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Publications de la Chambre

Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 4 décembre 1995

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

LE CODE CRIMINEL

    Projet de loi C-234. Motion visant à ladeuxième lecture 17111

SUSPENSION

    Suspension de la séance à 11 h 44 17115

REPRISE DE LA SÉANCE

    Reprise de la séance à 11 h 58 17115

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES BALKANS

    M. Mills (Red Deer) 17124
    M. Mills (Red Deer) 17124

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

LES OBLIGATIONS D'ÉPARGNE DU CANADA

LES AFFAIRES INDIENNES

L'UNITÉ NATIONALE

    M. Speaker (Lethbridge) 17133

LA SEMAINE NATIONALE DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

LE MAINTIEN DE LA PAIX

L'UNITÉ NATIONALE

LA FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE

    M. Leroux (Shefford) 17134

L'ÉCONOMIE

LA SASKATCHEWAN

L'INFRASTRUCTURE

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LA RÉFORME DE L'ASSURANCE-CHÔMAGE

LE DÉCÈS DE ROBERTSON DAVIES

LES BANQUES

    Mme Brown (Oakville-Milton) 17135

LE DÉCÈS DE ROBERTSON DAVIES

LA CONCEPTION DE COURTEPOINTES

QUESTIONS ORALES

LA RÉFORME DE L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17136
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17136
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17137
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17137
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17138
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 17138
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17138
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 17138
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17138
    Mme Brown (Calgary-Sud-Est) 17138
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17138

LA FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17139
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17139

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17140
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17140

LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17140
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17140

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17141
    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17141

L'ACHAT D'HÉLICOPTÈRES

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

LA FORCE DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE PAIX

    M. Mills (Red Deer) 17142
    M. Mills (Red Deer) 17142

L'AUTOROUTE DE L'INFORMATION

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

L'ÉCONOMIE

L'EMPLOI

    M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre) 17144

LES DROITS DE LA PERSONNE

    Mme Gagnon (Québec) 17144

LA DÉFENSE NATIONALE

AFFAIRES COURANTES

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

LE BUREAU CANADIEN D'ENQUÊTE SUR LES ACCIDENTS DETRANSPORT ET DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

LE SYNDROME D'ALCOOLISME FOETAL

LES CHÂTIMENTS CORPORELS

LES DROITS DE L'ENFANT À NAÎTRE

L'AIDE AU SUICIDE

L'INDUSTRIE MINIÈRE

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

L'AIDE AU SUICIDE

LES DROITS DE L'ENFANT À NAÎTRE

QUESTIONS AU FEUILLETON

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

LES BALKANS

    Reprise de l'étude de la motion 17146
    M. Leroux (Shefford) 17153
    M. Leroux (Shefford) 17155
    M. Peric
    17160
    M. Hill (Prince George-Peace River) 17163
    M. Leroux (Shefford) 17163
    M. Cann

    Projet de loi C-110. Reprise de l'étude de la motion dedeuxième lecture 17175
    Adoption de la motion par 145 voix contre 76 17176
    Deuxième lecture du projet de loi; renvoi à un comité 17176

LES BALKANS

    Reprise de l'étude de la motion 17177
    M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca) 17179
    M. Hill (Prince George-Peace River) 17186
    M. Hill (Prince George-Peace River) 17195

17111


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 4 décembre 1995


La séance est ouverte à 11 heures.

_______________

Prière

_______________

INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Français]

LE CODE CRIMINEL

M. Pierre de Savoye (Portneuf, BQ) propose que le projet de loi C-234, Loi modifiant le Code criminel (publicité par télécopie), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

-Monsieur le Président, le projet de loi C-234, que je présente ce matin, a pour but d'interdire l'envoi par télécopieur de publicité sur la vente d'un bien ou d'un service à une personne ou à une compagnie qui n'a pas demandé à la recevoir.

La préoccupation dont je vais traiter s'applique aussi à la télécopie électronique, au courrier électronique et voire même à Internet.

Permettez que je situe d'abord deux choses. Premièrement, comme cette Chambre le sait et pour en informer le public qui nous écoute, ce projet de loi n'étant pas votable, tout au plus dans une heure nous aurons terminé d'en parler et il n'y aura pas de conséquence législative à ce dont je vais traiter.

Cependant, et c'est mon deuxième point, le problème dont je fais état est, lui, tout à fait réel et, par conséquent, devra recevoir l'attention législative dans un avenir plus ou moins rapproché. Dans ce sens, le débat que nous faisons ce matin va permettre d'avancer la réflexion et possiblement, je le souhaite, d'en arriver éventuellement à ce que cette Chambre adopte en temps voulu une législation qui réponde vraiment aux besoins.

Quel est ce besoin? Vous le savez, avant d'être membre de cette Chambre, j'exerçais un autre métier, j'étais en affaires et j'avais un télécopieur. Le matin, lorsque je relevais les fax qui étaient arrivés durant la nuit, eh bien oui, il y en a qui arrivaient d'Europe, parce qu'il y a un décalage horaire, leur journée avait commencé un peu plus tôt que la mienne, mais il y en a d'autres qui arrivaient carrément des environs et qui n'avaient rien à voir avec les intérêts d'affaires de ma société. Je recevais de la télécopie-revue ou plus communément appelé du «junk mail» électronique.

Si ce n'était qu'occasionnellement, on pourrait ne pas s'en formaliser, si les quantités étaient minimes, on pourrait passer l'éponge. Mais c'est régulier, et le nombre de pages qui s'impriment-et, soit dit en passant, qui s'imprimaient à mes frais, qui s'impriment aux frais des entreprises qui reçoivent ces fax, parce que c'est sur leur papier que tout cela s'imprime-ce n'est pas minime.

Alors on doit comprendre ici les forces qui sont en présence. D'abord, la télécopie est un moyen peu dispendieux, extrêmement rapide de rejoindre n'importe qui dans le monde. Lorsqu'on applique cette technologie au télémarketing, à la publicité, on se rend compte qu'il devient possible pour n'importe qui, n'importe où de vous inonder d'une publicité dont vous avez ou vous n'avez pas besoin, et plus souvent vous n'en avez pas besoin.

On ne peut pas laisser au strict hasard cet état de choses. On se rappellera, dans le domaine de la téléphonie, que le télémarketing intempestif a été réglementé par le CRTC et que maintenant les sociétés qui veulent téléphoner à des numéros en série doivent suivre un processus respectueux de la réglementation en place. Tel n'est pas le cas avec la télécopie.

(1110)

Il y a des inconvénients à cette télécopie. On pourrait penser aux inconvénients environnementaux. Beaucoup de papier est dépensé inutilement, mais ce n'est pas uniquement les inconvénients environnementaux qui sont en cause. Il y a aussi les inconvénients commerciaux: pendant que votre fax est occupé à recevoir une télécopie que vous n'avez pas sollicitée, qui vous parle de choses qui ne vous intéresse pas et qui le fait sur votre papier en longueur interminable, vos véritables clients ne sont pas capables de communiquer avec vous. Vous n'êtes pas en mesure d'utiliser votre propre machine pour communiquer avec vos intérêts d'affaires. Il y donc ici un affrontement entre vos intérêts et ceux des entreprises qui veulent commercialiser des produits sans vous en avoir demandé nécessairement l'autorisation.

Vous me permettrez de citer à partir d'un document d'Industrie Canada qui s'intitule La Protection de la vie privée et l'autoroute de l'information, de citer le texte suivant qui parle des effets de l'autoroute de l'information sur la vie privée au niveau de l'intrusion. Voici ce que ce texte d'Industrie Canada dit: «Les citoyens souhaiteront aussi être protégés contre les communications indésirables à la suite d'un achat fait par l'intermédiaire de l'autoroute de l'information.» On voit ici que je ne parle seulement de télécopie, mais que je parle aussi de courrier électronique et de ses transmissions par voie de l'autoroute de l'information.

Je poursuis donc la citation: «Les intrusions par télévendeurs ou par le courrier publicitaire ciblé dérange bon nombre de Canadiens. Déjà des sollicitations importunes par télécopieurs sont reçues pour tous genres de services, de la vente de café au voyage d'agrément.» Faut-il contrôler les programmes de commercialisation ciblés qui découlent d'achats séparés ou connexes, par exemple les sollicita-


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tions envoyées par courrier électronique, après l'achat d'un voyage dans les Caraïbes et qui propose bien sûr d'autres voyages?

Dans l'affirmative, s'il faut le contrôler, comment peut-on le contrôler et quelles règles devraient régir la collecte et l'utilisation de l'information sur nos achats ou sur d'autres transactions personnelles? Comment instaurer un équilibre entre ces règles et les possibilités d'être renseignés sur les biens ou les services voulus? On voit donc que la problématique n'est pas seulement le papier, ce n'est pas uniquement le temps où votre télécopieur est sollicité par une ressource externe, mais c'est aussi le fait qu'à partir du propre profil de consommation de votre entreprise ou de votre personne, des entreprises seront en mesure de vous faire parvenir une publicité ciblée que vous n'avez pas demandée et qui utilise vos propres ressources et à la limite vous paralyse dans vos propres opérations.

Il y a un autre aspect: la publicité frauduleuse. Récemment, une enquête de la police de la Communauté urbaine de Montréal, sur la Société d'investissement First Nations Investors Group, a permis de relever une arnaque de près de 500 000 $ au dépens du vingtaine de résidants de la région de Montréal. Selon les policiers, les suspects recrutaient surtout les investisseurs à l'aide d'annonces à partir de médias électroniques, particulièrement par l'envoi de fax directement dans les compagnies et les bureaux d'experts en gestion. Alors une clientèle bien ciblée, on leur envoie des fax et on leur fait miroiter des possibilités.

Cette publicité était faite au nom de la firme Venture and Financing International Corporation, et les individus prétendaient offrir des prêts avantageux pour le financement d'immeubles résidentiels ou commerciaux, on parle de 1 p. 100 de moins que le taux en vigueur. Sans rentrer dans le détail de cette fraude, 500 000 $ ont été recueillis par cette entreprise, de manière frauduleuse, en utilisant justement la capacité d'accès par fax en signalant des numéros de fax sur une clientèle très ciblée.

(1115)

Il y a d'autres possibilités qui, elles, sont peut-être davantage désirables, par exemple, le journal quotidien par télécopieur. Il est maintenant possible pour un éditeur d'expédier à ses lecteurs, à ses abonnés, un quotidien, un journal, soit au moyen de l'inforoute-on parle d'Internet-soit directement par fax.

Effectivement, on connaît un éditeur qui a 300 abonnés à un tarif moyen de 250 $ par année et vous remarquerez que c'est tout à fait astucieux et ingénieux, puisqu'il n'y a ni frais d'impression, ni frais de distribution, l'impression se faisant sur le fax, sur le photocopieur ou sur l'imprimante de l'autre partie.

[Traduction]

Je voudrais maintenant rappeler un incident qui s'est produit à Calgary. Les responsables d'un magasin d'informatique traitent des annonces reçues par télécopieur de publicité inutile généralement destinée à la poubelle. Jusqu'à maintennt, ils estiment recevoir chaque jour au moins dix feuilles qu'ils doivent trier. C'est un problème. En effet, ils ne peuvent décider de jeter automatiquement ces documents, au cas où ils renfermeraient de véritables messages nécessaires à leurs activités commerciales.

D'ailleurs, le Calgary Herald a également signalé que certaines entreprises étaient exaspérées de constater que leurs machines, leurs lignes et leur papier étaient utilisés pour faire des annonces qui ne leur sont pas destinées.

En Alberta, un porte-parole de la compagnie de téléphone AGT a déclaré que la compagnie n'avait aucun contrôle sur l'utilisation des lignes et qu'elle n'avait aucune responsabilité à cet égard envers ses clients. Il y a un problème à Calgary, mais ce n'est pas le seul endroit.

Dans une étude d'avocats de Toronto, un faux message transmis tard le soir a utilisé 99 feuilles avant que le télécopieur ne s'arrête parce qu'il n'y avait plus de papier. C'est un autre problème. Non seulement il y a un gaspillage de papier, mais, quand la machine s'arrête parce qu'il manque de papier, cela empêche la réception d'autres messages qui pourraient être essentiels pour les activités de l'entreprise. Dans le cas de cette étude d'avocats, la machine a été paralysée par une personne de l'extérieur qui ne faisait même pas affaire avec la firme. Cette dernière s'est plainte de n'avoir aucun recours.

Des annonces sont envoyées chaque jour, au cas où celles de la veille seraient passées inaperçues, et causent un véritable casse-tête aux entreprises. La frustration est encore plus grande quand on constate que, même si l'on peut identifier les contrevenants, on ne peut leur demander d'arrêter.

Il y aurait une lueur d'espoir. On nous a dit que le CRTC voulait obtenir l'autorisation de limiter les annonces par télécopieur cet automne. Nous sommes presque à la fin de l'automne, et j'ignore où en est rendue cette demande d'autorisation. En réalité, une nouvelle loi sur les télécommunications nationales doit entrer en vigueur. Malheureusement, le CRTC se demande encore comment exercer son contrôle. Il ne s'agit pas seulement d'exercer un contrôle et d'appliquer des règlements, mais plutôt d'avoir les moyens techniques pour le faire.

[Français]

La compagnie Bell Canada qui, elle aussi, est inondée de plaintes, a demandé au CRTC le droit de retirer le service à ceux qui abusent justement de cette télécopie rebut. Bell Canada a une définition de la télécopie rebut qui, à son avis, «est du matériel non sollicité qui fait la promotion de biens ou de services pour vente, alors qu'il n'y a aucune relation d'affaires entre l'émetteur et le receveur et que cette situation dure depuis six mois.»

(1120)

Avec la proposition de la compagnie Bell, quiconque émettrait un fax, une télécopie rebut plus de deux fois dans le mois au même numéro de téléphone pourrait voir son service interrompu pour cinq jours. Et après trois suspensions de cette nature, la compagnie Bell envisagerait d'interrompre le service de façon permanente.

Comme on voit, il y a un problème. Le problème n'est pas localisé dans une municipalité ou une autre, on le retrouve à travers le Canada. Les compagnies de téléphone sont ouvertes à la question, mais manquent de moyens coercitifs pour intervenir. Le CRTC se


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penche sur la question, mais voit difficilement comment il pourrait utiliser les technologies seules pour parvenir à régler cette question.

Alors, j'espère que les quelques propos que je viens de tenir en cette Chambre auront permis, premièrement, de prendre conscience que le problème existe, de son envergure et de la nécessité d'agir, non pas dans trois, quatre ou cinq ans, mais dans les meilleurs délais. Et c'est ce que je souhaite.

[Traduction]

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir dans le débat du projet de loi C-234, Loi modifiant le Code criminel relativement à la publicité par télécopie. Cette mesure a pour objet d'interdire, en en faisant une infraction au Code criminel, l'envoi par télécopieur de publicité à une personne ou à une compagnie qui n'a pas demandé à la recevoir.

Le député d'en face estime clairement que les publicités non sollicitées reçues par télécopieur peuvent être un fléau pour beaucoup de gens, d'organismes et d'entreprises, surtout quand ces publicités sont longues, nombreuses et répétitives. Elles consomment beaucoup de papier thermosensible, bloquent l'utilisation du télécopieur qui n'est plus en mesure d'envoyer les messages importants à envoyer, et ainsi de suite.

Tous les députés peuvent sûrement comprendre cela et sympathisent sûrement à l'égard de ce problème. Cependant, même si l'envoi de documents non sollicités par télécopieur peut constituer un véritable fléau, il ne s'agit pas à mon avis d'une conduite qui devrait être punie par le Code criminel.

Le projet de loi C-234 propose d'en faire une infraction au Code criminel. Je ne pense pas qu'il soit approprié de faire de l'usage abusif d'un télécopieur une infraction criminelle. Le droit pénal a pour objet de contribuer à maintenir une société juste, paisible et sécuritaire. On reconnaît depuis longtemps que le droit pénal joue un rôle important dans la protection de nos valeurs sociales, mais il y a d'autres façons de protéger ces valeurs sociales.

L'utilisation abusive d'un télécopieur et la transmission abusive de documents par ce moyen constituent un problème contre lequel il vaudrait mieux utiliser des moyens moins gênants, moins coercitifs, et des solutions plus positives. Même si je reconnais que ce genre d'abus constitue un fléau, je ne peux pas aller jusqu'à dire qu'il faut traiter cette conduite avec toute la rigueur du droit pénal.

Le monde juridique et la société en général assistent avec une inquiétude croissante à la surcriminalisation de notre société et de nos lois. Il est peut-être utile de revenir sur les principes établis qui peuvent se révéler pertinents pour résoudre le problème. Ces principes pourraient guider notre pays quand il s'agit de déterminer ce qui devrait relever du droit pénal et ce qui devrait être réglementé par des moyens moins rigoureux.

Un rapport de 1982, intitulé «Le droit pénal dans la société canadienne», énonçait la politique du gouvernement du Canada au sujet de la véritable portée et des principes de base du droit pénal. On y trouve le clair énoncé suivant:

Le droit pénal devrait être réservé à la répression des conduites qui sont vraiment dangereuses (. . .) Le droit pénal ne devrait servir que lorsque le tort causé ou qu'on menace de causer est grave, et lorsque les autres moyens moins coercitifs ou gênants ne fonctionnent pas ou ne sont pas appropriés.
Dans cette optique, compte tenu de cette opinion et de cette orientation, peut-on dire que l'envoi par télécopie de publicité non désirée cause un tort sérieux à des particuliers ou à des organisations? Nous convenons tous que c'est ennuyeux, mais est-ce nuisible au point d'exiger que cet acte soit considéré comme criminel, avec toutes les conséquences que cela comporte: casier judiciaire, difficultés pour faire des études et décrocher un emploi? Ce n'est pas mon avis. C'est peut-être ennuyeux et dérangeant, mais je doute qu'il y ait jamais grand mal de fait. L'envoi par télécopie de publicité non réclamée contrevient-il sérieusement à nos valeurs fondamentales au point de nuire à la société? Bien sûr que non.

(1125)

Il me semble donc clair que cet acte ne doit pas relever du droit pénal. Si nous voulons que le système de justice pénale demeure un mécanisme efficace pour protéger les valeurs sociales, il importe de ne pas en abuser. Nous savons tous que notre système judiciaire est déjà surchargé. Il faut donc faire preuve de prudence lorsqu'il s'agit de prévoir de nouvelles infractions pénales. Cette prudence m'incite justement à conclure que la Chambre aurait tort de recourir à un instrument aussi puissant que le droit criminel.

Il y a autre chose qui me préoccupe dans le projet de loi. Il propose de faire de l'envoi par télécopie de publicité non désirée une infraction punissable. Toute personne reconnue coupable de cette infraction serait passible d'une amende d'au plus 200 $. À première vue, cette faible amende ne semble pas une atteinte excessive à la liberté individuelle.

Nous ne devons toutefois pas oublier, surtout à la Chambre et surtout aujourd'hui, avec ce qui se passe dans notre pays, que le paragraphe 787(2) du Code criminel stipule que quiconque néglige de payer une amende peut être condamné à une peine de prison d'un maximum de six mois. Dans les faits, cette infraction peut être punie de six mois d'emprisonnement. J'estime que ce serait là une atteinte injustifiable de l'État à la liberté individuelle. Je doute fort qu'il faille rendre illégal l'envoi de publicité par télécopieur pour faire régner la justice et pour protéger la société canadienne.

Je dois aussi exprimer mes réserves au sujet du libellé du projet de loi, qui ne définit pas clairement la nature de l'infraction. Par exemple, le projet de loi interdit l'envoi par télécopieur de publicité non sollicitée sur la vente d'un bien ou d'un service. De la publicité non sollicitée par qui? Puisque les mots ``publicité sur la vente'' sont utilisés, faut-il en conclure qu'il est désormais criminel de tenter de vendre quelque chose? Est-il par ailleurs légal de tenter de louer quelque chose? On peut interpréter cette expression de mille et une façons. Le projet de loi ne précise pas non plus qui est responsable. L'employeur, l'employé ou les deux?

Je le répète, les principes fondamentaux des droits et libertés individuels exigent que les infractions criminelles soient très clairement définies. Le projet de loi se prête à de nombreuses interprétations et, pourtant, il vise à créer une nouvelle infraction criminelle.


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Le droit criminel ne peut être aussi arbitraire. Dans sa version actuelle, le projet de loi n'est pas assez clair et transforme en actes punissables bien des gestes et des situations qui n'ont rien de criminel.

Encore une fois, je comprends ce qui a pu motiver le dépôt de ce projet de loi. Nous avons déjà, pour la plupart, reçu des messages publicitaires par télécopieur sans en avoir fait la demande et nous savons que cela peut être ennuyeux. Cependant, comme je l'ai expliqué aujourd'hui, le projet de loi suscite des préoccupations fondamentales. Je suis convaincue qu'il est inopportun d'inscrire une nouvelle infraction au Code criminel interdisant l'envoi par télécopieur de publicité à une personne ou un organisme qui n'en a pas fait la demande.

Il est inutile d'utiliser le droit criminel pour tenter de régler ce problème. On devrait avoir recours au droit criminel que lorsque c'est absolument nécessaire pour faire régner la justice et protéger les intérêts de la société. Il est peut-être possible de trouver des solutions plus adéquates et moins importunes à ce problème, des solutions que je pourrais appuyer, mais il m'est impossible d'appuyer la création d'une infraction criminelle qui vise l'objectif mentionné dans ce projet de loi d'initiative parlementaire.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je remercie la députée qui vient de prendre la parole. Elle a effleuré des questions très importantes que soulève le projet de loi. Je conviens que ce genre de publicité est très ennuyeux et qu'il le sera de plus en plus. Toutefois, je doute que le Code criminel soit l'instrument qu'il faut pour s'occuper de cet embêtement, car il s'agit fondamentalement d'un embêtement coûteux. Devrions-nous, en tant que législateurs, faire un délit criminel de ce qui est fondamentalement un embêtement? Je ne le crois pas.

(1130)

Si cette affaire doit être réglée, elle doit l'être conformément à la Loi sur les communications. Cette loi est l'instrument qu'il faut utiliser pour restreindre la publicité de ce genre si tel est le voeu des Canadiens.

Pour le bénéfice des téléspectateurs qui suivent le présent débat, je veux citer exactement ici ce que prévoit ce projet de loi. L'article 1 est très clair à ce sujet, et je cite:

Commet une infraction et encourt, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, une amende maximale de deux cents dollars quiconque fait parvenir par télécopie effectuée au moyen d'un réseau téléphonique de la publicité concernant la vente d'un bien ou d'un service à une personne ou un organisme qui n'en a pas fait la demande.
On a vu ce qui est arrivé lorsque le gouvernement a essayé de réduire la publicité concernant la cigarette et les produits du tabac. À mon sens, sa décision a été renversée parce qu'elle allait à l'encontre de la liberté de parole, notamment. Est-ce que ce serait la même chose pour le cas qui nous occupe ici? Peut-être ou peut-être pas, mais la question devrait certes être examinée.

En quoi cela toucherait-il à la publicité? Est-ce que cela s'appliquerait aussi à l'Internet où il n'y a pas d'intervention coûteuse? Comme l'a signalé le député qui parraine le projet de loi, des quantités inouïes de papier sont gaspillées par les consommateurs que cette publicité n'intéresse pas. Qu'en sera-t-il de l'Internet? Il semble que cela puisse, de bien des façons, remplacer le télécopieur. Les dispositions s'appliqueraient-elles à l'Internet? D'après ce que je comprends du projet de loi, elles s'appliqueraient à l'Internet.

Nous devons nous demander si les entreprises sont disposées et prêtes à susciter des sentiments et des attitudes négatives envers leurs produits en indisposant les gens qu'elles contactent et auxquels elles annoncent leurs produits et services. Est-ce là ce qu'elles veulent faire? En d'autres termes, les pressions du libre-marché ne suffisent-elles pas à éviter que ce phénomène échappe à tout contrôle et que quelqu'un, le matin, trouve son télécopieur enseveli sous une foule de publicités dont il ne veut rien savoir?

Tôt ou tard, il y aura des répercussions si cela va trop loin. Les annonceurs se rendront compte que cela nuit à leur produit ainsi qu'à l'image et au profil de leur entreprise. Ne devrions-nous pas laisser ce genre de question entre les mains des consommateurs qui, lorsqu'ils en auront assez, feront sûrement savoir aux auteurs de ce type de publicité ce qu'ils pensent de cette dernière?

Qu'en est-il des avantages? Il doit sûrement y avoir des avantages à ce type de publicité, sinon les annonceurs ne recourraient pas à celle-ci. Devrions-nous léser les gens qui bénéficient de ce type de publicité en adoptant pareil projet de loi?

Je n'ai pas grand-chose à ajouter à propos de ce projet de loi. Je crois que la députée du parti ministériel a bien couvert la question. Je n'insisterai pas sur mes préoccupations concernant le fait que ces dispositions relèvent du Code criminel. À mon avis, ce type de projet de loi devrait relever de la Loi sur les communications.

Nous devrions laisser les forces du marché régler ce genre de question. Si, à titre de législateurs, nous nous penchons sur ce genre de pratique, celle-ci ne devrait pas être criminalisée. Le simple fait de faire de la publicité en utilisant les lignes téléphoniques ne devrait pas constituer une infraction criminelle. Si l'on interdit cela, on devrait le faire en vertu de la Loi sur les communications.

(1135)

M. John Bryden (Hamilton-Wentworth, Lib.): Monsieur le Président, je n'avais pas l'intention d'intervenir dans ce débat sur la motion, mais je pense qu'il faut féliciter le député de Portneuf parce qu'il a certainement mis au jour un problème des temps modernes.

Ce problème, dont tous les députés ont sans doute fait, comme moi, l'expérience, est directement lié à notre fonction. Dans mon bureau de circonscription, il est arrivé que mon télécopieur ait été monopolisé pendant une heure ou plus, recevant une trentaine de pages de sujets de discussion relatifs à un projet de loi donné. Le fait est que j'aurais déjà entendu ces renseignements au cours de réunions du caucus. Cependant, de temps à autre, le personnel des ministères en fait un peu trop et nous envoie plus de renseignements

17115

par télécopieur que nous n'en avons besoin. Je vois que des députés sont d'accord avec moi. Je suis sûr que les députés de l'opposition ont le même problème.

Je suis tout à fait d'accord avec les orateurs précédents que ce n'est pas quelque chose qui se réglera mieux à l'aide de modifications au Code criminel. Quand on tente de limiter de quelque façon que ce soit la liberté d'expression, la liberté de presse et la liberté de la parole à l'aide de la loi, on court de grands risques relativement à une liberté fondamentale.

En ce qui concerne la transmission par télécopieur de la publicité importune, comme l'a dit le député de Portneuf, qui détermine que c'est de la publicité importune ou autre chose? Il n'a même pas essayé de parler de la question des transmissions par télécopieur qui renferment de documents pornographiques ou des renseignements que l'on sait faux. Si on tente de réglementer tout cela, ce sera comme dans le cas des documents pornographiques. On ne sait jamais quand on franchit une ligne floue au-delà de laquelle on enfreint la liberté d'expression.

De même, je rejette la proposition du député de Portneuf selon laquelle le CRTC devrait intervenir et imposer une réglementation aux distributeurs de ce genre de publicité importune par télécopieur. La raison est semblable à celle que l'on invoquerait si cela devenait une infraction criminelle. Il est très risqué pour une société de conférer à des organismes indépendants le pouvoir de dire comment nous pouvons nous exprimer.

Après tout, le CRTC est un organisme non élu. C'est un organisme qui fonctionne d'une manière indépendante du gouvernement, de la population. Il est très dangereux d'accorder plus de pouvoir à un tel organisme. Je dois dire que je ne suis pas un grand admirateur du CRTC qui, à bien des égards, a perdu le contact avec les besoins du pays en matière de communications et dont le mandat doit être réexaminé.

Pour ma part, je crois que la solution viendra du marché. La solution passe nécessairement par la technologie. Nous verrons un jour un inventeur brillant ou une grosse entreprise mettre au point un système de codage qui permettra de bloquer les télécopies qui ne comportent pas le code convenu. Je suis certain qu'un tel système s'en vient.

Je m'intéresse un peu à toute la question du renseignement sur les communications. Je peux affirmer en connaissance de cause qu'il se fait beaucoup de recherche au Canada, aux États-Unis et en Grande-Bretagne sur la sécurité des communications, notamment sur la sécurité de la télécopie et sur toutes sortes de moyens de transmission électronique des renseignements. Il est fort possible que, d'ici peu de temps, il y ait sur le marché des machines qui n'acceptent pas de transmissions à moins que l'expéditeur connaisse le bon mot de passe ou le bon code.

(1140)

Le système nécessaire serait très semblable à celui de l'afficheur de numéros sur les appareils téléphoniques, qui est une innovation relativement récente. Les députés savent sans aucun doute qu'il est maintenant possible de s'abonner à l'affichage des numéros et qu'il est aussi possible de demander à Bell Canada un numéro confidentiel qui ne s'affiche pas sur ces appareils. Le même système pourrait s'appliquer aux télécopieurs. Un code numérique secret pourrait empêcher la réception de certains envois.

Comme l'a suggéré le député de Crowfoot, c'est grâce aux forces du marché que ces nouveaux produits seront rendus disponibles. Quelqu'un a dit que nous étions arrivés à un point où il serait possible de transmettre les journaux par télécopieur. Il sera parfaitement inutile pour les journaux de se faire concurrence pour transmettre leurs articles les premiers puisque, pour accéder à un télécopieur, il faudra connaître le mot de passe secret du client.

Au bout du compte, ce sont les forces du marché qui joueront. La technologie réglera le problème. Je remercie le député de Portneuf d'avoir soulevé la question parce que la Chambre des communes est l'endroit où nous devons discuter des questions de l'heure. Nous devons démontrer que nous connaissons les sujets d'intérêt du moment et, si nous le pouvons, aider à trouver les solutions aux problèmes.

[Français]

Le président suppléant (M. Kilger): Comme il n'y a plus de député à prendre la parole et que la motion n'a pas été choisie pour faire l'objet d'un vote, la période prévue pour l'étude des Affaires émanant des députés est maintenant expirée et l'ordre est rayé du Feuilleton, conformément à l'article 96 du Règlement.

[Traduction]

M. Milliken: Monsieur le Président, je crois que vous trouverez que la Chambre est disposée à suspendre la séance jusqu'à ce que nous commencions l'étude des initiatives ministérielles à midi.

SUSPENSION

Le président suppléant (M. Kilger): La Chambre est-elle disposée à suspendre la séance jusqu'à midi?

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 11 h 44.)

_______________

REPRISE DE LA SÉANCE

La séance reprend à 11 h 58.


17115

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LES BALKANS

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.) propose:

Que cette Chambre prenne acte et accueille le récent accord de paix de Dayton et les efforts constants de la communauté internationale pour instaurer une paix et une sécurité durables dans les Balkans, et que le Canada contribue à ces efforts en participant à une force d'intervention militaire multinationale (IFOR) sous le commandement de l'OTAN.


17116

-Monsieur le Président, l'annonce faite le 21 novembre, selon laquelle les dirigeants de la Bosnie, de l'Herzégovine, de la Serbie et de la Croatie avaient conclu un accord de paix formel, a allumé une lueur d'espoir dans les Balkans, ce qu'on n'avait pas vu depuis longtemps.

Après quatre ans de luttes amères, de destruction réciproque et de dégradation, nous avons vu les parties se réunir pour tenter d'arriver à un accord de paix. Il est temps qu'ils sortent tous de l'ombre de la guerre. Mais ce n'est pas encore chose faite. Il reste beaucoup de travail à faire. Il existe un accord sur papier, mais le défi consiste à le concrétiser.

(1200)

C'est une force de mise en oeuvre de l'OTAN, autorisée par les Nations Unies, qui permettra de passer à l'étape suivante du processus de paix. La principale tâche de cette force sera de veiller au respect par les parties combattantes des aspects militaires de l'accord. Sans cette force, l'accord risque fort de crouler.

Aujourd'hui, nous n'avons pas à débattre d'une éventuelle participation des Canadiens à la force de mise en oeuvre de l'accord de paix dans les Balkans. Nous devons plutôt nous pencher sur la nature et la forme de cet engagement particulier. Le Canada n'est évidemment pas tenu d'envoyer des troupes pour aider l'OTAN à exécuter une mission donnée. Le traité de l'OTAN ne renferme aucune disposition qui nous oblige légalement à faire une telle contribution. Cependant, nous avons une obligation morale de participer à cette opération étendue de l'OTAN, qui montrera la pertinence de l'OTAN dans l'après-guerre froide.

Dans le livre blanc que nous avons rendu public au printemps dernier, par suite des consultations du comité mixte parlementaire de la défense nationale et des affaires étrangères, nous avons pris l'engagement de continuer à participer à l'OTAN. Nous croyons que nous avons une obligation, quand tous nos alliés au sein de l'OTAN conviennent de participer à cette force particulière, d'être à leurs côtés. Reste à savoir dans quelle mesure nous allons le faire. Nous demandons aux députés d'exposer leur point de vue sur cette question.

C'est un autre exemple de la façon dont le gouvernement actuel, sous la direction du premier ministre, est revenu à une ancienne tradition qui voulait que le Parlement participe à tout le processus décisionnel sur la façon de déployer nos troupes et de remplir nos obligations au chapitre des affaires étrangères.

Nous avons eu un certain nombre de débats de ce genre dernièrement, et je suis d'avis que celui d'aujourd'hui sera le plus important.

[Français]

Au cours des quatre dernières années, le Canada a joué un rôle important dans les efforts de la communauté internationale visant à faire face à la guerre en ex-Yougoslavie. Ces efforts ont été déployés principalement sous l'égide des Nations Unies et de l'OTAN.

Les militaires canadiens ont aidé à empêcher le conflit de s'étendre à d'autres parties de la région et de gagner en brutalité. Ils ont également contribué à sauver un nombre incalculable de vies en participant à la livraison de secours humanitaires et en empêchant que de pires violences ne soient commises contre la population civile.

Comme toujours, notre personnel a servi avec courage, dévouement et professionnalisme.

[Traduction]

Les forces armées du Canada sont consciencieuses, professionnelles et dévouées. Tous les Canadiens le savent, ils respectent nos militaires et ils leur sont reconnaissants.

Maintenant que le processus de paix entre dans une phase nouvelle, nous croyons que le Canada devrait y participer. Les forces armées canadiennes, contrairement à ce que prétendent certains de nos critiques, sont prêtes à servir au sein de cette force d'intervention.

Je n'ai guère besoin de rappeler aux députés la compétence et l'expérience que le Canada a acquises dans le monde entier à l'occasion de diverses missions de maintien de la paix depuis 1947. Nous avons des états de service remarquables.

J'ai deux fonctions à exercer dans le débat d'aujourd'hui. Je dois tout d'abord rappeler brièvement aux députés la grande contribution que nous apportons aux opérations de paix en ex-Yougoslavie depuis quelques années, ce qui nous incite à poursuivre la marche vers la paix en nous engageant dans la force de mise en oeuvre de l'accord de paix.

Deuxièmement, je dois fournir aux députés certains renseignements sur la force de mise en oeuvre de l'accord de paix que l'on propose d'envoyer là-bas.

[Français]

Le Canada a joué un rôle de premier plan dans les efforts déployés pour mettre fin pacifiquement au conflit qui se déroulait en ex-Yougoslavie et pour porter secours à ses victimes.

En septembre 1991, le Canada a été le premier pays à demander au Conseil de sécurité des Nations Unies de faire face à cette situation.

Le Canada a également répondu favorablement aux requêtes de l'ONU qui lui demandait de fournir des militaires canadiens pour une opération de paix dans la région.

Notre contribution militaire a fait appel à des éléments nombreux et variés de notre potentiel de combat terrestre, maritime et aérien.

(1205)

Notre contribution sur terre a fini par comprendre un groupe bataillon en Croatie, un groupe bataillon en Bosnie-Herzégovine, un bataillon de logistique sur la côte dalmate en Croatie, ainsi que des observateurs militaires et du personnel nommé à divers postes au quartier général.

[Traduction]

Nous avons contribué aux opérations aériennes, terrestres et maritimes de l'OTAN dans la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie-Herzégovine. Nos navires ont croisé au large de la côte adriatique. Nous avons fait partie des divers quartiers généraux des


17117

Nations Unies et avons participé à certaines forces de l'OTAN qui ont été déployées.

Le mandat a évolué depuis quatre ans. Je laisserai à certains de mes collègues le soin de décrire plus en détail la grande contribution que le Canada a apportée aux efforts de stabilisation de la situation en Bosnie.

Ce sont les troupes canadiennes qui ont rouvert l'aéroport de Sarajevo en 1992. Les troupes canadiennes ont été parmi les premières à participer à la protection des convois humanitaires à l'automne de 1992. Ce sont des Canadiens qui ont été les premiers à être déployés dans l'ex-république yougoslave de Macédoine, dans le cadre de ce qui a été le seul cas de déploiement préventif fructueux de la part de l'ONU. Les Canadiens étaient là quand on leur a demandé de participer au déploiement.

Qui pourrait oublier ce qu'ont fait les Canadiens au printemps de 1993? Nos troupes ont été envoyées dans la toute petite enclave de Srebrenica assiégée par l'artillerie et les troupes serbes bosniaques. Elles ont résisté durant plusieurs mois. Elles ont été remplacées par nos amis hollandais de l'OTAN avant que ne survienne le terrible événement de cet été qui a ameuté l'opinion publique de la communauté internationale; cela nous a forcés à changer de tactiques, à changer de stratégie, à devenir plus énergiques dans notre riposte à ce mépris flagrant de l'ordre international. Cela a engendré une initiative très importante réclamée par le premier ministre britannique en juillet à Londres et qui a par la suite conduit à l'effort de paix concerté par les Américains, lequel a donné lieu à la force de mise en oeuvre de l'accord de paix dont il est question aujourd'hui.

Il faut féliciter les États-Unis du rôle qu'ils ont joué en aidant les parties à se rapprocher, en surmontant tant de divergences et en nous faisant progresser au point où il est enfin possible d'envisager une paix durable qui est à notre portée, pourvu que nous fassions ce qu'il faut.

Le Canada a participé à un certain nombre de missions. Permettez-moi de rafraîchir la mémoire des députés. Le pont aérien assuré par les appareils Hercules du Canada a été vital pour Sarajevo. Je me trouvais dans le cockpit d'un de ces avions lorsqu'un radar ennemi nous a repérés. En simple civil, j'ai été très effrayé ce jour-là, mais les pilotes canadiens m'ont rassuré: «Ne vous inquiétez pas, ils ne font que nous mettre à l'épreuve. Ils n'oseront pas nous descendre.»

Tous les jours, pendant des mois, des équipages canadiens ont participé à ce ravitaillement nécessaire. C'était la seule liaison avec Sarajevo. Ce sont les navires de la Marine royale du Canada qui ont fait respecter l'embargo et appliqué les sanctions le long de la côte adriatique. J'ai également eu l'occasion de me rendre à bord du NCSM Iroquois, l'un de nos destroyers affectés à cette zone, pour voir le travail qu'on y faisait pour bloquer l'entrée d'armes et d'autres marchandises stratégiques en ex-Yougoslavie.

Enfin, le Canada a pris part à des missions de reconnaissance avec ses appareils Aurora. Des équipages canadiens ont volé dans des appareils de l'OTAN dotés du système AWACS pour fournir de l'information, et des Canadiens ont participé à l'opération Interdiction de vol.

Les Canadiens ont été présents là-bas et ils connaissent le terrain, la situation, les gens et la culture. C'est pourquoi il est logique qu'ils prennent part à cet effort international dirigé par l'OTAN afin de remettre un peu d'ordre dans cette situation très difficile, d'instaurer la paix et de faire en sorte que le plan de paix soit appliqué comme il se doit.

L'accord de paix est très impressionnant. Il se compose de trois éléments portant respectivement sur les aspects constitutionnel, territorial et militaire.

[Français]

Au niveau constitutionnel, la Bosnie demeurera un seul État à l'intérieur de ses frontières reconnues par la communauté internationale. Elle se composera de deux entités: la Fédération croato-musulmane et la République serbe de Bosnie.

(1210)

Il s'agira d'une union peu structurée, dont la présidence sera assurée par alternance. Le gouvernement central sera chargé des domaines tels que la politique étrangère, le commerce, les douanes et la politique monétaire. L'accord respecte généralement la division territoriale convenue par les parties, soit 51/49 p. 100 en faveur de la Fédération.

En ce qui concerne Sarajevo, les Serbes de Bosnie doivent céder au gouvernement bosniaque les banlieues qu'ils contrôlent dans le nord et dans l'ouest de la ville, la rattachant ainsi au territoire contrôle par la Fédération. Un corridor de 8 à 15 kilomètres de largeur reliera la zone de sécurité de Gorazde et Sarajevo.

[Traduction]

Sur le plan militaire, toutes les forces étrangères à l'exception des troupes de l'ONU devront se retirer dans les 30 jours suivant la signature officielle de l'accord, qui aura lieu à Paris ce mois-ci. Il s'agit là d'une disposition demandée par le gouvernement bosniaque et, bien entendu, les forces du gouvernement croate sont visées. L'accord prévoit également le retrait, dans les 120 jours, de toutes les armes lourdes vers les casernes, derrière une zone tampon de quatre kilomètres.

Les dirigeants des Serbes bosniaques n'ont pas participé directement aux négociations dans le camp serbe, mais il semble qu'ils aient accepté les termes de l'accord. Des réserves se manifestent à ce sujet, mais un accord est un accord, et les troupes dirigées par l'OTAN le feront respecter.

Il s'agit là d'un accord historique, mais les conflits futurs ne sont pas exclus. Ne cherchons pas à tromper les Canadiens. Reconnaissons que cette région est dangereuse, que l'accord de paix renferme certaines ambiguïtés et que les vieux sujets de querelle ne disparaîtront pas du jour au lendemain.

Nous croyons que la force de mise en oeuvre de l'OTAN est essentielle au processus de paix. Je voudrais partager avec mes collègues certains détails au sujet de cette force.


17118

Comme elle a accepté de le faire, l'OTAN a déjà commencé à déployer un premier contingent, avec le consentement de tous les intéressés. En déployant des troupes à ce moment-ci, l'OTAN sera en mesure de commencer à déployer ses contingents principaux dès que le conseil de sécurité de l'ONU adoptera une résolution autorisant l'OTAN à amorcer la mise en oeuvre des aspects militaires du plan de paix. Je me dois de préciser, pour corriger toute ambiguïté qui pourrait se glisser dans les reportages des médias, qu'onze Canadiens feront partie de ce premier contingent. Il s'agit de Canadiens choisis parmi les centaines de militaires qui sont sous le commandement de l'OTAN et qui sont donc obligés de participer aux opérations de l'OTAN.

Des Canadiens seront envoyés en mission dans cette région très bientôt, si ce n'est déjà fait, mais ce, dans le cadre des engagements permanents que nous avons pris envers l'OTAN en signant le traité de l'OTAN. Je tiens à préciser que ces militaires ne font pas partie de notre contribution à la force de mise en oeuvre dont nous discutons aujourd'hui.

Les plans de la force ont fait l'objet de débats. Ils ont été approuvés de façon provisoire par le Conseil de l'Atlantique Nord et seront soumis à son approbation finale dès l'adoption de la résolution du conseil de sécurité. Le plan prévoit le déploiement de 60 000 soldats et la force sera divisée en trois grands groupes, les divisions britannique, française et américaine.

Il nous faut absolument comprendre les objectifs de la force. Son rôle est de veiller au respect des aspects militaires de l'accord de paix. Elle doit surveiller, en particulier, le retrait des forces vers leurs territoires respectifs, tel que prévu dans l'accord, et l'établissement des limites convenues séparant les belligérants.

[Français]

Deuxièmement, il faut assurer le retrait des forces onusiennes qui se trouvent actuellement sur les lieux. Et troisièmement, assurer l'exécution d'autres tâches non militaires relatives à l'accord de paix. L'ONU, l'Union européenne et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe compteront parmi les organisations qui effectueront des tâches civiles.

[Traduction]

Cette opération respectera les dispositions du chapitre 7 de la charte des Nations Unies, qui autorisent l'utilisation de tous les moyens nécessaires pour remplir la mission, autrement dit, l'application de règles d'engagement très fermes. Je tiens à dire à la Chambre que le gouvernement canadien aura le dernier mot sur toutes les règles d'engagement que devront respecter les forces canadiennes.

Au cours des sept derniers jours, nous avons grandement contribué à l'élaboration de ces règles d'engagement. Je désire rendre hommage, en particulier, à notre état-major, dirigé par le chef d'état-major de la Défense, John de Chastelain, qui a collaboré avec ses collègues de l'OTAN à Bruxelles, la semaine dernière, pour bien définir des règles de conduite et des règles d'engagement tenant compte des préoccupations du Canada.

(1215)

Inutile de vous faire un dessin. Nous avons eu notre lot de situations délicates ces dernières années. Nous avons appris quand, avec qui et dans quelles circonstances employer la force. Je suis ravi de dire que cette expérience a été prise en compte dans la mise au point des règles d'engagement de cette force de protection.

Environ 40 000 des 60 000 militaires seront fournis par les États-Unis, la Grande-Bretagne et la France. La contribution des Russes sera importante aussi. Les grandes puissances ne seront pas les seules à participer. D'autres pays de moyenne puissance comme le Canada vont aussi jouer un rôle. À l'exception de l'Islande, qui n'a pas de forces armées, tous nos alliés vont participer.

Parmi les pays qui ne sont pas membres de l'OTAN, il y aura, je le répète, la Russie. Une brigade russe mènera des opérations dans le secteur américain sous le commandement d'un officier russe qui fera rapport directement au Commandant suprême des forces alliées en Europe, le général Joulwan, un américain, plutôt que par la chaîne de commandement de l'OTAN. La Russie a offert aussi de contribuer une brigade du génie et du déminage qui sera indépendante de la force d'intervention dirigée par l'OTAN.

Qui eût pu imaginer il y a cinq, six ou sept ans, et encore moins il y a dix ans, que des troupes russes serviraient la cause de la paix en Europe sous la direction d'un commandant américain? Le monde évolue certes dans la bonne direction. Nous amis russes méritent certes nos félicitations pour avoir mis leurs préoccupations de côté et s'être engagés à faire régner la paix en participant autant à cet effort.

[Français]

J'ajouterais que la Force de mise en oeuvre est un moyen de tester la capacité de l'OTAN de mener de nouveaux types de missions exigeant la coopération entre les forces de l'OTAN et les forces qui ne relèvent pas de cette organisation, en particulier celles de la Russie ainsi que de l'Europe centrale et orientale. Cette coopération se révélera une première étape précieuse en vue de l'établissement d'un système de sécurité européen efficace pour la période de l'après-guerre froide.

Comme toute opération de paix, celle-ci comporte un facteur de risque dont l'étendue dépendra de la volonté des parties en conflit de respecter l'accord de paix. Les rigueurs de l'hiver et le mauvais état des routes dans la région constituent d'autres dangers.

[Traduction]

Je sais que les critiques vont s'inquiéter du coût de tout cela. Cela ne sera pas bon marché. Il en coûtera dix milliards de dollars canadiens pour mettre en place toute cette opération. Les modalités de financement restent à régler, mais il semble probable que les participants vont assumer eux-mêmes leurs coûts de déploiement et de maintenance. Le financement commun sera réservé aux installations communes, tel le quartier général de la force, qui coûtera quelque 200 millions de dollars américains.

Le Canada sera tenu de participer au frais communs, y inclus pour les activités de la force auxquelles il ne participera pas. Cela représentera quelque 20 millions de dollars au moins. Le coût de participation dépendra de la nature et de la taille des forces. Voilà


17119

pourquoi nous sommes impatients de connaître le sentiment des députés, lesquels sont en contact avec leurs électeurs et partant, savent dans quelle mesure les Canadiens souhaitent que le Canada participe à cette opération.

Nous sommes à examiner des options qui coûteraient entre 20 et 50 millions de dollars. Toutefois, n'allez pas croire qu'il s'agit d'une affaire conclue. Nous voulons connaître le sentiment du Parlement avant que le Cabinet ne décide, mercredi, du nombre exact de militaires qui seront déployés dans la force en question.

Pour le moment, le plan prévoit que la force d'intervention de l'OTAN soit remplacée après 12 mois par des forces ne relevant pas de l'OTAN.

[Français]

Un cadre supérieur sera nommé pour coordonner les aspects civils du plan de paix, qui couvriront la relance économique, l'assistance humanitaire, les réfugiés, les élections et les droits de la personne, ainsi que le contrôle des armements et le désarmement.

S'ils sont appelés à le faire, les commandants de la force pourront venir en aide aux Nations Unies et aux organisations humanitaires dans le cadre d'activités telles que le maintien de l'ordre public, le déminage et le transport des vivres. Mais toutefois, la première responsabilité portera sur les aspects militaires de l'accord.

[Traduction]

Dans le temps très limité qui m'était alloué, je me suis efforcé d'informer la Chambre sur la force qu'on est en train de constituer. Nous sommes évidement impatients de connaître l'opinion de chaque député avant de prendre une décision.

(1220)

D'un point de vue philosophique, le gouvernement croit que les Canadiens comprennent que les intérêts et les valeurs de notre pays dépendent de la stabilité dans le monde entier. C'est pour cette raison que nous nous sommes engagés aussi fermement au fil des ans à promouvoir la sécurité et la paix à l'échelle internationale. L'examen de la politique étrangère et de la politique de défense réalisé en 1994 confirme cet engagement auquel ont souscrit tous les partis représentés à la Chambre. En effet, tous les partis ont généralement approuvé l'orientation de la politique étrangère et de la politique de défense du Canada qui ont fait l'objet d'un examen en 1994.

[Français]

Nous ne pouvons fermer les yeux sur les régions du globe où l'instabilité et les conflits ont pris racine. Même si nous ne sommes pas directement touchés par ces événements qui surviennent loin de chez nous, à plus long terme, nous nous sentirons moins en sécurité si nous évitons de nous en préoccuper. C'est là une leçon que l'histoire nous a enseignée à plusieurs reprises au cours des siècles.

C'est pour cette raison que le Canada s'est fait l'ardent défenseur des institutions multilatérales comme l'ONU, et c'est pourquoi il a participé si activement aux opérations de maintien de la paix. Nous savons à quel point il est important de travailler avec des alliés et des pays qui partagent les mêmes idées que nous, afin de promouvoir la paix et la stabilité internationale, que ce soit en Europe ou dans d'autres régions du monde.

[Traduction]

Nous avons une réputation bien méritée, celle de participer aux activités des institutions multilatérales lorsque c'est important de le faire. Voyons simplement notre dossier à l'égard du maintien de la paix. Si nous voulons que le Canada reste efficace sur la scène mondiale, il est essentiel que nous préservions notre réputation et que, à cette fin, nous participions aux efforts internationaux visant à améliorer la sécurité dans le monde entier.

À mon avis, le conflit dans les Balkans représente la plus grave menace à la sécurité internationale dans cette région depuis la Seconde Guerre mondiale. Nous avons parlé des risques que ce conflit puisse s'étendre à toute l'Europe. Sans la présence des Nations Unies en Bosnie, en Croatie et dans l'ex-République yougoslave de Macédoine, il aurait pu y avoir des centaines de milliers d'autres victimes, les atrocités auraient pu être plus nombreuses et l'Europe aurait pu être à feu et à sang de la mer Égée jusqu'aux Alpes. Ce conflit aurait pu être le précurseur d'une guerre très étendue en Europe, une guerre dans laquelle d'autres pays du monde seraient inévitablement intervenus pour défendre leurs intérêts.

À l'aube du XXIe siècle, aucun pays civilisé ne peut laisser ce genre de conflit perdurer dans l'une des régions les plus civilisées du monde. Il est assez tristement paradoxal de constater que, 50 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale, le Canada et le Parlement canadien tiennent encore, comme ils l'ont fait il y a une soixantaine d'années, un autre débat sur la participation de notre pays à d'importantes opérations en Europe.

Nous avons été là alors que la guerre faisait rage tout autour de nous. Nous avons maintenant un accord de paix. Nous avons un accord de paix qui n'est pas parfait, soit, mais c'est le seul que nous ayons. Nous devons veiller à ce qu'il soit mis en oeuvre avec succès.

En tant que Canadiens, nous pouvons nous frapper la poitrine et, du haut de la colline, préconiser la paix, la stabilité et la sécurité dans le monde, mais à moins que nous soyons disposés à faire quelque chose à ce sujet, à joindre l'acte à la parole et à engager nos ressources et nos gens, je crois que nos beaux discours n'auront pas une très grande portée. On s'attend à ce que le Canada participe à cette mission historique, à titre de membre fondateur de l'OTAN et de pays qui, au fil des ans, a beaucoup contribué à cette alliance.

Je remarque que nos collègues réformistes ne sont pas en faveur de notre participation. Ils ont des réserves à ce sujet. Le Parti réformiste souhaitait toutefois que nous demeurions au sein de l'OTAN. Or, quand on conclut une entente, une alliance amicale avec d'autres, on ne leur fait pas faux bond quand la situation se corse. On ne revient pas sur ses engagements. À mon avis, les Canadiens ne veulent pas que le gouvernement actuel se défile ni qu'il fasse fi de 50 ans de coopération et de succès dans l'édification d'une organisation qui a contribué, pendant cette période, à la paix et à la stabilité en Europe.


17120

(1225)

Toute contribution du Canada sera modeste. Il a été question de 20, de 50 ou de 60 millions de dollars, selon ce que nous déciderons pour le déploiement. Nous estimons que les Canadiens sont prêts à payer ce prix-là. Nous serons affectés au secteur britannique avec le Pakistan. Je pense que les Pays-Bas y seront, de même que la République tchèque. En fait, le gouvernement britannique a demandé au Canada de s'occuper du quartier général.

Quel meilleur hommage à la participation canadienne que de voir un de nos principaux alliés, qui fournira le gros des troupes dans ce secteur, décider de confier aux Forces armées canadiennes la tâche d'établir le quartier général de la brigade parce qu'il les respecte tellement. C'est tout un compliment et c'est certainement une possibilité que le gouvernement envisagera. Je voudrais entendre le point de vue des députés à propos de la participation canadienne.

Nous avons le choix entre fournir un bataillon d'infanterie, un escadron des transmissions, des troupes d'artillerie. Tout cela est possible. Nous voulons entendre le point de vue des députés pour voir si nous sommes tous d'accord, et je pense que les Canadiens le sont, pour prendre cet engagement.

Au moment où le public, les médias et d'autres surveillent de près les activités des militaires canadiens, nous devons nous rappeler que l'armée est une indispensable institution nationale. L'armée est le reflet du pays.

[Français]

C'est le reflet de la culture canadienne avec notre tradition des deux langues officielles.

[Traduction]

Elle est aussi un outil avec lequel le pays peut atteindre ses objectifs tant chez lui qu'à l'étranger. Nous l'avons vu le week-end dernier, lorsque l'équipage du NCSM Calgary est venu à la rescousse d'un navire en détresse au large de la côte atlantique et qu'un membre de l'équipage de l'hélicoptère s'est illustré par son courage. N'en déplaise à nos amis d'en face, c'était un hélicoptère Sea King. Ces hélicoptères marchent. Ce caporal-chef est descendu à maintes reprises au bout d'une corde au-dessus d'une mer déchaînée où gîtait un navire ayant à son bord des passagers désespérés. Il les a tirés de là un à un pour les mettre en lieu sûr à bord d'un navire à proximité. Voilà l'héroïsme dont font preuve nos forces armées.

Nous en avons entendu parler ce week-end parce que c'était une remarquable contribution. Tous les jours, les membres des forces armées servent fièrement tant au Canada qu'à l'étranger. Qu'entendons-nous? Uniquement des propos négatifs. Des critiques mesquines visent les petites erreurs administratives qui se produisent dans toute grande organisation. Nous entendons parler de personnel démoralisé. Oui, je peux dire que, depuis quelques années, tous les Canadiens sont affectés par une situation financière difficile, une compétitivité mondiale accrue, le besoin de remettre de l'ordre dans nos affaires, et la question de l'unité nationale qui s'impose de nouveau à nous.

En un sens, tous les Canadiens sont introspectifs. Peut-être ne sont-ils pas démoralisés, mais ils sont préoccupés. La même chose est vraie des forces armées. Le personnel de toute organisation où les salaires sont gelés depuis un certain temps, et où même les augmentations d'échelon normales dans la fonction publique sont aussi gelées, s'en ressent. Nous essayons de faire face à la situation.

À mon sens, les attaques incessantes de la part de critiques de salon, dont beaucoup à la Chambre des communes et la majorité au sein du Parti réformiste, contre les hommes et les femmes de nos forces armées et contre le travail qu'il font, affectent probablement plus que n'importe quoi d'autre le moral de nos troupes. C'est inacceptable.

Nos forces armés se classent parmi les meilleures du monde. Elles se composent d'hommes et de femmes qui risquent leur vie; ils la risquent pour tous, sans exception, peu importe qu'il s'agisse de séparatistes ou de gens dont la philosophie tient de celle de l'homme de Neandertal, comme les réformistes. Ils risqueront leur vie pour une société libre et démocratique. Ce sont des hommes et des femmes de ce calibre qui composent les Forces armées canadiennes. Je peux vous donner l'assurance que ces hommes et ces femmes seront prêts à servir au sein de cette force de paix et qu'ils le feront avec compétence.

(1230)

[Français]

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, le ministre de la Défense a fini sur une envolée oratoire qui, à mon sens, cadre très peu avec le débat de ce matin. C'est la troisième fois que l'on débat, en cette Chambre, de la Bosnie et de la participation des Forces armées canadiennes en Bosnie sous l'égide de l'ONU.

On se souviendra sans doute qu'en février 1994, le ministre de la Défense avait déclaré qu'il se devait d'informer le plus possible les députés de cette Chambre ainsi que la population canadienne sur les implications du Canada à l'intérieur des missions de paix, de vraiment informer les gens sur toutes les implications qu'on peut avoir concernant les missions de paix.

Lors des deux précédents débats, et même durant celui-ci, le Bloc ne peut nier et ne peut s'empêcher d'appuyer une participation canadienne aux missions de paix. Il est sûr, comme l'a dit avec emphase le ministre, que les Québécois et les Canadiens qui font partie des Forces armées canadiennes ont des faits d'honneur assez fréquents en ce qui concerne les missions de paix. Je ne pense pas que personne ici puisse dire qu'ils n'ont pas accompli leur travail au meilleur de leurs connaissances et qu'ils ne se sont pas donnés entièrement à ces missions.

Par contre, ces gens ont quand même certaines attentes. Le ministre de la Défense a mentionné tout à l'heure qu'il est important, dans ce débat, de pouvoir prendre le pouls de la population et des militaires par l'entremise des députés de cette Chambre. Il


17121

m'apparaît clair que l'on devrait, dans un tel débat, probablement clarifier davantage certaines règles et, tout au long de mon exposé, je reviendrai sur certains commentaires du ministre.

Pour poursuivre dans cette lignée, le 23 novembre, le premier ministre du Canada a déclaré, après une rencontre avec M. Boutros-Ghali, que le Canada se devait de participer à l'effort de paix à la suite de l'Accord de Dayton et qu'il y aurait détermination des moyens à prendre ou du nombre de militaires qu'on pourrait envoyer. Je m'attendais un peu, ce matin, à ce que le ministre de la Défense nous précise davantage ce que le gouvernement et le ministère de la Défense ont planifié.

J'ai eu l'opportunité d'avoir un briefing de la part des gens du ministère de la Défense, et je les en remercie. On m'a expliqué qu'il y avait une variété de scénarios qui pourraient coûter de deux millions de dollars à 70-75 millions de dollars, et que de 50 à 3 000 militaires pourraient être dépêchés dans cette force internationale sous l'égide de l'OTAN. J'aurais aimé, ce matin, que le ministre nous propose un certain scénario qui, selon lui, pourrait se rapprocher des désirs ou de la volonté d'appui de la population pour ce genre de mission et aussi de la possibilité qu'on a vis-à-vis de nos troupes.

Il a mentionné qu'on se doit de respecter certains accords qu'on a avec l'OTAN. Effectivement, les membres de l'OTAN se doivent, lorsque l'OTAN participe à des missions, de fournir 1 000 hommes. Est-ce que c'est un plancher? Est-ce que c'est un maximum? Est-ce qu'on envoie 1 000 hommes de combat ou si on redistribue? J'aurais aimé que le ministre de la Défense soit un peu plus précis, justement, dans ses informations, parce que dans un débat comme celui-là, il informe les députés de la Chambre, mais il informe aussi la population.

(1235)

Dans son discours, je n'ai rien vu qui pouvait indiquer vers quelle direction on pouvait s'en aller. Un peu plus loin dans le débat, je suggérerai quelques avenues à M. le ministre, peut-être qu'elles l'aideront.

Un peu plus loin dans son discours, le ministre de la Défense a mentionné, à juste titre, l'ensemble des participations que les militaires canadiens ont faites, que ce soit depuis le début du conflit au cours de l'été 1991 ou par la suite toutes les participations en 1992, l'ouverture de Sarajevo, la participation des militaires canadiens avec les avions de l'OTAN, tous les transports avec les avions Hercule, la participation au blocus dans la mer Adriatique, etc.

À juste titre, effectivement, le Canada a fourni un effort extraordinaire dans ce conflit et il a toujours été à la hauteur de sa tâche dans une mission de paix traditionnelle, c'est-à-dire dans des surveillances de convois humanitaires, aide à la population, transport de vivres, convois de vivres, etc., les communications. Tout ce qui relève d'une mission de paix traditionnelle, l'expertise canadienne, le ministre l'a mentionné, est reconnue à travers le monde. Là-dessus, il n'y a pas de problème, nos militaires s'acquittent de leur tâche de façon merveilleuse et tout le monde en est conscient. La population canadienne et québécoise aussi en est consciente.

Par contre, dans ce genre de mission, il y a un changement, à mon sens, tout à fait radical. Au lieu de travailler maintenant selon le chapitre VI des Nations Unies, on travaille maintenant selon le chapitre VII. Cela donne une latitude beaucoup plus ouverte au chapitre des interventions et à celui des interventions militaires. Je pourrais vous citer une déclaration de William Perry, secrétaire américain de la défense, qui disait que lorsque le contingent de l'OTAN sera installé en Bosnie, lorsqu'on aura des empêchements à établir certaines provisions de l'accord de Dayton, nous les forcerons. Et si nous sommes attaqués, nous riposterons de façon ferme et sans équivoque.

Cela ne relève pas du tout de l'historique des missions de paix qu'a remplies le Canada. C'est complètement un secteur à côté. C'est une inquiétude du Bloc québécois et de la population québécoise et canadienne dans la modification de ce genre de mission.

Dans un même ordre d'idée, j'ajouterais que la comparaison peut être malvenue et, malheureusement, je pense que le ministre a plutôt gardé les beaux côtés des missions de paix. Il a surtout rapporté les résultats parfois plus ou moins concrets que l'armée canadienne et le Canada ont obtenus en regard de certaines missions de paix. Mais il y a quand même des choses dans certains cas qu'on remarque lorsqu'on change les règles du jeu. Lorsque le ministre a mentionné tout à l'heure que les règles d'engagement vis-à-vis du chapitre VII ont été discutées avec la participation du gouvernement canadien, j'aurais aimé que le ministre nous précise exactement quelles sont les règles d'engagement, si le Canada s'engage, sous l'égide de l'OTAN, à participer à cette nouvelle mission de paix pour établir l'Accord de Dayton.

Si je me réfère à la logistique «mission de paix» ou à l'interprétation linguistique «mission de paix», il m'est apparu que la mission organisée maintenant sous l'égide de l'OTAN s'appelle une mission-veuillez excuser mon anglicisme-«peace enforcement».

Je reviens un peu en arrière. Malheureusement, je me souviens que lorsque les Américains sont allés en Somalie, cette mission s'appelait aussi «peace enforcement». On ne peut négliger le fait que, n'étant plus une mission de paix traditionnelle elle avait une connotation de «peace enforcement» qui est relativement semblable à ce qu'on a vécu en Somalie. Loin de moi l'idée de vouloir vous rappeler les malheureux événements impliquant l'armée canadienne, les Belges et même les Américains. À partir du moment où la soupe est devenue chaude un peu, les Américains se sont retirés et ont laissé les problèmes au Canada, aux Belges et à d'autres nations, ce qui a malheureusement résulté en des problèmes majeurs.

(1240)

Je pense qu'il est important, à mon sens, et au sens du Bloc québécois de très bien signaler le changement de mandat. La dernière fois que l'OTAN a organisé une mission sous l'égide de l'ONU, cela remonte à la guerre de Chypre.

Vous allez peut-être me dire que mes comparaisons sont un peu tirées par les cheveux, mais il n'en reste pas moins que dans toute l'expertise militaire canadienne en ce qui a trait aux missions de paix, rien de ce genre de participation à laquelle on s'engage n'a été


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le fait du Canada et n'a été non plus approuvé ou accepté par la population québécoise ou canadienne.

Je pense que c'est important qu'on le dise et qu'on se prémunisse avec une prévoyance de ce qui pourrait advenir. Quoi qu'on en dise, l'Accord de Dayton partage certains territoires, la Bosnie, la Croatie, la Serbie, et on a fait signer les représentants de la Bosnie, de la Serbie et de la Croatie.

Un des problèmes en Bosnie, tout autour de Sarajevo, c'est que ceux qu'on appelle les chefs de Pale qui sont M. Radovan Karadzic et Ratko Mladic, qui est le chef militaire, n'ont pas signé cet Accord. Pas plus tard qu'hier, je voyais aux informations queM. Ratko Mladic, le chef militaire s'est mis à la tête d'un groupe qui s'oppose à l'Accord de Dayton. Ce sont des gens qui depuis au moins deux ans ont un peu joué avec les résolutions de l'ONU, ont rapproché leurs obusiers près du pourtour de Sarajevo, après certaines menaces aériennes ils les ont retirés. Ils ont joué un peu au chat et à la souris avec l'ONU. Maintenant on signe un accord et ces gens-là sont encore installés dans les environs de Sarajevo. En fait, c'est la République autoproclamée serbo-bosniaque qui est dirigée par M. Karadzic qui, jusqu'à maintenant, a été très incohérent dans ses acceptations et a toujours été, je dirais même, difficile à saisir.

Autre argument qui met en doute premièrement la sécurité de la mission et deuxièmement qui, à mon sens, amplifie certains problèmes, vous savez que les Nations Unies ont formé un tribunal pour les crimes de guerre. Dernièrement, onze juges qui viennent de six pays différents ont participé à ces débats et ont justement condamné pour crimes de guerre M. Mladic et M. Karadzic.

Selon l'opinion internationale, différents experts en diplomatie, en droit international ou en crimes contre l'humanité suggèrent que la paix ne peut s'instaurer tant et aussi longtemps que ces gens n'auront pas été condamnés.

À ce que je sache, ces gens-là qui sont à la base du conflit à l'intérieur de la Bosnie n'ont jamais accepté l'Accord de Dayton et déjà se préparent à mettre des bâtons dans les roues ou à mettre de l'explosif dans l'engrenage. Je ne pense pas que ce soit si agréable et même si facile que cela d'imposer quoi que ce soit, parce qu'à mon sens à moi ce n'est pas une mission de maintien de la paix mais plus une mission d'imposition de la paix.

Je pense qu'ici en cette Chambre, les parlementaires se doivent de mentionner à la population et aux autres parlementaires qu'on a une modification dans tout ce qui a fait la réputation, je dirais même extraordinaire, des Casques bleus canadiens, et on en arrive à une application différente.

Lorsqu'on a appliqué cette modification à la mission, on a malheureusement obtenu-je faisais la comparaison-les ratés que l'on connaît en Somalie, et je pense que c'est regrettable qu'on puisse en arriver là.

(1245)

Le deuxième point a trait aux raisons économiques. Tous et chacun, peut-être moins du côté du troisième parti, sont d'accord, je pense, sur le fait que le Canada se doit de participer à ces missions de paix de façon à régler les conflits qui sévissent dans plusieurs contrées du globe.

Il est important, je pense, d'informer la Chambre et la population de ce que coûtent ces choses-là. La population sait que si on nous dit: «On a des militaires, on a besoin de certains exercices, on a de l'équipement, on l'utilise», cela coûte des frais. Par contre, dans les trois dernières années, en 1993, 1994 et 1995 qui s'achève, il y a eu un excédent de coûts normaux engendrés ici de l'ordre de 517 millions de dollars en Bosnie, qui comprend l'aide humanitaire et aussi les dépenses militaires.

Ce matin, je retiens un chiffre que le ministre a mentionné tout à l'heure, que cela pourrait varier entre 30 et 50 millions, dépendant de ce que le gouvernement déciderait. Ce que j'ai de la difficulté à comprendre, c'est que durant la plus haute participation canadienne, on a atteint environ 2 100 militaires à l'intérieur des forces en Bosnie et en Croatie et il y avait un surplus de dépenses, c'est-à-dire que cela coûtait plus cher que les coûts normaux prévus d'environ 170 millions par année sur une période de trois ans, ce qui donne 517 millions de dollars.

Maintenant, on veut maintenir ou diminuer l'apport canadien et on mentionne 30, 50 ou 60 millions de dollars et, si on se rend jusqu'à 3 000 militaires, on parle de 75 millions. Comment concevoir que pour 2 100 militaires dans le plus fort de la participation canadienne, cela nous a coûté des surplus de 170 millions de dollars, alors que pour 3 000 militaires, cela coûterait 75 millions? J'ai de la difficulté à suivre le calcul du ministère de la Défense, mais je pense que ce devrait être précisé. C'est une suggestion et je dirais même que cela devrait être exigé de la part du gouvernement. Il faut qu'on ait un peu plus de rigueur.

Lorsqu'on décide de participer à une mission, à l'aide de suggestions provenant soit de nous ou du Parti réformiste, si le gouvernement mentionne qu'effectivement, on respecte notre entente avec l'OTAN et on fournit, par exemple, 1 000 militaires, il devrait établir précisément les coûts excédentaires. Je ne parle pas des coûts afférents aux militaires qui sont dans la force régulière, qui ont déjà leur salaire. Il ne s'agit pas de ces coûts-là. Il faut stipuler clairement les coûts excédentaires vers lesquels on se dirige. Il faut aussi stipuler clairement, je pense, la durée du mandat et aussi les règles d'engagement, comme le ministre le disait tout à l'heure, auquel le Canada avait très bien participé. Mais j'aurais drôlement aimé que le ministre nous précise les règles de cet engagement-là.

Maintenant, en ce qui concerne l'aide canadienne, je me réfère à une déclaration du ministre des Affaires étrangères qui mentionnait que l'aide canadienne pouvait ne pas être nécessairement militaire. Dans l'approche du ministre de la Défense, il n'y a pas eu d'ouverture dans ce sens-là. Le ministre des Affaires extérieures a mentionné qu'on pourrait, soit participer à certaines missions humanitaires par des fonds, ou encore par la réception d'immigrants. On sait très bien que depuis le début du conflit, en 1991, il y a eu près de 250 000 morts en Bosnie et près de 800 000 personnes cherchent à évacuer ces lieux pour éviter tous les malheurs qu'ils ont déjà connus au niveau des mortalités dans leur famille ou des blessés. Il y a aussi passablement de gens qui ont des séquelles physiques à la suite des bombardements, de l'explosion de mines ou des armes à feu.


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(1250)

On a énormément besoin d'aide de toute sorte à l'intérieur de la Bosnie et on se demande, nous, du côté du Bloc, si les efforts innombrables que nos militaires ont fournis sont encore nécessaires. Parce que je vous dirais qu'il y a une quinzaine de jours, dans mon comté, à la base de Valcartier, il y a des militaires qui sont revenus de missions de paix en Croatie et ces gens étaient un peu essoufflés. Il y en a qui en sont rendus à leur cinquième mission, certains à la quatrième et d'autres à la troisième, et laissez-moi vous dire qu'il y en a certains qui ont connu des problèmes psychologiques, des problèmes familiaux, des problèmes de tous ordres.

On veut, encore une fois, un peu surcharger l'effort demandé, parce que, comme M. le ministre de la Défense l'a mentionné tout à l'heure, c'est vrai que, depuis 1992, le Canada a fourni un effort constant. Il ne faut pas oublier que ce conflit sévit présentement en Europe et que, en aucune façon, la communauté internationale ne pourrait dire au Canada qu'il n'a pas participé parfois plus que ses moyens le lui permettaient, que ce soit en hommes, en ressources humaines, ou que ce soit financièrement, et aussi que le Canada n'a pas fait sa large part.

Loin de nous, du Bloc, de mentionner qu'on doive se retirer de façon catégorique. Ce n'est absolument pas mon propos. Mais ce qui est mon propos, c'est que je tiens absolument à ce que le gouvernement pense de façon très élaborée à toutes les implications et qu'il les révèle sans aucune restriction à la population et au Parlement.

J'aimerais revenir un peu sur la déclaration qu'a faite le ministre de la Défense la semaine dernière en disant que le Canada enverrait des troupes à moins que les Américains ne le fassent. J'écoutais justement hier soir des interventions d'Américains qui livraient que l'accord du Congrès concernant les 20 000 ou 25 000 militaires de la force américaine n'avait pas encore été obtenu. À ce que je sache et à ce que je comprenne, ainsi que mes collègues du Bloc, si l'effort américain n'est pas approuvé par le Congrès, je me questionne drôlement sur la façon dont ce fameux Accord de Dayton pourrait être rempli.

C'est un peu comme si on s'engage dans un débat maintenant pour prendre une décision sur la participation canadienne et qu'on ne définit pas clairement quel genre d'aide on enverra. Est-ce qu'on enverra une escadrille aérienne, comme l'a suggéré le député de Saanich-Les Îles-du-Golfe, ou est-ce qu'on envoie un bataillon de génie pour réparer les routes? Est-ce qu'on envoie un peloton spécialisé dans les communications? Rien de ça n'a été suggéré par le ministre, et je pense que cela aurait sûrement été une excellente occasion de dire à la population: «Oui, le Canada participe aux missions de paix. Le Canada y va selon ses moyens et aussi selon ses ressources humaines.»

Comme je le mentionnais précédemment, je pense que nos fantassins sont drôlement essoufflés avec toutes les participations qu'ils ont faites, même si, à l'intérieur du Livre blanc ou à la suite du rapport du Comité mixte spécial, on mentionne qu'on devait augmenter le nombre de militaires de la force terrestre. Jusqu'à maintenant, ce n'est pas encore fait. On fait actuellement du recrutement, mais ces gens ne sont pas prêts à participer. Je pense qu'on devrait aller vers une tangente ou se limiter carrément aux 1 000 militaires que notre entente avec l'OTAN nous demande et puis, peut-être, y aller avec une participation soit d'observateurs ou de gens de communication, ces choses-là.

Mais toujours, avant de prendre cette décision, j'ai de la difficulté à comprendre comment il est possible qu'on puisse, premièrement, vouloir dire d'avance, comme M. le premier ministre a dit: «Oui, oui, on va vous envoyer des troupes, M. Boutros-Ghali, il n'y a pas de problèmes.»

(1255)

Ensuite, on va décider ce que ça coûtera et quel genre d'aide on va vous fournir. Et combien de temps y demeurera-t-on? Eh bien, M. Boutros-Ghali a justement mentionné que si un pays s'engage, ce peut être pour six mois, douze mois, trois ans, le temps que dure le conflit. Cela aussi est une interrogation, autant de la part de la population, des militaires impliqués que des membres du Parlement. Pour combien de temps on s'engage en Bosnie? Est-ce que lorsqu'on décide, que le gouvernement décide qu'on s'implique pour douze mois comme les membres de l'OTAN l'ont demandé, si après ces douze mois, le conflit n'est pas réglé, on va faire ce qu'on fait d'habitude? Deux jours avant le renouvellement, on aura un petit débat et on dira: On prolonge de six mois, on prolonge de douze mois, on recalculera ce que ça coûte quand on aura fini.

Je suis loin d'être sûr que c'est ce à quoi la population s'attend. Il est grand temps que le gouvernement et le ministère de la Défense nous fassent part de choses précises. Nous, du Bloc québécois, sommes d'accord pour l'implication du Canada et des Québécois à l'intérieur des missions de paix pour défendre les valeurs et les traditions, mais il faut aussi les préciser, ces participations. Il faut aussi donner aux militaires un mandat très clair de la durée et de ce qu'ils ont à faire, et à la population, ce que ça lui coûte pour défendre les principes et les valeurs du Canada.

En terminant, concernant le contexte géopolitique et l'Accord de Dayton qui a été signé, j'aimerais rappeler la citation que je vous ai faite, mentionnée par le juge Deschênes de la Cour internationale contre les crimes de guerre; il faut se souvenir que M. Mladic etM. Karadzic ont été déclarés criminels de guerre. Je pense que le Canada n'est pas intervenu sur le sujet ou très peu.

Est-ce qu'on s'en va imposer la paix et qu'ensuite, on va négocier avec ces criminels? On s'imagine qu'après cela, à l'intérieur de la population bosniaque, toutes les familles qui ont souffert des atrocités causées par ces gens-là vont tout simplement oublier ce qui s'est passé et leur pardonner. Je trouve cela un petit peu difficile à accepter.

Je me souviens d'un individu membre de l'armée de Croatie qui, lui aussi, a été déclaré criminel de guerre et dernièrement, il a reçu une promotion à l'intérieur de l'armée croate.

Encore là, que ce soit du côté des Serbes, que ce soit du côté des Bosniaques, je ne pense pas que la population puisse accepter, et que le feu continue à couver. Je pense que la communauté internationale et l'OTAN surtout devraient s'engager à ce que les condamnations prononcées contre ces gens-là soient effectives, parce qu'à mon sens et au sens de plusieurs observateurs, la paix va demeurer latente tant et aussi longtemps que justice n'aura pas été rendue.


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En conclusion, je dis qu'avant de prendre une décision, le gouvernement devrait faire connaître clairement toutes les implications politiques, financières et aussi en ressources humaines, au niveau des règles d'engagement dont le ministre a parlé et qu'il ne nous a pas précisées. Je pense qu'il est temps qu'on en parle ouvertement avant de prendre cette décision.

Aussi, le Bloc recommande au gouvernement de donner une période définie pour ce genre de mission. Si, en tant que membres de l'OTAN, cette organisation nous demande de rester douze mois, on s'engage pour une période de douze mois et au moment où on s'engage, qu'on évite de faire ce qu'on a failli vivre dernièrement, lorsqu'on a eu des problèmes à Visoko, à Tuzla et à Gorazde lorsqu'il y a eu prise d'otages. On préparait une mission, certains s'en souviendront, il s'agissait de la mission Cobra. Cette mission-là étant terminée, on a au moins une certaine avance sur l'entraînement pour certains militaires qui vont se rendre en Bosnie. Sauf que j'aimerais, à partir du moment où on y va, justement, et à ce sujet le ministre a mentionné de faciliter le retrait des Casques bleus, mais il faudrait aussi je pense prévoir le retrait des troupes lorsque la période sera terminée.

(1300)

Il faudrait au moins planifier le retrait de nos troupes afin qu'on ne le fasse pas de façon improvisée, un peu comme cela s'est produit au printemps dernier ou durant l'hiver dans le cas des otages.

Comme dernier point, je suggérerais, au nom du Bloc québécois, que les troupes canadiennes soient davantage spécialisées dans tout ce que j'appelle intervention traditionnelle de mission de paix tels des mandats de surveillance, tels des mandats de communication, tels des mandats de convois humanitaires. Je pense que si on décide d'y participer c'est plutôt l'emploi qu'on devrait en faire de par, comme je vous le mentionnais, l'essoufflement de nos ressources humaines, tout en évitant de rompre avec la tradition canadienne qui est justement d'être un participant excellent et extraordinaire aux missions de maintien de la paix. J'ose croire que le Canada ne développera jamais une expertise dans les missions d'imposition de la paix.

En terminant, je voudrais juste dire qu'il est toujours valorisant de participer activement à défendre les valeurs et les principes qui existent au Québec et au Canada, mais il faut toujours garder en mémoire qu'il faut aider et travailler d'abord avec sa population afin de pouvoir continuer à aider d'autres populations en détresse.

[Traduction]

Le président suppléant (M. Kilger): Avant de reprendre le débat, je dois informer la Chambre que nos délibérations d'aujourd'hui sont régies par l'article 43 du Règlement, ce qui veut dire que les députés disposeront de 20 minutes pour faire leur discours et qu'il y aura ensuite une période de 10 minutes réservée aux questions et aux observations.

M. Mifflin: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le discours que vient de prononcer le député est-il suivi d'une période de questions et d'observations?

Le président suppléant (M. Kilger): L'article 43 du Règlement prévoit que, dans ce cas, le ministre qui présente la motion aujourd'hui et l'orateur suivant disposent d'un temps de parole illimité, sans période de questions et d'observations.

Si je ne m'abuse, il ne peut pas y avoir de questions et d'observations concernant le discours du dernier orateur. À partir de maintenant, tous les discours seront suivis d'une période de dix minutes réservées aux questions et aux observations.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, cela fait ressortir une chose qui est très évidente. Ceci est censé être un débat. Nous sommes censés pouvoir poser des questions. Nous sommes censés pouvoir poser des questions au ministre, mais nous ne pourrons manifestement pas le faire parce que le Règlement ne le permet pas.

Le président suppléant (M. Kilger): Je ne veux pas me lancer dans un débat sur le sujet. Ce sont les députés qui ont fait les règles. S'ils veulent modifier ces règles ou s'ils veulent prévoir la possibilité de poser des questions parfois avec le consentement unanime de la Chambre, ils peuvent le faire chaque jour à la Chambre des communes durant cette 35e législature, comme ils ont toujours pu le faire au cours des législatures précédentes et comme ils pourront toujours le faire, du moins je l'espère, au cours des prochaines législatures.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je m'excuse. Aucune décision n'a été prise, mais nous allons envoyer des troupes. Nous sommes ici, au Parlement, pour informer les Canadiens, pour parler de ces sujets, pour avoir des réponses aux questions. Je voudrais parler aujourd'hui de l'exercice dans lequel nous sommes engagés, des critères que la Chambre devrait appliquer et de certains pièges dans lesquels nous risquons de tomber.

Il ne m'appartient pas de dire quoi que ce soit au sujet de nos soldats de la paix. Nous nous sommes suffisamment congratulés à leur sujet et nous sommes d'accord pour dire qu'ils sont les meilleurs. Nous sommes fiers des Casques bleus canadiens et nous ne ferions ou ne dirions rien de négatif à leur sujet ou au sujet des forces canadiennes qui sont envoyées en mission à l'étranger. Nous sommes fiers d'eux et nous devons le dire de façon claire et nette parce que c'est ce que nous pensons.

(1305)

Ce n'est pas la première fois que nous tenons un débat pour la forme. Ce genre de débat est de la fausse démocratie, une apparence de consultation, une promesse comme celles qu'on trouve dans le livre rouge. Nous savons qu'une bonne partie des décisions ont déjà été prises et que les fuites dans les médias n'étaient pas accidentelles. Nous savons aussi que la question ne fera pas l'objet d'un vote mais que dans quelques semaines on dira que la Chambre des communes a tenu un débat approfondi et démocratique et que la décision prise était fondée sur ce débat.

Le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères ont annoncé un certain nombre de choses à ce sujet. Il ne s'agit pas d'une mission de maintien de la paix, mais bien de l'imposition de la paix. Les troupes de combat que nous utilisons ne sont pas celles des Nations Unies, mais de l'OTAN. Cette mission ne fait pas partie du mandat de l'OTAN. Nous n'allons pas à la défense d'un membre de cette organisation. La situation actuelle n'a rien à voir avec le mandat de l'OTAN. Ne laissons donc pas les maquilleurs politiques nous dire que l'objet de ce débat est de décider si nous aiderons ou n'aiderons pas nos partenaires de l'OTAN. En fait, ce débat vise à informer la population canadienne pour qu'elle sache dans quoi elle s'engage.


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Lorsque M. Mulroney a décidé que le Canada participerait à la guerre du Golfe, tout le monde a jugé odieux que la décision ait été prise sans que la population canadienne ait été consultée. Comme les choses peuvent changer d'une élection à l'autre!

Il y a eu une semaine vendredi dernier, nous avons écrit au premier ministre pour lui demander trois choses. D'abord le texte de la proposition, pour que nous puissions en discuter. Nous voulons une vraie séance d'information, un débat en règle à la Chambre et un vote libre, c'est-à-dire trois demandes relativement simples. On ne nous a même pas fait la courtoisie de répondre à la lettre. On nous a répondu à la Chambre qu'il y aurait un débat en règle. Que nous aurions tous les détails, peut-être même qu'il y aurait un vote. Nous avons déjà entendu ce genre de discours. Quelle plaisanterie que les séance d'information que nous avons eues. J'y viendrai dans un instant.

Ce qui ne va pas, c'est qu'il n'y a pas véritablement de débat, que nous n'avons aucun détail en ce qui concerne la proposition et que ce matin, le ministre n'a rien dit. Nous n'avons pas eu de vraie séance d'information, nous n'avons pas eu la possibilité de consulter les Canadiens. Samedi soir, je me trouvais dans un endroit où 800 Canadiens se trouvaient réunis. Il aurait été très bien de pouvoir les consulter sur certaines de ces questions.

Il n'y a pas de vote, encore moins de vote libre. Le procédé n'est ni ouvert, ni transparent, ni honnête. Les décisions ont déjà été prises. Il n'y a qu'à écouter les médias. Hier déjà, ils parlaient des décisions.

Le gouvernement pense que l'opposition est essentiellement un inconvénient, qu'il faut la laisser dans l'ignorance. Manifestement, les simples députés se rangeront à ce que le gouvernement leur dit et au discours qu'il rédige pour eux. Les maquilleurs politiques diront que nous n'appuyons pas l'OTAN. Mais ceci ne rentre pas dans le mandat de l'OTAN. Soyons sérieux. N'en faisons pas une affaire de parti. Faisons ce qui est dans l'intérêt du Canada. C'est la seule chose qui devrait nous intéresser. C'est pourquoi nous avons besoin d'informations pour débattre et discuter de cette question. Toute cette comédie est inutile. Le ministre le sait. Il sait que nous n'avons pas d'informations.

De quoi veut-il dans ce cas que nous parlions? Nous aurions dû examiner certains critères. Quels genres de critères? Les deux députés qui ont pris la parole avant moi ont parlé du coût. Ce n'est pas être dur, froid et sans coeur. C'est la réalité. Les Canadiens sont en train de perdre leur assurance-maladie, ils ont du mal à envoyer leurs enfants à l'école et ils ont d'autres problèmes et on nous dit au cours de ces séances d'information que cette opération va peut-être coûter entre 2 millions et 70 millions de dollars. Voilà qui est une estimation précise. À présent, on nous dit à la Chambre qu'elle va peut-être coûter entre 50 et 60 millions de dollars. Nous avons déjà investi 600 millions de dollars et perdu dix hommes dans cette région du monde. Voyons les choses en face. Parlons de ce que ça signifie.

(1310)

Voyons certaines des estimations qui ont été faites. Le ministère des Affaires étrangères prévoyait 22 000 $ pour la mission en Haïti. Il réclame maintenant 67 millions de plus. Tout le monde devait savoir que 22 000 $ pour la mission en Haïti, c'était insuffisant. Tâchons d'obtenir des estimations et de discuter des coûts. C'est une question sérieuse.

Que dire de la durée de la mission? L'OTAN dit que dans 12 mois, tout sera terminé. Le premier ministre a dit la semaine dernière que 12 mois, ce n'était pas très long et que nous aurions peut-être besoin de trois ans. Nous aurons peut-être besoin de 30 ans, comme à Chypre. Combien de temps allons-nous y rester si l'OTAN s'en va?

Nous devons aussi nous demander ce que nous avons pu faire en 12 mois, où que ce soit. Pensons à Chypre, 30 ans. Pensons à la Somalie. Qu'avons-nous pu faire en 12 mois là-bas? Pensons à Haïti. M. Aristide envisage maintenant de rester en poste trois ans de plus comme dictateur. Parlons de la détérioration d'Haïti, à laquelle on assiste maintenant. Pensons à la durée de cette mission et à ce que nous désirons accomplir.

Parlons du commandement. Sur ce plan, nous avons des raisons de croire que le ministre est très compétent. J'espère qu'il l'est. À la séance d'information, on nous dit que la mission sera prise en charge par un groupe au moment du départ de l'OTAN. Ferons-nous partie de ce groupe? Ce sont les questions auxquelles les Canadiens veulent des réponses.

Qu'en sera-t-il du mandat? Quelle sera notre tâche? De toute évidence, si le ministre ne le sait pas, nous allons le lui apprendre aujourd'hui. Nous allons nous servir de nos armes pour tuer. Nous serons des chiens de garde impitoyables. C'est ce que le ministre de la Défense des États-Unis a dit. Qu'est-ce que cela veut dire pour nos troupes? Pouvons-nous vraiment combattre la force par la force? Est-ce ainsi qu'on obtient la paix? Cette méthode a-t-elle jamais été efficace au cours de l'histoire? Voyons un peu.

Parlons de l'escalade de la menace pour la paix mondiale. Parlons de l'Allemagne, de la Russie, des Turcs, des États-Unis et de leur rôle au fil des ans. Cette guerre civile a débuté en 350 av. J.-C. Pour comprendre la situation, il faut connaître l'histoire.

Notre engagement vis-à-vis de nos alliés est-il en jeu? La question a été posée. Il ne s'agit pas d'une mission de défense. Il ne s'agit pas de protéger un allié. Il s'agit de quelque chose d'entièrement différent.

Il y a de nombreux critères dont nous devons parler et les réponses à nos questions doivent être honnêtes et impartiales.

Quelles sont les risques? Prenons Sarajevo, par exemple. On va arriver dans une ville où se trouvent 120 000 Serbes à qui l'on va dire de partir. À quoi doit-on s'attendre? Comment allons-nous nous y prendre pour que les choses se passent pacifiquement?

Et que dire des élections? Il y a des milliers de réfugiés. On a pratiqué la politique de la terre brûlée et détruit les maisons. L'infrastructure est inexistante et, dans un an, il doit y avoir des élections. Comment faire pour qu'elles soient démocratiques? Quel sera le rôle des troupes de l'OTAN dans les élections? Il nous faut les réponses à ces questions et les Canadiens demandent au ministre d'y répondre.

Que va-t-on faire des réfugiés? Comment allons-nous les nourrir, les loger, leur fournir l'infrastructure et répondre à leurs besoins essentiels? Comment allons-nous nous y prendre? Comment allons-nous composer avec leurs émotions? Ils ont vu tuer leurs enfants, leurs grands-parents et d'autres membres de leur famille. Ils ont vu


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violer leurs filles. Comment les troupes de l'OTAN vont-elles traiter ces cas?

Comment assurer la stabilité entre les Croates et les musulmans? Comment désamorcer les risques de guerre entre Croates et Serbes? Il nous faut des réponses. Il faut poser ces questions avec impartialité.

Et la politique américaine de réarmement des musulmans? Comment peut-on réarmer une faction sans tenir compte des deux autres? En quoi cela va-t-il contribuer à ramener la paix? Comment le réarmement de cette faction peut-il apporter une plus grande stabilité? Toutes ces questions, il faut les poser.

Et que va-t-on faire des criminels de guerre? C'est un gigantesque dilemme moral. Que feront les troupes de l'OTAN lorsqu'un enfant s'accrochera à leur veste en disant: «Ce type là-bas a tué mes parents et violé ma soeur. Qu'est-ce que vous allez faire?» Nous devons discuter de ce que nous allons faire à ce sujet. Nous devons dire à nos troupes comment elles doivent agir. Nous devons savoir ce que cela signifie. Comment réagir devant ces questions qui mettent en cause les droits de la personne?

(1315)

Les combattants vont-ils simplement attendre un an en espérant pouvoir tous revenir? Quel est le véritable engagement des Américains? Si j'étais un Américain, je me dirais aujourd'hui que les soldats de mon pays sont certainement des cibles. Un soldat américain est plus précieux que toute autre personne. Il représente le véritable pouvoir. Il est marqué au front dès qu'il arrive quelque part.

Examinons un peu l'histoire. Voyons un peu comment le Vietnam a marqué les Américains. Pensons à Beyrouth, au Liban, lorsque les commandos suicides sont arrivés. Regardons ce qui s'est passé en Somalie, lorsqu'un marin américain mort a été traîné dans les rues et qu'on a pu le voir à la une des quotidiens américains. Quel impact ces événements ont-ils eu sur les Américains? Pensons à Haïti.

Le ministre doit nous dire ce qui se produira si les Américains décident de partir. La situation est bien différente, lorsqu'on est sur le terrain et qu'on vit ces situations. Le Canada restera-t-il là-bas si les Américains s'en vont? Est-ce possible? Comment tout cela fonctionnera-t-il? Nous devons obtenir des réponses à ces questions et nous de les obtiendrons pas ici à la Chambre, car le ministre ne veut pas répondre.

Vaut-il la peine de mourir pour la Bosnie? Voilà la question. Voilà ce que les Américains demandent. Le ministre serait-il prêt à envoyer son fils ou sa fille démêler ce conflit? Une mère accepterait-elle d'y envoyer ses enfants? Nous devons poser ces questions. Nous devrions en discuter ici à la Chambre.

En terminant, le gouvernement a refusé de tenir des réunions d'information pour donner des détails à ce sujet. Le gouvernement a décidé de gouverner par décret. Notre parti ne peut donc ni appuyer ni rejeter le processus. Comment pourrions-nous le faire, alors que nous ne possédons pas les renseignements adéquats et que nous ne pouvons obtenir des réponses à nos questions sur les différents points? Si l'approche était honnête et que nous obtenions des réponses honnêtes, alors nous pourrions aussi répondre honnêtement. D'un point de vue strictement militaire, le prochain orateur qui parlera en notre nom expliquera pourquoi nous ne disposons pas des équipements nécessaires pour dire oui.

Pour ma part, je parle pour l'ensemble des Canadiens. La méthode employée n'était pas la bonne. Cette décision est entièrement celle du gouvernement. Je ne veux pas entendre le ministre nous dire à nouveau que nous en avons discuté, que nous avons eu un débat démocratique et libre à la Chambre qui aura contribué à prendre la décision. Nous ne jouons aucun rôle dans cette décision. La décision est celle du gouvernement et il doit se souvenir de cela. C'est le gouvernement qui sera responsable. Il ne peut pas se camoufler derrière ce faux débat parlementaire que nous avons aujourd'hui et que nous avons déjà eu par le passé.

Le gouvernement poursuit une politique à l'ancienne. Libéral ou conservateur, c'est la même histoire. C'est Ottawa qui a la solution. Nous n'avons pas besoin d'informer la population ou de lui demander l'autorisation. Nous allons juste en parler au Parlement de façon que tout cela ait l'air démocratique.

Le gouvernement peut envoyer nos troupes, et j'espère que le ministre a raison. J'espère qu'il n'y aura pas de catastrophe. J'espère que personne ne se fera tuer. J'espère que la mission de l'OTAN sera un grand succès et que la Bosnie bénéficiera d'une paix durable. Nous aurions préféré, et de loin, avoir des réponses, pouvoir examiner les engagements, regarder cela de façon impartiale, avoir une discussion franche et ouverte avec un maximum de députés à la Chambre. La raison pour laquelle la majorité des députés ne participent pas, c'est qu'ils savent bien que tout cela c'est de la poudre aux yeux.

J'espère que les criminels de guerre seront traduits en justice. J'espère pour les Canadiens que rien n'ira mal dans cette mission. C'est une décision du gouvernement. La décision a été prise et le gouvernement doit en assumer les conséquences.

(1320)

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de son discours. J'ai certains doutes sur ce qu'il propose.

Tout d'abord, je voudrais mettre les choses au point. Le député a déclaré que les membres du tiers parti n'avaient pas suffisamment de renseignements. À ma connaissance, même si je ne suis pas certain que le député était là, il y a eu une séance d'information jeudi. J'ignore combien de temps elle a duré. Au moins deux membres du tiers parti m'ont dit qu'ils étaient heureux d'avoir participé à cette séance d'information.

On a expliqué à cette séance le rôle que le Canada pourrait jouer. On a soumis aux députés présents 15 options sur certaines des choses que nous pourrions faire et on leur a précisé les dispositions prises au sujet du commandement et du contrôle. J'aurais pensé que le député aurait obtenu à ce moment-là suffisamment d'information pour poursuivre ses recherches et être ainsi en mesure de venir à la Chambre participer à ce débat; il a eu au moins quatre jours de préavis pour faire des propositions utiles.

J'ignore au juste où les membres du tiers parti veulent en venir. Je suis très sérieux là-dessus. Depuis une semaine, les réformistes se plaignent que le moral des troupes n'est pas assez bon pour qu'elles


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participent à cette mission. Je ne peux que supposer que les réformistes ont reçu des coups de téléphone de membres furieux des Forces canadiennes, car cela ne semble pas faire partie de leur exposé. J'ignore au juste leur position là-dessus.

En ce qui concerne leur exclusion du processus décisionnel, nous avons eu d'innombrables débats à la Chambre et mon collègue sait pertinemment qu'on n'a pris encore aucune décision sur les effectifs qui seront engagés. J'ignore s'il s'attend à ce que les membres du tiers parti et de l'opposition puissent se rendre à Bruxelles pour rencontrer les représentants des autres pays membres de l'OTAN. Notre système de gouvernement démocratique prévoit que ce sont les ministres de la Défense et des Affaires étrangères qui vont rencontrer là-bas leurs homologues de l'OTAN, les représentants de nos partenaires pour la paix. Il n'y a pas de solution magique. Il s'agit de correspondre avec le ministre. Nos vis-à-vis ont-ils déjà entendu parler de lettres? Savent-ils qu'on peut rencontrer le ministre à son cabinet?

Nous tenons aujourd'hui ce débat spécial. À titre de secrétaire parlementaire-et je suis sûr que je parle au nom de mon collègue, l'honorable ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants-je veux que mon collègue réformiste et d'autres députés membres du tiers parti, de l'opposition ou de notre propre parti nous fassent connaître leur point de vue. Soumettez-nous des propositions. Aidez-nous. C'est pour cette raison que nous tenons ce débat, et pas pour entendre les discours creux de nos vis-à-vis qui nous disent qu'ils ne sont pas vraiment sûrs de ce que nous devrions faire et qui ne prennent position ni d'un côté ni de l'autre.

C'est une chance en or qui s'offre à nous. C'est la première fois en 45 ans que l'OTAN va se charger d'une opération de maintien de la paix seule, avec l'approbation du Conseil de sécurité, avec l'aide, peut-être, de partenaires pour la paix, notamment la Russie, notre ancien adversaire de la guerre froide, dans le cadre d'une mission qui devrait soulever l'enthousiasme et susciter l'imagination pour que nous tenions un débat éclairé.

Je suis très déçu de ce que le député avait à dire. Pourrait-il nous dire ce qu'il voudrait faire?

M. Mills (Red River): Monsieur le Président, de toute évidence, le député n'a pas écouté le député bloquiste non plus. Le député bloquiste a dit la même chose: nous ne connaissons pas les détails.

La séance d'information était une farce: le coût de l'opération pourrait osciller entre deux millions de dollars et 70 millions de dollars; nous ne connaissons pas encore la nature précise du mandat; nous ignorons qui fera marcher la baraque après le départ de l'OTAN.

Nous devons savoir le coût de l'opération, le budget précis. Nous devons savoir ce que sera la mission de nos troupes. Quelle sera donc leur véritable mission? Nous devons savoir qui commandera. Il faut nous donner de la matière à débattre. On ne nous a pas donné de précisions. La séance d'information était de la rigolade.

Nous savons que, comme à l'accoutumée, le gouvernement a déjà tout décidé. Il possède les renseignements, et c'est pourquoi nous les lui demandons. Il n'y a qu'à jeter un coup d'oeil sur la lettre qui a été envoyée au premier ministre pour connaître la nature de notre demande de renseignements. Il y a deux semaines, nous avons précisé ce que nous voulions. Nous voulons un vote libre à la Chambre. Nous n'avons que faire d'une bande de perroquets. Nous souhaitons un vote libre, ce qui nous permettrait de consulter nos électeurs et de revenir dans cette enceinte pour exprimer ce qu'ils pensent vraiment, car nous n'avons que faire des doreurs d'images. J'en ai assez des doreurs d'images. J'en ai assez de voir le gouvernement chercher à mettre tout sur le dos du troisième parti.

(1325)

M. Collenette: Qu'est-ce à dire? Que voulez-vous?

M. Mills (Red Deer): Vous savez ce que nous voulons. Nous avons dit que nous voulions connaîtr les critères, les détails.

M. Vanclief: Tout comme nous.

M. Mills (Red Deer): Je ne vois pas ce que je pourrais faire de plus pour que les députés comprennent enfin.

M. Boudria: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je désire invoquer le paragraphe 43(2) du Règlement, de sorte que les députés libéraux partageront maintenant leur temps de parole et feront des interventions de dix minutes.

M. Glen McKinnon (Brandon-Souris, Lib.): Monsieur le Président, j'ai entendu une allusion aux initiatives que le gouvernement de M. Mulroney avait prises lorsqu'il a envoyé des soldats au Moyen-Orient, il y a quelques années. Je me demande si le député préférait cette approche à celle que notre parti prend actuellement, à savoir d'engager tous les partis de la Chambre dans un débat avant que des mesures ne soient réellement prises.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, quelle différence cela fait-il que la décision soit prise dans une salle du caucus ou dans une salle du Cabinet, et qu'elle soit annoncée ensuite, ou qu'elle soit prise d'avance et que nous venions ici pour écouter, simplement pour la forme, les députés de l'opposition dire ce qu'ils ont à dire, ce qui, de toute façon, n'est pas important, et les ministériels dire ce que le gouvernement veut les entendre dire? Le gouvernement choisira un sujet, comme l'OTAN, et dira: «Ils ne veulent pas faire partie de l'OTAN.» Ou encore: «Ils ne sont pas en faveur de nos soldats.»

Nous sommes fiers de nos soldats. Ils ont fait un travail remarquable, mais ne continuons pas de leur demander de faire l'impossible. Ne me dites pas qu'un autre député de notre parti sera en désaccord avec cela parce qu'il examinera la question du point de vue de la défense, comme le ministre de la défense devrait le faire. J'ai dit que j'examinais la question dans son ensemble. J'ai dit que nous devrions l'examiner du point de vue de la participation de l'OTAN, des pays, de l'histoire, du mandat, des critères et ainsi de suite. D'autres députés l'examineront-ils simplement en demandant si nous pouvons continuer d'exiger l'impossible des forces militaires? C'est la question à laquelle il devra répondre.

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, le député qui vient de parler a men-


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tionné qu'il regardait cette question dans un contexte global. Lorsqu'il s'est assis après sa dernière remarque, il a dit qu'il n'avait plus rien à ajouter. À mon avis, il n'avait rien à dire durant tout son discours.

Si le député regarde le contexte global, s'il regarde le contexte historique, je plains les pauvres élèves d'histoire. Nous savons ce qui s'est passé dans l'histoire du monde lorsque certains peuples n'ont pas uni leurs efforts pour une cause commune, une bonne cause, une cause humanitaire. Il y a des guerres mondiales qui ont commencé de cette façon. Allons-nous laisser naître un autre conflit du genre sans intervenir? Allons-nous mettre le monde en péril ainsi que tous ces jeunes qui vivent aujourd'hui dans une société libre? Il veut également savoir ce que coûtera cette intervention. Quel sera le coût si nous n'intervenons pas? C'est la question qu'il faut se poser.

Lorsque nous débattons ces questions à la Chambre des communes, nous devons regarder le contexte global, comme le député l'a dit. Cependant, pour regarder le contexte global, il faut comprendre ce qui s'est passé tout au long de l'histoire.

Lorsque le comité d'examen de la politique de défense est allé là-bas, nous avons rencontré un maire croate, un maire bosniaque et un maire serbe. Chacun d'eux avait une solution, mais elles étaient toutes différentes. Aujourd'hui, le monde pacifique, le monde qui veut la paix au sein de l'humanité, devra aller là-bas pour établir les fondements de cette paix. Nous devons commencer à mettre en place des gouvernements. Personne n'intervient quand tout va bien. Cependant, il faut du courage et de la détermination de la part des Nations Unies et des pays membres pour prendre les choses en mains lorsque rien ne va plus. C'est la même chose que les débats à la Chambre des communes. Nous ne restons pas assis à écouter lorsque le débat devient chaud. Nous prenons la parole pour y participer.

(1330)

Je veux regarder le contexte global. Je félicite le gouvernement, l'OTAN et l'ONU pour le courage dont ils font preuve. En agissant de la sorte, ils aident tous les jeunes du monde qui pourraient se retrouver au beau milieu d'un conflit de plus grande envergure. Oui, regardons le contexte global. Regardons le coût de cette guerre, mais regardons aussi ce que notre inaction pourrait coûter.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, je félicite le député d'avoir exprimer les choses différemment. Nous devons débattre cette question à la Chambre. Nous devons examiner toutes ces questions, mais nous ne le faisons pas. C'est ça, le problème.

Nous devons parler aux gens. J'ai parlé aux communautés croates. J'ai été invité par les communautés serbes. Je leur ai parlé. Je sais ce que les gens disent. Ils disent: «Exposez-nous les faits avant de signer un chèque en blanc.» Voilà ce qu'ils disent.

Le député qui vient de parler serait-il prêt à envoyer son petit-fils ou sa petite-fille participer à ce conflit sachant ce qu'il sait aujourd'hui? Voilà la question.

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, certains députés ont critiqué et malmené le député de Red Deer, mais je voudrais pour ma part le féliciter. Je constate un changement d'attitude chez les réformistes, qui dans le passé ont critiqué nos gardiens de la paix et craignaient d'engager nos troupes dans des missions de maintien de la paix. Aujourd'hui, les réformistes reconnaissent au moins que les gardiens de la paix canadiens sont les meilleurs au monde. Je suis très heureux que les députés réformistes en soient venus à reconnaître l'importance des missions de maintien de la paix dans le monde.

Le ministre de la Défense nationale a exposé les options qui s'offrent à nos troupes en ce qui concerne leur participation à la force internationale qui est en train d'être constituée pour ramener la paix et la stabilité en Bosnie. J'espère que nous allons débattre ces options aujourd'hui.

J'aimerais que nous analysions la question dont la Chambre est saisie dans une perspective un peu plus étendue, soit celle de la politique étrangère, afin de saisir l'importance de la participation du Canada.

Nous avons tous été profondément affectés par les souffrances de ces milliers d'innocents de l'ex-Yougoslavie, victimes de la purification éthnique, qui ont été arrachés de leurs foyers et, dans de trop nombreux cas, tués. Ces actes ont profondément offensé les valeurs humanitaires et le sens de la justice des Canadiens.

Qui pourrait oublier la tragédie de Sarajevo et les souffrances de sa population qui a subi un siège de trois années complètes, l'un des plus longs sièges de l'histoire européenne? C'est sur cette toile de fond de conflit et de souffrances humaines que les Nations Unies ont invité le Canada et la communauté internationale à envoyer des gardiens de la paix.

Fidèle à son engagement pour le maintien de la paix et l'efficacité des Nations Unies, le Canada a relevé ces défis, mais à un certain prix. Dans chacune de ces régions, nous avons pris position afin de défendre les valeurs canadiennes et d'assumer notre rôle de chef de file sur la scène internationale.

Quand nous examinons notre action passée et que nous réfléchissons à notre action future, il est important de placer ces défis dans un contexte plus vaste. Comme le démontre clairement la tragique histoire de l'ex-Yougoslavie, la sécurité internationale est indissociable de la sécurité des individus.

Pour restaurer la paix en Bosnie, nous devons aussi redonner à la population des conditions propices à la paix, des conditions qui permettront aux familles d'être réunies de nouveau, aux écoles et aux hôpitaux de rouvrir et aux communautés de se reconstruire. La paix et la stabilité sont à de nombreux égards une condition préalable à un certain degré de sécurité des individus qui permettra au peuple de Bosnie d'apprendre les leçons de la paix, de la confiance, de la tolérance et de la coopération. À moins d'un retour à la paix et à la stabilité, nous risquons d'enseigner à toute une génération de


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Bosniaques les leçons de la guerre, de la méfiance, de la haine et de la violence.

Dès le début de la crise en ex-Yougoslavie, le Canada a reconnu l'importance d'une action précoce de part de la communauté internationale afin de prévenir la propagation de la violence. C'est le Canada qui a été à la tête de l'appel lancé en 1991 afin que le Conseil de sécurité intervienne dans la crise en ex-Yougoslavie.

(1335)

Comme nous l'a dit le ministre de la Défense nationale ce matin, le Canada a été l'un des premiers pays à envoyer des troupes en ex-Yougoslavie pour entreprendre l'une des missions les plus difficiles. En juin 1992, ce sont des troupes canadiennes qui ont été déployées à Sarajevo pour rouvrir et protéger l'aéroport de façon à ce que le pont aérien de secours puisse commencer.

Les troupes canadiennes étaient à Srebrenica, dans l'est de la Bosnie-Herzégovine, pour établir la présence des Nations Unies dans cette ville assiégée. Jusqu'au retrait des forces des Nations Unies cet automne, le Canada était, par ordre d'importance, le cinquième pays à contribuer aux forces de maintien de la paix des Nations Unies dans l'ex-Yougoslavie.

De même, depuis l'automne 1991, le Canada a versé une contribution de plus de 63 millions de dollars pour l'aide humanitaire aux victimes du conflit en ex-Yougoslavie. Cet argent a servi à l'achat et à la livraison de vivres, de fournitures médicales, de vêtements et d'abris, à l'aide aux réfugiés et aux personnes déplacées et à l'aide aux victimes de la violence sexuelle.

En 1992, le Canada a aussi pris des mesures spéciales pour aider des citoyens de l'ex-Yougoslavie à venir rejoindre leurs parents aux Canada. Plus de 7 000 personnes ont été admises au Canada dans le cadre de ces mesures spéciales. En outre, plus de 7 000 réfugiés en provenance de l'ex-Yougoslavie ont été admis dans le cadre de programmes subventionnés par le gouvernement et par le secteur privé.

Outré par les récits de crimes horribles contre l'humanité, le Canada a pris la tête des efforts en vue d'enquêter sur les responsables et de les poursuivre. Un juge canadien fait partie des 11 juges élus par l'Assemblée générale des Nations Unies au Tribunal international des crimes de guerre. Le porte-parole du Parti réformiste n'a pas mentionné cela.

Aujourd'hui, en paraphant l'accord de Dayton, qui définit le cadre général des mesures de paix en Bosnie-Herzégovine, les parties au conflit se sont engagées à signer, plus tard ce moi-ci, à Paris, un accord qui garantira que la Croatie, la République fédérale de Yougoslavie ainsi que la République de Bosnie et d'Herzégovine respectent mutuellement leur souveraineté. L'accord garantit que la Bosnie et l'Herzégovine resteront un État unique dans des frontières reconnues par la communauté internationale.

L'accord de paix de Dayton touche des questions telles que la nouvelle constitution de Bosnie et d'Herzégovine, les divisions territoriales, les droits de la personne, la politique et les forces militaires. Les principaux éléments de l'accord sont:

La Bosnie et l'Herzégovine se composeront de deux entités, soit la Fédération de Bosnie et d'Herzégovine et la République serbe. Elles formeront une union assez lâche avec un gouvernement central.

Des élections se tiendront à l'échelle de la Bosnie, avec la collaboration et la surveillance de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, l'OSCE, dans les neuf mois suivant l'entrée en vigueur de l'accord.

Sarajevo sera une ville unique.

Les parties entameront des négociations sur les mesures de renforcement de la confiance, ou MRCS, et l'accord de contrôle des armements subrégional sous les auspices de l'OSCE.

Les réfugiés et les personnes déplacées auront le droit de retourner à leur lieu d'origine ou de recevoir une indemnisation.

Il faut admettre que l'accord de Dayton est fragile. Nous le savons, mais c'est tout ce que nous avons pour le moment. Il reste des questions sans réponse et il y encore de grandes difficultés à surmonter, et beaucoup de choses pourraient mal tourner. Pourtant, cet accord est un engagement de poids à l'égard de la paix de la part des parties au conflit. C'est la meilleure chance de paix que nous ayons eue depuis le début de ce conflit. L'accord de paix de Dayton nous donne une occasion de mettre fin aux souffrances dans l'ex-Yougoslavie. C'est une occasion que nous devons saisir maintenant.

La constitution d'une force de mise en oeuvre en Bosnie sera autorisée par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Placée sous le commandement de l'OTAN, elle aura 12 mois pour séparer les belligérants et mettre en oeuvre les termes militaires de l'accord de paix de Dayton. C'est pourquoi on a tort de comparer avec la situation à Chypre où nos Casques bleus sont restés presque 30 ans. C'est un élément essentiel de l'accord de paix sans lequel les parties à l'accord estiment que la paix n'est pas possible.

Les parties à l'accord de paix de Dayton ne sont pas seules à reconnaître combien il est important de saisir l'occasion de rétablir la paix et la stabilité dans l'ex-Yougoslavie. La réponse de la communauté internationale à l'appel en vue de la constitution d'une force de mise en oeuvre a été rapide. Outre nos partenaires au sein de la structure militaire de l'OTAN, 19 pays en dehors de l'OTAN ont indiqué qu'ils étaient prêts à participer à IFOR.

(1340)

Il est important de reconnaître que la contribution du Canada à IFOR n'est qu'une dimension d'une approche globale en vue de rétablir une paix durable dans l'ex-Yougoslavie.

Le Canada continuera son action humanitaire et son action auprès des réfugiés. Nous demeurerons engagés sur le plan politique, favorisant la diplomatie et la négociation pour résoudre les problèmes plutôt que le seul recours à la force. Nous participerons pleine-


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ment à l'effort multinational de restructuration économique et social de l'ex-Yougoslavie.

À cet égard, je recommanderais que le Canada mette l'accent sur la renaissance sociale et sur l'établissement d'une société juste et démocratique. Dans cette optique, on ferra la promotion des droits de la personne et de la tolérance ethnoculturelle dans les États de l'ex-Yougoslavie et on continuera à appuyer le travail du tribunal international chargé de juger les criminels de guerre.

Le Canada devrait participer à la promotion d'élections libres en coopération avec l'OSCE. Nous devrions appuyer la création d'institutions nationales de protection des droits de la personne et oeuvrer à la promotion de médias indépendants. Certains accusent les médias internationaux d'avoir attisé le conflit.

La détermination du Canada à édifier une société ayant l'esprit civique devrait se traduire par la concentration de notre aide sur des projets communautaires et sur la reconstruction de l'infrastructure sociale de l'ex-Yougoslavie. Le Canada devrait lancer des projets dans les localités où une certaine coopération inter-éthnique commence à prendre forme.

En ce qui concerne le redressement économique, la contribution du Canada à l'effort multilatéral devrait être importante, mais non pas disproportionnée par rapport à celle des alliés européens et des Américains. Nous pourrions envisager un certain allégement de dette dans le cadre des ententes multilatérales intervenues entre les membres du Club de Paris si les pays remplissent les conditions donnant droit à ces allégements.

Toutes ces mesures constitueront une approche canadienne globale face à la situation d'après-conflit en ex-Yougoslavie. Cependant, elles devront s'accompagner d'un effort canadien soutenu en matière de sécurité. La paix demeure dangereusement fragile en Bosnie-Herzégovine. La stabilité que pourrait assurer une force de mise en oeuvre multinationale est essentielle.

En participant à la force de mise en oeuvre, ou IFOR, le Canada apportera une contribution unique. Il n'existe pas au monde une force de maintien de la paix plus expérimentée ou mieux formée que la nôtre. Participer à IFOR signifierait que nous assumons nos responsabilités en continuant d'agir à l'égard d'un conflit qui nous préoccupe depuis le début. Ne pas participer signifierait que nous tournons le dos à ce conflit qui porte atteinte aux principales valeurs et aux intérêts fondamentaux du Canada tant qu'il n'est pas efficacement résolu.

Ce serait mal d'abandonner une tâche aux trois quarts terminée en ne tenant pas compte de tout ce que les Canadiens ont investi en vue du règlement de ce conflit au cours des quatre dernières années. Nous devons poursuivre nos efforts pour instaurer la paix et la stabilité dans l'ex-Yougoslavie. Pour ce faire, nous devons participer concrètement à la force militaire qui assurera la mise en oeuvre de l'accord de paix.

Cette participation est un élément essentiel de l'approche globale du Canada à l'égard de la paix dans l'ex-Yougoslavie. C'est la meilleure façon de pouvoir encore espérer que les rêves et les talents de toute une génération de Bosniaques ne seront pas détruits par la guerre.

De nombreux électeurs de ma circonscription, anciennement de l'ex-Yougoslavie et d'origines ethniques et culturelles diverses, nous prient de poursuivre les efforts d'aide et de maintenir la participation du Canada. C'est ce qu'ils souhaitent en leur qualité de Canadiens. J'aimerais qu'on me fasse des suggestions précises au lieu d'accorder aux députés les vingt minutes. . .

Le président suppléant (M. Kilger): À l'ordre. Je comprends bien qu'il y a beaucoup de députés de tous les partis qui veulent participer à cet important débat. Si certains désirent partager leur temps, ils s'apercevront peut-être que dix minutes ce n'est pas aussi long que ce à quoi ils sont habitués. J'avertis la Chambre, de façon que nous puissions avoir autant de députés que possible qui participent à ce débat.

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, je suis assez d'accord avec le secrétaire d'État aux Affaires étrangères pour reconnaître que nous pouvons difficilement nous soustraire à ces missions de maintien de la paix, et ce, pour deux motifs.

(1345)

Strictement sur le plan humain et sur le plan de la compassion, je ne pense pas que nous puissions ignorer l'existence de ces souffrances. D'autre part, il faut reconnaître également que, dans un monde ouvert, la question de l'interdépendance des peuples est suffisamment importante pour qu'on soit conscients que toute situation conflictuelle, peu importe où elle se produit sur la planète, tôt ou tard, elle finit toujours par nous rejoindre.

Une fois que ces choses-là sont dites, il reste cependant que la nature de l'intervention à laquelle le Canada participera, je pense que c'est cela qui fait problème. Au fond, les Canadiens désireraient savoir, et les Québécois aussi, quelle est la nature de l'intervention exacte que mènera le Canada là-bas.

La question que j'aimerais poser au secrétaire d'État est la suivante: Comment s'assurer que le Canada aura un mot déterminant à dire dans la décision du type de contribution qu'il apportera en ex-Yougoslavie?

[Traduction]

M. Flis: Monsieur le Président, je remercie le député de son intervention. Il va y avoir une série de conférences de mise en oeuvre, de conférences de coordination, etc. C'est pour cela que ce débat est tellement important. Avant d'envoyer nos ministres à ces conférences, nous voulons avoir l'opinion des parlementaires.

Je voudrais que ce soit bien clair. Avant le stade des conférences, il y a le stade du cabinet. Avant de prendre ses décisions, le cabinet voudrait des idées. Pendant que nous débattons, le ministère des Affaires étrangères et le ministère de la Défense tiennent des consultations d'experts.

Le processus est en marche. Un tel processus de consultation des Canadiens ne s'est jamais produit sous les gouvernements précé-


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dents. Mais il se produit maintenant. Une fois de plus, j'invite les députés à présenter leurs idées constructives, des idées qui pourraient être soumises au cabinet, qui pourraient être présentées lors des discussions internationales que nous aurons. Ce serait une occasion de montrer une nouvelle fois au monde comment nous pouvons fonctionner par le biais de consultations, comment nous pouvons fonctionner en laissant de côté la politique partisane.

Lorsque nous représentons le Canada à l'étranger, que ce soit dans le cadre du maintien de la paix, ou dans un forum quelconque, nous mettons de côté nos différences politiques. Nous représentons le Canada, un pays uni et fort. C'est excellent pour le moral de nos soldats de la paix et c'est pourquoi je suis heureux que le Parti réformiste ait changé d'attitude à l'égard du rôle de nos Casques bleus à l'étranger.

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je rappelle que je me prononce sur une motion qu'a présentée le ministre de la Défense nationale, à savoir:

Que cette Chambre prenne acte et accueille le récent accord de paix de Dayton et les efforts constants de la communauté internationale pour instaurer une paix et une sécurité durables dans les Balkans, et que le Canada contribue à ces efforts en participant à une force d'intervention militaire internationale sous le commandement de l'OTAN.
Au cours des dix minutes qui vont suivre, je me propose de parler de la nouvelle étape que nous abordons, de la tendance qui s'en dégage, des missions telles que je les envisage et des difficultés que je prévois. Cela sera peut-être l'occasion de voir comment les Canadiens pourraient tirer parti de la riche expérience qu'ils ont acquise en matière de maintien de la paix.

Je vais remonter en 1947. Tout dépend de la façon dont on lit l'histoire, comme l'a mentionné le député de Renfrew-Nipissing-Pembroke. Si les députés se penchent sur l'histoire, ils doivent examiner les tendances. S'ils examinent la tendance au cours des 40 ans depuis 1947 à 1987, ils verraient qu'il y a eu en réalité 13 missions de maintien de la paix.

De 1987 à aujourd'hui, il en a eu deux fois plus. Soit, 26 pour être précis. S'il en a eu 13 en 40 ans et huit en cinq ans, ça fait le double en l'espace d'un cinquième de la période visée, d'où un facteur de 10.

Ce facteur, qui en est de l'ordre de 10 pour l'instant, va-t-il encore augmenter? Je l'ignore. C'est un signe que ce nous accomplissons maintenant, nous devions probablement le répéter dans un avenir pas si lointain.

Ceci est la 40e opération de maintien de la paix dans le monde. À mon avis, elle constitue le plus grand défi pour nous et elle nous donnera l'occasion de faire oeuvre de pionnier.

(1350)

Il y a un autre aspect de ce qui, loin de m'inquiéter, me guide dans ma réflexion personnelle à propos de ce qu'il faut faire. Il y a 184 pays dans le monde entier. Certains sont immenses. Le nôtre est le deuxième pour ce qui est de sa taille. D'autres sont minuscules. Sur ces 184 pays, il est important de se rappeler qu'en ce qui concerne l'ethnicité, les différences culturelles et autres, seuls 10 pays possèdent une population passablement homogène. Autrement dit, seulement 10 p. 100 des pays comportent un groupe ethnique représentant environ 75 p. 100 de leur population.

Ce que nous voyons ici n'est peut-être pas la fin de notre engagement vis-à-vis des tendances historiques. Voilà pourquoi il nous importe d'engager ce débat. Ce sur quoi nous nous prononçons aujourd'hui sera débattu au sein du Cabinet et constituera par la suite la décision du Canada. Ce débat sera l'occasion d'établir les règles de base en vue d'une participation à ce qui découlera inévitablement de ce train de mesures, pas trop tôt, espérons-le, mais vraisemblablement avant la fin de cette législature.

En comparaison des 44 mois de conflits qu'a connus la Bosnie, il est réconfortant de parler de la possibilité que l'horreur de la guerre cède le pas à des perspectives de paix. Un quart de million de personnes ont été tuées, 10 500 personnes à Sarajevo seulement. Les réfugiés atteignent le million. C'est un bien triste tableau. Partout ce n'est qu'immeubles détruits, maisons sans toit, villes désertes, sans parler des innombrables tombes jonchant les flancs de coteau et portant les noms de jeunes hommes et de jeunes filles nés après 1970.

Le comité mixte spécial dont j'ai eu le privilège de faire partie a été témoin de ce spectacle. Il y a, à Bacovici, un établissement psychiatrique qui a beaucoup souffert des bombardements et qui est administré par les soldats canadiens. Les malheureux qui s'y trouvent dépendent des Canadiens pour leur existence même.

Dans une guerre civile comme celle dont nous avons été témoins en Bosnie, il n'y a pas de gagnants et il est peu probable qu'il y en ait. La seule victoire possible, c'est celle de la paix.

Même s'il est imparfait, le plan de mise en oeuvre de l'accord de paix permet d'espérer qu'on ne sera plus confronté à certaines choses. Les gens ne passeront plus leurs journées à éviter les balles et leurs nuits à essuyer des barrages d'artillerie. Ce sera la fin des hivers où on doit quotidiennement creuser de nouvelles tombes froides et sinistres. C'en est fini des années d'isolement du monde extérieur.

Ce matin, le ministre de la Défense nationale a mentionné dix points saillants de l'accord de paix en Bosnie. Tout d'abord, la Bosnie demeure un seul État à l'intérieur des frontières actuelles. La Fédération croato-musulmane occupera 51 p. 100 du territoire et la République serbe de Bosnie, 49 p. 100 du territoire.

Deuxièmement, la présidence sera assurée par alternance, en commençant par un musulman bosniaque, il y aura un Parlement formé de deux chambres et une cour constitutionnelle. Le gouvernement central sera responsable de la politique étrangère, du commerce extérieur, de la politique monétaire, de la citoyenneté, de l'immigration et d'autres questions collectives.

La capitale, Sarajevo, est unifiée et placée sous contrôle croato-musulman. Cela pourrait poser des problèmes lorsqu'il s'agira d'améliorer le contenu de cet accord.

Des élections supervisées par la communauté internationale devraient avoir lieu l'année prochaine, ou dans un avenir prévisible.

17132

Près d'un million de réfugiés pourront retourner chez eux et les gens seront en mesure de circuler librement.

Un groupe d'arbitrage composé de musulmans, de Serbes et d'Européens tranchera la question du contrôle de Brcko, ville détenue par les Serbes.

Il importe de noter qu'il y aura un corridor de trois à cinq milles dans le nord-est de la Bosnie reliant le territoire plus petit détenu par les Serbes, à l'Est, à la partie centre-nord. Il s'agit du corridor de Posavina. Cela fait encore l'objet de négociations très serrées.

(1355)

La ville de Gorazde, qui est détenue par les musulmans, sera reliée à la fédération par un corridor terrestre. Les Serbes conservent Srebrenica et Zepa, les enclaves musulmanes qu'ils ont occupées l'été dernier. Le dernier point mais non le moindre, c'est que la force de mise en oeuvre de l'accord de paix, constituée par l'OTAN, entreprendra sa mission dans un avenir rapproché. En fait, c'est déjà commencé.

Quels sont les objectifs de l'OTAN. Il y a un objectif primaire et un objectif secondaire. L'objectif primaire, selon moi, même si je présente les choses un peu différemment du ministre de la Défense nationale, consiste à surveiller le retrait des factions en guerre d'une zone tampon d'environ cinq kilomètres ou deux milles et demi de large, qui est établie, dans la plupart des endroits, le long des lignes actuelles de cessez-le-feu. Après une certaine période, soit 30 ou 45 jours peut-être, cette zone sera élargie à 5 milles ou plus, sauf à Gorazde, Sarajevo et Brcko, qui, comme je l'ai mentionné plus tôt, auront des frontières spéciales.

La mission secondaire concerne l'enlèvement des mines terrestres et des rôles quasi militaires, par exemple, assurer la sécurité des organismes de secours qui acheminent des aliments et d'autres choses essentielles et garantir le passage des milliers de réfugiés que j'ai mentionnés.

Il y aura une entente au sujet de la création éventuelle de plusieurs commissions qui discuteront des efforts pour prévenir l'éclatement de petits conflits.

J'ai présenté un aperçu de ce que j'estime être le cadre de notre participation. Nous faisons oeuvre de pionniers. C'est la première fois que l'OTAN a un rôle exclusif de maintien de la paix. Ce n'est seulement l'OTAN qui participe à cette opération. Nous sommes engagés dans le partenariat pour la paix, avec nos futurs alliés, et la Russie a un rôle à y jouer, avec un système de commandement et de contrôle qui est mis en place pour la toute première fois.

Bien franchement, en tant que parlementaire et ministériel, je sais qu'il y a des risques, comme dans toutes les opérations de maintien de la paix. Cependant, pour reprendre les propos d'un député qui a pris la parole il y a quelques instants, le risque qu'il y a à ne pas participer financièrement ou le risque de pertes de vies ou de blessés est peut-être beaucoup plus grand que si nous participons.

Si j'en juge par les divers débats que nous avons eus ces deux dernières années, par les conclusions du comité mixte spécial sur la défense, par la discussion du livre blanc et par la discussion actuelle sur les forces de réserve, il m'apparaît très clairement que les Canadiens sont tout disposés à courir ce risque et à participer à cette opération.

C'est le rôle que nous devons jouer. J'implore les députés de l'opposition de donner au gouvernement, après leurs beaux discours politiques, une indication de ce que, à leur avis, les Canadiens voudraient que nous fassions, pour que nous puissions être guidés au cours des discussions du Cabinet et des décisions qui seront prises ultérieurement.

[Français]

Le Président: Mon cher collègue, nous passerons à la période prévue de questions et commentaires aussitôt après la période des questions orales.

[Traduction]

Comme il est 14 heures, nous allons passer aux déclarations de députés. Le secrétaire parlementaire aura la parole lorsque nous reviendrons aux initiatives ministérielles.

______________________________________________


17132

DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Traduction]

LES OBLIGATIONS D'ÉPARGNE DU CANADA

Mme Susan Whelan (Essex-Windsor, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le ministre des Finances qui a annoncé, en septembre, que les Canadiens pouvaient acheter des obligations d'épargne du Canada aux fins d'un régime enregistré d'épargne-retraite, ou REER, cette année.

Au cours des consultations prébudgétaires que j'ai organisées dans ma circonscription, l'an dernier, un grand nombre d'électeurs ont recommandé de mettre en place un système comme celui des obligations de la victoire, pour qu'une plus grande partie de notre dette nationale soit entre les mains de Canadiens, ce qui diminuerait notre dépendance à l'égard des marchés monétaires internationaux et des spéculateurs.

Cet été, le comité d'action politique des Travailleurs canadiens de l'automobile d'Essex est venu me voir pour recommander que les Canadiens puissent utiliser leurs obligations d'épargne du Canada aux fins de REER. Je remercie les membres des TCA pour l'intérêt soutenu qu'ils portent à la santé financière du Canada.

Les modifications apportées cette année montrent que le gouvernement actuel et son ministre des Finances écoutent les Canadiens et sont prêts à mettre en oeuvre leurs suggestions pour mieux gérer les finances du Canada.

J'invite tous les Canadiens à participer aux consultations prébudgétaires. Nous allons écouter ce qu'ils ont à dire. Je remercie également les Canadiens qui ont tiré avantage de cette nouvelle possibilité et qui ont acheté des REER au moyen d'obligations d'épargne du Canada cet automne.


17133

[Français]

LES AFFAIRES INDIENNES

M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, vendredi, les députés du Bloc québécois ont questionné le ministre des Affaires indiennes sur l'attitude et les intentions paternalistes et dédaigneuses envers les peuples autochtones telles que révélées dans une note de service écrite par son sous-ministre adjoint.

En guise de réponse à nos questions, le ministre s'est lancé dans une attaque tous azimuts contre les souverainistes et contre le gouvernement de tous les Québécois.

Tout en refusant de répondre pour des suggestions inacceptables de son sous-ministre adjoint, qui veut que ce gouvernement achète le silence des autochtones, le ministre s'est livré à une attaque contre le Québec, une attaque inqualifiable de par ses distorsions de langage et ses inexactitudes impardonnables. Il a même dit que j'ai été kidnappé par les Mohawks. Quelle performance pitoyable et quel mépris pour le système démocratique de la part d'un ministre de la Couronne.

* * *

[Traduction]

L'UNITÉ NATIONALE

M. Ray Speaker (Lethbridge, Réf.): Monsieur le Président, quand le gouvernement libéral est arrivé au pouvoir en 1993, il a promis que les choses allaient changer. Pourtant, plus ça change, plus c'est pareil.

Prenons les propositions du premier ministre concernant le Québec. Dans la foulée du référendum, les Canadiens de toutes les régions se sont tournés vers Ottawa dans l'attente d'une vision. Le premier ministre n'a rien trouvé de mieux qu'un «Charlottetown allégé», soit une nouvelle présentation de politiques conservatrices qui avaient échoué tant au Québec qu'à l'extérieur. Non seulement le premier ministre a dû emprunter la vision des conservateurs, mais il a aussi emprunté leurs sacs de mauvais tours pour invoquer la clôture concernant le projet de loi sur le droit de veto du Québec.

C'est effectivement ce qui se passe. Le gouvernement va obliger les Canadiens à accepter, de gré ou de force, ses propositions sur l'unité. Il va limiter le débat sur un ensemble de propositions qui ne fait l'affaire d'aucune région. Les conservateurs n'ont jamais été si effrontés ou si antidémocratiques.

Les Canadiens s'en trouveront peut-être plus unis du fait qu'ils seront déterminés à rejeter l'ancien Canada et à en bâtir un nouveau. Plus de libéraux, plus de conservateurs, en 1997, les réformistes prendront toute la place.

* * *

LA SEMAINE NATIONALE DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE

M. Joe Fontana (London-Est, Lib.): Monsieur le Président, cette semaine est la Semaine nationale de la sécurité routière, organisée sous l'égide du Conseil canadien de la sécurité.

Pour marquer le 40e anniversaire de cette campagne visant à encourager la prudence au volant sur les routes canadiennes, Transports Canada voudrait profiter de l'occasion pour rappeler aux Canadiens que la sécurité routière est la responsabilité de chacun.

La campagne a cette année pour thème la face cachée de la conduite avec facultés affaiblies. Ce problème n'a rien perdu de son acuité. Des statistiques récentes révèlent que plus de 40 p. 100 des conducteurs tués lors d'accidents d'automobile avaient bu.

Transports Canada s'est également efforcé de réduire le nombre des morts et des blessés sur nos routes grâce à des initiatives comme le programme canadien sur la protection des occupants et l'introduction d'équipement de sécurité obligatoire pour les véhicules.

Tous les Canadiens peuvent contribuer à promouvoir la prudence au volant, et cela commence par des habitudes de conduite prudente. Les conducteurs doivent tâcher de bien utiliser l'équipement de sécurité comme les sacs gonflables et les ceintures de sécurité. Faire preuve de bon sens au volant d'un véhicule, respecter les limites de vitesse et observer les règles, tout cela rendra les routes plus sûres pour tout le monde.

La Semaine nationale de la sécurité routière est une campagne importante, dont j'exhorte les députés à soutenir les objectifs.

* * *

LE MAINTIEN DE LA PAIX

Mme Dianne Brushett (Cumberland-Colchester, Lib.): Monsieur le Président, alors que nous discutons aujourd'hui de l'envoi de troupes en Bosnie, nous devons nous rappeler les réalisations accomplies depuis un demi-siècle par les forces canadiennes au service de l'ONU.

Nous devons épouser l'idéal de la paix et de l'unité mondiales que le secrétaire général de l'ONU, Boutros Boutros-Ghali, a exposé récemment ici à Ottawa. Les Canadiens doivent donner l'exemple en se faisant les ambassadeurs de la paix. Hésiter à un moment aussi crucial de l'histoire de ces pays en guerre équivaudrait à fermer les yeux sur un enfant qui meurt de soif. La Bosnie a soif de paix.

En tant que membres d'une nation unie, tous les Canadiens doivent relever le défi et contribuer à instaurer une paix durable pour tous les Bosniaques.

* * *

L'UNITÉ NATIONALE

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, depuis le début du XVIIe siècle, le Canada a pris de l'expansion, géographiquement, et a mûri pour devenir le pays dont nous sommes si fiers.

Il n'y a pas si longtemps, le Parti libéral formait l'opposition et il observait le parti qui lui faisait face. L'actuel chef du parti séparatiste à la Chambre, de même que Marcel Masse, ministre de la Défense nationale, et Roch Lasalle siégeaient alors au cabinet et ils utilisaient à fond leur pouvoir et faisaient prévaloir leur idéologie politique. Aujourd'hui, ils font campagne pour séparer le Québec du Canada, et ils présentent les faits sous un faux jour aux merveilleux habitants du Québec.


17134

Aujourd'hui, nos pensées vont vers des hommes d'État tels que Baldwin, Lafontaine, Georges-Étienne Cartier, Ernest Lapointe, sir Wilfrid Laurier, Louis St. Laurent, Pierre Elliott Trudeau et le Premier ministre actuel, qui ont jeté les fondements d'un grand avenir pour un Canada qui englobera toujours le Québec. À la différence du chef du parti séparatiste à la Chambre, qui change de parti politique comme de chemise, le Premier ministre et le Parti libéral. . .

* * *

[Français]

LA FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre, qui avait annoncé que le gouvernement fédéral se retirerait de la formation de la main-d'oeuvre, n'a pas tenu son engagement.

(1405)

Faisant une proposition qui va encore moins loin que celle faite au gouvernement du Québec en juin 1994, qui avait été rejetée du revers de la main par Daniel Johnson, Ottawa démontre encore une fois son incapacité à respecter le consensus québécois sur la nécessité de transférer au Québec les pouvoirs et ressources en formation de la main-d'oeuvre.

Dorénavant, le ministre pourra imposer aux provinces des normes nationales si elles souhaitent obtenir des fonds fédéraux et, si elles n'acceptent pas les normes d'Ottawa, le ministre pourra tout simplement les contourner pour offrir directement ces programmes aux chômeurs.

Vraiment, on comprend pourquoi le ministre a attendu après le référendum pour déposer sa réforme.

* * *

[Traduction]

L'ÉCONOMIE

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Levez-vous, jeunes gens du Canada. Vous n'avez rien à perdre sauf une existence vouée à la pauvreté. Cette génération est en train de vous ruiner. Elle vous lègue d'horribles hypothèques. Vous avez entendu parler de l'hypothèque visible.

La dette fédérale et provinciale s'élève à environ 800 milliards de dollars et augmente de 100 millions de dollars par jour. Au moment d'élever votre famille, près de la moitié de chaque dollar qui vous verserez au titre de l'impôt servira à payer les intérêts de l'hypothèque que vous lègue cette génération. Malheureusement, ce n'est qu'une partie de la réalité.

Il y a une autre hypothèque encore moins connue, presque invisible. Selon des actuaires, le coût des prestations promises aux pensionnés par le truchement des programmes du RPC, de la SV et de l'assurance-maladie va doubler, passant de 50 milliards de dollars à 100 milliards de dollars par an. Vos impôts sur le revenu devront être relevés de 50 p. 100 pour compenser cette augmentation.

Jeunes Canadiens, levez-vous et venez grossir les rangs. . .

Le Président: Le député de Regina-Qu'Appelle.

* * *

LA SASKATCHEWAN

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, la Saskatchewan est le meilleur endroit au monde, pour ce qui est de la qualité de vie, selon Martha Justus, une économiste travaillant pour Informetrica. Elle a utilisé l'indicateur du développement humain à partir duquel les Nations Unis ont décrété que le Canada était le meilleur pays au monde.

Appliqué aux provinces, cet indicateur a révélé que la Saskatchewan était la championne. Cette méthode de classement conçue par les Nations Unies vise à déterminer la qualité de vie des pays en additionnant divers facteurs comme l'espérance de vie, le niveau d'instruction et le cout de la vie rajusté en fonction du produit intérieur brut.

Les conclusions d'Informetrica n'avaient pas de quoi surprendre les habitants de la Saskatchewan. Notre histoire et notre culture communautaires ont donné le jour à quelques-unes des meilleures lois sociales que nous ayons. Ainsi, le gouvernement provincial néo-démocrate a récemment adopté une mesure autorisant de nombreux travailleurs à temps partiel à bénéficier d'avantages qui sont généralement l'apanage des travailleurs à plein temps. Voilà qui ajoute à notre qualité de vie.

Oui, la Saskatchewan arrive bonne première.

* * *

L'INFRASTRUCTURE

M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, le programme canadien d'infrastructure bat toujours son plein dans la circonscription de Peterborough, où il représente plus de 35 millions de dollars et 68 projets de construction dans chaque village, comté et ville, les deux conseils scolaires, le Collège Fleming et l'Université Trent.

Le programme a permis, entre autres, de dégager des fonds privés et publics qui étaient gardés en réserve pour des projets à venir. Le dégagement de ces fonds a donné lieu à des projets utiles et à la création d'emplois dont on avait grandement besoin. L'argent a été dépensé au niveau de la base.

J'incite fortement le gouvernement à s'inspirer de son expérience avec le programme actuel d'infrastructure et à en lancer un autre. On pourrait peut-être repenser le nouveau programme pour dégager à dessein plus de fonds du secteur privé. Ce programme pourrait peut-être comporter des variations régionales pour répondre aux besoins particuliers des localités. Ou encore, on pourrait peut-être accorder la priorité à des types particuliers d'infrastructure.

Consultons les municipalités et lançons un programme d'infrastructure nouveau et revigoré.


17135

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Jean Augustine (Etobicoke-Lakeshore, Lib.): Monsieur le Président, il y a six ans cette semaine, 14 jeunes femmes intelligentes et talentueuses, promises à un brillant avenir, ont perdu la vie à la suite d'un acte de violence insensé à l'École polytechnique, à Montréal.

Des Canadiennes de partout demeurent hantées par cette tragédie. Mercredi prochain, Journée nationale de commémoration et d'action pour mettre fin à la violence faite aux femmes, la tragédie survenue le 6 décembre devrait être un symbole de la société sûre, juste et pacifique que nous devons nous efforcer de créer.

Nous devons nous rappeler que ce terrible sacrifice peut inspirer une grande force. Par notre dévouement et nos efforts, et peu importe les divisions régionales, linguistiques, raciales ou sectaires, la mémoire de ces femmes devrait nous inciter à rebâtir un pays fondé sur les principes de l'égalité et du respect, où les femmes ne seront plus des victimes.

* * *

(1410)

[Français]

LA RÉFORME DE L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Antoine Dubé (Lévis, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines déposait, vendredi dernier, sa réforme de l'assurance-chômage. Le ministre clamait à qui voulait l'entendre que sa réforme avait pour but de s'adapter aux nouvelles exigences de la société canadienne et qu'elle permettrait aux chômeurs d'intégrer plus facilement le marché du travail.

Mais maintenant que la réforme est déposée, on constate qu'elle dépasse de beaucoup nos pires appréhensions. Le gouvernement fédéral compte en effet réduire son déficit sur le dos des femmes et des jeunes.

De plus, dans le but d'assurer la redistribution de la richesse, Ottawa a décidé de diminuer de un milliard de dollars les cotisations des mieux nantis, tandis que pour combler cette diminution Ottawa augmente les cotisations des bas salariés de 900 millions de dollars. Est-ce là la conception du gouvernement fédéral de la justice et de l'équité sociale?

* * *

[Traduction]

LE DÉCÈS DE ROBERTSON DAVIES

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Monsieur le Président, je prends aujourd'hui la parole pour rendre hommage au regretté Robertson Davies, l'un des écrivains les plus estimés du Canada.

Établissant un rapprochement entre les deux solitudes du Canada, un grand titre d'un journal du Québec disait ceci:

[Français]

«Avec Robertson Davies, les lettres canadiennes perdent un de leurs monuments.»

[Traduction]

C'est un sentiment qui décrit bien la reconnaissance que Robertson Davies avait acquise. C'est un monument de la littérature canadienne.

Pour moi, Robertson Davies était d'un autre monde. Je ne le connaissais que de réputation. La première fois que je l'ai entendu à la radio, j'ai été impressionné parce qu'il semblait avoir autant à coeur d'entendre les opinions des autres que d'exprimer les siennes. Reconnu dans le monde entier comme un grand homme de lettres, M. Davies était aussi un homme du peuple.

Cet homme a contribué à améliorer le Canada et le monde, en leur léguant à son décès son magnifique patrimoine littéraire.

* * *

LES BANQUES

Mme Bonnie Brown (Oakville-Milton, Lib.): Monsieur le Président, la semaine dernière, la Banque Toronto-Dominion et la Banque de Montréal ont annoncé des hausses substantielles de leurs bénéfices pour 1995. Par rapport à l'an dernier, leurs bénéfices ont augmenté respectivement de 17 et 19,5 p. 100.

Ces chiffres vaudront peut-être à l'industrie le respect de ses actionnaires, mais lui attireront plutôt des critiques de la part des propriétaires de petites et moyennes entreprises. Nous avons tous entendu parler de leur irritation devant les réticences de l'industrie bancaire à prêter au secteur de la petite entreprise. Nous connaissons le rôle critique de ces entreprises dans notre économie, et c'est pourquoi nous travaillons fort pour créer un milieu qui leur soit plus favorable.

Nous ne pouvons pas y arriver seuls. À notre avis, les banques ont l'obligation particulière d'aider les petites entreprises à obtenir du financement. Espérons que la hausse de leurs bénéfices les incitera à s'acquitter de cette importante obligation.

* * *

LE DÉCÈS DE ROBERTSON DAVIES

Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.): Monsieur le Président, les Canadiens pleurent le décès du grand écrivain, professeur, dramaturge et critique Robertson Davies, qui a grandement contribué à faire reconnaître la littérature canadienne au pays et à l'étranger.

Ses écrits et ses enseignements, particulièrement en tant que directeur du Massey College, ont profondément influencé les auteurs canadiens. Finaliste pour le prix Booker en 1986 et lauréat du prix Nobel de littérature en 1992, Robertson Davies a reçu le prix littéraire du gouverneur général en 1972 et le prix Molson en 1988.

17136

[Français]

Ses oeuvres renferment un univers romanesque où se mêlent passions, magie, destin, cupidité et humour. Son étonnante érudition a fait de lui un ambassadeur remarquable des lettres canadiennes.

[Traduction]

Cet homme modeste avait beaucoup d'esprit. Appelé à se décrire lui-même, il a déjà dit: «Je ne suis peut-être pas le plus beau cygne du monde, mais je ne suis pas un canard.» Il nous a néanmoins laissé de remarquables chefs-d'oeuvre en héritage. Il demeurera une source d'inspiration pour les prochaines générations.

* * *

LA CONCEPTION DE COURTEPOINTES

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour vous parler d'un art fascinant, la conception de courtepointes.

La fabrication et la préservation de courtepointes font partie intégrante de notre histoire. La confection de courtepointes illustre bien le caractère terrien du Canada à ses débuts et sa popularité persistante est gage de la vitalité de cette forme d'art.

Les foires de courtepointes sont aussi populaires de nos jours qu'elles l'étaient il y a plusieurs générations. Je cherche à obtenir actuellement l'approbation du Parlement afin que la quatrième semaine du mois de mai soit proclamée la semaine nationale de la courtepointe. Les artisans dévoués et inlassables qui confectionnent des courtepointes obtiendraient alors la reconnaissance qu'ils méritent.

(1415)

Je demande à tous les députés d'appuyer cette initiative fort louable.

Le Président: Je dirais que la conclusion du député vient à point nommé.

______________________________________________


17136

QUESTIONS ORALES

[Français]

LA RÉFORME DE L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, vendredi dernier, le ministre du Développement des ressources humaines a enfin rendu publique sa réforme de l'assurance-chômage, par laquelle il sera de plus en plus difficile pour les sans-emploi d'accéder au régime. La réforme prévoit que les seuils d'admissibilité seront considérablement relevés et que les chômeurs fréquents seront pénalisés, de sorte que les premières victimes de ces compressions seront les jeunes, les femmes et les travailleurs saisonniers. Le fédéral enlève deux milliards au programme.

Le ministre va-t-il enfin admettre que s'il a attendu aussi longtemps pour déposer sa réforme, c'est pour éviter que les Québécois sachent, avant la tenue du référendum, qu'ils écoperaient du tiers des coupures de l'assurance-chômage, soit 640 millions de dollars par année?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le député s'embrouille.

Le Québec n'est pas touché différemment des autres provinces. Un an après la transition, les prochaines répercussions sur le Québec seront de l'ordre de 7 p. 100 des prestations parce qu'une forte proportion de l'argent que nous allons économiser sera réinvesti pour permettre aux Québécois de retourner au travail.

Je crois que le député ne comprend pas bien cela. Le seul but de la réforme, c'est de donner aux gens la possibilité, les ressources et le soutien nécessaires pour réintégrer le marché du travail. Nous parlons d'emplois. Nous parlons de travail. Nous parlons d'emploi et de l'instauration d'une collaboration entre les différents paliers de gouvernement pour aider les sans-emploi à réintégrer le marché du travail.

C'est le seul but de la réforme et c'est à cela que servira l'argent. Nous transformons un programme qui n'était qu'un programme de revenu temporaire. Puisque ce programme n'est plus adapté au monde plus dur dans lequel nous vivons, nous voulons mieux préparer les gens à répondre aux exigences rigoureuses actuelles du marché du travail et à faire ce qu'ils veulent vraiment faire, c'est-à-dire trouver un emploi.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, le ministre ne peut pas nier l'effet terrible des coupures engendrées par sa réforme auprès des jeunes, des femmes et des travailleurs saisonniers surtout. Tout le monde est touché, mais davantage ces gens-là.

Le ministre ne peut pas le nier et je lui demanderais ceci: Puisque le fédéral utilise des surplus du compte d'assurance-chômage pour réduire son énorme déficit, doit-on comprendre des coupures de deux milliards annoncées vendredi, qu'au lieu d'assainir ses propres finances en gérant mieux sa boîte, Ottawa cherche plutôt à réduire ce déficit sur le dos des chômeurs?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je vais encore rappeler certains faits importants. Il est clair que le député n'a pas lu le rapport. Il ne sait pas ce que nous proposons.

La couverture du nouveau programme sera beaucoup plus large. Elle s'étendra aux travailleurs qui ont plusieurs emplois et aux travailleurs à temps partiel. Un demi-million de Canadiens qui n'étaient pas admissibles au programme le deviendront. Un quart de million de travailleurs saisonniers verront leur période de prestations prolongée par rapport à la situation actuelle. Plus de gens auront la possibilité d'accroître leurs gains parce que le nouveau


17137

régime sera basé sur un critère beaucoup plus réaliste, soit le nombre d'heures travaillées.

Mais pour répondre à la véritable question du député, pas à son préambule parce que ce qu'il y dit est faux, le fait est que l'argent ira d'abord dans un fonds de réserve qui servira à stabiliser le montant des cotisations en cas de récession. Cela vise à éviter aux travailleurs d'être frappés comme ils l'ont été au cours de la dernière récession. Donc, dans pareille situation, ce fonds évitera la hausse des cotisations. Avec cette mesure, nous réduisons les coûts pour les employés et pour les employeurs, ce qui devrait stimuler la création d'emplois. Nous utiliserons 800 millions de dollars de prestations pour aider les gens à réintégrer le marché du travail.

(1420)

Cela renvoie directement à l'objectif fondamental de notre mesure, qui est de donner aux Canadiens la possibilité de trouver un véritable emploi.

[Français]

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, quand le ministre parle de retourner les Canadiens au travail, on ne peut pas oublier que, depuis plus de deux ans, ce gouvernement est au pouvoir et n'a rien fait, mais absolument rien fait, pour ramener les Canadiens au travail, sinon de couper chez les pauvres gens et de couper chez les chômeurs. C'est ça qui est arrivé.

Le ministre ne peut pas nier, alors que le niveau d'emploi n'a pratiquement pas bougé au Canada, et compte tenu des coupures énormes qu'il inflige au Régime d'assurance-chômage, est-ce que le ministre admettra que, loin de redonner ce qu'il appelle la dignité du travail aux Canadiens, ce qu'il fait plutôt, il leur tape dessus, il les pousse vers l'aide sociale et il les condamne à la misère? C'est ça, son projet.

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le pauvre député s'est embrouillé dans la pire série d'exagérations qu'il m'ait été donné d'entendre depuis longtemps.

Comme le député le sait très bien, ou devrait le savoir, le fait est que depuis notre arrivée au pouvoir, près de 500 000 emplois permanents ont été créés. Le taux de chômage est passé de plus de 11 p. 100 à 9,4 p. 100. Au Québec seulement, 119 000 nouveaux emplois ont été créés.

Comme nous le savons tous, l'un des principaux éléments du programme, c'est que, en plus d'aider les travailleurs à s'adapter au marché de l'emploi, en ayant la possibilité d'acquérir les compétences dont ils ont besoin, il créera entre 100 000 et 150 000 emplois de plus, dont 40 000 au Québec. Il vaut la peine de se battre pour 40 000 emplois et c'est ce que nous faisons. J'aimerais que le député nous appuie dans notre combat.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. À l'aide des coupures de février 1994 et de celles de la présente réforme, le ministre, après avoir fait rembourser par les travailleurs et les entreprises six milliards de dollars sur le compte engagés à cause de la récession, va dégager, d'ici la fin de 1996, un surplus de cinq milliards de dollars. C'est une ponction très considérable. Ce surplus, pourtant, ne sera pas mis de côté, mais plutôt fera partie des revenus courants du gouvernement fédéral et réduira le déficit du fédéral de cinq milliards de dollars.

Doit-on comprendre de la réforme de l'assurance-chômage, que le gouvernement entend réduire son déficit non pas en administrant de façon plus saine le gouvernement fédéral, mais plutôt en diminuant davantage de deux milliards de dollars de plus les bénéfices aux chômeurs?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le compte d'assurance-chômage est encore déficitaire à l'heure actuelle. On a laissé son déficit atteindre les six milliards de dollars au cours de la dernière récession, faute d'avoir prévu une réserve pour compenser.

Le pire, c'est que le gouvernement précédent a haussé en même temps les contributions, les faisant passer de 2,05 $ environ à près de 3 $, soit une augmentation de 50 p. 100 au moment même où l'économie entrait en récession, ce qui n'a fait qu'aggraver la récession.

Cela devrait nous servir de leçon. Il ne faut pas mettre les travailleurs canadiens dans une situation où l'on retire tout à coup de l'argent de l'économie alors que le contraire s'impose, en fait. Un des principes fondamentaux de ce programme national est d'être anticyclique, c'est-à-dire qu'on réinvestit en période de vaches maigres et qu'on se fait une réserve de l'excédent en période de vaches grasses.

(1425)

Nous avons appris notre leçon. Nous prévoyons un fonds de réserve de façon à pouvoir stabiliser les cotisations. Ainsi, nous n'aurons pas à hausser les cotisations lorsque l'économie éprouve des difficultés, ni à financer l'économie par le déficit; nous pourrons nous assurer de réinvestir l'argent dans l'économie afin de préserver les emplois des travailleurs canadiens.

[Français]

Mme Francine Lalonde (Mercier, BQ): Monsieur le Président, le fait est que, avec le niveau des surplus actuels et le maintien du niveau des cotisations, les travailleurs ne pourront jamais toucher ce surplus, qui ne servira qu'à combler le déficit.

Comme les cotisations et prestations du Régime d'assurance-chômage font partie des revenus et dépenses du gouvernement, le ministre reconnaît-il que la réserve qu'il dit vouloir constituer pour parer à une récession n'est qu'une fiction comptable et que ce


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surplus du Régime va directement réduire le déficit fédéral, comme nous l'apprend le propre rapport financier annuel du gouvernement, à la page 11?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la députée de Mercier dit de temps à autre que les députés ont le devoir d'écouter les petites gens, d'écouter les habitants de leur région.

Je tiens à citer une déclaration très importante: «Pour que l'assurance-chômage joue pleinement son rôle de stabilisateur automatique, il conviendrait, à notre avis, de fixer les cotisations de telle sorte qu'un excédent s'accumule en période d'expansion et partant, qu'on ne soit pas obligé de hausser les cotisations en période de récession.» Est-ce là l'avis du Conseil du patronat? Non. C'est celui de la CSN et de la CEQ, les deux principaux syndicats du Québec, qui préconisent exactement ce que nous faisons.

Des voix: Bravo!

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, les modifications à l'assurance-chômage que le ministre du Développement des ressources humaines a annoncées vendredi ne créeront pas un seul emploi durable.

La nouvelle cotisation de 7 p. 100 est une taxe à plein temps imposée aux travailleurs à temps partiel; ce n'est rien d'autre qu'une razzia fiscale. Depuis le dépôt du projet de loi, le ministre et ses fonctionnaires ont omis de dire aux Canadiens le montant exact que cette razzia fiscale rapportera au gouvernement.

Pourquoi le ministre ne veut-il pas dire aux Canadiens combien d'argent il se trouve à aller chercher de cette façon dans les poches des travailleurs à temps partiel?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la députée de Calgary ne comprend vraiment pas.

Elle ne saisit tout simplement pas le but de la réforme, qui est de voir à ce que les travailleurs à temps partiel puissent, pour la première fois, bénéficier de la protection du régime d'assurance-chômage. C'est là le but de cette réforme. Si ces travailleurs gagnent moins de 2 000 $, les cotisations qu'ils auront versées leurs seront remboursées. La députée ne comprend toujours pas.

Il existe actuellement un seuil artificiel de 15 heures de travail par semaine, fixé par les employeurs, au-dessous duquel les travailleurs n'ont pas accès au congé de maternité, à la sécurité d'emploi, au recyclage. À cause de cela, tous ces travailleurs ont été renvoyés chez eux. Ce que nous faisons, c'est donner de la sécurité aux travailleurs à temps partiel au Canada.

Des voix: Bravo!

Des voix: Encore, encore!

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, permettez-moi de continuer.

La nouvelle cotisation fera mal à 2,5 millions de travailleurs à temps partiel et à leurs employeurs. Le ministre veut nous faire croire que cette cotisation est sans incidence sur les recettes. Il n'en reste pas moins que les étudiants et les mères actives visés par cette cotisation seront forcés de payer pendant des mois-plus exactement pendant 910 heures, ce qui fait des mois-avant de pouvoir toucher des prestations, et très peu d'entre eux en toucheront de toute façon. Cette cotisation n'est pas sans incidence sur les recettes. Elle permettra au gouvernement d'accroître ses recettes de 1,2 milliards de dollars au détriment des travailleurs à temps partiel.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas entendu la question de la députée, mais je suppose que je peux en inventer une pour elle et y répondre. Puisqu'elle semble inventer la plupart des faits qu'elle cite, je peux bien inventer les questions auxquelles elle veut que je réponde.

(1430)

Parlons de la question des travailleurs à temps partiel. C'est une des préoccupations qui a été soulevée avec le plus d'insistance durant les audiences publiques. J'ai entendu le chef de la députée dire, la semaine dernière, que nous devons écouter les gens. Nous les avons écoutés. Ils ont dit que, en cette époque où il y a de plus en plus de travailleurs à temps partiel ou de travailleurs qui occupent plusieurs emplois à la fois, la protection est importante. Ces travailleurs n'avaient aucune protection. Selon l'ancienne formule basée sur le nombre de semaines travaillées, on envoyait les gens chez eux après 15 heures de travail. On leur disait qu'ils ne pouvaient plus travailler. Cela créait des distorsions dans tout le marché du travail, et ces gens n'avaient aucune sécurité. Grâce à notre réforme, plus d'un demi-million de Canadiens deviendront admissibles à l'assurance-chômage.

Si la personne, que ce soit un étudiant, un homme, une femme ou qui que ce soit. . .

Une voix: Un réformiste?

M. Axworthy (Winnipeg-Sud-Centre): Il faudrait peut-être consulter la Charte des droits pour vérifier.

Mme Jan Brown (Calgary-Sud-Est, Réf.): Monsieur le Président, cela devient une habitude lorsque nous devons répondre à des points d'interrogation. Il est question ici de tuer les emplois à temps partiel.

On a très peu d'indices nous permettant de croire que la cotisation des travailleurs à temps partiel bénéficiera à quiconque sinon au gouvernement fédéral. Beaucoup d'entreprises s'opposent à cette idée. À la fin, les coûts accrus que cette mesure entraînera pour les entreprises nuiront à la création d'emplois à temps partiel. La nouvelle cotisation rapportera gros à l'État. En fait, nous nous attendons à ce qu'elle produise des recettes de plus de 1 milliard de dollars.

Comment le ministre peut-il justifier cette razzia fiscale de 1 milliard de dollars aux dépens des travailleurs à temps partiel?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la députée devrait savoir que les réductions de coûts prévues dans le programme s'élèvent à 1,3 milliard de dollars pour les employés et les dirigeants de petites entreprises. Cela aura pour effet de stimuler l'emploi.


17139

Ensuite, nous avons également prévu une remise pour les petites entreprises. S'il y a une augmentation des cotisations, elles recevront une remise de 50 p. 100. C'est une autre chose que la députée ne savait manifestement pas.

Enfin, je répète que, si un travailleur qui n'a pas gagné plus de 2 000 $ ne veut pas être admissible, il a droit à un remboursement total de ses cotisations.

Cela semble très clair. Maintenant que nous avons entendu la question de la députée, nous comprenons que cette question n'est fondée sur rien que la députée ait pu lire dans notre rapport.

* * *

[Français]

LA FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines.

En juin 1994, le fédéral offrait au gouvernement du Québec de transférer des budgets fédéraux pour plusieurs programmes de formation de la main-d'oeuvre. Cette proposition a été rejetée du revers de la main par M. Daniel Johnson qui l'a qualifiée d'entente à rabais. Ottawa propose maintenant de verser l'aide directement aux chômeurs.

Le ministre admettra-t-il que son projet de réforme va encore moins loin que l'offre de juin 1994, car il n'est plus question de transfert de budget au gouvernement du Québec, mais bien de remettre directement les chèques fédéraux aux chômeurs? Reconnaît-il qu'il n'y en a pas, de retrait fédéral, en matière de main-d'oeuvre?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je me serais attendu à ce que le député ait maintenant compris que notre projet va beaucoup plus loin que l'offre précédente.

Il y a plus d'une semaine, le premier ministre a annoncé que nous nous retirons des secteurs de l'éducation et de la formation. En fait, nous avons prévu dans le projet de loi qu'il n'y aurait pas de participation directe sans le consentement des provinces.

De plus, nous avons clairement présenté les dépenses globales que nous engageons et qui, dans la province de Québec, représentent actuellement quelque 500 ou 600 millions de dollars, plus les économies qui seront réalisées, c'est-à-dire 240 millions de dollars supplémentaires, afin de déterminer le genre de partenariat que nous pourrions établir avec les provinces. Si celles-ci ont, à l'égard de la clientèle que nous devons servir, des mécanismes de prestation de services qui satisfont aux critères établis, nous sommes tout à fait disposés à recourir à ces mécanismes. Nous pouvons chercher des façons de supprimer les chevauchements et le double emploi dans ces secteurs. Nous pouvons élaborer des plans d'emploi communs au niveau local et discuter du partage possible des ressources.

Ce projet vise vraiment à établir avec chaque province un nouveau partenariat au chapitre de l'emploi et à aider à redonner du travail aux gens.

[Français]

M. Paul Crête (Kamouraska-Rivière-du-Loup, BQ): Monsieur le Président, ce que le Québec veut, c'est que le fédéral se retire de ce champ où il a prouvé son inefficacité totale depuis plus de quinze ans.

Le ministre se rend-il compte qu'en remettant les chèques directement aux chômeurs, son ministère empêche le Québec de se doter d'une véritable politique de main-d'oeuvre au profit de la simple visibilité du gouvernement fédéral auprès de ces chômeurs?

(1435)

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, en 1941, les provinces, y compris le Québec, ont confié au gouvernement fédéral la responsabilité du régime d'assurance-chômage. C'est inscrit dans la Constitution. Au cas où le député n'aurait pas lu la Constitution dernièrement, c'est prévu dans ce document. Le gouvernement fédéral agit donc à titre de fiduciaire et doit veiller à ce que tous les cotisants au régime reçoivent des avantages adéquats.

Nous nous assurons que ceux qui ont le droit de recevoir des prestations, droit qu'ils acquièrent par leurs cotisations au régime, en reçoivent. Peu importe qui verse ces prestations, nous voulons simplement nous assurer, à titre de fiduciaire et conformément à la Constitution canadienne, que ceux qui ont droit à des prestations en reçoivent.

* * *

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, le ministre du Développement des ressources humaines a annoncé que la réduction de 5 p. 100 des cotisations d'assurance-chômage par tranche de 100 $ de rémunération assurable qu'il propose aurait pour effet de créer 24 000 emplois à temps plein au Canada. Quand il laisse aux Canadiens plus d'argent à dépenser, cela crée, selon lui, plus d'emplois. C'est aussi simple que cela.

Il faut alors se demander pourquoi le ministre du Développement des ressources humaines va prélever 7 p. 100 sur le salaire des travailleurs à temps partiel du pays.

Si une légère diminution des cotisations aura pour effet de créer 25 000 emplois à temps plein, combien d'emplois seront perdus lorsque le gouvernement ira chercher 1,2 milliard de dollars dans le portefeuille des travailleurs à temps partiel?


17140

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, le problème avec cette question, c'est que la députée a écouté sa collègue de Calgary et que les deux sont dans l'erreur.

Nous avons dit assez clairement que les travailleurs à temps partiel seront maintenant couverts par l'assurance-chômage et que s'ils veulent avoir un remboursement de cotisations, ils en auront un. Dois-je le répéter? Faut-il que je le souligne au crayon rouge pour qu'elles comprennent mieux? Jusqu'à concurrence de 2 000 $, ces cotisations seront pleinement remboursables.

D'autre part, tous ceux qui veulent être couverts par le régime et être admissibles aux prestations devront payer les cotisations nécessaires pour avoir droit à la protection qu'offrent les prestations de maternité et de maladie ainsi que les programmes facilitant le retour au travail, protection dont ils ne jouissent pas à l'heure actuelle.

Mme Deborah Grey (Beaver River, Réf.): Monsieur le Président, il est question de mathématiques, et je crois que ce n'était pas une condition préalable à l'accession au poste de ministre du Développement des ressources humaines.

Les mathématiques ne sont pas mon point fort non plus, mais je sais au moins faire le calcul suivant. Selon les propres collaborateurs du ministre, une réduction de 900 millions de dollars des cotisations d'assurance-chômage se traduira par la création de 25 000 emplois à temps plein, soit un emploi par tranche de réduction de 36 000 $. Si on se sert des mêmes données, la ponction fiscale de 1,2 milliard de dollars entraînerait la perte de quelque 34 000 emplois au Canada.

Le ministre peut-il confirmer que cette ponction fiscale sur la rémunération des travailleurs à temps partiel fera perdre des emplois? Ensuite, s'il rejette nos données, pourrait-il communiquer à la Chambre les résultats des recherches de son ministère dans ce domaine?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, je propose à la députée de lire le guide qui a été déposé en même temps que le projet de loi, car c'est dans ce document que se trouvent tous ces renseignements.

La réalité, c'est que pour être assuré il faut payer des cotisations. C'est ça un régime d'assurance. Si on paie les cotisations, on a droit aux prestations. Les travailleurs à temps partiel, qui n'avaient pas droit à l'assurance auparavant, pourront maintenant obtenir cette protection. S'ils n'obtiennent pas l'assurance, ils pourront demander un remboursement de leurs cotisations. Cela me semble un calcul assez simple. Ils auront droit à un remboursement. C'est ça le programme.

Ce qui, de toute évidence, semble échapper à la députée, c'est que dans ce marché du travail en pleine mutation, les travailleurs à temps partiel et de nombreux autres qui cumulent deux ou trois emplois, ne travaillent pas assez d'heures ou ne gagnent pas suffisamment maintenant pour avoir droit à l'assurance. Il en résulte de l'insécurité, laquelle cause des problèmes sur le marché du travail. Nous essayons de redonner une sécurité à plus d'un demi-million de travailleurs.

(1440)

[Français]

LA SÉCURITÉ DE LA VIEILLESSE

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre du Développement des ressources humaines. Après avoir déposé une réforme de l'assurance-chômage qui n'est en fait qu'un vaste programme de coupures, le ministre du Développement des ressources humaines s'apprête à déposer une réforme des pensions de vieillesse qui ira dans le même sens.

Le ministre admettra-t-il que, après s'être attaqué sans retenue aux chômeurs canadiens, il s'apprête à faire de même auprès des personnes âgées?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons pas attaqué les travailleurs canadiens et nous n'avons pas plus l'intention d'attaquer les personnes âgées.

Ce que nous faisons en tant que gouvernement, c'est de faire en sorte que ce pays puisse être gouverné efficacement. Pour les travailleurs, cela veut dire retourner au travail. Pour les personnes âgées de plus de 65 ans, cela veut dire s'assurer qu'elles aient une bonne pension de vieillesse quand le moment viendra. Telle est l'intention de ce gouvernement.

[Français]

M. Maurice Dumas (Argenteuil-Papineau, BQ): Monsieur le Président, en complémentaire, le ministre confirme-t-il que non seulement le fédéral s'apprête à couper dans les pensions de vieillesse, mais qu'il va inciter, je dis bien inciter, les personnes âgées à travailler à temps partiel, même après leur retraite?

[Traduction]

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, la seule personne qui soit coupable d'incitation est le député qui fait ce genre de fausses déclarations à la Chambre et qui essaye de faire peur aux gens alors qu'ils n'ont aucune raison d'avoir peur.

À maintes reprises dans cette Chambre, le premier ministre, entre autres, lui a dit que nous ne toucherions pas aux pensions que reçoivent les personnes âgées. Ce que nous envisageons, c'est la nécessité de réformer le Régime des pensions du Canada et de procéder à certaines réformes afin de garantir la survie de ce programme et de faire en sorte qu'il soit une source de sécurité, non seulement pour la génération actuelle de personnes âgées, mais également pour la génération suivante.

L'objectif principal du gouvernement est de prévoir l'avenir. Malheureusement, ce député ne semble capable que d'être tourné vers le passé.


17141

L'ASSURANCE-CHÔMAGE

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, je voulais poser une question générale au sujet des pertes d'emplois, mais je suis exaspéré par le manque de logique du ministre. Il aurait dû se faire éclairer par quelqu'un qui comprend la question.

D'abord, le ministre affirme que la réduction des cotisations d'assurance-chômage autorisées par la loi permet de créer des emplois. Puis il déclare que le gouvernement va faire adopter une loi pour augmenter les cotisations des travailleurs à temps partiel. Il prétend que la première mesure permet de créer des emplois mais que la seconde n'en fait pas perdre. Pourrait-il m'expliquer cette contradiction?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, oui, c'est parce que nous offrons un remboursement aux employeurs qui paient les cotisations.

M. Herb Grubel (Capilano-Howe Sound, Réf.): Monsieur le Président, cela s'applique clairement à certains de ceux qui obtiennent des remboursements, mais pas aux autres. Il y a là une contradiction.

Le mois dernier, le Canada a perdu 64 000 emplois à temps plein. IL est question d'une nouvelle récession, ce qui entraînera d'autres pertes d'emplois. Le livre rouge parlait des emplois, des emplois et encore des emplois, mais il faisait en fait référence à la perte d'emplois.

Ma question s'adresse au ministre des Finances. Puisque le ministre s'est empressé de s'attribuer le mérite des emplois créés pendant les mois précédents, va-t-il maintenant assumer la responsabilité pour les emplois perdus et nous dire comment il entend remettre les Canadiens au travail?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, il semble évident qu'une des premières choses que nous avons faites en ce qui concerne le programme d'emploi, qui avait gonflé au point de doubler en une décennie, a été de le raffiner et de réduire une bonne partie de ses coûts pour qu'il soit viable.

Deuxièmement, nous avons considérablement simplifié le programme, ce qui permettra aux entreprises d'économiser quelque 150 millions de dollars en coûts d'administration et d'injecter cet argent dans la création d'emplois.

Troisièmement, le programme produit 800 millions de dollars de nouvelles prestations d'emploi. Cet argent permettra de créer de nombreux emplois pour les Canadiens, en particulier ceux qui sont en chômage depuis longtemps.

Quatrièmement, nous avons un fonds d'investissement majeur de 300 millions de dollars pour créer des emplois dans les régions où le chômage est élevé. Il s'agit de fonds d'investissement et de mesures conçus pour aider à créer des emplois dans ces régions.

(1445)

Cette mesure est un élément majeur de création d'emplois.

* * *

[Français]

L'ACHAT D'HÉLICOPTÈRES

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Défense.

Sans doute dans l'espoir d'épargner suffisamment d'argent pour acheter des sous-marins dont on n'a pas besoin, le gouvernement envisage l'acquisition d'une vingtaine d'hélicoptères de fabrication américaine, les Sea Hawks. Or, ce type d'hélicoptère est reconnu pour ses problèmes de sécurité en mer. Pas rassurant pour des hélicoptères qui devront passer 80 p. 100 de leur temps au-dessus de la mer.

Le ministre confirme-t-il son intention de dépenser près de un milliard de dollars pour acheter à rabais des hélicoptères inadéquats?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Non, monsieur le Président.

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, c'est une réponse brève et claire.

Comment le ministre peut-il justifier, même s'il ne confirme pas son intention d'accorder encore une fois, sans appel d'offres, un contrat de près de un milliard de dollars d'achat d'hélicoptères à une entreprise américaine, privant ainsi, on en a déjà discuté, l'industrie aéronautique canadienne, principalement située au Québec, de toutes retombées économiques?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, la déclaration de l'honorable député est complètement fausse.

* * *

[Traduction]

LA VIOLENCE FAITE AUX FEMMES

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, le 1er décembre il y a un an, j'ai demandé au ministre de la Justice quelles mesures il prenait pour protéger les femmes contre la violence.

Aujourd'hui, je demande au ministre de la Justice quelles mesures législatives il a prises pendant l'année écoulée pour la mise en oeuvre du plan conçu par le gouvernement afin de combattre la violence contre les femmes?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je tiens tout d'abord à rendre hommage à la députée pour son engagement à l'égard de cette question et son importante contribution dans ce domaine.


17142

S'il y a encore beaucoup de choses à faire sur ce plan, ce que nous avons fait depuis un an pour combattre la violence contre les femmes dans ce pays a pu être réalisé en grande partie grâce à la contribution de ma collègue et d'autres membres du caucus libéral.

Pendant l'année écoulée, plusieurs mesures ont été prises. Le 15 février de cette année, le projet de loi C-42 est devenu loi. Ce texte prévoit, entre autres, qu'une personne autre que l'intéressée peut faire une demande d'ordonnance de bonne conduite. Un policier peut faire une telle demande. Les sanctions ont été renforcées et sont plus sévères.

Il y a aussi le projet de loi C-42, concernant la détermination de la peine, qui a reçu la sanction royale à la mi-juillet. Grâce à l'initiative du député de Mississauga-Sud, la violence familiale est maintenant une circonstance aggravante. Grâce à l'initiative du député de Brant, la loi prévoit le dédommagement des victimes de la violence familiale.

Il y a encore beaucoup à faire, mais je suis fier de dire que nous avons déjà pris cette année des mesures qui vont améliorer les choses.

* * *

LA FORCE DE MISE EN OEUVRE DE L'ACCORD DE PAIX

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, nous connaissons peu de détails au sujet du rôle du Canada dans le prochain déploiement de troupes de l'OTAN, de l'importance du contingent ou des autres aspects de la question. Le ministre de la Défense affirme que le Cabinet prendra une décision demain.

Des voix: Oh, oh!

M. Mills (Red Deer): Le ministre va-t-il déposer tous les détails de la proposition et permettre au Parlement. . .

Le Président: Les députés admettront que la présidence doit entendre toute la question et ne peut pas juger d'après le préambule seulement. À mon avis, cette question est irrecevable.

Si le ministre veut y répondre, je l'autoriserai à le faire, mais j'estime que la question est irrecevable. Nous passerons à la deuxième question.

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je m'excuse. J'avais pourtant consulté le greffier pour voir quelles étaient les règles.

Nous avons parlé des nombreuses violations des droits de la personne dans toutes les régions de la planète. Nous avons parlé des génocides qui ont eu lieu à certains endroits, et plus particulièrement de celui qui s'est produit dans l'ex-Yougoslavie.

(1450)

Je voudrais savoir comment le gouvernement veut que nos forces armées déployées partout dans le monde composent avec une situation de génocide.

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, encore une fois, cette question se rapporte en partie seulement au débat en cours à la Chambre.

Les troupes des Forces canadiennes ont montré ce que c'était que de prendre des mesures pertinentes lorsqu'elles sont intervenues dans l'ex-Yougoslavie. Des milliers et des milliers d'autres personnes auraient trouvé la mort si nos troupes et celles de l'ONU n'avaient pas été sur place.

Les Forces canadiennes n'ont pas de leçon à recevoir du député d'en face en ce qui concerne la façon d'agir dans les situations difficiles. Lorsqu'elles sont engagées dans un combat ou une mission, les forces remplissent leur mandat avec la plus grande compétence. Elles font appel aux normes canadiennes de justice et de tolérance dans l'exécution de leurs fonctions, dont l'utilisation de la force.

* * *

[Français]

L'AUTOROUTE DE L'INFORMATION

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Industrie.

On apprend que le ministre de l'Industrie s'apprête à accorder un contrat de 100 000 $, pour faire écrire ses discours et le conseiller sur le développement de l'autoroute de l'information, à la même entreprise qui agit comme lobbyiste auprès de lui pour les sociétés ayant des intérêts dans l'inforoute, dont Astral, Unitel, Western International Communications et bien d'autres entreprises.

En laissant les lobbyistes de ces entreprises écrire ses discours et lui dicter ses politiques relativement à l'inforoute, comment le ministre peut-il prétendre défendre l'intérêt des Canadiens dans le dossier?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais tout d'abord rappeler au député qu'il n'y a pas si longtemps que nous avons présenté la mesure législative la plus rigoureuse et la plus exhaustive à avoir jamais été présentée en Occident sur l'enregistrement des lobbyistes et qu'il ne l'a pas appuyée.

Deuxièmement, je voudrais lui dire qu'en ce qui concerne les conflits d'intérêts, la question a été soumise au conseiller en éthique. Il a examiné les arrangements que la société en question avaient mis en place en vue d'appliquer les mêmes principes qui s'appliquent à la profession juridique et qui sont approuvés par l'Association du Barreau canadien.

Le conseiller en éthique a signalé que, à son avis, il n'y aurait pas de conflit d'intérêts si le contrat en question était accordé.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier-Montcalm, BQ): Monsieur le Président, j'adresserai ma question supplémentaire au premier ministre, le grand responsable de l'intégrité de ce gouvernement.


17143

Le premier ministre ne trouve-t-il pas indécent que le ministre de l'Industrie se fasse le simple porte-parole d'entreprises intéressées dans l'inforoute, et que devons-nous penser d'un conseiller à l'éthique qui trouve cela correct?

[Traduction]

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, je ne sais pas si le député a de la difficulté à comprendre, mais ce qu'il doit savoir, c'est que nous prenons très au sérieux tout cas qui pourrait comporter un conflit d'intérêts.

À partir du moment où une entreprise concurrente a soulevé une possibilité de conflit d'intérêts au sujet d'un contrat accordé à la suite d'une demande de propositions, la question a fait l'objet d'une enquête complète. Le conseiller en éthique a jugé suffisants les engagements pris et les serments donnés, de sorte que nous avions confiance qu'il n'y avait pas de conflit d'intérêts susceptible de porter préjudice au travail effectué.

Je voudrais que le député comprenne que la question de l'intégrité et des conflits d'intérêts est extrêmement importante. S'il a des preuves de ce qu'il avance lorsqu'il dit que nous ne devrions pas accepter le serment ou les systèmes qui sont en place, qu'il nous donne des détails sur la nature du problème.

* * *

LA COMMISSION CANADIENNE DU BLÉ

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire.

Les agriculteurs des Prairies ont vraiment été offusqués d'apprendre récemment que les commissaires de la Commission canadienne du blé avaient reçu des indemnités de départ pouvant aller jusqu'à 290 000 $. En novembre 1994, j'ai soumis une demande en vertu de la Loi sur l'accès à l'information pour obtenir tous les renseignements disponibles sur les régimes de pensions et les salaires de ces commissaires. Le ministère de l'Agriculture m'a répondu qu'aucun document de ce genre n'existait.

(1455)

En août, j'ai contesté cette réponse, mais en vain. Pourquoi le ministre a-t-il caché ces renseignements?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, je vais vérifier ce qui s'est passé dans le cas que soulève le député et faire en sorte qu'on réponde correctement aux demandes de renseignements.

Cependant, le député devrait savoir que les indemnités de départ dont il a parlé dans sa question ont été établies il y a une quinzaine d'années, avec l'approbation du Conseil privé. À l'époque, aucun des commissaires actuels n'était en poste.

Cette année, après consultation du Bureau du Conseil privé, j'ai pris des dispositions pour moderniser les indemnités de départ, pour m'assurer qu'elles sont conformes aux autres exigences.

Le député ne peut rien reprocher aux commissaires actuels de la Commission canadienne du blé, car ils n'étaient pas là lorsque les indemnités de départ ont été éatblies.

M. Jake E. Hoeppner (Lisgar-Marquette, Réf.): Monsieur le Président, la dernière fois que j'ai demandé des renseignements à la Chambre, on a accusé la GRC d'user de procédures inappropriées. Je me demande maintenant qui est à blâmer au ministère de l'Agriculture. C'est le gouvernement libéral qui, il y a 15 ans, a donné aux commissaires la possibilité de profiter de ces avantages indirects et de ces privilèges.

Pourquoi le ministre ne prend-il pas des mesures pour faire disparaître, avec effet rétroactif, ces avantages indirects et ces privilèges, comme le gouvernement l'a fait dans le cas de l'accord de l'aéroport Pearson?

L'hon. Ralph E. Goodale (ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire, Lib.): Monsieur le Président, les dispositions aux termes desquelles les commissaires actuels sont entrés en fonctions étaient légalement en vigueur lorsque le gouvernement du Canada a décidé de retenir leurs services.

* * *

L'ÉCONOMIE

M. Gary Pillitteri (Niagara Falls, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances.

Le Comité permanent des finances, dont je fais partie, entend les Canadiens qui ont des propositions à faire sur le budget de 1996.

Le ministre des Finances peut-il nous dire quand il va comparaître devant le comité pour présenter son point de vue sur le déficit et d'autres problèmes d'ordre économique? Quel sera son message?

L'hon. Douglas Peters (secrétaire d'État (Institutions financières internationales), Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux d'annoncer que le ministre des Finances comparaîtra devant le Comité permanent des finances le mercredi 6 décembre, en après-midi.

L'an dernier, le ministre avait demandé au comité de lui proposer des mesures appropriées pour atteindre notre objectif de réduction du déficit en 1995. Nous sommes indiscutablement sur la voie de le réaliser. L'an dernier, le ministre a énoncé les principes de la réduction du déficit et, cette année, il réitérera notre engagement envers ces principes. Le comité devra refléter clairement les priorités des Canadiens pour qu'il en soit tenu compte dans l'établissement du budget pour 1996.

* * *

L'EMPLOI

M. Simon de Jong (Regina-Qu'Appelle, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse elle aussi au ministre du Développement des ressources humaines.

17144

En 1990, 87 p. 100 des chômeurs canadiens étaient admissibles aux prestations d'assurance-chômage. Il y a deux ans, les libéraux ont réduit cette proportion à 50 p. 100. Le CTC prédit qu'avec la mise en oeuvre des changements qu'on vient d'annoncer, les deux tiers des chômeurs canadiens ne seront plus admissibles à l'assurance-chômage, soit à peu près la même proportion qu'au Mississippi.

Comment le ministre peut-il prétendre que ces changements seront avantageux pour les travailleurs canadiens? Le gouvernement cherche sûrement à redresser le déficit au détriment des chômeurs canadiens.

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre du Développement des ressources humaines et ministre de la Diversification de l'économie de l'Ouest canadien, Lib.): Monsieur le Président, s'il est un cadeau de Noël que je souhaite sincèrement au président du CTC, c'est une calculatrice de poche pour lui permettre de calculer juste.

Il est très clair que l'économiste qui a fait ces déclarations est un candidat tout désigné pour les programmes de recyclage que nous avons l'intention d'offrir dans le cadre du nouveau régime d'assurance-emploi. Il ne sait tout simplement pas de quoi il parle.

* * *

(1500)

[Français]

LES DROITS DE LA PERSONNE

Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, ma question s'adresse au premier ministre suppléant ou au secrétaire parlementaire.

Lundi soir dernier, à l'émission Enjeux de Radio-Canada, on nous présentait un documentaire révélant l'horrible sort qui est réservé aux bébés de sexe féminin dans les pouponnières d'État en Chine. Chaque année, un million de bébés filles sont littéralement parqués dans des mouroirs.

Le premier ministre suppléant peut-il nous indiquer si le premier ministre a l'intention de dénoncer ces actes inadmissibles auprès des autorités chinoises, au lieu de se contenter d'aborder la question des droits de la personne derrière des portes closes, et ainsi fermer les yeux carrément sur cette odieuse pratique?

[Traduction]

L'hon. Raymond Chan (secrétaire d'État (Asie-Pacifique), Lib.): Monsieur le Président, le gouvernement canadien s'est toujours soucié de la situation des droits de la personne en Chine. Récemment encore, à la réunion au sommet de l'Organisation de coopération économique Asie-Pacifique, notre premier ministre a eu des entretiens bilatéraux avec le président chinois, M. Jiang. Il a abordé avec lui la question des droits de la personne. Nous soulevons cette question non seulement dans les échanges bilatéraux, mais aussi dans le cadre d'organisations multilatérales, comme le Haut-commissariat des Nations Unies pour les droits de l'homme.

Nous tenons à assurer à tous les députés que le gouvernement canadien n'accorde pas moins d'importance aux droits de la personne qu'au commerce. Nous continuerons d'insister sur ces droits auprès du gouvernement chinois.

* * *

LA DÉFENSE NATIONALE

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, le Parti réformiste et tous les députés tiennent à féliciter le capitaine et l'équipage du NCSM Calgary ainsi que le capitaine et l'équipage de l'hélicoptère Sea King qui ont participé aux opérations de sauvetage le week-end dernier.

Des voix: Bravo!

M. Hart: Le ministre de la Défense nationale peut-il nous dire quand les Canadiens seront mis au courant de l'appel d'offres qui sera lancé pour acquérir de nouveaux hélicoptères embarqués?

L'hon. David M. Collenette (ministre de la Défense nationale et ministre des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, il est réconfortant d'entendre enfin le député féliciter les forces armées d'un de leurs exploits. Cette opération a pris des proportions épiques, et tous les Canadiens ont lieu d'être fiers de l'équipage du NCSM Calgary.

Quant à la question des hélicoptères embarqués, une décision sera prise avant la fin de l'exercice financier, comme je l'ai déjà déclaré publiquement.

______________________________________________


17144

AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à six pétitions.

* * *

LE BUREAU CANADIEN D'ENQUÊTE SUR LES ACCIDENTS DE TRANSPORT ET DE LA SÉCURITÉ DES TRANSPORTS

M. John English (secrétaire parlementaire du Président du Conseil privé de la Reine pour le Canada et ministre des Affaires intergouvernementales, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le rapport du vérificateur du Bureau canadien d'enquête sur les accidents de transport et de la sécurité des transports.

Le rapport porte sur l'année financière se terminant le 31 mars 1995 et sera renvoyé au Comité permanent des transports.


17145

PÉTITIONS

LA FISCALITÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, j'ai trois pétitions à présenter aujourd'hui. Je voudrais d'abord présenter une pétition qui circule dans toutes les régions du Canada. Celle-ci a été signée par un certain nombre d'habitants de Fenelon Falls, en Ontario.

Les pétitionnaires attirent l'attention de la Chambre sur le fait que diriger un foyer et prendre soin des enfants d'âge préscolaire est une profession honorable qui n'est pas reconnue à sa juste valeur dans notre société.

Ils ajoutent que la Loi de l'impôt sur le revenu exerce une discrimination contre les familles qui choisissent de s'occuper, à la maison, d'enfants d'âge préscolaire, de personnes handicapées, de malades chroniques et de gens âgés. Les pétitionnaires demandent donc humblement au Parlement de poursuivre des initiatives visant à supprimer cette discrimination contre les familles qui décident de s'occuper de ces personnes à la maison.

LE SYNDROME D'ALCOOLISME FOETAL

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): La deuxième pétition, monsieur le Président, concerne le syndrome d'alcoolisme foetal. Les pétitionnaires souhaitent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que la consommation de boissons alcoolisées risque d'entraîner des problèmes de santé ou de diminuer les capacités personnelles. Plus particulièrement, on peut prévenir le syndrome d'alcoolisme foetal et les malformations congénitales liées à la consommation de boissons alcoolisées en évitant de consommer des boissons alcoolisées durant la grossesse.

(1505)

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de promulguer une loi exigeant que des étiquettes de mise en garde soient apposées sur toutes les bouteilles de boissons alcoolisées afin de renseigner la population en général et les femmes enceintes en particulier sur les risques associés à la consommation de boissons alcoolisées.

LES CHÂTIMENTS CORPORELS

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, la dernière pétition me vient de Mme Betty Pellier et concerne l'article 43 du Code criminel.

Les pétitionnaires veulent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que l'article 43 du Code criminel permet à tout instituteur, aux parents et à toute personne qui remplace les parents d'employer la force pour corriger un élève ou un enfant confié à leurs soins pourvu que la force ne dépasse pas la mesure raisonnable dans les circonstances, et que la mesure raisonnable a été interprétée par les tribunaux comme incluant la fessée, les gifles, les corrections administrées avec une lanière de cuir, les coups de pied, etc.

Les pétitionnaires prient donc le Parlement de mettre fin à l'approbation légale de cette pratique néfaste et discriminatoire en abrogeant l'article 43 du Code criminel.

LES DROITS DE L'ENFANT À NAÎTRE

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, j'ai deux pétitions à présenter au nom de personnes vivant dans la circonscription de Provencher.

La première concerne l'avortement. Elle a été signée par un certain nombre d'électeurs de Niverville et de Morris. Ces électeurs prient respectueusement le Parlement de prendre immédiatement des mesures, en modifiant le Code criminel, afin d'étendre à l'enfant à naître la protection dont bénéficient les autres êtres humains.

L'AIDE AU SUICIDE

M. David Iftody (Provencher, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition concerne l'aide au suicide et l'euthanasie. Elle a été signée par des électeurs de Rosenfeld, de Rosenort, de Niverville et de Saint-Malo.

Ces pétitionnaires prient eux aussi respectueusement le Parlement de veiller à ce que les dispositions actuelles du Code criminel du Canada qui interdisent l'aide au suicide soient vigoureusement mises en application et de n'apporter à la loi aucune modification qui aurait pour effet d'approuver ou de permettre, de quelque façon que ce soit, l'aide au suicide ou l'euthanasie active ou passive.

[Français]

L'INDUSTRIE MINIÈRE

M. Bernard Deshaies (Abitibi, BQ): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter une pétition recueillie lors de la récente tournée de l'exposition de photographie Les galeries de mines. Les pétitionnaires désirent attirer l'attention de la Chambre sur le fait que l'industrie minière au Canada et au Québec est le fondement principal pour l'emploi dans plus de 150 collectivités, une importante collaboratrice au Produit national brut et aux exportations totales du Canada, ainsi qu'une pierre angulaire de notre économie au Canada. Les pétitionnaires prient donc le Parlement de prendre les mesures nécessaires pour appuyer notre industrie minière.

[Traduction]

LES DÉLINQUANTS DANGEREUX

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, j'ai aujourd'hui deux pétitions principalement signées par des électeurs de Windsor-Ouest.

La première concerne les mesures que les pétitionnaires souhaitent voir prises relativement à l'arrestation des délinquants sexuels dangereux et des pédophiles, aux enquêtes dont ils font l'objet, aux peines qui leur sont imposées et à leur mise en liberté.

L'AIDE AU SUICIDE

Mme Shaughnessy Cohen (Windsor-Sainte-Claire, Lib.): Monsieur le Président, la deuxième pétition concerne l'aide au suicide par un médecin.

LES DROITS DE L'ENFANT À NAÎTRE

M. Paul Steckle (Huron-Bruce, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 36 du Règlement, un certain nombre de pétitionnaires m'ont demandé de présenter la pétition suivante qui attire l'attention de la Chambre sur ce qui suit. La majorité des Canadiens respectent le caractère sacré de la vie et les êtres humains

17146

non encore nés ne sont pas protégés par la société canadienne. Les pétitionnaires prient le Parlement d'agir sur-le-champ en modifiant le Code criminel afin d'accorder aux enfants non encore nés la même protection dont jouissent les autres être humains.

* * *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, nous répondons aujourd'hui aux questions nos 192 et 205.

[Texte]

Question no 192-M. Hanger:

Par le truchement de quels mécanismes et en vertu de quels pouvoirs spécifiques d'ordre statutaire ou réglementaire, le gouvernement fédéral peut-il déterminer, pour le compte des provinces, quels sont les immigrants parrainés parmi toutes les personnes touchant de l'aide sociale au Canada?
L'hon. Sergio Marchi (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Lib.): Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) conclut des protocoles d'entente pour faciliter l'échange de renseignements sur les immigrants parrainés avec les provinces (et s'il y a lieu, avec les municipalités), aux fins de l'administration des programmes d'aide sociale et pour les besoins du programme de parrainage du ministère. La question de la protection des renseignements personnels se pose, et il faut que les PE respectent les lois fédérales et provinciales dans ce domaine. Actuellement, CIC a conclu un PE avec les municipalités de la Communauté urbaine de Toronto et avec les municipalités de Peel, Windsor, London, York ainsi qu'avec deux ministères ontariens: Services sociaux et communautaires et Santé. Le ministère est en train de négocier la signature de protocoles d'entente avec d'autres provinces et municipalités qui le demandent. En Ontario, certaines municipalités veulent conclure leur propre PE, car les bases de données provinciales ne contiennent pas toutes les données municipales.

En vertu de ces PE, CIC peut faire savoir aux services d'aide sociale si un demandeur est un immigrant parrainé et quelle est la période de validité de l'engagement de parrainage, et les services d'aide sociale peuvent avertir CIC de la rupture d'un engagement de parrainage et confirmer que le répondant a remboursé à la province les sommes payées à l'immigrant parrainé.

Question no 205-M. Gilmour:

De quelle contribution monétaire totale (directe et indirecte) et source de financement gouvernementale a bénéficié annuellement la Valhalla Society entre 1990 à aujourd'hui, y compris au budget de 1995-1996?
M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): On m'informe comme suit, en ce qui concerne le ministère de l'Environnement:
1994-1995, 58 325 $, Fonds des partenaires de l'environnement;
1995-1996, 21 045 $, Fonds des partenaires de l'environnement.

En ce qui concerne Développement des ressources humaines Canada:
1990-1991, 1 671 $, Planification de l'emploi, placement relatif aux emplois d'été;
1993-1994, 2 624 $, Planification de l'emploi, placement relatif à la formation en milieu de travail.

Les ministères et organismes suivants n'ont pas de renseignements;
Agence canadienne de développement international,
Patrimoine canadien,
Commission de la Capitale nationale,
Ressources naturelles Canada.

[Traduction]

Le vice-président: Le gouvernement a répondu aux questions énumérées par le secrétaire parlementaire.

* * *

[Français]

QUESTIONS TRANSFORMÉES EN ORDRES DE DÉPÔT DE DOCUMENTS

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si la question no 144 pouvait être transformée en ordres de dépôt de document, ce document serait déposé immédiatement.

Le vice-président: Plaît-il à la Chambre que la question no 144 soit transformée en ordre de dépôt de document?

Des voix: D'accord.

[Texte]

Question no 144-M. Stinson:

Pour les années financières 1992-1993 et 1993-1994, quels sont les dix groupes qui ont reçu le plus de subventions fédérales au titre du multiculturalisme et combien chacun d'entre eux a-t-il reçu?
(Le document est déposé.)

[Français]

M. Milliken: Je suggère que les autres questions soient réservées.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

______________________________________________


17146

INITIATIVES MINISTÉRIELLES

(1510)

[Français]

LES BALKANS

La Chambre reprend l'étude de la motion.


17147

M. Jean-Marc Jacob (Charlesbourg, BQ): Monsieur le Président, juste avant la période des questions orales, le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense a terminé son exposé. J'ai constaté, comme lors de l'exposé du ministre de la Défense, que le gouvernement ne fait aucune précision quant à l'intervention du Canada à l'égard de la mission de paix qui se prépare en Bosnie.

Il est clair, si on réfère aux allocutions prononcées en cette Chambre depuis ce matin, que le Parti réformiste, qui approuve jusqu'à un certain point la participation à cette mission, de même que le Bloc québécois, demandent ce que le gouvernement se propose de faire.

Nous avons demandé ce matin de clarifier la façon dont l'aide serait prodiguée, quel serait le contingent, quels seraient les coûts, quelle serait la durée, quels seraient les engagements que le Canada prendrait en s'embarquant à nouveau dans cette mission. On a eu une belle élaboration de toute la participation canadienne et tout le monde en est très fiers, mais maintenant, on voudrait savoir, de la part du secrétaire parlementaire, quels sont les implications directes, chose qui ne nous pas encore été révélée?

[Traduction]

M. Mifflin: Monsieur le Président, je suis heureux que le député me donne la possibilité de commenter certaines de ses affirmations.

Je suis un peu perplexe. Les partis d'opposition réclamaient un débat pour qu'ils puissent nous dire ce que, d'après eux, le gouvernement devrait faire. J'ai entendu trois députés qui ne sont pas branchés puisqu'ils ont dit qu'ils aimeraient bien que le gouvernement leur dise ce qu'il va faire.

Dans ma déclaration, j'ai exposé les rôles et la mission de la force de l'OTAN, comme l'a déjà fait le ministre d'ailleurs. J'ai énuméré les pays participants. J'ai précisé certaines des choses que nous pourrions faire. La semaine dernière, les députés ont eu droit à une séance d'information d'une heure et ont reçu un document de 19 pages contenant des cartes, l'exposé de différentes options ainsi que des précisions sur le commandement responsable et les règles d'engagement.

J'ai une petite idée de ce que j'aimerais faire, mais je ne peux pas le dire. Nous devons attendre la tenue du débat et nous voulons bien attendre ce débat. Les partis d'opposition nous réclament un débat, mais, maintenant qu'il y en a un, ils nous critiquent parce que nous ne leur avons pas dit ce que le gouvernement voulait faire. Si c'est ce qu'ils attendent, j'imagine que le gouvernement peut les contenter. Nous avons beaucoup de gens très capables de prendre des décisions dans nos rangs.

J'avais cru que le but du débat était de permettre aux partis d'opposition de nous dire combien, à leur avis, nous devions dépenser et quel rôle nous devrions continuer de jouer dans les missions de maintien de la paix. Préfèrent-ils que nous prenions un rôle militaire ou aimeraient-ils mieux que nous mettions l'accent sur les droits de la personne? Devons-nous jouer un rôle quasi militaire ou quasi civil? Préféreraient-ils que nous consacrions tous nos efforts à la commission spéciale? C'est de ces questions que j'aimerais les entendre parler. S'ils veulent nous donner leur avis sur ces questions, nous en serons heureux. Que veulent-ils? Veulent-ils participer aux décisions, oui ou non?

[Français]

Le vice-président: Le temps alloué pour les commentaires et les questions est maintenant expiré. Nous allons reprendre le débat avec l'honorable député de Verchères.

M. Stéphane Bergeron (Verchères, BQ): Monsieur le Président, il me fait plaisir de prendre la parole aujourd'hui en cette Chambre relativement à la participation canadienne aux forces de l'OTAN dans le cadre du plan de paix de Dayton.

Comme vous le savez, monsieur le Président, le 21 novembre dernier, les trois principaux belligérants au conflit qui fait rage depuis plus de trois ans en ex-Yougoslavie se sont entendus pour y mettre fin. Cet accord, qui n'existe pour l'instant que sur papier, a été signé à Dayton, en Ohio, sous l'égide des Américains.

Pour que ce plan de paix se concrétise, une force d'imposition de la paix doit être déployée en ex-Yougoslavie, particulièrement en Bosnie. La mise en oeuvre de la force de paix comprendra près de 60 000 personnes. Cette force militaire sera composée sous l'égide de l'OTAN. Les différents pays membres de l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, dont le Canada fait partie, se sont pour la plupart engagés, à l'exception du Canada, du Danemark, et de l'Islande qui n'entretient pas de forces militaires, à envoyer des troupes pour l'opération militaire qui s'inscrit dans les accords de Dayton. En effet, le Canada n'a pas encore formellement spécifié à ses alliés s'il allait participer aux opérations et dans l'affirmative, quelle serait sa contribution.

C'est d'ailleurs pour cette raison que nous avons un débat aujourd'hui en cette Chambre. Le gouvernement libéral prétend vouloir consulter le Parlement avant de prendre sa décision quant à la participation du Canada à cette opération.

(1515)

Il est clairement apparu ces dernières semaines que le gouvernement libéral ne respecte pas les règles qu'il affirme s'être données. Je me permettrai de dire qu'on a l'impression d'avoir déjà joué dans ce film-là.

En effet, la décision du gouvernement est déjà prise. On a pu le constater à la lecture du quotidien The Citizen de vendredi, le 1er décembre dernier, dans lequel le porte-parole du ministère de la Défense, M. Stéphane Corbin, affirmait, et je cite: «qu'aucune décision n'avait été prise relativement à la contribution du Canada.» Mais l'engagement du Canada, lui, ne fait aucun doute.

Pour sa part, le premier ministre a déjà, on ne peut plus clairement, exprimé que le Canada allait envoyer des troupes. En effet, le 23 novembre dernier, le premier ministre déclarait, et je cite encore: «C'est sûr qu'il y aura un certain nombre de soldats, mais l'importance de la contribution dépendra de ce que nous pouvons faire et de ce qu'on nous demandera de faire.» Par ces paroles, le chef du gouvernement démontre bien le peu de respect qu'il a à l'égard de cette Chambre et dont il devrait pourtant se faire le principal défenseur, mais il semble en être tout à fait incapable.

Ceci devient encore plus évident lorsqu'on sait que le premier ministre se serait déjà entendu avec le secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, quant à la durée de la participation du Canada à cette mission de l'OTAN. Ceux-ci seraient tombés d'accord pour dire que tout pays qui s'engagerait dans la force d'interposition devrait le faire jusqu'à ce que la paix soit


17148

véritablement rétablie en ex-Yougoslavie, que ce soit «dans six mois ou dans trois ans».

Prendre un tel engagement sans consulter le Parlement, et ce en dépit du contexte qui pourrait changer et des conséquences qui pourraient survenir, est très inquiétant pour l'avenir et souligne un manque flagrant de considération envers le rôle du Parlement.

Malgré notre forte désapprobation vis-à-vis d'une telle manière d'agir, l'opposition officielle a le devoir de jouer son rôle en Chambre et d'agir en conformité avec ses principes et idéaux. Il en va de notre responsabilité envers nos concitoyens et concitoyennes, mais il en va également de notre responsabilité envers la communauté internationale.

Pour ces raisons et en dépit des lignes partisanes qui peuvent nous diviser en cette Chambre, le Bloc québécois appuie le gouvernement dans sa volonté d'envoyer des troupes en ex-Yougoslavie pour permettre la concrétisation du plan de paix élaboré à Dayton.

Cet Accord, malgré ses lacunes, est peut-être notre dernière chance de mettre fin à un conflit qui ravage depuis des années cette région des Balkans. Même si la participation du Canada peut sembler ne pas être très populaire aux yeux de l'opinion publique et qu'elle comporte des risques pour nos soldats, il ne faut pas demeurer insensibles à ce qui se passe à l'extérieur de nos frontières.

La Bosnie-Herzégovine est frappée par la guerre depuis déjà plusieurs années, une guerre à laquelle nous sommes trop souvent indifférents. Trop souvent indifférents parce que, trop souvent, la télévision ne nous montre que des visages sans nom, semblables à des millions d'autres. Pourtant, chacun de ceux et de celles qui habitent dans cette région déchirée par ce conflit meurtrier avait une vie en apparence normale avant que tout cela ne soit déclenché. Des hommes, des enfants, des femmes, ont vu leur existence bouleversée par une guerre qui perdure et qui ne semble pas vouloir prendre fin. Nous avons une obligation morale envers eux car notre responsabilité ne se limite pas simplement au territoire national du Québec et du Canada.

Pour la plus grande partie de leur histoire, le Québec et le Canada ont été épargnés par des conflits violents. Ils bénéficient depuis longtemps d'un niveau de vie très enviable, mais ceci ne doit pas nous faire oublier que d'autres, à l'extérieur de nos frontières, souffrent et ont besoin de notre soutien. Étant donné son statut de nation favorisée, le Canada a pour responsabilité d'apporter son aide à celles et ceux qui sont les victimes innocentes de la guerre.

Cela me donne l'occasion de signaler, pour répondre un peu à nos collègues du Parti réformiste, qu'il faut cesser de voir les conflits ou du moins les problèmes extérieurs comme étant tout à fait dissociés ou tout à fait indépendants de nos problèmes intérieurs. Dans ce monde en constante globalisation, dans ce monde en croissante intégration, il faut comprendre que les problèmes extérieurs sont souvent également nos problèmes intérieurs et que les problèmes intérieurs sont également les problèmes extérieurs.

Ce qui se passe à travers le monde a des incidences directes sur le Canada et sur le Québec. Lorsqu'on parle par exemple de mouvements de population, d'opportunités d'affaires ratées, et ainsi de suite, il faut comprendre que ce qui se passe à l'étranger a des incidences sur notre politique interne.

Notre objectif n'est pas de nous immiscer dans les affaires internes d'un autre pays. Nous ne déciderons pas pour eux de ce qui est juste ou mauvais.

(1520)

Notre responsabilité consiste tout simplement à éviter la mort et la souffrance de celles et ceux qui n'ont pas voulu ce conflit. Jusqu'à présent, c'est dans le cadre de la FORPRONU que nous avons exercé cette responsabilité, et ce par le biais d'une opération de maintien de la paix. Toutefois, les mesures employées jusqu'ici n'ont pu mettre fin au conflit et à ses conséquences désastreuses.

Il y a deux semaines, contre toute attente, les trois principaux belligérants se sont entendus pour arrêter les combats. Cependant, pour que ce plan de paix puisse réussir, ils ont besoin de notre aide. L'aide qui leur serait apportée de notre part comporte toutefois des risques, beaucoup plus de risques que ceux auxquels ont fait face les troupes canadiennes qui ont participé aux opérations de maintien de la paix de la FORPRONU durant les trois ans et demi qui viennent de s'écouler, et ce quoi qu'en dise le ministre de la Défense, qui voudrait nous faire croire que l'intervention militaire qui se prépare présentement n'est pas plus risquée que celle du maintien de la paix qui a débuté en 1991.

En fait, les risques inhérents à l'opération militaire qui découle des accords de Dayton sont plus élevés parce que l'opération qui va être menée par l'OTAN n'est pas du tout de la même nature que celle de la FORPRONU. Les opérations de l'ONU qui se sont déroulées en ex-Yougoslavie depuis 1991 ont été réalisées conformément au chapitre VI de la Charte des Nations Unies. Dans le cadre de différends entre les forces en place, ce chapitre autorise seulement l'utilisation de moyens pacifiques.

L'article 33 est très clair à ce sujet, et je cite: «1. Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix.»

Ensuite: «2. Le Conseil de sécurité, s'il le juge nécessaire, invite les parties à régler leur différend par de tels moyens.» Il s'agit là des articles 33.1 et 33.2.

Mais ce sur quoi nous débattons aujourd'hui ne se limitera pas à une opération de maintien de la paix, où les agressions sont peu susceptibles de survenir, même si le danger est toujours présent. Nous parlons aujourd'hui d'une opération militaire de grande envergure pour imposer la paix à des belligérants. La mobilisation de nos troupes pour la réalisation des accords de Dayton se fera conformément au chapitre VII de la Charte des Nations Unies.

Les clauses de ce chapitre permettent aux forces armées, sous l'égide de l'ONU, ou dans le cas présent de l'OTAN par délégation, d'utiliser tous les moyens jugés nécessaires pour rétablir la paix et mener à bien leur mission. Une telle opération est beaucoup plus risquée pour nos troupes, parce qu'elle augmente les probabilités que nos soldats soient appelés à être sur la ligne de feu. Bien sûr, ils pourront riposter, mais ce faisant, les attaques qu'ils subiraient pourraient définitivement être plus violentes.


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C'est la première fois qu'une telle opération est menée par l'OTAN depuis la Guerre de Corée, il y a de cela plus de 40 ans. Il est donc essentiel de bien s'assurer que la participation canadienne ne soit entachée par une opération d'agression qui pourrait mettre en péril la crédibilité du Canada dans le domaine du maintien de la paix. Le gouvernement doit faire connaître aux Québécois et aux Canadiens les conséquences qu'une telle mission peut entraîner. Nous avons le droit de connaître les dangers qui menacent nos soldats.

En ce sens, le gouvernement canadien doit dès maintenant nous expliquer quelles seront ses lignes de conduite dans ce dossier pour les mois à venir. En effet, contrairement à ce qui s'est produit lors de l'envoi de nos troupes dans le cadre de la FORPRONU en ex-Yougoslavie, le Bloc québécois croit que, cette fois-ci, Ottawa doit prendre sa place et cesser d'agir de façon bonasse. Est-il besoin de rappeler que, tout au long de notre participation à la FORPRONU, les effectifs canadiens ont oscillé autour de 2 000 hommes, soit l'un des plus gros contingents en place après ceux de la France et du Royaume-Uni.

Et pourtant, le gouvernement fédéral n'a pu faire en sorte que le Canada prenne part activement au processus décisionnel visant à gérer politiquement le conflit. Malgré notre forte participation à la FORPRONU, le Canada n'a pu faire partie du groupe de contact mis en place au plan international en avril 1994, dans le but de trouver une solution au conflit en ex-Yougoslavie, et dont faisaient partie les États-Unis, la France, le Royaume-Uni et l'Allemagne. L'implication canadienne était telle qu'il aurait pleinement mérité d'avoir sa place au sein de ce groupe.

Avec une participation canadienne aussi importante en ex-Yougoslavie, on aurait pu s'attendre à ce que le gouvernement fédéral essaie de prendre des initiatives dans le but de proposer des solutions quant à l'issue du conflit et quant à la manière dont il aurait pu être réglé. Mais comme on le sait, rien de tel n'a été fait.

(1525)

À partir du moment où nous avons décidé d'envoyer de l'aide humanitaire et des troupes pour le maintien de la paix en ex-Yougoslavie, la diplomatie canadienne s'est contentée de regarder passer le train. Pour ces raisons, bien que nous soyons en faveur d'une participation canadienne pour la mise en application des accords de paix de Dayton, nous nous devons de rester vigilants pour éviter de répéter les erreurs du passé.

Il faut donc dès maintenant s'interroger sérieusement sur l'ensemble des aspects entourant la participation canadienne au processus de paix en ex-Yougoslavie. D'abord, pour le Bloc québécois, il va de soi que le Canada devrait fournir, au chapitre de sa participation à cette mission de l'OTAN, un contingent qui ne devrait pas dépasser celui qui a pris part à la FORPRONU et qui s'élevait, aux moments les plus forts de la participation canadienne, à environ 2 000 soldats.

Le Canada doit clairement signifier aux différentes parties en présence qu'il entend continuer à s'impliquer activement dans le processus de paix. Vous me permettrez de profiter de l'occasion pour déplorer la participation relativement faible de nos alliés européens, à l'exception de la France, de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne, à cette force militaire qui devra être composée dans le cadre des accords de Dayton. Quant à notre participation, elle devrait être suffisamment substantielle pour permettre à notre diplomatie de jouer un rôle actif dans les mois à venir.

Mais le Bloc québécois verrait mal comment le gouvernement canadien pourrait envoyer davantage de soldats en Bosnie-Herzégovine. En effet, au cours des trois dernières années, le Canada a dépensé 517 millions de dollars dans le cadre de sa participation à la FORPRONU et à l'envoi d'aide humanitaire en ex-Yougoslavie. Cela équivaut à près de 172 millions de dollars par année. Par contre, de l'avis du ministère de la Défense, l'envoi en Bosnie-Herzégovine de 50 à 3 500 militaires canadiens coûterait entre 2 et 75 millions de dollars par an.

Du même souffle, le ministère de la Défense admet que le coût de participation à une mission de l'OTAN est deux fois plus élevé que celui d'une mission équivalente de l'ONU. Vous comprendrez donc que le Bloc québécois est très sceptique vis-à-vis des données fournies par le ministère de la Défense. Aussi, j'exige, au nom des contribuables québécois et canadiens, que le gouvernement fédéral chiffre clairement les dépenses qui seraient encourues pour l'envoi de troupes en Bosnie-Herzégovine, et ce, avant même qu'elles ne quittent le pays.

Par ailleurs, au chapitre de la composition de la force d'intervention canadienne, là encore, Ottawa doit fournir des réponses aux citoyens québécois et canadiens. En effet, en plus de connaître leur nombre, la population veut savoir si le gouvernement fédéral va seulement envoyer des troupes de combat ou des troupes qui vont travailler au plan logistique et de soutien.

Pour le Bloc québécois, il ne fait aucun doute que, de par notre expérience en matière d'opérations de maintien de la paix, le Canada devrait assumer des tâches davantage reliées à la surveillance et aux communications, domaine où nous avons une expertise connue. Conséquemment, seule une petite proportion de nos troupes devrait être constituée de troupes de combat.

D'autre part, la population est également en droit de savoir pour combien de temps nos troupes seront envoyées en Bosnie-Herzégovine. Selon les informations du ministère de la Défense, les chefs d'état-major alliés se seraient entendus sur des règles de déploiement des troupes pour une période de 12 mois. À cet effet, qu'arrivera-t-il si le gouvernement veut prolonger le mandat de nos troupes? Le Parlement sera-t-il convoqué deux jours avant la fin de l'échéance, comme ce fut le cas en avril dernier, à l'occasion du renouvellement du mandat des Casques bleus au sein de la FORPRONU? Le gouvernement canadien aura-t-il une fois de plus pris sa décision, comme c'est le cas maintenant, avant même que le Parlement ne soit saisi de cette question? Manquera-t-on encore une fois de respect envers la population québécoise et canadienne?

Au chapitre de l'utilisation de nos soldats, le Canada aura-t-il un droit de regard politique? Pour le Bloc québécois, cette question en est une d'importance. Nous sommes conscients que le Canada a un devoir moral de participer à l'application des accords de Dayton. Cependant, cet impératif ne doit pas remettre en cause le fait que nous avons également des responsabilités à assumer vis-à-vis de la population et vis-à-vis des soldats qui seront déployés là-bas. Aussi, le Bloc québécois estime que le gouvernement canadien devrait avoir en tout temps le droit de retirer ses troupes de cette mission. À


17150

cet égard, des assurances devraient être fournies par Ottawa, et un plan de retrait d'urgence devrait être prévu.

Aux dernières nouvelles, la France, la Belgique et le Canada voulaient disposer d'un droit de regard sur les opérations en cas d'incidents sur le terrain, mais les États-Unis s'y seraient opposés.

(1530)

Il semblerait que le tout ait été résolu, mais personne ne sait encore dans quel sens. Le gouvernement canadien se doit de répondre à ces questions avant d'envoyer un seul soldat en Bosnie.

Actuellement la population ne sait pas combien de nos soldats seront envoyés là-bas, pas plus qu'elle ne sait exactement quel rôle ceux-ci joueront, ni à quelle division internationale ils seront rattachés. Cependant, bien que ces questions soient importantes et qu'elles méritent des réponses claires, la population se demande davantage quels risques encourent nos soldats là-bas.

Dans un autre ordre d'idées, plusieurs aspects entourant la mise en place des accords de paix de Dayton doivent être soulignés, notamment celui qui a trait au jugement des criminels de guerre. Pour le Bloc québécois, le Tribunal pénal international qui a été mis en place par les Nations Unies pour juger des criminels de guerre, doit poursuivre sa mission de façon intégrale et indépendante. De l'avis de la formation politique à laquelle j'appartiens, il est totalement exclu que ceux qui sont accusés de crimes de guerre, tels le chef des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et le général Ratko Mladic, puissent bénéficier d'une quelconque amnistie.

Les accords de Dayton indiquent en effet que ces deux individus doivent être exclus de la vie politique, et des rumeurs veulent que ces chefs de guerre puissent maintenant jouir d'une certaine amnistie. Le gouvernement canadien peut-il nous dire s'il entend insister auprès des alliés et de la communauté internationale pour que le mandat du Tribunal pénal international soit respecté? Nous croyons qu'il serait inacceptable qu'il n'en soit pas ainsi.

D'autre part, si l'application des accords de Dayton se fait sans trop de problème, nous aurons le devoir moral d'aider les citoyens de l'ex-Yougoslavie à reconstruire et à rebâtir leur pays. À cet égard, il nous faudra voir ce que nous pourrons faire au plan économique pour participer à cette reconstruction. Aussi, le gouvernement fédéral devrait dès maintenant prendre position de façon claire et précise sur le rôle qu'il entend jouer à la réunion de la Banque mondiale à Bruxelles pour trouver des fonds destinés à la Bosnie-Herzégovine. De même, on pourrait se demander si le Canada entend participer à l'épuration de la dette extérieure de la Bosnie-Herzégovine quand on connaît l'état lamentable de ses propres finances publiques. Ce sont là des questions qui méritent qu'on s'y attarde, et la position du gouvernement canadien devrait être clarifiée au plus tôt.

En terminant, vous me permettrez de déplorer à nouveau le fait que de toute évidence, le gouvernement canadien avait décidé, avant même la tenue du présent débat, qu'il enverrait des troupes canadiennes en ex-Yougoslavie. De ce fait, le gouvernement canadien a, comme ce fut le cas lors du renouvellement du mandat de la participation canadienne à la FORPRONU en mai dernier, manqué de respect envers la population.

Nous voudrions que le gouvernement reconsulte ce Parlement au terme du délai d'un an pour savoir si nous devrions poursuivre cette participation et nous osons espérer que cette fois-là, cela ne se fera pas dans les quelques heures précédant le renouvellement de ce mandat.

Finalement, j'aimerais souligner qu'étant donné le changement de mandat auquel nos soldats devront faire face en Bosnie-Herzégovine, il apparaît impérieux que le gouvernement canadien puisse en tout temps conserver la possibilité de désengager nos troupes. En effet, si la mission de l'OTAN se passe sans problème, alors ce sera tant mieux. Par contre, en cas de dégradation de la situation, le gouvernement canadien se doit de garder toutes les options ouvertes y compris celle du rappel de nos troupes au pays.

Il ne faut surtout pas prendre cette dernière éventualité à la légère, car samedi dernier encore, le général des Serbes bosniaques Ratko Mladic affirmait que l'on devrait renégocier les accords de Dayton au sujet de Sarajevo et que les Serbes ne se laisseraient jamais gouverner par ce qu'ils appelaient des «bouchers». De même, il y a peu de temps, le général américain John Shalikashvili affirmait au sujet de la mission de l'OTAN en Bosnie-Herzégovine:

[Traduction]

«Ce sera indubitablement une mission difficile et nous devons prévoir des pertes.»

[Français]

Le gouvernement fédéral enverra bientôt nos troupes en Bosnie-Herzégovine dans le cadre d'une mission d'imposition de la paix, et ce ne sera pas définitivement une partie de plaisir ou une partie de sucre. Le gouvernement fédéral canadien doit donc être pleinement conscient et agir en conséquence, car il en va de la vie de nos soldats. Ottawa doit également s'activer en ce qui a trait aux autres aspects gravitant autour de cette mission, notamment au chapitre de la poursuite des criminels de guerre.

Le gouvernement peut être assuré que le Bloc québécois va surveiller de façon attentive et qu'il sera vigilant à l'égard de l'évolution de la situation pour faire en sorte que les intérêts de nos soldats et ceux, bien sûr, de la population de Bosnie soient préservés.

(1535)

[Traduction]

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, je remercie le député de son discours, qui se rapportait évidemment au débat que nous tenons actuellement. Je voudrais dire brièvement ce que je pense de ses propos.

Je suis évidemment sensible aux préoccupations de mon collègue, en tant que député de l'opposition, au sujet de la possibilité d'une modification de la structure, de la participation ou du retrait des forces des Nations Unies dans l'avenir et en ce qui concerne la participation des forces canadiennes sans la tenue d'un débat à la Chambre des communes. Je m'empresse cependant de rappeler au député que le chef de son parti était membre du gouvernement qui, il y a quatre ans, a envoyé un très fort contingent de l'armée canadienne dans le golfe Persique, sans tenir le moindre débat à la Chambre des communes. Si la même chose devait se produire aujourd'hui,


17151

j'espère que le député saura faire preuve de compréhension car il existe un précédent.

Le gouvernement précédent, dont le chef de mon collègue était ministre, avait alors dit qu'il n'était ni expéditif, ni propice pour tenir un débat. Puisqu'il n'est pas toujours propice et expéditif, je demanderais au député de faire preuve de compréhension.

Je m'attendais à ce que les partis d'opposition fassent des observations au sujet de l'effectif et de la structure du contingent. Je dois cependant reconnaître que le député a parlé de la possibilité d'envoyer des troupes qui seraient chargées de la surveillance et des communications. Il n'a cependant donné aucune indication au sujet des dépenses que lui-même ou son parti serait prêt à approuver.

Les partis d'opposition, soit l'opposition officielle et le tiers parti, en avaient long à dire aux médias. Ils ont parlé sur tous les tons de l'absence de débat. Maintenant que le moment est venu, ils refusent de dire ce qu'ils pensent. Mis à part la possibilité d'envoyer des troupes qui seraient chargées de la surveillance et des communications, je n'ai pas entendu un seul député de l'opposition dire s'il fallait envoyer un contingent militaire ou quasi militaire ou si nous devions faire partie de la commission. Aucun n'a proposé de règles d'engagement et personne n'a précisé le type de forces à envoyer pour répondre aux besoins de la mission, ni quelles devraient être les conditions de retrait de nos forces.

Le moment est venu pour les députés de l'opposition de faire des propositions concrètes. N'ayez pas peur. Nous examinerons vos propositions. Nous ne les suivrons peut-être pas à la lettre, mais laissez-nous une certaine latitude. Qu'avez-vous en tête? Que savons-nous faire? Devons-nous continuer d'agir comme par le passé ou faire les choses différemment? Quelles autres compétences devrions-nous exercer? Monsieur le Président, demandez à l'opposition ce qu'elle souhaite que nous fassions.

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, j'invite instamment le secrétaire parlementaire à relire demain, lorsqu'ils seront disponibles, les propos que j'ai tenus il y a quelques minutes.

Le secrétaire parlementaire prétend que nous n'avons pas fait état de quoi que ce soit, que nous n'avons fait aucune suggestion au gouvernement. Il a vraiment avantage à relire ce que j'ai dit, puisque nous avons fait moult propositions au gouvernement qu'il aurait avantage justement à considérer. Tous les discours que le gouvernement a tenus depuis ce matin n'ont aucunement fait état du nombre de soldats qu'il avait l'intention d'envoyer en Bosnie. Les discours du parti gouvernemental n'ont pas fait état du laps de temps au cours duquel nos troupes devraient rester là-bas. Les discours du parti gouvernemental n'ont pas fait état du type de troupes qui devrait aller là-bas. Est-ce que ce devrait être des troupes de combat? Est-ce que ce devrait être des troupes dans les domaines des communications, du génie, du soutien infirmier?

C'est le gouvernement qui maintient le silence le plus total sur cette question depuis le moment où il a convoqué ce débat. On nous demande aujourd'hui de venir débattre de cette question. Nous reconnaissons volontiers le fait qu'il appartient au gouvernement de prendre des décisions en matière de politiques étrangères, mais nous ne reconnaissons pas là l'engagement qui avait été pris par ce gouvernement de consulter ce Parlement sur les questions de politiques étrangères, puisqu'on le fait toujours à la sauvette. On consulte toujours ce Parlement à la sauvette, sans permettre aux parlementaires de se préparer adéquatement, d'une part, et, d'autre part, sachant également que le gouvernement a déjà fait son lit et que le gouvernement a déjà pris ses décisions avant même de venir consulter le Parlement. Toute cette consultation dans cette Chambre n'est qu'une parodie.

(1540)

Lorsque le secrétaire parlementaire prétend que nous ne reconnaissons pas ce rôle du gouvernement, faisant référence au fait que le chef actuel de l'opposition officielle a été membre du gouvernement précédent, je rappellerai tout simplement au secrétaire parlementaire, puisqu'il ne semble pas l'avoir remarqué encore, que le chef de l'opposition a démissionné du gouvernement conservateur et qu'il siège maintenant à la tête du Bloc québécois.

[Traduction]

M. Peter Milliken (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suis absolument estomaqué de ce que propose mon collègue. Je sais que mes collègues du Parti réformiste, qui ont manqué de courage aujourd'hui, sont d'accord avec moi pour dire que l'orateur précédent, en laissant entendre que le gouvernement était à blâmer parce qu'il n'avait pas expliqué sa politique, a dépassé les bornes.

Ce matin, j'ai écouté le ministre de la Défense nationale expliquer on ne peut plus objectivement la position du gouvernement et dire quelle était, selon lui, l'obligation du gouvernement. Il s'est exprimé en termes clairs pour que tous les députés comprennent bien. Le secrétaire parlementaire a prononcé un discours on ne peut plus clair et éloquent. Pourtant, l'opposition a cherché à obscurcir la question.

Le député qui vient de prendre la parole ne veut pas nous dire la position de son parti à cet égard. Comme nous l'avons dit, tout ce débat a pour but d'entendre le point de vue de tous les députés, de sorte que le gouvernement puisse en tenir compte dans sa décision.

[Français]

Et l'honorable député qui vient de prononcer son discours n'a pas expliqué ce qu'est la position de l'opposition officielle en Chambre. Et je suis surpris que lors de sa réponse à la question de mon collègue, le secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale, il n'ait pas bien expliqué sa position. Au lieu de cela, il a attaqué l'honorable député qui a posé la question. Je ne peux pas comprendre cela.

[Traduction]

Il a dit que le député ne savait pas de quoi il parlait, que le gouvernement ne jouait pas franc jeu avec la Chambre et qu'il avait l'obligation de prendre les rênes, de décider, de prendre toutes les décisions. Oui, et le gouvernement prendra la décision mercredi. Le ministre de la Défense nationale l'a clairement fait savoir, ce matin, au cours de son intervention. Manifestement, les députés de l'autre côté sont dépassés.


17152

M. Bergeron: Puis-je répondre?

M. Milliken: Le député aura la possibilité de répondre. J'attends sa réponse, mais avant, je voudrais qu'il réponde à certaines questions. Va-t-il nous dire combien d'argent nous devrions consacrer à cette mission, combien de temps nous devrions rester, combien de troupes nous devrions envoyer? Donnez-nous une réponse à ces questions. Le gouvernement écoutera l'avis du député et en tiendra compte dans la décision.

[Français]

M. Bergeron: Monsieur le Président, il est étonnant de voir nos collègues du parti gouvernemental prétendre vouloir tenir des débats non partisans, alors qu'ils rendent ce débat-là partisan au possible par leurs interventions, leurs questions et commentaires à la suite de nos discours.

J'ai fait état clairement, durant mon discours, de combien de troupes. . .

Des voix: Oh, oh!

M. Bergeron: Si vous m'écoutiez, peut-être que vous pourriez comprendre la réponse. Portez attention un peu à ce que je vous dis.

Combien de troupes devrions-nous envoyer? J'en ai fait état. Combien de temps devraient-ils rester? J'en ai fait état. Combien cela devrait coûter? J'en ai fait état également.

Je ne sais pas si le député de Kingston et les Îles se reposait paisiblement sur son pupitre au moment où j'ai fait mon discours, mais il est très clair qu'il n'a pas écouté d'aucune façon ce que je racontais tout à l'heure.

Une voix: Ce n'est pas la première fois, c'est toujours comme ça.

[Traduction]

M. George Proud (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, je viens d'arriver. C'est certainement pour moi une manière intéressante d'amorcer le débat sur cette question très importante.

J'ai entendu des députés d'en face dire que le gouvernement devrait prendre une décision dans cette affaire. Je suppose que, si nous en avions pris une, nous aurions mal agi et aurions plutôt dû tenir ce débat d'abord. D'après ce que j'ai compris, c'est justement le but de l'opération: tenir un débat. En bout de ligne, quand la Chambre des communes aura exprimé ses sentiments, le gouvernement prendra une décision sur notre participation au maintien de la paix dans l'ex-Yougoslavie.

C'est un plaisir pour moi de prendre part à ce débat aujourd'hui, parce que je suis de ceux qui croient que le Parlement doit participer aux débats et aux décisions, surtout pour ce genre d'entreprise qui consiste à envoyer nos militaires dans des pays étrangers. C'est une chose que nous répétons depuis que je suis ici, soit depuis sept ans, qu'on devrait avoir ce genre de débat. En général, on peut dire que c'est ce que nous avons fait depuis l'arrivée au pouvoir de notre parti, en 1993.

(1545)

Je n'ai aucune hésitation quant à ce que nous devons faire à l'égard du processus de paix dans l'ancienne Yougoslavie, et je ne crois pas qu'il y en ait beaucoup parmi nous qui hésitent. Il a fallu beaucoup de temps pour ramener la paix dans la région, mais c'est finalement arrivé. Je suis heureux de dire qu'avec la participation du Canada à la force de mise en oeuvre, la paix sera maintenue.

Certains députés d'en face ont mis en doute le rôle que nous avons joué dans cette région jusqu'à maintenant, comme un certain nombre de Canadiens l'ont fait également. On se demande même si nous ne devrions pas nous en laver les mains.

Comme je le disais, je crois que cette région avait besoin de nous et, surtout, qu'elle a maintenant besoin de nous plus que jamais. Le conflit qui s'est terminé avec la conclusion de l'accord de Dayton, en Ohio, a donné lieu à beaucoup d'atrocités, des choses dont la communauté internationale n'aurait jamais dû être témoin. On peut espérer que ce ne sera plus jamais le cas.

Pour s'assurer de cela, le Canada doit être fidèle à la tradition du maintien de la paix et participer à la force de mise en oeuvre. Nous devons contribuer à maintenir la paix fragile qu'on a réussi à instaurer.

Notre engagement dans le monde est avantageux pour tous. Le monde est une communauté complexe. Les États sont interdépendants de bien des façons, économiquement, politiquement et socialement.

Les conflits engendrent les conflits et nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour les empêcher d'éclater et pour mettre fin à ceux qui font rage. L'amélioration des relations entre nations profite à tous. Les opérations de maintien de la paix s'inscrivent dans cette philosophie.

Nous savons tous que le Canada a une longue et remarquable tradition de maintien de la paix. Nous aimons tous ressortir le nom de Lester B. Pearson à qui nous la devons.

Nos forces ne sont pas étrangères aux missions internationales dont nous parlons tous. Nous en sommes tous très fiers. Rares sont les pays qui, comme le Canada, portent si haut le flambeau du maintien de la paix. Depuis 1947, plus de 100 000 Canadiens ont servi à l'étranger dans le cadre d'une trentaine d'opérations de maintien de la paix et d'opérations connexes.

Nos alliés n'en ont pas fait autant. Nous avons récemment rendu hommage aux 103 soldats canadiens qui ont laissé leur vie dans ces missions. Malheureusement, je doute qu'ils soient les derniers, mais c'est un risque que nous devons prendre.

Nous sommes à la recherche d'un objectif qui dépasse le cadre national. La paix et la sécurité internationales ont un prix. La fin de la Guerre froide a été célébré par beaucoup, mais nous étions loin de nous douter qu'elle laisserait un vide favorable à la multiplication des conflits régionaux. L'importance des interventions conjointes a énormément augmenté au cours des dernières années.


17153

Par conséquent, les organisations internationales, et surtout les Nations Unies, sont plus souvent appelées à régler des différends entre États et se trouvent aux prises avec des questions humanitaires et des questions de droits de la personne sur une échelle beaucoup plus grande qu'auparavant.

Les chances de paix sont là et le Canada doit faire sa part pour les saisir. En l'absence de coopération internationale, comment peut-on espérer que la paix internationale devienne une réalité? Nous ne sommes pas des magiciens et nous ne pouvons pas faire sortir une colombe d'un haut-de-forme. En tant que membres du monde industrialisé, nous devons accepter la réalité et prendre part au combat en faveur de la paix. Cela fait longtemps que le Canada a accepté ce fait.

Non seulement sommes-nous membres de nombreuses organisations internationales, mais nous avons participé à chacune des opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Il est de notre devoir de continuer à jouer notre rôle dans ce domaine.

Comme chacun sait, la nature des missions de maintien de la paix a évolué de façon spectaculaire. Les casques bleus qui, dans les premières années, étaient des observateurs non armés du respect des accords de paix, jouent maintenant un rôle beaucoup plus actif, ayant recours aux armes pour mettre en oeuvre des accords de paix. Jusqu'à dernièrement, cette transition s'était faite lentement. Depuis la fin de la Guerre froide, les missions internationales se voient confier des mandats beaucoup plus difficiles. Dans certains cas, comme en Bosnie, les casques bleus, dont on ne voulait pas, n'ont pas été respectés et ont même servi de boucliers humains.

(1550)

Oui, les choses ont beaucoup changé depuis 1947. Généralement, nous parlons de maintien de la paix en termes généraux, mais nous n'avons pas toujours eu des missions de maintien de la paix dans le vrai sens de l'expression. Certaines missions ont été utilisées pour contenir des conflits et empêcher leur extension aux environs, non pas pour faire la paix, mais pour la faire respecter une fois conclue.

La signature de l'accord de paix-l'accord formel doit être signé le 14 décembre-a mis fin aux combats et aux conflits dans l'ancienne Yougoslavie. La paix a été conclue. Le personnel canadien était là et sera là pour participer à des opérations humanitaires.

Nous n'étions pas là pour maintenir la paix, parce qu'il n'y avait pas de paix auparavant. Maintenant que la paix a été conclue et qu'il va y avoir une force d'intervention, nous serons effectivement là-bas pour maintenir la paix. Par conséquent, ce sera une opération de maintien de la paix.

La mission sera placée sous le contrôle de l'OTAN et ne sera pas une mission de maintien de la paix au sens traditionnel. Ce sera tout de même une mission de maintien de la paix, car il va y avoir une paix à maintenir.

Déjà, nous avons entendu certains députés se pencher sur le rôle particulier que joueront nos troupes au sein de la force d'intervention. Avant que j'ajoute mon point de vue là-dessus, je voudrais parler du processus de détermination de notre rôle. Ne nous y trompons pas, le gouvernement canadien aura le dernier mot sur les règles d'engagement utilisées par les forces canadiennes.

Pour moi, il n'y a guère de doute que nous devons participer à la force d'intervention, mais combien de troupes devons-nous envoyer, pendant combien de temps et dans quelle capacité, tout cela est à discuter. Le ministre de la Défense nationale a consulté nos alliés sur ce qu'il faut encore pour composer cette force. Les engagements pris par les autres détermineront aussi ce que nous dirons.

Naturellement, il y a bien des façons de participer à la force d'intervention. Il y a des tâches militaires multiples dans cette mission, mais je ne m'y attarderai pas, étant donné le temps dont je dispose. Je voudrais néanmoins en mentionner quelques-unes.

Récemment, le député de Saanich-Les Îles du Golfe nous disait que nous devrions envoyer un escadron aérien plutôt que des forces terrestres. Toute la puissance aérienne requise viendra d'autres pays. Nous avons toujours eu des troupes au sol pour s'occuper de la ligne de front. Nos troupes devraient être là. Nos troupes ont beaucoup à offrir dans les domaines de la mise en oeuvre des cessez-le-feu, du respect des zones démilitarisées et de la protection des personnes, des biens et des régions désignées.

Ne vous méprenez pas sur ce que je dis. Cela ne doit pas être la limite de notre contribution. En plus de notre infanterie, nous devrions intervenir dans le domaine du support logistique, médical et aérien.

Les paramètres de la force d'intervention semblent être assez vastes. Il ne s'agit pas simplement de maintenir la paix, mais aussi, en collaboration avec les civils, d'aider à reconstruire la région. La guerre a eu un effet dévastateur sur la population, les communautés et le pays en général.

L'ancienne Yougoslavie a beaucoup de reconstruction à faire. La capitale, Sarajevo, qui, il y a tout juste dix ans, était l'hôte des Jeux olympiques, est en ruine. Le Canada devrait participer aux opérations non militaires également. Si l'on peut reconstruire la région assez rapidement, cela dissipera le ressentiment qui existe et permettra aux pays de retirer leurs troupes plus vite.

Nous savons tous que le Canada est fier de ses troupes, car elles sont parmi les meilleures au monde. Nous devrions leur fournir un symbole de cette admiration. À mes collègues des deux côtés de la Chambre, je dis oui à la force d'intervention, oui à l'envoi de troupes et oui à une reconnaissance lorsque tout cela sera terminé.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, je voudrais féliciter le député de Hillsborough pour son discours qui nous relate un peu tout ce que les forces canadiennes ont fait au cours des temps. C'est vrai qu'ils ont fait un travail assez extraordinaire de maintien de la paix. Cependant, les Canadiens, les gens de mon comté qui m'ont élu et qui me demandent de poser des questions ici en cette Chambre qui s'imposent lorsque ça s'impose, ces gens, actuellement, ne savent trop quoi penser.

(1555)

En effet, le Canada d'aujourd'hui a-t-il encore les moyens de faire tout ce qu'il fait dans le monde au moment où on va couper les prestations aux assistés sociaux, au moment où on en enlève de plus en plus à tous les Canadiens, à tous les Québécois? C'est là la question qu'il faut se poser.


17154

Est-ce qu'on a encore les moyens? Et si on a de petits moyens, pourquoi ne pas faire de petites choses au lieu de toujours prétendre sauver le monde?

M. Young: Comme les séparatistes qui font de petites choses.

M. Leroux (Shefford): Ce n'est pas une question de séparatisme. Le ministre dit n'importe quoi.

Pourquoi prétendre faire de grandes choses très coûteuses, lorsqu'on sait très bien qu'on n'en a pas vraiment les moyens. Soyons sobres. C'est ce que les Canadiens et les Québécois vont nous demander: d'être sobres dans les décisions qu'on prend actuellement.

Oui, il faut y aller, on a des engagements envers l'OTAN. Mais allons-y selon nos moyens. Et c'est très important de le dire.

[Traduction]

M. Proud: Monsieur le Président, je voudrais remercier le député de son sermon. La seule chose que je peux lui dire, c'est que la situation n'est pas facile lorsque l'argent manque pour faire certaines choses, mais nous n'aurons plus ni programmes sociaux ni programmes d'aucune sorte si nous ne contribuons pas au maintien de la paix dans le monde.

Les conflits peuvent se propager. C'est pourquoi notre pays est membre de l'OTAN et des Nations Unies. C'est pourquoi nous avons participé activement aux opérations de maintien de la paix au cours des 50 dernières années, afin d'améliorer un peu la vie sur la Terre. Malgré tous les problèmes, le Canada a joué son rôle et il devrait continuer de le faire. Je crois que la paix n'a pas de prix.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, ce que nous examinons actuellement est une escalade des missions traditionnelles de maintien de la paix, comme le député l'a souligné, auxquelles le Canada participe avec fierté depuis la crise de Suez de 1956.

Il s'agit là d'un nouveau niveau de disponibilité opérationnelle, d'une situation de combat. L'OTAN demande manifestement au Canada de lui envoyer des troupes prêtes au combat. Les États-Unis ont dit que l'OTAN veut des forces terrestres et le président des États-Unis a déclaré qu'ils sont prêts à accepter qu'il y ait des victimes dans cette participation à un niveau plus élevé.

Le député a dit que le Canada participait toujours à des missions et qu'il était toujours en mesure d'y participer. Dans les années 60, nous avions une force de quelque 120 000 militaires. Dans seulement quelques années, elle passera à environ 60 000, mais les engagements ont augmenté avec le temps.

Je voudrais citer un passage du livre blanc du ministre de la Défense qui a paru il y a quelques mois. Il dit, en parlant du Canada: «Il ne lui est pas possible de participer à toutes les opérations multilatérales, et ce n'est d'ailleurs pas nécessaire. Nos ressources sont limitées; il se peut que nous ne soyons pas d'accord avec l'objet ou l'organisation de telle ou telle mission.»

Combien de soldats canadiens faut-il sacrifier pour que le gouvernement canadien continue sur cette lancée?

M. Proud: Monsieur le Président, je suis sûr que le gouvernement canadien ne veut sacrifier aucun soldat canadien. Cependant, comme je l'ai dit, nos forces ont diminué avec les années, mais nous avons participé et je crois que nous devons participer.

Nous avons parlé à de nombreuses reprises de la situation dans l'ancienne Yougoslavie. L'année dernière et l'année précédente, on nous a dit que nous ne pouvions pas faire ce que nous pourrons faire cette fois-ci. Si nos soldats se trouvent dans des situations difficiles, ils peuvent user de la force pour s'en sortir.

C'est ce que nous disons. Je ne laisse pas entendre un seul instant que nous voulons sacrifier nos soldats. J'estime que cette mission sera aussi sûre qu'elle peut l'être. Dans toute mission, des soldats risquent d'être blessés. Ainsi va la vie. Chaque homme et chaque femme qui se joint aux Forces canadiennes ou à toute autre force le sait.

Nous ne faisons pas cela pour mettre les soldats canadiens en danger. Nous le faisons pour maintenir l'accord de paix qui a été signé et pour mettre fin à ces terribles atrocités. Je crois que le Canada et tous les Canadiens seront fiers de participer à cette force.

(1600)

[Français]

M. Robert Bertrand (Pontiac-Gatineau-Labelle, Lib.): Monsieur le Président, c'est un honneur et un privilège pour moi cet après-midi de prendre la parole.

Les missions de maintien de la paix ont pris une nouvelle allure dans les années 1990. Pour rencontrer les nouveaux défis de la sécurité mondiale dans le prochain siècle, nous avons besoin d'une Organisation des Nations Unies et autres organismes internationaux capables de jouer un rôle plus efficace dans la résolution des conflits.

L'ampleur et la complexité des missions de maintien de la paix contemporaines exigent que l'ONU demande aux organismes régionaux de jouer un plus grand rôle dans la résolution des conflits.

Le rôle de l'OTAN dans l'effort est un exemple par excellence de la coopération possible entre les organismes internationaux.

L'ONU est l'outil idéal pour donner une légitimité à une mission de paix internationale et l'OTAN est l'organisation la mieux équipée pour une mission en Europe, surtout une mission qui pourrait exiger l'utilisation de la force. Mais l'ONU a tout de même besoin de changement.

Créée dans les années 1940, l'organisation doit se doter d'outils nécessaires pour faire face aux défis de la sécurité mondiale de ce siècle et des siècles à venir. Le carnet de route de l'ONU depuis la fin de la guerre froide est en grande partie très impressionnant. Des missions au El Salvador, au Cambodge, au Mozambique et en Haïti ont produit des résultats fort solides. Mais des revers en Afrique et dans l'ancienne Yougoslavie ont soulevé des doutes.

Malheureusement, beaucoup d'États membres font reposer tous les problèmes du monde sur les épaules de l'ONU, ce qui est très injuste. Les États membres doivent arrêter de critiquer et faire leur part. Le Canada est conscient que l'ONU a ses problèmes, mais le gouvernement est déterminé à trouver des solutions.


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Avec notre expérience et notre expertise dans tous les domaines des missions de maintien de la paix ainsi que les nouvelles idées que nous avons à offrir, nous sommes dans une position unique pour aider l'ONU. Le Canada aide à l'amélioration des missions de paix de l'ONU par l'entremise de plusieurs outils, comme l'offre d'expertise au quartier général à New York et la création du Centre Lester B. Pearson du maintien de la paix à Cornwallis, en Nouvelle-Écosse.

De façon typiquement canadienne, nous avons des idées et des concepts pragmatiques et réalisables en vue de préparer l'ONU pour l'avenir. Par exemple, au mois de septembre dernier, le Canada a présenté à l'assemblée générale les résultats d'une étude pour améliorer la capacité de l'ONU de réagir en temps de crise. L'expérience du Rwanda a mis en évidence que des mesures modestes peuvent arrêter une crise avant qu'elle devienne difficilement contrôlable.

[Traduction]

L'étude canadienne recommande que des changements concrets soient apportés à tous les échelons du système onusien afin que ces mesures puissent être mises en oeuvre rapidement. Ces changements seraient efficaces et peu coûteux, et leur mise en oeuvre ne nécessiterait aucune modification de l'actuelle charte des Nations Unies.

L'étude recommande entre autres la création d'une cellule de planification pour son siège qui soit multinationale, multidisciplinaire et composée d'effectifs militaires et civils des États membres. Cette cellule de planification qui relèverait du Conseil de sécurité et de la direction stratégique du Secrétaire général comblerait un grand vide au sein du système onusien.

Elle serait chargée de la planification et de la préparation du déploiement rapide d'une force de réserve multiopérationnelle comprenant jusqu'à 5 000 militaires et civils. Cette force serait déployée pour une courte durée soit pour réagir à une crise soudaine, soit pour préparer la voie aux troupes de deuxième échelon, soit pour s'acquitter d'une opération de maintien de la paix de type plus traditionnel.

(1605)

Pour que ce nouveau concept, la force de réaction rapide, donne les résultats escomptés, il faudrait améliorer le système de réserve de l'ONU de façon que l'on puisse identifier, longtemps à l'avance, toutes les composantes essentielles de la force, tant militaires que civiles.

Pour obtenir le droit de déployer les effectifs, il faudra encore l'adoption d'une résolution des Nations Unies à cette fin ainsi que le consentement de chacun des gouvernements participants. L'accueil que les autres États membres ont réservé à notre étude a de quoi nous réjouir. Nous avons hâte de voir ce que cette initiative donnera dans les mois à venir.

Je termine en signalant que, même si l'environnement international devient de plus en plus complexe, le maintien de la paix n'a rien perdu de sa raison d'être. Pendant que de nouvelles menaces à la sécurité surgissent de toutes parts, le Canada et les autres membres de la communauté internationale ne doivent pas ménager leurs efforts pour découvrir des approches novatrices en matière de maintien de la paix.

Quelle que soit la nature des défis, le Canada doit resté attaché à ce précieux outil de résolution des conflits.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, les réformistes disent aujourd'hui que ce débat n'est qu'un miroir aux alouettes, car nous n'aurons pas l'occasion de nous prononcer sur cette question.

Nous prétendons que le gouvernement a déjà pris une décision et s'est engagé à envoyer des troupes.

Je me demande si le député pourrait nous dire ce qu'il pense de la plus récente nouvelle publiée par la Presse canadienne, il y a quelques minutes à peine. Voici ce qu'on dit: «Un fonctionnaire de l'OTAN a déclaré que le Canada s'était engagé à fournir à l'IFOR une brigade affectée au quartier général et un bataillon.» Cela représenterait l'envoi de 1 200 à 1 500 soldats. Qu'est-ce que le député a à dire?

[Français]

M. Bertrand: Monsieur le Président, je remercie mon collègue d'en face pour la question. J'aimerais lui dire que ce qu'il vient d'avancer n'est pas tout à fait vrai. Il n'y a absolument rien qui ait été décidé. Les députés du troisième parti ne nous ont pas encore fait part de leurs intentions concernant la force qui sera déployée en ex-Yougoslavie.

Ça fait tout près d'une heure que je suis ici et je n'ai rien entendu de concret du troisième parti et je vais encore rester ici pendant quelque temps pour voir s'ils vont apporter des suggestions constructives.

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Monsieur le Président, à la suite du discours de notre collègue d'en face, j'aimerais un peu partager et dire des choses à propos de ce qui se passe.

Le gouvernement nous demande d'accepter d'envoyer des troupes avec l'OTAN, mais il nous laisse dans le flou. C'est ce qui est difficile. On a de la difficulté, actuellement, à prendre position, parce qu'on ne sait pas quel en sera le coût, quelle en sera la durée et quelles sont les responsabilités qu'on veut donner à nos troupes.

Donc, c'est très difficile pour l'opposition de se prononcer. Nous, du Bloc québécois, on est d'accord avec ça. On est d'accord, mais comme je l'ai dit et comme mon collègue vient de le dire, moi, j'ai employé le mot sobre, j'ai demandé que ce soit fait sobrement, et lui, il a employé un mot semblable. Donc, on est d'accord là-dessus. Mais on ne saura pas, avant la fin de ce débat, combien ça va coûter. En d'autres mots, le gouvernement nous demande un chèque en blanc et j'aimerais que le député réagisse là-dessus.

(1610)

M. Bertrand: Monsieur le Président, je remercie le député de Shefford pour sa question. Je crois que nous sommes ici pour écouter ce que l'opposition officielle a à nous dire.

J'aimerais répéter ce que j'ai dit au député du troisième parti. Je ne les ai pas encore entendus faire aucune suggestion quant au nombre, quant à la durée. J'espère, je vais être ici encore pendant quelque temps, que les députés de l'opposition officielle vont au


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moins nous donner cette information. En tout cas, je l'attends avec anticipation.

[Traduction]

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Monsieur le Président, je voudrais obtenir une réponse nette et définitive sur la question que mon collègue vient de poser à ce député. Le Canada s'est-il déjà engagé, oui ou non, à envoyer des troupes participer à cette mission des Nations Unies?

M. Bertrand: Monsieur le Président, je pense qu'il est clair que le Canada s'est engagé à participer à cette mission. Par contre, nous n'avons pris aucun engagement clair, notamment sur la taille de notre contingent.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Monsieur le Président, j'interviens au nom des gens d'Okanagan-Similkameen-Merritt pour participer au débat d'aujourd'hui sur une question d'importance nationale, le mandat de l'OTAN consistant à envoyer une force de mise en oeuvre de l'accord de paix en Bosnie.

Le Parti réformiste appuie les engagements internationaux du Canada en matière de maintien de la paix et il est fier du travail accompli par nos forces armées dans le monde entier. Nos Casques bleus ont la réputation d'être les meilleurs soldats de la paix du monde et cette réputation est bien méritée.

Les Canadiens sont allés en Corée, au Cambodge, sur les hauteurs du Golan, en Bosnie, en Somalie et au Rwanda et se sont acquittés de leur mission avec honneur, dignité et détermination. Ils ont fait plus que leur devoir.

Rien ne montre mieux le dévouement et la bravoure de nos troupes que la mission de sauvetage d'un cargo roumain qui était en perdition dans une tempête au large de la côte de l'Atlantique, au cours du dernier week-end. Un caporal-chef et ses collègues ont réussi à sauver l'équipage à l'aide d'un hélicoptère de 30 ans, même si les chances de réussite étaient minces et si l'appareil dont ils se sont servis a de nombreuses faiblesses. En effet, cet hélicoptère n'a pas un rayon d'action suffisant, ce qui a forcé notre frégate à se rapprocher le plus près possible du navire en détresse, et le caporal-chef et ses collègues sont de véritables héros canadiens.

Depuis la fin de la guerre froide, le maintien de la paix change beaucoup. Nous passons d'une ère d'opérations classiques de maintien de la paix à une nouvelle ère d'opérations d'imposition de la paix. Face à ce changement, le gouvernement libéral accroît nos engagements en matière de maintien de la paix.

Cependant, les libéraux le font sans avoir une politique cohérente. D'une part, ils prennent de plus en plus d'engagements et d'autre part, ils réduisent de façon marquée les ressources affectées au ministère de la Défense nationale et à nos militaires.

Il faut tenir compte de cela avant de déterminer le type de contribution que le Canada peut apporter à l'IFOR. Nous devons aussi établir une liste précise de conditions avant d'engager nos forces armées dans une telle mission.

Le Parti réformiste a dressé une liste de conditions qu'il voudrait bien voir adoptées avant que nous engagions nos troupes dans des missions de maintien et de respect de la paix. Ces conditions sont les suivantes: premièrement, toutes les missions de maintien de paix, y compris le budget qui leur serait affecté, doivent être approuvées à l'avance par le Parlement; deuxièmement, les belligérants doivent faire part de leur volonté de régler pacifiquement le conflit; troisièmement, le mandat, la durée et les règles de l'engagement doivent être énoncés clairement, un contrôle du commandement doit être en place et il doit y avoir des ressources suffisantes pour accomplir la mission; quatrièmement, le Canada doit participer à toute négociation diplomatique; cinquièmement, les règles sur la rotation des troupes doivent être établies et observées.

Dans le cas présent, le gouvernement libéral n'a donné aucune indication que ces conditions seraient satisfaites.

(1615)

Aujourd'hui, nous discutons de la contribution à une mission d'imposition de la paix en Bosnie. Toutefois, ce débat ne vise qu'à prendre acte. Le Parlement ne prendra aucune décision à la Chambre aujourd'hui. Le gouvernement a déjà pris la décision.

Les États-Unis ont déclaré que le Canada fournissait entre 1 200 et 1 500 soldats. Samedi, 22 Canadiens ont été envoyés en Bosnie avec d'autres forces de l'OTAN pour préparer l'arrivée de la force principale de l'OTAN. Les Canadiens n'ont pas eu un mot à dire dans cette décision.

Les Canadiens ne sauront même pas si les belligérants veulent vraiment la paix, tant que ces derniers n'auront pas signé un document officiel le 14 décembre. L'accord n'est pas dans le sac. Le dirigeant des Serbes bosniaques a déclaré qu'il n'était pas satisfait et que le sort de Sarajevo pourrait faire couler du sang.

Bien que j'appuie tous les efforts de paix en Bosnie, je suis d'avis que le gouvernement devrait se pencher sur certaines questions militaires avant d'envoyer nos troupes en Bosnie. Avant de prendre un engagement envers l'IFOR, nous devons nous poser les questions suivantes: premièrement, nos forces terrestres ont-elles l'effectif, le matériel et les ressources nécessaires pour contribuer à la mission? Deuxièmement, nos forces terrestres sont-elles confrontées à un problème d'ordre moral? Troisièmement, les questions de leadership soulevées par l'enquête sur la Somalie ont-elles été examinées avant qu'un déploiement de cette nature soit effectué?

Au cours des 25 dernières années, nos gouvernements ont malmené les Forces canadiennes tant au niveau politique que financier, au point d'y créer la confusion. L'efficacité de nos forces diminue rapidement face aux missions que leur confie le gouvernement. Ce n'est pas une accusation portée contre nos militaires qui portent le fardeau de ces engagements, mais une condamnation des gouvernements successifs qui n'ont pas réussi à fournir un leadership efficace et des ressources suffisantes au ministère de la Défense nationale. Nos forces armées ne sont pas à la fine pointe de la technologie ou de l'efficacité; elles réussissent à peine à survivre comme force de combat.


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Le budget libéral de 1995 a réduit le budget de la défense au point de faire douter que nos forces terrestres soient capables de soutenir un rôle de combat. Je ferai remarquer au ministre des Finances qu'il faut que les forces armées soient financées jusqu'à un certain point pour demeurer viables. Nous avons atteint ce point-là. Or, le ministère de la Défense nationale se prépare à subir d'autres compressions budgétaires à un moment où notre gouvernement fait enfin appel aux forces armées pour accomplir une mission pour laquelle on aurait dû commencer par les équiper.

Aucun autre pays n'a négligé ses forces armées autant que le Canada. Au début des années 1960, les effectifs de nos forces armées s'élevaient à 120 000 membres; aujourd'hui, le gouvernement libéral réduit ce nombre à environ 60 000. Or, on exige toujours autant de nos forces armées, et nos militaires devront répondre à des exigences accrues à mesure que s'instaure le nouvel ordre mondial.

Les effectifs de notre armée toute entière se chiffrent à environ 23 000 membres, et sont inférieurs à ceux de la force policière de l'agglomération de Toronto. Nous pourrions faire entrer l'armée toute entière dans le stade B.C. Place pour assister à un match de football, et il y aurait encore de la place pour quelques milliers de spectateurs de plus.

Par ailleurs, nos forces armées ont presque été démilitarisées. Le gouvernement a formé et équipé nos forces terrestres pour des missions de maintien de la paix exigeant des troupes légèrement armées. Comme on n'enseigne pas ce qu'il faut aux commandants, cela pourrait conduire au désastre lorsqu'ils ont à faire face à une situation de combat intense. Cela, à un moment où les opérations classiques de maintien de la paix s'imposent de moins en moins.

Les missions de maintien de la paix font maintenant place aux missions d'imposition de la paix qui exigent des compétences et du matériel dont le gouvernement a négligé d'équiper nos forces armées. Les libéraux ont fondé leur politique de sécurité uniquement sur le maintien de la paix, au détriment de notre préparation au combat et de nos moyens conventionnels.

Être entraînés et équipés pour remplir des missions de maintien de la paix prépare bien mal nos militaires à intervenir dans une situation de combat classique. C'est pourtant ce que les libéraux demandent à nos forces terrestres de faire aujourd'hui. À cause de la procrastination du gouvernement libéral, nos transports de troupes blindés vieux de 30 ans ne seront pas remplacés avant 1997. Les forces terrestres souffrent de lacunes dans leur infrastructure de soutien dans les domaines de la santé et de la logistique.

(1620)

Je voudrais citer un étude récente du Congrès des associations de la Défense:

. . .les forces armées ne sont en fait que façade, ou bien un échiquier tridimensionnel où manquent beaucoup de pièces au niveau principal et il n'y a presque rien aux niveaux inférieurs.
Si les libéraux envoient nos forces terrestres dans cette mission de combat de l'IFOR en Bosnie, ce seront peut-être elles qui écoperont à cause du manque de leadership du gouvernement. Pas étonnant que le moral, dans les Forces canadiennes, soit au plus bas. Le ministre de la Défense nationale, dans ses beaux discours, rejette le blâme sur le Parti réformiste. C'est ce que le gouvernement libéral a fait aux forces armées qui explique les problèmes de moral, problèmes qui, par ricochet, compromettent la capacité opérationnelle de nos forces terrestres. Au cours des trois dernières années, nous avons dû avoir des roulements de 3 000 personnes, tous les six mois, pour les missions de l'ONU. Ce n'est peut-être pas beaucoup, aux yeux de certains. De nombreux pays peuvent déployer des forces de cette ampleur sans difficulté. Cependant, vu la taille modeste de nos forces terrestres, de pareils roulements successifs représentent un lourd fardeau.

En fait, c'est un fardeau tel que l'entraînement qui en temps normal doit obligatoirement précéder toute mission ne se fait plus. Notre armée de terre a dû faire des pieds et des mains pour réunir les effectifs et les unités nécessaires afin d'honorer les engagements auxquels le gouvernement l'a astreinte.

Le ministre de la Défense nationale, c'est regrettable, impute encore au Parti réformiste, bien entendu, le seul qui veille sur les intérêts de nos troupes, les problèmes dont il est lui-même la cause. Le ministre est responsable des problèmes de moral, et il ne devrait pas refiler lâchement cette responsabilité à d'autres.

Le problème de moral a été bien étudié. Ainsi, les aumônier, dans leur rapport d'août 1995, affirment que nous mettons le moral des troupes à très rude épreuve, mais elles doivent conserver ce moral pour pouvoir s'acquitter de leur travail. Il ajoute qu'il faut faire contrepoids aux affectations qui se succèdent rapidement et obligent les effectifs à des séjours prolongés loin de leur famille par des périodes suffisamment longues chez eux. Le stress est à un niveau sans précédent, ce qui entraîne des problèmes dans la famille et d'autres difficultés graves.

Je trouve très inquiétant que le gouvernement engage des effectifs importants de notre armée de terre en Bosnie sans tenir compte du problème de moral que posent ces affectations par roulement. Nous ne pouvons pas compter sur les réservistes des forces terrestres pour prendre la relève. Nous avons besoin d'eux pour aider à maintenir notre capacité opérationnelle pendant que les troupes régulières participent à des missions de l'ONU. Pendant ce temps, le ministre de la Défense nationale annonce que le nombre de réservistes diminuera de 6 000.

Cette série rapide de déploiements n'est pas le seul facteur qui a contribué à miner le moral et l'efficacité opérationnelle de nos troupes. L'enquête sur les événements survenus en Somalie a également soulevé un certain nombre de questions au sujet du leadership de nos forces armées. Les problèmes relatifs au leadership ont été bien documentés par des officiers supérieurs des forces armées canadiennes. Par exemple, selon un rapport diffusé en mars dernier, les soldats auraient peu confiance dans les officiers supérieurs. Toujours selon ce rapport, les membres des forces armées canadiennes croient, en général, que les ambitions politiques et le carriérisme ont remplacé le leadership chez les officiers. Ce rapport signale que les soldats ont l'impression que la loyauté et les efforts des officiers supérieurs sont dirigés vers le haut et non vers le bas, c'est-à-dire vers la troupe. On y critique le fait que les leaders semblent très sensibles au respect des droits de la personne et au conformisme politique et négligent d'inculquer la culture militaire à leurs soldats. On y dit que les soldats ont l'impression qu'on


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sacrifie leurs intérêts et leur bien-être pour permettre à l'état-major de continuer de livrer la marchandise.

Le gouvernement serait malavisé de songer à envoyer des forces combattantes en Bosnie, étant donné la gravité de ce problème et le fait que la commission d'enquête sur les événements survenus en Somalie, qui examine la chaîne de commandement, ne diffusera son rapport et ses recommandations qu'en juin 1996.

Le gouvernement devrait longuement réfléchir à l'état actuel de nos forces terrestres avant de s'engager à participer à cette mission de combat. J'insiste sur le fait qu'il ne s'agit pas d'une mission de maintien de la paix conventionnelle à laquelle les Canadiens sont habitués de participer et pour laquelle nos forces terrestres sont formées et préparées. Depuis trois ans, tous les membres de nos forces terrestres s'entraînent pour participer à des missions de maintien de la paix. Ils n'ont ni le matériel ni les ressources pour remplir d'autres fonctions. Le moral des troupes est bas et les problèmes de leadership doivent être réglés. Ce n'est pas le temps d'envoyer nos soldats participer à une mission pour laquelle ils sont mal préparés.

(1625)

M. Jesse Flis (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères, Lib.): Je suis extrêmement déçu, Monsieur le Président. Le tiers parti avait ici une occasion en or de vraiment faire valoir sa politique et de remonter le moral des membres de nos trois forces, de vraiment faire une contribution importante tant au plan national qu'au plan international, et que font ses députés? Ils parlent de la Somalie. Ils parlent de tout sauf de la motion à l'étude. Les députés de l'opposition officielle, au moins, ont cité des données. Ils ont notamment dit que notre engagement ne devrait pas dépasser 2 000 militaires. J'aurais bien voulu qu'ils soient un peu plus précis et qu'ils nous fournissent plus de détails, mais les députés du tiers parti n'ont même pas offert une seule proposition constructive au gouvernement.

Voici qu'ils accusent le gouvernement d'avoir déjà pris une décision. Ce n'est pas vrai. Le Cabinet ne se réunira que mercredi. Les députés réformistes lisent quelque chose dans les journaux au sujet du budget et ils parlent tout de suite de divulgation non autorisée du budget. C'est à cela qu'ils comparent ceci. Oubliez ce que vous avez lu dans le journal! Faites des propositions constructives au gouvernement et offrez-lui des idées concrètes! Les réformistes sont en train de rater une occasion en or.

Les députés réformistes chantent les louanges de nos casques bleus, mais que font-ils dans toutes leurs interventions? Ils démoralisent les troupes autant qu'ils le peuvent. Si j'étais au nombre des combattants, là-bas, je n'écouterais certes pas ce qu'ils disent de peur qu'ils ne me dépriment complètement.

Enfin, je me demande-j'ai toujours respecté le député pour ses bonnes idées-si le député voudrait partager ses idées avec nous. Qu'est-ce que le Cabinet devrait considérer, à son avis? Quelles sont les options? Devons-nous participer à l'intervention? Si oui, combien de militaires faut-il envoyer? Deux milliers? Lesquels? Faut-il oublier tout cela et s'occuper plutôt des droits de la personne à l'égard d'autres questions?

Qu'ils nous le disent! Ils ratent ici une occasion en or.

M. Hart: Merci beaucoup de cette question curieusement décousue.

M. Hill (Prince George-Peace River): Du babillage déroutant.

M. Hart: Du babillage déroutant, en effet. Voilà une observation très juste.

Les partis d'opposition s'inquiètent vivement de ce que le gouvernement s'apprête à faire. C'est très clair. N'ayons pas peur des mots. Ce que l'OTAN et les États-Unis demandent, ce sont des troupes de combat pour participer à l'IFOR.

Il ne s'agit pas du même genre de missions auxquelles le Canada a déjà participé; il ne s'agit pas d'une mission de maintien de la paix. Voyons les problèmes qui se posent. La pierre angulaire d'une mission de maintien de la paix, c'est le fait que nos militaires sont formés à l'art du compromis et de la négociation, deux éléments fondamentaux des opérations de maintien de la paix. Les Canadiens se sont très bien acquittés de ce travail, mais nous passons maintenant à un autre niveau. Il est maintenant question de troupes de combat et de l'imposition de la paix. N'allez pas croire que c'est l'équivalent du maintien de la paix, car il n'en est rien. Il n'y a plus de casques bleus désormais. Il est question maintenant d'une zone démilitarisée qui divise l'ensemble du territoire bosniaque, ses villes, ses villages, ses terres agricoles. Il va y avoir de l'action là-bas, des échanges de coups de feu. Quiconque de ce côté-là de la Chambre prétend le contraire n'est pas honnête envers la population canadienne. Il y en aura. Le président des États-Unis a dit qu'il y aura des victimes. Il s'attend à ce qu'il y en ait.

(1630)

Les Canadiens doivent examiner ce que nous avons fait par rapport aux opérations de maintien de la paix depuis 1956, depuis la crise du canal de Suez. Nous avons permis le déclin des Forces armées canadiennes, le déclin de leurs effectifs, mais aussi de leur matériel.

À l'âge adulte, j'ai servi deux fois dans les Forces armées canadiennes. Je sais ce qu'un gouvernement libéral peut faire aux Forces armées canadiennes lorsqu'il est au pouvoir. J'ai vécu cela. Je suis surpris de l'attitude du secrétaire parlementaire, car il sait que le gouvernement libéral a considérablement réduit nos forces armées et notre matériel. Nous n'avons pas le matériel nécessaire pour participer à une mission d'imposition de la paix. Il y a aussi de graves problèmes qu'il faut absolument régler dans le commandement des forces terrestres.


17159

Les députés d'en face blâment constamment le Parti réformiste du moral très bas au sein des Forces armées canadiennes. Les députés réformistes appuient les militaires; bon nombre d'entre eux ont déjà servi dans les Forces armées canadiennes. Non, nous ne sommes pas responsables de la baisse du moral. Ce sont les réductions des effectifs et du soutien qui en sont la cause. De l'autre côté, les demandes qui pèsent sur nos militaires augmentent, mais les ressources dont ils disposent diminuent.

Le livre blanc dit très clairement que le Canada ne possède pas de ressources illimitées. Nous devons choisir les missions auxquelles nous participons. Pendant trois ans et demi, les Canadiens ont participé honorablement et vaillamment à la mission en ex-Yougoslavie. Non, nous ne nous défilons pas, mais bon sang, nous n'exposerons pas à des situations de combat nos troupes mal équipées et très démoralisées. Ce serait aller tout droit au désastre, et si c'est là la décision que prend le gouvernement, il devra en payer le prix.

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Monsieur le Président, dois-je comprendre, d'après les propos du député, que s'il n'en tenait qu'au troisième parti, nous n'enverrions pas de troupes pour cette mission?

M. Hart: Monsieur le Président, j'ai été très clair dans mes observations. Je dis que si le gouvernement a l'intention d'envoyer des troupes de combat, et il semble effectivement que l'OTAN demande des troupes de combat terrestres, selon l'information qui m'a été communiquée en tant que parlementaire et que j'ai obtenue grâce à la Loi sur l'accès à l'information et lors de conversations avec des officiers supérieurs.

Nombre de Canadiens en colère sont venus frapper à ma porte pour me demander de faire quelque chose. Je ne pense pas pouvoir être plus clair pour le secrétaire parlementaire. Je représente les électeurs de ma circonscription, en plus d'autres Canadiens d'un bout à l'autre du pays, qui m'ont appelé à mon bureau pour me dire de ne pas envoyer de troupes de combat. Est-ce assez clair?

M. Mifflin: Monsieur le Président, je ne sais pas qui frappe à la porte du député. Le député a parlé du NCSM Calgary et des actes de bravoure d'un équipage qui, selon lui, éprouve des problèmes de moral. Le député a-t-il pensé aux hommages qui ont été rendus, et j'espère qu'il a assisté à certaines cérémonies où le Très Honorable Roméo LeBlanc a remis des médailles pour des actes de bravoure exceptionnels? A-t-il pensé aux actes de cet équipage dont le moral est bas?

M. Hart: Monsieur le Président, comme le secrétaire parlementaire l'a souligné, j'ai fait état à la Chambre aujourd'hui des actes courageux de l'équipage du NCSM Calgary et de celui de l'hélicoptère Sea King, qui a littéralement tiré les survivants d'une situation très dangereuse. Il ne s'agit pas des activités de nos forces navales, mais de celles de nos forces terrestres. Il s'agit de fantassins dotés de bottes et de fusils, qui manquent d'équipement. Je le répète, s'il est question d'envoyer ce genre de troupes, c'est un non catégorique.

(1635)

[Français]

Le vice-président: Conformément aux articles de notre Règlement, je dois faire connaître à la Chambre la question que nous aborderons à l'heure de l'ajournement, ce soir, à savoir: l'honorable député de Saskatoon-Clark's Crossing-Les programmes sociaux.

[Traduction]

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat sur la motion concernant la participation du Canada à la mise en oeuvre de l'accord de paix en Bosnie-Herzégovine.

L'accord de paix de Dayton a donné beaucoup d'espoir. Le monde espère que la situation dans l'ancienne Yougoslavie s'améliorera pour de bon et que les citoyens innocents n'auront plus à subir la violence de la guerre.

Étant originaire de la région dont on parle, je me sens personnellement plus touché que la plupart des Canadiens. Il n'y a rien que j'aimerais autant que de voir s'établir une paix durable garantissant la sécurité de toute la population de l'ancienne Yougoslavie.

J'ai eu l'honneur de prendre part à plusieurs débats à la Chambre des communes sur la participation du Canada à des missions dans l'ancienne Yougoslavie. À chaque fois, j'ai déclaré très clairement que j'y étais favorable tant que la vie de Canadiens et de Canadiennes n'était pas en danger.

J'ai souvent eu l'impression que l'on ne donnait pas aux militaires canadiens les outils nécessaires pour faire le travail qu'ils étaient censés faire ou pour se protéger. Lorsque je parle d'outils nécessaires, je ne parle pas uniquement d'armes, mais aussi de mandat, puisque celui de la FORPRONU liait les mains de la force de maintien de la paix. En dépit de ces obstacles, les soldats canadiens ont apporté une excellente contribution au maintien de la fragile paix en Croatie et ils ont joué un rôle humanitaire très valable en Bosnie-Herzégovine.

Cela n'est pas toujours évident, mais les membres canadiens de la mission de maintien de la paix sont respectés dans la région. Ils ont établi de bons rapports avec les habitants des localités où ils ont été stationnés, ce qui est essentiel au succès de toute mission de paix.

La mission à laquelle on demande maintenant au Canada de participer est différente de celle de la FORPRONU. La force de mise en oeuvre de l'accord de paix se composera d'environ 60 000 militaires. Elle aura pour mission de surveiller la dimension militaire de l'accord de paix récemment intervenu à Dayton, en Ohio. Cette force sera répartie dans trois divisions: une américaine, une britannique et une française. La Grande-Bretagne, la France et les États-Unis fourniront le gros des forces. En tout, ces trois pays enverront 49 500 soldats.


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L'OTAN assumera le commandement de la mission après le déploiement de l'IFOR. Cependant, la mission sera placée sous l'autorité d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies qui permet l'usage de tous les moyens nécessaires.

(1640)

Comme l'accord de paix ne sera pas signé officiellement avant le 14 décembre prochain à Paris, il est peu probable que des troupes soient déployées avant cette date.

L'IFOR n'aura pas une mission de maintien de la paix, mais bien une mission de mise en oeuvre de l'accord de paix dirigée par l'OTAN. Alors que le mandat de la FORPRONU consistait uniquement à surveiller la mise en oeuvre des résolutions des Nations Unies et à escorter les opérations d'aide humanitaire, l'IFOR sera là pour mettre en oeuvre l'accord de paix.

Les Canadiens et leurs alliés ont beaucoup de travail devant eux. Ils devront prendre des arrangements pour assurer la liberté de mouvement et l'auto-défense des troupes de l'IFOR dans un secteur donné. Ils devront surveiller le retrait des parties dans leurs territoires respectifs et, au besoin, en assurer l'exécution. Ils devront aussi établir et surveiller des lignes de démarcation et, au besoin, y stationner des troupes.

En plus de ces responsabilités, les troupes de l'IFOR assureront le respect du cessez-le-feu prévu dans l'accord de paix, défendront les personnes, les biens et les zones désignées comme étant des zones protégées, surveilleront le déminage des champs de mines par les parties à l'accord et offriront une capacité de combat au besoin.

En plus de cette liste déjà longue de responsabilités, l'IFOR sera chargée d'aider à l'établissement d'une commission militaire mixte avec des civils, des militaires et des organisations non gouvernementales de la région, d'aider le Haut-commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et d'autres organismes d'aide civils dans l'exécution de leurs missions humanitaires et, enfin, d'observer et d'assurer le mouvement des populations, des réfugiés, des personnes déplacées et de leurs biens et, au besoin, d'empêcher toute interférence.

Il va sans dire que les responsabilités que je viens d'énumérer représentent un défi de taille pour tous ceux qui participeront à la mission de l'IFOR. Le Canada a de l'expertise dans tous ces domaines simplement en raison de son rôle historique dans des missions de la paix difficiles aux quatre coins du monde.

Comme je l'ai dit plus tôt, nos forces ont fait de l'excellent travail durant la mission de la FORPRONU, souvent sans avoir les moyens nécessaires. Le Canada a déjà consacré beaucoup de temps et d'efforts à la recherche d'une solution pacifique à la situation qui existe dans l'ancienne Yougoslavie. Ce serait dommage d'abandonner maintenant, au moment où la paix semble être sur le point de devenir réalité.

Le mandat de l'IFOR donnera aux troupes canadiennes les outils nécessaires pour assurer la mise en oeuvre de l'accord de paix de Dayton. Il leur donnera aussi les outils nécessaires pour se protéger. Si nous nous retirions maintenant, après en avoir déjà tant fait pour cette cause, ce serait comme jeter la serviette durant la troisième période du dernier match des finales de la coupe Stanley.

Nous ne pouvons pas laisser tomber nos alliés à ce moment-ci de la partie. Nous ne pouvons pas non plus laisser tomber les centaines de milliers de réfugiés et de personnes déplacées qui comptent sur notre aide et qui nous font confiance depuis si longtemps.

J'encourage mon gouvernement non seulement à fournir une force moderne à l'IFOR pour que nous puissions terminer ce que nous avons commencé en 1991, mais aussi à jouer un rôle de chef de file dans cette région.

(1645)

M. Bob Mills (Red Deer, Réf.): Monsieur le Président, je partage les sentiments que le député vient d'exprimer au sujet des réfugiés et de la manière de les traiter, mais nous n'avons pas parlé de la nature de notre mandat ni d'effectifs. Nous n'avons pas discuté de ces détails.

On nous demande de proposer des chiffres et on nous dit que c'est à l'opposition de s'occuper de ces questions. Je m'attendais à ce que le gouvernement fasse une proposition pour que nous puissions en discuter. Cependant, il n'a rien à proposer et il voudrait que nous fassions le travail à sa place.

Nous avons entendu beaucoup de choses. Il y a tout juste une heure, un journaliste de la Presse canadienne a déclaré tenir directement d'un fonctionnaire de l'OTAN que le Canada avait promis d'envoyer un bataillon de troupes de combat. Le premier ministre a dit que nos troupes pourraient être là-bas pendant trois ans. Que sait-il que nous ignorons? Pourquoi dirait-il une chose semblable? Nous avons entendu M. Ouellet déclarer que le Canada s'était engagé à. . .

Le vice-président: Le député voudra bien désigner les ministres par leur titre et non par leur nom.

M. Mills (Red River): Merci, monsieur le Président. Suite à tout ce qu'ont dit le premier ministre, le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la Défense et les fonctionnaires de l'OTAN, pourquoi ne nous communique-t-on pas l'information pour que nous puissions en discuter ouvertement?

M. Peric: Monsieur le Président, je prends bonne note des préoccupations des députés du tiers parti. Nous avons une paix durable à portée de main et je suis sûr que le Canada est prêt à faire tout ce qu'il faudra.

J'espère que cette mission ne durera que six mois ou un an. Je serais très déçu qu'elle se prolonge pendant trois ans, mais je ne crois pas que ce soit le cas.

Si nous retirions les troupes canadiennes maintenant, nous trahirions non seulement nos alliés mais aussi ceux qui nous font confiance depuis si longtemps en Bosnie-Herzégovine. Nous trahirions la population de cette région.

M. Mills (Red Deer): Le mandat n'est plus le même.


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M. Peric: Notre mandat est différent, mais je suis convaincu que nous sommes prêts à le remplir et que nos troupes ont toute la compétence voulue pour le faire.

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à féliciter le député de Cambridge pour ses remarques.

Même si nous sommes tous égaux, il arrive dans cet endroit que les remarques de certains députés aient un petit peu plus de poids. Le député de Cambridge sait assurément de quoi il parle vu que son héritage et sa culture lui viennent de cette région, de l'ex-Yougoslavie. Il a aussi pris une part active à la création au sein du Parlement d'une association Canada-Croatie-Bosnie.

Je félicite le député pour ses efforts dans ce domaine et pour avoir mieux fait comprendre aux parlementaires comme moi-même les complexités de la situation en Bosnie-Herzégovine, comme dans tous les autres États de l'ex-Yougoslavie.

Je voudrais qu'il nous dise quels sont les aspects positifs de la présence canadienne en Bosnie-Herzégovine et en Croatie. Quel impact a eu la présence de Canadiens sur le peuple de la Bosnie-Herzégovine alors que la guerre continuait? Peut-il nous dire quel a été l'impact et peut-être nous expliquer pourquoi il tient tellement à ce que nous maintenions cette présence?

M. Peric: Monsieur le Président, venant de cette région et connaissant la mentalité des gens là-bas, je voudrais dire à mon collègue et à mes collègues du troisième parti que le moral des Casques bleus canadiens est très bon. Ils sont très respectés. Le moral des gens d'en face est très bas. Je ne crains nullement que nos soldats ne fassent pas du bon travail. Je suis très confiant car les trois parties respectent beaucoup les soldats canadiens.

(1650)

[Français]

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Monsieur le Président, depuis le matin, il y a une importante question qui n'a pas été abordée ou l'a été très peu, c'est celle de l'impunité des responsables des crimes contre les populations civiles.

Or, l'histoire se répète au Rwanda où près de un million de personnes ont été tuées sans que les responsables ne soient jamais touchés. En Haïti, on a vu un régime militaire partir avec une sorte d'impunité, et on a l'impression qu'en ex-Yougoslavie la même chose va se produire.

Le député de Cambridge pourrait-il nous dire si le gouvernement canadien est soucieux de cette question, et n'y aurait-il pas là un germe de répétition de guerres civiles dans d'autres pays?

[Traduction]

M. Peric: Monsieur le Président, il faut faire une distinction entre la situation en Somalie et la situation en Bosnie-Herzégovine. Il n'y a jamais eu de guerre civile en Bosnie-Herzégovine ou en Croatie. Comme nous le savons, il y a eu occupation. Il y a eu des attaques, d'abord contre la Slovénie, par l'ancienne armée yougoslave. Ça a été la même chose pour la Croatie et la Bosnie. Ce sont des situations différentes, que nous ne pouvons pas comparer entre elles.

Si j'en crois mes entretiens avec des soldats canadiens en Croatie, il n'y a pas eu de scandales. Les soldats faisaient leur travail, dans la mesure où ils le pouvaient. Ils sont très respectés par les trois parties. Les Canadiens devraient en être fiers. Nos soldats maintiennent une longue tradition. Nous devons les appuyer.

Mme Beth Phinney (Hamilton Mountain, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de pouvoir prendre part aujourd'hui à ce débat très important.

Le Canada a une longue et impressionnante expérience dans le monde entier en matière de maintien de la paix. Je suis sûre que tous les députés savent que le maintien de la paix, tel qu'on le connaît aujourd'hui, a été inventé par un Canadien, l'ancien premier ministre Lester B. Pearson. Au cours de la crise du canal de Suez, en 1956, M. Pearson a proposé la formation d'une force d'urgence de l'ONU pour superviser la cessation des hostilités.

Depuis 1947, le Canada a participé à toutes les opérations de maintien de la paix des Nations Unies. Nous sommes l'un des rares pays du monde à avoir cette expérience. Nous sommes aussi l'un des rares pays du monde à avoir payé tout notre dû aux Nations Unies, y compris notre part du coût des activités de maintien de la paix.

Le Canada a joué un rôle majeur dans l'opération actuelle de maintien de la paix en ex-Yougoslavie. Il a participé à quatre opérations distinctes, mais reliées, dans la région. Il a aussi participé au pont aérien établi à Sarajevo à des fins humanitaires. La marine a affecté une frégate à la force navale permanente de l'OTAN dans l'Atlantique, qui patrouille l'Adriatique, exerce un contrôle et applique les sanctions.

Le Canada a aussi fourni deux membres d'équipage pour les avions AWACS, qui font respecter la zone d'exclusion aérienne au-dessus de la Bosnie. Notre pays a aussi fourni un bataillon à l'appui de l'opération des Nations Unies en Bosnie. Cette unité était basée à Visoko, au nord-ouest de Sarajevo. Environ les trois quarts des membres de cette unité ont été rappelés en octobre, les autres étant revenus à la fin de novembre.

Les militaires canadiens ont joué un rôle appréciable en Bosnie. Ils ont distribué de l'aide humanitaire, protégé les civils et contrôlé les cessez-le-feu.

Au cours des trois dernières années, les scènes de violence et de souffrance sont devenues beaucoup trop courantes au téléjournal, chaque fois qu'on y parlait de la Bosnie. La guerre en Bosnie a été extrêmement brutale et vicieuse malgré tous les efforts des Nations Unies et des militaires canadiens pour soulager les épreuves des civils innocents.

Les efforts faits auparavant par les Nations Unies n'étaient guère plus qu'une solution provisoire. C'est pourquoi je suis heureuse qu'on ait récemment signé un accord à Dayton, en Ohio, pour mettre fin au conflit en ex-Yougoslavie. Après plus de trois ans de


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combats, 250 000 morts et la création de deux millions de réfugiés, il est grand temps que la guerre cesse en Bosnie.

(1655)

J'espère que l'accord de Dayton ramènera la paix dans la région, mais je dois admettre que je partage les doutes de beaucoup de gens à cet égard. Nous avons vu, au cours des récentes années, à quel point les trêves et les accords peuvent être éphémères dans les Balkans. Après plusieurs années d'affrontements, il sera extrêmement difficile pour les gens de tous les côtés de vivre ensemble.

L'accord de paix est extrêmement complexe et il ne sera pas facile de le mettre en oeuvre. C'est pourquoi je suis heureux de la participation de l'OTAN. Comme les députés le savent, l'OTAN prévoit déployer 60 000 soldats, dont 20 000 Américains, pour assurer la mise en oeuvre de l'accord.

En plus des États-Unis, 11 autres pays de l'OTAN ont indiqué qu'ils fourniraient des troupes. De même, la Russie et 19 autres pays non membres de l'OTAN ont indiqué qu'ils fourniraient aussi des troupes. La Russie et bon nombre de ces autres pays sont d'anciens pays du Pacte de Varsovie et d'actuels membres de Partenariat pour la paix. Cette mission sera la première opération conjointe de pays membres de l'OTAN et de Partenariat pour la paix.

L'OTAN a expliqué clairement que la force de mise en oeuvre n'effectuerait pas une mission traditionnelle de maintien de la paix, mais plutôt une mission de mise en oeuvre dirigée par l'OTAN. Celle-ci sera menée en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, qui permet d'utiliser tous les moyens nécessaires pour accomplir une mission.

La force de mise en oeuvre devra surveiller et faire respecter le retrait des troupes de chaque côté, jusqu'à leurs territoires respectifs, établir et contrôler les lignes de séparation, mettre en application les dispositions de l'accord sur le cessez-le-feu, défendre les zones protégées et aider les Nations Unies et les organismes civils d'aide.

Il est fort probable que la force de mise en oeuvre sera appelée à se battre pour faire respecter l'accord de paix. C'est pourquoi les troupes de l'OTAN seront lourdement armées et autorisées à utiliser la force.

Malgré leur grand nombre et leur armement lourd, les troupes de l'OTAN vont probablement subir des pertes. Le terrain rendra les opérations difficiles. Les tireurs d'élite et les mines peuvent causer de graves difficultés.

J'appuie la participation de l'OTAN et du Canada à cette opération, malgré les difficultés. Nous cherchons une solution depuis le début de cette guerre. Le Canada ne devrait pas abandonner la Bosnie au moment même où une solution semble possible.

Cet accord est le seul moyen de mettre fin à la guerre et nous devons l'appuyer. Cependant, même si je crois que nous devons appuyer l'accord de Dayton et la force de mise en oeuvre de l'OTAN, il y a des limites à ce que le Canada peut faire. Nous devons définir très clairement le rôle des troupes canadiennes.

J'ai le plus grand respect pour le professionnalisme et la compétence des soldats canadiens. Toutefois, je m'inquiète de l'état de préparation de l'armée canadienne et de sa capacité de jouer un rôle de première ligne dans une mission de mise en oeuvre de la paix. Je crains que les Forces canadiennes ne soient pas équipées pour le rôle de combat qu'elles pourraient avoir à remplir en Bosnie.

Le travail du Comité mixte sur la politique de défense du Canada montrait clairement qu'il avait de sérieuses lacunes dans le domaine de l'équipement de l'armée canadienne. Bien que le gouvernement ait pris des mesures pour combler certaines de ces lacunes, il faudra du temps pour moderniser complètement l'équipement de nos troupes.

Récemment, j'ai eu une longue discussion avec un de mes électeurs qui a servi en Bosnie et a été gravement blessé. Malgré cela, il est très fier de l'armée canadienne et du travail qu'elle fait en Bosnie. Il est très agréable de l'entendre parler de ce qu'il a tiré, personnellement, de son service militaire. Il estime que l'armée est un excellent terrain d'entraînement pour la jeunesse canadienne. Il estime que les troupes canadiennes sont les mieux entraînées au monde.

Malgré cela, il estime que le Canada devrait jouer un rôle de maintien de la paix et non d'imposition de la paix. Il est de cet avis parce qu'il connaît personnellement certaines des carences les plus flagrantes dans le domaine de l'équipement militaire. Par exemple, les véhicules blindés du type Cougar que le Canada utilise en Bosnie ont été achetés en 1980, comme véhicules d'entraînement. À son avis, le blindage n'est pas suffisant et le système de visée des canons n'est pas très efficace. À son avis aussi, les gilets pare-balles ne fournissent pas une protection suffisante et sont de qualité inférieure aux gilets modernes.

Personnellement, j'estime que le Canada pourrait contribuer davantage en fournissant des troupes pour le support logistique et l'aide humanitaire. Le Canada devrait fournir les services pour lesquels il est le mieux équipé et laisser d'autres pays, mieux en mesure de le faire, fournir les troupes de combat.

Lors des missions de maintien de la paix antérieures, par exemple en Namibie, le Canada fournissait le personnel pour le support logistique.

(1700)

Dans les opérations de l'ONU de maintien de la paix au Moyen-Orient, le Canada fournissait des troupes dans le domaine des télécommunications et du support logistique. Une autre option serait de fournir des ingénieurs et une aide pour les opérations de déminage, comme nous l'avons fait au Cambodge. On pourrait aussi fournir un support médical à la force d'intervention sous la forme d'hôpitaux de campagne.

La réinstallation d'un grand nombre de réfugiés mettra fortement à contribution les agences humanitaires des Nations Unies. Le Canada pourrait fournir de l'aide pour la réinstallation et la reconstruction en Bosnie.


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Je voudrais souligner que la contribution la plus valable que le Canada puisse faire à la force d'intervention serait de fournir un support dans le domaine des télécommunications, de la logistique et de la médecine. J'aimerais aussi souligner que je suis en faveur de la force d'intervention. Nous avons le devoir moral d'appuyer les efforts de paix en Bosnie et nos troupes seront à la hauteur de la tâche qu'elles seront appelées à effectuer.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Madame la Présidente, j'ai écouté très attentivement les observations de la députée. J'apprécie le courage qu'il lui a fallu pour faire certains commentaires qui vont clairement à l'encontre de la position déclarée de son parti et du gouvernement.

Ses remarques ne s'éloignent pas tellement de la position du Parti réformiste qui, comme on le sait, s'oppose ostensiblement à l'engagement de troupes de combat canadiennes, lesquelles sont mal préparées, mal dirigées et mal équipées, comme l'a fait remarquer la députée.

Ce ne sont pas tellement les troupes qui sont le gros problème, mais bien les gens d'en face qui prennent la décision de mettre leur vie en jeu. Comment nos forces armées peuvent-elles avoir le moral et avoir confiance dans leur commandant en chef de facto alors qu'il ne sait même pas dans quel sens se met un casque?

Si le gouvernement engage des troupes qui ne sont pas prêtes à jouer ce rôle, comme elle l'a dit, est-ce que la députée fera part de son point de vue au ministre de la Défense nationale et est-ce qu'elle s'opposera, comme le font les réformistes, à l'engagement de troupes canadiennes?

Mme Phinney: Madame la Présidente, je n'ai pas besoin de parler au ministre; il connaît déjà mon opinion parce que notre parti favorise la liberté d'opinion. Nous pouvons toujours dire ce que nous pensons.

Je suis certaine qu'on ne permettra jamais que des troupes canadiennes mal préparées et mal commandées soient envoyées en Bosnie. J'ai émis une opinion et j'attends celle des membres de notre parti qui sont plus au courant que moi des améliorations qui ont été apportées au matériel depuis que le comité a fait ces recommandations.

C'est ce que je pense maintenant, et si j'ai tort, je ne m'en offusquerai pas. Je sais également que les Américains seront très bien équipés et que nos troupe pourront se servir de leur équipement si elles n'ont pas ce qui leur faut.

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Madame la Présidente, je félicite la députée de son intervention. C'est le genre de débat que nous espérions engager, et non pas les belles paroles creuses que l'on entend trop souvent, même au sein de notre parti. Les avis varient quant au type de troupes à déployer, à leur nombre, et ainsi de suite.

Je voudrais toucher un mot sur une déclaration très importante que la députée a faite. Je ne peux qu'être de son avis. Quand nous étions en ex-Yougoslavie, en Croatie et plus particulièrement en Bosnie, les militaires nous ont fait savoir, à juste titre d'ailleurs, que leur matériel était loin d'être approprié aux tâches qu'on leur avait confiées.

Lors d'une opération militaire, il est très rare que l'on soit parfaitement équipé pour accomplir sa mission. Quoi qu'il en soit, des mesures ont été prises en ce qui concerne le blindage des TTB et les autres véhicules afin de remédier à la situation. Comme les députés ne sont pas sans le savoir, et suivant en cela les recommandations du comité mixte spécial, nous avons mis l'accent sur l'amélioration des TTB et on s'y emploie encore.

(1705)

Il y avait un autre aspect qui nous sautait aux yeux. Le comité était préoccupé par le nombre d'affectations imposées aux soldats. Le comité mixte a recommandé, avec l'accord du troisième parti, si ce n'est pas de l'opposition officielle, que l'on augmente les effectifs de l'armée de 3 000 membres. Le rapport faisait état de 2 500 nouveaux soldats, mais on a abouti, je crois, à 3 000 fantassins, par opposition au personnel du quartier général. Cette mesure a été mise en oeuvre. Cela devrait améliorer grandement la rotation des hommes de combat et faciliter le travail des responsables de la logistique. Je tenais à le signaler.

M. Jack Ramsay (Crowfoot, Réf.): Madame la Présidente, il ne fait aucun doute que le gouvernement s'est engagé à participer à l'initiative des Nations Unies. Cependant, je serais beaucoup moins inquiet au sujet de la décision si nous pouvions être assurés qu'on répondra aux préoccupations qu'ont soulevées mon collègue et le député qui vient de terminer son intervention, à savoir les questions de moral, de leadership et, le plus important, de matériel. Je me sentirais beaucoup mieux si nos soldats étaient bien équipés et avaient un excellent leadership pour faire face à cette situation.

[Français]

M. Jean H. Leroux (Shefford, BQ): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député de Louis-Hébert.

Je désire intervenir aujourd'hui dans ce débat sur l'implication des Forces armées canadiennes à la force d'interposition dans l'ancienne Yougoslavie. Je suis d'accord sur le principe, mais pas sur la façon dont le gouvernement, et plus particulièrement le premier ministre et le ministre de la Défense se sont engagés avec nos partenaires de l'OTAN.

Premièrement, le premier ministre a déjà engagé le Canada, en principe, financièrement et en ressources humaines, le 23 novembre dernier, lors d'un discours prononcé au terme d'une rencontre avec le secrétaire général des Nations Unies, M. Boutros Boutros-Ghali, sans avoir au préalable obtenu l'assentiment de cette Chambre.

En effet, avant même que le Parlement canadien ne soit tenu de débattre de la question, la décision était déjà prise. À ma connais-


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sance, le gouvernement devrait être au service du Parlement et non le contraire. À quoi sert-il d'avoir une institution démocratique telle que le Parlement, où les parlementaires émettent des avis au gouvernement et adoptent des lois, si ce même gouvernement fait fi de la procédure et ne fait qu'entériner ses propres décisions par le Parlement?

En effet, le 23 novembre dernier, le premier ministre a dit, et je le cite: «C'est sûr qu'il y aura un certain nombre de soldats, mais l'importance de la contribution dépendra de ce que nous pouvons faire et de ce qu'on nous demandera de faire.» Donc, le premier ministre faisait référence à nos alliés de l'OTAN et particulièrement à nos voisins, les Américains. Cela veut donc dire que la contribution du Canada dépend de la décision de nos voisins du Sud, et non pas de ce qu'aura décidé préalablement ce Parlement. Voilà comment les décisions sont prises au Canada.

Malgré mon appui au principe du plan de paix du gouvernement canadien de participer aux opérations de l'OTAN dans l'ex-Yougoslavie, je demeure perplexe sur la façon dont procèdent les libéraux fédéraux. Tout est une question d'attitude.

Même le président Clinton ne s'est pas formellement engagé avant que le Congrès américain n'ait ratifié la contribution des États-Unis à la force d'interposition. À mon avis, la déclaration du premier ministre démontre, une fois de plus, qu'il attache peu d'importance à l'avis des parlementaires, puisqu'il a déjà annoncé, avant même la tenue du débat parlementaire que nous tenons aujourd'hui, qu'il enverra des soldats en Bosnie.

Décidément, le premier ministre a deux poids, deux mesures. Pas plus tard que la semaine dernière, il proclamait que la Chambre était souveraine concernant sa fameuse clause de la société distincte et que cela devait passer devant la Chambre avant toute chose. Aujourd'hui, pour le cas de l'implication des Forces armées canadiennes à la force d'intervention militaire multinationale sous le commandement de l'OTAN, la décision est déjà prise et la Chambre n'a qu'à entériner cette décision. Voilà à quoi nous sommes conviés aujourd'hui.

(1710)

J'aimerais soulever plusieurs autres points qui m'apparaissent inconciliables entre le discours que le gouvernement affiche et les faits qui sont discutés dans cette Chambre.

Lors d'une rencontre d'information jeudi dernier, un membre des Forces armées canadiennes nous informait qu'à ce jour la contribution d'Ottawa au sein de la Force de protection des Nations Unies dans l'ex-Yougoslavie s'élevait à plus de un demi-milliard de dollars sur trois ans, soit approximativement 517 millions de dollars pour une force variant entre 1 600 et 2 000 soldats canadiens. Ce demi-milliard de dollars, environ 172 millions par année, représente le surplus des dépenses encourues au ministère de la Défense nationale pour l'engagement des troupes canadiennes de maintien de la paix au sein de l'ONU dans l'ex-Yougoslavie. Donc ce chiffre est la différence, c'est un surplus de ce que ça coûterait normalement que de garder nos troupes ici au Canada.

Fort de ces chiffres, on nous affirme que la présente implication au sein de l'OTAN ne devrait pas dépasser un surplus de 75 millions pour 12 mois d'engagement impliquant entre 2 000 et 3 000 soldats canadiens; 75 millions pour une mission très différente d'une mission de paix, c'est inconcevable. C'est le double. C'est deux fois moins, et on va en demander deux fois plus à nos troupes.

Or, dans un article du journal Le Devoir du 24 novembre dernier intitulé «Le Canada participera à la force d'interposition», le ministre de la défense fait allusion à des dépenses beaucoup plus élevées que 75 millions de dollars pour ce type d'engagement prévu.

Je vais vous lire une partie de cet article, et je cite: «M. Collenette a également noté que les dépenses logistiques inhérentes à des opérations de combat du type de celles que met en forme l'OTAN sont beaucoup plus élevées que dans le cas des missions de paix de l'ONU. Il faudra examiner les aspects financiers», de conclure le ministre de la Défense.

C'est difficile à comprendre. Le ministre de la Défense lui-même nous mentionne que ces opérations de combat pourraient nous coûter beaucoup plus cher que ce que nous ont dit les militaires, ce qui ajoute à l'avis de certains experts et fonctionnaires qui affirment que les coûts de participation dans le cadre d'une mission de l'OTAN sont le double habituellement de ceux relatifs à une mission de paix de l'ONU.

Je suis sceptique quand on me dit que ça va coûter seulement 75 millions pour 12 mois, et 75 millions de plus que ça coûte normalement, car il est important que les gens sachent cela. Est-ce que le ministre de la Défense pourrait éclairer la Chambre sur les dépenses réelles, les coûts réels qu'encourent ces opérations de combat.

Dans un autre article du journal Le Devoir en date du 19 août 1995, le ministre des Affaires étrangères réagissait à la parution d'un article publié dans le journal Le Soleil, estimant à 710 millions de dollars sur trois ans le coût de l'engagement d'Ottawa au sein de la Force de protection des Nations Unies dans l'ex-Yougoslavie.

Je pose une question très simple: Qui dans cette Chambre pourrait nous donner l'exactitude des coûts de telles opérations? D'un ministère à l'autre, il y a une différence d'environ 193 millions de dollars. Qui dit vrai? J'ai peine à croire qu'on veille à ce que la Chambre donne son accord sans avoir les coûts réels de ces opérations de combat, surtout lorsqu'on affirme qu'elles coûteront la moitié moins cher comparativement aux sommes déjà engagées dans des opérations de maintien de paix.

Avec le déficit actuel du gouvernement fédéral, comment peut-on se permettre d'ignorer de tels faits? C'est troublant. Et j'ose croire que la grande majorité des contribuables québécois et canadiens seraient intéressés à savoir combien coûteront réellement ces opérations de combat.

Le principe des opérations de maintien de la paix est noble en soi, mais je doute que nous ayons les moyens de nous lancer dans de telles aventures sans connaître les coûts réels de ce geste de solidari-


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té humaine. Avec de tels chiffres, aucun banquier au Québec ou dans le reste du Canada ne serait prêt à endosser une telle opération sans au moins savoir à quoi il s'engage.

(1715)

J'appuie en principe l'implication et le Bloc québécois appuie l'implication du Canada dans les forces d'interposition de l'OTAN. Mais je ne peux absolument pas donner un chèque en blanc à ce gouvernement sans savoir où et comment cet argent sera dépensé. C'est l'argent des contribuables que nous dépensons. Et avec les coupures que le fédéral impose aux plus démunis de notre société, il est impensable de ne pas savoir combien et comment cet argent sera réellement dépensé.

Finalement, quant à la mission de la force d'interposition, nul n'en connaît évidemment la durée et les implications que cela exige à moyen terme. Le premier ministre s'est entendu pour dire au secrétaire général de l'ONU que ceux qui s'engageraient à y participer devraient tenir le coup jusqu'au véritable rétablissement de la paix, que ce soit dans six mois ou dans trois ans.

Nonobstant l'engagement du premier ministre, si le mandat devait être prolongé au-delà des 12 mois prévus, je suis d'avis qu'on exige que le gouvernement soumette sa décision à l'approbation de cette Chambre. De plus, j'insiste sur la clarté du mandat de 12 mois et sur le fait que le Canada n'engage pas plus de 2 000 soldats, pas plus, aux forces de l'OTAN, niveau approximatif auquel se limitait l'engagement du Canada dans le cadre de la FORPRONU.

Considérant l'actuel état de nos finances, en conclusion, j'exprime de grandes réserves quant à l'évaluation des menaces que fait le ministère de la Défense.

M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Madame la Présidente, je trouve les observations du député un peu équivoques. Est-ce qu'il peut nous expliquer pourquoi son chef a toujours appuyé et même loué qu'il y ait des forces canadiennes en Europe pour des raisons humanitaires? C'est ainsi que son chef se prononçait la dernière fois qu'on a tenu ce débat. Et lui-même, il se dit d'accord en principe avec cette politique d'intervention pour les mêmes raisons que moi et d'autres en cette Chambre croyons qu'il est très important que le Canada participe à des actions humanitaires et importantes pour rétablir la paix dans cette région.

Donc, j'appuie personnellement cette initiative du gouvernement. Je crois que le député lui-même appuie cette initiative du gouvernement. Je crois que son parti appuie cette initiative, mais derrière cela, il cherche à trouver des prétextes pour critiquer le premier ministre, critiquer le gouvernement, trouver des petites objections ici et là. Par exemple, il dit que le premier ministre n'est pas correct quand il dit que notre participation dépend de celle des Américains. C'est tout à fait évident, mais cela ne veut pas dire que cette décision a été prise par les Américains, comme le député le prétend, et que nous prendrons notre décision en fonction de ce que font nos alliés. Notre façon de procéder est tout à fait logique, c'est intelligent, et c'est exactement ainsi que nous devions procéder.

À mon avis, ce débat en cette Chambre nous donne, en tant que parlementaires canadiens, la possibilité de participer à cette décision. C'est évidemment une décision complexe, qui dépend de beaucoup d'autres conditions, mais c'est toujours comme ça dans le monde et de prétendre autrement, je crois, c'est de déformer le débat et essayer seulement de trouver des prétextes pour critiquer le gouvernement.

M. Leroux (Shefford): Madame la Présidente, ce sur quoi nous ne sommes pas d'accord, c'est la façon de le faire. On parle toujours de la souveraineté du Parlement; le Parlement est souverain, dit-on. Sauf que, dans les faits, ce n'est pas ça qui se produit. Le premier ministre s'est déjà engagé et, ensuite, il soumet la question ici pour avoir une espèce de caution, une caution des différents partis de la Chambre et cela, nous ne l'acceptons pas.

Oui, nous sommes d'accord. Nous savons que le Canada a des engagements envers l'OTAN. Nous savons que le Canada a toujours respecté ses engagements. Nous n'avons pas de problèmes avec ça. Sauf que ce que nous disons actuellement, c'est allons-y, oui, mais allons-y selon nos moyens.

(1720)

Vous savez, nous sommes peut-être un des pays les plus endettés au monde, per capita. Alors on doit continuer à aider les autres, mais je pense qu'il faut considérer cela dans la décision qu'on prend. Et le Bloc québécois est d'accord pour qu'on aille en Bosnie-Herzégovine avec nos partenaires, mais je pense qu'il faut aussi que le gouvernement ne nous prenne pas toujours à la dernière minute. Ici, en cette Chambre, nous sommes souverains, c'est la Chambre qui devrait décider, on devrait revenir devant cette Chambre pour nous dire combien de troupes on devrait envoyer, etc., parce que c'est une décision qui est importante.

Ce que je disais dans mon discours c'est que le président Clinton a attendu, lui, d'avoir l'accord de son Parlement, de ses Chambres pour pouvoir agir. Ce n'est pas ce qui a été fait ici. Il y a une promesse qui a été faite par notre premier ministre.

En terminant, j'aimerais dire aussi que c'est important, nos engagements, mais il faut aussi regarder tout ce qui se passe. C'est très différent d'une mission de paix, ce qu'on va faire. Il y aura peut-être des pertes de vie. On sait que ces gens risquent leur vie, maintenant le risque va être plus grand, peut être plus grand. Si on envoie des troupes là-bas, on n'est pas obligé d'envoyer des troupes de combattants, on pourrait envoyer des troupes auxiliaires, des ingénieurs, des infirmiers. On a tout cela ici au Canada, on participerait. Mais je pense qu'il faut faire bien attention. Je pense qu'il faut faire notre part, mais on n'a pas à faire plus que les autres.


17166

[Traduction]

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le député d'Okanagan-Similkameen-Merritt a la parole. Soyez très bref.

M. Jim Hart (Okanagan-Similkameen-Merritt, Réf.): Madame la Présidente, dans son discours, le député a parlé de la durée de la mission. Comme nous le savons tous, l'OTAN a dit que la mission doit durer un an, soit 12 mois.

Le député a-t-il pensé qu'on était extrêmement optimiste en prévoyant la durée de ce type d'opération? Il semble qu'un an soit un délai très optimiste. Nous envoyons quelque 60 000 soldats là-bas.

Pendant la séance d'information que le gouvernement nous a donnée. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette. J'ai bel et bien demandé au député de poser une question directe et d'être très bref.

[Français]

M. Leroux (Shefford): Madame la Présidente, je pense que ce qui serait souhaitable, c'est qu'à la suite d'un engagement d'un an le gouvernement revienne devant cette Chambre et nous demande si nous sommes d'accord pour poursuivre.

Encore une fois, j'aimerais dire que c'est important qu'on ait les chiffres. Les gens doivent savoir combien ça coûte. C'est cela qui est important.

M. Philippe Paré (Louis-Hébert, BQ): Madame la Présidente, nous débattons aujourd'hui du récent Accord de paix de Dayton et de la contribution canadienne à cet effort de paix dans les Balkans.

Depuis plus de trois ans, des négociations ont pris place entre Bosniaques, Serbes et Croates, dans le but de trouver une entente quant à la mise en place d'un véritable processus de paix. Le 21 novembre dernier, un accord, imparfait certes, mais un accord, est tout de même intervenu entre toutes les parties.

Cet Accord de paix signé à Dayton, en Ohio, prévoit notamment que les réfugiés seront autorisés à retourner chez eux, ou auront droit à une indemnisation si ce retour est impossible. L'Accord prévoit aussi la libre circulation pour l'ensemble de la population sur le territoire bosniaque.

Pour la mise en oeuvre de l'Accord, la communauté internationale est invitée à contribuer sous forme d'aide humanitaire et/ou de reconstruction, le tout ayant comme objectif l'établissement d'une paix durable en ex-Yougoslavie.

Nous sommes aujourd'hui invités à débattre de la forme que devrait prendre la contribution du Canada dans le processus de paix. Mais nous sommes en droit de nous demander si ce débat sera vraiment utile ou si le gouvernement canadien n'a pas déjà pris toutes les décisions, puisque moins de 48 heures après la signature de l'Accord de Dayton, le premier ministre canadien a déjà déclaré publiquement que le Canada enverrait un certain nombre de soldats selon nos capacités et les demandes de l'OTAN.

Le Bloc québécois tient à questionner l'attitude du premier ministre qui laisse clairement entrevoir que les décisions ont déjà été prises et que l'avis des parlementaires de cette Chambre n'a que peu d'importance. Le message du premier ministre est que le Canada enverra des soldats en Bosnie, peu importe les débats parlementaires d'aujourd'hui. Pourtant, ce débat serait pertinent et, à cet égard, le ministre des Affaires étrangères aurait dû informer le premier ministre qu'il existe trois formes d'intervention possibles pour le Canada, autres que l'envoi simple de soldats.

(1725)

La participation à la force d'interposition en est une évidemment, mais la participation à la reconstruction et à l'accueil des réfugiés ne pouvant retourner chez eux est d'autres formes d'aide que le Canada devrait considérer.

J'aimerais d'ailleurs élaborer sur cette dernière initiative offerte au Canada afin de venir en aide aux réfugiés bosniaques. L'intervention du Canada peut se faire de deux manières. D'abord, le Haut-commissariat pour les réfugiés a lancé un appel pour accueillir des réfugiés provenant de l'ex-Yougoslavie. À ce titre, il y a quelques semaines, le ministre canadien de la Citoyenneté et de l'Immigration s'est entendu avec des organisations non gouvernementales et d'autres organismes afin de mettre en oeuvre un plan d'action pour accueillir ces victimes de la guerre. En ce sens, le gouvernement du Québec participe également à cet effort spécial. Le Bloc québécois appuie cette initiative et presse le gouvernement canadien de poursuivre ses actions en ce sens.

La deuxième façon de jouer un rôle pour le Canada quant au sort des réfugiés pourrait se faire directement sur le terrain en Bosnie-Herzégovine. Les meilleures estimations portent à croire que plus de 1,3 million de personnes ont été déplacées en Bosnie même, alors que 800 000 réfugiés sont situés dans les républiques voisines et les autres pays européens. Le Canada doit faciliter la mise en oeuvre de l'Accord de Dayton et venir en aide à ceux et celles qui veulent retourner chez eux.

Il est temps de reconnaître aujourd'hui que les interventions précédentes canadiennes en ex-Yougoslavie ont eu un succès plus que mitigé. La participation canadienne à la FORPRONU a coûté à ce jour plus de un demi milliard de dollars aux contribuables. Malgré ces ressources énormes investies par le Canada, les résultats sont, somme toute, assez décevants.

Le Canada a été exclu des importants processus de prises de décisions. J'en veux pour preuve l'exclusion du Canada en avril 1995 du groupe de contact formé par les États-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne et l'Allemagne. Le Canada a donc maintenu là-bas un contingent important dans le cadre de la FORPRONU, alors même que cette présence militaire n'avait pour ainsi dire pas d'encadrement et n'avait pas non plus de politique claire, originale et bien définie quant à l'issue du conflit et aux modalités de son règlement.

Le gouvernement canadien n'a absolument pas exercé un leadership international et n'a pris aucune initiative politique d'envergure susceptible de lui donner une certaine influence. Avant de s'engager dans une nouvelle participation pour la mise en oeuvre du


17167

plan de paix et de reconstruction de la Bosnie, l'opposition officielle croit que plusieurs questions méritent de trouver des réponses. Les contribuables canadiens sont en droit de savoir si oui ou non le Canada aura un droit de regard sur les opérations de ses soldats.

De plus, connaissant les graves problèmes économiques de la Bosnie, il faut aussi se demander si le gouvernement canadien a l'intention de venir en aide financièrement ou si, compte tenu de nos propres problèmes d'endettement, nous ne pourrions pas trouver une autre forme d'aide plus responsable et plus réaliste. Par exemple, le Canada pourrait très bien fournir une assistance technique pour les futures élections en Bosnie, étant donné son expertise dans ce domaine.

Nous voulons également connaître les risques qui seront encourus par nos soldats. On sait que la force d'interposition sera composée de troupes de combat et non de Casques bleus chargés de maintenir la paix. Cette nouvelle mission s'effectuera donc en vertu du chapitre 7 et non du chapitre 6 de la Charte des Nations Unies. Or, nous savons que le chapitre 7 donne davantage de moyens pour l'accomplissement de ces missions, y compris l'usage de la force. Tous les moyens seront ainsi mis en vigueur pour faire respecter l'entente.

Finalement, le Bloc québécois soulève aussi trois autres questions quant la durée, au mandat et aux coûts de cette opération. En ce qui a trait à la durée, le secrétaire général de l'ONU et le premier ministre ont déclaré conjointement que le mandat pourrait éventuellement s'échelonner sur une période de trois ans. Si tel devait être le cas, le Bloc québécois exige du gouvernement qu'il soumette sa décision de prolonger sa mission à l'approbation de la Chambre des communes, après l'expiration du présent plan de 12 mois.

Quant au mandat des Canadiens en Bosnie, nous espérons que le gouvernement canadien a appris de ses erreurs et que cette fois-ci il élaborera un mandat clair. Parmi les tâches probables que les troupes pourraient être amenées à accomplir, les troupes canadiennes pourraient davantage se spécialiser dans celles liées aux communications et aux aspects traditionnels de maintien de la paix. Soucieux de l'image pacifiste du Canada, nous du Bloc québécois croyons qu'une très faible proportion des soldats que nous fournirons à l'OTAN devra être consacrée à des missions de combat, s'il y a lieu.

(1730)

Finalement, le Bloc québécois est d'avis que la participation canadienne doit être sensiblement la même que celle consacrée à la FORPRONU, soit environ 2 000 soldats. Cette contribution semble comparable au niveau de participation de nos alliés européens, exception faite de la France, de la Grande-Bretagne et de l'Allemagne. Aussi, le coût d'une telle opération est importante. Le ministère de la Défense estime que les frais d'une telle opération sur 12 mois varieraient entre 2 et 75 millions de dollars, selon le nombre de soldats qui participeraient à l'opération. Les différents scénarios font état de l'envoi de 50 à 3 500 soldats.

Ces chiffres nous semblent douteux, quand nous savons qu'il en a coûté environ 172 millions annuellement pour la participation canadienne à la FORPRONU. Or, le ministère de la Défense reconnaît que les coûts d'une mission de l'OTAN seraient environ le double de ceux d'une mission de maintien de la paix des Nations Unies. Le gouvernement canadien doit faire preuve de plus de rigueur et doit indiquer les véritables coûts de cette opération avant de s'engager plus à fond.

Bref, ce que le Bloc québécois demande au gouvernement canadien, c'est plus de discernement, de rigueur intellectuelle et surtout de transparence. Il n'y a pas de doute que le Canada se doit de contribuer au processus de paix en Bosnie. La façon dont cela doit se faire doit vraiment être débattue en cette Chambre.

[Traduction]

M. Leonard Hopkins (Renfrew-Nipissing-Pembroke, Lib.): Madame la Présidente, nous tenons aujourd'hui, à la Chambre, un débat très sérieux sur l'accord de paix de Dayton. Un certain nombre de pays se sont réunis pour rédiger un accord de paix touchant les diverses factions combattantes dans l'ancienne Yougoslavie. Ce conflit remonte à quelques années et le Canada apporte depuis quatre ans une contribution remarquable sur le plan humanitaire, dans cette région.

Nous avons un débat très large à la Chambre cet après-midi et ainsi, je voudrais commencer par lire la motion dont la Chambre est saisie:

Que cette Chambre prenne acte et accueille le récent accord de paix de Dayton et les efforts constants de la communauté internationale pour instaurer une paix et une sécurité durables dans les Balkans, et que le Canada contribue à ces efforts en participant à une force d'intervention militaire multinationale (IFOR) sous le commandement de l'OTAN.
La force de mise en oeuvre ne participera pas à une mission classique de maintien de la paix, mais plutôt à une mission d'imposition de la paix, dirigée par l'OTAN. Elle mènera ses activités aux termes d'une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, conformément au chapitre VII de la Charte des Nations Unies qui permet l'utilisation de tous les moyens nécessaires pour accomplir une mission.

Étant donné qu'il ne s'agira pas d'une opération classique de maintien de la paix et que l'OTAN, ainsi que beaucoup d'autres pays, participent à cette mission, nous ne devrions pas être surpris qu'on nous demande d'envoyer des unités combattantes.

Le monde étant ce qu'il est de nos jours, il y a de nombreux points chauds. La situation dans certains de ces pays pourrait se détériorer encore davantage. C'est le grand problème auquel nous sommes confrontés aujourd'hui. Quelle sera la situation dans six mois, un an ou cinq ans? Personne ne peut le prédire. Le monde est un endroit très imprévisible en cette ère de notre histoire.

La force de mise en oeuvre est la seule façon de s'occuper de cette question. Il faut mettre en oeuvre l'accord de paix conclu. On doit rétablir dans la région les conditions de vie essentielles. Les gens doivent pouvoir vivre sans avoir peur de ce qui pourrait leur arriver.

Ce n'est pas le moment pour le Canada ou tout autre pays responsable d'abandonner ces gens à leur sort. À un moment comme celui-ci, la communauté internationale doit serrer les coudes, dans l'intérêt de l'humanité.


17168

(1735)

Dans de telles opérations, les gagnants sont ceux qui vivent soudain dans la sécurité et la paix. Ce sont aussi les pays libres qui acceptent les responsabilités qui leur incombent dans un monde qui, autrement, est cruel.

Les gagnants, ce sont, par exemple, les habitants de la Russie et des pays de l'Europe de l'Est qui, il y a peu de temps, faisaient partie du bloc communiste et qui collaborent aujourd'hui avec leurs amis occidentaux pour mettre en oeuvre cet accord de paix dans l'ex-Yougoslavie.

Il ne peut s'agir que d'un événement extraordinaire dans notre histoire. Il y a huit ou dix ans, qui aurait pu croire que tout cela arriverait et que nous en serions témoins?

Bien sûr, les autres gagnants sont aussi ceux qui vivent aujourd'hui dans ce pays, les enfants et les femmes qui vont enfin connaître la paix. Mais, on gardera le souvenir ces bébés, ces enfants, ces femmes, ces grands-parents, ces jeunes et vieux dont les noms figurent sur ces innombrables pierres tombales des cimetières partout dans l'ex-Yougoslavie. Un massacre a eu lieu auquel le Canada ou n'importe quel autre pays ne peuvent ignorer. Si nous ne sommes pas vigilants, il se reproduira. Les tombes rappelleront cette horrible période de l'histoire de l'ex-Yougoslavie.

Les gagnants seront les pays membres de l'OTAN et ceux du bloc de l'Est qui ont comblé l'écart dernièrement et qui mettent aujourd'hui tous leurs efforts dans cette cause humanitaire, dans une merveilleuse manifestation d'unité internationale pour la paix.

Il y a une surveillance à garantir et des mines à désamorcer. Sinon, ce sera encore l'enfer dans ce pays.

Depuis quatre ans, le Canada fournit une aide humanitaire de façon responsable et généreuse. Il est indéniable que nos soldats sont bien formés. Ils peuvent bâtir des écoles, des hôpitaux, des routes et des ponts, et ils font bien.

Je n'accepte pas le raisonnement que des députés réformistes ont fait valoir à la Chambre aujourd'hui, selon lequel nos forces deviennent inefficaces. Je m'y oppose catégoriquement. C'est un commentaire épouvantable à l'égard des Forces canadiennes que nous envoyons en mission partout dans le monde. Sont-elles en mesure de faire quelque chose? Nos militaires sont certainement capables de tout faire et s'acquitteront de leurs missions là-bas aux côtés des meilleurs militaires du monde.

Il est temps que le Parlement et tous les députés s'unissent pour remercier nos militaires, car abstraction faite de quelques problèmes, ils ont porté le drapeau canadien avec dignité et avec fierté dans le monde entier. Nous avons une grande dette à leur égard.

Les habitants de l'ex-Yougoslavie veulent la paix et la sécurité. Bien sûr, certains rebelles ne sont pas contents et rien ne saurait jamais les satisfaire, sauf quand on leur donne tout ce qu'ils veulent. Voilà ce qui explique la supervision et sa nécessité.

Il y a des gens en ce monde qui ferment leur esprit à jamais; ils ne veulent pas que personne conteste la propension à la mesquinerie qui les habite. Toutes les bonnes choses de la vie et les nécessités de la vie quotidienne doivent être remises en marche et rebâties.

(1740)

Les institutions de l'État sont nécessaires dans l'ex-Yougoslavie. Des travaux d'infrastructure énormes s'imposent à cause des destructions qu'on y a multiplié depuis des années. Le Canada y a apporté un secours conséquent depuis un certain temps.

Nos militaires ont accompli de grandes choses en notre nom dans la communauté internationale. Nous devons nous soucier de leur bien-être pendant qu'ils remplissent ces missions, et cela veut dire plus que du bon matériel. Cela veut dire un engagement financier et un engagement à leur fournir l'équipement nécessaire pour aller de l'avant à l'avenir. Nous avons déjà beaucoup fait à cet égard.

Cependant, cela veut dire également une autre chose qu'on oublie très souvent dans un débat comme celui-ci. Il faut en effet nous assurer qu'on s'occupe bien de leurs familles ici au pays. Je rappelle l'histoire de ce jeune militaire à qui j'ai parlé en Bosnie. Il m'a confié ceci: «Ça ne m'ennuit pas du tout de servir en ex-Yougoslavie parce que j'ai le sentiment de faire un travail indispensable. Ça ne m'ennuit pas pourvu que ma famille va bien chez nous.»

Nous ne pouvons pas continuer à faire du maintien de la paix et faire les choses comme nous le faisions avec les casques bleus quand les circonstances exigent un scénario différent.

D'un point de vue historique, nous pouvons nous demander combien d'argent cela coûtera. Nous pouvons nous demander combien de militaires il faudra déployer. Nous n'obtiendrons cependant pas les réponses à toutes ces questions à l'avenir. Le danger qu'il y a à ne rien faire est bien pire que celui que représente la mise en oeuvre de l'accord de paix.

Nous sommes, au sein de l'ONU, un partenaire responsable. Nous faisons partie de l'OTAN depuis bien des années. Nous entendons parler aujourd'hui du très honorable Lester B. Pearson qui a conçu la première mission de maintien de la paix en Égypte. Il faut nous rappeler une chose: le Canada a fait plus que sa part par rapport à n'importe quel pays du monde pour maintenir cette politique.

Maintenant qu'on tâche de faire baisser la pression dans les débats enflammés et les situations difficiles dans le monde, il devient très important pour le Canada de participer à la solution au lieu d'adopter une attitude isolationniste.

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais poser une question à mon distingué collègue, qui a consacré sa vie, comme on sait, à l'étude des questions militaires et du rôle du Canada à cet égard et qui a fait une contribution utile dans ce domaine. Dans ses entretiens avec le ministre compétent, jugerait-il bon de rappeler que l'OTAN, à titre d'organisation de sécurité régionale, est soumise à la charte de l'ONU, en vertu du chapitre VIII de cette charte, et plus particulièrement que, aux termes des articles 34 et 35, à l'article 52 de la charte, le rôle du Conseil de sécurité dans les opérations de maintien de la paix, selon le chapitre VI, touche également les opérations de l'OTAN et d'autres organisations militaires régionales?


17169

Est-ce qu'il ne conviendrait pas, dans ses entretiens avec le ministre, de rappeler ces faits à celui-ci et de souligner que toute participation du Canada à la nouvelle force en Bosnie resterait soumise à la charte des Nations Unies, dans le cadre du droit international établi en vertu de cette charte, que le commandement soit assuré directement par l'ONU, comme par le passé, ou par un général de l'un des pays membres de l'OTAN?

M. Hopkins: Madame la Présidente, notre histoire aurait été très différente, n'eut été d'une organisation comme l'OTAN, qui a vu le jour pendant la Guerre froide et qui a été fort utile, si je peux ajouter, toutes ces années durant.

Aujourd'hui, comme il y a quelque 80 points chauds dans le monde, nous pourrions avoir à intervenir, dans les années qui viennent, dans d'autres régions comme la Yougoslavie. J'imagine qu'il faudra apprendre à gérer toutes ces missions. Il est très important que l'OTAN et l'ONU unissent leurs efforts pour intervenir dans ces conflits. On a besoin de l'OTAN en raison de ses compétences et l'ONU a besoin du regroupement homogène de 16 pays qu'est l'OTAN.

(1745)

Je me permets aussi de signaler à mon collègue que cela n'empêche d'aucune façon tous les autres États membres de l'ONU d'appuyer l'OTAN et de collaborer à ses initiatives. Il y a environ 40 pays qui pourraient fort bien collaborer. Nous devons attendre une décision officielle du Cabinet avant de savoir si le Canada participera directement à l'opération. C'est ainsi qu'on fait les choses dans un pays démocratique.

Dans le monde où nous vivons aujourd'hui, il faut absolument que des organisations comme l'OTAN, des organisations de l'ancien bloc communiste, des organisations comme l'ONU s'unissent pour intervenir et mater certains de ces conflits hargneux qui font rage dans le monde.

Pour répondre à mon collègue, je dirai que toutes ces mesures me semblent nécessaires. Je suis sûr que le ministre est convaincu qu'elles sont nécessaires, mais il faut toujours chercher à les appliquer par l'entremise d'un grand organisme international pour le bien de l'humanité. Sinon, tous nos efforts seront vains.

M. Ian McClelland (Edmonton-Sud-Ouest, Réf.): Madame la Présidente, je suis persuadé que la plupart des peuples civilisés veulent que prennent fin toutes ces rivalités et ces guerres tribales et le génocide qui les accompagne, non seulement dans les Balkans, mais partout dans le monde et sous une forme particulièrement effroyable en Afrique.

Comme il y a un délai d'exécution et que, sans les Américains, cet effort de l'OTAN ne donnerait absolument rien, qu'arrivera-t-il si la bataille se transporte en Macédoine et si les Américains quittent la région dans un an?

M. Hopkins: Madame la Présidente, j'ose croire que nous agissons avec les meilleurs intentions du monde et le plus efficacement possible, dans l'état actuel de nos connaissances.

Nous voulons savoir d'avance tout ce qui va arriver. Si Napoléon avait su d'avance tout ce qui allait arriver, il ne serait jamais allé à Waterloo. Il y a toujours des questions auxquelles on ne peut répondre qu'avec le temps.

Si l'on se contente d'attendre et de ne rien faire, le problème ne peut que s'aggraver. L'Histoire montre que les problèmes qu'on ne règle pas finissent par devenir tellement graves que tout le monde doit s'en occuper.

Comme je l'ai dit plus tôt, aujourd'hui. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Le temps mis à la disposition du député est expiré.

Mme Eleni Bakopanos (Saint-Denis, Lib.): Madame la Présidente, je suis heureuse de pouvoir appuyer la motion dont nous sommes saisis aujourd'hui. C'est la deuxième fois que je prends la parole à la Chambre pour parler de cette question et, même si près de deux ans se sont écoulés depuis ma première intervention, ma position reste la même.

Nous devons continuer d'appuyer les efforts de la communauté internationale pour instaurer une paix et une sécurité durables dans les Balkans. Après tout, ce sont ces efforts qui ont mené à l'accord de paix de Dayton, et nous devons faire notre part pour montrer que nous maintenons notre engagement.

En tant que vice-présidente de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN, j'ai suivi de très près la participation de l'OTAN dans le conflit des Balkans. J'ai ainsi pu être informée de première main sur le rôle important que joue le Canada au sein de l'OTAN.

[Français]

Le Canada est, depuis 45 ans, l'un des principaux partisans de l'OTAN parce que celle-ci était et demeure dans notre intérêt national. L'OTAN a été, à plusieurs égards, bénéfique pour le Canada: elle a empêché la déflagration de conflits mondiaux; elle nous a permis, sachant que nous pouvions appeler à l'aide, au besoin, de maintenir des forces armées réduites à bon marché; et, ce qui importe peut-être le plus, elle nous a donné une voix à l'une des principales tribunes occidentales sur les questions de sécurité euro-atlantique et mondiale.

(1750)

[Traduction]

Ces avantages ne peuvent se concrétiser que si le Canada a une crédibilité auprès de nos alliés et qu'il demeure un membre actif de l'OTAN. Il est donc essentiel que nous participions à la force d'intervention militaire multinationale.


17170

[Français]

Nous ne devons pas tourner le dos à l'OTAN, comme si elle devenait un partenaire en qui nous ne pouvions plus avoir confiance pour produire des régimes de sécurité euro-atlantiques et mondiaux. Ce ne serait pas dans notre intérêt, d'autant plus que la création de l'IFOR est un élément clé dans l'adaptation et l'évolution des structures et opérations de l'OTAN.

La structure de commandement intégré a toujours été l'un des points forts de l'OTAN. L'Alliance est la seule organisation qui ait forgé une force militaire efficace composée à l'aide de ses divers États membres. Il s'agissait toutefois, pendant la guerre froide, d'une structure statique, aussi étendue que possible à l'intérieur des pays membres, qui avait les yeux résolument braqués sur l'Est. Ce n'est plus ce qu'il faut pour assurer notre sécurité ou celle de nos alliés.

[Traduction]

Nous avons besoin d'une OTAN qui soit moins coûteuse, qui soit souple, qui puisse agir, quelle que soit la provenance d'une menace, et qui puisse réunir des forces organisées et formées capables de participer à diverses missions allant des opérations habituelles de maintien de la paix aux interventions humanitaires et à la défense collective.

De plus, l'OTAN de l'ère moderne doit aussi pouvoir travailler avec d'autres, qu'il s'agisse d'institutions multilatérales, comme l'ONU ou l'OSCE qui ont besoin d'une force militaire organisée ou d'autres pays, grands ou petits, qui partagent les préoccupations de l'OTAN.

En janvier 1994, le Conseil de l'Atlantique Nord a appuyé l'idée d'une évolution de l'OTAN conforme au principe d'une force opérationnelle interarmées. Depuis, le concept n'a toutefois pas progressé, malgré les efforts du Canada pour le faire avancer.

La nécessité étant la mère de l'invention et l'OTAN devant se ressaisir pour imposer la paix en Bosnie, l'alliance vient de créer sa première force opérationnelle interarmées, l'IFOR. Pour l'OTAN, il n'est pas question de revenir en arrière, et nous n'aurons voix au chapitre pour nous assurer que les leçons ont été bien comprises qu'en participant à cette dernière mesure d'adaptation importante de l'OTAN.

Ce serait maintenant le pire des moments pour tourner le dos à l'OTAN et à nos alliés, mais la valeur de notre participation à l'IFOR ne se limite pas au maintien de la solidarité avec nos alliés. Depuis trois ans, le Canada et les Canadiens ont vu qu'il était dans l'intérêt de notre pays de participer aux opérations militaires multilatérales dans l'ex-Yougoslavie.

[Français]

C'était dans notre intérêt national parce que nous considérons la sécurité européenne indissociable de la nôtre. Le commerce, l'histoire, les alliances militaires et les sentiments nous lient à l'Europe. Nous savons par expérience que les conflits en Europe peuvent s'étendre et engouffrer nos amis, voire notre propre pays. Et les conflits dans les Balkans ont eu tout particulièrement tendance, dans le passé, à se propager en cercles toujours plus grands, au point même d'atteindre le Canada.

Il nous faut, si nous voulons continuer de pouvoir compter sur un système efficace de sécurité internationale pour nous protéger, y contribuer de façon significative lorsque le système sert à protéger autrui.

Beaucoup de Canadiens sont originaires des groupes en conflit, et un nombre encore plus grand est originaire de pays voisins dont la stabilité est mise en péril.

Les Canadiens ne sauraient rester oisifs pendant que d'autres souffrent. Beaucoup de gens doivent actuellement leur vie en Bosnie à la présence des Canadiens.

La signature d'un accord de paix n'a pas fait disparaître ces aspects de notre intérêt national, qui ne sera comblé qu'une fois que la Bosnie et la région environnante auront retrouvé la stabilité, la paix et la sécurité. Cela exige la mise en oeuvre intégrale de l'accord de paix de Dayton. Après tout ce qui s'est passé, cela exige la présence sur le terrain d'une force militaire multinationale, sous le commandement de l'OTAN.

[Traduction]

Pendant les heures les plus sombres en Bosnie, nos troupes ont souffert, versant même de leur sang. À quoi serviront les efforts, l'argent et les vies perdues jusqu'à maintenant si nous ne menons pas notre tâche à son terme? C'est pour ces raisons que j'appuie la motion et la participation canadienne à la force d'intervention militaire multinationale.

Mon appui et, je l'espère, celui de la Chambre ne donnent pas carte blanche à notre gouvernement, à nos planificateurs militaires ni à l'OTAN pour envoyer nos troupes en mission. La participation canadienne à la force d'intervention devrait se conformer aux principes des missions multilatérales énoncés dans le livre blanc, y compris un mandat clair et applicable, un processus de consultation efficace au sein des partenaires de la mission, un concept défini d'opérations et des règles d'engagement claires.

(1755)

[Français]

L'Accord de Dayton offre les fondements d'un mandat clair et exécutoire. La participation de l'OTAN assure en tout cas la présence d'un organisme distinct pour faire état de la situation. Elle assure également l'efficacité du processus de consultation qui faisait souvent défaut jusqu'ici dans les opérations des Nations Unies en Bosnie.

La composition d'IFOR qui regroupe presque tous les pays membres de l'OTAN, la Russie et jusqu'à 19 autres pays, devrait présenter suffisamment de diversité pour être acceptable à chacune


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des parties. Tout semble indiquer que des principes assez semblables aux nôtres sont à la base des efforts de planification.

[Traduction]

Il est évident que notre participation à la mise en oeuvre du plan de paix ne peut être sans fin. La mission de paix apparemment interminable à Chypre ne doit pas être répétée. Alors que la mission de l'ONU à Chypre était un exemple classique de maintien de la paix, différant des initiatives prises dans le cadre de la présente force d'intervention, il est impératif qu'un calendrier définitif soit proposé.

Le Conseil de sécurité de l'ONU a, à maintes reprises, demandé le retrait de toutes les troupes étrangères à Chypre, le retour volontaire des réfugiés chez eux, la cessation de toute ingérence dans les affaires internes de Chypre ainsi que le respect de sa souveraineté, de son indépendance, de son intégrité territoriale et de son unité. Aujourd'hui, plus de 20 ans plus tard, la situation sur le terrain n'a pas changé, plus de 30 000 soldats turcs lourdement armés continuent d'occuper illégalement près de 40 p. 100 du territoire de Chypre. La mission de l'ONU à Chypre a été entravée maintes et maintes fois par l'intransigeance de la Turquie.

La démilitarisation de la République de Chypre proposée par le président de Chypre, M. Glafco Clerides, est la solution concrète à ce problème de longue date. Des résolutions semblables ont été appuyées par le Congrès américain et, plus récemment, par le Parlement australien, qui a appuyé à l'unanimité une résolution en faveur de la démilitarisation à Chypre. Le Canada doit également présenter une résolution appuyant cette idée pour montrer que le statu quo n'est plus acceptable et que des règlements négociés doivent intervenir.

Nous avons vu souvent que seul un effort de collaboration peut conduire au règlement des conflits les plus complexes. Le débat d'aujourd'hui nous donne l'occasion d'appuyer l'effort de collaboration déployé dans le but de rétablir la paix dans les Balkans.

Je veux maintenant parler du travail que fait toujours le Canada sur le plan humanitaire dans l'ancienne Yougoslavie. En tant que présidente du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, j'applaudis aux initiatives prises par le gouvernement par l'intermédiaire du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Près de 7 000 citoyens de l'ancienne Yougoslavie ont obtenu le droit d'établissement au Canada depuis 1992 dans le cadre du programme de mesures spéciales. En outre, plus de 270 personnes ont été parrainées jusqu'à maintenant grâce au programme de parrainage partagé.

Le gouvernement maintiendra ces programmes tant que le besoin d'aide humanitaire continuera d'exister. Cela fait partie de notre engagement au sein des Nations Unies et de notre responsabilité à l'égard de la communauté internationale pour soulager les souffrances des citoyens de l'ancienne Yougoslavie.

[Français]

La population du Canada ne sera tranquille qu'une fois que la Bosnie aura retrouvé la paix et la sécurité. Il nous incombera, en tant que parlementaires, de les appuyer et obliger le gouvernement à rendre des comptes tout au long de cette mission.

[Traduction]

En conclusion, je crois que le Canada devrait participer à cette mission dirigée par l'OTAN, premièrement, parce que c'est dans notre intérêt national de voir à ce que nos trois ans d'efforts en vue d'apporter paix et secours en Bosnie soient couronnés de succès et, deuxièmement, parce que c'est une preuve de notre engagement au sein de l'OTAN, qui est un élément vital de notre sécurité nationale.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette d'interrompre la députée, mais son temps de parole est écoulé.

M. Lee Morrison (Swift Current-Maple Creek-Assiniboia, Réf.): Madame la Présidente, je partagerai mon temps de parole avec le député d'Athabasca.

Comme mes collègues qui ont parlé avant moi, je suis très déçu qu'il ne s'agisse que d'un débat dont on prendra note. Il n'y a pas beaucoup de gloire à participer à une charade. Nous sommes ici pour donner un semblant de respectabilité à des décisions qui ont déjà été prises par le Cabinet et par des fonctionnaires de la Défense nationale. Ces décisions portent sur des questions de vie ou de mort pour des membres de nos forces armées.

Ce débat n'aurait pas dû être teinté d'esprit de parti. Il aurait fallu que nous puissions mettre nos différences idéologiques de côté pour discuter et présenter des arguments nous permettant d'arriver aux meilleures décisions possibles et voter librement sans l'intervention des whips. Cependant, ce n'est pas ce qui se passe.

(1800)

Le premier ministre et moi avons sensiblement le même âge. Ni l'un ni l'autre n'aurons jamais à nous servir d'un Armalite ou à marcher dans un champ de mines. Si, comme d'habitude, on demande à des hommes âgés-il y a surtout des hommes ici-de décider s'il faut envoyer des jeunes mourir dans un pays étranger, on pourrait au moins leur permettre de prendre une décision éclairée, mais le gouvernement refuse à l'opposition cette possibilité.

La séance d'information du 30 novembre n'était pas très informative, pour utiliser un euphémisme. Le malheureux officier à qui on avait confié la tâche d'animer cette séance n'était même pas en mesure de nous donner une approximation du nombre de soldats que le Cabinet avait décidé d'envoyer en mission. Il ignorait quel type de troupes le Canada enverrait et quelles seraient leur fonction et leurs objectifs à long terme. Dans ces circonstances, il ne semblait guère utile de lui demander comment les militaires seraient équipés ou à quel endroit notre armée appauvrie pourrait dénicher des armes à si brève échéance.

En dépit de mes objections à l'idée de remettre un chèque en blanc au Cabinet, je ne suis pas un isolationniste. Je crois que, au nom de la stabilité politique internationale et au nom de l'humanité, nous devons de temps à autre aider d'autres pays qui ont besoin d'aide. D'ailleurs, plus d'un an avant que l'ONU cesse finalement de temporiser et de bluffer, je préconisais déjà fortement les frappes


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aériennes tactiques contre les Serbes de Bosnie dans le but de protéger ce que l'on a appelé les zones de sécurité. La minuscule force de maintien de la paix insuffisamment armée était incapable d'intervenir sérieusement, mais l'utilisation d'une puissance aérienne supérieure était faisable. Quoi qu'il en soit, les frappes aériennes ont donné des résultats, mais il était déjà trop tard pour des milliers de civils.

Maintenant que les hostilités sont plus ou moins terminées et que la plupart des belligérants, épuisés, sont prêts à signer un accord de paix le 14 décembre, je crois qu'il serait utile de déployer des forces terrestres nombreuses et bien équipées pour rappeler aux trois parties que la guerre est finie. Les deux divisions proposées par l'OTAN devraient suffire, quoique rien ne le garantisse.

Je crois que le Canada doit jouer un rôle, mais lequel? Nous faisons face à un dilemme moral et matériel. Nous ne devons plus jamais envoyer de troupes mal équipées dans une zone de conflit. Nos soldats de la paix ont magnifiquement fait les choses en Bosnie malgré des approvisionnements et du matériel limités et parfois désuets. Toutefois, en raison des règles d'engagements plus rigoureuses proposées pour les forces de l'OTAN, les soldats canadiens pourraient devenir de la chair à canon et il ne s'agit pas là d'une crainte injustifiée. Mis à part le fait que le Canada n'est pas en mesure d'équiper rapidement et adéquatement d'importantes forces de combat, rien n'indique que notre pays jouera un rôle important dans le processus décisionnel militaire et politique, sauf sa participation à la définition des règles d'engagement.

Ni le ministre de la Défense nationale, ni le ministre des Affaires étrangères ne peuvent donner l'assurance aux Canadiens que, dans le cas où la mission tournerait mal, nos soldats ne seront pas soumis à des risques injustifiés à cause des décisions prises par d'autres pays. Le Canada n'est plus un intervenant de première importance au sein de l'OTAN et il a peu de chances d'y être traité comme tel. À cause de la détérioration de notre économie et de notre faiblesse militaire, nous ne pouvons pas nous attendre à être pris très au sérieux, en dépit de notre contribution aux missions antérieures de l'ONU.

L'OTAN a indiqué que cette mission serait une opération rapide et sale. Elle n'est censée durer que 12 mois. Cela paraît rassurant, mais quelles mesures précises sont prévues dans l'éventualité où, à l'expiration du délai magique, les troupes seraient engagées activement contre un ou plusieurs belligérants? Si le ministère de la Défense nationale ou le ministère des Affaires étrangères en ont la moindre idée, ils se gardent bien de le dire. La guerre ne peut être assujettie à un calendrier. Même si le MDN pouvait rassembler maintenant une force bien équipée et militairement importante, nous n'aurions pas les ressources pour la maintenir pendant une période prolongée et indéfinie.

(1805)

Bref, la participation du Canada à quoi que ce soit que le Cabinet propose de faire pourrait sauver des vies et contribuer à maintenir la stabilité politique dans le monde. Toutefois, vu les compressions faites par ce gouvernement et les gouvernements précédents au sein de nos forces armées et vu la lourdeur de la bureaucratie militaire et la surexploitation de nos troupes de combat, nous n'avons tout simplement pas la capacité de faire un effort efficace. Les hauts-gradés sont en trop grand nombre et les simples soldats en trop petit nombre. Notre pléthore de généraux et de colonels ne peuvent pas lancer leurs bureaux contre les Serbes.

Nous ne pouvons pas continuer de venir en aide au monde entier. C'est faux de le prétendre, c'est induire les gens en erreur. Si j'ai un avis à donner au gouvernement, c'est de se fonder sur son livre blanc de 1994. N'intervenons pas dans ce cas-ci. Restons dans la limite de nos moyens. Ne commençons pas une chose que nous ne pouvons finir.

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Madame la Présidente, permettez-moi d'abord de dire que je crois que nous devons participer à l'effort de maintien de la paix. Comme le député le mentionnait, la stabilité politique est très importante. Malgré les réticences exprimées par le député, si le Canada n'y participait pas, comme on reconnaît que c'est un architecte du maintien de la paix, beaucoup d'autres pays choisiraient de ne pas y participer.

Le député a mentionné que nous n'avions pas les ressources nécessaires pour faire un effort valable. Je me demande si lui ou son parti pourraient faire des suggestions quant au nombre de soldats que nous devrions envoyer et au type de matériel qu'on devrait leur offrir, plutôt que de miner les efforts du gouvernement qui essaie de jouer un rôle très utile, un rôle que nous nous sommes donné.

M. Morrison: Madame la Présidente, comme je le disais, il semble que le gouvernement veut donner un semblant de respectabilité à des décisions qu'il a déjà prises.

Le député a demandé combien de soldats nous devrions envoyer et comment nous devrions les équiper. Je préférerais qu'il nous dise combien le gouvernement a décidé d'en envoyer et comment il espère les équiper, parce qu'il ne possède tout simplement pas le matériel nécessaire. Nous n'avions pas le matériel nécessaire pour nos pauvres petites forces de maintien de la paix dotées d'une artillerie légère et de véhicules de transport désuets. Comment pourrions-nous donc parvenir à équiper une véritable force de combat?

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Madame la Présidente, si je ne savais pas vraiment à quoi m'en tenir ce matin, la situation me semble encore plus confuse maintenant.

Un député réformiste a déclaré plus tôt qu'il était en faveur des frappes aériennes. Lorsque nos gardiens de la paix étaient dans la région l'année dernière, le premier ministre a dû faire cesser les raids parce que nous avions des troupes sur le terrain. Les États-Unis n'en avaient pas, alors ils favorisaient les frappes aériennes. Le député affirme que nous ne voulons pas que nos soldats soient blessés, que nous ne voulons pas les ramener dans des sacs. Je ne sais plus quoi penser. Ils disent qu'il faut envoyer des avions pour bombarder ces gens. Pourraient-ils expliquer plus clairement leur position?


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Pour avoir plus de détails, ils n'avaient qu'à se rendre à la réunion d'information. Ils auraient pu donner leur avis. Ils n'ont pas voulu se déranger. Ils se contentent d'occuper leurs sièges et de critiquer. À mon avis, c'est un cas évident de revirement. Une journée on dit blanc et le lendemain on dit noir.

(1810)

M. Morrison: Madame la Présidente, je ne crois pas avoir vu le député à la réunion de non-information à laquelle nous avons assisté.

En ce qui concerne les frappes aériennes, je tiens à rappeler au député que nous avons obtenu l'accord presque unanime de la Chambre sur ce point la première fois que nous avons abordé la question. Ce n'est rien de nouveau. À ce moment-là, les députés de tous les partis ont admis clairement que cela soulevait la possibilité de pertes.

Personne ne dit que nos soldats sont incapables de se battre et qu'ils ne peuvent encaisser des pertes. Nous disons simplement qu'ils n'ont aucune arme pour se battre. Les libéraux voudraient les envoyer combattre les Serbes à mains nues; c'est impossible.

M. Fred Mifflin (secrétaire parlementaire du ministre de la Défense nationale et des Anciens combattants, Lib.): Madame la Présidente, je ne suis pas sûr de ce que vient de dire le député. Je pense qu'il a dit que la position du Parti réformiste n'était pas que nous ne devions pas envoyer de troupes au combat. Ce n'est certainement pas la position prise par le porte-parole du troisième parti. Au bout d'une demi-heure, j'ai fini par le lui faire avouer.

J'aimerais demander aux députés du troisième parti s'ils croient que les Forces canadiennes devraient être incapables de participer à tout conflit armé. À quoi servent donc les forces armées? À rester au Canada et à tirer la langue aux passants?

M. Morrison: Ce que j'aimerais savoir, c'est à quoi sert le ministre de la Défense? Les forces armées ne peuvent compter sur l'appui des politiciens et des bureaucrates qui sont censés être derrière elles. Elles n'ont pas d'équipement. Les libéraux veulent les envoyer se faire casser la figure. Je suggérerais aux députés d'en face, s'ils sont tellement courageux, de prendre leurs armes et d'aller en Bosnie.

Une voix: Bravo.

M. David Chatters (Athabasca, Réf.): Madame la Présidente, je suis très heureux de participer à ce débat, parce que j'ai une position assez unique sur cette question, étant donné que j'ai un fils dans les forces armées qui pourrait très bien faire partie de cette mission et pourrait aussi revenir dans un sac mortuaire si la situation tourne au désastre.

M. Collenette: Voilà un bel optimisme. Quelle belle bonne chose à dire.

M. Chatters: Voyez-vous, c'est que le ministre ne nous donne pas beaucoup de raisons d'être optimistes. C'est tout ce que je peux dire.

M. Collenette: Je suis heureux de ne pas être votre fils, car je n'aimerais guère entendre cela de la bouche de mon père.

M. Chatters: Je dirais que s'il avait le choix, il ne vous prendrait sûrement pas non plus comme ministre de la Défense.

M. Hoeppner: Combien avez-vous de fils là-bas? Dites-le nous.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Puis-je rappeler aux députés que les observations doivent être adressées à la présidence.

M. Hill (Prince-George-Peace River): Rappelez cela au ministre.

M. Chatters: Madame la Présidente, j'attends ce débat depuis plusieurs semaines, depuis que j'ai entendu le premier ministre annoncer qu'il y aurait un débat à la Chambre des communes avant toute décision. Je peux simplement dire que j'ai été extrêmement déçu de constater au cours des derniers jours que tout ce débat serait de la frime, de la poudre aux yeux, puisque les décisions ont déjà été prises. On sait non seulement que l'on enverra des troupes, mais on sait aussi combien.

Je suppose que dans quelque cinq ans, le vérificateur général sera en mesure de nous dire combien aura coûté cette opération, étant donné que le ministre de la Défense nationale, le ministère des Finances et le gouvernement n'ont aucune idée de combien cela va coûter ou du moins, ne sont pas prêts à nous le dire.

Le gouvernement connaît la structure de commandement des forces russes et qui sera en charge de ces troupes, mais il ne sait pas encore qui commandera les forces armées canadiennes et quelle sera sa structure de commandement. Cela ne nous donne guère confiance. De plus, l'arrogance que nous avons observée toute la journée chez les députés d'en face, qui nous défient sur cette importante question, est une insulte à la démocratie.

Je peux dire que le Parti réformiste s'inquiète, tout autant que les députés d'en face, des souffrances et des atrocités qui se produisent dans l'ex-Yougoslavie. Néanmoins, nous devons nous préoccuper d'abord et avant tout de nos fils et de nos filles, des Canadiens en mission. Ce que me préoccupe, c'est que le gouvernement enverrait mon fils et ses compagnons sur le théâtre de la guerre sans les équiper comme il faut et sans les doter d'un commandement adéquat. C'est une pensée vraiment atroce.

(1815)

Au commencement de ce débat, nous avons demandé au gouvernement et aux ministres de saisir le Parlement d'une proposition où seraient expliqués clairement les critères du Canada et la nature de la mission. Nous avons également demandé au gouvernement de faire connaître la structure de commandement et la place que les soldats et les commandants canadiens occuperaient dans cette structure.

Comme il en a déjà été question lors de débats antérieurs sur ce thème, alors même que nous formions une des principales forces engagées dans l'opération de maintien de la paix dans l'ancienne Yougoslavie, nous ne pouvions absolument pas nous prononcer sur des décisions qui touchaient directement nos troupes. Nous ne


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voulons pas que ça se répète. Nous souhaitons pouvoir prendre des décisions et faire partie de la structure de commandement.

Nous avons également demandé au gouvernement de saisir le Parlement de la question des règles d'engagement. Qu'arrive-t-il quand certains de ces criminels de guerre sont arrêtés et mis en garde à vue? Qu'arrive-t-il quand nos soldats canadiens se trouvent face à face avec ces individus et qu'ils doivent abattre l'un d'entre eux pour faire respecter le mandat qui leur a été confié?

À ma connaissance, on n'a pas touché un mot là-dessus. Nous avons posé des questions à ce sujet et au sujet de la durée de la mission. On a parlé de 12 mois, et puis voilà que l'on raconte qu'à la fin de cette période le mandat va être confié à quelque organisation fictive, que nos soldats vont devoir se replier et que le pouvoir sera transféré à d'autres.

On a du mal à imaginer que d'ici 12 mois on pourra tenir des élections démocratiques et que l'on disposera d'une structure gouvernementale capable auquel on pourra passer le contrôle de la situation.

Nos députés ont fait état des problèmes que nos forces de maintien de la paix ont eu à affronter dans l'ancienne Yougoslavie, nos soldats n'ayant même pas suffisamment de casques de combat. Ils savent sûrement comment les porter, comment différencier l'avant de l'arrière, mais s'ils n'en possèdent pas il leur est difficile de les porter d'une façon ou d'une autre.

Nous avons également entendu parler des transports de troupes blindés, ces cercueils sur roues dans lesquels se promenaient nos soldats, ainsi que des efforts déployés pour les blinder afin qu'ils puissent transporter, en toute sécurité, nos soldats. Une fois les opérations de blindage terminées, ils étaient si lourds qu'ils n'avaient pas suffisamment de puissance pour monter les collines à cause du poids qu'ils transportaient. Il y a eu toutes sortes d'histoires d'horreur et il s'agissait d'une opération de maintien de la paix. Il est évident que nos vis-à-vis ne semblent pas comprendre la différence. Il n'est pas question d'une mission de maintien de la paix, mais bien d'une mission de combat.

Je crois que nous posons beaucoup de questions raisonnables susceptibles de faire l'objet d'un débat et de discussions à la Chambre. Nous espérions ensuite que le Parlement aurait la chance de tenir un vote libre sur les questions discutées et de prendre une décision démocratique au nom de nos électeurs en fonction de ce vote.

Une voix: Nous prenons des décisions démocratiques avec lesquelles vous n'êtes pas d'accord de toute façon. Vous perdez le vote et vous vous plaignez ensuite.

M. Chatters: Oui, nous savons tout de vos décisions démocratiques.

Je suis vraiment déçu et très inquiet pour le bien-être de nos jeunes que notre gouvernement envoie maintenant en ex-Yougoslavie où ils seront peut-être appelés à combattre. Dans ma famille, nous avons une très longue tradition de participation, avec fierté, dans les forces militaires du Canada, puisque nous avons servi durant la Seconde Guerre mondiale et durant la guerre de Corée et maintenant, mon fils, est dans les Forces canadiennes et joue le rôle de soldat de la paix. Mon fils et moi sommes vraiment embarrassés par ce que les gouvernements libéraux ont fait depuis 30 ans à l'armée canadienne, qui a déjà été une des organisations les plus fières du monde, dont nous avions bien raison de nous enorgueillir.

(1820)

Nous doutons beaucoup de la capacité du gouvernement d'envoyer ce type de bataillon de combat sur place, de lui fournir le matériel nécessaire pour s'acquitter de son rôle et de prévoir un roulement régulier des soldats pour éviter l'épuisement au combat et les problèmes auxquels nous avons été confrontés dans le cadre de notre mission de maintien de la paix en Yougoslavie.

Je le répète, étant donné que certains de nos soldats ont eu quatre périodes de service dans l'ancienne Yougoslavie et étant donné tous les problèmes qui s'en sont suivis pour les familles et les enfants de ces gens qui ont dû aller là-bas, on s'inquiète vivement de notre capacité de faire cela et, en même temps, de préserver un semblant de structure familiale pour les gens en cause.

Je tiens à dire une fois de plus que je suis vraiment déçu. Je souhaiterais que le gouvernement soit honnête et donne une chance à la démocratie, à la Chambre.

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Madame la Présidente, ce soir, les trois partis qui ont participé à cette discussion ont utilisé l'expression «ancienne Yougoslavie». Permettez-moi de la clarifier. L'ancienne Yougoslavie signifie un territoire composé de pays nouvellement formés, en commençant par la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine et l'ancienne République de Macédoine.

Il serait absurde d'utiliser l'expression «ancienne Union Soviétique» pour parler de la Lettonie. Je demanderais aux députés d'utiliser les noms appropriés. Ces pays sont membres des Nations Unies.

M. Chatters: Madame la Présidente, je ne crois pas qu'il s'agisse vraiment d'une question.

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, je vous remercie de me donner l'occasion de prendre la parole et de traiter de certaines préoccupations clés que. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Nous sommes toujours à la période de questions et d'observations.

M. Bevilacqua: J'en suis conscient et je ferai une observation de sept minutes.

Ce débat porte sur deux choses: d'abord, le récent accord de paix de Dayton, à la lumière des efforts constants de la communauté internationale pour apporter une paix et une sécurité durables dans les Balkans et, ensuite, le soutien que le Canada peut apporter aux efforts de paix en participant à une force d'intervention militaire multinationale placée sous le commandement de l'OTAN.

Comme les Canadiens de partout, les habitants de York-Nord veulent que cette crise soit réglée. Ils ont regardé des civils de toutes les origines souffrir inutilement dans ce conflit. Ils ont vu des compatriotes canadiens risquer leur vie en participant à des missions humanitaires. Ils considèrent l'accord de paix de Dayton


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comme une lueur d'espoir et appuient la participation du Canada à une force de mise en oeuvre.

Le Canada est depuis longtemps un participant actif sur la scène mondiale. Au printemps 1945, le Canada et 49 autres pays se sont réunis pour rédiger et adopter la Charte des Nations Unies, un organisme international créé en vue de prévenir les conflits militaires.

Depuis cette date, le Canada joue un rôle important et influent dans la bonne marche des Nations Unies.

(1825)

Après tout, c'est notre très honorable Lester B. Pearson qui a présenté au monde la notion de maintien de la paix, en réponse à la crise de Suez de 1956. Ses efforts lui ont valu le prix Nobel de la paix.

Le Canada a pris part à presque toutes les opérations de maintien de la paix des Nations Unies depuis 1956 et à beaucoup d'autres missions en dehors de cette organisation. Depuis le 1er novembre 1995, plus de 1 600 soldats participent à 13 missions, de sorte que le Canada se situe au sixième rang pour l'envoi de troupes.

Ma question est simple: pourquoi le Parti réformiste tente-t-il de briser cette tradition canadienne très importante qui consiste à venir en aide à un pays au cours d'une crise majeure?

M. Chatters: Madame la Présidente, ni aucun de mes collègues ni moi ne remettons en question l'histoire passée des Forces canadiennes. Nous nous sommes maintes fois distingués au combat et nous serions prêts à le faire de nouveau.

Les membres des forces armées sont là parce qu'ils acceptent d'accomplir ces missions. Par ailleurs, ils ne peuvent pas y arriver si le gouvernement ne leur en donne pas les moyens.

Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement libéral a traité les Forces canadiennes de façon vraiment scandaleuse. Ne commencez pas à laisser entendre que nous tenons nos forces armées en moins grande estime que vous ou que nous en sommes moins fiers.

Il est temps de joindre l'acte à la parole, d'accroître les fonds et de fournir le matériel. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Malheureusement, je dois rappeler encore une fois au député de bien vouloir formuler ses observations par l'entremise de la présidence. Il reste à peine un moment pour que le député de Scarborough-Centre fasse un bref commentaire.

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Madame la Présidente, la véritable démocratie, c'est de pouvoir débattre de cette importante question à la Chambre.

J'ai fait allusion précédemment à la volte-face. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais il y a un recours au Règlement.

M. Mills (Red Deer): Monsieur le Président, comme il ne reste plus beaucoup de temps, je voudrais demander au député de solliciter le consentement unanime de la Chambre pour prolonger. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais je croyais que vous posiez une question au secrétaire parlementaire.

M. Milliken: Madame la Présidente, je suis heureux de répondre à la question du député. Il y a eu des consultations. J'en ai discuté avec le ministre de la Défense nationale. Nous serons très heureux de prolonger le débat après la tenue du vote prévu pour 18 h 30 ce soir.

Nous serions disposés à prolonger le débat de deux heures, jusqu'à 21 heures, pourvu que pendant la période de prolongation, il n'y ait ni motion dilatoire ni demande de quorum et qu'on ne mette aucune autre question en délibération ni aucune autre motion aux voix sauf la question faisant l'objet du débat.

Nous serions très heureux de prolonger ainsi le débat de deux heures si cela convient au député. Je crois comprendre que beaucoup d'autres députés veulent participer au débat.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Y a-t-il consentement unanime pour prolonger le débat jusqu'à 21 heures, aux conditions énoncées par le secrétaire parlementaire?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je rends la parole pour le reste du temps au député de Scarborough-Centre.

M. Cannis: Madame la Présidente, il est merveilleux de pouvoir débattre de cette question très importante; c'est la démocratie à son meilleur.

Je parlais de volte-face. Le parti qui fait volte-face, le Parti réformiste, affirme que nos troupes ne sont pas bien équipées et ne sont pas préparées. J'ignore d'où lui vient cette impression. Il pense que nous allons envoyer nos troupes là-bas, mal équipées et mal préparées. C'est une fausse impression. Si le Parti réformiste pense que des dépenses s'imposent, accorde-t-il son appui au ministre pour en faire? Une fois l'argent dépensé, le Parti réformiste viendra sans doute reprocher au ministre d'avoir fait des dépenses au lieu de les réduire. Quelle est donc sa position?

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 18 h 30, conformément à l'article 45 du Règlement, la Chambre procédera maintenant au vote par appel nominal différé à l'étape de la deuxième lecture du projet de loi C-110, Loi concernant les modifications constitutionnelles.

* * *

LA LOI CONCERNANT LES MODIFCATIONS CONSTITUTIONNELLES

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 1er décembre, de la motion: Que le projet de loi C-110, Loi concernant les modifications constitutionnelles, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.


17176

La présidente suppléante (Mme Maheu): Convoquez les députés.

(La motion, mise aux voix, est adoptée.)

(Vote no 388)

POUR

Députés
Adams
Alcock
Allmand
Anderson
Arseneault
Assad
Assadourian
Augustine
Axworthy (Winnipeg South Centre/Sud-Centre)
Bakopanos
Barnes
Bélair
Bélanger
Bellemare
Bertrand
Bethel
Bevilacqua
Bhaduria
Blondin-Andrew
Bodnar
Bonin
Boudria
Brown (Oakville-Milton)
Brushett
Bryden
Caccia
Calder
Campbell
Cannis
Catterall
Chamberlain
Chan
Clancy
Cohen
Collenette
Collins
Cowling
DeVillers
Dhaliwal
Discepola
Duhamel
Dupuy
Easter
Eggleton
English
Finestone
Finlay
Flis
Fontana
Fry
Gaffney
Gagnon (Bonaventure-Îles-de-la-Madeleine)
Gallaway
Gerrard
Godfrey
Goodale
Graham
Gray (Windsor West/Ouest)
Grose
Guarnieri
Harb
Harper (Churchill)
Harvard
Hopkins
Hubbard
Ianno
Iftody
Irwin
Jordan
Keyes
Kirkby
Knutson
Kraft Sloan
Lastewka
LeBlanc (Cape/Cap-Breton Highlands-Canso)
Lee
Lincoln
Loney
MacDonald
MacLellan (Cape/Cap-Breton-The Sydneys)
Malhi
Maloney
Manley
Marchi
Martin (LaSalle-Émard)
Massé
McCormick
McGuire
McKinnon
McLellan (Edmonton Northwest/Nord-Ouest)
McTeague
McWhinney
Mifflin
Milliken
Mills (Broadview-Greenwood)
Minna
Mitchell
Murphy
Murray
Nault
O'Brien
O'Reilly
Pagtakhan
Parrish
Patry
Payne
Peric
Peters
Peterson
Phinney
Pickard (Essex-Kent)
Pillitteri
Proud
Reed
Richardson
Rideout
Ringuette-Maltais
Rock
Scott (Fredericton-York-Sunbury)
Serré
Shepherd
Sheridan
Simmons
Skoke
Speller
St. Denis
Steckle
Stewart (Brant)
Stewart (Northumberland)
Szabo
Telegdi
Terrana
Thalheimer
Torsney
Ur
Valeri
Vanclief
Verran
Volpe
Walker
Wells
Whelan
Wood
Young
Zed-145

CONTRE

Députés
Ablonczy
Althouse
Asselin
Axworthy (Saskatoon-Clark's Crossing)
Bachand
Bélisle
Bellehumeur
Benoit
Bergeron
Bernier (Gaspé)
Blaikie
Breitkreuz (Yellowhead)
Brien
Brown (Calgary Southeast/Sud-Est)
Caron
Chatters
Chrétien (Frontenac)
Crête
Cummins
Dalphond-Guiral
de Jong
de Savoye
Deshaies
Dubé
Duceppe
Dumas
Duncan
Epp
Fillion
Gagnon (Québec)
Gauthier
Godin
Grey (Beaver River)
Grubel
Guay
Hanger
Harper (Calgary West/Ouest)
Harper (Simcoe Centre)
Hart
Hill (Prince George-Peace River)
Hoeppner
Jacob
Lalonde
Landry
Langlois
Laurin
Lavigne (Beauharnois-Salaberry)
Lefebvre
Leroux (Richmond-Wolfe)
Leroux (Shefford)
Loubier
Manning
Marchand
Martin (Esquimalt-Juan de Fuca)
McClelland (Edmonton Southwest/Sud-Ouest)
Ménard
Mercier
Meredith
Mills (Red Deer)
Morrison
Nunez
Paré
Picard (Drummond)
Ramsay
Ringma
Rocheleau
Sauvageau
Schmidt
Solberg
Solomon
Speaker
St-Laurent
Stinson
Strahl
Taylor
White (Fraser Valley West/Ouest) -76

DÉPUTÉS «PAIRÉS»

Bernier (Mégantic-Compton-Stanstead)
Bouchard
Canuel
Cauchon
Copps
Culbert
Daviault
Debien
Dingwall
Gagliano
Graham
Guimond
Hickey
Lavigne (Verdun-Saint-Paul)
Lebel
Leblanc (Longueuil)
MacAulay
Maclaren
Marleau
Pomerleau
Robichaud
Tremblay (Rimouski-Témiscouata)

D (1855)

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je déclare la motion adoptée. En conséquence, le projet de loi est renvoyé au Comité permanent de la justice et des questions juridiques.

(Le projet de loi, lu pour la deuxième fois, est renvoyé au comité.)


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LES BALKANS

La Chambre reprend l'étude de la motion.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Conformément à un ordre adopté aujourd'hui, la Chambre reprend l'étude de la motion no 27, à la rubrique des initiatives ministérielles.

M. Maurizio Bevilacqua (secrétaire parlementaire du ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Madame la Présidente, je vous remercie de me permettre de prendre ici la parole au sujet de cette question importante.

Je voudrais rappeler quelques-unes des importantes questions que j'ai soulevées plus tôt. Ce débat porte essentiellement sur deux choses: d'abord, l'accord de paix conclu récemment à Dayton grâce aux efforts continus qu'a déployés la communauté internationale pour réaliser une paix et une sécurité durables dans les Balkans; ensuite, l'appui de ces efforts par le Canada au moyen d'une participation à la force d'intervention militaire multinationale sous le commandement de l'OTAN.

Comme tous les autres Canadiens, les électeurs de York-Nord souhaitent la résolution de cette crise. Ils ont vu des civils des deux camps souffrir inutilement. Ils ont vu de leurs compatriotes canadiens risquer leur vie dans le cadre de missions humanitaires. Ils considèrent l'accord de paix de Dayton comme une lueur d'espoir. Ils appuient la participation du Canada à la force d'intervention.

Le Canada s'occupe depuis longtemps du maintien de la paix au plan international. Nous savons que, grâce à l'autorité du très honorable Lester B. Pearson, qui a proposé la notion de maintien de la paix au monde en réponse à la crise du canal de Suez, en 1956, nous sommes, en fait, les chefs de file mondiaux en la matière.

En effet, le Canada a participé à presque toutes les missions de maintien de la paix des Nations Unies depuis 1956 et à beaucoup d'autres missions ne relevant pas de l'ONU. Au 1er novembre 1995, plus de 1 600 de nos militaires étaient déployés dans 13 missions du genre, ce qui place le Canada au sixième rang pour ce qui est du nombre de militaires contribués.

Depuis que la Guerre froide est terminée, la nature des conflits a changé. Ils sont devenus plus régionaux et plus complexes. Le besoin de forces de maintien de la paix s'accroît au lieu de décroître. Les forces de maintien de la paix, dont la mission était à l'origine de surveiller le cessez-le-feu, travaillent maintenant au maintien et au rétablissement de la paix, livrant l'aide humanitaire, surveillant le déroulement des élections et relevant les atteintes aux droits de la personne.

Les parties au conflit dans l'ancienne Yougoslavie veulent la paix. Elles ont combattu et souffert pendant plusieurs années. Elles en ont assez du carnage et elles sont disposées à poursuivre leurs objectifs par la négociation et des moyens politiques. Elles ont signé un accord complexe fixant les compromis et les plans d'ensemble qu'elles sont prêtes à accepter.

Après plus de quatre années d'âpres combats, la paix va peut-être régner finalement dans l'ancienne Yougoslavie. Les habitants de la région ont subi de terribles épreuves. Il sera peut-être impossible d'évaluer leurs souffrances ou leurs pertes. Les effets de ce conflit se feront sentir encore pendant des années. Les citoyens resteront profondément marqués, eux qui ont été témoins des atrocités de la guerre, qui ont vu leurs êtres chers mourir dans leurs bras, mourir de conditions aussi simples et faciles à prévenir que la faim, l'hypothermie et la déshydratation.

La terre a été mutilée par toutes ces années de guerre. Les bombes, les déversements de produits chimiques, les mines et la négligence ont fait de grands ravages. L'infrastructure a disparu. L'électricité n'a été rétablie que très récemment à Sarajevo. Les routes, les immeubles et les égouts ont été fortement endommagés. Les installations que nous, Canadiens, jugeons essentielles doivent être reconstruites.

L'un des éléments essentiels de tout processus de paix exigeant l'intervention de troupes de maintien de la paix est certes le fait que l'intervention militaire doit être appuyée par une démarche politique solide et viable. Dans l'ancienne Yougoslavie, nous avons amorcé un bon processus de paix. L'accord de paix de Dayton trace clairement la voie vers une nouvelle réalité politique devant mettre un terme aux combats et au conflit dans cette région.

Sur le plan militaire, il faut une brève période de stabilité pour que les mesures politiques qui ont été approuvées puissent être appliquées. La communauté internationale a posé les jalons d'un bon processus de paix. L'accord de paix de Dayton trace clairement la voie vers une nouvelle réalité politique devant mettre un terme aux combats dans cette région.

(1905)

L'accord prévoit, entre autres, la tenue d'élections nationales d'ici neuf mois. La tenue d'élections libres représenterait un progrès énorme dans l'ex-Yougoslavie. Des élections véritablement démocratiques, d'où sortiraient vainqueurs un gouvernement et un chef appuyés et choisis par la population, contribueraient grandement à renforcer la cohésion du pays.

Toutefois, pour tenir des élections libres, il faut pouvoir compter sur la stabilité, la liberté de circulation et la liberté d'information. Il faut neutraliser près de quatre ans de guerre et de haine. Il faut que les bases soient jetées pour que des élections puissent se tenir. Une façon d'assurer le succès des élections consiste à offrir à la population un engagement envers la sécurité personnelle.

Les efforts du Canada dans le rétablissement de la paix dans l'ex-Yougoslavie sont considérables. Depuis quatre ans, le Canada joue un rôle important au sein de la communauté internationale pour régler le problème de la guerre dans l'ex-Yougoslavie. Ces efforts ont été déployés principalement dans le cadre des Nations Unies et de l'OTAN. Les militaires canadiens n'ont pas fait que prévenir que les conflits ne s'étendent aux autres secteurs de la région et ne s'enveniment, ils sont sauvé d'innombrables vies en participant à la


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distribution de secours humanitaires et en prévenant des attaques plus massives contre les populations civiles.

En septembre 1991, le Canada a été le premier à demander au Conseil de sécurité de l'ONU d'intervenir. Depuis lors, le Canada a fourni l'un des plus importants contingents aux forces de l'ONU dans l'ex-Yougoslavie. À l'instar du mandat des forces de l'ONU pendant le conflit, la mission des troupes canadiennes a changé en cours de route. Les fonctions de ces dernières sont passées des fonctions plus traditionnelles de maintien de la paix, comme la surveillance de cessez-le-feu, à des fonctions plus délicates, telles que l'établissement de ponts aériens humanitaires, la réfection d'écoles et l'appui aux travailleurs d'hôpitaux.

Le processus de paix entrant dans une nouvelle phase, les forces canadiennes sont prêtes, s'il le faut, à servir de force de mise en oeuvre. La plan de la force de mise en oeuvre prévoit le recours à un personnel de quelque 60 000 personnes. Ce plan couvre les aspects militaires de l'accord de paix négocié à Dayton. Il sera mis en oeuvre après l'adoption, par le Conseil de sécurité de l'ONU, d'une résolution autorisant la mission. Les objectifs de la force de mise en oeuvre sont les suivants:

Premièrement, veiller au respect des aspects militaires de l'accord de paix. Cela comprendrait, notamment, le retrait des troupes de leurs territoires respectifs, tels qu'énoncés dans l'accord, et l'établissement des lignes de démarcation convenues de ces forces.

Deuxièmement, créer des conditions sécuritaires pour le retrait des forces de l'ONU actuellement en place.

Troisièmement, créer des conditions sécuritaires pour la conduite d'autres tâches non militaires liées à l'accord de paix. L'ONU, l'Union européenne et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe compteront parmi les organismes qui se chargeront des fonctions civiles. Nos alliés de l'OTAN participeront, à l'exception de l'Islande, qui n'a pas de forces armées. Parmi les pays non membres de l'OTAN, 19, y compris la Russie, ont déclaré être disposés à contribuer.

Enfin, le plan prévoit le remplacement de la force de mise en oeuvre par une force composée de pays non membres de l'OTAN après douze mois. Ce remplacement aurait lieu même si l'accord de paix n'a pas été pleinement mis en oeuvre. La population de l'ex-Yougoslavie considère l'accord de paix de Dayton comme une lueur d'espoir. La participation canadienne à la force de mise en oeuvre permettra à cette lueur d'espoir de briller.

(1910)

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Madame la Présidente, je suis très heureux que le débat ait été prolongé. S'il ne l'avait pas été, je n'aurais pu exprimer mon opinion sur cette question.

Beaucoup de députés s'intéressent vivement à ce qui se passe en Bosnie, en Croatie et dans d'autres États de l'ex-Yougoslavie. Dans ma circonscription, bien des gens ont des parents qui ont participé à de nombreuses opérations de soutien des Nations Unies depuis le début du conflit. Dans la région de Dartmouth-Halifax, où se trouve la base de la marine canadienne sur la côte est, bien des gens ont servi à bord des navires qui ont offert un soutien logistique dans l'Adriatique. Bien des gens du Canada atlantique ont aussi participé à de nombreuses missions en Bosnie.

Le député d'Athabasca expliquait tout à l'heure qu'il était peut-être dans une situation unique parce que son fils pourrait être au nombre des personnes appelées à servir. Sa situation est peut-être unique de ce point de vue, mais bon nombre d'entre nous, moi y compris, avons des parents qui sont dans les Forces armées canadiennes.

Mon frère Paul a participé, en tant que béret bleu, à une mission de paix sous la direction de l'ONU au Cambodge. C'était une mission très difficile. Il n'y avait pas de factions en guerre à ce moment-là, mais la situation politique était extrêmement instable dans ce pays. C'était difficile pour sa famille et pour sa fiancée de l'époque, mais il a servi fièrement en portant le béret bleu des Nations Unies et en tant que membre des Forces armées canadiennes.

Mon neveu, Neil Bernard MacKinnon, a participé à deux ou trois affectations en Bosnie. C'était un jeune homme au début de la vingtaine. Lorsqu'il nous rendait visite, mon père qui a participé à la Seconde Guerre mondiale disait que Neil Bernard avait, durant son aventure en Bosnie, connu la vie de tranchées plus que lui lors de la campagne d'Italie de la Seconde Guerre mondiale. Ce jeune homme a consacré sa vie au service des Forces armées canadiennes. C'est avec fierté qu'il a servi en Bosnie, dans un contexte très difficile. Le malheur, c'est qu'il a perdu la vie au printemps dernier, non pas en Bosnie, mais ici au Canada, lors d'une séance d'entraînement à Suffield. Cet incident fait actuellement l'objet d'une enquête.

Les histoires que Neil Bernard nous a racontées sur son service en Bosnie, sur la tragédie humaine qui s'est jouée là-bas et sur le rôle important des soldats canadiens sous les couleurs de l'ONU dans cette antichambre de l'enfer-c'est ainsi qu'il m'a un jour décrit la Bosnie-comptent parmi les meilleurs souvenirs que je garde de lui.

Il est important que notre débat de ce soir ne tourne pas à vide. J'ai entendu beaucoup de discours creux aujourd'hui. J'ai aussi vu trop d'esprit de parti. Nous parlons des hommes et des femmes qui ont choisi de servir le Canada en s'engageant dans les Forces armées canadiennes. Nous les avons envoyés en Bosnie à une époque où il n'y avait pas de paix à faire respecter et ils ont apporté une aide humanitaire à la population locale. Certains ont été blessés, certains ont été tués, d'autres encore sont marqués à jamais par ce qu'ils ont vu, mais il reste qu'ils sont allés là-bas parce qu'il croyaient en l'engagement de Pearson en faveur de l'aide humanitaire et du maintien de la paix sous l'égide des Nations Unies.

Au cours de la 34e législature, nous avons tenu un débat sur les Nations Unies et sur ses résolutions concernant la crise du golfe Persique. Je me souviens très bien d'être intervenu dans le débat. Il ne portait pas sur un sujet aussi précis que celui d'aujourd'hui. Le gouvernement de l'époque ne voulait pas que nous parlions de l'engagement de nos troupes dans les hostilités si jamais la guerre éclatait. La motion nous demandait simplement d'appuyer les résolutions des Nations Unies. Je me souviens que j'attendais mon tour pour parler de cette motion. Il y avait une longue liste d'orateurs. Je voulais prendre la parole parce que je savais que, si la guerre éclatait et que le gouvernement canadien s'engageait à envoyer des troupes,


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des hommes et des femmes de ma circonscription, de mon quartier, certains dont les enfants allaient l'école avec les miens, seraient envoyés là-bas.

(1915)

En tant que député, je voulais que tout le monde soit bien conscient du danger que représentait une telle mission dans le golfe Persique. J'ai appuyé la décision prise par le gouvernement à ce moment-là. J'ai appuyé ce que faisait le Parlement, et le gouvernement canadien devait appuyer les membres des forces armées canadiennes.

C'est un peu différent cette fois-ci. On nous demande si nous devrions continuer ou non, maintenant que nous avons l'accord de paix de Dayton, de fournir des troupes pendant une période d'un an durant le processus d'établissement de la paix en Bosnie.

Les membres des forces armées canadiennes ont certes été durement touchés au cours des années par les compressions budgétaires, par le manque d'équipement qu'ils jugeaient nécessaire, mais je n'ai jamais parlé à un seul membre de nos forces armées qui n'était pas prêt à aller faire le travail qu'il a choisi de faire lorsqu'il s'est engagé. Si cela veut dire protéger la souveraineté de notre pays, ils sont prêts à le faire. Si cela veut dire maintenir ou essayer d'établir la paix dans un pays étranger, ils sont prêts à le faire également.

Je prends la parole aujourd'hui pour dire que j'appuie la participation du gouvernement canadien à l'IFOR en Bosnie, et je ne le fais pas à la légère. Je le fais en sachant fort bien, comme l'a dit le député d'Athabasca, qu'une telle mission comporte des dangers. Les députés doivent en être conscients lorsqu'il prennent la parole pour ou contre une motion pareille.

Je suis également convaincu que nous ne pouvons plus demander au personnel des Forces armées canadiennes de faire plus avec moins. Pendant la guerre du golfe Persique et depuis 1991 en Bosnie, nous avons demandé aux hommes et aux femmes des forces armées de faire beaucoup plus qu'ils ne le pouvaient compte tenu des ressources dont ils disposaient.

Je suis de ceux qui croient que les Forces armées canadiennes ne pourront préserver la formidable réputation internationale dont jouit le Canada pour ses efforts en faveur du maintien et de l'établissement de la paix que si nous leur donnons l'équipement nécessaire pour en faire les forces armées les mieux équipées au monde.

Je trouve inquiétant d'entendre parler de compressions budgétaires constantes. Je trouve également inquiétant que nos forces armées ne disposent pas toujours du matériel adéquat, mais je suis également inquiet lorsque j'entends parler les députés du tiers parti, le Parti réformiste, qui veulent gagner sur tous les tableaux. À deux ou trois reprises au cours du débat, les réformistes ont reproché au gouvernement d'avoir permis la tenue d'un débat, ce qui est honteux, et ils se sont opposés à l'envoi de troupes en faisant valoir qu'elles ne sont pas adéquatement équipées.

Peu m'importe ce que peut dire le ministre de la Défense nationale ou ce que peut dire le ministre des Finances au sujet de la nécessité de réduire le déficit. Des membres des Forces armées canadiennes n'ont pas les ressources nécessaires pour accomplir ce qu'on leur demande.

Je le dis ici, je le dis en public et je continuerai de le répéter même si certains députés de mon parti n'aiment pas me l'entendre dire. Au moins, je ne suis pas un hypocrite. J'ai de la suite dans les idées. J'en ai depuis sept ans que je suis ici.

Ce que je voudrais que les députés d'en face, que quelqu'un du Parti réformiste me dise, c'est s'ils sont en faveur d'envoyer des troupes là-bas. Ils devraient le dire. Si c'est à la condition qu'assez de fonds soient prévus dans le budget pour leur acheter de nouveaux hélicoptères afin de remplacer les Sea King, je serai le premier à dire, je suis d'accord avec vous. Si c'est pour accélérer l'acquisition de véhicules blindés qui a été annoncée, je serai d'accord avec eux, même si cela coûte un peu plus d'argent. Si c'est pour l'achat de nouveaux sous-marins afin de remplacer les anciens qui ne fonctionnent plus tellement ils sont vieux, je serai d'accord avec eux.

J'aimerais qu'ils fassent preuve de clarté et d'honnêteté intellectuelle dans un débat comme celui-ci. Les hommes et les femmes des forces armées canadienne méritent mieux que tous ces beaux discours politiques quand il s'agit pour la Chambre des communes de débattre d'une motion visant à décider s'ils vont ou non participer à des missions internationales, surtout quand il y a risque de blessure, voire de mort.

(1920)

J'appuie l'initiative du gouvernement, mais je veux que le gouvernement s'assure que les troupes que nous envoyons là-bas aient les ressources dont elles ont besoin pour remplir la mission qu'on leur confie.

M. Keith Martin (Esquimalt-Juan de Fuca, Réf.): Madame la Présidente, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole au cours de cet important débat sur la Bosnie et sur le rôle du Canada dans le règlement de ce grave problème géopolitique.

La région a connu quatre années de guerre sans merci. Deux millions de personnes ont été déplacées. Plus de 200 000 ont été tuées. Maintenant, grâce à Dieu, nous avons le plan de paix de Dayton. C'est une initiative bien reçue. Toutefois, il y a une chose que nous devons bien comprendre: ce plan de paix est fragile. Ce n'est qu'un début. La communauté internationale doit se rendre compte que le plan de paix de Dayton donne au monde l'occasion d'instaurer une paix durable en Bosnie, mais que c'est loin d'être fini.


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À long terme, l'histoire nous a appris qu'on ne peut faire la paix avec un fusil. Il faut que les habitants des lieux prennent eux-mêmes des mesures de pacification. Chaque fois qu'une guerre civile déchire un pays, comme ce fut le cas en Bosnie, on récolte des dissensions ethniques et de l'intolérance, et le risque d'un conflit futur demeure élevé. Le seul moyen que nous ayons de combattre ces problèmes, c'est de participer aux initiatives de pacification conçues à l'intention des différents groupes ethniques qui doivent se partager la région.

Voyons un peu le scénario qui nous attend. Le calendrier de 12 mois qui a été établi par le commandement suprême allié n'est qu'une fantaisie. Les gens de cette région y resteront beaucoup plus longtemps. Nous devons nous assurer que nous ne nous mettons pas dans une situation semblable à celle de Chypre au milieu de l'Europe. Nous devons comprendre que la population serbe-bosniaque n'est pas forte, avec Radovan Karadzic et le général Mladic qui disent qu'ils saigneront certaines parties de l'ancienne Yougoslavie, plus précisément Sarajevo. Ces hommes sont des éléments qu'il faut neutraliser.

L'alliance croato-musulmane qui existe maintenant est fragile, c'est le moins qu'on puisse dire. Nombreux sont ceux qui ont tendance à oublier qu'il y a deux ans, ces deux groupes s'entre-déchiraient à l'intérieur des frontières de la Bosnie. Il y a beaucoup à faire pour réparer les pots cassés. La Fédération de Bosnie, dans sa forme actuelle, est aussi fragile, avec deux fédérations réunies dans un même pays. Elle va éclater. Reste à savoir si elle éclatera en deux ou en trois régions, avec un groupe croate-bosniaque-musulman et un groupe bosniaque-serbe ou avec les Croates et les Musulmans divisés en deux groupes. À mon avis, la Bosnie va éclater en au moins deux ou trois groupes. Il est important de nous assurer que cela se fasse par voie diplomatique plutôt qu'à coups de fusil d'assaut.

Il y a beaucoup à faire et IFOR nous en donne l'occasion. Il faut déployer des troupes, mais il n'est pas nécessaire qu'elles soient canadiennes. Je crois qu'il y a moyen de contourner la situation. L'Union européenne a une force de 50 000 hommes qui n'a encore jamais fait ses preuves. Cette force est bien armée et bien équipée. La force européenne pourrait se faire les dents en Bosnie sous le commandement de l'OTAN, sous sa forme actuelle. Ce serait une expérience dont on pourrait tirer des leçons applicables aux futures initiatives de consolidation de la paix.

Le Canada a fait sa part. Ses forces armées ont fait un travail admirable en ex-Yougoslavie. Nos troupes ont besoin de se reposer. Elles ont besoin de faire une pause et d'être rééquipées.

La Bosnie fera sécession. Comme je le disais, nous voulons nous assurer qu'elle le fasse pacifiquement.

Je crois que le Canada peut y contribuer, non pas en envoyant des troupes, mais en s'assurant que les initiatives de consolidation de la paix sur le territoire bosniaque continuent. Nous pouvons envoyer des ingénieurs pour reconstruire l'infrastructure: les hôpitaux, les routes, les ponts et le reste. Nous pouvons également avoir recours aux ONG et à des groupes de civils en vue de la consolidation de la paix et de l'établissement de ponts au sein de la population civile de cette région. C'est un domaine dans lequel nous sommes bons et nous pourrions ainsi contribuer au processus de consolidation de la paix dans l'ex-Yougoslavie sans avoir à y envoyer des troupes.

(1925)

La prospérité économique est absolument essentielle au processus de consolidation de la paix. Le simple fait d'imposer la paix avec une force d'intervention internationale ne signifie pas qu'il y aura la paix à l'avenir. Contribuer au développement des infrastructures et des économies, de façon que les habitants de la région puissent subvenir à leurs besoins, est absolument essentiel au processus de consolidation de la paix.

Une des choses que nous pouvons faire, c'est neutraliser Radovan Karadzic et le général Mladic en leur retirant la source de leur pouvoir. La population de Sarajevo a peur, les Serbes de Bosnie en particulier. Si nous pouvons contribuer à leur prouver qu'ils seront en sécurité, nous enlèverons au général Mladic et à M. Karadzic un terrain fertile et nous les empêcherons de réenflammer la situation volatile qui existe en Bosnie actuellement.

Je dirais que nous devrions maintenir l'embargo sur les armements et continuer le processus de démilitarisation qui doit se produire dans l'ex-Yougoslavie si l'on veut mettre fin à une situation difficile.

Je dirais cependant que la participation des troupes européennes est quelque chose qui est attendue depuis trop longtemps, que la communauté européenne n'a pas assumé ses responsabilités dans l'ex-Yougoslavie. Lorsqu'elle a reçu le mandat d'essayer de désamorcer la situation, de neutraliser les précurseurs de conflit qui étaient là, elle a tourné le dos et elle a fait l'autruche. Il est grand temps que l'Europe contribue à cette initiative, contribue à la force d'intervention.

Notre contribution en tant que pays, pour montrer que nous respectons nos engagements pour la sécurité en Europe, pour montrer à nos alliés de l'OTAN que nous sommes résolus à maintenir la sécurité en Europe, pourrait se limiter à l'envoi d'ingénieurs ou encore à la participation d'ONG civiles qui pourraient avoir des initiatives de consolidation de la paix sur le terrain. Tout ce qu'il faut faire, c'est regarder ce qui se passe au Moyen-Orient pour voir que la paix doit se construire sur des bases économiques également.

À plus grande échelle, je demanderai au ministre des Affaires étrangères de travailler avec notre ministre de la Défense nationale à mettre sur pied une politique étrangère canadienne de longue durée sur la façon d'empêcher que de tels conflits ne se produisent. Cela signifie notamment que nous devrions déterminer quels sont les précurseurs de conflits, en prendre note et, de concert avec les


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organisations internationales, veiller à ce que ces précurseurs entraînent des réactions prévisibles, reconnaissables et concrètes.

Comme d'autres conflits à travers le monde, celui de l'ex-Yougoslavie était entièrement évitable. Les signes étaient très clairs en 1987, mais la communauté internationale a choisi de ne pas les voir. Si nous avions pris des mesures à ce moment-là, nous aurions pu prévenir des centaines de milliers de morts, le déplacement de millions de personnes et une tragédie humaine si terrible qu'aucun de nous ne peut vraiment la comprendre.

Notre pays peut jouer un rôle de chef de file car c'est l'un des rares pays sur la planète qui, au sein de la communauté internationale, possède le pouvoir de persuasion nécessaire pour convaincre nos voisins du Sud de mettre sur pied le vaste cadre de consolidation de la paix, de pacification et de prévention des conflits qui s'impose.

En plus des Nations Unies, nous pourrions aussi faire appel aux grandes institutions financières internationales à titre de leviers économiques non militaires et peu dispendieux, qui contribueraient à la prévention en dissuadant les divers groupes à risque de s'engager dans les conflits et en incitant tous les groupes à opter pour la paix au lieu d'emprunter la route de la guerre.

Je remercie les députés d'avoir autorisé la prolongation du débat et j'espère que ce débat d'aujourd'hui nous permettra d'apporter une contribution efficace non pas nécessairement grâce à nos troupes de combat, mais grâce à ces initiatives de paix où le Canada excelle.

M. John Richardson (Perth-Wellington-Waterloo, Lib.): Madame la Présidente, je siège à la Chambre et j'écoute. Cela me rappelle quelqu'un qui marche sur une lame de rasoir et qui a peur de glisser. Je pense que c'est ce que font les députés d'en face. Qu'est-ce qu'ils entendent par sécurité collective? La personne à droite sera là lorsqu'on en aura besoin. C'est une question de confiance. On croit que quelqu'un va faire ce qui s'impose. Je pense que le tiers parti met vraiment à côté de la plaque dans tout ce débat en essayant de se faire des amis d'un côté et de l'autre.

(1930)

Je veux savoir si le député comprend la notion de sécurité collective au sein de l'OTAN.

M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Madame la Présidente, nous comprenons ce qu'on entend par sécurité collective. J'ai précisé très clairement dans mon discours que la paix dans l'ex-Yougoslavie passait par un certain nombre de voies. Une des solutions consiste à avoir recours à des unités de combat.

Comme son collègue l'a mentionné tout à l'heure, nos troupes éprouvent des problèmes à cause d'un manque de matériel et du fait de la fréquence des périodes d'affectation en ex-Yougoslavie. Les soldats sont très fatigués et ont besoin de repos.

Quoi qu'il en soit, le Canada peut apporter une contribution utile. J'ai notamment parlé d'ingénieurs militaires qui pourraient participer à la mise sur pied de l'infrastructure voulue en Bosnie. En effet, si les gens de la Bosnie ne peuvent pas compter sur l'infrastructure nécessaire, si leur économie ne leur offre pas les moyens de subvenir à leurs besoins essentiels, on sèmera alors tous les germes de conflits futurs.

L'IFOR n'est qu'un pis-aller. Il y a une réserve de soldats qu'on n'utilise pas à l'heure actuelle, une réserve de soldats dans la sphère d'influence de la Bosnie. Je veux parler des forces de l'Union européenne.

Je le répète, les Européens ont 50 000 soldats. On ne les utilise pas nulle part et ils sont bien équipés. Quel meilleur endroit pourrait-on choisir pour leur donner la possibilité de mettre à l'essai leurs techniques et leur entraînement que l'ex-Yougoslavie, la Bosnie d'aujourd'hui? Ils peuvent le faire dans un environnement contrôlé, sous la direction de soldats aguerris qui sont là maintenant, les Américains, les Français et les Britanniques. Ils pourraient apprendre les techniques et les outils nécessaires pour devenir une force efficace de pacification, ainsi que de consolidation et de maintien de la paix.

À l'avenir, j'espère que les troupes de l'Union européenne pourront assumer un rôle de leadership pour ce qui est de veiller à ce que l'IFOR poursuive son mandat et qu'on continue d'assurer en Bosnie une paix non pas à court terme, mais à long terme. Il ne faut pas qu'on assiste à nouveau aux brutalités dont nous sommes témoins depuis cinq ans.

Nous devons contribuer à cela. Nous pouvons faire participer les populations civiles au processus de pacification en ex-Yougoslavie. Comme je l'ai mentionné dans mon discours, plusieurs possibilités s'offrent à nous sur ce plan.

M. Ron MacDonald (Dartmouth, Lib.): Madame la Présidente, j'ai déjà eu à croiser le fer avec ce député. Il est en général assez catégorique quand il adopte une position.

Je lui demande de se montrer catégorique. Le député vient de m'entendre exprimer on ne peut plus clairement mon appui. Ce qui me préoccupe, c'est de savoir si, par le truchement du processus budgétaire, les forces armées canadiennes obtiennent les ressources nécessaires pour se doter du meilleur matériel qui soit afin d'accomplir la tâche que nous leur confions.

Je demande au député d'en face une question qui le concerne personnellement. Qu'il oublie son parti. Il sait ce que j'ai dit de son parti et de sa position. Qu'il me dise si, oui ou non, il est d'accord avec l'idée que les Forces canadiennes participent à l'IFOR. Oui ou non?

Le député d'en face croit peut-être que c'est la tribune idéale pour discuter des moindres détails de ce que serait la mission des forces armées canadiennes là-bas. Il devrait savoir que ces détails seront arrêtés en collaboration avec les autres membres de cette force collective.

L'appuie-t-il, avec ou sans réserves, oui ou non?


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M. Martin (Esquimalt-Juan de Fuca): Madame la Présidente, si nous avions des précisions sur ce qu'on exigera des troupes canadiennes dans l'ex-Yougoslavie, nous serions en mesure de faire une déclaration plus catégorique.

La contribution du Canada au processus de paix en Bosnie consistera peut-être à confier à nos ingénieurs militaires le soin d'élaborer l'infrastructure nécessaire, sans participation de nos troupes de combat à l'IFOR.

(1935)

J'espère que c'est très clair: n'envoyons pas nos troupes de combat à l'IFOR; contribuons plutôt à la sécurité européenne, contribuons à l'effort de nos alliés en vue de rétablir la paix en Bosnie grâce à des méthodes non militaires, à l'emploi de nos ingénieurs, à des initiatives propres à réaliser la paix, à l'emploi de nos troupes non combattantes et de groupes non militaires que l'on trouve au Canada, d'ONG, de groupes composés de civils, etc.

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je suis heureux ce soir de faire connaître ma position sur le rôle du Canada pour maintenir la paix en Bosnie. Je tiens d'abord à remercier nos troupes canadiennes.

Même si elles ont eu mauvaise presse ces dernières années, à cause de certains mauvais éléments ou de certains incidents causés par des gens indignes de porter l'uniforme de soldats canadiens, même si le leadership de la Défense nationale laisse beaucoup à désirer actuellement, même si le gouvernement réagit de façon totalement incorrecte au manque de véritable leadership et même si nos forces n'ont pas toujours reçu l'appui nécessaire de la part du gouvernement en place, je rends hommage au courage, à la retenue et au professionnalisme dont font preuve nos militaires sur le terrain. Nos Casques bleus n'ont jamais manifesté plus de retenue qu'en Bosnie et ils n'ont jamais suscité autant d'admiration. Les Canadiens sont reconnus partout dans le monde pour les contributions qu'ils ont faites dans cette partie du monde.

Les Canadiens jouissent d'une réputation exceptionnelle pour le sens de la justice et la compassion que leurs militaires ont manifesté ailleurs aussi. Un Canadien qui travaille pour Vision mondiale au Rwanda et en Somalie, et qui a été chaque jour en contact avec nos soldats n'a eu que des louanges à leur égard. Il nous a dit que nos soldats allaient toujours au-delà de leurs strictes fonctions à l'égard de Canadiens ou de gens natifs de ces régions. C'est une observation que l'on entend souvent.

Cependant, selon certains rapports qui circulent sur nos militaires, il y aurait de graves problèmes de moral dus aux déploiements rapides et successifs en Croatie et en Bosnie. Des soldats seraient épuisés par suite de trois ou quatre périodes de service d'affilée. En raison de leur professionnalisme, ils sont prêts à retourner sur le terrain sans hésiter si on le leur demande.

La question dont nous sommes saisis ce soir est la suivante: Devrait-on le leur demander? Il n'y a pas de meilleure place qu'à la Chambre pour poser cette question. Je rappelle aux Canadiens que le premier ministre et le ministre de la Défense ont déjà pris la décision d'envoyer des soldats dans l'ex-Yougoslavie. Par conséquent, la Chambre des communes n'a guère son mot à dire dans ce dossier. Tout ce que les députés peuvent faire c'est de se lever et d'exprimer leur frustration. Cela était évident dans les propos des ministériels, qui disent: «Appuyez-nous. Nous ne savons pas si nous avons les troupes ou le matériel nécessaires, mais appuyez quand même notre décision». Tout cela est très frustrant.

On empêche les députés d'apporter une contribution réelle, ce qui est contraire à la recommandation faite l'an dernier par le comité mixte spécial sur l'examen de la politique de défense, portant que: «le gouvernement ne devrait pas engager nos forces armées dans des missions à l'étranger sans tenir un débat parlementaire complet, et sans rendre compte d'une telle décision. Nous nous attendons à ce que, sauf circonstances extraordinaires, un tel débat ait toujours lieu avant un tel déploiement».

En d'autres mots, un débat devrait se tenir avant que la décision ne soit prise. Tant pis pour les recommandations du comité mixte spécial.

Plus tôt cette année, la Chambre a discuté d'un projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai déposé, le projet de loi C-295. Cette mesure, qui portait sur le maintien de la paix, aurait imposé des limites raisonnables au rôle du Canada. Elle aurait exigé que le Parlement approuve toute participation à des missions telles que celle dont nous discutons ce soir. Ce projet de loi stipulait aussi que le gouvernement devait donner à la Chambre une idée des coûts et de la durée de la mission, de même que du rôle des troupes canadiennes, avant de prendre un engagement ferme. Sauf erreur, ce sont précisément les questions que se posent les Canadiens aujourd'hui, mais le gouvernement ne leur fournit pas de réponses. Je ne vais pas signer ou approuver un chèque en blanc, parce que le gouvernement n'a pas répondu à ces questions.

Je veux souligner quelques points importants, particulièrement aux gens de la Base des Forces canadiennes Chilliwack, dans ma circonscription. Le premier point est évident, à savoir qu'il ne s'agit pas d'une mission de l'ONU, mais bien d'une opération de l'OTAN, qui n'est pas un organisme de maintien de la paix. C'est une organisation qui, à l'origine, a été créée pour défendre l'Europe face à des agresseurs. Nous faisons partie de cette organisation. Nous comprenons la notion de sécurité collective.

Toutefois, l'opération envisagée n'est pas une mission traditionnelle de maintien de la paix. Il faut bien comprendre cela. Il s'agit d'une mission d'imposition de la paix, menée par l'OTAN, et non du genre de mission à laquelle le Canada participe habituellement sous l'égide de l'ONU. Le ministre de la Défense nationale a déjà dit que les participants à cette mission seraient bien armés pour assumer un rôle de combattants et que les forces de l'OTAN pourraient être les premières à tirer et pourraient répondre à toute attaque avec une force écrasante. Auparavant, les autorités américaines ont dit que cette force serait plus méchante qu'un chien de garde dans un entrepôt de ferrailleur. Il ne s'agit donc pas d'une force de maintien de la paix.


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(1940)

Compte tenu aussi du ton quelque peu belliqueux adopté par certains dirigeants bosniaques, qui ont d'emblée répudié l'accord signé à Dayton, en Ohio, je pense que l'on peut s'attendre à de sérieux affrontements. On comprendra que nos militaires sont mal à l'aise de jouer un rôle comme celui-là quand ce n'est pas pour défendre leur propre patrie.

Ils se posent des questions comme les suivantes: Que ferions-nous si une escalade de nos moyens d'intervention s'imposait en Bosnie? Disposons-nous de ce qu'il faut pour équiper nos forces convenablement? Sommes-nous prêts à augmenter la mise, au risque de voir des militaires canadiens tués par balle ou par l'explosion de mines terrestres ou encore prise en otage et humiliés par des gens déterminés à empêcher la paix de régner? J'ai assisté, dans ma circonscription, aux funérailles d'un soldat canadien qui était en mission en Bosnie. Je comprends d'où vient cette préoccupation au sujet de ce qu'il convient d'appeler l'escalade du rôle de nos militaires.

Il est également question que l'OTAN contribue au réarmement de la Bosnie. Les gens se demandent si c'est la place du Canada de prendre partie, d'aider à armer diverses factions qui s'affrontent dans un conflit et de jouer un rôle dans la sélection des gagnants et des perdants. D'aucuns estiment que cela attise les conflits au lieu de les éteindre. Le Canada a travaillé trop fort pour établir sa réputation internationale de pacifiste pour risquer maintenant de compromettre sa neutralité en prenant une part active dans des conflits.

Nous ne savons pas non plus quel est le but de cette mission, si ce n'est que très vaguement. Or, l'OTAN prétend qu'elle va essayer de stabiliser la situation d'ici un an, mais qu'elle refilera ensuite le problème à quelqu'un d'autre, un entité inconnue qui sera chargée d'empêcher les adversaires de s'affronter. Qui cela pourrait bien être? Personne ne le sait exactement, mais, si le passé est garant de l'avenir, je dirais que les forces de l'OTAN risquent de rester là-bas indéfiniment.

Parce que l'année qui vient est une année électorale aux États-Unis, de très fortes pressions vont s'exercer pour que les militaires américains plient bagage et rentrent chez eux à la fin de l'année. Quelqu'un devra alors rester derrière pour garder la paix. Qui? Lorsque j'étais chez nous en fin de semaine, j'ai parlé à un haut gradé des Forces canadiennes. Il m'a dit que quand il est allé en Chypre il y a 30 ans, la mission était censée durer un an. Nous savons tous ce qui s'est passé. Nous avons passé 30 ans là-bas et nous ne voulons pas répéter l'expérience.

Dans un contexte plus général, le Canada a également déclaré qu'il était disposé à contribuer à une force permanente d'intervention rapide, qui constituerait en quelque sorte une armée permanente de l'ONU. Je sais qu'il s'agit d'une autre question, mais si cela se produisait, d'autres militaires canadiens se retrouveraient à l'extérieur des forces de combat sous commandement canadien.

Je me demande parfois où les dirigeants de notre pays nous amènent. Je ne suis pas certain qu'ils comprennent que nous n'avons pas un nombre illimité de soldats à prêter à l'ONU ou à l'OTAN tout en essayant d'équiper et de doter nos forces armées de façon qu'elles puissent remplir nos autres rôles militaires de façon convenable.

Quel sera le coût de cette mission? Au cours des trois dernières années, nous avons dépensé 800 millions de dollars dans l'ex-Yougoslavie. Au cours de l'année qui vient, nous devrions nous attendre à dépenser 200 millions de dollars supplémentaires, mais ce ne sont que des conjectures, car le gouvernement refuse de nous révéler les chiffres. Nous lui avons demandé de nous faire part des chiffres, des coûts, du rôle, etc., de cette opération, mais il refuse. Fait intéressant, si nous fournissons plus de soldats à l'OTAN, nous en aurons moins pour les forces sous commandement onusien dans les années à venir, et il y aura sans doute d'autres demandes en ce sens.

Je voudrais réitérer l'idée du député réformiste. Nous pourrions soutenir de manière persuasive que le Canada est tenu de servir au sein de l'OTAN mais sans nécessairement jouer un rôle de combat de façon active. Nous pourrions jouer un rôle de soutien en envoyant des ingénieurs militaires, comme il a été mentionné plus tôt, en fournissant des services sur le terrain ou des services d'approvisionnement, en constituant un réseau de renseignement, etc. Il y a des choses que nous pouvons faire en dehors du rôle de combat.

Participer au combat de façon active, réarmer seulement certains segments de la population, outrepasser notre mandat onusien traditionnel, est un grand pas, quand je ne vois même pas le résultat visé par le gouvernement. Sans un débat national efficace, nous sommes sur le point d'affecter des militaires épuisés et démoralisés, pour les raisons que j'ai mentionnées tout à l'heure, à une mission de combat dangereuse et très risquée sans objectifs, ni calendriers, ni estimation des coûts, et peut-être même sans matériel adéquat. Cela est-il sage?

On dit que prudence est mère de sûreté; nos dirigeants nationaux devraient faire preuve de prudence dans cette situation en refusant de participer au combat.

(1945)

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Madame la Présidente, à une époque plus cynique et insensible que la nôtre, Bismarck a un jour laissé tomber que les conflits des Balkans ne valaient pas la vie d'un seul grenadier prussien.

Dans les dépositions que j'ai faites à la Commission des affaires étrangères de la Chambre des représentants des États-Unis le 12 août 1992 et le 3 août 1993-témoignages qui ont été publiés dans les annales du Congrès à ces deux dates-j'ai fait remarquer que, vu la dislocation imminente de la République fédérale de Yougoslavie, créée dans le cadre du règlement de paix adopté par les vainqueurs au lendemain de la Première Guerre mondiale, il serait sage de remonter aux traités originaux de Versailles, en 1919, et plus précisément au traité de Saint-Germain-en-Laye, qui a créé la Yougoslavie, pour assurer une transition ordonnée et pacifique et éviter les pertes de vie et la misère dans la population civile de la région.

Aujourd'hui, après trois ans et après la mort de 250 000 civils, il semble que nous soyons arrivés au résultat que nous aurions pu obtenir en appliquant les processus du droit international prévus dans les traités de Versailles, y compris le recours obligatoire à la


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Cour internationale de Justice en cas d'impasse au sujet des frontières.

C'est à notre ministre des Affaires étrangères et ancien premier ministre, Lester Pearson, que nous devons l'idée de mission de maintien de la paix sous l'égide de l'ONU. Depuis, nous avons atteint la phase de la maturité grâce à l'expérience de l'ONU en ex-Yougoslavie, la mission de Bosnie-Herzégovine se transformant rapidement d'une mission de maintien de la paix classique-qui consiste simplement à séparer physiquement les belligérants qui ont déjà accepté un cessez-le-feu, et ces opérations relèvent du chapitre VI de la charte sur le règlement de conflits-et une nouvelle conception de maintien plus actif de la paix, relevant cette fois du chapitre VII de la charte.

Le Canada a déjà tellement fait qu'il est devenu une partie inhérente du règlement des problèmes de succession de l'ère postcommuniste en Yougoslavie, et il doit maintenir le cap.

Des mesures sont toutefois possibles pour compenser ou atténuer les dangers de notre engagement dans la nouvelle phase de l'opération, relevant cette fois de l'OTAN, et pour veiller à ce que les décisions soient compatibles avec le droit international et protégées par lui, et à ce qu'elles soient logiques sur les plans politique et géopolitique.

Tout d'abord, il faut reconnaître que l'OTAN, comme organisation de sécurité régionale relevant du chapitre VIII de la charte des Nations Unies, tire son autorité en droit international de la charte des Nations Unies, et ne peut outrepasser cette autorité. Des questions comme le droit de légitime défense et son exercice de nos jours peuvent être actualisées ou redéfinies en droit international contemporain par le Conseil de sécurité et aussi par l'Assemblée générale, par l'interprétation de la doctrine classique et de la jurisprudence, comme l'a confirmé la décision rendue en 1992 par la Cour internationale de Justice dans l'affaire Lockerbie.

L'OTAN n'a cependant pas le pouvoir de se soustraire aux exigences actuelles du droit international, et les commandants de l'OTAN et leurs dirigeants politiques agiraient à leurs risques et périls juridiques s'ils ne s'en remettaient pas au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale au cas où surgiraient de nouveaux faits politiques remettant en question l'accord politico-militaire auquel on est présentement parvenu.

Un de ces problèmes éventuels tient évidemment aux futures relations des deux principales composantes de la nouvelle entité bosniaque, la république croato-musulmane de Bosnie et la république serbe de Bosnie, avec les États originaire limitrophes, la Croatie et le reste de la Yougoslavie, c'est-à-dire la Serbie-Montenegro.

L'accord politico-militaire actuel présente un élément de transition historique inhérent, et on peut s'attendre à des pressions irrédentistes en faveur d'un rattachement ultime aux États originaires limitrophes.

Ce serait une erreur de la part de l'OTAN que de considérer de telles questions, si elles devaient se présenter, comme étant de nature purement militaire et exigeant uniquement une décision militaire de l'OTAN. Le bon sens politique et la prudence conseillent de se conformer à ce que le droit international enjoint de faire de toute façon, c'est-à-dire renvoyer les questions hautement politiques au Conseil de sécurité et à l'Assemblée générale, qui prendront la décision définitive.

De même, quelles que soient les dispositions que le haut commandement de l'OTAN souhaiterait prendre, le droit international exige que les décisions militaires de l'OTAN soient soumises aux Nations Unies pour y recevoir leur approbation et leur justification finales.

En adhérant à la nouvelle force d'intervention de l'OTAN en Bosnie, le gouvernement canadien pourrait attacher des réserves appropriées, en confirmant, en ce qui concerne les forces canadiennes, la primauté des Nations Unies dans le cadre des organisations régionales de sécurité autorisées en vertu du chapitre VIII de la Charte des Nations Unies.

(1950)

Cela étant entendu, nous pouvons et devrions appuyer la poursuite de la participation canadienne au processus de paix en Bosnie, qui, après quatre longs hivers, semble enfin ouvrir la perspective de la primauté du droit, de la paix et de la sécurité élémentaire pour les habitants de cette région du monde dont l'histoire a toujours été agitée.

M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Madame la Présidente, c'est pour moi un honneur de participer au débat que tient la Chambre pour décider si nous devons envoyer de nouveau des militaires dans les Balkans pour aider à mettre en oeuvre l'accord de paix récemment conclu à Dayton, en Ohio.

Nous devons premièrement nous demander si nous devons y retourner. Devrions-nous renvoyer dans cette région nos soldats qui ont déjà si bien fait, qui ont fait preuve d'une grande compétence et d'un grand professionnalisme et qui ont fait la fierté du Canada et des Canadiens, grâce à l'aide humanitaire qu'ils ont pu apporter aux malheureux de cette région?

Nous militaires ont participé à de nombreuses opérations dans cette région et bien des députés réformistes estiment que nous en avons fait assez. Nous avons donné. Mettons un terme à nos efforts. Nous avons contribué. Restons-en là.

À l'instar de nombreux Canadiens, j'aurais pu appuyer ce point de vue si les choses n'avaient pas changé. Mais les choses ont énormément changé depuis environ deux mois. Les conditions dans l'ensemble de cette région ont beaucoup évolué.

On nous a expliqué à la Chambre les conditions de l'accord de paix conclu à Dayton, en Ohio. Je ne vois pas la nécessité de réexaminer les conditions et les paramètres de cet accord.

L'accord n'est pas parfait, mais le gouvernement serbe,M. Milosevic en tête, s'est engagé à le respecter. Il y aura des problèmes à Sarajevo. Il y aura des problèmes dans d'autres régions, mais le gouvernement serbe s'est engagé à respecter l'ac-


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cord, tout comme diverses autres administrations locales. Il est évident que, sans une forme quelconque d'intervention active de la part de forces de l'extérieur, chargées de veiller à la mise en oeuvre du traité de paix, il serait impossible de rétablir la paix dans cette région du globe.

Ce que nous devrions nous demander, c'est s'il faut intervenir maintenant et donner une chance à la paix. Faut-il écouter le président Clinton, qui a énuméré l'autre soir à la télévision les raisons pour lesquelles il est, pour la première fois, disposé à engager les troupes américaines dans cette grande entreprise?

Faut-il reconnaître l'énorme contribution passée et présente des États-Unis à cette cause et de ce qu'elle va changer? Faut-il donc prendre le risque, car risque il y a? Toute entreprise digne de ce nom comporte des risques.

Il me semble que c'est ici une entreprise où les risques courus sont compensés par la certitude raisonnable d'une meilleure possibilité que jamais auparavant d'assurer la paix, si l'on songe, par exemple, à la sécurité de nos troupes, une question dont ont beaucoup parlé les députés du tiers parti.

Il me semble que la sécurité de nos troupes est maintenant de beaucoup meilleure à ce qu'elle était auparavant. Chaque fois que nous avons débattu de cette affaire, les députés du tiers parti ont soutenu que nous ne devrions pas exposer nos troupes, car elles n'ont aucun moyen de se défendre. Nos militaires se trouvent dans la situation impossible et affreuse où ils peuvent être pris en otages, mais où ils ne peuvent pas se défendre.

Nous allons les renvoyer là-bas bien équipées. Nous les envoyons là-bas en compagnie de 20 000 membres des forces armées les plus importantes aux mondes, soit celles des États-Unis d'Amérique, avec les armes les plus modernes au monde et avec l'autorisation de se défendre s'ils sont attaqués.

À mon sens, leur situation est bien meilleure qu'elle ne l'était jusqu'ici. Cela me rassure, en tant que parlementaire, de savoir que nos troupes iront là-bas dans ces circonstances et non dans celles qui régnaient auparavant.

Si nos militaires devaient retourner là-bas dans les mêmes conditions qu'avant, je ne serais pas d'accord. Mais ce n'est pas le cas. Leur situation est aujourd'hui moins précaire.

(1955)

Voyons seulement la situation avec laquelle les pays des environs composent, ainsi que la détermination de la Croatie et de la Serbie. Tous les pays de la région participent à l'effort. Nous avons maintenant l'assurance qu'il est possible d'empêcher que cette guerre ne s'étende.

Il est légitime de renvoyer nos troupes dans ces circonstances. Cela confirme les objectifs globaux de notre politique dans cette région et partout ailleurs, objectifs qui consistent à fournir une aide humanitaire efficace et à assurer l'évolution d'un effort multilatéral de maintien de la paix qui est directement axé sur la sécurité et la paix dans le monde. Dans le cadre de l'examen de la politique mené conjointement par le Sénat et la Chambre des communes, nous avons beaucoup insisté sur la nécessité pour le Canada de participer aux efforts multilatéraux de maintien de la paix, parce qu'ils sont garants de l'avenir de la planète. C'est à ce niveau que le Canada peut jouer un rôle et que sa participation est nécessaire.

Enfin, cela nous permet de respecter notre engagement à défendre les droits de la personne dans ces régions, lesquels ne sauraient être respectés en l'absence de paix, de sécurité et de stabilité. Sans cela, le discours sur les droits de la personne est vide de sens. Cela nous permet de participer à la mise en place des conditions présidant au respect des droits de la personne dans cette région.

Notre participation a déjà pris cette forme auparavant. Nous n'avons pas seulement participé par l'envoi de membres des forces armées dans la région. Nous avons aussi envoyé des représentants de la GRC qui, dans le cadre d'une mission axée sur les services de police, ont instauré un climat de stabilité, de paix et de sécurité dans de petits secteurs, permettant ainsi à la population de bénéficier de la justice et d'un traitement équitable.

Nos organisations non gouvernementales ont fourni une aide alimentaire et aidé des gens à se réinstaller et à tenter de reprendre une vie normale. Cela ne peut s'accomplir que dans les régions où la paix est instaurée et où une certaine forme de sécurité est garantie par des troupes. Voilà ce que vont faire nos militaires.

Je crois que nous devons appuyer cette initiative. Nous devons exhorter le gouvernement à prendre part à tout plan global auquel participent nos alliés de l'OTAN. Notre contribution à pareil plan peut être importante. Il est dans notre intérêt d'instaurer la paix dans cette région. Cela donne une crédibilité au processus multilatéral de maintien de la paix. En participant à ce processus, le Canada peut faire une contribution importante au monde d'aujourd'hui.

[Français]

Pour conclure, j'aimerais dire que cette initiative correspond aux intérêts canadiens et aux valeurs canadiennes. Ce sont nos intérêts, parce que nous avons un intérêt dans la paix et dans l'aide humanitaire et nous pouvons être fiers de ce que nous avons fait déjà et de ce que nous ferons dans ce domaine. Cela correspond à nos valeurs, parce que nous avons les valeurs d'une société qui est juste, équitable et paisible.

Nous voulons contribuer à un monde où ces valeurs prévalent et non des valeurs de la guerre et de l'agression. Nous nous devons, je crois, de participer à cette initiative et il y a de bonnes chances qu'elle réussisse et que nous puissions contribuer énormément à cette réussite. Je suis très fier de parler en faveur de cette initiative du gouvernement.

[Traduction]

M. Chuck Strahl (Fraser Valley-Est, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais remercier le député de ses observations. Je sais qu'il est très bien informé. En sa qualité de président du comité des


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affaires étrangères, il est dans le secret des dieux. Il connaît tous les détails inconnus du commun des mortels.

Je sais qu'il pense que le troisième parti n'est pas, pour une raison ou pour une autre, favorable à l'envoi de troupes à l'étranger. Mais s'il pouvait seulement saisir le sens de l'argument. Il dit que les troupes seront en bien meilleur état cette fois-ci, quand nous les enverrons là-bas, parce qu'elles seront bien mieux équipées pour se défendre en cas d'agression. J'espère que c'est le cas. C'est certainement ce que je demande depuis la fois où j'ai vu un des nôtres attaché à une clôture en mailles de chaîne. Je voulais qu'elles soient mieux équipées et mieux en mesure de se défendre.

(2000)

Le député ne peut-il pas comprendre que c'est ça le problème? Il dit, et il le sait peut-être parce qu'il fait partie du petit cercle bien informé, que nous allons avoir un meilleur équipement, que nous allons pouvoir mieux nous défendre, etc. Cependant, tout ce que nous voulons savoir, c'est ce que nous allons faire une fois rendus là-bas. Qu'allons-nous envoyer? Vingt F-18? Des tanks? Nous n'avons pas de tanks, alors je suppose que ce ne sera pas des tanks. Allons-nous leur donner des catalogues du magasin Eaton en guise de gilets pare-balles pour ne pas se faire exploser les entrailles? Qu'allons-nous faire?

Nous voulons simplement avoir une liste de ce que nous allons envoyer là-bas pour que nous sachions que l'on prend bien soin de nos troupes. C'est tout. Si le député sait des choses qui ne figurent pas dans la motion, qu'il le dise. Il se pourrait bien alors que nous votions en faveur de la motion. Cependant, lorsque tout ce qu'il nous dit, c'est qu'il espère que nos soldats arriveront bien et que, une fois sur place, ils pourront attacher un drapeau canadien au canon d'une pétoire datant de la Seconde Guerre mondiale en espérant qu'ils ne seront pas massacrés, nous ne marchons pas. Il nous faut de meilleures assurances que cela avant d'envoyer nos militaires là-bas.

Si le gouvernement veut nous rassurer, qu'il nous dise comment seront équipés nos militaires. Ils n'auront pas de tanks, parce que nous n'en avons pas. Auront-ils des sous-marins?

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Nous n'en avons pas.

M. Strahl: Nous n'avons pas de sous-marins. Qu'auront-ils alors? Pourquoi le gouvernement est-il si sûr que nous sommes en mesure de prendre soin de nous-mêmes? Ne pourrait-il pas nous dire tout simplement quel équipement nous envoyons? Nous envoyons un nombre inconnu de soldats pendant une durée indéterminée, à un coût inconnu, avec on ne sait trop quel matériel pour remplir une mission dont on ne sait pas grand chose, aux termes d'une résolution dont on ne sait pas plus et le gouvernement voudrait que nous applaudissions. Ce n'est vraiment pas mon avis.

Si le gouvernement nous disait seulement ce que nous allons faire, peut-être pourrions-nous appuyer sa motion.

M. Graham: Madame la Présidente, il est facile de réduire à l'absurde des arguments de ce genre. Le député croit-il sérieusement que nous allons parachuter nos troupes là-bas sans armes, sans équipement? C'est absolument ridicule.

Cela me rappelle ce que les députés du Bloc québécois disaient cet après-midi. Ils disaient: «Nous sommes d'avis que nous devrions participer. Nous reconnaissons que nous avons une obligation à cet égard. Nous reconnaissons que nous devrions être là, mais nous n'aimons pas le fait que le premier ministre n'a pas fait ceci ou n'a pas parlé d'abord à M. Clinton», ou quelque chose du genre. Nous pouvons toujours trouver des raisons.

De quoi est-il question ici? Il est question de participer à une mission de l'OTAN, une mission qui sera totalement sécuritaire à cause de la participation des États-Unis et où nous serons capables de jouer un important rôle de soutien.

Je ne crois pas que ce soit à nous d'essayer de faire le travail des généraux, de décider ce qui se passera exactement sur le terrain. Y aura-t-il trois chars d'assaut, deux avions de transport militaire, quatre mitraillettes? Ce n'est pas là le rôle des députés.

Les députés savent que nos forces armées sont équipées pour faire le travail qu'on leur demandera de faire. Nous savons qu'on ne nous envoie pas là-bas sans protection. Nous savons que nous allons participer à une entreprise énorme et compliquée qui, grâce à l'effort de collaboration des troupes de l'OTAN et des alliés, sera couronnée de succès.

Il est tout à fait irresponsable de laisser entendre que nous allons envoyer des gens là-bas sans l'équipement ni la préparation nécessaires, sans compter que cela ne tient pas compte de ce que nous avons été capable de faire jusqu'à maintenant. Cela ne tient pas compte de la qualité de nos forces armées.

En tant que député, je ne m'attends pas à ce que le gouvernement me fournisse la liste de tous les pelotons et de toutes les armes qui seront déployés là-bas. Ce à quoi je m'attends, c'est une décision fondée sur le bon sens et sur une compréhension des besoins stratégiques et militaires. D'après ce que le ministre de la Défense a dit ce matin lorsqu'il a ouvert ce débat et d'après ce que le premier ministre a dit jusqu'à maintenant, nous avons cette compréhension. Alors passons à l'action et cessons de soulever des préoccupations futiles qui ne sont en réalité qu'une excuse pour essayer d'échapper à notre devoir.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je voudrais réfuter rapidement ce que le député vient de dire. Je ne crois que ces préoccupations soient futiles. Il s'agit de questions de vie et de mort. Nous avons posé des questions toute la journée à la Chambre et les seules réponses que nous avons reçues, quand on nous en a données, n'avaient pas de sens.

Je voudrais tout d'abord remercier les députés d'avoir consenti à ce que le débat soit prolongé afin que ceux d'entre nous qui n'avaient pas eu la possibilité de participer au débat puissent le faire ce soir.

(2005)

Le débat sur le renouvellement de l'engagement des troupes en Bosnie m'apporte beaucoup plus de questions que de réponses. Mes collègues ont déjà soulevé ce problème. Comment pouvons-nous


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tenir un débat vraiment utile si le gouvernement ne détermine pas ou refuse de nous préciser les effectifs militaires qu'il entend envoyer, leurs fonctions et les conditions de leur rapatriement. Ce n'est pas nouveau. Le gouvernement n'a aucun critère depuis trois ans. Il n'y a donc pas lieu de s'étonner ou d'espérer qu'il en soit autrement.

Apparemment, l'OTAN attend la venue de 1 200 à 1 500 militaires canadiens. D'après les renseignements que nous avons reçus, c'est plus que ce que l'Allemagne et la Turquie fourniront respectivement. Ces pays sont pourtant situés tout près de l'ex-Yougoslavie, mais on exige davantage du Canada en ressources humaines et financières. Pourquoi?

À mon avis, maintenir nos troupes de l'autre côté de l'Atlantique nous coûte beaucoup plus cher qu'à un allié de l'OTAN dont le territoire est proche de la Bosnie. Le Canada, ou plutôt, ce qui est plus important, nos soldats n'ont-ils pas déjà prouvé leur engagement à l'égard du processus de paix dans l'ex-Yougoslavie? Les Canadiens ont passé trois ans et perdu dix hommes en Bosnie et, contrairement à qu'a dit le député qui a pris la parole avant moi, je ne crois pas que les réformistes sont en train de dire que nous avons déjà fait assez. Ce n'est pas ce qu'ils disent. Ce n'est ce que j'ai entendu ici aujourd'hui. Il est temps que d'autres alliés de l'OTAN assument leur part du fardeau. Comme l'a montré l'histoire, le rétablissement d'une paix durable dans les Balkans est critique pour la sécurité de l'Europe.

Je félicite les soldats canadiens qui ont déjà servi dans l'ex-Yougoslavie. Ils se sont acquittés de leur mission avec un professionnalisme au-delà des espérances étant donné le mandat imprécis qui était le leur et les conditions défavorables dans lesquelles ils travaillaient. Ils ont été envoyés là-bas comme soldats de maintien de la paix avant qu'il n'y ait de paix à maintenir. Ils ont été envoyés dans une zone de guerre mal équipés et légèrement armés. Ils ont protégé les populations civiles dans ce qu'on appelle les zones neutres, quand les parties au conflit ne respectaient pas les règles.

Malgré une structure de commandement douteuse, de piètres fournitures, un moral bas et un gouvernement, au Canada, qui n'avait pas de plan pour les faire sortir de là lorsque la situation a tourné au pire, malgré tout cela, ils se sont acquitté de leur mission. Ils ont fourni des secours humanitaires et veillé en pleine guerre à la sécurité de femmes, d'enfants et de non-combattants.

Au départ, ils n'ont pas été envoyés là-bas pour maintenir la paix puisque les belligérants étaient toujours en guerre, mais pour que le gouvernement de l'époque puisse dire au monde entier que le Canada est prêt à apporter sa participation n'importe quand, n'importe où, tant que c'est pour une mission de maintien de la paix.

Si les alliés de l'OTAN ont attendu, c'est pour de bonnes raisons. Il n'y avait pas d'accord de paix. Mais le Canada, lui, était là. Malheureusement, il semble que la fierté politique à l'égard de notre tradition en matière de maintien de la paix l'emporte sur la sécurité de nos troupes. C'est bien connu que nous arrivons en courant chaque fois qu'on a besoin de nous pour une mission de maintien de la paix. Nos soldats méritent que nous fassions preuve d'un peu plus de caractère. Tâchons de nous assurer que nous y retournons pour les bonnes raisons, pour des raisons qui nous sont propres.

Nous avons raison d'être fiers des Canadiens et des Canadiennes qui ont contribué au maintien de la paix, au fil des ans, mais si ces gens mettent leur vie en jeu, ils doivent savoir que leurs dirigeants politiques ont tout fait ce qui était en leur pouvoir pour leur donner les meilleures chances de survie.

Ces militaires ont le droit d'attendre certaines choses de leur gouvernement. Nous avons la responsabilité de veiller à leur sécurité avant tout. Si nous prenons la décision politique de participer à cette mission, ce sera leur devoir de la réaliser, quelles que soient les perspectives militaires. Ils ne peuvent pas dire non. Ils doivent obéir aux ordres. Même les généraux ne peuvent s'opposer à une décision politique officielle. Il est de notre devoir de nous assurer que nous avons tout fait, sur le plan politique, pour définir les paramètres d'une mission de maintien de la paix sûre et créer les conditions souhaitables avant d'envoyer des Canadiens en zone de guerre.

Ne nous y trompons pas, la Bosnie est encore une zone de guerre. Il ne faut pas verser le sang des Canadiens simplement parce que nos dirigeants politiques refusent de prendre des précautions raisonnables. Nos soldats ont fait le serment de défendre le Canada, et non la vanité des politiciens qui veulent préserver leur réputation auprès de l'ONU, quel qu'en soit le coût en vies humaines pour les Canadiens.

Je reconnais que c'est très délicat. La seule façon de vraiment protéger nos troupes, c'est de ne jamais les envoyer nulle part. Toutefois, nous avons des engagements envers nos alliés de l'OTAN. Nous avons des engagements internationaux sur le plan humanitaire. Nous devons pondérer ces obligations et le bien-être de nos troupes. Il ne s'agit pas de protéger le Canada. Nous avons le choix de nous engager ou non.

Le premier ministre a engagé le Canada auprès de la nouvelle force de l'OTAN avant même que l'accord de paix soit signé. Cette fois-ci sera-t-elle différente de la précédente? On n'essaie même pas de prétendre que la mission de la force de mise en oeuvre sera humanitaire. Il y a d'autres rôles à jouer dans l'ex-Yougoslavie. Nous pourrons être fiers si nous participons uniquement à des activités humanitaires, comme certains de mes collègues l'ont affirmé.

(2010)

Pourquoi tenons-nous ce débat si la décision a déjà été prise? Comment procéder à un débat significatif lorsqu'on nous dit que nous pourrions envoyer 20 soldats ou 2 500? Le ministère de la Défense nationale ne connaît pas le chiffre exact.

Durant toute la journée, les députés d'en face ont blâmé les réformistes parce que ceux-ci n'appuyaient pas nos gardiens de la paix. Il n'est pas du tout question d'appuyer ou non nos gardiens de la paix. On nous demande d'acheter un chat en poche et nous ne tomberons pas dans ce panneau.

Nos soldats pourraient bien rester là-bas pendant 12 mois, mais la Bosnie pourrait se transformer en une autre Chypre. Le gouvernement semble avoir remis un chèque en blanc à l'OTAN. Cette


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décision est politique; elle vise à montrer notre solidarité et à accroître notre prestige au sein de l'OTAN, ni plus, ni moins.

Que dire des soldats? Avant d'approuver l'envoi de troupes canadiennes en Bosnie, je voudrais obtenir d'autres garanties, être plus certain que nous avons pris toutes les mesures possibles pour assurer leur sécurité. Bien sûr, ce sont des soldats et ils sacrifieraient volontiers leur vie pour défendre le Canada, mais on ne doit pas leur demander de le faire pour un caprice politique.

Il me reste quelques questions auxquelles le premier ministre et son personnel de la Défense n'ont pas répondu.

Le mandat du Canada est-il bien défini? L'OTAN veut stabiliser la situation en 12 mois puis se retirer de la région. Cependant, le premier ministre a affirmé que nous devrions être prêts à demeurer là-bas pendant plus longtemps. Cela est tout à fait inacceptable. Si nous participons à l'intervention, nous devons le faire pour une période déterminée; par la suite, nous évaluerons la situation et en débattrons à nouveau. Tous les faits devraient être révélés au public canadien, car c'est à lui que l'armée appartient, pas au parti politique au pouvoir. Ce sont de ses fils et de ses filles dont nous parlons. Si nous n'avons pas un calendrier de retrait, comment saurons-nous que nous avons atteint nos objectifs? Le Canada doit établir ses propres critères de participation et non pas utiliser seulement ceux de l'OTAN.

Est-ce que le premier ministre est prêt à s'engager à procéder à un réexamen politique et militaire complet après 10 mois, de sorte que nos troupes sachent ce que nous attendons d'elles d'ici la fin de l'année? L'incertitude ne fera qu'exacerber les problèmes de moral. Au cours des trois dernières années, le gouvernement a prolongé unilatéralement notre engagement, sans écouter le Parlement et sans consulter la population canadienne. Ne recommençons pas.

Est-ce que le premier ministre peut nous garantir que nos soldats seront mieux équipés que la dernière fois que nous les avons envoyés en Bosnie? Ce sont les troupes les mieux formées dans le monde, mais il y a une limite à l'improvisation. Si nous les renvoyons dans une zone de conflit potentiel, ils méritent le meilleur équipement que nous puissions nous permettre. Avec les compressions de budget qu'il y a eues au ministère de la Défense et les transports de troupes périmés que nous avons, est-ce réaliste?

Est-ce que le premier ministre peut nous garantir que les soldats canadiens seront placés sous commandement canadien? Personne ne semble connaître la réponse à cette question. Nous ne nous pouvons pas nous permettre un autre Gallipoli ou un autre Dieppe. Cela devrait être une condition préalable à notre participation.

Les troupes canadiennes de maintien de la paix sont formées pour dissiper les malentendus avant qu'ils ne deviennent des conflits ouverts. Je crains que l'on ne puisse dire la même chose de toutes celles qui appartiendront à cette force d'occupation de 60 000 personnes. Si des troupes de maintien de la paix sans expérience antagonisent les civils, n'y aura-t-il pas un risque accru pour nos soldats?

Le secrétaire parlementaire demandait qu'on lui fasse des recommandations. J'en ai une. Il disait que l'aide aux réfugiés et l'aide humanitaire étaient une priorité secondaire. Je pense que pour le Canada cela devrait être la première priorité. Je pense que nous devrions nous concentrer sur notre participation à l'aide technique, logistique et humanitaire. Oui, nous avons des engagements vis-à-vis nos alliés de l'OTAN, mais nous avons une obligation morale encore plus grande à l'égard de nos troupes.

M. Bill Graham (Rosedale, Lib.): Madame la Présidente, je voudrais féliciter le député de Prince George-Peace River pour avoir dit au commencement de son discours qu'il nous fallait trouver un juste équilibre entre le besoin de sécurité de nos troupes et le but à atteindre. Je suis déçu de ce qu'il se soit empressé par la suite de tenir des propos bassement politiques, laissant entendre par là que ce n'étaient que futilités et lubies de politiciens. Ne convient-il pas que la situation a changé? N'admettra-t-il pas qu'une occasion extraordinaire s'offre à nous?

(2015)

Il y a trois mois, ce théâtre offrait la possibilité d'une guerre qui s'étende au-delà des frontières, de centaines de milliers de personnes déplacées, de milliers de personnes, y compris des femmes et des enfants, sur le point de perdre la vie et face à un hiver terrible qui approchait, sans succès en vue. Soudain, voilà que se dessinent des perspectives de paix qui peuvent se réaliser si la communauté internationale est au rendez-vous pour séparer les belligérents, si toutes les parties mettent l'épaule à la roue. Cela mérite sûrement qu'on coure des risques. Cela mérite qu'on participe à cet effort. En quoi est-ce une lubie? En quoi est-ce un geste de folie irresponsable de vouloir que cela se produise?

M. Clinton se montre-t-il fantasque et insensé quand il engage 20 000 soldats américains dans cette entreprise? Les Britanniques et les français qui en font autant sont-ils tous une bande d'imbéciles? Pourquoi reprocher tout à coup aux gens de n'être mûs que par la vanité, au lieu de les voir comme des gens qui reconnaissent que l'on a une responsabilité vis-à-vis du maintien de la paix dans le monde, vis-à-vis de l'aide humanitaire à laquelle participe ce pays depuis des générations? Soulever ces objections et accuser les gens de vouloir engager des troupes par pure vanité, voilà qui m'apparaît non seulement comme une attitude irresponsable, mais comme pure folie. C'est du vent, rien que du vent.

M. Hill (Prince George-Peace River): Madame la Présidente, je vais laisser aux téléspectateurs qui sont chez eux à nous regarder ce soir le soin de décider qui est plein de vent après cette scène que vient de faire le député.

À mon avis, c'est fantasque de la part de notre gouvernement.M. Clinton ne l'est certainement pas. Il envoie ses soldats là-bas avec le meilleur matériel au monde. Qu'envoyons-nous avec nos soldats?

De ce côté-ci de la Chambre, nous soulevons ces préoccupations depuis deux ans. Le Parti réformiste a soulevé des questions à maintes reprises au sujet de l'insuffisance du matériel de nos soldats. Nous posons les mêmes questions aujourd'hui. On vient de poser cette question au député et il a éludé la réponse encore une fois. Nous posons des questions parce que nous sommes préoccupés par la sécurité de nos soldats et nous obtenons des réponses absolument insensées. J'en ai marre.


17189

M. Leon E. Benoit (Végréville, Réf.): Madame la Présidente, aujourd'hui, nous débattons les mérites du renvoi de nos soldats en Bosnie, pas pour une autre mission de maintien de la paix, mais pour ce qu'on peut appeler une mission de mise en oeuvre de l'accord de paix. Le Canada devrait-il envoyer des soldats dans le cadre d'une mission de l'OTAN, pour tenter de stabiliser la région qu'on désigne comme étant l'ancienne Yougoslavie? Voilà la question.

Nous devrions penser avant tout aux casques bleus. Trop souvent, ils deviennent des personnes sans visage et sans nom qui sont envoyées à l'étranger pour maintenir une paix fragile. Eh bien, ce ne sont pas des personnes sans visage et sans nom pour moi. J'ai rencontré plusieurs des casques bleus et un grand nombre de leurs familles. Je sais que le rôle de casque bleu ébranle sérieusement les gens et leurs familles. Je peux seulement imaginer le stress qu'ils doivent subir.

J'admire les hommes et les femmes qui ont représenté les Canadiens dans des missions de maintien de la paix et, parfois, dans des missions de rétablissement de la paix. Nous avons quelques-uns des meilleurs casques bleus au monde. Ils ont accompli un travail magnifique, malgré l'adversité. Ils ont été obligés de se débrouiller avec du matériel qui est loin d'être satisfaisant. Les soldats canadiens sont habitués depuis longtemps à improviser et à se débrouiller avec du matériel désuet et qui ne convient pas à la tâche qu'ils doivent accomplir. Nos soldats poursuivent cette tradition avec une fierté considérable et justifiable. Ils remettent en état, modifient et réparent du matériel que d'autres abandonneraient de désespoir. Pendant que nos militaires s'enorgueillissent de se débrouiller avec du matériel inadéquat, ce matériel est également une source de stress et de frustration pour les casques bleus et leurs familles. Nos soldats ne devraient pas devoir faire face à des situations tendues comme celle-là sans être dotés du meilleur matériel qui soit.

Nos soldats sont également forcés d'endurer des dirigeants qui sont loin d'être satisfaisants. La crise des dirigeants au MDN a des conséquences négatives sur les soldats. L'affaire de la Somalie a manifestement exposé cette crise au grand jour. À mon avis, nous ne devrions pas déployer d'autres soldats tant que la crise des dirigeants ne sera pas réglée.

En outre, des notes en provenance du MDN nous parlent d'une crise dans le moral des troupes. On explique, dans ces documents, que le fardeau d'un déploiement rapide et prolongé est l'une des principales causes. Les déploiements successifs de nos militaires ont conduit à leur épuisement. Certains soldats ont été affectés à trois ou quatre reprises en Croatie ou en Bosnie et tout cela contribue au faible moral des soldats et de leurs familles. Le stress n'a jamais été aussi fort, ce qui entraîne la dislocation de familles, la consommation d'alcool, des dépressions, des tentatives de suicide, voire des suicides.

(2020)

On recommande de parvenir à un meilleur équilibre entre les périodes d'affectation et les périodes passées au Canada. Pourtant, le gouvernement ne tient pas compte du bien-être des troupes canadiennes lorsqu'on conclut des accords internationaux de maintien de la paix. Nos troupes méritent un meilleur traitement de la part du gouvernement et des échelons supérieurs des Forces canadiennes.

Il est donc important de se demander pourquoi ce débat n'en est pas un. Cette mission en Bosnie met en jeu la vie de Canadiens. Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de soumettre cette question à un vote libre à la Chambre? Je ne veux pas parler d'un vote libre comme le premier ministre l'entend. En effet, pour le premier ministre, tenir un vote libre, c'est demander aux députés libéraux de voter comme bon leur semble, pourvu qu'ils votent exactement comme il leur dit de le faire. Pour moi, ce n'est pas un vote libre, ce n'est pas l'interprétation que j'en fais. Pourquoi ne pas avoir un vote libre dans le cadre duquel les députés voteraient en fonction du point de vue majoritaire de leurs électeurs?

Ce débat n'est que de la frime et je suis persuadé qu'on a déjà pris la décision de déployer ou non des troupes. Ainsi, le fait que j'exprime mes craintes et mon appui face à cette mission a très peu d'importance pour le gouvernement. En fait, nos observations n'influenceront pas ou presque la décision du gouvernement au sujet de cette mission. J'espère que nous pourrons influencer de futurs déploiements de troupes dans le cadre de missions de maintien ou d'imposition de la paix.

Pour en revenir à cette mission, cependant, on a fixé à 12 mois la période d'intervention de l'OTAN. Par la suite, l'OTAN entend se retirer de la région et transmettre les pouvoirs à une autre autorité. Il y a des questions évidentes qui se posent à partir de cette vague description de ce qui pourrait se produire ou va se produire. Que va-t-il se passer après 12 mois? Si on transfère les pouvoirs à une autre autorité, de qui s'agira-t-il? Si cette nouvelle organisation est incapable de s'acquitter de la tâche, va-t-on maintenir les troupes de l'OTAN là-bas indéfiniment?

Le premier ministre a déclaré que si nous voulions vraiment la paix, nous devrions être prêts à rester sur place aussi longtemps que nécessaire. Est-il disposé à maintenir des troupes en Bosnie après l'expiration du mandat de 12 mois? Il semble que oui. Va-t-il nous préciser pour combien de temps alors?

Nous savons également très peu de choses au sujet de la mission elle-même. Combien va-t-elle coûter? Combien de soldats va-t-on déployer? Quel rôle les Canadiens doivent-ils jouer? Nous ne connaissons pas les réponses à ces questions, car le gouvernement refuse de nous donner les renseignements voulus. Comment sommes-nous censés discuter de cette question et nous prononcer là-dessus sans disposer de tous les faits?

En ce qui concerne les coûts, le ministère a précisé dans le cadre d'une séance d'information qu'ils pourraient varier entre 2 millions et 75 millions de dollars. C'est incroyable. Normalement, lorsqu'on fait des prévisions, il peut y avoir une marge d'erreur de 10 ou 15 p. 100, mais dans le cas du gouvernement libéral, c'est une marge de 3 800 p. 100. En plus d'être vague, ce chiffre ne porte que sur les dépenses du ministère de la Défense. Qu'en est-il de celles du ministère des Affaires étrangères? Y a-t-il un plafond? Dans l'affirmative, à combien s'élève-t-il?


17190

Nous ne savons presque rien des détails de cette mission et cela m'inquiète. En effet, les médias semblent en savoir plus long que les parlementaires, comme en fait foi la fuite en provenance des États-Unis, selon laquelle le Canada s'engagerait à fournir entre 1 200 et 1 500 militaires. Pourquoi le gouvernement n'a-t-il pas divulgué toute l'information aux parlementaires canadiens et à la population canadienne? Voilà une preuve de plus que ce débat n'est que de la frime.

(2025)

Si nos militaires avaient un mandat clair, bon nombre des problèmes que j'ai soulevés dans mon discours disparaîtraient. Il nous faut tout d'abord définir le rôle des militaires canadiens, et ce sont les Canadiens qui devraient décider de ce qu'il devrait être. Ils devraient pouvoir dire quelles tâches ils souhaitent voir jouer à la Défense nationale, après avoir tenu un débat sérieux sur la question, dans le cadre de réunions publiques et dans les médias. Il incomberait alors aux autorités compétentes des Forces canadiennes de décider-sans subir d'influence politique, dans le mesure du possible-comment ces tâches seront remplies. La fragmentation de nos forces qu'entraîne l'assignation de tâches trop nombreuses nuit à l'efficacité avec laquelle ces tâches peuvent être accomplies.

J'estime que, s'ils disposaient de tous les renseignements nécessaires, les Canadiens seraient en mesure de décider en quoi devrait consister le mandat des militaires canadiens et que cette décision devrait leur revenir. Il conviendrait de se demander, par exemple, si ceux-ci devraient jouer un rôle défensif, notamment pour repousser une invasion en territoire canadien. Devraient-ils s'occuper aussi de maintien de la paix? Devrait-on augmenter l'effectif des forces de réserve? Les activités de recherche et de sauvetage devraient-elles être ajoutées à leur mandat? Devrait-on faire appel à eux en cas d'agitation dans la population civile, comme une crise autochtone, des soulèvements liés au crime organisé ou la déclaration unilatérale d'indépendance d'une région du pays et les perturbations que pourrait occasionner cette sécession?

Nous savons que la première option n'est pas la plus pratique parce que nous n'avons ni les troupes ni l'argent nécessaires pour remplir ce rôle. Le Canada compte sur les États-Unis et peut-être sur l'OTAN pour le protéger contre les invasions.

Quel que soit le rôle que les Canadiens veulent confier à leurs forces armées, deux choses sont claires: nos militaires méritent le meilleur entraînement possible et le matériel le plus approprié au rôle qu'ils doivent jouer.

En conclusion, nous ne pouvons nous permettre de prendre à vue de nez des décisions qui touchent la vie de Canadiens. Je ne peux appuyer ce déploiement étant donné toutes les questions qui subsistent, étant donné le manque d'information et de réponses.

Le gouvernement prend des libertés avec les faits. Ces faits touchent la vie de gardiens de la paix canadiens. Le Parti réformiste refuse de. . .

La présidente suppléante (Mme Maheu): Je regrette, mais votre temps de parole est écoulé.

M. John Maloney (Erie, Lib.): Madame la Présidente, le maintien de la paix est devenu une des activités les plus éclatantes et les plus marquantes de la politique canadienne sur le chapitre de la défense et des affaires étrangères. Avec raison, le Canada est fier d'avoir participé avec brio au maintien et au renforcement de la paix et de la sécurité mondiales. Incidemment, notre pays est le seul à pouvoir dire qu'il a participé à presque toutes les opérations de maintien de la paix organisées sous les auspices des Nations Unies.

Les engagements du Canada à l'égard du maintien de la paix commandent le respect et l'admiration de la communauté internationale. À titre de parlementaires, nous devons de nouveau nous prononcer sur un tel engagement, cette fois dans le cadre d'une autre participation à la force de maintien de la paix en Bosnie. Nous devons prendre cet engagement, c'est notre responsabilité.

Le Canada a assumé un rôle de premier plan dans les efforts pour mettre pacifiquement un terme au conflit dans les Balkans. Le Canada a été l'un des premiers pays à demander un effort concerté de la communauté internationale et les Forces canadiennes ont servi avec distinction depuis 1991. Il ne faut pas oublier que cette participation a coûté très cher au Canada. En effet, dix Canadiens y ont perdu la vie. Examinons très soigneusement cette demande visant un autre engagement.

Aussi incroyable que cela puisse paraître, les factions en guerre en Bosnie ont conclu un accord il y a quelques semaines à peine. On a demandé de l'aide pour trouver une tribune stable permettant à cette initiative de paix de se développer. Parce que nous valorisons la tolérance, la liberté et la démocratie, et que nous rejetons l'intolérance, le terrorisme et la destruction, nous devons participer. Les Canadiens ne font pas que vanter leurs idéaux, ils les défendent en agissant, voire même en se sacrifiant pour eux.

Un demi-siècle s'est écoulé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, cette guerre qui devait être la dernière. Qu'avons-nous appris? Je me le demande.

(2030)

Depuis quatre ans, des horreurs, que nous pensions finies à jamais, sont de nouveau venues marquer nos esprits. Les prisonniers squelettiques et décharnés derrière des barbelés; les meurtres insensés de femmes et d'enfants sans défense; les lâches assassinats d'hommes et de garçons; les fosses communes; la purification ethnique; la destruction de maisons, de quartiers et de collectivités dont les terrains de jeu et les marchés sont devenus des zones de combat; les files sans fin de réfugiés qui avancent en trébuchant, dans la misère et le désespoir. Ce ne sont pas de belles images, croyez-moi.

Nos anciens combattants des deux guerres ont lutté et un grand nombre d'entre eux ont donné leur vie pour empêcher de telles atrocités. Oserait-on maintenant faire moins?

Les Musulmans, Croates et Serbes sont miraculeusement parvenus à signer un accord afin d'instaurer la paix, de déposer les armes, de poursuivre les criminels de guerre, de protéger les droits de la personne, ainsi que de préparer, pour l'avenir, la paix et la démocratie.


17191

Ils ont demandé notre aide, notre confiance et notre appui afin que soit mis en oeuvre l'accord de paix de Dayton. Devrions-nous participer à une mission de maintien de la paix qui facilitera leurs efforts? La seule réponse possible est oui.

Le Canada est l'un des membres fondateurs de l'OTAN, au sein duquel il continue de jouer un rôle important. Lorsqu'une situation difficile se manifeste, les Canadiens ne fuient pas leurs responsabilités. Ils ne tournent pas le dos à leurs alliés. Ils se tiennent debout et répondent présents.

Les soldats canadiens connaissent bien la géographie de la Bosnie. Ils connaissent les gens, leur culture et aussi ce qui les distingue. Les soldats canadiens sont bien entraînés et compétents. Ils sont non seulement aptes à participer à cette mission, mais parfaitement préparés à cette fin.

Il est intéressant de signaler en outre que, jusqu'à maintenant, 19 pays ne faisant pas partie de l'OTAN, dont la Russie, ont manifesté leur intention de participer à la force d'intervention. Ces pays partagent nos objectifs. Nous devons partager leur fardeau. En fait, ces pays comprennent que la paix et la stabilité en Europe sont essentielles à la sécurité du monde entier.

La Bosnie se trouve au coeur même de la diversité européenne, à proximité de quelques-unes des démocraties fragiles des anciens pays du rideau de fer. Il faut rétablir la stabilité dans cette région afin que le feu de la guerre et la dévastation qui l'accompagne ne s'étendent pas au-delà de la frontière de la Bosnie. N'oublions pas que c'est une étincelle des Balkans qui a allumé la Première Guerre mondiale! Souvenons-nous de cette leçon de l'histoire! Nous avons vu l'Europe en feu. Plus jamais!

La stabilité qu'assurera la présence de l'OTAN va permettre aux organisations civiles du monde entier d'entreprendre des programmes de secours humanitaire et de reconstruction pour fournir nourriture, abri, vêtements et médicaments aux populations touchées, reconstruire les routes, les écoles et les hôpitaux, réunir les familles, panser les blessures de la guerre, aider les Bosniaques à oublier le passé pour se construire un avenir de paix.

Cet exercice militaire va coûter très cher. En ces temps de compressions budgétaires et de réduction du déficit, les Canadiens responsables sont disposés à payer ce prix. Ils savent qu'un quart de million d'hommes, de femmes et d'enfants sont bombardés, abattus et torturés à mort et ils sont au courant des campagnes de viol et de purification ethnique. Ils connaissent très bien le prix de l'échec de cet accord de paix.

Ne nous leurrons pas! Le déploiement des troupes canadiennes n'est pas sans risque et il peut fort bien y avoir des morts et des blessés. Tous les efforts seront déployés pour que les risques soient réduits au minimum, mais nous devons néanmoins être prêts au pire.

Une des décisions les plus difficiles à prendre pour notre gouvernement a été de mettre nos militaires, hommes et femmes, dans des situations potentiellement dangereuses en des pays lointains lorsque les valeurs de notre pays l'exigeaient.

J'exhorte le gouvernement à participer à ce partenariat de la paix. Répondons à nouveau à l'appel en cette période de crise! Défendons la paix et la liberté! C'est tout simplement la chose à faire.

M. Andrew Telegdi (Waterloo, Lib.): Madame la Présidente, étant donné la nature et la composition du Canada, on trouve au Canada des gens originaires de partout dans le monde. Chaque fois qu'éclate un conflit quelque part, il y a toujours au Canada des gens qui ont des liens avec le théâtre du conflit. Quand éclatent des conflits et des guerres, il y a des Canadiens qui en sont très profondément touchés. C'est peut-être une des raisons pour lesquelles nous sommes devenus à ce point un pays intéressé au maintien de la paix.

(2035)

Si nous examinons la question dans une perspective historique, depuis 50 ans, le maintien de la paix est devenu l'une des activités les plus importantes de la communauté internationale pour promouvoir la paix et la stabilité. Les casques bleus ont servi partout dans le monde, jetant les fondements de la paix et sauvant d'innombrables vies humaines.

Le rôle classique de maintien de la paix a consisté à aider à maintenir un cessez-le-feu ou à prévenir l'éclatement ou la propagation des hostilités, de sorte que les conflits sous-jacents puissent se régler au moyen de négociations. En ce sens, le maintien de la paix a été un moyen pratique d'aider à la pacification.

Depuis la fin de la guerre froide, le maintien de la paix s'est transformé de façon remarquable.

Tout comme la conjoncture internationale a évolué, ces six ou sept dernières années, ainsi le maintien de la paix a changé. À preuve, les opérations récentes en Bosnie, au Rwanda ou en Somalie. Les bouleversements sont loin d'être terminés, et le maintien de la paix doit continuer de s'adapter pour être à la hauteur des nouveaux défis.

Il importe, en observant l'évolution du maintien de la paix au cours des 50 dernières années, que les députés comprennent le contexte global de ces opérations, dans leurs discussions sur l'envoi éventuel de forces canadiennes en ex-Yougoslavie, dans le cadre d'une nouvelle mission.

Je vais traiter brièvement de certains moyens par lesquels la communauté internationale, et en particulier le Canada, s'adaptent pour relever les défis nouveaux du maintien de la paix.

Lorsque des hommes d'État de partout dans le monde ont rédigé la Charte des Nations Unies, en 1945, les rudes épreuves de la Seconde Guerre mondiale étaient encore fraîches à leur esprit. Le maintien de la paix a eu des débuts modestes. Vers la fin des années 1940, l'ONU a commencé à déployer des militaires non armés, mais clairement identifiables, pour observer la mise en oeuvre des accords de paix dans certaines des régions les plus troublées de la terre.

Deux des premières missions de maintien de la paix de l'ONU, l'Organisme des Nations Unies chargé de la surveillance de la trêve au Moyen-Orient et la mission d'observation militaire en Inde et au Pakistan, durent encore aujourd'hui.


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Avec la crise du canal de Suez, en 1956, le maintien de la paix a dépassé le stade des simples missions d'observation et a pris beaucoup plus d'ampleur. Cette crise était la plus sérieuse à laquelle les Nations Unies avaient à faire face depuis la guerre de Corée et elle exigeait une réaction originale.

Lester B. Pearson, à l'époque secrétaire d'État aux Affaires extérieures du Canada, soutenait que l'ONU ne pouvait pas se contenter d'instaurer un cessez-le-feu entre les belligérants, mais qu'elle devait aussi en faire surveiller l'application par du personnel militaire et prendre les mesures pour parvenir à un règlement politique.

Au départ, les membres de l'ONU n'ont pas été très impressionnés par la proposition Pearson, mais la détermination et l'habileté de celui-ci ont finalement porté fruit et la Force d'urgence des Nations Unies, la FUNU, a vu le jour. En 1957, Pearson recevait un prix Nobel en reconnaissance de ses efforts.

Pendant 30 ans, la FUNU a été le modèle de la plupart des missions de maintien de la paix. Les forces de maintien de la paix, composées principalement de militaires, ont surveillé l'application de cessez-le-feu et le retrait de troupes, et elles ont servi de tampon entre des forces locales ennemies.

Quelques-uns des principes-clés du maintien de la paix, notamment l'armement léger, l'impartialité et l'obtention du consentement des parties en présence, remontent aussi à 1956.

Au cours des 30 années qui ont suivi, un nombre restreint de pays, dont le Canada, se sont imposés dans les missions de maintien de la paix. En raison de différences idéologiques et de leur passé colonialiste, les grandes puissances se sont faites discrètes.

Les soldats de maintien de la paix canadiens ont servi dans de nombreuses régions du monde, dont le Congo, la Nouvelle-Guinée, Chypre et les hauteurs du Golan. Depuis 1947, plus de 100 000 Canadiens ont participé à plus de 30 missions liées au maintien de la paix, une fiche encore inégalée. Plus de 100 Canadiens ont perdu la vie lors de ces missions et un nombre encore plus élevé ont été blessés.

Avec la fin de la guerre froide et de la rivalité entre les superpuissances, nous avons vu l'ONU assumer un rôle plus actif dans le maintien de la paix. Entre 1947 et 1988, l'ONU a effectué 13 missions de maintien de la paix. Au cours des sept dernières années seulement, il y en a eu plus de 20.

L'ONU intervient plus directement dans les conflits. La montée des valeurs humanitaires a parfois conduit à une contestation des notions traditionnelles de souveraineté. Par conséquent, l'ONU s'implique davantage dans les conflits internes des pays et s'occupe comme jamais auparavant de questions liées aux droits de la personne et à l'aide humanitaire. Bref, de nos jours, pour remplir des missions de maintien de la paix, il faut pouvoir compter sur toute la puissance de nos forces terrestres, aériennes et maritimes. L'expérience qu'a vécue le Canada dans les Balkans, en Amérique centrale, au Moyen-Orient et en Asie le prouve d'ailleurs.

(2040)

Dans l'ancienne Yougoslavie, les forces terrestres canadiennes ont participé à un vaste éventail de missions humanitaires. Au Cambodge, nos troupes terrestres collaborent actuellement avec le centre cambodgien responsable des opérations de déminage.

En mer, les forces maritimes du Canada ont participé à des opérations au large des côtes haïtiennes ainsi qu'à la surveillance du respect des sanctions économiques et des embargos sur les armes dans l'ancienne Yougoslavie. Des militaires canadiens ont aussi participé à des opérations de maintien de la paix en mer au Cambodge et en Amérique centrale.

Les missions contemporaines se déroulent parfois en l'absence d'un gouvernement viable et sans le consentement des parties belligérantes. Dans certains cas, les parties en cause s'en sont pris aux forces de l'ONU. Ce fut le cas en Bosnie, où nos militaires ont été exposés à de graves dangers et où certains ont perdu la vie.

Ces expériences ont rappelé au gouvernement canadien que les soldats bien formés forment les meilleurs casques bleus. Ils possèdent toutes les compétences et le professionnalisme nécessaires pour relever ces nouveaux défis.

Par ailleurs, le gouvernement est aussi conscient que nos soldats ont besoin de formation spécialisée. Voilà pourquoi nos militaires suivent des cours dans des domaines comme la sensibilisation aux diverses cultures, le droit international humanitaire et le règlement des différends. Le gouvernement entend privilégier ce type de formation à l'avenir.

En relevant les nouveaux défis dans ce domaine, on voit clairement que le maintien de la paix des années 90 est complètement différent. Si nous voulons relever les nouveaux défis du siècle à venir sur le plan de la sécurité, nous avons désespérément besoin que l'ONU et d'autres organismes internationaux soient plus efficaces pour résoudre des conflits.

En raison de la portée et de la complexité des opérations modernes de maintien de la paix, l'ONU a dû demander à des organisations régionales de jouer un rôle plus grand dans le règlement de conflits. Le rôle de l'OTAN dans la force proposée pour la mise en oeuvre de l'accord de paix en Bosnie illustre bien comment des organisations internationales peuvent travailler ensemble.

L'ONU est l'organe tout indiqué pour conférer une légitimité à une opération de paix internationale, tandis que l'Alliance est l'organisation la mieux placée pour exécuter une mission en Europe, notamment une à laquelle peut être associée une dimension d'imposition de la paix.

Quant à la réforme de l'ONU, elle ne peut plus être reportée. Créée dans les années 40, cette organisation doit pouvoir relever les défis des années 90 et de celles qui suivront au chapitre de la sécurité. Les réalisations de cette organisation depuis la fin de la guerre froide ont généralement été impressionnantes. Les missions de l'ONU en Namibie, au Salvador, au Cambodge, au Mozambique et en Haïti ont donné de solides résultats.


17193

Les déboires qu'elle a connus en Afrique et dans les Balkans, où de nombreux concepts nouveaux ont été mis en application, ont toutefois suscité des inquiétudes. Malheureusement, de nombreux États membres imputent à l'ONU tous les problèmes du monde actuel, ce qui n'est guère juste. Les États membres doivent cesser de blâmer les autres et commencer à faire leur part.

Le Canada sait que l'ONU a sa part de problèmes, mais le gouvernement est déterminé à trouver des solutions. Le Canada est dans une position unique pour aider l'ONU. Compte tenu de notre expérience et de notre expertise considérables dans presque tous les domaines du maintien de la paix, y compris les nouveaux concepts, nous avons beaucoup à offrir.

Le Canada contribue au renforcement du maintien de la paix de l'ONU de diverses façons, de la prestation de conseils d'experts au quartier général à New York, à l'établissement du Lester B. Pearson International Peacekeeping Training Centre à Cornwallis, en Nouvelle-Écosse.

Fidèles à la tradition canadienne, nous faisons des propositions pratiques et réalisables pour aider à préparer l'avenir de l'ONU. L'environnement international devenant de plus en plus complexe, il n'est guère surprenant que le maintien de la paix le soit devenu aussi.

À mesure que se feront jour de nouvelles menaces contre la sécurité, le Canada et les autres membres de la communauté internationale ne doivent pas abandonner leurs efforts pour découvrir des approches nouvelles et innovatrices en matière de maintien de la paix.

Quels que soient les défis, l'engagement du Canada envers cet outil utile pour le règlement des conflits ne doit pas changer.

M. Jag Bhaduria (Markham-Whitchurch-Stouffville, Lib. ind.): Madame la Présidente, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui dans le cadre de ce débat sur la participation des forces canadiennes à la mission de maintien de la paix en collaboration avec d'autres pays dans l'ancienne Yougoslavie.

(2045)

L'accord de paix signé il y a quelques semaines a été un soulagement pour tous après de nombreuses années de combats amers dans cette région du monde.

Le Canada a une longue tradition de maintien de la paix. Lorsqu'il est question de maintien de la paix, on pense tout de suite au Canada. Nous avons près de 40 ans d'expérience dans ce domaine.

La surveillance de la paix est une noble cause. Elle montre une volonté de la part des êtres humains et de leurs gouvernement de faire quelque chose de constructif pour éliminer la souffrance humaine. Elle apportera de la stabilité dans une région déchirée par les conflits internes et la guerre civile depuis de nombreuses années. Unies pour la première fois dans un esprit de coopération, des forces de l'OTAN et des forces non membres de cette organisation joignent leurs efforts pour assurer le maintien de la paix.

Cette mission n'a pas qu'un caractère militaire. C'est aussi une mission d'espoir pour la population des Balkans et une mission qui vise à mettre un terme à la misère des habitants de Bosnie, de Serbie et de Croatie. Cette mission doit également mettre fin à la purification ethnique qui a fait des dizaines de milliers d'innocentes victimes.

Les actes sont plus éloquents que les paroles. C'est en vertu de ce principe que notre gouvernement a décidé de participer à la responsabilité commune du maintien de la paix en ex-Yougoslavie.

Certains députés de ce côté-ci de la Chambre ont parlé du manque de ressources. Que cela n'empêche pas le gouvernement d'agir car l'occasion nous est donnée de contribuer au maintien de la paix dans le monde.

J'appuie la décision du gouvernement de faire sa part pour rétablir la paix dans cette région d'Europe centrale. Douze mois pour cette initiative de maintien de la paix, ça ne me semble pas excessif. On dit que ça pourrait prendre plus de temps. Nous ne pouvons travailler à partir de spéculations et d'autres hypothèses déraisonnables.

Pour ce qui est de leur compétence et de leurs capacités, les forces de défense canadiennes se classent parmi les meilleures du monde. Comme le dit le proverbe, c'est dans l'adversité qu'on reconnaît les forts. Ce sera un test de professionnalisme pour les femmes et les hommes de nos forces armées qui encore une fois devront travailler dans des conditions difficiles. Nous ne pouvons laisser la question du maintien de la paix aux pays et communautés de la région car le monde est devenu un village planétaire.

Les événements qui se produisent dans une partie du monde ne peuvent être considérés comme des échauffourées régionales qui ne valent pas la peine d'être prises sérieusement en considération par les pays qui ne sont pas directement ou indirectement touchés, comme notre pays dans ce cas-ci.

La sécurité mondiale est la responsabilité collective de tous les membres de la communauté internationale. C'est particulièrement vrai pour le Canada, parce que nous sommes un membre influent et respecté de cette communauté. Je ne vois pas de raison de nous effacer derrière un autre pays dans cette noble entreprise de ramener la paix dans la région des Balkans, qui mérite que nous y participions.

Finalement, c'est un projet important qui, j'en suis sûr, aura l'appui de tous les Canadiens. Nous devons l'appuyer sans hésiter.

[Français]

M. Don Boudria (Glengarry-Prescott-Russell, Lib.): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole en ce débat sur le maintien de la paix. Si vous ne l'avez pas noté, je dois vous dire que c'est la première fois que je prends la parole dans un de ces débats sur nos forces militaires. Si je ne m'abuse, je pense que c'est le troisième de ces débats et c'est la première fois que je choisis d'intervenir.

J'interviens, non pas parce que je suis membre du Comité de la défense, non pas parce que je suis membre du Comité des affaires extérieures, mais simplement pour vous dire et vous faire part des commentaires que j'ai entendus de certains de mes électeurs, de certaines personnes de ma circonscription.

Tout d'abord, j'aimerais féliciter tous ceux et celles qui ont participé et qui ont réussi l'Accord de Dayton. Je crois que tous ces

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gens, qu'ils viennent de près ou de loin, méritent les félicitations du monde entier.

(2050)

On doit aussi une fière chandelle à toutes les parties signataires de l'accord. Elles ont démontré au moins une intention de vouloir redonner un élément de paix à une partie du monde qui l'avait perdu et qui l'avait perdu il y a juste quelques années.

[Traduction]

J'ai des amis qui m'ont dit avoir rencontré des gens originaires de l'ex-Yougoslavie qui y habitaient avant et pendant la guerre. Le pays où ils vivaient était aussi normal que possible, bien que moins riche que le nôtre, mais pour un pays soumis à ce genre de régime, il était relativement prospère. Ils avaient réussi. Ils vivaient comme nous, peut-être pas aussi richement, comme je le disais.

Presque du jour au lendemain, le climat de paix qu'ils avaient connu a disparu. Les voisins qu'ils connaissaient sont devenus des ennemis, alors qu'avant ils étaient amis. Les familles ont été déchirées. Soudain, à cause du conflit, on ne pouvait plus faire confiance à qui que ce soit. On en était revenu au modèle de société de Hobbes, au chacun pour soi.

Je suppose que si cela nous apprend quelque chose, c'est que partout la paix est fragile et que nous devrions la chérir lorsque, comme nous, nous vivons en paix. C'est au moins la leçon que j'en ai tirée.

[Français]

J'aimerais également vous dire que je suis fier d'être un Canadien, un de ces héritiers de Lester B. Pearson. Vous savez sans doute que j'ai proposé une motion en cette Chambre pour que l'on érige une statue en son honneur, et elle est juste à côté de l'édifice. On l'a érigée il y a déjà quelques années, et il m'a fait plaisir d'être l'instigateur de cette initiative. Je dois vous dire que chaque fois, surtout récemment, que je passe près de cette statue de M. Pearson, je me souviens de sa contribution dans tout ce domaine du maintien de la paix dans le monde entier.

[Traduction]

Certains collègues en cette Chambre sont peut-être un peu plus isolationnistes que d'autres. Je ne fais pas partie de ceux-là. Je crois que nous avons un rôle important à jouer au sein de la communauté internationale. Nous ne sommes pas isolés sur notre propre planète. Nous partageons la Terre avec tous les autres peuples. Il ne faut pas l'oublier. Certains députés d'en face ne voient pas les choses de cette façon. Ils le montrent en chahutant en ce moment et c'est leur privilège.

À mon avis, nous n'accomplissons pas notre tâche de député si nous ne connaissons pas les députés des parlements étrangers, si nous ne communiquons pas avec eux et si nous ne sommes pas au courant de ce qui se passe ailleurs dans le monde. Qu'on s'en rende compte ou non, qu'on soit isolationniste ou non de nature, la planète rétrécit tout le temps du fait de l'augmentation des communications, du commerce et autres raisons de ce genre.

Les problèmes d'un pays sont les problèmes du monde entier, pas seulement ceux de ce pays. Même si c'étaient les problèmes d'un seul pays, je pense que moralement ce serait notre devoir d'aider si nous le pouvons. Toutefois, ce ne sont pas seulement les problèmes de ces autres pays, ce sont les problèmes de tout le monde, particulièrement dans le monde dans lequel nous vivons actuellement.

J'étais ici lorsque nous avons voté sur la question de notre participation à la guerre du Golfe. Madame la Présidente, vous vous souviendrez de cette nuit-là. Nous avons tous réalisé soudainement combien la planète avait rétréci, cette nuit où les missiles Scud ont quitté l'Irak à destination d'un autre pays. En l'espace de quelques minutes, de nombreux députés sont devenus familiers de tous les lieux au monde où des missiles Scud auraient pu atterrir. Il n'a pas fallu longtemps pour apprendre que la planète était plus petite et que tous ici étions plus près des autres que nous ne le pensions. Il est temps que nous nous souvenions de cela.

[Français]

Certains disent ce soir: «On ne peut pas voter pour ce genre d'initiative; on ne peut pas se prononcer en faveur parce qu'on n'a pas eu suffisamment de documentation.»

(2055)

On a offert de la documentation à tous les partis politiques. Le secrétaire parlementaire m'informe que la documentation a été offerte à toutes les formations politiques de cette Chambre. Les députés de chaque parti, j'espère, connaissent un peu ce qui se passe dans le monde, ont vu ce qui s'est produit dans le passé, ont vu les résultats de cette guerre, etc.

Alors, les députés ont bel et bien été informés et je me permets d'ajouter que ceux qui ne l'ont pas été, c'est peut-être parce qu'ils n'ont pas voulu en savoir davantage.

[Traduction]

Je voudrais parler de notre rôle en tant que Canadiens. Certains ont dit que nous ne devrions pas participer parce que nous l'avons déjà fait. C'est un point de vue plutôt inusité. Nous avons déjà participé. À mon avis, cela signifie que nous avons des connaissances et de l'expérience. Nous avons déjà participé et nous savons ce que nous faisons.

Nos militaires sont bien entraînés. Ils sont les meilleurs. À en juger par les missions précédentes auxquelles ils ont participé dans cette région du monde et ailleurs, nous savons que nos militaires sont très qualifiés. Ils ont fait un travail remarquable. Nous avons les connaissances et l'expérience et nous sommes très respectés. Oui, nous devrions participer.

Certains de mes électeurs sont allés dans l'ancienne Yougoslavie, en Croatie ou en Bosnie. Récemment, il y a eu une rencontre de jeunes dans ma circonscription et un jeune homme a pris la parole devant l'assemblée. C'est un soldat qui vient de revenir de Bosnie. Son travail consistait à désamorcer les mines terrestres. Il a apporté du matériel avec lui, en plus de son casque bleu et de son béret bleu qu'il portait pour des occasions plus officielles. Il nous a parlé de son rôle en Bosnie.

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Il n'a pas fallu longtemps pour que certains lèvent la main pour demander à ce soldat s'il était prêt à retourner là-bas. Il a répondu que oui. Quand on lui a demandé pourquoi, il a dit alors que c'était parce que les Casques bleus avaient fait une grande différence et sauvé des vies, selon lui.

À une époque pas si lointaine, les soldats canadiens éprouvaient beaucoup de problèmes dans cette région du monde. À l'instar des soldats d'autres pays, ils étaient retenus en otages ou menacés. C'est à ce moment-là que nous tous, à la Chambre, aurions dû les appuyer. Nous aurions dû nous unir.

[Français]

Qu'entendait-on de la part de certains parlementaires? Selon eux, pendant que nos Canadiens étaient pris en otage, on aurait dû annoncer, à ce moment-là, qu'on se retirait de l'engagement militaire en Yougoslavie.

[Traduction]

Ce n'était pas notre façon d'agir. Ce n'était pas la bonne chose à faire et nous nous en sommes abstenus. Pour ma part, je crois que nous avons un rôle à jouer et que nous devrions apporter notre contribution en tant que Canadiens. Je pense que nos militaires seraient d'accord là-dessus, à l'instar de la population canadienne. Selon moi, c'est ce que nous devons faire. Espérons et prions que la paix dans l'ex-Yougoslavie dure longtemps et apportons-lui notre contribution à cet égard.

M. Jay Hill (Prince George-Peace River, Réf.): Madame la Présidente, je ne peux m'empêcher d'en profiter pour signaler que le Parti réformiste n'est pas isolationniste.

Le député a parlé de la guerre du Golfe. Ce conflit a montré à quel point les forces armées canadiennes sont mal équipées. C'est surtout ce qui nous a préoccupé tout au long du débat d'aujourd'hui.

La présidente suppléante (Mme Maheu): Comme il est 21 heures, conformément à un ordre adopté plus tôt aujourd'hui, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, en conformité du paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 21 heures.)