Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui à l'appui du projet de loi .
Je vais commencer par une liste.
[Traduction]
Cette liste comprend l'Afghanistan, l'Argentine, la Chine, l'Allemagne, la Grenade, Haïti, l'Inde, l'Iran, le Liban, le Pakistan, la Pologne, le Portugal, l'Arabie saoudite, l'Écosse, la Somalie, l'Afrique du Sud, la Suisse, la Tanzanie, la Trinité, l'Ouganda, le Royaume-Uni et les États-Unis.
Qu'est-ce que ces pays ont en commun? Ce sont tous des pays d'origine de députés. Au total, 41 députés des quatre partis sont des citoyens canadiens d'origine étrangère. Je fais moi-même partie de ce groupe. Originaire de l'Ouganda, je suis arrivé ici en 1972 en tant que jeune réfugié.
Le projet de loi fait en sorte que ma citoyenneté et celle des 40 autres députés ne sont pas différentes de celles de nos collègues nés au Canada. En fait, le projet de loi C-6 indique aux millions de citoyens canadiens d'origine étrangère que leur nationalité est tout aussi valorisée et respectée que celle de leurs concitoyens nés au pays. Par le projet de loi, on affirme qu'un Canadien est un Canadien. Je m'explique.
Le projet de loi abrogerait une mesure législative porteuse de discorde qui a été adoptée par le gouvernement précédent. En adoptant l'ancien projet de loi , le gouvernement précédent a permis la révocation de la citoyenneté d'une personne ayant commis une infraction mettant en péril la sécurité nationale — trahison, espionnage et terrorisme —, mais seulement si elle était née à l'étranger. Par conséquent, une personne née au Canada ayant commis le même crime contre l’intérêt national ne pouvait pas être privée de sa citoyenneté. Les personnes nées au Canada n'avaient qu'à faire face au système de justice pénale, tandis que les Canadiens nés à l'étranger étaient doublement pénalisés. En effet, en plus d'être punis par le système de justice pénale, ces derniers voyaient leur citoyenneté révoquée aux termes de la Loi sur la citoyenneté.
L'ancienne mesure législative, adoptée par le gouvernement précédent, était mauvaise pour deux raisons. La première est qu'elle était injuste et inéquitable. Nous avons entendu parler de l'injustice de l'ancien projet de loi conservateur par d'ardents défenseurs des droits des immigrants, comme le Bureau du droit des réfugiés de l'Aide juridique Ontario et la Romero House dans ma circonscription, Parkdale—High Park. L'inégalité de l'ancienne mesure législative a été exposée par le litige auquel elle a donné lieu. L'association des libertés civiles de la Colombie-Britannique et l'Association canadienne des avocats et avocates en droit des réfugiés ont contesté le projet de loi en vertu de la Charte, soutenant qu'il créait deux catégories de citoyens.
La deuxième et principale raison pour laquelle l'ancien projet de loi laissait à désirer est qu'il envoyait le mauvais message aux nouveaux arrivants. Les gens comme moi, qui ont fui leur patrie pour commencer une nouvelle vie au Canada, sont reconnaissants de pouvoir être ici, mais, au bout du compte, nous désirons tous la même chose: nous intégrer pleinement et définitivement dans la société canadienne. Le projet de loi , présenté par le gouvernement précédent, a laissé tomber les nouveaux arrivants en les rendant plus vulnérables. Il leur donnait le message qu'ils étaient des citoyens canadiens, mais sous réserve de certaines conditions seulement. En abrogeant ce projet de loi odieux adopté par le gouvernement précédent, le gouvernement nous indique — à moi et aux millions d'autres Canadiens venus d'autres pays — que les politiques de division n'ont plus leur place au pays et nous confère un véritable sentiment d'appartenance.
[Français]
Assez parlé de l'ancienne législation, je veux maintenant parler du bien-fondé du projet de loi .
[Traduction]
Le projet de loi satisfait à trois critères importants: il est fondé sur des données probantes, respecte une logique économique et est conforme à l'éthique. Voici plus de détails sur ces trois aspects.
Tout d'abord, le projet de loi est fondé sur des données probantes. Pendant la campagne, les libéraux se sont engagés à adopter des politiques fondées sur les faits, et le projet de loi C-6 va tout à fait en ce sens. Les recherches démontrent que, lorsqu'on facilite le processus à suivre non seulement pour obtenir une nouvelle citoyenneté, mais aussi pour la conserver, l'intégration des nouveaux venus et leur sentiment d'appartenance s'en trouvent améliorés. C'est un point que m'ont souvent fait valoir les groupes responsables des services d'établissement des immigrants et les autres groupes communautaires qui accomplissent un travail crucial dans Parkdale—High Park. Je pense par exemple aux services sociaux canado-ukrainiens, au centre de santé communautaire Four Villages, à la Société d'aide aux immigrants ukrainiens et au Congrès canadien polonais.
Deuxièmement, le projet de loi est sensé sur le plan économique. D'après les recherches que j'ai déjà mentionnées, cette mesure procurerait des avantages économiques clairs au Canada, puisque les immigrants dont la situation est rendue permanente grâce à l'octroi de la citoyenneté étudient plus longtemps et gagnent des salaires plus élevés. C'est aussi ce que m'ont confirmé de merveilleux organismes de ma circonscription qui oeuvrent à l'établissement des nouveaux venus à Toronto, comme l'Association interculturelle de Parkdale, le Centre communautaire et récréatif de Parkdale, CultureLink, le Centre de santé communautaire de Parkdale et l'organisme Polycultural Immigrant and Community Services.
Troisièmement, le projet de loi est conforme à l'éthique. Le Canada n'avait jamais eu deux catégories de citoyens avant que le gouvernement précédent ne décide de mettre en oeuvre l'ancien projet de loi . Il n'est pas justifiable, sur le plan moral, d'établir deux catégories de citoyens, d'un côté ceux qui ont eu la chance de naître ici, de l'autre, ceux qui ont été naturalisés après avoir immigré au Canada.
[Français]
Notre nouveau projet de loi fait beaucoup plus qu'éliminer les deux tiers de la citoyenneté créée par les conservateurs. Comme je l'ai dit, le projet de loi facilite également l'obtention de la citoyenneté de plusieurs façons importantes, et je vais en discuter maintenant.
[Traduction]
Le projet de loi éliminerait de nombreux obstacles à la citoyenneté. Je vais parler de quatre de ces obstacles.
Le premier concerne la période requise pour être admissible à la citoyenneté. Le projet de loi exigera qu'un demandeur soit présent au Canada durant trois ans sur une période de cinq ans, et non durant quatre ans sur une période de six ans, comme c'est le cas actuellement. Par conséquent, le projet de loi ferait augmenter le nombre de citoyens potentiels et leur permettrait de présenter une demande plus tôt.
Plus précisément, le projet de loi est plus souple. Il n'exige pas qu'une personne réside au Canada pendant au moins 183 jours par année pour chaque année admissible. Il demande simplement que la personne soit présente au pays 1 095 jours sur une période de cinq ans. Cela signifie qu'elle a une marge de manoeuvre. Si elle travaille à l'étranger pendant une longue période, elle ne sera pas automatiquement non admissible à la citoyenneté.
Deuxièmement, le projet de loi rétablirait la tranche d'âge antérieure pour l'exigence relative à l'examen des connaissances et des compétences linguistiques. Le gouvernement précédent avait adopté un projet de loi afin que des tests de langue soient requis pour les demandeurs de 14 à 64 ans. Nous ramenons cette tranche d'âge à ce qu'elle était auparavant, soit de 18 à 54 ans. Cette modification améliorerait l'accès à la citoyenneté pour les personnes très jeunes et pour celles de 55 ans et plus, ce qui accélérerait leur intégration officielle.
Troisièmement, on retire la disposition concernant l'intention de résider. Le projet de loi éliminerait l'exigence de déclarer l'intention de résider au Canada avant de devenir citoyen. Cette exigence était imméritée. Tous les Canadiens ont droit à la liberté de circulation. Surtout, l'ancienne exigence créait beaucoup de confusion. Plus de 200 demandes ont été retournées à des personnes qui n'avaient pas rempli la portion de la demande visant l'intention de résider parce qu'elles ne la comprenaient pas. Ces personnes craignaient que leur citoyenneté puisse être révoquée si elles déménageaient à l'étranger, ce qui n'est pas le cas.
Quatrièmement, et ce qui est peut-être le point le plus important, le projet de loi permettrait de tenir compte du temps passé au Canada avant de devenir résident permanent pour satisfaire à l'exigence de trois ans pour devenir citoyen. Cette disposition accorde un crédit de 50 % pour le temps passé au Canada avant de devenir résident permanent, jusqu'à concurrence d'un crédit d'un an.
Qui est-ce que cela aidera? Cela aidera les travailleurs étrangers temporaires, les étudiants étrangers et les personnes protégées en accélérant la voie de tous ces groupes vers la citoyenneté. Cela a du sens. Ces personnes passent déjà du temps ici. Elles travaillent et étudient déjà ici. Elles ont déjà développé un attachement envers le Canada.
Je vais maintenant examiner l'une des critiques que nous entendons à l'égard du projet de loi, soit la question de la sécurité.
Soyons très clairs. Le projet de loi ne compromettrait pas la sécurité des Canadiens. L'engagement du gouvernement envers la sécurité est inébranlable. Il y a un endroit pour les terroristes, un endroit que l'on appelle « prison ». Nous avons un outil pour poursuivre les terroristes et cet outil s'appelle « système de justice pénale ». Lorsque quelqu'un commet un crime au Canada, il est poursuivi dans le cadre du système de justice pénale. Nous n'avons pas besoin d'une Loi sur la citoyenneté pour régler un problème qui relève du Code criminel.
Toutefois, un principe philosophique de plus vaste portée sous-tend le projet de loi . Lorsque nous favorisons l'intégration et que nous mettons en place des mécanismes propices au succès, nous renforçons les liens et la loyauté à l'égard du pays. Cela ne menace pas notre sécurité. Cela fait partie de toute une gamme d'initiatives, telles que notre réaction à la crise des réfugiés syriens, qui témoigne de l'ouverture, de la volonté d'inclusion et de la compassion du Canada. Ces efforts permettent de contrer la radicalisation et de réduire les menaces à notre sécurité. En fait, je dirais que nous faisons mieux en la matière que tout autre pays au monde, et je suis fier de faire partie d'un gouvernement qui restaure cette réputation, ici et à l'étranger.
[Français]
Il est également important de comprendre que le projet de loi n'est pas un rejet pur et simple de tous les aspects de son prédécesseur, le projet de loi , adopté par le gouvernement précédent.
[Traduction]
Quels éléments du projet de loi avons-nous décidé de conserver? Certaines dispositions ont été conservées, d'autres ont été en fait améliorées.
Nous avons par exemple conservé l'exigence de la présence effective plutôt que le terme de « résidence », parce que la présence effective est plus facile à vérifier.
La révocation de la citoyenneté pour cause de fraude et de fausse représentation, qui existe depuis 1947, est maintenue dans le projet de loi . Le projet de loi , qui a été adopté par le précédent gouvernement, facilitait la détection des fraudes, ce qui est fort important. Nous avons donc gardé les dispositions correspondantes, ainsi que celles qui permettent au gouvernement de déchoir rapidement de leur citoyenneté les gens qui ont commis une fraude. Mais ce qui est encore plus important, c'est que nous les avons renforcées. Nous avons par exemple ajouté un article qui nous permet de saisir des documents ayant servi à commettre une fraude. Finalement, nous nous sommes également engagés à mettre en œuvre toutes les recommandations du vérificateur général concernent la prévention des fraudes en matière de citoyenneté.
Une autre amélioration se rapporte aux ordonnances de sursis. En cas d'inculpation, la durée de la peine purgée dans la collectivité aux termes d'une ordonnance de sursis ne peut être comptabilisée dans les trois années de séjour requises. Par ailleurs, une personne qui a fait l'objet d'une ordonnance de sursis ne peut prêter le serment de citoyenneté. Ce sont autant d'améliorations par rapport à la législation précédente.
Parlons un peu du comité. Le projet de loi vient de nous être renvoyé par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration. Nous croyons qu'il est de notre devoir de tendre la main aux députés d'en face. Au comité, nous n'avons pas hésité un seul instant à accepter les amendements sensés qui cadraient avec l'orientation stratégique que nous voulions donner à la mesure législative et en amélioraient le texte, car ils nous permettront de rendre le Canada plus diversifié et plus inclusif.
Grâce à l'un des amendements du NPD, le ministre a dorénavant le pouvoir discrétionnaire d'attribuer la citoyenneté à toute personne en situation d'apatridie. Toujours grâce au NPD, le ministre pourra également prendre en compte les mesures d'accommodement raisonnables pour répondre aux besoins de l'auteur d'une demande de citoyenneté qui est une personne handicapée. Ces deux amendements provenaient de l'opposition, et nous les avons intégrés avec plaisir au projet de loi parce qu'ils avaient leur raison d'être.
Je terminerai en revenant au début de mon intervention.
Si j'ai fait la liste des 22 pays d'où sont originaires les différents députés, c'était pour donner aux gens une idée de la diversité de notre cohorte parlementaire. La Chambre est le miroir du pays, et celui-ci compte des millions de citoyens provenant des quatre coins du monde. À tous ces gens, le projet de loi envoie le message que leur citoyenneté n'est pas moins importante et ne mérite pas moins le respect que celle des gens qui sont nés ici.
On parle bien trop rarement de l'un des éléments marquants du projet de loi. En améliorant les voies d'accès à la citoyenneté, le projet de loi stimule également la participation. Seuls les citoyens peuvent voter au Canada. Seuls les citoyens peuvent présenter leur candidature pour se faire élire à la Chambre. En éliminant les obstacles à la citoyenneté et en les remplaçant par des occasions d'obtenir et de conserver la citoyenneté, le projet de loi C-6 encourage la plus grande participation possible à notre processus démocratique.
La tâche ultime de tout gouvernement, quelle que soit son affiliation politique, est d'encourager la participation des citoyens. C'est précisément l'objet du projet de loi . Je suis fier d'appuyer le projet de loi en ma qualité de et j'encourage tous mes collègues à en faire de même.
:
Madame la Présidente, je suis heureux de participer à ce débat important. C’est aussi un honneur pour moi d'intervenir juste après mon ami le secrétaire parlementaire, qui est député de . Je ne suis pas d’accord avec une bonne partie de ce qu’il a dit, mais je lui sais gré du travail qu’il accomplit ici et, surtout, je me réjouis de pouvoir collaborer avec lui au sein des Parlementaires amis du Tibet.
Avant d’entrer dans les détails du projet de loi, je tiens à le replacer dans son contexte philosophique et, pour le moins, expliquer la façon dont, à l'instar de nombreux députés de l'opposition, je perçois le fond du débat, au-delà des dispositions, sur la signification profonde de la citoyenneté canadienne.
Je vais dire tout d'abord qu'à mon avis, nous vivons dans le meilleur pays du monde. Je ne dis pas cela à la légère. J'ai vécu à l'étranger et j'ai beaucoup voyagé. Le Canada est le meilleur pays au monde pour de nombreuses raisons. La preuve, c'est qu'un grand nombre de personnes veulent immigrer au pays. Au cours des 10 dernières années, nous avons connu les plus hauts taux d'immigration de l'histoire du pays. De plus, à titre de comparaison, le nombre de personnes qui souhaitent immigrer au Canada est beaucoup plus élevé que le nombre de personnes qui souhaitent immigrer dans d'autres pays.
Alors que nous tentons de définir notre citoyenneté et de comprendre ce qu'elle signifie, il est important de nous demander d'abord pourquoi le Canada est un si beau pays, et ce que nous pouvons faire pour veiller à en préserver l'essentiel dans le contexte de la définition et de la redéfinition de la citoyenneté. Nous sommes tous très fiers de la diversité canadienne. Le secrétaire parlementaire a parlé avec éloquence de la diversité du pays. Toutefois, de nombreux autres pays du monde ont cette diversité et leur expérience est peut-être différente. Alors que je préparais mon intervention, j'ai pensé à la visite du ministre des Affaires étrangères de la Chine. La Chine est un pays très diversifié, mais c'est un pays où les minorités ethniques et religieuses font face à de grandes difficultés. La Russie est un pays très diversifié. La Syrie est en fait un pays très diversifié. De nombreux pays ont des populations diversifiées, mais les minorités n'y vivent pas une expérience positive.
De toute évidence, cette comparaison révèle que ce n'est pas uniquement la diversité qui fait du Canada un grand pays et qui caractérise les Canadiens. C'est plutôt la façon d'aborder cette diversité et de collaborer dans un contexte de diversité et, en particulier, notre capacité en tant que nation de bâtir ensemble sur la base de valeurs communes. La diversité qui ne repose pas sur des valeurs communes risque toujours de déboucher sur un conflit. Je suis très fier du fait que le Canada, tout au long de son histoire, ait fait place à une grande diversité et ait réussi à entretenir de fortes valeurs communes. Ces éléments sont particulièrement importants pour assurer notre prospérité.
Il vaut la peine de souligner certaines de ces valeurs communes. Au Canada, nous croyons dans la liberté, dans la démocratie et dans le respect des droits de la personne qui repose, dans une certaine mesure, sur le principe fondamental de la dignité humaine. Les Canadiens croient également dans la primauté du droit, dans l'égalité et la valeur intrinsèques des êtres humains, sans égard notamment à la race, à la religion, à la classe, à l'origine ethnique et à la langue. Au Canada, l'égalité entre les hommes et les femmes revêt une grande importance aux yeux des gens. Ces valeurs communes unissent les Canadiens dans un contexte de diversité. Au-delà de l'unité nationale et du fait que nous vivons en harmonie avec nos concitoyens, le Canada est unique dans la mesure où ses habitants forment une véritable collectivité animée d'un but commun.
Je tiens à faire part d'une anecdote que j'estime importante. Je me trouvais dans une capitale européenne il y a quelques années pour y rencontrer un ami canadien qui travaillait là-bas. Il y avait autour de nous des gens de tous les coins du monde. Cependant, nous avons constaté l'absence de groupes multiraciaux. Les gens se regroupaient en fonction de leur origine raciale. En plein coeur de cette capitale européenne bourdonnante d'activité, nous avons constaté qu'en dépit de la diversité raciale, il n'y avait aucun signe évident de communauté qui permette à tout le moins de penser que les gens peuvent s'asseoir ensemble.
L'avantage que nous avons au Canada, c'est de pouvoir bâtir une collectivité solide, qui se compose de gens différents, aux origines variées.
Plus tard, j'ai pensé à cette expérience lorsque j'ai entendu le premier ministre britannique, je crois — les dirigeants français et allemands ont fait des commentaires du même genre —, parler du présumé échec du multiculturalisme dans le contexte européen. Je ne crois pas qu'il soit juste de dire cela, même dans le contexte européen, mais il faut aussi comprendre que l'expérience du multiculturalisme en Europe est différente de celle vécue au Canada.
Le Canada est un pays qui a été fondé sur des valeurs communes ainsi que sur la diversité sur les plans ethnique, religieux et linguistique. Nous pouvons comparer notre situation à celle de nombreux États européens, qui, de toute évidence, ont mis l'accent sur des valeurs communes, mais dont la fondation repose aussi, dans une certaine mesure, sur le nationalisme ethnique.
Nous devons accueillir les nouveaux arrivants en tenant compte de ce contexte, sans nuire à ce que George Cartier appelait le concept d'une nation politique. Je vais lire un extrait d'un ouvrage intitulé Le pari de la franchise, qui porte sur le fédéralisme et qui saisit bien ce concept.
Cette double quête de l'universel et de la diversité culturelle, on la retrouve depuis la genèse de notre Confédération. Nous avons souvent dévié depuis, commis des erreurs et des injustices graves, mais le résultat est cette réalisation humaine admirable qu'est le Canada.
Depuis le début de son histoire, le Canada cherche à fusionner les valeurs universelles dans un contexte de diversité. On peut lire ce qui suit un peu plus loin dans le même ouvrage:
Enfin, Cartier voulait que le Canada soit une « nation politique », une nation solidaire qui transcende la race, la religion, l'histoire et la géographie. Il assurait que jamais les Français du Québec ne voudraient se désolidariser des autres Canadiens. Si l'on veut rechercher un contrat à la genèse de notre union fédérale, c'est bien celui-là, énoncé par Cartier, et qui inspire toute l'oeuvre de Peter Russell. Les Québécois de toutes origines ont puissamment aidé les autres Canadiens à réaliser cet idéal, ils ne doivent pas y renoncer.
Cet ouvrage, Le pari de la franchise, a été écrit par le . À mon avis, il avait des choses très intéressantes à dire sur l'importance que le Canada accorde aux valeurs communes dans un contexte de diversité.
Où en sommes-nous maintenant? Sur quelle philosophie le projet de loi du gouvernement se fonde-t-il?
Peu de temps après l'élection du gouvernement actuel, le a parlé de certains aspects de l'identité canadienne au New York Times. Voici ce qu'il a dit. Ses idées sont très différentes de celles des propos du que je viens de citer. Le premier ministre a dit: « L'identité canadienne ne repose pas sur un aspect fondamental commun [...] Ces qualités font du Canada le premier État postnational. »
Il y a donc dans cette Chambre, au moins entre notre parti et celui du , une divergence d’opinion très nette à propos de ce que la nation canadienne est censée être.
Pour nous, la nation, c’est l’unité autour de valeurs communes, dans un contexte de diversité ethnique, linguistique, religieuse et autre. Mais dans l’esprit du , la nation va au-delà du concept des valeurs communes et doit mettre en exergue la diversité, tout en définissant le Canada comme un État postnational, et non pas une nation politique.
Cela dit, nous sommes aujourd’hui saisis d’un projet de loi présenté par le gouvernement, qui permettrait à des personnes condamnées pour terrorisme de conserver leur citoyenneté canadienne. Il n’est pas difficile de comprendre pourquoi les libéraux présentent ce projet de loi, étant donné les commentaires du qui ont été publiés dans le The New York Times et la philosophie qui les sous-tend.
C’est aller à l’encontre de la tradition historique du Canada en tant que nation politique que d’affirmer que les personnes condamnées pour terrorisme devraient avoir le droit de conserver leur citoyenneté. Un terroriste, ce n’est pas seulement quelqu’un qui veut commettre des actes violents et semer le trouble. Les terroristes sont des gens qui, aujourd’hui, se dissocient complètement des valeurs canadiennes que j'ai mentionnées, l’égalité entre les hommes et les femmes, la dignité humaine, les droits de la personne, la démocratie et la primauté du droit, pour adhérer à des valeurs radicalement différentes et œuvrer à la destruction de nos propres valeurs. Un terroriste, ce n’est pas quelqu’un qu’on oblige à abandonner les valeurs canadiennes, c’est quelqu’un qui rejette volontairement ces valeurs. Cela ne fait aucun doute.
Notre conception de la diversité, qui met l’accent sur les valeurs communes, ne peut pas englober ceux qui veulent nous détruire. Il doit y avoir des paramètres ou des limites pour garantir la préservation de notre pays tel qu’il est, un pays d’unité dans un contexte de diversité.
Les libéraux ont une conception contradictoire de la diversité, qui accepte même ceux qui sont en profond désaccord avec les valeurs que les libéraux eux-mêmes chérissent, à savoir l’égalité entre les hommes et les femmes, les droits de la personne, la primauté du droit et la démocratie. Une conception qui permet aux gens qui rejettent nos valeurs, qui veulent même les combattre, de rester dans la famille canadienne, de profiter des avantages que leur donne la famille canadienne, le passeport canadien entre autres, et d’œuvrer à la destruction des valeurs que nous chérissons.
Tous ceux qui sont ici présents dans cette Chambre adhèrent sincèrement, je pense, au concept de la diversité, mais nous estimons aussi que la diversité doit être encadrée, ne serait-ce que pour garantir notre propre survie. Il y a des choses que nous ne pouvons pas tolérer, notamment la volonté de détruire notre mode de vie.
Je demande aux Canadiens qui suivent le présent débat de réfléchir à ces différences de vision. L'une des visions est celle du et l'autre est celle de George Cartier: le Canada est un État postnational ou il constitue un ensemble politique national commun.
Il est important de réfuter certains arguments de mes amis d'en face. Les députés ministériels ont dit beaucoup de choses à ce sujet qui sont vraies en substance, mais qui ne s'appliquent pas vraiment à ce projet de loi. Mon ami le secrétaire parlementaire souligne l'importance d'offrir une voie pour accéder à la citoyenneté. Mais cette voie existe déjà au Canada. Personne n'a jamais proposé la création d'une citoyenneté du genre de celle des Émirats arabes unis, qui ne peut être acquise que par naissance. Nous sommes tout à fait pour l'existence d'une voie d'accès à la citoyenneté, et nous pouvons ne pas être d'accord concernant le nombre d'années, qui peut être une de plus ou de moins, selon les points de vue, sans pour tant que nous soyons en désaccord sur ce point fondamental.
Les immigrants qui adoptent vraiment le Canada comme nouvelle patrie n'ont pas réellement d'objection à attendre un an de plus, par exemple. Ceux qui ne sont pas aussi fortement engagés dans leur démarche de naturalisation canadienne ont toutefois peut-être un autre point de vue. Je ne sais pas exactement quel serait le seuil — un an de plus ou davantage — à partir duquel le délai serait trop long, même pour les gens qui sont sincèrement attachés au Canada.
Le gouvernement pense qu'il existe un problème important de citoyenneté à deux vitesses, et nous entendons les députés ministériels répéter constamment cet argument formaté. Alors, deux choses doivent être dites à ce sujet. Premièrement, le gouvernement dit clairement avoir l'intention de se réserver le droit de révoquer la citoyenneté si elle a été acquise de manière frauduleuse. Donc, des personnes qui ont acquis la citoyenneté pourraient en être dépouillées pour avoir commis une fraude.
Or une fraude me semble être un crime beaucoup moins grave que le terrorisme. Alors, il est tout simplement incohérent d'entendre le gouvernement dire d'une part que la citoyenneté est irrévocable dans le cas d'une personne qui est nettement en rupture avec les valeurs canadiennes, tandis que, d'autre part, la citoyenneté peut être perdue si une personne a menti en remplissant un formulaire.
Il est vraiment difficile de suivre la logique du gouvernement lorsqu'il parle de l'irrévocabilité de la citoyenneté. C'est une logique qui m'apparaît extrême lorsqu'on sait qu'elle aurait comme conséquence que les cas les plus graves seraient traités au Canada, sans révocation, tandis qu'il pourrait y avoir révocation pour des infractions relativement moins graves.
Je veux ajouter ceci au sujet du régime que le gouvernement a mis en place. Le projet de loi du gouvernement instaurerait un régime de citoyenneté à deux vitesses qui n'existait pas auparavant. Dans ce régime, les gens qui obtiennent la citoyenneté canadienne pourraient se la voir retirer pour avoir présenté une demande frauduleuse. Dans notre système, n'importe qui pourrait perdre sa citoyenneté pour l'avoir obtenue frauduleusement ou avoir trempé dans des activités terroristes.
Dans le processus de citoyenneté des libéraux, aucune personne née dans notre pays ou qui avait la citoyenneté canadienne à la naissance ne pourrait perdre sa citoyenneté. Notre système traite de la même façon les personnes nées à l'étranger et celles qui sont nées ici. Par conséquent, je ne comprends pas pourquoi les libéraux invoquent continuellement le même argument, même s'ils refusent complètement d'appliquer pleinement le principe auquel ils disent adhérer.
Le fait est que le lieu de naissance d'une personne importe peu dans la loi initiale. Les gens pouvaient perdre leur citoyenneté s'ils étaient mêlés à des activités terroristes et il importait peu qu'ils soient nés ici ou ailleurs. La valeur de la citoyenneté canadienne dépend de leur adhésion à nos valeurs communes et non à l'endroit où ils sont nés. C'est un principe important et un principe que nous avons toujours défendu.
Bien entendu, pour des raisons pratiques, nous ne pouvons pas priver de sa citoyenneté une personne qui n'en a qu'une et cela est vrai que ces personnes l'aient obtenue frauduleusement ou en dépit de leur intention de participer ou de leur participation à une forme ou une autre de terrorisme.
Il s'agit donc d'une question pratique, et de toute évidence, la Chambre se trouve limitée par certaines considérations d'ordre pratique, car il y a certaines choses qu'elle peut faire et d'autres qu'elle ne peut pas faire. Cela dit, dans la mesure du possible, nous devrions nous en tenir fermement au principe selon lequel la citoyenneté canadienne a une grande valeur. Ce principe définit bien notre pays, qui est uni par des valeurs communes, compte tenu de sa diversité. Malheureusement, c'est un aspect qui n'est tout simplement pas pris en compte dans les arguments relatifs au projet de loi.
Il faut aussi fournir plus de précisions au sujet du système initial. En toute honnêteté, il est injuste que des députés ministériels mentionnent que les néo-Canadiens s'inquiètent des dispositions du projet de loi à cause de la désinformation, mais laissent ensuite entendre des choses incorrectes à propos de la mesure législative. Si certains Canadiens s'inquiètent des dispositions du projet de loi et ne comprennent pas bien les objectifs que le projet de loi initial permettrait d'atteindre, j'espère que les députés ministériels, qui ont peut-être discuté avec ces Canadiens pendant la campagne, ont fourni des renseignements exacts à ce sujet.
Ils ont peut-être précisé qu'en fait, dans sa version originale, le projet de loi ne limite aucunement la liberté de circulation. Il est impossible de perdre sa citoyenneté pour un crime mineur. D'ailleurs, même les personnes qui commettraient un acte criminel grave et violent ne verraient pas leur citoyenneté révoquée, qu'elles soient ou non nées ici et qu'elles aient ou non une double citoyenneté. Seuls les actes terroristes sont visés.
Quand il est question de terrorisme, l'essentiel à retenir, c'est qu'il s'agit du cas de personnes qui se sont carrément écartées des paramètres des valeurs canadiennes et ont affirmé qu'elles ne tenaient pas à faire partie de la famille canadienne. Elles ont agi de manière à se dissocier fondamentalement de ses valeurs.
Un des arguments avancés par mes collègues d'en face est qu'il suffit de mettre ces personnes en prison et qu'elles n'ont pas à subir à la fois l'incarcération et la perte de la citoyenneté. Or, il s'agit de deux types de sanctions complètement différents, qui se rapportent à des questions différentes. Il va de soi que la personne qui commet un crime violent ou un acte de terrorisme doit écoper d'une peine d'emprisonnement, mais il faut aussi déterminer si elle a maintenu son engagement à faire partie de la famille canadienne. Il s'agit là de deux questions différentes, dont il faut s'occuper et qu'il faut prendre en compte.
Je crois cependant qu'il y a un autre aspect concret qui échappe au gouvernement dans son raisonnement. Je parle du fait qu'une personne pourrait se trouver bien loin de notre pays et devenir très proche d'un mouvement terroriste, jusqu'à se battre pour Daech ou un autre groupe, par exemple. De toute évidence, sa participation à ce genre d'activités met fin à son appartenance à la famille canadienne. Tant qu'ils garderont leur citoyenneté canadienne, ces gens jouiront des avantages qu'elle confère, et ils pourront demander une aide diplomatique, que les Canadiens seront obligés de fournir à ces terroristes actifs.
Évidemment, nous ne sommes pas en mesure d'emprisonner une personne qui se bat à l'étranger au nom d'une autre organisation terroriste. C'est un scénario qui mérite peut-être d'être étudié et qui, à mon avis, n'est pas suffisamment pris en compte dans l'argumentaire du gouvernement.
Par ailleurs, il est important de souligner à cet égard que ce n'est pas la condamnation par un tribunal étranger qui mènerait à ce genre de considérations, mais seulement une décision prise par un tribunal canadien ou dans le cadre d'un processus d'arbitrage qui se fonde sur l'équivalence, c'est-à-dire une évaluation qui s'appuie sur la loi canadienne en matière de terrorisme. La personne ne serait toujours pas obligée de se trouver au Canada.
Les Canadiens devraient se fonder sur la philosophie de George Cartier plutôt que sur les idées postnationales fantaisistes et contre-identitaires du premier ministre. De plus, il est important de se rendre compte que les importantes dispositions du projet de loi ne règlent aucun problème réel, tandis que nous proposions de lutter contre de vrais problèmes. Les terroristes ne devraient pas...
:
Madame la Présidente, je suis très heureux de me prononcer sur cet important projet de loi au nom du Nouveau Parti démocratique.
Durant la 41e législature, le gouvernement conservateur précédent a présenté le projet de loi , qui a apporté diverses modifications à la Loi sur la citoyenneté. Comme les Canadiens le savent bien, la plus controversée de ces modifications est celle qui créait essentiellement deux catégories de citoyens. Elle faisait en sorte que les Canadiens naturalisés, c'est-à-dire ceux qui sont nés à l'étranger et qui ont acquis la citoyenneté canadienne par la suite, soient traités différemment des Canadiens qui sont nés au Canada. Le s'est exprimé avec grande éloquence durant la campagne électorale quand il a affirmé qu'un Canadien, c'est un Canadien. Cette déclaration a trouvé un écho chez la population. Toutefois, cette modification était loin d'être la seule grave lacune de ce projet de loi. Bien des experts ont signalé que, à bien des égards, le projet de loi était inconstitutionnel ou ne respectait pas le droit international.
Du point de vue politique, le projet de loi a été mal conçu. Il a été rédigé à la hâte, et bon nombre des modifications qu'il proposait à la loi visaient à résoudre des problèmes qui n'existaient pas. Le gouvernement conservateur précédent avait l'habitude de prendre des décisions qui n'étaient pas fondées sur des faits, mais sur une idéologie. Le projet de loi en est un exemple classique. Il s'agissait d'un projet de loi très injuste, porteur de discorde, motivé par des considérations idéologiques et, surtout, je le répète, injuste.
Le NPD s'est opposé au projet de loi dès le départ, et nous avons réclamé son retrait et son amendement. Nous avons proposé des dizaines d'amendements, qui ont tous été rejetés par l'ancien gouvernement conservateur. Le projet de loi à l'étude aujourd'hui, le projet de loi , modifierait cette mesure législative boiteuse et très dommageable. Les néo-démocrates sont donc très heureux de l'appuyer à l'étape de la troisième lecture.
Le projet de loi modifiera les mesures mises en oeuvre par le projet de loi de différentes façons, mais pas de toutes les façons que nous croyons nécessaires. Je m'explique.
Commençons par les modifications positives de mesures mises en oeuvre par le projet de loi C-24.
Le projet de loi éliminera la capacité de révoquer la citoyenneté pour certains motifs précis. Il éliminera l'obligation pour un nouveau citoyen de déclarer son intention de résider au Canada. Il rétablira la période pendant laquelle un résident permanent doit être effectivement présent au Canada pour être admissible à la citoyenneté. La présence effective exigée sera de trois ans sur une période de cinq ans, alors que le gouvernement précédent souhaitait que, pour l'obtention de la citoyenneté, les résidents permanents doivent avoir été effectivement présents au Canada pendant quatre ans sur une période de six ans. Le projet de loi rétablira le droit de tenir compte d'une période maximale de deux années de résidence temporaire avant l'obtention de la résidence permanente dans le calcul du nombre de jours qu'une personne doit résider au Canada pour être admissible à la citoyenneté. Il éliminera l'exigence selon laquelle le demandeur doit avoir été effectivement présent au Canada au moins 183 jours tous les ans, et ce, quatre années sur six. Il retirera l'exigence relative aux compétences linguistiques et aux connaissances, que les conservateurs ont élargie pour l'appliquer aux jeunes âgés de 14 à 17 ans et aux aînés âgés de 55 à 64 ans. Je parlerai de cela plus en détail.
Le projet de loi fait également fond sur le projet de loi en empêchant les délinquants de compter le temps passé à purger une peine avec sursis — c'est-à-dire une peine assortie de conditions purgée dans la collectivité — dans le calcul de la période de présence effective. C'est là une grande lacune conservatrice que le projet de loi vient combler. Le projet de loi C-6 donne également aux agents de la citoyenneté le pouvoir de confisquer tout document frauduleux, autre disposition importante qui permettra aux administrateurs de s'acquitter de leur travail.
Je répète que le projet de loi n'est pas parfait; j'espère qu'il sera amendé. Qui plus est, le projet de loi ne redresse pas les dispositions suivantes mises en oeuvre conformément au projet de loi : le pouvoir accordé au ministre de révoquer la citoyenneté à la suite d'un examen sur dossier, et ce, sans possibilité d'audience judiciaire, ainsi que l'interdiction d'obtenir la citoyenneté pour les gens accusés d'une infraction criminelle à l'étranger ou purgeant une peine à l'étranger pour avoir commis une infraction criminelle, qui doit également constituer au Canada une infraction punissable par mise en accusation. Enfin, le projet de loi ne retire pas au ministre le pouvoir discrétionnaire d'accorder la citoyenneté, autre pouvoir qui, selon les néo-démocrates, ne devrait pas être exercé de façon si peu transparente.
Les néo-démocrates sont heureux d'appuyer le projet de loi parce qu'il abroge nombre des changements préjudiciables et inconstitutionnels à la citoyenneté apportés par le gouvernement précédent. Nous sommes déçus que le projet de loi n'aille pas tout à fait assez loin en ce qui a trait à ce dont je viens de parler et nous soulignons également que sa portée limitée a fait en sorte que de nombreuses propositions d'amendement recommandées par les témoins experts, notamment l'Association du Barreau canadien, n'ont pas été admissibles à l'étape de l'étude en comité.
Le l'a reconnu de manière explicite et il a laissé entendre que le gouvernement fédéral devra présenter un autre projet de loi sur l'immigration à l'automne pour remédier à ces lacunes. Nous encourageons le ministre à tenir parole et nous avons hâte de collaborer avec lui lorsqu'il présentera un projet de loi réellement exhaustif qui améliorera le processus d'obtention de la citoyenneté canadienne et qui rétablira une loi en tous points appropriée, efficace et équitable relativement à cet élément on ne peut plus essentiel de la vie politique canadienne: la citoyenneté.
Je vais donner un peu de contexte. Le gouvernement conservateur a présenté le projet de loi initial en février 2014, donc un an ou un an et demi avant les dernières élections. Si je le précise, c'est parce que le gouvernement conservateur avait tendance à agir selon des motifs idéologiques et politiques et non selon un raisonnement fondé sur des données probantes. Nous croyons que le projet de loi était issu de motivations politiques, puisque les conservateurs ont tenté de miser sur les bas instincts et l'intolérance pour creuser des fossés entre les gens. J'en parlerai dans un moment parce que nous croyons qu'il s'agit d'une façon très malsaine de créer une loi à la Chambre.
À l'étape de la deuxième lecture, lors de la dernière législature, le NPD a présenté un amendement de portée générale pour demander au gouvernement de retirer le projet de loi. Nous avons également demandé au gouvernement de renvoyer le projet de loi au comité avant de terminer l'étape de la deuxième lecture afin d'en combler les lacunes évidentes avant de poursuivre le débat.
Les conservateurs ont refusé — ce qui n'est guère étonnant — et ils ont fait adopter le projet de loi sans amendement malgré notre opposition. Le projet de loi C-24 a reçu la sanction royale en juin 2014. Depuis, les néo-démocrates ont demandé qu'il soit abrogé, du moins les dispositions qui portent sur l'augmentation des pouvoirs du ministre, y compris le pouvoir d'accorder ou de révoquer la citoyenneté en tant qu'exécutif, sans processus judiciaire, celles qui éliminent la reconnaissance du temps passé au Canada comme résident non permanent, celles qui resserrent les exigences en matière de résidence et de connaissance de l'une des deux langues officielles ainsi que les parties qui interdisent d'accorder la citoyenneté aux personnes inculpées à l'étranger.
Encore une fois, les libéraux ont réglé la plupart, mais non la totalité, de ces questions importantes dans le nouveau projet de loi. Je vais en creuser quelques-unes. Premièrement, examinons la disposition du projet de loi qui abroge la révocation de la citoyenneté pour des motifs d'intérêt national et que nous appuyons. Les modifications apportées à la loi par la promulgation de l'ancien projet de loi créaient un nouveau motif de révocation de la citoyenneté des personnes ayant une double citoyenneté pour certains actes considérés comme contraires à l'intérêt du Canada. Ces motifs comprenaient la condamnation pour terrorisme, trahison ou espionnage ainsi que l'adhésion à une force armée ou à un groupe armé organisé engagés dans un conflit armé avec le Canada.
Le projet de loi dont nous sommes saisis supprime ces motifs. Je tiens d'abord à dire que les néo-démocrates — et sans doute aussi l'ensemble des députés — estiment que ces crimes sont graves et inacceptables. Cela ne fait aucun doute. La trahison, le terrorisme, l'espionnage, la participation aux activités de l'armée d'un pays étranger en conflit avec le Canada sont des crimes qu'à mon avis, tous les Canadiens condamnent vivement.
Le problème consiste alors à trouver la bonne façon de traiter ces crimes. Les néo-démocrates, de nombreux députés et, comme en témoigne le projet de loi, le nouveau gouvernement libéral jugent que les auteurs de ces crimes doivent être punis sévèrement et adéquatement par le système judiciaire canadien. C'est ainsi qu'il faut agir avec les citoyens canadiens. Il ne faut pas les priver des droits que leur confère leur citoyenneté. Cette façon de procéder nous ramène à une ancienne époque médiévale, lorsqu'un roi, au XIIe siècle, pouvait bannir un citoyen de son royaume pour le punir.
C'est cet état d'esprit que le gouvernement conservateur a transposé dans sa loi. Or, quiconque croit en la démocratie moderne et aux concepts modernes de l'art de gouverner conviendra que, une fois qu'ils ont acquis leur citoyenneté, les gens sont bel et bien des citoyens. Les citoyens devraient donc tous être traités sur un pied d'égalité.
Voilà le noeud du problème. J'ai entendu les conservateurs prononcer le mot « égalité » à la Chambre. Or, ils n'ont jamais réussi à expliquer de façon satisfaisante ce que ce mot signifie pour eux. Si un citoyen canadien né au Canada commet un acte terroriste, fait de l'espionnage contre le Canada ou se joint à une armée pour combattre les Forces armées canadiennes, pourquoi ne devrait-il pas être privé de sa citoyenneté comme le serait un citoyen canadien naturalisé ayant commis exactement le même crime?
C'était la raison principale pour laquelle des gens se sont opposés à cette disposition. Celle-ci avait pour effet de créer deux catégories de citoyens canadiens. Comme tous les autres députés, je vais dénoncer systématiquement ces crimes odieux à la Chambre. Toutefois, nous devrions tous intervenir dans cette enceinte et affirmer que l'une des valeurs de notre pays veut que la justice traite tous les citoyens canadiens sur un pied d'égalité.
Je suis très heureux de constater que le gouvernement libéral va mettre en pratique ce concept très important.
Je veux parler de l'abrogation de la disposition relative à l'intention de résider. Depuis juin 2015, à cause de la loi des conservateurs, les demandeurs adultes sont obligés de déclarer dans leur demande de citoyenneté qu'ils ont l'intention de continuer à résider au Canada s'ils obtiennent la citoyenneté. Cette disposition a préoccupé certains nouveaux Canadiens qui craignaient que leur citoyenneté ne soit révoquée s'ils quittaient le Canada. Le gouvernement libéral propose d'abroger cette disposition, et je l'en félicite, parce que c'est exactement ce qu'il faut faire.
Tous les Canadiens sont libres de déménager à l'extérieur du pays et de vivre où ils le veulent. Voilà un autre exemple de discrimination dans la loi instaurée par les conservateurs. Moi qui suis né au Canada, je pourrais déménager en France si je le voulais sans jamais avoir à m'inquiéter de perdre ma citoyenneté. En revanche, quelqu'un qui est né dans un autre pays et a été naturalisé ici devrait s'inquiéter. C'est une disposition discriminatoire et je me réjouis que le gouvernement l'abroge.