Privilège parlementaire / Droits des députés
Protection contre l’obstruction et l’ingérence : ingérence alléguée du gouvernement dans la réponse à une question écrite
Débats, p. 4207–4208
Contexte
Le 27 mars 2014, Scott Andrews (Avalon) soulève une question de privilège relativement à la réponse du gouvernement à la question écrite Q-176. M. Andrews prétend que Rob Moore (ministre d’État, Agence de promotion du Canada atlantique) s’est ingéré dans la publication d’information importante pour sa circonscription, ce qui nuit à sa capacité d’assumer ses fonctions de député. Il précise qu’il ne remet pas en question l’exactitude de la réponse du gouvernement, mais plutôt les moyens par lesquels le ministre aurait modifié le processus ministériel interne portant sur la cueillette d’information et la rédaction de la réponse. M. Andrews fait aussi remarquer qu’il a déjà reçu des réponses détaillées à des questions semblables. Peter Van Loan (leader du gouvernement à la Chambre des communes) réplique que l’affaire est une question de débat quant au caractère approprié de la réponse[1]. Le 1er avril 2014, le ministre d’État soutient que la question n’a pas été soulevée à la première occasion et qu’il n’est pas du ressort du Président de juger du contenu des réponses du gouvernement aux questions écrites. Il conteste l’allégation selon laquelle il y aurait une grande différence entre la manière dont le gouvernement a répondu à la question Q-176 et la manière dont les questions précédentes ont été traitées. Le Président suppléant (Bruce Stanton) dit que le Président prendra la question en délibéré[2].
Résolution
Le Président rend sa décision le 3 avril 2014. Il confirme que la présidence n’a pas pour rôle de juger de l’exactitude des réponses du gouvernement aux questions qui lui sont posées ni de se mêler des processus ministériels internes portant sur les questions écrites. Étant arrivé à la conclusion qu’il ne peut trouver que le député se soit vu empêcher d’exécuter ses fonctions, le Président statue qu’il n’y a pas de prime abord matière à question de privilège.
Décision de la présidence
Le Président : Je suis maintenant prêt à me prononcer sur la question de privilège soulevée le 27 mars 2014 par le député d’Avalon concernant la réponse du gouvernement à la question écrite Q-176.
Je remercie l’honorable député d’Avalon d’avoir soulevé cette question, ainsi que l’honorable leader du gouvernement à la Chambre, l’honorable leader à la Chambre de l’Opposition officielle et le ministre d’État pour leurs interventions.
Lorsqu’il a soulevé la question, le député d’Avalon a expliqué que la réponse du gouvernement à la question écrite Q-176 — déposée le 6 mars 2014 et portant sur les projets approuvés à Avalon par l’Agence de promotion économique du Canada atlantique — différait des réponses données auparavant à des questions similaires.
Le député a indiqué que l’exactitude des renseignements fournis n’était pas en cause, mais a soutenu qu’en modifiant la procédure régissant la manière dont l’agence recueille les renseignements et élabore ses réponses, le ministre avait fait obstacle à la communication des renseignements et, de ce fait, l’avait empêché d’exercer ses fonctions parlementaires.
En réponse aux affirmations du député, l’honorable leader du gouvernement à la Chambre des communes a rétorqué qu’en réalité, le député avait obtenu une réponse, bien que celle-ci ne fût pas aussi détaillée ou précise qu’il l’eût souhaité. Il était donc d’avis que le débat portait en fait sur la qualité de la réponse. Pour sa part, le ministre d’État pour l’APECA a expliqué en détail la procédure d’élaboration des réponses suivie par son ministère au cours des dernières années en répondant aux questions du député d’Avalon.
La présidence a été appelée à maintes reprises à se prononcer dans des affaires concernant des questions écrites. Aussi, la présidence a-t-elle eu, dans ses décisions portant sur de telles questions de privilège, l’occasion de confirmer à la fois son rôle en la matière et les usages et principes qui gouvernent les questions écrites. Certains de ces éléments valent la peine d’être répétés aujourd’hui.
Il est écrit à la page 522 de La procédure et les usages de la Chambre des communes, deuxième édition:
Aucune disposition du Règlement ne permet au Président de contrôler les réponses que le gouvernement donne aux questions.
Le 8 février 2005, à la page 3234 des Débats, le Président Milliken a fait valoir le même point:
Toute contestation de l’exactitude ou du caractère approprié de cette réponse est un sujet de débat. Ce n’est pas là une question que le Président a le pouvoir de trancher.
Le 3 avril 2012, dans une décision que j’ai rendue sur une autre question visant la réponse du gouvernement à la question écrite, j’ai réaffirmé cette pratique.
La présidence reconnaît que le député ne demande pas un jugement sur l’exactitude de la réponse qui lui a été fournie. Cependant, il demande à la présidence de juger des actions du ministre et de l’effet qu’elles ont sur sa capacité d’exercer ses fonctions de député. Pour ce faire, la présidence devrait non seulement se prononcer sur le contenu des réponses fournies, mais également se pencher sur les procédures internes passées et présentes du ministère. Indépendamment du fait que la procédure interne du ministère concernant les questions écrites ait changé ou non, la présidence outrepasserait son rôle si elle décidait de mener une enquête ou de porter un jugement sur la question.
Le rôle de la présidence se limite à évaluer la preuve qu’on lui présente afin de déterminer s’il y a eu entrave à la capacité du député d’exercer ses fonctions parlementaires. Dans les circonstances qui nous occupent, la présidence ne voit aucune preuve donnant à penser que celui-ci n’a pas été en mesure d’exercer ses fonctions.
Par conséquent, aucun motif ne me permet de conclure qu’il y a, de prime abord, matière à question de privilège.
Je remercie la Chambre de son attention.
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[1] Débats, 27 mars 2014, p. 3918–3919.
[2] Débats, 1er avril 2014, p. 4156–4158.