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FOPO Rapport du Comité

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Traçabilité et Étiquetage du poisson et des produits de la mer

Le poisson et les produits de la mer constituent d’importantes sources de protéine pour les consommateurs canadiens. En effet, le ministère des Pêches et des Océans (MPO) estimait la quantité disponible à neuf kilogrammes par personne en 2020, ce qui représente une augmentation de 15 % par rapport à 2010. Il est primordial que les Canadiens puissent compter sur une chaîne d’approvisionnement transparente afin de faire des choix éclairés concernant la salubrité des aliments, la durabilité environnementale et les droits des travailleurs au moment d’acheter du poisson et des produits de la mer. En outre, les pêcheurs canadiens ne doivent pas être désavantagés par des exigences de traçabilité et d’étiquetage différentes imposées aux produits importés qui se retrouvent dans les supermarchés canadiens.

Le Comité permanent des pêches et des océans de la Chambre des communes (le Comité) a donc mené une étude sur la mise en œuvre d’un système de traçabilité et d’étiquetage « du bateau à la table » afin d’éviter l’étiquetage erroné de poisson et de produits de la mer importés. L’étude porte également sur les éventuelles répercussions socioéconomiques, environnementales et relatives à la salubrité alimentaire d’un tel système.

Le Comité a tenu cinq réunions en février et en mars 2022 et a notamment entendu des chercheurs canadiens et internationaux, des détaillants et des représentants de quatre ministères fédéraux, d’organismes d’écocertification et d’organisations de pêcheurs et de transformation. Le Comité tient à remercier tous les témoins qui ont comparu. Le Comité est ravi de présenter les résultats de son étude dans ce rapport, ainsi que les recommandations formulées à la suite des témoignages entendus.

Contexte

Rôles et responsabilités des ministères fédéraux

Un thème récurrent pendant l’étude du Comité a été l’absence d’une hiérarchisation claire des responsabilités relatives aux politiques canadiennes de traçabilité du poisson et des produits de la mer. Des témoins ont fait état de lacunes dans les exigences canadiennes de traçabilité et d’étiquetage du poisson et des produits de la mer qui peuvent causer de la confusion et flouer les consommateurs lorsqu’aucune agence n’a la responsabilité principale sur les enjeux liés à l’exactitude des renseignements indiqués sur l’étiquetage du poisson et des produits de la mer. Le Comité a jugé pertinent de fournir un résumé des responsabilités de chaque ministère.

Pêches et Océans Canada

Selon Adam Burns, directeur général au MPO, la demande concernant la traçabilité et l’étiquetage du poisson et des produits de la mer est

en bonne partie attribuable à diverses exigences d’accès aux marchés, dont bon nombre se traduisent par des obstacles au commerce qui découlent des exigences d’autres pays. D’autres facteurs ayant également contribué à l’évolution du dossier sont exclusivement axés sur les consommateurs et le marché, comme l’étiquetage écologique[1].

Il a précisé que le programme de certification des captures du MPO avait été créé en 2010 afin de permettre à l’industrie canadienne de répondre aux exigences en matière d’accès aux marchés internationaux, comme le règlement de l’Union européenne sur la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN)[2]. M. Burns a ajouté que le MPO ne réglemente pas l’importation de poisson et de produits de la mer au Canada. Selon le MPO, la participation de l’industrie au programme de certification des captures est dictée par le marché. Le programme certifie seulement les produits exportés en fonction des exigences des pays importateurs. Par conséquent, les entreprises canadiennes choisissent de participer au processus selon leurs marchés d’exportation ciblés. En ce qui concerne les produits importés qui sont réexportés, les importateurs canadiens doivent recevoir une certification du pays d’origine du produit.

En ce qui concerne le poisson et les produits de la mer appelés à se faire transformer à l’étranger et à retourner au Canada, le Comité a entendu le témoignage de Christina Callegari, coordonnatrice des produits de la mer, SeaChoice. Mme Callegari a évoqué la possibilité que les informations sur la traçabilité se perdent durant le processus :

Les fruits de mer sont uniques en ce sens qu’il y a des transbordements. Plusieurs produits provenant de différents bateaux peuvent alors être placés sur un bateau pour être transformés, puis envoyés ailleurs. C’est certainement un défi auquel l’industrie des fruits de mer est confrontée, notamment en ce qui concerne le maintien de la traçabilité des produits une fois arrivés au port[3].

Les exigences en matière d’information pour le poisson et les produits de la mer importés et pêchés au Canada se trouvent à la figure 1.

Figure 1 — Traçabilité du poisson et des produits de la mer d’élevage et sauvages dans la chaîne d’approvisionnement canadienne

La figure illustre la traçabilité du poisson et des produits de la mer d’élevage et sauvages dans la chaîne d’approvisionnement canadienne. Les renseignements conservés par les pêcheurs conformément à la Loi sur les pêches et à ses règlements d’application incluent la taille, le poids, l’espèce, le lieu de capture, le navire, l’engin de pêche utilisé et la date de capture. Les renseignements conservés par les aquaculteurs comprennent l’espèce, le lieu de la ferme, l’alimentation du poisson, la méthode d’élevage, et les substances utilisées pour traiter les poissons contre les pathogènes ou les parasites. La figure montre les différents joueurs dans la chaîne d’approvisionnement incluant les courtiers, les entreprises de transformation, les grossistes, les détaillants et les restaurants. Les renseignements présentement requis pour les consommateurs comprennent le nom courant conformément à la liste des poissons de l’ACIA, le nom et lieu de l’entreprise où s’effectue la dernière étape de la transformation, et le pays d’origine de la capture, de l’élevage ou lieu où s’effectue la dernière étape de transformation dans le cas des produits importés.

Source : Règlement de pêche (dispositions générales) (DORS/93-53), article 22; Règlement sur la salubrité des aliments au Canada (DORS/2018-108), articles 90, 91 et 92; Règlement sur les activités d’aquaculture (DORS/2015-177); Règlement du Pacifique sur l’aquaculture (DORS/2010-270); et SeaChoice, Losing Information Along Canadian Seafood Supply Chains [disponible en anglais seulement].

Agence canadienne d’inspection des aliments

Tammy Switucha, directrice exécutive de la Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, a informé le Comité que les exigences en matière de traçabilité et d’étiquetage du Règlement sur la salubrité des aliments au Canada (RSAC) visaient à assurer la salubrité des aliments et s’appliquaient aux transformateurs de poisson et de produits de la mer qui importent, exportent ou font du commerce au pays[4]. Selon elle, ces exigences sont « conformes aux normes établies par l’organisme international de normalisation des aliments, le Codex Alimentarius ».

Tammy Switucha a affirmé que la traçabilité reposait sur deux éléments principaux : les exigences en matière de documentation et les exigences d’étiquetage. Le RSAC exige que les entreprises qui « importent, exportent ou font du commerce au Canada tiennent des registres qui permettent de retracer un aliment — un pas en amont et un pas en aval — jusqu’au point de vente au détail ». En ce qui concerne l’étiquetage, le poisson et les produits de la mer doivent porter une étiquette contenant des informations, comme le nom commun conforme à la liste des poissons de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA)[5], le nom et le lieu de l’entreprise et le code de lot ou l’identifiant unique. Le nom scientifique de l’espèce, le lieu de la capture et le type d’engin de pêche utilisé sont facultatifs, car la question de la pêche durable ne relève pas de l’ACIA. Pour ce qui est de l’étiquetage du pays d’origine, l’ACIA exige que l’étiquette indique « le pays où a été effectuée la dernière transformation de l’aliment qui en a changé la nature[6] ».

Agence des services frontaliers du Canada

L’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) est responsable de l’application de la Loi sur les douanes et des règlements à la frontière, y compris ceux adoptés par l’ACIA. Selon Shawn Hoag, directeur général du Programme commercial, ASFC :

En ce qui concerne l’importation de poisson et de fruits de mer, l’ASFC joue un rôle indirect en vérifiant que les exigences des autres ministères sont respectées pour les fruits de mer importés et exportés au Canada, et en administrant la Loi sur les douanes. […] Ces activités consistent principalement à vérifier que les licences, permis, certificats ou autres documents requis pour importer les marchandises au Canada sont fournis, et que les droits et taxes exigibles sont acquittés par les importateurs[7].

Affaires mondiales Canada

Selon Doug Forsyth, directeur général de l’Accès aux marchés, Affaires mondiales Canada (AMC) joue un rôle restreint dans l’application de la politique de traçabilité et d’étiquetage du poisson et des produits de la mer. Le rôle d’AMC se résume à :

[vérifier] que les producteurs étrangers et nationaux soient traités de la même façon [et] soumis aux mêmes règles et aux mêmes conditions de concurrence. Cela signifie que toutes les nouvelles mesures et procédures de conformité que le Canada pourrait élaborer à l’égard des produits de poisson et fruits de mer et appliquer aux produits importés devront également s’appliquer de la même façon aux produits canadiens[8].

Consultation sur la traçabilité du poisson et des produits de la mer « du bateau à la table »

Dans la lettre de mandat remise le 13 décembre 2019 à la ministre de l’époque, Bernadette Jordan, le premier ministre lui demandait d’« [a]ppuyer la ministre de la Santé, ministre responsable de l’Agence canadienne d’inspection des aliments, afin de mettre sur pied un programme de traçabilité “du bateau à la table” pour aider les pêcheurs canadiens à commercialiser leurs produits de grande qualité[9] ». Le Comité est préoccupé par le fait que la lettre de mandat de la ministre Joyce Murray du 16 décembre 2021 ne faisait désormais plus état du programme de traçabilité du bateau à la table[10].

Le 13 août 2021, l’ACIA, de concert avec Agriculture et Agroalimentaire Canada et le MPO, a lancé une consultation sur un document de travail qui servira à l’élaboration de propositions visant à améliorer la traçabilité du poisson et des produits de la mer « du bateau à la table » et leur étiquetage au Canada[11]. Selon l’ACIA, ce document de travail a été rédigé après avoir consulté divers intervenants du secteur du poisson et des produits de la mer. La consultation, qui a pris fin le 11 décembre 2021, a permis de recueillir les commentaires d’un large éventail d’intervenants, y compris des consommateurs.

Trois thèmes principaux ont été abordés dans le document de travail de l’ACIA :

  • la protection des consommateurs et la salubrité des aliments (en ce qui a trait au poisson et aux produits de la mer);
  • la durabilité et la gestion des pêches liées à la traçabilité et à la lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN);
  • l’accès au marché, le commerce et la commercialisation du poisson et des produits de la mer canadiens[12].

Cependant, selon un communiqué publié le 2 novembre 2021 par Oceana Canada :

[L]e gouvernement n’a pas présenté d’échéancier, de prochaines étapes ou de stratégie pour protéger les pêcheurs canadiens, les entreprises de produits de la mer, les consommateurs et nos océans contre les pertes économiques et environnementales associées aux produits mal étiquetés et capturés illégalement[13] [traduction].

Le Comité demande donc au gouvernement de mettre en œuvre rapidement un programme de traçabilité et d’étiquetage qui protégerait les consommateurs, favoriserait la vigueur de notre industrie de la pêche, respecterait les obligations internationales et instaurerait une économie bleue.

Décisions des consommateurs et mesures de protection

Le Comité a appris que les lacunes concernant les exigences canadiennes d’étiquetage du poisson et des produits de la mer causent de la confusion et peuvent flouer les consommateurs. En faisant référence à la liste des poissons de l’ACIA, Christina Callegari a déclaré :

En 2019, SeaChoice a réalisé un examen exhaustif de la liste des poissons de l’ACIA. Cette liste sert de guide quant aux noms communs acceptés pour les produits de la mer vendus au Canada. Nous y avons trouvé de nombreux cas de noms communs génériques, comme « crevette » qui est utilisé pour 41 espèces différentes. À titre d’exemple, nous avons aussi découvert que l’on désignait sous l’appellation « vivaneau » une espèce de sébaste, un type de poisson totalement différent[14].

Alors que Tammy Switucha a affirmé que l’ACIA travaillait « en étroite collaboration avec toutes les instances pour assurer la protection des consommateurs d’un bout à l’autre de la chaîne d’approvisionnement[15] », Sayara Thurston, d’Oceana Canada, a plutôt fait valoir ceci :

Nos exigences actuelles en matière de pays d’origine obligent simplement à mentionner le dernier lieu de transformation sur l’étiquette. Vous pouvez acheter un produit portant la mention « Produit du Canada » ou « Produit des États-Unis », mais cela ne reflète pas nécessairement l’endroit où le produit a été pêché à l’origine. Il est donc très difficile pour les consommateurs d’avoir une idée exacte de ce qu’ils achètent s’ils essaient d’éviter certains pays ou certaines pratiques parce qu’ils ont des préoccupations à leur sujet ou s’ils essaient d’acheter localement. À l’heure actuelle, ils n’ont pas l’information exacte pour faire ces choix[16].

Christina Callegari a déclaré que « [l]e Canada devrait en outre adopter des exigences plus strictes en matière d’importation, car nous risquons actuellement d’importer des produits provenant d’activités de pêche INN ou des produits de la mer dont l’étiquetage est trompeur. Cette lacune met particulièrement à risque des entreprises canadiennes, comme les gros détaillants, en permettant que des produits appartenant à des espèces pêchées illégalement ou en danger critique d’extinction passent inaperçus et soient vendus aux consommateurs. » Elle a ajouté que « les Canadiens méritent d’en savoir plus au sujet de leurs produits de la mer, mais l’étiquetage utilisé au Canada ne leur permet pas de faire des choix éclairés pour faire des achats dans une optique de durabilité ou de soutien aux producteurs locaux[17] ».

Kurtis Hayne, directeur des programmes pour le Marine Stewardship Council (MSC), a affirmé ceci :

Les produits de la mer du MSC sont clairement étiquetés, ce qui permet aux consommateurs de faire un choix éclairé et éviter la fraude. Les tests d’ADN révèlent que l’étiquetage erroné des produits de la mer du MSC se situe à moins de 1 %, ce qui est un taux beaucoup plus faible que les études dont a entendu parler le Comité pour d’autres produits de la mer et relativement aux estimations mondiales des taux d’étiquetage erronés[18].

Il a également déclaré que, selon les recherches menées par son organisation, « les Canadiens veulent savoir que leurs produits de la mer sont traçables — 65 % des consommateurs veulent savoir que le poisson qu’ils achètent peut être retracé jusqu’à une source connue et fiable[19] ».

Robert Hanner, professeur à l’Université de Guelph, a soutenu que, « [s]i nous n’arrivons même pas à lui donner le bon nom, il n’est pas certain que nous devrions présumer de la salubrité de l’aliment en question[20] ».

Il a ajouté ceci :

Ici, au Canada, je trouve vraiment décourageant de voir, alors que notre industrie se conforme déjà aux règlements de l’Union européenne pour pouvoir exporter nos produits de la mer vers ce marché, que nous, les Canadiens, ne jouissons pas du même niveau de transparence. Nous consommons du poisson de basse qualité provenant des marchés internationaux qui est vendu au Canada sans ce niveau de transparence, alors que notre propre industrie s’y conforme déjà si elle exporte vers l’Union européenne[21].

Dans le cadre de son étude, le Comité a entendu divers témoins, y compris des représentants des pays de l’Union européenne, dont Carmen G. Sotelo, chercheuse au Conseil supérieur de la recherche scientifique de l’Espagne. Elle a d’ailleurs affirmé avoir constaté, après l’adoption d’exigences plus strictes en matière d’étiquetage, « que la fraude chez les détaillants en Espagne et en Europe a diminué au fil du temps, à partir de 1990[22] ». De plus, ces nouvelles exigences ont seulement entraîné une augmentation modeste des prix pour les consommateurs.

Les lois européennes en matière d’étiquetage exigent notamment que le nom scientifique des espèces, la zone géographique de la capture et l’engin utilisé figurent sur l’étiquette[23]. Le Comité souligne également que les exportateurs canadiens de poisson et de produits de la mer doivent déjà se conformer aux exigences de traçabilité et d’étiquetage européennes, et qu’il serait donc pertinent d’envisager de les appliquer aussi au marché canadien.

Robert Hanner a réitéré que « [l]a législation canadienne en matière d’étiquetage devrait être harmonisée avec celle de l’Union européenne en ce qui concerne l’obligation d’indiquer les noms scientifiques sur les produits de la mer, ainsi que des critères supplémentaires concernant l’origine géographique, l’historique de la transformation et les méthodes de production et de récolte afin de faciliter les choix des consommateurs et d’assurer une traçabilité effective du bateau à la table. Cette loi devrait être appliquée[24] ».

Recommandation 1

Que le gouvernement du Canada mette en œuvre un système canadien de traçabilité et d’étiquetage des produits de la mer qui permet aux Canadiens de prendre des décisions éclairées lorsqu’ils achètent des produits de la mer, y compris des considérations en ce qui concerne leur santé ainsi que l’optimisation et la durabilité de la ressource.

Recommandation 2

Que le gouvernement du Canada mette en place un système de traçabilité et d’étiquetage compatible avec le système et les normes de l’Union européenne pour veiller à ce qu’il existe une chaîne de traçabilité complète pour les poissons et les fruits de mer, et que ce système soit obligatoire et fondé sur des règlements, et s’applique à toutes les espèces, tant pour l’importation que l’exportation.

Recommandation 3

Que le gouvernement du Canada introduise une réglementation exigeant la traçabilité tout au long de la chaîne d’approvisionnement et l’amélioration des normes d’étiquetage pour le poisson et les produits de la mer. Les renseignements exigés sur l’étiquette devraient être mis à la disposition, par voie électronique, des organismes de réglementation et comprendre les éléments suivants :

  • Le nom scientifique de l’espèce, que le poisson soit pêché ou élevé;
  • Le pays d’origine de la prise ou de l’élevage et, s’il y a lieu, les lieux de transformation;
  • La méthode de pêche ou d’élevage du produit.

De plus, le gouvernement du Canada devrait créer un soutien pour permettre à l’industrie canadienne d’innover et d’adopter de nouvelles technologies en réaction aux exigences accrues de traçabilité et d’étiquetage.

Recommandation 4

Que le ministère des Pêches et des Océans collabore avec l’Agence canadienne d’inspection des aliments pour examiner la « Liste des poissons » de l’Agence. L’examen devrait viser à fournir une base cohérente pour la détermination des noms usuels des poissons et des produits de la mer. L’Agence canadienne d’inspection des aliments devrait également améliorer ses analyses de l’ADN servant à confirmer l’étiquetage des produits importés et canadiens, et investir dans un éventail de mécanismes d’inspection, de vérification et d’exécution afin de dissuader les fraudeurs.

Recommandation 5

Que, lorsqu’on aura adopté un système canadien de traçabilité et d’étiquetage pour le poisson et les fruits de mer, le ministère des Pêches et des Océans collabore avec d’autres ministères et administrations pour élaborer une campagne d’intérêt public visant à mieux sensibiliser les consommateurs à la traçabilité complète, du bateau à l’assiette, des produits de grande qualité pêchés au Canada, rendue possible par le nouveau système.

Mise en œuvre d’un programme de traçabilité et d’étiquetage « du bateau à la table »

Le Comité se réjouit de la mise en œuvre d’un programme de traçabilité « du bateau à la table », tel qu’énoncé dans la lettre de mandat du premier ministre à l’intention de la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière. Néanmoins, Tammy Switucha n’a pas été en mesure de fournir un échéancier à ce sujet[25].

Sayara Thurston, responsable de campagne pour Oceana Canada, a recommandé au gouvernement de s’engager à respecter « un échéancier ambitieux pour l’élaboration de la traçabilité d’un bout à l’autre de la chaîne. Pour faciliter les choses, nous recommandons la création d’un groupe de travail panministériel afin de permettre à tous les ministères concernés de travailler ensemble[26]. » Elle a donné l’exemple des États-Unis, où un groupe de travail formé en 2014 a permis de faire adopter une loi deux ans plus tard.

Il est important de souligner que les pêcheurs et les transformateurs canadiens de poisson et de produits de la mer prônent une traçabilité et une transparence accrues. Claire Canet, chargée de projet pour le Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, a donné l’exemple des ventes du homard de la région au début de la pandémie de COVID‑19, en 2020 :

Comme notre homard était identifiable, nous avons pu obtenir l’appui de distributeurs comme Metro, qui ont pu mettre en vedette les produits québécois identifiables dans leurs commerces de détail. Cela a permis à nos acheteurs de maintenir les prix auxquels ils vendaient leurs produits à Metro et à quelques chaînes plus petites. Au bout du compte, les pêcheurs de homard de la Gaspésie ont pu maintenir leur prix de vente à l’acheteur principal[27].

La mise en œuvre d’un système de traçabilité et d’étiquetage entraînera des coûts supplémentaires, qui ne semblent pas constituer une préoccupation majeure. Laura Boivin, présidente-directrice générale de Fumoir Grizzly Inc., a affirmé que le coût d’une écocertification par l’Aquaculture Stewardship Council se traduisait par des coûts supplémentaires de seulement 0,05 %[28].

Ian MacPherson, conseiller principal de la Prince Edward Island Fishermen’s Association, a affirmé quant à lui que son association utilisait une application de registre électronique pour consigner ses données sur les prises à titre de système de traçabilité et d’étiquetage. Il a donné les précisions suivantes :

L’Association a consacré beaucoup de temps et de ressources à cette application afin que les pêcheurs puissent avoir accès à une unité qui saura non seulement répondre aux paramètres en matière de fonction du ministère des Pêches et des Océans, mais qui sera également conviviale et leur sera offerte à un coût raisonnable. Il est essentiel que les pêcheurs participent au processus pour qu’ils sachent où vont les données sur leurs prises, qui ont accès à ces données et l’endroit où elles sont stockées[29].

Cependant, Scott Zimmerman, président-directeur général de Safe Quality Seafoods Associates, a affirmé ceci :

En définitive, tout dépend de la compétence des personnes qui effectuent des vérifications de traçabilité dans ces systèmes. Il n’y a qu’un nombre très limité de personnes sur le terrain qui peuvent effectuer ce type de vérification, donc elles doivent choisir où elles concentreront leurs ressources[30].

En ce qui concerne la vente au détail, le Comité a entendu parler d’un cas où Costco a vendu en 2017 du homard hors saison en le présentant comme du homard des Îles-de-la-Madeleine[31]. Chez Metro, la traçabilité « complète » du poisson et des produits de la mer « fait partie d’une approche globale en matière de responsabilité d’entreprise qui date de 2010, alors que la compagnie adoptait sa politique de pêche et d’aquaculture durables[32] ». Alexandra Leclerc, chef, Approvisionnement responsable, Metro Inc., estime que toutes les informations sur la traçabilité sont inscrites sur l’étiquette des produits vendus par l’enseigne dans 90 % à 95 % des cas. Par contre, Sylvain Charlebois, professeur à l’Université Dalhousie, estime que le grand public doit être mieux renseigné sur les écocertifications et les informations de traçabilité indiquées sur l’étiquetage :

Au comptoir de fruits de mer d’une épicerie, où des produits comportaient une indication de certification du programme Ocean Wise SeaFood et de certification MSC, j’ai demandé au préposé ce que cela voulait dire. Le préposé ne le savait pas. De toute évidence, il y a un manque d’information. J’étais le premier client en quatre ans à poser cette question. Les programmes de certification ne sont pas expliqués au grand public[33].

Recommandation 6

Que le gouvernement du Canada fixe une date cible pour la mise en œuvre d’un système canadien de traçabilité et d’étiquetage des produits de la mer et s’engage à la respecter.

Recommandation 7

Que le gouvernement du Canada mette sur pied un groupe de travail interministériel sous la direction de Pêches et Océans Canada et composé d’agences clés, de participants à la chaîne d’approvisionnement et d’autres intervenants pour les charger d’élaborer une réponse coordonnée face aux erreurs d’étiquetage du poisson et des produits de la mer, ainsi que de mettre en œuvre un système de traçabilité complète du bateau à la table pour tous les poissons et les produits de la mer qui sont pêchés, élevés ou vendus au Canada. Les membres de ce groupe de travail doivent également envisager la création d’une entité de supervision chargée de soutenir la mise en œuvre efficace du système canadien de traçabilité et d’étiquetage et de mesurer les résultats des progrès réalisés.

Recommandation 8

Que le gouvernement du Canada élabore un règlement sur l’étiquetage afin d’assurer la traçabilité complète « du bateau à la table » du poisson et des produits de la mer importés et canadiens. Ces règlements permettraient d’exiger que des renseignements clés soient associés aux produits tout au long de la chaîne d’approvisionnement au moyen de dossiers électroniques, et ce du point de capture au point de vente.

Protection de la chaîne d’approvisionnement des pratiques de pêche illicite, non déclarée et non réglementée

Même si le Comité compte mener une étude plus approfondie sur la pêche INN, ses membres veulent mettre l’accent sur les violations des droits de la personne qui se produisent lorsque les produits de la mer ne font pas l’objet d’une réglementation et d’une traçabilité adéquates. Voici ce que Sayara Thurston a dit à ce sujet :

La fraude ou l’étiquetage trompeur des produits de la mer consiste notamment à faire passer un produit moins cher et facilement accessible pour un produit plus coûteux, des produits d’élevage pour des produits sauvages ou des poissons pêchés illégalement pour des produits de la pêche légitime. Ces pratiques compromettent la salubrité des aliments, trompent les consommateurs et l’industrie canadienne de la pêche, affaiblissent la durabilité des populations de poissons et masquent la pêche illégale mondiale et les violations des droits de la personne[34].

Il est impératif de créer un nouveau système de traçabilité et d’étiquetage pour prévenir les pêches INN. Sayara Thurston a d’ailleurs mentionné celui de l’Union européenne :

Par exemple, dans le système de l’Union européenne, si des pays sont soupçonnés de ne pas avoir une bonne gestion des pêches et de ne pas empêcher les produits illégaux d’entrer dans leur chaîne d’approvisionnement, on leur donne un carton jaune ou un carton rouge, un peu comme dans le sport. Le Cameroun est l’un des pays qui ont actuellement des cartons rouges, et le Canada a importé du poisson du Cameroun l’an dernier, mais ce n’est pas nécessairement une information à laquelle le consommateur aura accès[35].

Recommandation 9

Que le gouvernement du Canada mette en œuvre un système de traçabilité et d’étiquetage des produits de la mer qui protège les chaînes d’approvisionnement canadiennes des produits de la mer issus de la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) et de la pêche impliquant l’exploitation de travailleurs.

Promotion de la production canadienne de produits de la mer et protection de sa valeur marchande

L’industrie canadienne du poisson et des produits de la mer est un moteur important de l’économie qui offre des produits de très grande qualité. Selon l’ACIA, 92 % des étiquettes des produits vendus au détail sont correctes, et seulement 4 % des poissons et des produits de la mer transformés au Canada sont mal étiquetés au titre des normes de traçabilité actuelles[36]. La plupart des produits mal étiquetés sont vendus dans les restaurants. En effet, Oceana Canada a révélé que 47 % des échantillons d’espèces provenant de restaurants canadiens étaient mal étiquetés[37]. Les divergences entre l’ACIA et Oceana Canada découlent de méthodologies différentes : l’ACIA enquête sur la partie en amont de la chaîne d’approvisionnement (transformateurs et importateurs), tandis qu’Oceana Canada se concentre sur la partie en aval (détaillants et restaurants). Le Comité est d’avis que cette perte apparente d’information de traçabilité le long de la chaîne d’approvisionnement est un signal d’alarme et devrait faire l’objet d’une enquête plus approfondie afin de permettre de déceler les secteurs qui posent le plus problème dans la chaîne d’approvisionnement, comme l’a recommandé Paul Lansbergen, président du Conseil canadien des pêches[38]. Comme il a été mentionné précédemment, les pêcheurs et les transformateurs canadiens appuient fortement l’adoption de normes de traçabilité et d’étiquetage accrues tant pour favoriser la durabilité que pour leur garantir une part équitable du marché par rapport aux importateurs sans scrupules.

Christina Burridge, directrice exécutive de la BC Seafood Alliance, a corroboré les constatations de l’ACIA. Elle a d’ailleurs mentionné que l’étiquetage erroné du poisson et des produits de la mer concernait surtout « les produits récoltés illégalement qui entrent dans le marché de la vente au détail et des services alimentaires à petite échelle[39] ». Elle a souligné que sur la côte ouest, « [c]haque bateau doit rendre compte de chacune de ses prises, qu’elle soit conservée ou remise à l’eau, suivant un programme qui exige une surveillance électronique à 100 % ou la présence d’observateurs en mer et une validation à quai à 100 % avant que la prise ne se rende à l’usine de transformation ». De plus, la majorité des installations de transformation préservent la chaîne de possession du MSC. Selon elle, les produits illicites qui se retrouvent dans le marché canadien sont issus des pêches récréatives ou à des fins alimentaires, sociales et rituelles.

Paul Lansbergen a abondé dans le même sens. Il a affirmé que le nombre de mauvais étiquetages du poisson et des produits de la mer d’ici était limité, et que les transformateurs canadiens respectaient des normes élevées de traçabilité dans le cadre de leurs activités, qui comprennent des systèmes internes de traçage et une « inspection aux points de contrôle critiques[40] ». Selon lui, « [l]es Canadiens, comme nos clients du monde entier, peuvent avoir confiance lorsqu’ils consomment nos poissons et nos fruits de mer parce qu’ils savent qu’ils sont passés par un des systèmes de contrôle de salubrité les plus avancés au monde ».

Sonia Strobel, cofondatrice et directrice générale de Skipper Otto Community Supported Fishery, a affirmé ceci :

Les consommateurs canadiens veulent savoir si, en achetant des produits de la mer, ils soutiennent des familles canadiennes de pêcheurs ou au contraire s’ils soutiennent des activités illégales et même la pratique de l’esclavage. Or, à cause de nos règles d’étiquetage, les produits de la mer récoltés chez nous sont indiscernables sur le marché de ceux qui proviennent de l’étranger […]
À notre avis, le plus gros problème, c’est que les produits importés sont mal étiquetés sur le marché, ce qui représente une concurrence déloyale pour les pêcheurs et les petites entreprises du Canada. Ensuite, on ferme les yeux sur cet étiquetage trompeur et sur les dommages qui en résultent pour les pêcheurs et les consommateurs[41].

Ian MacPherson a convenu qu’un programme de traçabilité « du bateau à la table » et d’étiquetage profiterait à ses membres. Il a apporté les précisions suivantes :

[L]e prix au débarquement devrait refléter la valeur sur le marché. Si l’on veut que la chaîne d’approvisionnement reste saine, les avantages doivent se répercuter sur toute la chaîne d’approvisionnement, et ce, à partir du quai. Les pêcheurs veulent un prix juste et approprié pour leurs prises et ne veulent pas de produits de remplacement[42].

Il a ajouté ceci :

Nous estimons que la traçabilité des produits de la mer est importante pour maintenir notre réputation internationale intacte; pour veiller à ce que les espèces de grande et de moindres valeurs ne soient pas surexploitées; pour préserver les certifications internationales en matière de durabilité; et pour accroître la confiance des consommateurs dans les produits de la mer qu’ils achètent au détail[43].

Recommandation 10

Que le gouvernement du Canada mette en œuvre un système de traçabilité, d’étiquetage et de certification des produits de la mer qui protège la valeur marchande et l’accès au marché des produits de la mer canadiens pêchés légalement et les prix que les pêcheurs, les transformateurs et les détaillants peuvent recevoir pour les produits de la mer qu’ils vendent.

Application et surveillance

Des organismes gouvernementaux comme l’ACIA ont reconnu le fléau qu’est la vente de poisson et de produits de la mer mal étiquetés au Canada. Tammy Switucha a d’ailleurs affirmé ceci :

C’est un problème. Nous ne le contestons pas. Dans le cadre des pouvoirs dont nous disposons actuellement, l’ACIA effectue une surveillance très précise des importateurs de poissons et de fruits de mer. Nous utilisons tous les outils dont nous disposons en vertu de la loi pour être en mesure d’effectuer cette surveillance réglementaire et de prendre des mesures d’application de la loi, mais nous ne pouvons pas être partout en même temps[44].

L’absence de mandat pour faire respecter la durabilité et l’écocertification a aussi été soulevée par l’ACIA. De l’avis du Comité, le problème représente une énorme lacune en matière de gouvernance. Le Comité a également entendu les propos de Claire Dawson, cadre supérieure pour l’Initiative pêche et produits de la mer d’Ocean Wise, qui a soutenu qu’il était impossible de déterminer l’empreinte environnementale d’un produit de la mer si on ignorait où et comment celui-ci avait été produit. Selon elle, « l’opacité de la chaîne d’approvisionnement est l’une des principales raisons pour lesquelles les produits de la mer sont sujets à la fraude et à l’étiquetage trompeur[45] ». Laura Boivin a également soulevé l’absence de transparence relativement à l’étiquetage des produits de la mer génétiquement modifiés[46].

Robert Hanner a convenu qu’il s’agissait d’un problème et a donné les précisions suivantes :

L’Agence canadienne d’inspection des aliments teste au hasard les produits déclarés issus de l’aquaculture — les produits d’élevage qui sont importés au Canada — pour s’assurer qu’il n’y a pas de résidus de médicaments vétérinaires interdits ou d’autres agents thérapeutiques souvent utilisés par des producteurs sans scrupules pour éliminer les infections fongiques et d’autres agents pathogènes potentiels dans leur élevage de produits de la mer. Si, par exemple, je suis un exportateur d’un autre pays qui a du poisson pollué et que je l’étiquette comme étant « sauvage », j’obtiens plus d’argent et je contourne le processus de dépistage de ce genre de médicaments vétérinaires interdits. On part du principe qu’il s’agit d’une espèce sauvage et qu’elle n’a donc pas à être traitée de cette façon[47].

Il a également réclamé une application accrue de la loi à différents points de la chaîne d’approvisionnement afin de corriger ce qui ressemble au syndrome du téléphone arabe, puisque les erreurs d’étiquetage semblent augmenter à mesure que le produit progresse dans la chaîne d’approvisionnement. Il a ajouté ceci :

[N]ous avons publié un document avec eux au sujet de leurs inspecteurs qui prélèvent des produits de la mer à leur arrivée au port de débarquement à Toronto, en gros et au détail. Nous avons constaté qu’environ 20 % des échantillons prélevés et testés à l’importation étaient mal étiquetés; près de 30 % des échantillons prélevés en gros et au détail étaient mal étiquetés, et près de 40 % des échantillons prélevés au détail étaient mal étiquetés. […] [À] moins de faire des tests le long de la chaîne d’approvisionnement, on ne fait que suivre le cheminement des emballages sans savoir ce qu’ils contiennent[48].

Sonia Strobel en est arrivée à la conclusion suivante :

Vous pouvez faire toutes les lois que vous voulez sur le contenu des étiquettes, mais rien ne changera si ces lois ne sont pas appliquées. En raison du laxisme à l’égard des règles, lorsqu’une fraude est décelée dans le marché des produits de la mer, les gens haussent les épaules et jettent le blâme sur quelqu’un de plus haut dans la chaîne, ils paient les amendes et continuent comme si de rien n’était. C’est le prix à payer pour faire des affaires. Mais chaque personne dans la chaîne d’approvisionnement devrait être fortement incitée à se porter garante de ce qu’elle vend[49].

Le test d’ADN a été proposé au Comité comme méthode de vérification. Les grandes chaînes d’alimentation comme Metro utilisent leur propre système de traçabilité, qui comprend une base de données mise à jour régulièrement, pour s’assurer que « ce que [les fournisseurs] nous ont dit préalablement est toujours vrai aujourd’hui. De plus, leur capacité à documenter leur chaîne d’approvisionnement jusqu’aux navires de pêche ou jusqu’aux sites d’élevage est testée de façon aléatoire. Nous avons aussi un programme de vérification par test d’ADN pour valider les espèces qui sont déclarées[50]. »

Ce fardeau ne devrait pas reposer uniquement sur le secteur privé. Le gouvernement fédéral doit collaborer avec les intervenants pour renforcer ses mesures d’application à tous les niveaux de la chaîne d’approvisionnement. Sylvain Charlebois a recommandé une « approche filière, qui a été adoptée en premier au Québec il y a plusieurs années. Cette approche permet à l’ensemble des joueurs de l’industrie de se concerter et de faire part des problèmes auxquels ils doivent faire face. À mon avis, la traçabilité concerne tout le monde[51]. »

Obligations internationales du Canada

En plus de protéger et de promouvoir le secteur de la pêche et de la transformation du poisson et des produits de la mer, le Canada doit respecter ses obligations internationales. Le Plan d’action de Charlevoix pour la santé des océans et des mers et des communautés résilientes de 2018 contenait plusieurs objectifs pour les pays du G7, notamment :

[E]ncourage[r] une action coordonnée pour lutter contre le travail forcé et d’autres formes de travail qui violent ou bafouent les droits de le [sic] personne dans le secteur de la pêche et qui peuvent également être liées à la pêche INN […] [et] appuy[er] les directives volontaires de [l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture] pour les systèmes de documentation des captures[52].

Tout système de traçabilité et d’étiquetage devra s’harmoniser à ces objectifs et aux lois commerciales connexes, dont l’application relève d’AMC. D’ailleurs, Doug Forsyth a expliqué ceci :

[AMC] collabore avec d’autres ministères sur un éventail de questions, y compris l’élaboration de règlements et de normes. Nous serions heureux de continuer à le faire sous toutes les formes nécessaires et en vertu du mandat qui nous a été confié de fournir des conseils sur la conformité de ces normes et règlements à nos obligations commerciales internationales[53].

Le Comité accueille favorablement cet engagement qui prendra la forme d’un groupe de travail interministériel chargé de mettre en œuvre un système de traçabilité et d’étiquetage « du bateau à la table ».

Recommandation 11

Que le gouvernement du Canada s’assure que les lois du commerce international, les obligations du Canada en vertu des traités et les obligations des partenaires étrangers envers le Canada sont définies et prises en compte dans l’élaboration de son système de traçabilité et d’étiquetage des produits de la mer.

Recommandation 12

Que le gouvernement du Canada exige la documentation des prises pour permettre de déterminer l’origine et d’attester la légalité de tous les produits de la mer importés nationalement, conformément aux exigences de l’Union européenne et aux recommandations de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture que le Canada a accepté de soutenir lors du Sommet du G7 de 2018. Le gouvernement fédéral doit aussi veiller à ce que les nouveaux systèmes canadiens de traçabilité et de documentation soient compatibles avec les systèmes mondiaux émergents afin d’éviter un fardeau réglementaire supplémentaire pour l’industrie et de nouvelles failles pour les produits d’origine illégale.

Collecte et protection des données des pêcheurs

Des témoins ont aussi souligné que la protection des données transmises par les pêcheurs au MPO doit être garantie. Voici les propos de Claire Canet à ce sujet :

L’un des aspects consistait clairement à relier les systèmes informatiques et les différents logiciels utilisés tout au long de la chaîne de valeur, pour la collecte de données et leur transmission d’un acteur de la chaîne de valeur à l’autre, grâce au système de base des journaux de bord électroniques. La traçabilité doit commencer dès le bateau, si nous voulons vraiment quelque chose de solide pour le consommateur final. Ces données pourraient, pour des raisons de protection des données et de compatibilité des systèmes, être difficiles à intégrer dans un système unique de traçabilité. Il faut donc examiner les appareils qui peuvent être utilisés directement depuis le bateau[54].

Tammy Switucha a affirmé que l’ACIA est ouverte aux commentaires de l’industrie sur la conception du système de traçabilité et d’étiquetage « du bateau à la table ». Elle a dit ceci :

Nous collaborons et nous discutons régulièrement avec l’industrie alimentaire, même en dehors des processus de consultation, pour l’élaboration de politiques ou de règlements. Nous tenons toujours compte de ses observations et de son expérience[55].

Recommandation 13

Que le gouvernement du Canada, à mesure qu’il élabore un système de traçabilité et d’étiquetage des produits de la mer, vérifie que celui-ci utilise des systèmes électroniques et des logiciels qui facilitent la transmission efficace des données relatives au poisson et aux produits de la mer tout en garantissant la protection des renseignements confidentiels des pêcheurs ou de leurs entreprises.

Conclusion

Les consommateurs du Canada méritent d’avoir la certitude que les produits de la mer achetés et consommés par eux sont salubres, récoltés et transformés d’après les normes propices à la viabilité des stocks de poissons, à la protection des écosystèmes aquatiques et à la garantie des droits fondamentaux de la personne, et que l’étiquetage et la mise en marché de ces produits font état d’information exacte en toutes intégrité et transparence.

L’industrie canadienne de la pêche mérite d’être à l’abri d’une concurrence injuste, déloyale et illégale sur le marché national et d’être reconnue sur les marchés internationaux pour son adhésion aux normes les plus élevées.

Le gouvernement du Canada a l’obligation de veiller à ce que ses ministères disposent des ressources correspondantes et des fonds nécessaires pour répondre à ces attentes.


[1]                     Adam Burns, directeur général, Gestion des ressources halieutiques, ministère des Pêches et des Océans (MPO), Témoignages, 10 février 2022.

[3]              Christina Callegari, coordonnatrice des produits de la mer, SeaChoice, Témoignages, 1er mars 2022.

[4]                     Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.

[5]              Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA), Liste des poissons de l’ACIA.

[6]              Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.

[7]              Shawn Hoag, directeur général, Programme commercial, Agence des services frontaliers du Canada, Témoignages, 24 mars 2022.

[8]              Doug Forsyth, directeur général, Accès aux marchés, Affaires mondiales Canada, Témoignages, 24 mars 2022.

[9]              Cabinet du premier ministre, ARCHIVÉE — Lettre de mandat de la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, 13 décembre 2019.

[10]            Cabinet du premier ministre, Lettre de mandat de la ministre des Pêches, des Océans et de la Garde côtière canadienne, 16 décembre 2021.

[14]            Christina Callegari, coordonnatrice des produits de la mer, SeaChoice, Témoignages, 1er mars 2022.

[15]            Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.

[16]            Sayara Thurston, responsable de campagne, Oceana Canada, Témoignages, 15 février 2022.

[17]            Christina Callegari, coordonnatrice des produits de la mer durables, SeaChoice, Témoignages, 1er mars 2022.

[18]            Kurtis Hayne, directeur des programmes, Marine Stewardship Council, Témoignages, 1er mars 2022.

[19]            Kurtis Hayne, directeur des programmes, Marine Stewardship Council, Témoignages, 1er mars 2022.

[20]            Robert Hanner, professeur, Université de Guelph, à titre personnel, Témoignages, 15 février 2022.

[21]            Robert Hanner, professeur, Université de Guelph, à titre personnel, Témoignages, 15 février 2022.

[22]            Carmen G. Sotelo, chercheuse, Conseil supérieur de la recherche scientifique de l’Espagne, à titre personnel, Témoignages, 24 mars 2022.

[23]            Commission européenne, A pocket guide to the EU’s new fish and aquaculture consumer labels, 2014 [disponible en anglais seulement].

[24]            Robert Hanner, professeur, Université de Guelph, à titre personnel, Témoignages, 15 février 2022.

[25]            Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.

[26]            Sayara Thurston, responsable de campagne, Oceana Canada, Témoignages, 15 février 2022.

[27]            Claire Canet, chargée de projet, Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, Témoignages, 1er mars 2022.

[28]            Laura Boivin, présidente-directrice générale, Fumoir Grizzly inc., Témoignages, 3 mars 2022.

[29]            Ian MacPherson, conseiller principal, Prince Edward Island Fishermen’s Association, Témoignages, 1er mars 2022.

[30]            Scott Zimmerman, président-directeur général, Safe Quality Seafood Associates, Témoignages, 3 mars 2022.

[31]            Claire Canet, chargée de projet, Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, Témoignages, 1er mars 2022.

[32]            Alexandra Leclerc, chef, Approvisionnement responsable, Metro Inc., Témoignages, 1er mars 2022.

[33]            Sylvain Charlebois, professeur, Laboratoire des sciences analytiques en agroalimentaire, Université Dalhousie, à titre personnel, Témoignages, 3 mars 2022.

[34]            Sayara Thurston, responsable de campagne, Oceana Canada, Témoignages, 15 février 2022.

[35]            Sayara Thurston, responsable de campagne, Oceana Canada, Témoignages, 15 février 2022.

[36]            Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.

[37]            Sayara Thurston, responsable de campagne, Oceana Canada, Témoignages, 15 février 2022.

[38]            Paul Lansbergen, président, Conseil canadien des pêches, Témoignages, 15 February 2022.

[39]                  Christina Burridge, directrice exécutive, BC Seafood Alliance, Témoignages, 15 février 2022.

[40]                  Paul Lansbergen, président, Conseil canadien des pêches, Témoignages, 15 février 2022.

[41]            Sonia Strobel, directrice générale et cofondatrice, Skipper Otto Community Supported Fishery, Témoignages, 15 février 2022.

[42]            Ian MacPherson, conseiller principal, Prince Edward Island Fishermen’s Association, Témoignages, 1er mars 2022.

[43]            Ian MacPherson, conseiller principal, Prince Edward Island Fishermen’s Association, Témoignages, 1er mars 2022.

[44]            Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.

[45]                  Claire Dawson, cadre supérieure, Initiative pêche et produits de la mer, Ocean Wise, Témoignages, 15 février 2022.

[46]            Laura Boivin, présidente-directrice générale, Fumoir Grizzly inc., Témoignages, 3 mars 2022.

[47]            Robert Hanner, professeur, Université de Guelph, à titre personnel, Témoignages, 15 février 2022.

[48]            Robert Hanner, professeur, Université de Guelph, à titre personnel, Témoignages, 15 février 2022.

[49]            Sonia Strobel, directrice générale et cofondatrice, Skipper Otto Community Supported Fishery, Témoignages, 15 février 2022.

[50]            Alexandra Leclerc, chef approvisionnement responsable, Metro inc., Témoignages, 1er mars 2022.

[51]            Sylvain Charlebois, professeur, Laboratoire des sciences analytiques en agroalimentaire, Université Dalhousie, à titre personnel, Témoignages, 3 mars 2022.

[52]            Gouvernement du Canada, Plan d’action de Charlevoix pour la santé des océans et des mers et des communautés côtières résilientes, 2018; Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture, Directives d’application volontaire relatives aux programmes de documentation des prises, 2017.

[53]            Doug Forsyth, directeur général, Accès aux marchés, Affaires mondiales Canada, Témoignages, 24 mars 2022.

[54]            Claire Canet, chargée de projet, Regroupement des pêcheurs professionnels du sud de la Gaspésie, Témoignages, 1er mars 2022.

[55]            Tammy Switucha, directrice exécutive, Direction de la salubrité des aliments et de la protection des consommateurs, Agence canadienne d’inspection des aliments, Témoignages, 10 février 2022.