SCYR Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
SUB-COMMITTEE ON CHILDREN AND YOUTH AT RISK OF THE STANDING COMMITTEE ON HUMAN RESOURCES DEVELOPMENT AND THE STATUS OF PERSONS WITH DISABILITIES
SOUS-COMITÉ SUR LES ENFANTS ET JEUNES À RISQUE DU COMITÉ PERMANENT DES RESOURCES HUMAINES ET DE LA CONDITION DES PERSONNES HANDICAPÉES
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le mercredi 29 mars 2000
Le président (M. John Godfrey (Don Valley-Ouest, Lib.)): Comme d'habitude, nous comptons que d'autres membres vont se joindre à nous ce mercredi après-midi très chargé.
Je ne vais pas consacrer beaucoup de temps à l'introduction, qui sert simplement à rappeler aux membres du comité que nous sommes...
[Français]
Nous poursuivons deux voies de recherche: une sur la vie de famille ou le travail et la vie personnelle, et l'autre sur le rôle des communautés au niveau des services pour améliorer le sort des enfants et des familles.
[Traduction]
Je vais demander à notre témoin de bien vouloir prendre place à la table. Mme Judith MacBride-King nous vient du Conference Board du Canada. Elle va en fait examiner la première question, qui consiste à savoir comment on peut, du mieux possible saisir ce sujet, soit l'amélioration des conditions de travail à l'intention des familles et comment le gouvernement fédéral peut le faire dans ses propres services, comme il l'a promis dans le discours du Trône, et aussi comment nous pouvons aider le secteur privé et toutes les régions du Canada, à mieux s'acquitter de ce rôle.
Nous sommes enchantés de vous accueillir. Nous espérons que d'autres se joindront à nous, mais puisque la séance est ouverte officiellement, nous pouvons avoir un compte rendu et une réunion en bonne et due forme.
Nous vous souhaitons la bienvenue, madame MacBride-King.
Mme Judith MacBride-King (directrice adjointe à la recherche, Centre pour l'efficacité de la gestion, Conference Board du Canada): Merci beaucoup, monsieur le président.
Puis-je commencer?
Le président: Certainement.
Mme Judith MacBride-King: Très bien. Encore une fois, c'est avec plaisir que je comparais devant le sous-comité pour vous entretenir d'un sujet que je considère extrêmement important, c'est-à-dire les défis que représentent le travail et la vie personnelle pour les Canadiens.
En guise d'introduction, j'aimerais dire qu'au Conference Board, nous nous intéressons à cette question depuis plus d'une décennie, et je crois que vous avez des doubles des diapositives que je vais présenter aujourd'hui.
En fait, lorsque nous nous sommes lancés dans la recherche sur le travail et la vie professionnelle, à la fin des années 80, nous étions le premier organisme à effectuer des recherches de ce genre à l'échelle nationale.
En 1991, nous avons créé un réseau de cadres et de gestionnaires dans 25 ou 30 organisations de toutes les régions du pays et de tous les secteurs qui se réunissent périodiquement afin de discuter justement des questions qui touchent le travail et la vie professionnelle, des défis auxquels ils font face dans leurs organisations et de la recherche de solutions novatrices. Ce groupe existe toujours aujourd'hui.
Au fil des ans évidemment, nous avons tenu des ateliers et des séminaires spéciaux sur le travail et la vie professionnelle car cela fait vraiment partie de notre rôle qui est de réunir divers intervenants des secteurs public et privé, des différentes localités et des groupes syndicaux pour s'asseoir et examiner, étudier des questions de ce genre. Bref, nous ne sommes pas des néophytes sur cette question.
J'aimerais également mentionner que si nous avons abordé ce domaine d'étude, et si nous continuons à nous y intéresser, c'est essentiellement parce que nous pensons qu'afin que les organisations réussissent, et donc que nos citoyens et notre économie se portent bien, il nous faut mettre l'accent sur l'aspect humain des organisations. Il nous faut accorder toute l'attention voulue aux personnes au sein de nos institutions.
Évidemment, plus récemment, les recherches en milieu universitaire et dans les entreprises, et au Canada, et aux États- Unis, ont démontré clairement qu'il existe un lien quantifiable entre la satisfaction des employés, la satisfaction et la loyauté, des clients, et les résultats financiers. Ce qui revient à dire qu'il est avantageux sur le plan commercial de s'intéresser aux travailleurs.
Dans ce contexte donc, il y a lieu de se demander: quels facteurs contribuent à la satisfaction des employés ou au dévouement des travailleurs? Des études récentes ont démontré que bien que les avantages sociaux, les possibilités d'avancement, la reconnaissance et un climat très propice à l'apprentissage soient importants pour les travailleurs canadiens, surtout les jeunes, le facteur qui suscite le plus le dévouement des travailleurs et la satisfaction des employés, c'est la reconnaissance des besoins travail-vie personnelle des employés et les mesures prises à cet égard. En fait, une étude récente de la maison Aon Consulting confirme cette constatation. Il est important, donc, de reconnaître et d'agir en ce qui concerne les besoins travail-vie professionnelle des travailleurs.
Nous savons également, grâce à notre travail auprès des étudiants et les travailleurs qui occupent des postes difficiles à combler, que ceux-ci s'attendent à ce que leurs employeurs, ou leurs éventuels employeurs, soient au fait de ces questions et à l'écoute des besoins travail-vie professionnelle des employés.
Les jeunes de nos jours, peut-être parce qu'ils ont vu leurs parents travailler avec acharnement sans garantie d'emploi stable, veulent, nous disent-ils, conjuguer une carrière ou un emploi enrichissant et une vie professionnelle.
Il y a un an, nous avons refait, de notre mieux, l'étude entreprise il y a une décennie. C'est-à-dire, nous avons fait un sondage auprès des travailleurs et des employeurs canadiens sur cette question, c'est-à-dire sur les défis et les solutions éventuelles.
C'est de cette étude que je veux vous parler aujourd'hui et je me propose dans le peu de temps dont je dispose, de vous transmettre certains des principaux messages qui ressortent de la recherche que nous avons effectuée naguère et maintenant. J'espère, grâce à cet exposé, et à toutes les données recueillies sur une décennie, vous fournir des idées sur les questions, qu'en tant que comité, vous voudrez peut-être examiner à l'avenir—et sur lesquelles les employeurs devront certes mettre l'accent à l'avenir.
• 1545
D'abord, il y a dix ans, un Canadien sur cinq nous a dit qu'il
éprouvait beaucoup de difficulté à équilibrer ses divers rôles au
travail et au foyer. Aujourd'hui, le nombre, comme vous pouvez le
constater, est de un sur quatre. Le nombre de Canadiens qui déclarent
éprouver beaucoup de difficulté à équilibrer leurs responsabilités
personnelles et professionnelles, a doublé. Par conséquent, le degré
de stress augmente. Cette diapositive indique clairement que le
pourcentage de ceux qui déclarent connaître du stress, à un degré
considérable ou modéré, a augmenté de façon marquée de 27 p. 100 il y
a dix ans à près de 50 p. 100 aujourd'hui. Ici encore, c'est conforme
si vous avez lu les journaux locaux à Ottawa, aux études récentes qui
ont été publiées sur cette question.
Dans nos recherches, comme il y a dix ans, les parents, surtout ceux de jeunes enfants, les parents seuls, les femmes, les membres de la génération tartine sont plus portés à faire état d'un niveau élevé de difficulté et d'un degré important de stress. Lorsqu'ils éprouvent des difficultés, les travailleurs sont plus portés, comme vous pouvez le constater, à nous dire qu'ils n'ont pas suffisamment de temps pour eux-mêmes, qu'ils se sentent anxieux ou stressés, qu'ils manquent de sommeil et qu'ils ont des problèmes de santé.
En outre, les employeurs devraient se préoccuper du fait que sur le plan de la satisfaction professionnelle, lorsque les gens se sentent coincés, lorsqu'ils ont l'impression d'être un peu justes et de chercher à tout faire, au travail, à la maison, et dans leur collectivité, la satisfaction professionnelle en souffre. De plus, j'ai l'impression que nombre de gens qui subissent des pressions au foyer et au travail sont insatisfaits de nombreux autres aspects de leurs vies.
Je veux pendant un instant, si vous me le permettez, parler de la génération tartine. À propos, c'est un terme que nous connaissons tous, mais il y a une décennie, on n'employait pas cette expression. Nous le savons tous, il s'agit des Canadiens qui donnent des soins, sous une forme ou une autre, à un membre âgé ou handicapé de la famille, alors qu'ils ont toujours des enfants au foyer. Leurs nombres, soit dit en passant, est passé de 9,5 p. 100 dans notre sondage d'il y a dix, à 15 p. 100 aujourd'hui. Vu le vieillissement de notre population et l'âge des mères à la naissance de leur premier enfant, j'ai l'impression que cette population, cette génération tartine, ne va faire qu'augmenter.
Les gens qui sont dans cette situation, coincés entre la nécessité de prendre soin de leurs enfants et d'aider un membre âgé ou handicapé de la famille, sont particulièrement susceptibles au stress et ils déclarent éprouver plus de difficulté à équilibrer leurs divers rôles. Les soins des aînés, qu'ils soient donnés pendant que les enfants sont encore au foyer ou après leur départ, vont prendre de l'ampleur. Il y a dix ans, environ 16 p. 100 des répondants déclaraient avoir d'autres responsabilités, maintenant c'est 23 p. 100. C'est un grave problème. Compte tenu des changements apportés à notre régime de soins de santé par exemple, les sorties hâtives de l'hôpital et l'importance accrue des soins à domicile et des soins en clinique, de plus en plus de Canadiens vont devoir fournir des soins assez intensifs à domicile. Presque 25 p. 100 des participants qui prennent soin d'un aîné nous ont dit, qu'actuellement, ils dispensent des soins assez importants ou intensifs. Ils habillent, nourrissent et lavent la personne à leur charge quotidiennement. Ces responsabilités supplémentaires ont une incidence sur la personne et les familles, et les enfants dans ces familles et, évidemment, de notre point de vue, elles ont une incidence sur le lieu de travail.
Il y a lieu de se demander à qui incombe la responsabilité de régler le problème des soins aux enfants et des soins aux aînés des travailleurs canadiens? Selon les répondants, la plupart des Canadiens conviennent que c'est à eux qu'incombe la responsabilité première de gérer leur propre vie, mais une majorité de Canadiens reconnaissent aussi que leurs employeurs et leur gouvernement ont un rôle important à jouer à cet égard. Ils sont toutefois moins portés à chercher un appui auprès de leurs syndicats.
Bien qu'un appui et une reconnaissance des défis du travail et de la vie personnelle des travailleurs, en milieu de travail, soient importants pour les Canadiens, quatre sur dix nous ont en fait dit qu'à leur avis, «leur employeur n'en fait pas assez» pour aider les employés à concilier leurs responsabilités.
Que faire alors? Quelle forme cet appui doit-il prendre? Lorsque nous avons demandé aux répondants ce que leurs employeurs pouvaient faire pour les aider à trouver une solution mieux adaptée, ils nous ont répondu que l'important, c'est la souplesse. Ils cherchent une plus grande souplesse dans leurs options de travail, dans les heures de travail et les politiques de congé et une certaine reconnaissance de leurs responsabilités au travail et à la maison. Ils nous disent avoir besoin de plus d'aide pour assurer les soins des enfants, surtout pour trouver des services de garderie de qualité à un prix abordable, soit au lieu de travail ou près de celui-ci. L'accès à des garderies de qualité demeure une grande préoccupation pour les parents qui travaillent. Évidemment, cela concorde avec le rapport publié récemment au Canada qui conclut que trouver et payer pour des garderies accréditées demeure une des principales préoccupations des parents canadiens.
Les travailleurs canadiens nous ont dit qu'il ne suffit pas que leurs gestionnaires ou leurs organisations soient sensibles à leur réalité familiale—il serait très utile qu'ils fassent preuve de compassion et de compréhension. Ce dernier aspect est très important car à quoi sert-il d'avoir toutes sortes d'avantages et de possibilités si la culture en milieu de travail est telle que, lorsque vous utilisez ces avantages ou possibilités, vous semblez sans ressort et peu motivé dans votre travail?
• 1550
Dans le cadre de notre étude, presque les deux tiers des Canadiens
ont révélé que leur organisation s'attend à ce qu'ils laissent leurs
problèmes personnels à la porte. Ce n'est pas encourageant et cela
révèle que les organisations ont beaucoup à faire pour changer leur
culture. Changer l'état d'esprit et la culture d'une organisation, de
haut en bas, demeure un défi considérable pour les employeurs, même
ceux qui, sur papier, font état de plusieurs mesures et avantages pour
répondre aux besoins travail et vie professionnelle des travailleurs.
Une charge de travail accrue constitue également un facteur. Nous avons demandé aux Canadiens pourquoi la situation s'était compliquée au point qu'ils éprouvaient de la difficulté à gérer leurs divers rôles. La charge de travail, un plus grand nombre de fonctions, et moins de ressources sont trois des quatre principales raisons mentionnées. Encore une fois, c'est une question essentielle.
En ce qui concerne la réponse des organisations, à la fin de l'été 1999, nous avons entrepris un sondage auprès des employeurs sur ces questions afin de comparer nos données à celles d'il y a dix ans. Ce sondage en fait a repris entièrement le travail d'il y a une décennie et les résultats sont encourageants d'une part, et décourageants de l'autre.
Tout d'abord, la bonne nouvelle: notre analyse des données obtenues auprès des employeurs—plus de 200 dans tout le Canada, appartenant à tous les secteurs—porte à croire qu'il y a un mouvement dans certains domaines tels que les soins aux enfants, les soins aux aînés, les programmes d'aide aux employés, la gestion du stress, les programmes de mieux-être, et certainement au niveau des horaires variables, du télétravail et du travail à domicile.
Par ailleurs, très peu d'organisations mettent l'accent sur la charge de travail. Il est important, dans ce contexte, de trouver des solutions au problème de la charge de travail et d'éliminer de l'organisation le travail répétitif ou sans valeur ajoutée. Il est également important de mettre l'accent sur une transformation de la culture, et de mettre en place des structures d'appui et de reddition de comptes, afin de fournir aux gestionnaires les connaissances, les outils et les ressources nécessaires pour résoudre ces questions.
Nous avons appris dans le cadre de notre recherche et de celle des autres que la relation entre le travailleur et le gestionnaire est l'élément essentiel de la satisfaction professionnelle et de l'équilibre travail-vie personnelle. Les gestionnaires véhiculent la culture organisationnelle, traduisent cette culture et sont les observateurs de ces diverses initiatives. Nous avons également appris que, lorsque les employés quittent des organisations, souvent c'est leur gestionnaire, et non l'organisation, qu'ils quittent, parce que ceux-ci ne se soucient pas de leurs besoins.
Pour conclure, je pense que, l'on décèle un certain propos dans certaines organisations, mais qu'il reste encore beaucoup à faire. Trop peu d'organisations prennent vraiment cette question au sérieux. Trop peu comprennent les conséquences de ne pas tenir compte des besoins travail et vie professionnelle des Canadiens.
Les organisations qui ne répondent pas à ces besoins s'exposent notamment à un taux plus élevé d'absentéisme, à une productivité réduite et à un mauvais moral. Les employeurs et les travailleurs nous l'ont dit dans notre sondage.
Du côté des familles et de leurs enfants, cela signifie qu'un plus grand nombre de familles seront à bout de ressources. Les parents et les soignants de personnes âgées sont tiraillés et ont l'impression qu'ils ne réussissent pas à bien faire leur travail ni dans un domaine ni dans l'autre. Les enfants, la prochaine génération de travailleurs, ressentent les contrecoups du déséquilibre dans la vie de leurs parents. Bien que je ne sois pas psychologue pour enfants, je ne peux que le supposer. J'ai—non, oublions ça.
En ce qui concerne le rôle du gouvernement, que peut-il faire? Il peut jouer, à mon avis, plusieurs rôles. Par exemple, je crois qu'il y a beaucoup de choses que nous ne savons pas au sujet de la génération tartine et de l'incidence sur les Canadiens et leurs familles des soins à donner. Franchement, comme nation, nous n'avons pas beaucoup réfléchi au vieillissement de la population et à ce que cela signifie pour l'État, pour la famille, et pour les employeurs. La recherche et le dialogue sont importants dans ce contexte et je pense que le gouvernement doit appuyer ces activités.
Je pense également que le gouvernement doit faciliter le changement. On pourrait mieux éduquer les employeurs à ce sujet et les encourager à agir, les aider à se renseigner sur les diverses options—ce que d'autres employeurs font, les succès et les échecs—, pour les aider à se lancer, pour les aider à changer. En tant qu'employeur, le gouvernement peut donner l'exemple, en façonnant les comportements, les programmes et les politiques, etc., qui s'imposent pour venir en aide à la main-d'oeuvre plus diversifiée d'aujourd'hui. Plus particulièrement, en examinant certaines des données recueillies au cours du sondage sur la fonction publique, on constate qu'il y a là aussi des possibilités.
Voilà donc quelques-unes de mes observations. Cela dit, nous savons que les Canadiens attribuent à leur gouvernement un rôle important pour assurer leur santé et leur sécurité, et celle de leurs enfants, de leurs parents et des autres.
• 1555
Voilà qui conclut mon exposé. J'ai très hâte d'en discuter avec vous
et de répondre à toutes vos questions.
Le président: Les mains commencent à se lever. J'ai d'abord vu Libby Davies, puis Mme Folco.
[Français]
Je sais, madame St-Jacques, que vous êtes un peu pressée par le temps.
Mme Diane St-Jacques (Shefford, PC): Je dois partir, malheureusement.
Le président: D'accord. Libby.
[Traduction]
Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Merci, John.
Tout d'abord, j'aimerais remercier nos invités d'être venus aujourd'hui et je vous prie d'excuser notre léger retard.
Je trouve vos renseignements et le résultat de votre recherche très intéressants. À mon avis, il ne fait aucun doute que, ce qu'on appelle les membres de la génération tartine, les familles en général, font face à un degré plus élevé de stress dans leurs efforts pour concilier famille et travail, et pour trouver un juste équilibre. Je pense que cela crée un stress énorme dans la vie des gens.
J'ai quelques remarques à faire. D'abord, je constate que dans vos diapositives, le sexe des personnes n'entre pas en jeu. Je mettrais ma main au feu que toutes les femmes dans cette salle ont mille histoires à raconter sur la façon dont ceci touche principalement, pas exclusivement mais principalement, les femmes. Je me demande si vous avez fait une ventilation par sexe dans votre sondage. Les résultats sont très intéressants, mais j'ai l'impression que le degré de stress, de difficultés, tous les facteurs que vous avez examinés, sont beaucoup plus élevés chez les femmes...
Mme Judith MacBride-King: Accéléré...
Mme Libby Davies: ... et je pense que c'est là un problème très grave. En tant que femmes, nous voulons atteindre l'égalité, n'est-ce-pas? Nous voulons les femmes aient des chances de succès dans le monde du travail, qu'elles obtiennent de l'avancement et qu'elles assument des responsabilités. Nous savons que la capacité est là, mais si les mécanismes de soutien... Je pourrais dire que, même pour les députées, c'est un problème.
Une voix: Tout en haut...
Mme Libby Davies: Eh bien, nous nous situons quelque part en haut de la liste. Je connais des femmes députées qui ont de jeunes enfants et qui éprouvent d'énormes difficultés lorsqu'elles veulent rentrer chez elles. La vie de député n'est pas de tout repos; il faut se montrer dans la circonscription et il faut aussi être à Ottawa. Mais tous les lieux de travail comportent leur degré de stress. J'aimerais savoir ce que vous avez à en dire, du point de vue de l'égalité des sexes.
Ce que je voudrais dire également, c'est que je travaille au sein d'un groupe dans ma circonscription—à Vancouver—et avec un expert-conseil qui s'occupe du B.C. Children's Hospital en collaboration avec un groupe de parents d'enfants malades, d'enfants qui ont le cancer, d'enfants qui nécessitent des soins prolongés et qui doivent rester loin de chez eux. Encore une fois, les questions sont... Et on peut en dire autant des soins pour personnes âgées, n'est-ce pas? Nous tous avons peut-être des parents qui sont hospitalisés, qui subissent des traitements de chimiothérapie, ou d'autres soins. Lorsqu'on voit ce qu'on peut obtenir par les conventions collectives, par les mesures gouvernementales, par l'assurance-emploi ou par le congé parental, c'est bien peu de chose.
J'aimerais savoir ce que vous avez à dire concernant les mesures relevant des pouvoirs publics. On a fait une annonce sur les congés parentaux, mais il me semble qu'il faudrait étendre considérablement cette mesure pour qu'elle ait un effet réel et pour qu'on puisse véritablement prétendre à l'égalité, mais il va aussi falloir mettre en place des mécanismes de soutien et, comme vous le faites, faire de la sensibilisation en milieu de travail pour que tout cela se concrétise, pour que cela ne reste pas lettre morte.
Vous m'excuserez de m'être éternisée, mais c'est un sujet qui me passionne.
Le président: C'est à inscrire au programme d'une future discussion.
Mme Judith MacBride-King: Merci.
Tout d'abord, sur l'égalité des sexes, il est indiscutable que les travailleuses canadiennes sont plus exposées au stress et risquent plus de rencontrer des difficultés. Le plus souvent, ce sont elles qui sont principalement responsables de divers soins à donner aux enfants, aux personnes âgées ou aux personnes en difficulté dans la famille.
Lorsqu'on regarde la différence entre les soins prodigués aux enfants et aux personnes âgées, on remarque que les hommes ont plus tendance à s'occuper des personnes âgées que des enfants, car souvent, les personnes qui ont besoin de soins sont leurs parents. On remarque, à ce niveau, une dynamique intéressante. Je suis bien d'accord avec vous.
• 1600
Dans notre organisme, nous insistons beaucoup sur les changements
démographiques et sociaux, car nous pensons que c'est un élément
important à considérer pour les employeurs canadiens, qui doivent se
préparer à ce changement, s'ils veulent réussir dans leurs
entreprises.
Cependant, nous avons dit, dès le départ, que cette question ne concerne pas que les femmes, ni que les hommes, du reste. C'est un problème pour les femmes, pour les hommes, pour les familles et pour l'entreprise. C'est là un message très important, car nous voulons que les entreprises sachent qu'à notre avis, la question est importante, non seulement pour les enfants, les familles et les collectivités, mais qu'elle est également essentielle pour le succès des entreprises. J'ai jugé utile de vous le dire également.
Que faut-il pour permettre le changement et quelles en sont les conséquences, au sein de l'entreprise? Sur une échelle réduite, le changement se trouve facilité lorsque le PDG ou le chef de l'organisme est une femme, ou une personne qui a des enfants et qui se heurte à ce genre de difficultés, ou qui les a connues.
Je ne peux pas me prononcer sur la politique des pouvoirs publics. Je dois vous dire que mon organisme n'a pas pour vocation de proposer des mesures.
Mme Libby Davies: Qu'est-ce que cela signifie?
Mme Judith MacBride-King: Que nous faisons de la recherche sur différentes questions qui nous semblent importantes, que nous fournissons de l'information et invitons les particuliers et les organismes à en tirer les conséquences. Nous pouvons nous-mêmes en tirer les conséquences. Voilà ce que cela signifie.
Il m'est donc difficile de parler de la politique des pouvoirs publics du point de vue de mon organisme.
Mais j'ai apprécié vos questions.
[Français]
Le président: Madame Folco.
Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Ma question est un peu dans le sens de celle de ma collègue. Il y a eu un changement fondamental dans la composition de la masse ouvrière depuis au moins deux générations, avec l'entrée massive des femmes sur le marché du travail après la Deuxième Guerre mondiale.
Vous avez parlé du rôle que le gouvernement peut jouer comme modèle. Il me semble que depuis plusieurs années déjà, les gouvernements en général, autant au niveau provincial que fédéral, mettent en place un certain nombre de mesures qui leur permettent de servir de modèles.
Il me semble que le problème, présentement, ne se situe pas au niveau des grandes entreprises qui, elles, ont les moyens d'établir des garderies pour les jeunes enfants à même l'établissement, ou tout près. Il me semble que le problème se situe plutôt dans les petites et moyennes entreprises, les PME. Les PME constituent quand même l'épine dorsale de l'économie du Canada. Je pense aux petites entreprise de trois, quatre ou dix personnes au maximum, qui font de petits profits, qui ne font pas nécessairement de très gros profits.
Je sais que vous venez de dire que votre organisme n'est pas un organisme qui suggère des solutions, mais qui souligne les composantes du problème, mais quand même. D'abord, est-ce que les PME peuvent faire quelque chose? Ma question concerne surtout le gouvernement du Canada, puisque c'est notre rôle à nous ici. Quel rôle le gouvernement peut-il jouer, non pas pour aider les multinationales ou les grandes entreprises, mais pour aider les petites et moyennes entreprises à aider les mères de famille—je parle plus des mères que des pères pour des raisons évidentes, et il y en a beaucoup qui sont à la tête d'une famille monoparentale—, mais aussi à aider les jeunes enfants? Pouvez-vous nous faire des suggestions à cet effet?
[Traduction]
Mme Judith MacBride-King: Merci. C'est une excellente question.
Lorsque nous avons commencé notre recherche il y a 10 ans, nous avons regardé ce que faisaient les petites, les moyennes et les grosses entreprises dans l'ensemble du pays. Nous avons remarqué que les plus petites étaient très souples. Elles ne définissent pas ce qu'elles font dans ce contexte. Elles ne se considèrent pas comme particulièrement favorables à la famille, mais en réalité, elles le sont dans bien des cas. J'ai des exemples d'une petite ville du Nouveau-Brunswick où la directrice d'une entreprise qui propose des services de traiteur permet à ses employées de venir travailler avec leurs enfants lorsque les écoles sont fermées, par exemple, pour cause de tempête. Les exemples de ce genre sont nombreux.
Quant à savoir ce qui est de ce que le gouvernement pourrait faire pour venir en aide aux petits employeurs, je pense que le fait de poser la question peut leur apporter de l'information ou des connaissances. C'est très important. Il faut aussi rendre hommage à leur action. Cela peut paraître futile, mais ça ne l'est pas. Lorsqu'on discute avec un employeur d'une petite ville pour se renseigner sur ses réussites, il nous en parle, mais semble ne pas les considérer comme importantes. En réalité, ces réussites sont importantes, mais les dirigeants d'entreprises ne se rendent pas compte à quel point ils ont été efficaces pour leur communauté.
• 1605
Mais je dirais, avant tout, qu'il s'agit de bien renseigner les
petits employeurs sur l'importance de la question, sur les difficultés
que peuvent rencontrer leurs employés et sur les options qu'ils
peuvent leur offrir, notamment au plan de la souplesse. Pour de
nombreux Canadiens, il s'agit simplement de reconnaître que la
question est importante au quotidien.
Mme Raymonde Folco: Vous parlez surtout
[Français]
des mesures incitatives et la promotion des programmes qui existent déjà et qui sont initiés par les petites et moyennes entreprises elles-mêmes.
[Traduction]
Mme Judith MacBride-King: La promotion, en effet, mais encore une fois, tout cela dépend. C'est sans doute utile pour les petits employeurs dans les collectivités qui forment des regroupements. Pour ce qui est des services de garderie, les employeurs nous disent que les garderies coûtent très cher. Ils s'en inquiètent, de même que des questions de responsabilité et de budget, mais si un certain nombre d'employeurs du secteur public et du secteur privé se regroupent et se concentrent sur certains aspects des services de garderie, comme la création d'un établissement de garderie, etc., leur action peut aussi être très utile.
À notre avis, le regroupement est un modèle très prometteur et très efficace.
Le président: Eric Lowther, soyez le bienvenu.
M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Merci.
Vous m'excuserez d'avoir manqué votre exposé, mais j'ai bien examiné vos diapositives. Vous avez peut-être déjà répondu à ma question dans votre exposé et, dans ce cas, vous voudrez bien m'en excuser; je consulterai le compte rendu, et vous n'aurez pas à vous appesantir.
Je voudrais parler de certains sujets que je connais bien dans mon secteur et auxquels je me suis déjà trouvé confronté. Le Calgary Herald, par exemple, a un service de garderie très développé, destiné à ses employés, et situé à l'intérieur même de son immeuble. Je me souviens y être allé, il y a un an ou deux, et de m'être renseigné sur le taux d'utilisation de cette garderie. J'ai été surpris d'apprendre qu'elle était à peine utilisée. Elle était à moitié vide.
L'une des sociétés où j'ai travaillé n'avait pas de garderie de ce genre, mais elle avait conclu une sorte d'entente sur la souplesse des horaires, grâce à laquelle deux employés pouvaient se partager un poste à plein temps, lorsqu'ils voulaient s'occuper de leurs enfants, sans renoncer aux avantages sociaux offerts par la société. Il existe, à mon sens, différentes options axées sur la souplesse, et j'ai remarqué que vous utilisiez ce mot dans vos diapositives.
J'ai souvent l'impression qu'on se contente d'observer le pays à partir d'Ottawa et qu'on a tendance à oublier la diversité non seulement des entreprises, mais aussi des régions. On perd son temps à essayer de trouver une solution unique qui convienne à tout le monde. Il y a partout des nuances, des différences culturelles, des différences entre milieu rural et milieu urbain. Il y a tant de différences qu'à mon avis, il est préférable de chercher des solutions au niveau microcosmique, par exemple au niveau de quelques entreprises. Mais les solutions sont élaborées par les gens qui vont utiliser les services, quels qu'ils soient. Chacun a son mot à dire, puisqu'il y va de la culture, que ce soit de l'entreprise, de la communauté ou de la région. Lorsqu'on essaie d'imposer un moule unique, on risque de tenir bien des gens à l'écart.
Avez-vous des commentaires à faire?
Mme Judith MacBride-King: Certainement. Je suis tout à fait d'accord avec vous. Nous nous sommes rendus compte depuis dix ans qu'il n'y a pas de solution universelle ou de solution magique. Si les entreprises veulent se montrer plus accueillantes à l'égard des familles, elles doivent comprendre que les besoins des familles varient. Elles doivent comprendre ces besoins.
Soit dit en passant, je connais la garderie du Calgary Herald. Je me souviens lorsqu'on l'a construite. En fait, c'était juste au moment où les employés du Herald avaient besoin d'une garderie. Si je me souviens bien, bon nombre d'entre eux venaient d'avoir des enfants. Cette initiative a été très bien accueillie. La garderie n'est peut-être plus utile parce que les enfants ont grandi, ce qui montre bien que les employeurs et les entreprises doivent bien comprendre les besoins de leurs employés et savoir où ils se situent exactement dans le cycle de la vie. Je suis donc tout à fait d'accord avec vous.
• 1610
De nombreuses options s'offrent aux entreprises pour se montrer plus
accueillantes envers les familles. En réponse à une question
précédente, je dirais qu'il importe qu'elles le fassent. Il faut bien
comprendre les options qui s'offrent à elles et savoir qu'il ne s'agit
pas toujours pour les entreprises de créer une garderie. En fait, bien
des gens préfèrent recourir à d'autres types de services de garderie.
Il faut d'abord bien comprendre les besoins de ses employés.
M. Eric Lowther: Je crois qu'il est très juste que toutes sortes d'options s'offrent aux entreprises, outre celles des services de garderie.
D'après le graphique que vous nous avez remis, 50 p. 100 des sondés disent ne pas avoir suffisamment de temps pour eux-mêmes et 48 p. 100 d'entre eux disent avoir remarqué être nerveux et stressés dernièrement. Ces pourcentages sont plus élevés que les autres. Un autre énoncé dit ceci: «Lorsque j'ai besoin de plus de temps, j'ai tendance à moins dormir». On croirait entendre un député.
Des voix: Oh, oh!
Mme Judith MacBride-King: Pas de commentaire.
Le président: Je crois qu'Eric soulève des points très intéressants.
Ce qui semble être en train de changer—et cela fait intervenir la notion de souplesse à laquelle vous faisiez allusion, Eric—, c'est que les organismes comme les syndicats... Je songe notamment aux travailleurs de l'automobile. Autrefois, on aurait construit une garderie sur les lieux de travail parce qu'on estimait que c'était logique. On s'est cependant rendu compte qu'il valait mieux, dans de nombreux cas, construire une garderie à proximité du lieu de résidence des travailleurs de l'automobile, ce qui permettait aux deux parents d'êtres plus près de leur enfant. Cette solution s'est révélée meilleure que la solution précédente, et c'est pourquoi les travailleurs de l'automobile ont accepté les dispositions sur les services de garderie dans leur dernière convention collective.
J'ai participé à une conférence organisée par le Conference Board, l'automne dernier. Cette conférence portait sur un sujet connexe à celui que nous étudions. Elle portait sur l'aide à la petite enfance et le rôle que peuvent jouer à cet égard, les petites et moyennes entreprises. C'est le point que soulevait Mme Folco. Le patron d'une entreprise comptant 300 travailleurs a dit que son entreprise était trop petite pour qu'il soit logique de construire une garderie sur les lieux de travail. Il a demandé s'il ne serait pas plus logique, au lieu qu'il se regroupe avec d'autres petite entreprises pour ouvrir une garderie, qu'il y ait un programme de service de garderie qui soit financé à même les deniers publics. Il a fait remarquer que les petites entreprises ne se regroupent pas pour créer des écoles, par exemple. Pourquoi faudrait-il qu'elles le fassent pour offrir des services de garderie?
Notre comité examinera aussi, au cours de l'année, les solutions communautaires intégrées qui tiennent compte des divers besoins des parents. Ces besoins varient selon l'âge de leurs enfants et selon le genre de travail qu'ils font.
Il n'existe donc pas de solution magique, mais il y a un ensemble de solutions qui, mises en oeuvre ensemble, pourraient être intéressantes.
J'ai l'impression d'avoir fait tout un discours, mais je voulais simplement poser deux ou trois questions.
Vous avez des rapports avec le secteur privé. Pour inciter les entreprises à se montrer plus accueillantes à l'égard des familles, il faudrait féliciter publiquement celles qui prennent déjà des mesures en ce sens. J'aimerais savoir s'il existe déjà un programme de ce genre dans le secteur privé ou dans le secteur public. On publie, par exemple, une liste des 100 meilleurs employeurs. Tient-on compte de ce facteur, lorsqu'on établit ces listes? Un organisme quelconque dresse-t-il la liste des meilleures pratiques dans ce domaine, tant dans le secteur public que dans le secteur privé?
Parmi toutes les options intéressantes qu'on a soulevées, je pense qu'il convient d'examiner celles qui insistent sur le fait que les solutions à mettre en oeuvre doivent refléter les besoins des gens. Il ne faut pas s'intéresser uniquement aux besoins des enfants. C'est un élément très important.
Nous devrions peut-être établir aussi quelles sont les meilleures pratiques à l'échelle internationale. Savez-vous dans quels pays les entreprises se montrent le plus accueillantes à l'égard des familles et si cela les aide à fidéliser leurs travailleurs? Comment ces pays s'y prennent-ils? Ont-ils recours à une loi ou à des stimulants? Je reviens à la question que posait Mme Folco.
Enfin, voici ma dernière question: si le travail de votre organisme consiste à décrire les faits plutôt qu'à proposer des politiques, qui, à votre avis, est le mieux placé au Canada pour proposer une politique à cet égard et pour la mettre en oeuvre?
Je m'excuse de vous avoir posé autant de questions. Je me tairai dans un instant lorsque ce sera le tour de quelqu'un d'autre de vous poser des questions.
Mme Judith MacBride-King: Je vous remercie.
• 1615
Avant de répondre à vos questions, monsieur le président, j'aimerais
revenir sur la question de la souplesse dont on doit faire preuve,
pour pouvoir tenir compte de l'ensemble des besoins des collectivités
et des organismes. J'insiste beaucoup là-dessus. Je ferai parvenir au
comité des exemplaires de notre étude lorsqu'elle sera rendue
publique, mais je tiens seulement à vous signaler que nous avons
demandé à des organisations de nous décrire toutes les initiatives
qu'elles mettent en oeuvre dans ce domaine depuis les services
d'aiguillage et d'information destinés à aider les parents à trouver
le type de services de garderie qui leur convient, au prix qui leur
convient, jusqu'aux services de garderie sur les lieux de travail.
Diverses options s'offrent donc aux entreprises. Je m'assurerai que
vous obteniez copie de notre étude.
Vous demandiez si des prix sont décernés aux entreprises les plus méritantes. Le gouvernement fédéral décerne ce type de prix. Le Prix d'excellence dans le domaine de l'équité en matière d'emploi est un prix annuel et l'un des facteurs pris en compte pour choisir les lauréats de ce prix, a trait aux mesures prises pour permettre aux employés de concilier travail-vie personnelle. Le même facteur est pris en compte par l'Institut national de la qualité lorsqu'il décerne le Prix d'excellence du milieu de travail sain.
J'ai mentionné l'existence de prix mais j'incite le comité à songer à d'autres façons de faire la promotion de ce genre d'initiative. On pourrait songer à un processus d'accréditation comme ISO 9000. Il ne s'agirait donc pas de décerner un prix, mais de souligner les mesures qui sont prises par une entreprise pour répondre aux besoins des familles. Il faut tirer parti du sentiment de fierté des entreprises. Sur l'autoroute en direction de Montréal, on voit un panneau faisant la promotion de la norme ISO 9000 ou ISO 9001. On y lit ceci: «Nous sommes fiers». Je vous incite à penser à ce genre de mesure.
Je crois que l'Université de Guelph étudie actuellement la question de savoir si un programme de prix serait utile. Je n'en suis pas certaine. Je pense que l'université proposera plutôt un programme d'accréditation.
Pour ce qui est d'un répertoire des meilleures méthodes ou d'un dépôt où l'on garde cette information, cela s'impose au Canada. Il existe des centres de connaissance en la matière. Le Conference Board dispose de certains renseignements; c'est le cas également de l'Université de Guelph, et aussi de nos collègues de l'université Carleton. Il existe donc, me semble-t-il, une occasion de réunir ces divers éléments—et il ne s'agit pas ici de déboucher sur un modèle unique, mais de répertorier diverses initiatives, divers cas de réussite et d'échec, de manière à ce que les organisations n'aient pas à réinventer la roue et puissent tirer un enseignement de l'expérience des autres.
Le président: Il s'agit donc de réunir l'information et de la diffuser à ceux qui en ont besoin, n'est-ce pas?
Mme Judith MacBride-King: Tout à fait.
Et je me permets de rappeler que le Conference Board est très bien situé à cet égard, aussi bien sous l'angle du secteur public que privé. Il existe divers centres d'information et l'idée de les réunir est excellente.
En ce qui concerne les meilleures méthodes à l'échelle internationale, elles existent certes. Au Canada, un certain nombre d'organisations jouent un rôle de chef de file en la matière. C'est d'abord à elles que je m'adresserais. Ensuite, on pourrait voir ce qui existe ailleurs.
Vous me demandez comment ces organisations dans d'autres pays y parviennent. Est-ce par l'application d'une politique ou de mesures incitatives, etc? Lorsque nous avons amorcé nos travaux, il y a bien des années, nous avions l'habitude de nous comparer aux États-Unis, à ce que faisait les organisations du même genre aux États-Unis. Nous avions l'impression d'être très en retard et, en effet, nous en avions beaucoup. À l'époque, seul un faible pourcentage, soit 8 p. 100, des employeurs canadiens avaient mis au point des programmes d'aiguillage d'information destinés à leurs employés.
On peut s'interroger sur les raisons d'un tel écart. Il ne faut pas perdre de vue que nos voisins du Sud n'ont pas le même genre de filet de sécurité sociale que nous, ici au Canada. Par conséquent, les employeurs ont davantage tendance à combler le vide. Voilà tout au moins l'explication qui me semblait valable dans le contexte de l'époque. Nous devons donc envisager la question dans la perspective plus vaste de la politique des pouvoirs publics, notamment en ce qui a trait au filet de sécurité sociale, et nous demander dans quelle mesure...
Le président: Vous parlez à l'imparfait. Ai-je raison de croire que vous donnez à entendre que la situation actuelle a évolué par rapport aux États-Unis?
Mme Judith MacBride-King: En effet. Bon nombre d'organismes au Canada ont vraiment fait le rattrapage qui s'imposait. Ils l'ont fait essentiellement pour des raisons d'intérêt commercial, parce qu'elles souhaitent attirer, retenir et motiver les meilleurs sujets.
Lorsque nous avons amorcé nos travaux dans ce domaine, le taux de chômage à Toronto était de 2 p. 100. Les employeurs s'arrachaient les employés. Et, comme par hasard, nous constatons à nouveau aujourd'hui un resserrement du marché de la main- d'oeuvre, qui va vraisemblablement se poursuivre. Par conséquent, le moment est bien choisi de prôner la convergence, et ce pour des raisons qui ont trait aussi bien à l'intérêt général qu'à l'intérêt particulier.
Le président: Merci.
[Français]
Madame Gagnon, si vous voulez poser des questions, c'est votre tour. Ensuite, ce sera Libby Davies.
Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Je m'excuse d'avoir manqué le début des questions; j'avais un dossier à régler.
Je trouve qu'on essaie toujours de chercher la meilleure solution pour mieux aider les familles, mais il y a des créneaux qui existent présentement et qui permettraient, dès maintenant, d'apporter beaucoup plus de soutien à la famille. Je pense, par exemple, au congé parental, aux garderies et à une meilleure fiscalité. On sait très bien que les finances sont souvent une cause de stress pour une jeune famille qui a de jeunes enfants et qui a de la difficulté à joindre les deux bouts.
Je vais encore critiquer le gouvernement, mais si j'étais au Québec, je discuterais avec le gouvernement du Québec et le parti en place. Ici, présentement, ce sont les libéraux.
Par exemple, on a doublé la durée du congé parental, mais sans avoir fait une analyse plus large pour déterminer qui va y avoir droit et à quel prix. Quelles sont les femmes qui vont pouvoir se payer un congé parental d'une année, avec seulement 55 p. 100 de leur revenu? C'est une première chose. On annonce une bonne nouvelle, mais sans avoir tenu compte de toutes les dimensions du congé parental.
La même chose vaut pour les garderies. Au Québec, on a mis sur pied un service de garderie à 5 $. On sait très bien que le gouvernement fédéral a dans ses poches 70 millions de dollars de plus parce que les familles ne réclament plus de crédit d'impôt pour les frais de garde au-delà d'un certain montant. Encore une fois, comment peut-on inciter le gouvernement d'une autre province à aller de l'avant avec cette politique impopulaire parce qu'elle est liée à la Prestation nationale pour enfant? On a dit aux provinces qu'elles pouvaient aussi reprendre les allocations familiales dans les poches des familles si elles développaient des services pour mieux les aider.
Encore là, je ne pense pas qu'on ait tenu compte de l'ensemble de la problématique ou de l'ensemble des mesures qu'on pourrait prendre pour aider la famille. Le gouvernement aurait pu donner de l'argent séparément pour que la province, en l'occurrence le Québec, puisse développer ses services de garde. Aujourd'hui, on vient d'annoncer une mesure qui sera très impopulaire: on va aller chercher plusieurs millions de dollars dans les fonds qui sont destinés à la Prestation nationale pour enfant.
C'est la même chose pour la fiscalité. On aurait pu, à tout le moins pour les familles à faible revenu, être beaucoup plus généreux quant aux réductions d'impôt pour aider encore davantage les familles à joindre les deux bouts. Donc, on a au moins trois créneaux qui existent déjà, où il y a une grande faiblesse quant au soutien qu'on pourrait donner à la famille. J'aimerais vous demander si pour vous, ces trois créneaux sont essentiels au soutien de la famille. C'est un départ. Disons que ça n'empêche pas d'autres initiatives, mais ce sont des initiatives de base.
[Traduction]
Le président: Avez-vous des commentaires?
Mme Judith MacBride-King: À nouveau, j'hésite à répondre, à m'aventurer, mal préparée, dans le domaine de la politique. Je dirai tout de même que les employés sont de plus en plus nombreux à nous dire qu'il importe de respecter la notion de congé parental.
Le Québec a été la première province au Canada à introduire un congé de cinq jours pour responsabilités familiales. Divers organismes, un peu partout au Canada, ont tiré un enseignement de l'expérience québécoise et bon nombre de ceux qui offrent le congé pour responsabilités familiales offrent cinq jours ou plus. La politique gouvernementale peut donc avoir d'autres types d'incidence sur les employeurs.
J'hésite, par ailleurs, à vous répondre et je m'en excuse. Je ne suis pas en mesure de me prononcer sur les autres facteurs dont vous avez parlé.
Le président: Permettez-moi de vous poser une question connexe. Est-il ressorti du sondage que le Québec, à cause du congé pour responsabilités familiales et d'autres mesures, avait nettement une longueur d'avance, pour ce qui est du degré de satisfaction au travail.
Mme Judith MacBride-King: Je ne me souviens pas que cela soit ressorti du sondage. Mon collègue, qui a fait l'essentiel de l'analyse, n'est pas ici. Je suis en mesure de vous fournir la ventilation par province, mais je ne crois pas qu'il y avait des différences importantes.
Le président: Libby.
Mme Libby Davies: J'aimerais revenir sur une observation que vous avez faite en rapport avec ce que disait Eric au sujet du centre de garderie au Calgary Herald.
Je suis toujours étonnée de constater à quel point nous en savons peu. Pour beaucoup de gens, l'idée de la garderie en milieu de travail semble excellente, et John l'a très bien dit. Mais, ne serait-ce que sur le plan du temps passé en déplacement, entre la maison et le travail, il y a lieu de s'interroger. En effet, je connais bon nombre de familles, qui habitent Vancouver dans le sud de la partie continentale de la province qui passent une heure et demie dans la circulation, aussi bien à l'aller qu'au retour. Dans de telles circonstances, l'idée d'amener les enfants à la garderie parce qu'elle se trouve sur les lieux du travail...
Ainsi, sommes nous toujours en train d'en apprendre sur ces questions. Je suis d'accord pour dire que les gens doivent avoir le choix, et vous nous avez très bien expliqué pourquoi—personne n'est à la recherche de la formule unique qui va convenir à tout le monde—et je m'inquiète parfois du fait que lorsqu'on parle de «souplesse», on veut plutôt dire «chacun pour soi». Voilà bien l'un de nos points forts, ici au Canada. En l'absence d'une politique gouvernementale, d'une approche plus universelle qui permet des choix, nous nous retrouvons devant la grande mosaïque canadienne avec ses résultats aléatoires et disparates... Pensons au modèle québécois, où le programme de 5 $ par jour a suscité une demande considérable—je parle ici de garderies—alors que dans d'autres provinces, il n'existe pratiquement rien.
Je m'inquiète donc du fait que «souplesse» prenne le sens de «survie». Et, bien évidemment, cela a une incidence considérable sur le revenu, ce dont nous n'avons pas parlé. Pour ceux qui ont les moyens de se payer une gardienne à domicile, tout va très bien, mais de nombreuses familles canadiennes arrivent difficilement à joindre les deux bouts et, pour elles, la souplesse consiste à surnager jusqu'à la fin du mois.
Sans nous donner de conseils en matière de politique officielle, pouvez-vous nous dire comment le secteur privé devrait assumer ses responsabilités? Quels sont les moyens dont il dispose? Il pourrait peut-être s'agir du Conference Board. Je n'en sais rien. Toutefois, on peut espérer que quelqu'un fera de cette idée son cheval de bataille... Même dans votre secteur, il doit bien y avoir des moyens qui vous permettraient de communiquer l'information à IBM, à la Banque de Montréal, à Safeway et d'autres et leur dire que, en tant qu'employeurs, ils ont la responsabilité de régler les questions qui touchent la famille et la souplesse en milieu de travail.
Auriez-vous des commentaires à faire à ce sujet?
Mme Judith MacBride-King: Certainement. J'en ai effectivement quelques-uns.
Je suis d'accord avec vous pour ce qui est de l'utilisation du terme «souplesse». Le mot peut avoir quelque chose de polyvalent et d'indéfinissable, si on ne prend pas la peine de bien en circonscrire le sens. Je tenais à vous dire que je suis d'accord avec vous là-dessus.
Pour ce qui est des moyens dont disposent les organismes, j'estime, pour ma part, qu'il existe à peu près dans tous les milieux un ou deux organismes qui sont en mesure de prendre l'initiative, que ce soit par le truchement de chambres de commerce ou autrement, et qui vont ainsi avoir un effet d'entraînement. D'après moi, il importe d'identifier de tels chefs de file et de soutenir leur action. Ainsi, au nombre des moyens ou des véhicules, on pourrait penser par exemple aux chambres de commerce—des organismes comme le nôtre.
En réalité, je crois sincèrement que nous sommes le seul organisme au Canada à offrir aux employeurs un réseau d'entraide pour discuter de ces questions. Il s'agit du réseau dont je vous ai déjà parlé, que nous avons établi dès 1991, grâce auquel les dirigeants et gestionnaires de divers organismes peuvent apprendre les uns des autres... Il y a là de quoi satisfaire aussi bien le néophyte que le grand sage: tous les niveaux d'échange et d'apprentissage sont possibles. Les participants apprennent ensemble. Nous leur offrons les meilleures méthodes et nous facilitons les échanges entre organismes. Nous nous efforçons de les renseigner sur les réussites et les échecs et nous les sensibilisons à l'importance des pertes qu'ils peuvent s'éviter en répondant aux besoins de leurs employés: ils perdent de bons employés et ils y perdent aussi sur le plan des coûts de soins de santé. Lorsque les organismes se mettent à faire le calcul, ils constatent qu'ils y perdent à beaucoup d'égards.
• 1630
Donc, dans une perspective de rentabilisation, c'est un argument qui
a beaucoup de poids et que nous avons traditionnellement fait valoir
parce que nous considérons que ce sont d'excellents arguments
commerciaux.
En ce qui concerne la responsabilité sociale des entreprises, tout à fait, de plus en plus d'organismes reconnaissent que leurs employés font partie des collectivités dans lesquelles ils exercent leurs activités. Dans ce contexte, un grand nombre d'entre eux commencent à établir un lien entre ces différents aspects. Il s'agit probablement d'une poignée seulement d'organismes et surtout les plus gros.
Le président: J'ai sur ma liste Mme Folco et Mme Gagnon, mais je pense que M. Lowther doit partir et veut poser une brève question, si vous le lui permettez. Très bien. Nous aurons une brève question d'Eric, puis nous passerons aux autres.
M. Eric Lowther: Je vous remercie et je remercie mes collègues.
Certaines des entreprises où j'ai travaillé ont fait l'expérience du travail à la maison. Je sais que beaucoup de parents travaillent à la maison, mais d'après mon expérience, c'est surtout dans le cas de ceux qui travaillent à temps partiel et à contrat pour une entreprise, ou de ceux qui ont une petite entreprise chez eux. Je pense que ces gens-là se débrouillent assez bien.
Le Conference Board a-t-il des données concrètes, ou a-t-il décelé des tendances dans le cas de ceux qui ne travaillent pas à leur compte et pour un employeur, et de cet essai, dont on a tant parlé par le passé mais dont on parle moins aujourd'hui—du moins pas dans mon cas mais c'est peut-être simplement les milieux que je fréquente—de travail à la maison pour un employeur? Dans mon entreprise, on s'est toujours demandé comment cela fonctionnerait? Qui va vérifier si le travail se fait vraiment efficacement? Que se passe-t-il lorsque les enfants ont un accident et que la mère est là? Nous avons tenté l'expérience de façon un peu maladroite, et j'ai été élu avant d'en connaître le résultat. Quelles sont les tendances à cet égard?
Mme Judith MacBride-King: La tendance est à la hausse. Je crois que 10 ou 11 p. 100 des organismes que nous avons sondés, à la fin des années 80, ont indiqué qu'elles avaient des initiatives de travail à la maison ou de télétravail, et maintenant c'est le cas de plus de 30 p. 100 des organismes que nous avons sondés. Donc cette tendance est à la hausse, et il y a des problèmes. Nous avons toujours soutenu que ce n'est pas une solution pour la garde des enfants. Quiconque a travaillé à la maison avec un petit de 2 ans sait que ce n'est pas la solution pour s'occuper d'un enfant. Mais il est utile que les gens aient la souplesse de rentrer chez eux lorsqu'ils le doivent et de pouvoir faire ce qui s'impose. Mais en tant que méthode à long terme de soins des enfants, je ne recommande pas cette solution.
Les organismes et les particuliers qui optent pour ce mode de travail doivent comprendre pleinement les avantages et les inconvénients qu'il comporte. Pour les particuliers, par exemple, il y a le problème de l'isolement. Il y a toutes sortes de problèmes. Il y a aussi l'impression psychologique d'être tout seul, ce qui convient à certains mais pas à d'autres. Il est important de comprendre cet aspect, et de connaître les avantages et les inconvénients de ce mode de travail. Je pense que, pour bien des gens, le télétravail est un mode de travail à la maison de haut niveau, mais il y a beaucoup de personnes au Canada qui travaillent chez elles comme brodeuses et couturières. Ce n'est certainement pas un travail haut de gamme. Je crois donc qu'il est très important que les organismes tiennent compte des questions concernant la sécurité.
Vous avez demandé comment nous saurions si cette personne travaille effectivement et n'est pas plutôt en train de faire autre chose que ce qu'elle doit faire. J'ai une réponse simple à cette question. Si vous vous contentez de mesurer les résultats, alors cela n'a pas d'importance.
M. Eric Lowther: En résumé, cela n'a rien de sorcier. Si les enfants sont très jeunes, il est assez difficile de travailler à la maison. Mais s'ils sont plus âgés, qu'ils sont en âge d'aller à l'école—je me remémore certains de nos scénarios—c'est un arrangement qui fonctionnait assez bien pour ceux qui avaient des enfants d'âge scolaire, parce qu'ils étaient partis durant le jour et lorsqu'ils revenaient à la maison, le parent était là, au lieu de devoir engager quelqu'un pour s'en occuper entre le retour de l'école et le moment où le parent rentre à la maison. Dans le cas des nouveau-nés, la dynamique qui existe à la maison est de toute évidence différente.
Mme Judith MacBride-King: C'est intéressant, car certaines personnes qui travaillent à la maison ont aussi de très jeunes enfants mais elles les font garder par un voisin ou les mette dans une garderie. Donc, même ce modèle est en train de changer légèrement. Mais il est vrai que pour les personnes qui ont des enfants d'âge scolaire, l'avantage pour elles c'est d'être à la maison lorsque leurs enfants rentrent de l'école, et elles peuvent ensuite reprendre leur travail lorsque les enfants sont au lit, ou à un autre moment.
Quant à ce que vous avez dit au sujet de deux personnes qui partagent un emploi et qui partagent une part proportionnelle des avantages, etc., je pense qu'il est très important que ces personnes comprennent, ici encore, les avantages et les inconvénients de ce mode de travail. Mais lorsqu'il existe un choix—et je veux dire un choix réel, et que les gens choisissent cette option, ou a certains indices qui prouvent que ce mode de travail favorise la productivité, améliore la satisfaction, permet de mieux apprécier son travail, de mieux s'apprécier soi-même, et ainsi de suite. Il existe des données qui confirment cet état de chose.
M. Eric Lowther: Un des membres de mon personnel a eu son troisième enfant, et elle s'occupe de tout mon courrier, chez elle. Elle rédige certaines lettres pour moi à partir de mes points de discussion, et je les approuve. Cela fonctionne vraiment bien pour nous. Elle écrit très bien, mieux que moi. Je ne devrais peut-être pas avouer une telle chose devant le comité.
Le président: N'ayez crainte, nous ne révélerons pas votre petit secret. Merci beaucoup.
Madame Folco, puis madame Gagnon.
Mme Raymond Folco: J'aimerais réagir aux questions et aux observations de M. Lowther. Je viens d'un milieu où beaucoup de femmes d'origine ethnique travaillent à la maison pour l'industrie de la confection et élèvent leurs enfants. Que les enfants soient jeunes ou pas, que ce soit des nouveaux-nés ou des enfants d'âge scolaire, d'après ce que j'ai pu constater, cela représente un très lourd fardeau pour la femme. Cela signifie qu'elle doit s'occuper de la maison et faire son travail, quel qu'il soit. Une fois les enfants au lit, peu importe leur âge, c'est à ce moment-là qu'elle commence à travailler, pas nécessairement sur un ordinateur, mais à faire de la couture. Donc, mon impression des femmes qui travaillent à la maison pour quelqu'un d'autre et qui élèvent des enfants, surtout si elles travaillent à bas salaire, c'est qu'elles doivent assumer un fardeau extrêmement lourd, et je ne recommanderais cela à personne, d'après ce que j'ai pu voir.
Dans le cas de cette femme qui travaille pour vous, il me semble que ce sont des circonstances assez exceptionnelles car je ne crois pas que vous lui donniez tant de travail à faire tous les jours. Vous lui donnez du travail de temps à autre.
M. Eric Lowther: Elle travaille quand cela lui convient.
Mme Raymonde Folco: Donc, les choses sont assez faciles pour elle. Mais pour les personnes qui doivent travailler à la maison parce qu'elles y sont obligées, qui ne peuvent pas s'absenter de la maison parce qu'elles ont de très jeunes enfants, et qui viennent peut-être d'un milieu culturel où il n'est pas forcément bien vu de confier ses enfants à quelqu'un d'autre, cette situation peut être vraiment très difficile.
Mais j'avais une question.
[Français]
Ce qui m'étonne dans votre présentation et dans les questions qui ont été posées autour de cette table, c'est qu'on a parlé des chambres de commerce, des grandes entreprises et des banques, mais qu'on n'a pas du tout parlé d'un secteur de la société qui, selon moi, est extrêmement important, celui des syndicats. Je m'étonne que Mme Davies n'en ait pas parlé.
En ce qui concerne les syndicats, vous avez parlé—pardon, je reviens en arrière—du modèle américain. Pour ma part, j'ai souvent réfléchi et lu sur des modèles européens: le modèle allemand, le modèle français, le modèle italien, etc., où les syndicats jouent un rôle important. Évidemment, je viens d'une province, le Québec, où les syndicats jouent un rôle très important.
Dans les nouveaux contrats qui sont signés entre les syndicats et le patronat, est-ce qu'on voit des nouvelles tendances? Est-ce qu'on parle encore sérieusement de congés parentaux? Si oui, est-ce que ce sont des congés payés ou non rémunérés? Est-ce qu'on parle aussi non seulement de congés pour aider les parents de jeunes enfants, mais aussi d'aider des enfants de parents âgés? C'est un élément dont nous ne nous sommes pas occupés, mais comme tout le monde l'a dit autour de cette table, de plus en plus, nous sommes nous-mêmes de cette génération coincée. Donc, j'aimerais savoir quelles sont les nouvelles tendances en ce qui concerne le rôle des syndicats au Canada.
Mme Judith MacBride-King: Je vous remercie. En fait, bien que je ne l'ai pas mentionné, d'après notre sondage auprès des travailleurs canadiens, l'information que je vous ai fournie aujourd'hui semble indiquer que, s'ils devaient établir l'ordre de priorité de ceux envers qui ils se tournent pour obtenir un appui, ce serait d'abord eux-mêmes, puis leurs employeurs, ensuite leurs gouvernements et quatrièmement leurs syndicats.
Mme Raymonde Folco: Quel était le quatrième groupe?
Mme Judith MacBride-King: Quatrièmement, les syndicats. C'était leur perspective. Nous savons qu'il y a un certain nombre de...
Tout d'abord, pour répondre à votre troisième question, c'est-à-dire si le nombre de congés pour s'occuper de parents âgés et de congés parentaux a augmenté, tout à fait. Y a-t-il de plus en plus de syndicats qui négocient ces congés? Absolument. Donc le nombre est à la hausse. En fait, cette tendance est à la hausse depuis que nous avons commencé à examiner cette question dans les années 80. Nous le constations.
L'une des nouvelles tendances que nous constatons, et un aspect dont vous voudrez peut-être tenir compte dans le cadre de vos travaux, c'est que, d'après ce que je crois comprendre—car comme je l'ai dit je ne suis pas spécialiste en relations de travail—étant donné que l'on travaille davantage à partir de chez soi, étant donné que nous restons chez nous pour travailler, de plus en plus de syndicats envisagent une forme de syndicalisation communautaire. Je trouve cela très intéressant car cela permet aux travailleurs de divers quartiers d'établir des liens avec un syndicat pour obtenir de l'appui et ainsi de suite. C'est une tendance à surveiller, à mon avis. Je n'en sais pas davantage, mais à mon avis c'est une tendance très intéressante que l'on constate depuis le virage technologique et le développement de nouveaux modes de travail. Je crois que, de plus en plus, les syndicats s'y intéresseront.
Mme Raymonde Folco: Mais quel est le rôle des syndicats à cet égard—un rôle d'observateur, de déclencheur?
Mme Judith MacBride-King: À mon avis, c'est surtout un rôle de partenaire.
Si vous me le permettez, j'aimerais remonter à plusieurs années lorsque nous examinions cette question. C'était intéressant. On s'entretenait avec les employeurs et les syndicats. Cela remonte à très longtemps. Les deux parties se présentaient à la table avec leur liste de revendications qu'ils étaient prêts à négocier pour cet arrangement en particulier, et souvent la première chose à laquelle les deux partis renonçaient, que ce soit les employeurs ou les syndicats, c'était l'appui aux particuliers et aux familles—ce qui se rapportait aux responsabilités familiales. Cela remonte à une dizaine d'années.
Je ne sais pas où on en est maintenant, mais c'était une réaction assez courante des deux parties par le passé, le genre de choses auxquelles elles étaient prêtes à renoncer parce qu'elles considéraient que ce n'était pas si important que cela.
On est témoin, toutefois, d'excellentes relations entre divers syndicats et divers employeurs. Je pense qu'ici, à Ottawa—Carleton, il existe un regroupement intéressant de syndicats et d'employeurs qui ont travaillé ensemble en vue d'offrir des services de soins aux enfants à court terme en cas d'urgence, aux parents et aux membres des syndicats qui travaillent dans ces divers organismes. Je pense que l'hôpital civique entre autre y a participé. Donc, il existe certaines initiatives très positives.
J'espère que ces renseignements vous sont utiles.
Mme Raymonde Folco: Oui.
Le président: Nous devrions en prendre note au cas où quelqu'un veuille comparaître devant nous.
Madame Gagnon.
[Français]
Mme Christiane Gagnon: Je vais revenir un peu sur la tangente que Mme Davies a prise tout à l'heure et sur l'importance d'avoir une aide plus générale du gouvernement.
Tout à l'heure, vous avez mentionné qu'aux États-Unis, faute de soutien de la part des gouvernements, les employeurs avaient pris la relève. Mais il faut aussi s'adapter à la nouvelle réalité du marché. Par exemple, avec le travail autonome et le travail saisonnier, les gens ont moins d'avantages offerts par les entreprises. On sait qu'on est dans une ère de rationalisation du travail, ce qui fait en sorte que les employés ne restent pas longtemps dans une entreprise. Donc, même si les employeurs mettent sur pied des services de garde et offrent de l'aide d'appoint, le rôle que doit jouer l'État est essentiel pour qu'il y ait cette stabilité au niveau de l'aide. Lorsqu'un employé contractuel ou un travailleur autonome change d'emploi très rapidement, il n'est pas couvert par tous les services qu'offre l'entreprise.
• 1645
Cela m'amène à dire que dans mon comté, il y a une initiative qu'on
peut citer en exemple: c'est une maison d'accueil pour les enfants
défavorisés d'un quartier. Ça peut être plus large que cela, mais ces
enfants-là sont initiés aux ordinateurs et semblent en santé. On a
acheté une maison des années 1920, ce qui donne l'impression d'entrer
chez soi. Il y a des intervenantes et des intervenants qui viennent
des universités pour y faire des stages. Les enfants ont des repas
convenables et bien structurés le midi. Ils apprennent à faire face
aux difficultés qu'ils peuvent vivre au quotidien, parce qu'ils n'ont
pas de soutien ou parce qu'ils vivent dans un environnement qui ne
leur permet pas d'avoir accès à une certaine qualité de vie et à une
meilleure alimentation. Les parents participent aussi à cet effort de
sensibilisation à l'importance de donner de la bonne nourriture aux
enfants.
Donc, il faut qu'il y ait une multitude d'initiatives qui collent à la réalité des divers milieux et des diverses collectivités. Je trouve que nous devons travailler, comme acteurs de la scène politique, à ce que ce soutien soit permanent. C'est la seule façon de s'en sortir.
On n'en a pas beaucoup parlé, mais le travail autonome est le lot de 15 p. 100 de la population. C'est une réalité qu'on vit quotidiennement. Est-ce que vous vous êtes attardés à cette problématique particulière du travail autonome?
[Traduction]
Mme Judith MacBride-King: En fait, nous nous sommes assurés que certains de ceux que nous servons—de toute évidence il s'agit d'un échantillon représentatif de la main d'oeuvre—étaient des employés autonomes. Je crois que l'argument que vous faites valoir, concernant le fait que les travailleurs à contrat traditionnels recevaient des avantages moins importants, est valable. Nous l'avons d'ailleurs examiné dans une étude précédente au Conference Board. J'estime que c'est une importante question dont doivent tenir compte les organismes, les employeurs et les gouvernements.
Je crois qu'il s'agit d'un problème plus général et complexe. Et, dans ce contexte, je suis fermement convaincue qu'il faut améliorer le dialogue entre le gouvernement et le secteur privé et entre les employeurs, pour réellement approfondir certaines de ces questions. Souvent, dans les organismes, comme c'est le cas au gouvernement, dans les collectivités et dans les familles, nous oublions qu'un changement apporté à tel aspect du système aura des conséquences sur un autre aspect du système.
Je crois qu'il est très important, dans ce contexte, que les employeurs et les gouvernements tiennent compte du fait qu'un changement apporté ici aura des répercussions là-bas. Quand, par exemple, on augmente le nombre de postes qui ne donnent pas droit à des avantages sociaux, on peut être sûr que cela aura des conséquences sur la famille. Donc, je suis d'accord avec vous à ce sujet et j'estime qu'il s'agit d'une question importante dont doivent être conscients les organismes, les employeurs et les gouvernements.
Est-ce que cela répond à votre question?
Mme Christiane Gagnon: Oui.
Mme Judith MacBride-King: Je vous remercie.
Le président: J'ai une observation de nature organisationnelle, parce que notre temps tire à sa fin et nous allons poursuivre ce thème du travail et de la famille au cours des deux prochaines sessions. En fait, sans révéler leur identité—vous avez le droit de faire des suppositions—nous aurons la semaine prochaine des représentants de DRHC et aussi je crois la semaine suivante un témoin du Conseil du Trésor, qui s'est occupé du sujet qui nous intéresse. Je pense qu'il est extrêmement utile que vous arriviez, du moins je l'espère, à donner suite à ce dont nous avons parlé.
Ma question, à moins que l'on tienne absolument—et bien entendu, nous pourrions avoir d'autres questions—est la suivante: Sans trahir certaines confidences, avez-vous des exemples d'organismes vraiment remarquables—je suppose qu'ils ne seraient pas gênés d'être vantés—soit du monde des affaires, du monde syndical, du secteur à but non lucratif, ou du gouvernement, au sujet desquels votre recherche vous a permis de constater certains résultats remarquables? Et, bien entendu, la question sournoise est la suivante: comment le Conference Board s'en est-il tiré, en tant qu'employeur, au niveau du travail et de la famille?
Mme Judith MacBride-King: Je refuse de répondre à la dernière question parce que cela risque... non, je dirais simplement qu'effectivement il existe d'excellents exemples, et je serais ravie d'en parler car il en a déjà été question et nous avons publié des documents à leur sujet.
Je répète que, ce qui me préoccupe dans de nombreux organismes, c'est qu'ils adoptent certaines orientations sans tenir compte de la charge de travail, c'est-à-dire de la surcharge de travail. À mon avis, IBM Canada est un excellent exemple d'un organisme qui a privilégié la diversité de la façon la plus générale, c'est-à-dire les divers types de familles etc., et a examiné cette question de même que la charge de travail. Je suis fière de mentionner que IBM fait aussi partie du réseau dont j'ai parlé.
• 1650
Donc je recommande IBM. Ma liste est assez longue. Je ne peux pas
toutes les nommer. IBM, et MDS Nordion ici à Ottawa—Carleton, mettent
l'accent sur la question plus générale de la santé et du mieux-être,
ainsi que de la charge de travail, que je considère très importante.
Les principes de base sont, bien entendu, l'équité, la justice et la
sécurité au travail. À ce niveau, elles ont fait du bon travail.
Donc, je les cite en exemple. Et il y en a d'autres. En ce qui concerne les syndicats, le Syndicat national de l'automobile est le premier syndicat au Canada à avoir négocié une subvention pour les services de garderie dans sa convention collective, qui existe toujours. Ce syndicat a fait de l'excellent travail. Je me ferais un plaisir de fournir au comité les noms des autres organismes.
Le président: Merci beaucoup. Y a-t-il d'autres questions avant que nous vous remercions de nous avoir aidé à amorcer de façon très intéressante cette question? Vous nous avez donné ample matière à réflexion. Comme je l'ai dit, je pense que cela nous permettra très bien d'enchaîner avec notre autre grand thème, qui est le rôle de la collectivité et celui des entreprises.
Cela a été un après-midi très satisfaisant et je crois que vous l'avez constaté d'après la qualité des questions et l'intérêt manifesté par les députés. Nous tenons à vous remercier d'avoir été des nôtres.
Mme Judith MacBride-King: Je vous en prie, et je vous remercie.
Le président: En passant, nous avons hâte de recevoir votre document.
Mme Judith MacBride-King: Bien sûr. Je m'assurerai de vous le faire parvenir.
Le président: La séance est levée.