CHPC Rapport du Comité
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La tenue d’états généraux sur les médias
Contexte de l’étude
Le 5 décembre 2023, le Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes (le Comité) a adopté la motion qui suit :
Considérant que
- 1. Une crise secoue les médias de l’information en raison, notamment, de la domination des entreprises numériques étrangères;
- 2. Des centaines de postes dans les salles de nouvelles à travers le Canada ont été coupés depuis le début de l’année, et que des centaines d’autres risquent de l’être dans un avenir proche;
- 3. Des radiodiffuseurs canadiens, des associations de journalistes, des syndicats du secteur de l’information et plusieurs experts sont d’avis que des mesures urgentes doivent être mises en place pour permettre une couverture journalistique adéquate et diversifiée dans toutes les régions du Québec et du Canada;
Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude visant à déterminer la pertinence de l’appui gouvernemental de l’organisation, par le secteur de l’information nationale, des États généraux sur les médias et que le Comité invite des experts et des dirigeants du secteur pour une concertation afin d’en déterminer les paramètres. Si un tel forum est créé par le secteur, que les gouvernements des ordres national et provincial soient invités à prendre part aux discussions.
Que le Comité consacre un minimum de 4 réunions et fasse ses recommandations à la Chambre.[1]
Conformément à cette motion, le Comité a tenu six réunions et entendu le témoignage de 17 témoins, soient des journalistes, des experts, des dirigeants d’entreprises médiatiques et des représentants d’organisations à but non lucratif. Sept mémoires ont également été présentés au Comité. Outre la pertinence de tenir des États généraux sur les médias, les témoins ont émis des commentaires sur les enjeux relatifs à l’industrie des médias, à la profession de journaliste ainsi qu’au contenu diffusé par les médias. Le Comité tient à remercier tous ceux et celles qui ont participé à l’étude.
A. Les enjeux relatifs à l’industrie des médias
Médias et démocratie
Des témoins ont tenu à rappeler dans leur témoignage le rôle essentiel joué par les médias dans une société libre et démocratique. Par exemple, Colette Brin, directrice du Centre d’études sur les médias et professeur à l’Université Laval, a mentionné que « l’accès à une information complète, fiable et de qualité sur les affaires publiques est une condition fondamentale de la démocratie[2] ». Le président-directeur général d’Arsenal Media, Sylvain Chamberland, a également affirmé que la fonction de journaliste est « essentielle dans une société démocratique[3] ». Pour Jaky Fortin, directeur adjoint aux études et à la vie étudiante de l’École supérieure en Art et technologie des médias du Cégep de Jonquière, l’information constitue « un droit fondamental[4] » en démocratie.
Pour la présidente du Comité exécutif national de la Guilde canadienne des médias, Annick Forest, les médias constituent « la pierre angulaire de la démocratie[5] » en permettant aux citoyens de « prendre des décisions éclairées[6] ».
Un secteur en crise
La grande majorité des témoins ont reconnu que le secteur des médias traversait une crise majeure. Selon Colette Brin du Centre d’études sur les médias de l’Université Laval, il s’agit d’une « crise économique et structurelle[7] » doublée d’une « crise de confiance et une crise de pertinence du journalisme dans la vie[8] ». Selon Mme Brin, les effets se font ressentir à la l’échelle locale et régionale. Jaky Fortin de l’École supérieure en Art et technologie des médias du Cégep de Jonquière est également d’avis que c’est « l’information de proximité[9] » qui est particulièrement touchée par cette crise. Pour Pierre Tousignant, président du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Radio-Canada (FNCC-CSN), la crise des médias est avant tout financière[10].
La professeure en journalisme à la Toronto Metropolitan University School of Journalism, April Lindgren, a corroboré les propos de M. Fortin quant à l’impact de la crise des médias sur l’information locale. Selon Mme Lindgren, « plus de 500 organes de presse locaux ont fermé leurs portes au cours des 15 dernières années[11] ». Selon des données recueillies dans le cadre du Local News Research Project [disponible en anglais seulement] dirigé par Mme Lindgren, les trois quarts de ces fermetures étaient des journaux communautaires[12].
Pour le président de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, Éric Pierre Champagne, la crise des médias est une « crise de société[13] » qui touche directement l’exercice de la profession de journaliste. M. Champagne a informé le Comité que le journalisme au Canada avait perdu « 23 % de ses effectifs[14] » entre 2010 et 2020.
La journaliste du Toronto Star Newspapers Limited, Shree Paradkar, est d’avis que « les médias d’information sont au bord du gouffre et de l’extinction[15] ». Selon Mme Paradkar, quatre facteurs expliquent la situation financière difficile de l’industrie canadienne de l’information :
- une baisse des revenus publicitaires et des abonnements;
- une perte de confiance des lecteurs;
- un faible niveau de littératie médiatique dans la population; et
- un manque de diversité parmi les journalistes[16].
Plusieurs témoins ont identifié l’Internet et le développement rapide des technologies numériques comme étant la principale cause de l’effondrement du modèle d’affaires des médias traditionnels. L’émergence de médias essentiellement numériques, l’engouement des Canadiens à s’informer en ligne et la migration des revenus publicitaires vers les plateformes en ligne expliquent les bouleversements que traverse le secteur de l’information.
La directrice des Relations gouvernementales pour les Amis des médias canadiens, Sarah Andrews, estime que la migration des revenus publicitaires des médias traditionnels vers les plateformes numériques a contribué à alimenter la « crise dans le domaine de l’information[17] ». Dans un mémoire soumis au Comité, la Guilde canadienne des médias attribue également la crise des médias à « la domination des entreprises numériques étrangères[18] ».
Lors de son témoignage, Mme Andrews a expliqué que la publicité achetée par les entreprises canadiennes sur des plateformes numériques étrangères ne devrait plus être « une dépense déductible d’impôt[19] ». Il est à noter qu’il est possible de faire une telle déduction fiscale en vertu de l’article 19 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Mme Andrews a suggéré d’inciter les entreprises canadiennes à choisir des médias canadiens plutôt que des sites web étrangers pour faire leurs placements publicitaires.
Tara Henley, journaliste, auteure et baladodiffuseuse, a également établi un lien entre « l’effondrement des médias canadiens » et l’Internet. Mme Henley a résumé la situation de la façon suivante : « Internet a perturbé le secteur, et le modèle d’affaires fondé sur la publicité a implosé. […] De très nombreux bureaux ont été fermés, l’auditoire s’est raréfié, et les mises à pied ont été massives[20] ».
Des témoins ont réaffirmé l’importance que les organisations médiatiques prennent acte des changements technologiques, des habitudes de consommation médiatiques des Canadiens et de l’évolution des modèles d’affaires de ce secteur d’activités. Par exemple, Brandon Gonez de Gonez Media est d’avis qu’un « écosystème médiatique sain[21] » est composé de tous les intervenants du secteur médiatique, incluant les médias essentiellement numériques qui « peuvent assurer leur survie[22] ». M. Gonez a ajouté que « les créateurs de contenu axés sur le numérique[23] » peuvent aider les provinces qui sont aux prises avec des déserts d’information.
Sylvain Chamberland d’Arsenal Media a mentionné que certaines entreprises médiatiques ont tardé à prendre le « tournant numérique[24] ». Selon M. Chamberland, seules les entreprises médiatiques qui possèdent « un ensemble de propriétés et de capacités[25] » pourront survivre dans l’écosystème médiatique actuel. Il a invité les médias à prendre « leurs responsabilités » et à déployer « des efforts pour bâtir la relation[26] » avec les auditeurs et les lecteurs.
John Gormley, avocat, animateur radio à la retraite et ancien député, a reconnu que le secteur des médias vivait une période difficile. Toutefois, il est erroné selon lui d’attribuer les difficultés financières des médias à un sous-financement public[27]. Deux facteurs expliquent la situation actuelle selon M. Gormley :
- Les médias ont misé sur le journalisme d’opinion, ce qui leur a fait perdre leurs auditoires.
- Les médias ont fait preuve d’insouciance quand Internet et les réseaux sociaux ont développé la technologie permettant de transférer le contenu et les recettes des médias[28].
M. Gormley n’est pas convaincu que les services de nouvelles soient prêts à « s’adapter et innover comme ils doivent le faire[29] ».
Sue Gardner de l’Université McGill a également reconnu qu’il y avait une crise médiatique. Toutefois, la problématique actuelle n’est pas que financière selon la professeure. Pour bien comprendre la situation, il faut bien définir la nature du problème que l’on veut résoudre selon Mme Gardner. La pratique du journalisme doit également faire l’objet d’un examen :
Il n’y a pas, au pays, suffisamment de journalisme en profondeur pour que les citoyens puissent être informés comme il se doit et que ceux qui exercent le pouvoir puissent répondre de leurs actes comme il se doit. C’est le problème que vous devriez chercher à résoudre, à mon avis. Vous devriez vous demander comment favoriser les conditions propices à la pratique d’un journalisme de qualité[30].
Mme Gardner a ajouté que les interventions gouvernementales dans le secteur des médias doivent être guidées par l’intérêt public et non par « les besoins et les intérêts de l’industrie[31] ».
La pertinence de tenir des États généraux sur les médias
Le but premier de l’étude du Comité était d’examiner la pertinence de tenir des États généraux sur les médias. Les témoins ont exprimé une panoplie de points de vue à ce sujet.
Les organisations syndicales représentant les travailleurs du secteur des médias sont en faveur de la tenue d’un tel exercice. Dans un mémoire déposé au Comité, la Guilde canadienne des médias a affirmé que ce type d’événement constitue une occasion pour les intervenants de ce secteur « d’échanger des idées et des solutions possibles à la crise[32] ». Cependant, la Guilde a mentionné au Comité qu’une grande partie du travail avait « déjà été effectuée[33] » par le passé. Cet avis est partagé par l’Association canadienne des journalistes qui a affirmé que des États généraux sur les médias surviennent « 10 ans trop tard[34] ».
La présidente du Comité exécutif national la Guilde canadienne des médias, Annick Forest, a suggéré que les enjeux suivants fassent l’objet de discussions lors de potentiels États généraux sur les médias :
- les mécanismes de financement des médias, incluant les partenariats publics et privés;
- l’écoute des collectivités et de leurs histoires;
- le soutien à un journalisme canadien de qualité
- les connaissances médiatiques; et
- l’aide aux Autochtones du Canada qui souhaitent devenir des travailleurs des médias[35].
Dans un mémoire soumis au Comité, le Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique (CPSC-SCFP) a fait remarquer qu’il était urgent d’entamer une « grande réflexion sur les médias d’information[36] ». Les licenciements récents et les problèmes financiers auxquels les entreprises médiatiques sont aux prises justifient la nécessité de tenir des États généraux le plus rapidement possible. Cette initiative devrait contribuer à identifier des solutions pour protéger les nouvelles locales, l’intérêt public et « la diversité des médias[37] ». Le CPSC-SCFP estime que le gouvernement fédéral est le mieux placé pour organiser de tels États généraux et convaincre les gouvernements provinciaux d’y participer[38].
La journaliste Tara Henley s’est dit « très favorable[39] » à l’organisation d’États généraux sur les médias. Selon elle, il est essentiel que la population participe à un tel forum dans le but de « forger un journalisme axé sur l’intérêt public[40] ». Éric-Pierre Champagne de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec est également d’avis que des représentants syndicaux, des propriétaires d’entreprises médiatiques et des experts du secteur académique[41] doivent prendre part à cet exercice.
Tara Henley a ajouté que le gouvernement fédéral ne doit pas soutenir financièrement un tel forum. Selon elle, « l’intervention du gouvernement dans notre secteur d’activité a fait plus de tort qu’elle n’a fait avancer les intérêts de la presse canadienne[42] ».
L’animateur de radio John Gormley est également ouvert à la tenue d’États généraux sur les médias. Cependant, tout comme Mme Henley, M. Gormley est d’avis que le gouvernement fédéral ne doit pas assumer les coûts d’un tel exercice :
Le secteur canadien de l’information devrait‑il organiser une conférence ou des états généraux sur l’avenir des médias? Eh bien, pourquoi pas? Plus il y a de voix et de points de vue, mieux c’est. Mais demander au gouvernement de financer ces états généraux laisserait entendre que les contribuables canadiens devraient payer pour une énième séance de lamentations sur les médias. Je n’y suis pas favorable[43].
April Lindgren de la Toronto Metropolitan University School of Journalism a admis ne pas comprendre la nature des États généraux sur les médias. Elle a néanmoins reconnu qu’il s’agirait d’un exercice utile :
Je pense que cette discussion a un rôle à jouer, ne serait‑ce que pour aider les Canadiens à comprendre qu’ils ont de moins en moins accès aux nouvelles dont ils ont besoin pour participer efficacement au processus démocratique, s’engager auprès de leurs collectivités et naviguer dans la vie quotidienne[44].
Jen Gerson, cofondatrice de The Line, a affirmé que la tenue d’États généraux sur les médias pourrait être « une très bonne chose[45] ». Selon elle, il s’agit d’une occasion de « discuter des problèmes auxquels font face les médias d’information et du déficit démocratique qui découlera de cette crise[46] ». Elle a toutefois exprimé certaines réserves à propos d’un forum, notant qu’il n’était pas clair « pourquoi ce comité doit approuver cela » et avertissant que cela pourrait ne pas servir l’objectif visé :
Je crains que des états généraux ne servent pas vraiment de tribune pour discuter ouvertement de ces choses, mais qu’ils servent plutôt d’exercice de relations publiques pour rallier le public en faveur d’une conclusion préétablie. Si vous voulez tenir des états généraux pour obtenir du soutien ou construire le concept de soutien à l’égard du fait d’accorder toujours plus d’argent aux médias traditionnels, ce serait une perte de temps. Si c’est ce que tout le monde vise, alors pourquoi perdons-nous notre temps ici ? Vous n’avez qu’à faire un chèque[47].
Les entreprises médiatiques essentiellement numériques
Les entreprises médiatiques essentiellement numériques se composent de journalistes et de producteurs de nouvelles qui tirent profit des possibilités offertes par l’ère numérique pour produire et diffuser leur contenu médiatique sur Internet et différentes plateformes de diffusion en ligne.
Dans un mémoire déposé au Comité, Blacklock’s Reporter a expliqué que « les plateformes des médias sociaux ont créé au Canada un marché de 33 millions d’internautes[48] ». La présence de ces plateformes a permis à Blacklock’s Reporter de connaître du « succès[49] » et de bâtir une vaste clientèle.
Le Forum des politiques publiques (FPP) a également déposé un mémoire au Comité. Le FPP a mentionné que les « nouvelles formes de médias et de communications numériques[50] », telles que La Presse, Castanet, The Logic, Gonez Media, Canadaland et Village Media, constituent des formes prometteuses de production et de diffusion de l’information. Toutefois, il n’existe pas encore d’étude connue « sur la réussite réelle de ces entreprises et leur capacité à employer des journalistes[51] » selon le FPP.
La Loi sur les nouvelles en ligne et la Loi sur la diffusion en continue en ligne
Le 5 avril 2022, le projet de loi C-18, Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada a été déposé à la Chambre des communes. Son objectif était de rééquilibrer les rapports de force du marché de l’information numérique afin de garantir une rémunération équitable aux médias et aux journalistes canadiens. Le projet de loi C-18 a été étudié par le Comité permanent du patrimoine canadien de septembre à décembre 2022[52], puis par le Comité sénatorial permanent des transports et des communications du mois d’avril au mois de juin 2023. Il a reçu la sanction royale le 22 juin 2023.
Quelques témoins ont émis également des commentaires sur l’impact que la Loi sur la diffusion continue en ligne a eu sur la situation financière des médias canadiens. Cette loi, qui fut promulguée en avril 2023, a ajouté les entreprises de transmission ou de retransmission d’émissions par Internet, telles que Netflix et Spotify, en tant que catégorie distincte d’entreprises de radiodiffusion.
Selon Jen Gerson de The Line, ces deux projets de loi constituent « deux énormes leviers[53] » qui pourraient contrer l’effondrement du modèle d’affaires des médias. Pour Sarah Andrews des Amis des médias canadiens, ces lois permettent de « réagir à l’effet d’érosion que provoquent les entreprises technologiques étrangères sur nos nouvelles, sur notre culture et même sur notre santé démocratique[54] ». Toutefois, le CPSC-SCFP a écrit dans son mémoires que ces deux lois « n’ont pas encore donné les résultats escomptés[55] » sur le secteur des médias.
Dans son mémoire, le FPP a exprimé une opinion favorable envers la Loi sur les nouvelles en ligne. Le versement annuel de 100 millions de dollars par Google pour soutenir les médias canadiens constitue un pas dans la bonne direction selon le FPP. Cette somme « devrait permettre de financer l’emploi de journalistes canadiens à hauteur de 15 000 $ par an[56] ». Toutefois, l’organisme n’est pas certain que cette aide financière suffise à remettre les médias d’information canadiens « sur la voie de la viabilité[57] ».
D’autres témoins ont dressé un constat plus négatif sur la Loi sur les nouvelles en ligne. Elle aurait aggravé la crise des médias plutôt que l’atténuer. Selon Brandon Gonez, son entreprise a subi « une perte de revenus de plus de 40 %[58] » à la suite de la décision de Meta de supprimer les liens vers les nouvelles canadiennes sur Instagram et Facebook. Il a ajouté que la Loi sur les nouvelles en ligne et sa réglementation avaient « littéralement exploité et enchaîné[59] » des médias essentiellement numériques comme la sienne.
Tout comme M. Gonez, la journaliste Tara Henley est d’avis que l’intervention législative dans le secteur des médias a entraîné des difficultés « pour les médias indépendants et numériques[60] ». Pour sa part, la professeure Sue Gardner de l’Université McGill est d’avis que le projet de loi C-18 était « malavisé[61] » dès son introduction. La Loi sur les nouvelles en ligne constitue plutôt une taxe qui n’a pas apporté à l’industrie des médias l’aide financière qui était « initialement prévue[62] » à l’origine. De plus, il aurait été préférable de faire témoigner davantage de créateurs numériques « dans le cadre des audiences sur le projet de loi C‑11 et le projet de loi C‑18[63] » selon Mme Gardner.
Le radiodiffuseur public national
L’étude menée par le Comité fut l’occasion pour certains témoins d’exprimer des commentaires sur le mandat et le financement et le mandat de CBC/Radio-Canada.
Pierre Tousignant du Syndicat des travailleuses et travailleurs de Radio-Canada a insisté sur l’importance d’accorder à CBC/Radio-Canada un financement « suffisant, stable et récurrent[64] ». Il craint qu’une réduction des crédits parlementaires accordés aux services français de CBC/Radio-Canada mette en danger « la survie[65] » des francophones du Québec et du Canada. Selon M. Tousignant, des États généraux sur les médias seraient l’occasion « de réitérer l’engagement[66] » du gouvernement fédéral envers le radiodiffuseur public national.
Annick Forest de la Guilde canadienne des médias est également d’avis que CBC/Radio-Canada devrait recevoir « un financement adéquat, stable et à long terme[67] ». Ce point de vue est partagé par Sarah Andrews des Amis des médias canadiens, qui a proposé d’accorder « un modèle de financement durable[68] » basé entièrement sur des crédits parlementaires[69].
Pour Jen Gerson de The Line, le gouvernement fédéral pourrait utiliser CBC/Radio-Canada comme un « levier[70] » pour soutenir l’industrie de l’information au Canada. Le radiodiffuseur public national devrait axer sa programmation sur le service au public et le contenu local selon Mme Gerson :
Je pense qu’il faut repenser fondamentalement ce qu’est CBC/Radio-Canada et aussi l’imaginer comme un organe médiatique beaucoup plus axé sur le local qui ne serait pas en concurrence avec des organes privés et qui aurait, par exemple, des journalistes mandatés dans toutes les villes d’environ 100 000 habitants. Il pourrait s’agir d’une société d’État qui se considère moins comme un concurrent des radiodiffuseurs privés et davantage comme une bibliothèque publique de journalisme[71].
Cette position est partagée par les Amis des médias canadiens. Selon la directrice des relations gouvernementales de l’organisme, Sarah Andrews, une révision du mandat de la société d’État est nécessaire afin de le recentrer sur son objectif premier, soit celui de « rapporter les nouvelles à la population[72] », et tout particulièrement à l’échelle locale. Mme Andrews a ajouté que la réduction des effectifs annoncée à l’automne 2023 aurait pu être évitée. Elle estime que la société d’État souffre d’un « sous-financement chronique[73] » en comparaison aux autres pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) :
Parmi les 20 pays homologues de l’OCDE, le Canada se classe au 17e rang pour ce qui est du financement du radiodiffuseur public national. Cela représente environ 33 $ par personne par année[74].
Brandon Gonez de Gonez Media et la journaliste Tara Henley se sont exprimé en faveur de la présence d’un « radiodiffuseur public fort[75] ». Toutefois, M. Gonez est d’avis que l’atteinte d’un tel objectif ne doit pas se faire au détriment des entreprises qui prennent des risques pour établir « un nouvel écosystème[76] » médiatique. Tout comme M. Gonez, Mme Henley a affirmé que CBC/Radio-Canada doit cesser « de faire concurrence aux innovateurs numériques[77] ». Selon elle, le radiodiffuseur public national doit plutôt jouer un rôle accru en matière de formation et recentrer ses activités « sur les nouvelles locales, sur le journalisme d’enquête et sur les émissions délaissées par le marché[78] ».
L’aide financière publique aux médias
Le Comité a entendu des points de vue divers sur la pertinence d’accorder un financement public aux médias d’information. Certains témoins estiment que ce type de soutien est nécessaire pour traverser la crise des médias alors que d’autres craignent que le financement public compromettre l’indépendance des médias.
Les organisations syndicales qui ont participé aux travaux du Comité sont généralement en faveur d’une aide financière publique au secteur des médias. Dans son mémoire, la Guilde canadienne des médias a mentionné que ce financement était essentiel afin d’assurer « la production continue d’un contenu canadien de haute qualité sur diverses plateformes et dans divers formats[79] ». L’organisation syndicale a précisé que les fonds doivent provenir « de toutes les sources de revenus fédérales[80] ».
Pour Brent Jolly de l’Association canadienne des journalistes, le refus de soutenir financièrement les médias exprime « une incompréhension des aspects économiques du fonctionnement du journalisme[81] » au Canada. Il a ajouté que ce type de soutien existe ailleurs dans le monde, tels qu’au Royaume-Uni et en Scandinavie.
Lana Payne d’Unifor a affirmé qu’il n’y a pas de « mesure législative, fonds ou subvention[82] » qui permettront de résoudre la crise des médias. Mme Payne a admis que l’aide financière publique aux médias contribue à renforcer la perception dans la population que ce secteur est « un porte-parole du Cabinet du premier ministre[83] ». Néanmoins, elle a suggéré de « renouveler et d’élargir[84] » certaines politiques publiques, telles que l’Initiative de journalisme local et le crédit d’impôt pour la main-d’œuvre journalistique canadienne. Selon la présidente d’Unifor, l’achat de plus d’espaces publicitaires par les gouvernements est une autre option à considérer pour aider le secteur des médias.
Sylvain Chamberland d’Arsenal Media a soutenu lors de son témoignage que les fonds publics sont principalement dépensés dans « les grands centres urbains[85] » plutôt que dans les régions. M. Chamberland a donné l’exemple des activités de publicité du gouvernement fédéral qui devraient s’adresser à tous les Canadiens, y compris ceux qui vivent « dans les régions éloignées[86] ». Colette Brin du Centre d’étude sur les médias est également d’avis qu’une aide accrue doit être accordée « aux médias d’information locale et régionale, y compris les médias communautaires, autant écrits qu’audiovisuels[87] ».
April Lindgren de la Toronto Metropolitan University School of Journalism a rappelé qu’il n’y avait pas une « solution miracle évidente aux défis auxquels font face les médias d’information au Canada[88] ». Tout comme Mme Brin, Mme Lindgren est d’avis que le soutien des nouvelles locales est une priorité. Toutefois, elle n’est pas certaine que le gouvernement fédéral dispose de toute l’information nécessaire « pour prendre des décisions éclairées au sujet des politiques qu’il adopte[89] ». Selon Mme Lindgren, il est nécessaire d’en apprendre davantage sur les endroits au Canada où il y a des déserts d’information :
Nous ne savons pas vraiment où se trouvent les vrais déserts d’information, à savoir les endroits où il n’y a pas de nouvelles locales au Canada. Comment élaborera‑t‑on une bonne politique si nous ne savons pas vraiment où les besoins sont les plus grands?[90]
Brandon Gonez de Gonez Media s’est également dit « favorable à toutes mesures » susceptibles de soutenir le secteur de l’information[91] ». Il est notamment en faveur d’un « fonds d’investissement spécial[92] » pour les entrepreneurs qui prennent des risques, notamment ceux qui appartiennent à des groupes racisés.
D’autres témoins estiment qu’il est risqué d’aider un secteur d’activité qui, par définition, doit rendre les gouvernements imputables et être indépendant de toute influence extérieure.
Pour la journaliste Tara Henley, l’intervention du gouvernement dans le secteur des médias a fait plus de tort que de bien et n’a pas fait avancer « les intérêts de la presse canadienne[93] ». Selon elle, les subventions gouvernementales au secteur des médias propagent l’idée dans la population canadienne que les médias « sont achetés par le gouvernement[94] ».
Blacklock’s Reporter s’oppose fermement à toutes formes d’aide publique aux médias. Dans son mémoire, l’entreprise médiatique a tenu à rappeler un discours prononcé par la ministre du Patrimoine canadien en 2017 qui affirmait que le gouvernement fédéral n’avait pas « l’intention de soutenir les modèles qui ne sont plus viables pour l’industrie[95] ». Blacklock’s Reporter est alarmé par « l’ingérence fédérale dans les salles de presse[96] ». L’entreprise n’a formulé qu’une seule recommandation au Comité : « Tenez-vous loin des salles de nouvelles[97] ».
D’autres témoins prétendent que les politiques publiques pour soutenir le secteur des médias constituent un frein à l’innovation. Pour John Gormley, l’aide financière publique aux médias contribue à subventionner « l’inefficacité » et ne facilite pas « le changement nécessaire[98] ». De façon plus détaillée, M. Gormley a dit ceci :
Le financement gouvernemental n’incite pas les médias d’information à prendre de meilleures décisions. Il n’oblige pas les médias à garantir la viabilité des abonnements ou à créer des micro-abonnements pour que les consommateurs puissent payer au fur et à mesure, et il ne fait pas progresser le journalisme philanthropique, les modèles de financement des donateurs/membres ou les organismes sans but lucratif[99].
Pour Jen Gerson de The Line, les personnes chargées de réglementer les médias ne font pas « la différence entre le journalisme et l’exercice du journalisme[100] ». Avant tout, il est essentiel de bien comprendre pourquoi certaines entreprises médiatiques éprouvent des difficultés financières :
Si vous ne comprenez pas fondamentalement pourquoi les entreprises ont échoué, vous allez tomber dans le piège d’essayer d’injecter plus d’argent dans une industrie en difficulté ou un problème plutôt que de voir les choses du point de vue de l’intérêt public : comment pouvons-nous améliorer l’exercice du journalisme pour nous assurer de protéger l’intérêt public?[101]
Dans son mémoire, l’Institut Macdonald-Laurier a mentionné que le financement public des médias est « largement impopulaire[102] » dans la population. Ce type d’appui financier soulève « des questions « quant à l’indépendance de la presse[103] » en plus de miner « la perception du public quant à « la véracité des informations rapportées[104] ». De plus, le financement public privilégierait les médias traditionnels au détriment des entreprises médiatiques qui font preuve d’innovation :
Le régime de subventions crée également des conditions inégales : certains organes d’information, principalement les entreprises de médias traditionnelles, peuvent bénéficier d’une aide gouvernementale et d’autres non, ce qui entrave l’innovation et l’investissement privé dans le secteur, qui sont pourtant nécessaires[105].
Le FPP a rappelé l’importance d’assurer « une gouvernance indépendante[106] » du secteur des médias de manière à maintenir le gouvernement éloigné « de toute influence sur les décisions en matière d’information[107] ». Dans son mémoire, le FPP a expliqué que cette indépendance signifie « des formules de financement transparentes, des processus décisionnels indépendants et l’absence totale de pouvoir discrétionnaire permettant de déterminer quels médias reçoivent ou non de l’argent[108] ».
Quelques témoins privilégient l’utilisation des crédits d’impôt pour atténuer la crise des médias. Le paragraphe 248 (1) de la Loi de l’impôt sur le revenu permet à une organisation journalistique canadienne qualifiée (OJCQ) d’émettre des reçus de dons à des particuliers et à des entreprises. Les abonnés à des médias d’information numériques peuvent également réclamer le crédit d’impôt pour les abonnements aux nouvelles numériques.
Dans son mémoire, le FPP est d’avis que de permettre aux organisations médiatiques d’émettre des reçus fiscaux à des fins de bienfaisance représente une « politique judicieuse[109] ». Cependant, le FPP a suggéré de revoir les critères pour déterminer les organisations journalistiques canadiennes qui sont admissibles à recevoir le crédit d’impôt pour la main-d’œuvre journalistique canadienne. Le FPP a également proposé de majorer de 15 % à 50 % le crédit d’impôt pour les abonnements aux nouvelles numériques[110].
Shree Paradkar du Toronto Star Newspapers Limited est également favorable à l’utilisation de « modèles sans but lucratif aux entreprises médiatiques[111] » afin de résoudre les difficultés financières de ce secteur. De son côté, la journaliste Tara Henley a mentionné que des médias d’information numériques, tels que The Hub, ont réussi « à monétiser le travail journalistique[112] ». Le modèle caritatif retenu par The Narwhal News Society et l’Investigative Journalism Foundation sont d’autres modèles qui méritent d’être étudiés selon Brent Jolly de l’Association canadienne des journalistes[113].
La concentration de la propriété médiatique
La concentration de la propriété médiatique désigne « le niveau de présence d’une entité dans un marché donné, soit par le nombre de ses moyens de diffusion, soit par la part de marché qu’elle détient en termes de revenus ou d’auditoire[114] ». Des témoins sont d’avis que le gouvernement fédéral doit intervenir pour limiter les impacts négatifs de cette concentration.
Pour Jen Gerson de The Line, il faut mettre un terme à « l’oligopole dans le secteur des médias[115] ». Mme Gerson a suggéré que les entreprises de radiodiffusion soient obligées de réinvestir une partie de leurs profits dans le journalisme à titre de condition de licence.
Shree Paradkar du Toronto Star Newspapers Limited estime également qu’il est possible d’établir un lien entre la confiance du public envers le journalisme et « le manque perçu de diversité[116] » dans les médias. Pour corriger la situation, Annick Forest de la Guilde canadienne des médias a suggéré d’examiner « tous les moyens par lesquels le gouvernement peut soutenir[117] » la diversité dans les médias.
April Lindgren du Toronto Metropolitan University School of Journalism ne croit pas qu’il soit possible « de démanteler » les fusions actuelles au sein de l’industrie canadienne des médias. Mme Lindgren privilégie plutôt la création d’un « environnement propice aux concurrents viables et aux nouvelles entreprises du secteur numérique[118] ».
Lana Payne d’Unifor est d’avis que « les entreprises du secteur des médias jouissent de privilèges spéciaux dans notre pays[119] ». Selon Mme Payne, ces entreprises « ont presque un monopole dans certains domaines, comme dans le secteur des télécommunications[120] ».
Pour Sarah Andrews des Amis des médias canadiens, les acquisitions et de fusions dans l’industrie canadienne des médias confèrent aux entreprises médiatiques privées « une position dominante dans le domaine de la radiodiffusion de l’information[121] ». Selon Mme Andrews, le fait que des entreprises telles que Bell Canada Entreprises et Québecor dominent certains marchés les soustrait « complètement à leur obligation de fournir des services d’information conformément à la réglementation en vigueur[122] ».
B. Les enjeux relatifs à la profession de journaliste et au contenu médiatique
La nouvelle génération de journalistes
Des témoins sont préoccupés quant à l’avenir de la profession de journaliste et l’intérêt des jeunes générations à poursuivre une carrière dans ce domaine.
Selon Colette Brin du Centre d’études sur les médias, les étudiants en journalisme sont « intéressés par les transformations de l’environnement médiatique numérique[123] ». Exposés tôt aux technologies numériques, ils sont en mesure de proposer « des solutions créatives[124] » sur la pratique du journalisme sur les plateformes numériques.
Pour Jaky Fortin du Cégep de Jonquière, « il est important de soutenir l’éducation aux médias[125] » et de consulter les jeunes afin « qu’ils proposent de nouvelles idées et de nouvelles solutions à l’industrie[126] ».
Tant Mme Brin[127] que M. Fortin[128] ont affirmé que les étudiants en journalisme sont inquiets quant aux perspectives d’emploi dans ce secteur. Ils s’inquiètent notamment d’avoir accès à des programmes de stages. Pour remédier à la situation, Mme Brin a suggéré de développer « des programmes de formation continue et des stages rémunérés[129] » à leur intention. À ce sujet, April Lindgren du Toronto Metropolitan University School of Journalism a soutenu que le programme Initiative de journalisme local avait atteint les résultats escomptés en permettant « à près de 1 200 journalistes de trouver un emploi dans des organismes de presse partout au pays[130] ».
Selon Brent Jolly de l’Association canadienne des journalistes, les faibles perspectives d’emploi incitent de jeunes journalistes à orienter leur carrière dans le domaine des relations publiques. Cet « exode des cerveaux[131] » aggrave le déficit démocratique selon M. Jolly. L’absence de sécurité d’emploi est un autre facteur mentionné par la Guilde canadienne des médias dans son mémoire qui incite « la prochaine génération[132] » de journalistes à choisir une autre profession.
La journaliste Tara Henley a établi un lien entre l’intérêt des jeunes à faire carrière dans le journalisme et la concentration des médias. Selon Mme Henley, les jeunes journalistes sont moins enclins « à faire des stages ou à occuper des emplois mal rémunérés » dans les villes où le coût de la vie est élevé et les médias « sont concentrés[133] ». Elle a suggéré de décentraliser géographiquement la profession par l’entremise du télétravail. L’obtention d’un diplôme universitaire ne devrait pas non plus constituer une obligation pour pratiquer le journalisme. Mme Henley est d’avis que des allègements à cet égard permettraient d’élargir « le bassin de talents[134] » et de « multiplier la diversité idéologique[135] ».
La représentation des groupes minoritaires dans le journalisme
Des témoins ont abordé la question de la représentation des groupes minoritaires dans le journalisme. Brandon Gonez de Gonez Media inc. est d’avis que le contenu médiatique devrait davantage « refléter la population canadienne dans toute sa diversité[136] ». Il existerait notamment des lacunes à corriger dans la représentation « des récits et des témoignages[137] ».
Éric-Pierre Champagne de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec a exprimé un point de vue similaire à celui de M. Gonez. Selon M. Champagne, les médias traditionnels « ont parfois manqué à leur rôle de mieux représenter certaines voix qui sont nouvelles, autant au Québec qu’au Canada[138] ». Il a insisté sur l’importance d’entendre « les voix des différentes communautés[139] » dans les médias.
Shree Paradkar du Toronto Star Newspapers Limited est également d’avis que le secteur des médias avait encore des progrès à accomplir pour être représentatif de la population canadienne :
Le dernier sondage de l’Association canadienne des journalistes montre que les journalistes au Canada sont en très grande majorité blancs, à 75,5 %. C’est pire à l’échelon des superviseurs, qui sont à 84 % blancs. De plus, les journalistes noirs sont plus susceptibles de travailler à temps partiel ou comme stagiaires plutôt qu’à temps plein ou comme superviseurs. Bien trop souvent, les salles de nouvelles ne comptent aucun journaliste autochtone. Enfin, bien que plus de la moitié des effectifs se composent de femmes, elles sont à plus de 60 % plus susceptibles d’occuper un poste à temps partiel[140].
Mme Paradkar a ajouté que les femmes et les journalistes issus de groupes minoritaires sont parfois « réduits au silence[141] ». Ces tactiques d’intimidation contribuent à limiter « la liberté d’expression et la diversité des points de vue[142] » selon la chroniqueuse au Toronto Star.
Le harcèlement et l’intimidation
Des témoins ont affirmé que les journalistes sont parfois la cible de harcèlement et d’intimidation dans l’exercice de leurs fonctions. Ces attaques peuvent causer des préjudices à ceux et celles qui en sont victimes. Pour Brent Jolly de l’Association canadienne des journalistes, les journalistes doivent accomplir leur travail « dans un monde de plus en plus hostile[143] », ce qui peut leur causer des souffrances psychologiques selon M. Jolly.
Éric-Pierre Champagne de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec et Lana Payne d’Unifor[144] ont également affirmé que les journalistes sont de plus en plus confrontés au harcèlement et à la haine. Selon M. Champagne, ce type d’attaque exerce une pression « énorme[145] » sur les journalistes. De son côté, Mme Payne a rappelé l’importance que les journalistes puissent exercer leur travail « dans un environnement exempt de harcèlement[146] ».
Pour Shree Paradkar du Toronto Star Newspapers Limited, les femmes journalistes et ceux et celles issus de groupes minoritaires sont « l’objet de harcèlement, de menaces et d’abus de façon disproportionnée[147] ». Il peut même arriver que ces attaques soient lancées par d’autres journalistes, selon Mme Paradkar.
La fiabilité de l’information et la confiance du public envers les médias
Au cours de leur témoignage, plusieurs témoins ont insisté sur la nécessité que l’information diffusée dans les médias soit fiable, pertinente et de qualité. Certains d’entre eux craignent que la prolifération de la désinformation et de la mésinformation en vienne à miner la confiance du public envers les médias.
Selon Annick Forest de la Guilde canadienne des médias, « la mésinformation et la désinformation posent de sérieux défis à l’intégrité et à la crédibilité des médias canadiens[148] ». Ils constituent des menaces qui « perturbent le discours démocratique et sapent la crédibilité de sources d’information légitimes[149] ». Pour lutter contre ce phénomène, la Guilde canadienne des médias recommande dans son mémoire que des États généraux sur les médias examinent « la manière d’imposer une plus grande responsabilité aux créateurs et aux diffuseurs de désinformation et de mésinformation[150] ».
Pour Colette Brin du Centre d’études sur les médias, la désinformation est un « symptôme[151] » de la crise qui sévit dans les médias. Selon la professeure de l’Université Laval, un « écosystème médiatique d’information faible[152] » est propice à la propagation de ce phénomène. De son côté, Jaky Fortin de l’École supérieure en art et technologie des médias du Cégep de Jonquière[153] a soutenu que « l’éducation aux médias[154] » constitue un outil pour contrer la désinformation.
En se basant sur un rapport produit par le Forum économique mondial rendu public en janvier 2024[155], Sylvain Chamberland d’Arsenal Media a mentionné que la désinformation est un des risques « les plus importants pour la planète au cours des prochaines années[156] ».
Pour Lana Payne d’Unifor, les fausses nouvelles « ont infesté le tissu de notre société, semant la méfiance à l’égard des médias, du gouvernement et des institutions[157] ».
D’autres facteurs ont été invoqués par les témoins pour expliquer la perte de confiance du public envers les médias. Sue Gardner a affirmé qu’un peu plus « de 50 % des adultes au pays ne font pas confiance aux médias d’information[158] ». La multiplicité des sources d’information et les changements dans les modes de consommation des contenus médiatiques sont d’autres facteurs explicatifs de cette perte de confiance selon Mme Gardner[159].
Pour John Gormley, les médias traditionnels sont partiellement responsables de la perte de confiance de la population en remplaçant des principes journalistiques reconnus par le journalisme d’opinion :
Les médias traditionnels et leurs services de communications électroniques ont délibérément brouillé ces distinctions et décidé que le journalisme d’opinion remplacerait les principes que sont l’équilibre, le caractère factuel, l’impartialité, la mise à distance des idéologies et des préjugés tout comme des opinions et intérêts personnels[160].
M. Gormley reproche aux médias d’être davantage préoccupés à défendre des causes plutôt que « de les examiner et d’en rendre compte[161] ». Brandon Gonez de Gonez Media inc. est également d’avis que les médias traditionnels doivent « prendre leur part de responsabilité » quant à cette perte de confiance. Il a également établi un lien entre la fin de la disponibilité du contenu des médias d’information sur Google[162] et Meta et l’amplification de la désinformation à la suite de la promulgation de la Loi sur les nouvelles en ligne[163].
Selon un sondage commandé par les Amis des médias canadiens « près de 80 % des Canadiens estiment qu’il est de plus en plus difficile de savoir ce qui est vrai et ce qui ne l’est pas[164] ». Selon la directrice des Relations gouvernementales de l’organisme, les licenciements dans le secteur des médias expliquent pourquoi le « le journalisme rigoureux et digne de confiance[165] » a été remplacé par la désinformation.
La publicité programmatique est un autre facteur qui explique la montée de la désinformation selon Mme Andrews. La publicité programmatique est une forme de publicité qui cible « les clients individuellement au moyen de témoins de connexion, de codes d’identification d’appareils et de logiciels algorithmiques[166] ». En cherchant à accroître le nombre de clics pour augmenter les revenus publicitaires, la publicité programmatique a contribué à financer la désinformation et la mésinformation, selon Mme Andrews[167].
Pour d’autres témoins, le financement public accordé aux médias a contribué à ébranler la confiance du public dans l’information. La journaliste Tara Henley a expliqué qu’il s’agissait de vases communicants qui sont reliés entre eux :
Pas de confiance, pas d’auditoire. Pas d’auditoire, pas de revenus. Pas de revenus, pas d’avenir pour les médias canadiens. Pas de médias, pas d’électorat informé et pas de démocratie effective[168].
Mme Henley a rappelé que les médias ont « le devoir de se distancer[169] » du pouvoir qu’ils doivent tenir responsable. Le fait d’accepter des fonds publics sème des doutes quant à leur indépendance et leur crédibilité :
Les médias tirent leur crédibilité de leur indépendance du pouvoir, notamment du pouvoir gouvernemental, et le maintien de la confiance de la population à cet égard est d’une importance capitale, tout autant que le maintien de cette indépendance. Nous devons tenir compte de la façon dont les gens perçoivent le financement gouvernemental et comprendre que cela risque de miner la confiance au moment où, malheureusement, la presse canadienne a le plus besoin de la rétablir[170].
L’Institut Macdonald-Laurier est également d’avis que « la confiance du public est le principal élément dont les organismes de presse ont besoin pour survivre[171] ». Ce centre de recherches sur les politiques publiques invite les entreprises médiatiques à ne pas accepter « les subventions salariales actuellement proposées par le gouvernement et l’industrie[172] » pour gagner la confiance du public. Blacklock’s Reporter a exprimé un point de vue similaire en mentionnant dans un mémoire que « les contribuables se méfient des médias subventionnés[173] ».
Conclusion et recommandations
L’étude menée par le Comité portait sur la pertinence de tenir des états généraux sur les médias et de l’appui du gouvernement à une telle initiative. Les témoins ont profité de la tribune qui leur était offerte pour identifier certains enjeux spécifiques auxquels le secteur canadien des médias étaient confrontés. Ce rapport présente une synthèse des thèmes soulevés par les témoins qui pourraient être abordés dans le cadre de ces états généraux. À la lumière des témoignages entendus, le Comité formule la recommandation suivante :
Recommandation 1
Le Comité recommande que le ministère du Patrimoine canadien collabore avec les différents intervenants du secteur canadien des médias afin que soient organisés des États généraux sur les médias. Le Comité réitère l’importance que l’appui gouvernemental à cette initiative se fasse dans le respect des principes de la liberté de la presse et de l’indépendance journalistique. Le Comité rappelle qu’il ne revient pas au gouvernement du Canada d’initier et d’organiser les États généraux, mais simplement d’en faire la recommandation.
Recommandation 2
Que le gouvernement du Canada mette en place des mesures de soutien au journalisme de proximité.
Recommandation 3
Que le gouvernement du Canada effectue une collecte de données dans le but de cerner l’ampleur du phénomène des désert médiatiques afin de mettre en place des mesures pour les atténuer.
Recommandation 4
Que le gouvernement du Canada mette en place des mesures afin de rendre la profession de journaliste plus sécuritaire, plus attrayante et plus diversifiée, ainsi que d’augmenter le taux de rétention au sein de cette profession.
Recommandation 5
Que le gouvernement du Canada mette en place une vaste campagne d’information et de sensibilisation sur les dangers que représentent les contenus de désinformation ainsi que sur les façons de la détecter et de s’en protéger. Que la littéracie médiatique soit promue dès le plus jeune âge.
Recommandation 6
Que le gouvernement du Canada favorise la transition numérique des médias traditionnels et la création de médias d’information numériques de qualité.
[1] Comité permanent du patrimoine canadien de la Chambre des communes (CHPC), Procès-verbal, 5 décembre 2023.
[2] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1620 (Colette Brin, directrice, Centre d’études sur les médias, et professeure titulaire, Département d’information et de communication, Université Laval).
[3] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1550 (Sylvain Chamberland, président-directeur général, Arsenal Media).
[4] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1625 (Jaky Fortin, directeur adjoint aux études et à la vie étudiante, École supérieure en art et technologie des médias, Cégep de Jonquière).
[5] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1630 (Annick Forest, présidente du comité exécutif national de la Guilde canadienne des médias).
[6] Ibid., 1645.
[7] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1620 (Colette Brin).
[8] Ibid.
[9] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1625 (Jaky Fortin).
[10] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1600 (Pierre Tousignant, président, Syndicat des travailleuses et travailleurs de Radio-Canada (FNCC-CSN)).
[11] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1615 (April Lindgren, professeure, Toronto Metropolitan University School of Journalism, à titre personnel).
[12] Ibid.
[13] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1650 (Éric-Pierre Champagne, président, Fédération professionnelle des journalistes du Québec).
[14] Ibid., 1550.
[15] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1535 (Shree Paradkar, journaliste, Toronto Star Newspapers Limited, à titre personnel).
[16] Ibid.
[17] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1635 (Sarah Andrews, directrice, Relations gouvernementales et avec les médias, Les Amis des médias canadiens).
[18] Guilde canadienne des médias, Mémoire au Comité permanent du patrimoine canadien sur les États généraux sur les médias, 13 février 2024, p. 3.
[19] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1635 (Sarah Andrews).
[20] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1615 (Tara Henley, journaliste, auteure, baladodiffuseuse, à titre personnel).
[21] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1700 (Brandon Gonez, directeur général, Gonez Media Inc.).
[22] Ibid.
[23] Ibid., 1615.
[24] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1630 (Sylvain Chamberland).
[25] Ibid., 1640.
[26] Ibid., 1630.
[27] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1610 (John Gormley, avocat, animateur radio à la retraite et ancien député, à titre personnel).
[28] Ibid.
[29] Ibid., 1705.
[30] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1605 (Sue Gardner, Sue Gardner (professeure de pratique McConnell (2021–22), École de politiques publiques Max Bell, McGill University, à titre personnel).
[31] Ibid.
[32] Guilde canadienne des médias, Mémoire au Comité permanent du patrimoine canadien sur les États généraux sur les médias, 13 février 2024, p. 3 à 4.
[33] Ibid., p. 4.
[34] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1630 (Brent Jolly, président, Association canadienne des journalistes).
[35] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1635 (Annick Forest).
[36] Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique, Mémoire du CPSC-SCFP, 27 février 2024, p. 3.
[37] Ibid., p. 8.
[38] Ibid., p. 5.
[39] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1615 (Tara Henley).
[40] Ibid.
[41] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1650 (Éric-Pierre Champagne).
[42] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1640 (Tara Henley).
[43] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1610 (John Gormley).
[44] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1615 (April Lindgren).
[45] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1610 (Jen Gerson, cofondatrice de The Line et journaliste indépendante, à titre personnel).
[46] Ibid.
[47] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1610 (Jen Gerson).
[48] Blacklock’s Reporter, Motion du Bloc québécois sur la tenue d’états généraux sur les médias, 19 février 2024, p. 1.
[49] Ibid.
[50] Forum des politiques publiques, Forum national pour les médias, 14 mars 2024, p. 3.
[51] Ibid.
[52] CHPC, Projet de loi C-18 Loi concernant les plateformes de communication en ligne rendant disponible du contenu de nouvelles aux personnes se trouvant au Canada, 2022.
[53] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1640 (Jen Gerson).
[54] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1635 (Sarah Andrews).
[55] Conseil provincial du secteur des communications du Syndicat canadien de la fonction publique, Mémoire du CPSC-SCFP, 27 février 2024, p. 8.
[56] Forum des politiques publiques, Forum national pour les médias, 14 mars 2024, p. 6.
[57] Ibid.
[58] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1555 (Brandon Gonez).
[59] Ibid.
[60] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1615 (Tara Henley).
[61] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1725 (Sue Gardner).
[62] Ibid.
[63] Ibid., 1605.
[64] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1600 (Pierre Tousignant).
[65] Ibid., 1705.
[66] Ibid., 1600.
[67] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1620 (Annick Forest).
[68] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1635 (Sarah Andrews).
[69] Ibid., 1650.
[70] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1640 (Jen Gerson).
[71] Ibid.
[72] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1705 (Sarah Andrews).
[73] Ibid., 1700.
[74] Ibid.
[75] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1655 (Brandon Gonez).
[76] Ibid.
[77] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1645 (Tara Henley).
[78] Ibid.
[79] Guilde canadienne des médias, Mémoire au Comité permanent du patrimoine canadien sur les États généraux sur les médias, 13 février 2024, p. 4.
[80] Ibid., p. 5.
[81] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1650 (Brent Jolly).
[82] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1605 (Lana Payne, présidente nationale, Unifor).
[83] Ibid.
[84] Ibid.
[85] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1545 (Sylvain Chamberland).
[86] Ibid., 1640.
[87] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1625 (Colette Brin).
[88] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1615 (April Lindgren).
[89] Ibid.
[90] Ibid.
[91] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1615 (Brandon Gonez).
[92] Ibid.
[93] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1615 (Tara Henley).
[94] Ibid.
[95] Blacklock’s Reporter, Motion du Bloc québécois sur la tenue d’états généraux sur les médias, 19 février 2024, p. 1. Voir aussi : ministère du Patrimoine canadien, Lancement de Canada créatif - l’honorable Mélanie Joly, ministre du Patrimoine canadien, 28 septembre 2017.
[96] Ibid.
[97] Ibid., p. 4.
[98] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1610 (John Gormley).
[99] Ibid.
[100] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1610 (Jen Gerson).
[101] Ibid.
[102] Institut Macdonald-Laurier, États généraux sur les médias, 25 juin 2024, p. 4.
[103] Ibid.
[104] Ibid.
[105] Ibid.
[106] Forum des politiques publiques, Forum national pour les médias, 14 mars 2024, p. 4.
[107] Ibid.
[108] Ibid.
[109] Ibid., p. 5.
[110] Ibid.
[111] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1535 (Shree Paradkar).
[112] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1640 (Tara Henley).
[113] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1710 (Brent Jolly).
[114] Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes, Avis d’audience publique de radiodiffusion CRTC 2007-5, 13 avril 2007, par. 25.
[115] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1700 (Jen Gerson).
[116] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1535 (Shree Paradkar).
[117] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1700 (Annick Forest).
[118] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1700 (April Lindgren).
[119] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1635 (Lana Payne).
[120] Ibid.
[121] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1700 (Sarah Andrews).
[122] Ibid.
[123] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1655 (Colette Brin).
[124] Ibid.
[125] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1650 (Jaky Fortin).
[126] Ibid., 1655.
[127] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1625 (Colette Brin).
[128] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1705 (Jaky Fortin).
[129] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1625 (Colette Brin).
[130] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1705 (April Lindgren).
[131] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1710 (Brent Jolly).
[132] Guilde canadienne des médias, Mémoire au Comité permanent du patrimoine canadien sur les États généraux sur les médias, 13 février 2024, p. 5.
[133] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1615 (Tara Henley).
[134] Ibid., 1640.
[135] Ibid.
[136] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1615 (Brandon Gonez.
[137] Ibid.
[138] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1650 (Éric-Pierre Champagne).
[139] Ibid.
[140] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1535 (Shree Paradkar).
[141] Ibid., 1655.
[142] Ibid., 1540.
[143] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1630 (Brent Jolly).
[144] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1605 (Lana Payne).
[145] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1550 (Éric-Pierre Champagne).
[146] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1610 (Lana Payne).
[147] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1540 (Shree Paradkar).
[148] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1630 (Annick Forest).
[149] Ibid.
[150] Guilde canadienne des médias, Mémoire au Comité permanent du patrimoine canadien sur les États généraux sur les médias, 13 février 2024, p. 6.
[151] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1710 (Colette Brin).
[152] Ibid.
[153] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1655 (Jaky Fortin).
[154] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1710 (Colette Brin).
[155] World Economic Forum, The Global Risks Report 2024, 19e Edition, Janvier 2024, p. 11. [disponible en anglais seulement]. La désinformation et la mésinformation constituent le risque numéro pour les deux prochaines années selon ce rapport.
[156] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1550 (Sylvain Chamberland).
[157] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1605 (Lana Payne).
[158] CHPC, Témoignages, 13 février 2024, 1720 (Sue Gardner).
[159] Ibid.
[160] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1610 (John Gormley).
[161] Ibid.
[162] En novembre 2023, le ministère du Patrimoine canadien et Google ont conclu un accord en vertu duquel l’entreprise verserait 100 millions de dollars par an, indexés à l’inflation, aux entreprises de presse du Canada.
[163] CHPC, Témoignages, 15 février 2024, 1615 (Brandon Gonez).
[164] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1635 (Sarah Andrews).
[165] Ibid.
[166] Service canadien du renseignement et de sécurité, Qui dit quoi ? Défis sécuritaires découlant de la désinformation aujourd’hui. Points saillants de l’atelier, février 2018, p. 115.
[167] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1655 (Sarah Andrews).
[168] CHPC, Témoignages, 27 février 2024, 1620 (Tara Henley).
[169] Ibid., 1615.
[170] Ibid.
[171] Institut Macdonald-Laurier, États généraux sur les médias, 25 juin 2024, p. 2.
[172] Ibid., p. 5.
[173] Blacklock’s Reporter, Motion du Bloc québécois sur la tenue d’états généraux sur les médias, 19 février 2024, p. 4.