propose que le projet de loi , soit lu pour la troisième fois et adopté.
— Madame la Présidente, je suis honoré de prendre la parole aujourd'hui, à l'étape de la troisième lecture du projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai présenté, le projet de loi , Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive. Ce projet de loi est cher à mon cœur et je ne remercierai jamais assez tous ceux qui ont pris part à ce processus de tout leur travail pour que nous en arrivions à ce point.
Commençons par mon personnel. Ce sont des gens prodigieux, qui ont travaillé sans relâche sur le projet de loi à chaque étape du processus. Nous avons tous appris quelque chose. Comme j'ai été élu pour la première fois à la Chambre en 2019, la courbe d'apprentissage a été abrupte, mais mon personnel m'a offert un soutien extraordinaire. Il y a un jeune homme en particulier qui a travaillé d'arrache-pied. Je tiens à souligner tout le temps qu'il a consacré au projet de loi. Il s'appelle Jesus Bondo. Il a fait un travail colossal et il a été un collaborateur formidable. Je le remercie ainsi que tous les autres membres de mon personnel. Ils ont tous mis la main à la pâte et rendu cette mesure possible.
J'aimerais aussi témoigner ma reconnaissance aux députés de tous les partis qui ont contribué à ce processus, qui ont parlé de ce projet de loi et qui m'ont prodigué des encouragements durant le processus. Cette expérience m'a été très gratifiante. Elle souligne le fait que le Parlement peut contribuer à résoudre des enjeux de société et accomplir de grandes choses pour peu que les députés s'unissent. Je témoigne aussi ma reconnaissance à chacun des partis représentés à la Chambre des communes.
Je veux remercier les personnes qui ont pris le temps de témoigner au comité à propos de ce projet de loi.
Je pense à l'honorable Graydon Nicholas, ancien lieutenant-gouverneur du Nouveau-Brunswick et ancien juge d'un tribunal provincial. Il est d'origine autochtone, du peuple wolastoqiyik. Il a livré un témoignage formidable au comité, et il s'est montré encourageant et inspirant tout au long du parcours.
Je tiens à remercier Tina Naidoo, de la Texas Offenders Reentry Initiative. Cela a été formidable de travailler avec elle. Lorsqu'elle a témoigné devant le comité, elle a parlé de son organisme et du travail qu'il effectue. En effet, l'organisme a travaillé auprès de plus de 30 000 personnes, qui ont pu retourner dans leur collectivité grâce à ses programmes. Ces gens parviennent à réintégrer le marché du travail, ce qui leur permet évidemment de réussir leur réinsertion sociale. C'est vraiment inspirant. Je serai toujours reconnaissant à Tina Naidoo, à Bishop Jakes et aux gens formidables de Dallas, qui ont fait un travail exceptionnel dans ce dossier.
Je pense à Cathy Latimer, de la Société John Howard, qui a comparu devant le comité, et je pense au travail inspirant de cet organisme, qui aide les contrevenants à faire la transition entre la prison et la vie en société. Je tiens à leur exprimer ma gratitude.
Je pense à Stacey Campbell, qui a contribué à la rédaction du projet de loi. Elle travaille pour Fraternité des prisons du Canada, qui fait un excellent travail. Elle a accepté de comparaître lorsque nous avons présenté pour la première fois le projet de loi.
Je pense à Andrew Vähi, de Village of Hope, un organisme qui travaille auprès de jeunes hommes aux prises avec la toxicomanie et qui facilite leur réinsertion grâce à des programmes de traitement de la toxicomanie et de développement des compétences nécessaires à la vie courante. On y fait un excellent travail.
Je pense au Dr Tom Beckner, qui a été spécialiste de l'aumônerie et qui fait de l'excellent travail. Il a pris sa retraite, mais il faisait de l'excellent travail au sein des organismes Bridges of Canada et Bridges of America, et il a contribué à la formation de nombreux aumôniers de partout en Amérique du Nord. Je le remercie de sa contribution.
Je pense aussi au Dr John Rook et à l'excellent travail qu'il accomplit en Alberta. Je lui suis vraiment reconnaissant de son apport et de son soutien dans cette initiative.
Je pense à Mitch MacMillan, agent de la GRC à la retraite et chef du service de police communautaire de la ville de Woodstock, dans ma circonscription. Il travaille dans un poste de police local. Il a également fait partie de la Commission nationale des libérations conditionnelles. Il s'est prononcé en faveur du projet de loi et nous a aidés dans la rédaction de celui-ci.
Je pense à David Coburn, un agriculteur de ma région. Il embauche de jeunes hommes en transition et leur donne la chance de trouver une voie pour l'avenir.
Toutes ces voix ont parlé à l'unisson et se sont greffées à celles des députés des autres partis. Ces derniers ont fait de bonnes suggestions et ont contribué à faire du projet de loi ce qu'il est aujourd'hui. J'en suis très reconnaissant et je considère que c'est un privilège de voir le projet de loi arriver à l'étape où il est.
Je sais que nous sommes tous conscients du taux de récidive des anciens détenus dans les deux ans suivant leur libération d'un pénitencier fédéral. Il est troublant. Selon certaines estimations, ce taux dépasse les 25 %. Cependant, il est bien plus élevé pour les personnes libérées d'un établissement provincial. De plus, le taux de récidive est encore plus élevé chez les membres des communautés minoritaires, comme les communautés autochtones, où il s'élève à environ 40 %. Nous devons vraiment faire tout notre possible pour remédier à cette situation.
Malheureusement, les enfants dont les parents ont été incarcérés sont sept fois plus susceptibles d'être eux-mêmes incarcérés un jour. Si nous pouvions briser ce cycle et réduire la récidive, nous aiderions non seulement les personnes directement concernées, mais aussi les futures générations. Tous bénéficieront de ce genre d'initiative où nous unissons tous nos efforts pour permettre à une personne ayant purgé sa peine de réintégrer la société avec succès.
Je suis très reconnaissant de l'appui que la Chambre a accordé jusqu'à présent à mon projet de loi. J'ose espérer que les députés continueront de l'appuyer jusqu'à son adoption. Nous désirons tous mettre fin à la récidive. Lorsqu'une personne a purgé sa peine, nous voulons qu'elle parvienne à se réinsérer dans la société.
Nous devons collaborer avec les provinces et respecter leurs champs de compétence et leur expertise. Nous devons collaborer avec le secteur privé, qui pourrait offrir une deuxième fenêtre d'opportunité. Nous devons continuer à collaborer avec le secteur à but non lucratif et de bienfaisance, qui est excellent pour intervenir quand d'autres se retirent et qui n'abandonne pas quand d'autres se dérobent ou baissent les bras.
Bien des gens qui font un travail exceptionnel passent souvent inaperçus, mais en faisant ce qu'ils font et en intervenant là où d'autres n'iraient peut-être pas, ils permettent à beaucoup de particuliers, de familles et de collectivités d'aller au-delà d'une décision regrettable prise à un moment donné. Les collectivités, les familles, les provinces et le Canada ont tout à gagner quand ils pardonnent une injustice passée et qu'ils avancent vers un avenir radieux et plus sain.
Il s'agit vraiment d'une occasion pour nous de collaborer afin d'apporter un changement sociétal durable. Je crois que le projet de loi réunira le meilleur qu'ont à offrir le secteur public, tous les ordres de gouvernement, les organismes confessionnels et les organismes sans but lucratif pour trouver collectivement une solution à long terme. Il s'agit d'une approche qui mobilise tout le monde et qui vise à aider les plus meurtris et les plus vulnérables d'entre nous.
J'ai souvent parlé de mon bon ami Monty Lewis lorsque j'ai eu l'occasion de prendre la parole au sujet du projet de loi. Il a fondé une organisation qui œuvre dans les prisons. Il savait ce que c'était que d'être incarcéré.
Monty n'a pas eu une enfance facile. Il savait ce que c'était que de vivre avec des dépendances. Il savait ce que c'était que d'être victime de violence ou d'en être l'auteur. Il a fini par purger des peines d'emprisonnement dans des prisons provinciales, puis dans un pénitencier fédéral.
Monty se trouvait dans le trou d'une cellule au pénitencier de Kingston. Il avait, à toutes fins utiles, renoncé à la vie et était en colère contre le monde. Cependant, un aumônier de l'Armée du Salut a commencé à lui rendre régulièrement visite et Monty m'a raconté l'histoire de ces visites. Au début, il hurlait, jurait et disait à l'aumônier d'aller se faire voir, sans toutefois le décourager. L'aumônier a poursuivi ses visites et a fait connaître à Monty la grâce et l'espoir. Il lui a montré qu'il ne l'abandonnerait pas.
Bref, la vie de Monty a changé radicalement. Depuis le trou d'une cellule, sa vie a commencé à prendre une autre direction. Il a purgé sa peine, est sorti de prison et a rencontré l'amour de sa vie, Linda. Ils se sont mariés et il est retourné travailler dans les mines. Il a alors ressenti un besoin qu'il ne pouvait ignorer, celui de venir en aide à ceux qui s'étaient engagés dans une voie similaire à la sienne. Il voulait qu'ils sachent que leur vie n'était pas finie à cause des actes qu'ils avaient commis et qu'ils regrettaient. Il n'avait que 7,36 $ lorsqu'il a commencé à rendre visite aux prisonniers, à leur apporter de bonnes nouvelles et à être là pour eux à leur libération. Sa vie et son organisation sont la véritable source d'inspiration pour le projet de loi.
Je ne peux m'empêcher de penser que quelque part dans les cieux, Monty a un large sourire ce soir, en voyant qu'un projet de loi qu'il a inspiré sera peut-être adopté à la Chambre des communes dans quelques minutes et que cette mesure pourrait avoir une incidence sur la vie de bien des gens. Je lui dédie ce projet de loi et cette soirée, à lui, à son épouse et à leur famille, pour tous les sacrifices qu'ils ont faits et l'espoir qu'ils ont donné à tant de gens.
Je remercie chaque personne. Je suis reconnaissant de cette chance qui m'est donnée et du soutien dont j'ai bénéficié pour en arriver là, afin de donner de l'espoir à tous ceux qui ont eu des moments de désespoir.
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Monsieur le Président, j'aimerais partager quelques réflexions avec le député, qui a fait un travail remarquable en présentant à la Chambre des communes ce projet de loi, qui en est maintenant à l'étape de la troisième lecture. Même si je n'ai pas participé aux délibérations du comité, à entendre les interventions à ce sujet, je suis convaincu qu'elles étaient d'un grand intérêt. Il n'est pas étonnant que le comité permanent ait fait du si bon travail à propos de ce projet de loi.
Quand je pense au projet de loi , je pense aussi au discours du Trône, qui comprend l'engagement de présenter un projet de loi et de réaliser des investissements à l'égard de certains enjeux comme les inégalités systémiques à toutes les étapes du système de justice pénale, qu'il s'agisse de déjudiciarisation, de condamnation, de réhabilitation ou de casiers judiciaires. Il y a beaucoup de mérite dans nos débats d'aujourd'hui.
Le député et beaucoup d'entre nous parlent de la récidive dans notre système de justice. Pensons aux coûts pour la société, et je ne parle pas seulement des coûts financiers, en dollars, car ils dépassent de loin les coûts financiers. Il y a aussi des répercussions sur les collectivités. En tant que législateurs, nous voulons tous faire notre possible pour que les habitants de nos circonscriptions se sentent en sécurité dans leurs collectivités, à n'importe quelle heure de la journée et où qu'ils se trouvent. Nous voulons que le sentiment de sécurité prédomine.
Pour les résidants de Winnipeg-Nord, l'élément de sécurité est de la plus haute importance. Pouvons-nous aborder cette question sans, au moins, nous pencher sur le problème de la récidive et prendre les mesures qui s'imposent à ce sujet?
Je suis heureux que ce débat ait lieu. J'ai beaucoup réfléchi à la question, car j'ai été porte-parole en matière de justice pendant une courte période, lorsque je siégeais à l'Assemblée législative du Manitoba. J'ai eu l'occasion de visiter des endroits comme la prison provinciale de Headingley, la prison fédérale de Stony Mountain et différents types d'établissements pénitentiaires, dans les collectivités. J'ai aussi vu d'autres manières d'administrer la justice.
C'est pourquoi j'ai écouté le député avec beaucoup d'intérêt lorsqu'il a parlé de son intérêt pour la justice réparatrice. De façon générale, j'ai bien aimé sa réponse. Je crois en la justice réparatrice. Cette forme de justice pourrait s'appliquer non seulement au délinquant, mais aussi à la victime. On peut réunir les deux aspects et faire en sorte que la victime puisse voir le visage de son agresseur. Ce n'est pas une approche universelle, et elle ne peut pas nécessairement s'appliquer à toutes les situations, mais c'est possible dans certaines circonstances. J'ai déjà fait partie d'un comité de justice pour la jeunesse, et j'ai été à même de témoigner de la véritable valeur d'une approche de cette nature ainsi que de ses avantages à plus grande échelle.
En ce qui a trait aux systèmes carcéraux, comme j'ai moi-même étudié la question et parlé à de nombreuses personnes qui ont été incarcérées, j'en suis venu à certaines conclusions. La formation est une composante essentielle à intégrer à la vie carcérale. Je parle d'acquérir des compétences de base comme apprendre à parler l'anglais ou une autre langue. Il est très important de savoir écrire, communiquer ou préparer un curriculum vitæ. Il y a des choses que nous tenons pour acquises, mais qui sont souvent très difficiles à faire pour de nombreux détenus. En leur permettant d'acquérir ces compétences élémentaires, nous améliorerons leurs chances de devenir des membres productifs de la collectivité.
Il y a des moyens de s'attaquer aux problèmes de toxicomanie et de consommation de drogue, par exemple. Il faut en faire beaucoup plus pour trouver des façons d'améliorer les politiques à ce sujet. Je crois que le gouvernement a adopté des approches très progressistes pour plusieurs de ces enjeux.
En ce qui concerne le projet de loi présenté par le député, il est important de souligner certains points, ce que j'aurais dû faire dans la première partie de mon discours. Si je peux me permettre, pour le gouvernement, ce projet de loi ne s'applique qu'aux délinquants sous responsabilité fédérale. C'est un élément important, car ce sont les seuls délinquants qui sont sous la responsabilité du . Je voulais le souligner, parce que c'est un élément important du débat, même si, dans ses remarques, le député a fait référence à l'importance de collaborer avec les autres parties intéressées, notamment les provinces.
En ce qui concerne la participation de simples citoyens, notamment sous la forme de comités de justice, je peux dire que mon expérience a été très positive. On devient en quelque sorte un agent de probation honoraire pour organisme quasi judiciaire. Il y a beaucoup d'organisations sans but lucratif qui font un travail exceptionnel sur le terrain, en aidant les gens qui sont incarcérés. J'ajouterais qu'ils font aussi un travail exceptionnel pour aider les victimes de crimes. Toutefois, ce projet de loi reconnaît les efforts phénoménaux de ces organisations sans but lucratif dans toutes les régions du pays qui soutiennent les gens cherchant, de bien des façons et dans différentes situations, à sortir de leurs circonstances actuelles et à avoir un apport plus positif.
En plus des simples citoyens et des organisations sans but lucratif, on pourrait facilement parler des entreprises privées. Je ne sais pas au juste quel est son degré d'implication aujourd'hui comme je ne suis plus présent dans le milieu depuis un bon moment, mais le secteur privé apporte souvent de l'aide. Que l'on pense aux arrangements afin de réintégrer des personnes qui ont quitté le système ou aux décisions d'un groupe quasi judiciaire ou d'un comité de justice visant l'auteur d'une infraction, le secteur privé a aussi un rôle à jouer.
Bien sûr, il y a aussi les provinces. Je devrais parler d'elles un peu plus longtemps parce que je crois, même si je ne connais pas les chiffres précis, que le taux d'incarcération est plus élevé dans les établissements provinciaux que dans les établissements nationaux. D'après le député, c'est aussi vrai pour les taux de récidive. Nous devons toujours être prudents quand nous mentionnons des statistiques. Il pourrait y avoir des raisons qui expliquent ces différences. Cependant, je sais qu'il existe de véritables obstacles systémiques sur lesquels le gouvernement doit se pencher.
En ce qui concerne les services, il importe également de signaler que ces établissements font déjà un bon travail en examinant et en améliorant continuellement leurs instruments et procédures d'évaluation des risques pour s'assurer qu'ils demeurent objectifs, valides et fiables. Quand nous parlons de changements qui auront une incidence sur la sécurité, ce genre de choses nous aide concrètement à avancer.
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Monsieur le Président, initialement, on devait débattre de ce projet de loi au lendemain du débat d'urgence pour dénoncer les actes de violence perpétrés envers les femmes. Je leur avais donc fait une grande place dans mon allocution, puisque les féminicides sont un fléau qu'on doit à tout prix éradiquer, et ce projet de loi pourrait faire partie de la solution. Je prends quand même le temps de revenir sur ces tristes événements des derniers mois et on comprendra pourquoi.
Le 5 février 2021, Elisapee Angma a été tuée à Kuujjuaq par son ex-conjoint. Le 21 février 2021, Marly Édouard, 32 ans, est abattue d'une balle à la tête tout près de son domicile à Laval. Elle avait été victime de violence conjugale quelques semaines plus tôt. Le 23 février 2021, Nancy Roy, 44 ans, est poignardée à mort dans son logement de Saint-Hyacinthe. Son ex-conjoint Jean-Yves Lajoie est accusé du meurtre. Le 1er mars 2021, Myriam Dallaire, 28 ans, et sa mère Sylvie Bisson, 60 ans, sont tuées à coups de hache à Sainte-Sophie par l'ex-conjoint de Mme Dallaire. Le 19 mars 2021, Nadège Jolicœur, 40 ans, est poignardée à mort dans le véhicule de taxi de son conjoint. Le 23 mars, Rebekah Harry, 29 ans, a succombé à ses blessures après avoir été hospitalisée pendant plusieurs jours à Montréal. Son conjoint a été arrêté sur le lieu du crime.
Ces sept femmes ont été tuées en sept semaines au Québec. Quatorze enfants sont devenus orphelins de mères et souvent de pères qui se sont enlevé la vie à la suite de ces meurtres. Depuis, d'autres se sont ajoutées, faisant grimper la liste à 10. Ce sont 10 femmes tuées des mains de leurs proches.
Les tueurs sont des conjoints ou des ex-conjoints violents. Le constat est d'autant plus brutal lorsqu'on sait que, parmi ces féminicides, plusieurs ont été commis par des hommes qui avaient déjà été judiciarisés et qui traînaient un lourd passé en matière de violence conjugale. Il est assez clair que les conjoints violents doivent être pris en charge, suivis et évalués avec rigueur selon leur dangerosité.
C'est ici que le bât blesse. Le Comité d'examen des décès liés à la violence conjugale de même que les travaux de la criminologue Jane Monckton démontrent que l'homicide conjugale qui se fabrique sous nos yeux en raison de la négligence constante des pouvoirs publics en matière de prévention, de dépistage et de suivi des cas à risque. Les facteurs de risque sont connus, mais ils sont ignorés ou banalisés.
Dans le cas du double féminicide à Sainte-Sophie, une ex-conjointe du suspect juge qu'elle n'a pas été prise au sérieux lorsqu'elle a porté plainte contre lui cinq ans plus tôt. Elle a dû s'isoler en maison d'hébergement, alors que lui jouissait de sa pleine liberté. Pourtant, il a déjà un lourd passé criminel.
Il y a une incohérence dans le fait qu'une femme victime de violence doive se réfugier dans une maison d'hébergement pour être en sécurité, alors que son conjoint ou ex-conjoint violent est en liberté.
L'Alliance des maisons d'hébergement de 2e étape qui accueillent les femmes qui sont le plus à risque de se faire assassiner affirme que la plupart du temps les hommes en question sont remis en liberté dans les 24 à 48 heures suivant leur arrestation. Où vont ces hommes une fois remis en liberté, s'ils ne sont pas pris en charge? Poser la question, c'est y répondre.
Le corps d'Elisapee Angma portait d'importantes blessures lorsqu'il a été retrouvé le 5 février dernier à Kuujjuaq. Deux semaines plus tôt, son ex-conjoint avait été libéré sous caution, malgré qu'il ait bafoué des ordonnances qui lui interdisaient de s'approcher de Mme Angma. Plusieurs femmes victimes de violence qui avaient confiance dans le système de justice croient malheureusement aujourd'hui que la liberté d'un accusé est plus importante que la sécurité d'une femme. Quand les citoyens et les citoyennes perdent confiance en leur système de justice, ils cessent de dénoncer officiellement, ils cessent de porter plainte à la police.
D’ailleurs, les chiffres le démontrent. Les féminicides ont été beaucoup médiatisés ces dernières semaines. Cela nous permet d'ouvrir les yeux collectivement sur un problème sérieux dans notre société auquel il faut s'attaquer d'urgence. Toutefois, les chiffres concernant les tentatives de meurtre, les voies de faits graves, les menaces et les agressions envers les femmes sont encore plus préoccupants qu'on ne le pense. Pour l'année 2019-2020, 300 femmes ont été hébergées dans les maisons d'hébergement pour femmes du Québec. Ce sont 300 femmes victimes de tentative de meurtre par des hommes violents dont la majorité ne figure pas dans les statistiques policières.
Selon la Fédération des maisons d'hébergement pour femmes du Québec, il s'agit de tentatives d'étranglement, de noyade ou de femmes qu'on a jetées en bas des escaliers. Devant tant d'horreurs, nous avons le devoir, en tant que législateurs et législatrices, de nous poser la question. Que faire pour mettre fin à cette violence inouïe? Que faire pour que les femmes et les enfants se sentent en sécurité dans leur propre maison? Que faire pour que les hommes emplis de rage aient les outils nécessaires pour canaliser leur colère et éviter de causer d'autres féminicides?
Une des solutions est certainement qu'il faut immédiatement mieux prendre en charge les hommes violents. Il faut instaurer des mesures novatrices pour leur venir en aide parce que, oui, la judiciarisation est un moyen d'affirmer que la violence conjugale n'est pas acceptable, mais la prison ne règle pas les difficultés profondes des hommes violents. Dans 50 % des cas, ils récidivent. La violence conjugale est une problématique sociale et il faut agir sur plusieurs fronts. On ne peut enrayer la violence faite aux femmes par des hommes sans s'occuper de ces agresseurs. Ce serait une erreur.
Le projet de loi se veut une façon de mieux encadrer les détenus dans les prisons fédérales, afin de limiter au maximum la récidive. C’est un sujet qui me tient à cœur et que j’étudie avec beaucoup d'attention dans le cadre des travaux du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. En effet, les lacunes quant à la prise en charge des prisonniers fédéraux sont bien documentées.
Le projet de loi C-228 vise à mettre fin à l’imposition de peines minimales obligatoires pour certaines infractions au Code criminel. Il s'agit d'une erreur du gouvernement de Stephen Harper qui doit être réparée. L’aspect obligatoire de ces peines enlève aux juges la possibilité de déterminer des peines appropriées selon leur connaissance du dossier en question et de leur expertise, afin de maximiser les chances de réhabilitation.
Si l'on favorise l'imposition de peines minimales obligatoires, c'est parce qu'on croit que la durée de la peine d'incarcération a un effet dissuasif sur un délinquant qui serait tenté de récidiver. Or une importante étude réalisée sur une période de 30 ans, qui portait sur plus de 336 000 délinquants, démontre le contraire.
Les chercheurs ont établi 325 corrélations entre la récidive et la durée du séjour en prison. L’objectif était de déterminer si l'emprisonnement permettait vraiment de refréner le comportement criminel ou la récidive. Ils en sont venus à la conclusion qu’il serait illusoire d'imposer des peines d'emprisonnement dans l'espoir de réduire la criminalité. Selon eux, la principale justification de l'emprisonnement doit être de punir les délinquants pour leur crime et de neutraliser certains d'entre eux pour des périodes raisonnables.
Le rapport de l’enquêteur correctionnel du Canada, Ivan Zinger, publié le 27 octobre dernier, est d’ailleurs venu appuyer les résultats de cette étude. Il s'agit d'un rapport dévastateur pour le gouvernement canadien, parce qu’il démontre que le fédéral gère très mal la réinsertion sociale de ces détenus.
J’ai eu l’occasion de m’entretenir avec M. Zinger dans le cadre d’une réunion du Comité permanent de la sécurité publique et nationale. Nous avons discuté du nombre important de cas de violences sexuelles qui ne sont pas dénoncés dans les prisons fédérales ou, pire encore, qui sont parfois dénoncés sans être punis. Quand il est documenté que Service correctionnel Canada ferme les yeux sur des viols, il y a urgence d’agir.
Ce qu’il faut retenir du rapport de l’enquêteur correctionnel, c’est que le Canada accuse de plus en plus de retard par rapport au reste du monde industrialisé en ce qui concerne l’apprentissage numérique et la formation professionnelle derrière les barreaux. Peu de mesures ont été prises par le gouvernement pour mettre en œuvre les douzaines de recommandations faites par le bureau de M. Zinger pour améliorer la formation des détenus, ce qui aurait un impact direct sur leur réinsertion sociale.
Avec ces constats, comment s’étonner que les prisonniers des pénitenciers fédéraux peinent à se réhabiliter? Comment voulons-nous qu’ils réintègrent le marché du travail sans formations qui correspondent aux besoins du milieu du travail actuel? Comment pouvons-nous réussir une réinsertion sociale si l'on néglige les possibilités pour ces détenus d’obtenir un emploi une fois leurs peines terminées? Sans gagne-pain légitime, la porte de la délinquance est grande ouverte, tout comme celle de la récidive.
Le projet de loi C-228 prévoit l’élaboration et la mise en œuvre d’un cadre fédéral visant à réduire la récidive. C’est une bonne chose, et nous avons eu l’occasion d’en discuter, en comité, avec le parrain du projet de loi. Cependant, il prévoit des programmes normalisés, c’est-à-dire identiques pour tout le Canada. Malheureusement, cette façon de faire intervient directement dans les champs de compétence du Québec et des provinces.
Le Québec gère déjà la réinsertion sociale des délinquants juvéniles, mais ce projet de loi viendrait l’outrepasser par l'entremise d'un cadre fédéral. Le problème, c’est que le projet de loi C-228 ne donne aucun détail sur la forme que prendra le cadre fédéral. Il laisse toute la liberté au fédéral de le créer lui-même, et donc de passer outre le Québec et les provinces.
Un amendement libéral a même modifié le libellé pour que le cadre soit fait en consultation avec les provinces plutôt qu’en collaboration avec elles. Pour nous, cela laisse présager l’imposition d’un éventuel cadre. Nous avions espoir de modifier le projet de loi à l’étape du rapport, mais les légistes ont jugé que nos modifications pour empêcher l’ingérence fédérale n’étaient pas recevables.
C’est pourtant dans cette optique que nous avions appuyé le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. La réinsertion sociale des délinquants me tient à cœur et préoccupe le Bloc Québécois. Or ce projet de loi viendrait miner les efforts de Québec, lequel s’en tire plutôt bien pour ce qui est de la réinsertion sociale.
Pour que nous puissions être en faveur du projet de loi, ce dernier aurait dû se limiter à la partie fédérale de la réinsertion sociale des contrevenants. Le cas récent de Michel Cox, un dangereux prédateur sexuel qui a tenté d’enlever une adolescente immédiatement après être sorti de prison, démontre que la récidive chez les hommes violents est un problème. De plus, le cas du meurtre de Marylène Levesque par Eustachio Gallese démontre que la récidive chez les hommes violents est un problème.
Il ne faut pas se mettre la tête dans le sable: les mécanismes existants ont souvent échoué à protéger la population.
Bien que le Bloc Québécois ait appuyé le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture, nous nous opposons à toute imposition d’un modèle fédéral dans les prisons sous compétence provinciale, d’autant plus que plusieurs études jugent que le Québec fait nettement mieux qu’ailleurs dans le monde en matière de réinsertion sociale.
Je salue toutefois les efforts du député de , et je le remercie de son travail.
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Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de parler du projet de loi , Loi établissant un cadre fédéral visant à réduire la récidive, qui a été présenté par le député de .
Je tiens d'abord à féliciter le député d'avoir présenté ce projet de loi. Comme il en est à son premier mandat en tant que député, c'est tout à son honneur qu'il ait réussi à faire progresser son projet de loi d'initiative parlementaire jusqu'à cette étape aussi tôt dans sa carrière politique. Il a parlé avec beaucoup de passion et d'empathie de ce sujet à la Chambre, en s'appuyant sur son expérience dans sa collectivité et sur le travail extraordinaire d'un de ses amis, Monty Lewis, pour aider les ex-délinquants.
Il convient aussi de noter que le projet de loi vient d'un député conservateur. Je le souligne parce que nous entendons souvent des conservateurs, qui se perçoivent comme sévères contre les criminels, réclamer des sanctions plus strictes, des peines minimales obligatoires et des peines d'emprisonnement plus longues dans l'espoir de protéger le public, mais ces mesures n'ont pas fait leurs preuves.
Il est rare qu'on les entende parler de l'importance de la réadaptation et de la réinsertion sociale pour un délinquant qui sort de prison. Cette approche permet de protéger le public et représente un élément important pour améliorer la société. La réadaptation d'un délinquant est un principe important de détermination de la peine et elle doit être prise en compte par le juge, ainsi que d'autres facteurs.
Ce que nous voulons éviter, c'est que les délinquants commettent de nouveau un crime. C'est probablement la définition la plus simple de « récidive », un mot courant dans le vocabulaire correctionnel. Le projet de loi prévoit que le élabore d'ici un an un cadre national visant à réduire la récidive et qu'il en fasse rapport à la Chambre des communes.
L'élaboration du cadre doit se faire en consultation avec les provinces, des corps dirigeants et des organismes autochtones et d’autres intervenants compétents, notamment des organismes non gouvernementaux comme la Société John Howard et la Société Elizabeth Fry, ainsi que d'autres organismes et groupes qui travaillent avec d'ex-délinquants.
Le projet de loi reconnaît qu'il faut que le cadre prévoie des mesures visant à garantir que les personnes qui sortent de prison ont accès à des ressources adéquates et permanentes ainsi qu’à des possibilités d’emploi pour favoriser la transition et la réinsertion sociale dans le but de réduire le risque de récidive, mais aussi de les aider à devenir des membres productifs de la société en cours de route.
L'accès à l'emploi est extrêmement important et constitue un élément fondamental de la réadaptation. Le fait d'occuper un emploi et donc d'avoir la possibilité de devenir autosuffisant et indépendant est crucial et donne aux gens un certain contrôle sur leur vie et leur avenir. Un représentant de la Société John Howard dans ma circonscription, St. John's-Est, a récemment souligné la nécessité de mettre en place des programmes de développement des compétences professionnelles que les délinquants pourront suivre avant leur libération afin de les aider à se remettre plus rapidement sur pied lorsqu'ils essaieront de réintégrer la société et de se construire une meilleure vie.
Il est à espérer que les consultations sur le projet de loi entraîneront des recommandations productives concernant les mesures à prendre pour favoriser la réadaptation, éviter la récidive et aider les gens à surmonter les obstacles ayant peut-être contribué à leur incarcération.
Cela pourrait inclure la prestation d'aide aux gens qui n'ont pas accès à l'éducation et à la formation ou qui se heurtent à des obstacles à cet égard et aux personnes qui ont des problèmes de drogue ou d'autres problèmes de dépendance, ce qui peut être un facteur important dans la vie de certaines personnes qui ont été incarcérées. Le projet de loi nous offre une très bonne occasion de nous concentrer sur les besoins des ex-délinquants et d'améliorer les programmes et les ressources qui pourraient être mis à leur disposition.
Par ailleurs, dans le préambule du projet de loi, on reconnaît que le système correctionnel vise notamment à favoriser la réadaptation des délinquants, tant dans les pénitenciers que dans la collectivité. Un fait qui est maintenant bien connu est la surreprésentation scandaleuse des hommes et femmes autochtones, de même que des Canadiens noirs et de couleur, dans les prisons canadiennes. En effet, en 2020, selon l’enquêteur correctionnel, les Autochtones représentaient 30 % des prisonniers, alors qu'ils ne représentent que 5 % de la population canadienne. Les détenus noirs, quant à eux, formaient 10 % de la population carcérale, mais seulement 4 % de la population canadienne.
De plus, on a appris récemment que les préjugés raciaux s'étendent aux outils utilisés pour évaluer le potentiel de réadaptation et la cote de sécurité des détenus durant leur incarcération, que ce soit dans un établissement carcéral à sécurité maximale, moyenne ou minimale. Les détenus noirs et autochtones sont plus susceptibles de se voir attribuer une cote de sécurité maximale et d'obtenir les pires notes dans les évaluations du potentiel de réadaptation.
Par conséquent, ils ont un accès restreint aux programmes de réadaptation dans les prisons et à la libération conditionnelle, ce qui signifie qu'ils purgent une plus grande partie de leur peine d'emprisonnement. De toute évidence, l'accès restreint aux programmes nuit aux détenus.
J'ai proposé un amendement pour rectifier cette situation, et il a été accepté de très bonne grâce, à l'étape de l'étude par le comité, par le député de et appuyé par le comité. Il est maintenant inclus dans le projet de loi. C'est une disposition selon laquelle le cadre doit « évaluer et améliorer les instruments et les procédures d’évaluation des risques pour s’attaquer aux préjugés raciaux et culturels et veiller à ce que toutes les personnes qui sont incarcérées aient accès à des programmes adaptés qui permettent de réduire la récidive ».
Je crois que cela renforcera le cadre visant à réduire la récidive et éliminera, espérons-le, un peu du racisme systémique qui existe dans notre société et est si nocif. Je veux de nouveau féliciter le député d'avoir présenté cette mesure législative et dire que j'appuierai son adoption à l'étape de la troisième lecture.
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Monsieur le Président, je tiens à remercier le député de et son équipe du travail essentiel qu'ils ont accompli afin d'établir un cadre fédéral pour réduire la récidive au moyen du projet de loi, ainsi que de m'avoir donné l'occasion de prendre la parole cet après-midi.
Nous devrions tous être profondément soucieux du bien-être et du statut des personnes qui ont commis des crimes, et ce, pour deux raisons. Ceux qui ont commis des crimes demeurent des êtres humains et, à moins qu'ils ne soient réadaptés, ils peuvent récidiver et nous faire du mal, à nous et aux autres.
En ce qui concerne le premier point, je sais que le député qui a proposé le projet de loi a déjà été pasteur. Je sais également qu'une grande partie de l'important travail d'affirmation de la dignité humaine des détenus et de recherche de réduction de la récidive est accompli par des groupes confessionnels. Mon collègue connaît donc très bien le texte du chapitre 25 de l'Évangile selon saint Matthieu, qui parle de ceux qui obtiendront ou non le salut. En voici un extrait:
[...] le roi dira à ceux qui seront à sa droite: « Venez, vous qui êtes bénis de mon Père; prenez possession du royaume qui vous a été préparé dès la fondation du monde. Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger; j'ai eu soif, et vous m'avez donné à boire; j'étais étranger, et vous m'avez recueilli; j'étais nu, et vous m'avez vêtu; j'étais malade, et vous m'avez visité; j'étais en prison, et vous êtes venus vers moi. »
Je suis certain que pour beaucoup, la dernière ligne de ce célèbre texte est la plus difficile à appliquer. Nourrir celui qui a faim, vêtir celui qui est nu et recueillir celui qui est étranger sont des actes beaucoup plus faciles à accomplir lorsque celui qui a faim, celui qui est nu et celui qui est étranger ne sont pas responsables de la situation dans laquelle ils se trouvent. Cependant, se soucier du bien-être de celui qui est coupable, de celui qui a fait du mal aux autres, et reconnaître sa culpabilité sans pour autant nier son humanité est nécessairement plus difficile. Je le reconnais.
Affirmer le droit inaliénable à la dignité humaine des individus reconnus coupables d'un crime ne doit pas nous amener à ignorer leur culpabilité ou à imputer le crime à des facteurs sociaux sur lesquels ces individus n'ont pas de prise. Selon moi, agir ainsi reviendrait à leur refuser le droit à la dignité humaine. Lorsqu'on respecte la dignité d'une personne, on lui attache de la valeur et on lui permet d'exercer son libre arbitre. Par conséquent, on considère qu'elle doit assumer la responsabilité de ses gestes.
L'auteur d'un crime, surtout un crime violent, a très certainement posé des gestes de déshumanisation en bafouant la dignité des autres ou en se servant d'eux comme d'un vulgaire moyen d'arriver à ses fins. De toute évidence, il ne serait aucunement bénéfique que l'État ou la population pratique la déshumanisation en cherchant à nier l'humanité des auteurs de crime, que ce soit en prétendant qu'ils n'étaient pas conscients de leurs actes ou en cherchant à les traiter un peu comme des animaux.
Devant un acte de déshumanisation criminel, la réaction du système et de la société devrait consister globalement à rétablir l'humanité du délinquant. D'une part, il faut l'amener à assumer la responsabilité de ses actes et, d'autre part, il faut l'inciter à agir de manière compatible avec son humanité. Nous ne devrions pas réagir à un acte de déshumanisation criminel par une autre forme de déshumanisation, mais plutôt par un travail d'humanisation, en sens inverse. Autrement, la mentalité qui sous-tendrait notre action ne serait pas très différente de celle du criminel.
Dans son livre Utopia, sir Thomas More a fait l'observation suivante sur la manière dont la déshumanisation contribue à la criminalité:
Si vous ne trouvez pas un moyen de remédier à ces maux, cela ne mène à rien de vous vanter de la sévérité de votre punition du vol, qui, même si elle donne l'impression d'être juste, n'est en fait ni juste ni utile; car si vous tolérez que votre peuple soit mal éduqué et que ses manières soient corrompues dès l'enfance, et ensuite vous le punissez pour les crimes auxquels sa première éducation l'a disposé, que peut-on conclure d'autre que vous créez des voleurs et que vous les punissez ensuite?
Mis à part tout argument normatif ou moral sur la déshumanisation et la réhumanisation des criminels, il y a un avantage pratique très évident à la réhumanisation. C'est un fait que la plupart des criminels seront un jour libérés. Donc, la mesure dans laquelle ils ont pu cesser leurs comportements antérieurs aura des répercussions corrélatives sur la sécurité de l'ensemble de la société.
En théorie, une société pourrait résoudre ce problème en ne libérant jamais les criminels, mais non seulement serait-ce injuste, mais aussi énormément coûteux. Économiser de l'argent au gouvernement est certainement la moindre des raisons pour essayer de réduire les taux de récidive, mais c'est tout de même une raison.
Même les criminels incarcérés à vie peuvent faire beaucoup de mal à d'autres personnes, comme les gardiens, les codétenus ou le grand public. Ceux qui pensent que l'incarcération à vie est la solution devraient se rappeler qu'Allen Legere, l'un des tueurs en série les plus connus du Canada, a tué la plupart de ses victimes après s'être échappé de prison. Nous serons toujours plus en sécurité si nous réadaptons un délinquant, même s'il a été condamné à passer le reste de sa vie derrière les barreaux. Comme je l'ai dit précédemment, en pratique, la plupart des personnes qui entrent en prison en sortent à un moment ou à un autre.
En prévoyant la création d'un cadre national pour réduire la récidive, ce projet de loi souligne en particulier l'importance des communautés fortes et des organismes sans but lucratif. Je sais que ce n'est pas un hasard. Une communauté humaine au tissu social fort, avec des responsabilités et des obligations, qui s'appuie sur des structures naturelles reconnues comme la famille, le lieu de travail et le quartier, c'est ce qui nous aide à apprendre et à pratiquer les vertus qui nous permettent de vivre ensemble des vies bien remplies et heureuses.
La communauté est importante pour le développement de la personnalité et pour la réadaptation. La communauté peut aussi, dans un certain sens, faire partie du problème, lorsque les gens évoluent dans des communautés qui récompensent ou renforcent les comportements antisociaux. Dans de tels cas, les gens ont besoin de pouvoir s'insérer dans une autre communauté. Cependant, nous ne transformons pas les criminels en de bons citoyens en les déshumanisant, pas plus que nous les transformons en bons citoyens en les éloignant de leur réalité et de leur communauté.
Le gouvernement, c'est bien des choses, mais sa plus grande faiblesse, c'est que ce n'est pas une communauté. Si les gouvernements créent des cadres juridiques et fournissent des programmes, ils n'ont pas les caractéristiques ni les compétences propres aux communautés. Certes, les gouvernements peuvent jouer un rôle de soutien, mais c'est parce que les communautés de bénévoles qui accueillent les anciens criminels et les aident à devenir intègres ont des compétences uniques que ce projet de loi met l'accent sur le rôle que les partenariats doivent jouer dans un cadre national de réduction de la récidive.
Après avoir cité sir Thomas More, je vais me tourner vers le film À l'ombre de Shawshank pour faire valoir mon dernier point. Après le suicide d'un prisonnier récemment libéré, un autre prisonnier fait l'observation suivante: « Ces murs sont étranges. On commence par les détester, puis on s'y habitue. Après y avoir passé assez de temps, on finit par dépendre d'eux. »
La période d'ajustement après la remise en liberté est très difficile. L'État assume la responsabilité de l'incarcération et de la libération, mais, pour combattre la récidive, il est très important d'offrir aux détenus libérés un processus leur permettant de s'intégrer à une nouvelle collectivité, ce qui les aide à adopter de nouveaux schèmes de comportements. La transition vers l'extérieur, et en particulier le soutien des collectivités qui accueillent les détenus libérés, est nécessaire pour réduire la récidive. Le gouvernement ne peut pas faire tout ce travail seul, mais il peut y contribuer.
Lors de la dernière législature, j'ai eu l'occasion de rencontrer Cal Maskery et l'équipe de Harvest House Atlantic, à Moncton. Harvest House est un centre communautaire pour les personnes récemment libérées de prison. L'organisme offre un refuge d'urgence, des logements de transition, des services de désintoxication et des formations pour acquérir des compétences. Son financement provient de dons et de programmes gouvernementaux.
Cal a lui-même fait de la prison, mais il s'est repris en main. Il a rencontré son épouse pendant sa détention. Elle offrait son aide bénévolement aux détenus. Ils se sont mariés le jour où Cal a été libéré. J'ai été très inspiré par l'histoire de Cal et par le travail de l'organisme Harvest House. C'est le genre de travail qu'on devrait encourager davantage avec les mesures proposées dans ce projet de loi.
J'ai aussi eu l'occasion de visiter la prison qui se trouve dans ma propre circonscription à quelques reprises. J'encourage tous les députés à prendre le temps de visiter des prisons, de parler aux détenus et au personnel et de s'informer sur les problèmes et les aspirations de ces gens. Dans ce contexte, j'ai été inspiré par le travail de mon oncle, qui est musicien professionnel et qui dirige un organisme de bienfaisance appelé Concerts for Hope. Il invite d'autres musiciens professionnels à l'accompagner pour donner des concerts de musique classique dans des prisons partout aux États-Unis. Faire entendre de la belle musique à des gens condamnés pour un crime permet de rendre leur humanité à des criminels endurcis et de leur redonner de l'espoir.
Il me semble que l'espoir est quelque chose d'essentiel pour rendre leur humanité aux gens et réduire les risques de récidive. C'est quelque chose de fondamental pour toute personne. Les gens qui ont commis un crime ont besoin d'espoir pour se reprendre en main. Ils doivent pouvoir espérer quelque chose de différent, espérer pouvoir un jour trouver un sens à leur vie en rendant service aux autres. Même s'ils doivent endurer les pires châtiments, comme le bon larron sur la croix, ils doivent avoir l'espoir de pouvoir se racheter jusqu'à leur dernier souffle.
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Monsieur le Président, je veux remercier du fond du cœur tous les députés de leurs commentaires formidables et de leur examen attentif de ce projet de loi.
Le député de a cité un passage que j'avais l'intention d'utiliser à la toute fin. Il s'agit d'un de mes passages préférés, qui traite de ce que le maître lui-même a dit à propos de celui qui hérite du royaume: « Car j'ai eu faim, et vous m'avez donné à manger; [...] j'étais nu, et vous m'avez vêtu; j'étais malade, et vous m'avez visité; j'étais en prison, et vous êtes venus vers moi. »
Ces mots sonnent juste dans mon cœur, alors que nous arrivons à la conclusion du débat. La différence que peut apporter la compassion, que peut apporter l'espoir, et que peut apporter l'accompagnement à ceux qui croient peut-être devoir être définis à jamais par une décision peut-être très regrettable et douloureuse qu'ils ont prise à une époque de leur vie, et qui vivent maintenant dans l'ombre de ce sentiment.
Je suis heureux de pouvoir raconter à la Chambre que j'ai connu de nombreuses personnes qui ont donné une nouvelle direction à leur vie, une direction nettement meilleure, parce que des gens sont allés à leur rencontre pour leur transmettre un message d'espoir, pour leur tendre la main de l'amitié, et pour leur offrir une occasion, alors qu'elles ne croyaient peut-être plus jamais en avoir une autre. Ce projet de loi contribuerait grandement à la création d'un cadre.
Ce projet de loi vise à fournir une structure par laquelle la crème des programmes, aussi bien ici qu'à l'international, puisse être favorisée et développée pour nous permettre à tous d'atteindre notre objectif commun, qui consiste à réduire la récidive au sein de la population carcérale, et à aider ces personnes à réintégrer la communauté. Nous y arriverons grâce à ce type de partenariats efficaces.
Je remercie tous les députés, et j'espère que nous pourrons rapidement renvoyer ce projet de loi au Sénat, afin qu'il devienne une loi le plus tôt possible.