Que le 15e rapport du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, présenté à la Chambre le mercredi 13 décembre 2017, soit adopté.
-- Monsieur le Président, c'est un privilège pour moi d'attirer de nouveau l'attention de la Chambre sur le paragraphe 38(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui porte sur l'interdiction de territoire pour motifs sanitaires en cas de fardeau excessif.
Comme de nombreux députés le savent déjà, aux termes de cette disposition de la Loi, les autorités doivent calculer les coûts — et seulement les coûts — que les personnes qui demandent la résidence permanente au Canada risquent de représenter pour les services sociaux et de santé du pays.
Au moment où on se parle, le paragraphe 38(2) de la Loi fait une exception pour les réfugiés au sens de la Convention de l'ONU, les personnes protégées ainsi que les époux et les personnes à charge faisant partie de la catégorie « regroupement familial ». Bref, seules les personnes faisant partie de la catégorie « immigration économique » et leurs proches, les proches aidants, les candidats des provinces, les parents et les grands-parents, les étudiants, les travailleurs étrangers et les résidents temporaires sont visés par le paragraphe 38(1). De la manière dont cette disposition est appliquée, si, dans une famille, une seule personne est susceptible de constituer un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé, la demande de toute la famille est rejetée.
Comme je le disais à l'instant, seuls les coûts sont pris en compte, et le calcul fait fi de la contribution que cette famille pourrait faire à la société canadienne.
L’affaire du professeur Felipe Montoya, qui s’est installé au Canada avec son épouse, sa fille et son fils en 2012, a fait la une des manchettes nationales en 2016. Sa femme et lui travaillaient, payaient leurs impôts et contribuaient à la collectivité. Leur fille et leur fils étaient scolarisés au Canada. Toutefois, lorsque la famille Montoya a décidé de s’installer de façon permanente au Canada et qu’elle a demandé le statut de résident permanent, elle a été rejetée. Pourquoi? Parce que le fils, Nico, avait le syndrome de Down.
À la suite de cet incident, l’été dernier, une enquête journalistique menée par Global News a attiré l’attention sur une disposition peu connue de la loi, suscitant de sérieuses questions sur la façon d’appliquer la politique. On s’interrogeait sur les éléments de ce qu’on appelle le panier de services qui comptaient dans le calcul et ceux qui ne comptaient pas. Pourquoi le seuil avait-il été fixé à ce niveau? La politique n’était-elle pas discriminatoire et quelle conséquence cela avait-il pour les familles?
En octobre 2017, le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a étudié cette disposition. On a entendu 25 témoins et reçu 23 mémoires. On a fait savoir on ne peut plus clairement au comité que cette disposition constituait une discrimination à l’égard des personnes handicapées. Les témoins ont été pratiquement unanimes pour dire que la seule option envisageable était l’abrogation du paragraphe 38(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés. Toute autre solution ne ferait que maintenir la discrimination.
En fait, non seulement les témoins qui ont comparu devant le Comité étaient convaincus que cette politique est discriminatoire, mais les députés libéraux l'étaient également. Lors de la comparution du , le député de lui a dit ceci: « Je dois dire qu'à ce stade-ci, je ne vois pas comment le fait de rehausser le seuil et d'exclure moins de personnes change le fait que si l'on exclut qui que ce soit, c'est une discrimination prima facie qui va à l'encontre des valeurs canadiennes ».
Au cours de l'étude de la politique, le député de a changé l'opinion qu'il en avait et il a évoqué une image forte et dérangeante en comparant l'idée sous-jacente à la politique à la mentalité entourant la traite des esclaves. Il a déclaré ceci: « Je dirais qu'au départ, je croyais que c'était une bonne politique, car on imposerait sans doute un fardeau de taille aux Canadiens, mais j'ai fait un retour en arrière — et je ne veux pas faire de comparaison — et je me suis rendu compte que ce n'est pas différent de la traite des esclaves, où seulement les gens les plus forts et physiquement aptes étaient emmenés d'Afrique. Je ne dis pas que cette politique est complètement mauvaise, mais je dis qu'elle équivaut à la discrimination dont nous faisons preuve lorsque nous choisissons les gens qui sont en santé, pleinement fonctionnels, qui n'ont aucun handicap intellectuel et physique. »
Le député a aussi résumé l'opinion générale des membres du Comité en déclarant: « Comme vous pouvez le constater, nous avons presque tous tendance à trouver cette politique discriminatoire. Nous pouvons déjà voir que même à l’immigration, il y a une politique comportant deux niveaux. »
Le ministre a déclaré à maintes reprises que « cette politique ne concorde pas avec la manière dont le Canada traite les personnes handicapées ». Le ministre a promis des changements. Étant donné les points de vue quasi unanimes des témoins, les idées bien arrêtées des membres libéraux du comité et le fait que le ministre est d'avis que cette politique est mauvaise, j'espérais que le comité puisse présenter un rapport qui soit appuyé à l'unanimité et qui demande au gouvernement de faire une chose, une seule chose, c'est-à-dire abroger le paragraphe 38(1) de la LIPR.
Malheureusement, j'ai été déçue. Plutôt que de publier un tel rapport, le comité a présenté un rapport qui, même s'il recommande l'abrogation, offre au gouvernement la possibilité de prendre une série de mesures intérimaires. C'est comme si les membres du comité ne s'inquiétaient plus du fait que cette politique constitue une discrimination prima facie, comme l'a décrit le député de .
En ma qualité de représentante du NPD au comité, j'ai joint au rapport une opinion dissidente. Je n'oublierai jamais l'histoire de Mercedes Benitez, une aide familiale qui, après avoir travaillé près de 10 ans au Canada et avoir attendu d'être réunie avec sa famille, a été informée que sa demande serait rejetée parce que son fils a une déficience intellectuelle. Heureusement, après d'intenses représentations, après avoir reçu l'appui du public et après des reportages des médias, elle a obtenu, tout comme la famille Montoya, que le ministre intervienne dans son dossier, et sa demande a enfin été approuvée.
Voici ce que Mercedes Benitez a dit aux membres du comité:
Même si mon cas est déjà réglé, je pense que la disposition relative au fardeau excessif devrait être abrogée. Je ressens encore la douleur que j'ai éprouvée quand on m'a dit que j'étais bonne pour travailler, mais pas assez bonne pour rester en raison de mon fils.
Dans cet esprit, le NPD a formulé deux recommandations dans son rapport dissident: la première visait à abroger le paragraphe 38(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés; et la deuxième à obliger le gouvernement à travailler avec les gouvernements provinciaux et territoriaux pour déterminer toute hausse des coûts des services de santé et des services sociaux qui découlerait de l'abrogation et à augmenter en conséquence le montant du Transfert canadien en matière de programmes sociaux et du Transfert canadien en matière de santé.
Le ministre a déclaré que le gouvernement annoncerait ses changements à la politique le 12 avril 2018. Il a choisi cette date parce qu'il s'agissait de la date d'échéance du gouvernement pour répondre au rapport du Comité. Même si le ministre ne ressentait aucune urgence à agir, j'étais très impatiente d'apprendre, tout comme un bon nombre des familles touchées, ce qu'il ferait pour corriger le caractère discriminatoire de la politique.
Le ministre a raté le délai qu'il s'était fixé et j'ai été très déçue lorsqu'il s'est finalement décidé à annoncer la nouvelle politique. Il n'annonçait pas l'abrogation du paragraphe 38(1). Malgré les mises en garde du député de , le gouvernement a plutôt annoncé qu'il augmenterait le seuil de 6 555 $ par an à 20 000 $ et modifierait la définition de « services sociaux » en supprimant toute mention des services d’éducation spécialisés, des services de réadaptation sociale et professionnelle et des services de soutien personnel.
Le gouvernement s'attend à ce que cette mesure permette de réduire la discrimination de 75 %. Il ne vise pas 100 %. Autrement dit, 25 % de discrimination lui semble acceptable. Le gouvernement se dit prêt à abolir cette politique, comme le veut la recommandation, mais il ne prévoit pas de moment précis où les 25 % restants ne seront plus victimes de discrimination. Lors de la conférence de presse, le ministre a déclaré que cette nouvelle politique n'aura pas d'effets rétroactifs. Il s'agit d'une terrible nouvelle pour les familles dont les demandes viennent d'être rejetées.
On laisse entendre qu'elles pourront présenter une demande de résidence permanente pour des motifs d'ordre humanitaire, mais cette demande pourrait encore prolonger de trois ans la longue période de séparation d'avec leurs proches, qui est déjà difficile à vivre. Elles pourront ensuite présenter une demande de parrainage, à condition que leur demande de résidence permanente pour des motifs d'ordre humanitaire soit d'abord acceptée. Pour certaines familles, ces démarches supplémentaires pourraient faire en sorte que leurs enfants ne pourront plus faire partie de la demande parce qu'ils auront vieilli de quelques années entretemps.
En outre, le ministre n'a pas dit si la nouvelle politique s'appliquerait aux personnes et aux familles dont la demande est en cours de traitement. Beaucoup de gens touchés par cette politique gardent espoir, mais s'inquiètent tout de même de la suite des choses. C'est le cas de Monica Mateo Ilarde.
Monica est également arrivée au Canada à titre d'aide familiale résidente en 2008. Elle a travaillé très fort tous les jours pendant 10 ans à s'occuper des enfants d'une famille canadienne. Depuis, elle a passé la majeure partie de son temps séparée de son époux des 13 dernières années, Richard, et de leur fille, Brianna, âgée de neuf ans. Presque tous les soirs, Monica s'endort en pleurant tellement elle souffre de cette séparation.
En 2012, elle a demandé le statut de résident permanent. La demande de résidence permanente de Monica a été signalée en raison du « fardeau excessif » que sa fille, Brianna, dont Richard prenait soin aux Philippines, et qui est née avec une déficience visuelle, imposerait au système de santé canadien. Cette décision repose sur un jugement arbitraire. Brianna pourrait bénéficier de services d'orthophonie et aurait possiblement besoin d'une intervention chirurgicale, mais sinon, c'est une enfant heureuse et en bonne santé.
En décembre 2017, Monica était enceinte de son deuxième enfant. On n'a ménagé aucun effort pour que Monica et sa famille puissent être réunies au Canada, de sorte qu'elle ne soit pas seule à son accouchement. On a demandé à ce que son dossier soit accéléré, en vain. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada l'a informée que sa seule option serait de présenter une demande urgente de visa de visiteur temporaire pour son époux et sa fille. Après en avoir discuté avec sa famille, ils ont convenu que le coût occasionné par ces visas additionnels et le déplacement était trop élevé pour eux. Au cours des six dernières années, depuis qu'elle avait présenté sa première demande de résidence permanente, Monica et sa famille ont dû subir les examens médicaux à quatre reprises, et Monica a dû se soumettre à des vérifications de sécurité et renouveler de nombreuses fois son permis de travail.
Monica était seule lorsqu'elle a donnée naissance à son fils au Canada, le 1er janvier 2018. Monica, qui attend avec un optimisme et une détermination inébranlables le jour où elle retrouvera sa famille au Canada, voit la naissance de son fils comme une bénédiction et une récompense pour son isolement. Elle rêve encore au jour où sa fille, Brianna, et son époux, Richard, viendront la rejoindre pour toujours.
Selon l'information que Monica a reçue, il semble que, si son dossier est soumis aux nouvelles règles, sa demande pourra finalement être traitée et acceptée, ce qui veut dire que sa fille pourrait rencontrer son petit frère pour la première fois et que son époux pourrait voir son fils pour la première fois.
La situation de Monica explique pourquoi j'attendais avec impatience de savoir si les nouvelles règles allaient s'appliquer aux dossiers en cours de traitement. Après m'être informée à maintes reprises, j'ai finalement reçu du bureau du ministre, dimanche soir, l'assurance que les demandes actuellement en traitement seront évaluées en fonction des nouvelles règles. J'en remercie le gouvernement et le ministre. Monica a bon espoir que son dossier pourra être traité avant l'hiver et que sa famille pourra ainsi la rejoindre au Canada pour Noël.
Outre la situation des dossiers en cours de traitement, j'aimerais attirer l'attention des députés sur celle des aidants qui offrent depuis des années du soutien et des services précieux aux familles canadiennes, qui ont été soumis à des délais indus dans le traitement de leur demande de résidence permanente et qui, après avoir attendu jusqu'à 10 ans, dans certains cas, pour faire venir leur famille, ont récemment vu leur demande rejetée à cause de cette politique discriminatoire. D'ailleurs, le lundi 7 mai, j'ai tenu une conférence de presse à Toronto afin de faire la lumière sur cette situation bouleversante.
Shirley Benigno est une mère seule avec trois enfants. Son fils, John Nicko, est atteint du syndrome de Down. Shirley a travaillé fort toute sa vie pour subvenir aux besoins de sa famille. Elle a d'abord déménagé à Hong Kong, où elle a dû supporter des situations d'abus et de harcèlement au travail pour pouvoir envoyer de l'argent à sa famille.
Elle espérait qu'en venant s'installer au Canada, elle pourrait offrir un nouveau départ à sa famille. Arrivée ici en 2009 dans le cadre du Programme des aides familiaux résidants, Shirley a cumulé deux emplois afin d'épargner les sommes nécessaires pour faire venir ses enfants ici. Elle a demandé la résidence permanente au Canada en même temps qu'elle a fait sa demande de regroupement familial, en 2011.
Outre ses deux emplois, elle offrait des services de traiteur, fournissait deux dépanneurs en produits maison et s'était inscrite au Programme national de formation en sécurité alimentaire dans l'espoir, un jour, de retourner sur les bancs d'école et d'ouvrir son propre restaurant familial. Tous ses rêves ont toutefois pris abruptement fin en 2017 quand, après sept ans d'attente, sa demande de résidence permanente a été rejetée à cause du handicap de son fils, et ce, même si l'évaluation médicale précisait que John Nicko est capable de s'occuper de lui-même et qu'il peut même occuper un emploi non spécialisé ou semi-spécialisé.
Le permis de travail de Shirley a donc été révoqué, ce qui veut dire qu'elle ne pouvait plus gagner sa vie. Incapable de subvenir à ses besoins, elle était encore moins capable de subvenir à ceux de sa famille. Elle a donc dû cesser de leur envoyer de l'argent, et ses enfants ont dû arrêter l'école faute d'argent pour payer les frais d'inscription. Shirley et sa famille étaient tout simplement dévastés. Voici ce qu'elle m'a dit, encore sous le choc: « J'ai toujours cru que le Canada ne faisait pas de discrimination contre les personnes différentes. J'ai toujours cru qu'il les protégeait. »
Depuis, Shirley a pu profiter des conseils d'un avocat, qui l'aide dans ses démarches pour faire réétudier sa demande. Si celle-ci est de nouveau rejetée, Shirley devra demander la résidence permanente pour des motifs d'ordre humanitaire. Ce nouveau processus purement arbitraire pourrait prendre trois ans avant d'aboutir. Outre cette nouvelle période d'attente, si Shirley devait présenter une nouvelle demande, un de ses enfants serait alors trop vieux pour être admissible au regroupement familial. Shirley pourra donc dire adieu à son rêve d'avoir toute sa famille au Canada avec elle.
Si la demande de Shirley était traitée selon les nouvelles règles, John Nicko ne serait pas jugé comme étant un fardeau excessif. Mon bureau a été informé que, sur une période de cinq ans, John Nicko coûterait environ 120 000 $ en services sociaux, soit 24 000 $ par année. On nous a remis une ventilation des coûts par année: formation professionnelle, 5 000 $; programmes d'emplois, 7 000 $; programmes de jour, 12 000 $. Augmenter le seuil et établir une exception pour le coût de la formation professionnelle signifieraient que John Nicko serait sous le seuil et serait admissible à la résidence permanente au Canada. J'ai porté ce cas à l'attention du ministre. J'espère sincèrement qu'il utilisera son pouvoir pour intervenir et faire la bonne chose.
Shirley et d'autres comme elle ont démontré pendant une décennie qu'ils ont leur place ici. Elle a gagné sa place au Canada et mérite d'être réunie avec sa famille. Ce serait une grande injustice si nous restions les bras croisés alors que des personnes comme Shirley sont forcées de quitter le pays après tout ce temps, toute cette attente, à cause d'une politique discriminatoire qui est maintenant changée. Le ministre a la possibilité d'empêcher une injustice si flagrante et de faire la bonne chose en permettant à cette famille de rester ici. Si le gouvernement mettait à profit cette possibilité et appliquait la nouvelle politique dans le cas de Shirley et de sa famille, ces derniers seraient en mesure de rester.
Il serait raisonnable que les demandes qui ont été rejetées récemment — au cours des 12 derniers mois, par exemple — soient évaluées selon la nouvelle politique. Cela ne créerait pas un fardeau excessif pour le système. Lors de l'étude en comité, nous avons appris que, conformément aux anciennes règles, après les appels et les mesures d'atténuation, moins de 400 demandes sur 1 000 qui faisaient l'objet d'un signalement au titre du paragraphe 38(1) ont fini par être rejetées.
Nous avons l'occasion de faire ce qui s'impose et de remédier aux difficultés que le système a causées à des familles en raison d'une politique qui, comme nous le savons tous, ne concorde pas avec nos valeurs.
Je m'en voudrais de ne pas profiter de l'occasion pour rappeler aux députés qu'en février, j'ai présenté le projet de loi , qui vise à abroger le paragraphe 38(1). J'aimerais de nouveau signaler au gouvernement que je serais heureuse de collaborer avec lui pour en faire un projet de loi d'initiative ministérielle. D'ici là, c'est-à-dire jusqu'à ce que cette politique discriminatoire soit abrogée, le gouvernement peut faire quelque chose pour les familles qui attendent depuis des années, tout particulièrement les familles dont la demande vient d'être rejetée. Le gouvernement peut rouvrir leur dossier et appliquer les nouvelles règles, de sorte qu'elles puissent être réunies au Canada. C'est la bonne chose à faire. J'espère que les députés ministériels répondront de façon favorable à cette demande.
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Monsieur le Président, je vous remercie de me donner la parole aujourd'hui pour participer à ce débat. Au nom du gouvernement, j'aimerais commencer par remercier mes collègues du Comité permanent de la citoyenneté et de l’immigration de leur travail et de leur diligence d'avoir produit ce rapport. J'offre également mes remerciements aux nombreux témoins du Comité qui ont tous consacré temps et efforts afin de faire connaître leurs points de vue, leurs analyses et leurs recommandations.
Notre gouvernement a procédé à un examen des aspects fondamentaux de l'admissibilité médicale et du fardeau excessif afin de s'assurer que nos politiques sont conformes aux valeurs modernes de notre pays. Le rapport présente un certain nombre de recommandations importantes qui ont contribué à orienter des conclusions de cet examen. L'objectif de notre gouvernement est d'atteindre un équilibre entre la protection des services sociaux et de santé financés par l'État et la promotion des objectifs humanitaires du système d'immigration du Canada.
Aux termes de la politique sur le fardeau excessif, les demandeurs qui sont susceptibles de constituer un fardeau plus lourd sur nos services sociaux et de santé que le Canadien moyen sont jugés interdits de territoire au Canada. Toutefois, la politique ne correspondait plus aux valeurs modernes concernant l'accessibilité et l'inclusion des personnes handicapées. Aux termes de la politique, les agents d'immigration examinent les demandes de façon individuelle afin de déterminer l'impact potentiel sur les services sociaux ou de santé en évaluant les services requis par le demandeur, les coûts de ces services et l'incidence sur les listes d'attente. Récemment, certaines déterminations faites en fonction de la politique actuelle vieille de plus de 40 ans ont suscité beaucoup d'inquiétude. Par exemple, il y a eu un certain nombre de cas de demandeurs qualifiés qui ont initialement été déclarés interdits de territoire au Canada parce que leurs enfants, par exemple, étaient atteints du syndrome de Down ou d'autisme, ou présentaient des retards de développement.
En 2018, les Canadiens sont en mesure de constater que de telles décisions ne sont pas conformes au point de vue de la société sur l'inclusion et la diversité ainsi que sur les contributions faites par les personnes handicapées et les familles de ces personnes. Les Canadiens voient ces services comme des investissements qui permettent la participation et l'inclusion des personnes handicapées, ce qui contribue à rendre notre société plus diversifiée et encore plus forte.
Nous reconnaissons également que lorsqu'un demandeur qualifié est déclaré interdit de territoire parce qu'un membre de sa famille a un handicap, nous nous passons de qualifications qui pourraient s'avérer profitables pour notre pays et son économie. C'est pourquoi nous devons maintenant rendre nos politiques plus équitables et favoriser l'inclusion des personnes handicapées tout en continuant à protéger les services sociaux et de santé financés par l'État.
Comme je l'ai dit, Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada a procédé à l'examen de la disposition relative soulevée par le Comité et mes collègues. Dans le cadre de cet examen, notre gouvernement a sollicité les points de vue d'intervenants, dont des défenseurs des personnes handicapées, ainsi que des homologues provinciaux et territoriaux. Les recommandations du Comité permanent ont constitué une contribution très importante à cet examen et ont aidé notre gouvernement à formuler une nouvelle approche en mettant en place une politique qui résistera à l'épreuve du temps.
Conformément aux recommandations du Comité, notre gouvernement met en oeuvre d'importantes modifications à la politique actuelle. Cela comprend, par exemple, la suppression des services d'éducation spécialisés, des services de réadaptation sociale et professionnelle et des services de soutien personnel des éléments pris en compte dans le cadre de la politique actuelle. Cela apportera un meilleur équilibre entre le traitement équitable des personnes handicapées et la protection des services sociaux et de santé financés par l'État, ce qui sera profitable pour les demandeurs ayant des enfants handicapés ainsi que les autres personnes qui ont besoin de ces services.
De plus, notre gouvernement a triplé le seuil du coût relatif au fardeau excessif. Cette mesure remédiera au fait que la politique actuelle a parfois empêché l'arrivée de nouveaux arrivants ayant des coûts relativement faibles qui pourraient autrement apporter une contribution au Canada. Cette mesure améliorera l'équité en facilitant l'immigration pour les demandeurs ayant des problèmes de santé qui nécessitent habituellement une gamme limitée de services sociaux et de santé dont le coût est relativement faible.
Selon l'évaluation de notre gouvernement — que nous avons partagée avec nos homologues des provinces et des territoires — cela aura une incidence très minime sur les systèmes de soins de santé. En effet, nous parlons ici de cas qui représentent moins de 0,1 % de l'ensemble des dépenses de santé au Canada. Parallèlement, cela permettra l'arrivée de plusieurs centaines de demandeurs qui, aux termes de la politique actuelle, se verraient refuser l'entrée au Canada.
Certaines catégories de demandeurs, dont les réfugiés et certains membres de la catégorie du regroupement familial, sont dispensées de l'application de la disposition sur le fardeau excessif. La disposition touche principalement les demandeurs au titre de la catégorie de l'immigration économique; autrement dit, les personnes que nous inviterons au Canada parce que nous avons besoin de leurs compétences dans notre économie.
Notre gouvernement reconnaît que les personnes dont les frais médicaux sont très élevés et supérieurs au seuil dont j'ai parlé peuvent encore avoir une incidence disproportionnée sur les systèmes de soins de santé provinciaux et territoriaux.
C'est pour cette raison que notre gouvernement, avant de prendre des mesures autres que celles que j'ai décrites, consultera les provinces et les territoires au sujet des incidences de la recommandation du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration visant l'abrogation complète de la disposition relative au fardeau excessif.
Notre gouvernement entamera un processus rigoureux de collecte et d'analyse de données, partagera les résultats avec ses partenaires provinciaux et territoriaux et continuera à mobiliser ses partenaires pour garantir une mise en oeuvre efficace des changements à la politique que j'ai décrite, ainsi qu'à suivre les répercussions de ces changements.
Cette façon de faire donnera également à notre gouvernement des données additionnelles qui lui permettront de tirer des conclusions relativement aux répercussions de l'élimination complète de la disposition relative au fardeau excessif. Nous allons faire une politique fondée sur ces preuves.
Nous surveillons aussi les effets continus de la disposition relative au fardeau excessif et des changements apportés à la politique sur son travail, sur ses clients et sur les provinces et les territoires. Conformément aussi à la recommandation du comité de faire un examen parlementaire complet dans les trois ans suivant la mise en oeuvre de ces changements, des représentants seront heureux de se rendre disponibles pour le comité s'il souhaite mener un tel examen.
Pendant le temps qu'il me reste, j'aimerais aborder certaines recommandations formulées par le comité relativement à l'administration de la politique. Le gouvernement, encore une fois, accueille favorablement les conseils du comité sur les façons d'améliorer les mesures administratives, par exemple, et l'expérience du client, et mettra en oeuvre un certain nombre de mesures pour atteindre ses objectifs très rapidement.
Nous centralisons actuellement les demandes qui relèvent de cette politique dans un seul bureau au Canada pour un traitement plus efficace. Cette mesure permettra justement de prendre des décisions plus uniformes et efficaces, puisqu'une équipe se consacrera à la prise de décision en matière du fardeau excessif.
Notre gouvernement est aussi d'accord avec les recommandations du comité concernant la formation adéquate des agents d'immigration et des médecins responsables de prendre des décisions. Notre gouvernement examinera des options pour compléter ou adapter la formation existante, afin qu'elle soit davantage en harmonie avec les changements apportés à la politique.
Notre gouvernement entreprendra également une analyse experte de la méthodologie utilisée pour fixer le seuil du fardeau excessif et présentera cette formule de manière transparente aux demandeurs et au public canadien. En raison de la modification qui fait en sorte que certains services ne seront plus pris en compte au titre de la politique révisée, IRCC révisera ce seuil de coût.
Pour résumer, notre gouvernement est déterminé à s'assurer que la politique relative à l'accessibilité et aux demandeurs d'immigration continue de reconnaître les besoins de protéger la santé, l'éducation et les services sociaux, tout en traitant tous les demandeurs de manière équitable. Ainsi, les changements qu'apporte notre gouvernement à la disposition relative au fardeau excessif établiront un juste équilibre et refléteront les valeurs modernes d'un pays inclusif pour les personnes handicapées.
Je tiens à répéter que le rapport du comité constitue un apport très important aux efforts de notre gouvernement pour mener un examen approfondi de la politique relative au fardeau excessif, et que nous sommes d'accord avec son intention. Les recommandations qu'il contient sont constructives, éclairées et extraordinairement utiles. Je tiens donc à remercier à nouveau les membres du comité de leur travail.
Notre gouvernement se réjouit de leurs travaux continus dans ce domaine, ainsi que de leur intérêt à veiller à ce que notre système d'immigration continue de s'adapter et d'évoluer, afin d'être en phase avec les valeurs modernes de la société canadienne.
Je suis heureux d'avoir eu l'occasion de parler de cet enjeu important et, encore une fois, nous voulons prendre notre temps fin d'avoir une approche équilibrée. Nous voulons consulter les provinces et les territoires, ainsi que différents intervenants, pour faire en sorte de pouvoir peut-être un jour annuler cette politique de fardeau excessif, et ne plus avoir une politique vieille de 40 ans.
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Monsieur le Président, tout comme le secrétaire parlementaire, je tiens à remercier les témoins qui ont comparu devant le comité pour nous permettre de définir le contexte de ce rapport. Je tiens également à remercier mes collègues du comité, qui ont entrepris une étude très rigoureuse de cette question.
Le Parti conservateur du Canada a annexé une opinion dissidente au rapport à titre d'opposition officielle. Aujourd'hui, je soulignerai les divergences de point de vue de notre parti et les éléments des principales recommandations qui ont été présentées sur lesquels nous sommes d'accord. Le Nouveau Parti démocratique a également soumis une opinion dissidente, si je ne m'abuse. Peut-être que ma collègue pourrait me rafraîchir la mémoire ou me corriger si je me trompe.
Pour les gens qui nous regardent, et aux fins du débat, l'étude portait sur l'inadmissibilité des nouveaux arrivants potentiels pour des raisons médicales ou parce qu'ils représentent un fardeau excessif. Tout particulièrement, le comité a étudié le paragraphe 38(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, qui dit qu'un étranger est inadmissible pour des motifs sanitaires si son état de santé risque « d'entraîner un fardeau excessif pour les services sociaux ou de santé ».
Après un examen attentif de l'information limitée mise à la disposition du comité, les membres conservateurs de celui-ci avaient encore beaucoup de questions sans réponse; nous étions d'avis qu'il nous manquait des données. Néanmoins, nous tenions à dire qu'il existe des moyens d'améliorer l'application des règlements actuels, et que le système d'immigration du Canada doit trouver le juste équilibre entre protéger les services sociaux et de santé sur lesquels comptent les Canadiens, et faire en sorte que l'article sur le fardeau excessif ne nuise pas à notre capacité d'attirer et à retenir des immigrants. Nous estimons que le texte principal du rapport, tel qu'adopté, présente des lacunes à cet égard. C'est dans ce contexte que nous avons soumis l'opinion dissidente.
Le Canada est un pays généreux et accueillant. Depuis la Confédération, des millions de personnes ont immigré au Canada pour commencer une nouvelle vie, trouver un emploi, lancer une entreprise, élever une famille ou échapper à la persécution. Le caractère multiculturel de la population a enrichi notre pays, qui s'est ouvert chaleureusement à la diversité de ses citoyens.
Afin de continuer à accueillir des immigrants au Canada, le grand public doit appuyer les objectifs globaux du système d'immigration. Les Canadiens ordinaires doivent avoir l'assurance que le système est efficace et avantageux pour le pays. Tout au long de l'étude, le Comité a découvert de nombreuses lacunes et irrégularités relatives à l'application du règlement actuel sur l'inadmissibilité pour raisons médicales. Le Comité a pris connaissance de suggestions sur les façons dont on peut améliorer la prestation de services et dont le ministère, à savoir Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, peut faire le ménage dans le jargon administratif inutile, qui prête à confusion, applicable au processus de demande.
Les questions posées lors de nos réunions portaient fréquemment sur l'équité dans le contexte d'intérêts divergents. Si la demande en services spécialisés augmentait en raison de la suppression de la disposition relative au fardeau excessif, serait-ce juste pour les Canadiens qui sont sur une liste d'attente depuis des mois? Serait-ce juste pour les provinces et les territoires qui ont déjà du mal à boucler leur budget? Est-ce juste qu'une personne qui souhaite immigrer au Canada soit rejetée parce qu'on a déterminé qu'elle ou un membre de sa famille constituerait un fardeau excessif pour les services de santé et les services sociaux?
En ce qui concerne la notion de fardeau excessif, mes questions portaient notamment sur la difficulté de trouver des modèles ou des données quantitatives illustrant dans quelle mesure la demande augmenterait si on retirait cet élément du paragraphe 38(1); je me demandais aussi s'il était possible de consulter les données des dernières années. Le président a dû poser beaucoup de questions aux fonctionnaires à propos des calculs, car il s'agit d'une formule compliquée. Nous avons demandé à plusieurs reprises si l'élimination de la notion de « fardeau excessif » entraînerait une hausse de la demande qu'on n'aurait pas prévue en se fondant sur les chiffres de l'année précédente, puisque certaines personnes n'ont carrément pas présenté de demande si elles savaient que la notion de « fardeau excessif » du paragraphe 38(1) les rendait inadmissibles. En l'absence de données, les provinces auraient du mal à prévoir les besoins futurs en matière de soins de santé; nous l'avons souligné dans notre rapport dissident.
Nous avons également souligné qu'une consultation auprès des gouvernements provinciaux était toujours en cours et que le ministre n'avait pas transmis au comité de renseignements à ce sujet. Seuls quelques comités ont présenté des recommandations. Plusieurs provinces se sont montrées hésitantes ou critiques devant l'idée d'éliminer complètement la notion de « fardeau excessif » du paragraphe 38(1) comme le recommande le rapport, car elles se demandaient combien coûterait ce changement et si Ottawa paierait la note ou non.
Je le répète, je tiens à ce que nous ayons un régime équitable et à ce que nous ne perdions personne à cause de cette disposition. Par contre, comme nous n'avons pas de données pour prédire l'effet que ce changement aurait sur la demande et que nous ne savons pas comment nous assumerions les coûts qui y sont associés, certaines des recommandations du rapport ne tenaient pas la route. Nous avons tenté d'établir ce raisonnement très clairement dans le rapport dissident.
L'autre aspect est pour ainsi dire un excellent exemple d'analyse de rentabilisation. Il aurait suffi d'abroger cet article pour éviter les coûts administratifs qui sont associés au traitement des demandes. Toutefois, comme je l'ai déjà dit, nous ne disposons pas des données sur le fardeau qui devrait peser sur le système de santé. En fait, même si les modifications que propose le gouvernement étaient adoptées, je ne sais pas trop si nous disposerions des données nécessaires pour évaluer ce fardeau. Je pense que les gouvernements provinciaux se posent encore des questions à ce sujet. Il est très difficile de faire valoir cet argument parce qu'on ne peut pas comparer les ensembles de coûts sans d'abord effectuer une modélisation.
À propos de l'évaluation des coûts constituant un fardeau excessif, rappelons quelques-unes de nos réflexions. Nous avons déclaré ceci:
Pour déterminer s'il y a fardeau excessif, il faut procéder à une évaluation médicale individualisée, c'est-à-dire tenir compte de tous les besoins actuels et futurs de chaque personne en matière de services de santé et de service sociaux.
[...] l'Association du Barreau canadien (ABC) a présenté deux mémoires au Comité et a témoigné en personne afin de faire des recommandations. [Dans ces mémoires,] elle a souligné les défis posés par la façon dont IRCC calcule les coûts afin de déterminer si quelqu'un devrait représenter un le fardeau excessif pour les services de santé et sociaux.
Les difficultés relatives à l'estimation des coûts liés aux besoins d'éducation spéciaux ont été soumises à l'attention du Comité. L'éducation relève des compétences provinciales, et aucune province ne détermine de façon identique les taux de financement pour les étudiants ayant des besoins spéciaux. Par exemple, le modèle d'éducation exclusif de l'Ontario diffère de la manière dont le Manitoba soutient les besoins spéciaux, car chaque division scolaire est unique quant au soutien offert aux étudiants ayant des besoins spéciaux.
Il existe également un écart entre les provinces quant au soutien aux médicaments d'ordonnance. Dans certaines provinces, les services médicalement requis sont complètement pris en charge, alors que les coûts des patients externes ne sont pas automatiquement couverts. Il y a aussi des disparités dans le montant que chaque province rembourse pour les divers médicaments d'ordonnance.
L’ABC a souligné que l’unité centrale sur l’accessibilité d’IRCC, récemment formée, pourrait alléger certains défis de la détermination des coûts financiers afin de savoir si un demandeur va causer un fardeau excessif. Cependant, elle presse IRCC d’améliorer le manuel des agents médicaux et de collaborer avec les gouvernements provinciaux et territoriaux afin d’avoir l’information sur les coûts la plus à jour possible pour le lieu de résidence du demandeur. Il est inacceptable de refuser des demandeurs en se fondant sur de l’information non pertinente, et toutes les mesures doivent être prises pour assurer l’exactitude de l’estimation des coûts.
[En outre], il y a des cas où IRCC a mis tant de temps à examiner une évaluation médicale que celle-ci a été jugée obsolète. En raison des temps requis par IRCC pour déterminer le fardeau excessif, 886 demandeurs ont nécessité une nouvelle évaluation médicale indépendante. […] [C]'est à notre avis inacceptable, et IRCC doit améliorer la prestation des services si les évaluations médicales ne sont pas faites en temps opportun.
Je ne pense pas que ce problème ait été abordé dans la réponse du gouvernement. Nous aurions certes aimé qu'il le soit.
Pour ce qui est des lettres d’équité procédurale, plusieurs témoins ont indiqué qu'elles prêtent à confusion. Elles « ne fournissent pas suffisamment d’information au demandeur de manière sensée. Souvent, le langage utilisé est excessivement bureaucratique et difficile à déchiffrer. » Nous ajoutons: « De plus, comme IRCC envoie les lettres d’équité procédurale par la poste, le temps de livraison réduit la période déjà courte de 60 jours dont disposent les demandeurs pour fournir une réponse. En raison du temps requis pour qu’une lettre parvienne à divers endroits du monde […], il est difficile pour un demandeur de répondre […] »
Nous avons entendu nombre de témoignages sur le caractère nébuleux du plan d'atténuation. Nous n'avons pas vraiment vu de modèle pour ce genre de plan, même si on a donné les grandes lignes de ce qu'il pourrait contenir. Nous avons jugé utile de revoir la façon dont le ministère de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté communique ses attentes concernant le contenu du plan d'atténuation d'un demandeur. Nous aimerions que le ministère fournisse le plus d'indications possible aux demandeurs afin de mieux renseigner les demandeurs et de réduire le nombre d'appels.
Selon les conclusions de notre rapport dissident, il est évident que nombre de provinces hésitent à éliminer complètement la disposition sur le fardeau excessif, qui fait l'objet d'une des principales recommandations du rapport du comité. Pourtant, bien des craintes ont été soulevées au sujet de la mise en oeuvre de la politique actuelle. En tant que décideurs, nous avons la responsabilité de veiller au juste équilibre afin de protéger les services de santé et les services sociaux tout en répondant aux besoins du Canada en matière d'immigration. Les politiques d'immigration doivent faire preuve d'équité et de compassion. Par ailleurs, nous sommes fermement convaincus qu'il faut que les Canadiens puissent accorder leur confiance et leur appui à l'ensemble du système d'immigration.
Or, il manque une fois de plus des données à ce sujet. Étant donné que nous sommes confrontés à un déficit important, à l'instar de nombreux gouvernements provinciaux, il convient d'examiner ce modèle lorsqu'on parle d'augmenter potentiellement le fardeau financier du système de santé du Canada, surtout que les témoignages entendus étaient plutôt empiriques.
Je tiens à être parfaitement claire. Le comité a entendu des histoires déchirantes, mais, en tant que décideurs, nous devons aussi nous demander ce que l'abrogation d'une partie du paragraphe 38(1) engendrera potentiellement comme demande globale. Selon certaines opinions empiriques, si une partie de ce paragraphe était abrogée, davantage d'immigrants économiques viendraient au pays et connaîtraient beaucoup de succès, mais, en réalité, aucune donnée n'appuie cette affirmation.
Dans l'ensemble, nous avons estimé qu'il manquait de données pour vraiment analyser le coût de l'abrogation de cette disposition du paragraphe 38(1). Par la suite, il a été difficile de questionner le gouvernement sur la façon dont il prévoit financer ce changement. En tant que conservatrice, il est évident que, sans ces renseignements, j'éprouve beaucoup de réticence à apporter des changements importants qui pourraient toucher les dépenses provinciales.
Voici les recommandations que nous avons inscrites dans notre rapport dissident:
1. Que toute modification du paragraphe 38(1) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés soit faite en consultant pleinement les provinces et les territoires.
2. Que les provinces et les territoires disposent d'une procédure officielle pour se soustraire à l'application de l'article invoquant le fardeau excessif, dans le cas d'un demandeur qui est considéré comme essentiel à la province ou au territoire et pour lequel la province ou le territoire accepte de payer entièrement les coûts.
3. Qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada crée un mécanisme permettant de recueillir, de la part des provinces et des territoires, des données annuelles à jour sur les coûts des services de santé et des services sociaux, de manière à améliorer la précision des calculs servant à déterminer si l'acceptation d'une demande engendrerait un fardeau excessif. De plus, nous recommandons que ces données sur les coûts soient publiques et accessibles.
4. Qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada prenne les mesures nécessaires, par exemple, en ayant recours à la numérisation, pour éliminer les retards qui obligent un demandeur à obtenir une nouvelle évaluation médicale indépendante sans que ce soit sa faute.
5. Qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada s'emploie immédiatement à simplifier les lettres relatives à l'équité procédurale pour qu'elles soient faciles à comprendre et que le demandeur voit clairement quelle suite il doit y donner.
6. Qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada examine, conjointement avec les provinces et les territoires, l'efficacité des plans d'atténuation, y compris en ce qui a trait à l'exécution, afin de pouvoir mesurer la réduction des coûts qui leur est attribuable.
7. Qu'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada examine la formation de son personnel, pour s'assurer de bien l'informer de son obligation de fournir la ventilation des coûts prévus des services de santé et des services sociaux.
Nous avons présenté un rapport dissident assez solide et équilibré. J'espère que le gouvernement, comme l'a dit le secrétaire parlementaire, est déterminé à revoir son plan dans l'avenir. J'aimerais qu'une certaine modélisation formelle de toute augmentation de la demande soit incluse dans cet examen afin que nous sachions quel fardeau supplémentaire serait imposé aux systèmes de santé provinciaux, de même que des données sur la migration économique. Par ailleurs, il n'y avait pas grand-chose dans le rapport sur les changements administratifs qui pourraient être apportés afin de simplifier le système pour les demandeurs.
Telle était l'opinion du Parti conservateur du Canada. Nous sommes toujours du même avis dans ce débat sur l'adoption du rapport.