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HRPD Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES

COMITÉ PERMANENT DU DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES

TÉMOIGNAGES

[Enregistrement électronique]

Le mardi 1er juin 1999

• 1109

[Traduction]

Le vice-président (M. Dale Johnston (Wetaskiwin, Réf.)): La séance est ouverte.

Nous avons eu des discussions préalables avec les témoins. Nous accueillons aujourd'hui deux groupes de témoins, et nous avons discuté au préalable de la possibilité de les entendre en même temps.

• 1110

Les témoins pourraient peut-être venir à la table pour que nous puissions les entendre tous ensemble d'ici à 12 h 30. Est-ce que cela conviendrait aux témoins, au lieu que nous entendions un groupe, puis l'autre?

La greffière du Comité: Chaque groupe présente néanmoins son exposé.

Le vice-président (M. Dale Johnston): Pourquoi ne venez-vous pas vous installer à la table?

La greffière: Mme Bennett voulait votre attention. Elle a une motion à proposer avant que nous ne commencions.

Le vice-président (M. Dale Johnston): Oui.

M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Je ne suis pas sûr qu'ils comprennent comment on procède à une séance de comité.

La greffière: Chaque groupe dispose de cinq à dix minutes pour présenter son exposé.

Mme Carolyn Bennett (St. Paul's, Lib.): En ma qualité de présidente du Sous-comité sur la condition des personnes handicapées, monsieur le président, j'ai une demande à présenter au comité principal pour que nous puissions nous réunir aujourd'hui après la réunion du comité principal pour étudier notre projet de rapport. Nous avons déjà prévu d'entendre des ministres jeudi, et nous aimerions obtenir une autre courte réunion cette semaine. Nous ne sommes autorisés qu'à nous réunir une fois par semaine.

Pour nous préparer en vue de la présentation de notre rapport, je propose que le sous-comité sur la condition des personnes handicapées siège deux fois cette semaine, soit les 1er et 3 juin, pour étudier son projet de rapport et pour entendre le témoignage de ministres.

Le vice-président (M. Dale Johnston): Voulez-vous inclure l'heure de la réunion du 3 juin dans votre motion?

Mme Carolyn Bennett: À 11 heures le 3 juin et à 13 heures aujourd'hui, après votre réunion.

Le vice-président (M. Dale Johnston): D'accord. Quelqu'un a quelque chose à dire au sujet de la motion?

[Français]

M. Paul Crête: Je ne veux pas retarder les témoignages. Je suis d'accord sur la motion. Je voudrais seulement qu'après les témoignages, on précise la façon dont fonctionnera la présentation des rapports des sous-comités. Si j'ai bien compris, il y en a trois qui s'en viennent: un sur les personnes handicapées, un deuxième sur les travailleurs âgés et un troisième sur les enfants. Va-t-on prévoir pour la semaine prochaine une espèce de séance marathon au cours de laquelle on aura à étudier les rapports de ces trois sous-comités? Je suis d'accord sur la motion, mais je pense que cet élément d'information pourra nous être précisé après l'audition des témoins sur l'autre sujet pour qu'on puisse savoir ce qui se passera la semaine prochaine.

[Traduction]

Le vice-président (M. Dale Johnston): En fait, monsieur Crête, nous discuterons de tout cela quand nous siégerons à huis clos tout à l'heure pour parler de nos travaux futurs.

(La motion est adoptée)

Le vice-président (M. Dale Johnston): Je tiens à souhaiter la bienvenue aux témoins du syndicat national. Vous avez la parole.

[Français]

La greffière: Les témoins sont M. Élie Cyr, le président du Syndicat national des travailleurs et travailleuses des pâtes et papiers de Kénogami inc., et M. Sylvain Parent, le président de la Fédération des travailleurs et des travailleuses du papier et de la forêt. Monsieur Cyr, vous pouvez commencer par une présentation de cinq à dix minutes.

M. Élie Cyr (président, Syndicat national des travailleurs et travailleuses des pâtes et papiers de Kénogami Inc.): Merci. Mesdames et messieurs, nous voulons en premier lieu exprimer nos remerciements à Mme Girard-Bujold, députée de Jonquière, pour son invitation à venir présenter notre point de vue au comité quant aux programmes d'aide aux travailleurs âgés.

Je suis le président du Syndicat national des travailleurs et travailleuses des pâtes et papiers de Kénogami inc., affilié à la CSN, lequel représente environ 415 employés travaillant à la papeterie Abitibi-Consolidated de Kénogami.

Jusqu'en mars 1987, la papeterie de Kénogami comptait sept machines à papier, et notre syndicat représentait 750 membres. Par la suite, en mars 1987, deux machines à papier cessaient leurs opérations; puis, en 1999, ce fut le tour de la machine à papier numéro 4 et finalement, en décembre 1997, la machine à papier numéro 5 cessait ses activités, de sorte qu'il ne reste que 415 employés dans notre syndicat.

• 1115

En 1998, Abitibi-Consolidated annonçait un programme d'investissement qui résultera en la fermeture de la machine à papier numéro 1 et de l'usine de pâte mécanique au début de l'an 2001. À ce moment-là, il ne restera que 215 travailleurs dans notre syndicat.

Ces 200 pertes d'emploi ne pourront être absorbées par la mise à la retraite des travailleurs même si un programme de préretraite a été négocié en 1997. Nous comptons environ 30 travailleurs qui, de toute façon, même s'ils sont âgés de 55 ans et plus et sont donc admissibles au programme de préretraite, ne pourront avoir recours à ce programme, surtout parce qu'ils n'ont pas accumulé suffisamment d'années de participation au régime de retraite. S'ils acceptaient ces conditions, leur revenu serait très faible et ils ne pourraient pas faire face à leurs responsabilités financières et familiales.

Lorsque le licenciement sera effectué en 2001, en tenant compte des travailleurs âgés de 55 ans et plus qui accepteront de prendre une préretraite décente et qui quitteront leur emploi, un employé devra avoir un minimum de 17 années d'ancienneté à l'usine pour conserver un poste de travailleur de relève à temps partiel, ce qui affectera, bien sûr, les jeunes travailleurs. Je vous laisse le soin d'imaginer l'atmosphère et le climat d'incertitude qui règnent présentement.

Afin de faire sa part, notre syndicat a élaboré un projet d'usine de transformation du bois de l'ordre de 21 millions de dollars. Les études de préfaisabilité, de faisabilité, de marché et de financement ont toutes été effectuées entre juin 1998 et août de cette année, avec l'aide d'une firme d'ingénieurs-conseils de la région et des conseillers du Groupe de consultation pour le maintien d'emploi de la CSN. Ce projet créerait entre 75 et 80 emplois de qualité.

Nous avons toutefois un problème. En effet, lors des négociations de 1998, nous avons négocié des indemnités de licenciement de 10 000 $ et 25 000 $, selon l'ancienneté, et nous comptons sur ces sommes pour le financement du projet, pour la partie qui reviendra aux travailleurs. Toutefois, on nous dit que ces sommes seraient déduites de l'assurance-emploi dans l'éventualité où le démarrage de l'usine ne coïnciderait pas avec la date à laquelle la papeterie de Kénogami procédera aux licenciements.

Il faudrait que la loi soit corrigée de façon à ce qu'on ne touche pas à ces sommes qui, dès leur paiement, seront investies dans le projet et pour lesquelles les confirmations seraient transmises aux autorités.

Bien sûr, nous comptons bien que notre projet se réalise, mais cela ne réglera pas tous les problèmes que cause un licenciement de cette importance. Il est donc nécessaire que le gouvernement soit disposé à remettre en marche le Programme d'aide aux travailleurs âgés et que les modalités de ce programme tiennent compte d'une situation comme la nôtre.

Ainsi, nos 30 travailleurs âgés de plus de 55 ans pourraient bénéficier de ce programme, et cela aiderait grandement les plus jeunes travailleurs à conserver un emploi stable et bien rémunéré et à contribuer à la prospérité de notre région et du pays. Merci.

La présidente (Mme Albina Guarnieri (Mississauga-Est, Lib.)): Merci.

Je veux m'excuser de mon retard. Je vous félicite tous d'avoir pris la décision de commencer sans moi.

Nous allons passer à la période de questions.

Je m'excuse. Monsieur Parent, avez-vous une présentation?

M. Sylvain Parent (président, Fédération des travailleurs et des travailleuses du papier et de la forêt): Merci, madame la présidente. Mesdames et messieurs, nous voudrions tout d'abord remercier Mme Girard-Bujold, députée de Jonquière, de nous avoir invités à présenter notre point de vue au comité quant au Programme d'aide aux travailleurs âgés.

Depuis le début des années 1990, l'industrie des produits forestiers a connu d'importantes transformations au Canada ainsi qu'au Québec, qui ont eu pour conséquence d'entraîner des réductions d'effectifs de 10 à 20 p. 100 dans les usines de pâtes et papiers de l'est du Canada, mais aussi dans l'ouest du pays.

Ces licenciements ont eu lieu dans des communautés souvent mono-industrielles, de sorte que leur impact social est très considérable. Il en a été ainsi à Clermont, à Jonquière, à Desbiens, au Lac-Saint-Jean, à Chandler, en Gaspésie, à Iroquois Falls, en Ontario et à Crabtree, au Québec.

• 1120

L'impact de ces licenciements a déjà fait l'objet d'une étude parrainée par le ministère du Développement des ressources humaines du Canada, il y a quatre ou cinq ans, portant sur la main-d'oeuvre dans l'industrie papetière au Canada.

En raison de ces changements technologiques et organisationnels et de stratégies de réduction de coûts, nombre de travailleurs ont perdu leur emploi. Ce matin, vous avez pu entendre le président du Syndicat des travailleurs et travailleuses des pâtes et papiers de Kénogami vous les décrire.

Pour limiter les effets de ces licenciements, nos syndicats et les employeurs concernés ont: réduit l'âge de la retraite à 58 ans sans pénalités actuarielles et à 55 ans avec pénalités actuarielles; instauré des programmes spéciaux de supplément de revenu aux régimes normaux de retraite; élaboré des projets temporaires d'amélioration des installations dans les usines; initié des projets de relance de l'emploi, comme c'est présentement le cas à Kénogami, où nous avons formé une coopérative de travail regroupant les syndiqués qui seront affectés par les réductions de personnel à l'usine de papier de Kénogami; favorisé la formation en négociant les contributions des employeurs et des employés à des programmes visant à parfaire l'éducation des membres.

Ces quelques exemples vous démontrent que nous avons fait du mieux que nous le pouvions face à cette situation. Nous avons agi de façon responsable. Toutefois, cela ne suffit pas, cela pour plusieurs raisons.

Lorsque les licenciements sont importants, lorsqu'ils touchent au-delà de 20 ou 30 personnes, nous ne pouvons absorber, par les moyens que nous donnent les conventions collectives et les programmes de retraite et de préretraite, tous les effectifs excédentaires, de sorte que de jeunes travailleurs bien formés, en début de formation de famille, sont licenciés.

Les raisons qui expliquent cela sont souvent les suivantes: les employés de plus de 55 ans ne disposent pas de revenus de retraite suffisants parce qu'ils sont entrés tard dans l'entreprise, de sorte que leur plan de pension est faible; les employés ont travaillé, avant d'arriver aux usines, dans les opérations forestières où, par exemple dans le cas des opérations de ce qui était Stone-Consolidated, il n'y avait pas de régime de retraite avant 1986; des employés âgés de 50 ans et plus ne peuvent avoir accès à la retraite et il leur est difficile de se recycler; dans les entreprises de plus petite envergure, il n'existe de ressources ni pour la retraite ni pour la préretraite; dans certaines usines, des femmes ont occupé pendant plusieurs années des postes à temps partiel ou ont dû interrompre leur service en raison de maternités et de responsabilités familiales. Ce sont là quelques raisons que nous désirons soumettre à votre attention.

Pour vous donner un idée de l'ordre de grandeur des licenciements, les changements à l'usine de Kénogami, malgré les négociations sur la préretraite, résultent en une cinquantaine de pertes d'emploi; certains de ces travailleurs ont plus de 45 ans, voire plus de 50 ans. À l'usine d'Alma, les changements technologiques d'il y a quatre ou cinq ans, qui étaient nécessaires et nous le reconnaissons, ont produit 61 pertes d'empois.

Nous considérons donc que le gouvernement du Canada doit s'impliquer. La caisse d'assurance-emploi a un surplus, et les transformations dans l'industrie se poursuivent. Les syndicats ont fait de façon responsable ce qu'il fallait faire, et nous venons d'en témoigner. Nous estimons donc que le régime du Programme d'aide aux travailleurs âgés doit jouer un rôle important pour faciliter la préretraite et le maintien en emploi des jeunes. Ce serait bien d'utiliser pour cela les cotisations payées au régime d'assurance-emploi, qui sont un impôt sur la masse salariale.

Ce programme doit envisager le versement de prestations égales aux sommes prévues par la loi, et cela à l'âge de 50 ans. Dans certains cas, on doit envisager le versement de prestations complémentaires aux sommes disponibles, cela à l'âge de 55 ans, en vertu des régimes de retraite quand l'employé est un participant. Nous ne sommes pas fermés à des mesures de réinsertion sur le marché du travail, pourvu que cela soit raisonnable et surtout possible pour les personnes touchées.

Nous souhaitons aussi que les employés affectés par un licenciement qui s'impliquent dans un projet de création d'emplois, comme c'est le cas à Kénogami et comme cela a été le cas chez Spexel à Beauharnois, une usine de papier de sécurité qui appartenait à Domtar avant 1997, ne soient pas pénalisés dans leur droit aux prestations à l'assurance-emploi du fait qu'ils reçoivent des indemnités de départ.

Dans ces projets, les travailleurs investiront ces sommes, notamment à Kénogami, dans leur coopérative. Il nous apparaîtrait injuste et inéquitable que les indemnités de départ négociées soient considérées comme un revenu d'emploi s'il arrivait qu'entre le moment du licenciement et le démarrage du projet il y ait une période d'inactivité.

Il s'agirait donc de prévoir un mécanisme qui exempterait du calcul du revenu les indemnités de départ lorsque celles-ci seraient investies dans un projet, cela s'appliquant, bien entendu, à tout projet de cette nature.

Je vous remercie de votre attention. S'il y a des questions, il me fera plaisir d'y répondre.

La présidente: Merci.

[Traduction]

Nous passons maintenant au premier tour de questions. La parole est à Mme Diane Ablonczy.

• 1125

Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Réf.): Merci, madame la présidente, et merci aussi aux témoins.

Ces changements qui se produisent dans votre collectivité doivent vous causer bien des difficultés, surtout puisque la main-d'oeuvre de votre région se trouve réduite des deux tiers en raison des pertes d'emploi dans ce seul secteur. Ces pertes sont assez difficiles à prendre. Vous avez proposé des éléments de solution.

Proposez-vous une modification à la Loi sur l'assurance-emploi en ce qui a trait aux programmes d'adaptation des travailleurs âgés? Vous avez indiqué que vous vouliez modifier cette loi.

[Français]

M. Élie Cyr: Oui.

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy: L'avocat du syndicat a-t-il communiqué avec le ministère à Ottawa par l'entremise de votre député pour discuter de la formulation que vous pourriez donner à cette modification? Avez-vous un texte quelconque à nous proposer?

[Français]

M. Élie Cyr: On n'a pas eu de contact avec le ministère quant à un amendement à la loi. La loi n'est pas applicable dans la vraie vie et il faudrait la modifier, mais on ne peut vous dire de quelle façon il faudrait la modifier.

M. Sylvain Parent: Nous avons quand même soumis, dans le document, différentes suggestions en regard des employés qui se retrouvent dans une situation fort délicate.

Je faisais allusion tout à l'heure à l'étude faite par le ministère du Développement des ressources humaines du Canada. Il faut constater que cette étude faite en 1994 indique que plus de 20 000 travailleurs de l'industrie papetière et forestière seront affectés d'ici l'an 2000. Les restructurations, les changements technologiques, les fusions et tous les programmes de réduction de coûts qui s'avèrent nécessaires ont des impacts très significatifs.

Il faut trouver des solutions et apporter des suggestions pour qu'on puisse faire travailler les personnes à un salaire décent.

Un autre élément extrêmement important est celui des jeunes en milieu de travail. Comment doit-on intégrer les jeunes en milieu de travail? Malheureusement, avec tous les exercices qui se font présentement dans l'industrie, on sort les jeunes du milieu de travail. Il y a donc ici un exercice visant à faciliter le maintien en emploi des jeunes. Pour nous, c'est extrêmement important, car c'est la relève de demain dans l'industrie.

Un autre élément à souligner est l'âge. On sait que l'âge des travailleurs de l'industrie est très élevé. Je ne veux pas dire qu'on est des personnes âgées, mais la moyenne d'âge est de plus de 45 ans dans l'industrie papetière. Un changement brutal devrait s'effectuer dans quelques années avec tous les régimes de retraite en place, entre autres dans la grande industrie au niveau du papier journal, du papier fin, du papier mousseline et du papier d'impression. C'est une chose à laquelle il faut être très attentif, parce que même là, on sera confronté à une situation difficile; il y a toute la question de l'efficacité et de la productivité de l'entreprise face à la concurrence mondiale.

Pour nous, tout cet exercice s'enchaîne. C'est important et on veut vous sensibiliser à notre démarche et à la situation qu'on vit présentement.

[Traduction]

Mme Diane Ablonczy: J'ai une question en ce qui concerne ce que vous venez de dire au sujet de la façon de vous préparer aux changements qui se sont produits et qui continueront à se produire. Quels organismes ou associations devraient, selon vous, travailler ensemble afin d'aider les travailleurs à se préparer à ces changements? Il y aurait manifestement la municipalité, le ministère provincial du Travail et le ministère des Ressources humaines du gouvernement fédéral. Quels acteurs devraient, selon vous, se réunir pour trouver des solutions aux problèmes dont vous venez de nous parler aujourd'hui?

[Français]

M. Sylvain Parent: Vous avez mentionné les différents groupes qui pourraient se joindre à nous. Je faisais allusion tout à l'heure au ministère du Développement des ressources humaines du Canada, qui a fait une étude dans l'industrie. Les différents ministères sont conscients des difficultés qu'on rencontre, tant celui du Développement des ressources humaines que celui de l'Industrie. Les organisations syndicales seront parties prenantes dans cette démarche parce que nous sommes très sensibilisés; nous vivons cela quotidiennement dans les milieux de travail.

• 1130

On croit même que les entreprises doivent être présentes aux tables de discussion, parce qu'elles sont conscientes des difficultés. La relève doit aussi être préparée dans l'industrie. Tous ces intervenants doivent être présents à une même table pour discuter et trouver des solutions qui devraient permettre de corriger la situation pour l'avenir.

La présidente: Merci.

Monsieur Crête.

M. Paul Crête: Je voudrais tout d'abord vous transmettre les salutations de Mme Jocelyne Girard-Bujold qui, malheureusement, est en Chambre aujourd'hui. Elle devait prononcer un discours en tant que porte-parole de l'environnement pendant votre témoignage au comité. C'est un hasard. S'il lui est possible d'intervenir avant la fin de votre présentation, elle le fera.

Je voudrais aussi faire un bout de chemin sur la question de savoir si des amendements ont été proposés à la Loi sur l'assurance-emploi. On sera prêts à parler d'amendements à la Loi sur l'assurance-emploi. On a fait des propositions globales intéressantes à cet égard, je pense.

Votre présentation donne des exemples très concrets de situations vécues par les travailleurs âgés. Dans le passé, le gouvernement fédéral a mis en place un programme qui s'appelait le PATA. C'était une tentative pour essayer de trouver une solution intéressante. On a suspendu l'application du PATA le 31 mars 1995 pour des raisons que je ne veux pas justifier d'une façon ou d'une autre. Il y avait des questions de coûts et toutes sortes d'autres éléments.

Vous proposez des solutions de deux ordres, et j'aimerais que vous nous donniez plus de détails. Pour les travailleurs qui vivent la situation que vous nous avez décrite, vous avez parlé d'un amendement à la loi afin qu'il soit possible d'utiliser les fonds de l'assurance-emploi pour cela. J'aimerais que vous élaboriez un peu là-dessus. Pour une solution à long terme, vous avez parlé d'asseoir à une même table toute les parties impliquées dans une telle décision.

Je vais vous poser une question à deux volets. L'élément premier n'est-il pas une volonté politique claire? Ne faudrait-il pas que le gouvernement dise que la question des travailleurs âgés est importante dans notre société, où les technologies changent, et qu'il est prêt à faire quelque chose dans ce dossier?

J'aimerais que vous nous parliez un peu plus de la responsabilité des compagnies, des employeurs. Les entreprises font des gains de productivité importants en installant de la nouvelle machinerie. À votre avis, font-elles suffisamment leur part à l'heure actuelle? Y aurait-il moyen qu'elles en fassent davantage ou si cela doit venir d'ailleurs?

M. Élie Cyr: C'est une longue question, et je vais y répondre par étape. Parlons des travailleurs âgés à l'usine de Kénogami. Il y a eu de nombreuses coupures de postes par le passé, et l'employeur a réengagé des travailleurs forestiers au cours des dernières années. Cela signifie que les gens qui vont perdre leur emploi seront âgés de 40 à 55 ans. Le défi du retour sur le marché du travail est grand pour ces gens; ils ne seront probablement pas capables de se replacer dans n'importe quelle industrie.

M. Paul Crête: Est-ce une question d'âge, selon vous, ou plutôt une question de formation de base et de capacité de s'adapter? On nous dit toujours qu'il y a des mesures actives pour recycler ces gens. Cette solution est-elle réaliste ou préférable, ou doit-on les considérer comme des gens difficilement recyclables?

M. Élie Cyr: Je pense qu'il n'est pas réaliste de penser que ces gens seront capables de se recycler à leur âge, quand on connaît le type de recyclage qui se fait. Quand quelqu'un est plus jeune, c'est plus facile. Les jeunes sont beaucoup mieux instruits que les personnes de 45 à 55 ans. C'est facile pour les jeunes de retourner sur le marché du travail. Les autres doivent subir des examens. Quand ils avaient été engagés par Abitibi-Consolidated, c'était pour leurs bras et non pas pour leur tête. Faire passer des tests à ces gens ou les amener à un niveau scolaire suffisant prendrait beaucoup trop de temps; ils sont quand même assez âgés.

On a beaucoup de difficulté à croire à la possibilité de trouver un emploi pour ces gens. L'employeur a une responsabilité parce que lorsqu'il a engagé ces gens, il devait les former, etc. Certaines gens qui auraient pu prendre une préretraite à l'âge de 55 ans n'avaient pas les moyens de partir parce qu'ils n'avaient pas contribué au fonds de pension pendant assez longtemps. On est pris avec ces gens parce qu'ils ne peuvent pas quitter. Si les plus vieux pouvaient quitter à 55 ans, cela permettrait aux autres de rester à l'emploi d'Abitibi-Consolidated qui, selon notre convention collective, aurait l'obligation de les former. Pour nous, ce serait un avantage.

• 1135

Lorsque les employeurs modernisent leurs usines, ils offrent des indemnités de départ, mais les gens qui perdent leur emploi sont bien souvent laissés à eux-mêmes et ont beaucoup de difficulté à se trouver un autre emploi leur permettant de vivre décemment.

M. Sylvain Parent: Si vous me le permettez, j'aimerais élaborer. Dans un premier temps, on est placés devant une situation qui extrêmement critique. J'ai parlé tout à l'heure de la question de l'industrie forestière. La concurrence mondiale, les programmes de réduction des coûts, les changements technologiques et les fusions ont eu pour effet des pertes d'emploi massives. Il faut se placer dans ce contexte.

Même s'il existait des programmes de retraite et de préretraite dans les grandes entreprises, quand est arrivée la deuxième vague de restructurations et de fusions, on s'est alors retrouvé dans un contexte extrêmement difficile parce que nos gens n'avaient pas atteint l'âge de la retraite. On se retrouvait avec un groupe de personnes âgées de 50 à 55 ans qui n'avaient pas de programme de retraite. On sait que la retraite n'est possible qu'à partir de l'âge de 55 ans, avec des réductions actuarielles jusqu'à l'âge de 58 ans.

On a donné un exemple bien précis, celui de Kénogami, où des gens de 45 et 50 ans vont se retrouver demain sans emploi. On place ces gens dans une situation de pauvreté et c'est malheureux. Ce sont des gens qui ont donné leur matière grise, en plus de leurs bras, comme le disait Élie, à l'entreprise pendant près de 30 ans, et aujourd'hui, tout ce qu'ils en récoltent, c'est la pauvreté. On trouve cela très malheureux dans le contexte d'aujourd'hui.

Vous avez soulevé la responsabilité des compagnies. Il est très important que l'entreprise soit florissante, qu'elle se développe sur le plan économique et qu'elle génère beaucoup de profits pour faire face à la concurrence. Par la voie de la négociation, des mécanismes intéressants de retraite et de préretraite ont été instaurés, mais on doit se demander jusqu'où cela va aller et quand cela doit arrêter. L'entreprise dira-t-elle qu'elle doit arrêter à un moment donné? Je serais surpris de l'entre répondre oui; au contraire, elle doit toujours répondre qu'elle doit poursuivre.

On doit se tourner vers les partis politiques et les gouvernements pour légiférer. À un moment donné, on doit protéger la classe ouvrière dans la démarche de l'industrie. Il est certain qu'il faut du courage et une volonté politique pour le faire, mais ce sont ces gens qui font progresser l'économie de notre province et de notre pays. On a donc une responsabilité à leur égard.

Il y a un autre élément extrêmement pénible et difficile, et ce sont toutes les petites entreprises où les employés se retrouvent sans régime de retraite ou de préretraite. Ces gens-là se retrouvent dans un cul-de-sac, devant rien, sans programme, parce qu'il arrive souvent qu'ils ne sont pas informés des programmes qui peuvent exister. Pour plusieurs, c'est l'assurance-emploi et ensuite le bien-être social. C'est une fin de carrière très triste pour des gens qui ont travaillé pendant plusieurs années.

On suggère que le PATA soit réinstauré pour les gens de 50 à 55 ans et qu'il y ait, pour ceux de 55 à 58 ans, un mécanisme qui permette, si la personne a une rente, de combler la différence entre les deux.

On a mentionné qu'on s'intègre beaucoup pour être en mesure de sauver des emplois. On crée des coopératives avec différents groupes. Nos travailleurs investissent dans les coopératives, mais la difficulté, c'est qu'avant le départ de la nouvelle usine, il y a un laps de temps assez important; pendant ce temps, les gens reçoivent une indemnité de licenciement pour laquelle ils sont imposés. On vous demande de ne pas imposer ces gens parce qu'ils investissent dans l'économie et dans la création d'une nouvelle entreprise. De tels changements favoriseraient la petite PME de l'industrie, papetière ou autre.

• 1140

Nous croyons que le PATA joue un rôle d'une très grande importance dans le milieu du travail.

La présidente: Merci.

[Traduction]

Madame Davies.

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Merci, madame la présidente.

Je tiens tout d'abord à vous remercier de votre présence ici aujourd'hui. Je suis de la côte Ouest, où nous avons aussi de très grandes papetières. D'après l'expérience que j'ai du travail auprès de ma collectivité et auprès des syndicats, je connais l'effet dévastateur sur les travailleurs des changements massifs qui se produisent. Je vous suis donc reconnaissante d'être venus nous parler aujourd'hui de ce qui se passe dans votre collectivité.

Je suis d'accord avec vous pour dire qu'une restructuration majeure qui s'accompagne de licenciements massifs peut avoir un effet très dévastateur sur la collectivité, surtout quand il s'agit d'une petite collectivité; l'effet se fait sentir non seulement chez les travailleurs, mais aussi chez leur famille et dans l'ensemble de l'économie de la collectivité. Je suis d'accord avec vous pour dire que l'entreprise a en quelque sorte sa part de responsabilité, qu'elle ne peut pas simplement se contenter de réaliser des bénéfices et de profiter du travail de ses employés le temps que son usine est viable, puis de leur donner leur congé, sans plus, quand elle ne l'est plus.

Je me demandais si vous aviez des exemples de programmes de rechange que vous aviez réussi à mettre sur pied. En Colombie-Britannique, par exemple, le syndicat des pêcheurs a dû lutter d'arrache-pied pour obtenir des fonds fédéraux, mais ses efforts ont été largement récompensés. Il a réussi à mettre sur pied des programmes de recyclage qui permettent aux travailleurs de mettre à profit les compétences acquises dans le secteur.

La mobilité est un problème qui se pose pour tous les travailleurs, n'est-ce pas? Quand on vit dans une localité depuis 20, 30 ou 40 ans, quand on y a pris racine, il est très difficile de partir dans l'espoir de se trouver du travail ailleurs.

Par ailleurs, ces travailleurs ont acquis dans leur secteur des compétences et des connaissances très valables. Ainsi, les pêcheurs ont pu mettre à profit ces compétences et ces connaissances dans le domaine environnemental, notamment pour ce qui est de la remise en état des cours d'eau, ou encore dans le domaine du tourisme.

Je me demandais si vos syndicats avaient tenté des expériences semblables, s'ils s'étaient eux-mêmes engagés dans des programmes de recyclage ou de développement communautaire par suite des changements survenus dans le secteur.

[Français]

M. Sylvain Parent: J'ai déjà parlé de l'usine d'Alma, au Saguenay—Lac-Saint-Jean, qui a fait l'objet d'une restructuration il y a quelques années. À ce moment-là, quelque 120 personnes devaient être mises à pied. L'entreprise a fait preuve de la volonté de mettre sur pied un mécanisme selon lequel les mises à pied pouvaient être effectuées progressivement pendant une période de six ans, permettant ainsi à un plus grand nombre d'employés d'avoir droit à une pension de retraite.

Simultanément, on élaborait un programme de formation afin d'aider les travailleurs affectés par les mises à pied à se recycler et à apprendre un nouveau métier. Mais pour arriver à cela, il faut qu'il y ait une volonté de la part des deux parties, et même une volonté politique. Le mécanisme qu'on a élaboré à Alma a permis à des travailleurs de s'absenter chacun à leur tour de leur milieu de travail pendant une période de six mois afin d'acquérir de la formation. Pendant ces six mois, des travailleurs plus jeunes pouvaient demeurer en milieu de travail.

Quels résultats ont été obtenus? Les répercussions négatives en termes de pertes d'emploi ont été minimisées. Mais, comme je l'indiquais, c'était une question de volonté. En l'absence de volonté, les difficultés à surmonter sont énormes. Cet exercice ne se répète pas malheureusement pas assez souvent dans l'ensemble de l'industrie. J'ai décrit des cas uniques que nous avons vécus.

La présidente: Merci.

Monsieur Coderre.

M. Denis Coderre (Bourassa, Lib.): Bonjour à vous deux. On peut parler de bras, mais on peut aussi parler de coeur. Monsieur Cyr, je crois que vous êtes des gens de coeur avant tout.

Puisque je suis né dans la région de Joliette, je connais un peu le village de Crabtree. Je suis d'ailleurs certain que c'est là que nous nous sommes déjà rencontrés. Je vais poursuivre le même ordre d'idées que Paul. Nous sommes ici avant tout pour réfléchir en vue de trouver des solutions. Il est important de tenir compte des besoins des travailleurs âgés. Je cherche toujours des réponses, et c'est pour cette raison que je vous poserai quelques questions.

• 1145

Si je suis votre raisonnement, monsieur Parent, je crois comprendre que vous recommandez qu'on mette sur pied un programme semblable au PATA à l'intention des travailleurs de 50 à 55 ans. Mais le PATA n'a pas connu un grand succès dans certaines régions, notamment dans le dossier du linge ou de la guenille, si je puis utiliser cette expression. Les choses ont été un petit peu difficiles de ce côté-là. Certaines régions pouvaient bénéficier du PATA, tandis que d'autres en étaient exclues.

M. Sylvain Parent: J'ai effectivement parlé des modalités d'accès. On rayait tout le monde et on entretenait la pauvreté.

M. Denis Coderre: Voilà. Vous disiez que les travailleurs de 55 à 65 ans toucheraient probablement plutôt une rente par la suite. J'éprouve certaines réticences face à cela. Monsieur Cyr, vous disiez que ces employés n'étaient pas nécessairement recyclables. J'estime que vous nous proposez une perspective plutôt triste. Vous auriez probablement ainsi une tâche bien plus facile que le gouvernement. Je crois qu'il faut parler d'emplois plutôt que de dire que lorsque les travailleurs ont atteint l'âge de 50 ans, that's it, that's all, on leur offre un premier programme et par la suite on songe à leur verser une nouvelle rente. Vous me semblez un petit peu pessimiste de ce côté-là. Croyez-vous que c'est ce que les travailleurs âgés souhaitent? Est-ce qu'un programme saurait tout régler?

Il ne faut pas oublier cette réalité que sont les coûts qu'assument tous les contribuables. Vous auriez raison de me répondre qu'ils ont payé des impôts toute leur vie et qu'il est maintenant normal qu'on leur redonne un petit peu de leurs contributions.

Vous avez parlé d'une volonté politique claire. On a mis sur pied à l'intention des jeunes la Stratégie emploi jeunesse, qui fonctionne quand même assez bien. De tels programmes sont de bonnes mesures incitatives. Ne réglerions-nous pas le problème si nous mettions beaucoup plus l'accent sur une politique visant les régions? On a trop souvent tendance à ne penser qu'aux grands centres. Il faudrait mieux définir les régions et le type d'emplois qu'on devrait y exercer. Nous devons trouver des mesures incitatives dont pourront bénéficier les travailleurs qui tiennent à la dignité du travail. Je poserai d'autres questions par la suite.

M. Élie Cyr: Lorsque nous faisions allusion aux travailleurs âgés, nous parlions de travailleurs qui avaient atteint l'âge de 55 ans et à qui on avait offert de prendre leur retraite, mais qui avaient refusé. Ces travailleurs ont maintenant 57, 58, 59 ou 60 ans.

Je suis âgé de 45 ans et après que j'ai été embauché, l'usine où je travaille a engagé des travailleurs dont l'âge variait de 35 à 50 ans. Ces travailleurs qui ont moins d'ancienneté que moi sont les premiers à perdre leurs emplois, bien qu'ils soient plus âgés. Ceux qui n'ont pas accepté les offres de retraite qu'on leur a soumises lorsqu'ils avaient 55 ans ne seront pas plus en mesure de prendre leur retraite en 2001, et je ne sais pas comment nous pourrions les aider à franchir ce pas. Leurs rentes ne leur permettront pas de vivre décemment. Il faudrait probablement combler leur manque à gagner jusqu'à ce qu'ils soient admissibles à la pension que leur versera le gouvernement lorsqu'ils auront atteint 65 ans. En prenant leur retraite, ces travailleurs âgés laisseront la place aux autres travailleurs de l'usine dont l'employabilité en dehors de l'usine est très précaire.

M. Denis Coderre: Vous proposez qu'on leur verse un revenu garanti pendant cette période de transition.

M. Élie Cyr: C'est exact. Leur départ permettrait à d'autres travailleurs de l'usine de prendre la relève, et le gouvernement n'aurait pas à les prendre en charge pendant toute leur vie.

Je ne suis pas en mesure de proposer une solution parfaite. D'ailleurs, personne ne détient une telle solution. Mais on pourrait améliorer certaines choses afin de permettre à ces travailleurs d'au moins finir leur vie dignement.

M. Denis Coderre: Dans le fond, on n'a rien à faire pour les aider, autre que leur donner un montant d'argent?

M. Élie Cyr: Notre syndicat a formulé une proposition et nous cherchons actuellement du financement afin de réaliser notre projet. Nous croyons être en mesure de placer 80 des 160 travailleurs de notre usine. Certains travailleurs seront en mesure de partir, mais ce ne sera pas le cas de certains autres.

Les membres de votre comité ont une meilleure vue de l'ensemble du pays; la nôtre se limite au moulin de Kénogami. Nos efforts visent à placer nos travailleurs et nous avons créé un comité de main-d'oeuvre à cette fin.

Lorsqu'une nouvelle entreprise a ouvert ses portes au Saguenay, 5 000 personnes se sont portées candidates pour les 50 postes qu'elle comptait. Parmi les candidats qui ont postulé, on retrouvait des travailleurs très qualifiés qui venaient tout juste de finir leurs études. Leurs compétences étaient bien supérieures à celles de nos travailleurs. Non seulement le retour à l'école est difficile pour ces travailleurs, mais le retour à l'emploi l'est également.

• 1150

Je suis père de quatre enfants et si je ne trouvais qu'un emploi à 7 ou 8 $ de l'heure, ça ne vaudrait pas vraiment la peine que je travaille. Il est dommage qu'il en soit ainsi. Je travaillerais probablement quand même parce que j'ai du coeur, mais il me serait très difficile de subvenir aux besoins de mes enfants.

M. Denis Coderre: Monsieur Parent, est-ce qu'on a quantifié ce qu'un tel programme représenterait?

M. Sylvain Parent: Je voudrais ajouter quelques éléments au sujet du commentaire qu'a fait Élie tout à l'heure. On ne propose pas qu'on accorde aux travailleurs un laissez-passer gratuit. On ne voudrait pas qu'ils se disent que parce qu'ils ont été mis à pied, ils ont désormais droit à une rente du gouvernement.

M. Denis Coderre: Non, mais on pourrait parler de revenu minimum garanti à ce moment-là. Quelle somme serait nécessaire?

M. Sylvain Parent: On voudrait d'abord souligner qu'avant d'en arriver à ce recours, les travailleurs devraient se prévaloir des nombreuses autres possibilités qui existent, dont les programmes de retraite, de préretraite, de formation et celui du CAMO-qualité.

Nous vous avons aussi donné l'exemple des coopératives et dénoncé le fait que les indemnités de licenciement que les travailleurs y investissent sont imposables. Cela ne favorise pas l'intégration des travailleurs sur le marché du travail.

Nous devons souligner deux réalités, dont la première est le fait que l'industrie papetière et forestière exploite des usines dans des régions mono-industrielles. Vous connaissez le village de Crabtree. Si l'usine de papier Scott fermait ses portes demain matin, cette municipalité de 3 000 habitants...

M. Denis Coderre: La région mangerait une claque.

M. Sylvain Parent: Voilà. Si je fermais les portes de l'usine de Clermont, qui est également dans une région mono-industrielle, la même situation se produirait. Toute l'industrie papetière et forestière se trouve dans des régions mono-industrielles. Si on dit vouloir tenir compte des particularités de chaque région, on rencontrera des difficultés parce que chacune d'elles a des besoins différents. Nous avons recours à tous les moyens qui sont à notre disposition. On les a énumérés et présenté des suggestions quant aux solutions que nous souhaiterions mettre en oeuvre.

Je suis convaincu que vous serez en mesure de confirmer l'existence de la prochaine réalité que je vais décrire. Je travaille dans ce milieu depuis tout près de 20 ans. Malgré toute la volonté dont on peut faire preuve et tous les programmes de formation qui visent à réintégrer les personnes âgées au milieu du travail, je vous dirai, monsieur Coderre, que très peu de travailleurs âgés de 45 à 55 ans trouvent un nouvel emploi dans notre milieu. Comme le mentionnait Élie, à l'époque où ces travailleurs ont commenté à travailler dans cette industrie, l'employeur engageait des bras, alors qu'aujourd'hui, il veut avoir des compétences, des compétences et des compétences pour faire face aux défis de la mondialisation.

Même si les travailleurs de 50 et 55 ans qui ont perdu leur emploi vont frapper à la porte du voisin pour demander un emploi, on les accueillera peut-être très poliment, mais après l'exercice de politesse, ils se retrouveront sans emploi. C'est la réalité d'aujourd'hui. Je ne veux pas avancer de pourcentages, mais la réalité est dure aujourd'hui. Ce constat prévaut dans toutes les régions.

M. Denis Coderre: On ne conteste pas le fait qu'il y a une génération qui aura beaucoup plus de difficulté à s'adapter à la nouvelle réalité, et c'est pour cette raison que nous devons adopter une politique qui comportera des mesures à court terme et à long terme. On est d'accord là-dessus.

M. Sylvain Parent: Oui.

M. Denis Coderre: Monsieur Parent, il est également important qu'un gouvernement administre ses finances publiques de façon responsable. Est-ce que la la Fédération des travailleurs et des travailleuses du papier et de la forêt a calculé quelle somme ses demandes représentent?

M. Sylvain Parent: Vous comprendrez que le premier exercice de calcul qu'on a fait avait pour but d'évaluer combien il en coûterait pour permettre à nos travailleurs et travailleuses de quitter leur milieu de travail tout en ayant des revenus décents qui leur permettront de vivre sans avoir à souffrir de la pauvreté. Notre première préoccupation, monsieur Coderre, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, est le bien-être de nos membres.

Si vous me demandez plus précisément si, en tant qu'organisation syndicale, nous avons évalué les coûts pour tous les travailleurs, je vous répondrai que je suis convaincu que vous pouvez compter sur les services de comptables qui sont capables de faire ce calcul.

• 1155

M. Denis Coderre: Si vous ne les avez pas, ce n'est pas grave. Vous ne les avez pas?

M. Sylvain Parent: Non.

M. Denis Coderre: En passant, vous saluerez votre nouveau président. Vous avez eu des élections dernièrement. J'entends souvent le mot «concertation». Cela sonne comme de la musique à mes oreilles, venant de la CSN.

M. Sylvain Parent: Merci.

La présidente: Merci.

Monsieur Vellacott.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott (Wanuskewin, Réf.): D'accord, j'ai besoin de plus de précisions sur l'exemple que donne M. Cyr, au paragraphe (6), où il dit qu'on a négocié des indemnités de 10 000 $ à 25 000 $—je suppose que c'était le montant par personne—pour ce projet. Les travailleurs participaient au projet. Il s'agissait donc de 10 000 $ à 25 000 $ d'indemnités qui ont pu être consacrées au projet.

Les travailleurs ont-ils investi la totalité de leurs indemnités dans le projet? Est-ce bien ce qui s'est passé?

[Français]

M. Élie Cyr: Les indemnités de départ sont de 10 000 $ ou 25 000 $ par travailleur, mais à l'heure actuelle, aucun employé n'a encore été mis à pied. Quand la mise à pied va se produire, les travailleurs vont investir leur indemnité de départ dans l'industrie qu'on veut créer. Si le timing de l'Abitibi-Consolidated n'est pas bon et que nos travailleurs reçoivent de l'assurance-emploi, l'indemnité de départ qu'on a négociée sera déduite de leurs prestations d'assurance-emploi. Les travailleurs n'auront donc pas d'argent à investir dans le projet.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott: Très bien. Ainsi, si je comprends bien, ils n'ont pas encore reçu l'indemnité. Ils ne la recevront que quand leur emploi prendra fin, bien entendu. Il s'agit de quelque chose que vous avez négocié et dont ils bénéficieront quand leur emploi prendra fin. C'est bien cela? Il s'agit simplement d'un engagement relatif à une indemnité future.

[Français]

M. Élie Cyr: C'est un engagement de l'employeur.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott: On est donc sûr que la coopérative pourra être mise sur pied. Ou la question est-elle toujours en suspens?

[Français]

M. Élie Cyr: Au moment où l'on se parle, on en est au financement de la coopérative. On a rencontré REXFOR, qui investit dans des coopératives pour créer de l'emploi. Nous avons assuré notre approvisionnement en matières premières et nous avons trouvé un vendeur qui aura 52 points de vente aux États-Unis.

Il nous reste à faire asseoir ensemble tout ce monde. Nous aurons une rencontre dans les prochaines semaines pour le financement du projet. Le fonds de la CSN investit dans notre projet, ainsi que REXFOR et la SDJ. Maintenant, il reste à regarder la part des travailleurs et la place de chacun là-dedans.

M. Sylvain Parent: J'aimerais ajouter quelque chose. M. Coderre disait qu'il était surpris que la CSN fasse une démarche de concertation. La CSN innove beaucoup. La coopérative est un projet syndical, et il faut le mentionner. C'est quelque chose de fort intéressant. De plus en plus, ce sont les organisations syndicales qui mettent sur pied des projets qui permettront de maintenir des emplois. C'est une responsabilité sociale qu'on partage avec l'entreprise et les gouvernements.

M. Paul Crête: Le Fonds de solidarité et...

M. Sylvain Parent: C'est exact, et le Fonds d'actions.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott: Je voudrais aussi obtenir des précisions à savoir si cette indemnité de 10 000 $ à 25 000 $, ou de quelque autre montant qui serait versé par travailleur, et qui sera investi dans le projet, fera des travailleurs des actionnaires du nouveau projet. Auront-ils des parts, ou verseront-ils simplement leur argent dans le projet sans plus? Auront-ils une «part», ou un pourcentage de la nouvelle entreprise—des actions?

[Français]

M. Élie Cyr: C'est une coopérative de travailleurs actionnaires. Cela devient une part de l'industrie, et les travailleurs retireront des bénéfices au niveau de l'industrie.

M. Paul Crête: Le problème, c'est que c'est retenu à titre de salaire.

M. Élie Cyr: Oui, c'est retenu à titre de salaire. Comment voulez-vous que j'explique cela?

• 1200

M. Paul Crête: Le problème est le fait que ces sommes sont considérées comme un gain et que cela a une incidence négative sur les prestations d'assurance-chômage. Dans le cadre des procédures existantes, on donne une réponse négative à l'initiative qui a été prise.

[Traduction]

M. Maurice Vellacott: La question que je pose maintenant sera ma dernière. Si le projet se concrétise et que tout va très bien, les travailleurs, pour ce qui est des dividendes qu'ils en retireront... Je veux dire qu'ils auraient leur salaire mensuel, plus les dividendes. Si le projet prenait son envol, comme on l'espère, les travailleurs en retireraient de bons dividendes, et on ne verrait pas d'inconvénient à ce que ces dividendes soient imposés. Ce qui vous préoccupe, c'est que, si le projet échoue ou qu'il est chambranlant, l'indemnité ne devrait pas compter au détriment des les travailleurs.

[Français]

M. Élie Cyr: Le problème est le fait que lorsqu'un travailleur reçoit une indemnité de licenciement de la part de l'employeur et doit présenter une demande pour obtenir des prestations d'assurance-emploi, le ministère du Développement des ressources humaines considère que l'indemnité de départ du travailleur est un gain. Par exemple, si le travailleur reçoit 10 000 $, le ministère pourra établir que cela équivaut à un salaire de 1 000 $ par semaine pendant 10 semaines, ce qui ferait en sorte que le travailleur ne serait plus en mesure d'investir ces 10 000 $ dans la coopérative. C'est là qu'est le problème. Si l'industrie démarre et qu'elle est rentable, les travailleurs toucheront un salaire décent qui leur permettra de vivre et ils seront en mesure de continuer à travailler. Mais il faut qu'ils puissent investir leur indemnité de départ pour que l'industrie puisse démarrer.

[Traduction]

La présidente: Merci.

[Français]

Madame Girard-Bujold.

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Bonjour, messieurs Cyr et Parent. Je suis très heureuse que vous soyez venus et que vous ayez répondu favorablement à mon attente et à ma demande.

Malgré ce que dit M. Coderre, ça fait des décennies que la région du Saguenay—Lac Saint-Jean essaie de ne pas dépendre des gouvernements. On a toujours été des gens innovateurs et on a tout fait pour se prendre en main. Mais au-delà de tout ça, monsieur Coderre, il y a des problèmes qui touchent actuellement les personnes âgées. Toutes les personnes ici présentes, y compris M. Crête, ont réussi à faire en sorte que ce comité se penche enfin sur ce dossier.

MM. Parent et Cyr sont venus mettre en lumière la réalité que vivent les personnes âgées de 45 à 50 ans. Bien qu'on dise à ces personnes de se recycler, elle doivent faire concurrence à des plus jeunes sur un marché où il n'y a ni emploi ni mobilité. Tous ces facteurs font en sorte qu'il ne subsiste aucun espoir pour ces personnes-là.

Je ne crois pas que dans la province où vit le député réformiste, il y ait de coopératives parce qu'il ne semble pas comprendre ce qu'est une coopérative. Le gouvernement doit écouter les revendications du syndicat de Kénogami et comprendre que c'est le temps d'aider ces travailleurs-là afin qu'ils puissent bénéficier pleinement de leur indemnité de départ. Le gouvernement les pénalise lorsqu'ils demandent d'avoir accès aux prestations d'assurance-emploi et réduit les sommes auxquelles ils devraient avoir droit. Il y a quelques années, on pouvait recevoir des prestations d'assurance-emploi pendant 52 semaines, mais on a depuis modifié les critères d'admissibilités et les sommes accordées. On ne leur accorde maintenant des prestations que pendant 12 à 14 semaines, ce qui ne représente pas une indemnisation bien décente.

Les efforts déployés par les travailleurs de l'usine de Kénogami ne représentent qu'une petite bille qu'on peut mettre à l'intérieur de la problématique que vivent présentement ces personnes-là. M. Parent ne peut pas vous fournir de chiffres, monsieur Coderre. C'est une tâche qui vous appartient à vous, du gouvernement. Ils sont venus nous décrire la réalité qu'on vit sur le terrain. Les gouvernements en sont très loin et ils ne sont pas conscients de cette réalité. On peut tenir de beaux discours, mais ce sont ces travailleurs qui doivent vivre cette réalité à tous les jours.

M. Denis Coderre: Vous avez parfaitement raison: vous avez un premier ministre dans votre comté et la réalité que vous décrivez existe vraiment.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur Coderre, vous pouvez dire n'importe quoi, mais ce problème a été créé de toutes pièces par tous les paliers de gouvernement qui ont fait preuve de désengagement et qui ont négligé d'adopter des mesures proactives à l'égard de ces travailleurs âgés. Il n'y a pas qu'au Québec que des travailleurs vivent des situations semblables à celle que vivent les travailleurs de l'usine de Kénogami et M. Cyr. Comme le soulignait M. Parent, ces usines sont exploitées dans des régions mono-industrielles. Cette problématique prévaut à la grandeur du pays, dans toutes les autres provinces.

• 1205

Je pense qu'il est temps d'agir. Monsieur Parent et monsieur Cyr, je ne sais pas si vous auriez un message percutant afin que les gouvernements se réveillent, plus particulièrement ce gouvernement, qui doit cesser de faire de belles grandes phrases, passer à l'action et vous donner les moyens d'agir.

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Je pensais que le rôle de l'opposition était justement de présenter des solutions de rechange.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Madame Folco...

Mme Raymonde Folco: Je vous écoute, madame Girard-Bujold.

La présidente: Vous avez la parole. On va entendre nos témoins.

M. Élie Cyr: La seule chose que je peux vous dire, c'est que la semaine dernière, nous avons rencontré les 200 employés qui perdaient leur emploi. Certains travailleurs étaient accompagnés de leur épouse. Je peux vous dire que ce n'est pas facile pour certains travailleurs. Ils se demandent ce qu'ils vont faire après. Ils se demandent où ils vont, où ils vont vivre.

Lorsque Abitibi-Consolidated était Abitibi-Price, il y avait des programmes d'aménagement du travail pour donner de l'emploi au plus grand nombre de gens possible. Depuis la fusion qu'il y a eu à Abibiti-Consolidated, aucun aménagement du temps de travail n'est prévu. Cela veut dire une réduction du temps de travail pour qu'on puisse garder plus de monde, ou toutes sortes de choses connexes pour garder plus de gens à l'emploi. On voit ces familles lorsqu'il y a des réunions au bureau. Ce n'est pas facile pour elles.

Tout le monde suit le projet que l'on a entrepris et pose des questions. Nous sommes allés en Europe, il n'y a pas longtemps, voir un fabricant d'équipement.

Tout le monde se pose des questions. Nous allons avoir une assemblée, et nous nous demandons qui va entrer dans cette usine. Deux cents personnes perdent leur emploi, et on ne peut en engager que 80.

Allez dire à quelqu'un qu'il n'entrera pas dans l'usine. Je pense que je vais démissionner cet automne pour ne pas avoir à répondre à ces questions, parce que ce n'est pas vraiment facile de dire à quelqu'un qu'il n'entrera alors qu'on sait que cette personne a une femme et des enfants.

M. Denis Coderre: Dans le fond, je comprends que Mme Girard-Bujold veuille marquer des points...

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Monsieur Coderre...

M. Denis Coderre: J'invoque le Règlement, madame la présidente.

La présidente: Vous invoquez le Règlement? J'espère que ce ne sera pas un débat, parce que Mme Girard-Bujold a encore cinq minutes, mais allez-y.

M. Denis Coderre: J'ai le droit d'invoquer le Règlement.

Je veux simplement que vous disiez à vos employés que le monopole de la vérité n'est pas toujours du même côté que les partis politiques. Notre rôle au sein du gouvernement est aussi de nous assurer que l'on veuille améliorer la qualité de vie des gens. Je prends personnellement le message que vous m'envoyez.

On a fait le tour du Québec et on a pu voir qu'il y avait d'autres problèmes. Il y a des usines qui ferment dans les régions, et j'ai donné certaines pistes de solution, notamment l'élaboration d'une politique des régions. Je prends bonne note de vos propos.

La présidente: Je vous remercie de vos commentaires, mais ce n'était pas un recours au Règlement. C'était un commentaire. Madame Girard-Bujold, il vous reste cinq minutes.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Madame la présidente, je veux dire à M. Coderre que je n'essaie pas de me faire du capital politique. Monsieur Coderre, vous me connaissez très mal. J'ai toujours été très près des gens de chez nous, même quand je n'étais pas en politique, et j'ai toujours fait en sorte que leurs voix soient projetées plus haut afin qu'elles puissent être entendues.

Madame Folco, nous, les députés d'opposition, faisons venir des gens pour vous faire part de la réalité, pour vous dire qu'ils ont des solutions pour faire avancer la cause des travailleurs. Vous en avez une preuve, madame Folco.

Mme Raymonde Folco: Madame Girard-Bujold...

La présidente: À l'ordre! Madame Girard-Bujold.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Je m'excuse, madame. Je n'ai pas l'habitude de faire cela, mais je n'avais pas d'autre choix.

La présidente: On a la possibilité d'entendre l'avis de nos témoins. Il vous reste encore cinq minutes. Si vous avez des questions, on pourra entendre ce qu'en pensent nos témoins.

Mme Jocelyne Girard-Bujold: Dans notre région, il y a eu une expérience de travail partagé à l'usine Alcan de Jonquière. Cela a duré trois ans.

Les gens travaillaient 40 heures; ils étaient payés pour 38 heures et gardaient deux heures en banque. Le gouvernement fédéral, le gouvernement provincial et l'Alcan participaient à ce programme. On a ainsi créé 150 emplois permanents qui ont été acceptés dans le cadre de la nouvelle entente conclue avec l'Alcan. Est-ce que vous ne trouvez pas que ce serait un bonne initiative? Cela a permis de garder les travailleurs âgés et d'en engager de nouveaux.

La présidente: Monsieur Parent.

• 1210

M. Sylvain Parent: J'aimerais terminer en vous laissant un message.

Aujourd'hui, nous sommes dans une société où les choses vont très vite. Nous sommes dans une économie qui change continuellement. Tous les éléments sont mis en place et se développent à un rythme très rapide. Malheureusement, souvent, il y a des personnes de diverses couches de la société qui sont prises en otage à cause des contextes et des décisions qui sont prises.

Je voudrais parler des jeunes. On encourage beaucoup les jeunes à poursuivre leurs études, on veut éviter le décrochage et on veut que ces gens aient la possibilité d'entrer facilement sur le marché du travail, mais en même temps, on tient un langage différent. Les situations et les contextes sont contradictoires. Comme je l'expliquais plus tôt, tous les changements qui se produisent dans les industries réduisent le nombre d'employés dans plusieurs entreprises. Cela est vrai entre autres dans notre secteur d'activité.

Cela a pour effet de nuire à notre industrie. On ne donne pas aux personnes âgées ce qu'il faut pour qu'elles aient un revenu intéressant et décent. Il faut éviter la pauvreté de ces personnes. En même temps, il faut des outils permettant aux jeunes d'entrer dans les entreprises, afin que l'on puisse mettre à profit leurs compétences. Il faut que ces deux groupes puissent se rejoindre et que l'on trouve une approche répondant à leurs besoins.

Il y a un autre aspect dont je voudrais parler. Nous avons des responsabilités syndicales; nous essayons de les assumer au maximum pour la protection de l'emploi et pour la création d'emplois, mais nous avons aussi nos limites, et il faut le reconnaître. Parfois nous sommes confrontés à des employeurs qui qui ne sont pas nécessairement sensibles aux mêmes points que nous.

Je crois aussi que les gouvernements ont une responsabilité sociale et qu'ils doivent légiférer, notamment au sujet du temps supplémentaire. Il faut donner aux employés la possibilité de travailler en temps partagé et de faire des semaines réduites.

Dans certaines entreprises, on a réussi à le faire accepter et à maintenir des emplois parce qu'on a été capables de négocier, mais il faut bien reconnaître que ce ne sont pas toutes les entreprises qui nous permettent de le faire.

Il faut que les gouvernements nous donnent les outils nécessaires pour répondre à l'ensemble des besoins. Nous croyons que l'ensemble des mesures permettront aux jeunes de prendre leur place et permettront également aux personnes âgées qui ont consacré 20 ou 30 ans de leur vie à l'emploi d'une entreprise et qui ont participé au développement économique d'avoir leur place dans la société.

Je terminerai en disant que les paroles sont une chose, mais que l'action est extrêmement importante. Nous vous demandons de passer à l'action le plus rapidement possible. Merci.

La présidente: J'aimerais vous poser une question.

Vous avez parlé des obligations du gouvernement. Comme représentant syndical, vous sentez-vous l'obligation de préparer les travailleurs âgés, même quand ils quittent votre industrie? Si vous avez les ressources pour faire la préparation des personnes âgées, pensez-vous que ce serait une approche nouvelle que de préparer les personnes âgées?

M. Sylvain Parent: Il faudrait peut-être définir les ressources qu'on pourrait avoir.

La présidente: Si le gouvernement rendait les ressources disponibles afin que le syndicat forme les gens, envisageriez-vous la possibilité de les préparer?

M. Sylvain Parent: Je crois que oui.

La présidente: Oui?

M. Sylvain Parent: Oui.

La présidente: Je sais que c'est une nouvelle idée et que vous n'y avez peut-être pas encore réfléchi. Vous nous avez dit qu'on avait besoin de nouvelles approches.

• 1215

On essaie toujours d'aider les personnes âgées à la fin, quand elles sont désespérées et qu'elles sont mal prises. Je pense que si on doit adopter une nouvelle approche, il faut commencer dès le début et non à la fin.

Vous avez parlé des obligations du gouvernement, mais je me demande si c'est une responsabilité que l'on peut partager avec les syndicats, en partenariat avec le gouvernement.

M. Sylvain Parent: Nous sommes ouverts à toute nouvelle mesure.

La présidente: D'accord. Merci.

Madame Davies.

[Traduction]

Mme Libby Davies: Merci.

Je voulais revenir sur ce que disait M. Parent.

Vous parliez de la rapidité avec laquelle le marché et l'économie changent et du fait que, dans ce contexte, les travailleurs sont laissés pour compte. Ils sont au bas de la liste des priorités. Il me semble que, dans cette étude que nous faisons des travailleurs âgés, il faut notamment poser comme critère fondamental le besoin d'une certaine sécurité économique. Enfin, le travailleur typique peut travailler pendant 20 ans ou 30 ans pour une entreprise en particulier et, du jour au lendemain, être remercié de ses services. Quoi que nous envisagions comme solution, indemnité de départ, recyclage, retraite anticipée ou prestations d'assurance-emploi, si restreintes soient-elles, le maintien de la sécurité économique des travailleurs doit être primordial, car c'est l'absence de cette sécurité qui est le plus gros problème. Quand les travailleurs n'ont pas cette sécurité, même si elle est à court terme, il est très, très difficile pour eux de chercher à se recycler ou à acquérir de nouvelles compétences. Plus ils vieillissent, plus c'est difficile.

Je me demande simplement, quand on parle du rôle des différentes parties... Je suis d'accord pour dire que le gouvernement a un rôle à jouer, de même que les syndicats et l'employeur. Il me semble que, trop souvent, on laisse à chaque syndicat le soin d'essayer d'arracher tout ce qu'il peut à l'employeur, car il n'existe pas de principe selon lequel il faut assurer le maintien de la sécurité économique. Le gouvernement doit avoir un rôle à jouer à cet égard, de même que les syndicats et l'employeur.

Je me demande simplement si vous approuvez avec cette façon de voir les choses. Nous tentons ici de trouver des moyens de venir en aide aux travailleurs âgés qui se trouvent aux prises avec des circonstances très difficiles. Je pense que leur situation devient de plus en plus désespérante. Il est très difficile, vous savez, quand on atteint la fin de la quarantaine ou qu'on est dans la cinquantaine, de penser que, du jour au lendemain, l'emploi qu'on occupe depuis vingt ou trente ans pourrait simplement disparaître.

[Français]

M. Élie Cyr: On est entièrement d'accord.

[Traduction]

La présidente: On est d'accord, madame Davies.

Y a-t-il d'autres questions?

[Français]

J'aimerais vous remercier. Vos commentaires nous ont fait beaucoup réfléchir.

[Traduction]

Nous suspendons la séance pendant deux minutes, puis nous siégerons à huis clos. Merci.

[Note de la rédaction—La séance se poursuit à huis clos]