Recueil de décisions du Président Peter Milliken 2001 - 2011

Les règles du débat / Processus du débat

Motions : recevabilité; suspension de certains articles du Règlement

Débats, p. 7242-7243

Contexte

Le 23 février 2007, Joe Comartin (Windsor–Tecumseh) invoque le Règlement, alléguant qu’une motion (Affaires émanant du gouvernement no 15) proposée par Peter Van Loan (leader du gouvernement à la Chambre des communes et ministre responsable de la Réforme démocratique) n’est pas recevable. La motion tendait à suspendre certaines dispositions du Règlement pendant l’étude d’un projet de loi intitulé Loi prévoyant la reprise et le maintien des services ferroviaires, et qui n’avait pas encore été présenté à la Chambre[1]. M. Comartin soutient qu’on demande ainsi à la Chambre d’accepter une mesure législative qu’elle n’a pas encore vue, que la Chambre se voit privée de la possibilité de proposer des amendements éclairés au projet de loi, que la motion se veut une tentative de contourner le Règlement et que le consentement de la majorité des partis devrait précéder toute mesure visant à restreindre le débat. Il prétend que, puisque le gouvernement n’a ni demandé ni obtenu le consentement unanime pour suspendre le Règlement, il pourrait invoquer l’article 57 ou le paragraphe 78(3) du Règlement pour limiter le débat sur le projet de loi. Jay Hill (secrétaire d’État et whip en chef du gouvernement) répond qu’on a déjà eu recours à ce type de procédure et que cela avait été jugé recevable.

Résolution

Le Président rend sa décision sur-le-champ. Il cite aussi une décision antérieure du Président Fraser, selon laquelle la Chambre peut passer outre à l’application de règles par voie de consentement unanime ou de motion et que le Règlement peut être suspendu par voie de motion, précédée d’un avis en bonne et due forme. Il souligne qu’en l’occurrence, la motion controversée a été proposée en conformité avec le Règlement et qu’elle était précédée d’un avis conforme. Il déclare que la Chambre se prononce sur diverses questions en fonction de la majorité des députés, selon qu’ils votent pour ou contre, et non en fonction des partis. Il statue, par conséquent, que la motion dont la Chambre est actuellement saisie est recevable.

Décision de la présidence

Le Président : La présidence a entendu les arguments très valables du député de Windsor–Tecumseh en ce qui concerne cette motion. Je dois cependant dire que c’est avec un certain scepticisme que je les reçois.

Les allégations du député selon lesquelles la majorité des partis n’auraient pas donné leur accord et que cela rend une affaire irrecevable me préoccupent. La Chambre se prononce non pas en fonction des partis, mais en fonction des votes, c’est-à-dire du nombre de députés qui appuient ou rejettent une motion. À mon avis, c’est ainsi que la Chambre fonctionne et qu’elle continuera de fonctionner.

Je signale que cette motion, qui a été présentée aujourd’hui et dont nous discutons actuellement, sera mise aux voix, si elle est recevable. Les députés voteront pour ou contre, comme ils l’entendent, et la volonté de la majorité l’emportera. Si la majorité des députés votent contre la motion, elle sera rejetée et nous ne procéderons pas de cette façon. Par contre, si la majorité des députés sont en faveur de ce mode de fonctionnement, nous procéderons alors ainsi.

Je voudrais renvoyer le député à une décision rendue par le Président Fraser le 15 décembre 1988 lorsqu’une motion proposant des changements au Règlement a été présentée à la Chambre. Le Président Fraser, citant une de ses décisions précédentes rendue en juin 1988, a dit ceci :

Parmi les privilèges dont est investie la Chambre dans son ensemble, aucun n’est plus capital que celui de se fixer à elle-même des règles de procédure et de les appliquer. Sans doute certaines de ces règles figurent-elles à l’Acte de l’Amérique du Nord britannique, mais dans l’immense majorité des cas elles sont constituées par des résolutions de la Chambre qu’il est loisible à celle-ci, à sa diligence, de développer, de modifier ou de rapporter. Il s’ensuit que la Chambre peut passer outre à toutes les prescriptions nées des règles, en toutes circonstances par voie de consentement unanime ou, à l’occasion et par voie de motion, en suspendre l’application pour un temps donné.

Il a ajouté ce qui suit :

Le Règlement peut être suspendu dans un cas d’espèce sans que cela porte atteinte à sa validité, car la Chambre a le pouvoir de supprimer les barrières et les entraves qu’elle s’impose à elle-même par son propre règlement. Elle peut même adopter une motion prescrivant une ligne de conduite incompatible avec le Règlement.

Il continue en ces termes :

De plus, le Règlement a déjà été suspendu plusieurs fois à la Chambre des communes, comme on le voit dans les Journaux du 16 mars 1883, du 1er juin 1898, du 8 avril 1948, du 24 avril 1961 et du 14 mai 1964. Les autorités et notre pratique permettent toutes les deux que le Règlement soit suspendu ou modifié par voie de motion après avis.

Je constate qu’on a donné avis de cette motion. Elle a été présentée en conformité du Règlement et propose la suspension de certaines dispositions du Règlement.

Enfin :

Le Règlement n’est pas protégé par une procédure spéciale contre des amendements, des annulations ou des suspensions, que ce soit de façon explicite ou par le truchement d’un ordre contraire à son objet. Il suffit de donner un préavis ordinaire pour la motion nécessaire; et certains règlements prévoient la suspension de leurs propres dispositions par un simple vote, sans amendement ni débat.

Dans les circonstances, en ce qui concerne la motion qui a été présentée par le leader du gouvernement à la Chambre, je dois dire qu’il me semble qu’elle suspend l’application des dispositions du Règlement relativement à un projet de loi qui doit être présenté dans l’avenir sous un titre donné et que, lorsque le projet de loi sera présenté, cet ordre spécial s’y appliquera.

Il me semble que c’est une question sur laquelle la Chambre doit se prononcer si elle veut procéder de cette façon.

À mon avis, la motion est recevable dans sa forme présente et en conformité avec les autorités que j’ai citées. Je crois que c’est à la Chambre de décider si cette motion est acceptable, pas à moi.

À mon avis, la motion est recevable maintenant, et la Chambre pourra décider si elle veut la rejeter ou l’adopter après le débat sur la motion qui commencera maintenant par un discours de l’honorable ministre du Travail.

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[1] Débats, 23 février 2007, p. 7241-7242.

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