SECU Rapport du Comité
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Rapport complémentaire du Bloc Québécois concernant l’étude sur le racisme systémique au sein des services policiers au Canada
Le Bloc Québécois souhaite tout d’abord remercier tous les témoins et tous les groupes ayant participé à cette importante étude sur la discrimination perpétrée par les forces policières. Le Bloc Québécois est d’accord avec la majorité des recommandations contenues dans ce rapport. Il est important pour nous que des actions décisives soient prises afin que tous puissent vivre dans une société où ils se sentent en sécurité et respectés.
Le meurtre de George Floyd, un Afro-Américain de Minneapolis tué le 25 mai 2020 par un policier blanc, a fortement marqué les esprits et a remis sous les projecteurs les tensions raciales qui existent aux États-Unis. Si ce triste événement a eu des échos partout sur la planète, c’est parce que plusieurs groupes minoritaires se sentent discriminés par l’État. Les exemples ici sont nombreux. La mort de Chantel Moore – tuée par un policier qui devait simplement vérifier son état de santé – a remis à l’avant-plan la douleur vécue par les nations autochtones aux mains des forces policières canadiennes. Nous avons tous été bouleversés par le cas de Joyce Echaquan, une femme autochtone décédée à Joliette alors qu’elle se faisait insulter par du personnel hospitalier qui n’avait aucune considération pour sa souffrance et sa détresse. Plus récemment, la découverte de 215 corps d’enfants sur les lieux d’un ancien pensionnat autochtone, enfants qui avaient été arrachés de force à leur famille pour être placés dans des pensionnats autochtones voués à leur assimilation, a montré à toute la planète la portée de la violence de l’État canadien contre les Autochtones. Nous croyons que le traitement des Premières Nations et des Inuits par le Canada est l’illustration même d’un système raciste discriminant envers les autochtones. Utiliser le terme « racisme systémique » – dans la mesure où le système est conçu pour discriminer un groupe selon des prémisses racistes – est donc approprié lorsqu’il s’agit de parler de la façon que le gouvernement canadien a traité les nations autochtones au fil du temps.
Malgré les progrès accomplis par la société au fil du temps pour lutter contre la discrimination et le racisme, toutes ces tragédies nous rappellent qu’il reste encore beaucoup de chemin à parcourir pour que tous puissent vivre dans une société exempte de discrimination fondée sur la race, le sexe, la langue ou l’origine ethnique. Ce rapport du Comité permanent de la sécurité publique est un petit pas vers l’atteinte de cet objectif. Le 17 juin, quatre membres du Comité permanent de la sécurité publique, dont la porte-parole en matière de sécurité publique du Bloc Québécois et vice-présidente du Comité, ont signé et envoyé une lettre au greffier du Comité pour qu’une étude soit immédiatement entamée afin d’examiner les problèmes de racisme et de discrimination au sein des corps policiers du Canada et en faire rapport à la Chambre des communes. Bien que l’étude porte sur l’ensemble des corps policiers au Canada, l’accent a été mis sur la Gendarmerie royale du Canada, qui relève de la compétence fédérale.
Le Bloc Québécois a également tenu, tout au long de cette étude, à ce que l’accent soit mis sur la Gendarmerie royale du Canada étant donné qu’elle relève de la compétence fédérale. De plus, une étude exhaustive menée par le gouvernement du Québec et portant sur la discrimination contre les Autochtones par les corps policiers du Québec vient récemment d’être complétée. La Commission d’enquête sur les relations entre les Autochtones et certains services publics : écoute, réconciliation et progrès – aussi connue sous le nom de Commission Viens – avait formulé près de 100 recommandations à l’intention du gouvernement du Québec. Le commissaire Jacques Viens a été catégorique : « Il me semble impossible de nier la discrimination systémique dont sont victimes les membres des Premières Nations et les Inuits dans leurs relations avec les services publics ayant fait l’objet de l’enquête ». Notons également que la notion même de « racisme systémique » ne fait pas l’unanimité et qu’il existe une multitude de définitions pour ce concept. De notre avis, certaines de ces définitions suivent une logique circulaire et cela a comme effet de semer la confusion et d’orienter le débat, ce qui nous éloigne de l’objectif qui est de passer des recommandations à l’action pour enrayer le racisme et ces effets sur les différentes communautés racisées. Nous estimons qu’il est important d’aller au-delà de ce débat sémantique pour se concentrer sur les victimes de discrimination et trouver des solutions constructives et pragmatiques.
Le Bloc Québécois a participé à cette étude pour que la population soit entendue et pour que les recommandations qui se trouvent dans ce rapport soient appliquées au niveau fédéral afin d’en arriver à un réel changement. Il nous apparaît important toutefois d’apporter des nuances à certaines recommandations. Par ce rapport complémentaire, nous exhortons le gouvernement fédéral à respecter les champs de compétence des provinces et à encourager les initiatives des provinces plutôt que de leur faire concurrence.
Recommandations
Le Bloc Québécois souhaiterait apporter des précisions et des changements aux recommandations suivantes :
Recommandation 20
Les problèmes de santé mentale sont la cause d’une grande partie des interventions policières, au Canada comme au Québec. Les policiers n’étant pas des spécialistes en intervention auprès de gens ayant des problèmes liés à la santé mentale, il arrive qu’une escalade évitable survienne selon l’approche des forces policières. Pour que l’on puisse mieux intervenir et protéger les gens ayant des troubles de santé mentale, nous devons leur assurer un accès à des soins adéquats. Le Bloc Québécois est donc en accord avec le principe de cette recommandation, mais tient à rappeler que la santé est une compétence provinciale et que la responsabilité fédérale se limite à transférer, sans condition, des sommes aux provinces. Ce sont les provinces qui gèrent les hôpitaux et qui offrent les soins de santé à la population, alors que le fédéral n’a pas d’expertise dans ce domaine. Les provinces ont d’ailleurs unanimement demandé une hausse des transferts en santé, ce que le gouvernement fédéral refuse, bien que nous soyons pris dans la pire crise de santé publique depuis un siècle. Les pressions exercées sur le réseau de santé public à cause du sous-financement du gouvernement fédéral amènent un lot de défis qui ne pourront être relevés qu’avec un financement adéquat.
Le Bloc Québécois croit donc que la recommandation 20 devrait être rédigée comme suit pour respecter les compétences des différents niveaux de gouvernement :
Que le gouvernement du Canada augmente les transferts en santé aux provinces et aux territoires afin de couvrir 35 % des montants dépensés en santé par ceux-ci, ce qui leur permettra de mettre des ressources additionnelles là où ils le jugent approprié, comme dans le soutien et l’intervention en matière de santé mentale.
Recommandations 31 et 32
La collecte de données est l’une des principales recommandations des communautés racialisées qui sont venues témoigner, et il est important que le rapport reflète leur suggestion. Notons que le rapport de la Commission Viens recommandait à Québec d’« intégrer la collecte de données ethnoculturelles au fonctionnement, à la reddition de comptes et à la prise de décision des organisations du secteur public ». Le Bloc Québécois est d’accord avec l’essence des recommandations 31 et 32, mais juge que les efforts du gouvernement fédéral ne doivent pas venir entraver le travail des provinces et que le gouvernement fédéral n’a pas à imposer une politique au Québec.
Le Bloc Québécois croit donc que les recommandations 31 et 32 devraient être rédigées comme suit pour respecter les compétences des différents niveaux de gouvernement :
Que le gouvernement du Canada exige que la GRC crée une base de données sur le recours à la force désagrégées par race, couleur, origine ethnique, origine nationale, sexe et autres identités; recueille régulièrement ces données en collaborant avec les gouvernements provinciaux et territoriaux qui souhaiteraient y participer et publie régulièrement les données recueillies.