Passer au contenu

CIIT Rapport du Comité

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

PDF

Barrières non tarifaires au commerce : Certaines perspectives canadiennes

 

Introduction

Lorsqu’il est question d’obstacles qui nuisent au commerce international, les observateurs se concentrent souvent sur les dispositions tarifaires et non tarifaires des accords commerciaux. Cette dernière expression peut faire référence aux « barrières non tarifaires » (BNT) ou aux « mesures non tarifaires » (MNT), voire aux deux à la fois. Selon l’Organisation mondiale du commerce (OMC), les « obstacles non tarifaires » sont des mesures autres que les droits de douane qui visent à protéger la production nationale. De son côté, la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement définit les « mesures non tarifaires » comme des mesures de politique autres que les droits de douane qui peuvent modifier les quantités échangées, les prix ou les deux, et avoir une incidence sur le commerce des marchandises. Certains estiment que les BNT sont équivalentes aux MNT, alors que d’autres considèrent que la notion de MNT englobe les BNT ainsi qu’un éventail d’autres mesures relatives au commerce[1]. À titre d’exemple, selon un rapport de la Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement publié en 2013, le terme BNT désignerait habituellement les MNT qui sont discriminatoires ou protectionnistes, ce qui laisse entendre que certaines MNT ne sont pas des BNT.

Les BNT comprennent certaines mesures sanitaires et phytosanitaires (SPS) ainsi que quelques mesures qui représentent des obstacles techniques au commerce (OTC). Les mesures SPS protègent la santé et la vie des personnes, des animaux ou des végétaux. Par exemple, elles peuvent imposer des restrictions sur les substances, garantir la salubrité des aliments, empêcher la propagation de maladies ou de parasites, ou encore à imposer des exigences en matière d’évaluation de la conformité relatives à la sécurité des aliments, comme la certification, les essais, l’inspection et la mise en quarantaine. Les OTC sont des mesures concernant les caractéristiques des produits, comme les spécifications techniques et les exigences de qualité, les mesures telles que l’étiquetage et l’emballage visant à assurer la protection de l’environnement et de la sécurité des consommateurs, et toutes les mesures d’évaluation de la conformité relatives aux exigences techniques, dont la certification, les essais et l’inspection.

Le 25 novembre 2022, le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes (le Comité) a adopté une motion visant à entreprendre une étude sur l’incidence des BNT sur le Canada ainsi que sur les dispositions relatives à celles-ci qui figurent dans les accords commerciaux internationaux actuels ou qui pourraient être intégrées à de futurs accords. Au cours de six réunions ayant eu lieu du 27 avril au 1er juin 2023, le Comité a reçu à titre de témoins des représentants de 16 associations commerciales; de trois sociétés canadiennes; de trois groupes de réflexion; et d’une organisation de la société civile. Par ailleurs, trois individus ont comparu à titre personnel et le Comité a reçu deux mémoires : l’un provenant de Médicaments novateurs Canada et l’autre ayant été soumis par Cereals Canada.

Le présent rapport résume les observations sur les BNT formulées dans les témoignages et les mémoires. Plus précisément, la première section comporte des perspectives générales sur les BNT et les accords commerciaux. Les quatre sections suivantes mettent en lumière les conséquences des BNT sur les secteurs du bœuf, du porc et des produits laitiers; l’industrie du canola, des céréales et des légumineuses; la fabrication de produits, principalement les voitures, les pièces automobiles et le matériel aérospatial; ainsi que les petites et moyennes entreprises. Les sections suivantes expliquent les mesures que le gouvernement du Canada devrait mettre en œuvre selon les témoins : négocier les accords commerciaux; faire respecter les dispositions pertinentes des accords de commerce; et renforcer la coopération sur le plan de la réglementation ainsi que la collaboration internationale. La dernière section fait état des observations et des recommandations du Comité.

Des témoins ont parlé des mesures nationales qu’un certain nombre d’observateurs ne considèrent pas comme des BNT, mais qui peuvent limiter les possibilités dont peuvent se prévaloir les entreprises canadiennes. La réglementation nationale en matière d’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), plus souvent appelée « maladie de la vache folle », en est un exemple. L’Association canadienne des bovins a indiqué que les mesures mises en place par le gouvernement du Canada en 2003 afin de minimiser le risque d’exposition et de propagation de l’ESB sont toujours en vigueur malgré le fait que l’Organisation mondiale de la santé animale ait déclaré que le risque d’ESB au Canada est négligeable. D’après l’Association canadienne des bovins, le coût pour les producteurs canadiens de viande bovine de se conformer aux mesures telles que le retrait de matières à risque spécifié relatif aux bovins abattus dans le pays entraîne un désavantage concurrentiel pour le secteur national du bœuf par rapport à ses homologues aux pays qui n’ont pas adopté ou n’appliquent pas de mesures similaires. Selon l’Association nationale des engraisseurs de bovins, il en coûte aux producteurs de bœuf canadien environ 167 $ par tonne métrique pour l’élimination de ces matières. L’Association canadienne des bovins a souligné que le Japon, qui est le deuxième marché d’exportation de bœuf du Canada en importance, a éliminé toutes les restrictions nationales en matière d’ESB.

Les témoins ont aussi affirmé que les contingents tarifaires sur les produits laitiers, qui sont soumis à un examen depuis 2019, font partie des mesures qui limitent les possibilités pour les entreprises canadiennes. D’après le Conseil canadien des fromages internationaux, les politiques nationales d’attribution et de gestion des contingents tarifaires créent de l’incertitude pour certaines entreprises canadiennes en plus d’avoir des répercussions sur les possibilités d’établir des relations à long terme avec les fournisseurs ainsi que sur l’importation de certains produits laitiers. Plus précisément, le Conseil canadien des fromages internationaux a souligné que les contingents tarifaires relatifs aux fromages accordés aux importateurs canadiens dans certains accords commerciaux varient grandement d’une année à l’autre. Le Conseil préconise donc l’instauration d’un système selon lequel les importateurs qui n’utilisent pas les contingents accordés au cours d’une année donnée devraient renoncer à ceux-ci pour l’année suivante. Tree of Life Canada, un distributeur de produits alimentaires, a déclaré que les politiques d’attribution et d’administration des contingents tarifaires font en sorte qu’il n’a plus accès au contingent des crèmes de spécialité de l’OMC depuis 2016. En outre, Tree of Life Canada a expliqué qu’il a bénéficié d’une autorisation supplémentaire pour l’importation de crème accordée par le ministre des Affaires étrangères pour la période de 2016 à 2019. Toutefois, comme cette autorisation n’a pas été renouvelée, l’entreprise n’a pas pu importer de crèmes de spécialité sans droits de douane entre 2019 et 2021. Enfin, Mondo Foods Co. Ltd., un distributeur de produits alimentaires, a mis l’accent sur les contingents tarifaires du Canada pour les importations de fromage en provenance de l’Union européenne, qui sont attribués à deux groupes : les fabricants de fromage, ainsi que les détaillants et distributeurs de fromage. Mondo Foods Co. Ltd. a expliqué que les contingents tarifaires sont attribués chaque année sur la base de la part de marché, le dernier groupe recevant un contingent tarifaire plus élevé, et a appelé à une plus grande transparence dans l’attribution des contingents tarifaires pour le fromage afin d’assurer une continuité « raisonnable » des montants des contingents d’une année à l’autre pour aider les entreprises à respecter leurs « engagements contractuels » et à garantir une « viabilité soutenue ».

Le présent rapport ne fait pas état des commentaires d’autres témoins qui n’étaient pas directement axés sur les BNT, y compris celles liées aux modifications des lois canadiennes sur les brevets, qui ont été abordées par Médicaments novateurs Canada. Par ailleurs, un certain nombre de témoins, dont la Chambre de commerce du Canada, la Canadian Canola Growers Association et Ian Laird, ont fait des commentaires sur le règlement des différends et les mécanismes qui s’y rattachent, principalement en ce qui concerne l’Organe d’appel de l’OMC. Enfin, des témoins ont donné leur avis sur d’autres défis liés au commerce, notamment les difficultés pour les petites et moyennes entreprises à obtenir du financement commercial et les préoccupations liées aux droits de propriété intellectuelle des femmes autochtones propriétaires d’entreprises. Ils ont également évoqué les chaînes d’approvisionnement, l’intelligence artificielle et le financement public des services de garde d’enfants. Ces sujets ont été soulevés notamment par l’Organization of Women in International Trade Ottawa et le Canadian American Business Council. L’Association nucléaire canadienne a quant à elle mis l’accent sur des accords de coopération nucléaire et les définitions de l’énergie « propre » ou « verte » utilisées dans les accords commerciaux internationaux.

En ce qui concerne un certain nombre des questions commerciales abordées par les témoins qui ne sont pas liées aux BNT et qui ne sont donc pas traitées dans le présent rapport, le Comité renvoie à certains de ses travaux antérieurs, comme les audiences tenues récemment dans le cadre de l’étude du projet de loi C-282, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (gestion de l’offre); le rapport publié en juin 2021 intitulé La réforme de l’Organisation mondiale du commerce : Le point de vue et les priorités du Canada; et le rapport publié en juin 2019 intitulé Activités des petites et moyennes entreprises canadiennes dans le commerce international : L’aide du gouvernement fédéral.

Barrières non tarifaires et accords commerciaux : Observations générales

Le Centre canadien de politiques alternatives a affirmé que les questions relatives aux BNT « sont vieilles de plusieurs décennies et aucun accord commercial signé par le Canada n’est parvenu à les résoudre », tandis que Pulse Canada a souligné que les sociétés canadiennes sont visées par un nombre de plus en plus élevé de BNT dans certains marchés étrangers. D’après l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, même si les droits de douane sont réduits à zéro dans un accord commercial, l’existence de BNT peut avoir un effet comparable à des droits de douane de l’ordre de 40 %.

La Fondation Asie Pacifique du Canada a affirmé que les chapitres qui traitent des BNT dans les accords commerciaux « se sont étoffés au fil du temps », l’Accord de partenariat transpacifique global et progressiste (PTPGP) étant considéré comme « la référence mondiale ». Toujours de l’avis de la Fondation Asie Pacifique du Canada, les accords commerciaux qui limitent les BNT restreignent « la marge de manœuvre » des gouvernements en ce qui concerne l’imposition de règlements nationaux qui iraient à l’encontre des obligations commerciales internationales. La Fondation a également affirmé que l’harmonisation des mesures liées aux BNT prévues dans ces accords faciliterait la tâche aux entreprises qui souhaitent se tailler une place de marché.

Le Centre canadien de politiques alternatives a fait observer qu’il existe des divergences d’opinions quand il s’agit de déterminer si une mesure donnée est une BNT ou une « bonne politique publique ». Il a cité, à titre d’exemple, les politiques visant à réduire l’utilisation de pesticides dans le secteur agricole, l’augmentation de la taille minimale des cages et des enclos pour les animaux d’élevage, et l’obligation d’ajouter un « étiquetage sanitaire sur le devant de l’emballage » de produits comme les cigarettes, l’alcool et certains aliments.

Selon Pulse Canada, un grand nombre de BNT sont des mesures réglementaires ou techniques « légitimes sur les plans de la santé et de la sécurité », alors que d’autres ont « pour objectif manifeste et délibéré de faire échec à la concurrence et de protéger les producteurs du pays ». De son côté, la Chambre de commerce du Canada a affirmé « qu’il est tout à fait légitime » d’avoir recours à des lois et à des règlements sur les conditions de travail et les conditions environnementales, mais que ces outils ne doivent pas servir de « manière cachée » de restreindre l’accès au marché.

CropLife Canada a expliqué que le « droit de légiférer » est à la fois « extrêmement important » ainsi qu’un « principe de base des accords commerciaux ». L’organisation a toutefois ajouté qu’en dépit de l’existence de ce droit, les gouvernements doivent prendre des mesures fondées sur la science, tandis que le Conseil canadien du canola a affirmé que certaines décisions prises pour répondre aux préoccupations des citoyens en matière de sécurité alimentaire ne reposent peut-être pas toujours sur des données scientifiques. La Canadian Canola Growers Association a déclaré que les membres de l’OMC s’affairent à moderniser l’Accord sur l’application des mesures sanitaires et phytosanitaires, lequel exige que les normes en matière de salubrité des aliments ainsi que de santé des animaux et des végétaux soient fondées sur la science.

Le Conseil canadien du canola a expliqué que les mesures SPS visent à protéger la santé humaine, animale et des végétaux et a insisté sur l’importance que ces mesures soient conformes aux normes internationales et scientifiquement justifiables. Elles devraient en outre limiter le moins possible le commerce. Dans le même ordre d’idées, la Canadian Canola Growers Association a affirmé que les accords commerciaux que le Canada a conclus « stipulent que de telles mesures doivent être fondées sur la science, qu’elles ne [devraient] pas créer d’obstacle injustifié au commerce », et qu’elles devraient comporter un cadre relatif à la reconnaissance d’équivalences. Par ailleurs, selon la Canadian Canola Growers Association, les différentes administrations ont le « droit souverain […] d’adopter des politiques liées à la santé humaine et animale et à l’environnement ».

Cependant, le Centre canadien de politiques alternatives a affirmé que les accords commerciaux signés par le Canada « vont assez loin, et probablement trop loin, en limitant l’espace réglementaire et politique » et a indiqué qu’ils le font « d’une manière qui appauvrit notre démocratie et la démocratie d’autres pays ». Le Centre canadien de politiques alternatives estime qu’en raison « des règles trop strictes sur la manière dont les gouvernements sont autorisés à réglementer » énoncées dans les accords commerciaux, les partenaires d’un pays donné pourraient contester les politiques nationales qui visent à « promouvoir la santé publique [ou] l’éthique publique et des objectifs sociaux et environnementaux ».

Afin de donner un portrait régional, la Fondation Asie Pacifique du Canada a souligné qu’au cours des 23 dernières années, les pays de la zone Asie‑Pacifique ont signalé à l’OMC plus de 14 000 mesures SPS et OTC. C’est en Chine qu’a été répertorié le plus grand nombre de BNT, suivie par le Japon et la Corée du Sud. La Canada West Foundation a cité des données de l’OMC selon lesquelles, au 1er juin 2023, les États-Unis avaient le plus grand nombre de mesures SPS et OTC, pour un total de 554, comparativement à 66 pour la Chine, 60 pour le Canada et 92 pour l’Inde.

Selon l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, à l’échelle mondiale, le nombre de mesures SPS est passé d’un million en l’an 2000 à plus de quatre millions en 2021. Le Conseil canadien du canola a expliqué que le nombre de mesures SPS continue d’augmenter alors que de plus en plus de pays adoptent des systèmes de réglementation nationaux.

En ce qui concerne le secteur de l’agriculture, l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a qualifié les BNT de « principale source » de difficultés pour le commerce international des produits agricoles et agroalimentaires du Canada, et a souligné que les exportateurs canadiens sont touchés par les subventions et les autres formes de soutien accordées par les gouvernements étrangers, des mesures SPS et des exigences réglementaires et techniques. En s’appuyant sur une étude de l’Organisation de coopération et de développement économiques, l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a déclaré qu’en moyenne, au cours de la période de 2019 à 2021, les gouvernements ont fourni 817 milliards de dollars américains chaque année en subventions gouvernementales et autres formes de soutien à leur propre secteur agricole. Ce sont la Chine, l’Union européenne, l’Inde, le Royaume-Uni et les États-Unis qui ont accordé « la plus grande partie des subventions à l’agriculture ». Toujours selon l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire, les mesures SPS ainsi que les exigences d’ordre réglementaire et technique représentent « un défi […] persistent et coûteux » pour les exportateurs canadiens de produits agricoles et agroalimentaires.

La Fondation Asie Pacifique du Canada a bon espoir que la Stratégie du Canada pour l’Indo‑Pacifique aidera à « relever les défis posés » par les BNT et à « nouer des rapports » avec les importateurs d’autres pays, ce qui présentera des avantages pour le secteur agricole du pays. En outre, la Fondation Asie Pacifique du Canada a indiqué que la stratégie prévoyait le « renforcement de la présence diplomatique et commerciale du Canada » dans la région indo‑pacifique.

Barrières non tarifaires : Bœuf, porc et produits laitiers

L’Association nationale des engraisseurs de bovins et le Conseil canadien du porc estiment que l’Union européenne et le Royaume-Uni ont créé une BNT en interdisant l’acide peroxyacétique dans le processus de lavage des carcasses de bovins et de porcins alors qu’il s’agit d’une pratique normalisée reconnue à l’échelle internationale et « totalement sans danger[2] ». D’après l’Association canadienne des bovins, le « rejet de l’acide peroxyacétique » constitue l’une des « principales » BNT à laquelle sont confrontés les exportateurs de bœuf canadien au sein de ces deux marchés. De son côté, l’Association nationale des engraisseurs de bovins a affirmé que ses exportateurs n’ont qu’un accès limité, voire inexistant, à ces marchés malgré les dispositions prévues dans l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne (AECG).

De même, le Conseil canadien du porc a indiqué que les BNT ont limité l’augmentation des exportations de viande vers les marchés de l’Union européenne en dépit des dispositions de l’AECG. Le Conseil canadien du porc a aussi souligné que, même si le Canada dispose « de systèmes d’inspection des aliments parmi les plus sûrs au monde », l’Union européenne affirme néanmoins que les règlements canadiens en matière de sécurité des aliments « doivent correspondre exactement » à ses propres règlements. Pour ce qui est des échanges de viande de porc entre le Canada et le Royaume-Uni, lesquels avaient atteint un certain équilibre en termes de volume en 2019, le Conseil canadien du porc a signalé qu’en 2022, le Canada a importé environ 1,2 million de tonnes de viande de porc en provenance du Royaume-Uni et n’en a exporté que 13 000 tonnes vers ce pays. Selon le Conseil, la diminution du volume des exportations de porc canadien vers le Royaume-Uni de 2021 à 2022 est attribuable aux BNT, en particulier à l’exigence de ce pays concernant le dépistage de la trichinose pour les porcs élevés à l’intérieur.

En ce qui concerne les produits laitiers, Mondo Foods Co. Ltd., un distributeur de produits alimentaires, s’est concentré sur les contingents tarifaires du Canada pour les importations de fromage en provenance de l’Union européenne dans le cadre de l’AECG, qui sont répartis entre deux groupes : les fabricants de fromage et les détaillants et distributeurs de fromage. De son côté, le Conseil canadien des fromages internationaux a déclaré que les contingents tarifaires pour les fromages qui sont attribués aux importateurs canadiens dans le cadre de cet accord varient en taille chaque année, « passant de centaines de milliers de kilos une année à tout juste 10 000 kilos une autre année ». Enfin, Tree of Life Canada, un autre distributeur de produits alimentaires, a souligné que le PTPGP donne aux distributeurs de produits laitiers l’accès à moins de 10 % du total des contingents tarifaires de crème que le Canada fournit au titre de cet accord.

Barrières non tarifaires : Canola, céréales et légumineuses

La Canadian Canola Growers Association a indiqué que, malgré la levée des droits de douane sur le canola qui a suivi l’application provisoire de l’AECG, les exportateurs canadiens de canola demeurent confrontés à de l’incertitude sur le marché de l’Union européenne en raison d’exigences non scientifiques pour les produits de protection des cultures, des approbations tardives pour les variétés de cultures dérivées de la biotechnologie et des approches différentes en matière de protection de l’environnement. Le Conseil canadien du canola a fait observer que les exportateurs éprouvent des difficultés comparables au Mexique et au Pakistan, ce dernier ayant restreint les importations de cultures génétiquement modifiées depuis l’automne 2022.

Selon le Conseil canadien du canola, les différences entre les processus réglementaires de divers pays ont des effets « pernicieux dans le cas de marchandises transigées à l’échelle mondiale comme le canola ». En effet, il a affirmé que, comme de nombreuses administrations n’ont pas encore clarifié le statut réglementaire des variétés de cultures développées à l’aide de l’édition génomique ou d’autres nouvelles techniques de reproduction, il existe une « grave asymétrie » réglementaire d’un pays à l’autre en ce qui concerne les caractères biotechnologiques.

La Canadian Canola Growers Association a souligné les effets négatifs sur les exportateurs canadiens de canola de la politique de « tolérance zéro » adoptée par certains pays à l’égard du canola génétiquement modifié et des retards dans l’approbation des produits issus de la biotechnologie. En outre, elle a affirmé que les producteurs de canola du Canada devaient faire un choix entre l’accès aux marchés étrangers et l’adoption de technologies novatrices.

Dans un mémoire envoyé au Comité, Cereals Canada a indiqué que les BNT imposées aux exportateurs canadiens de blé en Italie, au Mexique et au Viet Nam entravent le commerce, limitent l’accès aux marchés et augmentent les coûts de production. Le mémoire a attiré l’attention sur l’étiquetage obligatoire du pays d’origine en Italie pour les produits à base de blé dur, une exigence qui entraîne des « coûts supplémentaires pour la ségrégation, le traçage et l’emballage des produits ». De même, le mémoire a signalé que la décision prise par le Viet Nam en 2019 d’ajouter le chardon des champs à la liste des organismes nuisibles interdits a eu pour effet de limiter les exportations de blé canadien vers ce pays en raison de la présence possible de graines de chardon dans les cargaisons de blé. Toujours selon le mémoire, en raison de cette restriction commerciale, le volume des exportations de blé canadien vers le Viet Nam a chuté, passant de 375 000 tonnes métriques en 2019 à 20 000 tonnes métriques en 2022.

Cereals Canada a affirmé que l’élimination des droits de douane sur les céréales « dans les quelques marchés où ces droits existent encore » serait utile, mais a ajouté que malgré le nombre de plus en plus élevé d’accords commerciaux conclus par le Canada, les BNT restreignent l’accès des exportateurs canadiens de céréales aux marchés de certains pays et, par conséquent, réduisent les avantages qui pourraient être tirés de ces accords.

Pulse Canada a déclaré que les BNT constituent « le principal frein » à l’augmentation des exportations de légumineuses canadiennes. Selon Pulse Canada, des mesures SPS « imprévisibles et injustifiées sur le plan technique » sont toujours en place dans « d’importants marchés d’importation comme l’Inde », où une restriction quantitative à l’importation « a eu pour effet de bloquer » les exportations de pois canadiens vers ce pays qui était auparavant le plus grand marché pour ce produit.

Par ailleurs, Pulse Canada a souligné qu’au cours des cinq dernières années, les exportateurs canadiens de légumineuses ont constaté une augmentation du nombre de BNT sur les marchés autres que l’Inde, notamment des « interdictions soudaines d’importation » au Népal et au Sri Lanka, des « exigences en matière de fumigation » au Pakistan et des « exigences injustifiées liées aux semences de blé » au Viet Nam. L’organisation a fait remarquer que ces BNT sont présentes dans des pays avec lesquels le Canada a conclu un accord commercial, notamment certains des signataires du PTPGP.

CropLife Canada a déclaré que la mise en œuvre d’un nouveau règlement adopté par l’Union européenne le 7 mars 2023, qui permettra de modifier les limites maximales de résidus pour pesticides en raison de préoccupations environnementales, risquerait de « saper l’ensemble du système commercial agricole mondial ». CropLife Canada a aussi souligné que le Canada et l’Union européenne sont membres de la Commission du Codex Alimentarius, qui fixe des normes en matière de sécurité alimentaire fondées sur des données scientifiques et reconnues à l’échelle internationale. L’organisation a ajouté que la capacité de l’Union européenne à modifier de façon unilatérale les limites maximales de résidus fait fi du processus scientifique qui sert à évaluer les pesticides et va « directement à l’encontre du consensus international » quant à l’usage de ces produits.

De même, CropLife Canada a affirmé que l’adoption par l’Union européenne d’un règlement qui permettrait de modifier les limites maximales de résidus de pesticides pourrait restreindre l’accès des exportateurs agricoles canadiens aux marchés européens. Pulse Canada s’est dit préoccupée par le fait que la capacité de l’Union européenne à modifier ces limites pourrait constituer une BNT pour les exportateurs canadiens de légumineuses. Toujours de l’avis de CropLife Canada, comme l’AECG et l’OMC exigent que toutes les mesures réglementaires soient fondées sur des données scientifiques, l’Union européenne pourrait ne pas respecter ses obligations commerciales internationales en modifiant ainsi les limites.

Barrières non tarifaires : Fabrication de produits sélectionnés

Constructeurs mondiaux d’automobiles du Canada a déclaré qu’il faut « rester vigilant » en ce qui concerne toutes les BNT qui visent les exportations d’automobiles canadiennes vers les États‑Unis, la destination de 85 % de la valeur des voitures fabriquées au Canada. Plus précisément, Constructeurs mondiaux d’automobiles du Canada a affirmé que les subventions accordées aux États‑Unis au titre de la loi sur la réduction de l’inflation de 2022 pourraient représenter d’éventuelles BNT.

L’Association canadienne des constructeurs de véhicules a dit considérer les règles des États-Unis sur l’origine des automobiles et des pièces comme une BNT. Elle a aussi souligné que, bien que le Canada et le Mexique aient obtenu gain de cause dans le litige sur ces règles d’origine au titre de l’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM), en date de mai 2023, les États-Unis n’avaient pas toujours modifié ces règles comme l’exigeait pourtant la décision du groupe spécial chargé du règlement des différends.

Selon l’Association canadienne des constructeurs de véhicules, si les signataires de l’ACEUM prennent la décision de ne pas renouveler leur accord en 2026 à la suite du processus de révision qui doit avoir lieu six ans après l’entrée en vigueur de celui-ci, cela « constituerait une [BNT] majeure » pour le secteur de l’automobile du Canada puisque celui-ci n’aurait plus un accès garanti au marché des États‑Unis[3].

L’Association canadienne des constructeurs de véhicules a expliqué que des centaines de milliers d’emplois du secteur de l’automobile au Canada « sont tributaires » de l’uniformité des normes en matière de sécurité de véhicules et d’émissions au Canada et aux États‑Unis. De son côté, l’Association des fabricants de pièces d’automobile du Canada a affirmé qu’il est « extrêmement important » d’harmoniser la réglementation en vigueur dans les deux pays.

L’Association canadienne des constructeurs de véhicules a expliqué que les accords commerciaux que le Canada a conclus avec le Japon et la Corée du Sud n’ont pas permis d’éliminer les BNT « de longue date » que ces pays appliquent aux automobiles importées depuis l’Amérique du Nord. De son côté, l’Association des fabricants de pièces d’automobile a parlé en détail des taxes japonaises établies en fonction des dimensions de chaque véhicule, de leur poids et de la cylindrée du moteur. Elle estime que ces taxes peuvent atteindre 105 000 yens par année pour les voitures fabriquées au Canada, comme les Dodge Challengers et Chargers ainsi que les Chrysler 300. Il s’agit d’un montant supérieur aux taxes sur une « Nissan Maxima produite sur le marché intérieur japonais avec un moteur de base », qui seraient de 79 000 yens par année.

En outre, l’Association des fabricants de pièces d’automobile a indiqué que le carburant coûte 40 ¢ par litre de plus au Japon par rapport au Canada en raison des taxes et d’autres facteurs. Elle a laissé entendre que le coût relativement plus élevé du carburant au Japon constituait une forme de BNT, les voitures canadiennes étant moins écoénergétiques et donc plus coûteuses à l’utilisation que les voitures japonaises.

La Magellan Aerospace Corporation, un fournisseur de produits et de services de génie aérospatial, a déclaré que certaines des règles qui concernent le secteur de l’aérospatiale « ajoutent à la complexité de l’environnement commercial mondial » et que des mesures du gouvernement du Canada qui visent l’atténuation des BNT sont essentielles pour assurer la croissance et le succès continu de cette entreprise.

Barrières non tarifaires : Petites et moyennes entreprises

La Fondation Asie Pacifique du Canada a affirmé que les microentreprises ainsi que les petites et moyennes entreprises, tant au Canada qu’en Asie, « sont souvent à court de ressources pour se conformer aux BNT », ce qui a une incidence sur leur capacité à exporter dans de nouveaux marchés. Dans le même ordre d’idées, l’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a déclaré que les petites et moyennes entreprises canadiennes ont un accès limité aux marchés étrangers parce qu’elles « n’ont généralement pas les ressources nécessaires pour se conformer » aux mesures SPS et à d’autres exigences réglementaires et techniques.

D’après Stewart Beck, un ancien sous-ministre adjoint fédéral chargé du commerce international, du développement, de l’innovation et de l’investissement ayant comparu à titre personnel, les petites et moyennes entreprises « n’ont pas les ressources nécessaires pour naviguer dans des environnements réglementaires complexes ». Le Canadian American Business Council a quant à lui expliqué que certaines exigences administratives et réglementaires peuvent avoir un effet « disproportionné » sur ces entreprises ainsi que sur les entrepreneurs.

Soulignant que les entreprises détenues par des femmes sont généralement de petite taille, l’Organization of Women in International Trade Ottawa a affirmé qu’il est difficile pour les petites et moyennes entreprises de tirer profit des accords commerciaux parce qu’elles et leurs fournisseurs étrangers ne comprennent pas toujours certaines dispositions de ces accords, telles que les règles d’origine complexes.

Mesure : Négocier les accords commerciaux

Pulse Canada a souligné l’importance de réduire les BNT dans le cadre des négociations commerciales et de la mise en œuvre des accords commerciaux. Le Conseil canadien du porc a exprimé son désir de voir le Canada négocier des accords commerciaux qui comportent « le moins de [BNT] possible ». De son côté, la Fondation Asie Pacifique du Canada a déclaré que le Canada devrait négocier des dispositions qui permettent de « trouver un équilibre entre le recours légitime à ces BNT et leur application à des fins protectionnistes ».

Dans son mémoire, Cereals Canada a exhorté le gouvernement du Canada à négocier des accords commerciaux comportant des dispositions qui limitent la possibilité des signataires de mettre en place des BNT et qui prévoient le recours à des évaluations scientifiques fondées sur les risques. Le Conseil canadien du canola a également affirmé que le gouvernement devrait accorder la priorité aux dispositions qui reposent sur la science. CropLife Canada a quant à elle recommandé la mise en place de dispositions qui restreignent l’utilisation des BNT et assurent l’adoption de mécanismes de règlement des différends applicables à ces dispositions.

Stewart Beck a expliqué qu’il est « essentiel » pour le Canada de réduire, voire d’éliminer les BNT. Il a qualifié le PTPGP « d’exemple à suivre » et a encouragé le gouvernement du Canada à reproduire son contenu dans le cadre de ses négociations avec les pays de la région Asie-Pacifique. Pulse Canada a affirmé que, lors des négociations commerciales, le Canada et l’Inde devraient collaborer afin de garantir que les mesures SPS soient fondées sur la science et le risque et qu’elles n’entravent pas le commerce de produits agroalimentaires.

L’Association canadienne des bovins a fait part de ses préoccupations à l’idée que le Royaume-Uni puisse adhérer au PTPGP sans remplir les conditions SPS imposées aux autres signataires. L’Alliance canadienne du commerce agroalimentaire a demandé au gouvernement du Canada d’aborder, lors de négociations ou de discussions bilatérales, la question des BNT qui limitent les exportations de bœuf canadien vers le Royaume‑Uni.

Selon la Canadian Canola Growers Association, les futurs accords commerciaux du Canada devraient reprendre les dispositions sur la biotechnologie agricole qui se trouvent dans le PTPGP et l’ACEUM. Dans le même ordre d’idées, CropLife Canada a affirmé que les futurs accords devraient comporter des dispositions à cet effet en plus de régler « les enjeux commerciaux liés aux différences dans les réglementations sur les pesticides ».

Ian Laird, un avocat qui a témoigné à titre personnel, a déclaré que le gouvernement du Canada devrait collaborer plus étroitement avec les entreprises canadiennes au sujet des négociations commerciales afin de « prendre conscience des enjeux exacts » relatifs aux BNT.

Le Conseil canadien du porc estime que le gouvernement du Canada pourrait encourager les gouvernements étrangers à réduire leurs BNT en leur rappelant qu’il a aussi « quelques idées de barrières [qu’il pourrait] utiliser en guise de réponse ».

Enfin, Omar Allam, un consultant du domaine des affaires internationales ayant témoigné à titre personnel, a proposé que, dans le cadre des négociations relatives à des « accords de partenariat commercial et économique stratégiques », le Canada demande à un éventuel partenaire commercial d’éliminer une BNT, en échange de quoi le Canada pourrait à son tour s’engager à « accélérer l’approbation des prises de contrôle étrangères » ou d’« investissements dans des projets d’infrastructures essentielles ».

Mesure : Faire respecter les dispositions des accords commerciaux

Ian Laird est d’avis qu’il faut « absolument que [les accords commerciaux du Canada] renferment des dispositions relatives au règlement des différends » puisque les BNT engendrent ce genre de litige. Pour sa part, Pulse Canada a fait valoir que le gouvernement du Canada devrait s’attaquer aux BNT en s’assurant que les accords commerciaux qu’il signe comportent des mécanismes efficaces de règlement des différends. En outre, Cereals Canada a suggéré que, pendant les négociations d’accords commerciaux, le gouvernement s’efforce de mettre en place des dispositions qui garantissent des processus « rapides et contraignants » de règlement des différends qui portent sur les BNT. L’Association canadienne des constructeurs de véhicules a insisté sur l’importance de s’assurer que tous les accords commerciaux actuels et futurs du Canada comportent des mécanismes « fonctionnels ».

CropLife Canada a mentionné que tous les accords commerciaux signés par le Canada devraient inclure des mécanismes de règlement des différends qui peuvent être utilisés pour appliquer les dispositions relatives aux BNT, dont celles qui concernent les mesures SPS et les OTC. La Canada West Foundation a elle aussi suggéré que ces mécanismes s’appliquent aux mesures SPS.

Le système d’avis de l’OMC, qui permet d’informer les membres des BNT proposées, est « assez efficace pour désamorcer les problèmes avant qu’ils ne soient portés devant un groupe spécial de règlement des différends », selon le Centre canadien de politiques alternatives. Ce dernier estime que l’OMC offre au Canada des « moyens appropriés » pour traiter les divergences avec d’autres pays en ce qui concerne les OTC, les normes alimentaires et d’autres politiques liées aux échanges commerciaux.

D’après la Canadian Canola Growers Association, dès l’entrée en vigueur d’un accord commercial, le gouvernement du Canada devrait avoir une stratégie et des « ressources dédiées » pour assurer la mise en œuvre complète et le respect des accords, plus particulièrement des dispositions relatives aux mesures SPS et aux OTC.

Pour conclure cette section, la Chambre de commerce du Canada est d’avis que les délégués commerciaux du Canada « ne doivent jamais rater l’occasion de dénoncer le recours à des [BNT] inéquitables ». Ils doivent aussi s’assurer que les autorités réglementaires accordent la priorité aux rencontres avec leurs homologues canadiens, qui pourraient leur expliquer en quoi les produits du Canada « respectent l’esprit des exigences locales ».

Mesure : Renforcer la coopération sur le plan de la réglementation ainsi que la collaboration internationale

La Chambre de commerce du Canada a suggéré que le gouvernement du Canada s’assure que les « groupes de coopération réglementaire » soient inclus dans les accords commerciaux. À titre d’exemple, la Chambre de commerce du Canada a évoqué les mécanismes prévus dans l’AECG, dont un forum et divers comités, qui favorisent la coopération en matière de réglementation parmi les signataires.

Bien qu’il reconnaisse le travail effectué par le Conseil de coopération Canada–États-Unis en matière de réglementation pour veiller à ce que les règles relatives au commerce bilatéral soient harmonisées dans la mesure du possible tout en protégeant la santé et la sécurité des résidents canadiens et américains ainsi que l’environnement, le Canadian American Business Council a invité les gouvernements du Canada et des États-Unis à « redoubler » d’efforts pour assurer l’« harmonisation en matière de réglementation ». De plus, le Canadian American Business Council a déclaré que les gouvernements doivent s’attaquer à la « redondance réglementaire contre‑productive » tant pour le secteur public que pour les entreprises ainsi que « les Canadiens et les Américains ordinaires ».

L’Association canadienne des constructeurs de véhicules a demandé au gouvernement du Canada de maintenir l’alignement avec les États-Unis sur les règlements relatifs aux véhicules. Constructeurs mondiaux d’automobiles du Canada a aussi affirmé que le Canada aurait intérêt à continuer d’aligner ses politiques, règles et réglementations automobiles sur celles des États-Unis.

Par ailleurs, la Chambre de commerce du Canada a dit que le Canada pourrait réduire ou éliminer les BNT imposées par les pays du Mercosur en négociant un accord commercial qui prévoit « une bonne coopération en matière de réglementation ». La Chambre de commerce du Canada a également demandé au gouvernement d’« essayer de mettre l’accent sur la coopération réglementaire » dans le cadre des négociations commerciales avec l’Inde.

Après avoir salué la proposition de créer un bureau d’Agriculture et Agroalimentaire dans la région indo-pacifique, annoncée dans le cadre de la Stratégie pour l’Indo‑Pacifique de 2022, et plaidé en faveur de l’établissement de bureaux similaires dans d’autres régions comme l’Europe et l’Amérique du Sud, Cereals Canada a dit avoir bon espoir que des « relations intrarégionales » continues entre les organes de réglementation canadiens et leurs homologues d’autres pays « instaureront un climat de confiance et des lignes de communication qui peuvent prévenir le recours à des [BNT] et favoriser la résolution de l’asymétrie réglementaire quand elle se produit ». Pulse Canada et le Conseil canadien du canola ont aussi affirmé que ce nouveau bureau contribuera au « renforcement des capacités réglementaires et techniques » dans la région indo‑pacifique.

En outre, selon Cereals Canada, « un engagement de gouvernement à gouvernement et des efforts d’industrie à industrie soutenus et constants » sont parmi les meilleures façons de surmonter les BNT auxquelles sont confrontés les exportateurs de céréales du Canada. Afin d’illustrer les bienfaits d’une telle mobilisation, Cereals Canada a aussi souligné dans son mémoire qu’en 2019, les producteurs agricoles canadiens, les meuniers péruviens et le gouvernement du Canada ont « établi un protocole » en réponse aux restrictions imposées par le Pérou sur les importations de produits céréaliers canadiens.

CropLife Canada a demandé au gouvernement du Canada « de s’engager à tous les échelons diplomatiques afin d’exprimer clairement et sans équivoque l’opposition du Canada à l’approche unilatérale de l’Union européenne concernant l’établissement des [limites maximales de résidus] ».

Observations et recommandations du Comité

Certaines BNT, dont diverses mesures SPS et certains OTC, ont des effets négatifs importants sur les échanges commerciaux du Canada avec ses partenaires internationaux. Les BNT peuvent notamment être considérées comme une forme de « protectionnisme déguisé », limiter l’accès au marché pour les entreprises canadiennes et obliger ces dernières à consacrer beaucoup de temps et d’autres ressources au respect des exigences liées à ces barrières.

Lorsqu’ils négocient des accords commerciaux, les pays tentent souvent de réduire, voire d’éliminer, les BNT. Le Comité constate que la levée des BNT figure parmi les priorités des représentants du Canada qui négocient de nouveaux accords commerciaux ou des modifications à ceux qui sont déjà en vigueur. Des pourparlers sont en cours avec un certain nombre de pays, et l’un des objectifs devrait être l’élimination des BNT. Celles qui ne sont pas éliminées devraient être fondées sur des données scientifiques, ne devraient pas être appliquées arbitrairement ni constituer une entrave déguisée au commerce, et devraient répondre à des objectifs légitimes de politique publique, tels que la protection de la vie et de la santé des personnes, des animaux et des plantes.

Après la signature d’un accord commercial, les gouvernements, les entreprises et d’autres intervenants se concentrent souvent sur la mise en œuvre de l’accord et sur le respect par les signataires des dispositions qui y sont énoncées, dont celles relatives aux BNT. À cet égard, le Comité reconnaît l’importance des processus qui peuvent être utilisés pour résoudre les différends entre les signataires. Dans tous les accords commerciaux signés par le Canada, actuels ou futurs, des mécanismes de règlement des différends rapides et contraignants permettent d’éviter que les partenaires commerciaux du pays ne recourent à des BNT qui pénalisent les exportateurs canadiens.

Le Canada travaille depuis longtemps avec ses partenaires commerciaux pour harmoniser les règlements, notamment ceux qui touchent les secteurs agricole et automobile du pays, et a démontré son engagement à collaborer avec ses homologues étrangers pour éliminer les BNT. Le Comité est conscient que certains règlements ne sont pas des BNT et que certains existent à des fins légitimes. Cela dit, la réglementation étrangère peut avoir des répercussions négatives sur les exportateurs canadiens, en particulier en raison des coûts et des incertitudes qui y sont associés. Les discussions que les décideurs, les organismes de réglementation, les entreprises et les autres intervenants canadiens ont avec leurs homologues étrangers peuvent favoriser l’harmonisation des règlements et déboucher sur une meilleure compréhension que les différences entre les réglementations des diverses administrations peuvent avoir les mêmes objectifs.

À la lumière de ce qui précède, le Comité recommande :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada, dans le cadre de ses négociations commerciales, essaie d’éliminer les barrières non tarifaires qui ne sont pas fondées sur des données scientifiques, qui ne permettent pas d’atteindre un objectif légitime ou qui entravent considérablement les échanges du point de vue des exportateurs canadiens. Plus particulièrement, le gouvernement devrait donner la priorité au renforcement de ses efforts visant à éliminer les barrières non tarifaires qui limitent les occasions d’affaires pour les petites et moyennes entreprises canadiennes. En outre, le gouvernement devrait renforcer le mandat du Service des délégués commerciaux d’Affaires mondiales Canada afin que les délégués commerciaux aient pour responsabilité de travailler avec ces entreprises dans le but d’accroître les avantages qu’elles tirent des accords commerciaux existants du Canada.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada veille à ce que les accords commerciaux du pays prévoient des mécanismes de règlement des différends rapides et exécutoires qui sont applicables aux dispositions relatives aux barrières commerciales non tarifaires. Plus précisément, le gouvernement devrait examiner les mécanismes des accords commerciaux existants afin de s’assurer que les préoccupations concernant les mesures sanitaires et phytosanitaires peuvent être résolues rapidement. Si un tel examen recense des possibilités de renforcement de ces mécanismes, le gouvernement devrait discuter des changements avec les partenaires commerciaux concernés.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada poursuit et renforce sa collaboration avec ses partenaires commerciaux en vue d’harmoniser la réglementation et d’éliminer les barrières commerciales non tarifaires. À cet égard, le gouvernement devrait donner la priorité aux secteurs canadiens qui sont aux prises — ou pourraient l’être — avec des barrières non tarifaires ayant de graves répercussions négatives, notamment les secteurs de l’agriculture et de l’automobile.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada soit tenu de contrôler les importations de produits agroalimentaires aux frontières du pays afin de s’assurer que la réciprocité des normes est bien réelle et qu’il ne s’agit pas seulement d’un objectif théorique. Le contrôle ne devrait pas avoir de conséquences négatives sur l’efficacité du commerce international du Canada. En outre, le gouvernement devrait prendre des mesures pour s’assurer que les pratiques et les intrants utilisés par les fabricants étrangers pour produire des biens importés au Canada n’ont pas d’effets négatifs sur les producteurs de biens nationaux équivalents.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada prenne des mesures pour préserver son droit souverain de légiférer pour le bien commun. De même, dans les situations où certains dénoncent l’existence de barrières non tarifaires injustifiées, le gouvernement devrait entamer des discussions sérieuses avec les parties concernées afin de résoudre le problème.


[1]              Conformément à la motion adoptée par le Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes le 25 novembre 2022, le présent rapport est axé sur les barrières non tarifaires.

[2]              L’acide peroxyacétique est un produit antimicrobien utilisé dans les abattoirs. Santé Canada en a autorisé l’utilisation pour le lavage des carcasses de bovins et de porcins. Par ailleurs, l’Autorité européenne de sécurité des aliments a déterminé que l’utilisation de l’acide peroxyacétique permet de réduire la contamination par des agents pathogènes des « carcasses et de la viande de volaille » d’une manière sans danger.

[3]              L’Accord Canada–États-Unis–Mexique (ACEUM) doit faire l’objet d’un examen en 2026 et tous les six ans par la suite. L’ACEUM prendra fin en 2036 à moins que, dans le cadre de l’examen devant avoir lieu en 2026 ou à tout autre moment après l’examen et avant la fin de la période de validité de l’ACEUM, tous les signataires confirment par écrit qu’ils souhaitent que l’ACEUM se poursuive jusqu’en 2052.