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ETHI Rapport du Comité

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L'ÉTAT DU SYSTÈME D'ACCÈS À L'INFORMATION DU CANADA

 

Introduction

Le 16 mai 2022, la commissaire à l’information, Caroline Maynard, a comparu devant le Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes (le Comité) et a brossé un portrait plutôt sombre de l’état de l’accès à l’information en 2022. À la fin de cette réunion, le Comité a adopté une motion visant à mener une étude sur le système d’accès à l’information et de protection des renseignements personnels. Ce rapport reflète ce que le Comité a entendu.

Le Comité a commencé son étude le 5 octobre 2022. Il a tenu 11 réunions publiques, au cours desquelles il a entendu 42 témoins. Quelques témoins, comme la commissaire à l’information, ont comparu à deux reprises. Le Comité a aussi reçu 12 mémoires. Il remercie tous ceux et celles qui ont participé à l’étude.

Contexte

L’accès à l’information a fait couler beaucoup d’encre depuis l’adoption de la Loi sur l’accès à l’information (LAI) en 1983[1]. Par exemple, en 2015, la commissaire à l’information de l’époque, Suzanne Legault, a publié un rapport contenant 85 recommandations visant à moderniser la LAI[2]. En 2016, le Comité a publié un rapport unanime de son examen de la LAI, dans lequel il faisait 32 recommandations[3].

En 2017, le gouvernement du Canada a présenté le projet de loi C-58, la Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et d’autres lois en conséquence[4]. Il s’agissait de la première réforme de fond depuis l’adoption de la LAI. La même année, la commissaire Legault a publié un rapport spécial au Parlement dans lequel elle critiquait ce projet de loi et faisait de nombreuses recommandations visant à l’améliorer[5].

Le projet de loi C-58 a reçu la sanction royale en juin 2019[6]. Il a mené à certaines modifications de la LAI, dont l’octroi de pouvoirs additionnels à la commissaire à l’information et l’ajout d’une partie 2 qui fixe des exigences visant la publication proactive de renseignements.

La LAI prévoyait un examen de la LAI par le gouvernement un an après l’adoption du projet de loi C-58[7]. En 2020, le Secrétariat du Conseil du Trésor (SCT) a lancé son examen de l’accès à l’information qui devait porter sur la révision du cadre législatif, les possibilités d’améliorer la publication proactive et l’évaluation des processus et des systèmes pour améliorer le service et réduire les délais[8].

Le rapport de l’examen de l’accès à l’information du SCT a été présenté à la Chambre des communes et renvoyé au Comité en décembre 2022[9]. Plusieurs des conclusions tirées par le SCT, comme le besoin d’une meilleure gestion des documents et de plus de ressources humaines dans le domaine de l’accès à l’information et de protection des renseignements personnels (AIPRP), concordent avec ce que le Comité a entendu dans le cadre de son étude.

Organisation du rapport

Le rapport se divise en six chapitres. Le chapitre 1 fait un survol du rôle du système d’accès à l’information et de ce à quoi pourrait ressembler le système idéal. Le chapitre 2 fait état des critiques du système d’accès à l’information canadien et discute de six enjeux spécifiques liés à l’accès à l’information : les délais systémiques; l’accès à l’information dans le domaine de l’immigration; l’accès à l’information des peuples autochtones; l’accès à l’information de victimes d’abus dans les forces armées canadiennes; la protection des dénonciateurs et l’accès aux documents historiques, dont ceux sur l’Holocauste. Le chapitre 3 examine l’état de l’accès à l’information chez sept institutions fédérales. Le chapitre 4 porte sur les moyens législatifs et non législatifs d’améliorer le système d’accès à l’information du Canada. Le chapitre 5 discute des pouvoirs, de l’indépendance et des ressources de la Commissaire à l’information du Canada. Le chapitre 6 discute du rapport de l'examen de l’accès à l’information du SCT.

Chapitre 1 : Le système d’accès à l’information

Rôle du système d’accès à l’information

La LAI a comme objectif « d’accroître la responsabilité et la transparence des institutions de l’État afin de favoriser une société ouverte et démocratique et de permettre le débat public sur la conduite de ces institutions[10] ». La plupart des témoins ont confirmé qu’un système d'accès à l'information efficace est essentiel dans une démocratie moderne[11]. Plusieurs témoins étaient aussi d’avis que le système actuel n’est pas adéquat[12]. Deux témoins ont indiqué que le statu quo n’est pas acceptable[13].

L’honorable Mona Fortier, la présidente du Conseil du Trésor, a comparu devant le Comité le 18 avril 2023. Elle a, elle aussi, souligné que l’accès du public aux informations gouvernementales est essentiel à la démocratie. Elle a dit prendre son travail relatif à l’accès à l’information au sérieux et que ses efforts en la matière sont sincères. Elle a aussi indiqué que l’accès à l’information est une priorité pour le gouvernement actuel.

Mme Maynard a affirmé que si les Canadiens ne savent pas quelles décisions sont prises en fonction de quels faits et de quelles données, et s’ils ne sont pas informés des dépenses du gouvernement, ils ne sont pas au fait de la situation. Elle a rajouté que si les Canadiens ne sont pas en mesure d’obtenir les réponses qu’ils cherchent auprès des administrations fédérales et provinciales, ils risquent de se tourner vers d’autres sources, ce qui mène à la mésinformation. Selon elle, une solution pour augmenter la confiance des Canadiens envers les institutions fédérales est de fournir de l’information rapidement et respecter la LAI.

Michel Drapeau, avocat, Colonel (à la retraite) et professeur auxiliaire de l’Université d’Ottawa, a souligné que pour certaines personnes (surtout les personnes vulnérables), le système d’accès à l’information est le seul mécanisme qui permet d’avoir accès à de l’information sous le contrôle du gouvernement. Selon lui, lorsqu’il est impossible d’exercer son droit d’accès ou de l’exercer dans les délais prescrits, il y a préjudice.

Kirk Lapointe, vice-président, Éditorial, Glacier Media et éditeur et rédacteur en chef de Business in Vancouver, a expliqué que les demandes d'accès à l'information (ci-après « demandes d’accès ») permettent aux Canadiens de comprendre leur histoire, le processus décisionnel des personnes qui les servent, ainsi que les complexités, les enjeux et les dilemmes inhérents à l’administration publique. Selon lui, lorsque les médias n’ont pas accès au processus décisionnel des politiques publiques, ils doivent travailler avec des renseignements très limités, ce qui affaiblit le métier et l’image des journalistes.

M. Lapointe a rajouté que l’accès à l’information est une occasion pour les journalistes d’aller chercher des renseignements que le public veut connaître, sans se contenter de ce que les gouvernements fournissent au public. Il a rajouté que l’accès à l’information permet de se fonder sur des comptes rendus officiels plutôt que sur l’interprétation de quelqu’un ou des commentaires anecdotiques. Dean Beeby, un journaliste, a fait des commentaires similaires. Selon lui, l’accès à l’information permet de répondre au problème de mésinformation, car les données qui ont été fournies par les gouvernements et qui ont été vérifiées servent d’assises solides au journalisme d’enquête.

Stanley Tromp, un journaliste indépendant, a rappelé au Comité que depuis l’adoption de la LAI, plus de 6000 reportages découlant de demandes d’accès ont été publiés. Cela démontre selon lui la valeur du système et le danger de le perdre[14]. Brent Jolly, le président de l’Association canadienne des journalistes, de son côté, a souligné que lorsque des documents obtenus par l’intermédiaire du système d’accès à l’information sont inclus dans des reportages, cela met en cause le système lui-même et permet d’illustrer les défis auxquels les journalistes sont confrontés pour avoir accès à ces documents.

Pour reconnaître l’importance du droit d’avoir accès à l’information, Ken Rubin, un recherchiste d’enquête et défenseur de la transparence, a recommandé que le droit à l’information soit établi fermement dans la Charte canadienne des droits et libertés. À son avis, tant que le système d’accès à l’information n’est pas réformé et qu’un droit constitutionnel à l’information n’est pas formellement reconnu, ce droit ne demeure qu’un privilège[15].

Système d’accès à l’information idéal et système actuel

Mike Larsen, le président de la BC[16] Freedom of Information and Privacy Association (BC FIPA), a partagé une vision d’un système d’accès à l’information efficace et sans entrave, en utilisant la métaphore d’un oignon dans lequel la santé de chaque couche influe sur la santé des autres couches.

Tout comme l'oignon en bonne santé, un accès efficace et sans entrave au système d'information pour le Canada serait constitué de plusieurs couches. Au cœur, nous verrions inscrit dans la loi un devoir robuste de consigner ou de documenter les activités et décisions, qui s'appuierait sur des mesures d'application. […]
La couche suivante, autour du centre, serait le cadre de gestion de l'information, qui serait clair et bien pourvu en ressources et qui permettrait la localisation et l'extraction efficaces des documents […]
[L]a couche suivante serait une version actualisée et modernisée de la Loi sur l'accès à l'information, qui aurait besoin de s'inspirer d'un engagement profondément enraciné envers l'idée que le droit à l'information fait partie intégrante du fonctionnement d'une démocratie. Sa portée devrait être large et englober tout le spectre des organismes de l'État, notamment les cabinets des ministres et les entités contrôlées par le gouvernement ou généreusement financées par lui.
[Un système efficace] devrait agir en temps opportun et adhérer au principe selon lequel l'accès retardé est un accès refusé, en imposant des limites claires à la durée des prolongements de requêtes. Il devrait être accessible sans péage à l'entrée ni majoration considérable des droits en cours de route, qui nuisent à la transparence. Il serait guidé par une clause impérative axée sur l'intérêt public qui aurait préséance sur toutes les exemptions dans les cas où l'intérêt public pour la divulgation l'emporte sur celui du secret.
De plus, il limiterait vraiment l'application des exemptions et des exceptions […] Fait important, une telle loi aurait besoin d'être appuyée par un commissariat à l'information doté d'importants pouvoirs d'enquête, de prise d'ordonnances et d'exécution.
La couche suivante serait une culture vivante de l'accès, caractérisée par des engagements sincères envers la transparence, au plus haut niveau de l'État, par la dotation efficace en ressources des bureaux d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels au sein des organismes publics et par une formation adéquate. Il faudrait l'ascendant des niveaux supérieurs pour donner le ton, en se chargeant de la responsabilité de transformer les cultures du secret de l'organisation, qui considèrent comme un risque l'accès à l'information, en cultures de la transparence qui reconnaissent comme un droit l'accès à l'information.
Nous arrivons enfin à la couche extérieure, un mécanisme de divulgation proactive reposant sur toutes les couches sous-jacentes et qui exige des organismes publics qu'ils publient de manière automatique et proactive les catégories de documents fréquemment demandés et ceux dont la divulgation est d'intérêt public.

Selon M. Larsen, cette vision ressemble toutefois très peu à la réalité. Il a indiqué que dans sa forme actuelle, la LAI n’oblige pas à consigner les choses par écrit. Le système d’accès à l’information ne couvre pas tout le domaine de l'administration publique et se caractérise par des retards et l’utilisation d’exceptions ou d’exclusions pour certains documents. Il impose aussi des frais, est insuffisamment financé et est fragilisé par une culture du secret. M. Larsen a donc décrit le système d’accès actuel comme un « oignon qui abrite beaucoup de pourriture[17] ».

Les différents éléments d’un système d’accès à l’information efficace soulevés par M. Larsen sont abordés au chapitre 4, qui discute des moyens législatifs et non législatifs d’améliorer ce système. Les critiques du système actuel et certains enjeux liés à l’accès à l’information plus urgents sont examinés dans le prochain chapitre.

Le Comité reconnaît que le système d’accès à l’information fédéral actuel comporte plusieurs problèmes. Il recommande donc d’abord ce qui suit :

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada fasse un examen et une refonte complète du système d’accès à l’information fédéral.

Chapitre 2 : Critiques du système d’accès à l’information et enjeux liés

Critiques générales

Plusieurs témoins ont critiqué le système d’accès à l’information actuel. Par exemple, M. Drapeau a affirmé que ce système est aujourd’hui sans destination puisqu’il ne sert plus les buts prévus. Duff Conacher, cofondateur de Démocratie en surveillance, a dit que les dispositions de la LAI ne donnent pas suite à son objectif. Selon lui, elle est « plus une échappatoire en soi qu'un dispositif qui assure l'accès à l'information ».

M. Beeby a dit que la LAI permet aux citoyens ordinaires de poser des questions à leur gouvernement, de lui demander des comptes et d'obtenir de l'information sur eux-mêmes et sur les sujets qui les intéressent, retirant ainsi le pouvoir de l’information du gouvernement pour le donner à la population. Toutefois, il est d’avis qu’en pratique, le gouvernement actuel et les gouvernements antérieurs gardent jalousement l’information qu’ils détiennent. Andrea Conte, écrivain, chercheur et artiste médiatique, a dit être du même avis.

M. Rubin a affirmé que les mesures législatives sur l'accès à l'information qui ont été adoptées depuis 1983 n’ont fait que multiplier les obstacles pour ceux qui cherchent à obtenir de l’information. Ainsi, selon lui, le régime actuel ne permet qu’un « faux accès à l’information ».

Pour sa part, M. Jolly a noté qu’après des décennies de promesses de modernisation du système d’accès à l’information, ce dernier demeure défaillant et « cela fait 40 ans qu’aucun effort concerté n’a été déployé pour régler le problème ». Il a rajouté :

[O]n ne peut pas coller le châssis d'une voiture de Formule 1 avec du ruban adhésif et espérer qu'elle fasse un bon temps, encore moins qu'elle ne remporte le championnat mondial. Ce que je vous propose, c'est de retirer la voiture, de la réparer de manière appropriée et de recommencer la course.

Selon M. Jolly, de nombreux documents, dialogues publics et études universitaires présentent déjà une meilleure voie à suivre, mais il faut que les représentants élus trouvent la volonté politique d’agir en ce qui concerne la modernisation du système d’accès à l’information. Pour M. Conte, le système d’accès à l’information actuel ne peut être réformé, puisqu’il s’agit selon lui d’un « système discrétionnaire fondé sur la bonne foi, associé à de trop nombreux problèmes fondamentaux ».

Enjeux liés urgents

Outre les critiques générales à l’égard du système d’accès à l’information, six enjeux spécifiques en matière d’accès à l’information ont été soulevés par les témoins, soit les délais systémiques, l’accès à l’information dans le domaine de l’immigration, l’accès à l’information des peuples autochtones, l’accès à l’information de victimes d’abus dans les forces armées canadiennes, la protection des dénonciateurs, et enfin, l’accès aux documents historiques, y compris ceux de l’Holocauste.

Délais systémiques

Mme Maynard a rappelé au Comité qu’à l’heure actuelle ce n’est qu’environ 30% des demandes d’accès qui ne sont pas traitées dans les délais prescrits par la LAI[18]. Elle a toutefois reconnu que ce nombre ne cesse de croître d’année en année, malgré le fait que la LAI ne prévoit aucune possibilité de déroger à ses obligations, même dans des circonstances extraordinaires.

La présidente du Conseil du Trésor a soulevé les mêmes statistiques que la commissaire, notant qu’en 2021–2022, 70,7 % des demandes ont été traitées dans les délais prescrits par la LAI. Elle a toutefois reconnu que ce taux de conformité n’est pas suffisant[19]. Elle a expliqué que bien que le nombre de demandes closes augmente, il ne suit pas le rythme des demandes qui arrivent. Par conséquent, le nombre de demandes reportées à l’année suivante n’a cessé d’augmenter au cours de la dernière décennie. Elle a dit que le Conseil du Trésor continue de rappeler aux ministères leurs obligations en vertu de la LAI.

La présidente du Conseil du Trésor a aussi reconnu qu’il y a beaucoup de travail à faire pour que le gouvernement traite davantage de demande d’accès et vide l’arriéré de demandes, dont le nombre s’est accru dans les dernières années. Elle a souligné que des outils administratifs ont été élaborés et déployés pour réduire le fardeau et la charge de travail qui augmente au fil des ans.

Mme Maynard a indiqué que les prolongations de délais posent beaucoup de problèmes et que le nombre de plaintes que son commissariat reçoit ne cesse d’augmenter[20]. Elle a souligné que de plus en plus d’institutions fédérales demandent des prorogations de délais, ne respectent pas le délai prescrit de 30 jours, ou ne répondent tout simplement pas, laissant des demandeurs attendre des mois sans accusé de réception. Allan Cutler, ancien président de Canadians for Accountability, a confirmé cette pratique en indiquant que dans une demande d’accès active au moment de sa comparution devant le Comité, il attendait toujours pour un accusé de réception plus de 60 jours après le dépôt de sa demande.

M. Drapeau a souligné que les procédures d’accès à l’information sont de plus en plus embourbées par des retards excessifs, pas tant du côté des institutions fédérales, selon lui, que du côté du Commissariat à l’information (le Commissariat). Il a quand même proposé de modifier la LAI pour permettre aux institutions de répondre à l’intérieur de 30 jours ouvrables plutôt que 30 jours civils, comme c’est le cas présentement[21]. De son côté, la BC FIPA a recommandé de réduire le délai prescrit à 20 jours civils, comme c’est le cas au Québec et à Terre-Neuve-et‑Labrador[22].

M. Conacher a recommandé d’exiger que toutes les institutions demandent la permission du commissaire à l’information pour dépasser le délai prescrit de 30 jours et que la prorogation maximale du délai soit de 60 jours. La BC FIPA et le Center for Law and Democracy (CLD) ont aussi indiqué que la prolongation des délais au-delà de la limite permise devrait nécessiter l’approbation du commissaire à l’information[23]. Andrew Koltun, qui a comparu au nom de l’Association canadienne des avocats et avocates en immigration, a recommandé qu’Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) respecte le délai de 30 jours pour répondre à une demande d'accès en vertu de la LAI et que les prolongations ne soient pas autorisées au-delà de 30 jours. L'accès à l'information dans le domaine de l’immigration est abordé dans la section suivante de ce rapport.

Par ailleurs, M. Beeby a affirmé qu’un faible pourcentage des demandes d’accès provient aujourd’hui des médias, ce qui selon lui s’explique par les délais d’attente. À son avis, des limites plus sévères sur la capacité d’un ministère de remettre le traitement des demandes à plus tard devraient être établies. Il a suggéré que si une institution rate son échéance, on devrait lui retirer le pouvoir d’appliquer des exceptions sous la LAI.

Pour M. Lapointe, les délais dans le système d’accès à l’information sont le plus grand problème auquel font face les journalistes aujourd’hui. Comme M. Beeby, il a dit qu’une raison expliquant le faible pourcentage de journalistes qui utilisent la LAI est qu’ils se sentent frustrés par la LAI et n’essaient plus d’avoir accès à l’information de cette manière. Il s’est lui aussi dit en faveur d’un plafond du délai de réponse. Il a par ailleurs noté que la plupart des journalistes accepteraient d’obtenir une divulgation partielle à l’intérieur du délai de 30 jours prévus sous la LAI, et de recevoir le reste graduellement par la suite.

En fait, en raison des délais auxquels font face les demandeurs d’accès à l’information, y compris les journalistes, M. Lapointe a indiqué que l’accès à l’information est aujourd’hui « un outil qui sert mieux l’histoire que le journalisme ». M. Beeby a lui aussi dit qu’il a l’impression de ne plus effectuer le travail d’un journaliste, mais plutôt celui d’un historien. Selon lui, le journalisme d’enquête qui s’appuie sur des documents est en voie de disparaître en raison des lacunes de la LAI.

D’après M. Larsen « la confiance de la population envers les institutions publiques passe par la transparence et se renouvelle par la transparence ». Dans un environnement où les gens sont exposés à beaucoup de mésinformation, il est essentiel d’avoir accès en temps opportun à de l'information exacte pour contrer certains de ces récits. Selon lui, lorsqu’une culture du secret prévaut et qu’il y a des retards systémiques au sein d’institutions, cela mine la confiance du public envers le gouvernement dans son ensemble. Par exemple, il a suggéré que si une personne fait une demande d’accès pour la première fois et se heurte à un mur, cela ne peut qu'amplifier d’autres préoccupations, légitimes ou non, au sujet du fonctionnement de la démocratie. Ainsi, selon M. Larsen, le fait d'imposer des échéances claires qui sont réellement respectées et appliquées est une importante mesure à prendre pour rebâtir la confiance des Canadiens.

Quelques témoins ont fait part au Comité des pires délais auxquels ils ont fait face pour obtenir les documents demandés dans le cadre d’une demande d’accès, soit des délais d’entre 5 à 10 ans[24]. Par exemple, M. Conte a relaté une demande d’accès pour laquelle il s’est fait demander par la Gendarmerie royale du Canada (GRC), 5 ou 6 ans après avoir déposé la demande, s’ils voulaient toujours obtenir une réponse. M. Lapointe a expliqué que dans le cadre du cours universitaire qu’il donne, ses étudiants font des demandes d’accès. En 12 ans d’enseignement, il n’est jamais arrivé que les résultats de ces demandes soient obtenus à l’intérieur de 90 jours.

Le Comité est d’accord avec plusieurs des témoins que la prorogation du délai de 30 jours pour répondre aux demandes d’accès sous la LAI devrait seulement se faire dans des circonstances limitées. Ainsi, il recommande :

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada modifie l’article 9 de la Loi sur l’accès à l’information afin de limiter la prorogation du délai à une durée maximale de 60 jours, sous réserve d’une permission du Commissaire à l’information du Canada d’excéder cette période.

Accès à l’information dans le domaine de l’immigration

En 2020, le Commissariat a mené une enquête systémique chez IRCC. Le rapport de cette enquête a été publié en mai 2021[25]. Mme Maynard a dit que l’enquête a permis de constater que l’information demandée de façon systématique est souvent de l’information qui devrait se trouver sur le portail du ministère. Elle a comparé la situation à devoir faire une demande d’accès chaque fois qu’un individu voudrait obtenir de l’information relative à son propre dossier d’impôts.

Mme Maynard a expliqué qu’à la suite de son enquête systémique, IRCC a commencé à mettre en place un système offrant plus d’information, et que les fonctionnaires ont modifié le libellé de leurs lettres de décision pour y offrir davantage de détails. Elle a dit être très encouragée par les démarches entreprises par IRCC, mais a indiqué que les résultats ne sont pas encore au rendez-vous[26].

M. Drapeau a rappelé qu’une majorité des demandes d’accès fédérales sont adressées à IRCC[27]. Selon lui, les demandeurs ne devraient pas avoir à passer par le régime d’accès à l’information pour obtenir ces renseignements. Il a toutefois reconnu que les mesures qu’IRCC est en train de mettre en place pourraient réduire le nombre de demandes d’accès et de plaintes. M. Beeby a lui aussi recommandé que les demandes de consultants et d’avocats en immigration soient traitées à l’extérieur du régime de la LAI.

M. Koltun a également souligné qu’IRCC est le ministère fédéral qui reçoit le plus de demandes d’accès. Selon lui, l’augmentation des nouveaux arrivants entraînera une hausse du nombre de demandes refusées, du nombre de demandes d'accès et du nombre de plaintes déposées au Commissariat. Supprimer les raisons pour lesquelles les demandes d’accès chez IRCC accaparent une grande proportion des ressources du Commissariat pourrait donc être bénéfique.

Selon M. Koltun les nouvelles méthodes d’IRCC n’ont encore rien donné sur le plan pratique. Au moment de sa comparution, IRCC ne divulguait toujours pas les raisons des refus aux demandeurs dans leur intégralité de façon proactive ni les notes du système mondial de gestion des cas utilisé par IRCC.

M. Koltun a expliqué que comme IRCC ne motive pas ses décisions de refuser une demande d’immigration, le candidat à l’immigration doit soit faire une demande d’accès pour obtenir les raisons du refus, soit contester la décision d’IRCC devant la Cour fédérale. Il a rajouté qu’un scénario similaire se produit lorsque des candidats à l’immigration doivent répondre à une lettre d’IRCC relative à l’équité procédurale qui demande d'expliquer la différence entre une nouvelle et une ancienne demande d’immigration. Puisqu’IRCC ne fournit pas avec cette lettre une copie de l'ancienne demande, une demande d'accès doit être faite pour l’obtenir. Le candidat doit alors demander un sursis du délai de réponse, car il attend la réponse à sa demande d’accès.

En ce qui concerne les délais, M. Koltun a expliqué que par le passé, la majorité des demandes d’accès chez IRCC étaient traitées dans le délai prescrit de 30 jours. Pendant la pandémie, le délai a excédé 60 jours. Dans les quelques mois précédant sa comparution, IRCC a non seulement cessé de respecter le délai de 30 jours, mais a aussi cessé d’envoyer des avis de prorogation du délai. Sans communication d’IRCC, les candidats à l’immigration ne savent pas si leur demande d’accès va être traitée ou non. Il a rajouté que, lorsqu’IRCC donne un avis de prorogation du délai, ces prolongations sont souvent longues et injustifiables. Par exemple, il a expliqué qu’IRCC demande souvent une prorogation générale de 365 jours pour communiquer une copie complète d’un dossier, alors que les mêmes documents peuvent être fournis en une à deux semaines par ordonnance de la Cour fédérale.

Selon M. Koltun, les « retards et les prorogations [d’IRCC] imposent des obstacles redoutables à l'accès à la justice aux candidats à l'immigration ». Il a souligné que le manque d’accès aux documents que détient IRCC peut avoir de lourdes conséquences, par exemple en affectant la capacité des candidats à l’immigration de contester une décision ou de présenter une demande d’immigration crédible, solide et complète. M. Koltun a indiqué qu’IRCC devrait aussi être obligé de fournir automatiquement les raisons du refus d’une demande d’immigration dans ses lettres de refus.

M. Kotlun a reconnu que de façon générale, les avocats en immigration ont l’habitude de présenter une demande d'accès pour tous leurs clients. Cette pratique ne vise pas à embourber le système. Il s’agit souvent de la seule façon d’obtenir des renseignements ou d’avoir une idée de la raison pour laquelle un dossier d’immigration accuse du retard.

Tracy Perry, la directrice générale par intérim des Affaires corporatives intégrées des Services ministériels d’IRCC et Sylvain Beauchamp, le directeur général de la direction Expérience client chez IRCC, ont comparu devant le comité le 25 avril 2023. Ils ont discuté de l’état de l’accès à l’information chez IRCC et des récentes initiatives visant à améliorer leur service en la matière.

Mme Perry a confirmé qu’en 2021–2022, IRCC a reçu 204 000 demandes d’accès, soit environ 80% de toutes les demandes d’accès à des institutions fédérales sous la LAI et 28% de toutes les demandes d’accès relatives aux renseignements personnels soumises sous la Loi sur la protection des renseignements personnels (LPRP). Elle a noté que l’enquête systémique de la commissaire à l’information en 2020 a permis d’examiner les stratégies ministérielles employées par IRCC pour s’attaquer à la cause fondamentale des problèmes : la nécessité d’une meilleure communication en temps opportun avec les clients d’IRCC au sujet de leurs demandes d’immigration.

Mme Perry a expliqué que pour répondre à l’enquête systémique, IRCC a entrepris plusieurs initiatives pour moderniser son programme d’AIPRP, y compris des initiatives visant à mettre à la disposition des clients les informations sur leur dossier d’immigration. IRCC a aussi élaboré une stratégie globale de gestion des effectifs permettant aux employés d'avoir accès à de meilleures possibilités de formation et de développement. Il aussi mis en œuvre de nouveaux outils, de nouvelles technologies et de nouveaux processus.

Mme Perry a indiqué que comme d’autres institutions fédérales, IRCC fait face à des défis en matière de recrutement d’agents d’AIPRP d’expérience qualifiés. IRCC tente de conserver son personnel d’expérience en leur offrant de la formation et des occasions de promotion à l’interne. Elle a aussi noté que l’équipe d’AIPRP chez IRCC est maintenant composée de trois directeurs et de neuf gestionnaires.

Mme Perry a expliqué qu’IRCC incorpore de nouveaux outils pour créer des efficiences dans le traitement des demandes d’accès. Cela inclut l’utilisation de l’automation robotisée des processus qui permet aux employés de compléter du travail fondé sur la prise de décisions plutôt que de faire de l’entrée de données répétitives.

M. Beauchamp a indiqué qu’IRCC est en train de construire sa « plateforme numérique de l’avenir », qui intégrera le concept de libre-service dans un nouveau système d’immigration. La première phase de cette modernisation est prévue pour l'exercice fiscal 2023–2024 et les premiers résultats sont attendus à l’automne 2023. Entretemps, il a noté qu’IRCC a déjà lancé neuf outils de suivi de l’état d’avancement des demandes pour neuf secteurs d’activités différents.

Mme Perry a aussi souligné qu’IRCC travaille avec le SCT pour passer au portail de service de demande d'AIPRP en ligne et travaille activement à l'acquisition d'un nouveau logiciel pour le traitement des demandes d'accès. Elle a rajouté qu’IRCC participe à l’initiative du Bureau de développement communautaire du SCT en matière d’accès à l’information. Selon elle, en s’attaquant aux causes profondes du volume des demandes d’accès et en améliorant ses processus, IRCC pourra mieux respecter les délais fixés par la loi et défendre les valeurs d'excellence du service à la clientèle, de transparence et de protection de la vie privée.

Stephen Burt, le dirigeant principal des données et sous-ministre adjoint du Secteur de la politique et du rendement du SCT, a dit que le plus important en ce qui concerne IRCC est que les demandes liées aux dossiers d’immigration traitées par ce ministère fassent partie des demandes de service plutôt que des demandes d’accès. Catherine Luelo, la sous-ministre et dirigeante principale de l’information, a indiqué que le programme visant la modernisation de la technologie dans le secteur de l’immigration est sur la bonne voie. Le SCT travaille déjà en étroite collaboration avec IRCC afin de numériser davantage l’expérience au sein de ce ministère.

M. Beauchamp a noté qu’IRCC a lancé en mars 2023 des outils de suivi de l’état d’avancement des demandes pour quelques secteurs d’activités sélectionnés, notamment ceux des résidents permanents et des résidents temporaires. Ce libre-service permet aux clients d’accéder à l’information eux-mêmes et de réduire leur dépendance envers les demandes d’accès. Mme Perry a dit que la modernisation de la plateforme numérique d’IRCC permettra aux clients d’accéder à l’information qu’ils recherchent sans passer par le système d’accès à l’information.

Le Comité convient que la majorité des demandes de renseignements concernant des dossiers d’immigration ou d’autres dossiers contenant de l’information relevant d’une institution fédérale qui devrait être facilement accessible par les individus concernés devraient être traitées à l’extérieur du régime d’accès à l’information. Bien que le Comité se sente encouragé par les mesures qu’IRCC est en train de prendre pour améliorer l’accès à l’information dans le domaine de l’immigration, il recommande :

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada crée un processus par lequel les ministères et organismes qui font face à des demandes continues d'accès à l'information en dernier recours pour obtenir de l'information qui devrait être disponible aux demandeurs, comme l'information liée au refus d'une demande d'immigration, traitent ces demandes en dehors du système d'accès à l'information.

Accès à l’information et peuples autochtones

Les revendications particulières

Des représentants de l’Union of BC Indian Chiefs (UBCIC) ont comparu devant le Comité et partagé les défis que le processus fédéral d'accès à l'information actuel pose en matière d'accès à la justice des Premières Nations, dans le règlement de leurs revendications particulières contre le Canada. Ils ont aussi discuté de son impact sur les efforts de réconciliation[28].

Jody Woods, directrice administrative et directrice de recherche pour l’UBCIC, a noté que l’UBCIC est l’un des plus importants programmes de recherche sur les revendications particulières au Canada. Il est présentement mandaté d’environ 220 revendications présentées par des Premières Nations de la Colombie-Britannique. L’un des sujets les plus récurrent des revendications particulières porte sur l'aliénation illégale des terres et des ressources, ou bien sur l'incapacité de protéger ou de réserver des terres ou des ressources qui auraient dû l'être en vertu de la loi coloniale.

Kukpi7 Judy Wilson[29], secrétaire-trésorière de l’UBCIC et coprésidente du groupe de travail sur les revendications particulières de la Colombie-Britannique, a résumé la situation entourant les revendications particulières comme suit :

Des revendications particulières sont présentées lorsque le Canada ne respecte pas ses obligations juridiques envers les Premières Nations. La politique du Canada sur les revendications particulières exige que les Premières Nations justifient leurs revendications au moyen de preuves documentaires. La plupart des preuves historiques dont les Premières Nations ont besoin pour appuyer leurs revendications sont la propriété du Canada et des organismes fédéraux. Étant donné que c'est le Canada qui contrôle l'accès à ces preuves, les Premières Nations sont tenues d'invoquer la Loi sur l'accès à l'information et la Loi sur la protection des renseignements personnels pour étayer leurs revendications historiques contre la Couronne. Il s'agit d'un conflit d'intérêts injuste et insoutenable.

Kukpi7 Wilson a spécifié que la plupart des preuves utiles aux Premières Nations dans leurs revendications particulières sont détenues par des institutions fédérales, comme Relations Couronne-Autochtones, Services aux Autochtones Canada et Bibliothèque et Archives Canada (BAC). À son avis, le conflit d’intérêts dans lequel se trouve le Canada est le principal obstacle à l’accès complet et équitable des Premières Nations à la justice. Selon elle, il s’agit-là d’un conflit d’intérêts « en ce qui concerne la gestion des documents et l'accessibilité à ces documents ».

Au sujet de l’accessibilité aux documents, Mme Woods et Robyn Laba, la recherchiste en chef d’UBCIC, ont toutes deux témoigné de la difficulté pour l’UBCIC d’avoir la certitude que tous les documents qui existent ont été fournis lorsque une revendication particulière est présentée. Mme Woods a souligné que cela est particulièrement notable lorsque le Canada examine des revendications particulières et qu’il lui partage des documents dont l’UBCIC ignorait l’existence ou que l’organisation n’avait jamais été en mesure de trouver ou d’obtenir.

En effet, Mme Laba a noté qu’il existe encore « des trous béants en ce qui a trait aux documents historiques » et que les « Premières Nations n'ont d'autre choix que de présenter des rapports incomplets », ce qui nuit à leurs revendications.

Problèmes du système d’accès à l’information

Kukpi7 Wilson a souligné que les problèmes systémiques qui accablent le système d’accès à l’information entravent l’accès à la justice des Premières Nations. Selon elle, ces nations de devraient pas avoir à « attendre pendant des décennies, des mois ou des années » pour finalement récupérer, dans de nombreux cas, des documents caviardés.

En réponse au fait que la LAI contient une définition de « gouvernement autochtone » qui reconnaît neuf nations autochtones, Mme Laba a affirmé que des centaines de nations autochtones existent au Canada et qu’elles devraient toutes se voir accorder le droit à la souveraineté de leurs données. Selon elle :

La souveraineté sur les données est un droit accordé aux peuples et aux nations autochtones, point final. On ne peut pas accorder un droit à certaines personnes sélectionnées dans ce groupe. C'est un droit de la personne. Il devrait s'appliquer à toutes les Premières Nations. Je dirais que c'est à elles de décider à quoi cela va ressembler en fonction de leurs propres structures de gouvernance, de leurs lois, de leurs protocoles et de leurs priorités.

Selon Mme Laba, les législations fédérales et provinciales en matière d’accès à l’information ne tiennent pas assez compte des principes PCAP des Premières Nations, soit la propriété, le contrôle, l’accès et la possession[30].

M. Rubin a confirmé que les chercheurs agissants au nom de différents groupes autochtones se frappent aussi à un mur lorsqu’ils tentent d’obtenir des informations pertinentes. Il a donné l’exemple de ses recherches sur les pensionnats et ajouté ce qui suit :

J'ai présenté des demandes de documents pour différents groupes autochtones. C'est un peu honteux qu'eux ou leurs chercheurs en revendications territoriales ne puissent pas obtenir certains documents ou qu'ils doivent attendre aussi longtemps. Le préjudice a été tellement grand, et pourtant, les agents invoquent des exceptions, par exemple à la [Gendarmerie royale du Canada (GRC)], en disant que des agressions sexuelles ou d'autres choses sont en cause dans ces documents et qu'ils ne peuvent donc pas les communiquer.

D’après Mme Maynard, il est certain que les efforts de réconciliation souffrent en raison des défis lié à l’accès à l’information. Selon elle, bien que plusieurs institutions communiquent l’information à l’extérieur du système d’accès à l’information sans attendre de se la faire demander, il y a encore beaucoup de documents nécessaires aux revendications autochtones, dont des avis juridiques. Elle a toutefois mentionné que le ministre des Relations Couronne-Autochtones a dit que son ministère discutait avec le ministère de la Justice et cherchait à faire communiquer une partie de cette information.

Mme Maynard a aussi expliqué que le Commissariat ne consulte les peuple autochtones que lorsqu’ils déposent une plainte et qu’une enquête s’impose. Le Commissariat a toutefois pris connaissance de certains cas et essaie de leur donner priorité dans ses enquêtes, étant donné les délais, le volume d’information et le caractère délicat des documents. Souvent, ces plaintes sont liées aux délais. Elle a aussi indiqué que les nations autochtones lui ont fait part du fait que la définition de gouvernement autochtone dans la LAI pose un problème pour elles.

Mme Maynard a ajouté que les plaintes que le Commissariat reçoit des Autochtones portent surtout sur des demandes pour lesquelles ils ne sont pas satisfaits de la réponse ou pour contester l’application d’une exception qui a été invoquée pour refuser de communiquer certains renseignements. Elle a donné l’exemple du secret professionnel de l’avocat, qui peut être invoqué pour des documents dont le ministère de la Justice s’est servi dans des affaires mettant en cause des Autochtones. Elle a indiqué qu’il faudrait « voir si le ministre de la Justice pourrait utiliser son pouvoir discrétionnaire pour autoriser la communication de l’information ». Selon elle, les Autochtones ont besoin de renseignements pour faire avancer leurs demandes et ils ne devraient pas avoir à demander ces informations au moyen d’une demande d’accès.

La présidente du Conseil du Trésor a elle aussi souligné la relation unique des peuples autochtones avec le régime d'accès à l'information. Elle a indiqué que ces peuples devraient pouvoir exercer un plus grand contrôle sur leurs renseignements. Elle a noté que l’examen de l’accès à l’information du SCT a permis de cerner plusieurs changements nécessaires, incluant le besoin d’élargir la définition étroite de « gouvernement autochtone » dans la LAI.

Respect de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones

Kukpi7 Wilson a discuté de l’importance que le Conseil du Trésor et le ministère de la Justice travaillent en partenariat avec les Premières Nations et leurs organisations respectives à l'établissement d'un nouveau régime de gestion de l'information qui devrait respecter les droits des Premières Nations, tels qu’énoncés dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones (DNUDPA)[31]. Entretemps :

[L]e Canada doit reconnaître son devoir de divulgation complète et respecter l'honneur de la Couronne en travaillant en partenariat avec les Premières Nations afin d'élaborer un mécanisme de surveillance indépendant qui assure aux Premières Nations un accès complet et rapide aux documents.
Le Canada doit faire des demandes d'accès à l'information des chercheurs affectés aux revendications des Premières Nations une priorité en embauchant du personnel supplémentaire spécialement pour accélérer le traitement des demandes existantes et imminentes.
Les analystes et les agents d'information du Canada doivent être informés des revendications propres aux Premières Nations, de leurs droits de recours et de leurs droits à l'information, ainsi que de l'impératif de réconciliation entre la Couronne et les Autochtones.
Le Canada doit faire de l'objectif de nouer un véritable dialogue directement avec les Premières Nations et leurs organisations représentatives une priorité dès le début de tout travail stratégique.

Kukpi7 Wilson a noté que l’indemnisation juste et équitable pour les pertes historiques est un droit énoncé à l’article 28 de la DNUDPA. Il s’agit d’un impératif politique pour progresser vers la réconciliation. Elle a rappelé que les tribunaux et tous les ordres de gouvernement ont déterminé que la réconciliation est dans l’intérêt public et une priorité politique. Elle a aussi rappelé l’obligation juridique à laquelle le gouvernement fédéral s’est souscrit en adoptant la Loi relative à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, soit « de veiller à ce que toutes les mesures nécessaires soient prises pour faire respecter la déclaration des Nations unies et atteindre ses objectifs ».

Selon Mme Laba, il est très important, surtout à la lumière de la DNUDPA, de reconnaître les droits autochtones à la souveraineté en matière de données dans l'établissement d'un mécanisme par lequel les Premières Nations pourront obtenir les renseignements les concernant, surtout dans le cadre de démarches judiciaires comme celles des revendications particulières. Mme Woods a rappelé que la résolution de ces griefs permettrait également d’ouvrir la voie au développement culturel, social et économique de ces communautés.

Mme Laba a expliqué que la question de la souveraineté des données est complexe puisqu’elle doit inclure les organes directeurs des Premières Nations. Ceux-ci doivent être mis à contribution à toutes les étapes puisque ce sont eux les propriétaires de l’information. Pour faciliter ce processus, il faudrait une surveillance indépendante garantissant « que les Premières Nations engagées dans des démarches judiciaires, en particulier contre la Couronne, aient pleinement accès aux informations auxquelles elles ont droit ».

Mme Laba a noté que l’on travaille actuellement à la mise sur pied d'un centre indépendant pour la résolution des revendications particulières[32]. Il est envisagé que cette initiative mène à la création d’un mécanisme par lequel l'information circulerait librement vers les Premières Nations engagées dans ce processus, sans que l’information nécessite un examen par le Canada, qui est une partie aux revendications.

Kukpi7 Wilson a dit que malgré le travail pour mettre en œuvre la DNUDPA à l’échelon fédéral et provincial, il faut aussi la mettre en œuvre dans la LAI et dans tous les différents dossiers. Elle a rajouté que bien que les modifications législatives prennent beaucoup de temps, elles sont essentielles pour résoudre l’arriéré important en ce qui a trait aux revendications particulières tant à l'échelon fédéral que provincial.

Kukpi7 Wilson a dit :

L'engagement du Canada à nouer un véritable dialogue avec les Premières Nations est loin de produire les résultats escomptés, et on reste loin d'atteindre les normes minimales pour l'obtention du consentement libre, préalable et éclairé des Premières Nations, conformément à l'article 40 de la déclaration des Nations Unies. Les principes des droits de la personne (tels que l'autodétermination, le respect des droits et des titres des Premières Nations et l'obtention du consentement préalable, libre et éclairé des Premières Nations) doivent être intégrés à la base même de tous les processus d'élaboration, de révision et de modification de la loi fédérale sur l'accès à l'information et des mécanismes réglementaires et administratifs connexes.

Mme Woods a rajouté sur l'engagement du Canada à nouer un véritable dialogue avec les Premières Nations :

Nous avons participé au processus dans le cadre du projet de loi C‑58. Nous avons donné notre point de vue pour ce qui est des documents du ministère de la Justice pour les nations autochtones en ce qui concerne la modernisation de la Loi sur la protection des renseignements personnels, et nous avons collaboré avec le Secrétariat du Conseil du Trésor relativement à ce processus. Or, je dois dire que, bien que tout le monde soit gentil, ces expériences ont été bien en deçà non seulement de nos attentes, mais aussi de ce qui constitue l'engagement du Canada, à notre sens, en vertu de la déclaration des Nations unies. Tout est fait vraiment à la dernière minute.

Mme Woods a souligné que lorsqu'on ne donne pas aux Premières Nations suffisamment de temps pour se préparer dans le cadre d’un processus de consultation, il ne s'agit pas d'un partenariat, alors que c’est ce dont ils ont besoin, et ce à quoi ils s’attendent.

Selon le Comité, les peuples autochtones ne devraient pas avoir à faire des demandes d’accès à l’information pour avoir accès aux documents historiques dont ils ont besoin pour poursuivre des revendications particulières. Il estime aussi que la définition de « gouvernement autochtone » dans la LAI devrait être mise à jour. Par conséquent, il recommande :

Recommandation 4

Que le gouvernement du Canada travaille avec les peuples autochtones pour éliminer les obstacles à l'accès à l'information.

Recommandation 5

Que le gouvernement du Canada travaille avec les peuples autochtones pour élaborer un mécanisme de surveillance indépendant qui assure un accès complet et rapide aux documents détenus par les institutions fédérales aux fins de la justification des revendications historiques.

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l'accès à l'information afin de mettre à jour et d'harmoniser le langage utilisé en relation avec les peuples et les communautés autochtones, y compris la définition de « gouvernement autochtone » dans la Loi.

Protection des personnes vulnérables dans les Forces armées canadiennes

Patrick White, un membre des Forces armées canadiennes (FAC) qui a comparu à titre personnel, a indiqué faire partie des survivants d’inconduites sexuelles au sein des forces armées.

M. White a expliqué que les membres des FAC les plus vulnérables comptent sur le régime d’AIPRP pour avoir accès aux renseignements et aux dossiers essentiels dont ils ont besoin pour prendre des décisions éclairées sur leurs droits et déposer des plaintes complètes et bien étayées. Ces personnes peuvent être des victimes de viol ou d'agression sexuelle grave, des victimes de menaces et d'abus de représailles de la chaîne de commandement, des militaires qui se sont vu refuser à tort des possibilités d'emploi ou un remboursement de dépenses, ou encore un jeune de 16 ans qui a reçu l'autorisation de ses parents de s'engager dans les FAC pendant ses études secondaires.

S’inspirant de son expérience personnelle, M. White a expliqué que la quantité d’information requise avant qu’une demande d’accès puisse être traitée est l’une des difficultés rencontrées par les victimes et survivants lorsqu’elles utilisent le système d’accès à l’information. Par exemple, si un demandeur fait une demande d’accès qui vise des dossiers faisant état de l’inconduite du membre des FAC l’ayant agressé, il lui faut absolument fournir le numéro de matricule de la personne visée, ce qui est une information protégée. Cela constitue un obstacle en matière d’accès à l’information pour les victimes qui doivent parfois s’adresser à la chaîne de commandement pour demander ce numéro de matricule. La victime en question risque d’être identifiée comme demandeur potentiel de documents alors que le processus devrait être anonyme.

M. White a rajouté qu’un membre des forces dispose de 90 jours pour déposer un grief à partir du moment où un geste a été posé ou une décision a été prise, ou encore du moment où, selon toute vraisemblance, le membre aurait dû être au fait d’un tel geste ou d’une telle décision. Le problème est que, selon M. White, le ministère de la Défense nationale (MDN) se montre très strict en ce qui concerne ce délai, mais moins strict quant au respect des exigences de la LAI et des délais de réponse. Une victime qui a besoin d’information pour déposer un grief pourrait donc ne pas le déposer si elle n’a pas accès à l’information requise à temps.

En réponse à des questions relatives au témoignage de M. White concernant les délais de griefs par opposition aux délais de réponse de demande d’accès, Anne Bank, directrice exécutive de la direction de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels au ministère de la Défense nationale, a dit n’avoir aucune opinion sur le temps requis pour soumettre une plainte à la commissaire à l’information.

M. White a aussi noté que la Direction de l'AIPRP du MDN doit transmettre les demandes de dossiers à différentes composantes des FAC ou du ministère (les dépositaires de dossiers) pour obtenir l’information recherchée. Selon lui, cela crée des problèmes additionnels, comme une opportunité pour la personne concernée à qui l’on s’adresse d’obtenir des copies de courriels, d’effacer des courriels incriminants ou de mettre quelqu’un dans l’embarras avant de fournir les documents. M. White a décrit cette crainte comme un obstacle à la divulgation complète et honnête des dossiers.

M. White a également expliqué que lorsque les membres des FAC reçoivent des demandes d'accès auxquelles ils doivent répondre, ces derniers doivent fournir les critères de recherche qu'ils ont utilisés (p. ex., les termes pouvant être recherchés dans Microsoft Outlook). Ces critères de recherche ne sont toutefois pas divulgués au demandeur, à moins qu'il soumette une demande d’accès subséquente.

Un autre élément problématique de l’utilisation du système d’AIPRP soulevé par M. White est le risque d'être victime de représailles après avoir présenté une demande d’accès. Selon le sujet de la demande ou le moment où elle a été présentée, les responsables au sein des FAC peuvent formuler des hypothèses à l’égard de l’individu à l'origine de cette démarche. D’après lui, il est alors fort possible que des mesures administratives soient prises envers cet individu ou que des changements soient apportés, car c'est en utilisant des moyens très subtils et difficiles à détecter que l'on victimise les gens qui tentent d'utiliser le système en place. Par exemple, M. White a dit faire « ce témoignage devant le Comité aujourd'hui en sachant très bien que je risque fort de subir des représailles ou des tentatives de représailles de la part des Forces armées canadiennes et du ministère de la Défense nationale ».

D’après M. White, toute étude sur le système d’accès devrait prendre en compte l’interaction des victimes et des survivants de la crise des abus de pouvoir et d’inconduites sexuelles dans les FAC avec le régime d'AIPRP. M. White a fait les recommandations suivantes au Comité :

  • Mener une étude indépendante sur les abus du régime d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels par le ministère de la Défense nationale et les Forces armées canadiennes.
  • Créer de véritables pénalités pour les ministères qui ne respectent pas les dispositions sur l'AIPRP et offrir de véritables recours aux victimes, aux survivants et aux plaignants.
  • Envisager la création d'un système de traitement accéléré dans le cadre du régime d'AIPRP pour les victimes et les survivants d'inconduite connus.
  • Exiger que certains renseignements essentiels soient obligatoirement divulgués aux victimes ou aux plaignants, à moins que ces derniers n'y renoncent explicitement, par un consentement éclairé donné par écrit.
  • Exiger la divulgation obligatoire des noms de tous les détenteurs de documents qui participent activement au traitement ou au processus décisionnel à la suite d'une plainte.
  • Suspendre le délai de prescription pour porter plainte, comme pour déposer un grief, quand une demande d'information a été faite et que la divulgation de cette information serait pertinente pour la rédaction de la plainte.
  • Veiller à ce que les dossiers soient conservés après la retraite et à ce que des sanctions administratives et disciplinaires claires s'appliquent à toute personne contrevenant à ces directives et cherchant à utiliser la retraite pour se soustraire à l'obligation de rendre des comptes.
  • Étudier et mettre en œuvre des options pour éliminer la culture du « code d'honneur » dans la divulgation des dossiers.
  • Créer des sanctions administratives et disciplinaires particulières pour quiconque évite de créer des dossiers ou les détruit prématurément.
  • Repérer dès la réception les demandes de documents auxquelles la chaîne de commandement pourrait s'opposer et imposer une surveillance accrue du processus de divulgation des documents.
  • Exiger la divulgation obligatoire des termes de recherche utilisés par les détenteurs de documents en réponse aux demandes d'information[33].

M. White a exprimé de la sympathie pour ceux qui ont vécu des expériences difficiles et qui peuvent souffrir d’un traumatisme si profond qu’il devient impossible pour eux de composer avec les obstacles du système d’accès à l’information et l’absence d’un soutien et d’une divulgation pleine et entière. Selon lui, c’est la raison pour laquelle ce système doit être conçu en ayant à l'esprit les personnes les plus vulnérables. Il s’est d’ailleurs dit inquiet du niveau de compréhension du système d’AIPRP par les membres des FAC.

Enfin, M. White a réitéré que de vrais obstacles se dressent devant les victimes, les plaignants et les survivants qui veulent avoir accès à des informations essentielles. Il a indiqué qu’il est possible qu’aucune mesure ne soit prise dans un cas d’agression sexuelle en raison du fait que la victime n’a pas pu avoir accès à l’information dont elle avait besoin. Selon lui, même si des mesures ont été prises, il y a encore beaucoup à faire pour régler certains problèmes dont les gens n'ont pas vraiment conscience[34].

Considérant le témoignage de M. White, le Comité recommande :

Recommandation 7

Que le gouvernement du Canada étudie la possibilité de créer un système d'accès à l'information accéléré dans le cadre du régime d'accès à l'information pour les victimes et survivants d'inconduite militaire.

Recommandation 8

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l'accès à l'information pour y insérer des dispositions interdisant strictement aux coordonnateurs de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels de demander aux demandeurs de s'identifier.

Protection des dénonciateurs

M. Cutler est d’avis que les lacunes du système d’accès à l’information affectent la capacité des dénonciateurs à se manifester. Par exemple, les dénonciateurs ne peuvent pas attendre indéfiniment pour des documents dans le cadre d’une demande d’accès. « Plus on met de temps à répondre à la demande, plus ils risquent d'être repérés et démasqués. Ils refusent donc d'emprunter cette voie. » Selon M. Cutler, les dénonciateurs font tout ce qui est en leur pouvoir pour contourner le régime d’accès.

M. Cutler a rajouté que plus d’un des dénonciateurs externes avec lesquels il fait affaire aujourd’hui lui ont dit « qu'il y a de longs délais et que des documents sont détruits » par le gouvernement.

Le Comité note que la conservation de renseignements personnels par les institutions fédérales est gérée conformément à l’article 6 de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les articles 4 et 7 du Règlement sur la protection des renseignements personnels.

Selon M. Conacher, le système actuel de protection des dénonciateurs protège ceux qui sont visés par les dénonciations plutôt que de protéger les dénonciateurs qui signalent des actes répréhensibles.

M. Cutler, M. Rubin et M. Conacher ont tous convenu que le Canada ne dispose pas de mesures de protection appropriées pour les dénonciateurs.

Selon le Comité, alors que le système d'accès à l'information n’est pas explicitement utilisé pour aider les dénonciateurs, il est important qu'il serve tous les Canadiens de manière égale et efficace. Le projet de loi C-290, Loi modifiant la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles, est actuellement examiné par le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires[35]. Parallèlement, le gouvernement a mis en place un groupe de travail externe qui étudiera les révisions à apporter à la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles[36]. Le système d'accès à l'information devrait être amélioré pour compléter ces efforts visant à améliorer les protections des dénonciateurs au Canada.

Accès aux documents historiques

Le dernier des six enjeux urgents soulevés par les témoins est celui de l’accès aux documents historiques, dans lequel est inclut l’accès aux documents historiques de l’Holocauste.

Alan Barnes, chef de projet du « Canadian Foreign Intelligence History Project » et chercheur principal de la « Norman Paterson School of International Affairs » de l’Université Carleton, a soulevé un problème qui selon lui passe presque inaperçu, soit la difficulté d'accéder aux archives du gouvernement. À son avis, la discussion sur l'accès à l'information porte surtout sur les documents courants, mais il existe également un enjeu relatif à l'obtention des documents historiques du gouvernement.

M. Barnes a expliqué qu’il y a encore énormément de pans de l’histoire canadienne dont la diffusion demeure restreinte, notamment dans les catégories suivantes : le renseignement, la sécurité, les affaires internationales et la défense. Ces domaines sont touchés par l'article 15 de la LAI, qui prévoit des exceptions pour tout ce qui pourrait nuire aux affaires internationales canadiennes et à la défense. Ainsi, de nombreux événements survenus pendant la guerre froide, et depuis cette période, demeurent à diffusion restreinte.

M. Conte a noté qu’avec l’adoption de la LAI en 1983, le système de déclassification des documents historiques a pris fin. Il a décrit la situation comme étant catastrophique pour les personnes qui ont un intérêt pour la recherche historique dans certains domaines, dont les prisons, l’armée et toutes autres formes institutionnalisées de violences commises par l’État au pays et à l’étranger. Par exemple, il a noté que lorsqu’on consulte les dossiers de surveillance de la GRC de BAC sur le Parti communiste du Canada des années 1930 ou le soulèvement de l'Université Sir George Williams de 1969, les documents à communiquer en réponse à une demande d’accès sont largement caviardés, et même des articles publiés par le Globe and Mail et d'autres médias grand public de l’époque sont entièrement caviardés par le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS).

M. Conte a rajouté qu’une contestation réussie contre ce caviardage ne fait que donner accès à l’auteur de la demande d’accès. Toute autre personne intéressée à consulter ce même dossier historique doit repasser par le même processus.

M. Conte a partagé des exemples de la frustration ressentie par les journalistes à l’égard de la LAI et de l’accès à des documents historiques[37]. Par exemple, il a raconté avoir pris cinq ans pour rédiger un article en raison des retards concernant l’accès à l’information sur le dossier COINTELPRO au Canada[38]. Les archives recherchées étaient entre les mains de BAC qui les catégorisaient toujours de menace opérationnelle, alors qu’aux États-Unis, les Archives nationales à Washington, D.C., avaient déjà déclassifié les documents reliés à cette affaire. En ce qui concerne l’incidence de ne pas avoir accès à certains documents contemporains ou historiques relatifs au racisme systémique, comme ceux de COINTELPRO, M. Conte a dit que ce manque de transparence est selon lui une preuve de la suprématie blanche institutionnelle du Canada.

À ce sujet, Nicole Giles, sous-directrice et sous-ministre adjointe principale du département des politiques et partenariat stratégique du SCRS, a dit que sans pouvoir discuter spécifiquement du cas COINTELPRO, le SCRS « a souvent des préoccupations pour la sécurité nationale, liées à d'anciens motifs, dans les dossiers », ce qui interdit au SCRS de révéler des informations qui pourraient avoir des conséquences sur certaines de ses sources.

Mme Giles a précisé que chacun des partenaires du Groupe des Cinq possède son propre système de déclassification qui diffère des normes législatives canadiennes s’appliquant à la déclassification de documents. Ainsi, bien que le SCRS fasse son possible pour déclassifier l’information demandée, la législation canadienne ne permet pas toujours d’en déclassifier autant que la législation étrangère le permet.

En effet, M. Barnes a indiqué qu’une des difficultés pour accéder aux documents historiques s’explique par le fait qu’à ce jour, le Canada ne possède aucun mécanisme permettant de déclassifier et de publier les archives après un certain temps. Le mécanisme principal pour accéder aux documents historiques du gouvernement demeure donc les demandes d’accès sous la LAI et la LPRP. Ces demandes sont alors examinées suivant le même processus que pour les documents courants : en ignorant le contexte historique des archives et en appliquant les mêmes critères de caviardage. Puisque le gouvernement ne possède aucun mécanisme de surveillance des archives déclassifiées, les ministères consacrent un temps considérable au réexamen d’archives déclassifiées ailleurs. Souvent, l’opération prend des années et pour de nombreux cas, elle aboutit à des plaintes auprès du commissaire à l'information.

M. Barnes a reconnu la nécessité de protéger certains renseignements contre des acteurs malveillants, mais il a insisté sur le fait qu’il faudrait cesser de négliger le facteur du temps. Il a expliqué « que ce qui peut être confidentiel aujourd'hui l'est beaucoup moins 20, 30 ou 40 ans plus tard ». Selon lui, il devrait y avoir un mécanisme permettant de reconnaître l’évolution d’un document et de différencier les renseignements réellement délicats « de ce que la fonction publique préférerait que les autres ne sachent pas ». À son avis, il existe une différence entre le désir bureaucratique de confidentialité et les véritables menaces à la sécurité nationale. Bref, il a souligné que « le temps est un facteur très important à prendre en compte ».

M. Barnes a expliqué que chaque gouvernement possède sa propre réglementation sur l’accès à l’information et des procédures permettant la divulgation des dossiers moins sensibles tout en maintenant un contrôle nécessaire sur ceux qui sont beaucoup plus délicats, telles les questions de politique et de défense nationale. Mais ce n’est pas le cas au Canada où l’on traite tous les documents comme s'ils étaient aussi délicats qu'ils l'étaient lorsqu'ils ont été créés.

Mme Maynard a elle aussi soulevé le fait qu’au fil du temps, les documents perdent leur caractère confidentiel. Selon elle, un programme de déclassification permettrait à des experts de passer à travers les documents et de rétablir automatiquement l’accès à ceux qui, comme c’est souvent le cas, sont surclassés après plusieurs années.

Comme la commissaire, M. Barnes est d’avis que le Canada devrait créer un mécanisme de déclassification, distinct du processus d’AIPRP, qui permettrait de faire un examen et une déclassification proactifs des documents après un délai fixé. Il a aussi mentionné que pour améliorer l’accès aux documents historiques, il faudrait restreindre davantage « l'arsenalisation du processus de consultation, où les ministères utilisent le processus de consultation pour remettre les choses à plus tard ».

M. Barnes a par ailleurs indiqué que le système actuel embête BAC parce qu'il implique que l'immense majorité des archives du gouvernement sur le renseignement, les affaires internationales et la défense ne seront jamais accessibles aux chercheurs autrement que par une demande d’accès sous la LAI ou la LPRP. D’autres ministères sont également touchés par ce manque de déclassification, dont le Bureau du Conseil Privé (BCP) et le ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement (Affaires mondiales Canada) dont les « archives n'ont pas encore été transférées à [BAC], même si la plupart d'entre elles remontent à plusieurs décennies. Par exemple, le [BCP] détient encore des documents datant de la Seconde Guerre mondiale. »

Toutefois, Mary Francoli, doyenne associée et directrice du Arthur Kroeger College of Public Affairs, a expliqué que la divulgation de dossiers historiques ne devrait pas se faire de façon automatique, parce que différents facteurs peuvent faire en sorte qu’un document d’archives ne puisse être rendu public. C’est le cas, par exemple, des documents liés à la sécurité nationale dont BAC a la garde.

Mme Francoli a noté qu’à l’extérieur du système d’accès à l’information, BAC a mis en place des mesures intéressantes pour favoriser l’accès à l’information, par exemple un efficient système d’examen en bloc permettant de repérer, parmi des piles de dossiers et de boîtes de vieux documents, ceux qui renferment des renseignements ne pouvant être divulgués en vertu de la LAI. Il semblerait que l’on ait ainsi pu rendre accessibles des millions de pages de documents d’archives.

Kristina Lillico, directrice générale de l’AIPRP chez BAC, a confirmé que plus de 45 millions de pages de documents ont été rendues accessibles aux cours des dernières années grâce à une approche basée sur les risques. Bien que ce nombre puisse sembler impressionnant, elle dit croire qu’il y en a des milliards d'autres qui attendent d'être découvertes et qui ne devraient pas faire l’objet d’une demande d’accès.

En ce qui concerne le potentiel du numérique, M. Lapointe a dit garder espoir que les avancées en matière d’apprentissage automatique permettront de numériser et de lire certains documents historiques.

Cependant, certains témoins ont discuté des difficultés et des coûts liés à la numérisation des documents historiques. Par exemple, Mme Lillico a indiqué qu’il reste beaucoup de documents historiques à numériser et que la numérisation a un coût. Il faut disposer du stockage adéquat pour gérer, conserver et migrer ces éléments. M. Rubin a suggéré qu’investire dans le numérique est « ce qui rendra l’accès à l’information plus difficile de même que l’obtention de renseignements personnels et du consentement des Canadiens à les communiquer ».

Micheal Wernick, titulaire de la chaire Jarislowsky sur la gestion dans le secteur public de l’Université d'Ottawa et ancien greffier du Conseil privé, a lui aussi noté qu’il y a un coût élevé lié à la numérisation de documents. Il y a également un

coût lié à la main-d'œuvre nécessaire pour aller chercher et trier les documents, appliquer les exemptions et envoyer les documents en haut de la chaîne. Et plus haut dans la chaîne, il faut composer avec le temps limité des cadres supérieurs qui doivent approuver et signer la version finale, etc. […] Le coût pour accomplir cette fonction est certainement élevé.

M. Wernick a fait remarquer que la tenue des documents gouvernementaux est répartie dans plus de 300 organisations, des milliers de lieux de travail et qu’il y a différents formats techniques des documents historiques : format papier ou dans des logiciels des années 1970 ou 1980. Il n’y a jamais eu selon lui d’investissement important dans la numérisation des documents historiques et le rattrapage serait énorme. Ces documents sont donc les plus difficiles à gérer et récupérer et ils ne se prêtent pas à la numérisation pour la recherche par mots-clés.

Accès aux documents historiques sur l’Holocauste

Le 18 avril 2023, date du Yom HaShoah, le jour du souvenir de l’Holocauste, des représentants de B’nai Brith Canada, le Comité pour la justice Canada (B’nai Brith), ont comparu devant le Comité pour discuter des difficultés particulières que ce Comité a rencontré dans les efforts qu’il mène pour obtenir des documents historiques qui lui permettraient d’améliorer la compréhension et l’apprentissage des leçons de l’Holocauste.

David Matas, conseiller juridique principal de B’nai Brith, a rappelé que

[l]e Canada, en tant que membre de l'Alliance internationale pour la mémoire de l'Holocauste, a à cœur la commémoration de l'Holocauste. Pour se souvenir de l'Holocauste, il faut se souvenir des victimes, sans toutefois oublier leurs meurtriers. Il faut donc traduire les meurtriers en justice de leur vivant. Après leur décès, il faudra s'assurer que le public ait accès aux dossiers des atrocités qu'ils ont commises.

M. Matas a expliqué qu’après l’Holocauste, il a été rapporté que plusieurs criminels de guerre et collaborateurs nazis se sont sauvés au Canada pour trouver refuge et échapper à la justice. Par exemple, le programme canadien sur les crimes contre l'humanité et les crimes de guerre mentionne dans un de ses rapports que depuis le début de ses travaux, le ministère de la Justice a ouvert et examiné plus de 1 800 dossiers de cette nature[39]. Or, le département de la Justice et la GRC n’ont pas donné de réponse satisfaisante sur ces dossiers malgré les demandes d’accès de B’nai Brith.

M. Matas a rajouté que pour tirer leçon de l’Holocauste et brosser un tableau authentique et complet de ce pan de l’histoire, il faut rendre publics les dossiers des personnes qui ont été identifiées ou qui ont fait l’objet d’enquêtes par la commission sur les crimes de guerre ou le gouvernement du Canada. Pourtant, les efforts de B’nai Brith pour avoir accès aux dossiers et documents pertinents ont sans cesse été entravés.

Parmi les documents auxquels B’nai Brith demande accès se trouve la partie 2 du rapport de la Commission d’enquête sur les criminels de guerre dirigé par l’Honorable Jules Deschênes, dont la première partie a été publiée en décembre 1986[40]. Cette commission a fait plusieurs recommandations qui ont généralement été acceptées par le gouvernement canadien[41]. Cependant, plusieurs documents importants en lien avec cette enquête n’ont toujours pas été rendus publics ou, s’ils l’ont été, sont largement caviardés. Par exemple, le rapport Rodal, un rapport historique sur la politique canadienne concernant l’établissement de criminels de guerres nazis au Canada, est public mais fortement caviardé, ce qui nuit considérablement à la compréhension du contexte du rapport[42].

Dans son mémoire soumis au Comité, B’nai Brith fait deux recommandations. Premièrement, il a recommandé de modifier la LAI afin d’obliger la divulgation des documents relatifs aux criminels de guerre nazis se trouvant au Canada et tout autre résidant canadien qui a été complice de l’Holocauste[43]. Deuxièmement, il a recommandé l’établissement d’archives numériques publiques pour tous les documents gouvernementaux relatifs à l’Holocauste et de les organiser et les rendre facilement accessibles par l’entremise de BAC[44].

M. Matas a noté que dans certaines juridictions, comme aux États-Unis et dans l’Union européenne, des lois précises sur la divulgation des données reliées à l’Holocauste existent. Michael Wenig, avocat chez Matas Law Society et pour B’nai Brith, a rajouté que la législation américaine a permis de créer un « groupe de travail inter-organisations chargé de recueillir les documents relatifs à l'Holocauste provenant de l'ensemble du gouvernement fédéral, de les organiser et de les transmettre aux Archives nationales ». Les Archives nationales américaines ont ensuite créé des archives publiques pour rendre tous ces documents accessibles. Selon M. Matas, une modification de la LAI qui traiterait spécifiquement des documents liés à l’Holocauste pourrait donc s’inspirer de ce qui se fait dans d’autres juridictions.

Systèmes de classification et de déclassification des documents

Selon Mme Francoli, il existe de nombreuses balises pouvant guider la classification des documents. Cependant, elle n’a pas l’impression que l’on procède toujours de façon uniforme selon le ministère ou l’organisme concerné. Elle a souligné que la mesure dans laquelle la personne qui effectue la classification est compétente en la matière affecte la classification des documents. Elle est d’avis qu’il y a une tendance à attribuer aux documents une classification de sécurité trop élevée, ce qui les rend inaccessibles. Elle a dit qu’il serait bon d’envisager de mettre en place un système de déclassification.

M. Barnes a aussi supposé que si les documents transmis à BAC étaient classifiés par leur ministère d’origine comme des documents ouverts, alors il serait possible pour les chercheurs de les consulter. Or, comme indiqué ci-dessus, beaucoup des documents gouvernementaux transférés à BAC demeurent à diffusion restreinte, de sorte que tous ces documents doivent faire l'objet d'une demande d'accès afin d’être consultés. Il a souligné que si les documents « sont conservés sous forme classifiée, il n'existe actuellement aucun autre moyen d'y accéder que le processus très fastidieux de la demande d'accès à l’information ». Selon M. Barnes il faudrait donc une idée beaucoup plus claire au sein du gouvernement de ce qui est réellement confidentiel et de ce qui ne l'est pas, c’est-à-dire une directive sur le processus de classification.

Mme Maynard a noté que l’on peut effectivement se demander si certains documents auraient dû être classés « secret » ou « très secret ». Le Commissariat tente de démontrer aux fonctionnaires que ce n’est pas parce qu’un document porte l’une ou l’autre de ces mentions que les exceptions de la LAI doivent s’appliquer. La classification « secret » ou « très secret » doit être prise en considération. Toutefois, elle ne doit pas automatiquement entraîner l’application de l’exception relative à la sécurité nationale sous la LAI. Il faut faire attention d’appliquer la LAI comme elle est écrite et non en fonction de la classification du document.

En ce qui concerne la déclassification, Leslie Soper, directrice générale de Politiques de la sécurité nationale du ministère de la Sécurité publique et de la Protection civile (Sécurité publique Canada ou SPC), l’a décrit comme faisant référence à la divulgation publique de documents. Selon elle, « il convient de se rappeler que le niveau de classification reflète l'ampleur de l'atteinte à l'intérêt national qui serait causée si les renseignements étaient divulgués ». Elle a expliqué que

lorsqu'un document est déclassifié, il a été déterminé que la diffusion du document complet, ou peut-être encore partiellement caviardé, ne causerait plus de préjudice. Cependant, même après avoir été déclassifié, un document peut encore devoir être caviardé pour supprimer des renseignements de nature délicate pour d'autres raisons, comme la protection de renseignements personnels.

Mme Soper a confirmé que le Canada ne dispose pas d'une politique-cadre officielle de déclassification des documents relatifs au renseignement et à la sécurité nationale. Pour résoudre ce problème, SPC travaille en collaboration avec la communauté du renseignement national et de la sécurité, le SCT et BAC, à l'élaboration d'un cadre de déclassification qui établit une approche pratique de déclassification proactive dans cette communauté.

Mme Soper a reconnu que la publication de documents historiques aiderait les chercheurs publics et universitaires. Selon elle, le travail entamé par SPC représente donc un pas dans la bonne direction, car l’examen proactif de la déclassification réduirait le fardeau de traitement des demandes d'accès. Elle a toutefois noté que pour soutenir la diffusion proactive des documents historiques, il faudrait une mise en œuvre d’un cadre complet et que cela nécessiterait un engagement considérable de ressources.

Mme Soper a rajouté que le travail de déclassification entamé par SPC reflète l'engagement du gouvernement en matière de transparence à l'égard de la sécurité nationale. Cet engagement consiste à mieux renseigner les citoyens canadiens au sujet de la sécurité nationale à l'appui de la responsabilité démocratique, tout en évitant de fournir des renseignements qui pourraient compromettre la sécurité du Canada ou de la population canadienne.

La présidente du Conseil du Trésor a convenu que la déclassification est une partie importante du travail d'amélioration du système d'AIPRP. L’une des conclusions du rapport de l'examen de l’accès à l’information du SCT est d’ailleurs que: « la déclassification systématisée des documents favorise la transparence et la responsabilisation du gouvernement [et] améliore l'accès à l'histoire du Canada ». Elle a mentionné la participation du SCT au projet pilote de déclassification mené par SPC et indiqué que le SCT examine toujours la façon dont ce projet pourrait l’orienter sur les moyens de poursuivre la déclassification. M. Burt a toutefois souligné que le projet pilote a dévoilé certains des défis qui se posent lorsqu’on examine des dossiers historiques en vue de les déclassifier ainsi que le genre de ressources nécessaires pour le faire.

M. Barnes, pour sa part, a réitéré qu’il est très important d’avoir un processus systématique de déclassification des documents après une période donnée. Ainsi, la déclassification serait effectuée par des gens qui connaissent bien les exceptions plutôt que d'avoir chaque ministère qui essaie d'interpréter le matériel de façon isolée.

Mme Lillico a fait remarquer que dans d’autres pays la législation sur l’accès à l’information permet une meilleure gestion des documents. Elle est donc elle aussi d’avis qu’une approche proactive de déclassification alignerait le Canada sur les autres pays du Groupe des Cinq, qui ont tous des programmes de déclassification, gérerait l'information au niveau approprié, diminuerait les coûts et les efforts et réduirait le fardeau du système d'AIPRP sur BAC. Une clause de temporisation permettrait de reconnaître la sensibilité réduite de la plupart des informations au fil du temps et garantirait que les dossiers historiques soient accessibles de manière cohérente et prévisible.

Approches internationales

M. Barnes a rappelé que le Canada est le seul pays du Groupe des cinq à ne pas posséder un système de déclassification des archives. Ainsi, selon lui, le Canada pourrait s’inspirer de ses proches alliés sans nécessairement réinventer la roue.

Mme Maynard a expliqué que, contrairement au Canada, les États-Unis ont un programme de déclassification des documents. Tous les 20 ans, les documents secrets ou très secrets font l’objet d’un examen. Selon elle, le Canada devrait aussi avoir un tel programme, que ce soit sur 15, 20 ou 50 ans[45]. Elle a aussi mentionné qu’un programme de déclassification existe au Royaume-Uni. À son avis, l’implantation d’un régime similaire au Canada permettrait aux historiens, aux bibliothécaires, aux archivistes et à ceux qui s’intéressent à l’histoire du Canada et en particulier aux documents relatifs à la sécurité nationale d’avoir accès aux documents plus rapidement. Elle a mentionné que le Commissariat a d’ailleurs publié une Stratégie de déclassification pour les documents relatifs à la sécurité nationale et au renseignement en 2020, qui propose des pistes possibles pour l’établissement d’une telle stratégie au Canada.

M. Barnes a aussi expliqué qu’aux États-Unis, des manuels indiquent quels renseignements sont de nature sensible et comment ils doivent être classés. Il a précisé que dans ce pays, c'est le directeur du renseignement national qui rédige ces manuels.

Même si M. Barnes a reconnu que les États-Unis possèdent « un bon système de déclassification des documents », selon lui, « le Royaume-Uni a un système beaucoup plus efficace ». Il a expliqué que la loi britannique exige que les documents gouvernementaux soient examinés au bout d’un nombre spécifique d’année et qu’ils soient en grande partie déclassifiés et transférés aux archives nationales[46]. La loi britannique prévoit quelques exceptions afin de garder des documents confidentiels plus longtemps. Il a rajouté que

[L]orsqu'ils sont transférés aux archives, ils deviennent automatiquement accessibles au public, alors qu'au Canada, l'accès à de nombreux documents gouvernementaux transférés aux archives demeure restreint. Par conséquent, Bibliothèque et Archives Canada doit consulter le ministère d'origine pour savoir s'ils peuvent être divulgués. C'est un processus beaucoup plus compliqué.

M. Barnes a comparé le système américain et le système britannique à celui du Canada.

Le système américain est assez compliqué. Il y a plusieurs éléments. Il y a la loi sur la liberté d'information, qui est similaire à la loi canadienne sur l'accès à l'information, mais il y a aussi d'autres mécanismes permettant de divulguer des documents de façon proactive. Par exemple, les divers organismes du renseignement ont des bureaux responsables de l'histoire, qui divulguent des séries de documents de façon proactive. Par exemple, lors de l'anniversaire de la crise des missiles cubains ou d'un autre événement historique, ces bureaux divulguent un lot de documents, et souvent, une conférence universitaire a lieu en parallèle. Ce concept nous est totalement étranger au Canada.
Le Royaume-Uni a un système différent. Là‑bas, les documents sont divulgués au bout de [20] ans et ils sont versés directement dans les archives, qui sont accessibles. Il y a certaines restrictions, mais même les services du renseignement britanniques ont agi de façon proactive en appuyant la divulgation de documents officiels et autorisés sur l'histoire des diverses agences du renseignement, ce qui a permis d'en apprendre davantage sur la façon dont ces organismes ont fonctionné. Cela ne s'est pas fait au Canada.

M. Barnes a proposé que le gouvernement du Canada adopte une avenue similaire à celle de ses alliés en créant « un mécanisme de déclassification, distinct du processus de [l’AIPRP], qui permettrait l'examen et la déclassification proactifs des documents après un délai fixé ».

Autres pistes de solution

Outre la mise en place d’un système de déclassification exhaustif, M. Barnes a discuté de deux autres pistes de solutions pour améliorer l’accès aux documents historiques.

D’abord, M. Barnes a noté qu’il existe divers aspects des dispositions actuelles de la LAI qui rendent très difficile l’accès aux documents historiques et qu’il faudrait améliorer. Il a proposé deux solutions. Premièrement, il faudrait améliorer l’organisation des demandes d’accès déjà rendues publiques. Présentement, les ministères n’ont aucun moyen de savoir ce que les autres ministères ont déjà divulgué. Les fonctionnaires passent donc énormément de temps à réexaminer des documents qui parfois ont déjà été divulgués par un autre ministère. Deuxièmement, il faudrait assurer une meilleure gestion de l’information puisque les problèmes liés à cette gestion se répercutent sur l’accès à l’information. Par exemple, si un chercheur n’est pas au courant de l’existence d’un document en particulier, il ne peut pas le demander, et les demandes d’informations générales sur un sujet donné ne permettent généralement pas d’obtenir des informations utiles.

Ensuite, il a discuté du problème de « surclassification » des documents. À ce sujet, M. Barnes ne croit pas qu’il y ait de solution miracle à ce problème. Il a noté que la culture du secret et de surprotection des documents qui ne sont plus aussi sensibles qu'ils ont pu l'être à une autre époque est présente au sein des ministères. Par exemple, il a souligné le fait qu’une étude pilote sur le niveau de classification d’un grand nombre de documents du Comité mixte du renseignement datant des années 1950 et 1960 a été menée dans le cadre du projet de déclassification lancé par le SPC. Les fonctionnaires qui ont examiné ces dossiers ont déterminé que la plupart de ces documents pouvaient être divulgués. Cependant, les ministères qui possèdent ces documents n’étaient pas prêts à accepter ce genre de recommandations et essaient encore de déterminer ce qu'ils vont en faire. Améliorer l’accès aux documents historiques passe donc peut-être par un changement de culture.

En se fondant sur les témoignages entendus et les documents et mémoires qu’il a reçus, le Comité estime que le Canada bénéficierait grandement d’un système de classification et de déclassification plus robuste. Un tel système pourrait assurer un meilleur accès aux documents historiques pour le public, les chercheurs, les journalistes et toute autre partie intéressée. Il pourrait également réduire le nombre de demandes d’accès à l’information. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 9

Que le gouvernement du Canada révise son système de classification des documents secrets et assure la formation du personnel responsable du traitement des demandes d’accès à l’information des institutions fédérales pertinentes à l’égard de ce système.

Recommandation 10

Que le gouvernement du Canada améliore le système de déclassification pour offrir un meilleur accès à l’histoire du Canada.

Recommandation 11

Que le gouvernement du Canada mette en place un processus de divulgation automatique des documents historiques datant de plus de 25 ans.

Recommandation 12

Que le gouvernement du Canada établisse et mette en œuvre des directives de classification des documents plus claires et un système de déclassification.

Chapitre 3 : État de l’accès à l’information dans certaines institutions fédérales

En plus du cas d’IRCC discuté ci-dessus, le Comité s’est aussi intéressé à l’état du système d’accès à l’information de sept institutions figurant dans la liste des institutions fédérales ayant fait l’objet du nombre le plus élevé de plaintes auprès du Commissariat dans la dernière année[47].

Gendarmerie Royale du Canada

David Janzen, le directeur général de la Sous-direction de l’AIPRP de la GRC, a reconnu qu’au cours de la dernière décennie, la GRC a eu de la difficulté à respecter la LAI et la LPRP. L’enquête systémique de 2020 du Commissariat à l’égard de la GRC a mené, à la demande du ministre, à l’élaboration d’une stratégie pour donner suite aux recommandations de la commissaire à l’information. La stratégie quinquennale de la GRC contient un plan de modernisation de l’AIPRP[48].

M. Janzen a noté que la GRC a donné suite à l’une des principales préoccupations soulevées par la commissaire dans son enquête systémique : le besoin de leadership. La GRC a maintenant un directeur général et trois directeurs qui dirigent trois volets : l'accès à l'information, la protection des renseignements personnels et le soutien opérationnel. Ces directeurs sont appuyés par huit gestionnaires et le nombre d’employés dans ces domaines a aussi augmenté au sein de la GRC.

Néanmoins, M. Janzen a confirmé que la GRC utilise des consultants pour traiter les demandes d’accès. Elle a un contrat avec deux cabinets-conseils canadiens, pour un total d’environ 12 consultants[49]. La GRC a environ 70 équivalents temps plein dans le secteur d’AIPRP et le total de postes financés est d’environ 110.

M. Janzen a souligné que la capacité de la GRC à rencontrer ses obligations en matière d’accès à l’information sont réduites en raison de la difficulté d’attirer de nouveaux employés dans le domaine de l’AIPRP. Il a toutefois souligné que la GRC a tiré des leçons de la pandémie de COVID‑19 en vue de bâtir une main-d’œuvre nationale dans ce domaine.

M. Janzen a aussi indiqué que le rôle de la GRC dans les grands événements d’intérêt public entraîne un nombre élevé de demandes d’accès et des défis quant au traitement de celles-ci. Par exemple, l’attribution, la collecte et l'examen de documents dans une situation où un employé qui s'occupe de ces tâches participe également à une évacuation à la suite d'inondations ou à une enquête sur une tragédie représentent un défi unique. Selon lui, ce type de situations détourne aussi l’attention des membres de la GRC à l’égard du traitement des demandes et des dossiers d’accès à l’information.

En ce qui concerne les difficultés opérationnelles auxquelles fait face la GRC, M. Janzen a soulevé la répartition de ses 30,000 employés dans l’ensemble du Canada et le fait que les systèmes de gestion de l’information de la GRC ne sont pas centralisés. Un policier ne peut pas obtenir quelque information que ce soit à propos de n’importe qui à partir d’un poste centralisé. La technologie utilisée par la GRC doit être mise à niveau.

M. Janzen a indiqué que la GRC a retenu les services d’experts-conseils en affaires pour améliorer leurs processus en matière d’accès à l’information, en plus d’avoir créé des forums intergouvernementaux pour communiquer les pratiques exemplaires et d’avoir mis en œuvre du nouveau matériel de formation et d'orientation à l'intention des employés. Des investissements antérieurs et continus dans les nouvelles technologies permettent aussi à la GRC de traiter les demandes d’accès plus efficacement.

M. Janzen a dit qu’au cours du dernier exercice financier, les taux de conformité de la GRC aux obligations en vertu de la LAI et de la LPRP ont augmenté; ils sont passés de 26,4 % à 40,1 % et de 32,8 % à 46,1 %, respectivement. Il a dit que l’arriéré de la GRC en matière de demandes d’accès remonte environ à 2017.

Bureau du Conseil Privé

Matthew Shea, le secrétaire adjoint du Cabinet aux Affaires et services ministériels du BCP, a expliqué que les fonds de renseignements du BCP sont uniques par rapport à ceux des autres institutions. En plus des fonds d'information plus traditionnelle, l’information relevant du BCP comprend les documents confidentiels du Cabinet, des fonds d'information secrète et très secrète, y compris des évaluations de renseignements sensibles. En tant qu'entité qui regroupe des renseignements, le BCP détient aussi un grand volume de renseignements provenant d'autres institutions gouvernementales. Il doit donc travailler en étroite collaboration avec ces institutions afin de trouver des gains d'efficacité en matière d’accès à l’information.

M. Shea a indiqué que la pandémie a eu une grande incidence sur la capacité du BPC à respecter ses obligations en matière d’accès. Le nombre limité d’employés permis sur les lieux du travail en début de pandémie et le type d’information que le BPC détient, ont contribué à une forte augmentation du nombre de dossiers d’accès actifs et créé un arriéré. De plus, à l’été 2020, le BCP a aussi reçu presque le double du nombre de demandes d'AIPRP par rapport à la même période avant la pandémie.

M. Shea a expliqué que pour relever le défi auquel a contribué la pandémie, le BPC a pris plusieurs mesures. Il est passé d’un processus où le ministère utilisait surtout des documents papier à un processus électronique, dans la mesure du possible, ce qui permet à davantage de fichiers de nature non délicate d'être traités à distance. Il a désigné l'AIPRP comme un service essentiel, lui permettant ainsi d'avoir plus de personnel au bureau pour traiter les dossiers et aplatir la courbe de croissance de l’arriéré des demandes d’accès. Il a alloué un budget supplémentaire à son équipe d'accès à l'information et à son équipe de gestion de l'information pour le traitement de l'arriéré. Il a aussi fait de la gestion de l'information et de l'accès à l'information une priorité au sein du ministère et un sujet de conversation courant au sein de son comité ministériel de gestion.

David Neilson, directeur exécutif de l’AIPRP et des Services de la correspondance de la haute direction du BPC, a confirmé que son organisation n’emploie actuellement aucun consultant pour travailler sur l’accès à l’information.

M. Shea a précisé qu’en 2021–2022, le BPC a reçu 509 nouvelles demandes d’accès et en a fermé 532. Selon lui, en 2022–2023, le BPC devrait aussi fermer plus de demandes d’accès que le nombre de nouvelles demandes reçues. M. Neilson a indiqué que la demande d’accès en suspens depuis le plus longtemps au BPC est autour de six ans. En ce qui concerne l’exclusion liée aux documents confidentiels du Cabinet, le BPC a confirmé qu’en 2021–2022, elle a été appliquée à environ 32% des dossiers d’accès à l’information fermés[50].

Affaires mondiales Canada

Colleen Calvert, directrice générale et secrétaire des affaires ministérielles d’Affaires mondiales, a indiqué qu’en juin 2022, son organisation a adopté un plan de réduction de l'arriéré des demandes d'accès qui inclut l’établissement de cibles, le renforcement du niveau de responsabilité des sous-ministres adjoints et une formation accélérée. Au moment de sa comparution, Affaires mondiales avait formé 544 employés du ministère en matière d’accès à l’information.

Mme Calvert a souligné que la pénurie de spécialistes qualifiés en AIPRP affecte la capacité d’Affaires mondiales d’éliminer son arriéré de demandes d’accès. L’organisation entreprend ses propres processus de recrutement. Elle travaille avec le SCT et d’autres ministères dans le cadre de l’initiative du Bureau de développement communautaire sur les processus de dotation collective. Elle dispose aussi d’un programme interne de perfectionnement professionnel encourageant une carrière dans le domaine de l’AIPRP.

Mme Calvert a confirmé qu’Affaires mondiales fait appel à des consultants en matière d’accès à l’information[51]. De 8 à 10 consultants, en moyenne, travaillent dans son secteur d’accès à l’information. Elle a précisé que le nombre d’employés à durée indéterminée dans ce secteur est 42.

Mme Calvert a indiqué qu’un nouveau système de traitement des documents non classifiés en accès à l'information a été mis en place l’an dernier. Il permet des gains d'efficacité et une flexibilité accrue pour le travail à distance. Au cours du prochain exercice financier, Affaires mondiales entamera aussi une transition vers une nouvelle génération de logiciels de traitement des documents pour l'accès à l'information, ce qui permettra de mener à d’autres gains d'efficacité et offrira la possibilité d'accéder à des outils tels que l'intelligence artificielle.

En ce qui concerne les difficultés opérationnelles auxquelles fait face Affaires mondiales, Mme Calvert, en plus du recrutement difficile de personnel qualifié et du fait que la technologie utilisée par l’organisation n’est pas encore assez performante, a noté que tout comme la GRC, qui agit dans des situations d’urgence, il peut être difficile pour Affaires mondiales de respecter les exigences opérationnelles tout en traitant des demandes d’accès.

Mme Calvert a indiqué que le traitement des demandes d’accès dans les délais prescrits, qui avait chuté à 19% au cours de la première année de la pandémie, s’élève maintenant à 57%. Ce progrès se fait alors qu’Affaires mondiales constate une augmentation de 30 % des demandes d'accès par rapport à l'exercice financier précédent. Elle a noté que la demande qui est en suspens depuis le plus longtemps à Affaires mondiales date d’environ cinq ans.

Sécurité publique Canada

Mme Soper a expliqué que SPC joue un rôle clé en assurant la coordination entre tous les ministères et les organismes responsables de la sécurité nationale et de la sécurité des Canadiens. Malgré l’étroite collaboration de ces organismes, chacun d’entre eux est responsable de son propre programme d'accès à l'information.

En ce qui concerne les difficultés opérationnelles auxquelles fait face SPC en matière d’accès à l’information, Derek Melchin, directeur de l’AIPRP et des services exécutifs de Sécurité publique Canada, a lui aussi soulevé la pénurie de personnel formé, et ce malgré la mise en place par le SCT d’initiatives pour un processus de dotation centralisé. Il a aussi noté que le recrutement et la formation constante de nouveaux analystes demande beaucoup de temps. D’autres enjeux comme la technologie et la gestion de l’information affectent également le bureau d’accès à l’information de SPC. M. Melchin, a précisé que SPC n’emploie actuellement aucun consultant pour traiter des demandes d’accès.

Mme Soper a noté que SPC a traité plus de 90 % des demandes d’accès dans les délais prescrits par la loi au cours de 14 des 15 derniers exercices. Elle a toutefois reconnu que pendant la pandémie, le ministère a été limité dans sa capacité à traiter des dossiers contenant des documents classifiés ou physiques auxquels les employés travaillant à distance n’avaient pas accès. Au cours de la dernière année, des mesures ont été prises pour rétablir la pleine capacité de traitement des demandes et que des progrès importants ont été réalisés dans la résorption de l'arriéré de dossiers en attente au ministère. M. Melchin a noté qu’au moins deux demandes d’accès auprès de SPC sont en suspens depuis cinq ans.

Service canadien du renseignement de sécurité

Mme Giles a expliqué que le SCRS opère sous le mandat et les pouvoirs qui lui sont octroyés par la Loi sur le Service canadien du renseignement de sécurité. Le mandat principal du SCRS est d’enquêter sur les menaces pour la sécurité du Canada, y compris l’espionnage et les tentatives de sabotage, l’ingérence étrangère, le terrorisme et la subversion.

Elle a rajouté qu’en vertu de son mandat, le SCRS offre des conseils et de l’information au gouvernement du Canada sur ces menaces afin qu’il puisse prendre des mesures appropriées pour les réduire. Le SCRS fournit également des évaluations de sécurité sur les personnes qui ont besoin d'accéder à des renseignements classifiés ou à des dossiers sensibles au sein du gouvernement du Canada.

Mme Giles a expliqué qu’en tant qu'agence de sécurité nationale, bon nombre d’activités doivent demeurer protégées contre la divulgation. La divulgation d’informations classifiées pourrait révéler des sources, des méthodologies et des techniques sensibles, ce qui serait préjudiciable aux efforts du SCRS de protéger le Canada et les Canadiens contre les menaces à la sécurité nationale. L’accès à certaines informations pourrait poser de réels dangers, allant jusqu’à compromettre l'intégrité d’opérations et poser des risques pour la sûreté et la sécurité physique de sources humaines et d’employés.

Bien que le SCRS ait besoin de garder certaines informations secrètes, l’agence doit aussi être transparente. Mme Giles a indiqué que la transparence et la responsabilité sont des valeurs fondamentales pour le SCRS, et que l’organisme perçoit un accès solide aux systèmes d’AIPRP comme étant absolument fondamental. C’est pourquoi le droit du public d'accéder à l'information est mis en balance avec le besoin légitime de protéger les informations sensibles et de maintenir le fonctionnement efficace du gouvernement.

Mme Giles a rajouté que dans l'administration des demandes d'AIPRP, le SCRS effectue des examens ligne par ligne pour s'assurer de divulguer le plus d'informations possible, tout en protégeant les informations qui pourraient causer préjudice si elles étaient divulguées. Bien que cette activité demande beaucoup de temps, le SCRS réussit selon elle à fournir des réponses rapides et de qualités aux demandes d’accès.

Au cours des dernières années, le SCRS a développé d’autres ressources pour accroître sa transparence et son engagement auprès des Canadiens. Il publie notamment un rapport public annuel. Il offre des publications sur les menaces dans plus de sept langues. Il offre des séances d'information pour dialoguer avec les provinces et les territoires, les groupes autochtones, le secteur des affaires, les universités et les organisations communautaires. Il développe aussi une présence sur les réseaux sociaux.

Mme Giles a noté qu’en 2021–2022, les taux de conformité du SCRS aux délais de l’AIPRP étaient de 94 %. En 2019, le SCRS a reçu le prix du commissaire à l'information pour son excellence dans l'administration de l'AIPRP.

Ministère de la Défense nationale

Mme Bank est responsable de la mise en œuvre de la LAI et de la LPRP au sein du MDN et des FAC.

Elle a décrit l’engagement du MDN à faire preuve d'ouverture et de transparence et à respecter les droits accordés en vertu de la LAI et de la LPRP. Elle a noté que les examens et les enquêtes des dernières années ont permis au MDN d’apporter des changements positifs à ses pratiques, dont notamment une étroite collaboration entre le directeur de l’information de la Défense et le directeur des données de la Défense pour garantir que la transparence et la protection des renseignements personnels soient prises en compte dans la mise en œuvre de la stratégie de données de la défense.

En juillet 2020, le Commissariat à l'information a présenté au Parlement un rapport spécial sur son enquête systémique sur le traitement des demandes d’accès au MDN[52]. Mme Bank a indiqué que depuis ce rapport, le MDN a mis en place plusieurs initiatives, comme l’établissement de lettres d'entente qui sont signées entre chaque haut fonctionnaire et sous-ministre de la Défense et dans lesquelles ces derniers s'engagent à respecter leurs obligations en matière d’AIPRP; une mise à jour d’outils de référence pour soutenir les agents de liaison chargés de la recherche des documents; l’intégration des objectifs d'accès à l'information dans les ententes de gestion de rendement pour ceux qui ont un accès principal ou secondaire à l'information ou des responsabilités en matière de confidentialité; l’établissement des processus pour améliorer la rigueur autour du processus de récupération; l’amélioration de la capacité du MDN à recevoir des dossiers électroniques pour accélérer le processus; un engagement à mettre l’accent sur les principes du devoir d'assistance envers l'ensemble du gouvernement pendant l’examen complet du programme de formation sur l'AIPRP; et une mise à jour de ses politiques ministérielles.

Bibliothèque et Archives du Canada

Mme Lillico a expliqué les défis uniques liés à l'accès aux archives historiques de BAC. Elle a peint un portrait de ce à quoi peut ressembler une seule demande d’accès chez BAC :

J'aimerais vous mentionner un nombre: trois millions. Trois millions de pages. Il s'agit d'une seule des milliers de demandes d'accès à l'information actuellement traitées par BAC.
Maintenant imaginez-vous cette tâche. C'est comme si un de nos employés spécialisés devait lire les sept livres d'Harry Potter — c'est‑à‑dire 4 100 pages —, plus de 730 fois en 30 jours civils. Avant de pouvoir procéder, nos spécialistes aident nos clients à déterminer les documents qu'ils recherchent au moyen des listes numériques et analogiques de nos collections. Ce n'est pas une recherche Google.
Certaines de ces listes contiennent peu de détails, et la façon de décrire les choses a changé au fil du temps. Il faut ensuite retrouver ces documents. Dans le monde archivistique, il peut y avoir une seule description pour des centaines de boîtes. Nos experts doivent passer au travers de toutes ces boîtes pour trouver ces documents.
Nous avons plus de 200 kilomètres linéaires de documents du gouvernement du Canada dont la date de création peut remonter à 1867. Cette distance équivaut au trajet de deux heures en voiture entre Montréal et Québec.
Pour compliquer encore plus cette situation déjà complexe, ces documents historiques sont généralement en papier, et il faudrait les numériser avant même qu'un analyste de l'AIPRP puisse commencer son travail d'analyse.
Aujourd'hui, bien que BAC partage bon nombre des défis auxquels font face les autres ministères — pénurie de main-d'œuvre, rétention des employés et défis technologiques —, BAC joue un rôle unique en préservant et en rendant accessibles les documents historiques gouvernementaux de plus de 300 institutions fédérales, dont certaines n'existent plus aujourd'hui.

Mme Lillico a expliqué que les archives gouvernementales sont soit ouvertes au public, soit fermées, car elles peuvent contenir des informations jugées sensibles. Lorsqu'elles sont fermées, il faut soumettre une demande d'accès pour les consulter. Elle a rajouté que l'équipe de l'AIPRP de BAC est la principale voie par laquelle il est possible d'accéder aux milliards de pages de documents gouvernementaux conservés à BAC.

Elle a noté que le traitement d'une demande d'AIPRP pour des documents historiques peut prendre beaucoup de temps, car les documents historiques sont anciens, mais aussi parce qu’il faut se projeter dans le passé et bien comprendre le contexte d’un document pour décider de ce qui doit être caviardé. Cela nécessite une expertise que peu de ministères ont immédiatement à portée de main.

Mme Lillico a rajouté que chaque décision de caviardage effectuée par un analyste de l'AIPRP doit être documentée afin de pouvoir le justifier au demandeur, au commissaire à l'information ou aux tribunaux. Selon elle :

L'accès à l'information devrait être utilisé en dernier recours pour accéder aux documents historiques du gouvernement du Canada. C'est ce vers quoi BAC s'oriente: un avenir où nous passons plus de temps à rendre accessibles de façon proactive les documents du gouvernement tout en tenant compte des préoccupations relatives à la vie privée et à la sécurité des renseignements de nature délicate.

Mme Lillico a aussi indiqué que BAC fournit des efforts pour obtenir les technologies qu’elle peut exploiter, notamment par l’intégration et l'utilisation des systèmes technologiques sécurisés que le gouvernement du Canada utilise. Récemment, BAC a aussi intégré le portail en ligne de l'AIPRP afin que les gens puissent faire leurs demandes plus facilement.

Chapitre 4 : Améliorer le système d’accès à l’information du Canada

Divers moyens d’améliorer le système d’accès à l’information qui ont été proposés par les témoins sont explorés dans ce chapitre. Entre autres, Mme Maynard a recommandé au Comité d’examiner la liste de 18 recommandations qu’elle a soumise au SCT dans le cadre de son examen de l’accès à l’information et les conclusions dégagées par des comités parlementaires dans le passé[53]. Les 18 recommandations de la commissaire sont intégrées au présent chapitre.

Leadership et culture

Mme Maynard a indiqué qu’un moyen qui permettrait d’améliorer l’accès à l’information et ne requiert aucune modification législative est le leadership, et par extension la culture au sein des institutions fédérales. Les dirigeants doivent veiller à ce que leur institution respecte ses obligations législatives en matière d’accès à l’information et être tenus responsables de leur rendement. Ainsi, lorsqu’elle rencontre des ministres et de hauts fonctionnaires, elle parle souvent d’engagement commun à l’égard du droit d’accès.

Mme Maynard a indiqué que les dirigeants des institutions fédérales doivent veiller à ce que leur organisation considère l’accès à l’information comme une responsabilité collective et donne au droit d’accès la place de droit quasi constitutionnel qui lui revient. Elle a fait remarquer qu’il s’agit surtout d’une question de leadership. Les ministères dont les dirigeants croient en l'accès à l'information le prouvent. Ils prévoient les ressources nécessaires pour répondre aux demandes d'accès et obtiennent de meilleurs résultats.

Mme Maynard a indiqué que le Commissariat note une grande différence lorsque la tête dirigeante demande des statistiques sur l’accès à l’information afin de savoir où se trouvent les goulots d’étranglement. Elle a donné comme exemple l’Agence du revenu du Canada, où des comptes rendus à l’égard de l’accès à l’information sont demandés toutes les deux semaines.

Ainsi, selon Mme Maynard, les indicateurs de rendement en matière d’accès à l’information devraient être imposés à la gestion, soit pour les directeurs généraux, les sous-ministres et les sous-ministres adjoints. Ultimement c’est le ministre qui doit rendre des comptes relativement à l’accès à l’information. À son avis, ce n’est pas au « pauvre petit analyste qu’il faut imposer des objectifs ». Les directeurs généraux sont ceux qu'il faudrait soumettre à des évaluations de rendement et auxquels il faudrait verser des primes en fonction du travail d'accès à l'information relevant de leur responsabilité.

À la question de savoir si une culture du secret existe au sein du gouvernement, Mme Maynard a dit qu’une telle culture existe « dans le sens où les fonctionnaires, lorsqu’ils reçoivent une demande d’accès, se demandent quels renseignements enlever et non quels renseignements divulguer[54] ». Il s’agit selon elle d’une mentalité qui est difficile à changer. C’est pourquoi le Commissariat incite les institutions fédérales à faire de la formation, non seulement auprès de leur unité d’accès à l’information, mais auprès de tous les fonctionnaires, qui collectivement, devraient avoir un sens de responsabilité en ce qui concerne l’accès[55].

Mme Maynard a d’ailleurs noté avoir offert ses services pour donner de la formation en matière d’accès à l’information aux institutions fédérales, même si elle n’a pas de mandat d’éducation sous la LAI. Elle offre par exemple des séances de formation qui peuvent permettre aux fonctionnaires qui ne travaillent pas dans un service d’AIPRP et n’ont jamais traité de demande d’accès de comprendre leur rôle vis-à-vis l’information.

Selon Mme Maynard, la culture en matière d’accès à l’information ne s’est pas améliorée dans les dernières années, mais cela dépend de l’institution. Certaines font de l’accès à l’information une priorité. Pour amener un changement de culture, elle a indiqué qu’il faudrait que le gouvernement indique clairement à toutes les institutions qu’elles sont tenues de se conformer à la LAI.

La présidente du Conseil du Trésor a affirmé que le gouvernement a une culture d’ouverture et de transparence, mais aussi de responsabilité. Elle a soulevé par exemple l’importance de protéger les renseignements personnels. Ainsi, selon elle, il est important de s’assurer que le caviardage de documents se fait conformément aux principes énoncés dans la directive du SCT[56]. M. Burt a rajouté que la culture d’ouverture du gouvernement est directement liée à la nécessité de protéger ce qui doit être protégé. Tout ne peut pas être ouvert, même si l’intention demeure de maximiser l’accès aux renseignements et de garder les données ouvertes.

D’autres témoins ont dit être d’avis qu’une culture du secret existe au sein du gouvernement. Selon M. Drapeau, les fonctionnaires sont souvent appelés à protéger l’information et limiter la divulgation à ceux qui sont autorisés à la recevoir et les exceptions contenues dans la LAI leur permettent de protéger certaines informations. À son avis, cela crée une tension entre les demandeurs, qui veulent obtenir le plus d’information possible, et le fonctionnaire typique qui vise à protéger le plus d’information possible. Selon lui, les demandes d’accès sont « perçues la plupart du temps comme un ennui ou un élément qui bouscule l'ordre bureaucratique ».

M. Lapointe a souligné que trop souvent dans l’histoire, les utilisateurs de la LAI ont eu l’impression qu’on leur faisait une faveur lorsqu’ils exerçaient leur droit de savoir. Il a aussi dit être d’avis que trop de fonctionnaires estiment que leur rôle est de protéger la bureaucratie et les maîtres politiques, mais a reconnu qu’il s’agit d’une généralisation qui ne s’applique pas nécessairement à toutes les personnes œuvrant dans le système d’accès à l’information. Il a aussi soulevé la différence entre la culture de divulgation au Canada et aux États-Unis. Par exemple, lorsque des documents sont demandés par des journalistes des deux côtés de la frontière pour un dossier portant sur un problème transfrontalier, les États-Unis fournissent généralement beaucoup plus d’information que le Canada.

M. Conacher, M. Cutler et M. Rubin ont aussi indiqué qu’il y a une culture du secret au sein du gouvernement[57]. M. Rubin a affirmé que pour mettre fin à la culture du secret, il faudrait une divulgation automatique, rapide et complète de l’information, garantie par la liberté d’expression et les droits constitutionnels, qui serait accompagnée d’un régime de peines sévères intégré aux lois sur le droit de savoir. Il a aussi dit que la situation pourrait être améliorée rapidement si les analystes d’AIPRP limitaient leur utilisation des exceptions et répondaient aux demandes de façon plus rapide. Selon lui, les analystes ont un problème d’attitude et refusent d’agir. Il a toutefois reconnu que ce ne sont pas tous les fonctionnaires qui sont malintentionnés ou silencieux à l’égard de l’accès l’information[58].

M. Wernick, pour sa part, s’est dit d’avis que des personnes de bonne foi dans les ministères essaient plutôt de répondre aux demandes d’accès et d’évaluer les différentes exceptions et les raisons pour lesquelles il y peut y avoir un besoin de confidentialité.

Le Comité reconnaît que plusieurs institutions fédérales respectent leurs obligations en matière d’accès à l’information et que plusieurs des fonctionnaires qui travaillent dans le domaine de l’AIPRP ont l’accès à l’information à cœur. Néanmoins, comme la commissaire à l’information et d’autres témoins l’ont indiqué, souvent, il appert que le réflexe premier est de se demander ce qui ne doit pas être divulgué plutôt que ce qui doit être divulgué. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 13

Que le gouvernement du Canada s’assure que le personnel responsable du traitement des demandes d’accès à l’information dans chaque institution fédérale soit tenu de suivre une formation continue visant à assurer l’intégration d’une culture d’ouverture et de transparence au sein de l’institution.

Recommandation 14

Que le gouvernement du Canada soumette les directeurs généraux des ministères à des évaluations de rendement assorties de primes en fonction de leur travail concernant l’accès à l’information relevant de leur responsabilité.

Ressources et innovation

Innovation et outils technologiques

Notant que certaines institutions utilisent déjà de tels outils, Mme Maynard a affirmé qu’il serait utile de recourir à des moyens technologiques comme l’intelligence artificielle pour trouver l’information dans les documents au lieu d’effectuer cette recherche manuellement. Elle a noté, par exemple, que depuis son enquête systémique chez IRCC, cette institution utilise des robots pour trouver l’information plus rapidement et la traiter. Selon Mme Maynard, les institutions fédérales doivent investir dans des innovations et voir ce qui peut leur être utile pour mieux gérer les demandes d’accès. Elle et aussi d’avis que la technologie développée devrait être mise à la disposition de toutes les institutions fédérales en même temps et que le partage d’information entre celles-ci devrait être facilité.

En ce qui concerne la capacité de faire des demandes d’accès en ligne, la présidente du Conseil du Trésor a souligné le lancement récent d’une version améliorée de la plateforme de demande d'accès à l'information en ligne du gouvernement. Cette plateforme permet aux gens de présenter des demandes d’accès et de recevoir des documents plus efficacement. Selon elle, cette amélioration va réduire le fardeau administratif du gouvernement. À ce jour, 251 organisations ont été intégrées à la plateforme. D'autres vont s'ajouter. D'ici un an, plus de 90 % des demandes d’accès passeront par cette plateforme.

Mme Maynard a reconnu que la mise à jour du service de demandes d’accès en ligne permet de plus facilement soumettre une demande d’accès à l’information, plutôt que d’avoir à traiter avec chaque institution séparément.

En ce qui concerne les outils technologiques utilisés pour le traitement des demandes d’accès, la présidente du Conseil du Trésor a expliqué que le SCT a sélectionné deux systèmes modernes qui permettront de les traiter plus rapidement. Les 13 premières organisations seront intégrées dans le nouveau logiciel de traitement en 2023. Selon elle, l’automatisation du travail là où il est possible de le faire permettra aux équipes au sein du gouvernement de se concentrer sur leurs tâches essentielles et de mieux servir le public.

Mme Luelo, a rappelé que tous les ministères seront éventuellement intégrés au portail des demandes d’accès en ligne, qui offrira un guichet d’accès commun aux Canadiens, et que le nouveau logiciel de traitement facilitera l’automatisation du processus. Mme Luelo a aussi tenu à souligner que même si le rapport de l’examen de l’accès à l’information du SCT expose des conclusions, cela n’a pas empêché les choses d’avancer pendant que le SCT élabore son plan d’action. Ce rapport fait l’objet du chapitre 6.

D’autres témoins ont fait des commentaires concernant le potentiel de la technologie. Par exemple, M. Beeby a indiqué que l’intelligence artificielle responsable, c’est-à-dire qui peut être auditée, pourrait aider à simplifier le traitement des demandes. Il est également d’avis que la numérisation des documents permettrait un meilleur accès à l’information tout en permettant une meilleure analyse statistique du système d’accès à l’information.

M. Larsen est également d’avis que des outils numériques pourraient permettre d’avoir accès et de trouver les documents pertinents pour les demandes d’accès. Toutefois, selon lui, il faut aussi s’assurer que les documents sont divulgués en temps opportun et qu’ils sont complets. Cela ne peut être réglé par la numérisation; ce doit être réglé par une réforme de la loi.

M. Wernick, pour sa part, a dit qu’un investissement considérable, non seulement dans la technologie de l’information, mais aussi dans les ressources humaines et la formation, est nécessaire pour améliorer la gestion de document et de l’information au sein des institutions fédérales[59]. Il a insisté sur le fait qu’imposer des sanctions ou des obligations est inutile si l'on n'investit pas dans des systèmes de conservation, de récupération et de classification de documents et de dossiers.

Ressources humaines

Au sujet des employés de la fonction publique qui répondent aux demandes d’accès, Mme Maynard a indiqué qu’il y a un grand besoin de personnel qui est capable de négocier, de discuter, de consulter la loi et de l’appliquer aux documents qu’ils traitent. Cela se traduit par un besoin de formation dont le gouvernement est responsable. Elle a aussi reconnu qu’il est très difficile de recruter des gens qui possèdent les compétences nécessaires, ce pourquoi les institutions fédérales, et même le Commissariat, doivent parfois embaucher des consultants externes. Selon elle, il faut maintenir des bassins de candidats qualifiés et intéressés auxquels toutes les institutions peuvent recourir pour recruter.

En ce qui concerne les besoins en matière de dotation, la présidente du Conseil du Trésor a mentionné la création du Bureau de développement communautaire, qui vise à soutenir les communautés de l'accès à l'information au chapitre du recrutement, du maintien en poste, de la formation et du perfectionnement professionnel. Elle a aussi indiqué que le SCT priorise la formation du personnel et essaie de trouver plus d’employés. Elle a réitéré qu’il existe un bassin de candidats potentiels qui pourraient venir travailler pour le gouvernement. Elle a confirmé que le gouvernement embauche plus agents d’AIPRP aujourd’hui qu’au moment où on lui a confié le poste de présidente du Conseil du Trésor. Elle a aussi confirmé que moins de consultants sont embauchés à l’heure actuelle qu’il y a 10 ans. Dans une réponse écrite fournit au Comité, le SCT a indiqué que dans les trois dernières années, 66 institutions fédérales ont conclu des contrats de services professionnels pour soutenir l’administration de la LAI, pour un coût total de 36 millions de dollars[60].

De son côté, M. Lapointe a mentionné qu’un roulement important existe dans les directions d’AIPRP fait en sorte qu’il manque de continuité dans ces équipes[61]. Il a lui aussi recommandé d’investir davantage de ressources dans le système d’accès à l’information afin de limiter les délais de réponse aux demandes d’accès.

M. Drapeau a recommandé que la vérificatrice générale mène un audit du système d’accès à l’information dans son ensemble afin de vérifier que les ressources, tant au Commissariat que dans les institutions fédérales, sont suffisantes pour répondre en temps utiles aux utilisateurs qui exercent leur droit d’accès. Il a dit que chaque équipe chargée de l’AIPRP devrait demander de l’aide à leur sous-ministre pour avoir suffisamment de ressources. Selon lui, les coordonnateurs d’AIPRP font le meilleur travail possible avec le personnel dont ils disposent.

La BC FIPA a aussi recommandé que le gouvernement accroisse les ressources en personnel des équipes responsables de l’accès à l’information et investisse dans de nouvelles technologies[62].

Le Comité reconnaît que des investissements dans les outils innovateurs et dans les ressources humaines sont nécessaires pour améliorer le système d’accès à l’information et que plusieurs institutions fédérales font face à des défis à cet égard. Par conséquent, il recommande :

Recommandation 15

Que le gouvernement du Canada augmente l'utilisation des nouvelles technologies par les institutions fédérales pour accélérer le traitement des demandes d'accès à l'information, y compris, mais sans s'y limiter, l'intelligence artificielle, la transcription électronique et la traduction automatique.

Gestion de l’information et des documents

Mme Francoli a expliqué que la quantité de renseignements et de données dont nous disposons aujourd'hui, la façon dont nous les conservons et la mesure dans laquelle nous ne parvenons pas à maintenir à jour les fonds de renseignements et de données au fur et à mesure que les technologies et les logiciels changent, font en sorte qu'il est vraiment difficile d'avoir une bonne gestion de l'information.

Mme Maynard a expliqué qu’il arrive souvent qu’en réponse à une demande d’accès, le demandeur reçoive des éléments en double. Elle a indiqué que l’une des sources de ce problème est la mauvaise gestion des courriels. Si cinq personnes échangent des courriels, une seule personne, l’auteur du courriel initial, devrait conserver la chaîne de courriels. On pourrait alors répondre à une demande d’accès avec les documents d'une seule personne. Elle a fait des commentaires similaires lors de sa deuxième comparution. Elle a aussi noté, par exemple, qu’une meilleure gestion des courriels et l’élimination de pages identiques réduiraient la tâche des analystes qui traitent les demandes d’accès.

Mme Maynard a affirmé qu’il faudrait établir des règles plus claires concernant qui doit garder les courriels et quels documents sont jugés éphémères. Il n’est pas question d’effacer tout le contenu des boîtes de courriels, mais de bien classer les documents nécessaires dans un répertoire commun où l’on pourra les trouver, même en l’absence de l’auteur. Elle a rajouté qu’il ne s’agit pas de supprimer des documents ayant une valeur administrative, mais de se débarrasser des messages transitoires et des courriels personnels.

En ce qui concerne le risque qu’une meilleure hygiène de courriels entraîne la suppression de courriels importants, elle a précisé que ce qui peut être supprimé est les courriels personnels ou les courriels qui relatent une discussion reflétée dans une note de service qui indique clairement « nous avons discuté d’un tel sujet, voici les facteurs qui ont été pris en considération, et voici la décision qui a été prise ». Elle a comparé un tel processus au procès-verbal d’une réunion non enregistrée[63].

M. Drapeau a fait des commentaires similaires à ceux de Mme Maynard. Il a souligné que le fonctionnaire qui écrit un courriel n’a certainement pas à l’esprit le fait que ce courriel pourrait faire partie d’une chaîne de courriels divulguée en vertu de la LAI. Si c’était le cas, la discipline serait meilleure et les documents peut-être un peu plus étoffés. Pour améliorer la gestion de documents, il a proposé la tenue de séminaires annuels au sein de tous les ministères, qui rappelleraient aux fonctionnaires que l’une de leurs responsabilités juridiques est le respect de la LAI.

M. Conacher, pour sa part, a recommandé d’inclure dans la LAI une obligation pour le Commissariat d’offrir de la formation périodique d’une durée déterminée à tous les politiciens, membres du personnel, aux personnes nommées et aux employés du gouvernement concernant les règles de la LAI et les meilleures pratiques en matière de systèmes de gestion de l’information et des dossiers[64].

Cependant, M. Lapointe a indiqué que qu’on peut faire maintenant est c'est bâtir un meilleur système qui permettra d'améliorer la tenue de documents et qu’il « faudra ensuite faire du rattrapage quant aux documents répartis dans 300 organisations différents ».

Le Comité convient qu’une meilleure gestion de l’information aiderait sûrement les institutions fédérales à répondre aux demandes d’accès de façon plus efficiente. Par conséquent, il recommande :

Recommandation 16

Que le gouvernement du Canada s’efforce de renforcer sa gestion de l’information en améliorant le stockage et l’organisation de l’information, les exigences de conservation et l’innovation numérique.

Obligation de documenter

Mme Maynard a recommandé d’inclure une obligation de documenter dans la LAI. Elle a souligné que seule la Colombie-Britannique a légiféré une telle obligation[65]. Elle a reconnu que le modèle de travail hybride fait qu’il est de plus en plus difficile de savoir ce qui est discuté et ce qui est décidé[66]. Elle a expliqué qu’après une réunion, il faut veiller à ce que des procès-verbaux soient dressés et correctement sauvegardés pour qu’ils soient faciles à retrouver. Selon elle, si personne ne prend le temps de bien documenter ce qui se passe et les décisions qui sont prises et de mettre le tout dans un endroit où un analyste qui viendra après les gens impliqués pourra le trouver, le droit d’accès n’existe pas, puisqu’il n’y a pas de dossiers[67]. Bref, « l’accès n’existe que si le document existe[68] ».

Selon Mme Maynard il faut des dirigeants qui favorisent la création de documents afin que les Canadiens aient le droit d’obtenir ces informations lorsqu’ils les demandent. Elle conseille aussi aux organisations d’être plus claires sur la rédaction de procès-verbaux, la prise de décisions et la documentation appropriée. Il faut que les fonctionnaires sachent que cela fait partie de leur travail.

M. Lapointe a dit qu’il voit l’utilisation de courriels personnels ou d’applications cryptées pour les communications gouvernementales ou le recours à des séances d’information de vive voix plutôt que des rapports écrits comme des abus de la lettre et de l’esprit de la LAI. M. Cutler a aussi exprimé des inquiétudes quant à l’utilisation de la messagerie texte au sein du gouvernement.

Selon M. Tromp, « le gouvernement verbal », soit la transmission d’information de façon verbale plutôt qu’écrite, est la plus grande menace actuelle au régime d’accès à l’information. À son avis, le Canada doit se doter d’une loi exhaustive en matière de conservation des documents, assortie de sanctions en cas de non-conformité. M. Rubin s’est lui aussi dit en faveur d’inclure une obligation de documenter dans la LAI[69].

M. Conacher a recommandé de modifier la LAI afin d’exiger que chaque institution tienne un registre détaillé des décisions et des mesures qu’ils prennent. Le CLD a fait une recommandation similaire[70]. Selon M. Conacher, s’il y avait une obligation de documenter les échanges dans la LAI, il serait clair qu’il y a eu violation de la LAI lorsqu’une décision a été prise sans que les échanges qui y ont mené aient été documentés.

M. Larsen a recommandé que le Canada suive l’approche néo-zélandaise. Le Public Records Act of 2005 de la Nouvelle-Zélande prévoit une obligation de documentation du travail du gouvernement qui fait en sorte que les personnes qui travaillent pour le gouvernement dans ce pays doivent créer et conserver des registres adéquats de leurs activités. En plus d’une exigence législative, il a noté qu’il faudrait aussi une norme, afin qu'il n'y ait pas une approche improvisée pour chaque nouveau type de technologie émergente. La modernisation des systèmes utilisés pour la gestion de l’information est aussi un élément essentiel du processus[71].

M. Wernick a dit que « l'obligation de documenter fait partie des idées qui semblent bonnes si on les formule sans trop réfléchir, mais qui ne fonctionneraient pas dans la pratique » et que « ce concept pourrait avoir des conséquences néfastes et imprévues ». Plutôt que d’inclure une obligation de documenter dans la LAI, il a proposé de limiter l’utilisation de certains modes de communication[72]Il a recommandé de donner au dirigeant principal de l’information du Canada le pouvoir d’approuver le choix des logiciels et d’appareils utilisés pour les affaires gouvernementales et de prévoir des sanctions pour la communication d’affaires gouvernementales sur des logiciels et des appareils non approuvés.

Le Comité est d’accord avec la commissaire à l’information et d’autres témoins que l’accès à l’information ne peut exister que les si les dossiers pertinents existent. Par conséquent, il recommande :

Recommandation 17

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l’accès à l’information afin d’y inclure une obligation de documenter assortie de sanctions appropriées en cas de non‑respect.

Recommandation 18

Que le gouvernement crée un cadre pour s'assurer que les méthodes d'évitement des exigences en matière d'accès à l'information soient arrêtées, que les exigences soient clairement énoncées dans les conditions d'emploi des employés des institutions fédérales, que les incidents d'évitement soient signalés dans un rapport au Commissaire à l'information du Canada, et que le rapport soit déposé au Parlement.

Recommandation 19

Que le gouvernement du Canada interdise l’utilisation de courriels personnels ou d’applications cryptées pour les communications gouvernementales.

Consultation entre institutions fédérales

L’alinéa 9(1)b) de la LAI permet la prorogation du délai de réponse à une demande d’accès d’une période que justifient les circonstances dans les cas où « les consultations nécessaires pour donner suite à la demande rendraient pratiquement impossible l’observation du délai ».

Mme Maynard a noté que les consultations auprès d’autres institutions fédérales sont problématiques. Elle a donné l’exemple d’une consultation effectuée par le Commissariat à l’égard d’un document de deux pages pour laquelle l’institution fédérale consultée a demandé au Commissariat un délai supplémentaire de 90 jours pour répondre.

Mme Maynard a rappelé que bien que la nécessité de mener des consultations peut être invoquée pour demander plus de temps pour répondre à une demande d’accès, ces consultations ne sont pas obligatoires. Bon nombre d’organisations croient qu’elles le sont ou agissent comme si c’était le cas car elles ne veulent pas communiquer de l’information provenant d’une autre institution fédérale sans l’avoir consultée au préalable.

Mme Maynard a reconnu que dans certains cas, il est probable que les institutions utilisent ces consultations comme prétexte pour tarder à répondre aux demandes. Elle a recommandé que la LAI fixe un délai ferme de 30 jours pour mener de telles consultations. Elle a indiqué qu’il faudrait aussi définir clairement les raisons pour lesquelles de telles consultations doivent avoir lieu ou non[73].

Un des problèmes identifiés par Mme Giles à l’égard des consultations entre institutions fédérales est le fait bon nombre de ministères n'ont pas facilement accès aux systèmes secret et top secret.

Le Comité appuie la recommandation de la commissaire d’information concernant les consultations entre institutions. Il recommande :

Recommandation 20

Que le gouvernement modifie la Loi sur l’accès à l’information afin de préciser les circonstances dans lesquelles les consultations entre institutions fédérales doivent avoir lieu et d’imposer une limite de temps pour celles‑ci.

Partage d’information proactif

Distinction entre transparence, gouvernement ouvert et accès à l’information

Plusieurs témoins ont reconnu qu’aujourd’hui, les Canadiens ont accès à une plus grande quantité d’information provenant du gouvernement qu’auparavant. Par exemple, M. Wernick a dit que les citoyens canadiens ont déjà accès à une panoplie de renseignements relatifs aux produits du gouvernement et « voient les résultats des décisions, les annonces, les contrats d'approvisionnement, les subventions et les contributions accordées, les vérifications, les évaluations, les recherches et ainsi de suite ». La présidente du Conseil du Trésor a précisé que le portail du gouvernement ouvert contient 37 000 dossiers et 2 millions de divulgations proactives.

M. Wernick a aussi souligné que dans un classement des pays les plus transparents, établi par le magazine U.S. News & World Report, le Canada occupe le deuxième rang sur 85 pays[74]. Dans le classement établi par Open Data Watch, le Canada occupe le 15e rang sur 187 pays[75]. Dans l'Indice sur l’État de droit du World Justice Project, le Canada occupe le 12e rang sur 140 pays en matière de transparence gouvernementale[76].

Cependant, le classement du pays à l’égard du droit à l’information est moins reluisant. Le Canada se trouve au 51e rang du Global Right to Information Rating (GRIR) sur 135 pays[77]. Cet indice analyse la qualité des lois d’accès à l’information dans le monde.

Mme Maynard a reconnu que bien que certaines lois soient bien rédigées, elles doivent aussi être bien appliquées et l’accès doit être bien traité.

Dans la même veine, la présidente du Conseil du Trésor a affirmé que le GRIR, bien qu’intéressant, n’est pas un indice utile car il « ne repose que sur des cadres juridiques, et non sur des réalités opérationnelles ». Selon elle, « personne ne croit que la Russie ou l'Afghanistan sont plus transparents que le Canada parce qu'ils ont un rang plus élevé que lui ». Elle a aussi noté que ce classement ne tient pas compte de la publication proactive, notant par exemple que le Canada se trouve au 7e rang sur 86 pays du Baromètre des données ouvertes, un classement mondial sur les données ouvertes[78].

L’écart entre le classement du Canada en matière de transparence et son classement en ce qui concerne le droit de savoir, permet d’illustrer un fait important : la transparence et l’accès à l’information sont deux concepts liés, mais distincts.

En effet, Mme Francoli a expliqué que l’accès à l’information est l’une des pierres angulaires de la transparence, mais que la transparence est un concept plus vaste. Elle a aussi noté que l’accès à l’information est un élément d’un gouvernement ouvert, soit un gouvernement fondé sur les notions de responsabilité, d'accès à l'information et de participation citoyenne. Selon elle, « l'accès à l'information en soi est le grand principe du gouvernement ouvert que nous devons améliorer au Canada ».

Mme Francoli a expliqué que le Canada a soumis cinq plans d'action au Partenariat pour un gouvernement ouvert, comprenant une série d'engagements visant à améliorer l'ouverture[79]. Ces plans d’action ont contribué à la diffusion d'informations et de données grâce à la création de mécanismes comme la Plateforme de science et de données ouvertes[80]. Cependant, elle a noté que bien que l’accès à l’information ait été inclus dans certains des premiers travaux du Conseil du Trésor sur le gouvernement ouvert, il semble avoir été relégué au second plan dans les plans d’action pour le gouvernement ouvert.

Mme Francoli a aussi tracé une distinction entre les données ouvertes et « l’ouverture par défaut ». Selon elle, les choses au Canada ont bougé davantage sur le plan des données ouvertes qu’en matière d’ouverture par défaut. Pour être plus ouvert par défaut, il faut penser à la classification des documents à l’avance et à la publication de choses de manière proactive, de sorte que la rétention d’information soit rare et limitée à certains éléments comme la sécurité nationale.

Mme Francoli a aussi rappelé que le Canada n’a pas de stratégie de transparence claire ou coordonnée. Elle a recommandé que le gouvernement adopte une telle stratégie, qui rassemblerait toutes les initiatives dispersées et inclurait des éléments comme l’accès à l’information, les systèmes de gestion de l’information, la conservation et la récupération, et la nécessité de fournir des ressources adéquates[81]. Elle a précisé que le Canada mène tout de même de nombreuses activités visant à améliorer la quantité et la qualité de l'information et de la divulgation des données, la transparence et la responsabilité au sein du gouvernement. Ces activités, si elles sont bien menées, devraient contribuer à alléger la pression qui existe sur le système d’accès à l’information.

M. Larsen a fait des commentaires similaires à ceux de Mme Francoli, indiquant que « les données ouvertes sont une chose; l'accès efficace à un régime d'information avec une divulgation proactive régie par la loi en est une autre ». Il s’est dit emballé par certaines des initiatives du gouvernement au cours des dernières années en ce qui concerne la communication plus active et plus proactive d'ensembles de données. Toutefois, il maintenu que sur le front de la transparence et de l'accès à l'information, le Canada n’est plus le chef de file qu’il pourrait ou devrait être.

Divulgation proactive

La partie 2 de la LAI, rajouté par le projet de loi C-58 en 2019, prévoit la publication proactive de certains renseignements. Cependant, Mme Maynard a expliqué que cette partie exige la publication proactive d’information qui était en grande partie déjà couverte par des politiques gouvernementales auparavant. M. Lapointe et M. Larsen ont indiqué que la proactivité en matière de divulgation est importante, mais selon M. Lapointe le projet de loi C-58 n’a permis que des progrès mineurs. Le projet de loi C‑58 a été critiqué par plusieurs témoins pour ne pas avoir réellement engendré les changements recherchés[82].

Considérant les limites de la partie 2 de la LAI, Mme Maynard a dit qu’elle aimerait plutôt que les administrations divulguent de façon proactive les renseignements qui sont demandés par les Canadiens et qui ne figurent pas dans la liste de la partie 2 de la LAI. Selon elle, une institution fédérale qui reçoit trois demandes sur le même sujet devrait publier de façon proactive les documents[83]. Elle a donné l’exemple de Santé Canada, qui a commencé à publier de façon proactive les résultats des tests faits en laboratoire parce que les gens les demandaient. Elle a aussi donné l’exemple des notes de breffage, qui font souvent l’objet de demandes d’accès, indiquant que lorsqu’elle rencontre un ministre ou un sous-ministre, elle demande s’il est possible, de façon proactive, de mettre cette information sur le site Web du ministère[84].

Mme Maynard a proposé que les institutions fédérales se basent sur les demandes d’accès qu’elles reçoivent chaque année pour déterminer les dix renseignements les plus demandés et les publier de façon proactive. Selon elle, les demandes d’accès « devraient toujours être le dernier recours et l'information devrait déjà être publique », car « on parle ici de l'information de nos Canadiens ». Elle a rajouté qu’il faut investir dans des outils pour fournir l’information que les Canadiens demandent, et non celle que le gouvernement veut bien divulguer. Elle a aussi noté qu’il devrait être possible d’évaluer si les obligations en matière de divulgation proactive sont respectées.

La BC FIPA a également recommandé que les types de documents fréquemment demandés et communiqués soient divulgués de façon proactive, et que toutes les exigences de divulgation proactive soient sous la supervision du Commissaire à l’information[85].

M. Conacher a recommandé d’obliger une divulgation systématique, non seulement des communications, des réunions et des processus décisionnels, mais aussi de tous les documents en ligne qui peuvent être divulgués et dont la communication est dans l'intérêt public. Cette divulgation pourrait se faire sur une base de données en ligne interrogeable, de sorte à réduire le nombre de demandes d’accès. L’Alliance de la fonction publique du Canada a fait une recommandation similaire[86].

M. Lapointe a indiqué que toute une gamme de renseignements devrait être divulguée de façon proactive, par exemple les vérifications ministérielles effectuées à l’interne, 30 jours après leur achèvement. Cette divulgation permettrait, selon lui, d’évaluer en temps réels si les programmes offrent effectivement un bon rapport qualité-prix.

Cependant, selon M. Beeby, une augmentation de la divulgation proactive ne diminuera pas nécessairement les demandes d’accès. Selon lui, les gouvernements pourraient communiquer des documents inoffensifs de façon proactive, alors que ceux liés à des décisions ne seront jamais communiqués de cette façon, à moins d’avoir été abondamment caviardés. Il a affirmé que « toute l’information n’est pas créée égale ». Il faut se demander si l’information publiée est utile et essentielle. M. Jolly s’est dit d’accord avec les propos de M. Beeby.

Par ailleurs, M. Beeby et M. Wernick ont noté que malgré la divulgation proactive de plusieurs documents, les demandes d’accès ne diminuent pas puisqu’il ne s’agit pas du type d’information recherchée[87]. M. Wernick a souligné que les gens veulent connaître l’information reliée aux processus délibératifs du gouvernement avant même que les décisions soient prises.

M. Wernick a recommandé d’insérer dans la LAI une obligation de divulgation routinière, régulière et proactive d’une liste beaucoup plus large de catégories d’information. Il a soulevé la possibilité qu’une telle liste puisse être ajoutée à la LAI par voie réglementaire. Cependant, il a rappelé qu’il faut tenir compte du contexte de la sécurité nationale lorsque des dispositions relatives à la publication proactive sont rédigées.

M. Wernick a aussi recommandé que les ministères et les organismes assujettis à la LAI soient forcés d’afficher chaque demande d’accès, chaque demande pour laquelle des documents sont divulgués, et le temps écoulé entre le dépôt de la demande et la divulgation des documents. Cela créerait selon lui une boucle de rétroaction.

Mme Francoli a elle aussi souligné l’importance de mettre l’accent sur la divulgation proactive et l’ouverture par défaut autant que possible. Elle a donné l’exemple du Groupe consultatif sur la transparence de la sécurité nationale qui a recommandé aux intervenants du milieu de la sécurité nationale d'élaborer une déclaration d'engagement envers la transparence, dans laquelle ils préciseraient ce que la transparence signifie pour les différents organismes de sécurité et comment ce sera mesuré[88].

M. Larsen a préconisé l’inclusion du principe de la « primauté de l'intérêt public » dans la LAI. Un tel principe permet la publication de renseignements jugés d'intérêt public, et dans certains cas, exige leur publication proactive. Selon lui, il faudrait étendre ce principe à tous les autres motifs pour lesquels des renseignements pourraient ne pas être divulgués[89]. À l’heure actuelle, la LAI ne contient qu’une disposition très limitée relative à la primauté de l'intérêt public[90]. Le CLD et l’Alliance de la fonction publique du Canada ont fait une recommandation similaire[91]. Mme Maynard a elle aussi recommandé d’ajouter le concept d’« intérêt public » à la LAI. Selon elle, si l’intérêt public était mentionné au début de la LAI, cela voudrait dire qu’il l’emporte sur tout autre facteur dans les décisions discrétionnaires.

M. Conte a par ailleurs souligné qu’aux États-Unis, la loi fédérale en matière d’accès à l’information contient une disposition qui permet de répondre aux demandes sur les questions d’intérêt public urgentes plus rapidement. Il a expliqué aux États-Unis, s'il survient une question urgente touchant les activités du gouvernement, une demande d'accès relative à cette question sera traitée en priorité. Mme Maynard a confirmé qu’au Canada, c’est premier arrivé, premier servi.

Matt Malone, un professeur adjoint de la faculté de droit de l’Université Thompson River, a quant à lui critiqué l’impossibilité de contester l’absence de réponse du gouvernement à une demande d’accès informelle pour des documents qui ont déjà fait l’objet d’une demande d’accès et dont les résumés sont disponibles en ligne. Il a recommandé que les documents relatifs aux demandes d’accès traitées soient conservés pour plus de deux ans et rendus publics de façon proactive[92].

En ce qui concerne la possibilité de divulguer des renseignements dans l’intérêt public, par exemple des délibérations du Cabinet ou de ses comités, M. Wernick a toutefois fait remarquer que la question serait alors « qui décide de ce qui est dans l’intérêt public ». Selon lui, cette question devrait être tranchée par la Cour fédérale, alors que M. Tromp est d’avis qu’elle pourrait être tranchée soit par la commissaire à l’information ou les tribunaux.

Mme Maynard a aussi souligné qu’un frein existe au niveau de la divulgation proactive en raison du fait que les documents doivent être publiés dans les deux langues. Les institutions disent souvent qu’elles n’ont pas les ressources nécessaires pour faire traduire ces documents. Toutefois, Mme Maynard a noté qu’il y a très peu de plaintes relatives à la langue dans laquelle les documents sont fournis dans le cadre de demandes d’accès.

Mme Francoli a soulevé que les obligations sous la Loi sur les langues officielles (LLO) rendent la situation du Canada, en matière d’accès à l’information et de gouvernement ouvert, différente que pour d’autres pays. Elle a dit que la LLO est souvent présentée comme un obstacle à l’ouverture du gouvernement et à une plus grande transparence.

Le Comité reconnaît que le gouvernement partage une vaste quantité d’information avec les Canadiens. Cependant, comme certains témoins l’ont indiqué, les données qui sont disponibles ne sont pas toujours celles que recherchent les Canadiens. C’est pourquoi ils continuent de faire des demandes d’accès. Le Comité est d’avis que la divulgation proactive devrait être adaptée à ce à quoi les Canadiens veulent avoir accès. Si cela est dans l’intérêt public, l’information devrait être accessible sans qu’il soit nécessaire de faire une demande d’accès. En conséquence, le Comité recommande :

Recommandation 21

Que le gouvernement du Canada augmente l'information publiée de manière proactive en vertu de la partie 2 de la Loi sur l’accès à l’information.

Recommandation 22

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l’accès à l’information afin d’exiger que les institutions fédérales qui y sont assujetties fassent la divulgation proactive des renseignements fréquemment demandés dans le cadre de demandes d’accès.

Recommandation 23

Que le gouvernement du Canada publie toutes les demandes d'accès à l'information non liées à des renseignements personnels dans une base de données consultable, accessible au public sans frais, et que ces demandes soient rendues anonymes avant d'être publiées.

Recommandation 24

Que le gouvernement du Canada exige des institutions fédérales qui font face à des demandes répétées sur un sujet précis qu'elles en informent le Commissaire à l’information et qu'un rapport soit envoyé au Parlement.

Recommandation 25

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l'accès à l'information afin de s'assurer que les demandes d'accès présentées antérieurement sont assujetties à celle‑ci.

Recommandation 26

Que le gouvernement du Canada oblige chaque institution fédérale à tenir un registre public des demandes d’accès à l’information qu’elles reçoivent et le temps nécessaire pour répondre à chaque demande.

Recommandation 27

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l’accès à l’information afin de préciser que le système d’accès à l’information repose sur une culture d’ouverture et de transparence et d’inclure dans la Loi un principe de la primauté de l’intérêt public, qui s’appliquerait à toutes les exceptions afin de rendre les documents d’intérêt public ouverts par défaut.

Recommandation 28

Que le gouvernement crée une approche « ouverte par défaut » de l'accès à l'information et reconnaisse que le statu quo n'est pas acceptable.

Portée de la Loi sur l’accès à l’information

Application de la Loi sur l’accès à l’information aux documents confidentiels du Cabinet

L’article 69(1) de la LAI prévoit que la partie 1 de cette loi, qui donne un droit d’accès aux documents relevant d’une institution fédérale, ne s’applique pas aux documents confidentiels du Cabinet. C’est une exclusion complète.

Selon Mme Maynard les renseignements confidentiels du Cabinet et ceux des cabinets du premier ministre et des ministres devraient être assujettis à la LAI[93]. Elle a expliqué que puisque les documents du Cabinet sont exclus de l’application de la LAI et ne relèvent pas de son autorité, le Commissariat ne reçoit qu’une confirmation par l’institution que certaines des pages demandées par un plaignant sont visées par l’exclusion. Selon elle ces documents devraient être soumis au Commissariat pour qu’il puisse faire une révision indépendante des documents et confirmer qu’il s’agit effectivement de documents confidentiels du Cabinet[94]. Elle a soulevé la question suivante : si elle n’a pas accès à ces documents, et que personne d’autre ne peut les examiner, comment peut-elle confirmer aux Canadiens qu’il s’agit bel et bien de renseignements confidentiels?

Mme Maynard a rappelé qu’elle a déjà l’habileté de faire un tel examen indépendant en ce qui concerne les documents couverts par le secret professionnel de l’avocat. Elle a confirmé que le Commissariat a accès aux documents pour les autres exceptions qui existent sous la LAI et peut comparer la version caviardée et l’original. Elle a précisé que cela inclut les documents secrets et très secrets.

Mme Maynard a souligné que son rôle, en révisant les documents confidentiels du Cabinet, serait de déterminer si l’exclusion à l’article 69 a été appliquée correctement et non pas de divulguer les documents au public. Elle a mentionné que le Canada est l’un des rares pays du Commonwealth à ne pas avoir d’examen indépendant des documents confidentiels du Cabinet.

La présidente du Conseil du Trésor, pour sa part, a souligné qu’il est important que les ministres du Cabinet puissent s’exprimer librement pendant les réunions et donc de protéger les « secrets du Cabinet ». Elle a aussi rappelé que la partie 2 de la LAI prévoit maintenant la divulgation proactive de certains documents des ministres. M. Burt a rajouté qu’il faut « se donner une certaine marge de manœuvre pour pouvoir avoir les discussions nécessaires au fonctionnement du gouvernement ».

Mme Francoli a elle aussi noté que plusieurs facteurs font en sorte que la LAI devrait s’appliquer aux documents confidentiels du Cabinet, même la prise de décisions au sein du Cabinet peut être un exercice difficile et qu’elle reconnaisse la nécessité de laisser libre cours aux discussions et délibérations. Néanmoins, elle a dit que la commissaire à l’information devrait pouvoir voir les documents confidentiels du Cabinet.

M. Beeby a lui aussi reconnu que certaines délibérations du gouvernement doivent être protégées afin de permettre des discussions ouvertes et honnêtes, mais comme Mme Maynard et Mme Francoli, il a critiqué l’absence d’un mécanisme de surveillance au niveau des documents du Cabinet. Il a dit que la commissaire à l’information devrait avoir le pouvoir d’examiner les décisions relatives au refus de communiquer des documents du Cabinet.

M. Tromp a aussi recommandé que les documents confidentiels du Cabinet puissent être révisés par la commissaire à l’information. Il a aussi recommandé d’éliminer l’exclusion complète de ces documents de l’application de la LAI et de la remplacer par une exception[95]. Il a fait remarquer que seuls le Canada et l’Afrique du Sud ont une telle exclusion dans leurs lois. Il a donné l’exemple du Ghana, où la loi sur l’accès à l’information adoptée en 2019 prévoit un critère de préjudice précis pour les documents du Cabinet. Ils ne peuvent être retenus que s'ils « portent atteinte au processus de délibération ».

M. Lapointe a lui aussi reconnu qu’il est tout à fait raisonnable de préserver la confidentialité des documents du Cabinet dans le cadre des délibérations qui précèdent la prise de décisions. Cependant, il est d’avis que la divulgation de ces renseignements après la prise de cette décision devrait se faire plus tôt. Il a dit que la période d’interdiction d’accès aux documents confidentiels du Cabinet devrait être réduite à 10 ou 15 ans, donnant l’exemple de la Colombie-Britannique, où les documents confidentiels du Cabinet demeurent confidentiels pendant 15 ans. M. Wernick était d’avis qu’une période de 10 à 12 ans serait adéquate. M. Beeby a recommandé une période de 10 ans. M. Tromp et la BC FIPA ont aussi recommandé de réduire cette période[96].

M. Beeby a confirmé que selon lui les données et informations de base sur lesquelles le Cabinet s’est fondé pour prendre ses décisions devraient être publiées de façon proactive peu de temps après la décision. À son avis, il est important de pouvoir savoir ce qui s’est passé au cours des délibérations qui ont mené à une décision, pour savoir si des sociétés, des promoteurs ou d’autres intervenants ont exercé une influence indue sur le Cabinet. Il a donc recommandé de protéger les délibérations, mais de publier les renseignements fournis pour éclairer ces délibérations.

Toutefois, M. Wernick a souligné qu’il ne serait pas dans l’intérêt public de faire en sorte qu’il soit plus difficile pour le Cabinet de délibérer et de prendre des décisions. Il a indiqué que si un certain degré de confidentialité autour des processus de délibération qui précèdent la prise de décision du Cabinet n’est pas garanti, la capacité de ce dernier de prendre des décisions sera compromise.

Application de la Loi sur l’accès à l’information aux bureaux du premier ministre et des ministres

Dans la soumission du Commissariat dans le cadre de l’examen de l’accès à l’information au sein du gouvernement du Canada, Mme Maynard a recommandé d’étendre l’application de la partie 1 de la LAI aux cabinets du premier ministre et des ministres[97]. M. Rubin, le CLD et la BC FIPA ont fait la même recommandation[98]. Selon la commissaire, « dans un gouvernement transparent, toute personne élue ou prenant des décisions au nom du gouvernement, y compris au sein des cabinets ministériels, devrait être assujettie à la Loi ».

De façon similaire, M. Conacher a recommandé que la LAI s’applique aux cabinets des ministres. M. Wernick a recommandé d’élargir la LAI au personnel qui travaille pour des ministres et M. Beeby a recommandé que les adjoints politiques des ministres soient assujettis à la LAI[99].

Selon M. Wernick, le régime d’accès à l’information devrait s’appliquer à tous les membres du personnel financé par les contribuables et aux cabinets des ministres, y compris à celui du premier ministre, afin de placer l’ensemble du personnel politique et des fonctionnaires sur un pied d’égalité. Il a expliqué que le Cabinet et ses comités, ce qui comprend le CDT, produisent des ordres du jour, des documents et des délibérations liés aux processus du Cabinet. Le personnel politique des cabinets ministériels participe à l’ensemble du processus en amont du tri des options et des conseils. Ils se rencontrent entre eux et ils rencontrent des fonctionnaires. À l’heure actuelle, le régime d’accès à l’information ne fait ressortir que la partie qui concerne les échanges entre fonctionnaires.

Application de la Loi sur l’accès à l’information à d’autres institutions et individus

Selon Mme Maynard, tout organisme fonctionnant au nom du gouvernement et utilisant des fonds publics pour offrir des services aux Canadiens, au nom du Canada, devrait être assujetti à la LAI[100]. Elle s’appliquerait alors aux sociétés d’État et aux entités privées qui sont parfois engagées sous contrat par le gouvernement[101].

M. Conacher a abondé dans le même sens. Il a recommandé de modifier la LAI pour qu'elle vise toutes les institutions gouvernementales, y compris les institutions financées par l'État et celles à vocation publique.

M. Rubin a lui aussi indiqué que plus d’entités devraient être assujetties à la LAI, surtout dans le secteur privé[102]. Il a noté qu’il est parfois difficile de s’y retrouver dans toutes les filiales de certaines sociétés d’État et de savoir si des elles sont assujetties à la LAI ou non.

M. Tromp a lui aussi recommandé que la LAI s’applique aux entités publiques qui exercent des fonctions publiques et dépensent l’argent des contribuables, comme la Société canadienne du sang, la Société de gestion des déchets nucléaires et NAV Canada. Le CLD a recommandé d’élargir la portée de la LAI aux renseignements détenus par toutes les autorités qui engagent la responsabilité de l’État[103]. La BC FIPA a recommandé d’élargir la portée de la loi à toutes les organisations qui fournissent des services publics[104].

M. Wernick a de son côté proposé d’élargir la portée de la LAI de sorte qu’elle devienne une loi sur la transparence. La commissaire à l’information deviendrait une commissaire à la transparence et se verrait confier un vaste mandat consistant à examiner les pratiques liées à la transparence dans l’ensemble du secteur public fédéral, y compris chez les sociétés d’État, le Parlement, et les tribunaux.

M. Conacher a aussi recommandé de modifier la LAI pour permettre à toute personne, même si elle ne vit pas au Canada, de présenter des demandes d'accès[105].

Enfin, Mme Maynard a reconnu qu’élargir la portée de la LAI pourrait faire augmenter le nombre de demandes et le nombre de gens qui doivent répondre aux demandes d’accès. Cependant, elle estime qu’il faut donner aux Canadiens exactement ce qu’ils souhaitent obtenir et qu’à l’heure actuelle, il y a une foule de renseignements auxquels ils ne peuvent avoir accès sous la LAI, dont ceux qui proviennent des cabinets des ministres, ainsi que des organisations, fournisseurs ou entrepreneurs externes. Comme cela représente une grande quantité d'information, elle estime nécessaire d'élargir la portée de la loi.

Le Comité partage l’avis de nombreux témoins selon lequel le champ d’application de la LAI devrait être élargi, en particulier en ce qui concerne l’application de la partie 1 au Cabinet du premier ministre et aux bureaux des ministres. Le Comité reconnaît également qu’il est important que le Cabinet puisse discuter librement lorsqu’il prend des décisions. Cependant, il est d’avis que l’exclusion générale des documents confidentiels du Cabinet de l’application de la partie 1 de la LAI devrait être éliminée et remplacée par une exception. Il estime aussi que la commissaire à l’information devrait pouvoir procéder à un examen indépendant des documents confidentiels du Cabinet. Par conséquent, il recommande :

Recommandation 29

Que le gouvernement du Canada ordonne et effectue un examen impartial des documents confidentiels du Cabinet en ce qui concerne le système d'accès à l'information et de protection des renseignements personnels.

Recommandation 30

Que le gouvernement du Canada étende le champ d’application de la partie 1 de la Loi sur l’accès à l’information aux documents confidentiels du Cabinet, sauf lorsqu’une exception s’applique, et qu’il donne au commissaire à l’information le pouvoir d’examiner ces documents afin de déterminer si l’exception a bien été appliquée.

Recommandation 31

Que le gouvernement du Canada étende le champ d’application de la partie 1 de la Loi sur l’accès à l’information au Cabinet du premier ministre et aux cabinets des ministres.

Recommandation 32

Que le gouvernement du Canada étende le champ d’application de la Loi sur l’accès à l’information à tout organisme fonctionnant au nom du gouvernement et utilisant des fonds publics pour offrir des services aux Canadiens.

Limites relatives à l’utilisation des exceptions et aux exclusions sous la Loi sur l’accès à l’information

La LAI contient aux articles 13 à 26, des exceptions qui permettent au responsable d’une institution fédérale de refuser de communiquer certains renseignements. La LAI contient également des exclusions aux articles 68 et 69, ce dernier portant sur les documents confidentiels du Cabinet qui ont été discutés dans la section précédente du rapport.

Selon Mme Maynard, les exceptions prévues à la LAI devraient toujours être invoquées de façon exceptionnelle. Par exemple, dans le cadre de l’examen du système d’accès à l’information du gouvernement, elle a recommandé de limiter l’application relative aux renseignements personnels à l’article 19 de la LAI et d’imposer une obligation consulter la commissaire à l’information si l’ajout de nouvelles interdictions fondées sur d’autres lois à l’annexe II de la LAI est envisagé sous l’article 24 de la LAI[106].

Mme Luelo a reconnu qu’un défi concernant l’application des exceptions et exclusions de la LAI est que certains ministères les interprètent eux-mêmes, malgré les directives du SCT sur la façon dont il souhaite voir ces règles s’appliquer[107].

M. Conacher a recommandé que toutes les exceptions à la divulgation soient clairement et étroitement définies et qu’elles se limitent aux domaines où l’intérêt public exige le secret. Il a recommandé que les exclusions deviennent des exceptions et que chaque exception ait une définition plus étroite[108]. Selon lui, les exceptions dans la LAI sont trop générales. Le CLD a aussi recommandé de limiter la portée des exceptions[109].

M. Larsen est d’avis qu’il faudrait imposer un critère du préjudice pour l’application d’exceptions à la communication plutôt que d’avoir des exceptions catégoriques qui traitent de certaines sortes d'informations. Ce critère devrait aussi être utilisé pour les documents du Cabinet. Ainsi, le public aurait la certitude que lorsque des informations ne sont pas publiquement divulguées c’est parce que leur divulgation entraînerait un préjudice démontrable, et non pas simplement parce que le gouvernement exerce son pouvoir de les garder secrètes.

Selon M. Rubin, « des règles excessives d'organismes centraux comme le Conseil du Trésor, le Cabinet du premier ministre et le Bureau du Conseil privé », le fait que des entreprises peuvent émettre des objections à l’égard de la communication de renseignements et le fait que les forces de l'ordre disent que c'est une question de sécurité nationale pour éviter la publication de renseignements, font en sorte que la personne normale a très peu de chance de recevoir l’information qu’elle recherche. Il a par exemple noté qu’il n’est pas rare qu’une demande d’accès se solde par une réponse contenant des pages blanches.

M. Beeby a lui aussi noté que les documents qui arrivent finalement sur le pupitre d’un journaliste « ont été expurgés de tout contenu révélateur ». Selon lui, la LAI fournit aux fonctionnaires « une panoplie d'excuses pour cacher l'information ». M. Barnes, a souligné que beaucoup de renseignements sont caviardés selon une vision qu’il qualifie de très subjective, et qu’il n’existe pas de directive claire au sein du système sur le caractère délicat ou non d'un document. À son avis « il devrait tout de suite être évident, pour toute personne raisonnable, si un document est vraiment confidentiel ou non ».

M. Lapointe a mentionné la loi sur la transparence allemande qui prévoit une divulgation automatique de l’information, sauf si la partie qui doit communiquer des renseignements argumente qu’ils ne devraient pas être divulgués. Selon M. Lapointe, cette approche fait peser la charge là où il pense qu’elle était censée peser initialement.

M. Wernick s’est dit d’accord avec M. Lapointe que le fardeau pourrait être inversé de manière à divulguer l’information à moins que sa non-communication soit justifiée. Il a toutefois noté que cela nécessiterait une précision des définitions de « sécurité nationale » et « documents confidentiels du Cabinet ». Il a par ailleurs souligné qu’il ne faut pas faire abstraction du fait que la LAI est utilisée par toutes sortes d’acteurs comme des courtiers et des revendeurs; des avocats; des lobbyistes et groupes spéciaux; et des entreprises ou gouvernements étrangers. Il faut donc faire un examen minutieux de chaque demande d’accès.

Cependant, selon M. Beeby, le fardeau inversé existe déjà dans la LAI à l’alinéa 2(2)(a) qui discute des objets spécifiques de la partie 1 de la Loi, qui consacre le principe du droit du public à la communication des documents de l’administration fédérale, sauf en cas d’exceptions précises et limitées. En ce qui concerne l’utilisation de la LAI par des courtiers et revendeurs, il s’est dit d’avis que ces derniers, qui offrent un service aux Canadiens, ont tout à fait le droit de demander des renseignements, au même titre que des journalistes ou toute autre personne.

À l’égard du processus de caviardage des documents communiqués dans le cadre d’une demande d’accès, M. Wernick a souligné qu’il faut d’abord améliorer la clarté et les définitions dans la LAI, en adoptant des termes clairs et précis. Ensuite, il faut donner au commissaire à l’information le rôle de signaler ce qu’il ou elle considère comme des suppressions inappropriées. Enfin, il faut que le demandeur puisse s’adresser à la Cour fédérale, qui selon lui devrait entre autres avoir le dernier mot sur toute question relative à des renseignements confidentiels du Cabinet.

M. Lapointe était d’accord avec M. Wernick qu’il faudrait habiliter la commissaire à exercer une plus grande surveillance en ce qui concerne le caviardage des documents. Si nécessaire, il a proposé qu’un petit organisme, conseil ou assistant, puisse aider le Commissariat à trancher au sujet des passages caviardés afin de mieux servir l'intérêt public.

Sécurité nationale

Comme indiqué dans la section de ce rapport portant sur l’accès aux documents historiques, l’article 15 de la LAI permet au responsable d’une institution fédérale de refuser de communiquer certains renseignements liés aux affaires internationales et à la défense du Canada[110].

En ce qui concerne la possibilité qu’un contrat ne puisse pas être divulgué pour de raisons de sécurité nationale, Mme Maynard a indiqué cela dépend de la façon dont le contrat est rédigé. Chaque cas est différent. Si un contrat soulève effectivement des questions de sécurité nationale, il est traité de façon différente. Il faut toutefois que cela vise réellement à éviter un danger ou un abus de confiance. Elle a rajouté qu’aussitôt que les gens voient un document classé confidentiel, secret ou ultrasecret, ils ont tendance à penser que l’information ne devrait pas être divulguée. Pourtant, le test exige de déterminer si la divulgation de l’information va engendrer des conséquences.

Comme Mme Maynard, M. Drapeau a dit que l’exemption de sécurité nationale peut être invoquée dans toutes sortes de contexte. Selon la nature, les objectifs et les circonstances du contrat, on peut avoir intérêt à ne pas révéler certaines informations. Chaque cas est un cas d’espèce. Il a rajouté que lorsque des cas mettent en cause la sécurité nationale, il s’attend à ce que tous les fonctionnaires, y compris ceux qui travaillent dans le domaine de l’accès à l’information, soient très prudents et conservateurs et qu’ils ne divulguent que ce qui est possible, pratique, utile et légal de divulguer. Comme indiqué au Chapitre 3, Mme Giles a expliqué qu’il existe d’importantes raisons pour protéger de la divulgation certaines informations reliées à la sécurité nationale. Elle a souligné l’importance de balancer le droit d’accès à l’information avec la protection d’informations sensibles.

Renseignements des tiers

L’article 20 de la LAI prévoit que le responsable d’une institution fédérale est tenu, sous réserve des autres dispositions de cet article, de refuser la communication de documents contenant divers types d’information dont, entre autres, les secrets industriels de tiers ou des renseignements financiers, commerciaux, scientifiques ou techniques de nature confidentielle.

Mme Maynard a indiqué que le Commissariat encourage les gens qui établissent des contrats à faire preuve de plus de transparence et à avertir l’entrepreneur avec qui ils concluent un contrat au nom du gouvernement, que cette information sera accessible aux Canadiens.

Dans la soumission du Commissariat dans le cadre de l’examen du système d’accès à l’information au sein du gouvernement du Canada, Mme Maynard a proposé d’abroger l’article qui requiert au commissaire de donner au tiers intéressé un avis écrit de son intention d’ordonner au responsable d’une institution fédérale de communiquer tout ou partie d’un document qui pourrait contenir des renseignements visés à l’article 20[111].

M. Drapeau a expliqué que si une demande vise des renseignements fournis au ministère par un tiers, ce dernier doit consulter le tiers concernant la divulgation potentielle. Ce tiers peut exiger que certains renseignements soient considérés comme étant des secrets professionnels ou industriels. S’ils sont divulgués en dépit des représentations faites par le tiers, ce dernier peut porter la cause devant les tribunaux. Il a souligné que ce processus peut entraîner des délais en matière d’accès à l’information.

De son côté, M. Conacher a affirmé que les contrats et les renseignements commerciaux sont beaucoup trop protégés. Selon lui, « tout ce qui doit être protégé, ce sont les renseignements exclusifs qui sont à la base des activités d'une société ». Tout ce qui va plus loin, comme protéger les signataires des contrats et les sous-traitants, est selon lui excessif[112]. M. Malone a recommandé que la LAI soit modifiée de manière à affirmer que les montants des fonds publics dépensés ne constituent jamais de l’information confidentielle[113].

Activités du gouvernement

L’article 21 de la LAI prévoit que le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents datés de moins de 20 ans lors de la demande et contenant divers types d’information, dont des avis ou recommandations élaborés par ou pour une institution fédérale ou un ministre (alinéa 21(1) a)).

Mme Maynard a indiqué que l’exemption que l’on retrouve à l’alinéa 21(1)a) est trop souvent utilisée. Le Commissariat ordonne souvent à l’institution fédérale de divulguer l’information factuelle ou statistique qui ne contient pas d’avis ou de recommandation. Elle a noté que dans la soumission du Commissariat au CDT dans le cadre de son examen du système d’accès à l’information, elle a recommandé d'ajouter dans la LAI une liste d'informations auxquelles l'exception prévue à l'alinéa 21(1)a) ne devrait pas s'appliquer[114]. Elle a noté que la loi ontarienne équivalente contient cette précision, ce qui aide les fonctionnaires[115]. Elle a fait des commentaires similaires lors de sa deuxième comparution.

Selon Mme Maynard, les gens devraient « au moins avoir la base », sans nécessairement savoir ce qui a été recommandé ou quels ont été les avis, pour pouvoir savoir si les bons faits ont été utilisés. Elle a aussi recommandé que la période de 20 ans à l’article 21 soit réduite à 10 ans[116].

La BC FIPA a recommandé que l’article 21 soit modifié de sorte qu’il n’empêche pas la divulgation de renseignements factuels et généraux qui ne constituent pas des avis ou des recommandations Elle a aussi recommandé que la période pendant laquelle les documents peuvent ne pas être communiqués soit réduite[117].

De façon similaire, M. Tromp a recommandé d’ajouter à l’article 21 de la LAI un critère de préjudice, une limite de temps de 10 ans, ainsi qu’une déclaration claire selon laquelle on ne peut exiger la rétention d’information factuelle et d’analyses de base comme étant un avis[118]. M. Beeby a quant à lui recommandé de définir plus clairement dans la LAI le terme « avis » pour empêcher que l’exception soit utilisée « comme une solution fourre-tout pour refuser de communiquer des renseignements ».

Secret professionnel de l’avocat

L’article 23 de la LAI prévoit que le responsable d’une institution fédérale peut refuser la communication de documents contenant des renseignements protégés par le secret professionnel de l’avocat ou du notaire ou par le privilège relatif au litige.

Mme Maynard a indiqué que les communications entre avocats ne sont pas toutes confidentielles et doivent être examinées au cas par cas. Elle a expliqué qu’en vertu de la LAI, elle a le pouvoir d’examiner les documents pour lesquels une institution fédérale réclame le secret professionnel de l’avocat, lorsqu’une plainte est déposée auprès du Commissariat. Elle détermine alors si l’exception a bien été appliquée aux documents communiqués au plaignant. Elle a dit que l’exception est bien appliquée dans environ 75% des cas.

Mme Maynard a précisé qu’une plainte porte sur l’application de l’exception à l’article 23 de la LAI, elle peut comparer le document original et le document caviardé pour confirmer si oui ou non les renseignements caviardés correspondent à un avis juridique qui ne peut être divulgué.

Exclusion relative à la Société Radio-Canada

L’article 68.1 de la LAI exclut de l’application de la partie 1 de la LAI « les renseignements qui relèvent de la Société Radio-Canada (SRC) et qui se rapportent à ses activités de journalisme, de création ou de programmation ». La partie 1 s’applique aux renseignements relatifs l’administration de la société.

Selon Patrick McCurdy, professeur adjoint du Département de communication de l’Université d’Ottawa, cette exclusion créée plusieurs défis et obstacles pour les chercheurs qui s’intéressent à l’histoire de la SCR. Tout en reconnaissant l’importance conserve son indépendance et sa liberté d’expression, il a recommandé de modifier l’article 68.1 afin d’y inclure une disposition de temporisation, limitant la période pendant laquelle SRC peut refuser de communiquer certains renseignements[119].

Le Comité estime que comme il est indiqué dans l’objet de la LAI, les exceptions indispensables à la divulgation d’information doivent être précises et limitées. L’utilisation d’une exception devrait être l’exception et non la norme. Par conséquent, le Comité recommande :

Recommandation 33

Que le gouvernement du Canada procède à un examen des exceptions et des exclusions à l'accès à l'information contenues dans la Loi sur l'accès à l'information, y compris, mais sans s'y limiter, les renseignements commerciaux sensibles, les renseignements personnels, le personnel politique et les documents confidentiels du Cabinet.

Recommandation 34

Que le gouvernement du Canada modifie l’article 21 de la Loi sur l’accès à l’information afin d’y inclure une liste de renseignements auxquels l’exemption relative aux activités du gouvernement ne s’applique pas et réduire la période prévue de 20 ans à 10 ans.

Recommandation 35

Que le gouvernement du Canada limite l’application de l’exception relative aux renseignements personnels à l’article 19 de la Loi sur l’accès à l’information et impose une obligation de consulter la Commissaire à l’information du Canada si l’ajout de nouvelles interdictions fondées sur d’autres lois à l’annexe II de la Loi est envisagé en vertu de l’article 24, ou sur d’autres sujets tel que l’intelligence artificielle.

Recommandation 36

Que le gouvernement du Canada modifie la LAI de manière à affirmer que les montants des fonds publics dépensés ne constituent jamais de l’information confidentielle.

Gestion des demandes vexatoires

Mme Maynard a expliqué que depuis l’adoption du projet de loi C-58, une institution peut demander au Commissariat l’autorisation de ne pas répondre à une demande d’accès. Le responsable d’une institution fédérale peut, avec l’autorisation écrite du commissaire à l’information, ne pas donner suite à une demande d’accès « si, à son avis, la demande est vexatoire ou entachée de mauvaise foi, ou constitue autrement un abus du droit de faire une demande de communication[120] ».

Mme Maynard a précisé que cette mesure n’est pas utilisée fréquemment. Elle a seulement été utilisée à quelques reprises au cours des deux dernières années. Un document d’information fourni au Comité montre qu’en avril 2019 et mars 2023, le Commissariat a reçu 55 demandes d’autorisation de ne pas donner suite à une demande d’accès. Sur ces demandes, cinq seulement ont été accordées par la commissaire à l’information[121].

Mme Maynard a rajouté qu’elle est en train de publier ses décisions relatives à l’article 6.1 pour donner des lignes directrices aux institutions fédérales en ce qui concerne l’utilisation de cette disposition. Elle a toutefois fait une mise en garde. La LAI vise à responsabiliser le gouvernement et améliorer la démocratie. Il serait donc difficile de trop circonscrire ce que des gens, par exemple des journalistes, demandent aux institutions fédérales.

M. Lapointe a fait une mise en garde similaire. Il a souligné que les termes « mauvaise foi » et « vexatoire » sont subjectifs. Avant de rejeter de telles demandes, il faut s’assurer qu’elles soient vraiment vexatoires.

Mme Maynard a reconnu que les demandes d’accès malveillantes existent. La plupart des institutions ont un demandeur ou deux qui pour une raison ou une autre est mécontent et décident de submerger une institution de demandes ou de présenter des demandes frivoles. Avant 2019, il n’y avait aucun moyen de repousser ces demandes. Maintenant, il est possible de ne pas y répondre avec l’autorisation de la commissaire à l’information. Selon elle, l’impact des demandes vexatoires et frivoles est énorme. Par exemple, au Commissariat, trois personnes s’occupent des demandes d’accès. L’an dernier, elle a reçu une demande qui s’est soldée par l’envoi de 33 000 pages. Le Commissariat lui-même a dû demander une prorogation sous la loi — pour dépasser le délai prescrit de 30 jours.

Toutefois, Mme Maynard a expliqué que lorsque quelqu’un demande un nombre énorme de dossiers, le fait qu’il y ait beaucoup de documents ne veut pas dire que la demande elle-même est déraisonnable. Les institutions fédérales devraient communiquer avec les demandeurs et discuter avec eux avant de demander au Commissariat de leur permettre de ne pas répondre à la demande parce qu’elle est vexatoire. Cela reflète l’obligation de prêter assistance dans la LAI[122].

Frais d’accès

En ce qui concerne les frais d’accès, M. Larsen, M. Conacher, M. Rubin et le CLD, sont d’avis que les demandes d’accès devraient être gratuites puisque les frais constituent une barrière à l'accès[123]. M. Larsen a noté qu’en Colombie-Britannique, où des frais d’accès sont imposés, il s’agit de frais dissuasifs plutôt que de frais permettant de recouvrer les coûts de l’accès à l’information. Selon lui, il est fondamental dans une démocratie de réduire les obstacles à l'accès à l'information. Les frais d’accès constituent un obstacle.

Pour sa part, Mme Maynard est d’avis qu’un accès gratuit serait idéal, mais que les cinq dollars exigés en frais initiaux à l’heure actuelle sont très raisonnables[124]. M. Drapeau, quant à lui, est d’avis qu’il faudrait imposer de plus grands frais pour les demandes d’accès, afin de réduire le nombre de demandes frivoles ou vexatoires et d’octroyer aux sous-ministres les ressources nécessaires pour avoir plus de personnel pour répondre aux demandes d’accès[125].

Chapitre 5 : Pouvoirs, indépendance et ressources de la commissaire à l’information

Pouvoirs de la Commissaire à l’information

Pouvoir d’émettre des ordonnances

Mme Maynard a noté deux changements positifs que le projet de loi C-58 a amenés : le pouvoir de rendre des ordonnances et la capacité de publier des rapports d’enquête.

Selon Mme Maynard, le fait qu’elle puisse maintenant rendre des ordonnances, plutôt que simplement formuler des recommandations, aide au traitement des dossiers de plaintes et à l’obtention des règlements informels. Lorsque les institutions savent qu’une ordonnance peut être émise, elles se pressent un peu.

Elle a expliqué que, comme elle peut ordonner une divulgation ou le respect d’un échéancier donné pour une divulgation, moins de négociations avec les institutions fédérales ont cours. Le Commissariat demande à l’institution fédérale de justifier les retards ou l’utilisation d’une exception. Si la justification n’est pas satisfaisante, le Commissariat exprime son désaccord et une ordonnance est émise. Cela rend le processus beaucoup plus rapide et efficace.

Cependant, Mme Maynard a noté que ses ordonnances ne sont pas toujours respectées, puisqu’elle n’a pas accès à un processus de certification auprès de la Cour fédérale pour s’assurer que ces dernières soient considérées comme équivalentes à celle des tribunaux. Elle a expliqué que lorsqu’elle émet une ordonnance, l’institution fédérale a le choix de s’y conformer ou de la contester devant les tribunaux. Elle a rajouté qu’une « tendance se dégage où les institutions ne disent pas qu'elles vont contester l'ordonnance, mais vont simplement prendre plus de temps pour s'y conformer[126] ». Elle estime qu’un processus par lequel ces ordonnances seraient validées par le tribunal devrait être prévu dans la LAI.

La présidente du Conseil du Trésor a indiqué que la commissaire à l'information peut déposer un recours à la Cour fédérale pour obliger une institution à respecter ces ordonnances. Toutefois, ce pouvoir n'a pas été exercé jusqu'à maintenant[127].

M. Drapeau, de son côté, a dit que la commissaire agit de façon trop timide en ce qui concerne sa capacité d’émettre des ordonnances. M. Conacher, pour sa part, a noté que même si la commissaire à l’information peut émettre des ordonnances, elle ne peut imposer de peines aux contrevenants de la LAI. Son pouvoir de rendre des ordonnances n’est donc pas assez fort.

M. Tromp a lui aussi noté que le pouvoir d’émettre des ordonnances de la commissaire a des lacunes, dont le fait que l’appel d’une décision d’émettre une ordonnance est un appel de novo et son manque d’application. M. Beeby et le CLD ont fait des commentaires similaires[128].

Pouvoir de publier des décisions

En ce qui concerne la capacité de publier des rapports d’enquête, Mme Maynard a expliqué que sous l’ancienne version de la LAI, cela n’était pas possible. Il manquait donc « environ 35 ans de jurisprudence au Commissariat, avec toutes sortes de cas qui ont fait l'objet d'une enquête et des positions qui ont été prises et qui n'ont pas été rendues publiques avant le rapport annuel ». Le Commissariat peut maintenant utiliser les rapports publiés pour expliquer à un plaignant ce qui va probablement se passer considérant un cas semblable au leur, ou expliquer aux institutions qu’une certaine position a déjà été adoptée par la commissaire et risque donc d’être adoptée à nouveau dans leur cas. Bref, les Canadiens et les institutions fédérales ont accès à l’interprétation de la LAI du Commissariat, ce qui lui permet de régler des problèmes plus rapidement[129].

Cependant, Mme Maynard a souligné qu’en vertu de la LAI actuelle, elle ne peut publier que des rapports d’enquête. Ainsi, les décisions qu’elle prend sous l’article 6.1 de la LAI, soit d’autoriser ou non une institution à ne pas répondre à une demande d’accès frivole ou vexatoire, ne sont pas censées être publiées[130]. Elle les résume en évitant de donner le nom de l’institution ou trop de détails pour fournir des lignes directrices sur les types de cas que le Commissariat considère comme frivoles et de mauvaise foi.

M. Conacher a recommandé que la LAI exige que le Commissariat publie ses décisions pour chaque plainte reçue, chaque cas qu’il examine et d’y inclure le droit, pour tout membre du public, d’interjeter appel de toute décision du Commissariat auprès d’un tribunal.

Pouvoirs d’enquête

En ce qui concerne ses pouvoirs d’enquête, Mme Maynard a expliqué qu’elle n’a pas le pouvoir de mener des enquêtes pénales. Ses enquêtes sont de nature administrative. Lorsque des éléments lui porte à croire qu’il y a eu infraction criminelle, elle peut saisir le procureur général du Canada de cette question, qui décidera si oui ou non il y a lieu de mener une enquête criminelle.

Durant son mandat, Mme Maynard a rapporté environ sept cas au procureur général, dont la majorité était liée à la destruction de documents. Elle a rappelé que la LAI prévoit que si la commissaire pense qu’il y a eu une intervention intentionnelle visant à modifier, effacer ou détruire un document, cela peut être à un acte criminel et elle peut la rapporter au procureur général. Elle n’était pas en mesure de confirmer si l’un de ces sept cas a mené à une poursuite criminelle.

Mme Maynard a expliqué que les deux types d’enquêtes, administratives et criminelles, doivent demeurer séparés. Cependant, la LAI prévoit que toute l’information qu’elle reçoit est confidentielle, ce qui limite les preuves qui peuvent être communiquées au procureur général. La soumission du Commissariat, dans le cadre de l’examen de l’accès à l’information du SCT, a recommandé de permettre un plus grand partage d’information[131].

Mme Maynard a aussi mentionné qu’elle préférait pouvoir faire des renvois directement aux corps policiers provinciaux ou fédéraux plutôt que de devoir passer par le procureur général. Elle éliminerait donc cette étape du processus prévue sous la LAI[132].

Pouvoirs additionnels

En ce qui concerne la possibilité d’obtenir des pouvoirs additionnels, Mme Maynard a indiqué que le modèle des commissariats au Royaume-Uni et en Écosse est intéressant[133]. Contrairement au Commissariat, ces deux commissariats ont une capacité de surveillance directe des institutions. Les rapports des institutions vont directement au commissaire. Ce faisant, après trois mois, si le commissaire note qu’une institution gouvernementale éprouve des difficultés ou a du mal à répondre aux demandes d’accès, il peut intervenir. Selon Mme Maynard, ce modèle est intéressant parce qu’il permet de prendre des mesures proactives et de faire de la sensibilisation plutôt que d’attendre des plaintes.

Mme Maynard a noté qu’au Canada, les rapports statistiques annuels présentés par les institutions sont inutiles pour le Commissariat. Ils ne permettent de voir les résultats qu’un an plus tard et non de pouvoir intervenir de façon proactive. Selon elle, ces rapports devraient être remplacés par un format qui peut être saisi facilement comme une base de données, sans que la production d’un rapport soit nécessaire.

M. Beeby est également d’avis qu’un système centralisé permettrait un meilleur accès aux statistiques réelles. Selon lui, la plupart des statistiques sur l’accès à l’information ne sont pas fiables. Par exemple, il a noté que la présidente du Conseil du Trésor a déclaré que 70% des demandes d’accès sont traitées dans les délais prescrits par la loi. Selon lui, cette statistique est trompeuse, puisque les délais prescrits incluent les prolongations de délais importantes permises sous la LAI.

M. Conacher a recommandé que le commissaire à l’information ait le pouvoir d’exiger des changements systémiques dans les institutions fédérales afin qu’elles respectent mieux la LAI. Toutefois, il a souligné que dans la loi fédérale et la majorité des lois provinciales en matière d’accès à l’information, les commissaires à l’information n’ont pas suffisamment de pouvoirs pour « mettre fin aux refus et aux délais » parce qu’aucune peine pour ces manquements ne peut être imposée. Il a fait remarquer qu’au Canada, se stationner illégalement mène à de plus sérieuses conséquences qu’une violation de la LAI :

Celui qui se gare illégalement n'importe où au Canada, même si cela ne cause aucun tort, même si le véhicule n'est pas garé devant une bouche d'incendie et ne dérange personne, est passible d'une amende plus élevée, d'une peine plus lourde que celle de l'agent qui oppose un déni fondamental du droit du public de connaître des renseignements clés qui révéleraient des actes répréhensibles du gouvernement et des milliards de dollars de gaspillage. Il y a quelque chose de pervers dans notre système.

Ainsi, M. Conacher a affirmé que même si « certaines provinces reconnaissent la primauté de l'intérêt public », cela n'est pas suffisant, car les pouvoirs d'exécution des commissaires ne sont pas assez forts. Il a recommandé d’accorder au commissaire à l’information le pouvoir d’imposer des sanctions lorsqu’il y a infraction à la LAI avec des amendes modulées en fonction de la gravité de l’infraction. Ces infractions devraient selon lui inclure l’entrave intentionnelle à l’accès, la non-création de documents, une mauvaise tenue des documents ou des délais dans la réponse d’une demande[134]. Il a aussi recommandé de donner au commissaire l’autorisation d’examiner tout refus de divulgation et d’ordonner la divulgation si elle ne cause pas de préjudice ou si elle est dans l’intérêt public.

M. Conte a lui aussi fait remarquer qu’à l’heure actuelle, il n’y a aucune conséquence à ne pas se conformer à la LAI[135]. Même les ordonnances de la commissaire peuvent être contestées devant les tribunaux. Il a noté que les États-Unis ont un système de responsabilité civile plus adéquat comparativement au Canada. Il a proposé que l’on adopte « des sanctions financières imposées à des représentants du gouvernement ou à des ministères ». M. Rubin a également recommandé l’imposition de peines plus sévères lorsque des fonctionnaires utilisent des tactiques d’évitement créatives pour se soustraire à leurs obligations de divulgation[136].

M. Conacher a aussi proposé de modifier la LAI pour élargir le mandat et le budget du Commissariat afin d’inclure un devoir de promotion du droit d’accès et des activités de sensibilisation du public[137]. De façon similaire, M. Wernick a indiqué que la commissaire à l’information devrait avoir un mandat plus vaste qui lui permettrait de mener des études, de produire des rapports, de faire des recommandations sur les pratiques en matière d’accès à l’information et d’amélioration continue des pratiques de transparence.

Le Comité est d’avis que la commissaire à l’information devrait avoir des pouvoirs additionnels, dont le pouvoir d’imposer des sanctions pour le non-respect de la LAI. Il recommande :

Recommandation 37

Que le gouvernement du Canada modifie la Loi sur l'accès à l'information pour donner au Commissaire à l'information du Canada le pouvoir d'imposer des amendes ou des pénalités lorsque les divisions de l'accès à l'information et de la protection des renseignements personnels tardent à répondre aux demandes.

Indépendance du Commissariat à l’information

Mme Maynard a dit être convaincue que le Commissariat est très indépendant du gouvernement. Des enquêtes ont été lancées contre tous les ministères, y compris le BCP, qui relève du premier ministre. Selon elle, le seul élément qui pourrait sembler affecter l’indépendance du Commissariat est le processus de financement. Il n’y a pas de processus indépendant qui permet aux agents du Parlement, comme la commissaire à l’information, d’obtenir les fonds nécessaires. S’ils veulent plus de fonds, les agents du Parlement doivent s’adresser au Conseil du Trésor et au ministère des Finances, sur lesquels certains d’entre eux enquêtent au quotidien. Selon elle, le mode de financement actuel ne cadre pas avec le rôle de surveillance que jouent les agents du Parlement. La façon dont les organisations de ces divers agents sont financées devrait refléter cette indépendance.

Comme solution potentielle, Mme Maynard a indiqué qu’on a recommandé par le passé de créer un comité parlementaire indépendant chargé d’examiner les demandes de fonds des mandataires du Parlement[138]. Dans une lettre soumise au Comité en avril 2023, Mme Maynard a réitéré le besoin d’un mécanisme de financement indépendant pour le Commissariat à l’information du Canada. Elle a rappelé au Comité qu’en 2005, ce dernier a fait cette recommandation dans un rapport intitulé Un nouveau mécanisme de financement pour les hauts fonctionnaires du Parlement.

La présidente du Conseil du Trésor a dit que le gouvernement soutient l’indépendance de la commissaire à l’information.

Sur un autre aspect de l’indépendance des commissaires, M. Conacher a recommandé de mettre sur pied une commission des nominations entièrement indépendante et impartiale pour la recherche et la mise en candidature de personnes qualifiées pour doter les postes de commissaires. Cette commission devrait aussi avoir le pouvoir de décider si le ou la commissaire à l’information sera reconduit pour un autre mandat.

Le Comité reconnaît qu’il est important que les agents du Parlement soient complètement indépendants et qu’ils soient perçus comme l’étant. Par conséquent, il recommande :

Recommandation 38

Que le Gouvernement du Canada mette en place un mécanisme de financement indépendant pour le Commissariat à l’information du Canada et les autres agents du Parlement qui ne dispose pas d’un tel mécanisme.

Suffisance et affectation des ressources du Commissariat

Lors de sa première comparution le 5 octobre 2022, Mme Maynard a noté que le nombre de plaintes reçues par le Commissariat a augmenté de 70% par rapport à l’an dernier. Elle a estimé que si la situation perdurait, le Commissariat pourrait recevoir 10 000 plaintes durant l’année. Mme Maynard a précisé que le Commissariat détient les fonds nécessaires pour fermer 4000 dossiers par an. Au moment de sa comparution, le Commissariat avait déjà reçu 7000 plaintes[139].

Mme Maynard a rajouté que l’année précédente le Commissariat a réussi à régler 6500 plaintes, dont plusieurs de façon informelle. Cependant, elle a expliqué que le Commissariat a réussi à réduire son inventaire en consacrant tout son argent aux enquêtes. Cela ne peut pas durer. Le Commissariat doit investir des fonds dans les services intégrés, les services juridiques et les services de traduction. Elle a affirmé que la limite de ce que le Commissariat peut faire avec les niveaux de financement actuels est atteinte. Elle a aussi rappelé que depuis son arrivée au Commissariat, il y a cinq ans, les plaintes ont augmenté de 180%. C’est pourquoi le besoin de ressources du Commissariat augmente d’année en année.

Pour sa part, la présidente du Conseil du Trésor a souligné que le gouvernement croit au financement de l’AIPRP et du Commissariat à l’information. Elle a affirmé que le financement du Commissariat à l’information a augmenté de 54% dans les dernières années[140].

En ce qui concerne le temps requis pour compléter une enquête, Mme Maynard a souligné qu’elle aimerait être en mesure de réaliser ses enquêtes en un an ou moins, mais que cela est difficile avec l’inventaire de plaintes du Commissariat qui portent parfois sur des renseignements secrets ou très complexes. Elle a réitéré que le nombre de plaintes ne cesse d’augmenter, et donc que le Commissariat doit choisir les dossiers sur lesquels il se penche. Elle aimerait disposer, au moins temporairement, de financement supplémentaire pour recruter des enquêteurs afin de pouvoir « se débarrasser des dossiers qui sont bloquées dans l’arriéré », et qui se maintient toujours autour de 3 500 à 4 000 dossiers. Cependant, même si le Commissariat avait plus de ressources, le manque de ressources des organisations assujetties à la LAI fait en sorte qu’elles ne seraient pas nécessairement capables de répondre aux enquêteurs. Il faut donc investir dans l’ensemble du système d’accès.

En fait, pour réduire le nombre de plaintes, Mme Maynard a dit qu’il faudrait que trois choses se produisent. D’abord, il faudrait que les institutions fédérales répondent aux demandes d’accès dans les délais prescrits. Ensuite, il faut donner les ressources nécessaires aux services responsables de l’AIPRP et sensibiliser les fonctionnaires au devoir collectif que représente l’accès à l’information. Enfin, les institutions doivent mieux gérer leur information.

D’autres témoins ont fait des commentaires relatifs à l’allocation des ressources du commissariat et l’impact que cette allocation peut avoir sur le traitement des plaintes. M. Drapeau a critiqué l’affectation des ressources humaines du Commissariat. Il a dit que le Commissariat est une organisation particulièrement lourde aux échelons supérieurs, avec une équipe de direction composée d’une commissaire, de trois commissaires adjoints et de cinq cadres supérieurs. Il a suggéré que la structure hiérarchique du Commissariat fait en sorte que moins de 50% des employés mènent des enquêtes. M. Cutler a aussi dit qu’il y a un problème d’affectation des ressources au Commissariat ainsi qu’à l’égard de sa capacité à effectuer le travail.

M. Drapeau a proposé que le Bureau de la vérificatrice générale examine le volume de plaintes du Commissariat et le temps requis pour les traiter, afin de déterminer s’il existe de meilleures façons de faire et s’il faut plus de personnel.

M. Conacher a fait une recommandation similaire. Il a recommandé que la LAI soit modifiée afin d’exiger que le Parlement accorde au Commissariat le financement annuel nécessaire permettant d’assurer une application efficace et en temps opportun de la LAI, une formation adéquate et une promotion utile du droit d’accès. Ce financement devrait être déterminé en fonction du budget présenté par le Commissariat et d’une évaluation de la vérificatrice générale ou du directeur parlementaire du budget[141].

M. Drapeau a affirmé qu’il n’est pas inhabituel d’attendre deux ans ou plus avant qu’une enquête du Commissariat à l’information ne soit terminée. Selon lui, les retards dans les enquêtes du Commissariat causent de sérieux préjudices aux utilisateurs. En vertu de la LAI, ces derniers ne peuvent saisir la Cour fédérale de leur dossier qu’une fois que le Commissariat a publié un rapport d’enquête. Il a donc recommandé l’imposition d’un délai d’un an pour compléter une enquête, faute de quoi un plaignant devrait pouvoir aller devant la Cour fédérale. M. Rubin s’est montré d’accord avec la proposition de M. Drapeau[142]. M. Beeby a recommandé un délai encore plus court de six mois.

Dans un mémoire soumis au Comité, M. Malone a recommandé que la LAI soit modifiée pour permettre à la personne qui n’est pas satisfaite de la réponse du gouvernement à l’égard d’une demande d’accès, de demander la révision judiciaire de la conduite du gouvernement sans avoir à attendre qu’une plainte soit évaluée par la commissaire à l’information, ni qu’un rapport d’enquête soit publié.

M. Conte a noté que la LAI « bloque l’accès aux tribunaux par l'entremise d'un long processus d'appels préliminaires auprès du Commissariat à l'information ». À son avis, ce système nuit à la capacité des journalistes d’effectuer leur travail. Il a noté que les États-Unis permettent un accès direct aux tribunaux sans délai, ce qui permet aux journalistes d’obtenir des documents par l’entremise d’une poursuite.

Toutefois, Mme Maynard a dit craindre que les gens ne puissent se représenter eux-mêmes, sans examen ni avis de la part d’un commissaire indépendant pour les aider à avoir gain de cause, s’ils doivent porter leur cause devant les tribunaux. Contrairement aux particuliers, le Commissariat a la capacité de consulter les documents et contester une institution selon les données qu’il a sous la main. Les particuliers reçoivent des documents caviardés.

M. Conacher a aussi exprimé son désaccord quant à la proposition d’imposer un délai d’un an pour compléter une enquête avant de pouvoir accéder à la Cour fédérale. Il a noté que les tribunaux ne sont pas plus rapides et ont eux aussi un arriéré. M. Wernick a aussi noté que la Cour fédérale est très occupée et qu’elle traite de tous les aspects du droit fédéral. Selon lui, elle risque d’être engorgée si l’accès à celle-ci est trop facile pour des petites questions qui pourraient être résolues par un mécanisme de règlements de différends ou un organisme intermédiaire.

Chapitre 6 : Rapport de l’examen de l’accès à l’information du Conseil du Trésor

En juin 2020, un an après l’entrée en vigueur du projet de loi C-58, le SCT a lancé un examen de l’accès à l’information. Dans son Cadre de référence de l’examen de l’accès à l’information, le SCT précise que l’examen va se pencher sur trois choses : l’examen du cadre législatif; les possibilités d’améliorer la publication proactive afin de rendre l’information ouvertement accessible; et l’évaluation des processus et des systèmes pour améliorer le service et réduire les délais de traitement.

Selon le Calendrier de l’examen de l’accès à l’information du SCT, ce dernier a tenu en 2020 des discussions avec les groupes et les représentants autochtones, avec la commissaire à l’information et le commissaire à la protection de la vie privée, de même qu’avec des institutions fédérales. En 2021, le SCT a lancé la mobilisation du public et procédé à des ateliers et des tables rondes sur les trois volets de l’examen. Il a également poursuivi ses discussions avec les groupes et représentants autochtones et avec les institutions fédérales[143].

En décembre 2021, le SCT a publié un rapport intérimaire « Ce que nous avons entendu ». Au printemps 2022, le SCT a consacré davantage de temps à la mobilisation des Autochtones. Un second rapport intérimaire « Ce que nous avons entendu » propre aux Autochtones a été publié vers la fin 2022.

La présidente du Conseil du Trésor a indiqué qu’une approche très rigoureuse a été utilisée par le SCT pour s’assurer que les Autochtones participent à l’examen de l’accès à l’information. Mme Luelo a précisé que la consultation auprès des peuples autochtones a duré environ 9 mois.

En 2022, dans le cadre son examen de l’accès à l’information, le SCT a aussi publié une Étude des coûts du régime de l’accès à l’information et un document intitulé Principales mesures en matière d’accès à l’information, qui fait la liste des mesures visant à améliorer l’accès à l’information et la transparence qui ne nécessitent pas de modifications législatives et qui sont déjà mises en œuvre, planifiées ou en cours au sein du gouvernement fédéral[144].

Le mardi 13 décembre 2022, la présidente du Conseil du Trésor a présenté son rapport au Parlement de l’examen de l’accès à l’information[145]. Le rapport ne propose pas de modification législative précise.

Lors de sa comparution en avril 2023, la présidente du Conseil du Trésor a expliqué que l’examen mené par le SCT visait à consulter les Canadiens et les Canadiennes, et en particulier les personnes autochtones, pour en savoir plus sur les problèmes d’accès auxquels ils sont confrontés. Elle a précisé que l’objectif du rapport était de cerner les défis à relever. Il ne visait pas à établir un plan d'action. Il sert plutôt de base aux travaux que le SCT entreprend pour améliorer le système d’accès à l’information et qui ont pour objectifs : d’améliorer la prestation de services; d’appuyer le personnel; de mieux répondre aux besoins des populations autochtones; et de continuer à développer des mesures telles que la déclassification.

La présidente du Conseil du Trésor a précisé qu’un plan d'action qui précisera les prochaines mesures que le gouvernement prendra à des fins administratives et qui examinera également les modifications législatives possibles est cours d’élaboration. Le SCT le présentera d’ici la fin de l’année[146].

Concernant la modification de la LAI, la présidente du Conseil du Trésor a dit ce qui suit : « Certaines personnes ont réclamé que la loi soit modifiée. Ma priorité actuelle est d'améliorer l'administration de la loi existante. » Elle a rajouté que le gouvernement « a renforcé la loi il y a moins de quatre ans » et souligné qu’il y a beaucoup à faire pour résoudre les problèmes systémiques sous-jacents au système d’accès à l’information. Le gouvernement continue de prendre des mesures pour régler ces problèmes. Il prendra le temps nécessaire pour proposer les prochaines mesures, qui pourraient inclure des modifications législatives[147].

À la question de savoir si le gouvernement va procéder à une réforme en profondeur de la LAI bientôt, la présidente du Conseil du Trésor a renchéri :

Lorsque nous avons annoncé le projet de loi C‑58, nous avons dit que nous ferions une révision de la Loi après cinq ans. Nous sommes déjà en train de faire une partie de ce travail pour voir comment nous pouvons apporter des changements législatifs. Ce qu'il est le plus important de noter, à l'heure actuelle, c'est qu'on doit mettre en place des outils. Le système numérique est extrêmement important pour répondre à la demande. Comme le mentionnait plus tôt Mme Luelo, par le passé, on utilisait souvent le papier, mais maintenant, plusieurs données sont présentées dans le cadre de rencontres sur Teams ou font partie de bases de données, par exemple. Ce sont des données qui ne sont pas seulement sur papier. Nous sommes donc en train de mettre en place des outils administratifs pour améliorer le système.

La présidente du Conseil du Trésor a aussi rappelé que le projet de loi C-58 était le premier projet de loi visant à modifier la LAI à une époque où elle n’avait pas été examinée depuis 30 ans. Il a donné le pouvoir de rendre des ordonnances à la commissaire à l’information en plus d’intégrer un système de publication proactive dans la LAI[148]. Elle a rajouté que l’examen de l’accès à l’information a permis au SCT de comprendre qu’un système numérique capable de soutenir le traitement des demandes d’accès est nécessaire.

Commentaires de la Commissaire à l’information

Mme Maynard a indiqué être déçue du rapport de l’examen de l’accès à l’information du SCT. Elle s’est réjouie du fait que le gouvernement a tenu compte des préoccupations qu’elle a soulevées concernant les longs délais de consultation entre les institutions, l’absence d’un cadre de déclassification et les répercussions néfastes sur le système d’accès qui en découlent. Elle trouve toutefois regrettable qu’aucune mesure concrète n’ait été proposée pour accompagner l’analyse du gouvernement. Elle a dit :

[J]’estime que le rapport comporte peu d’engagements tangibles, voire aucun, susceptibles d’entraîner des changements dès maintenant dans des domaines nécessitant une attention immédiate. Plus important encore, il semble que le gouvernement ait décidé qu’aucune autre modification ne serait apportée à la Loi sur l’accès à l’information, du moins à court terme.

Mme Maynard a noté que ce qui se trouve dans le rapport résume bien les enjeux auxquels est confronté le régime d’accès à l’information, mais que ces enjeux sont déjà connus, et qu’ils étaient connus avant l’adoption du projet de loi C-58 en 2019. Elle s’est dit déçue qu’aucun plan d’action n’accompagne le rapport.

Par exemple, Mme Maynard a expliqué que le rapport renferme une série de commentaires et de constatations quant aux exceptions et aux exclusions qui ne sont pas appliquées de manière uniforme ou qui sont mal comprises. Cependant, il ne renferme aucune recommandation quant aux changements à apporter à la formulation de ces exceptions dans la LAI ou à l’examen des délais supplémentaires accordés dans ce contexte. Selon elle, il est temps de se pencher sur chacune des exceptions et exclusions et de prendre des décisions en répondant, par exemple, aux questions suivantes :

Voulons-nous que l'article 21 sur les avis et les recommandations ne s'applique pas aux documents de moins de 20 ans? Souhaitons-nous qu'il demeure interdit pour moi d'examiner les documents confidentiels du Cabinet? Désirons-nous inscrire dans la Loi elle-même un échéancier pour les consultations de telle sorte que nous n'ayons pas à nous en remettre aux politiques des différentes institutions en la matière?

Mme Maynard a indiqué qu’il faut étudier la LAI article par article. Pour elle, « il est tout aussi primordial de procéder à un examen de la loi que d'apporter les correctifs qui s'imposent au système[149] ». Selon elle, le Canada a besoin d’une loi modernisée sur l’accès à l’information, d’une loi adaptée à 2023.

Mme Maynard a affirmé qu’elle doute « que le renforcement du droit d’accès à l’information de la population canadienne figure au nombre des priorités financières du gouvernement », notant entre autres que l’accès à l’information est absent des lettres des mandats des ministres[150].

Commentaires d’autres intervenants

M. Larsen s’est dit découragé de lire dans le rapport de l’examen de l’accès à l’information du SCT que « la plus grande plainte concernant le régime d'AI est le manque de conformité à la loi ». Il a soulevé l’importance pour les cadres supérieurs, les représentants élus et les membres du Cabinet de donner le ton. Lorsque les témoins, les commissaires et les comités décrivent un système d'accès à l'information brisé, en retard ou dysfonctionnel et que la réponse est le statu quo, cela semble être une « une approbation de l'opacité, et non pas un engagement envers la transparence ».

Selon M. Larsen, le rapport de l’examen de l’accès à l’information du SCT mentionne un certain nombre de possibilités. Pour la BC FIPA, les priorités devraient être

premièrement de créer une obligation de documenter prévue par la loi pour s'assurer que les décisions fondamentales sont consignées. Deuxièmement, il doit y avoir une primauté de l'intérêt public dans la loi. Troisièmement, il faudrait imposer des plafonds sur les prorogations pour les demandes, plutôt que de s'en remettre à la référence vague et indéfinie aux prorogations pour une période raisonnable, et exiger l'autorisation du commissaire pour d'autres prorogations. Quatrièmement, il faut modifier le cadre d'exemption pour qu'il reflète une approche fondée sur les préjudices plutôt que des exemptions catégoriques ou discrétionnaires fondées sur des catégories de documents. Cinquièmement, conformément à la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, il s'agit d'éliminer les obstacles à l'accès à l'information pour les communautés autochtones et de progresser vers la souveraineté des données autochtones, particulièrement en ce qui a trait aux dossiers pertinents aux revendications particulières et à la réconciliation. Sixièmement, même si le SCT n'a pas insisté sur ce point, on doit inclure toutes les entités qui fournissent des services ou des programmes publics dans la portée de la loi, y compris le Bureau du premier ministre et le cabinet des ministres, en veillant à ce que les partis politiques fédéraux soient assujettis aux lois fédérales sur la protection des renseignements personnels, en reconnaissant le droit des électeurs de savoir comment leurs renseignements personnels sont utilisés. Enfin, nous avons radicalement révisé et limité l'exclusion des documents confidentiels du Cabinet prévue à l'article 69, la transformant en une exception limitée, sous réserve d'un examen.

M. Larsen a mentionné que le rapport du SCT discute d’initiatives louables, tel que le soutien administratif, la modernisation de la technologie et des processus, et l'élargissement des engagements en matière du gouvernement ouvert au‑delà des auspices de la LAI. Cependant, ces initiatives ne peuvent se substituer à une modernisation de la loi. Selon lui, la réforme administrative ne devrait pas primer sur la réforme législative.

Lors de sa seconde comparution, M. Beeby s’est prononcé sur le rapport du SCT ainsi que sur le témoignage de la présidente du Conseil du Trésor. Il a dit se sentir dupé par le processus de révision du système d’accès à l’information du SCT[151]. Il a rappelé que l’examen devait porter sur trois éléments : le cadre législatif, la publication proactive et l’administration de l’accès à l’information. Il a noté que bien qu’ils aient été nombreux à soumettre des propositions de modification législatives, la présidente du Conseil du Trésor a dit que la priorité actuelle est d’améliorer l’administration de la LAI actuelle.

M. Conacher a également souligné le manque d’intérêt de la présidente du Conseil du Trésor à introduire une réforme législative. Sur ce point, il a recommandé qu’un projet de loi d'initiative parlementaire s’inspirant des nombreux rapports et recommandations déjà disponibles soit présenté au Parlement. M. Rubin a fait une recommandation similaire[152].

En effet, en ce qui concerne la réforme législative, plusieurs témoins ont indiqué au cours de l’étude que le projet de loi C-58 n’a pas mené à des changements du régime législatif en matière d’accès à l’information suffisants. Par exemple, M. Lapointe a indiqué que les récentes réformes de la loi ont permis de retrouver une partie de son esprit original, mais qu'il reste un très long chemin à parcourir pour concrétiser cette vision. Mme Francoli a dit que « contrairement à ce qu'espéraient sincèrement bien des gens, le projet de loi C‑58 n'a pas révolutionné le système », ce qu'elle a décrit comme n'étant pas mauvais, mais juste un peu décevant. M. Conacher a dit que le projet de loi C-58 « marque un recul, à certains égards », car, entre autres, il n'a pas rendu les informations gouvernementales accessibles par défaut. M. Rubin est d'avis que « le projet de loi C-58 a détruit la [LAI] » avec la partie 2, qu'il a décrit comme une « mesure proactive bidon ». M. Beeby a noté que le projet de loi C-58 comportait quelques améliorations, mais qu'il ajoutait également des restrictions pour les utilisateurs, comme la disposition relative aux demandes frivoles et vexatoires.

Pour sa part, M. Rubin a décrit l’examen du SCT d’inepte et d’égoïste. Il est d’avis que le SCT devrait se voir retirer son rôle central dans l’accès aux documents gouvernementaux et être remplacé par un organisme d'accès à l'information indépendant, en vertu d'une loi révisée, afin de gérer et de favoriser la divulgation d'informations publiques.

Conclusion

Le Comité constate, comme la majorité des témoins l’ont fait, que malgré les modifications qu’on apportées le projet de loi C-58 en 2019 et les meilleurs efforts des fonctionnaires qui travaillent dans le domaine de l’AIPRP dans les institutions fédérales, le système d’accès à l’information canadien comporte toujours plusieurs failles. Considérant l’importance de l’accès à l’information dans une société démocratique, il est impératif que des actions pour améliorer l’accès à l’information soient prises immédiatement.

C’est pourquoi, à la lumière de ce qu’il a entendu, le Comité fait plusieurs recommandations à travers ce rapport, qui visent à améliorer le régime législatif de l’accès à l’information et le système auquel il s’applique. Il espère que ces recommandations seront mises en œuvre.


[1]              Kristen Douglas, Élise Hurtubise-Loranger et Dara Lithwick, La Loi sur l’accès à l’information et les propositions de réforme, Bibliothèque du Parlement, 6 juin 2012.

[2]              Commissariat à l’information du Canada (CIC), Viser juste pour la transparence, mars 2015.

[3]              Comité permanent de l’accès à l’information, la protection des renseignements personnels et de l’éthique (ETHI), Examen de la Loi sur l’accès à l’information, juin 2016.

[4]              Chloé Forget, Alexandra Savoie, Maxime-Olivier Thibodeau, Résumé législatif du projet de loi C-58 : Loi modifiant la Loi sur l’accès à l’information, la Loi sur la protection des renseignements personnels et d’autres lois en conséquence, Bibliothèque du Parlement, 4 décembre 2019.

[5]              CIC, Objectif transparence : la cible ratée, 2017.

[7]              Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. 1985, ch. A-1, art. 93(1).

[8]              Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada (SCT), Le processus d’examen.

[10]            Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. 1985, ch. A-1, art. 2(1).

[11]            ETHI, Témoignages, Allan Cutler (ancien président, Canadians for Accountability [CFA]), Ken Rubin (recherchiste d'enquête et défenseur de la transparence, à titre personnel), Duff Conacher (cofondateur, Démocratie en surveillance [DS]), Michael Wernick (président, Chaire Jarislowsky sur la gestion dans le secteur public de l’Université d'Ottawa, à titre personnel), Kirk Lapointe (vice-président, Éditorial, Glacier Media Group [GMG] et éditeur et rédacteur en chef, Business in Vancouver), Andrew Kotlun (Association Canadienne des Avocats et Avocates en Immigration [ACAAI]), Kukpi7 Judy Wilson (secrétaire-trésorière, Union of BC Indian Chiefs [UBCIC]), Alan Barnes (chef de projet, Canadian Foreign Intelligence History Project (CFIHP) et chercheur principal, Norman Paterson School of International Affairs, Carleton University), Mike Larsen (président, BC Freedom of Information and Privacy Association [BC FIPA]), Patrick White (à titre personnel), Mary Francoli (doyenne associée et directrice, Arthur Kroeger College of Public Affairs, Carleton University, à titre personnel), Dean Beeby (journaliste, à titre personnel), Brent Jolly (président, Association canadienne des journalistes [ACJ]), Andrea Conte (écrivain, chercheur et artiste médiatique, à titre personnel), l’hon. Mona Fortier, (présidente, Conseil du Trésor).

[12]            ETHI, Témoignages, Cutler (CFA), Rubin, Conacher (DS), Wernick, Lapointe (GMG), Wilson (UBCIC), Barnes (CFHIP), Larsen (BC FIPA), White, Francoli (AKCPA), Beeby, Jolly (ACJ).

[13]            ETHI, Témoignages, Kotlun (ACAAI), Conte.

[14]            ETHI, Témoignages, Stanley Tromp (à titre personnel). M. Tromp a soumis deux documents de référence au Comité dans lesquels se trouvent plusieurs recommandations pour améliorer l’accès à l’information: Stanley L. Tromp, It’s Time for Change!—206 Recommendations for Reforms to Canada’s Access to Information Act, Centre for Free Expression, Ryerson University, 3 août 2021 [disponible en ligne en anglais seulement]; et Stanley L. Tromp, Fallen Behind—Canada’s Access to Information Act in the World Context, BC Freedom of Information and Privacy Association, 2e édition, 2020 [disponible en ligne en anglais seulement].

[15]            Ken Rubin, Mémoire, 31 octobre 2022, p. 5 [Mémoire Rubin]. Le mémoire contient un plan d’action sur la transparence en cinq points (processus de divulgation complète; obligation de documenter; accès rapide, facile et sans frais; limite au nombre d’exceptions; et processus d’examen indépendant plus solide). La Cour suprême du Canada a interprété la Loi sur l’accès à l’information (LAI) et d’autres lois comme la Loi sur la protection des renseignements personnels comme étant des lois quasi-constitutionnelles. Voir : Lavigne c. Canada (Commissariat aux langues officielles), [2002] 2 RCS 773, para. 24; Canada (Commissaire à l'information) c. Canada (Ministre de la Défense nationale), [2011] 2 SCR 306, para. 40.

[16]            Province de la Colombie-Britannique.

[17]            Voir aussi : BC FIPA, Mémoire, novembre 2022 [Mémoire BC FIPA].

[19]            ETHI, Témoignages, Fortier. La présidente du Conseil du Trésor a indiqué qu’au Conseil du Trésor, 90.2% des demandes d’accès sont traitées dans le délai prévu de 30 jours.

[20]            Loi sur l’accès à l’information, art. 9. Cet article permet une prorogation du délai pour une « période raisonnable » dans trois circonstances (le respect du délai causerait une entrave sérieuse le fonctionnement de l’institution, des consultations nécessaires rendent impossible l’observation du délai et un avis aux tiers a été donné); Voir aussi : SCT, Directive sur les demandes d’accès à l’information. La directive indique que la durée d’une prorogation de délai doit être la plus courte possible et que les consultations interinstitutionnelles ne devraient être menées que dans cas précis (art. 4.1.28 et 4.1.31). Un avis de mis en œuvre relatif aux consultations interinstitutionnelles a été publié par le SCT en septembre 2022.

[21]            Voir aussi : Michel W. Drapeau, « Le droit à l’accès à l’information : un droit quasi constitutionnel en péril », Institut MacDonald‑Laurier, 17 octobre 2022. Cet article a été soumis au Comité comme document de référence.

[22]            Mémoire BC FIPA, p. 19.

[23]            Mémoire BC FIPA, p. 23; Centre for Law and Democracy, Mémoire, août 2021 [Mémoire CLD]. Le contenu de ce document a été présenté par le CLD au SCT dans le cadre de son examen de l’accès à l’information.

[24]            ETHI, Témoignages, Michel Drapeau (avocat, Col (à la retraite) et professeur auxiliaire de l’Université d’Ottawa, à titre personnel), Cutler (CFA), Beeby, Tromp.

[25]            CIC, Question d’accès : remettre en cause le statu quo, Enquête systémique sur Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, Rapport spécial présenté au Parlement, 25 mai 2021.

[26]            ETHI, Témoignages, Maynard.

[28]            ETHI, Témoignages, Wilson (UBCIC); Voir aussi : Union of BC Indian Chiefs, Full Disclosure: Canada’s Conflict of Interest in Controlling First Nations’ Access to Information, [disponible en anglais seulement] 4 novembre 2022. Ce document de travail porte sur l’examen annuel du régime de gestion de l’information du Canada et des différentes lois qui l’entoure. Cet examen soutient entre autres que le régime actuel n’est ni adéquat ni approprié pour maintenir et mettre en œuvre le droit de recours des Premières Nations pour les griefs historiques contre le gouvernement fédéral, et entrave l’accès à la justice des Premières Nations; Groupe de travail sur les revendications particulières, en Colombie-Britannique, de l’Union des chefs indiens de la Colombie-Britannique (UBCIC), Mémoire, 5 décembre 2022.

[29]            Kukpi7 (Kook-pea) désigne un membre Splatsin démocratiquement élu pour servir en tant que chef de la nation Splatsin Tkwamipla7. Le rôle de Kukpi7 est de travailler pour le peuple et veiller à ce que les terres et les ressources soient protégées pour les générations futures. Un Kukpi7 ne se tient pas au-dessus de sa nation, mais marche à côté d’elle. Chaque membre de la communauté est chargé de commander les Kukpi7 et d’exprimer leurs préoccupations et leurs intérêts auprès d’eux.

[30]            Centre de gouvernance de l’information des Premières Nations, Les principes de PCAP® des Premières Nations.

[32]            Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada, Le Canada et l’Assemblée des Premières Nations lancent le processus d’élaboration conjointe de la réforme des revendications particulières, communiqué, 24 novembre 2022.

[33]            Patrick White, Observations supplémentaires présentées au Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique de la Chambre des communes, 7 décembre 2022.

[37]            Andrea Conte, Toronto Star, « Le Canada continue de censurer les entretiens internes sur l’examen de la guerre en Afghanistan », document de référence à ETHI, 28 août 2022.

[38]            Andrea Conte, Briarpatch Magazine, « Sabotage administratif », document de référence soumis à ETHI, 3 mars 2022 [disponible en ligne en anglais seulement]. COINTELPRO est le diminutif du Federal Bureau of Investifation (FBI) Counterintelligence Program — un programme considéré illégal qui, selon le texte de M. Conte, visait à perturber, détourner, discréditer ou autrement neutraliser les mouvements de gauche et progressistes aux États-Unis entre 1956 et 1971. La GRC aurait collaboré avec le FBI en entreprenant des actes de surveillance, d’infiltration, de sabotage et de terreur raciale similaire à celles du FBI. Les registres d’information canadiens de COINTELPRO demeurent fortement classifiés et censurés au Canada, alors que les États-Unis ont déclassifié tous les dossiers liés à ce programme.

[39]            Gouvernement du Canada, Programme canadien sur les crimes contre l’humanité et les crimes de guerre 2008–2011, 12e rapport, p. 17.

[40]            Honorable Jules Deschênes, Commission d’enquête sur les criminels de guerre, décembre 1986.

[41]            B’nai Brith, Mémoire, 14 février 2023, [Premier mémoire B’nai Brith] p. 2.

[42]            Premier mémoire B’nai Brith, p. 2, citant Alti Rodal, Nazi War Criminals in Canada: The Historical and Policy Setting from the 1940s to the Present (le rapport Rodal) (présenté à la Commission d’enquête sur les criminels de guerre présidée par le juge Jules Deschênes en 1986).

[43]            Premier mémoire B’nai Brith, p. 3; B’nai Brith, Mémoire, 25 mai 2023. Dans un deuxième mémoire, B’nai Brith fournit de plus amples informations sur la définition de documents relatifs à l’Holocauste et sur le modèle américain d’archives de l’Holocauste. Il mentionne également d’autres pays qui se sont efforcés d’archiver les documents relatifs à l’Holocauste.

[44]            Premier mémoire B’nai Brith, p. 3.

[45]            Voir : CIC, Question d’accès : La difficulté d’accéder à notre mémoire collective, Enquête systémique sur Bibliothèque et Archives Canada, Rapport spécial présenté au Parlement, 26 avril 2022. CIC, Stratégie de déclassification pour les documents relatifs à la sécurité nationale et au renseignement, 12 février 2020 (rédigé par Wesley Wark).

[46]            Royaume-Uni, The national archives, 20-year rule. M. Barnes a parlé de la règle de 30 ans. En 2013, le gouvernement du Royaume-Uni a commencé à divulguer les dossiers lorsqu'ils ont 20 ans, au lieu de 30 ans.

[47]            CIC, Rapport annuel 2021–2022, p. 14.

[49]            ETHI, Témoignages, David Janzen (directeur général de la Sous-direction de l’AIPRP, GRC). M. Janzen a noté que la GRC collabore entre autres avec la firme Altis.

[50]            ETHI, Réponse écrite soumise au Comité, Bureau du Conseil Privé, 17 mars 2023.

[51]            ETHI, Témoignages, Alexandre Drago (directeur de l’Accès à l’information et la protection des renseignements personnels, ministère des Affaires étrangères, du Commerce et du Développement). M. Drago a noté qu’Affaires mondiales collabore avec les firmes Altis et CANADEM.

[52]            CIC, Rapport spécial présenté au Parlement par le Commissariat à l’information du Canada, Question d’accès : Neuf recommandations concernant le traitement des demandes d’accès à la Défense nationale, 22 juillet 2020.

[53]            CIC, Observations et recommandations de la Commissaire à l’information dans le cadre de l’examen du système d’accès à l’information au sein du gouvernement du Canada, 2021 [Recommandations CIC 2021]. Voir aussi : Démocratie en surveillance, Mémoire, 26 octobre 2022 [Mémoire DS]. Les changements clés proposés par Démocratie en surveillance sont fondés en partie sur les rapports du CIC, le rapport de 2016 du Comité et le rapport intérimaire publié dans le cadre de l’examen de l’accès à l’information entamé en 2020.

[54]            ETHI, Témoignages, Maynard. La commissaire a refait des commentaires similaires pendant sa deuxième comparution.

[55]            Voir aussi : Mémoire BC FIPA, pp. 9–10. L’organisme fait des commentaires similaires à la commissaire à l’information et recommande un changement de culture et plus de formation de tous les employés des institutions fédérales.

[56]            SCT, Directive sur les demandes d’accès à l’information. Une nouvelle directive est entrée en vigueur en juillet 2022, remplaçant la directive provisoire datant de 2016. L’article 4.1.33 explique comment appliquer les exceptions en matière de divulgation sous la LAI.

[57]            ETHI, Témoignages,Cutler (CFA), Conacher (DS), Rubin.

[58]            Mémoire Rubin, p. 1.

[59]            Michael Wernick, document de référence soumis au Comité ETHI, 21 novembre 2022.

[60]            ETHI, Réponse écrite au Comité, SCT, mai 2023.

[61]            Alliance de la fonction publique du Canada, Mémoire, 21 août 2021, p. 4 [Mémoire AFPC]. Ce document a été présenté au SCT dans le cadre de son examen de l’accès à l’information. L’AFPC a aussi noté le problème de roulement de personnel. Elle recommande d’augmenter le financement des programmes d’accès à l’information, d’affecter plus de personnel au traitement des demandes d’accès et de créer un bureau indépendant chargé de répondre à toutes les demandes d’accès à l’information.

[62]            Mémoire BC FIPA, pp. 7–8.

[64]            Mémoire DS, p. 5.

[65]            Information Management Act, SBC 2015, c 27, ss. 6 and 19 [disponible en anglais seulement].

[66]            ETHI, Témoignages, Maynard (Commissaire à l’information du Canada).

[67]            SCT, Politique sur les services et le numérique, art 4.3.2.10. La politique prévoit que les administrateurs généraux sont responsables de la tenue de documents, soit de « veilleur à ce que les décisions et les processus décisionnels soient consignés ». Il ne s’agit toutefois pas d’une obligation légale.

[68]            ETHI, Témoignages, Maynard.

[69]            Mémoire Rubin, pp. 1–2. M. Rubin recommande une amende pouvant aller jusqu’à 500 000$ et/ou une peine d’emprisonnement maximale de cinq ans aux fonctionnaires qui utilisent des tactiques d’évitement pour se soustraite aux obligations de divulgation.

[70]            Mémoire CLD, p. 6.

[71]            Voir aussi : Mémoire BC FIPA, pp. 12 à 14.

[72]            Michael Wernick, document soumis au Comité ETHI, 21 novembre 2022. Selon M. Wernick, une obligation de document « ferait perdre beaucoup de temps et d’efforts précieux et coûteux en créant des documents de valeur douteuse qui ne feraient qu’engorger davantage le problème de la gestion et de la récupération des documents ».

[73]            Recommandations CIC 2021, Recommandation 1 : « La Loi devrait prévoir la durée maximale des consultations qui sont nécessaires pour donner suite à une demande d’accès. »

[74]            U.S. News & World Report, Most Transparent Countries [disponible en anglais seulement].

[75]            Open Data Watch, Open Data Inventory (ODIN), consulté le 30 mai 2023 [disponible en anglais seulement].

[76]            World Justice Project, WJP Rule of Law Index, Canada, Open Government, consulté le 30 mai 2023 [disponible en anglais seulement].

[77]            Centre for Law and Democracy, Global Right to Information Rating, consulté le 30 mai 2023 [disponible en anglais seulement]; ETHI, Témoignages, Lapointe (GMG); Conacher (DS), Tromp.

[78]            World Wide Web Foundation, Open Data Barometer, Global rankings, accessed 8 May 2023 [disponible en anglais seulement].

[79]            Gouvernement du Canada, Partenariat pour un gouvernement ouvert.

[80]            Gouvernement du Canada, Plateforme de science et de données ouvertes.

[81]            ETHI, Témoignages, Francoli.

[82]            ETHI, Témoignages, Cutler (CFA), Conacher (DS), Rubin.

[83]            SCT, Directive sur les demandes d’accès à l’information, art. 4.1.44. Cet article encourage un examen régulier de la nature des demandes d’accès reçues en vertu de la partie 1 de la Loi sur l’accès à l’information et d’évaluer la possibilité de rendre disponibles, par d’autres moyens, les types de renseignements fréquemment demandés.

[84]            ETHI, Témoignages, Maynard.

[85]            Mémoire BC FIPA, p. 30.

[86]            Mémoire AFPC, pp. 3–4.

[87]            M. Wernick a mentionné la divulgation proactive des documents suivants : contrats, subventions, contributions, déplacements, accueil, études de recherche, vérifications et évaluations.

[89]            Mémoire BC FIPA, pp. 17–18. La BC FIPA donne l’exemple de la loi de Terre-Neuve-et-Labrador, Access to Information and Protection of Privacy Act, 2015, qui contient un critère de primauté pour l’intérêt public général qui s’applique à toutes les exceptions.

[90]            Loi sur l’accès à l’information, art. 20(6). En vertu de cet article, le responsable d’une institution fédérale peut communiquer, en tout ou en partie, tout document qui contient les renseignements de tiers pour des raisons d’intérêt public concernant la santé ou la sécurité publiques ou la protection de l’environnement.

[91]            Mémoire AFPC, pp. 1–3; Mémoire CLD, p. 11. Le CLD a rappelé que la Cour suprême du Canada a affirmé que l’intérêt public doit être pris en compte au moment de décider ou non d’appliquer des exceptions discrétionnaires dans Criminal Lawyers’ Association c. Ontario (Sûreté et Sécurité publique), 2010 CSC 23.

[92]            Mémoire Malone, p. 2; Mémoire AFPC, p. 3. L’AFPC recommande de cesser de supprimer les ensembles de documents après deux ans et de les conserver sur le portail du gouvernement ouvert pour 20 ans. Depuis juillet 2022, les résumés des demandes d’accès complétées restent accessibles au public en ligne après deux ans. Voir : SCT, Directive sur les demandes d’accès à l’information, Annexe D : Procédures obligatoires pour la publication des résumés des demandes d’accès à l’information traitées, 13 juillet 2022.

[93]            Recommandations CIC 2021, Recommandation 7 : « Les renseignements confidentiels du Cabinet devraient être assujettis à la Loi. »

[94]            Ibid., Recommandation 8 : « La Commissaire à l’information devrait avoir accès aux documents contenant des renseignements confidentiels du Cabinet dont le responsable d’une institution refuse la communication. » Recommandation 13 : « La Loi devrait contenir un mécanisme de révision indépendant pour s’assurer que les institutions respectent les exigences de publication des renseignements énoncés à la partie II de la Loi. »

[95]            Voir aussi : Mémoire BC FIPA, p. 27. La BC FIPA recommande d’abroger l’article 69 de la Loi sur l’accès à l’information et de le remplacer par une exception limitée.

[96]            Mémoire BC FIPA, p. 29.

[97]            Recommandations CIC 2021, Recommandation 3 : « Les cabinets du premier ministre et des ministres devraient être assujettis à la partie 1 de la Loi. »

[98]            Mémoire Rubin, p. 1; Mémoire CLD, pp. 4–5; Mémoire BC FIPA, p. 16.

[99]            ETHI, Témoignages, Beeby.

[100]          ETHI, Témoignages, Maynard.

[101]          Recommandations CIC 2021, Recommandation 2 : « Les organismes auxquels le gouvernement a imparti la prestation de programmes, qui fournissent des services gouvernementaux ou qui exercent des activités de nature gouvernementale devraient être assujettis à la partie I de la Loi. »

[102]          Mémoire Rubin, pp. 1 et 6.

[103]          Mémoire CLD, p. 5.

[104]          Mémoire BC FIPA, p. 15.

[105]          Ibid. BC FIPA fait la même recommandation.

[106]          Recommandations CIC 2021, Recommandation 4 : « La Loi devrait permettre aux responsables des institutions fédérales de donner accès à des renseignements personnels lorsque leur communication ne constitue pas une atteinte injustifiée à la vie privée »; Recommandation 5 : « La Loi devrait permettre aux responsables des institutions fédérales de donner accès aux renseignements personnels d’une personne décédée à son conjoint ou à ses proches parents pour des motifs de compassion. » Recommandation 6 : « La Loi devrait permettre la communication des coordonnées d’affaires ou professionnelles d’une personne »; Recommandation 11 : « La Commissaire à l’information devrait être consultée lors du processus visant l’ajout de nouvelles interdictions fondées sur d’autres lois à l’annexe II de la Loi. »

[108]          Par exemple, les documents du Cabinet sont exclus de l’application de la partie 1 de la Loi sur l’accès à l’information en vertu de l’exclusion que l’on retrouve à l’article 69 de la Loi. Les exceptions se trouvent aux articles 13 à 26 de la Loi; ETHI, Témoignages, Duff Conacher.

[109]          Mémoire CLD, p. 10.

[110]          Loi sur l’accès à l’information, art. 15.

[111]          Recommandations CIC 2021, Recommandation 1 : « La Loi devrait prévoir la durée maximale des consultations qui sont nécessaires pour donner suite à une demande d’accès »; Recommandation 18 : « L’avis au tiers prévu à l’article 36.3 de la Loi devrait être abrogé. »

[112]          Mémoire AFPC, p. 1. Ce document a été présenté au SCT dans le cadre de son examen de l’accès à l’information. L’AFPC recommande de restreindre l’application de l’article 20 de la Loi sur l’accès à l’information.

[113]          Mémoire Malone, p. 2.

[114]          Recommandations CIC 2021, Recommandation 9 : « Le paragraphe 21(2) de la Loi devrait être modifié pour y ajouter une liste de catégories de renseignements qui ne sont pas protégées par l’exception. »

[115]          Mémoire BC FIPA, p. 25. Les lois sur l’accès à l’information de la Colombie-Britannique, l’Ontario, la Nouvelle-Écosse et Terre-Neuve-et-Labrador contiennent des listes de documents auxquels l’exception relative aux conseils et avis des fonctionnaires ne s’appliquent pas.

[116]          Recommandations CIC 2021, Recommandation 10 : « La période de 20 ans prévue au paragraphe 21(1) de la Loi devrait être réduite à 10 ans. »

[117]          Mémoire BC FIPA, pp. 24–26. Voir aussi : Mémoire AFPC, p. 2.

[118]          Voir aussi : Mémoire CLD, pp. 10–11. L’organisation propose d’inclure un critère de préjudice dans plusieurs des exceptions que l’on trouve dans la Loi sur l’accès à l’information; et Mémoire Rubin, p. 3. M. Rubin recommande de limiter les exceptions et d’exiger qu’aucun document ne soit retenu, sauf en cas de démonstration d’un préjudice grave.

[119]          Patrick McCurdy, Mémoire, 6 décembre 2022. Voir aussi : Mémoire CLD, p. 12. L’organisme recommande d’éliminer toute exclusion générale de la Loi sur l’accès à l’information et d’assujettir toutes les exceptions qui protègent l’intérêt public à une période de temporisation n’excédant pas 20 ans.

[120]          Loi sur l’accès à l’information, art. 6.1.

[122]          Loi sur l’accès à l’information, art. 4(2.1). Cet article prévoit : « Le responsable de l’institution fédérale fait tous les efforts raisonnables, sans égard à l’identité de la personne qui fait ou s’apprête à faire une demande, pour lui prêter toute l’assistance indiquée, donner suite à sa demande de façon précise et complète et, sous réserve des règlements, lui communiquer le document en temps utile sur le support demandé. »

[123]          Mémoire Rubin, p. 12; et Mémoire CLD, p. 8.

[124]          ETHI, Témoignages, Maynard.

[125]          ETHI, Témoignages, Drapeau et Drapeau.

[126]          ETHI, Témoignages, Maynard.

[127]          Toute révision par la Cour fédérale sous la LAI est une révision de novo.

[128]          Mémoire CLD, p 14. Le CLD recommande que les ordonnances du commissaire à l’information soient directement applicables par la Cour fédérale et que le processus de contrôle judiciaire soit modifié de sorte que ce soient les ordonnances du commissaire à l’information, et non les décisions des autorités publiques, qui soient à l’étude.

[129]          ETHI, Témoignages, Maynard.

[130]          Recommandations CIC 2021, Recommandation 14 : « Le pouvoir de publication de la Commissaire à l’information devrait être étendu aux décisions qu’elle rend à la suite de demandes d’autorisation prévues à l’article 6.1 de la Loi. »

[131]          Ibid. Recommandation 16 : « Le paragraphe 63(2) de la Loi devrait être modifié pour autoriser la Commissaire à l’information à faire part des éléments de preuve touchant la perpétration par quiconque d’une infraction fédérale ou provinciale. »

[132]          Ibid. Recommandation 17 : « Le paragraphe 63(2) de la Loi devrait être modifié pour autoriser la Commissaire à l’information à faire part à l’autorité compétente des éléments de preuve touchant la perpétration d’une infraction fédérale ou provinciale. »

[133]          L'Écosse a son propre commissaire à l'information qui régit la Freedom of Information (Scotland) Act, qui couvre les autorités publiques écossaises. Le commissaire à l'information du Royaume-Uni est compétent en Écosse en matière de protection des données et, en ce qui concerne l’accès à l’information des autorités publiques du Royaume-Uni basées en Écosse [disponible en anglais seulement].

[134]          ETHI, Témoignages, Conacher (DS). M. Conacher a aussi recommandé d’ajouter dans la LAI des pénalités pour les fonctionnaires qui tentent d’échapper aux sanctions sous la Loi sur l’accès à l’information en prenant leur retraite, qui pourrait inclure la perte ou la récupération partielle d’indemnité de départ ou de pension.

[135]          ETHI, Témoignages, Conte.

[136]          Mémoire Rubin, pp. 2–3.

[137]          Mémoire DS, p. 5.

[138]          ETHI, Témoignages, Maynard.

[139]          CIC, Document d’information ETHI — 7 mars 2023. Le document d’information fournit des informations et des statistiques relatives à l’examen des plaintes par le commissariat.

[141]          Mémoire DS, p. 5.

[142]          Mémoire Rubin, pp. 12–13.

[145]          Voir aussi : Gouvernement du Canada, Le processus d’examen (fournit la liste de tous les rapports publiés dans le cadre de l’examen).

[146]          ETHI, Témoignages, Fortier.

[147]          ETHI, Témoignages, Fortier.

[148]          ETHI, Témoignages, Fortier.

[149]          CIC, Lettre au Comité, 27 avril 2023. La commissaire a réitéré que selon elle, la Loi sur l’accès à l’information, doit être révisée tout autant que le système doit être amélioré.

[150]          Voir aussi : ETHI, Témoignages, Maynard.

[151]          Le 27 mai 2021, Dean Beeby a soumis un mémoire au SCT contenant 9 recommandations de modification législatives dans le cadre des consultations publique sur l’examen du système d’accès à l’information. Lors de son témoignage devant le comité, M. Beeby a noté qu’aucune de ses recommandations n’ont été retenu par le SCT qui n’a d’ailleurs émis aucune recommandation quant à des modifications législatives. Dean Beeby, « Mémoire de Dean Beeby soumis au Secrétariat du Conseil du Trésor dans le cadre de ses consultations publiques sur l’examen de la Loi sur l’accès à l’information, le 27 mai 2021 », réponse écrite au Comité, 26 avril 2023.

[152]          Mémoire Rubin, janvier 2023. Dans ce mémoire, M. Rubin critique l’examen de l’accès à l’information du Conseil du Trésor.