propose que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
— Monsieur le Président, je suis ici aujourd'hui pour débattre du projet de loi , Loi modifiant le Code criminel, la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels et la Loi sur le transfèrement international des délinquants.
[Français]
Ce projet de loi est un autre exemple des efforts continus déployés par notre gouvernement pour rendre le système de justice pénale plus efficace dans la lutte contre les infractions sexuelles et mieux adapté aux besoins des victimes et des survivants d'actes criminels.
[Traduction]
Ce projet de loi a pour principal objectif de répondre à l'arrêt de la Cour suprême selon lequel certaines dispositions du registre des délinquants sexuels sont inconstitutionnelles. À défaut d'adopter ce projet de loi d'ici le 28 octobre prochain, les juges ne pourront pas ajouter les délinquants sexuels nouvellement condamnés au registre des délinquants sexuels. Je pense que nous pouvons tous convenir qu'aucun d'entre nous, de quelque parti que ce soit, ne souhaite une telle issue. Les services de police nous ont indiqué qu'il s'agissait d'un outil important qui leur permettait de faire leur travail. Nous voulons que les services de police puissent continuer à utiliser cet outil.
Nous entendons beaucoup de beaux discours de la part de députés, notamment du , sur la nécessité de sanctionner les délinquants dangereux et d'assurer la sécurité des Canadiens et des victimes. C'est exactement ce que vise ce projet de loi. J'ai hâte de collaborer avec les députés des deux côtés de la Chambre pour faire en sorte qu'il soit adopté et qu'il reçoive la sanction royale avant le délai fixé par la Cour suprême.
Je veux d'abord remercier le Sénat du travail mené sur cet important projet de loi, ainsi que les nombreux témoins dont les importantes contributions ont mené aux amendements proposés par le Sénat. Plus particulièrement, je veux remercier les victimes et les survivants de violence sexuelle qui ont contribué au processus législatif en faisant part de leur expérience. Je les ai écoutés et j'ai senti leur souffrance. Le Canada doit faire mieux. Je les remercie de nous avoir aidés à modeler cette réforme essentielle. Les sénateurs ont travaillé fort pour s'assurer que ce projet de loi soit renvoyé à la Chambre des communes rapidement et je les remercie de leur diligence.
Le projet de loi est, pour le gouvernement et pour moi, une priorité fondamentale. Je suis convaincu qu'il améliorera le système de justice canadien, en particulier pour les victimes et les survivants de crimes. En plus de répondre à l'arrêt de la Cour suprême et de renforcer le registre des délinquants sexuels, le projet de loi apportera des changements au régime d'interdiction de publication afin de mieux servir les victimes et les survivants et de changer la façon d'accéder aux informations pour les victimes. Je vais expliquer chacun de ces éléments.
D'abord, il y a la réponse à l'arrêt de la Cour suprême. L'urgence d'adopter le projet de loi découle de l'arrêt dans l'affaire R. c. Ndhlovu, qui a invalidé deux dispositions du Code criminel concernant le registre des délinquants sexuels.
La première disposition que la Cour suprême a invalidée exigeait des juges qu'ils ordonnent automatiquement à une personne de s'inscrire au registre des délinquants sexuels lorsqu'elle est reconnue coupable d'une infraction désignée ou déclarée non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux. La Cour suprême a statué dans cette affaire de l'année dernière que la loi était trop générale puisque les juges devaient rendre une ordonnance dans chacun des cas, y compris dans les cas où les délinquants ne présentent pas de risque de récidive. La cour a donné un an au Parlement pour réagir à l'invalidation de cette disposition.
La deuxième disposition que la Cour suprême a invalidée exigeait l'inscription obligatoire à vie des personnes reconnues coupables ou déclarées non criminellement responsables de multiples infractions dans le cadre d'une même poursuite. Dans cette catégorie, la Cour suprême a soutenu que, puisque les personnes reconnues coupables de plus d’une infraction au cours d’une même poursuite ne représentaient pas nécessairement un risque plus élevé dans certaines circonstances, la disposition allait trop loin en exigeant l’inscription obligatoire à vie alors qu’une période plus courte pourrait être appropriée. L'annulation de cette disposition est entrée en vigueur dès que la décision a été rendue l'année dernière.
Le projet de loi dont nous sommes saisis donne suite à la décision de la Cour suprême en améliorant l'approche à l'égard de l'inscription obligatoire. Le projet de loi maintient l'inscription obligatoire dans deux cas: les infractions graves contre les enfants et les infractions sexuelles répétées. Dans tous les autres cas, le projet de loi dont le Parlement est saisi propose une présomption réfutable d’inscription. Autrement dit, les personnes reconnues coupables ou déclarées non criminellement responsables d'une infraction admissible devront s'inscrire, à moins de pouvoir démontrer au tribunal qu'une telle inscription porterait indûment atteinte à leurs droits, ce qui la rend donc réfutable.
En rétablissant le pouvoir discrétionnaire des juges dans des cas précis en ce qui a trait au régime d'enregistrement des délinquants sexuels, nous répondons directement aux directives de la cour. Cependant, nous veillons aussi à ce que l'on continue de tenir un bon registre des délinquants sexuels, registre que les forces de police nous ont demandé de maintenir. Ce registre donne aux forces de l'ordre les outils dont elles ont besoin pour faire enquête sur les infractions de nature sexuelle et pour protéger les collectivités. C'est ma responsabilité fondamentale.
L'approche proposée est essentiellement celle que le Comité permanent de la sécurité publique et nationale a recommandée, en 2009, au terme de son examen de la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Cependant, à l'époque, le gouvernement conservateur avait décidé de faire fi de ces recommandations pour adopter plutôt une approche qui a été jugée inconstitutionnelle.
Toute ressemblance avec ce que nous voyons aujourd'hui de la part des députés d'en face n'est pas un hasard. Le a dit à maintes reprises qu'il est prêt à faire fi de la Charte s'il n'approuve pas une décision de la cour, et cela me préoccupe. J'aimerais d'ailleurs souligner au passage que certaines pétitions qui viennent d'être présentées à la Chambre parlent d'invoquer la disposition de dérogation sur la base de certaines perceptions et de certains points de vue par rapport à des arrêts de la Cour suprême.
Pour en revenir au projet de loi, je tiens à souligner les circonstances qui justifient selon nous l'inscription automatique d'un individu au registre national des délinquants sexuels. Il s'agit dans tous les cas de récidivistes et d'agresseurs sexuels d'enfants reconnus coupables d'actes criminels et condamnés à une peine d'emprisonnement de deux ans ou plus.
La Cour suprême du Canada a clairement établi que l'inscription automatique dans tous les cas demeure inconstitutionnelle, car elle contrevient à l'article 7 de la Charte. Le gouvernement estime toutefois qu'il est important de maintenir l'inscription automatique dans deux cas particuliers, et fonde cette décision sur des preuves qui démontrent un risque de récidive pouvant être évalué de façon objective.
Le premier cas, comme je l'ai mentionné, concerne les infractions sexuelles contre les enfants, qui font partie des actes criminels les plus odieux. Selon les données que nous avons examinées, les infractions sexuelles contre les enfants représentent un facteur de risque connu de récidive. Pour ce qui est du deuxième cas, les experts nous ont appris que les délinquants sexuels récidivistes présentent un risque de récidive de cinq à huit fois plus élevé que les individus ayant des antécédents criminels de nature non sexuelle. Dans tous les autres cas, à l'exception des deux catégories que je viens de décrire, les délinquants seraient tenus de s'inscrire au registre, à moins qu'ils puissent prouver en cour que cette décision n'est pas appropriée dans leur situation, en fonction des critères que j'ai mentionnés.
Cette approche, décrite dans le projet de loi , respecte la Charte. Je le répète, l'un de mes devoirs fondamentaux consiste à assurer la sécurité des Canadiens, tout en respectant les droits garantis par la Charte. C'est également conforme à l'objectif de protéger la sécurité publique.
Pour donner suite à la décision de la cour au sujet de l’enregistrement automatique à vie, le projet de loi donnerait aux tribunaux le pouvoir d’ordonner un enregistrement à vie lorsque de multiples infractions sont en cause dans le cadre de la même procédure, ce qui laisse entendre que la personne présente un risque de récidive.
[Français]
En plus des éléments qui donnent suite à la décision de la Cour suprême, le projet de loi contient plusieurs éléments visant à renforcer le régime d'enregistrement des délinquants sexuels dans son ensemble.
Ces éléments ont été élaborés dans le cadre d'une consultation continue avec nos partenaires provinciaux et territoriaux, y compris les organismes chargés d'appliquer la loi.
[Traduction]
Le projet de loi ajouterait de nouvelles infractions pouvant donner lieu à un enregistrement, comme l’extorsion à des fins sexuelles, ou la sextorsion, et la distribution non consensuelle d’images intimes. Ce sont des crimes inexcusables qui ont causé des dommages réels à la vie de Canadiens, surtout des femmes et des filles. Nous les prenons au sérieux et nous veillons à ce que les auteurs de ces actes déplorables soient tenus responsables.
Les modifications exigeraient également que les personnes dont le nom figure déjà dans le registre fournissent un préavis de 14 jours pour tout voyage, ainsi que l'adresse précise de leur destination. Lorsque le procureur général Garland et le secrétaire Mayorkas étaient à Ottawa en mars dernier à l'occasion du forum sur la criminalité transfrontalière, ils ont salué cette modification très importante à notre structure législative. Ces changements renforceraient notre partenariat avec nos alliés américains pour assurer la sécurité le long de notre frontière commune.
De plus, le projet de loi édicterait une nouvelle disposition sur les mandats qui permettrait à la police d'arrêter un délinquant qui ne respecte pas ses obligations et de l'amener à un bureau d'inscription.
[Français]
En somme, les modifications proposées dans le projet de loi au Registre national des délinquants sexuels le rendront plus efficace et contribueront de façon importante à la capacité des organismes chargés d'appliquer la loi d'enquêter sur les infractions sexuelles et de les prévenir. J'exhorte tous mes collègues à se joindre à moi pour appuyer ces changements.
Comme je l'ai indiqué au début, le projet de loi contient également des réformes importantes et utiles concernant les dispositions relatives aux ordonnances de non-publication. Ces réformes visent à renforcer le pouvoir des victimes d'actes criminels en veillant à ce que leurs souhaits soient respectés lorsqu'il s'agit d'émettre, de révoquer ou de modifier des ordonnances de non-publication et à ce que le droit d'une victime à recevoir des informations sur son affaire soit pleinement respecté.
[Traduction]
Ces changements sont réclamés depuis longtemps, y compris, plus récemment, par des groupes de victimes et de survivants, comme l’organisme My Voice, My Choice.
Ces réformes sont soutenues par tous les partis. Je tiens à remercier tout particulièrement la députée de pour son leadership dans ce dossier. Ce printemps, lors d’un événement organisé par My Voice, My Choice, des députés du Parti conservateur, du NPD, du Bloc québécois et du Parti vert ont écouté les récits déchirants de personnes ayant survécu à la violence sexuelle.
Les députés, tous partis confondus, avaient alors promis de modifier le régime d’interdiction de publication, comme le réclamaient ces courageuses survivantes. Aujourd’hui, à la Chambre, nous avons la possibilité de remplir cette promesse. J’espère que les députés de tous les partis se joindront à moi pour le faire.
Une des survivantes de violences sexuelles qui s’était exprimée sur cette question avait demandé la levée d’une interdiction de publication de son nom afin de protéger ses enfants. Elle avait été victime de sévices dans son enfance et, à l’âge adulte, elle avait décidé de raconter son histoire après avoir appris que son agresseur travaillait dans le secteur des services de garde. De nombreux mois, des honoraires d’avocat et une procédure judiciaire compliquée ont été nécessaires pour que l’interdiction soit enfin levée et qu’elle puisse protéger ses enfants et les autres qui risquaient de subir les mêmes sévices dont elle avait été victime.
Je suis fermement convaincue que, lorsqu’une personne a le courage de revenir sur un chapitre extrêmement douloureux de sa vie pour demander la levée d’une interdiction de publication, notre système judiciaire devrait faciliter sa guérison, et non pas la traumatiser à nouveau. C’est essentiel.
[Français]
Ces changements sont réclamés depuis longtemps, y compris plus récemment par des groupes de victimes, dont Ma voix, mon choix. Des appels à la réforme ont également été lancés dans le rapport de décembre 2022 du Comité permanent de la justice et des droits de la personne de la Chambre des communes intitulé « Améliorer le soutien aux victimes d'actes criminels ». Je suis fier de faire partie d'un gouvernement qui a enfin agi dans ce domaine.
[Traduction]
Même si les interdictions de publication peuvent être utiles pour protéger les victimes, elles peuvent aussi injustement les réduire au silence. Je tiens à assurer aux Canadiens et aux députés que l'intention du gouvernement est de garantir que ce qu'ont vécu les victimes et les survivants de crimes sexuels leur appartient à eux. C'est une priorité absolue du gouvernement, et c'est le but ultime de ce projet de loi.
Les modifications contenues dans le projet de loi qui touchent les interdictions de publication ont fait l'objet de longs débats au Sénat. Les objectifs stratégiques derrière ces changements jouissaient d'un vaste soutien, mais on a aussi dit qu'il faudrait en faire plus pour en améliorer les effets. Le gouvernement a travaillé étroitement avec des survivants, des experts et des militants pour apporter des amendements importants. Le projet de loi a donc été amendé de plusieurs façons.
En général, je dirais que ces amendements ont amélioré le projet de loi , et j'en suis heureux. Je remercie les témoins qui ont raconté ce qu'ils ont vécu et exprimé leur point de vue pendant l'étude en comité. Ils ont aussi comparu devant nos collègues du Sénat, qui les ont écoutés et ont proposé des amendements réfléchis.
Que fait le projet de loi au sujet des interdictions de publication? Premièrement, il énonce clairement que le tribunal, lorsqu'une interdiction de publication est imposée, est tenu d'aviser dans les meilleurs délais la personne qui en fait l'objet de son droit de faire une demande de révocation ou de modification de l'ordonnance. Cela donne à la personne un certain contrôle.
Le projet de loi exige également du tribunal qu'il s'enquière auprès des témoins et de la victime s'ils souhaitent faire l'objet d'une interdiction de publication, si ceux-ci sont présents. S'ils ne sont pas présents, le tribunal doit s'enquérir auprès du procureur de la Couronne si celui-ci a demandé aux témoins et à la victime ce qu'ils souhaitaient. Là aussi, on leur donne un certain contrôle.
Le projet de loi précise que le poursuivant a l'obligation d'informer la victime et les témoins de leur droit de demander, de révoquer ou de modifier une interdiction de publication.
[Français]
Tous ces changements placent la victime et les témoins au cœur du processus d'interdiction de publication. L'objectif, ici, est simple: une interdiction de publication devrait être demandée si elle est souhaitée.
[Traduction]
Par ailleurs, nous savons qu'il n'est pas toujours possible de joindre la victime ou un témoin dans les premières étapes des procédures criminelles et qu'il est important de protéger leurs intérêts avant de savoir ce qu'ils souhaitent faire. Voilà pourquoi le projet de loi n'empêcherait pas de demander une interdiction de publication dans les cas où il est impossible de connaître le point de vue de la victime ou d'un témoin. J'imagine qu'il ne serait impossible de connaître les souhaits de la victime que dans de très rares cas.
Le projet de loi apporte également d'importants changements pour codifier et préciser le processus de révocation et de modification des interdictions de publication qui ont été imposées. Je répète encore une fois que le point de vue des victimes et des survivants est le moteur de ces changements.
Le projet de loi créerait un nouvel article dans le Code criminel pour préciser et rationaliser le processus de révocation ou de modification des interdictions de publication. si la personne qui fait l'objet de l'interdiction de publication souhaite que cette interdiction soit révoquée, le tribunal serait tenu de s'exécuter sans tenir d'audience.
La seule exception à cette règle serait lorsque le tribunal estime que la révocation ou la modification aurait une incidence sur la vie privée d'une autre personne faisant l'objet d'une interdiction de publication. Il pourrait par exemple y avoir un cas avec deux victimes d'agression sexuelle où l'une souhaiterait que l'interdiction soit levée, mais où l'autre voudrait que la protection de sa vie privée soit maintenue. Une audience devrait alors être tenue pour s'assurer que la levée de l'une des interdictions de publication ne permettrait pas d'identifier involontairement l'autre victime contre son gré. Il s'agit là d'une importante mesure de protection.
Je tiens à ce qu'il soit absolument clair que l'accusé n'aurait pas son mot à dire dans le processus de modification ou de révocation d'une interdiction de publication. Dans une telle situation, on ne se concentre pas sur l'accusé, mais sur les victimes et les témoins. Il s'agit d'aider les victimes à décider de ce qui leur convient le mieux.
En réponse aux préoccupations exprimées au cours du débat au sujet du projet de loi , il y a maintenant des dispositions dans le projet de loi qui précisent les cas où des poursuites judiciaires ne peuvent être engagées pour violation d'une interdiction de publication par la personne qui en fait l'objet. Plus précisément, les modifications prévoient que des poursuites ne seront pas engagées dans les cas où une personne a enfreint sa propre interdiction de publication, à moins qu'elle n'ait une incidence sur la vie privée d'une autre personne également protégée par une interdiction et qu'un avertissement préalable n'ait pas été pertinent. Ces modifications revêtent de l'importance pour moi, pour le gouvernement et pour toutes les victimes qui ont milité depuis longtemps pour que des réformes soient mises en place à cet égard.
J'ai mentionné plus tôt que le projet de loi a été généralement amélioré grâce aux amendements adoptés au Sénat. J'aimerais toutefois demander au comité de la justice de déterminer le plus tôt possible si d'autres modifications sont nécessaires, étant donné que la date limite du 28 octobre fixée par la Cour suprême approche à grands pas.
La dernière partie du projet de loi pour les victimes répond aux appels des groupes de victimes et de l'ombudsman fédéral des victimes d'actes criminels, qui demandent de permettre aux victimes d'informer plus facilement le système judiciaire si elles veulent recevoir des informations continues sur leur dossier après le procès. En vertu de la Charte des droits des victimes, les victimes peuvent décider si elles souhaitent rester informées de tous les développements dans leur dossier, tels que les appels ou la libération conditionnelle. Elles peuvent également décider de ne pas être contactées au sujet de l'affaire. Elles ont le droit de tourner la page et de ne plus avoir à entendre parler de l'affaire. C'est leur décision.
Cependant, comme les défenseurs l'ont dit au comité de la justice, de nombreuses victimes qui souhaitent recevoir des informations continues sur leur dossier sont laissées pour compte. Elles ne savent pas qu'elles doivent s'inscrire pour recevoir ces informations. Pour remédier à ce grave problème, le projet de loi propose de simplifier considérablement le processus d'enregistrement en obligeant le juge à demander à la victime quelle est sa préférence et en faisant en sorte qu'il s'agisse d'une simple case à cocher sur un formulaire. Je remercie les personnes qui ont attiré mon attention sur ce problème afin que nous puissions y remédier grâce à ce projet de loi important.
En conclusion, je dirais que le projet de loi est extrêmement important. Il est centré sur les victimes et les survivants. Il contribuerait à la sécurité publique tout en respectant les droits garantis par la Charte. J'attends avec impatience le débat sur ce projet de loi, et je suis convaincu que tous les partis, des deux côtés de la Chambre, peuvent travailler ensemble pour assurer et faciliter son adoption rapide. Cela montrera l'importance non seulement du maintien du registre national des délinquants sexuels, mais aussi du renforcement continu de la réponse du système de justice pénale à l'égard des victimes d'actes criminels.
:
Monsieur le Président, nous parlons du fait que les décisions que nous prenons ont un poids incroyable. Nous savons que la plupart des lois que nous adoptons au Parlement ont beaucoup de poids, mais je pense qu'il faut accorder une attention particulière aux enjeux comme celui-ci. Je pense que tous les partis le feront, mais nous avons quelques inquiétudes. J'en soulignerai quelques-unes dans mes observations d'aujourd'hui.
Au bout du compte, nous parlons du projet de loi qui modifierait évidemment le Code criminel et apporterait notamment des changements à la Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels. Je vais fournir quelques renseignements pour expliquer comment nous en sommes arrivés là, donner l'historique de cette question au Canada et expliquer pourquoi il était si important que ce registre soit mis en place au départ.
La Loi sur l'enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels, la LERDS, a été adoptée pour la première fois par le gouvernement libéral de Paul Martin en 2004. Elle avait obtenu le soutien de l'ensemble des partis, comme cela arrive de temps en temps lorsque la gravité de l'enjeu est particulièrement importante. Il est encourageant de constater qu'il arrive parfois que tous les partis parviennent à s'entendre.
Toutefois, sous le premier ministre Martin, l'enregistrement au registre des délinquants sexuels a été laissé à la discrétion des juges. Ce changement a introduit l'idée qu'un délinquant sexuel enregistré était tenu de se présenter chaque année au sein d'un centre d'enregistrement, et de déclarer tout changement de résidence, tout projet de voyage ou tout changement d'emploi. Les délinquants se sont également retrouvés soumis à des vérifications policières. En cas de non-respect de cette obligation, ils étaient passibles d'une amende et d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à deux ans. Honnêtement, je pense que l'introduction de ces mesures était légitime. Elles ont réellement permis de responsabiliser les délinquants sexuels et de les soumettre à une surveillance policière accrue. Ces mesures ont constitué une avancée très importante pour le Canada en 2004.
Quelques années plus tard, une énorme avancée a de nouveau été faite en 2011 sous le gouvernement Harper, qui a déposé et fait adopter à l'unanimité, encore une fois, le projet de loi . Le projet de loi rend l'inscription au registre obligatoire pour les individus reconnus coupables d'une infraction sexuelle, et impose l'inscription à vie dans le cas des individus reconnus coupables de multiples infractions.
Bien sûr, cette modification apportée par le gouvernement conservateur de Harper en vue de rendre obligatoire l'inscription au registre a permis de pousser encore plus loin le progrès pour vraiment sévir contre ceux qui agressent ou exploitent sexuellement d'autres Canadiens, et les tenir responsables de leurs actes. Cette modification a été cruciale, car on s'était rendu compte que depuis l'adoption du projet de loi initial sous le gouvernement Martin en 2004, qui laissait l'inscription au registre à la discrétion des juges, près de la moitié des délinquants sexuels reconnus coupables n'avaient pas été inscrits au registre. Ainsi, avant que leur inscription ne devienne obligatoire, pratiquement la moitié de tous les délinquants sexuels n'étaient assujettis à aucun mécanisme de reddition de comptes. C'était très préoccupant et cela compromettait certainement l'efficacité du registre. Si on n'y inscrit seulement un délinquant sexuel sur deux, cela réduit grandement la sécurité, la reddition de compte et l'efficacité des outils dont se servent constamment les policiers pour nous protéger d'individus comme les délinquants sexuels.
C'était donc un progrès très important, d'où son adoption à l'unanimité. Toutefois, en octobre 2022, donc il y a un an, la décision de la Cour suprême dans l'affaire R. c. Ndhlovu a invalidé deux dispositions du Code criminel pour cause d'inconstitutionnalité. Premièrement, dans une décision partagée à raison de cinq voix contre quatre, la cour a invalidé la disposition du Code criminel qui rendait obligatoire l'inscription au registre des délinquants sexuels pour toute personne reconnue coupable d'une infraction sexuelle. Je reviendrai dans un instant sur le fait que la décision était partagée presque à égalité.
En fin de compte, cette décision a fait en sorte qu’il n’était plus nécessaire d’ajouter les renseignements personnels de chaque délinquant sexuel au registre national des délinquants sexuels du Canada. Rappelons que l’article invalidé par la Cour suprême avait été introduit en premier lieu parce que la moitié des délinquants sexuels condamnés n’étaient pas inscrits au registre.
La deuxième disposition du Code criminel qui a été invalidée est celle qui imposait l’enregistrement obligatoire à vie des personnes ayant commis plus d’une infraction de ce type. Cette disposition a été annulée à l’unanimité. Tous les membres de la Cour ont convenu que l’enregistrement obligatoire à vie était inconstitutionnel.
Comme on l'a déjà dit, le temps presse. Malheureusement, il a fallu beaucoup de temps au gouvernement libéral pour faire avancer ce projet de loi. Nous avons environ un mois pour franchir toutes les étapes. Je suppose que ce ne sera pas tâche facile. Je siège à la Chambre depuis quatre ans. C'est plutôt rare, mais nous verrons si le gouvernement libéral établira des priorités. Nous le saurons. Les libéraux auront peut-être à demander une prolongation parce que, je le répète, si le projet de loi n'est pas adopté, personne ne pourra être inscrit au registre. Voilà qui est très inquiétant. J'espère donc que les libéraux feront preuve de diligence raisonnable pour que cela se produise. Le temps nous le dira. Encore une fois, le registre est un outil très important pour la police. Il est également très important de tenir les délinquants sexuels responsables de leurs actes, d'où la nécessité d'inclure cette disposition.
Même si la Cour suprême a invalidé ces deux dispositions, le projet de loi impose un enregistrement automatique dans certains cas, notamment pour les agresseurs sexuels d'enfants condamnés à une peine d'emprisonnement de deux ans ou plus et pour tout récidiviste qui a déjà été reconnu coupable d'une infraction sexuelle. Le projet de loi permettrait également aux juges d'imposer un enregistrement à perpétuité aux délinquants sexuels reconnus coupables de plus d'une infraction à la fois s'ils présentent un risque de récidive. C'est une bonne chose. Je suis heureuse que cela soit prévu.
Cependant, je vais décrire brièvement les autres cas qui ne feraient pas l'objet d'un ajout automatique. Par exemple, l'exploitation sexuelle d'une personne handicapée ne ferait pas l'objet d'un ajout automatique. L'agression sexuelle armée est un autre exemple. Si une personne agresse sexuellement une autre personne avec une arme, son nom ne sera pas automatiquement inscrit au registre des délinquants sexuels. C'est très préoccupant. Les gens devraient s'en inquiéter, surtout compte tenu du bilan des tribunaux, qui n'ont inscrit que la moitié des délinquants. Un autre exemple est l'agression sexuelle grave avec une arme à feu, et il y a une très longue liste de circonstances préoccupantes où une personne ne serait pas nécessairement ajoutée si elle violait une personne de cette façon-là. Selon moi, et je sais que c'est la même chose pour notre parti, il est très préoccupant que cela puisse être le cas, compte tenu du bilan antérieur à 2011.
Je voulais revenir un peu sur la décision de cinq contre quatre parce que j'ai trouvé que les arguments des juges dissidents étaient assez convaincants. Encore une fois, il s'agissait de l'enregistrement obligatoire. Je vais lire un extrait de l'opinion dissidente. Je pense qu'il est pertinent pour cette discussion. La minorité dissidente a soutenu que le Parlement poursuivait un objectif rationnel en rendant obligatoire l'inscription au registre de tous les délinquants sexuels parce que ce groupe de personnes, dans son ensemble, présente un risque accru de récidive et que le système précédent de discrétion judiciaire avait permis à 50 % des délinquants sexuels d'éviter d'y être inscrit. L'opinion dissidente, se référant à ceux qui ont eu raison de nous au tribunal, a poursuivi son argumentation:
Dans les faits, ils ne sélectionnent qu’un seul exemple: un cas exceptionnel mettant en cause une délinquante en fauteuil roulant. Le fait que mes collègues ne peuvent citer qu’un seul cas extrême où il ne faisait aucun doute au moment du prononcé de la peine que le délinquant ne présentait pas un « risque accru » de récidive tend à prouver mon point, pas le leur.
Les juges dissidents ont fait valoir ceci:
En concluant que cet article est inconstitutionnel, mes collègues se fondent sur la suppression du pouvoir discrétionnaire des juges d’accorder une dispense aux délinquants qui ne présentent pas un « risque accru » de récidive. Toutefois, l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire est justement le problème qui a incité le Parlement à modifier le Code criminel afin d’y prévoir l’inscription automatique des délinquants sexuels en application de la Loi sur l’enregistrement de renseignements sur les délinquants sexuels [...]
En conclusion, la Cour suprême, du moins dans son opinion dissidente, a indiqué ceci:
En particulier, de nombreux juges avaient exercé leur pouvoir discrétionnaire de dispenser certains délinquants d’une manière manifestement inappropriée, et le taux peu élevé d’inscription au registre minait son efficacité. La preuve montre clairement que même les délinquants sexuels qui présentent relativement moins de risques sont plus à risque de commettre une autre infraction sexuelle que la population criminelle générale. En outre, il est clair qu’on ne peut prédire de manière fiable, au moment de la détermination de la peine, quels délinquants récidiveront. Compte tenu de ce risque incertain, le Parlement était en droit de ratisser large.
J'ai trouvé cela très convaincant. Je m'inquiète. Je suis consciente que cette mesure législative semble faire ce qu'elle peut, mais je ne suis pas convaincue qu'elle aille assez loin. Je crois qu'elle pourrait aller plus loin. Nous tentons de déterminer si nous pouvons l'améliorer au fil des étapes du processus législatif au Parlement et aux comités.
En guise de conclusion, je répète qu'il y a une raison derrière cette obligation. J'accepte la décision de la Cour suprême, mais comme l'indique l'opinion dissidente, il s'agit de délinquants sexuels et de leur incidence sur des victimes parmi les plus vulnérables. Nous voulons que la mesure législative ait un effet maximal compte tenu de la décision de la Cour suprême, mais nous ne sommes pas totalement convaincus que c'est le cas. Nous allons nous pencher très attentivement sur la question tout au long des diverses étapes.
:
Monsieur le Président, c'est toujours un plaisir de prendre la parole au nom des habitants de Kamloops-Thompson-Cariboo.
Avant de commencer, je tiens à souligner que le neveu de ma femme, Dustin Rise Dempsey, est décédé cette semaine. C'est évidemment très regrettable. Il était très jeune. Il laisse derrière lui son père, Raeo, le frère de ma femme, et sa mère, Vivian. J'offre mes condoléances à toute la famille. Que la lumière éternelle brille sur lui.
Je tiens également à offrir mes condoléances à l'une de mes amies du secondaire, Stacey Gagnon, et à sa famille. Son père, Leslie Gagnon, ou Les, comme on l'appelait communément, est décédé récemment. J'offre également mes plus sincères condoléances à sa famille. Que la lumière éternelle brille sur lui.
Je trouve intéressant de parler de cette question à la Chambre. Il s'agit d'une question dont j'aurais probablement parlé avec mes étudiants lorsque je donnais un cours avancé de droit pénal ou de détermination de la peine à la Faculté de droit de l'Université Thompson Rivers. Ce cours a depuis été repris par l'un de mes mentors, le juge Greg Koturbash. Il enseigne demain, alors il se peut qu'il en parle.
J'aurais parlé de la notion de dialogue entre les décisions de la Cour suprême et le Parlement. Ce qu'on voit souvent relativement aux affaires criminelles, c'est que les tribunaux rendent leurs décisions et que le Parlement est censé réagir. Or, avec le gouvernement libéral, on a bien souvent l'impression que les tribunaux rendent leurs décisions et que le Parlement ne réagit pas.
J'ai remarqué que le Parlement n'a pas réagi dans le dossier des infractions d'ordre sexuel. Je mets le sur la sellette, et j'ai l'impression qu'il va me poser une question tout à l'heure. Je l'invite à le faire.
Monsieur le Président, je vais le regarder directement. J'ai demandé au s'il était en faveur de limiter le recours aux ordonnances de sursis — c'est-à-dire l'assignation à domicile ou les peines purgées dans la communauté —, notamment pour les délinquants qui s'en prennent aux enfants. Est-ce que la réponse est oui ou non? J'espère vraiment qu'il reviendra sur ce sujet pendant la période de questions et observations.
Il y a une chose qui m'a frappé. C'est le premier article. Il est question de remplacer une disposition de la loi, l'alinéa 153.1(1)a), pour faire passer la peine maximale de cinq à dix ans. Pour une raison ou une autre, c'est passé inaperçu. Je crois que cela concerne l'exploitation sexuelle d'une personne handicapée. Selon le projet de loi, sur déclaration de culpabilité par mise en accusation, cet acte criminel sera passible d'un emprisonnement maximal de 10 ans.
J’en viens au point qui me contrarie le plus: certes, nous augmentons la peine prévue, mais nous ne l’augmentons pas suffisamment. Quand j’ai présenté le projet de loi , je me suis fait chahuter par les libéraux. Pourtant, le projet de loi abordait précisément ce point. Je me permets d’y revenir, car je pense qu’il est extrêmement important et qu’il s’inscrit dans le cadre de cette discussion sur la protection des enfants, un objectif fondamental du projet de loi qui nous occupe, selon le .
Le Code criminel prévoit plusieurs infractions passibles d’une peine d’emprisonnement à perpétuité, qui est la peine maximale. Je cite toujours l’exemple du vol qualifié. Le vol qualifié est la prise délibérée d’un bien sans le consentement du propriétaire. Un vol commis avec violence est un vol qualifié. Rien de plus simple.
Qu’est-ce qu’une agression sexuelle? Qu’est-ce qu’une infraction sexuelle? Une infraction sexuelle comporte un élément sexuel, de la violence et une absence de consentement. Quelle est la peine maximale encourue? Dix ans. Une agression sexuelle contre un adulte est passible d’un emprisonnement maximal de 10 ans. La peine maximale pour la plupart des infractions sexuelles commises contre des enfants est de 14 ans, mais nous tombons dans le même piège ici.
Dans les faits, nous nous trouvons à dire que s'emparer d'un bien sans consentement est une infraction plus grave que d'enlever la dignité sexuelle d'une personne. On parle de seulement 10 ans. C'est la valeur que nous donnons à la dignité, à l'inviolabilité et au consentement d'une personne: 10 ans. Il revient à la Chambre, à nous tous ici, de faire en sorte que le Parlement corrige cette situation.
Je poserais la question suivante à tout le monde ici: les députés préféreraient-ils subir un vol qualifié ou une agression sexuelle? Je peux déjà dire à la Chambre que pratiquement tous les députés choisiraient le vol qualifié sans la moindre hésitation. Pourquoi? Parce que c'est une question de dignité de la personne et d'intégrité physique.
Il y a des victimes, comme les gens de My Voice, My Choice, qui m'ont parlé avec beaucoup d'éloquence dans le passé et que j'ai trouvés très convaincants. Les victimes purgent souvent une peine psychologique à perpétuité. Lorsque je demande au s'il est favorable à la détention à domicile alors que les victimes sont elles-mêmes dans une prison psychologique, il y a une raison à cela.
En tant que législateurs, nous n'avons pas suivi l'évolution de la recherche qui nous révèle les effets pernicieux — et parfois insidieux — de la violence sexuelle contre les enfants. Oui, un registre est une mesure utile, mais la sanction elle-même est une mesure fondamentale. Je le signale au et j'espère qu'il répondra à cette question, et que la réponse sera simplement un « oui » ou un « non »: appuyez-vous l'élimination des ordonnances de sursis pour les infractions sexuelles, en particulier les infractions sexuelles contre les enfants?
Mon message ne s'adresse pas seulement aux députés. Nous avons parlé de dialogue. Monsieur Iacobucci en a parlé dans une décision qu'il a rendue il y a de nombreuses années. C'est un dialogue que je souhaite avoir avec les juges, les procureurs de la Couronne, dont je faisais partie, les avocats de la défense et, surtout, les victimes. Je souhaite que les députés se portent à la défense des victimes chaque fois qu'ils en ont l'occasion.
Je l'ai déjà dit et je le répète. Si le député de Kamloops—Thompson—Cariboo que je suis et mes collègues conservateurs avons un jour l'occasion de légiférer dans ce domaine, je poursuivrai mes efforts tant que l'opinion de toutes les victimes du pays ne sera pas représentée et que la gravité des infractions, en particulier des infractions de nature sexuelle commises contre des enfants, ne sera pas prise en compte de manière adéquate dans la détermination de la peine infligée à ceux qui veulent porter atteinte à l'innocence d'un enfant.
J'ai une certaine expérience de cet enjeu d'interdiction de publication. C'est une question que mon collègue d' a posée à ma collègue de après son excellent discours. Je me souviens — et c'était l'une des premières fois que je voyais une telle chose — qu'une victime a renoncé à l'interdiction de publier son nom. Un certain nombre de personnes de My Voice, My Choice se sont présentées et ont dit: « J'ai été victime. S'il vous plaît, laissez-moi décider si je devrais être entendue ou non. » Cette question sera débattue en comité. J'espère qu'un représentant de ce groupe sera autorisé à assister aux travaux du comité.
Ce projet de loi prévoit aussi la possibilité pour une victime de présenter une demande — qui exposera aussi ses souhaits — pour faire en sorte que le tribunal tienne une audience afin d'établir si l'ordonnance sera révoquée. Bien trop souvent, nous n'intégrons pas les victimes à la procédure. Elles ne sont prises en compte qu'après coup.
La détermination de la peine se fait très souvent selon approche axée sur le délinquant, ce que je peux comprendre. C'est lui qui reçoit la peine. Toutefois, lorsqu'on se penche sur les personnes qui subissent des conséquences, il n'y a pas que le délinquant, surtout dans le cas d'infractions sexuelles. Une des infractions primaires, par exemple, est l'article 163.1, associé à la « pornographie juvénile ». J'espère que ce terme ne sera plus jamais utilisé dans cette mesure législative.
Le projet de loi , que j'ai rédigé et qui a été présenté par mon collègue de l', est actuellement à l'étape de la troisième lecture au Sénat. Il remplacerait le terme « pornographie juvénile » par « matériel d’abus et d’exploitation pédosexuels » afin de mieux refléter les préjudices réellement causés.
Je constate que mon temps de parole est presque écoulé. J'espère que le prendra la parole au moment des questions et observations pour nous dire s'il est pour l'élimination de la détention à domicile dans le cas des individus qui flétrissent l'innocence des enfants victimes d'abus.
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Monsieur le Président, en effet, ce sont des débats qui nous interpellent et qui font qu'on en parle peut-être plus longtemps que pour d'autres projets de loi.
Cela dit, je dois dire que le projet de loi m'apparaît comme étant non seulement souhaitable, mais essentiel. Le registre des délinquants sexuels permet aux policiers de mieux travailler. Il permet de mieux encadrer les délinquants récidivistes et les délinquants graves.
Bien sûr, le Bloc québécois va appuyer le projet de loi . Est-ce que nous allons proposer des amendements en comité? On verra, possiblement. Sur le fond, je pense que c'est un bon projet de loi. Mon premier geste serait de remercier le sénateur Gold d'avoir présenté ce projet de loi le printemps dernier et d'avoir fait en sorte que le Sénat bouge rapidement.
Deux mois, on peut trouver cela long des fois, mais on peut aussi trouver cela court. Dans la vie parlementaire, des projets de loi qui sont déposés et adoptés en troisième lecture au bout de deux mois, il n'y en a pas tant que cela. Je pense qu'il y a eu diligence du côté du Sénat. Je veux saluer cette diligence et le travail de l'honorable sénateur Gold, que je remercie.
Après son adoption par le Sénat le 22 juin, le projet de loi se retrouve ici cet automne. J'en ai parlé dans mes questions précédentes. J'aurais voulu entendre le ministre. Je comprends que ce ne sera pas possible aujourd'hui. J'espère que, dans les prochains jours, on pourra avoir un certain éclaircissement sur la question des délais.
Cela dit, c'est un bon projet de loi qui va mieux baliser, mieux équilibrer les droits des victimes et les droits de l'accusé. Il faut se rappeler qu'on vit dans un système juridique où la présomption d'innocence prévaut. Particulièrement au Québec, où on a adopté bon nombre de lois à ce sujet, on souhaite la réhabilitation des délinquants. On souhaite que ces gens puissent, de toutes sortes de façons, améliorer leur comportement, leur attitude qui a posé problème et se réintégrer dans la société. On veut qu'ils redeviennent ou qu'ils deviennent les actifs qu'ils peuvent être pour la société. Donc, on croit à la réhabilitation.
Dans ce sens, on pourrait prétendre que le registre des délinquants sexuels vient un peu contrecarrer les efforts de réhabilitation en disant à quelqu'un que non seulement on l'a puni pour le crime qu'il a commis, mais qu'on va, en plus, l'inscrire sur un registre pendant un certain temps. Comment règle-t-on ce dilemme? Je pense qu'il y a des crimes qui méritent des exceptions.
On le voit dans le projet de loi, quand on parle d'agression sexuelle, on ne parle pas de quelqu'un qui a pris une bière de trop dans un bar et qui a donné une tape sur les fesses de son amoureux ou de son amoureuse. On ne parle pas d'un crime qu'on pourrait qualifier d'accidentel, voire banal, comme certains pourraient le dire. On parle de gens qui sont des récidivistes, qui ont donc fréquemment été condamnés pour des crimes d'ordre sexuel, ou de gens qui ont commis des agressions sexuelles sur des enfants.
Je ne connais personne, dans la société, du moins dans mes amis et dans mes contacts, qui prétend qu'une agression sexuelle sur un enfant n'est pas grave. Je connais des personnes qui ont subi des agressions sexuelles dans leur enfance. Je peux dire que c'est vrai que cela laisse des traces toute la vie. Tout le monde n'en sort pas non plus sonné. Tout le monde n'est pas médicamenté pour le reste de sa vie. Or, cela laisse des traces dans tous les cas.
Je pense que quelqu'un qui n'a pas la capacité de contrôler ses comportements et qui se permet d'agresser des enfants mérite une sanction appropriée et mérite également que la société se protège un peu mieux de cet individu. En ce sens, le registre des délinquants sexuels vient permettre aux policiers d'encadrer et de suivre ces individus. Je pense que c'est une bonne chose. Cela dit, on n'enregistre pas tout le monde de la même façon.
La Cour suprême a rendu une décision l'an dernier. Dans environ un mois, cela fera un an que la décision a été rendue. Selon ce qu'elle disait dans sa décision, l'enregistrement automatique de tous les contrevenants à des crimes d'ordre sexuel irait à l'encontre des dispositions de la Charte canadienne des droits et libertés.
Soit, je pense que c'est une décision qui était bien fondée. Or, le projet de loi vise à corriger ce problème en disant qu'on n'inscrira pas tout le monde automatiquement, à tort et à travers et dans toutes les situations. Nous n'inscrirons de façon obligatoire ou automatique que les délinquants qui auront été condamnés à des peines de plus de deux ans pour ce type de crime, y compris ceux qui auront agressé des enfants ou qui seront récidivistes. Voilà pour l'inscription automatique. Je pense que, dans ces cas, il est sage de prévoir une inscription automatique.
Maintenant, pour les autres contrevenants, on dit qu'il y aura une présomption. Cela veut dire qu'on ne demandera pas à la Couronne de prouver qu'il faut inscrire l'individu. On indique qu'il y a une présomption selon laquelle l'individu doit être inscrit. On va demander à l'individu de faire la preuve qu'il est inutile de l'inscrire au registre des délinquants sexuels parce que son infraction n'a aucun lien avec les objectifs prévus à la loi qui crée ce registre, ou parce que son inscription serait totalement disproportionnée par rapport au crime qu'il a commis.
Je vais donner un exemple. Quelqu'un qui tape les fesses de quelqu'un d'autre dans un bar commet une agression sexuelle et pourrait être condamné pour cela. Est-ce que cela mérite de l'inscrire à vie dans un registre de délinquants sexuels? À mon avis, non, mais c'est discutable. Il faut faire la distinction entre ce crime et celui d'une personne qui, par exemple, aurait commis un viol à l'endroit d'une petite fille de douze ans.
Avec le projet de loi S‑12, on va équilibrer un peu l'inscription au registre en disant que, pour les crimes graves, c'est automatique, et que, pour les autres, on va demander à l'individu de démontrer au juge qu'il ne devrait pas être inscrit au registre pour telle ou telle raison. Si on fait la preuve que son inscription n'aurait aucun lien avec les objectifs du registre, qui est d'aider les policiers dans leur travail, ou si on fait la preuve que ce serait totalement disproportionné, l'individu en question ne sera pas inscrit. Cela n'empêchera pas qu'il soit condamné. Il y aura un procès, et, si l'individu est reconnu coupable, on lui imposera une peine. Il aura sa peine de toute façon, mais l'inscription au registre n'aura pas lieu.
Je pense que c'est un compromis acceptable, un honorable compromis qui nous permet d'améliorer les dispositions sur le registre. Je pense que, à cet égard, on ne peut que saluer la décision qu'a rendue la Cour suprême l'an dernier et saluer le dépôt de ce projet de loi par l'honorable sénateur Gold.
Maintenant, le projet de loi S‑12 ne fait pas que cela. Il prévoit également une meilleure participation des victimes aux procédures judiciaires. Je siège au Comité permanent de la justice et des droits de la personne depuis quelque temps. Nous avons mené des études sur cette question, notamment sur une révision de la Charte canadienne des droits des victimes. Bon nombre de victimes sont venues nous expliquer que certaines d'entre elles souhaitaient participer davantage au procès, être mieux informées et être interpellées par le procureur de la Couronne lorsqu'il y a des décisions importantes à prendre. D'autres victimes ont dit qu'elles préféraient rester chez elles, qu'elles ne tenaient pas à se mêler du procès de leur agresseur. Les deux positions se valent. Je pense qu'on doit respecter le droit des victimes de participer ou non. C'est ce que prévoit ce projet de loi.
Je parlais de participation au sens large, mais il y a un sujet sur lequel les victimes souhaitent particulièrement être interpellées, et c'est les ordonnances de non-publication. Il y a plusieurs années, on a adopté des dispositions qui font que, dans certains cas, le juge peut ordonner la non-publication des débats. Dans de tels cas, on ne saura pas qui sont les individus concernés parce qu'on ne veut pas identifier les victimes. On veut éviter qu'une victime soit identifiée si elle ne le souhaite pas, qu'elle subisse un opprobre et qu'elle doive répondre d'actes qui ne sont pas les siens, mais ceux de son agresseur. On a dit qu'on allait ordonner la non-publication des débats. Il y a aussi une autre étape où on peut ordonner le huis clos, mais on ne parle pas de cela présentement, on parle de la non-publication.
À cette époque, cela a été fait de bonne foi dans le but d'aider les victimes, et probablement que tout le monde était d'accord pour dire que c'était une bonne idée. Or, les victimes nous disent maintenant que, dans certains cas, elles sont bien contentes qu'il y ait une ordonnance de non-publication. Dans d'autres cas, elles n'en veulent pas. Il y a des victimes qui souhaitent parler du crime dont elles ont été l'objet, soit avec des journalistes, soit à la télévision, soit publiquement, par l'entremise des réseaux sociaux ou autrement. Toutefois, il y a des victimes pour qui, sur le plan thérapeutique, c'est utile de parler du crime dont elles ont été victimes. Or, dans l'état actuel des choses, si elles le font quand une ordonnance de non-publication a été rendue, elles contreviennent à l'ordonnance et s'exposent elles-mêmes à des sanctions pour cette contravention. Alors les victimes nous ont dit de les laisser décider. Puisque nous disons faire cela pour les protéger, nous devrions les interpeller et leur demander ce qu'elles en pensent. Si elles souhaitent ne pas être l'objet d'une ordonnance de non-publication, il s'agit de ne pas la rendre. Si elles souhaitent être l'objet d'une ordonnance de non-publication, il s'agit de la rendre.
Cela m'apparaît sage et cela va contribuer à améliorer la législation fédérale en matière criminelle, c'est-à-dire le Code criminel. Je ne peux qu'applaudir à cette disposition du projet de loi . C'est conforme au rapport que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a déposé en décembre dernier. Je peux témoigner que c'est conforme à ce que des témoins nous disaient en comité. Je pense que cela tombe sous le sens.
Ce que cette disposition va prévoir, c'est qu'avant de rendre une ordonnance de non-publication, la Couronne va devoir consulter la ou les victimes. Je crois que le ministre disait tantôt que s'il y a deux victimes, que l'une des deux souhaite que ce soit non publié alors que l'autre souhaite que ce le soit, il va falloir que le tribunal tienne compte de cette distinction et assure la protection de l'identité de la victime qui ne souhaite pas être identifiée tout en permettant l'identification de celle qui souhaite l'être. Il y aura un travail, un exercice d'arbitrage, si je puis dire, de l'intérêt supérieur des victimes qui devra être fait par le tribunal le moment venu. Je pense qu'il y a moyen d'y arriver. Ainsi, les victimes vont donc pouvoir intervenir sur la diffusion ou non d'une ordonnance de non-publication.
Par ailleurs, elles vont pouvoir demander la levée de cette ordonnance si elle est rendue. Il est possible qu'au départ la victime dise qu'elle ne veut pas être identifiée et que la non-publication est une bonne idée, mais, qu'au bout de trois mois, six mois, un an ou trois ans, elle se dise que le temps est passé, qu'elle a fait le ménage dans ses idées et qu'elle a envie de parler du crime dont elle a été l'objet. Ce n'était pas le cas avant, mais, maintenant, on va permettre aux victimes de demander la levée de l'ordonnance de non-publication, ce qui, encore une fois, m'apparaît tout à fait raisonnable.
Finalement, on va permettre aux victimes d'être informées, d'avoir une sorte de suivi sur le parcours de l'agresseur. Est-ce qu'il est en prison? À quel endroit est-il? Les victimes vont pouvoir obtenir des informations du service correctionnel et vont pouvoir ensuite avoir des informations sur la date de sortie de l'individu, sur les conditions de sa libération, et ainsi de suite. Cela va permettre aux victimes de se préparer au fait que l'agresseur peut, ou non, être en liberté, et cela va leur permettre de se prémunir ou d'intervenir le moment venu.
Je pense que ce sont des dispositions raisonnables, souhaitables, conformes à ce qui a été demandé par les victimes et conformes au rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne déposé en décembre dernier.
Je reviens maintenant sur le laxisme du gouvernement actuel. Je ne sais plus comment le dire parce que j'ai l'impression que je me répète et les gens vont se dire que le député de Rivière‑du‑Nord a juste un discours et répète toujours les mêmes affaires. Ce n'est pas cela. Le député de Rivière-du-Nord est face au même gouvernement depuis huit ans, et il trouve que le gouvernement traîne un peu les pieds à ce sujet. Je le dis en tout respect pour le actuel et son prédécesseur, car je suis convaincu que ce sont des gens de bonne foi, mais je n'ai aucune idée de la raison pour laquelle cela « jamme dans le coude ». Il ne s'est rien passé pendant six mois. Mon collègue du Parti conservateur demandait tantôt, avec raison, ce qu'ils ont fait.
J'aimerais entendre un membre du conseil des ministres, voire le lui-même, venir me dire qu'il s'excuse pour le délai et que c'est tombé entre deux chaises. Je ne peux même pas imaginer quelle raison on va me sortir. J'aimerais avoir des explications parce que c'est une fâcheuse habitude qui cause des préjudices énormes, d'abord aux victimes. En ce moment, il y a un risque que, le 29 octobre, il n'y ait plus de registre des délinquants sexuels. Il va tomber. La Cour suprême l'a dit l'an dernier. On ne peut pas la blâmer. Celle-ci a laissé un an au gouvernement pour bouger. Cela a pris six mois, puis ce n'est pas le gouvernement qui a bougé, c'est un sénateur.
Que se passe-t-il avec le gouvernement? Y a-t-il encore un pilote dans l'avion? J'aimerais le savoir.
Tantôt, le nous disait qu'il espère que l'opposition va collaborer parce qu'on a besoin que le projet de loi soit adopté avant le 29 octobre. Je suis bien d'accord. J'ai envie de dire que nous allons collaborer et que nous allons encore une fois bulldozer les dispositions pour que ça entre en vigueur rapidement. D'ailleurs, cette semaine, on a dû bulldozer les dispositions concernant le projet de loi pour la mise en liberté sous caution. Or, le « bulldozage » a des effets pervers. Les principes et les règles de procédure qu'on adopte ont leur raison d'être.
Qu'on ne vienne pas me dire que l'étude en comité des projets de loi est inutile parce que je vais me sentir visé. Si tel est le cas, cela fait huit ans que nous travaillons pour rien. D'autres que moi sont ici depuis plus de huit ans. Je pense à mon collègue le député de qui est ici depuis presque une quarantaine d'années. Va-t-on lui dire qu'il a travaillé pour rien tout ce temps? Je ne pense pas. Des gens ont travaillé à rédiger et à nous faire adopter ces règles. Ont-ils travaillé pour rien? Je ne pense pas. Il faut respecter ces règles.
Certes, il y a des situations d'exception. Cette semaine, le projet de loi en était une. Cela constituait une exception au principe de la présomption d'innocence. On disait qu'on allait garder quelqu'un en prison avant même qu'il soit condamné. On est assez loin de la présomption d'innocence, mais on a convenu que c'est une exception qui se justifie dans certains cas. C'est ce qu'on a fait et le projet de loi a été adopté.
Aujourd'hui, on nous demande de faire le même exercice pour le registre des délinquants sexuels. Je ne suis pas en train de dire que le registre n'est pas important. C'est très important. Nous souhaitons que l'inscription soit modifiée, comme proposé dans le projet de loi . Or, je déplore et je m'inquiète du fait que le gouvernement propose encore une fois de bulldozer l'exercice parlementaire.
Je ne veux pas faire référence à la présence ou à l'absence d'un député à la Chambre, mais le ministre pourrait-il être présent, un moment donné, et nous expliquer comment il se fait qu'on se retrouve encore, pour une deuxième fois en deux jours, dans une situation où on doit bulldozer les procédures parlementaires?
Comment se fait-il que, dans ce cas-ci, pendant six mois, on ait regardé voler les papillons, qu'au bout de ces six mois, un sénateur ait dit qu'il fallait le faire et qu'aujourd'hui, on nous dise qu'on vient de se réveiller et de réaliser que le sénateur avait raison et, donc, qu'on doit adopter cela au plus vite?
Ce n'est pas sérieux. Je demande un peu de sérieux de la part du gouvernement parce que le gouvernement nous demande de l'être. J'ai envie de dire que nous allons l'être. Pourrait-on aussi, du côté du gouvernement, être un peu sérieux en ce qui a trait à l'adoption des projets de loi qui sont déposés à la Chambre?
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Madame la Présidente, avant de commencer à parler du projet de loi , en tant que député faisant partie de ceux qui s'affichent ouvertement comme des gais au Parlement, je voudrais rapidement aborder la question des événements qui se déroulent sur la Colline aujourd'hui.
J'étais ravi de voir que, à Ottawa, un grand nombre de contre-manifestants se sont présentés pour s'opposer à la vague de haine à l'endroit des personnes trans et des membres de la communauté 2LGBTIA qui déferle sur le pays. Je suis également heureux d'entendre le gouvernement s'engager à travailler avec nous au sujet d'une motion visant à condamner la haine, la perturbation d'événements publics et la destruction des institutions publiques, comme les conseils scolaires, pour des motifs malavisés et haineux. J'ai hâte de collaborer à ces travaux. Par contre, pour y arriver, il faut que le comité de la justice se réunisse.
Un des éléments pressants devant nous est évidemment le projet de loi . Par contre, je dois avouer que je suis un peu déçu qu'il n'y ait pas eu de réunion du comité de la justice cette semaine. J'implore les leaders de tous les partis représentés à la Chambre de se rencontrer, de reformer le comité de la justice et de s'assurer qu'il reprenne ses travaux le plus rapidement possible. Ce n'est pas seulement pour le projet de loi , c'est aussi pour ma motion, qui porte sur la vague de haine dont je viens de parler. Je voudrais que le comité s'en occupe.
Pour revenir au projet de loi, disons que plusieurs observations ont été formulées concernant le temps qu'il a pris pour arriver à la Chambre. Je suis d'avis qu'il aurait dû nous parvenir plus tôt, mais je dois avouer que les libéraux ont bien joué. Les gens se demandent pourquoi le projet de loi est arrivé au Sénat en premier lieu. Au fait, le gouvernement a procédé ainsi pour faire adopter le projet de loi plus rapidement en demandant au Sénat de faire une partie du travail et de nous renvoyer le projet de loi par la suite. Lorsque nous aurons terminé de l'examiner, il aura déjà été adopté au Sénat, ce qui va faire avancer les choses plus rapidement. Toutefois, il ne faut pas que, comme l'a déjà dit l'un des députés, nous prononcions des discours qui n'en finissent pas pour dire la même chose et pour appuyer le même projet de loi. Un travail important attend notre comité, et j'espère que tous les partis feront en sorte que nous puissions renvoyer le projet de loi au comité dès que possible pour qu'il fasse ce travail.
Bref, le projet de loi comporte deux volets. Certains députés n'ont abordé que l'un d'entre eux dans leur discours, mais il y en a bel et bien deux, et celui qui m'importe le plus porte sur les victimes d'infractions sexuelles. Il vise à modifier la loi pour redonner un libre arbitre aux victimes en empêchant qu'une affaire soit frappée d'une interdiction de publication contre leur volonté.
Les interdictions de publication sont parfois extrêmement utiles et, dans certains cas, elles sont conformes aux souhaits de la victime. Toutefois, à mon avis, elles constituent un vestige de la vieille mentalité qui dit que les victimes d'agression sexuelle ont fait quelque chose de mal et qu'il vaut donc mieux ne pas révéler publiquement leur nom, sauf que rien ne saurait être plus loin de la vérité. Quoi qu'il en soit, le plus important, comme nous l'a dit le groupe My Voice, My Choice, c'est que les victimes d'actes criminels souhaitent souvent aider à éviter de nouvelles victimes et qu'elles ont le sentiment que les interdictions de publication finissent, involontairement, par protéger les criminels en privant les autres membres de la collectivité de renseignements cruciaux sur les agresseurs potentiels.
Dans l'une de mes questions, j'ai parlé d'une affaire survenue en 2021 en Ontario où une victime d'agression sexuelle a été carrément poursuivie en justice pour avoir enfreint l'interdiction de publication et s'est vu imposer une amende de 2 000 $ et une suramende compensatoire de 600 $. Qu'avait-elle fait? Elle avait été agressée par un ami ou un membre de sa famille, comme c'est le cas dans 80 % des affaires de ce genre, et elle croyait que le reste de son groupe d'amis et de sa famille devait savoir qui était l'auteur du crime. Allant à l'encontre de l'interdiction de publication, elle s'était identifiée comme la victime et elle avait nommé son agresseur afin de protéger d'autres membres de la collectivité. Le projet de loi corrigerait cette lacune dans la loi en redonnant un libre arbitre aux victimes d'agression sexuelle. À mon avis, c'est l'élément le plus important du projet de loi.
Je salue les membres de l'organisme My Voice, My Choice, qui ont comparu devant le comité de la justice dans le cadre de notre étude sur les victimes d'actes criminels. Ils ont très courageusement raconté de nouveau leur histoire et, à bien des égards, ils ont revécu leur traumatisme au bénéfice d'autres victimes.
Je sais, de par mon expérience dans le domaine de la justice pénale, que lorsqu'on parle à des victimes d'acte criminel, ce qui importe le plus pour la quasi-totalité d'entre elles, c'est de veiller à ce que personne d'autre ne subisse ce qui leur est arrivé. Contrairement à ce que les députés d'un autre parti à la Chambre ont tendance à affirmer, la première réaction des victimes n'est pas toujours d'exiger que le coupable soit puni. Elles exigent plutôt que des mesures de prévention et de sensibilisation soient prises pour que cela n'arrive à personne d'autre. La levée des ordonnances de non-publication contribuera à empêcher que d'autres personnes soient victimes d'une infraction sexuelle. Je le répète, j'estime que c'est l'aspect le plus important du projet de loi.
L'autre moitié de ce projet de loi découle de l'arrêt de la Cour suprême sur le registre des délinquants sexuels. J'aimerais dire une évidence: nous sommes tous favorables à la tenue du registre. Cela dit, la Cour a établi que, dans bien des cas, l'enregistrement automatique des délinquants s'applique trop largement. Les délinquants sexuels ne sont jamais un sujet de conversation populaire, mais il y a des cas où des personnes ayant un handicap intellectuel ou des personnes neurodivergentes qui étaient incapables de comprendre les règles qui encadrent les comportements sociaux et de bien interpréter les signaux sociaux ont été condamnées pour des infractions d'ordre sexuel. Je connais deux de ces cas dans ma propre collectivité.
Je ne dirai pas que ce n'était pas leur faute, car je ne veux pas présenter les choses ainsi. Il n'en reste pas moins que c'était attribuable à un manque de compréhension. Ces gens sont très peu susceptibles de récidiver ou de se comporter de nouveau de la même façon, mais ils sont quand même inscrits pour la vie au registre des délinquants sexuels. Dans leur cas, qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire qu'ils ne peuvent pas vivre dans un logement social et qu'ils n'ont pas accès à bon nombre des mesures d'aide sociale dont ils ont besoin, tout cela parce qu'ils sont inscrits au registre des délinquants sexuels.
Ce projet de loi rétablirait, dans un nombre très limité de cas, le pouvoir discrétionnaire des juges de ne pas inscrire ces personnes de façon permanente comme délinquants sexuels. Selon l'analyse du projet de loi effectuée par le ministère de la Justice, plus de 90 % de celles qui sont déjà inscrites continueront de l'être automatiquement. Au plus 10 % d'entre elles, je dirais, pourront présenter une demande à un juge en expliquant pourquoi elles ne devraient pas être inscrites, mais 90 % de ces personnes seront tout de même automatiquement inscrites au registre.
Nous prévenons une injustice envers les gens qui peuvent avoir des difficultés, notamment d'ordre intellectuel, qui les empêchent de comprendre leur comportement. En revanche, nous veillons également à ce que les ressources utilisées par le registre des délinquants sexuels soient concentrées sur les individus qui sont le plus susceptibles de récidiver. À mon avis, voilà une très bonne raison pour les divers partis à la Chambre d'appuyer ce projet de loi.
Si nous ne parvenons pas à nos fins et que le registre des délinquants sexuels cesse d'être fonctionnel, on se retrouvera avec un gros problème sur les bras. Bien que je me joigne aux députés qui disent que le projet de loi aurait déjà dû être présenté à la Chambre, je souligne également que le rapport sur les victimes d'actes criminels, qui comprenait les documents de l'organisme My Voice, My Choice, n'a été déposé à la Chambre qu'en décembre dernier. Le gouvernement a repris les éléments du rapport du comité dans le projet de loi.
Une partie du travail a été réalisée assez rapidement et à la demande des victimes. Nous avons donc l'obligation de ne pas tergiverser longtemps. Je sais que je n'aurai pas tout le temps qui m'est imparti aujourd'hui, mais ce n'est pas grave, car le Nouveau Parti démocratique appuie cette mesure législative. Nous estimons qu'il s'agit d'un projet de loi important et nous voulons qu'il soit renvoyé au comité sans délai.
Il y a d'autres choses que nous devons faire. Le rapport du comité de la justice sur l'amélioration de l'aide aux victimes d'actes criminels est essentiellement resté lettre morte. Je pense que nous devrions tous prendre au sérieux les recommandations qui y figurent. L'ombudsman fédéral des victimes d’actes criminels a également affirmé que nous pouvions améliorer l'aide à ces victimes; le projet de loi est l'un des moyens d'y parvenir.
J'invite tous les députés à appuyer ce projet de loi pour le renvoyer au comité sans délai et j'invite les membres du comité de la justice à en faire une priorité dans nos travaux. Toutefois, pour en revenir aux leaders de tous les partis à la Chambre, je souligne que nous avons manqué toutes nos réunions cette semaine. Pourrait-on former le comité de la justice pour qu'il se réunisse?