:
Monsieur le Président, je suis heureux d'amorcer le débat à l'étape de la troisième lecture sur le projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation.
[Français]
Tout d'abord, j'aimerais remercier mes collègues de tous les partis de la Chambre qui ont apporté leur soutien et qui ont exprimé leurs commentaires et leurs préoccupations au sujet de ce projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. Nous avons entendu leurs commentaires.
Beaucoup de ces commentaires ont été repris en comité et des amendements ont été adoptés. À cet égard, j'aimerais également remercier tous les membres du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord pour leur étude approfondie du projet de loi . Au cours du dernier mois et demi, pendant les sept réunions du Comité consacrées à ce projet de loi, 32 témoins ont livré leur témoignage.
[Traduction]
J'aimerais saluer tous les témoins qui ont pris le temps de présenter leurs points de vue et de répondre aux questions du comité. Chaque témoignage a été d'une importance cruciale et nous a permis d'apporter d'importants amendements pour renforcer le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui.
Sur les conseils du comité de transition, le 22 juin 2022, nous avons présenté le projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation.
L'étude du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord a été exhaustive. Soulignons d'ailleurs une fois de plus que 32 témoins ont comparu devant le comité, dont des représentants d'organismes, de conseils et de gouvernements autochtones territoriaux, provinciaux et nationaux, une ancienne commissaire de la Commission de vérité et réconciliation, des fonctionnaires fédéraux du ministère des Relations Couronne-Autochtones et des Affaires du Nord ainsi que de Justice Canada, de même que quatre membres du comité de transition du conseil national de réconciliation.
Lors de leur comparution, beaucoup de témoins ont fait des suggestions concrètes pour renforcer cette mesure législative.
[Français]
Bon nombre de ces amendements sont maintenant contenus dans la version du projet de loi qui est présentée au Parlement aujourd'hui. Je peux dire que ces amendements sont conformes aux objectifs juridiques et politiques généraux du projet de loi , qu'ils ne soulèvent pas de risques juridiques et qu'ils n'ont pas d'incidence financière immédiate.
Je vais expliquer certaines des principales modifications que nous avons apportées ensemble.
Tout d'abord, nous avons apporté plusieurs modifications afin que le conseil favorise l'inclusion et la diversité. Une chose que nous avons entendue à maintes reprises dans le cadre de notre engagement auprès des peuples et des organisations autochtones, et encore une fois lors de l'étude du projet de loi par le Comité, c'est l'importance d'avoir un conseil d'administration représentatif des réalités des peuples autochtones au Canada.
Le projet de loi initial prévoyait que le conseil d'administration devait comprendre entre 9 et 13 personnes, dont les deux tiers seraient Autochtones. Il prévoyait également l'inclusion de personnes issues des groupes suivants: Premières Nations, Inuits et Métis, ainsi que d'autres peuples du Canada; les organisations autochtones, y compris un représentant de l'Assemblée des Premières Nations, de l'Inuit Tapiriit Kanatami et du Ralliement national des Métis; des jeunes, des femmes, des hommes et des personnes de genres divers; et des gens provenant de diverses régions du Canada, notamment des régions urbaines, rurales et éloignées.
Au cours du processus de comité, nous avons travaillé avec des partenaires et des membres du Comité pour accroître la diversité du conseil. Nous devions garantir la participation de voix supplémentaires, notamment de personnes originaires des territoires, des aînés et, de façon très importante, des survivants des pensionnats et d'autres politiques discriminatoires, et leurs descendants.
[Traduction]
Il y avait également un amendement visant à obliger le conseil d'administration à assurer et à refléter une diversité des genres. L'équilibre entre les sexes est essentiel afin de respecter les droits des femmes et de progresser sur les enjeux auxquels sont confrontées les femmes et les personnes ayant diverses identités de genre. L'ajout de l'Association des femmes autochtones du Canada à la liste des organismes autochtones nationaux garantit que les voix des femmes seront centrées et qu'une attention sera accordée aux appels à la justice de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées.
Bien que le projet de loi garantisse déjà une représentation régionale, il fallait en faire davantage pour assurer que l'on tienne compte de la perspective des habitants du Nord, étant donné que les peuples autochtones représentent un pourcentage élevé des populations territoriales. Le projet de loi amandé prévoit qu'au moins deux des membres du conseil d'administration doivent être originaires du Nord. C'est une bonne évolution.
Les aînés sont des figures centrales de l'ensemble des cultures, des communautés et des organismes autochtones. C'est pourquoi un amendement a été apporté pour garantir que les aînés soient inclus dans la composition du conseil.
Enfin, la réconciliation ne peut se faire sans que puissent se faire entendre les survivants des pensionnats indiens et d'autres politiques discriminatoires ainsi que de leurs familles. Cette philosophie qui a imprégné le travail de la Commission de vérité et réconciliation devait se refléter dans la composition du conseil. C'est pourquoi nous avons apporté un amendement afin de garantir leur participation.
Quand je suis allé à Winnipeg, plus tôt ce mois-ci, j'ai eu l'occasion de parler avec des survivants, des aînés et de nombreux Autochtones à la cérémonie d'inauguration des travaux du Centre national pour la vérité et la réconciliation. Les personnes que j'ai écoutées m'ont rappelé l'importance faire connaître la vérité à tous les Canadiens au sujet des pensionnats autochtones. Le conseil et le Canada gagneront à découvrir la perspective de personnes aux opinions et aux expériences variées. Je suis sincèrement convaincu que c'est ce que nous avons accompli avec le projet de loi, et je remercie la Chambre.
[Français]
Ces amendements ont été proposés sur les conseils des membres des partis de l'opposition, des membres du Comité et des peuples autochtones eux-mêmes. Dans l'ensemble, ces amendements garantiraient que la diversité régionale, de genre et culturelle soit reflétée dans la composition du conseil.
Nous avons ajouté au projet de loi des dispositions clés sur le respect, la protection et la valorisation des langues autochtones. Notre objectif est de soutenir la participation de tous les peuples autochtones aux travaux du conseil et la revitalisation des langues autochtones.
Cette mesure est conforme à l'engagement du gouvernement de mettre pleinement en œuvre la Loi sur les langues autochtones afin de préserver, promouvoir et revitaliser les langues autochtones au Canada. Elle contribue à la mise en œuvre de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
La protection et la promotion des droits des Autochtones, y compris les droits linguistiques autochtones, font partie de la réconciliation. Il s'agit donc d'un prolongement naturel du mandat du conseil.
[Traduction]
Comme je l'ai mentionné plus tôt, le conseil national de réconciliation offrirait un cadre pour faire progresser la réconciliation au Canada. L'inclusion de résultats mesurables aidera le conseil, car ils démontreront les progrès réalisés. Pour qu'il soit le plus efficace possible dans sa façon de faire progresser la réconciliation, nous avons précisé ses attributions principales en lui permettant de définir les résultats mesurables et de surveiller, en vue d'en faire rapport, les progrès réalisés à cet égard.
Accorder cette responsabilité au conseil renforce son autonomie et ses pouvoirs afin qu'il choisisse les meilleurs indicateurs pour mesurer les progrès en matière de réconciliation. Préserver l'autonomie du conseil est une grande priorité. Le gouvernement considère son indépendance comme un principe fondamental.
Pour protéger l'autonomie et les pouvoirs du conseil, nous avons modifié le processus de sélection du premier conseil d'administration. Les administrateurs seront choisis conjointement par le comité de transition et le ministre des Relations Couronne-Autochtones afin d'enlever une partie des pouvoirs accordés au poste que je m'occupe en ce moment.
Cette modification accroît l'indépendance du conseil en renforçant le rôle du comité de transition, qui est dirigé par des Autochtones. Elle contribue aussi à garantir que le processus de sélection du premier conseil d'administration est ouvert et équitable.
Tout en renforçant les rôles et les responsabilités du conseil, nous devons également faire en sorte qu'il ait accès aux renseignements dont il a besoin pour effectuer son travail. Même avec les amendements que nous avons proposés, je reconnais que ce projet de loi n'est pas parfait. J'aimerais souligner un argument qui a été soulevé lors de l'étude de ce projet de loi au comité: il sera possible de consulter davantage les communautés autochtones et les Canadiens après la création du conseil, au fur et à mesure qu'il élaborera son plan d'action et qu'il définira ses objectifs.
[Français]
Tout au long de l'élaboration de ce projet de loi, notre gouvernement a veillé à ce que les membres des communautés autochtones et les dirigeants politiques aient la possibilité d'exprimer leur point de vue sur la création du conseil. Cependant, la Commission de vérité et réconciliation a clairement indiqué dans son rapport final que la réconciliation ne concerne pas seulement les peuples autochtones, mais tous les Canadiens.
Souvent, la responsabilité d'éduquer les gens comme moi incombe aux peuples autochtones, mais cela ne devrait pas être le cas. Il y a encore beaucoup de travail à faire et d'ignorance à combattre. La réconciliation est une chose à laquelle tous les habitants du Canada, y compris tous les ordres de gouvernement et tous les secteurs du pays, doivent prendre part. Il ne s'agit pas seulement des peuples autochtones ou du gouvernement fédéral, il s'agit de nous tous.
Pendant l'étude du projet de loi par le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord, l'un des membres du Comité transitoire pour le Conseil national de réconciliation, M. Michael DeGagné, l'a formulé ainsi: « [...] la réconciliation n'est pas un processus politique. Certes, la politique a un rôle à jouer, mais ce n'est pas uniquement un processus politique. C'est une façon d'engager les Autochtones et les non-Autochtones au Canada dans un dialogue sur la bonne façon d'aller de l'avant. »
C'est ce que ce conseil vise à accomplir. Il ouvrira des voies de communication et mettra en relation différents secteurs de la société. Il formulera des critiques et proposera des recommandations d'amélioration. Il demandera des comptes à notre gouvernement et aux gouvernements futurs et il fera en sorte que le dialogue sur la réconciliation se poursuive.
[Traduction]
Quatre ans se sont écoulés depuis la publication du rapport final du conseil intérimaire, et huit ans, depuis celle du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, avec les 94 appels à l'action correspondants. La création d'un conseil national de réconciliation est attendue depuis longtemps, mais nous espérons qu'elle aura lieu maintenant grâce à ce projet de loi.
:
Monsieur le Président, je commencerai par reconnaître que le Parlement du Canada est situé sur le territoire traditionnel non cédé du peuple algonquin anishinabe. Je voudrais poursuivre le débat à l'étape de la troisième lecture sur le projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation.
La réconciliation n'a rien de nouveau en tant qu'idée ou que processus. C'est quelque chose qui fait activement son chemin au pays depuis 50 ans: en 1982, par des changements visant à reconnaître et à affirmer les droits des autochtones dans la Constitution; en 1996, avec le rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones; et en 2015, avec les appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation du Canada.
Aujourd'hui, après un examen minutieux à l'étape de la deuxième lecture et l'étude approfondie du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord, nous envisageons la création d'un conseil national de réconciliation en réponse aux appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
Bien que le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord ait apporté des modifications importantes au projet de loi, celui-ci, dans son essence, reste sensiblement le même. Le projet de loi établirait le conseil national de réconciliation en tant qu'organisme de surveillance permanent, indépendant, apolitique et dirigé par des Autochtones chargé d'observer et d'évaluer les progrès du Canada en matière de réconciliation ainsi que d'en rendre compte. Ce n'est pas rien.
Le projet de loi répond aux appels à l'action nos 53 à 56 et il donne suite à l'engagement du gouvernement du Canada à accélérer la mise en œuvre des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
Bon nombre de mes collègues sont au courant des origines de ce projet de loi, mais j'aimerais en donner un aperçu.
Depuis la publication du rapport final de la Commission de vérité et réconciliation, le gouvernement a répondu aux appels à l'action en déployant des efforts de réconciliation. Nous nous sommes engagés à mettre en œuvre la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones. Nous avons désigné la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation. Cette année, nous avons vu le pape présenter des excuses historiques à des membres d'une communauté autochtone qui sont des survivants des pensionnats autochtones.
Ce sont des efforts complémentaires à ceux qui sont déployés sur le terrain. De nombreuses initiatives encourageantes sont mises en œuvre partout au Canada et dans de nombreux secteurs, mais il n'y a pas de surveillance ni de reddition de comptes sur ces activités à l'échelle nationale.
Comme on l'a indiqué lors de l'étude en comité, jusqu'à présent, il n'y a pas de mécanisme en place pour mettre en commun les pratiques exemplaires et entamer un dialogue de manière à ce que l'on puisse célébrer les progrès réalisés tout en recommandant des améliorations. Il n'y a pas de processus de surveillance officiel à l'égard des efforts de réconciliation au sein des différents pouvoirs publics et des diverses tranches de la société canadienne. Il est absolument essentiel d'exercer ce genre de surveillance pour réaliser des progrès et obtenir des résultats fructueux et durables. C'est exactement ce que ferait le conseil national de réconciliation.
Selon la vision de la Commission de vérité et réconciliation, un conseil national de réconciliation dirigé par des autochtones, apolitique, indépendant et permanent constituerait une structure permettant de surveiller et d'évaluer les efforts de réconciliation, ainsi que d'en rendre compte.
C'est ce que prévoient quatre de ses appels à l'action, c'est-à-dire les nos 53 et 54, qui réclament la création au moyen d'une loi d'un conseil national de réconciliation doté d'un financement, ainsi que les nos 55 et 56, qui précisent les attentes, pour le conseil, envers divers ordres de gouvernement en matière de communication de données et de renseignements, ainsi que de production de rapports sur les progrès réalisés.
Depuis que la Commission de vérité et réconciliation a publié les appels à l'action, nous travaillons avec des partenaires, des dirigeants et des communautés autochtones pour élaborer ce projet de loi. Nous nous sommes efforcés de respecter les principes énoncés par la Commission. Le fait de garder les voix et les survivants autochtones au cœur de notre travail constitue un élément clé de ce projet de loi.
Le conseil intérimaire et le comité de transition ont joué un rôle structurant et prépondérant dans le processus de création d'un conseil national de réconciliation. Ces deux organismes indépendants étaient composés de membres des Premières Nations, d'Inuits et de Métis, qui ont donné leur avis sur la voie à suivre, en tenant compte d'un large éventail de voix et de perspectives diverses.
Je vais prendre quelques minutes pour tracer les grandes lignes du processus que nous avons utilisé pour élaborer le projet de loi et des consultations qui ont été effectuées à chaque étape.
Il y a cinq ans, nous avons démarré le processus d’établissement du conseil en créant un conseil d’administration provisoire. Le conseil d’administration était composé de six dirigeants autochtones représentant les Premières Nations, les Inuits et les Métis, dont l’ancien commissaire de la Commission de vérité et réconciliation, M. Wilton Littlechild.
Le conseil d’administration provisoire avait pour mandat de formuler des recommandations sur la création d’un conseil national de réconciliation. À cette fin, le conseil provisoire s’est engagé auprès de membres de la collectivité, d’universitaires, de professionnels du monde des affaires, des arts et de la santé, et auprès d’autres parties intéressées, afin de recueillir leurs commentaires.
En 2018, le conseil provisoire a présenté son rapport final à la , qui contenait 20 recommandations précises sur le nom, la vision, la mission, le mandat, la structure, la composition, le financement et les rapports du conseil national de réconciliation et la législation censée l’encadrer. Les recommandations du conseil provisoire ont servi de base au projet de loi.
Pour poursuivre le processus, en décembre 2021, le comité transitoire a été nommé. Il a accompli jusqu’ici un travail important en organisant des discussions sur les fonctions du conseil national, en définissant les étapes clés et les échéances, et en proposant une approche de consultation. Le comité transitoire a également examiné, en se fondant sur les recommandations du conseil d’administration provisoire, un projet de cadre législatif élaboré par le ministère de la Justice. Il a tenu des consultations préliminaires sur le cadre avec des partenaires autochtones et des spécialistes non autochtones, notamment des avocats et des spécialistes des données, des finances et de la réconciliation. Il a également recueilli des commentaires et des conseils sur des sujets tels que la réconciliation, le droit, les données, les finances organisationnelles, l’échange de renseignements, la gouvernance et la responsabilité.
En mars 2022, le comité a remis ses recommandations sur la manière de renforcer le projet de cadre législatif. Le comité a également suggéré de présenter le projet de loi le plus rapidement possible, en insistant sur les souhaits des survivants, qui veulent voir le conseil national devenir une réalité de leur vivant. Cet automne, le projet de loi a franchi l’étape de la deuxième lecture et a été renvoyé, le 6 octobre, au Comité permanent des affaires autochtones et du Nord de la Chambre des communes, ce qui nous amène à aujourd’hui.
J'invite les députés à adopter le projet de loi sans tarder. Les députés le savent, il s'agit d'un enjeu qui me passionne. Il faut en faire plus pour mettre en œuvre les appels à l'action et favoriser la réconciliation. J'entends faire tout en mon pouvoir pour m'assurer que le conseil a tout le soutien nécessaire pour faire le suivi de la mise en œuvre des appels à l'action. J'espère que les pouvoirs publics dans l'ensemble du pays s'engageront, comme nous, à collaborer avec le conseil.
Alors que nous débattons du projet de loi à l'étape de la troisième lecture, il ne faut pas oublier l'objectif ultime que vise réellement cette mesure législative, soit favoriser la réconciliation au pays. J'invite mes collègues à réfléchir à des façons de soutenir le conseil une fois qu'il sera créé et à des façons d'établir des liens entre le conseil et des initiatives ou des membres de leur collectivité.
Favoriser la réconciliation doit se faire de concert avec les peuples autochtones partout au pays. La réconciliation n'est pas un processus linéaire et elle n'est pas facile à accomplir, mais, dans le cadre de notre travail, nous chercherons toujours à réaliser des progrès et à corriger les lacunes existantes. Ce sont les objectifs du projet de loi .
:
Monsieur le Président, nous débattons aujourd'hui de la réconciliation entre la Couronne et les Premières Nations. J'aimerais me concentrer sur le concept de la réconciliation économique.
Le Canada est un pays riche: riche en ressources naturelles, en ressources humaines, en percées technologiques et industrielles, et en beaucoup d'autres paramètres que les économistes utilisent pour mesurer la richesse des nations. Malheureusement, toutefois, cette richesse ne bénéficie pas à tous, ce qui est injuste.
Pour être clair, je ne suis pas ici pour promouvoir les plans fiscaux malavisés du gouvernement en matière de redistribution de la richesse. Je songe par exemple à la taxe sur le carbone, que le gouvernement tente de faire passer pour un plan environnemental, ou encore à l'accent qu'il met sur la classe moyenne et ceux qui cherchent à en faire partie, malgré des politiques fiscales qui excluent les gens de la classe moyenne. Je ne parle pas de ses politiques malavisées en matière de logement, qui sont apparemment conçues pour que les gens achètent des maisons, même si elles excluent du marché immobilier les acheteurs d'une première maison et que le rêve d'accéder à la propriété s'envole pour bien des jeunes familles. Je parle de la création de richesse.
Après avoir quitté le gouvernement et n'étant plus tenus aux notes d'allocution du Parti libéral, M. Bill Morneau, l'ancien ministre des Finances, avait attiré l'attention sur ce qui est évident pour nombre d'entre nous dans cette enceinte: le problème avec le gouvernement actuel, c'est qu'il est beaucoup trop axé sur la redistribution de la richesse et qu'il n'accorde pas assez d'importance à la création de la richesse. Je suis d'accord. C'est une évidence pour moi et beaucoup d'autres personnes à la Chambre des communes.
Le meilleur moyen pour un pays de créer de la richesse est de faire en sorte que tous ses habitants travaillent, qu'ils mettent à profit leurs compétences, qu'ils participent aux échanges commerciaux et qu'ils jouissent de la dignité que le travail procure. Quand un pays veille à son propre intérêt économique, c'est toute sa population qui s'enrichit.
Adam Smith n'a pas inventé ce concept il y a 250 ans. En effet, c'est un concept ancien et, pour le prouver, j'aimerais vous citer le roi Salomon, un vieux sage, qui avait ceci à dire il y a des milliers d'années à propos de la dignité que le travail procure: « Il n’y a de bonheur pour l’homme qu’à manger et à boire, et à faire jouir son âme du bien-être, au milieu de son travail. » C'est ce dont j'aimerais parler aujourd'hui dans le débat sur la réconciliation. Tout être humain devrait avoir la chance de profiter du fruit de son labeur.
Cela m'amène au sujet d'aujourd'hui, à savoir la création d'un conseil national de réconciliation, comme le demande, dans son rapport de 2015, la Commission de vérité et réconciliation établie par le gouvernement conservateur précédent. Nous avons créé cette commission afin de nous attaquer aux enjeux de société persistants et profondément ancrés qui nuisent à notre développement en tant que nation et qui découlent des politiques gouvernementales mal conçues des décennies précédentes. Ces politiques ont échoué. En effet, séparer les enfants de leurs familles est une très mauvaise politique publique dont font encore les frais un grand nombre de gens. C'est une honte pour notre pays. Comment y remédier?
Je me suis entretenu avec de nombreux habitants de ma collectivité, Langley, et plus précisément de Fort Langley, qui sont des survivants des pensionnats. L'annonce faite à Kamloops il y a quelques années a ravivé des souvenirs. Leurs souvenirs sont encore frais, leur douleur bien réelle et leur colère bout sous la surface. Ce qui est triste, c'est que cette nouvelle n'est est pas une. Nous sommes au courant depuis longtemps. En fait, six des 94 appels à l'action du rapport de la Commission de vérité et réconciliation font référence aux tombes anonymes sous le titre « Enfants disparus et renseignements sur l'inhumation ». Le rapport date d'il y a sept ans et les progrès accomplis sont insuffisants. Il est maintenant temps d'agir.
Nous débattons aujourd'hui du projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation. C'est un pas dans la bonne direction. Le conseil sera chargé de surveiller et d’évaluer les progrès réalisés par le gouvernement en matière de réconciliation, suite aux excuses qu'il a présentées.
Je crois que, des deux côtés de la Chambre, nous sommes d'accord pour dire qu'il faut corriger les politiques malavisées du passé et indemniser ceux qui en ont souffert, mais nous ne sommes pas tous d'accord sur la façon de procéder. Les libéraux aiment faire des annonces et se vanter de la quantité d'argent qu'ils versent pour des programmes. Les conservateurs, en revanche, veulent prendre des mesures. Nous voulons que tout le monde puisse travailler. Nous voulons éliminer les obstacles à la pleine participation des communautés autochtones de tous les secteurs de la société.
C'est pourquoi les membres conservateurs du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord ont présenté une motion en vue d'amender le projet de loi pour y inclure le concept de réconciliation économique. Fait inexplicable, les membres des autres partis ont voté contre cette proposition. J'espère que nous pourrons les amener à changer d'idée pendant le débat d'aujourd'hui, car il n'y a pas de réconciliation sans réconciliation économique.
Nous avons un excellent exemple, en Colombie-Britannique, de la forme que peut prendre la réconciliation économique. Le projet de gaz naturel liquéfié de Coastal GasLink, qui est sous réglementation provinciale, créera un lien entre les champs de gaz naturel très riches du Nord de la Colombie-Britannique et l'usine de traitement de LNG Canada, située sur la côte à Kitimat. Le tracé du pipeline traverse 20 communautés des Premières Nations, qui profiteront toutes de retombées financières grâce à ce projet.
Dans le cadre du projet, des ententes sur les retombées ont été conclues avec les 20 nations. D'autres ententes permettront aux nations d'acheter une participation de 10 % dans la société. De nombreux contrats ont aussi été conclus avec des sous-traitants, des fournisseurs de services et des entreprises locales autochtones. Il y a également du financement pour la formation professionnelle. Tout cela rapportera des avantages économiques à long terme aux communautés des Premières Nations. Voilà à quoi ressemble la réconciliation.
Pour finir, j'aimerais donner un exemple concret de ce à quoi ressemble la réconciliation économique pour les membres des Premières Nations. Pour ce faire, je vais lire le témoignage livré par M. Ellis Ross, membre de l'Assemblée législative de la Colombie‑Britannique et membre des Premières Nations, lorsqu'il a comparu devant le comité des affaires autochtones et du Nord le mois dernier, car j'estime qu'il cerne parfaitement le problème. M. Ross a dit:
Un certain nombre de dirigeants autochtones sont convaincus que la réconciliation économique non seulement profite aux Premières Nations, mais aussi, bien sûr, aux provinces et au pays. La preuve est faite.
Dans ma communauté, par exemple, la réconciliation économique à laquelle nous avons participé a [...] fait de nous l'une des bandes les plus riches de la Colombie‑Britannique [...]
Il a poursuivi en disant:
[...] les jeunes Autochtones obtiennent eux-mêmes des hypothèques sans dépendre des Affaires indiennes ou de leur conseil de bande. Ils partent en vacances. Ils planifient l'avenir de leurs enfants.
Voici ce que M. Ross avait à dire au sujet des tentatives des gouvernements précédents de réparer les torts causés:
Eh bien, mesdames et messieurs du gouvernement, vous ne le pouvez pas; si vous pouviez régler le problème, cela aurait été fait il y a bien longtemps. Si vous voulez faire quelque chose, faites‑le en partenariat avec les Premières Nations pour que leurs conseils de bande — et, surtout, leurs membres — soient indépendants.
M. Ross a terminé en lançant l'invitation suivante, qui, je crois, est ouverte à tous les députés que cela pourrait intéresser. Il a dit:
Si vous voulez un exemple, venez dans mon village, Kitamaat Village, en Colombie-Britannique.
Pour résumer, la société canadienne a fait beaucoup d'erreurs par le passé. Nous pouvons apprendre de nos erreurs, mais nous pouvons aussi apprendre de nos réussites, et il y a beaucoup de réussites. Il ne s'agit que d'un exemple. Tirons-en des leçons. Allons de l'avant avec les communautés autochtones et la réconciliation.
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Monsieur le Président, comme toujours, c'est un honneur de prendre la parole en cette enceinte et de représenter les gens de Desnethé-Missinippi-Rivière Churchill, et aujourd'hui, alors que je parle du projet de loi et de la création d'un conseil national de réconciliation, je soutiens qu'il s'agit de la suite d'un cheminement auquel tous les Canadiens doivent prendre part tandis que nous créons un avenir meilleur.
Lors d'une intervention précédente, en septembre, j'ai clairement indiqué qu'il était important d'adopter une approche consensuelle pour améliorer le projet de loi. Initialement, le projet de loi méritait que l'on fasse un examen responsable des points à améliorer, et je dois admettre que, comme on l'a abondamment souligné aujourd'hui, c'est le travail qui a été accompli en comité avec le concours de tous les députés qui en sont membres.
À l'étape de la deuxième lecture, j'ai signalé quelques problèmes qui, selon moi, devaient être réglés. J'ai parlé de la transparence et de l'indépendance du processus de sélection du conseil d'administration. J'ai parlé de certains mots qui semblaient délibérément vagues pour éviter toute responsabilité. J'ai parlé de l'absence de résultats mesurables. J'ai parlé du fait qu'il a fallu plus de trois ans pour présenter le projet de loi à la Chambre. Enfin, j'ai dit que c'était le qui devrait répondre au rapport annuel du conseil, puisque c'était l'orientation de l'appel à l'action no 56.
En réponse à ces préoccupations et aux témoignages, nous avons présenté des amendements raisonnables pour améliorer le projet de loi , et je suis très fier aujourd'hui d'annoncer que 17 des 19 amendements proposés ont été adoptés au comité. C'est le travail de l'opposition officielle d'améliorer les mesures législatives et de les rendre vraiment représentatives de tous les points de vue, et c'est exactement ce que nous avons fait à ce comité.
Je dois cependant admettre que je suis un peu déçu aujourd'hui de constater que le gouvernement, et plus particulièrement le , n'a pas voulu reconnaître la volonté démocratique du comité des affaires autochtones et du Nord concernant l'amendement visant à ajouter un siège pour le Congrès des peuples autochtones. Il s'agit d'une organisation autochtone nationale qui représente plus de 800 000 Autochtones en milieu urbain.
Une deuxième préoccupation que j'ai à la suite des discussions en comité, c'est que nous avons proposé un amendement que tous les autres partis ont malheureusement rejeté. C'est ce dont je veux parler pendant quelques minutes.
Comme bon nombre de mes collègues l'ont indiqué aujourd'hui, nous avons présenté un amendement afin d'ajouter un siège au conseil d'administration pour un membre d'une organisation autochtone qui se concentre sur la réconciliation économique. Les possibilités sont nombreuses. Qu'il s'agisse du Conseil de gestion financière des Premières Nations, de l'Association nationale des sociétés autochtones de financement ou du Conseil canadien pour l'entreprise autochtone, bon nombre d'organisations font de l'excellent travail dans ce domaine, si bien qu'il aurait été très facile de trouver une organisation bien établie qui a démontré sa compétence. Il n'aurait pas été difficile d'y trouver quelqu'un à nommer à ce conseil.
Il faut dire qu'en rejetant cet amendement, on a fait fi de l'avis de nombreux témoins qui se sont clairement dits favorables à l'inclusion d'un point de vue économique au sein de ce conseil d'administration. Nous n'avons pas demandé à ce que ce soit l'unique point de vue à considérer, mais à ce qu'on inclue cet aspect parmi tant d'autres. Ne pas tenir compte de ces points de vue décrédibilise le processus de réconciliation.
Au cours des dernières années, j'ai vu des députés libéraux et néo-démocrates cuisiner les dirigeants autochtones qui ont témoigné devant le Comité permanent des affaires autochtones et du Nord pour défendre la réconciliation économique. Souvent, je me demande pourquoi. Pourquoi le seul fait d'en discuter suscite-t-il une telle aversion? Il y a quelque chose qui cloche. Qu'est-ce qui ne leur plaît pas dans l'idée de permettre aux Autochtones d'être les maîtres de leur destinée? Qu'est-ce qui ne leur plaît pas dans l'idée de créer une communauté saine, forte et dynamique par l'entremise de la prospérité? Qu'est-ce qui ne leur plaît pas dans l'idée d'utiliser des revenus autonomes tirés de véritables partenariats qui ciblent des problèmes sociaux de longue date? Qu'est-ce qui ne leur plaît pas dans l'idée de se débarrasser de l'emprise destructrice de la pauvreté pour offrir de l'espoir et des débouchés aux générations futures?
Tristement, la réponse est qu'ils s'intéressent davantage au pouvoir politique et au contrôle. En imposant leurs propres points de vue au lieu d'écouter des voix autochtones, ils créent les mêmes conditions dans lesquelles les Autochtones vivent dans notre pays depuis beaucoup trop longtemps.
Il est temps de changer fondamentalement d'approche. En fait, pour ceux qui écoutent avec attention, le changement a déjà été amorcé sur le terrain. La réconciliation économique joue un rôle primordial dans la discussion globale. Je vais d'abord raconter quelques histoires de ma propre circonscription dans le Nord de la Saskatchewan.
Lorsque je suis retourné dans ma circonscription en septembre dernier pour célébrer la Journée nationale de la vérité et de la réconciliation, j'ai passé du temps avec la bande Pelican Lake et son chef, Peter Bill. À notre arrivée dans la communauté, j'ai été accueilli par le chef Bill, un agent de la GRC et deux des agents de sécurité communautaires de Pelican Lake. Étant donné que les services de police des Premières Nations étaient un enjeu très important le lendemain de la tragédie survenue dans la nation crie de James Smith, j'ai demandé comment allait leur nouveau programme des agents de sécurité communautaire. Le chef Bill était ravi de m'apprendre que la communauté avait maintenant six employés à temps plein et ses propres véhicules entièrement équipés, et qu'elle était en train d'embaucher plus d'agents. Quant à l'agent de la GRC, il m'a expliqué comment ce programme avait contribué à assurer la sécurité de la communauté.
Comment la bande Pelican Lake a-t‑elle financé ce programme des agents de sécurité communautaire? Elle a utilisé ses revenus autonomes. Elle a investi ses profits pour contribuer à la santé et à la sécurité générales de ses membres, au lieu d'attendre des années que les ministériels et les fonctionnaires dressent des plans, se rencontrent, établissent des cadres, procèdent à des évaluations des avantages et à des études de faisabilité, ou profitent de la signature de protocoles d'entente pour faire des séances de photo.
Plus tard ce jour-là, j'ai visité la Première Nation de Flying Dust. Après les discours officiels, tout le monde est sorti de la salle pour participer à une marche de solidarité avec des survivants des pensionnats. Lors de cette marche, quand je regardais d'un côté, je pouvais voir une patinoire qui avait été construite il y a quelques années, puis, juste à côté, il y avait le tout nouveau magasin d'articles de sport et centre d'entraînement de 6 000 pieds carrés appelé Snipe and Celly Sports Excellence. Quand je regardais de l'autre côté, je pouvais voir sur le bord de la route la toute nouvelle station-service de Petro-Canada.
Il s'agissait d'un rappel visuel de ce que mon ami le vice-chef Richard Derocher avait évoqué plus tôt dans son discours en parlant de façon positive de la réconciliation. Il nous avait fait part de son souhait que les gens qui visitent ou traversent nos communautés soient incapables de se rendre compte qu'ils quittaient la Première Nation de Flying Dust pour entrer à Meadow Lake, ou l'inverse. Comment peut-on y parvenir? En créant de la richesse grâce au développement économique, ce qui est une fière tradition de la Première Nation de Flying Dust et du Conseil tribal de Meadow Lake.
Dans le Nord de la Saskatchewan, il y a de nombreux exemples de ces histoires de réussite. Qu'il s'agisse du groupe de développement du bassin d'Athabasca, du groupe Des Nedhe d'English River, de Pinehouse Business North, du Kirsaki Management Limited Partnership du Lac la Ronge, du Sakitawak Development Corporation du village métis d'Île-à-la-Crosse ou du groupe d'entreprises Peter Ballantyne, chacun rehausse la prospérité et la capacité en fondant des entreprises et en créant des débouchés. Ces débouchés offrent aux membres de leurs communautés des emplois et un sentiment de fierté.
Il s'agit de groupes sur le terrain qui ont déjà entrepris le changement. Leur approche est la nouvelle voie à suivre. Ce sont leurs histoires, ainsi que beaucoup d'autres initiatives, que le conseil national de réconciliation devrait inclure dans ses rapports et qu'il devrait faire connaître aux Canadiens.
Les conservateurs sont souvent décrits comme des gens qui ne s'intéressent qu'à l'économie. C'est peut-être notre faute, puisque nous n'expliquons pas pourquoi. J'essaierai donc de le faire ici. L'un des agents de sécurité communautaires de Pelican Lake dont j'ai parlé s'appelle Dalton. J'ai eu le privilège d'être son entraîneur quand il jouait dans l'équipe de hockey midget AA de Meadow Lake. C'était un défenseur robuste et fiable, qui comprenait bien son rôle. Il ne ratait jamais un entraînement ni une partie. C'était un joueur que tout entraîneur aurait adoré avoir dans son équipe.
Dalton a d'abord décidé de mettre toutes ses qualités au service d'une carrière de mécanicien de centrale électrique, son premier choix. Son père et sa mère approuvaient son choix et il aurait pu choisir plusieurs endroits où travailler plus tard, mais il a ressenti le besoin de revenir à Pelican Lake. Il a eu l'occasion de revenir chez lui, de suivre une formation d'agent de sécurité communautaire, d'être l'un des piliers de sa communauté et un agent de changement, et de servir d'exemple aux jeunes de la génération suivante.
C'est avec une énorme fierté que je voyais de jeunes enfants s'approcher d'un Dalton en uniforme et lui demander s'il avait d'autres tatouages. Ils étaient à l'aise avec lui, ils se sentaient en sécurité. Ce jeune homme de qualité est un leader de sa communauté parce qu'il a eu l'occasion de le devenir. Voilà notre pourquoi; voilà ce qu'apporte la réconciliation économique.
Les conservateurs croient en la réconciliation économique et l'encouragent parce que c'est ainsi qu'on éradique la pauvreté et les maux sociaux qu'elle provoque. En reprenant les choses en main, les Autochtones pourront commencer à gérer la prospérité au lieu de la pauvreté et ils pourront prendre des mesures concrètes vers la guérison grâce à l'autodétermination.
En conclusion, je suis fier, du travail de notre équipe, qui a réussi à améliorer le libellé du projet de loi par rapport à ce qu'il était lors de sa présentation à la Chambre, en juin dernier. Bon nombre des préoccupations soulevées à l'étape de la deuxième lecture ont été réglées et le projet de loi s'en trouve amélioré. C'est ainsi que nous passons de la parole aux actes.
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Monsieur le Président, en tant que porte-parole en matière d'affaires autochtones et du Nord pour ma formation politique, je suis heureuse et fière de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi . Quand on est porte-parole en matière d'affaires autochtones et du Nord, il faut une humilité et un certain recul. C'est certainement la même chose pour chacun des dossiers, mais j'aime le mentionner.
Je prends la parole en fonction de tout ce que j'ai entendu de la part des témoins en comité et de la part des gens avec qui j'ai eu des conversations au sujet du projet de loi C‑29. C'est un projet de loi que les Autochtones, soit les Premières Nations, les Inuits et les Métis, ont à cœur. Je veux donc en parler avec tout le respect possible, comme je l'ai fait lors des travaux du comité avec mes collègues qui sont ici aujourd'hui.
J'ai une pensée particulière pour les Premières Nations qui sont sur le territoire de la Côte-Nord, c'est-à-dire les nations innue et nakaspie, que je salue au passage. Elles savent que je souhaite faire mon travail humblement en ayant toujours en tête ce qu'elles veulent. Même s'il arrive parfois que les individus et les familles des Premières Nations ne veuillent pas tous exactement la même chose, il y a un consensus, et c'est ce vers quoi nous essayions d'orienter les travaux lors de l'étude de ce projet de loi en comité.
Cela dit, je vais diviser mon discours en plusieurs petites étapes ou plusieurs sujets différents. Ce sont des sujets que nous avons abordés en comité et qui, selon moi, ressortaient vraiment.
Le conseil qui serait créé par le projet de loi aurait pour objectif de surveiller les progrès et l'avancement des travaux faits dans le cadre de la vérité et de la réconciliation. J'aimerais tout d'abord aborder un élément qui a été soulevé par plusieurs témoins lors du comité relativement au mot « réconcilation ». Il y a quelques minutes, certains de mes collègues ont pris la parole et ont essayé d'apposer des adjectifs au mot « réconciliation ». On a essayé de le sectoriser et de dire que cela ne doit pas être ceci ou cela.
Je dois dire que, avant tout cela, plusieurs Autochtones et membres des communautés autochtones ont dit ne pas être d'accord avec le mot « réconciliation ». Quand on y pense un tant soit peu, on constate que ce mot suppose à la base qu'il y a une conciliation et une union, qu'il y a quelque chose qui est déjà créé. Or on nous dit qu'il n'y avait rien au départ, qu'il n'y avait pas de « nous ».
Lorsqu'on parle de réconciliation, on part déjà avec un faux terme et ce terme, je dois le mentionner, n'est même pas défini. Nous travaillons sur un projet de loi au sujet de la vérité et de la réconciliation, mais le mot « réconciliation » n'est même pas accepté, car on considère que c'est un terme qui n'est pas juste et qui, en plus, n'a même pas été défini. En tant que législateurs, quand nous étudions un projet de loi, nous devons aussi partir de là. Au tout début, avant même de commencer, il y a déjà une pierre d'achoppement, une difficulté, et nous devons en tenir compte tout au long de notre travail. J'ai parlé du mot « réconciliation ». Cela semble vraiment simple, mais il s'agit du principe premier.
J'aimerais me diriger vers un autre sujet, soit la consultation.
J'ai été surprise d'apprendre que les Innus et les Naskapis de ma circonscription et les membres d'autres communautés ailleurs n'avaient aucune idée que des consultations avaient eu lieu pour ce projet de loi. Ils n'étaient même pas au courant que cela existait. Lors du comité, nous avons appris que seulement quelques communautés avaient été consultées. Selon les informations dont je dispose et selon ma perception, qui n'est pas forcément la vérité, j'ai l'impression qu'on a finalement un peu improvisé pour ce qui est des consultations. Évidemment, peu de gens auraient pu être consultés, mais on aurait pu consulter de façon systématique l'ensemble des communautés pour avoir un meilleur portrait. Cela aurait permis d'éviter que les seules personnes consultées soient celles qui sont plus informées que d'autres ou qui ont un réseau de contacts qui leur permet d'être plus au fait de ce qui se passe.
C'est également ce qu'on a noté au comité. Je vais revenir plus loin à la question de la représentativité, car c'est vraiment un point que je trouve très important dans le projet de loi. Lorsqu'on consulte, je ne dirai pas qu'on le fait en catimini, mais ce n'est pas tout le monde qui est consulté. C'est vraiment une toute petite portion de gens. Ensuite, ce n'est pas nécessairement représentatif de ce que les Premières Nations, les Inuits, les Métis souhaitent voir dans le projet de loi. Pour moi, c'était un souci, à ce moment-là. C'était également une alerte pour voir ce qu'on amenait plus loin dans le projet de loi, comme la question de la représentation.
Je pourrais aborder cette question tout de suite. Je me sens à l'aise de sauter deux ou trois points auxquels je reviendrai plus tard, parce que c'est tout à fait en lien avec la question de la représentativité.
Dans le projet de loi, on crée un conseil d'administration. Il y a eu un comité probatoire et un comité transitoire, puis il va y avoir un conseil d'administration où des postes sont attribués à différentes entités, nommément des organisations nationales qui représentent les Autochtones. On a souhaité en comité ouvrir cette représentation, on voulait savoir pourquoi il y avait seulement trois organisations dans le projet de loi, alors qu'il y en a cinq qui représentent les Autochtones sur le plan national. Pour nous, cela posait problème. Je souhaitais savoir pourquoi trois, alors qu'il en existe cinq. En l'absence de réponse — non pas satisfaisante, mais de réponse tout court —, on souhaitait que ces groupes-là soient inclus.
Des gens venaient témoigner et disaient qu'ils ne se sentaient pas représentés par telle ou telle organisation et que c'était plutôt telle autre organisation qui les représentait.
Il y a par exemple l'Association des femmes autochtones du Canada. La moitié de la population autochtone est composée de femmes ou de personnes avec une identité de genre féminin. On devait également les représenter. Elles n'en faisaient pas partie. On revient souvent à la question des femmes autochtones disparues et assassinées, on parle présentement de toute la question de la violence, y compris la violence sexuelle, mais on ne les retrouvait pas non plus dans le projet de loi.
En toute bonne conscience, par souci d'équité et de représentativité, je dois dire que c'était un des travaux que le comité a faits. Cela s'est fait en équipe. Tout à l'heure, j'ai entendu des interventions selon lesquelles les gens étaient braqués, mais on a eu vraiment des discussions très intéressantes, entre autres avec mon collègue de . On a eu vraiment des discussions. C'est vraiment ce qu'on notait.
Il y a aussi d'autres groupes qui n'étaient pas représentés. Bien que je ne sois pas moi-même autochtone — je suis blanche —, je côtoie des gens, j'ai des amis, j'ai quand même une certaine connaissance, une ouverture également qui fait en sorte que j'ai pu m'abreuver à la culture autochtone, notamment l'innu-aimun l'nnu-aitun chez moi.
Je donne l'exemple des aînés. Quand on pense à la réconciliation, aux pensionnats autochtones, les aînés n'étaient pas représentés de facto dans le projet de loi. C'est la première question que je me suis posée. Je n'en suis pas demeurée là. J'ai consulté des gens. On a également questionné des témoins à savoir si c'était un intérêt de pouvoir ajouter justement les aînés dans le projet de loi, ou plutôt les survivants. Ils nous ont dit qu'on parlait des aînés, mais qu'il fallait dire les survivants des pratiques et des politiques colonialistes. C'est ce qui a été fait également dans le projet de loi.
Je parle des aînés. J'ai parlé des femmes aussi. Bref, c'était de faire en sorte que la composition du conseil ne se résume pas à certains groupes qui avaient été désignés par le ministre lui-même au début.
Cela va me permettre de faire le lien avec un point duquel n'ai pas encore parlé, mais duquel j'aimerais parler: l'indépendance. Il ne s'agit pas de l'indépendance du Québec. Je parle de l'indépendance du conseil. L'indépendance est importante pour nous.
Bien sûr, il faut qu'un travail commence à se faire et nous comprenons que le ministre intervienne, puisque c'est son projet de loi. Nous voulons bien sûr qu'il amorce le travail, mais nous souhaitions également que le conseil devienne à un certain moment autonome et indépendant et que les membres soient nommés par les personnes qui composent le conseil d'administration transitoire. C'est ce que nous souhaitions et nous avons discuté afin que le comité soit plus indépendant. Le mot « indépendant » était d'ailleurs un maître-mot durant nos discussions.
Le mot « transparent » était lui aussi un maître-mot. Mon collègue du Parti conservateur a fait une proposition très intéressante, à laquelle le Bloc québécois est tout à fait favorable, car nous considérons que les nations sont des nations en elles-mêmes. Les chefs sont des chefs de nations et ils devraient donc pouvoir s'adresser à leurs vis-à-vis des gouvernements, que ce soit celui du Québec ou du Canada.
Nous souhaitions que le premier ministre lui-même ait l'obligation de répondre au rapport qui sera déposé par le conseil chaque année. Pour la majorité d'entre nous, c'était vraiment d'une importance majeure. On nous parle de rapports de nation à nation, mais le rapport de nation à nation nécessite et exige que le premier ministre lui-même soit tenu de répondre à ce que lui demande le conseil.
Alors que nous sommes à la fin du processus, je crois que l'opposition, notamment, a renforcé le projet de loi sur le plan de la représentativité en permettant à plus de personnes autochtones et à plus de groupes autochtones de différents horizons d'amener leurs propres couleurs au sein du conseil.
On parlait tout à l'heure de réconciliation économique. Oui, les conservateurs en parlent, mais certains groupes autochtones en parlent aussi. Il faut aborder la réconciliation sous tous ses angles. Bref, il peut y avoir des comités sectoriels qui seront formés à ce moment-là et ce sera tout simplement la responsabilité du conseil en lui-même. Je crois vraiment que nous avons amélioré le projet de loi du point de vue de la transparence, de l'indépendance et de la représentativité.
J'aimerais vraiment qu'on garde en tête cette idée que tout peut être amélioré. Je souhaite que la voix des Autochtones soit entendue par le truchement de ce nouveau mécanisme, qui aura quand même une force importante parce qu'il pourra surveiller les avancements du gouvernement.
On entend souvent parler de la question de la symbolique. Cela a d'ailleurs été abordé au cours des discours précédents. La plupart du temps, on a eu l'impression que les gestes posés envers les Autochtones étaient surtout symboliques. Je dis « on » parce que je m'exclus moi-même, mais je pourrais m'inclure aussi.
C'étaient des gestes qui pouvaient coûter de l'argent, mais qui ne coûtaient pas au gouvernement, qui ne lui faisaient pas mal et qui ne l'amenaient pas à poser des gestes plus importants et plus délicats. Même si on admet qu'on a des torts, il faut quand même les réparer. La posture de contrition n'est pas suffisante.
Tout ce que je souhaite dire, c'est que nous espérons justement que d'autres gestes seront posés. Nous espérons que cela sera pris à bras le corps par les Autochtones eux-mêmes. On parle de rapports de nation à nation, mais, en même temps, on parle de « par les Autochtones, pour les Autochtones ». Ce sont eux qui seront mesure de faire des évaluations, de tirer des conclusions et de faire des recommandations. C'est ce qui permettra d'aller au-delà de cette symbolique, qui donne peut-être une relative auréole de gloire temporaire au gouvernement, mais qui ne change pratiquement rien dans la vie quotidienne des Autochtones. Cela a peut-être un effet sur ceux qui sont près, mais pas sur ceux qui sont loin.
J'inviterais l'ensemble des députés de la Chambre à venir visiter ma circonscription. À Kawawachikamach, à Matimekush‑Lac John ou à Unamen Shipu, on est loin des statues et des fêtes. Je suis tout à fait d'accord qu'il faut célébrer les cultures autochtones, mais ces dernières rencontrent d'autres difficultés. J'ai utilisé le mot « difficultés », mais il s'agit d'une litote, car ces communautés vivent en fait des problèmes majeurs qui doivent être réglés. Le conseil pourra bien entendu en parler.
En terminant, j'aimerais m'adresser encore une fois à des gens de chez nous pour montrer à quel point, même si c'est tout simple, les témoignages et le fait qu'on consulte, et pas seulement de façon superficielle, aident à améliorer des projets de loi.
Je pense par exemple à Mme Marjolaine Tshernish, de l'Institut Tshakapesh, un organisme qui promeut la culture innue dans l'ensemble du Québec, mais également au Labrador, parce qu'il y a des communautés innues au Labrador. Elle me faisait remarquer que cela avait été difficile pour elle. Elle craignait pour la suite des choses, par exemple pour le conseil. En effet, pour certains, l'innu est la première langue, mais, pour plusieurs à d'autres endroits, la première langue peut être le français ou l'anglais. Elle disait qu'elle n'avait même pas encore cette information et qu'elle craignait de ne pas l'avoir. L'innu est sa langue. Le français est une autre langue qu'elle parle, mais elle ne parle pas anglais. Elle disait vouloir s'assurer qu'il y aurait une présence francophone au sein du conseil.
J'ai également travaillé pour qu'on puisse assurer une présence francophone au sein du conseil. En matière de représentativité, cela représente pour moi un gros gain. On dira que c'est parce que je suis du Bloc québécois que j'ai pensé à la question française ou francophone. Or ce n'est même pas le cas. Je dois dire bien humblement que cela ne vient pas de moi. Ce sont vraiment les gens de l'Institut Tsakapesh qui me l'ont fait remarquer. Bref, c'est grâce à eux qu'on réussit à modifier le projet de loi. C'est une chose qui — j'ai fait amende honorable, n'y ayant pas pensé moi-même — aurait pu être apportée par des consultations auprès des gens et des communautés dont la langue première, sinon la langue seconde, est le français.
J'aimerais terminer en évoquant le langage coloré d'un chef innu, M. Piétacho, d'Ekuanitshit sur la Côte‑Nord. M. Piétacho est chef depuis plus d'une trentaine d'années. J'ai apprécié sa rapidité d'esprit lorsqu'il a comparu en comité. Cela nous arrive à tous d'avoir de petites difficultés techniques en comité. Bref, il n'avait pas enlevé le mode sourdine et, aussitôt qu'il a pris la parole, notre président a dit à M. Piétacho qu'il pouvait maintenant parler. Chef Piétacho a répondu au président que cela faisait 500 ans qu'il était en sourdine, de ne pas s'inquiéter, qu'il allait parler.
J'espère que ce conseil permettra à tous les Autochtones de parler et que cela permettra au gouvernement de répondre et d'agir concrètement.
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Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec la députée de .
Je suis honorée de prendre la parole aujourd'hui à l'appui du projet de loi , Loi portant sur un conseil national de réconciliation. Nous ne serions pas ici aujourd'hui sans les histoires des survivants qui nous ont confié leur vécu pour que les gens de partout au Canada puissent apprendre la vérité au sujet du passé du Canada, apprendre que ce qui s'est passé dans les pensionnats était un acte de génocide, comme l'a reconnu la Chambre à l'unanimité en octobre. En effet, la Chambre a reconnu que les actes perpétrés contre les enfants dans ces établissements étaient génocidaires. Ainsi, on ne peut plus remettre en question les mauvais traitements et les violations épouvantables des droits de la personne qu'ont subis les survivants. Je tiens à dire que j'en suis très reconnaissante. Chaque jour, je soulève les survivants, les descendants et les communautés. Ne perdons pas cela de vue tandis que nous débattons ce projet de loi.
Nous ne devons pas perdre cela de vue. Les voix des survivants doivent tracer la voie à suivre, et non pas les organisations et les fonctionnaires. Il faut se fier aux survivants, à leurs descendants et aux aînés. Je suis heureuse que ce fait se reflète dans le projet de loi, mais j'espère que ce sera aussi le cas du débat à la Chambre. Nous ne devons pas oublier que nous ne serions pas en train de débattre de cette mesure législative aujourd'hui si des survivants n'avaient pas courageusement raconté leurs histoires. Nous ne devons pas le perdre de vue. Leurs voix ne doivent jamais être reléguées au second plan parce qu'elles nous ont permis de discuter de la façon d'accéder à une véritable justice tout en ciblant les injustices dont les Autochtones sont toujours victimes.
Les progrès sont lents, et c'est l'une des raisons pour lesquelles je suis vivement en faveur de la mise en œuvre de l'appel à l'action no 53 de la Commission de vérité et réconciliation, qui prévoit la mise sur pied d'un conseil national de réconciliation au moyen de dispositions législatives fédérales. L'appel à l'action no 53 demande au gouvernement d'établir le conseil en tant qu'« organisme de surveillance indépendant de portée nationale » qui surveillera et évaluera les progrès réalisés en matière de réconciliation et qui présentera un rapport à ce sujet au Parlement.
Les mécanismes de responsabilisation que pourrait fournir le conseil sont cruciaux, car nous savons qu'en l'absence d'une responsabilisation suffisante, les progrès de la mise en œuvre des appels à l'action ont été d'une lenteur inacceptable. Depuis que les appels à l'action ont été publiés en 2015, seulement environ 13 des 94 appels ont été mis en œuvre. Pour un gouvernement qui a défini à plusieurs reprises la réconciliation et la nouvelle relation avec les peuples autochtones comme une priorité absolue, ce n'est tout simplement pas suffisant. Si ce projet de loi avait été présenté il y a sept ans, on peut se demander si nous serions plus avancés dans la mise en œuvre de tous les appels à l'action.
Quoi qu'il en soit, le fait que nous soyons proches de l'adoption de ce projet de loi constitue un important pas en avant. Il est essentiel d'inscrire cette loi dans le droit canadien. Le fait que ce conseil agisse comme un chien de garde pour assurer l'avancement de la réconciliation s'avère crucial et il rendra plus difficile pour le gouvernement et pour l'ensemble des députés de perdre de vue la mise en œuvre des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
Cependant, voici la réalité: le suivi ne suffit pas. Il faut que le gouvernement fasse le travail et investisse massivement dans des mesures concrètes de réconciliation, et il y a encore tellement de travail à faire. J'ai souvent dit que nous ne pouvons pas avoir de véritable réconciliation en l'absence de justice. Or, partout au pays, des Autochtones sont privés de justice chaque jour, de manière douloureuse et humiliante.
Nous sommes aux prises avec une crise du logement qui n'est rien de moins qu'alarmante. Selon les données du recensement de 2021, un Autochtone sur six vit dans un logement surpeuplé qui n'est pas assez grand pour le nombre de personnes qui y vivent. Pour mettre les choses en perspective, cela veut dire que les Autochtones sont près de deux fois plus susceptibles que les non-Autochtones de vivre dans un logement surpeuplé. C'est une honte.
Je reconnais que le budget de 2022 prévoit de nouveaux investissements dans le logement autochtone, mais ils sont loin d'être suffisants pour répondre aux besoins des communautés autochtones, malgré ce que disent les conservateurs aujourd'hui sur les dépenses sans précédent qui ont été consacrées aux peuples autochtones. Selon l'Assemblée des Premières Nations, il faudrait 44 milliards de dollars sur 10 ans pour répondre aux besoins actuels des communautés des Premières Nations. Le budget de 2022 prévoit un financement de 2,4 milliards de dollars sur cinq ans pour combler les lacunes en matière de logement dans les réserves.
Nous devons aussi faire face à une situation que le a lui-même reconnue comme étant un génocide contre les femmes, les filles et les personnes bispirituelles autochtones. L'ancienne ministre des Relations Couronne-Autochtones a désigné ma propre ville, Winnipeg, comme l'épicentre de la crise des femmes et filles autochtones assassinées ou portées disparues. Cependant, depuis la publication, en 2019, du rapport final de l'Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, nous sommes loin d'avoir traité la lutte contre ce génocide en cours avec le respect et le sentiment d'urgence nécessaires.
À titre d'exemple, dans le budget de 2022, le gouvernement libéral n'a prévu aucun nouvel investissement pour contribuer à mettre fin à cette crise de la violence. Pire encore, il a été ahurissant d'apprendre que presque rien dans l'enveloppe prévue de 724,1 millions de dollars pour la stratégie globale de prévention de la violence, dont le lancement a été annoncé en 2021, n'a été utilisé. Pas un seul nouveau refuge ni la moindre unité de logement de transition n'ont été bâtis.
Même si je reconnais que le gouvernement fédéral a récemment annoncé un investissement de 6,9 millions de dollars dans ma circonscription pour soutenir l'agrandissement du refuge Velma’s House, un lieu sûr à cadre peu restrictif ouvert 24 heures sur 24, 7 jours sur 7 dans Winnipeg-Centre, il reste encore beaucoup trop de femmes, de filles et de personnes de diverses identités de genres chez les autochtones qui n'ont pas de lieu où elles peuvent se réfugier en sécurité dans leur collectivité.
Nous continuons également à voir des projets d'extraction des ressources qui sont imposés aux collectivités autochtones sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause. Un exemple flagrant s'est déroulé il y a près de deux ans sur le territoire des Wet'suwet'en, quand des défenseures de la terre, des femmes, se sont retrouvées devant des chiens policiers et des tireurs d'élite. La GRC avait utilisé une hache et une tronçonneuse pour couper la porte d'une petite maison où se trouvaient deux femmes autochtones non armées. C'est exactement le contraire de ce à quoi on peut s'attendre d'une approche axée sur la réconciliation.
Je suis très préoccupée par l'accent démesuré que mettent les conservateurs sur la réconciliation économique avec leur histoire d'opposition au droit au consentement préalable donné librement et en connaissance de cause, qui est inscrit dans la loi canadienne et énoncé dans la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones.
Les peuples autochtones ont le droit de prendre des décisions sans être intimidés etd'être informés de tous les aspects des projets avant l'étape de conception, ce qui ne peut se faire lorsque des fusils sont braqués sur eux. Il est également inacceptable d'affirmer que les collectivités qui choisissent de bâtir des économies hors du secteur de l'extraction des ressources n'ont aucun désir d'améliorer leur économie locale. Sur ces questions et tant d'autres, y compris la surreprésentation des peuples autochtones dans les systèmes de justice pénale et de protection de l'enfance, et le fait que 27 collectivités font encore l'objet d'avis de faire bouillir l'eau, il y a tant de travail à faire pour renverser les politiques et pratiques coloniales qui nous empêchent de parvenir à une véritable réconciliation.
J'espère que cette mesure législative améliorera la situation. Je veux souligner le travail accompli par ma merveilleuse collègue la députée de pour renforcer le projet de loi au comité. Nous serons aidés dans nos efforts par un intérêt renouvelé du gouvernement envers ce que le a décrit comme la « relation la plus importante » que le Canada entretient. Je suis convaincue que le conseil fera son travail pour veiller à ce que le gouvernement rende des comptes sur les progrès réalisés en matière de mise en œuvre des appels à l'action, mais il incombe au gouvernement d'assumer ses responsabilités en prenant des mesures concrètes.
Je veux dire à tous les survivants qui ont raconté leurs histoires, ainsi qu'à tous ceux qui ne l'ont pas fait, que je les soutiens. J'espère que le projet leur donnera la justice qui leur a été refusée pendant beaucoup trop longtemps.
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Uqaqtittiji, c'est avec beaucoup d'intérêt que je participe au débat consacré au projet de loi , Loi prévoyant la constitution d'un conseil national de réconciliation.
Tous les partis ont présenté leur position et leurs question à propos des inégalités qui, selon eux, touchent les peuples autochtones. Tandis que les néo-démocrates mettent en lumière les constantes violations des droits des peuples autochtones, d'autres choisissent de se concentrer sur la possible composition du conseil national de réconciliation.
À l'occasion de mon dernier discours à propos de ce projet de loi, je préciserai la position des néo-démocrates. Pour la définir, le NPD a été guidé par les plaidoyers de personnes autochtones, et nous n'y dérogerons pas.
Parlons tout d'abord des articles 9 et 10 du projet de loi , qui portent sur la composition du conseil et sur les organismes qui feront des nominations. Selon l'article 9, le conseil comprendra de 9 à 13 administrateurs. Pour sa part, l'article 10 ne fait état que de quatre organismes qui feront une nomination. C'est donc dire que de cinq à neuf administrateurs pourraient provenir d'autres groupes autochtones. Il m'apparaît important que soient représentées des nations de partout au pays qui auront l'indépendance nécessaire pour participer au conseil.
Je rappelle à tous les peuples et à tous les groupes autochtones que, s'ils estiment que le projet de loi ne garantit pas que leur voix sera entendue grâce à la composition du conseil, ils auront la possibilité de se faire entendre, que ce soit en proposant des candidatures au conseil dans le cadre du processus de nomination, en offrant des opinions par l'intermédiaire de conseils consultatifs ou, comme le prévoit le projet de loi, en s'adressant directement au conseil.
Je remercie les principaux témoins qui ont pris la parole devant le comité. Zebedee Nungak a parlé avec éloquence de la nécessité de faire de la décolonisation l'objectif ultime du processus. Okalik Eegeesiak a insisté sur le fait que « la réconciliation doit venir d'une approche, d'un état d'esprit et d'une base équilibrés, avec un respect mutuel et des ressources équitables ». Karen Restoule a souligné l'importance de revitaliser les lois relatives aux Autochtones et de faire respecter les droits des Autochtones.
L'Association des femmes autochtones du Canada joue un rôle important pour conseiller et soutenir les femmes autochtones de tout le pays. Celles-ci continuent de se battre pour leurs droits et, compte tenu des taux élevés de violence à leur égard, la réconciliation doit répondre aux multiples préoccupations des communautés.
Un amendement apporté par les néo-démocrates visait à garantir que l'on tienne compte des conseils importants des survivants, des aînés et des professionnels du droit autochtones. Nous avons entendu au cours de ce débat qu'il est important de veiller à ce que les survivants et les aînés se trouvent au centre de ce travail. Les amendements proposés par les néo-démocrates le garantissent. À l'heure actuelle, partout au pays, les droits des Autochtones sont violés, enfreints et attaqués. Souvent, les Autochtones sont privés de leurs droits, même des droits fondamentaux comme le logement.
Nous avons vu récemment, dans le rapport de la vérificatrice générale sur l'intervention du gouvernement en matière de protection civile, que les familles autochtones de la Première Nation de Peguis ont été évacuées pendant 10 ans à la suite d'une inondation.
Les Autochtones sont souvent privés du droit à l'autodétermination, à un logement accessible, à l'éducation et à l'accès à leurs propres terres. Ce conseil mènera les discussions portant sur ce que les nations veulent obtenir du gouvernement pour faire avancer la réconciliation. Pour que le conseil puisse faire son travail efficacement, il devra avoir accès à l'information tant au niveau provincial que fédéral. Il est important que l'accès lui soit accordé dans les limites permises pour qu'il puisse rendre compte de ce qui arrive aux communautés autochtones. Le conseil devra s'efforcer de protéger et de promouvoir systématiquement les droits des Autochtones par la voie de ses recommandations.
C'est grâce aux recommandations et aux amendements du Nouveau Parti démocratique que le conseil adoptera une approche fondée sur les droits dans ses efforts visant à faire progresser la réconciliation.
Il est important de ne pas perdre de vue ce que cette mesure législative est susceptible de faire. Depuis des années, les Premières Nations, les Métis et les Inuits réclament des solutions qui peuvent fonctionner dans les communautés autochtones.
Le travail de ce conseil national pour faire progresser la réconciliation sera important, étant donné qu'il garantira une approche apolitique pour prendre connaissance des problèmes et pour accomplir le travail qui doit être fait, puisque le conseil surveillera les programmes et les politiques du gouvernement. Il est essentiel que la réconciliation soit constamment à l'esprit de tous les Canadiens.
Je rappelle à tous les peuples et à tous les groupes autochtones qui espèrent se faire entendre que ces possibilités existent toujours. Le travail a commencé pour permettre aux Autochtones d'ouvrir la voie de la réconciliation grâce à la création de ce conseil. De l'excellent travail a déjà été accompli, et il en reste encore beaucoup à faire.
En tant que pays, nous avons beaucoup à apprendre au sujet de la réconciliation. J'ai parlé à des députés de la Nouvelle‑Zélande qui nous ont rendu visite au Canada. L'un d'eux m'a demandé comment nous allions savoir que la réconciliation se sera concrétisée. J'ai répondu que la réconciliation se sera concrétisée seulement quand les Autochtones diront qu'elle l'a été. Ce n'est pas à un gouvernement de le déterminer.
Les communautés autochtones ont besoin que le gouvernement montre, par des mesures, qu'il est à leur écoute. Les gouvernements doivent suivre l'exemple des peuples autochtones, en particulier sur les questions liées à la réconciliation, à la décolonisation et à l'autochtonisation des lois, des politiques et des programmes qui auront des répercussions sur les peuples autochtones.
En conclusion, j'ai un certain espoir que le projet de loi entraînera des résultats mesurables. Bien qu'il ne soit pas la seule solution pour remédier aux injustices vécues par les peuples autochtones, il assurera l'avancement de la réconciliation nécessaire pour tous les Canadiens.
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Madame la Présidente, j'aimerais souligner que je participe à la séance à distance, depuis les territoires traditionnels des peuples musqueam et salish du littoral. J'aimerais aussi vous informer que je vais partager mon temps de parole avec le député de .
J'aimerais remercier les membres du conseil d'administration provisoire et du comité de transition, qui ont mené des consultations exhaustives afin d'élaborer le cadre du projet de loi . J'aimerais aussi remercier le et tous les députés qui appuient cette importante mesure législative, notamment les membres du Comité permanent des affaires autochtones et du Nord ainsi que les témoins qui ont comparu au sujet du projet de loi . Leurs amendements songés ont permis de renforcer ce projet de loi tout en respectant l'indépendance du conseil.
Grâce au projet de loi , le Canada franchit une étape de plus dans le processus multigénérationnel de la réconciliation avec les peuples autochtones. Trois des 94 appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation demandent au gouvernement de créer un conseil national de réconciliation. Il s'agirait d'une organisation permanente, indépendante et dirigée par des Autochtones qui surveillerait et appuierait les progrès de la réconciliation au Canada, y compris la mise en œuvre complète des appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation.
En tant que député de Steveston—Richmond-Est et en ma qualité d'habitant de longue date dans la grande région métropolitaine de Vancouver, la réconciliation avec les peuples autochtones est pour moi un impératif moral. Découvrir et célébrer l'histoire des peuples autochtones est une étape cruciale pour commencer à faire amende honorable et à bâtir un Canada plus inclusif.
Au printemps dernier, Richmond a nommé une nouvelle rue en l'honneur de Steven L. Point, le premier lieutenant-gouverneur autochtone de la Colombie‑Britannique. Il a été président tribal de la nation Stó:lo et il a été juge à la cour provinciale avant son mandat de 2007 à 2012 à la résidence du gouverneur général.
Au mois d'avril, j'ai assisté au dévoilement d'une nouvelle plaque au centre-ville de Vancouver. Celle-ci souligne la redécouverte des racines métisses de l'un des plus héros les plus inspirants du Canada: Terry Fox.
Célébrer les héros et l'histoire des peuples autochtones est un élément essentiel pour rendre le Canada plus inclusif.
Sur le chemin de la réconciliation, ces étapes symboliques sont fondamentales. Toutefois, elles sont aussi insuffisantes si elles ne sont pas accompagnées de partenariats économiques constructifs et d'améliorations à la qualité de vie des Autochtones. C'est pourquoi la collectivité de Steveston s'est associée avec les Premières Nations Musqueam et Squamish pour établir le plus grand port de petits bateaux de pêche au Canada.
Au printemps, afin d'assurer la viabilité des pêches de la Colombie‑Britannique et de rétablir les populations de saumon, les gouvernements fédéral et provincial se sont réunis et ont annoncé le doublement des contributions au Fonds de restauration et d'innovation pour le saumon de la Colombie-Britannique. Le saumon est un élément essentiel de l'alimentation traditionnelle des communautés autochtones de la région. La protection de cette source alimentaire vitale est essentielle pour faire avancer la cause de la réconciliation en Colombie‑Britannique.
Il ne peut pas y avoir de réconciliation sans aborder la grave crise du logement à laquelle les peuples autochtones font face, tant dans les réserves qu'à l'extérieur des réserves. En septembre dernier, les Vancouvérois et les Salishs ont accueilli sur leur territoire traditionnel le , qui s'est engagé à fournir 1,4 milliard de dollars pour créer près de 3 000 logements sur les terres traditionnelles du quartier Kitsilano de Vancouver.
Le règlement de revendications territoriales contestées depuis longtemps est peut-être l'une des étapes les plus importantes de notre cheminement multigénérationnel vers la réconciliation. Cette année, le et le chef de la nation Siksika ont conclu un règlement historique d'une revendication territoriale — l'un des plus importants accords du genre au Canada. L'accord prévoit une indemnisation de 1,3 milliard de dollars pour la nation Siksika afin de régler les revendications territoriales en suspens portant sur 46 500 hectares de la réserve des Siksika.
En juillet, le gouvernement du Canada et la nation de Shuswap ont annoncé une entente de règlement négociée concernant une revendication vieille de 100 ans, qui prévoit un règlement de 21 millions de dollars.
Bien que ces règlements nous rapprochent de la réconciliation, les choses ne changent pas assez vite, nous en sommes conscients. La création d'un conseil national de réconciliation n'aurait pas seulement pour effet de concrétiser 30 des 94 appels à l'action de la Commission de vérité et réconciliation: le conseil pourrait également mener des études approfondies et proposer des façons de régler les injustices systémiques qui font obstacle à la réconciliation au Canada.
La semaine dernière, pendant le témoignage qu'elle a présenté au Comité permanent de l'accès à l'information, de la protection des renseignements personnels et de l'éthique, l'union des chefs indiens de la Colombie-Britannique a parlé de son expérience et de ses préoccupations à l'égard du système d'information du Canada. Elle a informé le Comité que la souveraineté sur les données fait partie intégrante de l'article 28 de la Déclaration des Nations unies sur les droits des peuples autochtones, qui confirme le droit à une indemnisation juste, correcte et équitable pour les terres traditionnelles qui ont été confisquées. Elle a aussi souligné que, pour recevoir les documents dont elle a besoin pour plaider sa cause, elle devait avoir recours au processus d'accès à l'information. Autrement dit, les nations autochtones doivent passer par la partie contre laquelle elles se battent pour obtenir les documents dont elles ont besoin, et elles doivent payer pour chaque demande d'accès à l'information.
Les tracasseries bureaucratiques comme l'accès à l'information et les injustices systémiques et sociales font obstacle à la réconciliation. Un conseil national de réconciliation, comme celui que prévoit le projet de loi , jouerait un rôle important pour ce qui est de repérer les problèmes et de demander des comptes aux gouvernements à ce sujet.
Dans le cadre du processus de reddition de comptes, le conseil produirait un rapport annuel qui serait soumis au ministre et présenté au Parlement. Ce rapport rendrait compte des progrès réalisés en matière de réconciliation et recommanderait des changements à apporter au sein du gouvernement et dans l'ensemble de la société canadienne. La loi obligerait le gouvernement en place à fournir une réponse au rapport et à indiquer ce qu'il compte faire pour promouvoir la réconciliation.
Il incombe à tous les pouvoirs publics, ainsi qu'à l'ensemble de la population canadienne, de faire avancer la cause de la réconciliation, mais le gouvernement fédéral doit donner l'exemple en répondant aux besoins de tous. Le projet de loi vise à faire avancer le gouvernement, mais aussi l'ensemble du pays. Comme l'a dit le chef Robert Joseph, « [t]rouvons le moyen de vivre ensemble dans ce temps et dans cet espace. Notre avenir et le bien-être de tous nos enfants reposent sur le type de relations que nous bâtissons aujourd'hui ».
La création d'un conseil national de réconciliation ne vise pas qu'à réparer les torts du passé. Il s'agit d'établir avec les peuples autochtones une nouvelle relation fondée sur le respect, le dialogue et un partenariat renouvelé. Il me tarde de voir le conseil à l'œuvre et de voir les recommandations qu'il fera pour promouvoir la réconciliation au Canada.