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CIIT Rapport du Comité

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Les répercussions de certaines mesures commerciales prises par les États-Unis et l’Union européenne sur le secteur des pêches du Canada

Introduction

Le Canada est l’un des principaux exportateurs de poisson, de produits de la mer et de produits dérivés du phoque sur la scène internationale. Selon Agriculture et Agroalimentaire Canada, le Canada s’est classé au 5e rang des plus grands exportateurs mondiaux de poisson et de produits de la mer au monde en 2021 avec des parts de marché de 4,2 % à l’échelle internationale. En 2022, d’après Pêches et Océans Canada, le Canada a exporté plus de 565 000 tonnes métriques de poisson, de produits de la mer et de produits du phoque, ce qui équivaut à environ 67,0 % de la valeur des débarquements, de la pêche commerciale marine et d’eau douce ainsi que de la production aquacole du pays. Historiquement, les États-Unis et l’Union européenne ont été deux des principaux marchés d’exportation du Canada pour ces produits. Toutefois, les dirigeants de ces régions ont mis en place certaines mesures qui soulèvent des préoccupations à propos de l’accès des pêcheurs et des transformateurs de poisson, de produits de la mer et de phoque du Canada aux marchés des États-Unis et de l’Union européenne.

Au Canada, les peuples autochtones ont le droit, protégé par la Constitution, de chasser des mammifères marins, incluant des phoques, à condition de respecter certaines exigences précises. Selon Pêches et Océans Canada, dans les localités côtières isolées et du Nord canadien, « la chasse au phoque constitue un volet important du mode de vie et une source de revenus essentielle pour des milliers de familles ». Les mesures de l’Union européenne visant l’importation des produits du phoque ont donc eu des effets négatifs disproportionnés sur les peuples autochtones au Canada.

Le 17 octobre 2023, le Comité permanent de la Chambre des communes sur le commerce international (le Comité) a adopté la motion suivante :

Que, conformément à l’article 108(2) du Règlement, le Comité entreprenne une étude sur l’affaiblissement de l’industrie des pêches québécoises et canadiennes créé par les politiques restrictives américaines et européennes en matière d’importation des produits de la mer; que le Comité tienne au moins deux réunions sur cette étude, et que le Comité fasse rapport de ses conclusions et recommandations à la Chambre.

Le Comité a consacré deux réunions à cette étude, qui ont eu lieu les 21 et 23 mai 2024. Il a entendu 11 témoins, parmi lesquels se trouvaient des représentants du gouvernement du Canada, de quatre associations commerciales, de deux organisations de la société civile et d’une entreprise. Le Comité a aussi reçu une réponse écrite de Pêches et Océans Canada ainsi qu’un mémoire de l’Institut de la fourrure du Canada[1]. Les témoignages, la réponse écrite et le mémoire n’étaient pas axés uniquement sur les produits de la mer; ils ont aussi abordé la question des produits du poisson et du phoque. Au cours de l’étude, le Comité n’a pas entendu de témoins autochtones et n’a pas non plus reçu de mémoires d’Autochtones; c’est la raison pour laquelle le rapport ne prend pas en considération les points de vue des Autochtones sur la question. Selon La procédure et les usages de la Chambre des communes, pour ses études, un « comité peut choisir ses témoins de différentes manières. Normalement, ceux-ci sont proposés par ses membres. » Les partis politiques peuvent aussi proposer des témoins.

Le présent rapport résume les observations formulées par les témoins lors de leur comparution devant le Comité ainsi que les commentaires contenus dans la réponse écrite et dans le mémoire. Plus précisément, la première section présente des observations sur les éventuels défis liés aux exportations de homard du Canada vers le marché américain; la deuxième section expose les points de vue des intervenants sur les interdictions d’importation des États-Unis et de l’Union européenne concernant les produits dérivés du phoque et l’utilisation de produits dérivés du phoque comme appâts; et la troisième section est axée sur les mesures américaines destinées à protéger les baleines noires de l’Atlantique Nord. La quatrième section décrit les autres exigences en matière d’importation auxquelles les pêcheurs et les transformateurs de poisson et de produits de la mer canadiens (ci-dessous « les pêcheurs et les transformateurs ») doivent se conformer. La cinquième section énonce les mesures commerciales dans le secteur de la pêche au Canada que le gouvernement fédéral a mises en place et que les intervenants souhaiteraient voir adoptées. La dernière section présente les réflexions et les recommandations du Comité.

Homard

Le Conseil canadien du homard a souligné le fait que la Magnuson-Stevens Fishery Conservation and Management Act des États-Unis comporte « une disposition qui exige que tout homard vivant importé ait la même taille minimale qu’aux États-Unis ». Il a également indiqué qu’« [i]l ne fait aucun doute » qu’un règlement américain visant à augmenter la taille minimale du homard pouvant être pêché aux États-Unis pourrait avoir une incidence sur les pêcheurs de homard du Canada[2]. En outre, toujours selon le Conseil canadien du homard, les homards dont la taille se trouve en deçà de ce nouveau seuil pourraient être exportés vers les marchés de l’Asie ou traités différemment.

La Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a suggéré que l’augmentation de la taille minimale des homards que les pêcheurs canadiens peuvent conserver entraînerait une baisse des débarquements initiaux en raison du rejet de homards auparavant exploitables. Toutefois, le Conseil canadien du homard a estimé que cette augmentation pourrait entraîner des répercussions différentes en fonction des zones de pêche au homard : les conséquences à l’Île-du-Prince-Édouard et sur la côte est du Nouveau-Brunswick seraient minimes, parce que les homards y sont plus petits et que la plupart sont transformés. Au Québec, l’incidence serait également négligeable parce que la taille minimale des homards qui peuvent y être pêchés est déjà plus élevée que dans les autres provinces.

Enfin, la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a fait valoir que l’inaction en réponse à l’augmentation de la taille minimale des homards pêchés aux États-Unis pourrait entraîner la perte de l’accès des pêcheurs de homards canadiens au marché américain, ce que l’industrie « ne peut pas se permettre, puisque les États-Unis représentent une part importante du marché ». De son côté, la Prince Edward Island Fishermen’s Association a affirmé que ses membres fournissent « une quantité substantielle » de homards aux usines de transformation des États-Unis et a estimé qu’« il est primordial de préserver l’accès aux circuits de distribution critiques aux États‑Unis ».

Produits dérivés du phoque

Les représentants de Pêches et Océans Canada ont expliqué que l’Union européenne était autrefois le plus grand marché pour l’exportation des produits du phoque en provenance du Canada. La valeur des ventes effectuées sur ce territoire a atteint 5,4 millions de dollars en 2006. Ils ont insisté sur le fait que le règlement de l’Union européenne intitulé Règlement sur le commerce des produits dérivés du phoque, adopté en 2009, a interdit toute importation de produits dérivés du phoque, ce qui a eu une incidence négative importante sur les exportations canadiennes de ces produits. Les représentants ont expliqué que l’Union européenne a imposé cette interdiction parce qu’elle était préoccupée « par la méthode de la chasse au phoque ». Dans son mémoire, l’Institut de la fourrure du Canada a dit qu’avec l’Inuit Tapiriit Kanatami, ils ont contesté cette interdiction devant le Tribunal de l’Union européenne. Il a ajouté que le gouvernement du Canada a déposé une plainte au sujet de cette interdiction devant l’Organisation mondiale du commerce.

Les représentants de Pêches et Océans Canada ont indiqué qu’en 2015, l’Union européenne a ajouté deux exceptions au Règlement sur le commerce des produits dérivés du phoque afin d’autoriser l’importation de produits dérivés du phoque certifiés en provenance de communautés autochtones ainsi que l’importation occasionnelle de produits dérivés du phoque destinés à l’usage personnel et exclusif des voyageurs. D’après le mémoire de l’Institut de la fourrure du Canada, malgré ces exceptions, « très peu » de produits du phoque provenant de communautés autochtones au Canada ont été exportés vers l’Union européenne depuis l’entrée en vigueur de ce règlement.

Toujours dans son mémoire, l’Institut de la fourrure du Canada a déploré le fait que la Directive sur les blanchons et le Règlement sur le commerce des produits dérivés du phoque de l’Union européenne ainsi que la Marine Mammal Protection Act des États-Unis, peuvent avoir « de graves conséquences sur les pêcheurs et les transformateurs de phoque de même que sur les fabricants de produits dérivés du phoque » du Canada.

La Pacific Balance Pinniped Society a souligné quant à elle que, depuis 1972, l’importation de produits dérivés de mammifères marins, y compris les produits dérivés du phoque, est interdite aux États-Unis au titre de la Marine Mammal Protection Act américaine. Affirmant que la Colombie-Britannique a une « surabondance de pinnipèdes », elle a fait valoir que « le maintien d’une loi sur la protection de ces animaux adoptée en 1972 est absurde[3] ». Dans son mémoire, l’Institut de la fourrure du Canada a fait état d’une « augmentation substantielle des populations de phoque » sur les côtes Est et Ouest du Canada, ajoutant que — depuis l’adoption de la Marine Mammal Protection Act aux États-Unis —, « les méthodes de pêche et de gestion des mammifères marins ont beaucoup évolué […] et les populations de mammifères marins ont repris de la vigueur ».

Par ailleurs, la Pacific Balance Pinniped Society a indiqué au Comité que les appâts à base de produits canadiens du phoque sont en demande dans les États de l’Alaska, de la Californie et de Washington. La Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a suggéré que les pêcheurs de homard canadiens souhaitent recourir davantage à ces produits comme appâts, mais elle a aussi reconnu qu’une telle pratique pourrait avoir des répercussions négatives sur l’accès au marché américain du homard.

Les représentants de Pêches et Océans Canada ont précisé que le gouvernement du Canada ne réglemente pas les appâts. Ils ont toutefois mis en garde le Comité, puisque de l’avis du gouvernement des États-Unis : « Les pêcheurs qui utilisent le phoque comme appât ne respecteraient pas la [Marine Mammal Protection Act] et risqueraient, de façon plus générale, de compromettre toute exportation de l’espèce concernée vers les États‑Unis. »

Enfin, la Pacific Balance Pinniped Society a insisté sur les effets négatifs de l’augmentation du nombre de pinnipèdes sur les populations de poissons de la côte Ouest du Canada. Dans son mémoire, l’Institut de la fourrure du Canada a fait remarquer que « la prédation du phoque gris est considérée comme un obstacle à la reconstitution des stocks de poisson de maintes listes recensant les espèces en péril de l’Atlantique ».

Baleine noire de l’Atlantique Nord

Lorsqu’il a été question des dispositions de la Marine Mammal Protection Act des États‑Unis et des autres exigences auxquelles les produits doivent satisfaire avant d’entrer sur le marché américain, la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association et le Conseil canadien du homard ont souligné que les pêcheurs et les transformateurs canadiens doivent se conformer aux normes américaines en matière de protection des mammifères marins, dont les baleines noires de l’Atlantique Nord. Le Conseil canadien du homard a confirmé que la protection de cette espèce représente un « défi concernant l’accès au marché ».

Les représentants de Pêches et Océans Canada ont fait observer que, selon la Marine Mammal Protection Act, les pays qui exportent des poissons et des produits de la mer aux États‑Unis doivent avoir un régime de protection des mammifères marins « comparable, sur le plan de l’efficacité des mesures, au régime américain[4]. » Par ailleurs, ils ont déclaré que le gouvernement du Canada n’a reçu aucune information indiquant qu’elle ne satisfait pas aux dispositions de la mesure législative en matière d’importation. Les représentants ont également souligné que le gouvernement du Canada entretient « d’excellentes relations avec le gouvernement des États-Unis, tant au niveau opérationnel qu’aux échelons plus élevés, pour ce qui est de la mise en œuvre et du respect de la loi américaine sur la protection des mammifères marins ».

En ce qui concerne les baleines noires de l’Atlantique Nord, les représentants de Pêches et Océans Canada ont évoqué les mesures d’atténuation prises par le Canada, telles que la fermeture temporaire de zones de pêche, qui visent à la fois à maintenir l’accès au marché américain et à protéger les mammifères marins[5]. Le Conseil canadien du homard a laissé entendre que ces mesures « ont permis aux pêcheurs de homard de continuer à pêcher lorsque les baleines sont présentes au printemps ». Le Canadian Whale Institute a affirmé que les mesures du Canada « sont sans précédent », et le Conseil canadien du homard a dit qu’elles étaient « parmi les plus rigoureuses au monde ». Le Canadian Whale Institute et le Conseil canadien du homard ont estimé que les mesures du Canada rivalisent avec celles des États-Unis.

Enfin, la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a dit avoir « été alarmé » en apprenant que Pêches et Océans Canada collaborait avec certaines organisations non gouvernementales américaines, comme le Fonds international pour la protection des animaux, et considère que ces partenariats ne sont pas de nature à résoudre le problème de la baleine noire de l’Atlantique Nord au Canada.

Autres exigences en matière d’importation

Le Conseil canadien des pêches, le Conseil canadien du homard et Louisbourg Seafoods Ltd. ont signalé que les exigences des États-Unis et de l’Union européenne en matière de tenue de registres concernant la traçabilité du poisson et des produits de la mer étaient préoccupantes. Le Conseil canadien du homard a ajouté que l’augmentation de la traçabilité dans les pêcheries commerciales s’inscrivait dans une « tendance mondiale ». Selon Louisbourg Seafoods Ltd., la numérisation des dossiers est devenue « une nécessité pour ceux qui veulent exporter dans les marchés aux États‑Unis et en Union européenne ».

Louisbourg Seafoods Ltd. a aussi souligné que certaines entreprises devront se soumettre aux exigences américaines en matière de tenue de dossiers dès janvier 2026 et a indiqué que « le secteur des produits de la mer du Canada atlantique doit commencer sans tarder à se préparer à remplir les diverses exigences de la nouvelle [loi sur la modernisation de la réglementation de la sécurité des aliments (Food Safety Modernization Act)][6] ». Le Conseil canadien des pêches et le Conseil canadien du homard ont dit qu’ils suivaient de près l’évolution de la réglementation relative à cette mesure législative. De l’avis de Louisbourg Seafoods Ltd., la Food Safety Modernization Act constitue un bon exemple des exigences « en constante évolution » auxquelles les transformateurs et les autres intervenants du secteur des pêches du Canada doivent s’adapter.

Les représentants de Pêches et Océans Canada ont indiqué qu’au titre du règlement de l’Union européenne relatif à la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN)[7], entré en vigueur en 2010, tous les poissons et produits de la mer qui entrent sur le territoire de l’Union européenne doivent être certifiés comme ayant été obtenus dans le respect des lois nationales et internationales applicables à la pêche ainsi que des mesures de conservation et de gestion.

D’après Louisbourg Seafoods Ltd., le « fardeau et la responsabilité » de respecter les exigences relatives aux importations « incombent invariablement aux transformateurs », qui doivent « investir dans des ressources pour répondre aux exigences réglementaires ». Il a aussi insisté sur les exigences relatives aux certificats de capture, à l’étiquetage, à l’emballage et au marquage, ainsi qu’aux autorisations qui doivent être obtenues avant l’exportation. Dans le même ordre d’idées, la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a affirmé que l’« évolution de la réglementation internationale a une incidence directe sur les pêcheurs. Dans le passé, ces questions concernaient davantage les exportateurs. » Cela dit, le Conseil canadien des pêches a laissé entendre que les exigences en matière d’importation de poissons et de produits de la mer imposées par de nombreuses administrations étrangères portent sur des pratiques qui ne sont pas courantes au Canada. Il a estimé cependant que le secteur de la pêche du pays risque d’« être [victime] de dommages collatéraux si [il ne fait] pas preuve de diligence dans la surveillance des problèmes potentiels ».

Enfin, en ce qui concerne le programme de surveillance des importations de produits de la mer des États-Unis, le Conseil canadien des pêches a déclaré le 23 mai 2024 qu’il envisageait de soumettre une proposition aux personnes responsables de l’examen du programme[8]. Le Conseil canadien du homard a indiqué qu’il voyait le programme comme une façon de maintenir l’accès au marché américain.

Mesures fédérales existantes et souhaitées

Les témoins ont fait part au Comité de leur point de vue sur les mesures fédérales en vigueur et sur les mesures qu’ils souhaitent que le gouvernement prenne pour aider les exportateurs de poisson, de produits de la mer et de produits dérivés du phoque du Canada. Ils ont notamment parlé des normes et des exigences en matière de protection du milieu marin applicables dans le contexte de la défense des intérêts à l’échelle internationale, de la collaboration mondiale et nationale sur les questions relatives à la pêche et aux mammifères marins, ainsi que de divers accords commerciaux, programmes et autres mesures.

Défense des intérêts à l’échelle internationale

De l’avis de la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association, le gouvernement du Canada pourrait aider les exportateurs de poisson et de produits de la mer du Canada en diffusant « les bonnes nouvelles concernant les pêches canadiennes », en particulier en Europe et aux États-Unis. En outre, la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a affirmé qu’il était impératif pour le gouvernement, dans ses interactions avec les organismes de réglementation et consommateurs américains, de s’efforcer de faire connaître les succès du secteur des pêches du Canada en matière de protection des mammifères marins.

Toujours selon la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association, le secteur des pêches du Canada est sous-représenté sur la scène internationale en raison de l’absence d’un ambassadeur fédéral de la conservation des pêches. Sa « voix est supplantée par celle d’[organisations non gouvernementales de défense de l’environnement] » qui ont des programmes « servant leurs propres intérêts et du financement étranger ». Le Conseil canadien du homard, Louisbourg Seafoods Ltd. et la Prince Edward Island Fishermen’s Association appuient tous la nomination d’un tel ambassadeur. En effet, la Prince Edward Island Fishermen’s Association a indiqué qu’une telle mesure permettrait de s’adapter plus rapidement à la volatilité du marché puisque l’ambassadeur serait en mesure d’aider le secteur de la pêche au Canada.

Dans le contexte de ses observations sur l’importance de sensibiliser les intervenants internationaux aux mesures de réduction des risques pour les baleines noires de l’Atlantique Nord prises par le Canada et, par conséquent, de garantir l’accès aux marchés étrangers, le Conseil canadien du homard a indiqué qu’il fournissait aux associations étrangères d’importateurs de poissons et de produits de la mer des informations sur les mesures prises par le Canada.

Collaboration à l’échelle nationale et internationale

Dans sa réponse écrite, Pêches et Océans Canada a souligné que le Canada a ratifié le premier accord international contraignant visant la pêche INN, soit l’Accord relatif aux mesures du ressort de l’État du Port visant à prévenir, contrecarrer et éliminer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, dont l’objectif consiste à empêcher les navires pratiquant ce type de pêche à utiliser les ports des États membres des Nations Unies pour débarquer leurs prises. En outre, toujours selon la réponse écrite, le Canada préside l’Alliance d’action contre la pêche INN, une coalition mise sur pied conjointement avec le Royaume-Uni et les États-Unis en 2022. L’Alliance est le chef de file des efforts déployés à l’échelle internationale afin de prévenir, de contrecarrer et d’éliminer la pêche INN.

Les représentants de Pêches et Océans Canada ont affirmé qu’ils travaillaient avec leurs homologues américains pour garantir que les exportations de poisson et de produits de la mer du Canada vers les États-Unis puissent se poursuivre. Le Conseil canadien du homard a confirmé que Pêches et Océans Canada « travaille en étroite collaboration » avec la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis.

En ce qui concerne la collaboration entre les parties nationales concernées par l’augmentation des exportations canadiennes de poisson, de produits de la mer et de produits dérivés du phoque, les représentants de Pêches et Océans Canada ont déclaré qu’ils travaillent avec l’Agence canadienne d’inspection des aliments. Ils ont aussi souligné qu’ils travaillent en collaboration avec les communautés autochtones du Canada, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement du Nunavut et d’autres intervenants afin de s’assurer que l’Union européenne prenne en considération « la nature durable et sans cruauté de la chasse aux phoques au Canada », que les « voix du secteur canadien de la chasse aux phoques soient entendues », et que les répercussions d’interdiction d’importation sur les communautés côtières et autochtones du Canada soient bien comprises par l’Union européenne.

Le Conseil canadien du homard a expliqué qu’il collabore avec Pêches et Océans Canada et qu’Affaires mondiales Canada et ses délégués commerciaux lui « fournissent un soutien essentiel sur le terrain » grâce à leurs interactions avec des représentants d’autres pays et « des associations d’importation ». Dans la même veine, Louisbourg Seafoods Ltd. a affirmé que les délégués commerciaux du Canada sont « d’une importance vitale » et aident l’entreprise à établir et à développer des liens avec ses clients internationaux. Par ailleurs, le Conseil canadien du homard a indiqué qu’il collabore avec des représentants de l’Agence canadienne d’inspection des aliments et d’Agriculture et Agroalimentaire Canada afin de régler les problèmes relatifs à l’accès aux marchés de l’Asie, de l’Europe et des États-Unis.

Enfin, selon la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association, le gouvernement du Canada, les groupes de conservation et les organismes de pêche travaillent de concert pour garantir aux États-Unis que le Canada est en mesure de protéger les mammifères marins et mettra tout en œuvre à cet égard. Ces efforts visent à s’assurer que le Canada puisse « conserver l’accès au marché » pour les produits de la mer canadiens. Le Canadian Whale Institute a indiqué que les groupes consultatifs dirigés par le gouvernement, qui ont pour objectif de réduire les collisions avec de grands navires et les enchevêtrements de baleines sur la côte est du Canada, ont eu « beaucoup de succès ».

Mesures d’aide diverses

En ce qui concerne les accords commerciaux et l’importance des marchés d’exportation pour assurer la prospérité du secteur des pêches du Canada ainsi que des pêcheurs et des transformateurs, les représentants de Pêches et Océans Canada ont indiqué que l’Accord Canada–États-Unis–Mexique et l’Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne « ont favorisé un accès constant et stable pour [les] poissons et […] fruits de mer » canadiens. Le Conseil canadien des pêches a affirmé que « [l]’industrie canadienne de la pêche accorde une grande importance à ses relations commerciales tant avec les États-Unis qu’avec l’Union européenne », et la Prince Edward Island Fishermen’s Association a déclaré qu’« il faut encourager et maintenir des relations commerciales justes et équitables avec des partenaires sûrs ».

Pour ce qui est des programmes et des fonds existants et souhaités, les représentants de Pêches et Océans Canada ont indiqué que le gouvernement du Canada s’est adapté au règlement de l’Union européenne sur la pêche INN, qui exige que tous les pays qui y exportent du poisson et des produits de la mer fournissent un certificat de capture pour chaque cargaison exportée, en mettant sur pied un programme de certification des prises qui « soutient le rôle […] du Canada dans la prévention, la dissuasion et l’élimination de la pêche INN ».

Le Conseil canadien des pêches a encouragé le gouvernement du Canada à renouveler le Fonds canadien d’initiatives en matière de poissons et de fruits de mer, qui n’existe plus. Dans son mémoire, l’Institut de la fourrure du Canada a plutôt recommandé que ce fonds soit remplacé par des « programmes de financement destinés à soutenir la commercialisation et la mise en marché du poisson et des fruits de mer, y compris des produits du phoque ». Louisbourg Seafoods Ltd. a quant à elle proposé que le gouvernement continue à financer des programmes comme le Fonds des pêches de l’Atlantique et « des programmes connexes ». Au sujet des mesures souhaitées, Louisbourg Seafoods Ltd. a plaidé pour que l’on offre davantage de soutien aux entreprises qui élaborent et mettent en œuvre des programmes nationaux de traçabilité des produits de la pêche.

Enfin, la Bay of Fundy Inshore Fishermen’s Association a demandé au gouvernement du Canada de continuer à financer la recherche sur le homard afin de mieux comprendre la migration des homards ainsi que la distribution et la quantité de homards dans une zone donnée. Elle souhaite ainsi pouvoir « déplacer » ses efforts de pêche en fonction de la présence des baleines tout en maintenant l’approvisionnement en poisson et en produits de la mer pour les marchés nationaux et étrangers. Le Conseil canadien des pêches a souligné l’importance de maintenir ou d’améliorer les normes de pêche du Canada grâce à « des décisions sur les pêcheries prises en connaissance de cause » afin d’augmenter les exportations de poissons et de produits de la mer du pays. Il a aussi affirmé que les ressources de Pêches et Océans Canada « sont insuffisantes ».

Réflexions et recommandations du Comité

Le secteur de la pêche au Canada contribue de manière importante à l’économie du pays, notamment grâce au commerce international du poisson et des produits de la mer. Selon Pêches et Océans Canada, les exportations canadiennes de ces produits se chiffraient à 7,6 milliards de dollars en 2023. Cette année-là, les trois principaux marchés étaient les États‑Unis, la Chine et l’Union européenne, qui ont reçu respectivement 64,0 %, 19,0 % et 5,5 % des exportations canadiennes de poisson et de produits de la mer. Toutefois, les mesures commerciales prises par ces pays et d’autres administrations peuvent avoir des effets négatifs sur les exportateurs canadiens de poisson et de produits de la mer et sur leurs employés.

Il serait sans doute possible de réaliser des progrès plus importants dans la lutte contre les effets négatifs des mesures liées au commerce extérieur sur le secteur de la pêche au Canada si les mesures existantes étaient assorties de dispositions supplémentaires. Le Comité reconnaît qu’au Canada, les parties concernées déploient sans relâche des efforts pour protéger les mammifères marins, ce qui contribue à garantir l’accès du poisson et des produits de la mer canadiens aux marchés étrangers. La promotion de ces initiatives et des normes de protection rigoureuses en vigueur dans le pays permettrait d’atteindre deux objectifs. Le nombre croissant de consommateurs nationaux et étrangers qui réclament des pratiques de pêche durables serait davantage sensibilisé à la qualité des poissons et produits de la mer canadiens. En outre, il deviendrait évident que les mesures prises par le Canada pour protéger les mammifères marins respectent – pour ne pas dire dépassent – les exigences fixées par les gouvernements de ses principaux marchés d’exportation.

Enfin, la collaboration peut être déterminante pour garantir un accès continu ou nouveau aux marchés étrangers, y compris pour les poissons et les produits de la mer. Le Comité est tout à fait convaincu de l’importance de la coopération nationale et internationale pour préserver la réputation du Canada en tant qu’exportateur fiable de poissons et de produits de la mer issus de pratiques durables. Le renforcement de la coopération nationale et des partenariats entre les gouvernements des provinces et des territoires du Canada, les communautés autochtones, les représentants du secteur, les organisations environnementales et d’autres acteurs peut aider les exportateurs canadiens de poisson et de produits de la mer à satisfaire, voire à surpasser les exigences étrangères en matière de durabilité des ressources marines. Bien que la coopération nationale soit d’une importance primordiale, elle pourrait néanmoins ne pas suffire à obtenir les résultats escomptés. C’est pourquoi la collaboration internationale joue également un rôle essentiel dans l’atteinte d’objectifs communs.

À la lumière de ce qui précède, le Comité recommande :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada veille à informer les administrations étrangères de ses pratiques de pêche durables ainsi que des mesures de protection des mammifères marins en vigueur au Canada. Ces administrations doivent également être informées du fait que les phoques ne font pas partie des espèces en péril au Canada. Pour ce faire, le gouvernement pourrait notamment intensifier ses démarches sur la scène internationale afin de souligner l’engagement du Canada en faveur de la protection de ces mammifères et du respect des exigences en matière d’importation de poisson et de produits de la mer à l’étranger. Des efforts accrus devraient être déployés auprès des autorités compétentes des États-Unis et de l’Union européenne.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada mette en œuvre des mesures visant à faciliter la coopération nationale et internationale entre les différents acteurs concernés. Les mesures devraient être axées en partie sur le maintien de la réputation internationale du Canada en tant que fournisseur fiable et concurrentiel de poisson et de produits de la mer ainsi que sur la collaboration avec des administrations aux vues similaires pour garantir des normes de durabilité marine élevées et le respect des exigences.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada rétablisse le poste d’ambassadeur pour la conservation des pêches.

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada demande au ministère fédéral des Pêches et des Océans d’obtenir auprès de la National Oceanic and Atmospheric Administration des États-Unis la confirmation, par écrit, que le Canada respecte ou dépasse les exigences qui entreront en vigueur le 1er janvier 2026 à la suite des modifications apportées à la Marine Mammal Protection Act des États-Unis, et qu’après avoir reçu cette confirmation, le gouvernement en en fasse part à tous les acteurs concernés au Canada.


[1]                La réponse écrite de Pêches et Océans Canada n’a pas été téléversée sur le site Web du Comité permanent du commerce international de la Chambre des communes.

[2]                L’addendum XXVII à l’amendement 3 du plan de gestion interétatique de la pêche au homard américain mis en place par l’Atlantic States Marine Fisheries Commission fait passer la taille minimale du homard de 82 millimètres à 84 millimètres à compter du 1er juillet 2025, puis à 86 millimètres à compter du 1er janvier 2027.

[3]                Les pinnipèdes sont un groupe de mammifères marins qui comprend les phoques, les otaries, les otaries à fourrure et les morses.

[4]                En 2016, le gouvernement des États-Unis a publié un règlement d’application de la loi sur la protection des mammifères marins (Marine Mammal Protection Act) relativement à l’importation de poisson et de produits de la mer provenant de pêcheries ayant causé la mort accidentelle ou intentionnelle de mammifères marins ou leur ayant infligé des blessures graves. Les dispositions concernant les mammifères marins et les pêcheries commerciales étrangères qui exportent leurs produits vers les États-Unis visent à prévenir les enchevêtrements dans les engins de pêche et les collisions avec les navires. Selon la réglementation, les pays pratiquant ce type de pêche doivent mettre en place des régimes comparables à ceux des États-Unis sur le plan de l’efficacité des mesures d’atténuation. Toutes ces dispositions entreront en vigueur au plus tard le 31 décembre 2025.

[5]                Si une baleine noire de l’Atlantique Nord est détectée visuellement ou acoustiquement dans le golfe Saint‑Laurent, dans la baie de Fundy ou dans le bassin Roseway, Pêches et Océans Canada interdit alors temporairement certains engins et activités de pêche dans une zone définie autour de la position de détection.

[6]                En ce qui concerne les aliments destinés à la consommation humaine aux États-Unis, le règlement de la Food and Drug Administration (FDA) concernant les exigences relatives aux enregistrements supplémentaires de traçabilité pour certains aliments fixe des obligations en matière de tenue de registres pour les entreprises nationales ou étrangères qui fabriquent, transforment, emballent ou entreposent des aliments figurant sur la liste de traçabilité des aliments. Toutes les entreprises assujetties à ces exigences devront s’y conformer au plus tard le 20 janvier 2026.

[7]                Le titre officiel de la mesure est le suivant : Règlement (CE) No 1005/2008 du Conseil du 29 septembre 2008 établissant un système communautaire destiné à prévenir, à décourager et à éradiquer la pêche illicite, non déclarée et non réglementée, modifiant les règlements (CEE) no 2847/93, (CE) no 1936/2001 et (CE) no 601/2004 et abrogeant les règlements (CE) no 1093/94 et (CE) no 1447/1999.

[8]                Le programme de surveillance des importations de produits de la mer (Seafood Import Monitoring Program) établit des exigences en matière de déclaration et de tenue de registres concernant les importations de plusieurs groupes d’espèces dont l’objectif est d’empêcher l’entrée, sur le marché américain, de produits issus de la pêche illégale, non déclarée et non réglementée. En novembre 2023, le National Marine Fisheries Service des États-Unis a entrepris une révision du programme en vue d’en accroître l’efficacité.