propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, je remercie mes collègues d'être présents ici aujourd'hui.
Pour un gouvernement, il n'y a rien de plus important qu'une fonction publique intègre, compétente et responsable et il faut valoriser le travail de nos fonctionnaires. Ceux qui sont les plus à même de constater des irrégularités dans la machine d'État, dans la gestion des fonds publics, dans l'utilisation des biens de la Couronne, comme on aime bien les appeler ici, ce sont les fonctionnaires. Parfois, par sens de responsabilité, ces fonctionnaires deviennent des personnes divulgatrices d'actes répréhensibles, qu'on appelle aussi les lanceurs d'alerte. C'est un rôle qui est absolument important. C'est pour cela qu'il faut les protéger; il faut aussi créer et bonifier les mécanismes qui permettent à ces fonctionnaires de divulguer des actes répréhensibles.
Il y a présentement la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. Cette loi émane d'abord du scandale des commandites. On sait bien que le programme des commandites fédéral a été hautement problématique de 1997 à 2001 et que cela a fait un scandale majeur. C'est un programme qui est né à la suite du référendum de 1995, où le gouvernement fédéral voulait avoir davantage de visibilité au Québec et a décidé d'afficher des drapeaux canadiens dans à peu près toutes les sphères culturelles et sociales au Québec.
Malheureusement, en plus d'être mauvais à la source, ce programme a fini par servir de mécanisme d'échange de bons procédés où des firmes de communication proches du Parti libéral recevaient de très gros contrats et l'argent était finalement retourné directement ou indirectement dans les poches du Parti libéral du Canada. Cela a eu comme effet de miner la confiance des contribuables envers le gouvernement, la confiance du public envers les opérations gouvernementales.
Puisque cela a dérapé, cela a également été de nature à miner le processus démocratique même qui fait en sorte que nous sommes élus à la Chambre et que les gens font confiance à ce processus. On ne parle pas de petits montants à l'époque; on parle de la dilapidation prouvée d'un quart de milliard de dollars de fonds publics, qui a mené à la commission Gomery.
Dans cette foulée, on se rappelle que le gouvernement de Paul Martin a été sévèrement puni. Il a été réélu minoritaire en 2004. Finalement, les Canadiens et les Québécois, en élisant un grand nombre de députés du Bloc québécois, ont décidé de mettre les libéraux dehors et de donner un mandat minoritaire au gouvernement Harper, qui a très rapidement agi pour qu'on puisse protéger les fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles.
On se rappellera que, si le public a été en mesure de connaître l'ampleur du scandale des commandites, ce fut entre autres grâce à une divulgatrice qu'on avait surnommée « MaChouette ». Elle parlait régulièrement au journaliste Daniel Leblanc qui a dû faire tous les efforts juridiques du monde pour protéger son identité.
Est venue d'abord la Loi fédérale sur la responsabilité au début du gouvernement Harper, suivie de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles qui est entrée en vigueur le 15 avril 2007.
On comprendra que le monde a bien changé depuis, mais cette loi n'a pas changé et n'a pas été bonifiée, amendée ou corrigée depuis 15 ans. Aujourd'hui, le temps est venu de rendre un service envers nos fonctionnaires qui sont compétents et de protéger les fonctionnaires divulgateurs.
Le but du projet de loi est de protéger les fonctionnaires qui dénoncent les actes répréhensibles dans la gestion de l'État, mais aussi d'instaurer un processus d'enquête sur ces actes-là. C'est très important, parce qu'on veut qu'ils soient divulgués, mais on veut aussi contribuer à y mettre fin. On veut qu'il y ait des processus qui nous aident à faire cela. L'objectif ultime est une meilleure gestion de l'appareil d'État.
La Loi actuelle couvre beaucoup de choses. C'était une loi ambitieuse à l'époque et les intentions étaient bonnes. Elle décrivait comme étant des actes répréhensibles la contravention d'une loi fédérale ou provinciale ou d'un règlement par des personnes en autorité; l'usage abusif des fonds publics ou des biens publics; des cas de mauvaise gestion dans le secteur public; le fait de causer par action ou par omission un risque grave et précis pour la vie, la santé, la sécurité humaines ou pour l'environnement, à l'exception évidemment des risques qui sont inhérents au travail normal des fonctionnaires, parce qu'on veut qu'ils soient capables de faire leur travail.
La Loi couvre des contraventions graves d'un code de conduite qui découlent des éléments que je viens de nommer et, évidemment, le fait de volontairement et sciemment ordonner ou conseiller à une personne de commettre l'un des actes répréhensibles que je viens d'énumérer.
Cela reste une loi assez ambitieuse qui est accompagnée de mécanismes. La Loi créait à l'époque un mécanisme par lequel la divulgation peut avoir lieu. En effet, on veut qu'il y ait un mécanisme. On ne veut pas nécessairement que les lanceurs d'alerte se retrouvent à appeler des journalistes en secret et à leur passer des documents confidentiels. On veut qu'il y ait un processus, un processus censé protéger l'anonymat et, surtout, protéger les fonctionnaires de représailles. La Loi créait une institution indépendante, soit le Commissariat à l'intégrité du secteur public du Canada, qui peut recevoir les dénonciations et enquêter sur des allégations et sur de possibles représailles. Finalement, on a créé le Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles.
Si la Loi est si bonne, pourquoi donc avoir présenté le projet de loi ?
D'abord, redisons-le. Les principes de la Loi qui est en application depuis 2007 sont excellents, mais la Loi comporte beaucoup de lacunes. Ce sont de petites lacunes, mais qui, mises bout à bout, rendent cette loi effectivement inopérante. On l'a vu: depuis sa mise en application, on compte le nombre de cas où des divulgations ont passé correctement le processus. On peut presque les compter sur les doigts de nos deux mains.
Cela est également cohérent avec les conclusions de l'Association internationale du barreau, qui classe le Canada dans la queue du peloton en matière de lois qui protègent les fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles. Le Canada est un cancre à l'échelle mondiale. J'épargne à mes collègues la liste des pays qui sont au-dessus de nous parce que non seulement c'est gênant, mais c'est honteux. Lorsque l'Association internationale du barreau a évalué la loi canadienne, le Canada a obtenu la note de zéro pour 19 des 20 critères d'évaluation. Sait-on quel est le critère pour lequel le Canada n'a pas eu zéro? Le simple fait d'avoir d'une loi. C'est le seul critère où on n'a pas eu zéro. On ne part pas de rien, mais on part de loin.
Il y a des exemples à suivre, des exemples qui sont bien connus. L'Union européenne, l'Australie et les États‑Unis sont des exemples à suivre, et on peut marcher dans leur sillon. Toutefois, ce que cela nous dit, c'est que cela doit changer pour le mieux et pour le bien des contribuables.
On ne part pas de rien non plus. Une étude en comité a été faite en 2017. Certains de mes collègues parlementaires, que je salue, ont travaillé très fort sur ce rapport. Ce sont 12 réunions qui ont été tenues dans le cadre de cette étude, 52 témoins rencontrés et 12 mémoires reçus de la part d'experts, de dénonciateurs et de syndicats, essentiellement des gens qui connaissent cela et qui sont sur le terrain. On y a exposé les défis et les lacunes et on y a formulé 15 recommandations.
Je sais qu'une des personnes qui a grandement participé à la rédaction de ces recommandations est décédée récemment. Il s'agit de M. Michael Dagg, et je tiens, avec plusieurs de mes collègues, à lui rendre hommage.
Qu'est-ce que le Comité nous a appris? Il nous a notamment appris que la protection des fonctionnaires divulgateurs était insuffisante et que la façon dont cela fonctionnait faisait en sorte qu'on avait instauré un manque de confiance avec les fonctionnaires. Ces derniers savent que les mécanismes existent, mais, comme ils n'ont pas confiance que cela va aboutir et qu'ils ont peur que, à la fin, cela leur nuise énormément, on se retrouve avec une loi qui n'est pas utilisée et des fonctionnaires qui ne viennent pas dénoncer.
Le projet de loi vient pallier ces lacunes et cherche à corriger essentiellement, comme je l'ai dit, les lacunes de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles.
Que fait-on dans ce projet de loi? D'abord, on veut élargir la définition d'actes répréhensibles. En effet, la Loi couvre les cas graves de malversation et d'actes illégaux, mais elle ne couvre pas les cas d'ingérence politique dans les décisions administratives. Cela devrait pourtant en faire partie. Évidemment, si un fonctionnaire divulgue un cas d'ingérence politique, on se retrouve dans une situation où sa plainte sera tout simplement rejetée. Elle ne pourra pas être traitée ni même considérée par les fonctionnaires qui reçoivent les plaintes dans les ministères ou par le commissaire.
Par ailleurs, il faut pouvoir aller au fond des choses. Or, la Loi actuelle ne permet pas d'aller au fond des choses quand un acte répréhensible est divulgué. Cela ne nous permet pas de corriger la situation.
Dans la situation actuelle, aller voir les personnes responsables de la réception des plaintes peut être extrêmement formel, difficile et intimidant pour un fonctionnaire. En plus, le commissariat qui traite ces questions a un budget limité. Il n'a à peu près pas de ressources, ni l'expertise ni la connaissance nécessaire des ministères. Cela fait que souvent les enquêtes n'aboutissent pas. Il est possible de transmettre le cas aux forces de l'ordre, mais, encore une fois, il faut qu'il y ait une enquête en amont et elle n'est généralement pas faite.
Le projet de loi propose de permettre à la vérificatrice générale de faire enquête dans de tels cas. Rappelons qu'à l'époque du scandale des commandites, c'était la vérificatrice générale Mme Sheila Fraser qui avait permis de mettre à jour les malversations.
De surcroît, nous voulons protéger plus de gens. Présentement, la Loi protège les fonctionnaires, mais elle ne protège pas les ex-fonctionnaires qui ont pu être témoins d'actes répréhensibles pendant des années et qui décident de les divulguer plus tard. La Loi ne protège pas non plus les employés contractuels, les employés temporaires comme quelqu'un qui travaille à l'ARC pendant quelques mois, pendant la période des impôts. Ce sont ces personnes qui sont les plus vulnérables dans ces circonstances, parce que le statut d'emploi de ces personnes est précaire. Elles peuvent facilement être victimes d'intimidation ou de représailles.
Par ailleurs, il faut rebâtir la confiance avec la fonction publique. Dans la Loi actuelle, on peut refuser une plainte, même si les actes répréhensibles sont bien établis, parce que le commissaire peut juger que la personne qui dénonce des actes répréhensibles avait des motifs personnels de le faire.
On comprend la gravité de cela. Souvent quand on dénonce un acte répréhensible, ce n'est pas après en avoir été témoin une ou deux fois seulement. Cela ne s'est pas passé pendant 15 minutes un mardi avant-midi. On l'a vu de façon répétée pendant des jours, des années. Cela a été extrêmement dur en milieu de travail. C'est normal qu'un fonctionnaire qui dénonce développe de l'amertume, de la frustration, de la colère. C'est possible que cela nuise au milieu de travail. C'est anormal que, sur la base d'une hypothèse sur le motif de ces émotions humaines profondes que peut avoir un fonctionnaire, on puisse avoir le droit de mettre les faits de côté.
C'est un projet de loi qui est constructif. Comme on le sait, je suis relativement nouveau parlementaire. Si j'ai décidé de déposer le projet de loi C‑290 comme mon premier projet de loi d'initiative parlementaire, c'est parce que je pense qu'il est important de déposer des projets de loi non partisans, des projets de loi qui visent l'intérêt du public. Il n'y a personne, ici à la Chambre, indépendamment de toutes les lignes partisanes, de toutes les lignes idéologiques, voire de toutes les lignes constitutionnelles qui nous démarquent, qui ne veut pas que les deniers de l'État soient bien gérés, que les biens de la Couronne, les biens du gouvernement fédéral, soient bien utilisés. Personne ici ne veut que le contribuable qui fait sa déclaration de revenus au mois d'avril ou au mois de mai n'ait pas confiance dans la machine de l'État.
Avant tout, si je dépose ce projet de loi, c'est par respect pour les milliers de professionnels qui dédient leur vie et consacrent leur carrière au service public, des gens qui y mettent du temps, de l'énergie et du cœur en tant que fonctionnaires. Ne pas mettre à jour la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, c'est empêcher ces personnes-là, dans des situations extrêmement importantes, de faire au mieux de leur capacité leur travail. Je pense que nos fonctionnaires méritent le projet de loi C‑290.
:
Madame la Présidente, je suis très heureux d'avoir cette chance de prendre la parole aujourd'hui dans le cadre du débat sur le projet de loi .
Tout d'abord, je tiens à remercier mon collègue le député de d'avoir présenté le projet de loi C‑290, qui est très bien rédigé. Ce travail a été très utile et très important. Je crois que tout le monde conviendra que les fonctionnaires qui divulguent des actes répréhensibles graves doivent être protégés.
[Traduction]
La question n'est pas de savoir si nous pouvons renforcer ces dispositions, mais comment. Le projet de loi contient des pistes de solutions, mais il pose aussi d'importants défis juridiques et opérationnels.
Aujourd'hui, je vais décrire ce qui a déjà été fait pour mieux protéger les divulgateurs, parler de l'examen complet de la loi actuelle qui arrive bientôt, et expliquer ce qu'il faut corriger dans le projet de loi pour qu'il puisse contribuer à concrétiser les changements favorables que souhaite mon collègue, j'en suis persuadé.
[Français]
La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles favorise une culture de travail fondée sur l'éthique et l'intégrité de la fonction publique fédérale. La loi sur la dénonciation du Canada est l'un des divers mécanismes de recours offerts aux fonctionnaires qui s'appliquent au harcèlement, à la discrimination, aux griefs en matière de travail et aux plaintes relatives à la protection de la vie privée.
[Traduction]
Le gouvernement a apporté des améliorations importantes au système. Nous avons amélioré les conseils relatifs au processus de divulgation interne.
[Français]
Nous avons multiplié les activités de sensibilisation et les formations destinées aux fonctionnaires, aux superviseurs et aux gestionnaires. Nous avons aussi amélioré les rapports sur le processus de divulgation interne et les actes répréhensibles fondés.
Le gouvernement a également mis en place un site Web central dans le cadre du portail du gouvernement. Il permettra aux Canadiennes et aux Canadiens d'accéder aux informations sur les actes répréhensibles fondés au sein des institutions fédérales. Dans la lettre de mandat qu'il a adressée à la présidente du Conseil du Trésor, le l'a chargée de tirer parti des progrès réalisés et de « [c]ontinuer à prendre des mesures pour améliorer les mesures de soutien et de protection offertes aux dénonciateurs du gouvernement ». Conformément à ce mandat, nous procéderons bientôt à un examen détaillé de la Loi dans le cadre duquel des recommandations seront formulées sur de possibles modifications à la Loi.
L'examen sera mené par un groupe de travail composé d'universitaires, d'experts et de représentants syndicaux. Leur travail tiendra compte des recherches et de l'expérience canadienne internationale, du rapport du Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires sur la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles ainsi que des débats et des témoignages sur le projet de loi C‑290.
[Traduction]
Notre but consiste à nous assurer que la loi protège efficacement les fonctionnaires et leur permet de dénoncer les actes répréhensibles et d'aider à renforcer la confiance des Canadiens dans l'intégrité de nos institutions publiques. Voilà ce qui fait la grande importance du projet de loi sont nous sommes saisis.
[Français]
Le projet de loi C‑290, dans sa forme actuelle, comporte un certain nombre de mesures positives. La loi portée par ce projet élargirait les protections pour couvrir davantage de fonctionnaires impliqués dans la divulgation d'actes répréhensibles. Elle porterait de 60 jours à un an le délai pour déposer une plainte pour représailles. Elle augmenterait les demandes pour les infractions aux différentes sections de la Loi. Elle permettrait au commissaire à l'intégrité du secteur public de divulguer les renseignements supplémentaires dans des circonstances précises. Elle exigerait aussi une révision de la Loi tous les cinq ans. Ces propositions sont importantes et valables.
L'honorable député qui a présenté ce projet de loi mérite toutes nos félicitations pour les efforts qu'il a investis dans la préparation de ce projet de loi.
Cela dit, le projet de loi soulève aussi des questions qui devront être examinées en comité afin que le projet de loi n'ait pas de répercussions juridiques et opérationnelles négatives. Il est important de noter que la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles vise à remédier aux manquements graves à l'éthique qui ne sont pas soumis aux mécanismes de recours en place. Elle ne vise pas à traiter tous les manquements à l'éthique ou à remplacer des mécanismes de recours existants applicables aux questions comme le harcèlement, la discrimination, les griefs en matière de travail et les plaintes relatives à la protection de la vie privée.
Ces autres mécanismes de recours comprennent ceux qui sont prévus par la Loi sur les relations de travail dans le secteur public fédéral, le Code canadien du travail, le Règlement canadien sur la santé et la sécurité au travail, le Règlement sur la prévention du harcèlement et de la violence dans le lieu de travail, la Loi canadienne sur les droits de la personne, la Loi sur la protection des renseignements personnels et le Code de conduite pour l'approvisionnement.
Par ailleurs, j'aimerais souligner que les dispositions du projet de loi C‑290 donneront lieu à un dédoublement et à un chevauchement importants en ce qui a trait à ces processus. Par exemple, prenons la proposition du projet de loi qui supprime le pouvoir du commissaire à l'intégrité du secteur public de refuser de traiter une plainte en matière de représailles qui pourrait être ou qui a été examinée en vertu d'une autre loi du Parlement. Ce changement pourrait entraîner l'utilisation de multiples processus pour les mêmes questions par divers organes administratifs ayant des mandats et des objectifs différents.
[Traduction]
Un tel chevauchement pourrait entraîner un gaspillage de ressources et conduire à des décisions incohérentes, à des recours différents et des règlements faisant double emploi. Je doute que le député ait pensé à ces conséquences.
À titre d'exemple, citons également la proposition du projet de loi d'inclure l'abus de pouvoir dans la définition des actes répréhensibles. Cela pourrait entraîner un chevauchement avec des plaintes concernant la dotation qui porteraient sur les mêmes allégations et qui seraient faites en vertu de la Loi sur l'emploi dans la fonction publique. Encore une fois, cela pourrait entraîner des instances parallèles, et plusieurs décisions pourraient être rendues sur la même question et se contredire.
Nous devons éviter d'introduire un chevauchement et une confusion inutiles dans le système actuel. Nous devons veiller à ne pas miner la valeur des griefs, qui constituent un outil important pour les syndicats dans le secteur public.
D'autres dispositions modifieront le degré de gravité des actes répréhensibles couverts par la loi, et les écarts de conduite les plus anodins seront susceptibles de faire l'objet d'un recours, ce qui engorgera le système et réduira son efficacité. Le projet de loi exige également que les cadres supérieurs apportent leur soutien à un fonctionnaire ayant participé à une divulgation, ce qui est contraire au principe de confidentialité.
[Français]
En intégrant des entrepreneurs en vertu de la loi, le projet de loi pourrait non seulement mener à la formation de relations d'emploi problématiques, mais aussi violer la compétence provinciale. C'est loin d'être l'intention de mon collègue du Bloc québécois, j'en suis certain.
Ce projet de loi enlève aussi au Tribunal de la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles le pouvoir discrétionnaire de décider s'il doit ajouter l'auteur présumé des représailles à titre de partie. Cela pourrait en fait exposer les dénonciateurs dans les cas où la personne ayant exercé les représailles ne sait pas qui est le plaignant.
Mon collègue a présenté un projet de loi très important. Le Parlement doit déterminer si les préoccupations opérationnelles que j'ai exposées aujourd'hui peuvent être abordées en comité ou s'il est préférable d'attendre que l'examen débouche sur des réformes plus complexes.
En conclusion, je tiens à remercier mon honorable collègue de du travail qu'il a accompli dans la préparation du projet de loi C‑290 et j'attends avec impatience les prochaines étapes du processus législatif.
:
Madame la Présidente, je remercie mon collègue de d'avoir présenté ce projet de loi.
[Traduction]
Ce projet de loi me tient beaucoup à cœur. En effet, j'ai été fonctionnaire pendant près de 15 ans à Affaires mondiales Canada, alors je connais assurément l'importance de ce projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Ce projet de loi, tel qu'il est présenté, viendrait modifier la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles dans le but de renforcer les mesures de protection et de soutien offertes aux dénonciateurs. La définition du terme « acte répréhensible » serait élargie, de même que ce que l'on entend par supérieur hiérarchique. Ainsi, les fonctionnaires pourront divulguer en toute sécurité tout acte répréhensible à n'importe quel supérieur hiérarchique au sein de l'organisation. C'est très intéressant parce qu'un directeur adjoint pourrait non seulement aller voir son directeur immédiat, mais aussi un directeur général, un sous-ministre adjoint ou même le sous-ministre. C'est un projet de loi très important.
Ce projet de loi élargirait la protection aux anciens fonctionnaires, aux titulaires de contrats du gouvernement et à toutes les personnes qui participent à la divulgation. J'estime qu'en tant qu'ancienne fonctionnaire, il est très important que je sois protégée en vertu de la loi si je suis appelée à témoigner dans le cadre d'une enquête. L'échéance pour déposer une plainte serait repoussée, passant de 60 jours à une année. C'est aussi très important. Comme vous le savez, la validation n'est pas toujours rapide. Parfois, les démarches sont longues. C'est donc très rassurant pour un grand nombre de fonctionnaires de savoir que la période de validité de la divulgation est six fois plus longue.
Le projet de loi élargirait les exigences en matière de rapport annuel pour inclure le nombre de divulgations d'actes répréhensibles, la durée de tous les dossiers ouverts et de tous les dossiers fermés au cours de l'exercice, la répartition des dossiers par région et la répartition des dossiers par ministère ou organisme fédéral. De ce côté-ci de la Chambre, nous aimons la transparence, alors plus les Canadiens obtiennent de la transparence grâce à ceux qui demandent des comptes à leurs collègues, mieux c'est.
Le projet de loi prévoit également des amendes en cas de représailles contre un dénonciateur, qui passeraient de 10 000 $ à 200 000 $ pour les actes criminels et de 5 000 $ à 100 000 $ pour les infractions punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Encore une fois, de ce côté-ci de la Chambre, nous sommes toujours très heureux que ceux qui ont été jugés négligents et qui ont commis des actes répréhensibles se fassent infliger une sanction plus sévère qu'une simple tape sur les doigts, comme nous l'avons vu, par exemple, lorsque l'ancien ministre des Finances n'a payé que 200 $ pour avoir omis de déclarer sa villa française. Nous nous réjouissons de voir que les amendes seraient alourdies.
Comme les députés le savent certainement, les dispositions de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles ont été mises en place dans le cadre du projet de loi fédérale sur la responsabilité, présenté le 11 avril 2006 par le président du Conseil du Trésor de l'époque, John Baird. Comme mes collègues l'ont mentionné, la première version de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles a été proposée sous le gouvernement de Stephen Harper en réponse au scandale libéral des commandites. D'autres scandales ont certainement eu lieu par la suite, mais c'est ce scandale en particulier qui s'était produit à l'époque, et c'est en réponse à ce scandale que cette loi a été proposée.
Je précise que le député d' a joué un rôle important dans l'examen de la loi mené par le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires, en 2017. Il a joué un rôle absolument essentiel, tout comme le regretté Michael Dagg, ainsi qu'Erin Weir. Nous leur sommes très reconnaissants pour l'évaluation qu'ils ont faite de la loi à l'époque.
Comme on l'a mentionné, on s'attendait à ce que le gouvernement mette en œuvre ces recommandations, mais aucune mesure n'a été prise jusqu'à présent, et cela ne semble pas être une priorité pour le gouvernement. Par conséquent, je ne blâme pas le député de d'avoir voulu agir de façon proactive en présentant ce projet de loi. Malheureusement, ce n'est pas le seul cas où le gouvernement a trop tardé à faire adopter d'importantes mesures législatives. Pendant la pandémie, en tant que ministre du cabinet fantôme en matière de transports, j'ai imploré le gouvernement de proposer un plan pour le secteur du transport aérien. Il a fait preuve de négligence en laissant les transporteurs aériens remonter la pente tout seuls.
En fait, au printemps et à l'été derniers, lorsque nous avons constaté que les retards avaient de graves répercussions sur les Canadiens, les libéraux n'en ont même pas assumé la responsabilité. Le a plutôt reproché aux Canadiens d'être encore en train d'apprendre à voyager alors que, dans les faits, c'était l'absence de plan du gouvernement et ses exigences relatives à la vaccination qui ont créé cette situation. C'était donc trop peu, trop tard.
Demain, l'énoncé économique de l'automne sera présenté. Ô surprise, récemment, la s'est mise à dire qu'il faudrait trouver un dollar d'économies pour chaque dollar de dépenses supplémentaires. Le chef conservateur avait bien de l'avance sur elle. Il a commencé à parler d'inflation il y a deux ans. Il a conseillé d'adopter un modèle de financement par répartition bien avant cette prise de position. D'ailleurs, il en a fait un engagement des conservateurs en vue des prochaines élections, peu importe quand elles auront lieu: sous un gouvernement conservateur, il n'y aura pas de nouvelles taxes et il faudra économiser un dollar pour chaque dollar de nouvelles dépenses.
Malheureusement, les libéraux ont aussi pris des mesures trop timides et trop tardives à l'égard des interprètes et du personnel de soutien afghans. Le 23 juillet 2021, les talibans ont déferlé sur l'Afghanistan et se sont rapprochés de Kaboul. Le ministre de l'Immigration, des Réfugiés et de la Citoyenneté de l'époque a annoncé la mise en place d'un programme d'immigration spécial visant à faire venir en toute sécurité dans notre pays les Afghans qui travaillaient directement avec le Canada ainsi que leurs familles. À l'époque, il avait déclaré: « Des vies sont en jeu. C’est pourquoi nous prenons des mesures rapides et décisives pour appuyer les Afghans qui ont aidé le Canada ». Un an plus tard, ces Afghans attendaient toujours désespérément les mesures rapides et décisives qui avaient été promises. Non seulement le ministre de l'Immigration n'a pas agi rapidement, mais il a mis fin aux mesures d'immigration spéciales après avoir reçu seulement 18 000 demandes.
Les passeports sont un autre exemple où le gouvernement a agi trop peu et trop tard, puisque des milliers de Canadiens se sont vus refuser des passeports. Nous avons entendu dans les médias ces récits d'horreur où des Canadiens devaient camper toute la nuit pour dormir devant les bureaux des passeports dans l'espoir d'obtenir leurs documents.
Le dernier problème, et non le moindre: le poste d'ombudsman des victimes d'actes criminels est demeuré vacant pendant près d'un an. Enfin, quelqu'un a été nommé en septembre dernier. Ce n'est pas la première fois que les libéraux se complaisent dans l'inaction et que les autres députés doivent s'occuper de présenter des projets de loi pour venir en aide aux Canadiens. C'est certainement encore le cas cette fois-ci.
Je souligne que, contrairement à ce que montre l'historique en matière de protection des divulgateurs des députés de ce côté-ci de la Chambre, le gouvernement libéral, lui, a été l'un des plus grands opposants aux divulgateurs. Tout le monde se souvient de ce qui est arrivé à Jody Wilson‑Raybould en août 2019. Le rapport a été publié hier et, pour la deuxième fois en à peine quatre ans, le commissaire à l'éthique est arrivé à la conclusion que le avait contrevenu à la Loi sur les conflits d'intérêts lors de son intervention dans le scandale de corruption de SNC‑Lavalin. Je cite:
Le premier ministre, directement et par l'entremise de ses hauts fonctionnaires, a employé divers moyens pour exercer une influence sur Mme Wilson-Raybould. La position d'autorité dont bénéficient le premier ministre et son Cabinet a servi à contourner, à miner et finalement à tenter de discréditer la décision de la directrice des poursuites pénales ainsi que l'autorité de Mme Wilson-Raybould en tant que première conseillère juridique de la Couronne.
Tout cela nous rappelle étrangement certaines choses qui se passent à la Chambre présentement.
Évidemment, tout le monde se souviendra de la tragédie vécue par le vice-amiral Mark Norman. La Couronne a décidé de suspendre les accusations d'abus de confiance à l'endroit du vice-amiral parce qu'elle ne voyait pas de probabilité raisonnable de condamnation dans cette affaire. Le ministre de la Défense avait annoncé que le gouvernement paierait les frais juridiques de M. Norman. C'est une bien mince consolation. M. Norman était vice-chef d'état-major de la Défense jusqu'à sa suspension en janvier 2017.
À l'époque, des preuves accablantes pointaient vers une ingérence politique du et du gouvernement libéral dans cette affaire en vue de détruire le vice-amiral Mark Norman. Comme l'a souligné la poursuite, les documents que le premier ministre et les libéraux voulaient absolument lui cacher et cacher au vice-amiral étaient les documents qui ont mené à la suspension des accusations. Cela suggère fortement que le gouvernement tentait délibérément de cacher des preuves afin de maintenir les poursuites bidon fondées sur ses intérêts politiques à l'endroit du vice-amiral Mark Norman.
En conclusion, j'ajouterai que le gouvernement a pris l'habitude, comme je l'ai mentionné, de faire trop peu trop tard. Il s'agit d'un autre cas où le gouvernement a cherché à faire taire un dénonciateur. De ce côté-ci de la Chambre, nous avons toujours défendu les dénonciateurs. Les lois le prouvent. Notre bilan le prouve.
:
Madame la Présidente, je suis ravi de me joindre au débat de ce soir sur le projet de loi , Loi modifiant la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, même si je dois malheureusement le faire par vidéoconférence.
En effet, j'ai dû revenir sur le territoire non cédé des Tseshaht et des Hupacasath et les terres ancestrales des Nuu-chah-nulth pour assister aux funérailles du chef des Tla-o-qui-aht, Muuchinink, également appelé Bruce Frank, qui est décédé soudainement dimanche dernier. Ce soir, je me déplacerai dans le Ha-Hoothlee, son territoire, pour me joindre à sa famille et à sa communauté. Je transmettrai les salutations de tous les députés, et j'exprimerai nos condoléances à son peuple. C'est une période bien triste pour les gens de nos collectivités et les Nuu-chah-nulth. C'était un grand homme qui aimait son peuple.
J'aimerais remercier le député de d'avoir présenté ce projet de loi et ainsi donné lieu à cette importante discussion. C'est un sujet très important, et je suis très reconnaissant de son travail dans ce dossier.
Lorsque le nouveau chef conservateur, le député de , était ministre au sein du gouvernement Harper, il a présenté un projet de loi, soutenant à répétition que celui-ci offrirait une « protection à toute épreuve » aux dénonciateurs au sein de la fonction publique fédérale. Or, 15 ans après son entrée en vigueur, force est de reconnaître que cette loi est un échec lamentable.
Je vais parler de David Hutton, un spécialiste de la protection des lanceurs d'alerte et agrégé supérieur de recherches au Centre pour la libre expression de l'Université métropolitaine de Toronto, qui a récemment écrit ce qui suit dans le Hill Times:
Après avoir étudié de près ce système au cours des 15 dernières années, j'en suis venu à croire qu'il n'a jamais été conçu pour protéger les lanceurs d'alerte. Il ne semble pas s'agir d'un accident regrettable résultant d'un système inefficace. En réalité, il fonctionne comme une arme offensive très efficace, finement réglée, contre les lanceurs d'alerte. Il les attire dans un piège, où leurs révélations d'actes répréhensibles sont ignorées et enterrées à jamais, où les promesses de protection qui leur ont été faites se révèlent fausses, et où leurs efforts pour obtenir justice les placent dans un labyrinthe sans fin de procédures truquées, coûteuses et finalement vaines.
En effet, au bout de 15 ans, les résultats du système canadien de protection des lanceurs d'alerte parlent d'eux-mêmes. Le commissaire à l'intégrité du secteur public n'a trouvé que 18 cas d'actes répréhensibles sur plus de 1 500 divulgations faites par des lanceurs d'alerte. Alors que 500 personnes ont déposé des plaintes de représailles, le tribunal mis en place pour traiter ces plaintes n'a jamais accordé de mesure de réparation.
Dans un autre article, David Hutton a écrit: « L'histoire ne se termine pas comme dans un conte de fées pour les lanceurs d'alerte, qui perdent presque toujours leur emploi, leur carrière et leur gagne-pain ».
Les lanceurs d'alerte ne sont pas les seuls à faire les frais de l'inefficacité de cette loi. Quand on permet à des actes répréhensibles et à des cas de mauvaise gestion de se produire impunément, tout le monde en fait les frais. C'est ce qui se produit constamment dans les processus d'approvisionnement, et les lanceurs d'alerte sont incapables de dénoncer la situation. Je vais donner un exemple, soit l'horrible système de paie Phénix. Il était censé permettre de réaliser des économies, mais, jusqu'à maintenant, il a entraîné des coûts imprévus d'au moins 2,4 milliards de dollars. Voilà un exemple de ce qui peut se produire lorsqu'il y a une culture de peur au sein de la fonction publique.
Ce problème a commencé sous les conservateurs, puis il a subsisté sous les libéraux fédéraux. C'est inacceptable. Cette culture de la peur se retrouve dans les conclusions du commissariat à l'intégrité du secteur public. En mars 2022, le commissariat a publié un rapport qu'il avait commandé, intitulé « Explorer la culture de dénonciation et la crainte de représailles au sein de la fonction publique fédérale ». Le rapport repose sur des groupes de discussion composés de membres issus de quelques ministères et il fait écho aux conclusions de sondages semblables menés en 2011 et en 2015. Ce dernier rapport a révélé que la crainte de représailles demeurait une préoccupation majeure au sein de la fonction publique.
Le rapport contient également d'autres conclusions préoccupantes: primo, la plupart des travailleurs et des gestionnaires interrogés ignoraient l'existence du commissariat; secundo, on fait preuve de plus en plus de désillusion et de cynisme à l'égard de la dénonciation; et, tertio, les efforts supplémentaires déployés pour soutenir la dénonciation, comme la sensibilisation et l'éducation, sont essentiellement considérés comme une façade plutôt qu'un changement réel. Nous pourrions dresser une longue liste.
Il est décevant de lire de telles conclusions en 2022. On sait depuis des années qu'il faut changer la façon de traiter les dénonciateurs. La loi existante comporte de graves lacunes, y compris une définition étroite de ce que sont les actes répréhensibles et l'accent qui est mis sur les procédures de traitement des allégations au lieu de la protection des dénonciateurs.
En 2017, le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires a présenté un rapport unanime qui recommandait de modifier en profondeur la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles. Ce rapport a été produit à la demande du Conseil du Trésor dans le but d'effectuer l'examen législatif obligatoire qui aurait dû être fait cinq ans plus tôt. Voilà un refrain qui nous est familier. Cinq ans se sont écoulés depuis, et le gouvernement n'a pas mis en œuvre les modifications législatives recommandées par le comité. D'ailleurs, le député de en a parlé plus tôt. Dans le dernier budget fédéral, le gouvernement a plutôt choisi de prévoir une enveloppe de 2,4 millions de dollars sur cinq ans pour que le Secrétariat du Conseil du Trésor lance un nouvel examen de la Loi.
C'est une bonne chose que le gouvernement fédéral reconnaisse enfin la nécessité d'une réforme législative, mais je me demande s'il y a une véritable volonté politique d'aller de l'avant et d'apporter de vrais changements ou s'il s'agit simplement d'un exercice pour sauver la face. Comme l'a dit le député de , le gouvernement n'a même pas commencé à agir avant vendredi, juste au moment où on allait débattre de ce projet de loi.
Cela me rappelle la façon dont le gouvernement agit soudainement lorsque des projets de loi d'initiative parlementaire sont présentés, comme mon projet de loi sur l'usage de substances. Le gouvernement n'a rien fait pour répondre à la demande de la Colombie‑Britannique, qui souhaitait que les personnes prises en possession d'une petite quantité de substances ne fassent pas l'objet d'accusations criminelles. Le gouvernement a annoncé que l'exemption serait accordée à la Colombie‑Britannique la veille du vote sur mon projet de loi. C'est du déjà-vu. J'ai constaté que les choses se passent souvent ainsi.
Pour revenir au projet de loi, ce qui a mené au plus récent examen de la loi, c'est probablement une analyse réalisée en 2021 par l'Association internationale du barreau, qui a comparé des pays dotés de lois sur la protection des divulgateurs, et qui a classé le Canada au dernier rang, à égalité avec d'autres pays. C'est une honte sur la scène internationale. C'est une question de transparence et de confiance, et il est évident qu'il faut agir. Or, en septembre, le Canada n'a pas envoyé de représentants à une réunion de l'Organisation internationale du Travail pour discuter de la protection des divulgateurs dans le secteur public. Pourtant, cette rencontre aurait sûrement permis au gouvernement de recueillir de précieux renseignements pour orienter son nouvel examen. Cela aurait pu lui être fort utile.
Encore une fois, je suis heureux que le député de ait présenté ce projet de loi, qui met en lumière les lacunes des dispositions législatives actuelles, et qui, je l'espère, nous poussera à apporter des changements grandement nécessaires. Mon bureau a consulté des syndicats du secteur public au sujet du projet de loi. De façon générale, ils estiment qu'il s'agit d'un pas dans la bonne direction, mais que d'autres changements seront nécessaires pour que l'on puisse vraiment protéger les divulgateurs et la population canadienne.
Le projet de loi ne donne pas suite à toutes les recommandations formulées par le Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires en 2017. Toutefois, il propose des améliorations considérables qu'il convient de souligner.
Le projet de loi élargirait les mesures de protection à plus de personnes, dont les entrepreneurs et les anciens employés, et couvrirait plus de types d'actes répréhensibles, y compris l'ingérence politique. Je crois que le projet de loi a du mérite et qu'il devrait être renvoyé au comité où les députés pourront entendre les travailleurs de la fonction publique et les experts, et voir s'il y a lieu d'apporter des amendements susceptibles d'offrir une plus grande protection aux dénonciateurs.
Je tiens à souligner que, selon moi, le nouvel examen de la loi par le Conseil du Trésor ne devrait pas nous empêcher de procéder à des améliorations dès maintenant. On ne sait pas exactement quand cet examen sera terminé, mais il est clair que le régime canadien de protection des dénonciateurs est défaillant et qu'il a désespérément besoin d'être réformé pour protéger les courageux travailleurs de la fonction publique et le public canadien qui divulguent des actes répréhensibles.
En 2015, les libéraux ont promis que leur gouvernement serait caractérisé par la transparence, mais cette promesse a pris le bord, tout comme ce fut le cas des conservateurs. Étant donné la succession de scandales qui ont éclaboussé le gouvernement, je doute que celui-ci soit véritablement motivé à améliorer les mesures de protection offertes aux dénonciateurs qui pourraient faire la lumière sur les actes répréhensibles du gouvernement ou la mauvaise gestion des deniers publics.
En conclusion, je remercie le député de d'avoir présenté le projet de loi à l'étude. Je suis impatient d'en débattre plus longuement.
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Madame la Présidente, tout pays qui se respecte se doit d'avoir des moyens à sa disposition pour s'assurer que les deniers publics sont utilisés à bon escient, ne sont pas détournés, ne servent pas au copinage ni à toute autre malveillance.
Après le scandale des commandites, le gouvernement de Stephen Harper a mis en place une loi permettant de protéger les fonctionnaires divulgateurs d'information. Il faut se rappeler que la découverte du scandale des commandites n'a été possible que grâce à un divulgateur qu'on a appelé « MaChouette ». Il a fallu se battre en justice pour que l'identité de cette personne demeure secrète. Rappelons-le, car c'est important.
Sans cette personne, il est fort probable que le scandale des commandites n'aurait jamais été connu du public. Ces commandites et ce programme auraient possiblement encore lieu aujourd'hui. Nous avons appris, grâce à cette personne et à la commission Gomery, que ce sont 250 millions de dollars qui ont été engloutis par le scandale des commandites. À combien s'élèverait ce montant si « MaChouette » n'avait pas parlé? Ce serait énorme, et c'est l'argent des contribuables.
Pour encourager les fonctionnaires témoins de pratiques qui laissent à désirer au sein de l'appareil gouvernemental, une loi fut promulguée pour les protéger. Les protège-t-elle vraiment? La réponse est non, et c'est parce que cette loi contient des lacunes que mon collègue le député de a déposé le projet de loi .
Je ferai donc un rappel des objectifs de la loi, une courte liste des raisons et des démonstrations prouvant que la loi est quasi inopérante, et une brève explication des corrections qu'apporte le projet de loi C‑290.
La Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d'actes répréhensibles a deux objectifs: protéger les fonctionnaires qui dénoncent les actes répréhensibles dans la gestion de l'État et mettre en place un processus d'enquête sur ces actes répréhensibles afin de contribuer à y mettre fin.
J'aimerais être très claire. La vaste majorité des fonctionnaires sont fondamentalement honnêtes. Il ne faut qu'une seule personne ayant des pratiques douteuses pour que ce soit l'ensemble des fonctionnaires qui voient leur réputation être traînée dans la boue. Si une telle personne existe, il faut la trouver et la dénoncer. C'est l'ensemble de l'État qui subit les conséquences d'une mauvaise réputation.
Les fonctionnaires sont conscients de tout cela. Il y a néanmoins des gens dans notre société, comme dans n'importe quelle autre société, qui ont peu à faire de ces considérations et qui se sentent peut-être intouchables ou indétectables. Ces gens, heureusement une infime minorité parmi les centaines de milliers de fonctionnaires que nous avons, n'ont aucun scrupule à détourner l'argent durement gagné des contribuables, et ce, pour leur propre profit ou pour ce qu'ils pensent être ce qu'il y a de mieux.
Le système très hiérarchisé — j'oserais dire l'omerta — et la compétition faisaient en sorte et font probablement encore en sorte que des fonctionnaires honnêtes se taisent, malgré le fait qu'ils savent qu'un collègue ou un supérieur enfreint les limites éthiques, voire légales. Ils se taisaient et se taisent encore par crainte de représailles. S'ils dénoncent, ils subiront des pressions. Certains craignent ces pressions au point de tomber malades ou d'être obligés de démissionner. Ce sont des exemples que j'ai malheureusement déjà entendus de la part d'anciens fonctionnaires maintenant partis à la retraite qui ont voulu améliorer quelque chose et dénoncer une situation, et qui ont vécu la pression dont je viens de parler.
La loi de 2007 était donc nécessaire pour protéger les gens qui travaillent pour l'ensemble de la population, mais il fallait également la rédiger de manière à ce que les milieux de travail ne deviennent pas des milieux où tout un chacun soupçonne l'autre de malversation. Il ne fallait pas créer des milieux toxiques. Il fallait créer des milieux collaboratifs et faire sentir que, si quelque chose n'allait pas, quelqu'un allait agir. Cependant, à vouloir trop protéger l'équilibre, la loi est devenue inopérable.
Lorsque j'étais enseignante et qu'il fallait mettre en place un règlement, l'une des premières questions que je me posais était de savoir si celui-ci était applicable. Je pouvais avoir les meilleures intentions du monde, mais si je n'étais pas capable d'appliquer le règlement ou les conséquences, les élèves n'étaient pas fous et s'en rendaient bien compte à un moment donné. Ils trouvaient les failles et se faufilaient. C'est la même chose au sein de l'appareil étatique. La Loi est comme cela. On a mis une loi en place sans être capable de bien l'appliquer, sans bien faire sentir que, s'il y a un problème, les conséquences suivront. C'est ce qui manque.
Je vais donner un exemple pour démontrer ce que je viens d'avancer. En 15 ans, le Commissariat à l'intégrité du secteur public n'a officiellement traité que 8 cas et aucun de ces cas n'a mené à la protection d'un divulgateur ou à une enquête sur l'acte répréhensible.
Ajoutons à cela que l'Association internationale du barreau a compilé une cinquantaine de lois portant sur la protection des dénonciateurs. Elle a fait un classement des pays protégeant le mieux les divulgateurs. Sur une liste de 20 élément à cocher, le Canada en a coché un seul, c'est-à-dire le fait d'avoir une loi. C'est tout. Le Canada a obtenu 1 sur 20. Le Botswana, le Rwanda, le Bangladesh, le Pakistan et d'autres sont meilleurs que nous. En fait, il faudrait s'inspirer des meilleures pratiques, comme celles de l'Union européenne, de l'Australie ou des États‑Unis.
Comme mes collègues l'ont aussi mentionné, le Comité permanent aux opérations gouvernementales et aux prévisions budgétaires a publié un rapport en 2017, sauf erreur, et les recommandations de ce rapport n'ont pas été suivies. On attend toujours. C'est ce que le projet de loi de mon collègue prévoit faire. Il permettra à ce rapport de prendre vie et, surtout, il permettra de réellement protéger les fonctionnaires qui voient des choses répréhensibles.
Le projet de loi veut donner du mordant à la Loi. Pour ce faire, il propose une série de mesures correctrices. Je ne présenterai pas toute la liste. Quand j'étudie un projet de loi, je prends la loi originale et le projet de loi, et je souligne tout ce qui est différent, tout ce qui est amélioré, tout ce qui est enlevé et tout ce qui est ajouté. Cela prend des heures et je ne ferai pas subir cela à mes collègues. J'ai seulement dix minutes. Je vais donc essayer d'être brève.
D'abord, le projet de loi permet d'élargir la définition d'actes répréhensibles. Par exemple, dans la Loi originale, il était question de cas grave de malversation. Qu'est-ce que « grave » veut dire? C'est un peu flou, parce que cela peut changer d'une personne à l'autre. Par exemple, pour moi, voler un œuf, c'est voler un bœuf. Cela veut dire que, peu importe la malversation qui est faite, qu'elle soit considérée comme petite ou grande, c'est une malversation. C'est grave pour moi. Or, la Loi ne précisait pas ce que le mot « grave » voulait exactement dire. Le mot « grave » sera donc enlevé. Si on voit une malversation, c'en est une et on gère la situation. Il n'y a pas de petites ou de grandes malversations. Je ne sais pas si tout le monde pense comme moi, mais j'espère que oui.
On ajoute également la notion d'ingérence politique. Ensuite, il y a une incongruité, parce que, dans le cas d'un événement majeur, le ministère doit enquêter sur lui-même selon la Loi actuelle. Le projet de loi va modifier cela. Je trouve que c'est une incongruité, parce que si une personne dans la société de nos jours fait un acte répréhensible, ce n'est pas elle qui enquêtera sur son propre acte. C'est la police qui va le faire. On demande au ministère d'enquêter sur lui-même. J'ai un peu de difficulté avec cela. Le projet de loi corrige cela.
En conclusion, pour rétablir la confiance de la population envers l'État et ses fonctionnaires, cet État et ces fonctionnaires doivent être exemplaires. Pour qu'ils le soient, il faut que les gens qui y travaillent se sentent eux-mêmes suffisamment en confiance pour dénoncer tout acte qu'ils jugent répréhensible et qu'il y ait de vraies conséquences, une vraie suite à ces dénonciations, pas seulement pour les fonctionnaires, mais aussi pour les contractuels et les anciens fonctionnaires qui se sont parfois tus très longtemps.