JURI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON JUSTICE AND HUMAN RIGHTS
COMITÉ PERMANENT DE LA JUSTICE ET DES DROITS DE LA PERSONNE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mardi 5 mai 1998
[Traduction]
La présidente (Mme Shaughnessy Cohen (Windsor—St. Clair, Lib.)): Bienvenue. Nous poursuivons notre étude du Budget des dépenses.
Nous entendrons aujourd'hui les représentants de la Commission canadienne des droits de la personne: Michelle Falardeau-Ramsay, présidente; John Hucker, secrétaire général; Joanne Baptiste, directrice, Direction des services de gestion et du personnel; et Denis Pelchat, chef des services financiers.
Je vous souhaite la bienvenue à tous. Avez-vous un exposé à nous présenter ou avez-vous l'intention de vous jeter directement dans la fosse aux lions?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay (présidente, Commission canadienne des droits de la personne): Non, nous avons toujours des choses à vous dire.
La présidente: C'est bien ce que je pensais. Je vous laisse la parole.
[Français]
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Merci. Madame la présidente et membres du comité, je suis heureuse d'être ici aujourd'hui pour vous parler du travail, des priorités et des projets d'avenir de la Commission canadienne des droits de la personne.
Comme vous le savez sans doute, c'est un moment particulièrement important pour la commission. Nous célébrons cette année notre 20e anniversaire ainsi que le 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l'homme. C'est une belle occasion de faire le bilan des progrès accomplis par le Canada dans le domaine des droits de la personne et d'évaluer l'apport de la commission à cet égard. Mais c'est aussi un moment propice pour bien réfléchir aux droits à l'égalité dans le Canada de demain et à ce qui pourrait être fait pour que nous soyons mieux en mesure de faire face aux nouvelles réalités. Il n'est donc pas étonnant que cette année de célébration, à la commission, ait pour thème «Des progrès accomplis aux défis à venir».
Comme nous le mentionnons dans notre récent rapport annuel et dans notre rapport sur les plans et les priorités, il ne fait aucun doute que le Canada a réalisé des progrès importants pour ce qui est du respect des droits à l'égalité. Je crois que notre société est maintenant plus ouverte et plus tolérante qu'il y a 50 ans ou même 20 ans, et plus disposée à reconnaître et à accepter la diversité. Cela ne veut pas dire pour autant que la situation des droits de la personne est parfaite; si c'était le cas, la commission pourrait fort bien fermer boutique. Or, nous sommes toujours confrontés à d'importants défis, tant dans certaines sphères des droits à l'égalité que sur le plan de l'efficacité, de l'efficience et de l'accessibilité de nos services.
[Traduction]
Il est clair qu'un organisme de défense des droits de la personne ne peut être plus efficace que les outils dont il dispose, et les principaux outils de la Commission sont la Loi canadienne sur les droits de la personne et la Loi sur l'équité en matière d'emploi.
La Loi canadienne sur les droits de la personne nous a bien servis au fil des ans, et ce, depuis son adoption en 1977. Non seulement elle guide les travaux de la Commission, mais elle est aussi un important agent de changement social. Les décisions rendues par les tribunaux et les cours de justice relativement à des plaintes déposées en vertu de la loi ont beaucoup enrichi la jurisprudence des droits de la personne au Canada.
• 1540
Mais la loi n'est pas immuable; il faut l'analyser et
l'améliorer constamment pour qu'elle demeure efficace. La dernière
fois que j'ai comparu devant le comité, il n'y a pas si longtemps
en fait, c'était pour communiquer le point de vue de la Commission
au sujet du projet de loi S-5. Nous avons alors dit qu'il
s'agissait d'une initiative importante, tant pour ses dispositions
relatives aux mesures d'adaptation pour les personnes ayant une
déficience que pour ses modifications opérationnelles visant à
rendre le processus de traitement des plaintes plus efficace.
Depuis, la nécessité de réformer le système des tribunaux s'est
imposée de façon encore plus pressante par suite de la décision
rendue par la Cour fédérale relativement à l'indépendance de ces
derniers.
Nous sommes donc très heureux que le projet de loi ait été adopté en troisième lecture à la Chambre des communes la semaine dernière et nous avons bon espoir qu'il devienne loi dans un très proche avenir. Je tiens à remercier tout particulièrement les membres du comité de leur appui.
Si important que puisse être le projet de loi S-5, nous ne le considérons pas comme l'aboutissement final du processus de modification de la loi. Lorsqu'il a été déposé à l'origine, la ministre de la Justice a annoncé que la Loi canadienne sur les droits de la personne ferait aussi l'objet d'un examen exhaustif à un moment donné. Nous sommes tout à fait d'accord pour dire qu'il faut examiner la loi à fond de manière qu'elle puisse vraiment protéger les droits des Canadiens et des Canadiennes à l'avenir.
Elle a fait l'objet d'un certain nombre de modifications au fil des ans, mais elle n'a pas changé fondamentalement depuis son adoption en 1977. Parallèlement, notre société a connu d'importants changements sociaux et démographiques, qui posent des défis considérables sur le plan des droits de la personne.
Nous espérons que cet examen se déroulera dans un contexte le plus large possible et que les Canadiens des diverses régions du pays seront consultés. On devrait considérer les défis auxquels notre pays devra faire face en matière de droits de la personne au XXIe siècle et le genre de loi qui permettrait de mieux les relever.
Y a-t-il, par exemple, un meilleur moyen que le système de plaintes en vigueur pour disposer de questions comme la parité salariale? Les droits de la personne sont-ils définis de manière trop restrictive dans la loi? Peut-on faire en sorte que le système des droits de la personne soit moins litigieux et moins axé sur la confrontation? Ce ne sont là que quelques-unes des questions qui pourraient être soulevées lors de l'examen de notre loi.
[Français]
Même si nous souhaitons ardemment que la loi soit examinée et modifiée en conséquence, nous convenons que cela ne se fera pas du jour au lendemain. En attendant, notre plus grande préoccupation est de faire en sorte que la loi soit le plus efficace possible et nous y avons pensé avant toute autre chose lorsque nous avons élaboré nos plans et priorités pour les trois prochaines années.
Vous constaterez, par exemple, que l'une de nos priorités clés est d'examiner et de parfaire le processus de plaintes actuel pour qu'il soit plus souple et plus accessible. Bien conscients du fait que certains déploraient la lenteur et la bureaucratisation de notre processus, nous avons travaillé d'arrache-pied ces dernières années pour tenter de régler le problème. Je suis heureuse de pouvoir dire que nous avons marqué des progrès et que nous avons écourté le délai de traitement des plaintes. Notre tâche n'est pas encore terminée, mais nous espérons continuer à parfaire notre processus de traitement des plaintes au cours des trois prochaines années de manière à trouver un juste milieu entre la souplesse et l'équité de la procédure.
Nous reconnaissons également que le traitement des plaintes n'est qu'un volet du mandat conféré à la commission par la loi. Un autre volet important de notre travail consiste à prévenir et à diminuer la discrimination par nos programmes de sensibilisation du public, de recherche et d'information.
• 1545
Notre rapport sur les plans et les priorités dit de
ces activités qu'elles visent à «contribuer à une
meilleure compréhension des principes sur lesquels
reposent les droits de la personne au Canada et des
questions soulevées à ce titre».
Outre les activités de base, comme la production de
publications, les rencontres avec les employeurs et les
organismes communautaires, les réponses aux demandes de
renseignements des médias, nous mettons tout
particulièrement l'accent sur l'élaboration et la
diffusion de messages visant à favoriser le respect des
droits de la personne dans divers secteurs de la
société canadienne.
[Traduction]
Nous avons aussi défini quatre dossiers prioritaires pour les trois années en question: améliorer la situation des Autochtones, diminuer les obstacles pour les personnes ayant une déficience, améliorer la situation des femmes sur le marché du travail et accroître la représentation des minorités visibles dans la fonction publique fédérale.
Ces dossiers ont été retenus à la suite d'un long processus de réflexion et de discussion de la part de nos commissaires et de notre personnel. Il s'agit de dossiers où les choses n'ont pas progressé autant que nous l'aurions voulu et qui nécessitent, selon nous, une attention particulière. Ils touchent aussi des questions qui peuvent être abordées au moins partiellement dans le cadre de notre nouveau rôle en vertu de la Loi sur l'équité en matière d'emploi. Le processus de vérification va maintenant bon train, et nous avons bon espoir de nous servir des vérifications de l'équité en matière d'emploi pour mesurer et accroître la représentation des quatre groupes définis. Nous travaillons aussi à diverses initiatives de politique, de promotion et de conformité par rapport à ces priorités.
Ce n'est pas parce que nous avons établi des dossiers prioritaires que nous allons laisser tomber d'autres préoccupations ou négliger nos activités de base. Il faut reconnaître, du reste, que n'importe quel plan évolue avec le temps. Mais il est clair que ce que nous pouvons faire comme travail, dans un secteur ou dans un autre, dépend des ressources financières et humaines dont nous disposons.
Comme vous pouvez le constater dans notre budget des dépenses, celui-ci est plus serré que jamais et nous devons continuellement faire des choix déchirants quant à la façon d'utiliser nos ressources. Ce serait négligent de ma part de ne pas rappeler que nous sommes préoccupés par notre situation financière difficile et de ne pas formuler l'espoir que des ressources supplémentaires puissent nous être accordées un jour ou l'autre.
Je crois que je vais m'arrêter ici pour qu'il y ait assez de temps pour les questions. Je vous remercie de votre attention, et c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions ou à vos observations.
La présidente: Merci.
Vous avez des questions, monsieur Forseth?
M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Réf.): Oui, bien sûr.
La présidente: Vous avez dix minutes.
M. Paul Forseth: A la page 16 du document «Partie III—Rapport sur les plans et les priorités», on trouve un tableau sur les ressources du programme pour chaque direction de la Commission pour l'exercice 1998-1999. Au titre des cabinets des dirigeants, on prévoit dépenser 1,24 million de dollars et employer 13 équivalents temps plein.
Pourriez-vous nous parler de ces 13 postes et nous expliquer quelles sont les dépenses de fonctionnement de cette direction de la Commission? Nous pourrions ensuite parler des services juridiques.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Mon cabinet fait évidemment partie des cabinets des dirigeants. Les équivalents temps plein de ce secteur représentent mon propre poste et les postes du secrétaire général, du directeur exécutif, de six agents et de quatre employés de soutien.
Ce poste budgétaire paie également les dépenses et les déplacements des commissaires à temps partiel, les dépenses générales de voyage des 13 commissaires à plein temps, les frais des services de traduction, les frais généraux et tous les autres services qui sont normalement fournis pour le fonctionnement d'un tel organisme.
M. Paul Forseth: La direction des Services juridiques prévoit dépenser 1,79 million de dollars et employer 17 équivalents temps plein.
Il semblerait que la Commission doive faire exécuter du travail juridique par des avocats du secteur privé pour pouvoir assumer sa charge de travail actuelle. Est-ce bien le cas? Combien cela coûte-t-il? Comment ces coûts se comparent-ils à ceux du travail fait à l'interne par le personnel juridique de la Commission?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: L'an dernier, nous avons donné en sous-traitance un grand nombre de dossiers à des gens de l'extérieur parce que nous n'avions pas suffisamment d'équivalents temps plein pour faire tout le travail. C'est le premier aspect.
Deuxièmement, il est parfois moins coûteux de faire traiter un dossier par un avocat de la région—par exemple, un avocat de Vancouver peut traiter un dossier de Vancouver.
L'an dernier, nous avons dépensé environ 225 000 $ en contrats. Pour faire la comparaison avec le travail fait à la Commission, il faut savoir que la Commission compte 10 avocats à plein temps plus un avocat général. Ces avocats traitent la plupart des dossiers. Il faut également savoir qu'à l'heure actuelle, il faut en moyenne 10 jours devant les tribunaux par dossier, dont généralement un jour d'audience préliminaire, et dans le dossier le plus récent, un jour de médiation. Mais dans bien des cas, surtout dans les dossiers de harcèlement racial, il faut parfois de 30 à 40 jours. Il y a aussi les nouveaux dossiers comme celui de l'équité salariale, que nous avons traité, surtout le dossier qui opposait le Conseil du Trésor à l'AFPC et le dossier d'équité salariale des services postaux, pour lesquels il a fallu 300 jours d'audience sur une période de six ans. Les audiences de tels dossiers nécessitent la présence de deux avocats.
Et c'est sans compter les examens devant la Cour fédérale et les appels entendus par la Cour fédérale d'appel. Je puis vous assurer que nos avocats sont bien loin de se tourner les pouces.
M. Paul Forseth: Merci.
Dans les discussions sur le projet de loi S-5, on pensait qu'il serait possible de régler le problème de la discrimination de façon systémique plutôt qu'au cas par cas. Pourriez-vous nous expliquer comment vous essayez d'appliquer ces concepts? Modifiez-vous votre façon de fonctionner? Avez-vous des plans dans ce domaine et ces plans entraîneront-ils des modifications ultérieures à la loi?
Vous pourriez peut-être comparer les deux types de lutte à la discrimination, de façon systémique ou au cas par cas en fonction des plaintes.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Ce que nous aimerions mettre en place, au cours des trois prochaines années, c'est un moyen d'identifier dès le départ, parfois même avant que les plaintes soient rédigées, des dossiers qui pourraient être regroupés, et aussi ceux qui pourraient avoir les répercussions les plus importantes en raison du nombre de personnes en cause ou parce qu'ils établiraient un précédent. Au cours des derniers mois, nous avons mis sur pied ce genre de comité en mesure de prendre des décisions sur ces dossiers.
• 1555
D'après le libellé actuel de la loi, je ne crois pas que nous
puissions faire bien davantage pour ce qui est de la lutte
systémique. Mais nous essayons toujours de trouver de nouveaux
moyens d'appliquer cette lutte systémique de façon plus efficace
que le régime fondé sur les plaintes individuelles, qui existe
maintenant sous le régime de la loi.
M. Paul Forseth: L'équité salariale est une question très importante. Pourriez-vous nous dire, d'une façon générale et dans votre perspective, où nous en sommes et quelle est notre orientation dans ce dossier?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: C'est une question intéressante. Nous saurons probablement davantage où nous en sommes lorsque nous connaîtrons les résultats de l'appel interjeté de la décision du juge Muldoon dans le dossier de Bell.
Comme vous le savez peut-être, nous ne pouvions pas interjeter appel de cette décision nous-mêmes, puisque la Cour fédérale ne nous avait pas accordé la qualité d'intervenant à part entière. Mais je ne voudrais pas vous ennuyer avec tous ces détails techniques.
Les demandeurs en ont appelé de la décision et nous nous joindrons à cet appel. Nous estimons toutefois qu'à l'heure actuelle, le domaine de l'équité salariale est, des points de vue judiciaire et juridique, un écheveau à ce point embrouillé qu'il faudra trouver de nouveaux moyens de traiter ces dossiers.
On ne saurait, je le répète, traiter ces plaintes au moyen d'un régime fondé sur les plaintes. Un tel régime suscite des iniquités parce qu'il existe des employeurs contre qui aucune plainte n'est déposée et qui, de ce fait, n'ont pas à respecter les règles de l'équité salariale. Le régime actuel donne lieu à trop de litiges et de confrontations et nous devrions trouver une autre approche.
On pourrait par exemple adopter une approche fondée davantage sur la coopération et un système de surveillance, un peu comme c'est le cas pour l'équité en matière d'emploi. Nous pourrions ainsi obtenir des résultats supérieurs à ceux du régime actuel, qui nécessite trop de ressources.
M. Paul Forseth: Cela ressemble au droit de la famille. Il suffit de réunir les parties et de négocier une solution.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: J'estime que c'est une bonne solution. Parler de médiation et de négociation, cela semble être le truc à la mode, mais cela donne de bons résultats.
En fait, nous envisageons d'améliorer la structure de la médiation dans notre système. Ce faisant, nous examinons également ce qu'a fait la Commission ontarienne des droits de la personne, qui a utilisé la médiation et a obtenu d'excellents résultats. Nous pouvons étudier les mesures qu'elle a prises et essayer d'en faire autant.
M. Paul Forseth: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci.
Madame.
[Français]
Mme Madeleine Dalphond-Guiral (Laval-Centre, BQ): Vous avez ciblé dans votre rapport quatre clientèles que vous avez très bien identifiées. Comme j'ai eu le malheur d'enseigner très longtemps, j'ai envie de vous poser une question particulière. Quand vous parlez de représentation accrue, je suis sûre que vous avez en tête un pourcentage minimum que vous voudriez être en mesure d'atteindre d'ici un an, deux ans ou trois ans. Est-ce que vous pourriez nous préciser ce que veut dire pour vous une représentation accrue?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Vous parlez de la représentation accrue...
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Par exemple, au niveau du travail pour les communautés autochtones et les personnes handicapées. Je fais allusion à des choses qui sont mesurables. Il serait difficile de mesurer jusqu'à quel point on a sensibilisé les gens.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Vous avez tout à fait raison. D'ailleurs, c'est ce qu'on espère faire par l'entremise de nos vérifications dans le domaine de l'équité en matière d'emploi.
Comme vous le savez probablement, la situation des autochtones et des personnes qui ont des déficiences est actuellement épouvantable, tant dans le domaine privé que dans le domaine public. Par exemple, si on continue à employer les personnes qui ont des déficiences—petit train va loin—au taux où on les emploie actuellement dans les deux secteurs, il faudra 31 ans avant que leur présence soit équivalente à leur disponibilité. Il est donc important que ces personnes puissent au moins accomplir des progrès réels quant à leur représentation, tant dans le domaine privé que dans le domaine public.
La situation des autochtones n'est guère plus florissante. Dans le secteur privé, la situation est vraiment très mauvaise, tandis que dans le domaine public, leur représentation est beaucoup meilleure, probablement grâce à la présence du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. En l'absence de ce ministère, leur représentation serait grandement diminuée. Je pourrai vous fournir des chiffres un peu plus tard.
La représentation des femmes, tant dans le domaine public que dans le domaine privé, est généralement bonne. Elle correspond à leur disponibilité. Mais c'est dans des secteurs particuliers, par exemple dans des métiers traditionnellement exercés par des hommes, où les salaires sont souvent très intéressants, que leur représentation est moindre. Elles ont beaucoup de difficulté à percer dans ce domaine.
La même chose prévaut au niveau de l'intégration des femmes dans les postes de combat des forces armées. Ce n'est pas une situation très gaie, mais il faut se conformer à la décision du tribunal. Mais il reste qu'on voit depuis un an des changements considérables dans l'attitude des forces armées. Elles ont mis sur pied des systèmes de recrutement fort intéressants, et on verra d'ici un an ce que ça va donner. Elles ont pris toutes sortes de mesures, dont des cours et des colloques de sensibilisation à l'intention de leurs officiers et soldats en vue d'améliorer le sort des femmes dans le domaine.
Actuellement, la représentation des autochtones est de 1,2 p. 100 dans le secteur privé et les sociétés de la Couronne, alors que leur disponibilité est de 3 p. 100. Dans la fonction publique, leur représentation est de 2,4 p. 100, alors que leur disponibilité est de 2,6 p. 100, ce qui, comme je vous l'expliquais, est attribuable à la présence du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien.
La représentation des personnes qui ont des déficiences est de 2,7 p. 100 dans le secteur privé, alors que leur disponibilité est de 6,5 p. 100. Dans la fonction publique, leur représentation est de 3,3 p. 100, alors que leur disponibilité est de 4,8 p. 100.
• 1605
Quant aux membres des minorités visibles, leur
représentation dans le secteur privé est de 9,2 p. 100,
ce qui correspond à leur disponibilité, qui est de 9,1
p. 100. Mais dans la fonction publique, leur
représentation est de 4,7
p. 100, alors que leur disponibilité est de 9 p. 100.
Ces données sont basées sur le recensement de 1991.
Quand nous aurons obtenu toutes les données
du dernier recensement,
nous constaterons probablement que la disponibilité a
considérablement augmenté et qu'elle se situe à 11
ou 12 p. 100.
Mme Madeleine Dalphond-Guiral: Je m'excuse d'être arrivée en retard. Vous parliez de la loi. Bien sûr, tout est perfectible, y compris nous et même les lois. À la lumière de votre expérience à la commission, quels sont les éléments majeurs sur lesquels on devrait se pencher pour rendre la Loi canadienne sur les droits de la personne plus up to date, comme on dit?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: En premier lieu, il faudrait voir si la notion de droits de la personne devrait rester telle quelle ou être élargie. Par exemple, devrait-on considérer les obligations auxquelles le Canada s'est engagé en signant des instruments internationaux, dont le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels?
On pourrait aussi se demander de quelle façon on pourrait s'attaquer à l'aspect systémique de la discrimination et à quels systèmes on pourrait avoir recours pour s'y attaquer. Par exemple, que pourrions-nous faire si on se rendait compte à un moment donné qu'en raison du nombre de plaintes qu'on reçoit, il y a un problème de harcèlement sexuel dans un ministère ou chez un employeur du domaine privé, ou un problème de prestation de services, comme celui qui s'est produit il y a quelques années? On n'a pas de moyens, sauf celui des plaintes individuelles, de s'attaquer à ce problème.
Quand on reçoit une plainte individuelle, on règle le problème de telle personne, mais on ne règle pas le problème de l'ensemble, ce qui est très frustrant et exige beaucoup de ressources. C'est la même chose dans le domaine de la discrimination raciale. Je n'ai pas toutes les réponses. Je m'attends justement à ce qu'il y ait des consultations et que les groupes concernés, soit les employeurs, les syndicats, les groupes communautaires et les personnes qui viennent chez nous à titre de partie plaignante ou mise en cause, nous arrivent avec des idées afin de nous aider à mettre sur pied un système qui s'avérera plus approprié pour régler le genre de problèmes qu'on rencontre dans le moment.
Cela ne veut pas dire qu'il faut mettre de côté les plaintes individuelles, parce qu'il est parfois nécessaire qu'il y ait un système de recours qui soit individuel. Il y a tout un autre secteur qui n'est pas touché par la loi, ou enfin qu'on touche difficilement.
[Traduction]
La présidente: Monsieur McKay.
M. John McKay (Scarborough-Est, Lib.): Merci, madame la présidente.
Lorsque les représentants des banques ont comparu au sujet du projet de loi S-5, ils se sont plaints entre autres de perdre beaucoup de temps en interminables procédures légales à la suite de plaintes systémiques. À la place qu'ils occupent dans le système, ils n'avaient aucun moyen de mettre fin à ces procédures. Chaque fois qu'ils croyaient avoir une solution à une plainte, une nouvelle plainte se présentait et tout était à recommencer. Le représentant d'une banque, en particulier, s'est plaint d'une affaire devant la Commission qui avait duré neuf ans.
• 1610
J'aimerais savoir si vous avez l'intention d'imposer le mode
substitutif de règlement des différends pour que ces plaintes
soient résolues dans des délais raisonnables.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je ne peux pas commenter cette plainte en particulier, car je ne la connais absolument pas, mais en règle générale, chaque fois que nous recevons une plainte, nous nous en occupons. Il y a parfois des amendements, mais cela se produit très rarement car le tribunal rend une décision qui interdit d'apporter un amendement à la plainte.
Pour revenir à votre question au sujet de la médiation, à mon avis, il est tout à fait possible de régler beaucoup de plaintes avant même qu'elles ne soient déposées par écrit à la Commission. Plus longtemps on s'occupe d'une plainte, plus les gens ont tendance à s'enfermer dans leur point de vue et à refuser d'en sortir. Il vaut beaucoup mieux commencer tout au début et essayer un terrain d'entente susceptible de satisfaire, au moins dans une certaine mesure, les deux parties.
M. John McKay: Est-ce qu'il y a une procédure qui vous permet d'intervenir avant que les points de vue se cristallisent pour aboutir à des conflits?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Pour l'instant, nous n'avons pas vraiment ce pouvoir.
M. John McKay: À ce sujet, est-ce que vous pensez que ce pouvoir serait nécessaire?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Personnellement, je ne le pense pas, et c'est la raison pour laquelle nous avons l'intention de le faire, car nous pouvons déjà aller passablement loin sans pouvoir légal.
M. John McKay: J'imagine que la Commission dispose d'une grande latitude lorsqu'il s'agit de fixer des règles et des règlements.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui, c'est la raison pour laquelle ce genre de chose me semble important. C'est aussi la raison pour laquelle j'ai dit tout à l'heure à M. Forseth que c'est un domaine où nous avons l'intention d'agir au cours des trois prochaines années. Nous pensons pouvoir régler beaucoup d'affaires de cette façon-là sans devoir attendre le processus de conciliation officiel ou légal qui est prévu par la loi, mais tout de même après enquête.
M. John McKay: Pensez-vous pouvoir le faire autant dans les affaires de discrimination systémique que lorsque vous recevez des plaintes de particulier?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Cela risque d'être très difficile, car à l'heure actuelle les seules affaires de discrimination systémique que nous avons sont des affaires de parité salariale. C'est intéressant, car avec les banques, nous n'avons pas d'affaire de parité salariale.
M. John McKay: Si je me souviens bien, cela était rangé dans la catégorie «obligation d'accommodement». Chaque fois qu'on accordait une marge, celle-ci semblait se déplacer, et il y avait une autre obligation d'accommodement. Autrement dit, ce concept de l'obligation d'accommodement était en expansion permanente.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Cela voulait dire, à mon avis, que lorsqu'un aveugle demande certains arrangements, la question est réglée pour cet aveugle, mais un sourd pouvait se présenter et réclamer d'autres types d'arrangement ou d'accommodement.
M. John McKay: Mais ce serait une plainte secondaire, j'imagine.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Non, ce serait une plainte complètement différente, venant de quelqu'un d'autre.
M. John McKay: Précisément.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Si c'était possible de régler ces affaires d'une façon systémique, ce serait beaucoup plus facile pour toutes les parties concernées.
• 1615
Toutefois, cela exigerait un pouvoir légal. Pour l'instant,
nous ne pouvons pas accepter une plainte de nature systémique. Nous
pouvons essayer de régler le problème dans une certaine mesure en
essayant de déceler dès le départ, comme je l'ai dit tout à
l'heure, certaines affaires qui peuvent être regroupées, mais si on
s'aperçoit que toutes ces affaires sont en réalité individuelles,
à ce moment-là, nous pouvons essayer d'agir sur ce plan-là.
M. John McKay: Et là encore, vous pouvez le faire en suivant vos propres règles et procédures et non pas par la voie d'amendements législatifs?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Eh bien, oui et non; en effet, si ces affaires devaient aboutir devant le tribunal, nous ne pourrions pas les regrouper. La loi nous empêcherait de le faire. Par contre, nous pourrions les regrouper aux fins de l'enquête et de la médiation.
M. John McKay: Ma seconde question porte sur les avocats de l'extérieur et la sous-traitance dans ce domaine. Je vois que votre budget brut est d'environ 1,8 million de dollars.
Je n'ai pas bien suivi la réponse que vous avez donnée à M. Forseth. Combien avez-vous dépensé l'année dernière en frais d'avocat à l'extérieur?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Environ 225 000 $.
M. John McKay: Est-ce qu'il s'agissait d'un certain nombre d'affaires, ou bien seulement d'une ou deux affaires?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Cette somme a été répartie sur un certain nombre d'affaires. Comme je l'ai dit, il y a des cas où il est plus rentable d'engager un avocat de l'extérieur, par exemple quand c'est à Vancouver ou dans les Territoires du Nord-Ouest.
M. John McKay: Est-ce que c'est une moyenne représentative, est-ce qu'on dépensait d'ordinaire un peu plus de 10 p. 100 de votre budget en avocats de l'extérieur?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Non, pas forcément, je ne pense pas.
Je vais demander à M. Hucker de répondre car je ne connais pas aussi bien les chiffres pour les années passées.
M. John Hucker (secrétaire général, Commission canadienne des droits de la personne): Merci, madame la présidente.
Depuis plusieurs années, une partie de notre budget légal est consacrée à des avocats de l'extérieur. Je ne peux pas vous donner un chiffre exact, mais cela doit se situer entre 5 et 12 p. 100.
M. John McKay: C'est donc assez représentatif.
M. John Hucker: Ce n'est certainement pas exceptionnellement élevé.
M. John McKay: Et l'affaire Zundel? Quelle proportion de vos ressources a été consacrée à l'affaire Zundel?
M. John Hucker: L'affaire Zundel nous a coûté très cher. Je n'ai pas le chiffre exact, mais j'imagine que les deux tiers au moins de cette somme ont dû être consacrés à l'affaire Zundel.
M. John McKay: Toutes ces factures ont été payées la même année?
M. John Hucker: Non.
M. John McKay: Étalées sur deux ans?
M. John Hucker: Oui, précisément.
M. John McKay: Est-ce qu'il en reste en souffrance?
M. John Hucker: Oui, il doit y avoir des factures en souffrance.
La présidente: Cela n'est pas terminé?
M. John Hucker: Dans une certaine mesure. Cela n'est pas tout à fait terminé, mais cela devrait beaucoup diminuer au cours des prochains mois. La majeure partie des fonds a été versée.
M. John McKay: Ainsi, les deux tiers de ces 225 000 $ ont été consacrés à l'affaire Zundel, ce qui fait environ 150 000 $, et les années précédentes, vous avez reçu d'autres factures?
M. John Hucker: C'est exact.
M. John McKay: Dans le même ordre de grandeur?
M. John Hucker: Non, infiniment moins. Je pense qu'au total il s'agit d'environ 250 000 $.
M. John McKay: Autrement dit, 250 000 $ ont été versés et il en reste 50 000 $?
M. John Hucker: Non, je crois que c'est le total.
M. John McKay: Vous prévoyez donc de dépenser un quart de million de dollars pour l'affaire Zundel?
M. John Hucker: Oui.
M. John McKay: C'est ce que vous dépensez normalement en avocat de l'extérieur pour l'année entière, ou du moins pour une année budgétaire.
M. John Hucker: L'affaire Zundel a été une grosse affaire, une affaire importante.
M. John McKay: Oui.
Enfin, j'imagine qu'il doit vous arriver de représenter la Commission à l'étranger, ce qui vous force bien sûr à voyager à l'extérieur du pays.
C'est vous, madame la présidente, qui êtes la seule représentante ou bien y a-t-il d'autres représentants qui vous accompagnent parfois et qui représentent également la Commission?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Beaucoup de gens sont appelés à voyager à l'extérieur du pays pour le compte de la Commission. Dans certains cas, c'est parce qu'ils sont experts dans un certain domaine et qu'on a besoin d'eux, mais le plus souvent, sinon dans la totalité des cas, ces déplacements sont financés par l'ACDI, par les Affaires étrangères ou par les Nations Unies. Une proportion infime de notre budget est consacrée...
M. John McKay: Est-ce que vous voyagez vous-même?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui.
M. John McKay: Combien de fois êtes-vous partie en voyage l'année dernière?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: L'année dernière, je suis allée en Inde au mois de janvier. Ensuite, je suis allée à Merida à une réunion du Réseau des organismes concernés par les droits de la personne au niveau international qui fait partie du Centre des Nations Unies pour les droits de l'homme. Je suis également allée en Indonésie car, aux termes d'une entente que nous avons avec la Commission indonésienne des droits de la personne, nous avons un employé de la Commission qui est détaché là-bas à plein temps. Je suis allée assister à un séminaire et je suis restée trois jours.
J'ai également passé trois jours en Norvège à la demande du gouvernement norvégien. C'est eux qui ont payé. Ils voulaient que je leur explique le système de promotion et de protection des droits de la personne que nous avons au Canada.
Le mois dernier, j'ai passé trois jours à Genève pour assister à des séances de la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Il y avait un vote sur les institutions concernées par les droits de l'homme. En même temps, nous avons eu une réunion du Réseau des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l'homme sous les auspices du Bureau du commissaire aux droits de l'homme des Nations Unies.
M. John McKay: En tout, combien de temps avez-vous passé à l'extérieur du pays?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: D'ordinaire ce sont des déplacements de trois ou quatre jours. En tout, cela fait peut-être un mois ou un mois et demi.
M. John McKay: C'est le temps que vous passez à l'extérieur du pays.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui.
M. John McKay: Merci, madame la présidente.
La présidente: Monsieur DeVillers.
M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Merci, madame la présidente.
[Français]
Je voudrais entendre vos commentaires sur la décision du juge Muldoon dans la cause Bell Canada, sur ses éventuelles implications sur les plaintes relatives à l'équité salariale qui seront portées à la commission, et plus particulièrement sur le rôle des syndicats qui sont engagés dans des négociations salariales et qui porteront par la suite des plaintes auprès de votre commission.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Nous ne sommes pas tout à fait d'accord sur la décision du juge Muldoon. D'abord, nous croyons que...
M. Paul DeVillers: Est-ce qu'elle a été portée en appel?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui, la décision est en appel.
M. Paul DeVillers: Oui.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Elle nous semble aller à l'encontre de la plupart des décisions de jurisprudence concernant la parité salariale, entre autres la décision qu'avait rendue la Cour suprême au sujet de la SEPCA sur ce point-là en particulier.
Maintenant, je crois que nous avons traité Bell Canada d'une façon tout à fait appropriée et tout à fait équitable dans cette histoire-là. Il faut aussi tenir compte du fait que Bell Canada avait fait—si je me souviens bien—sept demandes de requête à la Cour fédérale dans ce cas particulier.
J'ai bon espoir que la Cour fédérale nous donnera raison. Je ne pense pas que cela change tellement la situation dans le moment. D'abord, cette cause-là est unique et la décision s'applique précisément aux faits qui y sont reliés. On ne pourrait pas appliquer cette décision à une autre cause parce que les faits et les façons de calculer seront nécessairement différents.
• 1625
Donc, je ne pense pas que cette décision
ait un impact considérable sur les
autres cas de parité salariale qui sont présentement
devant la commission.
M. Paul DeVillers: Que pensez-vous des commentaires du juge sur le rôle des syndicats?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je pense qu'effectivement les syndicats ont un rôle à jouer. Si si je me souviens bien, le Code du travail précise qu'un syndicat est l'organisme qui représente les employés et qu'il les représente particulièrement dans les cas des griefs. Quand un employé dépose un grief et veut aller en arbitrage, si le syndicat ne veut pas procéder ainsi, il n'y aura pas d'arbitrage.
Dans le domaine de la parité salariale, je crois que le même principe de représentation devrait s'appliquer. Je ne pense pas qu'un syndicat soit obligé d'aller chercher la signature de chacune des personnes qui sont impliquées, de la même façon qu'il n'ira pas chercher la signature de chacune des personnes qui sont impliquées lorsqu'il négocie des changements aux conventions collectives. Je pense que le même type de structure peut s'appliquer.
M. Paul DeVillers: Merci, madame.
[Traduction]
La présidente: J'ai seulement une ou deux questions. J'ai sous les yeux le tableau 3 à la page 15 du budget des dépenses. M. McKay a posé des questions sur les frais d'avocat. Je regarde ce tableau, et sous le titre Biens et services, Services professionnels et spéciaux, je vois que le total est de 2 139 000 $ pour 1997-1998. Est-ce que cela comprend les frais d'avocat de l'extérieur? Que signifie ce chiffre?
Mme Joanne Baptiste (directrice, Direction des services de gestion et du personnel, Commission canadienne des droits de la personne): Vous êtes à la page 15, n'est-ce pas?
La présidente: Oui. Les autres renseignements financiers qui figurent au tableau 3 à la page 15.
M. John Hucker: Madame la présidente, ce chiffre de 2,1 millions de dollars ne comprend pas seulement les frais d'avocats de l'extérieur, ni même seulement les frais légaux, à l'extérieur ou à l'interne. Cela comprend les sommes consacrées au système de gestion des affaires, c'est un système informatisé qui nous permet de suivre les plaintes dans tout le système. C'est un système que nous avons mis sur pied et perfectionné. Il y a donc une partie de ces dépenses. Nous avons également un nouveau système pour nos activités dans le domaine de la parité salariale, des activités dans le cadre de nos nouveaux pouvoirs de vérification qui nous permettent de vérifier la parité salariale. Ces activités-là figurent également dans le chiffre cité pour les services professionnels et spéciaux.
La présidente: D'accord. Est-ce que cela comprend vos vérificateurs? Où se trouvent-ils?
M. John Hucker: Non, cela ne comprend pas les vérificateurs. Les vérificateurs font partie de notre personnel et figurent dans les salaires en haut de la page, sous le titre Personnel.
La présidente: Les services d'interprétation sont-ils compris là-dedans? Qu'est-ce qui est compris là-dedans?
M. John Hucker: M. Pelchat peut peut-être vous donner plus de détails.
M. Denis Pelchat (chef, Services financiers, Commission canadienne des droits de la personne): La rubrique «Services professionnels» comprend, comme l'a dit M. Hucker, tous les frais liés à la mise sur pied et au maintien de notre système de gestion des plaintes. Il s'agit du système qui nous permet de suivre les plaintes ainsi que du nouveau système que nous avons mis en place en 1997-1998, des services juridiques et de la formation des employés de la Commission. Ce poste budgétaire comprend les honoraires des avocats de l'extérieur, les dépenses des commissaires à temps partiel et des témoins experts que nous devons embaucher pour témoigner devant le tribunal, les frais de sténographie judiciaire, les services de traduction et tous les autres frais de ce genre.
La présidente: Vous ne nous donnez vraiment pas beaucoup de détails. C'est que vous semblez regrouper beaucoup de choses disparates sous une même rubrique. Sous cette rubrique «Services professionnels et spéciaux», vous pourriez cacher bien... si j'étais d'un naturel soupçonneux.
Que voulez-vous dire par «location»? Que louez-vous pour ces dépenses de 188 000 $ par an? S'agit-il de matériel?
M. Denis Pelchat: Oui.
La présidente: Possédez-vous des véhicules?
M. Denis Pelchat: Nous en possédons un.
La présidente: Combien?
M. Denis Pelchat: Nous avons une voiture de service.
La présidente: Autres subventions et paiements—c'est quoi ça? Le montant n'est pas très élevé, mais de quoi s'agit-il?
M. Denis Pelchat: Ce pourrait être des intérêts. Ce pourrait être des dépenses diverses, que nous n'avons pas pu indiquer ailleurs.
La présidente: Sur le montant affecté aux transports et aux communications, quelle est la part qui va aux transports et quelle est celle qui va aux communications? Ce poste comprend-il votre système téléphonique?
M. Denis Pelchat: Il comprend effectivement le système téléphonique et les appels interurbains.
La présidente: Quelle est la part des transports?
M. Denis Pelchat: Je n'ai pas le chiffre ici, mais nous pourrions vous le faire parvenir plus tard si vous le souhaitez.
La présidente: D'accord. Je voudrais aussi savoir quelle est la part affectée aux transports internationaux.
M. Denis Pelchat: La plupart des voyages à l'étranger sont payés par l'ACDI ou par les Affaires étrangères.
La présidente: J'aimerais quand même savoir combien la Commission dépense à ce titre.
Information—que faut-il entendre par là?
M. Denis Pelchat: Sous la rubrique «Information», nous incluons les services d'impression, l'édition, les relations avec les médias et toutes les dépenses liées à la promotion.
La présidente: C'est 396 000 $ par an? C'est bien cela?
M. Denis Pelchat: Oui.
La présidente: Très bien. Comment choisissez-vous vos avocats de l'extérieur?
M. John Hucker: Nous choisissons généralement parmi ceux qui nous sont recommandés. Notre avocat général tient une liste officieuse, et nous appelons de façon officieuse les gens qui figurent sur cette liste. Nous choisissons en priorité des avocats qui ont une certaine expertise dans le domaine des droits de la personne.
La présidente: De quelles villes viennent ces avocats?
M. John Hucker: Tout dépend du lieu où la cause doit être entendue. Nous avons déjà retenu les services d'avocats de Vancouver, par exemple, comme l'a dit la présidente. Nous avons retenu les services d'avocats de l'Alberta. Si nous avions une cause importante à Vancouver, nous choisirions un avocat qui a une bonne réputation là-bas.
Nous appellerions la Commission provinciale pour lui demander de nous recommander des noms. Nous appellerions des membres du barreau là-bas pour obtenir des références. C'est comme cela que nous procéderions pour embaucher un avocat à Vancouver. De même, nous avons embauché des avocats à Edmonton et à Toronto.
La présidente: L'Ontario, comme vous le savez, ne se limite pas à Toronto. Voilà où je veux en venir.
M. John McKay: Mais c'est de l'hérésie.
La présidente: Je connais d'excellents avocats à London et à Windsor. La plupart des bons avocats sont à Windsor, et ils coûtent beaucoup moins cher que les avocats de Bay Street, vous savez. Vous devriez explorer cette possibilité. Vous pourriez obtenir leurs services à un taux horaire inférieur même en payant leurs frais de déplacement.
M. John Hucker: Nous en tiendrons compte, mais je crois que notre budget pour les services d'avocats de l'extérieur est plus susceptible de baisser que de monter.
La présidente: Vous devriez donc embaucher des gens de localités autres que Toronto.
Quand vous embauchez ces avocats, leur demandez-vous de faire une proposition fondée sur un taux horaire?
M. John Hucker: Oui, c'est ce que nous faisons. Nous leur demandons de nous faire une proposition et nous leur demandons de nous accorder une remise sur leur tarif habituel. Ce n'est pas que nous voulons obtenir leurs services gratuitement, mais comme nous sommes une organisation à but non lucratif, ils acceptent généralement de nous accorder une remise sur leur tarif horaire habituel.
La présidente: Bien sûr, et ils n'ont pas à s'inquiéter de mauvaises créances quand ils traitent avec vous. En principe, ils n'ont rien à faire pour percevoir ce qui leur est dû. Quel est le délai dans lequel vous payez vos comptes?
M. John Hucker: Il faudrait que je demande à M. Pelchat.
M. Denis Pelchat: Nous les payons rapidement.
M. John Hucker: Ils n'ont pas besoin de nous talonner, si c'est ce que vous voulez dire.
La présidente: Bravo.
Je vous invite à étendre un peu vos recherches. Il y a d'excellents avocats à l'extérieur des trois grandes villes de Toronto, Montréal et Ottawa. Je puis vous dire que la plupart d'entre eux travailleront pour moins cher, qu'ils auront la même expertise et qu'ils seront tout à fait raisonnables pour ce qui est de leurs frais de déplacement. Voilà ma petite réclame au profit des gens des régions.
M. John Hucker: Nous prenons bonne note, madame la présidente.
La présidente: Oui. Quelle part de votre budget avez-vous consacrée aux vérifications relatives à l'équité en matière d'emploi?
M. John Hucker: Nous avons la ventilation. Le montant est d'environ 1,6 million de dollars.
La présidente: D'accord. Merci.
Madame Bakopanos.
Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Voulez-vous passer en premier, monsieur Forseth? Ça va. Ma question est très simple. Allez-y.
M. Paul Forseth: Je regardais justement la page 17. Il semble que le coût net estimatif total du Programme pour 1997-1998 soit de 16 741 000 $.
Le contribuable moyen, qui ne connaît pas grand-chose au travail de la Commission, voudrait peut-être disposer d'une mesure quelconque qui lui permettrait de savoir que vous avez dépensé tant d'argent au cours de l'année écoulée et que tant de cas ont été réglés. Il pourrait ensuite diviser le total des sommes dépensées par le nombre de cas.
Certains diront qu'il s'agit là d'une mesure très grossière, mais quand on fait le calcul d'une année à l'autre à partir du moment où la Commission a été créée, on peut constater une tendance: le coût par cas augmente-t-il ou baisse-t-il de manière générale? S'il y avait eu un problème en particulier au cours d'une année donnée, comme dans le cas de l'affaire Zundel, le calcul pourrait être vraiment déformé, mais il y aurait moyen de faire ressortir cette anomalie.
Une mesure simple comme celle-là permet parfois d'en savoir très long. Je me demande si vous avez une idée du coût estimatif, pour que nous puissions le diviser par le nombre de cas que vous traitez et que nous puissions ainsi représenter l'activité en fonction des dépenses.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Il est très difficile de répondre à cette question, car nous faisons bien plus que nous occuper de cas en particulier, comme vous le savez. Il faut ajouter à ces cas les vérifications que nous faisons, et il faut aussi y ajouter tout le travail d'éducation et d'information que nous faisons dans le cadre de notre mandat. Il est très difficile de vous dire quel est le coût exact par cas. On ne peut pas simplement prendre le montant et le diviser par le nombre de cas, car ces cas ne représentent qu'une partie de notre travail. Vous comprenez?
M. Paul Forseth: Je sais bien, mais je crois que l'électeur moyen de ma collectivité aimerait bien avoir cette information. Il est très facile au moyen d'une note à cet effet d'indiquer que vous avez aussi des services d'éducation et d'expliquer en quoi consiste cette activité.
Il n'en reste pas moins qu'une mesure grossière de l'optimisation des ressources, surtout si la mesure permet de faire une comparaison—c'est votre rendement à vous qui servirait de point de comparaison—d'une année à l'autre et qui permet de comparer ce que la Commission faisait au début par rapport à ce qu'elle fait maintenant et ce qu'elle prévoit de faire, une mesure comme celle-là, même si elle est très approximative, est très utile pour permettre de conserver l'appui politique ou autre du contribuable moyen. En dernière analyse, nous devons tous défendre notre activité devant le public.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Ce qui est sûr, c'est que le coût a baissé ces dernières années parce que nous subissons d'importantes réductions depuis quelques années. Depuis 1994, je crois que la réduction a été d'environ 27 p. 100 quand on inclut le tribunal et de 16 p. 100 quand on l'exclut.
Nous pourrions sans doute en arriver à déterminer en quelque sorte combien il en coûte par cas à partir du budget de lutte contre la discrimination et d'une partie du budget des services juridiques. Comme je l'ai dit, la tâche n'est pas facile. Il faudrait inclure une part des frais généraux de l'organisation car nous incluons, par exemple, dans notre budget les vérifications que nous ferons cette année. Vous voyez comme la tâche est difficile?
M. Paul Forseth: D'une année à l'autre, pouvez-vous savoir combien de nouvelles plaintes ont été déposées...
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui.
M. Paul Forseth: ... combien ont été instruites...
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui.
M. Paul Forseth: ... et combien de dossiers ont été fermés?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Assurément. Vous trouverez tout cela dans notre rapport annuel.
M. Paul Forseth: D'accord. Merci.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je vous en prie.
La présidente: Madame Bakopanos.
Mme Eleni Bakopanos: Vous nous avez dit tout à l'heure qu'une de vos priorités était d'améliorer la représentation des minorités visibles dans la fonction publique fédérale.
J'ai longtemps travaillé pour le gouvernement du Québec et j'ai fait partie de la Commission consultative du Conseil du Trésor sur l'équité en matière d'emploi pour les collectivités culturelles. J'ai pu constater qu'on se heurtait à une pierre d'achoppement car très souvent, en remplissant un formulaire de demande d'emploi, les gens ne signalent pas qu'ils appartiennent à un groupe particulier de crainte qu'on exerce une discrimination à leur égard. Autrement dit, s'ils reconnaissent qu'ils appartiennent à une minorité visible, ils n'obtiendront pas l'emploi. Quant à moi, je ne cessais de leur répéter que ce n'est pas ainsi que les choses se passent. Il nous faut savoir qui ils sont car sur papier on ne voit pas leur couleur, leur origine ethnique ou leur religion.
• 1640
Les gens éprouvent de véritables réticences à inscrire cela et
d'après mon expérience, les gens de la deuxième et de la troisième
générations de Canadiens hésitent encore davantage. Chez eux, les
réticences sont encore plus grandes.
Je cherche conseil auprès de vous. En fait, le comité a été saisi aussi des nominations judiciaires. La question a été soulevée car on ne possède pas de statistiques quant au nombre de ceux qui appartiennent à des minorités visibles et qui se sont portés candidats. Là encore, si le candidat ne dit rien, comment le commissaire peut-il fournir des statistiques au gouvernement, voire au comité? C'est un problème qui dure depuis 15 ans que je m'occupe de ce dossier.
Je me demande donc comment vous allez contourner la difficulté. Vous songez à une politique ciblée prévoyant des initiatives de promotion et de conformité pour aider le gouvernement à progresser dans le dossier des minorités visibles, mais comment allez-vous résoudre la difficulté qui vient du fait que les gens de la deuxième et de la troisième générations, ceux qui ont fait des études et qui ont de l'expérience, n'aiment pas que l'on sache qu'ils appartiennent à une minorité visible?
Cette année, Statistique Canada a révélé que les gens se sentaient un peu insultés car ils estimaient qu'ils n'avaient pas besoin qu'on reconnaisse leur appartenance à une minorité.
Bien entendu, nous pourrions discuter de ce sujet pendant deux heures.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Il est très intéressant que vous souleviez la question. En vertu de l'ancienne Loi sur l'équité en matière d'emploi, nous avons rencontré une difficulté de taille semblable à celle-ci. Comme vous savez, la loi alors ne s'appliquait qu'au secteur privé et non pas au secteur public. Nous avons constaté que même les premières années, le taux de réponse était très bas. Après avoir donné de bonnes explications quant au motif, et ce aux employés, nous avons obtenu un taux de réponse de 90 p. 100.
Nous espérons que le même genre de stratégie pourrait donner des résultats dans la fonction publique en expliquant exactement pourquoi on demande aux gens de remplir ces questionnaires. Les questionnaires sont anonymes et ils ne serviront que pour l'équité en matière d'emploi. Nous espérons obtenir le même taux de réponse que nous avons obtenu dans le secteur privé.
Mme Eleni Bakopanos: Merci. Il y a longtemps que ce problème existe. Comme je l'ai dit, je trouve ça plus inquiétant que par le passé car nous avons affaire désormais aux deuxième et troisième générations et même à la quatrième qui refusent qu'on reconnaisse leur appartenance. Parfois on confond le mérite et la discrimination. J'espère avoir l'occasion de reprendre cette discussion avec vous en privé.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Comme vous le savez, ce programme a commencé en octobre dernier. Nous aurons une meilleure idée l'année prochaine, mais nous exhortons les divers ministères à fournir ce genre d'explications pour que nous obtenions un nombre satisfaisant de réponses à ces sondages.
Mme Eleni Bakopanos: Je l'espère. Merci beaucoup.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je vous en prie.
La présidente: J'ai une question à propos des plaintes pour discrimination à cause de la race ou de la couleur sur lesquelles vous fournissez des statistiques à la page 14 de votre rapport annuel. On dit que l'an dernier vous avez reçu 201 plaintes dont aucune n'a été déférée au tribunal. Seulement 17 d'entre elles ont été retirées ou abandonnées par le plaignant de sorte qu'on en conclut que les autres ont été en fait rejetées par la Commission.
Pouvez-vous nous donner des explications sur ces chiffres car, d'après certains incidents, il semble exister au Canada une forme de racisme assez virulente en ce moment. Je me demande pourquoi le nombre des affaires déférées au tribunal n'en témoigne pas.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Il faut songer aux autres moyens de résolution des plaintes car pour certaines, il y a eu résolution au cours de l'enquête ou de la conciliation. Certaines ont été instruites grâce à d'autres mécanismes de recours; c'est le cas de 79 d'entre elles.
La présidente: Qu'entendez-vous par «d'autres mécanismes de recours»?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Par exemple, dans certaines conventions collectives, il existe une procédure de grief pour les cas de discrimination, laquelle est d'abord suivie car notre loi est le dernier recours, la dernière possibilité de redressement. On peut songer à ce genre de cas.
Toutefois, si le plaignant dans un tel cas estime que l'arbitrage ne règle pas le grief de discrimination de sa réclamation, il peut toujours s'adresser de nouveau à la Commission pour que ce grief de discrimination soit entendu. Dans la plupart des cas, cet aspect-là est réglé.
Il arrivera que la Commission des relations du travail dans la fonction publique entende un grief pour motif de discrimination raciale car nous aurons demandé qu'il soit entendu là-bas avant de nous en occuper.
Il y a également quantité de plaintes qui sont abandonnées: 213, en l'occurrence. Il se peut que ce soit parce qu'une entente à l'amiable est intervenue entre les parties. Il se peut aussi que le plaignant ne veuille pas poursuivre parce qu'il veut tout simplement tourner la page et passer l'éponge. En outre, dans bien des cas, nous ne pouvons joindre le plaignant car il refuse de nous donner sa nouvelle adresse ou son numéro de téléphone. Nous faisons bien des tentatives—en moyenne dix—pour joindre le plaignant. Nous consultons l'annuaire de téléphone et Internet pour essayer de retrouver les plaignants qui manquent à l'appel mais parfois il est impossible de les joindre. Au total, cela représente 213 plaintes abandonnées.
Dans 61 cas, la plainte a été rejetée pour cause de manque de preuves. Parfois il n'y a absolument pas de preuves, une fois l'enquête faite, de sorte que toute poursuite serait vaine. Il y a également les plaintes qui ne sont pas de la juridiction de la Commission ou les cas où rien ne motive une enquête plus poussée.
Voilà donc pourquoi si peu de plaintes ont été déférées aux tribunaux. Quand nous envoyons un cas au tribunal, il nous faut tenir compte de certains éléments. Tout d'abord, il faut déterminer si la plainte exige une enquête plus poussée. Deuxièmement, une fois que la Cour fédérale a rendu une décision, il faut décider si nous avons des chances d'obtenir gain de cause afin de ne pas gaspiller nos ressources. Il nous faut donc tenir compte de ces deux facteurs avant de décider.
Il y a eu des cas par exemple—pas nécessairement des cas où la race, la couleur, l'origine ethnique ou nationale étaient en cause—des cas donc où le plaignant se voyait offrir un très bon règlement, un règlement que même un tribunal n'ordonnerait pas. Ainsi, on offrira parfois des dommages-intérêts plus élevés que ce que les dispositions de la loi permettent au tribunal d'ordonner. Dans un tel cas, la Commission décide, compte tenu qu'un règlement raisonnable en l'occurrence est offert et refusé par le plaignant, de ne pas déférer la plainte au tribunal.
La présidente: Et la personne se retrouve les mains vides, n'est-ce pas?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Effectivement, mais elle aura été prévenue de cela. En effet, un employé de la Commission lui aura conseillé d'y réfléchir avant de refuser. Parfois, nous renvoyons l'affaire en conciliation une deuxième fois pour tâcher de convaincre le plaignant d'accepter le règlement. Il nous incombe d'utiliser nos ressources à bon escient car nous existons dans l'intérêt public.
La présidente: C'est une situation épineuse car cela fait de vous des gardiens tout-puissants?
Supposons que j'estime qu'on a porté atteinte à mes droits, supposons que toutes choses demeurant égales, c'est de compétence fédérale, etc., et que je veuille obtenir une audience devant la Commission. Voilà que vous étudiez le dossier, que vous faites enquête, que vous en faites la gestion, alors que moi en tant que plaignante, je ne souhaite qu'être entendue. C'est vous qui avez plein pouvoir d'ouvrir la porte. Ce n'est pas comme un tribunal. C'est vous qui ouvrez la porte de votre propre recours et vous pouvez refuser à quelqu'un l'accès à sa plainte.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: C'est exactement notre finalité. Il nous appartient de faire le tri des plaintes. C'est exactement notre raison d'être. Voilà pourquoi les dispositions de la loi ont été adoptées, sinon il n'existerait qu'une instance judiciaire. Les gens s'adresseraient directement à cette instance. Récemment, la Cour d'appel a rendu une décision qui interdit le genre de régime qui existe au Québec, celui qui permet aux gens de s'adresser directement au tribunal. La Cour s'est prononcée dans ce sens car autrement le tribunal deviendrait une instance judiciaire.
La présidente: Je vois.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Je sais que c'est difficile à accepter, mais il faut se rappeler que la loi existe pour faire réparation dans une situation. Si dans une situation donnée, la réparation est possible, il faut se demander si le plaignant l'acceptera et dans la négative, il nous faut prendre une décision difficile, à savoir déterminer s'il y va de l'intérêt public de déférer l'affaire au tribunal, ce qui entraînera des frais.
La présidente: À quand remonte la dernière affaire mettant en cause la race ayant été déférée au tribunal?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Il y a encore beaucoup d'actions en instance. Les causes de l'Alliance de la Capitale nationale sur les relations inter-raciales sont sans doute les dernières.
La présidente: À quand remontent-elles?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: La décision a été rendue en mars.
La présidente: Au cours de quel exercice financier le tribunal en a-t-il été saisi?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Vous parlez de la dernière affaire que nous avons déférée, n'est-ce pas? Probablement le mois dernier.
La présidente: Ainsi, en 1998, le tribunal a été saisi d'une affaire mettant en cause la race, n'est-ce pas?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oui.
La présidente: Mais pas en 1997.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Tout dépend des plaintes dont nous sommes saisis.
La présidente: En 1996?
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Oh oui.
La présidente: Quelqu'un d'autre a-t-il des questions?
Merci beaucoup.
Mme Michelle Falardeau-Ramsay: Merci beaucoup.
La présidente: La séance est levée.