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Publications de la Chambre

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36e Législature, 2ième Session

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 102

TABLE DES MATIÈRES

Le lundi 29 mai 2000

VINITIATIVES PARLEMENTAIRES

. 1110

VLA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU
VProjet de loi C-205. Deuxième lecture
VM. Benoît Sauvageau

. 1115

. 1120

VM. Rick Casson

. 1125

. 1130

VM. Yvon Godin

. 1135

. 1140

VM. Greg Thompson

. 1145

VM. Ghislain Lebel

. 1150

. 1155

V(Le vote est réputé avoir été demandé et différé)
VSuspension de la séance

. 1200

VReprise de la séance
VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VMme Marlene Catterall
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLOI SUR LA CITOYENNETÉ AU CANADA
VProjet de loi C-16. Troisième lecture
VM. Pat Martin

. 1205

. 1210

VM. Andrew Telegdi
VM. Lynn Myers

. 1215

. 1220

VMotion
VM. Rob Anders

. 1225

. 1230

VM. Werner Schmidt
VM. Rob Anders

. 1235

. 1240

. 1245

. 1250

VM. Andrew Telegdi

. 1255

VM. John Bryden
VM. Paul Forseth

. 1300

VM. Andrew Telegdi

. 1305

. 1310

. 1315

. 1320

VM. John Bryden

. 1325

VM. Eric Lowther

. 1330

VM. Janko Peric
VM. Eric Lowther

. 1335

. 1340

. 1345

. 1350

VM. Rob Anders

. 1355

VM. Werner Schmidt
VDÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
VLE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD
VM. Guy St-Julien
VMAURICE «ROCKET» RICHARD
VM. Hec Clouthier
VLE SOLDAT INCONNU
VM. Peter Goldring

. 1400

VLE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD
VMme Raymonde Folco
VL'APPROVISIONNEMENT EN EAU DE WALKERTON
VM. Ovid L. Jackson
VLE SOLDAT INCONNU
VM. Paul Forseth
VLE SOLDAT INCONNU
VM. David Pratt

. 1405

VLE SOLDAT INCONNU
VM. Jean-Guy Chrétien
VLE JUGE JULES DESCHÊNES
VM. Ted McWhinney
VLES SOINS DE SANTÉ
VM. Bob Mills
VLE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE
VM. John Cannis
VLE STATUT DE LA FEMME
VMme Michelle Dockrill

. 1410

VL'OCÉANIC DE RIMOUSKI
VMme Suzanne Tremblay
VLA DÉCENNIE DES OS ET DES ARTICULATIONS
VM. Greg Thompson
VLE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE
VMme Eleni Bakopanos
VL'ARMÉNIE
VM. Sarkis Assadourian
VLE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD
VM. Peter Stoffer
VLE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD
VM. Michel Gauthier

. 1415

VQUESTIONS ORALES
VDÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
VMme Deborah Grey
VL'hon. Jane Stewart
VMme Deborah Grey
VL'hon. Jane Stewart
VMme Deborah Grey
VL'hon. Jane Stewart
VM. Rick Casson
VL'hon. Jane Stewart

. 1420

VM. Rick Casson
VL'hon. Jane Stewart
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Jane Stewart
VM. Gilles Duceppe
VL'hon. Jane Stewart
VMme Suzanne Tremblay
VL'hon. Martin Cauchon
VMme Suzanne Tremblay
VL'hon. Martin Cauchon

. 1425

VLE CODE CRIMINEL
VM. Pat Martin
VL'hon. Anne McLellan
VM. Pat Martin
VL'hon. Anne McLellan
VLE CRIME ORGANISÉ
VM. Peter MacKay
VL'hon. Lawrence MacAulay
VM. Peter MacKay
VL'hon. Lawrence MacAulay

. 1430

VLE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES
VM. Reed Elley
VL'hon. Jane Stewart
VM. Reed Elley
VL'hon. Jane Stewart
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Jane Stewart
VM. Michel Bellehumeur
VL'hon. Jane Stewart
VL'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA
VM. Monte Solberg

. 1435

VL'hon. Martin Cauchon
VM. Monte Solberg
VL'hon. Martin Cauchon
VLE RETRAIT PRÉVENTIF
VMme Caroline St-Hilaire
VL'hon. Claudette Bradshaw
VMme Caroline St-Hilaire
VL'hon. Hedy Fry
VLES AFFAIRES ÉTRANGÈRES
VM. Eric Lowther
VL'hon. Lloyd Axworthy

. 1440

VM. Eric Lowther
VL'IMPORTATION DE PLUTONIUM
VMme Jocelyne Girard-Bujold
VM. Brent St. Denis
VLA COOPÉRATION INTERNATIONALE
VMme Sue Barnes
VL'hon. Maria Minna
VLE SECTEUR MINIER
VM. Roy Bailey
VM. David Iftody

. 1445

VM. Roy Bailey
VM. David Iftody
VLA SANTÉ
VMme Judy Wasylycia-Leis
VL'hon. Allan Rock
VMme Judy Wasylycia-Leis
VL'hon. Allan Rock

. 1450

VL'ASSURANCE-EMPLOI
VM. Greg Thompson
VL'hon. Jane Stewart
VM. Greg Thompson
VL'hon. Jane Stewart
VL'ALENA
VMme Sarmite Bulte
VM. Bob Speller
VLA COOPÉRATION INTERNATIONALE
VM. Ted White
VL'hon. Paul Martin

. 1455

VMOSEL VITELIC
VM. Pierre Brien
VL'hon. John Manley
VLA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA
VM. Dennis Gruending
VLe très hon. Jean Chrétien
VM. Mark Muise
VLe très hon. Jean Chrétien
VLA SANTÉ
VM. Paul Szabo
VL'hon. Allan Rock
VLA COOPÉRATION INTERNATIONALE
VM. Ted White

. 1500

VL'hon. Maria Minna
VMICHEL DUMONT
VM. Benoît Sauvageau
VL'hon. Anne McLellan
VPRÉSENCE À LA TRIBUNE
VLe Président
VLE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD
VLe très hon. Jean Chrétien

. 1505

VMme Deborah Grey
VM. Gilles Duceppe

. 1510

VM. Dick Proctor
VM. Peter MacKay

. 1515

VLe Président
VAFFAIRES COURANTES
VLE TRANSPORT DU GRAIN
VL'hon. David M. Collenette
VRÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS
VM. Derek Lee
VDÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES
VM. Steve Mahoney

. 1520

VCOMITÉS DE LA CHAMBRE
VIndustrie
VM. Walt Lastewka
VJustice et droits de la personne
VM. Paul DeVillers
VProcédure et affaires de la Chambre
VM. Derek Lee
VPÉTITIONS
VL'immigration
VM. Mac Harb
VLes dons de bienfaisance
VM. Inky Mark
VLa Société canadienne des postes
VM. Ghislain Lebel
VMme Maud Debien

. 1525

VM. Michel Bellehumeur
VLe prix de l'essence
VM. Pierre Brien
VLes adoptions
VM. Eric Lowther
VQUESTIONS AU FEUILLETON
VM. Derek Lee
VRECOURS AU RÈGLEMENT
VLe dépôt de pétitions
VM. Pierre Brien

. 1530

VLe vice-président
VINITIATIVES MINISTÉRIELLES
VLA LOI SUR LA CITOYENNETÉ AU CANADA
VProjet de loi C-16. Troisième lecture
VM. Eric Lowther

. 1535

VM. John Bryden
VM. Janko Peric

. 1540

. 1545

. 1550

VM. Inky Mark
VM. Rey D. Pagtakhan

. 1555

VM. Steve Mahoney

. 1600

. 1605

. 1610

VM. Andrew Telegdi

. 1615

VM. John Bryden

. 1620

. 1625

. 1630

. 1635

VM. Rey D. Pagtakhan

. 1640

. 1645

VM. Inky Mark

. 1650

. 1655

VM. Andrew Telegdi

. 1700

VM. Rey D. Pagtakhan

. 1705

VM. Ghislain Lebel

. 1710

VReport du vote sur la motion
VLOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
VProjet de loi C-33. Deuxième lecture
VM. Dennis Gruending

. 1715

. 1720

. 1725

VM. John Herron

. 1730

VM. John Herron

. 1735

. 1740

. 1745

. 1750

VAmendement
VLES TRAVAUX DE LA CHAMBRE
VNouveau report des votes par appel nominal sur le projet de loi C-16
VM. Bob Kilger
VLOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL
VProjet de loi C-33. Deuxième lecture
VL'hon. Charles Caccia

. 1755

. 1800

VMme Louise Hardy

. 1805

VM. Rob Anders
VMme Aileen Carroll

. 1810

. 1815

VM. John Herron

. 1820

VM. Rick Casson
VM. Rick Casson

. 1825

. 1830

. 1835

VLES CRÉDITS
VJour désigné—La loi canadienne sur la santé

. 1900

. 1905

(Vote 1322)

VRejet de l'amendement

. 1910

(Vote 1323)

VRejet de la motion
VMOTION D'AJOURNEMENT

. 1915

VLa santé
VMme Libby Davies
VM. Yvon Charbonneau

. 1920

VLa santé
VM. Greg Thompson
VM. Yvon Charbonneau

(Version officielle)

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 102


CHAMBRE DES COMMUNES

Le lundi 29 mai 2000

La séance est ouverte à 11 heures.



Prière


INITIATIVES PARLEMENTAIRES

 

. 1110 +

[Français]

LA LOI DE L'IMPÔT SUR LE REVENU

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 30 mars, de la motion: Que le projet de loi C-205, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des dépenses engagées par un mécanicien pour la fourniture d'outils nécessaires à son emploi), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Il y a eu des consultations entre les représentants de tous les partis et je demande le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion suivante:

    Qu'à la conclusion du présent débat en deuxième lecture du projet de loi C-205, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des dépenses engagées par un mécanicien pour la fourniture d'outils nécessaires à son emploi), toutes questions nécessaires pour disposer de cette étape dudit projet de loi soient réputées avoir été mises aux voix et le vote par appel nominal soit réputé avoir été demandé et différé jusqu'au mardi 30 mai 2000, à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement.

Je rappelle à la Chambre qu'il y a eu des consultations entre les leaders de chacun des partis.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): L'honorable député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour présenter cette motion?

Des voix: D'accord.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

(La motion est adoptée.)

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole sur ce projet de loi présenté par mon ami et collègue de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans.

Tel que mon collègue l'a signalé dans des communiqués de presse et l'a répété au cours de discours, ce projet de loi est non partisan. Trop souvent, ici à la Chambre, on doit débattre de projets de loi pour lesquels les lignes de parti nous obligent à prendre telle position plutôt que telle autre. Ici, il s'agit d'un projet de loi qui touche directement la poche des contribuables, le budget et le portefeuille des contribuables. Il touche les Québécois et les Québécoises, les Canadiens et les Canadiennes, d'une façon équitable pour les uns et les autres.

Il s'agit du projet de loi C-205, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu (déduction des dépenses engagées par un mécanicien pour la fourniture d'outils nécessaires à son emploi).

Pour résumer ce projet de loi pour nos auditeurs, ainsi que pour les députés qui n'ont pas encore pris de décision, laquelle sera, nous l'espérons, favorable lors du vote libre des partis—ce n'est pas un sujet très litigieux—on peut lire dans le sommaire:

    L'objet de ce texte est de permettre aux personnes employées à titre de mécanicien de déduire le coût des outils nécessaires à leur emploi qu'ils fournissent s'ils sont tenus de le faire en vertu de leurs conditions d'emploi. La déduction porte sur les coûts de location de ces outils, les dépenses pour leur entretien et pour les assurances qui s'y rapportent, le coût complet des outils de moins de 250 $, sous réserve d'ajustement, prévu par règlement, de cette somme pour tenir compte de l'inflation, et l'amortissement du coût en capital, déterminé par règlement, des outils de plus de 250 $.

 

. 1115 + -

Certains diront: «Oui, mais les mécaniciens vont pouvoir jouer des tours». D'abord, qui est mécanicien? Tous ceux qui bricolent dans leur garage au fond de leur cour pour réparer des automobiles sont-ils des mécaniciens? Vous et moi qui pouvons faire occasionnellement l'entretien de notre auto, sommes-nous mécaniciens? Est-ce que ce sera difficile à gérer?

Ce ne le sera pas réellement, parce qu'il existe un précédent dans la Loi de l'impôt sur le revenu au niveau fédéral. Ce que mon collègue de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans propose de créer ne serait pas un précédent. Il existe au niveau des travailleurs forestiers, des musiciens, des médecins, des dentistes et de certaines entreprises.

Aujourd'hui, un jeune ou une jeune qui décide d'embrasser le métier de mécanicien ou de mécanicienne—c'est un métier dans lequel on vit des pénuries au moment où on se parle, mais qui est très important au Québec et au Canada où le nombre d'automobiles par famille croît sans cesse, où l'entretien est également obligatoire pour le respect de l'environnement et pour le budget—, qui finit un cours professionnel ou secondaire pour aller travailler comme mécanicien ou mécanicienne dans un garage doit, le lendemain de l'obtention de son diplôme, débourser entre 15 000 $ et 40 000 $ pour exercer son métier.

Il est très très rare que des jeunes peuvent débourser entre 15 000 $ et 40 000 $ pour acheter de l'équipement pour travailler. Si je suis musicien, musicienne ou dentiste, je vais acheter l'équipement et le gouvernement va m'offrir un crédit d'impôt lors de l'achat des appareils nécessaires à mon travail. Si je suis mécanicien ou mécanicienne, on dit non et on demande souvent à ces jeunes, parfois à des moins jeunes, de débourser des montants assez importants pour pouvoir exercer leur travail.

Donc, au niveau de la complexité de l'application de la loi, je le dis, il y a déjà un précédent. Concernant les budgets, a-t-on l'argent? Combien cela va-t-il coûter et a-t-on l'argent pour permettre à ces jeunes et ces moins jeunes d'exercer leur profession et d'avoir une déduction d'impôt?

On nous a appris, sous les applaudissements nourris du Parti libéral que, pour les cinq prochaines années, on aurait des surplus de 95 milliards de dollars. Si on a de tels surplus, ce n'est pas tout le temps pour débattre de projets de loi sur des espèces menacées. Ce n'est pas que ces projets de loi ne sont pas importants, mais on doit aussi débattre de projets de loi et poser des gestes concrets pour les gens de nos communautés. Un projet de loi comme celui-là peut, comme je le disais précédemment, toucher directement les gens de nos comtés respectifs.

Les sommes d'argent sont là. Même que le ministre de l'Industrie a voulu les utiliser de façon outrancière en offrant aux équipes, aux propriétaires et au joueurs de hockey professionnels des compensations financières pour les aider à rester au Canada et pour augmenter leur part de marché. L'idée du ministre était tellement saugrenue, que c'est la première fois qu'on a vu après 24 ou 48 heures un ministre «backtracker», comme on dit en bon québécois, et retirer son projet de loi.

Donc, il y a de l'argent dans les coffres du gouvernement. C'est de l'argent qui doit être bien investi, bien dépensé et bien orienté.

Le projet de loi C-205 permettrait à chacun et chacune des députés ici de poser un geste concret pour une partie importante de leur communauté qui travaille dans leur région, dans leur comté, dans leur ville et qui sont souvent des travailleurs qui ne sont pas parmi les plus fortunés. Le salaire moyen des mécaniciens oscille autour de 15 $ l'heure. On est surpris de voir ce montant parce que lorsqu'on va au garage, cela nous coûte souvent un peu plus cher que cela. Malgré tout, les salaires horaires des mécaniciens sont à peu près de 15 $ l'heure.

C'est un projet de loi qui, pour une des rares fois, démontrerait l'aspect concret du travail des législateurs de cette Chambre auprès de la population. La population pourrait voir qu'on ne fait pas seulement pelleter des nuages, comme elle le pense trop souvent, mais qu'on prend des décisions qui, comme on l'a fait précédemment au niveau des travailleurs et des travailleuses forestiers, des médecins, des dentistes et des musiciens, va les toucher directement et personnellement. J'espère qu'on n'aura pas sur cette question—j'avoue que je ne suis pas au courant à cet égard—l'imposition d'une ligne de parti.

 

. 1120 + -

Mon collègue, le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, a demandé à ce que le vote soit différé à demain soir. J'espère que sur un sujet comme celui-là, où il n'est question ni de souverainisme ou de fédéralisme, ni du Québec ni du Canada, ni de mondialisation ou d'autres sujets comme ceux-là, mais où on veut aider d'honnêtes citoyens et d'honnêtes travailleurs à accéder à un marché du travail ou à y prospérer, on ne verra pas des lignes de parti imposées par certains partis et des votes unanimes contre ce projet de loi non partisan. Bien sûr, si on votait unanimement en faveur du projet de loi, il n'y aurait pas de problème.

L'adoption du projet de loi C-205 favoriserait la création d'emplois dans le domaine de l'automobile. Si on se renseigne au niveau des diplômes d'études secondaires et surtout des diplômes au niveau professionnel, on voit qu'une pénurie sévit dans ce domaine en ce moment. C'est donc un geste concret pour aider un secteur d'activité économique important.

En considérant un allégement fiscal, les jeunes pourraient aller davantage vers le domaine de la mécanique automobile.

Plusieurs députés du Bloc québécois ont assisté à une réception donnée à Ottawa par l'Association des mécaniciens automobiles du Canada et, à notre grand étonnement, nous étions le seul parti, si je ne m'abuse, à être représenté à cette réception qui visait à sensibiliser les députés de cette Chambre, ceux qui vont prendre des décisions sur un projet de loi comme celui-là.

J'encourage mes collègues députés à appuyer ce projet de loi. Je demande à ceux qui n'étaient pas présents à cette réception d'information sur les aspects d'un tel projet de loi et aux considérations mises de l'avant par l'Association des mécaniciens du Canada de prendre vraiment connaissance du projet de loi et de son implication auprès de leurs communautés respectives avant de voter en faveur, je l'espère, de ce projet de loi.

[Traduction]

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je suis heureux de parler de ce projet de loi d'initiative parlementaire. Je félicite notre collègue bloquiste de l'avoir présenté.

Le député de Lakeland nous a saisis de cette mesure au cours de la dernière session. Il a effectué beaucoup de recherches sur la question et je suis heureux de voir que nous sommes à nouveau saisis de ce projet de loi. La dernière fois qu'on en a discuté, il ne pouvait faire l'objet d'un vote, mais cette fois-ci, oui.

Je crois que c'est une question dont tous les députés sont au courant, car on leur a signalé qu'il y a dans notre régime fiscal une iniquité qu'il faut corriger. Alors que nous accumulons des excédents budgétaires, le gouvernement doit examiner notre régime fiscal et apporter les modifications nécessaires pour supprimer les iniquités et reconnaître un métier qui n'est pas traité comme les autres.

Je suis heureux que la Chambre étudie ce projet de loi et qu'il fasse l'objet d'un vote. J'espère que tous les députés envisagent d'y souscrire.

Le message est clair. Le député de Lakeland a reçu 7 000 lettres de mécaniciens de tout le pays qui ont signalé les lacunes de ces dispositions de notre régime fiscal et qui ont précisé qu'en cette période de forte évolution technologique, ils doivent débourser de plus en plus d'argent pour acheter les outils dont ils ont besoin pour se livrer à leur métier.

Le métier évolue rapidement. Le matériel que ces gens sont appelés à réparer évolue, qu'il s'agisse de machinerie lourde, de tracteurs ou d'automobiles et le reste. Tout est informatisé maintenant. De moins en moins de gens peuvent regarder sous le capot d'un véhicule et faire quoi que ce soit pour le réparer. Il faut des gens spécialisés et du matériel spécialisé.

Certains mécaniciens estiment qu'ils doivent investir de 20 000 $ à 30 000 $ en équipement juste pour faire leur travail. Or, l'une des conditions d'emploi des mécaniciens est la nécessité pour eux d'avoir leurs propres outils.

Il y a à peine deux semaines, j'ai rencontré un jeune homme alors que je visitais un atelier dans ma circonscription. Il m'a dit qu'il devait avoir des outils valant de 5 000 $ à 10 000 $ pour occuper un poste de compagnon. Cela constituait pour lui un énorme obstacle qu'il risquait de ne pouvoir surmonter. C'est l'exemple d'un jeune homme qui a la formation voulue et qui est intéressé à entrer sur le marché du travail. Or, à cause de l'argent qu'il devra investir, il risque de ne pas être en mesure de le faire.

 

. 1125 + -

Le gouvernement doit se pencher sur cette réalité. Il doit accorder à ces gens un crédit d'impôt pour les outils qu'ils sont tenus d'acheter dans le cadre de leurs conditions d'emploi.

La dernière fois que le projet de loi a été présenté, diverses questions ont été soulevées par le secrétaire parlementaire du ministre des Finances, et certaines des déclarations doivent être éclaircies ou débattues. Il a notamment déclaré:

    Les mécaniciens ne sont pas les seuls à engager des dépenses importantes pour être en mesure de faire leur travail.

Cela va de soi. Il y a de nombreuses professions où c'est le cas. Toutefois, ils sont ceux qui ne peuvent déduire les frais d'achat de ce matériel dans le cadre de l'exercice de leur activité. Nous disons que les agriculteurs et autres hommes d'affaires ainsi que les artistes, les musiciens et les opérateurs de scies mécaniques engagent des dépenses importantes pour être en mesure de faire leur travail, mais qu'ils peuvent déduire ces coûts. Pourquoi ne peut-on ajouter les mécaniciens à ce groupe? Le gouvernement pourrait ensuite veiller à ce que d'autres groupes dont l'emploi exige qu'ils engagent des dépenses importantes soient traités équitablement par le système fiscal.

Nous sommes maintenant dans une situation où nous pouvons prendre du recul et analyser notre système fiscal afin de déterminer où nous pourrions l'améliorer. Il y a de nombreuses façons d'améliorer notre système fiscal, et les outils des mécaniciens représentent un des domaines sur lesquels il faut se pencher.

Cette politique est appuyée par le Comité des finances de la Chambre des communes qui compte des représentants de tous les partis. Dans son dernier rapport, le comité précise ce qui suit:

    Le comité recommande que le gouvernement accorde un allégement fiscal aux Canadiens qui doivent engager des dépenses importantes pour pouvoir faire leur travail, comme dans le cas des outils de mécanicien.

Tous les partis d'opposition sont favorables à cette mesure et j'espère que les députés ministériels l'appuieront également au moment du vote. Je suis convaincu qu'ils savent que cette situation existe et qu'elle doit être modifiée.

Le secrétaire parlementaire a aussi déclaré:

    Le projet de loi d'initiative parlementaire vise également à accorder un allégement fiscal à tous les mécaniciens indépendamment de l'importance des dépenses engagées, au lieu d'accorder un allégement qui s'appliquerait seulement aux dépenses extraordinaires.

Voilà des propos qui laissent beaucoup à désirer. Nous savons que les entrepreneurs, les agriculteurs, tous ceux qui font des affaires peuvent déduire leurs dépenses. Pourquoi les mécaniciens seraient-ils traités différemment? La question de l'absence de déduction des petites dépenses, de quelque niveau qu'elles soient, pourrait facilement être réglée.

Il a également déclaré:

    Il faudrait élaborer des dispositions permettant de s'assurer que l'allégement fiscal s'applique uniquement aux outils vraiment nécessaires à l'emploi, et non pas aux outils achetés pour un usage personnel.

C'est toujours le cas. Les choses que nous achetons à des fins professionnelles ne font pas l'objet du même traitement que ce que nous achetons à des fins personnelles. Ce tatillonnage passe à côté de la véritable question. En effet, il y a des gens qui dépensent des dizaines de milliers de dollars pour se lancer en affaires et qui doivent ensuite débourser chaque année 1 000 $, 2 000 $ ou 3 000 $ pour l'achat de matériel spécialisé afin de pouvoir conserver leur emploi. Or, ces dépenses ne sont pas déductibles. C'est une situation injuste.

Lorsqu'il a été présenté par le député de Lakeland en 1998, le projet de loi a reçu l'appui généralisé des membres de l'industrie. J'ai en ma possession des déclarations de mécaniciens, d'employeurs de mécaniciens et de cadres généraux de concessionnaires d'automobiles qui estiment que ce projet de loi aiderait grandement les mécaniciens à mieux faire leur travail.

Le projet de loi C-205 apporte une modification mineure au projet de loi précédent, en portant de 200 $ à 250 $ le montant de la déduction. Cela exigerait seulement une petite retouche au projet de loi. Le projet de loi dont nous sommes saisis a été présenté comme mesure pouvant faire l'objet d'un vote, afin d'alimenter le débat à la Chambre et de donner plus de temps aux gens de faire valoir leurs opinions.

Un projet de loi d'initiative parlementaire que j'ai présenté a été retenu par tirage au sort la semaine dernière. C'est un peu comme gagner à la loterie. Le projet de loi doit être tiré au sort et pouvoir faire l'objet d'un vote. Il est important que la Chambre en soit saisie pour amener les députés à se prononcer sur la mesure. Ce projet de loi a franchi le premier obstacle et a ensuite atteint une autre étape.

Nous appuierons le projet de loi présenté par le député. Nous croyons que la situation actuelle crée une injustice à laquelle il faut remédier. L'appui généralisé des membres de l'industrie au projet de loi atteste clairement de la nécessité de cette mesure. J'espère seulement que les ministériels s'en souviendront au moment de voter et qu'ils écouteront les personnes qui les ont contactés comme elles nous ont aussi contactés, et qu'ils appuieront le projet de loi.

 

. 1130 + -

[Français]

M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Madame la Présidente, il me fait plaisir de prendre la parole en faveur du projet de loi C-205, Loi modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu. Il est temps que cette Chambre prenne une décision finale afin d'aider les mécaniciens de notre pays, les travailleurs, par une réduction de leurs dépenses lorsqu'ils sont appelés à travailler.

Au début de sa carrière, un mécanicien doit aller à l'école des métiers ou au collège communautaire pour apprendre à devenir mécanicien. Il sort de là avec des dettes. Lorsqu'il arrive à son premier emploi, il a tout d'abord besoin d'un coffre à outils. Il lui faut beaucoup d'outils pour pouvoir occuper son emploi, sinon il ne sera pas engagé.

Les gens qui créent une nouvelle compagnie rencontrent les représentants du gouvernement en disant: «Nous sommes prêts à créer tant d'emplois.» Comme on le sait, cela passe par le Fonds transitoire ou tout autre fonds. Lorsqu'on parle du Fonds transitoire, cela fait sourire, car c'est un sujet qui rend les gens nerveux à la Chambre, mais ce sont des outils dont on a besoin pour faire du développement économique.

Ici, c'est la même chose. Le mécanicien qui veut exercer un emploi a besoin d'un coffre à outils et des outils, et cela coûte très cher. Ce n'est pas la fin du monde qu'un mécanicien demande une réduction d'impôt. Par exemple, si un bûcheron achète une scie mécanique au printemps pour aller travailler en forêt, il peut obtenir une déduction d'impôt pour cela.

Les mécaniciens sont pris de tous les côtés. On voit ce que cela coûte, on parle de plusieurs milliers de dollars. Je le sais, car j'ai travaillé avec des mécaniciens qui devaient constamment acheter des outils. Quand on est passé du système de mesures anglaises au système métrique, il fallait deux sortes d'outils, ce qui fait que les coûts ont doublé. À cause des changements au Canada, cela leur coûtait deux fois plus cher.

Des mécaniciens me demandaient: «Pourquoi, nous, comme travailleurs, ne sommes-nous pas capables d'obtenir une réduction d'impôt pour les outils que l'on achète? Quand on travaille, on paie nos impôts, on paie nos taxes. Si on a besoin d'un outil pour travailler, pourquoi n'aurions-nous pas le droit d'avoir une réduction d'impôt?» Quand une compagnie a des coûts, elle obtient une réduction d'impôt. Le travailleur paie ses impôts et ses taxes, mais il demande qu'on l'aide pour le coût de ses outils, parce que cela lui coûte cher.

Je vais vous raconter une expérience que j'ai vécue la semaine dernière. J'ai mené ma voiture chez un concessionnaire pour une réparation. Il y a deux jours, on était en train de laver la voiture et on a trouvé deux de ses outils dans la voiture. Nous savons où était notre voiture, on va donc ramener les outils au mécanicien.

Mais combien de fois, à cause du nombre d'outils qu'ils utilisent en réparant les voitures des gens, les mécaniciens laissent les outils dans la voiture, pas parce qu'ils veulent les laisser là, certainement pas, mais parce qu'ils utilisent beaucoup d'outils et que, parfois, ils en oublient. Si une personne travaille dans un moteur de voiture, elle peut oublier un outil. Cela coûte très cher.

Il ne s'agit pas d'un achat que l'on fait une fois dans sa vie. On n'achète pas un «wrench», une clé, pour la garder toute sa vie. Couramment, en cours d'année, il faut acheter d'autres outils. Il faut racheter des outils tout le temps, parce qu'on en a perdu et qu'on ne peut pas travailler sans ces outils.

Je pense qu'on aura toujours besoin des mécaniciens. J'ai une voiture, je suis sûr que vous avez une voiture, madame la Présidente, tout le monde a sa voiture. Si on veut aider les mécaniciens dont on a besoin dans ce pays, ce serait une façon de le faire.

 

. 1135 + -

On ne demande pas qu'ils aient des réductions sur le prix de leurs outils, mais qu'au moins le gouvernement leur accorde des déductions d'impôt. Il est normal que pour certains métiers on ait droit à des déductions d'impôt. Les pêcheurs, par exemple, ont droit à certaines déductions.

Il en coûte cher aux mécaniciens. Ils perdent beaucoup d'outils et ce n'est pas leur faute. Je vais donner un exemple: celui des mécaniciens qui travaillent sous la terre dans les mines. C'est dans la roche. Il y a de l'eau et de la vase. Ils peuvent perdre leurs outils et ne même pas s'en apercevoir. Ils ne reverront jamais cet outil. Beaucoup d'outils sont perdus de cette façon chaque année par chaque mécanicien.

Il y a eu aussi le changement au système métrique. Pour nos mécaniciens—je me répète, mais je pense que c'est important de le dire—c'est un double coût. Cela prend deux sortes d'outils: certains pour le système de mesures anglaises et d'autres pour le système métrique.

On parle de mécaniciens qui doivent débourser 10 000 $ et 15 000 $ pour leurs outils, et cela dépend toujours des outils. Ils ont besoin de ces outils sinon ils n'ont pas de travail. Les compagnies qui sont en affaires aujourd'hui ne disent pas: «On va engager nos employés et payer leurs outils.» Les mécaniciens au Canada, c'est connu, doivent payer leurs propres outils.

Notre parti va certainement voter en faveur de ce projet de loi. Je suis certain qu'il y a des mécaniciens dans chacune des circonscriptions de tous les députés ici dans cette Chambre, qu'ils soient libéraux, bloquistes, conservateurs, néo-démocrates ou de l'Alliance canadienne. Que ce soit dans les stations-service, dans les mines ou dans les industries, il y a des mécaniciens.

Comme notre collègue de l'Alliance canadienne le disait tantôt, des milliers de personnes ont signé des pétitions pour demander qu'on allège le fardeau fiscal des mécaniciens. Le gouvernement a maintenant des surplus. Il serait temps d'aider nos travailleurs qui oeuvrent dans ce domaine.

Comme je le disais tantôt, il ne faut pas s'inquiéter pour les compagnies. Si quelque chose se brise ou si elles ont besoin de nouveaux équipements, elles n'ont même pas parfois à le demander parce que le gouvernement court vers elle pour leur dire: «Savez-vous qu'on a un programme pour vous?» Je ne sais pas si les fonctionnaires ont besoin de garder leur emploi, mais ils courent vers les compagnies et leur disent: «On a un programme ici et un autre là. On va travailler sur ce programme et on va être capables de vous aider.»

Nous appuyons le député du Bloc québécois de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans. Son projet de loi est vraiment important parce qu'il touche un problème qui sévit partout à la grandeur du Canada. Il y a des mécaniciens partout. Ce ne sont pas des emplois isolés dans une partie du pays. Il y en a partout.

Il est important que les membres du gouvernement et les députés, peu importe leur allégeance politique, se prononcent là-dessus et posent un bon geste pour montrer qu'on croit dans nos travailleurs et travailleuses et qu'on peut les aider.

Les jeunes qui sortent du collègue ont dû débourser beaucoup d'argent pour leurs études. Il y en a beaucoup qui travaillent dans des stations-service au salaire minimum. Ils travaillent à 5,75 $ l'heure. Dans certaines provinces, ils travaillent à 7 $, 8 $ ou 10 $ l'heure en attendant d'avoir leur permis de mécanicien, et cela prend quatre ans pour l'obtenir. En attendant d'avoir leur permis, ils ont besoin d'avoir leurs outils.

Encore une fois, je demande aux députés de cette Chambre de se prononcer demain soir en faveur du projet de loi déposé par le député du Bloc québécois parce qu'il est important pour nos mécaniciens canadiens.

 

. 1140 + -

[Traduction]

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Madame la Présidente, je vais parler aujourd'hui au nom de notre porte-parole en matière des finances, le député de Kings—Hants. On sait que c'est avec passion qu'il s'est exprimé sur le sujet. Nous souscrivons au projet de loi C-205, modifiant la Loi de l'impôt sur le revenu de façon à permettre la déduction des dépenses engagées par un mécanicien pour la fourniture d'outils nécessaires à son emploi.

Le régime fiscal est très injuste envers les mécaniciens. Comme nous le savons, bon nombre de travailleurs peuvent déduire les dépenses qu'ils engagent pour l'achat des outils nécessaires à leur emploi. Les mécaniciens font exception à la règle.

Les mécaniciens ont l'appui des députés de ce côté-ci de la Chambre ainsi que de plusieurs autres députés d'en face.

C'est un dossier qui ne date pas d'hier. Il y a une dizaine d'années, alors que je siégeais de ce côté-là de la Chambre, des mécaniciens sont venus me voir. Le dossier a été présenté au gouvernement d'alors, mais à mon grand déplaisir, le gouvernement dont je faisais partie ne lui a pas accordé toute l'attention qu'il méritait. Il est temps que le gouvernement intervienne.

Ce qui est en jeu ici, c'est la politique à adopter en matière de gouvernement. Les gouvernements hésitent beaucoup à mettre en oeuvre des mesures fiscales qui auraient une incidence sur leurs recettes. La plupart d'entre nous feraient valoir que, si nous voulons que l'économie se porte mieux et que les gens soient encouragés à travailler, c'est tout le monde qui en profite.

Il convient de souligner que les représentants de l'Association canadienne des concessionnaires d'automobiles appuient cette initiative. Ils ont comparu devant le Comité des finances afin de demander l'autorisation pour les mécaniciens de déduire de l'impôt sur le revenu les dépenses engagées pour les outils nécessaires à leur emploi. Ce n'est pas la première fois qu'ils comparaissaient devant le comité. Ils appuient cette mesure depuis 1992. Ils ont rendu ce dossier public et ont comparu devant le Comité des finances pour la première fois en 1992.

Dans son rapport prébudgétaire de 1997, le Comité des finances dit:

    Le Comité recommande que le gouvernement accorde des allégements fiscaux ciblés à tous ceux qui, pour obtenir un emploi, doivent assumer des dépenses importantes, comme celles qu'engagent les mécaniciens pour leurs outils.

Dans son rapport prébudgétaire de 1996, le comité disait:

    Le Comité recommande que le gouvernement envisage des façons d'accorder un allégement fiscal ciblé à ceux qui doivent, comme condition d'emploi, engager de fortes dépenses.

Essentiellement, c'est la même chose.

Le Comité des finances, qui est un comité parlementaire, appuie cette demande.

Ce pays compte plus de 115 000 mécaniciens qui pourraient bénéficier de cette mesure visant à leur permettre de déduire de l'impôt sur le revenu le coût des outils nécessaires à leur emploi. Une fois formé, le mécanicien moyen dépense environ 15 000 $ pour l'achat d'outils nécessaires à sa profession. Certains dépensent jusqu'à 40 000 $.

Comme nous le savons fort bien, les mécaniciens doivent remplacer leurs outils usés, ce qui revient très cher.

Selon les statistiques, le salaire moyen d'un mécanicien est seulement de 29 000 $ par an. Qu'est-ce que cette mesure coûterait au gouvernement du Canada?

 

. 1145 + -

Le coût n'en serait pas élevé, mais nous ferions du même coup comprendre à nos jeunes professionnels—les mécaniciens sont des professionnels—que nous nous soucions de leur bien-être et que nous pensons qu'ils assurent des services importants. Ils devraient pouvoir déduire le coût de leurs outils au même titre que beaucoup d'autres professionnels. C'est une question d'équité et nous tenons à ce que le gouvernement du jour en fasse preuve.

Abstraction faite de la politique, je rappelle à la Chambre qu'elle est saisie de cette question depuis au moins une dizaine d'années déjà. Si le comité multipartite et les concessionnaires de voitures au Canada peuvent tomber d'accord, le gouvernement peut assurément faire l'effort de donner aux mécaniciens l'allègement fiscal que ces derniers méritent.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, il me fait plaisir d'intervenir sur le projet de loi C-205 présenté par mon collègue, le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, visant à ce que les mécaniciens puissent déduire de leur revenu les frais engagés pour l'acquisition ou le remplacement d'outils.

J'ai eu la chance de travailler comme mécanicien pendant 15 ans, pour une compagnie minière de la Côte-Nord, IOC à Sept-Îles. Heureusement, cette compagnie remplaçait parfois les outils perdus. Si on avait dû sortir l'argent de notre poche, cela aurait été une charge. Ceux qui ne connaissent pas le métier de mécanicien, surtout de mécanique lourde, sont totalement ignorants des coûts que cela peut représenter.

En 1980, un vernier servant à calculer le diamètre coûtait, au bas mot, 150 $. Avec l'inflation, avec l'escalade des coûts de toutes sortes, je suis à peu près persuadé qu'aujourd'hui, un vernier coûte 250 $. Le coffre d'un mécanicien compte plusieurs outils de cette nature.

Ce n'est pas toujours par négligence, parfois par malchance, à cause du lieu où on exerce son métier et les conditions dans lesquelles on l'exerce, mais les outils sont vulnérables et il arrive qu'on les perde. Je travaillais sur un chargeur de bateaux, sur les transocéaniques, à 200 pieds, soit 60 mètres au-dessus de l'eau, et j'avais échappé des outils à l'eau. À l'époque, cela représentait plusieurs centaines de dollars; c'était accidentel. Heureusement, cette compagnie que j'ai toujours respectée, pour laquelle je travaillais—et je suis fier d'avoir pu y travailler pendant 15 ans—remplaçait nos outils.

J'écoutais le député d'Acadie—Bathurst nous expliquer qu'après avoir fait réparer son auto, en la nettoyant, il a trouvé deux outils de mécanicien. La même chose m'est arrivée l'an dernier. Lorsqu'on parle d'un tournevis Snap-On, c'est de la qualité j'en conviens, mais dans l'exécution de son travail de mécanicien automobile, un tournevis va toucher deux bornes, va faire le lien du négatif au positif, une étincelle se produit et il m'est arrivé de voir le tournevis coupé en deux par l'étincelle. C'est 15 $. Vous me direz peut-être que ce n'est pas grand-chose, mais cela se répète souvent dans une année.

Je pense que c'est rendre justice aux cols bleus, aux travailleurs manuels que de leur reconnaître certains droits dans ce domaine, le droit de remplacement de leurs outils et le droit de les acquérir pour accéder à un emploi. C'est leur rendre justice face aux autres professionnels de toute nature qui, sans le demander, ont obtenu le droit de remplacer leurs outils ou de les moderniser.

 

. 1150 + -

Tantôt, on parlait des dentistes. Il y a plusieurs travailleurs autonomes ou professionnels autonomes qui doivent remplacer leurs outils. Quand je pratiquais le notariat, j'achetais des crayons à la caisse. Je n'avais pas à me battre pour les inclure dans mes dépenses d'opération de bureau, cela allait de soi; personne ne l'a jamais contesté. C'est à peu près la seule chose qu'ils n'ont pas contestée dans mon cas.

Le mécanicien, pour qui le coffre d'outils représente un investissement majeur, d'autant plus qu'il est soumis à des risques de perte ou de brisure, lui qui a probablement un des revenus les moins élevés de l'échelle, n'a pas droit à ces déductions.

Je pense que le député de Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans témoigne du respect à l'égard des travailleurs. Je pense qu'il faut appuyer son projet de loi. Je me réjouis que ce soit un des nôtres qui l'ait proposé ici.

Je me réjouis encore plus que les partis, ceux de l'opposition à tout le moins, semblent prêts à épouser la cause de mon collègue.

M. Michel Guimond: Madame la Présidente, j'invoque le Règlement. Considérant le fait que le débat se termine dans environ quatre minutes, à titre de proposeur de ce projet de loi qui va faire l'objet d'un vote demain, je demande le consentement unanime de la Chambre afin de pouvoir faire mes remarques de conclusion pour un maximum de quatre minutes. Il me faut le consentement unanime, étant donné que je suis déjà intervenu sur ce projet de loi.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le député a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour clore le débat pendant cinq minutes?

Des voix: D'accord.

M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Madame la Présidente, je désire remercier mes collègues de tous les partis d'avoir consenti à me donner la parole.

En conclusion, j'aimerais informer cette Chambre, ainsi que les citoyens et les citoyennes qui nous écoutent en ce moment, que ce projet de loi transcende la ligne de parti. Il ne s'agit pas d'une division entre des options politiques, il ne s'agit pas d'une vision différente des relations Québec-Canada; nullement.

Je crois que nous, les 301 députés de cette Chambre, dans le cadre de nos activités parlementaires dans nos circonscriptions, avons l'occasion de visiter des concessionnaires automobiles, nous avons l'occasion de rencontrer des mécaniciens dans nos bureaux de circonscription. Ils nous ont déjà sensibilisés à cette question de la déduction des outils nécessaires à leur emploi.

Je reprends les paroles du premier ministre: «Nous sommes peut-être à 12 ou 15 mois des prochaines élections.» Tous les parlementaires qui décideront de se présenter une autre fois lors de ces élections auront à visiter des concessionnaires automobiles et ils seront interpellés sur cette question.

C'est pour cela que je fais appel au bon sens des parlementaires. Si je me base sur les trois heures de débat, que ce soit mes collègues de l'Alliance canadienne, ceux du Bloc québécois bien entendu, ceux du Nouveau Parti démocratique et ceux du Parti progressiste-conservateur, tous ont parlé en faveur du projet de loi.

J'en appelle aux collègues de la majorité libérale en cette Chambre. Le secrétaire parlementaire du ministre des Finances—c'était peut-être une opinion personnelle—ne semblait pas très enclin à voter en faveur de ce projet de loi. De toute façon, j'en appelle à mes collègues libéraux. Il s'agira d'un vote où il n'y a pas de ligne de parti, de ce que l'on appelle un vote libre. Je suis persuadé qu'en leur âme et conscience, ils voteront en faveur de ce projet de loi.

En terminant, je rappelle que le Comité permanent des finances, en 1997, composé majoritairement de députés libéraux, avait fait la recommandation suivante:

    Le Comité recommande que le gouvernement accorde des allégements fiscaux ciblés à tous ceux qui, pour obtenir un emploi, doivent assumer des dépenses importantes, comme celles qu'engagent les mécaniciens pour leurs outils.

 

. 1155 + -

Je rappelle à mon collègue libéral de Vaughan—King—Aurora, qui était président de ce comité, qu'il avait voté en faveur de la recommandation. Mon collègue libéral de Gatineau, ceux de Sarnia—Lambton, de Provencher, de Niagara Falls, de Kitchener-Centre, de Mississauga-South et de Stoney Creek, qui étaient membres du Comité permanent des finances et représentaient la majorité libérale, avaient voté en faveur de la recommandation.

Je pense que les techniciens de l'automobile s'attendent à ce que nous, en tant que parlementaires, reconnaissions enfin que leur profession est importante pour notre société et que nous la reconnaissions à sa juste valeur.

Il ne s'agit que d'une question d'équité par rapport à d'autres catégories d'emplois qui peuvent déduire le coût de leurs outils. C'est également une question de promotion de nos jeunes qui pourraient être tentés, si on leur donnait des avantages fiscaux, d'épouser cette profession. Il s'agit de jeunes garçons et de jeunes filles qui pourraient voir que ce gouvernement tient compte de leurs préoccupations et encourage le développement de cette profession.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Conformément à l'ordre adopté plus tôt aujourd'hui, toutes les questions nécessaires pour disposer de la motion sont réputées mises aux voix et le vote par appel nominal est réputé demandé et différé jusqu'au mardi 30 mai 2000, à la fin de la période prévue pour les ordres émanant du gouvernement.  

[Traduction]

SUSPENSION DE LA SÉANCE

Mme Marlene Catterall: Madame la Présidente, nous pourrions suspendre brièvement nos travaux et passer aux initiatives ministérielles à midi, comme à l'accoutumée.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

(La séance est suspendue à 11 h 57.)

 

. 1200 + -

REPRISE DE LA SÉANCE

(La séance reprend à 12 heures.)

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

Mme Marlene Catterall (Ottawa-Ouest—Nepean, Lib.): Madame la Présidente, des discussions ont eu lieu avec les représentants de tous les partis, et je crois que vous constaterez qu'il y a consentement, conformément au paragraphe 45(7) du Règlement, pour reporter le vote par appel nominal sur la motion no 30, prévu pour le mardi, 30 mai 2000, au mercredi, 31 mai 2000, à la fin de la période prévue pour les initiatives ministérielles.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime pour que nous précédions ainsi?

Des voix: D'accord.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LOI SUR LA CITOYENNETÉ AU CANADA

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 17 mai, de la motion: Que le projet de loi C-16, Loi concernant la citoyenneté canadienne, soit lu pour la troisième fois et adopté.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir prendre la parole au sujet du projet de loi C-16, car c'est la dernière occasion d'en débattre avant le vote final.

Le caucus néo-démocrate croit vivement que le projet de loi C-16 constitue une bonne mesure législative et répond aux besoins des citoyens canadiens. Nous sommes satisfaits que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration ait entendu de nombreux témoignages. En fait, 37 groupes et organismes ont comparu devant le comité. Nous sommes satisfaits que le gouvernement ait rédigé la version finale du projet de loi en tenant compte des préoccupations soulevées par les spécialistes du domaine et les nombreux porte-parole qui ont témoigné. Autrement dit, le comité a écouté les Canadiens et a pris leur opinion en compte dans l'élaboration du projet de loi C-16.

Le projet de loi a été présenté à l'origine sous le nom de projet de loi C-63. Nous en avons débattu en long et en large. Nous avons fait valoir de nombreuses préoccupations et recommandé des amendements à l'étape de l'étude en comité. Lorsque le gouvernement a représenté le projet de loi en tant que projet de loi C-16, nous avons été heureux de constater qu'il avait corrigé un grand nombre des points faibles que nous avions signalés.

Les 37 comparutions devant le comité témoignent du grand intérêt que suscite le sujet. J'ai siégé à d'autres comités chargés d'étudier des mesures législatives, mais je n'ai jamais vu un aussi grand nombre de comparutions. Les Canadiens s'intéressent vivement à la question de la citoyenneté. La citoyenneté canadienne est précieuse. Il faut la chérir. En fait, il faut la conserver précieusement. La plupart d'entre nous sont très passionnés parce que la plupart des Canadiens sont des nationalistes canadiens extrêmement fiers.

La raison pour laquelle le projet de loi a généré autant d'intérêt est que la plupart d'entre nous voient la citoyenneté sous un jour très nouveau étant donné la mondialisation actuelle de l'économie. Nous avons été contraints de réévaluer et de réviser tout le concept de citoyenneté.

Avec la mondialisation des capitaux, nous voyons les frontières disparaître. De nombreuses personnes disent que nous vivons probablement le début de la fin du concept de l'État-nation. La libre circulation des produits, des services, des investissements et des capitaux ne s'occupe pas des frontières internationales. Tout cela se fait autour de nous. Le seul moyen de nous définir et de maintenir notre identité en tant que Canadiens est de veiller à ce que l'État-nation canadien survive en tant qu'entité, personnifié par notre citoyenneté.

Nous sommes très préoccupés lorsque nous voyons des accords commerciaux internationaux qui ne reconnaissent pas les frontières de l'État-nation. Par exemple, nous avons vu l'AMI, l'Accord multilatéral sur l'investissement, récemment échouer. Les gens du monde entier ont voté contre cette idée. Selon les promoteurs de l'AMI, l'excédent de démocratie dans le monde empêche la libre circulation des capitaux; autrement dit, les gouvernements démocratiquement élus font obstacle à ce que souhaitent faire les entreprises.

 

. 1205 + -

C'est pourquoi je dis que les gens s'inquiètent au sujet du concept de citoyenneté. Ils s'inquiètent au sujet du concept d'État-nation et, à terme, de l'avenir de la démocratie lorsque les dirigeants d'entreprises du monde entier disent que l'excédent de démocratie dans le monde empêche la libre circulation des capitaux. Nous nous demandons alors ce qui nous attend ensuite.

Voilà quelques-unes des raisons pour lesquelles les gens sont préoccupés par la notion de citoyenneté et pour lesquelles tellement de groupes ont témoigné devant le comité. Il ne s'agit pas ici que des aspects pratiques de l'obtention ou de la révocation de la citoyenneté au Canada. Ce sont là les aspects techniques. La notion de citoyenneté et sa nature même soulèvent une question plus large et plus philosophique. Bon nombre des groupes qui ont présenté des instances au comité ont abordé cette question beaucoup plus large qu'est la signification de citoyen.

À mon avis, lorsqu'on est citoyen du Canada, à bien des égards, le tout est plus grand que la somme des parties. Les citoyens canadiens éprouvent un sentiment de camaraderie, un sentiment de solidarité, parce qu'ils vivent dans le meilleur pays du monde. C'est une chose qui nous tient à coeur et à laquelle nous attachons une grande valeur, mais nous la prenons au sérieux.

Nous devons nous rappeler que la citoyenneté n'est pas un droit. C'est un privilège. La citoyenneté s'accompagne de responsabilités. La citoyenneté offre beaucoup d'avantages, mais elle s'accompagne aussi du fardeau que sont les responsabilités. Il nous faut nous conduire d'une certaine manière, à défaut de quoi notre citoyenneté peut être révoquée.

Certaines dispositions du projet de loi C-16 traitent de la révocation de la citoyenneté. Quelques-uns des témoins qui ont présenté des instances au comité étaient fermement d'avis que ces dispositions offraient au ministre trop de pouvoirs en ce qui concerne la révocation de la citoyenneté.

Le NPD est convaincu que, à cet égard, le projet de loi C-16 est équilibré, car il existe des options d'appel à toutes les étapes de la révocation de la citoyenneté. Ce processus peut conduire jusqu'au plus haut tribunal du pays et, à notre avis, personne n'a besoin de recours supplémentaires. Je suis heureux de constater que cette proposition recueille un large appui.

Nous sommes satisfaits du recours auprès de la cour fédérale prévu dans le projet de loi C-16. À notre avis, le projet de loi C-16 ne traite pas trop maladroitement la révocation de la citoyenneté. Nous pensons maintenant que les conditions d'obtention de la citoyenneté sont clarifiées. Certains des changements que nous avions réclamés au début de l'étude du projet de loi C-63 ont été inclus dans le projet de loi C-16.

Nous trouvions extrêmement regrettable que ceux qui subissaient l'examen pour obtenir la citoyenneté devaient connaître l'une des langues officielles de notre pays. Ils n'avaient pas accès aux services d'un interprète. Ils n'avaient pas accès à des services d'interprétation. Nous ne voyions pas de lien entre le fait de connaître l'une des langues officielles pour subir un examen de citoyenneté et le fait d'être un bon citoyen.

Nous sommes heureux de constater que, dans la version du projet de loi dont nous sommes actuellement saisis, les personnes pourront avoir accès à des services d'interprétation si leur connaissance pratique de l'une ou l'autre des langues officielles n'est pas suffisante pour leur permettre de subir un examen pouvant être très compliqué.

Un autre aspect que nous avons abordé au début de l'étude du projet de loi C-63, c'est le principe selon lequel il faut être présent physiquement dans notre pays pendant un certain temps pour pouvoir demander la citoyenneté canadienne. Nous avons fait valoir que de nombreux immigrants admis, de nombreux néo-Canadiens qui sont venus chez nous ont encore des intérêts à l'étranger. Certains peuvent être des gens d'affaires. Prenons l'exemple d'un néo-Canadien originaire d'Asie qui peut avoir un certain nombres d'entreprises différentes dans cette région du monde. Cette personne devrait se déplacer pour s'occuper de tels intérêts. De plus, nous ne pensons pas que la présence physique dans notre pays soit un facteur ou une indication permettant de déterminer le genre de citoyen que la personne visée sera au bout du compte.

À notre avis, c'était faire preuve d'une sévérité inutile que d'exiger d'une personne qu'elle soit présente dans notre pays pendant un nombre X de jours au cours d'une période donnée pour pouvoir demander sa citoyenneté. Nous estimons que le gouvernement a tenu compte de ces préoccupations et qu'il a assoupli les dispositions à cet égard et a assez bien respecté nos demandes.

De nombreux groupes sont venus parler des règles concernant l'inadmissibilité à la citoyenneté en raison de la participation à des activités criminelles. Nous croyons que nous ne devrions pas offrir un refuge sûr ou un asile aux criminels internationaux. Nous avons parfaitement le droit. Nous ne croyons pas que cela viole en quoi que ce soit nos obligations internationales aux termes des conventions des Nations Unies sur les droit de l'homme, de dire que nous ne permettrons pas à certaines personnes de devenir des citoyens canadiens.

 

. 1210 + -

Nous attachons trop d'importance à notre citoyenneté pour permettre l'entrée au pays de gens qui vont abuser du système, qui vont se réfugier chez nous pour se livrer à leurs activités criminelles. Nous n'allons pas le tolérer. Les Canadiens veulent des règles strictes qui précisent cela très clairement.

Les Canadiens sont incroyablement tolérants en ce qui concerne leur attitude à l'égard de l'immigration en elle-même. Nous voulons ouvrir nos portes encore plus grandes lorsqu'il s'agit d'inviter des néo-Canadiens à venir s'établir au Canada, mais nous souhaitons également nous assurer de ne pas laisser entrer des indésirables, des criminels internationaux, des terroristes ou des gens de ce genre qui viendraient se réfugier chez nous. Nous n'avons pas besoin d'eux et nous ne voulons pas d'eux ici. D'une certaine façon, le projet de loi C-16 parle quelque peu de cela lorsqu'il est question de la révocation de la citoyenneté.

Le caucus néo-démocrate croit que le projet de loi C-16 répond aux besoins des Canadiens pour ce qui est de l'acquisition de la citoyenneté canadienne. Il établit des règles justes pour l'acquisition de la citoyenneté et la révocation de cette dernière dans le cas fort improbable où cela deviendrait nécessaire.

Nous sommes persuadés que le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a tenu compte des préoccupations soulevées par un certain nombre de Canadiens, par quelques 37 groupes qui ont présenté des instances et par les membres du comité, comme votre serviteur, qui ont proposé des amendements au comité. Nous sommes convaincus maintenant qu'on a répondu à ces préoccupations dans le projet de loi C-16.

Nous entendons bien voter en faveur du projet de loi et lui faire franchir toutes les étapes à la Chambre afin que nous puissions consacrer plus de temps à la question plus large de l'immigration et de la protection des réfugiés qu'on aborde dans le projet de loi C-31, un autre projet de loi portant sur la citoyenneté et l'immigration, mais qui touche en fait au coeur même des règles sur l'immigration et la façon d'attirer et de retenir plus de gens au Canada pour favoriser notre croissance économique.

Il nous tarde de passer du projet de loi C-16 que nous considérons tout à fait adéquat au débat beaucoup plus large sur l'immigration et la protection des réfugiés que nous tiendrons relativement au projet de loi C-31.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, notre collègue pourrait-il nous nommer un seul des nombreux groupes à avoir fait un exposé sur la révocation de la citoyenneté qui ne serait pas mécontent de ne pas avoir le droit de faire appel d'une décision rendue par un juge de la cour fédérale?

M. Pat Martin: Monsieur le Président, les gens sont contents que l'on ait démontré et illustré très clairement qu'il existe un droit d'appel à toutes les étapes de la révocation de la citoyenneté, et ce jusqu'au niveau du plus haut tribunal au pays.

Les Canadiens sont heureux de cela. Lorsqu'on a souligné qu'il pourrait y avoir des amendements au projet de loi C-16, ou un changement à la loi qui modifierait l'accès au processus d'appel, un certain nombre de groupes se sont dits préoccupés. La question a été soulevée.

Les responsables de la citoyenneté et de l'immigration ont précisé qu'il n'y avait rien dans le projet de loi C-16 qui pouvait menacer le droit d'appel dans le cas de la révocation de la citoyenneté et qu'en fait, le droit d'appel existait toujours à toutes les étapes du processus. Il s'agit d'un processus exhaustif, que certains qualifient même de lourd, qui peut s'étaler sur des années. Comme nous le savons tous, dans certains cas bien connus, l'étude des dossiers a duré cinq, sept ou même neuf ans avant qu'une ordonnance d'expulsion ou un avis de révocation de citoyenneté ne soit émis.

Après avoir examiné les tableaux, graphiques et diagrammes définissant le processus d'appel, nous sommes convaincus que le projet de loi C-16, de même que les lois sur la citoyenneté et l'immigration, comportent un mécanisme d'appel complet et pertinent. À mon avis, il n'y a pas lieu de s'inquiéter. Les groupes qui ont fait part de leurs préoccupations à ce sujet ont vu leurs craintes apaisées.

M. Lynn Myers (Waterloo—Wellington, Lib.): Monsieur le Président, je commencerai par dire que c'est un grand honneur pour moi que de parler aujourd'hui du projet de loi C-16 et de ce qu'il signifie non seulement pour mon pays mais spécialement pour les gens qui souhaitent faire du Canada leur pays d'adoption et certes pour ceux qui y ont réussi.

 

. 1215 + -

J'ai écouté avec un grand intérêt le député de Winnipeg-Centre, qui a présenté de nombreux arguments valables. Je veux réitérer spécialement le fait qu'après avoir entendu plusieurs témoins, le comité a été en mesure de prendre des décisions qui sont appropriées au sujet dont nous discutons.

La citoyenneté, comme le savent tous les députés et les Canadiens, revêt une grande valeur pour les citoyens et leur famille. Elle leur confère un grand honneur et une grande responsabilité, de même que des droits inhérents en vertu de la Charte des droits et libertés et de la Constitution canadienne.

Cela me rappelle mes arrières-arrières-grands-parents qui sont venus d'Europe s'établir ici en 1827 en passant par le comté de Bucks, en Pennsylvanie. Au fil des années, nous en sommes venus à chérir ces choses qui nous tiennent à coeur, et notamment le fait d'être des citoyens de notre beau et grand pays.

Sur le plan historique, il est étonnant de constater qu'avant 1947, les Canadiens n'avaient pas encore la citoyenneté canadienne telle que nous la connaissons, mais étaient plutôt des sujets britanniques. Il est intéressant de noter que le premier ministre avait 12 ans lorsqu'il a reçu la citoyenneté canadienne. Nous étions des sujets britanniques jusqu'à ce moment-là. Cela dit, avoir la citoyenneté canadienne et bénéficier de tous les avantages qui y sont rattachés est une chose à laquelle les Canadiens accordent une grande valeur. Il est important de célébrer et de chérir ce qui nous tient ainsi à coeur. En 1947, le gouvernement libéral d'alors, avec le premier ministre Mackenzie King, a vu à ce que les Canadiens jouissent d'un statut qui encore aujourd'hui nous tient à coeur, celui de citoyen du Canada.

La citoyenneté est, dans notre culture, un concept qui remonte aux cités de la Grèce antique. Chez les Grecs, un citoyen devait participer étroitement à la vie de la cité. Il jouissait de droits et de privilèges énormes. Mais c'était aussi un statut très restrictif, ce que nous n'avons pas conservé. En effet, les femmes et les nouveaux venus n'avaient aucun espoir de devenir un jour citoyens.

Cette restriction, qui a existé pendant des siècles, a fini par disparaître. Dans un certain sens, on la retrouve encore aujourd'hui dans les pays où les conditions d'octroi de la citoyenneté sont restrictives et chez les membres de groupes ethniques traditionnels. Il existe beaucoup de pays où, à l'inverse du Canada, la citoyenneté n'est pas un moyen d'accueillir des nouveaux venus. Ce n'est pas l'occasion pour ces derniers de déclarer qu'ils sont prêts et disposés à faire partie intégrante de la communauté en tant que citoyens.

Il est clair que le Canada est différent à cet égard. Nous accueillons les nouveaux venus. Nous octroyons la pleine citoyenneté à tous les nôtres d'une manière conforme à la Charte et aux prérogatives constitutionnelles, ainsi que les droits auxquels s'attendent maintenant tous les Canadiens, et à juste titre, où qu'ils habitent dans ce grand pays qui est le nôtre. Il est important de ne pas l'oublier.

C'est quand les Canadiens voyagent à l'étranger que notre citoyenneté revêt sa pleine importance et qu'ils prennent pleinement conscience du fait que le Canada est un pays formidable. C'est important d'apprécier à sa juste valeur et de chérir tout ce qu'implique la citoyenneté canadienne.

Permettez-moi de préciser ce que la loi de 1947 apportait de nouveau. Je le fais à titre d'historique car c'est important. Cette loi prévoyait un traitement différent pour les hommes et les femmes, notamment en cas de mariage avec un non-Canadien pour ce qui était de conserver la citoyenneté canadienne s'ils vivaient à l'étranger, de la transmission de cette citoyenneté à leurs enfants s'ils vivaient à l'étranger et, finalement, du délai imposé à l'époux pour acquérir la citoyenneté. C'était une partie intégrante de la loi de 1947, mais, malgré tous les défauts que nous y avons relevés après coup, cette loi constituait un important point de départ. C'est ainsi que nous en sommes aujourd'hui à étudier le projet de loi C-16.

Il est important de souligner que ce qui n'a jamais changé, c'est le sentiment que la citoyenneté a pour objet d'unir la famille canadienne, qui est magnifique. L'idée est de partager les valeurs, les traditions et les institutions qui nous caractérisent et nous unissent, et qui font de notre pays le meilleur au monde selon le rapport sur le développement humain des Nations Unies depuis six années d'affilée. Ce n'est pas une coïncidence. Cela est attribuable à ce que nous sommes, à ce que nous représentons, et la citoyenneté canadienne fait partie de notre grandeur.

 

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Quand de nouveaux arrivants prêteront le serment de citoyenneté prévu par le projet de loi, ils diront ce que signifie le fait d'être canadien. Ils voueront loyauté et allégeance au Canada et à la Reine. Ils promettront de respecter les droits et libertés du Canada et d'assurer l'observation de la Constitution. Ils prêteront serment pour souscrire aux valeurs démocratiques qui nous permettent de débattre de très importantes questions dans un esprit d'ouverture, de transparence et de responsabilité comme nous le pratiquons dans notre grand régime démocratique, au Canada. Ils promettront de faire ce que nous devrions faire, respecter nos lois et remplir les fonctions et les obligations qui incombent à tout bon citoyen canadien.

Et ce ne sont pas que des mots. Ce sont des mots qui vont au coeur même de la citoyenneté. Quiconque les prononce accepte les règles fondamentales du fonctionnement de notre société, accepte de jouer pleinement son rôle dans la société canadienne en venant en aide à son prochain et en souscrivant vraiment aux valeurs canadiennes où qu'il vive au Canada. Il accepte de se conformer aux lois électorales, de faire partie d'un jury, de discuter au jour le jour avec ses concitoyens, bref de voter et de remplir son devoir de citoyen d'une manière significative et concrète, conformément aux valeurs canadiennes.

Monsieur le Président, je voudrais préciser que je partagerai mon temps de parole avec le député de Cambridge.

Certains pays vendent essentiellement leur citoyenneté. De fait, il y a des gens qui font cela pour de l'argent. Ils achètent des passeports qui peuvent être utilisés pour aller quelque part. Des documents de voyage feront partie de cela également. C'est vendre de l'espoir, de faux espoirs dans bien des cas, dans des régions du monde qui sont sujettes à l'instabilité, et c'est des plus regrettable. Mais cela n'équivaudra jamais à ce que représente la citoyenneté canadienne, et c'est ce que nous avons. Les passeports de complaisance qui sont vendus ne donnent pas à penser au monde qu'une personne fait partie d'une grande famille, comme c'est le cas avec la citoyenneté canadienne. Les détenteurs de ces passeports ne sauraient être liés aux hommes et aux femmes de partout dans le monde qui partagent la fierté d'être des citoyens du Canada.

C'est là l'essence de la citoyenneté. C'est ce que signifie être Canadien. C'est ce que signifie avoir les valeurs qui nous unissent en tant que peuple et que nous transmettons comme nous les ont transmises nos ancêtres, avec les enrichissements qu'y apportent les nouveaux venus au Canada. Cela est important pour que nous puissions bâtir sur les fondations du passé avec vision, discernement et prévoyance. Nous pouvons affronter l'avenir avec confiance, sachant que nous avons un des meilleurs—et je dirais personnellement le meilleur—pays au monde. Cela mérite d'être souligné.

En terminant, je dirai simplement que le projet de loi C-16 aidera à renforcer ce que nous tenons si souvent pour acquis dans ce merveilleux pays que nous habitons, notamment la citoyenneté. Cela étant dit, je propose:  

    Que la motion soit mise aux voix.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, pourquoi le député a-t-il recours à une manoeuvre aussi sournoise pour essayer d'écraser l'ancien secrétaire parlementaire? Celui-ci a mis son poste en jeu parce qu'il a adopté une position de principe. En allant de l'avant et en ayant recours à des manoeuvres sournoises, le gouvernement le punit et l'empêche de remplir convenablement le mandat que les électeurs de sa circonscription lui ont confié.

 

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J'aimerais savoir pourquoi le député plante un couteau dans le dos de l'ancien secrétaire parlementaire, qui a travaillé très fort à ce projet de loi.

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, je n'ai pas de leçon à recevoir du député d'en face. En matière de sournoiserie et de coups de poignard dans le dos, il est l'expert du côté de l'Alliance canadienne. Il est toujours partie aux gestes que ces gens posent constamment pour réaliser les opérations de toutes sortes qu'ils sont prêts à entreprendre. Je parle de certaines mesures notoires du député et notamment de son initiative à l'occasion du débat au sujet de M. Thompson et du Sénat, lorsqu'il a réuni des députés de son parti et des musiciens mariachis coiffés de sombreros et qu'on a vu les assaisonnements de tacos dégouliner sur les planchers de marbre de cette admirable institution.

Le député d'en face est bien mal placé pour me faire la leçon. Franchement, il devrait avoir honte de ce qu'il a fait dans ce domaine.

Ce qui se passe présentement correspond au processus normal visant à accélérer les travaux du gouvernement et à ce que nous devons faire en ce vénérable Parlement du Canada. Nous respectons le programme du gouvernement dont je suis fier de faire partie.

M. Rob Anders: Monsieur le Président, je tiens à signaler que tout ce que j'ai dit jusqu'à ce jour en ce qui concerne le Sénat est conforme à la politique de notre parti et à l'opinion de beaucoup de Canadiens.

En un sens, le député a violé les privilèges d'un autre député, d'un député de son propre parti, de quelqu'un qui a défendu un principe, de quelqu'un qui, dans l'intérêt de ses électeurs, a fait ce qu'il a cru devoir faire en démissionnant de son poste de secrétaire parlementaire, de quelqu'un qui essaie de faire de son mieux pour ses électeurs.

Le député s'est arrangé pour empêcher l'ancien secrétaire parlementaire d'agir conformément à la volonté de ses électeurs. C'est la chose la plus mesquine et la plus ignominieuse que le député pouvait faire. Il a empêché un député qui avait perdu un poste pour une question de principe de poser une question à ce sujet. Le député d'en face peut me critiquer autant qu'il veut, mais comment peut-il poignarder un des siens dans le dos à propos d'une chose pour laquelle celui-ci s'est personnellement sacrifié dans l'intérêt de ses électeurs?

M. Lynn Myers: Monsieur le Président, le député d'en face a tout bonnement tort. Il n'y a rien eu d'irrégulier dans le processus suivi aujourd'hui. La démarche est tout à fait courante. Nous faisons le nécessaire pour faire avancer l'étude d'un projet de loi très important sur lequel les Canadiens de toutes les régions ont des opinions très arrêtées.

Quant aux réformés de l'Alliance, à ces extrémistes qui siègent en face, ils sèment la pagaïe et se poignardent dans le dos. Voyez ce qui se passe pendant la campagne à la direction de leur parti et les positions extrémistes qu'ils adoptent et tous leurs stratagèmes pour s'assurer des voix et influencer les résultats. Je crois que 1 200 personnes s'étaient inscrites, mais 1 600 personnes ont voté.

Quand il s'agit de coups bas, de stratagèmes énormes, ces extrémistes, ces réformés de l'Alliance sont des maîtres, et ils ne cessent d'innover. Eux seuls savent tout ce dont ils sont capables, tout ce qu'ils peuvent faire à répétition. Ce qu'ils font est scandaleux. Mais les Canadiens ne se laissent pas berner. Ils savent à quoi s'en tenir sur ces extrémistes et sur ce qu'ils représentent.

 

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M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Monsieur le Président, certains termes, qui n'ont rien de nouveau à mon avis, ont été employés pour désigner certaines personnes de ce côté-ci de la Chambre. Ces termes ont déjà été employés auparavant.

On se trouve ici à refuser le droit de parole au secrétaire parlementaire. Si cette motion devait être adoptée, cela créerait vraiment une situation délicate parce que cela ne ferait pas qu'empêcher le secrétaire parlementaire de parler.

Ce dernier a employé des termes semblables pour désigner les députés de l'Alliance canadienne. Je trouve cela plutôt difficile, dans un certain sens, d'appuyer le secrétaire parlementaire relativement à la position qu'il a prise, mais il a agi correctement et c'est pourquoi je l'appuie. Par contre, le député de Wellington devrait reconnaître qu'il est allé trop loin.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je dois dire que c'est dégoûtant de voir le Parti libéral planter un poignard dans le dos de ses propres députés qui tentent de défendre un principe. C'est triste à voir, et j'espère que les libéraux qui nous regardent de leur bureau rougissent de honte. J'espère que l'ancien secrétaire parlementaire aura la chance de présenter ses arguments devant le caucus et qu'il sera capable de convaincre quelques-uns de ses collègues.

Nous débattons aujourd'hui le projet de loi C-16, Loi concernant la citoyenneté canadienne. Le projet de loi C-16 n'est pas une réforme majeure comme il prétend l'être. Il ne va pas assez loin, et c'est malheureux. Certains éléments critiques ont été négligés, alors que d'autres ont été modifiés de façon négative.

Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, dominé par les libéraux, a fait des recommandations en 1994. Le gouvernement a pris plus de cinq ans pour préparer une mesure législative qui ne donne toujours pas suite aux principales recommandations du comité. Encore une fois, le gouvernement élabore les réformes recommandées, mais ne les met pas en oeuvre.

Une des dispositions dont je voudrais parler concerne la citoyenneté dès la naissance, disposition qu'on trouve aux paragraphes 4(1) à 4(4).

Le Canada va au-devant d'un problème. Nous avons actuellement une disposition qui accorde la citoyenneté dès la naissance, ce qui est logique dans le cas des personnes nées au Canada de parents canadiens. Toutefois, cette disposition s'applique aussi à des personnes de passage au Canada, aux immigrants reçus et à d'autres.

L'Australie a constaté ce problème. Avec cette forme d'encouragement, des gens qui ne sont pas citoyens canadiens donneront naissance à un enfant au Canada et cet enfant deviendra citoyen canadien. En un sens, ils utiliseront l'enfant comme monnaie d'échange afin de pouvoir rester dans notre pays avec leur famille.

Aux États-Unis, des gens traversent la frontière du Mexique pour se rendre au Texas en franchissant le Rio Grande. Des femmes enceintes déploient toute l'énergie possible pour traverser la frontière, car elles savent que, si elles réussissent à la franchir, même au prix de blessures, et qu'elles peuvent accoucher à l'intérieur de la frontière américaine, leur enfant deviendra citoyen américain.

Le Canada, avec tous les bateaux d'immigrants qui arriveront probablement sur nos côtes cet été, est en train de créer la même situation. En raison de cette disposition législative, des femmes d'autres pays présumeront que, de quelque façon que ce soit, elles pourront s'embarquer à bord de rafiots rouillés, au mépris de leur état de santé, afin de tenter leur chance d'accoucher en terre canadienne. Comme l'enfant aura la citoyenneté canadienne, la mère aura réuni les conditions pour rester au Canada. Ce qui est déplorable, c'est que des femmes enceintes sont incitées à accomplir ce pénible voyage dans des circonstances abominables. Voilà une politique publique peu judicieuse que celle qui encourage des femmes enceintes à mettre leur vie et celle de leurs enfants en danger pour que l'enfant puisse naître sur le territoire canadien. Le gouvernement devrait avoir honte.

 

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L'Australie a su se montrer plus responsable quand elle a modifié sa loi. Elle a prévu qu'au moins un des parents devait être citoyen. On ne peut donc pas se servir des enfants comme monnaie d'échange pour des fins d'immigration.

Le projet de loi traite également des conditions relatives à l'attribution de la citoyenneté, notamment la présence au Canada. Jusqu'en 1977 ou quelle part par là, la loi prévoyait qu'il fallait avoir résidé au Canada pendant cinq ans pour obtenir la citoyenneté canadienne. Puis, le gouvernement libéral de l'époque a réduit cette période à trois ans. Il fallait que ce soit trois ans sur cinq. Or, le gouvernement, dans sa sagesse, a décidé, en dépit de tous les problèmes qui se posent dans le dossier des revendications du statut de réfugié avec tous ces gens qui réclament des choses auxquelles ils n'ont pas droit, avec tous ces mariages simulés et avec tous ces problèmes auxquels est confronté notre système d'immigration, de ramener cette condition à trois ans de résidence au cours des six ans qui ont précédé la date de la demande. Il est donc beaucoup plus facile d'acquérir ce droit.

Le problème, c'est qu'on ne précise pas ce qu'il faut entendre par résidence. La loi dit quelque part qu'il doit s'agir d'une présence effective. L'ennui, c'est qu'aucun mécanisme n'est prévu pour établir quand exactement les demandeurs arrivent au Canada et en repartent et que le projet de loi n'instaure pas un tel mécanisme, de sorte qu'il n'existe aucun moyen de vérifier les faits.

Résultats, des gens vont venir au Canada et dire qu'étant physiquement présents, ils remplissent les conditions requises pour obtenir le statut de résident. Ensuite, ils quitteront le pays en empruntant un poste frontière non surveillé puis prendront un vol de Seattle à destination de leur pays d'origine où ils resteront. Pendant ce temps, ils figureront dans les dossiers canadiens comme ayant été physiquement dans notre pays. Rien ne les empêchera alors de revenir après avoir vécu quelques années à l'étranger et de se voir octroyer automatiquement la citoyenneté canadienne, en dépit du fait qu'ils n'ont pas été physiquement présents au Canada. Le gouvernement dit qu'il existe une disposition relative à la présence physique. C'est vrai, mais pas dans la pratique. Il n'y a aucun moyen de vérifier.

Je sais par exemple que des Coréens quittent le pays via Seattle en passant par des postes frontières non surveillés. Ils viennent au Canada, font une demande de citoyenneté—l'horloge de la résidence commence alors à faire tic tac—puis quittent le pays en empruntant un poste frontière non surveillé, vont à Seattle, reprennent un avion pour l'Asie, continuent à faire des affaires là-bas, bien souvent ne paient pas d'impôts au Canada, puis reviennent quand ils veulent et, après quelques années, se voient octroyer la citoyenneté canadienne bien que travaillant à l'étranger. C'est un grave problème et le gouvernement n'a rien fait pour le régler.

En ce qui concerne l'article 8 du projet de loi, l'adoption à l'étranger, il fut un temps où les gens qui voulaient immigrer au Canada étaient tenus de se soumettre à un examen médical. Plus maintenant, le gouvernement ne l'exige plus. Résultat, les gens pourront désormais adopter des enfants atteints de toutes sortes de maladies qui auparavant auraient été détectées au moyen d'un examen médical. Qui en assume les frais? Le contribuable canadien.

Une fois de plus, le gouvernement a exposé le Canada à d'autres difficultés, malgré tous les problèmes qui existent déjà et qu'on lui reproche. Et que fait le gouvernement? Au lieu de s'employer à régler le problème, il nous fragilise encore davantage.

Il y a du favoritisme flagrant dans ce projet de loi. Les articles 31 et 32 portent sur les juges et les commissaires à la citoyenneté. Ce qui est regrettable, c'est que, à l'époque des derniers changements apportés à cette loi, ce sont les nominations partisanes qui posaient problème. Quand Barbara McDougall exerçait les fonctions de ministre, les progressistes conservateurs avaient et créé les postes de juges à la citoyenneté. Évidemment, ces nominations ont bénéficié à des partisans intéressés qui ont touché des rémunérations conséquentes pour chanter l'hymne national et présider aux cérémonies d'assermentation.

Les libéraux ont reconnu qu'il y avait un problème. Des comités parlementaires ayant déploré le fait que l'on n'appliquait pas le principe du mérite pour pourvoir à ces postes, le gouvernement s'est contenté de les rebaptiser. Cela fait penser au roman 1984 et à Big Brother. Au lieu de juges de la citoyenneté, on aura maintenant des commissaires à la citoyenneté. Il s'agit du même poste. On continuera d'y nommer des partisans intéressés. Il y aura toujours des nominations politiques. C'était sans doute trop beau pour y changer quoi que ce soit.

L'article 6 concerne les exigences en matière de connaissances linguistiques pour acquérir la citoyenneté. On a de nouveau atténué les exigences linguistiques. Le gouvernement exige uniquement que les gens aient une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada. Qu'est-ce qu'une connaissance suffisante? C'est très vague. Le gouvernement sait exactement ce qu'il fait.

 

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J'aimerais faire état d'un livre récemment publié par Charles M. Campbell et intitulé Betrayal & Deceit: the Politics of Canadian Immigration. M. Campbell a été vice-président de la Commission d'appel de l'immigration pendant un certain nombre d'années. Il souligne que l'Australie a eu le courage politique de s'attaquer à bon nombre de ces situations et a apporté les changements nécessaires. Les Australiens ont reconnu que des gens participaient à des mariages simulés, présentaient de piètres perspectives d'emplois et tout le reste, comme c'est le cas au Canada à l'heure actuelle.

Quelles sont certaines des dispositions adoptées par l'Australie? Une d'entre elles prévoit que, pour être réputée posséder une connaissance suffisante de la langue anglaise, une personne doit satisfaire à quatre critères: savoir lire l'anglais, parler anglais, comprendre l'anglais et écrire en anglais. Au Canada, cette disposition s'appliquerait bien sûr à l'anglais et au français.

Dans le projet de loi C-16, le gouvernement précise qu'une personne doit manifester une compréhension ou une connaissance suffisante. Le mot suffisante ne laisse en rien entendre que cette personne est en mesure de lire une des langues officielles, de parler une des langues officielles, de comprendre une des langues officielles ou de rédiger dans une des langues officielles.

Les Australiens savaient qu'ils avaient un problème à régler. Au Canada, nous ne l'avons pas réglé. Par conséquent, nous consacrons beaucoup d'argent à l'enseignement d'une langue à ces gens après leur arrivée. C'est un fardeau pour les contribuables canadiens. Nous aurions facilement pu corriger la situation en prévoyant ces quatre aptitudes en ce qui concerne la compréhension des langues officielles, mais le gouvernement ne l'a pas fait.

Il y a d'autres choses que l'Australie a eu le courage de faire, contrairement à notre gouvernement. Les Australiens ont également vu à ce que le niveau de compétence soit limité aux postes qui exigent un certificat d'aptitude professionnelle, un degré, un diplôme ou un diplôme associé. En outre, les compétences doivent être obtenues au moins trois ans avant que la demande d'immigration ne soit présentée. Il s'agit d'une disposition très pertinente, car bien des personnes qui immigrent au Canada ont acquis chez eux des compétences particulières qui ne sont pas reconnues ici, ce qui les empêche de travailler dans leur domaine. C'est pourquoi un grand nombre de gens détenant une bonne formation se retrouvent chauffeurs de taxis. Voilà une partie du problème que le gouvernement a créé.

L'Australie a aussi été confronté à la question de l'âge. Nous savons tous qu'une grande partie de la population est vieillissante. Cette tranche de la population atteindra une proportion énorme en 2017, ce qui aura probablement pour conséquence de vider les coffres du Régime de pensions du Canada et d'y mettre fin. Et pourtant, le gouvernement continue de laisser croître le passif non capitalisé des programmes sociaux et du régime de pensions pour les immigrants et de prendre de plus en plus de responsabilités.

L'Australie a eu le courage de fixer l'âge idéal d'un nouvel immigrant entre 21 et 35 ans. Les personnes âgées de plus de 45 ans ne sont pas admises. Ce pays s'est rendu compte que les obligations en matière de pension et de soins de santé étaient trop lourdes. Il s'est rendu compte qu'à moins de posséder un système de soins de santé et un régime de pension comme ceux du Canada, l'immigration constituait un fardeau pour les Australiens. Ce serait un fardeau que des immigrants entrent facilement en Australie et bénéficient des programmes sociaux sans avoir apporté une contribution en ayant travaillé dans ce pays durant leurs années les mieux rémunérées. L'Australie a eu le courage d'agir. Cependant, une fois de plus, notre gouvernement a évité de s'attaquer à ces problèmes importants.

Mon parti et moi appuyons une politique d'immigration et de citoyenneté qui exige que les enfants nés au Canada aient la citoyenneté de leurs parents. Ainsi, les enfants nés au Canada et dont les parents sont des immigrants reçus obtiendraient la citoyenneté canadienne. Cependant, lorsque des personnes viennent ici en faisant courir un risque à leur enfant ou à elles-mêmes afin de mettre leur enfant au monde au Canada, celui-ci ne devrait pas recevoir la citoyenneté canadienne, car cette mesure incite des femmes à prendre ce genre de risque.

Pour l'article 34, le serment d'allégeance, on n'a pas fait beaucoup intervenir le public. D'une certaine manière, la ministre a préparé seule ce serment. Il n'y a eu aucun débat et les citoyens n'ont pas pris part à la création du nouveau serment d'allégeance. Cela aurait constitué une occasion idéale pour un débat patriotique sur la question auquel auraient pu participer tous les Canadiens, mais cela n'a pas eu lieu. La ministre a décidé de faire cela à huis clos et de formuler son propre serment d'allégeance. Nous aurons donc le serment d'allégeance que la ministre juge bon, plutôt que celui qu'aurait proposé le pays.

 

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Encore une fois, il y a tant de choses que le gouvernement aurait pu faire, mais qu'il n'a pas faites. Par exemple, pour ce qui est de la question des conjoints, le terme conjoint va être très large. La notion de conjoint ne se limitera donc plus seulement au mariage entre un homme et une femme, mais s'appliquera également aux unions de fait. Dieu sait que nous avons déjà des mariages blancs qui sont des impostures, mais imaginez ce qui se passera si nous laissons entrer chez nous des gens vivant simplement en union de fait.

Et cela ne s'arrête pas là. Il y a ces dispositions concernant les conjoints de même sexe. C'est ainsi qu'un citoyen canadien pourrait prendre un amant dans un pays dépourvu d'un régime d'assurance-maladie et de programmes de recherche sur le sida, et le faire entrer ici; comme ils seraient considérés comme des conjoints de même sexe, ils pourraient alors faire payer tous les frais médicaux par le régime canadien d'assurance-maladie. Où s'arrêtera donc le ridicule?

Je terminerai en résumant les points essentiels de mon intervention. Auparavant, le candidat à la citoyenneté l'obtenait après avoir vécu cinq ans dans notre pays. Cette exigence a maintenant été réduite à trois années de résidence au Canada au cours d'une période de six ans. Le projet de loi ne comporte absolument aucune disposition permettant de vérifier si le candidat à l'immigration a résidé réellement au Canada.

Par-dessus le marché, le gouvernement a mis cinq ans pour en arriver à la mesure à l'étude, qui n'est pas grand-chose par rapport à la mesure qu'il aurait pu nous proposer, et cette mesure a été concoctée à huis clos. Il a conservé toutes les dispositions qui permettent de pratiquer le favoritisme, et il continue de faire fi des recommandations qu'avait formulées le comité permanent de même que celles qu'avaient faites le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration et l'opposition officielle et qui recevraient l'appui de beaucoup de Canadiens.

En conclusion, j'aimerais pouvoir faire savoir à la Chambre qu'en conséquence de tout cela, et compte tenu de ce que le secrétaire parlementaire tentait de faire de ce projet de loi, ce dernier est d'avis, comme bon nombre d'autres personnes d'ailleurs, que le gouvernement ne devrait pas faire office de procureur. À l'heure actuelle, il y a des gens qui sont convoqués devant un genre de tribunal politique, soit le gouverneur en conseil, et qui se voient dépouillés de leur citoyenneté canadienne, malgré le fait qu'ils sont au pays depuis 20, 30 et parfois même 40 ans.

Nous voulons proposer l'amendement suivant, soit «Que la motion soit modifiée en supprimant tous les mots après «que» pour les remplacer par ce qui suit: Que le projet de loi C-16 Loi concernant la citoyenneté canadienne, ne soit pas lu maintenant pour la troisième fois, mais qu'il soit renvoyé au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration aux fins du réexamen des articles 16 et 17, en tenant compte du fait que le projet de loi C-16 perpétue le système actuel de révocation qui existe depuis 1920 et qui permet au gouverneur en conseil de révoquer la citoyenneté d'une personne en se basant sur un rapport du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, ainsi que des arguments avancés par certains groupes et certaines personnes tels le Congrès germano-canadien, B'nai B'rith Canada et l'ancien secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui soutiennent que la citoyenneté devrait être octroyée par un tribunal et que ces décisions ne devraient pas être laissées aux politiciens.»

Je crois qu'un sous-amendement devrait également être proposé. Cet amendement porte essentiellement sur le fait que le gouvernement peut faire office de procureur contre des personnes qui sont au pays depuis des décennies.

Nous voudrions bien régler ces questions rapidement, mais nous ne pouvons pas demander au cabinet de servir de juge et de dépouiller les gens de leur citoyenneté malgré le fait qu'ils sont au pays depuis 10, 20, 30 ou même 40 ans. Ce n'est pas juste pour eux ni pour leur famille.

 

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De toute évidence, madame la Présidente, vous pouvez entendre les sifflets en face. Les libéraux savent qu'ils ont poignardé leur secrétaire parlementaire dans le dos. Je suis certain qu'ils se sentent coupables, et à juste titre. Il s'est fait des choses assez ignobles ici aujourd'hui. J'espère qu'ils le prendront en considération et qu'ils en débattront mercredi à leur réunion de caucus afin de trouver un moyen de ne pas priver les gens.

J'aimerais demander le consentement unanime pour remplacer la motion du député de Waterloo—Wellington, dont la Chambre est saisie, par l'amendement suivant: «Que la motion soit modifiée en supprimant tous les mots après «que» pour les remplacer par ce qui suit: Que le projet de loi C-16, Loi concernant la citoyenneté canadienne, ne soit pas lu maintenant pour la troisième fois, mais qu'il soit renvoyé au Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration aux fins du réexamen des articles 16, 17 et 18, en tenant compte du fait que le projet de loi C-16 perpétue le système actuel de révocation qui existe depuis 1920 et qui permet au gouverneur en conseil de révoquer la citoyenneté d'une personne en se basant sur un rapport du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, ainsi que des arguments avancés par certains groupes et certaines personnes tels l'Alliance canadienne, le Congrès germano-canadien, B'nai B'rith Canada et l'ancien secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui soutiennent que la décision d'octroyer la citoyenneté ne devrait pas être laissée au Cabinet et que les personnes menacées de perdre leur citoyenneté par révocation devraient avoir accès à une procédure d'appel judiciaire complète.»

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Y a-t-il consentement unanime?

Des voix: D'accord.

Une voix: Non.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Madame la Présidente, à ce qu'il me semble, les groupes qui ont comparu devant le comité et qui ont abordé la question de la révocation de la citoyenneté ont tous déclaré qu'il devrait y avoir un droit d'en appeler de la décision du juge de la Section de première instance de la Cour fédérale. Selon le projet de loi, le juge de la Cour fédérale qui rend cette décision très importante n'a pas à en répondre devant un autre tribunal. Le projet de loi ne dit rient au sujet du contrôle judiciaire.

Je suis certain d'avoir entendu tous les témoins et d'avoir lu tous les mémoires. Tous les groupes qui se sont fait entendre ont dit qu'il devait y avoir un droit d'appel. Tel qu'il est rédigé, le projet de loi discrédite le processus judiciaire. Qu'en pense le député?

M. Rob Anders: Madame la Présidente, l'ancien secrétaire parlementaire a raison. Les groupes qui ont comparu devant le comité ont tous parlé des problèmes que soulève la révocation de la citoyenneté et reconnu qu'en permettant qu'elle relève d'une décision du Cabinet, elle soit entre les mains de politiciens. Ils ont dit ne pas accepter que des gens qui vivent au Canada depuis 20, 30 ou 40 ans puissent se faire révoquer la citoyenneté en l'absence de ce qu'ils considéraient un processus équitable.

Le secrétaire parlementaire a bien écouté tous ceux qui ont témoigné devant le comité. Je sais qu'il a risqué beaucoup en défendant les idées qu'il jugeait correctes dans ce cas. Il a écouté ce que lui disaient ses électeurs au sujet de ce dossier.

Un grand nombre de groupes ont comparu devant le comité. Des représentants de l'Alliance canadienne faisaient partie du comité permanent. Le député a perdu son poste de secrétaire parlementaire à cause de sa position dans ce dossier. Je suis certain que, comme ses électeurs, un grand nombre de citoyens de partout au Canada ont critiqué les dispositions sur la révocation de la citoyenneté du projet de loi C-16 qui, s'il est adopté tel quel, enlèverait injustement la citoyenneté à des gens qui vivent au Canada depuis 20, 30 ou 40 ans en l'absence d'un recours approprié.

 

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M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Il semble que le véritable débat sur le projet de loi ait lieu alors qu'il est maintenant trop tard pour y apporter des changements de fond, du moins à la Chambre des communes.

Je félicite le député pour son discours. Il a relevé des choses très importantes au sujet du projet de loi. Il a également parlé très brièvement du serment de citoyenneté, en signalant que la version modifiée contenue dans le projet de loi a été rédigée par la ministre elle-même ou par un de ses fonctionnaires. Le député a cependant commis une erreur. Il a dit qu'il n'y a pas eu de débat public au sujet de la formulation d'un nouveau serment de citoyenneté. Il s'est trompé.

Le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration a examiné le projet de loi sur la citoyenneté en 1993 et 1994. J'en faisais alors partie. Nous avons longuement entendu des citoyens amis également de nouveaux Canadiens qui ont tenu à nous dire à quel point ils s'estimaient heureux d'être venus au Canada et d'avoir acquis la citoyenneté canadienne. Ils ont également insisté sur l'importance d'une déclaration de citoyenneté qui reflète les valeurs propres aux Canadiens et au Canada, dans des termes plus éloquents que dans le serment de la citoyenneté actuel. Ils ont évoqué des valeurs comme la démocratie, la liberté de parole, l'égalité des chances et la primauté du droit, autant de choses qui n'existent pas dans leurs pays d'origine.

Malgré tous ces avis, nous nous retrouvons avec un projet de loi C-16 qui propose un serment révisé, dont aucun d'entre nous ne connaît l'auteur pas plus que l'origine.

Le député ne se sentirait-il pas gêné, et je sais que ce serait mon cas, de voir de nouveaux Canadiens prêter un nouveau serment de citoyenneté qui n'aurait fait l'objet d'aucun débat au Parlement? Le comité permanent n'a pas été saisi du contenu du serment de citoyenneté qui est actuellement à l'étude à la Chambre et qui sera obligatoire pour tous les néo-Canadiens.

Est-il concevable que dans notre pays on ait laissé une chose aussi importante et aussi sacrée que la formulation du serment de citoyenneté à un fonctionnaire anonyme, que l'on n'ait pas eu le courage d'en saisir la Chambre et de créer une version du serment de citoyenneté élaborée par la Chambre et par le pays, plutôt que par quelque contractuel anonyme?

M. Rob Anders: Madame la Présidente, tout comme le député d'en face qui vient de prendre la parole, j'estime qu'il est honteux que nous n'ayons pas pu discuter de ces questions plus à fond. Nous n'avons pas eu la possibilité de nous prononcer. Il n'y a pas eu de grand débat patriotique dans tout notre pays.

Je sais que le député s'intéresse de très près au serment de citoyenneté et qu'il a son opinion sur la question. Malheureusement, certains députés de son propre parti ont eu recours à des stratagèmes sournois pour limiter le débat sur la question et empêcher l'ancien secrétaire parlementaire de proposer des amendements pour essayer d'améliorer le projet de loi.

C'est un triste jour que celui où on nous empêche de tenir un vrai débat sur le serment de citoyenneté et la révocation de la citoyenneté. Un pays qui ne contrôle pas ses frontières et ne peut pas tenir un débat sérieux sur la question de savoir qui est citoyen, qui ne l'est pas et où le pays s'en va est promis à de graves difficultés. C'est une vraie honte si on laisse des questions comme celles-là entre les mains des bureaucrates sans tenir un vrai débat public.

Je signale de nouveau, au cas où je ne l'aurais pas déjà fait, que je partage mon temps de parole avec le député de Calgary-Centre.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Je crains que le député n'ait largement dépassé ses dix minutes. Il ne peut plus être question de partager son temps de parole. Nous en sommes maintenant à la période des questions et des observations, qui dure dix minutes, et huit minutes sont déjà passées. Il reste deux minutes pour les questions et les observations.

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je remarque, chez les gens d'en face, qu'on se préoccupe peut-être plus que nécessaire des manoeuvres internes inconvenantes des libéraux. Au lieu de demander ce que veulent les libéraux, demandons plutôt ce que veulent les Canadiens. Pourquoi pas un véritable mandat politique d'agir? Les paramètres de la citoyenneté sont les éléments par lesquels les Canadiens se définissent collectivement comme pays.

 

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On vient tout juste de demander quel genre de pays est le Canada. À bien des égards, c'est un pays dirigé par des libéraux dont le gouvernement adopte une attitude surannée.

Pour ce qui est de la citoyenneté, de l'immigration et de ce genre de choses en général, dans ma circonscription, la confiance à l'égard du système est bien mince. Les gens hochent la tête de droite à gauche, dégoûtés. Ils lancent les mains au ciel en se demandant ce qu'ils pourraient faire vu que nous avons ici un système bureaucratique coupé de la réalité, qui n'a aucune idée de leur conception du pays.

Nous cherchons aujourd'hui à rétablir une certaine confiance dans le système, à convaincre les gens que le système est bien géré. Lorsqu'un membre d'une collectivité affirme qu'il est un immigrant, il devrait commander immédiatement le respect parce qu'on sait qu'il a dû satisfaire aux exigences d'un système fiable fondé sur des crédits et des mérites. Un tel système suscite la confiance et non le contraire.

Je demande que l'on parle aujourd'hui des divers moyens positifs qu'on pourrait prendre pour corriger le système au lieu de défendre encore et toujours le statu quo.

M. Rob Anders: Madame la Présidente, je crois qu'on peut bien résumer la chose en disant qu'il n'y a pas de meilleur exemple pour illustrer à quel point le gouvernement libéral est déconnecté de la situation. Le gouvernement libéral ne permettra pas la tenue d'un débat sur le serment de citoyenneté. Il n'autorisera pas un débat sur la révocation de la citoyenneté. Il ne permettra pas à son propre secrétaire parlementaire, qui a sacrifié son poste dans l'intérêt de ses électeurs, d'aller de l'avant à cet égard.

Le gouvernement a tellement peur de soumettre la question à un débat public ou même à un examen par de sages députés de ses propres banquettes qu'il va tout laisser aux bureaucrates, camoufler l'affaire et espérer qu'elle disparaîtra tout simplement.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Madame la Présidente, permettez-moi de dire aux députés que le débat n'est pas terminé. Le débat ne fait que commencer. Le fait est que le gouvernement peut faire adopter le projet de loi et qu'il le fera probablement, mais le débat a été lancé dans tout le Canada par des groupes de Canadiens qui ont décidé d'être des citoyens canadiens.

Je m'entretiens avec ces gens-là de cette question. Je reçois déjà des plaintes de députés de ce côté-ci. Ils ne sont pas très contents. Nous avons lancé une pétition à l'intention de la Chambre des communes. Nous présenterons ici de très nombreuses pétitions. J'ai aussi un site Web au www.telegdi.org.

Nous aurons des élections au cours de la prochaine année. J'ai dit à tous mes collègues qu'avant de voter sur les modifications à l'étape du rapport, ils devraient songer à un proche qui n'est pas né au Canada.

Ils devraient se demander s'ils voudraient que cette personne bénéficie des voies de droit régulières en ce qui concerne le droit d'appel. Voudraient-ils qu'elle ait ce droit? Ne croient-ils pas que les tribunaux sont mieux placés que les politiciens pour en décider? J'ai dit à mes collègues qu'on leur posera ces questions. Peut-être finiront-ils par comprendre.

 

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J'ai reçu de nombreux appels de gens de tout le Canada. Je pense qu'il convient que je fasse inscrire au compte rendu ce que certains ont dit. Je vais commencer par la Commission des peuples autochtones de la Colombie-Britannique qui a écrit au premier ministre avec copie conforme aux membres du comité de la citoyenneté et de l'immigration. Elle dit:

    La Commission des peuples autochtones de la Colombie-Britannique a de graves réserves au sujet des dispositions portant sur la révocation de la citoyenneté dans le projet de loi C-16, Loi sur la citoyenneté.

    En tant que membres des nations de tout le pays dont les ancêtres ont participé à la création du Canada, nous avons le sentiment que notre acceptation transgénérationnelle des immigrants, le fait d'accueillir et d'aider des immigrants dans nos patries respectives, donne un poids particulier à nos délibérations et nos conclusions. Nous présentons donc en toute déférence la motion suivante qui a été adoptée à l'unanimité par l'exécutif de la Commission des peuples autochtones de la Colombie-Britannique lors de notre réunion du 25 mai 2000:

    «Que nous exhortons le Parlement à modifier la Loi sur la citoyenneté proposée pour garantir que les tribunaux, et non les politiciens, décideront de la révocation de la citoyenneté, et

    Qu'on prévoie, relativement à des cas existants et de nouveaux cas de révocation de la citoyenneté, des appels de toute décision de la Section de première instance de la Cour fédérale devant la Cour fédérale d'appel ou la Cour suprême du Canada sous réserve de l'autorisation de ces cours.»

    Que, en tant que descendants des premiers peuples de cette terre qui ont accueilli et aidé les ancêtres de la majorité des Canadiens et en tant que libéraux, nous prions pour que vous ameniez vos membres à réexaminer les dispositions du projet de loi C-16 avec le même esprit et le même espoir qui sont les fondements de notre pays.

Cette lettre est signée par Kim Recalma-Clutesi, président de la Commission des peuples autochtones de la Colombie-Britannique.

J'ai également reçu des instances de l'association libérale de Nanaïmo—Alberni défendant une position semblable. La lettre en question est signée par M. Joe Dodd, un Canadien par choix. J'ai également reçu des lettres de membres du Parti libéral dans l'Ouest qui disent qu'ils sont immigrants comme moi. Ils trouvent pour le moins effrayant de ne pas avoir le droit d'en appeler à la Cour suprême du Canada si on remet en question leur citoyenneté. Ils sont étonnés et déçus de voir que le gouvernement envisage de prendre une telle mesure. Cette décision va sans aucun doute venir hanter les libéraux au cours des prochaines élections.

Je reçois sans cesse des lettres à ce sujet. Je peux dire aux députés que cette question ne perdra pas de son importance à la suite de l'adoption de cette mesure législative, car nous entrons dans un nouveau millénaire avec des citoyens de seconde zone au Canada.

J'ai reçu de nombreux témoignages, mais notamment une lettre de gens qui ont été placés dans des camps de concentration et qui ont été déportés de leurs pays à un certain nombre de reprises. Les députés devraient penser au cas d'un Sikh hindou vivant au Pakistan. Beaucoup de ces gens ont été déportés vers l'Inde. Ils sont venus ici par la suite. Les députés devraient penser à toutes les personnes déplacées après la guerre. Ces personnes ont été expulsées d'autres pays et sont venues chez nous. Elles ont pris au sérieux leurs droits de citoyens.

Une partie de la famille de ma mère est passée de l'Allemagne à la Hongrie il y a quelque 500 ans. Mon père biologique est un Hongrois. Mon beau-père, qui nous a adoptés mon frère et moi, est né en mai 1919. Il est juif. Le jour de sa naissance, la Hongrie est passée à la Roumanie par suite du Traité de Versailles, ce qui l'a fait changer brusquement de citoyenneté. Pour un juif en Transylvanie, dans l'Europe occupée par les Nazis, survivre fut une horreur, mais il a survécu. Comme il était juif, il ne pouvait aller à l'université en Roumanie. Il est donc allé à l'Université de Paris, où il a obtenu un diplôme en architecture et en planification urbaine.

 

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Il a changé de nom. J'ai appris cela il y a quelques années seulement parce que je n'ai pas beaucoup de parents. J'ai reçu un message électronique du Texas dont l'auteur, qui portait le même nom de famille que moi, voulait savoir si nous étions parents. Je me suis donc empressé d'appeler mon père adoptif pour lui en parler. Il m'a raconté l'histoire. Il avait changé de nom afin de survivre dans l'Europe dominée par les Nazis.

Ma soeur, qui est à la tribune aujourd'hui, n'a su qu'à l'âge de 12 ans qu'elle avait du sang juif. Nous sommes venus de la Hongrie comme réfugiés. Nous sommes restés dans un camp de réfugiés pour juifs à cause de l'antisémitisme.

La famille du côté de ma mère a terriblement souffert sous l'occupation soviétique, tout comme mon père. Il est arrivé des choses horribles en Europe. Je tiens vraiment à que l'on traduise en justice tous ceux qui sont coupables de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité. C'est pourquoi je considère comme tout à fait inacceptable que l'on exclue plus de cinq millions de Canadiens du bénéfice de la Charte des droits et libertés ou de l'application régulière de la loi, en défendant une chose à laquelle ils tiennent beaucoup, leur citoyenneté. Il faut que cela change.

Les députés néo-démocrates me déçoivent. Le Nouveau Parti démocratique, son prédécesseur et les membres du Winnipeg Labour Council ont lutté pour mettre un terme aux expulsions massives de personnes qui n'étaient coupables de rien d'autre que d'avoir été en chômage pendant la crise ou d'avoir participé à un mouvement syndical. C'était le phénomène de la D. et E. On dénaturalisait d'abord la personne pour ensuite l'expulser. C'est le sort que nous avons réservé à des dizaines de milliers de Canadiens.

L'inauguration de la tombe du soldat inconnu hier est lourd de signification pour de nombreux immigrants canadiens. Je lisais la chronique de Mark Bonokoski l'autre jour. Il nous demandait d'imaginer qui cette personne pouvait bien être.

Je ne sais pas combien de députés savent qu'un bon nombre de nos soldats immigrants qui ont participé à la Première Guerre mondiale, qui sont revenus dans notre pays blessés et qui avaient alors besoin de soins hospitaliers ont été expulsés parce qu'ils avaient besoin d'assistance. Réfléchissons à cela. Ces soldats se sont battus pour notre pays lors de la Première Guerre mondiale. Bon nombre sont revenus dans notre pays blessés et ils ont alors été expulsés parce qu'ils avaient besoin d'aide et de soins hospitaliers. Il n'est pas étonnant que les associations d'anciens combattants s'emploient très activement à éliminer pareilles expulsions.

 

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J'ai parlé du sombre chapitre de notre histoire dans le domaine de l'immigration. Je recommande à tous mes collègues de lire le livre de Barbara Roberts qui s'intitule Whence They Came et qui traite des expulsions du Canada. Ce livre comprend une préface extraordinaire d'Irving Abella qui explique le contrôle exercé au sein du ministère de l'Immigration. Il fait mention d'un petit groupe de fonctionnaires qui ont tenté désespérément d'envoyer à l'étranger des gens dérangeants qui échappaient au contrôle du Parlement et des tribunaux.

Je partage les idées que mes collègues ont exprimées au sujet du projet de loi C-16. C'eût été un grand projet du millénaire que d'organiser des concours dans les collectivités et les écoles du pays en vue d'obtenir un serment que nous pourrions vraiment qualifier de canadien au lieu d'un serment concocté dans l'ombre par des bureaucrates et des conseillers.

Ce projet de loi est le fruit de la bureaucratie. Quand on s'y arrête, on constate qu'il vise à soutirer le contrôle. Comment? Les juges du Bureau de la citoyenneté que je connais ont accompli un travail fantastique. Je pense à M. Somerville, juge en exercice, et à Lorna van Mossel, une ancienne juge. Les juges accomplissent un travail fantastique, mais ils posent un problème à la bureaucratie. Ils sont indépendants, et la bureaucratie ne veut pas que l'on accorde trop d'indépendance aux juges.

Le gouvernement libéral s'est fait avoir lorsque nous sommes arrivés ici en 1993. Sergio Marchi, ministre de l'époque, a décidé de se débarrasser des juges du Bureau de la citoyenneté. Ce fut une grave erreur. Par qui le gouvernement a-t-il remplacé ces juges? Par des commissaires occupant un poste moins relevé qu'auparavant. J'ai dit qu'ils devraient sans doute être des magistrats afin de conférer plus de prestige au poste qu'ils occupent, mais ma suggestion a été rejetée. Cette situation était entièrement dominée par la bureaucratie, la même bureaucratie qui s'est opposée à la moindre justification utile devant le Parlement et les tribunaux.

Le projet de loi C-63 retirait non seulement la citoyenneté de la personne qui est arrivée au pays de façon frauduleuse, mais aussi celle des personnes à sa charge. Jugez ce qui se serait passé dans mon cas si ce projet de loi avait été adopté. Ma mère est décédée, de sorte que je ne sais pas ce que quelqu'un pourrait découvrir à son sujet. Supposons cependant qu'elle soit arrivée au pays de façon frauduleuse. J'ai 54 ans et je pourrais être déporté. Pensez-y. Ma femme et ma fille sont nées au Canada. Elles n'ont pas vraiment envie d'aller vivre en Hongrie, si ce pays m'acceptait, étant donné que je suis d'ascendance allemande. Pensez à l'incidence de cette mesure sur les familles. C'est un autre secteur où les bureaucrates ont cherché à étendre leur pouvoir.

En vertu de l'article 18, la citoyenneté d'une personne peut être annulée sans comparution devant un juge. C'est bidon et ce n'est pas correct. Les articles 16 et 17 sont une honte et, à mon avis, ils font tomber en discrédit notre sens de la justice au Canada.

 

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Je suis libéral et j'ai honte que mon parti, le parti qui a donné la Charte des droits et libertés au Canada, ne croie pas suffisamment en ceux qui sont devenus Canadiens par choix pour leur accorder la protection offerte par cette charte.

J'ai autrefois admiré le Parti progressiste conservateur, particulièrement à l'époque de Diefenbaker et de la Déclaration des droits. Je suis étonné de voir comment ce parti a voté sur la question. Je suis très déçu des néo-démocrates. J'ai moi-même souligné comment ils ont mené la bataille pour la justice sociale et j'ai été très déçu d'entendre le député de Winnipeg, porte-parole du NPD pour les questions d'immigration, prendre la parole contre le droit à des appels.

J'étais présent, au comité, lors de tous les témoignages et j'ai lu et relu les mémoires. Tous les témoins ont déclaré qu'il fallait accorder un droit d'appel parce que la citoyenneté canadienne est une chose assez importante pour que nous ne voulions pas nous en remettre à l'avis d'un seul juge qui n'est pas infaillible et qui n'a aucune imputabilité judiciaire. Nous ne voulons sûrement pas que la révocation de la citoyenneté continue de se faire dans la Chambre étoilée du Cabinet, où les gens ne sont pas des juges. Le premier ministre n'est pas un juge; il est avocat, pas juge.

Pensons-y. Les personnes qui demandent le statut de réfugié au Canada bénéficient de la protection offerte par la charte. Un visiteur étranger qui commet un crime grave au Canada a droit à l'application régulière de la loi jusqu'en Cour suprême. Cependant, ceux et celles qui décident de devenir Canadiens par choix n'ont pas cette protection. La nouvelle se répandra dans les rues de tout le Canada et bien des gens demanderont que cette loi archaïque et draconienne soit changée.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Madame la Présidente, le député de Waterloo—Wellington et moi-même sommes du même avis à cet égard, ma préoccupation étant que le serment de citoyenneté contenu dans le projet de loi C-16 manque essentiellement à l'obligation de décrire ce que c'est que d'être citoyen canadien. Par suite de suggestions présentées par des néo-Canadiens au comité permanent en 1993-1994, j'ai proposé que nous incluions dans un serment ou une déclaration de citoyenneté les cinq principes de la Charte des droits, dont le respect des droits fondamentaux de la personne.

Qu'est-ce que le député de Waterloo—Wellington et moi-même trouvons à redire au serment de citoyenneté contenu dans le projet de loi à l'étude? Ce serment nous dit simplement d'observer les lois du Canada et de remplir fidèlement nos devoirs de citoyens canadiens; il ne parle pas du respect des droits fondamentaux de la personne. Il me semble que nous sommes sur la même longueur d'onde parce que nous avons ici une situation, et cela ne s'applique pas seulement au gouvernement mais bien au Parlement, où nous ratons une occasion unique de dire qu'être citoyen canadien ne signifie pas seulement observer les lois, qu'il s'agisse du code de la route ou du Code criminel, mais bien respecter des principes fondamentaux, comme les droits fondamentaux de la personne. C'est le point qu'a soulevé le député de Waterloo—Wellington.

Mais nous ne disons pas cela. Nous disons que les Canadiens sont simplement des gens qui observent la loi. Je dirai au député de Waterloo—Wellington que le gouvernement a décidé que la loi sera comme ceci ou comme cela, qu'il n'y aura pas de processus d'appel. Avec le serment contenu dans le projet de loi C-16, on n'a qu'à être un bon citoyen canadien et à observer la loi, même si elle est mauvaise.

M. Andrew Telegdi: Madame la Présidente, je demanderais à mon collègue de ne pas me déshonorer en me désignant comme étant le député de Waterloo—Wellington. Je suis le député de Kitchener—Waterloo.

 

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Le député vient tout juste d'expliquer ce que devrait être en gros un projet de loi concernant la citoyenneté. Il a dit que nous étions dans un pays de droit. Le premier ministre se trouvait dans une des circonscriptions bordant la mienne, il y a une semaine et demie environ. Si je m'en tiens à ce que les journaux ont rapporté, il a dit qu'une composante essentielle de la vie d'une nation était de faire en sorte que les droits de citoyens soient protégés par nos tribunaux plutôt que d'être soumis aux caprices des élus. Le premier ministre a déclaré que, si quelqu'un était accusé d'une infraction quelconque, il ne devait pas être jugé par des politiciens, mais plutôt selon les voies de droit régulières.

Je puis dire à mon collègue qu'en effet pour bien des Canadiens, nouveaux ou nés ici, ce projet de loi pose problème et que le plus gros problème avec ce projet de loi, c'est le processus qui a mené à son élaboration. C'est le processus fermé qui est géré depuis des décennies par le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, qui vient tout juste de le restreindre encore davantage. Certaines dispositions du projet de loi facilitent la révocation de la citoyenneté. On a ajouté des dispositions au projet de loi afin d'ôter toute ingérence de la part de certains intervenants, y compris les juges de la citoyenneté.

Je voudrais raconter à mon collègue une anecdote au sujet d'un juge de la citoyenneté qui remonte à l'époque où, il y a plusieurs années de cela, je siégeais à un conseil municipal en ma qualité de président du centre multiculturel de ma collectivité. Nous voulions organiser une cérémonie de la citoyenneté à l'occasion de la Fête du Canada. Nous n'avons pas pu parce que l'événement aurait eu lieu un long week-end, alors que les bureaucrates du ministère ne voulaient pas pour tout l'or du monde écourter ce long week-end. La Fête du Canada devrait donner lieu à des cérémonies de citoyenneté dans tout le pays. Nous devrions dire aux nouveaux citoyens que leur citoyenneté nous tient à ce point à coeur que si quelqu'un tente de les en priver, ils sont protégés par la Charte canadienne des droits et libertés de même que par les tribunaux.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je n'ai pu m'empêcher de remarquer que le député a fait allusion au fait qu'il n'existait aucun rapport entre ce projet de loi et ce qui s'était passé en comité. Cela me rappelle les comités auxquels j'ai participé, le comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes sur la garde et le droit de visite des enfants, le comité chargé par le ministre des Finances d'examiner l'équité du système canadien d'imposition pour ce qui est des familles, et d'autres comités qui ont fait toute une série d'excellentes recommandations. Les députés à la Chambre parviennent à un consensus, on entend des témoins et on fait des recommandations. Or, aucune mesure n'est prise, par exemple dans le cas de la garde et du droit de visite des enfants, ou si des mesures sont prises, elles ne tiennent pas compte des recommandations du comité, par exemple dans le cas de l'équité du système d'imposition pour ce qui est des familles. C'est ce qui me semble être arrivé dans le cas qui nous préoccupe.

Je n'ai pas eu le privilège de faire partie du comité qui a examiné ce projet de loi, mais je suis membre de plusieurs autres comités. Quand je compare ce projet de loi à la brève version produite par le comité, il ne semble pas y avoir réellement de rapport entre les deux. Je me demande si le député pourrait nous dire quelles sont les différences entre ce projet de loi et ce qui s'est passé en comité et dans quelle mesure ce projet de loi reflète ce qu'ont dit les témoins qui ont comparu devant le comité.

M. Andrew Telegdi: Madame la Présidente, je regrette de le dire, mais dans bien des cas, les recommandations des témoins n'ont pas été incorporées. Le cas le plus frappant concerne le droit d'appel. Pas une personne n'a dit que l'on devrait maintenir le statu quo. Tous les témoins qui ont comparu devant nous voulaient qu'il y ait un droit d'appel car ils estimaient que cela augmentait l'importance de la citoyenneté aux yeux de gens comme moi et d'autres Canadiens par choix.

 

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M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Madame la Présidente, puisque je ne dispose que d'une minute, je ne vais pas poser de question au député de Kitchener—Waterloo. Je vais profiter de l'occasion pour féliciter mon collègue. Lui et moi sommes ce que l'on appelle des nouveaux venus dans ce pays. En plus d'avoir un passé similaire, d'être presque d'anciens voisins d'Europe, nous sommes maintenant voisins dans la région de Waterloo. J'aimerais le féliciter pour sa prise de position courageuse, pour ses principes et ses croyances. Ça a été pour moi un honneur de travailler en étroite collaboration avec lui sur cette question très importante pour nous deux, ainsi que pour plus de 5 millions de Canadiens.

En même temps, je suis déçu que l'un de nos collègues, que j'appellerais le livreur, ait adopté une telle position et ait parlé de la sorte à la Chambre, alors qu'il n'a aucune idée de ce que cela signifie d'être un nouveau Canadien et d'obtenir la citoyenneté canadienne.

J'aimerais remercier mon collègue encore une fois.

M. Andrew Telegdi: Madame la Présidente, mon collègue et moi partageons de nombreuses opinions sur la question. J'assiste souvent aux cérémonies aux bureaux de la citoyenneté. Maintenant que j'ai compris où veut en venir ce projet de loi, je le fais moins souvent maintenant, car je ne veux pas dire aux gens qu'ils sont maintenant des citoyens de troisième zone et que, dans cinq ans et pour le reste de leur vie, ils seront des citoyens de seconde zone.

Toutefois, lorsque je me rendais dans les bureaux de la citoyenneté et que je voyais des gens de Bosnie-Herzégovine qui venaient demander leur citoyenneté—il y avait des Croates, des Serbes et des Musulmans—ce que je leur disais, c'était d'amener le meilleur d'eux-mêmes, mais de laisser leurs différends vieux de plusieurs siècles parce que le Canada a besoin du meilleur qu'ils ont à apporter, mais il n'a que faire de leurs conflits.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je remercie le député d'en face pour ses observations. Il a dénoncé avec verve et éloquence les lacunes du projet de loi. Mais il aurait pu aller encore plus loin au vu des conséquences que l'initiative est susceptible d'entraîner si la bureaucratie et des personnes détenant le pouvoir décidaient de l'appliquer de façon inappropriée.

Le projet de loi C-16 abroge et remplace la Loi sur la citoyenneté adoptée en 1977. Le texte apporte plusieurs changements à la loi actuellement en vigueur, notamment des lignes de conduite plus clairement définies, des dispositions actualisées, et une nouvelle structure administrative pour remplacer les procédures courantes, et il renforce le pouvoir conféré au ministre de refuser la citoyenneté. C'est de cela dont il a été question dans le discours précédent.

Le projet de loi C-16 est réputé être: ...la première grande réforme entreprise depuis 20 ans au titre de la citoyenneté, une tentative visant à moderniser la loi en l'amenant à mieux refléter la valeur réelle de la citoyenneté canadienne.

Toutefois, bien que certaines dispositions du projet de loi à l'étude soient plus précises que ce que prévoit la loi en vigueur, il demeure que celui-ci n'apporte pas la grande réforme dont le gouvernement se targue. Des secteurs critiques ont été négligés alors que d'autres ont été modifiés de façon négative.

La ministre a été saisie des recommandations formulées en 1994 par le Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, dont la majorité des membres étaient des ministériels. Le gouvernement a mis plus de cinq ans à élaborer ce projet de loi qui, comme l'a fait observer l'intervenant qui m'a précédé, ne donne toujours pas suite aux recommandations principales de ce comité. Il a fallu cinq ans au gouvernement pour présenter ce projet de loi qui ne tient pourtant pas compte des recommandations du comité. C'est déplorable.

 

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Le projet de loi C-16 comporte un certain nombre de dispositions intéressantes. Je voudrais tout d'abord m'attarder sur l'article 8, qui porte sur l'adoption à l'extérieur du Canada.

Le projet de loi C-16 fait en sorte d'atténuer la différence entre un enfant étranger adopté par un Canadien et un enfant né au Canada. Actuellement, un enfant étranger adopté par un Canadien doit d'abord entrer au Canada en tant que résident permanent avant que la citoyenneté ne lui soit accordée. En vertu de la nouvelle loi, il sera plus facile pour des parents qui ont adopté un enfant à l'extérieur du Canada d'obtenir la citoyenneté canadienne pour cet enfant. Cette disposition revêt un intérêt particulier pour moi, car on a récemment débattu d'un projet de loi d'initiative parlementaire que j'avais présenté concernant l'adoption tant au pays qu'à l'étranger.

Selon mon projet de loi C-289, les dépenses liées à l'adoption d'un enfant peuvent être déduites du revenu jusqu'à concurrence de 7 000 $. L'adoption est une bonne option que l'on sous-estime et à laquelle on n'a pas suffisamment recours. Les couples qui adoptent à l'étranger font face à d'énormes dépenses. Mon projet de loi aiderait ces couples qui offrent généreusement un milieu familial attentionné à des enfants qui ont besoin de parents. J'espère que tous les députés appuieront cette mesure législative. Je crois que nous devrions encourager les couples qui souhaitent adopter. En fait, bien des Canadiens figurent sur une liste d'attente pour adopter un enfant. Ils dépensent des sommes considérables pour adopter et prendre soin d'un enfant dans le besoin. Pourtant, nous ne leur offrons aucune aide. Ils assument tous les frais. Nous devrions reconnaître l'incroyable contribution sociale que ces couples sont prêts à apporter et leur faciliter la tâche, au lieu de compliquer les choses.

Je veux maintenant consacrer un peu de temps à l'article 43 du projet de loi C-16. Cet article est à mon avis celui qui est le plus irrévérencieux envers le Parlement et les Canadiens. Il donnerait en quelque sorte à la ministre le pouvoir de définir ce que constitue la famille selon son bon vouloir. Aux termes de cet article, le projet de loi C-16 accorde des pouvoirs à la ministre sans prévoir de directives ou de mesures de surveillance particulières. Il permet fondamentalement à la ministre de décider qui peut faire une demande au nom d'un mineur. C'est la ministre elle-même qui décide qui peut faire une demande au nom d'un mineur.

Deuxièmement, le projet de loi permet à la ministre de définir ce qui constitue la filiation aux fins de détermination du droit à la citoyenneté pour l'application de la présente loi. Ce sont là les termes exacts de la loi.

Pourquoi alors la ministre devrait-elle se mêler de définir ce qui constitue la filiation? Devons-nous croire que le Parlement ne peut pas ou ne devrait pas établir ces précisions, aux fins de clarté, de cohérence ou tout simplement de bon sens?

Peut-être qu'au lieu de demander au Parlement de définir ce qui devrait être évident, ce que devraient être les liens entre un parent et un enfant dans la loi, la ministre croit savoir mieux et pouvoir décider unilatéralement si une personne doit être considérée comme un père, une mère, un fils ou une fille. Cela n'a aucun sens. Le gouvernement doit mettre au point des mesures législatives claires. Le Parlement doit voir à ce que les mesures législatives soient bien structurées et qu'elles résistent à l'épreuve du temps de sorte qu'elles puissent servir de guide à ceux qui devront mettre en vigueur les mesures adoptées par cette Chambre.

Le gouvernement insulte la Chambre en proposant une mesure législative aussi confuse qui ne pourra vraisemblablement pas être appliquée de façon uniforme. La ministre décide un jour de se baser sur la famille, et le lendemain, c'est autre chose. Il n'y a aucune directive claire. Cela est laissé entièrement à la discrétion des fonctionnaires au sein du cabinet du ministre. C'est inacceptable. Il faut supprimer ces dispositions du projet de loi.

Quant au pouvoir de définir ce qui constitue un véritable lien de filiation, voici ce que le député de Scarborough-Est, un libéral, disait le 13 mai 1999 au cours d'une séance du comité: «Il est assez inhabituel qu'un règlement permette la définition d'une notion, et c'est là que dans plusieurs cas nous devons procéder non pas par la voie réglementaire, mais par la voie législative. Je pense que [ces] dispositions sont irrecevables [et] qu'en fait il n'est pas de la compétence du gouverneur en conseil, ni de celle du ministre ou de ses collaborateurs, de définir ce qui constitue un conjoint ou de définir ce qui constitue un lien de filiation.»

 

. 1340 + -

Il a ajouté:

    Je pense que ces aspects vont au-delà des pouvoirs d'un ministre, sûrement au-delà des pouvoirs de ses collaborateurs, au-delà des pouvoirs d'un gouverneur en conseil, et indiquent clairement une volonté de la part du gouvernement de renvoyer ces questions à des instances qui ne devraient pas en être saisies.

Le député libéral parlait d'une disposition du projet de loi qui laissait à désirer et dont je m'inquiète moi aussi. Il ajoutait: «Plusieurs personnes qui se sont exprimées sur cette question estimaient que le Parlement avait la prérogative de définir ces notions.» Je serais d'accord avec lui.

Il a ajoutait plus loin: «À mon avis, la seule solution acceptable consiste à supprimer ces dispositions afin que le ministère, le ministre et le gouverneur en conseil soient liés par les définitions qui existent à l'heure actuelle en droit et dans la loi. Il ne faut pas autoriser le ministre ou le gouverneur en conseil ou les hauts fonctionnaires à élargir la définition de conjoint ou de parent ou enfant au-delà de ce qui est prévu à l'heure actuelle par la loi.»

C'étaient de sages paroles. Il ne faut pas laisser ce soin à d'autres. Pourtant, que se passe-t-il? On laisse entièrement entre les mains des bureaucrates et du cabinet de la ministre le soin de déterminer ce qui constitue une relation familiale.

Nous pouvons, avec raison, nous opposer à la délégation de pouvoirs aussi énormes à la seule ministre. Nous pouvons songer à d'autres problèmes qui ont fortement ébranlé les Canadiens. Il y a, par exemple, le cafouillis de 1 milliard de dollars au ministère du Développement des ressources humaines, ce qui a fait amplement comprendre aux Canadiens pourquoi nous ne devrions pas tout simplement avoir une confiance aveugle dans quelque ministre que ce soit.

Dans ce dossier, nous avons constaté une incompétence d'une ampleur monumentale. Des fonds publics ont été accordés sans qu'aucune demande n'ait été présentée, et 80 p. 100 des dossiers ne renfermaient aucune preuve de contrôle financier. Les deux tiers des dossiers ne donnaient même pas les motifs justifiant le financement de projets. Des fonds ont été consacrés à des choses comme des fontaines dans la circonscription du premier ministre, et j'en passe.

Après l'éclatement du scandale et le tollé public devant l'incompétence du ministère et de sa ministère lorsqu'il s'est agi de réparer le gâchis, le premier ministre a fermé les yeux, et cette ministre siège toujours au Cabinet. Aucun changement n'a été fait.

En 1991, lorsque le premier ministre siégeait dans l'opposition, il a dit: «Lorsqu'il y a un problème, les ministériels doivent accepter leurs responsabilités et ne pas rejeter le blâme sur qui que ce soit. C'est ce qu'une personne honorable fait.»

Je suis d'accord avec lui, mais ce n'est pas ce qui s'est passé dans ce cas-là, et je me demande si cela pourrait se passer avec ce projet de loi.

Permettez-moi de dire que le projet de loi C-16 comporte de nombreux aspects que nous ne pouvons pas appuyer et qui nous préoccupent. J'ai déjà signalé rapidement que le projet de loi s'en remet trop largement à des règlements dont nous n'avons pas vu le texte. Les règlements qui fixeront les modalités d'application de la loi ont été rédigés par des bureaucrates sans que la Chambre ni le public puissent dire leur mot. Ces règlements ont des conséquences pour la vie des gens, comme des députés d'en face l'ont fait valoir avec éloquence.

Mes électeurs m'ont fait part de leurs inquiétudes au sujet de ce projet de loi et de ses graves répercussions sur leur vie personnelle. Ils trouvent très déconcertant, pour des raisons bien légitimes, de constater que leur citoyenneté, que le pays auquel ils sont attachés et qui leur donne leur identité leur sont enlevés. Pour tout cela, nous nous remettons à des rédacteurs de règlements, sans que les représentants du peuple à la Chambre des communes puissent exercer la moindre surveillance.

Comme je l'ai dit, le projet de loi C-16 laisse un pouvoir discrétionnaire trop important au gouvernement, qui n'aura pas à rendre compte de la façon dont il l'exerce. Même le secrétaire parlementaire libéral s'est élevé contre les articles 16 et 17 qui portent sur la révocation de la citoyenneté. La version initiale du projet de loi ne donne pas à ceux qui ont obtenu la citoyenneté canadienne le plein accès au système judiciaire si leur droit à la citoyenneté est remis en question.

Du jour au lendemain, ce droit peut être contesté, et un Canadien peut se retrouver privé de sa citoyenneté canadienne. Et alors, il n'a pas accès à tous les recours judiciaires, il ne peut interjeter appel et il n'a pas droit à l'application régulière de la loi pour tirer la question au clair. Même si une erreur a été commise, il est privé de ces recours.

 

. 1345 + -

Ce projet de loi est très déconcertant pour beaucoup d'entre nous à la Chambre. Bien que les représentants du ministère aient maintenu que cette disposition n'était pas préoccupante, la question a suscité une vive inquiétude parmi les membres du comité et chez la vaste majorité des témoins, et ce, sans qu'il en soit tenu compte.

Nous, à l'Alliance canadienne, nous sommes d'avis qu'une fois que la citoyenneté a été octroyée, on doit pouvoir prendre pour acquis que c'est pour de bon. Révoquer la citoyenneté n'est pas une chose à prendre à la légère et ne doit se faire que sous l'étroite et complète surveillance d une procédure judiciaire équitable.

Le député libéral de Kitchener—Waterloo a très clairement exprimé son opinion pendant les travaux du comité permanent, pendant le débat à l'étape du rapport à la Chambre, et tout dernièrement, par la voie des médias. Il a même démissionné de son poste de secrétaire parlementaire de la ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration tant il est ulcéré par le refus de son propre parti de tenir compte de ses recommandations. Qui est à la barre là-bas? La ministre et les députés, qui ont été élus, ou les bureaucrates? Je pense que cette approche à l'égard du projet de loi indique aux Canadiens qui est réellement à la barre.

Le député de Kitchener—Waterloo est convaincu que le pouvoir de révoquer la citoyenneté ne devrait pas être laissé entre les mains du gouverneur en conseil, contrairement à ce que prévoit le projet de loi. L'Alliance canadienne est d'accord avec lui. Nous le félicitons d'avoir pris ainsi position. Cela va plus loin que l'esprit de parti. Il est question ici de ce qui est bon pour les Canadiens.

Que le Cabinet libéral n'écoute pas l'un de ses députés de l'arrière-ban n'a rien de nouveau. Nous avons vu cela à plusieurs reprises à la Chambre. Si le Cabinet écoutait les simples députés libéraux, je me demande si la possession de matériel de pornographie juvénile serait encore légale en Colombie-Britannique. Il y aura bientôt un an et demi que les tribunaux de cette province ont annulé l'article du Code criminel interdisant la possession de matériel de pornographie juvénile.

Je me souviens qu'après une première prise de position, qui était tout à leur honneur, 79 députés et sénateurs libéraux avaient écrit au premier ministre pour l'exhorter à «ne pas attendre que l'appel du jugement survenu en Colombie-Britannique soit entendu, mais à se porter immédiatement à la défense des enfants du Canada et à envisager d'avoir recours à la disposition dérogatoire pour indiquer clairement aux Canadiens que plus jamais on ne pourrait se servir de la Charte canadienne des droits et libertés pour défendre l'exploitation sexuelle des enfants canadiens».

De simples députés libéraux ont signé le document en question. Nous étions ravis, mais qu'est-ce que cela a donné? Un peu comme pour le projet de loi C-16, c'est l'indifférence totale.

En proposant une motion d'initiative parlementaire pour protéger les Canadiens les plus vulnérables, nous, les députés de l'opposition officielle, avons donné au gouvernement une chance d'agir et de faire exactement ce que les 79 simples députés libéraux avaient demandé au premier ministre. Nous avons proposé cette motion.

Les simples députés ont malheureusement cédé à la pression du bureau du premier ministre qui, à ce que je devine, leur a promis qu'un appel du gouvernement fédéral réglerait toute la question en deux mois, de sorte que la situation serait rétablie. Combien de temps s'est écoulé depuis? Un an et demi et nous n'avons toujours pas reçu une décision concernant ce problème. Les habitants de la Colombie-Britannique qui possèdent du matériel de pornographie juvénile actuellement ne feront face à aucune peine. Cela a des répercussions partout au Canada.

En terminant sur ce point, ces 79 simples députés libéraux ont voté contre notre motion qui aurait mis en oeuvre exactement ce qu'ils demandaient dans leur lettre. Malheureusement, ils n'ont donc pas été fidèles à leur position.

Pour revenir à la révocation de la citoyenneté, le porte-parole de l'Alliance canadienne en matière de citoyenneté et d'immigration a présenté, au comité, un amendement qui aurait modifié cet article. Nous avons entendu ici certains commentaires des députés d'en face, mais lorsque le porte-parole en question a présenté cet amendement qui aurait comblé certaines lacunes quant à la révocation de la citoyenneté, les libéraux ont voté contre. Les changements que bien des témoins souhaitaient, et que bien des députés d'en face souhaitaient aussi, n'ont donc pas été apportés. Quelques éléments du projet de loi présentent un potentiel certain et pourraient éventuellement être avantageux pour le Canada, mais les lacunes sont si nombreuses que l'Alliance canadienne ne peut appuyer cette mesure législative dans sa forme actuelle.

 

. 1350 + -

Certains députés d'en face, s'ils sont fidèles aux convictions qu'ils ont exprimées aujourd'hui, se joindront sans doute à nous pour voter contre ce projet de loi. Il comporte des défauts qui pourraient certainement causer de vrais problèmes par rapport à la citoyenneté.

Notre parti, le parti que je suis fier de représenter, ne peut pas laisser passer cela sans rien faire. Ces problèmes vont se manifester. Nous espérons qu'un nombre suffisant de députés d'en face, qui subiront personnellement les conséquences de ce projet de loi en tant que Canadiens d'adoption, le contesteront pour eux-mêmes sinon pour leurs électeurs et d'autres personnes dans le même cas.

La citoyenneté canadienne est un atout dont beaucoup voudraient bénéficier. J'ai eu fréquemment l'honneur d'assister à des audiences de citoyenneté dans ma circonscription. Il transpire une telle joie de ces cérémonies. C'est l'extase pour des gens du monde entier. Les parents comme les enfants affichent un sourire radieux.

Ils viennent d'un autre pays avec leur histoire et leur vécu à eux. Or, ils mettent tout cela de côté pour faire du Canada leur pays. Ils prennent des cours de civisme et se soumettent à un examen. Ils sont prêts à dire qu'ils sont Canadiens. À la fin de chaque cérémonie, à Calgary, tout le monde dit en choeur qu'il est Canadien, le sourire fendu jusqu'aux oreilles. C'est très important pour les gens.

Si j'ai présenté ma candidature comme député, c'est en partie à cause de l'importance que j'accorde à la citoyenneté canadienne et à l'amour que je porte au Canada. C'est effectivement un honneur pour moi de participer au débat sur ce projet de loi en cette enceinte spéciale. Le sujet est important. J'espère que nous aurons la sagesse collective de tenir compte de ce qui a été dit ici aujourd'hui et de nos préoccupations lorsque le projet de loi C-16 sera mis aux voix.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Madame la Présidente, je voudrais poser une autre question au député en ce qui concerne la connaissance d'une langue officielle.

Le projet de loi C-16 stipule essentiellement que tout le monde doit avoir une connaissance suffisante d'une des deux langues officielles. Je trouve vraiment étrange que, tout en stipulant que tout le monde doit avoir une connaissance suffisante d'une des deux langues officielles, le projet de loi prévoit le recours aux services d'un interprète, au besoin, dans le cadre du processus d'examen.

Si quelqu'un a besoin d'un interprète pour comprendre les questions qui lui sont posées au sujet du Canada et pour y répondre, que ce soit en anglais ou en français, du simple fait, dis-je, qu'on lui accorde un interprète, aux frais du contribuable canadien, ou tout simplement qu'il y ait droit, j'en conclus que la personne qui a besoin d'un interprète, que ce soit en anglais ou en français, n'a tout simplement pas une connaissance suffisante de l'une des langues officielles.

Les Australiens ont réglé la question en posant les quatre exigences suivantes que doivent satisfaire tout immigrant: savoir lire la langue officielle, savoir écrire la langue officielle, parler la langue officielle et être capable de comprendre la langue officielle. Si quelqu'un peut lire, écrire, parler et comprendre, il n'a que faire d'un interprète. Or, ce projet de loi prévoit le recours aux services d'un interprète. À quoi peut servir un interprète si on a une connaissance suffisante de l'une des langues officielles?

 

. 1355 + -

M. Eric Lowther: Madame la Présidente, le député de Calgary-Ouest voulait savoir comment on peut concilier la présence d'un interprète et la connaissance suffisante des langues officielles. Ce n'est là qu'une des nombreuses questions qui viennent à l'esprit.

Le projet de loi dit tout simplement que le requérant doit avoir une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada. Il omet de préciser, et c'est une lacune, comment la connaissance de l'une des langues officielles est évaluée, qui fait l'évaluation et en vertu de quels critères.

Mon collègue, le député de Calgary-Ouest, a posé une question astucieuse. À quoi tout cela rime-t-il? Il n'y a pas de critères. Tout est laissé à la discrétion d'un fonctionnaire, du responsable du moment ou de l'interprète. Une personne pourrait venir au Canada, obtenir la citoyenneté canadienne sans pouvoir parler, écrire, comprendre ou lire un seul mot de français ou d'anglais. C'est un problème. Le projet de loi doit être beaucoup plus précis. Ses rédacteurs ont raté leur objectif, et de loin.

M. Werner Schmidt (Kelowna, Alliance canadienne): Madame la Présidente, j'ai été impressionné par le discours de mon collègue, qui vient tout juste de prendre la parole et par le discours de l'ancien secrétaire parlementaire qui a pris la parole avant lui. Ces messieurs ont dépeint en termes éloquents certaines lacunes du projet de loi.

Le député de Calgary-Centre peut-il nous dire de façon précise ce que signifie pour lui être citoyen canadien? La définition de la citoyenneté est-elle quelque chose de suffisamment arbitraire pour qu'on puisse la laisser à des juges? Faut-il laisser au pouvoir politique le soin de décider, de façon arbitraire, selon son bon vouloir et son habilité, qui est ou n'est pas citoyen canadien, et cela indépendamment de ce que peut en penser le Parlement du Canada? Le projet de loi permet-il cette forme d'intervention presque arbitraire...

La Présidente: J'invite le député de Calgary-Centre à répondre brièvement à la question, s'il le peut. Ou peut-être préfère-t-il prendre le temps de réfléchir à sa réponse, auquel cas il pourra attendre après la période des questions orales pour répondre. Il restera encore six minutes. Que choisit de faire le député?

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, je préférerais répondre après la période des questions orales.

La Présidente: Il en sera donc ainsi.



DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Français]

LE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD

M. Guy St-Julien (Abitibi—Baie-James—Nunavik, Lib.): Monsieur le Président, la population de l'Abitibi, de la Baie James et du Nunavik a appris avec tristesse le départ de l'idole des amateurs de hockey, Maurice Richard.

Le Canada vient de perdre un homme qui a marqué l'histoire de son sport et qui nous a tous inspirés par sa personnalité attachante et sa générosité.

Merci, Maurice.

*  *  *

[Traduction]

MAURICE «ROCKET» RICHARD

M. Hec Clouthier (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Lib.): Monsieur le Président, le hockey est la chaîne qui tient le Canada uni. Aujourd'hui, nous avons perdu un maillon qui unissait tous les amateurs de hockey. Maurice «Rocket» Richard était aimé et respecté par tous les Canadiens. Il était un héros, un symbole de tout ce qui est grand et bon dans ce sport spectaculaire. Son chandail no 9 a profondément marqué la conscience collective canadienne.

Enfant, j'ai grandi dans une famille qui était folle des Canadiens de Montréal et où Richard s'imposait comme un modèle. Lorsqu'il touchait la rondelle, ses yeux lançaient le fameux regard du Rocket. Il a été le premier joueur de l'histoire à marquer 50 buts en 50 parties. Son record de six buts en surtemps au cours de séries éliminatoires n'a pas encore été battu.

La plupart des Canadiens n'étaient même pas encore nés lorsque Richard jouait. Il a pris sa retraite après la saison de 1960, mais non sans avoir remporté une autre coupe Stanley. Il y a 40 ans que le regretté Maurice «Rocket» Richard a cessé d'éblouir les foules par ses prouesses, mais son souvenir a marqué des générations. Sa légende ne mourra jamais.

*  *  *

LE SOLDAT INCONNU

M. Peter Goldring (Edmonton-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président,

Lorsque nous nous aventurons
Sur la voie du souvenir,
Nous savons que des moments pénibles
Peuvent assombrir le voyage.

L'expédition visant à ramener au Canada
Un Soldat inconnu mort à Vimy, en France,
A été un effort remarquable de la part du président Chuck Murphy
Et de la Légion royale canadienne.

Chuck devait voir la réalisation de son rêve du millénaire.
Il devait ramener en sol canadien un Soldat inconnu
Et lui trouver un lieu final pour son dernier repos, puis, il est lui-même mort.

Aujourd'hui, nous nous souvenons de deux soldats:
un inconnu, qui représente tous ceux qui sont morts à la guerre,
Et celui qui l'a ramené au Canada,
Chuck Murphy,

Président de la direction nationale de la Légion royale canadienne,
Époux d'Alice,
Père, grand-père et ami.

Au coucher du soleil,
et à son lever, nous nous souviendrons de lui.

*  *  *

 

. 1400 + -

[Français]

LE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD

Mme Raymonde Folco (Laval-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec un très grand regret que nous avons tous pris connaissance du décès de Maurice «Rocket» Richard. Il laisse ainsi dans le deuil les membres de sa famille, ses amis, ses admiratrices et admirateurs.

Cet homme, qui a endossé le chandail du Canadien de Montréal pendant de nombreuses années, a été un symbole et une inspiration pour bon nombre d'entre nous. Pendant toute sa carrière, il s'est donné au hockey corps et âme. Il a laissé une marque ineffaçable et fut l'inspiration de nombreuses générations de Canadiens.

Pendant 18 ans, le «Rocket» a soulevé les passions en réalisant des exploits hors du commun, tout en incarnant par son jeu et son courage les aspirations des Canadiens français.

Ses grandes qualités, en plus de son talent exceptionnel, ont fait de lui un homme qui occupera une page importante de notre histoire nationale.

*  *  *

[Traduction]

L'APPROVISIONNEMENT EN EAU DE WALKERTON

M. Ovid L. Jackson (Bruce—Grey, Lib.): Monsieur le Président, je sais que je parle au nom de plusieurs autres en exprimant mes sincères condoléances à la population de Walkerton. Au cours des derniers jours, cette petite localité a beaucoup souffert à cause de la bactérie E. coli dans son système d'approvisionnement en eau.

Cette tragédie a fait les manchettes d'un bout à l'autre du pays et a fait ressortir ce qu'il y a de meilleur au sein de la population de toute la région. Durant cette période difficile, la collectivité s'est résolument attaquée à la crise, montrant à la fois sa force et son courage. Les localités environnantes, des professionnels de la santé et des habitants de la région y vont d'inestimables contributions en eau, en ressources, en temps et en soutien. Ils méritent nos remerciements les plus sincères.

J'ai parlé au maire de la localité. Il m'a demandé de remercier de leur soutien tous mes collègues de tous les coins du pays ainsi que le premier ministre. Je prie pour ceux qui ont perdu des proches à cause de la bactérie E. coli. J'espère que la population de Walkerton surmontera cette tragédie. Je lui souhaite d'avoir de la force et de se rétablir rapidement.

*  *  *

LE SOLDAT INCONNU

M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le Canada a enterré un soldat à Ottawa hier. Nous ne savons pas son nom, ni où il est né, ni dans quelles circonstances il a péri au combat. Toutefois, nous savons qu'il était jeune et qu'il est mort en se battant pour nous. C'est pour cela que nous rendons hommage au soldat inconnu.

Hier, ils étaient des milliers à garder un silence solennel pendant qu'une charrette à canon tirée par des chevaux transportait le cercueil drapé de l'unifolié jusqu'à son dernier repos au pied du monument commémoratif. Le cercueil a ensuite été recouvert de terre provenant de la tombe en France ainsi que de terre provenant de toutes les provinces et de tous les territoires.

Ce jeune homme s'est battu à des milliers de milles de chez lui pour défendre la liberté, laquelle nous tenons parfois pour acquise. Aujourd'hui encore, des dizaines de milliers de soldats gisent en terre sans que l'on sache leur nom. Bien que ne sachant pas leur nom, nous nous souviendrons toujours d'eux dans nos coeurs pour ce qu'ils ont fait et pour ce qui les a poussés à le faire.

C'est le brigadier-général M. C. Farwell, aumônier général des Forces canadiennes, qui a su le dire le mieux dans sa prière: «Mon Dieu, vous le connaissez. Vous savez comment il s'appelle. Et vous le garderez près de vous pour l'éternité.»

*  *  *

LE SOLDAT INCONNU

M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le Président, hier, le Canada a inhumé la dépouille du Soldat canadien inconnu dans une tombe spéciale située à côté du Monument commémoratif de guerre du Canada. La dépouille de ce soldat qui a reposé pendant plus de 80 ans dans le cimetière Cabernet Rouge, dans le nord de la France, a finalement été rapatriée la semaine dernière après une cérémonie officielle sur la crête de Vimy.

J'ai eu l'honneur et le privilège de faire partie de la délégation officielle qui s'est rendue en France la semaine dernière et qui comprenait le ministre des Anciens combattants, des représentants d'organisations d'anciens combattants, quelques parlementaires et des membres des Forces armées canadiennes. C'est une expérience que je ne suis pas prêt d'oublier.

Je voudrais rendre hommage à tous ceux qui ont fait en sorte que la tombe du soldat inconnu devienne une réalité. Je voudrais honorer tout particulièrement M. Chuck Murphy, ex-président de la Légion royale canadienne, qui est malheureusement décédé jeudi dernier, quelques heures à peine après son retour de France. Nous adressons à sa famille et à ses amis nos plus sincères condoléances.

*  *  *

 

. 1405 + -

[Français]

LE SOLDAT INCONNU

M. Jean-Guy Chrétien (Frontenac—Mégantic, BQ): Monsieur le Président, depuis hier, près d'ici, repose un soldat, rapatrié dans sa terre natale après plus de 80 ans. Canadien ou Québécois, gradé ou simple soldat, nul ne connaîtra jamais ni son âge, ni le lieu où il est né.

Nous lui rendons hommage parce que c'est un homme qui a donné sa vie pour la liberté. Par son anonymat, il représente les dizaines de milliers de ses compatriotes qui, comme lui, soldats, aviateurs ou marins, sont tombés pour cette liberté au cours des deux grandes guerres, en Corée et aussi lors de missions de paix.

Cette présence parmi nous rappelle que la liberté a été payée par d'innombrables souffrances, par la perte de milliers de vies, par les larmes de ceux et celles qui n'ont pas vu revenir un être cher.

N'oublions jamais ces vers de Victor Hugo qui sont toujours d'actualité:

Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie
Ont droit qu'à leur tombeau la foule vienne et prie

*  *  *

LE JUGE JULES DESCHÊNES

M. Ted McWhinney (Vancouver Quadra, Lib.): Monsieur le Président, Jules Deschênes, décédé le 10 mai dernier, était un juriste des plus distingués.

Il a été nommé juge à la Cour d'appel du Québec en 1972, juge en chef de la Cour supérieure de 1973 à 1983 et, ensuite, juge du tribunal spécial des Nations Unies sur les crimes de guerre en Yougoslavie. Mais c'est surtout pour ses jugements dans le domaine constitutionnel qu'il passera à la postérité.

En 1976, il a maintenu la constitutionnalité de la Loi 22 du gouvernement Bourassa établissant le français comme langue officielle du Québec; en 1978, il a invalidé une section de la Loi 101 du gouvernement Lévesque, afin d'affirmer l'égalité du français et de l'anglais à l'Assemblée nationale et devant les cours du Québec; et, en 1982, il a invalidé une autre section de la Loi 101 limitant l'accès à l'éducation en anglais.

En somme, en vrai fédéraliste, le juge Deschênes comprenait l'importance...

Le Président: L'honorable député de Red Deer a la parole.

*  *  *

[Traduction]

LES SOINS DE SANTÉ

M. Bob Mills (Red Deer, Alliance canadienne): Monsieur le Président, après avoir passé la dernière semaine dans ma circonscription, je prends aujourd'hui la parole à la Chambre pour exprimer l'inquiétude que mes électeurs et moi éprouvons par rapport à notre régime de soins de santé en péril.

Les Canadiens d'un océan à l'autre s'inquiètent, à juste titre d'ailleurs, de leur régime de soins de santé. À ce jour, la réponse du gouvernement a été franchement insultante.

Le budget qui a octroyé sur quatre ans 2,5 milliards de dollars pour les soins de santé et l'éducation est une insulte. Un comité de la santé qui ne s'occupe pas des problèmes de santé que les Canadiens estiment importants est une insulte. Un ministre de la Santé qui parle beaucoup, mais ne fait rien est une insulte. Un gouvernement fédéral qui choisit de dresser les provinces les unes contre les autres et qui refuse de coopérer avec elles est une insulte.

Le Canada occupe le cinquième rang pour ce qui est des dépenses engagées et il se classe dans le dernier tiers des pays de l'OCDE au chapitre des soins de santé. Des agriculteurs, des enseignants, des travailleurs industriels et des professionnels s'inquiètent de nos soins de santé. Ils ont bien raison.

Un gouvernement incapable de régler ce problème de plus en plus important est une insulte pour les Canadiens.

*  *  *

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE

M. John Cannis (Scarborough-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais souhaiter la bienvenue au président de la République hellénique au Canada et dans notre capitale, Ottawa.

C'est la première fois depuis 1982 qu'un président de la République hellénique vient en visite au Canada et je voudrais encore une fois, au nom de tous mes collègues à la Chambre, lui souhaiter la bienvenue tandis que 350 000 Canadiens grecs célèbrent sa venue dans notre pays.

Cette visite est très importante. Le président de la République hellénique a été la première personnalité étrangère à s'être rendue sur la tombe du Soldat inconnu l'autre jour. Je le félicite.

*  *  *

LE STATUT DE LA FEMME

Mme Michelle Dockrill (Bras d'Or—Cape Breton, NPD): Monsieur le Président, je voudrais aujourd'hui féliciter Terry Brown, la nouvelle présidente élue du Comité canadien d'action sur le statut de la femme.

Mme Brown est la première femme autochtone à occuper ce poste. Au nom du Nouveau parti démocratique, je la félicite.

Les femmes continuent à devoir se battre pour l'accès aux soins de santé, pour les garderies et pour l'assurance-emploi. Ce sont des questions qui touchent tous les Canadiens mais qui bien souvent touchent encore plus les femmes.

Malheureusement pour elles, le gouvernement a simplement ces questions, comme il a ignoré le problème de la violence contre les femmes et les questions d'égalité.

Le NPD estime qu'il s'agit là de questions essentielles et prioritaires pour les femmes canadiennes. Quand le gouvernement libéral va-t-il faire passer ces questions en priorité?

*  *  *

 

. 1410 + -

[Français]

L'OCÉANIC DE RIMOUSKI

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, c'est avec fierté et un très grand plaisir que je récidive à la Chambre pour souligner l'éclatante et convaincante victoire des joueurs de l'Océanic de Rimouski, représentants de la Ligue de hockey junior majeur du Québec.

Hier, à Halifax, ils se sont mérité la Coupe Memorial, une consécration que leur justesse de jeu et leur discipline permettaient d'ancitiper.

Je les félicite chaleureusement et souligne, par la même occasion, le doigté de leurs entraîneurs et le support peu commun que la population leur a témoigné.

Bravo aux joueurs de l'Océanic. Leurs très nombreux fans, dont je suis, sont ravis, et à bon droit.

*  *  *

[Traduction]

LA DÉCENNIE DES OS ET DES ARTICULATIONS

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, le mois de janvier 2000 a marqué le début de la décennie des os et des articulations. Le secrétaire général des Nations Unies a lancé cette décennie en collaboration avec l'Organisation mondiale de la santé et différentes organisations nationales et internationales oeuvrant pour les personnes souffrant de maladies squeletto-musculaires.

Quelque 21 pays ont officiellement fait leur cette décennie, mais le Canada n'est pas du nombre. Fort heureusement, cependant, notre pays a mis en place un réseau national d'action regroupant 18 organismes qui se consacrent à la promotion de cette initiative, dont la Société d'arthrite du Canada et les Instituts canadiens de recherche en santé qui y sont favorables et qui y prennent part.

Je voudrais profiter de l'occasion pour attirer l'attention sur cette initiative internationale et remercier toutes les organisations canadiennes qui y participent.

*  *  *

LE PRÉSIDENT DE LA RÉPUBLIQUE HELLÉNIQUE

Mme Eleni Bakopanos (Ahuntsic, Lib.): Monsieur le Président, plus de 300 000 Canadiens d'origine grecque s'associent à moi pour souhaiter la bienvenue parmi nous à Son Excellence le Président de la Grèce, en visite officielle au Canada.

[Note de la rédaction: La députée s'exprime en grec.]

[Traduction]

C'est la première fois depuis 1982 qu'un chef d'État de la République hellénique rend visite au Canada à l'invitation du gouvernement canadien. Le Canada et la Grèce ont toujours entretenu des relations amicales basées sur le partage de valeurs fondées sur les principes de la démocratie et le respect des droits de l'homme et du droit international.

L'un des moments plus exaltants de ma carrière politique remonte à l'époque où j'ai reçu, en compagnie de deux collègues d'origine grecque, la croix d'or de l'Ordre du Phoenix, en récompense de notre contribution à la promotion de liens plus étroits entre notre pays d'origine, la Grèce, et le Canada qui, grâce à notre premier ministre, m'a accordé le privilège de siéger dans cette Chambre.

Je tiens à remercier à la fois l'ambassadeur de la Grèce auprès du Canada, qui a proposé ma candidature à cet honneur, et le président de la République hellénique, un grand chef d'État, éminemment respecté dans son pays et à l'étranger, pour avoir distingué de la sorte la fille de deux immigrants grecs qui ont choisi pour seconde patrie ce que j'estime être l'un des meilleurs pays au monde.

[Note de la rédaction: La députée s'exprime en grec.]

*  *  *

[Traduction]

L'ARMÉNIE

M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le Président, l'Arménie est aujourd'hui un pays fier et indépendant qui décide lui-même de son avenir sur la scène internationale. Malheureusement, l'Arménie n'a pas toujours bénéficié d'une telle liberté ni d'une telle indépendance.

Après 600 ans d'oppression, l'Arménie a d'abord obtenu son indépendance de l'Empire ottoman, le 28 mai 1918. Tragiquement, sa liberté fut de courte durée, car la prise du pouvoir par les communistes, le 2 décembre 1920, allait mener à 70 ans de tyrannie aux mains des dirigeants soviétiques.

Considérée comme un tournant important de l'histoire arménienne, l'indépendance de 1918, quoique brève, a libéré l'Arménie du joug turc ottoman et est le fondement du nouvel État arménien qui a retrouvé son indépendance le 21 septembre 1990.

Je voudrais souhaiter avec tous les députés un heureux anniversaire à l'Arménie.

*  *  *

[Français]

LE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD

M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le Président, j'aimerais profiter de l'occasion pour rendre hommage à un très grand joueur de hockey, un Canadien et un Québécois.

[Traduction]

Au Canada, il y a un sport
Dont un homme a marqué le sort.

Ailier droit, le numéro 9 portant,
De l'après-guerre il fut le plus grand.

Avec son frère que les fans appelaient le «Pocket»,
Lui que tout le monde surnommait le «Rocket»

Jouait toujours avec fierté et passion,
Déterminé et les yeux comme des tisons,

Intouchable de la ligne bleue jusqu'aux buts.
Tous criaient «Maurice» s'il marquait un but.

La LNH ne comptait que six équipes dans ce temps-là.
Aux générations futures sa légende dira

Comme il savait patiner et toujours persévérer
Pour que ses chers «Canadiens» aient la Coupe Stanley.

À Montréal, au Québec, les fans seront nombreux,
Pour lui rendre hommage, à faire la queue

Pour nombre d'entre nous, Richard était le meilleur;
Qu'il repose en paix dans le sein du Seigneur.

*  *  *

[Français]

LE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD

M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, Maurice Richard est un sportif talentueux qui a soulevé les amateurs de hockey pendant des années. Il vient de nous quitter.

 

. 1415 + -

Il était non seulement un leader dans son équipe, il était aussi un homme qui a inspiré tout un sport. Il a été un symbole pour tout un peuple. C'est un homme d'une force herculéenne qui est entré dans la légende de son vivant.

Avec le départ de Maurice Richard, c'est un peu de nous tous qui disparaît. C'est une page de notre histoire dont on vient de terminer l'écriture. C'est une tragédie pour nous tous. C'est tout le Québec qui vit un deuil cruel. C'est un géant qui vient de mourir, mais il continuera encore longtemps de nous inspirer par sa grande force de caractère, par son talent exceptionnel et par sa détermination à toute épreuve.

Au nom de mes collègues du Bloc québécois, je voudrais présenter toutes mes condoléances à sa famille, à ses amis et au peuple du Québec.



QUESTIONS ORALES

[Traduction]

DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans la base de données de la ministre du Développement des ressources humaines, qui reflète un État omniprésent, on a recueilli des renseignements extrêmement privés sur les Canadiens. Ces renseignements touchent la situation familiale, les antécédents professionnels, l'assistance sociale, les dossiers d'immigration et j'en passe, monsieur le Président. La ministre sait tout sur les citoyens.

Aujourd'hui, après le tollé soulevé dans tout le pays tant parmi l'opposition que chez les Canadiens en général, la ministre a enfin changé d'avis et annoncé qu'elle va démanteler sa base de données.

Pourquoi faut-il que les Canadiens la harcèlent constamment pour que la ministre prenne les mesures qui s'imposent?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, plus tôt aujourd'hui, j'ai annoncé le démantèlement du Fichier longitudinal sur la main-d'oeuvre. Ma décision survient moins de deux semaines après le dépôt par le Commissaire à la protection de la vie privée de son dernier rapport sur ce fichier. À l'époque, j'ai déclaré que je voulais collaborer avec lui pour répondre à nos préoccupations communes. J'annonce aujourd'hui le résultat de cette collaboration très étroite et je note qu'il souscrit parfaitement à notre projet.

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je dirai que cela vient du fait que le gouvernement s'est fait prendre. Jour après jour, à la Chambre, la ministre a garanti aux Canadiens que cette énorme base de données ne posait aucun problème. Elle a déclaré qu'elle était tout à fait légitime, qu'elle était codée. Or, maintenant, à la suite d'un énorme tollé, la ministre a décidé d'éliminer tout ce fichier et elle s'en attribue le mérite.

Pourquoi cette base de données, qui était essentielle la semaine dernière, pose-t-elle un danger pour la sécurité cette semaine?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, là encore, l'opposition ne fait que susciter de fausses craintes. Rappelons-nous ce que le Commissaire à la protection de la vie privée a déclaré la semaine dernière. Il a précisé que toutes les lois avaient été respectées. Il a ajouté qu'on avait respecté la confidentialité des renseignements personnels, mais il s'est dit préoccupé pour l'avenir. À cause de l'évolution de la technologie et du fait des progrès rapides réalisés, je m'inquiète également de cette situation et c'est pourquoi nous avons jugé prudent de démanteler le Fichier longitudinal sur la main-d'oeuvre.

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je ne pense pas que quiconque croie cela. En fait, je ne pense pas que les gens aient confiance en la ministre.

Dans son communiqué de presse, on dit que son ministère a retourné à l'Agence des douanes et du revenu du Canada l'information qu'elle lui avait envoyée et que cette agence gérera toute l'information à l'avenir. Cependant, on ajoute «Tout éventuel appariement avec les données de DRHC devant être justifié cas par cas».

On peut donc se demander dans quel cas on pourrait recréer cette énorme base de données.

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, voyons ce que le Commissaire à la protection de la vie privée a dit. Dans une lettre qu'il a envoyée à la sous-ministre le 27 mai, il a déclaré: «Nous approuvons et appuyons ces mesures. Elles répondent bien à l'ensemble des recommandations et des observations formulées dans mon Rapport annuel pour 1999-2000.»

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les Canadiens étaient outrés, avec raison, lorsqu'ils ont appris l'existence de cette base de données du type «Big Brother» montée par le gouvernement. Au cours de la dernière semaine, à cause du manque de confiance à l'égard de la ministre du Développement des ressources humaines, plus de 30 000 Canadiens ont écrit pour demander de voir leur propre dossier personnel, qu'ils ont le droit légal de voir.

Le démantèlement de la base de données de la ministre a-t-il un effet sur ces 30 000 demandes présentées par des Canadiens pour voir les renseignements qui les concernent personnellement?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous répondrons aux Canadiens qui ont demandé ces renseignements. La base de données a été démantelée, mais nous verrons à obtenir ces renseignements auprès des diverses sources afin que les Canadiens qui le désirent puissent les avoir.

 

. 1420 + -

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministère du Développement des ressources humaines a admis la semaine dernière qu'il n'avait aucun moyen de vérifier si les 30 000 demandes de renseignements étaient légitimes. Comment la ministre fera-t-elle pour s'assurer que ces renseignements personnels très délicats au sujet de chaque Canadien ne tombent pas entre de mauvaises mains?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, c'est là une question très importante. Nous travaillons avec le commissaire à la protection de la vie privée pour élaborer un processus qui nous permettra d'envoyer ces renseignements aux Canadiens en étant certains que chaque individu reçoit uniquement les renseignements qui le concernent.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, encore la semaine dernière, le gouvernement défendait avec conviction son mégafichier en nous expliquant qu'il était essentiel pour la gestion des dossiers gouvernementaux qu'un tel fichier existe.

Le premier ministre lui-même avait écarté l'idée de démanteler ce fichier. Or, aujourd'hui, contre toute attente, le fichier n'est plus.

Que s'est-il passé entre la semaine dernière et la décision d'aujourd'hui pour expliquer cette volte-face du gouvernement?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, à l'instar du commissaire à la protection de la vie privée, nous comprenons l'importance de disposer de renseignements exacts afin de pouvoir élaborer et mettre en oeuvre une bonne politique publique. Comme le commissaire, nous comprenons que la protection de la vie privée des Canadiens doit être notre préoccupation première. Ensemble, nous avons examiné l'avenir de cette banque de données et nous avons constaté qu'elle allait bientôt atteindre ses limites. Plutôt que d'y ajouter d'autres renseignements, il a été jugé plus prudent de diviser l'information qu'elle contient et de mettre en place un protocole pour pouvoir maintenir l'accès à l'information selon les besoins conformément à ce qui a été déterminé et examiné, notamment par le commissaire, afin non seulement de continuer à gérer efficacement les dossiers, mais aussi à assurer la protection des renseignements.

[Français]

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, en d'autres mots, ce que la ministre dit, c'est que depuis deux ans, quand les demandes étaient faites confidentiellement, cela n'avait pas d'importance. Dans la mesure où cela a été rendu public, là, c'est devenu très important. On comprend mieux.

Est-ce qu'à l'avenir, la ministre s'engage, avant de ramasser toute information sur tout citoyen, de demander auparavant la permission de tout citoyen avant d'utiliser quelque information que ce soit sur tout citoyen, comme on le fait d'ailleurs sur le formulaire d'impôt afin d'utiliser notre nom pour les fins de la liste électorale? Que la permission soit demandée avant d'agir.

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, il ne fait aucun doute que des renseignements exacts font partie intégrante d'une bonne politique publique. C'est ce que nous croyons et c'est ce que croit aussi le commissaire à la protection de la vie privée et les Canadiens.

En vue d'assurer la transparence, nous veillerons, de concert avec le commissaire, à déterminer la meilleure façon de faire en sorte que les Canadiens soient à l'aise avec les renseignements qu'ils fournissent et avec l'utilisation de l'information.

[Français]

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, le ministre du Revenu et le leader du gouvernement invoquaient le paragaraphe 241(3) pour justifier qu'ils ne pouvaient transmettre les données fiscales de CINAR à la GRC.

Avec ce qu'on vient d'apprendre concernant le lien direct qui existait entre Revenu Canada et DRHC, comment le ministre du Revenu et le leader du gouvernement ont-ils pu, à plusieurs reprises en cette Chambre, nous faire de grands discours sur la confidentialité des dossiers fiscaux, alors qu'on apprend aujourd'hui que c'était tout à fait le contraire?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, j'ai affirmé et j'ai répété à plusieurs reprises dans cette Chambre qu'aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu, une des pierres angulaires, un des principes fondamentaux que le gouvernement défendra toujours, c'est l'élément de confidentialité.

J'ai aussi exprimé à plusieurs reprises que lorsqu'il y avait partage, non pas de l'ensemble de l'information concernant un contribuable, mais lorsqu'il y a partage d'informations spécifiques, c'est aux termes de la Loi de l'impôt sur le revenu, plus particulièrement l'article 241.

J'aimerais simplement rappeler à l'opposition que lorsque nous avons déposé aujourd'hui le fameux communiqué de presse, il y a une citation du commissaire à la protection de la vie privée qui dit qu'effectivement, il n'y a jamais eu de manquement à la confidentialité dans le passé.

Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Mitis, BQ): Monsieur le Président, pendant que la GRC se plaignait de ne pouvoir poursuivre son enquête sur CINAR par manque de collaboration de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, on apprend que, pour les simples citoyens, les renseignements passaient directement de Revenu Canada à DRHC.

Comment le ministre peut-il défendre le fait que de simples citoyens soient fichés, alors que des entreprises qui fraudent seraient, elles, protégées?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, la question de l'opposition m'apparaît assez aberrante au moment où on se parle.

D'un côté, il y a un échange d'informations concernant l'élément de confidentialité lorsque la Loi de l'impôt sur le revenu le permet, plus particulièrement l'article 241.

 

. 1425 + -

J'ai dit que ce gouvernement va protéger le principe de la confidentialité tant et aussi longtemps que le Parti libéral formera le gouvernement.

Il m'apparaît aberrant de voir que l'opposition, alors que ma collègue est en train d'offrir un excellent service à la population et d'augmenter la confidentialité, voudrait qu'on partage l'information et qu'on la diffuse sur la place publique. Il n'en est pas question. Nous allons protéger pour longtemps la confidentialité des contribuables.

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député de Winnipeg-Centre a la parole.

*  *  *

[Traduction]

LE CODE CRIMINEL

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, tous les Canadiens ont été saisis d'horreur lorsque 26 mineurs ont perdu la vie à l'occasion de la catastrophe de la mine Westray. Ils ont été encore plus estomaqués d'apprendre qu'en dépit de preuves écrasantes établissant qu'il y avait eu négligence grave, les procureurs de la Couronne ont dû laisser tomber toute accusation car ils ne pouvaient étayer ces dernières en vertu du Code criminel du Canada. Les dirigeants de la mine Westray ont tué impunément. En réalité, ils ont commis impunément 26 meurtres.

La ministre de la Justice donnera-t-elle à cette Chambre du Parlement l'assurance qu'elle modifiera le Code criminel du Canada afin que le meurtre de travailleurs dans l'exercice de leur emploi constitue une infraction pénale?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, le député fait probablement allusion à la recommandation 73 de la Commission d'enquête sur l'accident de la mine Westray. Je peux donner l'assurance au député que le Comité permanent de la justice et des droits de la personne se penche sur la recommandation 73. J'attends avec impatience de recevoir son rapport.

M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, le comité de la justice ne s'occupe pas de la recommandation 73 ni la motion no 79 qui a été adoptée dans cette Chambre. Trois ans se sont écoulés depuis que le juge Richard de la Commission d'enquête sur l'accident de la mine Westray a fait des recommandations visant à modifier le Code criminel afin que les hauts dirigeants soient tenus personnellement responsables dans les cas de négligence grave entraînant la mort. Pendant cette période de trois ans, le gouvernement n'a absolument rien fait.

Le comité de la justice n'est pas saisi de la question. Nous doutons que le comité de la justice aborde cette question pendant la présente législature, à moins que la ministre de la Justice intervienne.

La ministre interviendra-t-elle au cours de la présente session de la législature en cours en vue de faire des recommandations visant à modifier le Code criminel dans le sens de la recommandation 73?

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je donne au député l'assurance que le comité de la justice a l'obligation d'examiner la recommandation 73. Je suis impatiente d'obtenir son rapport.

Quant à l'affirmation selon laquelle mon ministère ne fait rien, permettez-moi de donner au député l'assurance que les fonctionnaires et les ministres des administrations fédérale, provinciale et territoriale ont discuté de cette question. Nous attendons les résultats de l'examen du Comité permanent de la justice et des droits de la personne. Lorsque nous les obtiendrons, nous aurons je l'espère entendu toutes les parties pertinentes et, au besoin, nous irons de l'avant.

*  *  *

LE CRIME ORGANISÉ

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, lorsque le gouvernement libéral a démantelé les services de la police portuaire en 1997, de nombreuses enquêtes concernant la criminalité organisée ont été abandonnées et des dossiers ont été détruits. D'anciens agents de la police portuaire faisaient enquête au sujet de présumés liens entre les Hell's Angels et les autorités portuaires de Vancouver et de Halifax. Les preuves risquent maintenant d'être perdues.

Il est consternant qu'on ait mis fin à ces enquêtes, et cela nous rappelle le cas de l'opération Sidewinder, où les autorités avaient mis fin à l'enquête sans explication.

Le ministre va-t-il dire aux Canadiens pourquoi ces enquêtes en cours n'ont pas été confiées à d'autres services de police? Pourquoi ces dossiers ont-ils disparu ou ont-ils été détruits?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme je l'ai déjà dit à de nombreuses reprises à la Chambre, le gouvernement n'a pas de priorité plus importante en matière d'application de la loi que la lutte contre la criminalité organisée. C'est d'ailleurs dans ce but précis qu'il a affecté un montant supplémentaire de 59 millions de dollars à la GRC.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, je crois que le solliciteur général se trompe de priorité. Je croyais que la sécurité publique était sa priorité absolue.

Le démantèlement de la police portuaire et le sous-financement persistant des organismes d'application de la loi au Canada font mentir le prétendu engagement du ministre à l'égard de la sécurité publique. Malgré les assurances vides que donne le ministre, nous savons que les agents débordés de la GRC et du SCRS se disputent déjà des ressources insuffisantes et qu'il vont en plus devoir se charger de la lutte contre les activités illégales dans les six grands ports canadiens.

Le ministre va-t-il admettre que depuis sa nomination à son poste, il y a sept ans, les ports du Canada sont devenus une porte ouverte à la criminalité organisée? Le ministre peut-il nous dire ce qu'il fait pour remédier à cette situation?

L'hon. Lawrence MacAulay (solliciteur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, je puis vous dire qu'il y a une chose que nous ne ferons pas, c'est d'accumuler un déficit comme l'a fait le gouvernement précédent et nous retrouver sans argent pour les autres secteurs d'activité.

Sous la gouverne du premier ministre, nous avons réussi à affecter 810 millions de dollars supplémentaires au ministère du Solliciteur général, afin de pouvoir lutter contre la criminalité organisée au Canada. Si nous faisions comme le veut le député, nous n'aurions plus d'argent pour intervenir ailleurs.

*  *  *

 

. 1430 + -

LE DÉVELOPPEMENT DES RESSOURCES HUMAINES

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les responsables du ministère ont affirmé que le Commissaire à la protection de la vie privée surveillerait le démantèlement de la base de données de l'État. C'est une étape très importante, surtout si l'on tient compte du fait que l'existence même de cette base a été cachée au Commissaire à la protection de la vie privée pendant des années.

Les Canadiens ont le droit de savoir quels seront les pouvoirs conférés au Commissaire pour lui permettre de s'assurer que le dernier plan d'action mis au point par DRHC soit réellement mis en oeuvre.

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord préciser que l'existence de cette base de données n'a jamais été tenue secrète. En fait, cela faisait partie des renseignements contenus dans InfoSource qui sont accessibles à tous les Canadiens et auxquels le Commissaire à la protection de la vie privée a fait référence à cet égard.

Voyons un peu ce qu'il a dit. J'aimerais de nouveau citer ses paroles.

    Je tiens à souligner l'esprit dans lequel nos discussions se sont déroulées et votre détermination manifeste à améliorer la supervision et la gestion de vos systèmes d'information de sorte que les Canadiens et les Canadiennes puissent jouir pleinement de leurs droits à la protection de la vie privée. Je suis persuadé que la population accueillera favorablement ces mesures.

M. Reed Elley (Nanaïmo—Cowichan, Alliance canadienne): Monsieur le Président, personne n'était au courant. Dans son communiqué de presse, la ministre a affirmé qu'il y aurait une nouvelle structure pour les activités de recherches stratégiques en matière de programmes sociaux et de main-d'oeuvre qui s'inspirerait des pratiques en vigueur à Statistique Canada et exigerait la participation de représentants de cet organisme.

Compte tenu de son bilan catastrophique en matière de collecte de données, pourquoi le ministère du Développement des ressources humaines ne se retire-t-il tout simplement pas des activités de recherches stratégiques et ne laisse-t-il pas les experts de Statistique Canada s'en charger?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le député est encore une fois dans l'erreur. Je reprends les paroles du Commissaire à la protection de la vie privée qui a souligné que le fichier sous sa forme actuelle respectait les lois canadiennes et qu'il n'y avait pas eu violation de renseignements.

En prévision de l'avenir, nous avons convenu avec le Commissaire à la protection de la vie privée qu'il serait plus prudent de démanteler ce fichier et de mettre sur pied une nouvelle structure qui nous permettrait d'avoir accès à ces renseignements d'une façon plus appropriée tout en respectant la prépondérance de la vie privée des Canadiens et des renseignements qui les concernent.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, la ministre du Développement des ressources humaines affirmait récemment à la Chambre que la GRC et le Service canadien du renseignement de sécurité n'avaient pas directement accès au mégafichier de son ministère.

La ministre peut-elle nous dire si oui ou non la GRC et le Service canadien du renseignement de sécurité ont eu accès directement ou indirectement au mégafichier de Développement des ressources humaines Canada?

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, nous n'avons eu aucune demande de la GRC ou du SCRS pour accéder à ce fichier. Comme je l'ai déjà dit, et le député a raison, ils n'ont pas eu directement accès à ce fichier.

[Français]

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, est-ce que la ministre va reconnaître que le spectacle auquel on assiste aujourd'hui s'apparente de plus en plus à ce qu'on peut appeler une belle opération de camouflage?

Tant que ce n'est pas connu, ce n'est pas vu et pas pris et il n'y a pas de problème. Mais dès que c'est rendu public, le gouvernement d'en face fait tout pour camoufler son inaction et la façon dont il a traité le mégafichier.

[Traduction]

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je répète encore une fois que, à ce jour, le dossier a été géré de façon adéquate et que le commissaire à la protection de la vie privée a félicité le ministère d'avoir veillé à ce qu'il n'y ait aucune fuite.

Comme le souhaite le commissaire à la protection de la vie privée, nous regardons vers l'avenir. Nous reconnaissons que la technologie évolue et change rapidement. Nous sommes conscients des préoccupations qu'ont les Canadiens au sujet de l'information et nous évaluons les possibilités qu'ont d'autres d'obtenir ces renseignements.

Ce que nous voulons, c'est nous assurer d'adopter une voie prudente. C'est pourquoi nous avons aboli ce programme. C'est pourquoi nous avons rendu les dossiers à l'agence canadienne des douanes et du revenu. C'est pourquoi nous allons...

Le Président: Le député de Medicine Hat a la parole.

*  *  *

L'AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, devinez qui vient dîner? C'est l'Agence des douanes et du revenu du Canada.

L'ADRC voulait que les compagnies aériennes réunissent des renseignements d'ordre privé sur leurs clients, comme par exemple leur revenu et le nom de leur agent de voyage. Elle voulait même savoir ce que les voyageurs avaient pour le dîner. Dieu merci, le commissaire à la protection de la vie privée a fait savoir à l'Agence qu'elle exagérait.

Comment l'Agence des douanes et du revenu peut-elle justifier le fait de proposer un plan qui constitue une intrusion aussi évidente dans la vie privée des gens?

 

. 1435 + -

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, le député se trompe encore une fois, et il doit avoir rêvé ce qu'il affirme dans sa question.

Je remercie le député d'avoir posé sa question, car je suis heureux de signaler que le gouvernement a décidé de mettre en oeuvre un gigantesque plan de modernisation du service des douanes au cours des cinq prochaines années.

Nous investirons environ 100 millions de dollars pour veiller à ce que notre pays soit plus sûr et pour faciliter les voyages d'affaires chez nos voisins du Sud et ailleurs dans le monde. Cela facilitera les choses dans le contexte du marché mondial. Je suis heureux de signaler qu'au terme de ce processus, nous pourrons effectuer une bien meilleure évaluation du risque et assurer une sécurité accrue à tous les Canadiens.

M. Monte Solberg (Medicine Hat, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je me demande pourquoi cette réponse ne me réconforte pas du tout. Il y a quelque chose de fondamentalement choquant dans le fait que le gouvernement veut savoir ce que nous avons eu pour le dîner hier soir. Voilà à quoi le gouvernement veut en venir.

Le simple bon sens devrait faire comprendre que ce genre de renseignement devrait demeurer confidentiel. Pourquoi faut-il une intervention du commissaire à la protection de la vie privée pour obliger le gouvernement à renoncer à sa tentative d'espionner ses propres citoyens?

L'hon. Martin Cauchon (ministre du Revenu national et secrétaire d'État (Agence de développement économique du Canada pour les régions du Québec), Lib.): Monsieur le Président, les renseignements que les compagnies aériennes nous fourniront correspondent essentiellement aux questions que nous poserons aux voyageurs quand ils se présenteront au bureau de douane.

En conclusion, si le député dînait plus souvent avec le ministre du Revenu national, il saurait que sa question est prématurée.

*  *  *

[Français]

LE RETRAIT PRÉVENTIF

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, les syndicats consultés, des hauts fonctionnaires de Santé Canada et de Développement des ressources humaines Canada, des professeurs d'universités du Québec et du Canada ont signé un document demandant à tous les gouvernements du Canada de s'inspirer de l'exemple du Québec et de permettre le retrait préventif, avec rémunération, pour les femmes enceintes.

Or, la ministre du Travail peut-elle nous expliquer pourquoi elle refuse d'insérer une telle disposition dans le projet de loi C-12, allant ainsi à l'encontre d'un consensus largement exprimé au Québec et au Canada?

L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, dans la partie II du Code du travail, en vertu de l'article 132, les femmes enceintes et celles qui allaitent bénéficient de ces services. Cela a été négocié pour une période de sept ans avec les employées et les employeurs. L'amendement du Bloc québécois concernant la définition de «danger» est traité à la partie III du Code du travail et les employées et les employeurs vont en discuter.

Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, ce qui est clair de la part du gouvernement fédéral, c'est que la question des femmes ne l'intéresse pas. Après avoir aboli le Conseil consultatif sur la situation de la femme, il a réduit le financement du Programme de promotion des femmes.

Comment la ministre responsable de la condition féminine peut-elle défendre son gouvernement, alors que celui-ci a toute la marge de manoeuvre nécessaire et qu'il refuse de faire passer le Programme de promotion des femmes de 8,2 millions à 30 millions de dollars, ce qui représente à peine 2 $ par femme?

[Traduction]

L'hon. Hedy Fry (secrétaire d'État (Multiculturalisme) (Situation de la femme), Lib.): Monsieur le Président, j'informe la députée que les subventions accordées aux femmes ne sont pas réduites. En fait, au cours des trois prochaines années, un montant de 10,5 millions de dollars sera ajouté aux subventions et contributions.

*  *  *

LES AFFAIRES ÉTRANGÈRES

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, selon des documents qui ont fait l'objet d'une fuite, le ministre des Affaires étrangères a personnellement approuvé des paiements sur le marché noir en Algérie. Le ministre a renouvelé ce qu'on appelle «un bail non conventionnel» pour un montant de 32 000 francs français par mois, pour les logements de personnel canadien en Algérie.

Le problème, c'est que la monnaie algérienne est le dinar, et non le franc français, et qu'il est illégal de payer un bail en devises étrangères en Algérie. Comment le gouvernement libéral peut-il justifier de faire ces paiements au noir dans un autre pays?

L'hon. Lloyd Axworthy (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, si le député veut bien me fournir les renseignements sur lesquels il se fonde pour poser sa prétendue question, je suis prêt à fournir une réponse sans qu'il y ait eu d'avis officiel.

 

. 1440 + -

Le fait est que l'Algérie, un très proche partenaire du Canada, est également aux prises avec des problèmes de sécurité très graves. Par conséquent, il nous faut prendre des mesures de sécurité pour protéger notre personnel.

J'exhorte le député à réunir tous les renseignements avant de faire des allégations calomnieuses.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis étonné que le ministre ne soit pas au courant des documents qu'il signe. Le ministre a personnellement signé un document, qui faisait référence à des ententes non conventionnelles concernant les logements du personnel en Algérie.

En outre, une note ministérielle de 1997 expliquait que la partie non conventionnelle du bail comprenait un paiement en devises étrangères de 32 000 francs français par mois.

Pourquoi le ministre des Affaires étrangères sanctionne-t-il une infraction à la loi dans un autre pays en approuvant personnellement des paiements sur le marché noir...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La question est irrecevable.

*  *  *

[Français]

L'IMPORTATION DE PLUTONIUM

Mme Jocelyne Girard-Bujold (Jonquière, BQ): Monsieur le Président, du MOX russe arriverait prochainement par voie navale à Sept-Îles, au Québec, et de là, à Chalk River en Ontario par avion.

Cent soixante et une municipalités et MRC du Québec et la Commission de l'environnement de la Communauté urbaine de Montréal se sont opposées à l'importation de plutonium par le Canada.

Comment le ministre de l'Environnement peut-il décemment ignorer l'avis formel des élus du Québec qui rejettent la décision d'Ottawa d'importer du plutonium?

[Traduction]

M. Brent St. Denis (secrétaire parlementaire du ministre des Ressources naturelles, Lib.): Monsieur le Président, le transport de tout échantillon provenant de Russie se fera conformément aux lois canadiennes et internationales. Le projet ne comporte aucun danger pour nos concitoyens, et la députée devrait le savoir.

*  *  *

LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Coopération internationale. La guerre a de nombreux effets dévastateurs, mais le plus tragique, c'est probablement celui qu'il a sur des milliers de jeunes garçons et filles qui subissent de tels conflits.

Ce matin, le Canada a annoncé un nouveau partenariat avec une organisation internationale, partenariat qui aidera à protéger les enfants victimes de la guerre. La ministre peut-elle expliquer à la Chambre ce qui est prévu dans un proche avenir?

L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, le ministre des Affaires étrangères et moi-même coparrainons une conférence internationale sur les enfants victimes de la guerre, événement qui aura lieu l'automne prochain. L'UNICEF a accepté de coanimer pour nous une rencontre de spécialistes mondiaux qui se tiendra dans le cadre de la conférence, et c'est sur cela que portait l'annonce de ce matin.

Comme les députés le savent, les enfants sont victimes de la guerre de nombreuses façons. En Sierra Leone et dans bien d'autres endroits déchirés par des conflits, il y a des enfants soldats et des fillettes qui sont enlevées et contraintes à devenir des esclaves sexuelles. Il y a aussi des enfants qui sont déplacés et qui deviennent finalement des chefs de famille par suite de conflits, comme nous avons pu le constater au Rwanda. La conférence vise à réunir des spécialistes du monde entier.

*  *  *

LE SECTEUR MINIER

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, l'activité économique dans le secteur minier du Yukon a diminué de presque 70 P. 100 en quatre ans, passant de 316 millions de dollars à seulement 90 millions de dollars par année. En revanche, le secteur minier de l'Alaska est en plein essor.

Ce déclin est largement attribuable à la mauvaise gestion du ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien. En moyenne, il faut quatre ans pour faire approuver un projet minier au Yukon, contre seulement trois à six mois au Manitoba. Pourquoi le ministre orchestre-t-il la destruction de l'industrie minière du Yukon?

M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est totalement faux. En ce qui concerne les intérêts miniers du Yukon, j'ai eu l'occasion de rencontrer les parties intéressées. J'ai répondu à la même question la semaine dernière à la Chambre. Le député devrait lire la réponse. Nous travaillons de très près sur les listes internes avec les premières nations, les parcs et les Canadiens en général à cet égard.

 

. 1445 + -

En tant que Manitobain, je puis dire aux députés que l'industrie minière du Manitoba se porte très bien, même dans ma circonscription.

M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je voudrais citer la Chambre des mines du Yukon:

    Avec la création de secteurs de gestion spéciaux dans le cadre des ententes sur les revendications territoriales, le MAINC a créé un bourbier législatif et réglementaire pour le secteur minier et l'économie dans son ensemble.

Le déclin de l'activité économique résulte directement de l'ingérence et de l'incurie du gouvernement.

Le ministère cherche-t-il à ruiner le Yukon et à le rendre complètement dépendant des subventions gouvernementales?

M. David Iftody (secrétaire parlementaire du ministre des Affaires indiennes et du Nord canadien, Lib.): Monsieur le Président, c'est tout à fait faux...

Le Président: Je demande aux députés de ne pas employer ces mots qui entraînent certaines réponses. N'utilisez pas les mots vrai et faux.

M. David Iftody: Monsieur le Président, je puis donner l'assurance à la Chambre que le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien défend les intérêts des premières nations du Yukon et d'ailleurs dans le Nord et qu'il assume ses responsabilités fiduciaires à leur égard. Nous les prenons au sérieux.

Nous sommes également très conscients des intérêts miniers en cause. J'ai personnellement rencontré ces représentants du Yukon et j'ai entendu leur plaidoyer. Nous voulons en arriver à un règlement négocié avec toutes les parties intéressées, et non pas à un affrontement, comme le fait le député et son parti.

*  *  *

LA SANTÉ

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.

La tragédie de Walkerton devrait réveiller le gouvernement. Que ce soit l'environnement, la santé, la salubrité des aliments ou la sécurité des médicaments, il y a tellement de dossiers que le gouvernement ne prend pas au sérieux.

Le principe de précaution n'existe plus pour lui. La compétence scientifique ne compte plus et c'est l'industrie, et non le consommateur, qui est son client préféré.

Quand le gouvernement fédéral reconnaîtra-t-il que la déréglementation à tous les niveaux en ce qui concerne les aliments, l'eau, les médicaments et le sang a des répercussions catastrophiques sur les Canadiens? Quand va-t-il revoir cette politique désuète et dangereuse?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je remercie la députée car elle me donne l'occasion de dire à la Chambre et à tous les Canadiens que le gouvernement offre sa profonde sympathie aux familles et à tous les habitants de Walkerton que frappe une dure épreuve depuis plus de dix jours.

Heureusement, Santé Canada a pu collaborer avec d'autres gouvernements pour mettre à leur disposition des connaissances approfondies et des services de surveillance ainsi que pour donner immédiatement accès à un médicament expérimental pouvant aider certaines personnes particulièrement atteintes.

Si la députée cherche un domaine où la déréglementation entraîne des problèmes, ce n'est pas ici qu'elle doit regarder, mais plutôt du côté du gouvernement de l'Ontario. C'est là que les problèmes se présentent.

Mme Judy Wasylycia-Leis (Winnipeg-Centre-Nord, NPD): Monsieur le Président, tous les députés expriment leur sympathie à l'endroit des familles éprouvées par la tragédie de Walkerton.

La leçon à tirer de cette tragédie, c'est que, lorsque les systèmes de sécurité sont affaiblis, tout le monde est touché.

En 1997, ce même ministre de la Santé a démantelé notre bureau de recherche sur les médicaments et vidé nos laboratoires de recherches alimentaires. Il a ensuite promis de rétablir la recherche alimentaire et de remettre en service certains de ces laboratoires. Rien de cela ne s'est encore produit.

Le ministre agira-t-il immédiatement pour renforcer la recherche sur la salubrité des aliments au sein de la Direction générale de la protection de la santé, pour que nous ayons les compétences scientifiques nécessaires afin d'éliminer le genre de risques qui ont causé la tragédie de Walkerton?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, la députée devrait savoir que la sécurité de l'eau et les questions connexes sont une responsabilité provinciale. Si elle en a contre le niveau de réglementation en Ontario, elle devrait s'adresser au gouvernement responsable.

Je suis étonné. La députée est une membre très active du Comité de la santé. Elle devrait savoir qu'il est clairement indiqué dans notre budget que nous affectons quelque 256 millions de dollars à la Direction générale de la protection de la santé de Santé Canada. Ce montant s'ajoute aux 65 millions de dollars que nous avons consacrés aux fins de la salubrité des aliments à Santé Canada. Ces mesures sont tout à fait contraires à l'orientation que suit le gouvernement de l'Ontario, avec ses baisses d'impôt de 30 p. 100 qui ont vraiment des répercussions sur la population.

*  *  *

 

. 1450 + -

L'ASSURANCE-EMPLOI

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, les propositions de modification des limites des régions économiques aux fins du régime d'assurance-emploi pourraient créer des difficultés énormes pour les travailleurs saisonniers du Nouveau-Brunswick.

La ministre pourrait-elle nous dire si ces propositions sont coulées dans le béton et quelles données son ministère a utilisées pour établir ces nouvelles limites?

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait le député, à moins qu'il ne l'ignore, nous sommes dans une période d'examen de 30 jours pendant laquelle tous les Canadiens peuvent faire connaître leur réaction aux modifications des limites économiques proposées dans la Gazette du Canada.

Des économistes locaux ont travaillé en collaboration avec les localités pour moderniser les limites sur la base des données relatives à l'emploi. Le député a certainement amplement le temps de commenter les propositions qui ont été faites et d'y ajouter ses suggestions au cours des jours qui restent.

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je sais gré à la ministre de sa réponse concernant les responsabilités des députés. Je ne manquerai pas de les exercer.

J'espère qu'elle inclura non seulement les employés, mais aussi les employeurs de cette région. C'est une question vraiment très importante. Beaucoup de nos travailleurs sont âgés et employés de façon saisonnière. Le problème, c'est que certains sont laissés pour compte. Je ne suis pas convaincu que les renseignements que possède la ministre sur l'évolution du taux de chômage dans la région soient exacts. En fait, certaines données sur le chômage remontent à 1996, et les taux fluctuent entre 23 p. 100 et 45 p. 100. J'espère que la ministre en tiendra compte au cours des prochaines semaines.

L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je le répète, c'est pour ça que nous avons entrepris le processus en question. On fait des propositions, on les publie dans la Gazette du Canada et le public a 30 jours pour les commenter. Par public, nous entendons les employés, les employeurs et les députés—quiconque a des conseils à l'intention de la Commission de l'assurance-emploi. Elle les prendra en considération avant de présenter ses recommandations finales.

*  *  *

L'ALENA

Mme Sarmite Bulte (Parkdale—High Park, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international.

Le nombre de procès intentés par des entreprises contre le Canada en vertu des dispositions de l'ALENA semble être à la hausse. Le secrétaire parlementaire pourrait-il nous dire quels sont les efforts qui sont faits pour modifier le chapitre 11 de l'ALENA afin de protéger le Canada contre les revendications frivoles?

M. Bob Speller (secrétaire parlementaire du ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, je tiens à assurer la députée que le Canada prend très au sérieux les préoccupations exprimées par toutes les parties intéressées au sujet du chapitre 11. Nous avons consulté abondamment les provinces et les principaux intéressés afin de rendre le processus plus ouvert et plus équitable.

Nous avons rencontré des cadres mexicains et américains au niveau du sous-ministre et nous poursuivons dans cette voie pour vérifier que le mécanisme relatif aux droits des investisseurs reflète la position des parties à l'accord.

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LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre des Finances et la ministre de la Coopération internationale ont assisté récemment à une manifestation culturelle organisée par la Federation of Associations of Canadian Tamils. Il en coûtait 60 $ par personne. Je ne sais pas au juste avec quoi les ministres pensaient coopérer lorsqu'ils ont assisté à cette manifestation, mais le SCRS et le Département d'État américain estiment depuis longtemps que la fédération est une façade derrière laquelle se cachent les Tigres tamouls.

Cette semaine, les Tigres tamouls du Canada célébreront, pour reprendre leurs termes, «les vagues incessantes et invincibles» des attaques contre Sri Lanka. Le ministre des Finances assistera-t-il également à cette manifestation culturelle?

Le Président: À l'ordre. Je ne crois pas que la question se rapporte aux responsabilités administratives du ministre. S'il veut répondre, il peut le faire. Sinon, il peut ne pas répondre.

L'hon. Paul Martin (ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, c'est loin d'être une importante activité de financement lorsqu'on demande 60 $ par personne et que la soirée a lieu dans un grand hôtel. Il s'agissait d'une manifestation culturelle. Une adolescente canadienne d'origine tamoule a pris la parole pour expliquer ce que le Canada signifiait pour elle. Elle a dit notamment que le Canada était un pays tolérant et compatissant. Lorsque des gens viennent d'autres coins de la planète s'installer chez nous et deviennent des citoyens, nous comprenons qu'ils veuillent célébrer leur patrimoine culturel et nous voulons célébrer avec eux.

*  *  *

 

. 1455 + -

[Français]

MOSEL VITELIC

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, Montréal se retrouve en concurrence avec des villes d'Irlande et d'Allemagne pour obtenir l'implantation d'une nouvelle usine de Mosel Vitelic.

On parle ici d'investissements de plus de 3 milliards de dollars et de la création de 1 500 emplois directs.

Comme la décision doit se prendre d'ici deux semaines à Taiwan, le ministre de l'Industrie peut-il nous confirmer qu'il est à 100 p. 100 derrière le projet et qu'il annoncera bientôt la contribution de son gouvernement à ce projet?

L'hon. John Manley (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, c'est moi qui ai visité Mosel Vitelic et qui ai commencé cette introduction au Canada pour cette entreprise.

Nous sommes certainement en faveur d'un investissement si important et nous allons maintenant travailler avec le groupe représentant le gouvernement du Québec et la Ville de Montréal pour obtenir cet investissement. C'est très bon pour le Canada, c'est bon pour le Québec et c'est bon pour Montréal.

*  *  *

[Traduction]

LA SOCIÉTÉ RADIO-CANADA

M. Dennis Gruending (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Monsieur le Président, le conseil d'administration de la Société Radio-Canada a annoncé aujourd'hui que la société réduira toutes les émissions de nouvelles locales sur le réseau anglais et que, de surcroît, elle mettra à pied des centaines d'employés. Cela signifie que, furtivement, dans un but nettement politique et en réduisant les effectifs d'un millier de personnes, on met fin à tous les bulletins de nouvelles locaux de la CBC. Le président a admis publiquement que la société n'est pas une priorité pour le gouvernement, mais elle constitue une priorité pour des millions de Canadiens.

Le premier ministre va-t-il enfin s'engager à réinvestir des sommes adéquates et à long terme afin que la présentation des nouvelles locales à la télévision soit protégée et améliorée?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai dit la semaine dernière que nous accordons un budget très imposant à la Société Radio-Canada. Elle a reçu près d'un milliard de dollars du gouvernement.

Il appartient aux gestionnaires et au conseil d'administration de répartir cette somme. La société a annoncé aujourd'hui qu'elle doit apporter certains changements afin d'améliorer l'efficience de la CBC. Nous devons respecter la décision du président de la société et du conseil d'administration.

M. Mark Muise (Ouest Nova, PC): Monsieur le Président, le premier ministre peut-il nous dire si l'annonce d'aujourd'hui concernant les bulletins régionaux de 18 heures vise à démanteler systématiquement la programmation des bulletins régionaux? Est-il d'accord avec ce genre de compression?

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, j'ai déjà dit que, il y a quelques semaines, la société avait décidé d'abolir totalement les bulletins régionaux sur le réseau anglais de télévision. La CBC a maintenant décidé de les conserver. Le fonctionnement des bureaux changera un peu, mais ils resteront ouverts. C'est grâce à l'intervention de députés de ce côté de la Chambre que la CBC a maintenant la confiance requise pour agir ainsi.

*  *  *

LA SANTÉ

M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au ministre de la Santé.

Les journaux nationaux nous apprennent ce matin qu'il existe maintenant des preuves manifestes selon lesquelles l'industrie du tabac cible les enfants depuis des décennies dans la promotion des cigarettes.

Quelle stratégie le gouvernement entend-il adopter pour contrer l'attaque impitoyable à laquelle l'industrie du tabac soumet nos enfants et nos jeunes?

L'hon. Allan Rock (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, petit à petit et mois après mois, les Canadiens comprennent de mieux en mieux le programme de l'industrie du tabac qui vise à accroître sa clientèle en mettant l'accent sur les jeunes. Les documents rendus publics aujourd'hui révèlent que cette situation a cours depuis un bon bout de temps, que c'était une stratégie délibérée.

Il n'en est que plus manifeste que nous devons continuer comme nous l'avons fait à mettre de l'avant une stratégie de lutte contre l'industrie du tabac et le tabagisme, en adoptant des taxes plus élevées dans les meilleurs délais et dans la mesure du possible, en diffusant des messages contre le tabagisme qui s'adressent particulièrement aux jeunes et en apportant des modifications à l'étiquetage afin que nous acquérions l'attitude selon laquelle le tabagisme n'est pas «cool»; le tabagisme tue.

*  *  *

LA COOPÉRATION INTERNATIONALE

M. Ted White (North Vancouver, Alliance canadienne): Monsieur le Président, toutes les fanfaronnades au monde de la part du ministre des Finances ne changeront rien au fait que le SCRS et le Département d'État des États-Unis ont établi que la Fédération des associations de Tamouls est liée aux Tigres tamouls ou leur sert de couverture.

Au lieu de faire des fanfaronnades, le gouvernement est-il disposé à promettre la tenue d'une enquête complète portant sur les activités de la Fédération des associations de Tamouls canadiens? Le gouvernement va-t-il consentir à promettre que l'argent des contribuables ne servira plus à verser des subventions et contributions à cet organisme, pas même pour des billets afin que des ministres participent au soi-disant...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. La ministre de la Coopération internationale a la parole.

 

. 1500 + -

L'hon. Maria Minna (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, la prémisse de la question du député fait état d'un événement auquel le ministre des Finances et moi-même avons participé. Le fait qu'il assimile les Tigres à l'ensemble de la collectivité tamoule, y compris à la jeune femme qui a été jetée...

Des voix: Oh, oh!

L'hon. Maria Minna: Oui, c'est ce qu'il a dit. Monsieur le Président, c'est du racisme à l'état pur.

Nous avons participé à une activité culturelle réunissant des citoyens nés au Canada. Je suis indignée de la connotation des propos du député ou du mélange qu'il fait. Les Tigres ne sont pas...

Des voix: Oh, oh!

Le Président: Le député de Repentigny a la parole.

*  *  *

[Français]

MICHEL DUMONT

M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): Monsieur le Président, depuis maintenant trois ans, le ministère de la Justice est saisi du dossier de M. Michel Dumont, un citoyen de ma circonscription qui aurait injustement purgé une peine d'emprisonnement.

La ministre de la Justice est-elle consciente de l'angoisse que créent de telles situations et s'engage-t-elle à rendre publique sa décision concernant la demande de pardon de M. Dumont, avant la relâche estivale?

[Traduction]

L'hon. Anne McLellan (ministre de la Justice et procureur général du Canada, Lib.): Monsieur le Président, comme le sait le député, j'ai collaboré avec lui à différentes occasions dans ce dossier qui progresse normalement dans le cadre du processus de l'article 690. Dès qu'une décision finale aura été prise, je communiquerai avec le demandeur ainsi qu'avec le député s'il le désire.

*  *  *

PRÉSENCE À LA TRIBUNE

Le Président: Je voudrais vous signaler la présence à notre tribune de Son Excellence Constantinos Stephanopoulos, président de la République hellénique.

Des voix: Bravo!

*  *  *

[Français]

LE DÉCÈS DE MAURICE RICHARD

Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, au nom du gouvernement du Canada et de tous les Canadiens, je tiens à offrir mes plus sincères condoléances à la famille et aux proches de l'honorable Maurice Richard.

Je veux aussi rendre hommage à ce fier Canadien français qui a su inspirer des générations entières au dépassement.

S'il est vrai que certaines personnes sont nées pour faire un métier, alors Maurice Richard est né pour jouer au hockey. Mais à lui seul, son talent n'aurait pas été suffisant pour en faire l'un des meilleurs, sinon le plus grand joueur de hockey de l'histoire.

 

. 1505 + -

Il lui fallait plus encore. Il lui fallait du coeur, de la fierté, de la détermination, du courage et de la persévérance, toutes des qualités dont le numéro 9 faisait preuve à chacune de ses présences sur la patinoire et dont Maurice Richard, l'homme, a fait preuve durant toute sa vie.

[Traduction]

Je me revois encore le samedi soir dans le dortoir du collège, assis avec mes amis autour d'un poste de radio de fortune et écoutant les descriptions de Maurice Richard, poussé de toutes parts et jeté sur la glace alors que, sur ses patins, il essayait d'atteindre le filet. Cela ne l'arrêtait pas. Il se relevait et donnait le meilleur de lui-même sans s'arrêter jusqu'à ce que la rondelle soit derrière la ligne de but.

Personne ne voulait gagner autant que lui. C'est ce qui a fait sa grandeur. C'est le souvenir qu'il laissera à tout jamais aux Canadiens.

[Français]

Maurice Richard était un fier compétiteur, mais il était aussi un homme discret qui n'aimait pas les grands honneurs ou les hommages interminables.

Alors, je m'en tiendrai à ces quelques mots. Merci, Maurice. Nous ne t'oublierons jamais.

[Traduction]

Mme Deborah Grey (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis toujours émue également lorsque je vois l'incroyable passion que nous partageons en tant que Canadiens pour le sport merveilleux qu'est le hockey. C'est ce que je constate à la Chambre des communes aujourd'hui. qchose certaine, nous avons pu le voir au cours du week-end à la suite de la mort de Maurice Richard.

Les Canadiens rendent hommage au plus grand joueur peut-être à avoir jamais porté un uniforme du Canadien de Montréal, Maurice «Rocket» Richard. Il ne fait aucun doute que les Canadiens de Montréal constituent l'une des plus grandes équipes de hockey que le Canada ait jamais eues. Les Canadiens sont encore l'équipe qui a remporté le plus de championnats dans le sport professionnel et à titre de grande partisane des Oilers d'Edmonton, c'est pour moi difficile à dire.

Lorsque je pense à un joueur qui représente plus que tout autre cet esprit de gagnant, je pense à «Rocket» Richard. Je dois reconnaître que je peux être passionnée au sujet de bien des choses, et surtout le hockey, mais j'ai toujours eu le sentiment que je ne pouvais arriver à la cheville de mes concitoyens francophones à ce chapitre avec leur passion et leur enthousiasme pour le hockey et Maurice Richard.

Le «Rocket» était une légende sans pareille dans le sport qu'il adorait. Ses yeux brillants d'enthousiasme, sa vitesse incroyable, son endurance, sa détermination et son caractère à peine contrôlé reflétaient sa passion pour ce sport qu'il adorait. «Non, Rocket, vous n'êtes pas censé frapper les juges de ligne».

Je pense pas qu'il y aura jamais un autre joueur comme lui. C'est une légende unique, un héros sans pareil. En 1944-1945, il devenait le premier joueur à marquer 50 buts en 50 parties et il a fallu attendre 37 saisons avant qu'un autre joueur n'égale cette marque.

Je lui rends hommage aujourd'hui au nom de tous mes collègues. J'offre nos sincères condoléances à toute sa famille. Je la remercie de le partager avec nous tous, Canadiens.

Le hockey et la politique se ressemblent beaucoup. Lorsque nous avons fait de notre mieux, lorsque nous avons marqué nos meilleurs points, lorsque nous avons subi nos sanctions, on peut espérer que nous pouvons tous faire ce que le «Rocket» a fait, c'est-à-dire nous serrer la main et dire que le hockey s'en porte mieux, que la politique est un meilleur métier ou que la vie est plus agréable, car nous avons tous bien joué notre rôle. Nous devons cela au nom et à la mémoire de Maurice Richard.

[Français]

Merci, Maurice. Nous ne t'oublierons jamais.

M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, au nom de tous mes collègues, je veux d'abord offrir mes condoléances à toute la famille de M. Maurice Richard, à ses enfants surtout qui ont dû partager leur père avec toute la population du Québec et même du Canada.

Maurice Richard n'était pas le patineur le plus rapide. Il n'avait pas le lancer le plus foudroyant. Il n'était pas le plus élégant, ni le meilleur manieur de rondelle. Il était tout simplement le meilleur joueur.

 

. 1510 + -

Toute sa vie, il n'a cessé de travailler à être le meilleur. Le seul but visé, c'était la victoire. Il consacrait toutes ses énergies, sa force, ses capacités et sa volonté à remporter la victoire. Il a appris à sa génération qu'il était possible d'atteindre les sommets. Il a montré aux générations futures qu'il fallait viser la perfection, atteindre le premier rang.

J'ai vu jouer Maurice Richard au Forum et, bien sûr, à la télévision. Voilà des moments qui restent gravés dans ma mémoire. Quand il patinait à pleine vitesse, nous patinions avec lui. Quand il s'envolait, nous nous envolions avec lui. Quand il comptait, nous comptions tous.

Il nous laisse l'exemple d'un homme simple, généreux, pour qui le succès ne pouvait être obtenu qu'en travaillant au maximum de ses capacités, qu'en se dépassant. Juste pour cela, merci, M. Maurice Richard.

M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, au nom de notre parti et en mon nom personnel, je tiens à offrir mes plus sincères condoléances à la famille et aux proches de l'honorable Maurice Richard.

Sans diminuer le statut de Maurice Richard au Québec, il était un héros pour tous les Canadiens.

[Traduction]

Ainsi, pour montrer son adoration de toujours, son admiration et même son amitié pour Maurice Richard, un de mes électeurs qui vit à Pense a une plaque d'immatriculation qui dit simplement: «NHL-9».

[Français]

Considéré comme un joueur de seconde importance durant la Seconde Guerre mondiale, les sceptiques ont dit: «Attendons le retour de vraies vedettes».

Mais durant la décennie suivante, Richard a non seulement battu le record de Nels Stewart, mais il l'a dépassé de plus de 200 buts. Comme on l'a déjà mentionné, Richard a été l'un des plus grands joueurs de hockey de l'histoire. Ses adversaires parlaient toujours de la fureur de son regard, surtout de la ligne bleue jusqu'au filet. Le «Rocket» a toujours insisté pour dire: «Je ne suis qu'un joueur de hockey».

[Traduction]

Après la mort de son père, samedi soir, Maurice Richard fils a déclaré: «Mon père était un homme simple». C'est peut-être vrai, mais pour une génération de fans canadiens de hockey, Maurice «Rocket» Richard était tout simplement merveilleux.

M. Peter MacKay (Pictou—Antigonish—Guysborough, PC): Monsieur le Président, au nom du très honorable Joe Clark et de tous les députés du Parti progressiste conservateur, je tiens à exprimer notre tristesse à l'occasion du décès de Maurice «Rocket» Richard.

[Français]

Le Parti progressiste-conservateur veut offrir ses sincères et profondes condoléances à tous les membres de la famille Richard.

[Traduction]

Né le 4 août 1921, Maurice Richard a été, tout au long des 78 années de sa glorieuse existence, un symbole d'excellence et une source d'inspiration pour plusieurs générations de Québécois et de Canadiens. Le «Rocket» laissera plus que le souvenir d'une légende du hockey. Il était véritablement un grand Canadien dont les talents, sur la glace, ont inspiré toute une génération d'amateurs de hockey.

Il n'était peut-être pas l'athlète le plus doué sur le plan physique, mais il a su se distinguer de tous les autres par sa volonté de gagner. Il avait une force de volonté remarquable.

Surnommé le «Rocket» pour sa rapidité sur la glace et la puissance de ses tirs, Richard s'est mérité la réputation d'un joueur électrisant, surtout lorsqu'il partait de la ligne bleue. Celui qui portait le maillot no 9 a été pendant 18 magnifiques années la figure dominante de la LNH et le principal joueur de la plus fameuse équipe du sport professionnel. Tout au long de sa carrière il a accumulé, en saisons et durant les séries éliminatoires, 626 buts et 465 assistances, pour un total de 1 091 points. Il fut également, comme on l'a rappelé, le premier joueur à compter 50 buts en autant de parties durant la saison 1944-1945, un record qui n'a été égalisé que durant les années 80.

Ce fut cependant sa performance dans les situations cruciales et durant les matches importants qui l'a vraiment distingué de tous les autres joueurs de hockey. Durant sa carrière d'étoile, Richard a mené les Canadiens de Montréal à la conquête de huit coupes Stanley, dont cinq d'affilée entre 1956 et 1960.

Après sa carrière comme joueur de hockey, cet homme qui figurait parmi les personnages les plus reconnus et les plus aimés au Canada, a vu grandir sa popularité et sa légende. Alors que la santé de Maurice Richard commençait à se détériorer, la LNH a reconnu sa contribution au hockey et lui a rendu un hommage éloquent en créant le trophée Maurice Richard, qui est décerné chaque année au premier compteur de la ligue.

 

. 1515 + -

[Français]

Maurice Richard est décédé samedi dernier et ce, non sans combattre férocement le cancer de l'abdomen qui le rongeait. Il sera exposé en chapelle ardente mardi, au Centre Molson, et des funérailles nationales auront lieu mercredi à la basilique Notre-Dame.

[Traduction]

Les témoignages de sympathie et les condoléances ne cessent d'affluer de partout au pays à la suite du décès de Maurice «The Rocket» Richard. Celui-ci transcendait le jeu. Les Canadiens considéraient comme un honneur de pouvoir dire que ce grand hockeyeur, ce grand ambassadeur du hockey et du Canada que l'on surnommait affectueusement le «Rocket», était l'un des leurs. C'est un véritable trésor national que le Canada et la famille Richard ont perdu. Au revoir, «Rocket».

Le Président: Je vais me permettre de dire quelques mots au sujet de M. Maurice Richard. Laissez-moi vous raconter une petite histoire.

Ceux d'entre vous qui sont de ma génération se rappelleront peut-être de cette époque où nous recevions pour étrennes, à Noël, un chandail aux couleurs d'une équipe de hockey. Les enfants de mon quartier étaient principalement francophones. Nous recevions invariablement un chandail de hockey. Je ne sais pas si c'était par économie ou parce que les chandails étaient tout simplement faits comme cela, mais il n'y avait jamais de numéro sur les chandails qu'on achetait. Nous étions sûrement quatre ou cinq à avoir reçu un chandail du Canadien de Montréal. Nos mères y avaient toutes cousu le numéro que nous avions demandé. Nous arborions tous le numéro 9.

Si un ou plusieurs d'entre vous s'étiez présentés aujourd'hui à la Chambre portant le chandail des Canadiens de Montréal arborant le numéro 9, je ne les aurais pas réprimandés quant à l'usage d'accessoires à la Chambre des communes. Avec un tel maillot marqué de ce chiffre et avec le souvenir de Maurice Richard, ce serait considéré réglementaire.



AFFAIRES COURANTES

[Traduction]

LE TRANSPORT DU GRAIN

L'hon. David M. Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 32(2) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer l'avant-projet de loi, Loi modifiant la Loi sur les transports au Canada, qui prépare la voie au projet de loi de mise en oeuvre de la réforme du transport du grain que le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire et ministre responsable de la Commission du blé et moi-même avons annoncée il y a quelques semaines.

Je compte présenter officiellement le projet de loi à la Chambre dans le courant de la semaine.

*  *  *

[Français]

RÉPONSE DU GOUVERNEMENT À DES PÉTITIONS

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à trois pétitions.

*  *  *

[Traduction]

DÉLÉGATIONS INTERPARLEMENTAIRES

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de présenter à la Chambre, dans les deux langues officielles, le sixième rapport de l'Association canadienne des parlementaires de l'OTAN, qui a représenté le Canada à la réunion annuelle du comité permanent à Bruxelles le 8 avril 2000.

*  *  *

 

. 1520 + -

COMITÉS DE LA CHAMBRE

INDUSTRIE

M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le cinquième rapport du Comité permanent de l'industrie. Le comité a examiné les crédits du ministère de l'Industrie dans le Budget des dépenses principal pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2001, et en fait rapport.

JUSTICE ET DROITS DE LA PERSONNE

M. Paul DeVillers (Simcoe-Nord, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le rapport du Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

Conformément à son ordre de renvoi du 2 décembre 1999 et des dispositions de l'article 233 de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, un sous-comité du Comité permanent de la justice et des droits de la personne a été chargé d'effectuer un examen approfndi des dispositions et du fonctionnement de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition.

[Français]

En exécution de son mandat, le Sous-comité a tenu des audiences publiques à Ottawa et dans beaucoup d'autres villes canadiennes. Il s'est également rendu dans des établissements correctionnels de tous les niveaux de sécurité établis en divers endroits du pays et a assisté à des audiences de libération conditionnelle.

Au cours de ces visites, il a entendu, lors des séances à huis clos, des équipes de gestion, des agents de correction, des agents de libération conditionnelle, des membres du personnel affectés aux programmes, des membres de la Commission des libérations conditionnelles, des détenus, des membres de comités consultatifs de citoyens et d'autres témoins.

Le Sous-comité a convenu de présenter au Comité permanent le rapport suivant intitulé: «En constante évolution: La Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition». Le Comité permanent a adopté le dit rapport.

[Traduction]

PROCÉDURE ET AFFAIRES DE LA CHAMBRE

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter, dans les deux langues officielles, le trente-deuxième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant l'ordre de renvoi de la Chambre des communes du mardi 29 février 2000.

Pour ce qui est du budget principal des dépenses pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2000 et du crédit 20, Conseil privé, directeur général des élections, le comité rapporte les mêmes montants, moins les sommes votées dans les crédits provisoires.

*  *  *

PÉTITIONS

L'IMMIGRATION

M. Mac Harb (Ottawa-Centre, Lib.): Monsieur le Président, je présente une pétition signée par des électeurs qui demandent au gouvernement d'abolir les frais de 500 $ exigés de ceux qui demandent le statut de résident permanent ou de réfugié au Canada.

LES DONS DE BIENFAISANCE

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter des pétitions signées par plus de 25 000 Canadiens qui demandent au gouvernement d'adopter une mesure législative comme mon projet de loi d'initiative parlementaire C-474, qui ferait en sorte que les dons, jusqu'à concurrence de 1 150 $, aux organismes de bienfaisance enregistrés, aux organismes sans but lucratif ainsi qu'aux partis politiques fédéraux ouvrent droit à la même déduction d'impôt et que toute portion au-delà de cette limite ouvre droit à une déduction de 29 p. 100, jusqu'à un maximum de 50 p. 100 du revenu imposable.

[Français]

LA SOCIÉTÉ CANADIENNE DES POSTES

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Monsieur le Président, j'ai le plaisir de déposer ici trois pétitions distinctes, mais qui touchent le même sujet, signées par 286 personnes du Québec.

Les pétitionnaires demandent l'abolition pure et simple du paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes, qui a fait l'objet d'un vote à la Chambre et qui a failli passer à 114 voix contre 110.

Donc, les contribuables veulent que leurs livreurs de courrier postal rural puissent négocier collectivement avec le gouvernement.

Mme Maud Debien (Laval-Est, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais déposer une pétition signée par plusieurs Québécoises et Québécois concernant la Loi sur la Société canadienne des postes.

Les pétitionnaires demandent au Parlement d'abroger le paragraphe 13(5) de cette loi qui interdit aux courriers des routes rurales le droit à la négociation collective.

La Charte canadienne des droits et libertés stipule que la liberté d'association et la liberté de négocier collectivement font partie des libertés fondamentales de toute personne. Le déni de cette liberté constitue une pratique discriminatoire à l'endroit des travailleuses et des travailleurs ruraux.

En conséquence, le Parlement doit abroger le paragraphe 13(5) dans les plus brefs délais, afin de se conformer à sa propre Charte et respecter le droit à la syndicalisation et à la négociation collective.

 

. 1525 + -

M. Michel Bellehumeur (Berthier—Montcalm, BQ): Monsieur le Président, à l'instar de mes deux collègues, je désire présenter une pétition, signée par des gens de mon comté, demandant l'abrogation du paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes qui brime les droits fondamentaux de s'associer et de se syndiquer. C'est un déni de droit fondamental.

Il me fait plaisir de déposer cette pétition et de dire que j'appuie à 100 p. 100 les revendications de ces pétitionnaires.

Le vice-président: Le député de Berthier—Montcalm est un député ayant beaucoup d'expérience à la Chambre. Il sait bien qu'il n'est pas conforme au Règlement de dire si on appuie ou non une pétition. Je suis certain qu'il ne commettra pas de nouveau cette erreur.

LE PRIX DE L'ESSENCE

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de déposer une pétition concernant la question du prix de l'essence. De nombreux citoyens de partout au Québec et aussi de l'extérieur du Québec sont grandement préoccupés par la hausse très rapide du prix de l'essence que nous avons subie. Dans ma région, plus de 3 500 personnes ont signé une pétition et j'en dépose une partie aujourd'hui.

Cette pétition demande au gouvernement d'agir dans les plus brefs délais pour contrer cette hausse. On demande aussi au gouvernement de prendre des dispositions pour le développement d'énergies alternatives.

[Traduction]

LES ADOPTIONS

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je présente plusieurs centaines de noms qui appuient une requête présentée par des parents adoptifs confrontés à des frais administratifs et à des dépenses très élevés au moment d'une adoption.

Les pétitionnaires exhortent le Parlement à adopter le projet de loi C-289, qui accorderait une déduction d'impôt pour les frais liés à l'adoption d'un enfant.

*  *  *

QUESTIONS AU FEUILLETON

M. Derek Lee (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je demande que toutes les questions soient reportées.

Le vice-président: Est-ce d'accord?

Des voix: D'accord.

*  *  *

[Français]

RECOURS AU RÈGLEMENT

LE DÉPÔT DE PÉTITIONS

M. Pierre Brien (Témiscamingue, BQ): Monsieur le Président, j'aimerais porter à l'attention de la Chambre une question relative au Règlement concernant le dépôt de pétitions.

Il arrive très fréquemment qu'une pétition ait été signée par des citoyens ou par des groupes de pression qui nous les font parvenir afin que nous les déposions ici à la Chambre.

Toutefois, le nouveau contexte d'aujourd'hui, avec le développement des moyens de communication, fait en sorte qu'il puisse y avoir différentes formes de pétitions. C'est ce qui s'est produit dans mon cas.

Un citoyen a présenté une pétition en utilisant des moyens électroniques, donc sur CD-ROM. Cette pétition contient plus de 17 000 noms. M. Goyette, un citoyen de Montréal, au Québec, a amassé électroniquement 17 000 signatures. Cette pétition, comme celle que j'ai présentée tantôt, demande au gouvernement d'intervenir sur la question du prix de l'essence. Ce type de pétition n'est pas tout à fait conforme au Règlement actuel de la Chambre, soit l'article 36.

Je demande à la Présidence s'il est possible d'avoir une interprétation très généreuse de cette disposition du Règlement, ou s'il apparaît plus opportun de la modifier ou d'en faire une mise à jour pour faire en sorte que des citoyens pourront, à l'avenir, utiliser ce moyen.

J'ajoute que la pétition électronique offre même des avantages par rapport aux pétitions traditionnelles. Il est beaucoup plus facile pour la personne qui récolte les signatures de contrôler si un individu l'a signée à plus d'une reprise. On peut limiter le nombre de signatures par adresse électronique. De toute façon, les individus ont de plus en plus chacun une adresse électronique. On risque de voir se répéter cette initiative. M. Goyette est à l'avant-garde. Il est le premier citoyen, à ma connaissance, à recueillir une telle pétition.

Il y a aussi d'autres avantages au niveau des archives. Sur un simple CD-ROM, où il y a 17 000 noms, on peut en inclure 50 fois plus. Pensons donc à la capacité de stockage des pétitions qui serait grandement simplifiée.

À l'heure où on permet aux individus de transmettre leur déclaration d'impôt par Internet, il me semble que la Chambre des communes devrait revoir le Règlement pour permettre le dépôt de pétitions comme celle-ci.

Je vous soumets cette question et j'attends votre avis avec impatience.

 

. 1530 + -

Le vice-président: Y a-t-il d'autres interventions à ce sujet?

Des voix: Non.

Le vice-président: Comme l'a indiqué l'honorable député de Témiscamingue, le Règlement de la Chambre est assez clair sur ce point. Je cite l'alinéa 36(2)f) du Règlement:

    36. (2) Pour être certifiée correcte conformément au paragraphe (1) du présent article, chaque pétition satisfait aux conditions suivantes:

      f) elle ne contient que des signatures originales et adresses inscrites directement et non collées ou autrement reproduites; et

Dans ces circonstances, il est difficile pour la Présidence de faire autre chose que d'insister que les pétitions soient présentées sous la forme demandée par l'article du Règlement de la Chambre des communes.

Toutefois, si l'honorable député lui-même, ou par l'entremise de ses collègues qui sont membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre, veut soulever cette question au Comité, peut-être que ce dernier peut faire autre chose pour recommander des modifications au Règlement qui peuvent être adoptées ici, à la Chambre, et nous pouvons changer le Règlement pour aider l'honorable député avec le problème qu'il a si bien décrit.

J'invite l'honorable député de Témiscamingue à trouver un moyen de soulever cette question devant le comité que j'ai indiqué. Je suis certain que le président du Comité, qui est maintenant ici à la Chambre, a bien écouté le point soulevé et la décision de la Présidence dans les circonstances.

M. Michel Bellehumeur: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. En attendant que la Chambre des communes arrive à l'an 2000 au niveau des pétitions électroniques, est-ce que la Chambre donnerait le consentement unanime au député de Témiscamingue afin qu'il dépose ce CD-ROM avec les 17 000 signatures sur ce sujet, surtout qu'avant de vouloir déposer son CD-ROM, il avait déposé une pétition en bonne et due forme sur le même sujet.

Le vice-président: Est-ce que la Chambre donne le consentement unanime afin que l'honorable député puisse déposer cette pétition?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

[Traduction]

Le vice-président: Je désire informer la Chambre que, en raison de la déclaration ministérielle, la période consacrée aux initiatives ministérielles sera prolongée de 11 minutes.



INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Traduction]

LA LOI SUR LA CITOYENNETÉ AU CANADA

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-16, Loi concernant la citoyenneté canadienne, soit lu pour la troisième fois et adopté.

Le vice-président: Quand la Chambre a interrompu ses travaux pour les questions orales, le député de Calgary-Centre avait la parole. Il lui reste six minutes pour des questions et observations.

M. Eric Lowther (Calgary-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avant les questions orales, je répondais à une question. On m'a demandé d'indiquer ce que représentait pour moi et d'autres gens de ma circonscription le fait d'être Canadien et de préciser de quelle façon le projet de loi C-16 y contribuait.

Je dirai rapidement qu'il n'est pas aisé de décrire en quelques mots ce que c'est que d'être Canadien. Pour ce qui me concerne personnellement, cela signifie que je dois respecter les lois du pays. Je dois participer à la vie du pays en tant que citoyen. Nos droits sont innombrables, mais nos responsabilités de citoyens le sont tout autant, car il nous faut travailler à améliorer notre pays, à bien le représenter et à obéir à ses lois.

Ce projet de loi me préoccupe par certains de ses aspects, en ce que, bien qu'il concerne la citoyenneté, il semble s'orienter sur une mauvaise pente. Il ne précise pas, à mon sens et de l'avis de beaucoup de membres du comité, quelles personnes sont admissibles à cette citoyenneté. Cela semble avoir été édulcoré et laissé aux bons soins des bureaucrates d'en décider dans la réglementation.

 

. 1535 + -

On n'a pas expliqué clairement quel niveau de compétence linguistique doit posséder un nouveau citoyen dans l'une ou l'autre des langues officielles. Ce n'est vraiment pas clair. En fait, on pourrait prétendre qu'en vertu de ce projet de loi, un nouveau citoyen peut à peine comprendre, voire pas du tout, l'une ou l'autre des langues, car le projet de loi permet le recours à des services d'interprétation.

Il n'est pas clair non plus qui peut être considéré comme un membre de la famille, tandis que c'est tout à fait clair dans les lois canadiennes. Ce projet de loi laisse la ministre et ses fonctionnaires en décider.

De plus, de sérieuses préoccupations ont été soulevées à propos de la révocation de la citoyenneté de ceux qui ont choisi de devenir citoyens canadiens. La loi ne prévoit aucun processus d'appel pour ces personnes. Bien sûr, on a retiré aux juges de la citoyenneté toute responsabilité réelle. Ces juges n'existent que pour la forme. Nous laissons encore une fois les bureaucrates prendre des décisions au sujet de la vie des gens, au sujet de leur identité, de leur nationalité et de leur citoyenneté.

Il est vrai que d'être citoyen canadien a une grande signification. Malheureusement, ce projet de loi laisse aux bureaucrates le soin de définir par règlement cette signification et l'importance qu'on accorde au fait d'être Canadien.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, définir ce qu'est un Canadien alors que nous sommes un peuple si diversifié serait une tâche très compliquée. Toutefois, à première vue, étant donné que le député n'aura pas beaucoup de temps pour réfléchir à la réponse qu'il va donner à ma question, ne pense-t-il pas que la chose qui nous unit tous en tant que Canadiens, d'où que nous soyons originaires—que nous soyons de nouveaux Canadiens ou des Canadiens de naissance—, est le respect mutuel pour les principes de la Charte des droits et libertés?

M. Eric Lowther: Monsieur le Président, je dirais que c'est exact. Le député a travaillé sur la question et je pense que c'est exact. Ce qui mérite peut-être un examen plus approfondi, c'est la manière dont ces principes sont appliqués et gérés dans le pays. Cependant, en général, je dirais que c'est vrai.

M. Janko Peric (Cambridge, Lib.): Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de Mississauga—Ouest.

Je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-16, Loi concernant la citoyenneté canadienne. Il y a certainement plusieurs députés qui ont connu la même expérience que le député de Kitchener—Waterloo et moi. Cette question me touche de très près et j'aimerais faire part de mon expérience à mes collègues et au pays tout entier.

Jeune garçon, en Croatie, je rêvais du Canada. Je rêvais d'un immense pays. En 1968, à Vienne, j'ai fait la demande et j'ai suivi tout le processus pour venir dans ce pays, et cela a été pour moi un honneur et un privilège. Je n'avais que 18 ans et demi à l'époque.

J'ai choisi ce pays. Je suis venu de moi-même et tout seul. Trois ans plus tard, j'ai demandé la citoyenneté canadienne et je l'ai obtenue deux ans plus tard.

 

. 1540 + -

Dans le bureau de la citoyenneté de Waterloo, dans un ancien immeuble de la poste situé rue King, je revois le visage de nombreuses personnes dans la même situation que moi, et je me souviens du sentiment spécial que nous éprouvions et de leur sourire.

Lorsque je me rends maintenant dans un bureau de la citoyenneté en ma qualité de député, le juge me demande habituellement de faire des commentaires. Lorsque c'est le cas, je dis aux nouveaux Canadiens qu'ils sont des membres égaux de la meilleure société qui soit, la famille canadienne, et qu'ils sont égaux à quiconque est né ici ou aux familles arrivées ici 300 ou 400 ans avant eux. J'ai constaté tout récemment que j'avais tort.

Je ne sais pas si je pourrais me présenter de nouveau dans ce même bureau de la citoyenneté et dire aux nouveaux Canadiens qu'ils sont égaux. Selon le projet de loi C-16, ils ne le sont pas, situation qui est vraiment déplorable. Il est tout à fait déplorable que je ne sois pas un membre aussi égal de la société canadienne que mes propres enfants. Plus de cinq millions de Canadiens sont dans la même situation.

Le gouvernement et le Parlement canadiens font la promotion de l'égalité, en particulier à l'étranger. En vertu de ce projet de loi, il n'y a pas d'égalité. En vertu de ce projet de loi, je suis traité comme un citoyen de deuxième classe. Il n'y a aucun autre ministère où le ministre a le droit et le pouvoir de renverser une décision de la Cour suprême, mais cette mesure législative donnerait ce pouvoir. C'est mal.

Je connais bon nombre de nouveaux Canadiens qui n'ont probablement pas dit toute la vérité pour de nombreux motifs. Peut-être venaient-ils d'un pays où leur vie et leur liberté n'étaient pas protégées par la loi, de sorte qu'ils ont fait appel à tous les moyens possibles pour en sortir et devenir membres de la meilleure famille qui soit.

Le Canada est un des signataires de la convention internationale sur les droits civils et politiques adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 16 décembre 1966. Ce pacte des Nations Unies précise qu'une personne qui a vécu au Canada pendant un minimum de 20 ans, qu'elle soit ou non citoyenne du Canada, peut considérer que le Canada est son pays. Aux fins du paragraphe 12(4) et de l'article 13 du pacte, une telle personne ne peut être expulsée du Canada. Si la personne quitte le pays à l'occasion de ses vacances, on ne peut l'empêcher d'y revenir. Il est clairement précisé dans ces articles que même des non-citoyens, en vertu de la convention des Nations Unies, ont plus de droits que ce que propose le projet de loi C-16.

Supposons qu'une personne, de quelque nationalité qu'elle soit, entre dans l'enceinte de l'ambassade canadienne à Moscou, et qu'une autre entre dans l'enceinte de l'ambassade canadienne à Beijing. Ces deux personnes sont protégées par la Charte des droits. Ce ne sont même pas des immigrants admis ni des citoyens. Cependant, aux termes du projet de loi C-16, des citoyens canadiens ne sont pas traités comme des égaux dans la société canadienne. C'est inadmissible.

 

. 1545 + -

Pouvons-nous juste imaginer combien de nationalités différentes il y a dans ma circonscription de Cambridge, comme des Croates, des Serbes, des Portugais, des Indiens, des Punjabis, des Anglais, des Irlandais, des Écossais, des Hongrois et des Polonais. Tous ces gens ont décidé par choix de venir s'établir au Canada. Ils ont choisi de venir ici, mais ils ne sont pas considérés comme des membres égaux de notre société.

Lorsque j'ai écouté le député de Winnipeg ce matin, j'ai été tout à fait surpris d'apprendre que le caucus néo-démocrate et lui-même appuyaient pleinement le projet de loi C-16. Qu'on me permette de citer ce qu'a dit Alistair Stewart, député de Winnipeg, un membre du CCF, au cours d'un débat qui a eu lieu le 3 avril 1951. Le débat ressemblait à celui d'aujourd'hui. Voici ce que ce député a dit:

    Le ministre a le droit de décider. Ce n'est pas lui faire injure que de rappeler qu'en tant que députés, nous savons tous ce que c'est que d'être en butte à des pressions, à des instances d'inspiration politique. Je veux bien que le ministre conserve ce droit, mais je ne prise guère qu'il ait en cette matière le dernier mot. Je le prie de considérer le plus soigneusement possible la possibilité d'accorder à l'intéressé le droit d'appel à la Cour suprême du Canada[...]. Ce tribunal est[...] impartial. Qu'on lui laisse le soin de décider s'il y a lieu d'imposer cette sanction extrêmement grave qu'est la perte de la citoyenneté. Ce serait une façon de rétablir l'égalité que nous cherchons tous à assurer. Je souhaite que le ministre étudie aussi attentivement que possible cette proposition.

Nous accordons le même pouvoir aux instances politiques plutôt qu'à la Cour suprême, qui doit être impartiale et qui l'est. C'est tout à fait inadmissible.

C'est inacceptable pour cinq millions de Canadiens qui, par choix, ont adopté le Canada comme leur patrie. Je suis l'un d'eux et je suis fier de la société canadienne. J'espère que les députés comprendront à quel point il est dangereux de laisser ce pouvoir entre les mains de politiciens plutôt que de nos juges.

 

. 1550 + -

J'ignore quels seront mes sentiments la prochaine fois que je serai appelé à participer aux travaux des bureaux de la citoyenneté. Je ne devrais pas dire non, mais je ne peux induire les gens en erreur ou leur mentir. Je ne peux aller là-bas et dire aux gens: «Félicitations, vous venez de devenir des citoyens de seconde zone.» J'ignore comment mes collègues verront cela, mais je suis vraiment déçu et déshonoré en tant que député représentant la circonscription de Cambridge. J'espère que mes collègues feront ce qui s'impose lorsque nous voterons à l'étape de la troisième lecture.

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, permettez-moi de féliciter le député de son discours. Je tiens également à féliciter le député de Kitchener—Waterloo pour son engagement envers l'honnêteté et la transparence et sa détermination à ce que tous les Canadiens soient traités sur un pied d'égalité.

Cette journée a été très instructive pour moi. Je ne m'étais pas rendu compte que le projet de loi créerait deux classes de Canadiens. À l'instar de mes collègues qui sont intervenus avant moi, j'ai choisi le Canada comme patrie. Cela fait 45 ans que je vis ici. J'ignorais que soudain je risquais de ne plus être un citoyen de première classe semblable au reste de nos collègues qui sont nés et qui ont grandi dans ce pays. Si ce que j'ai entendu est vrai, je crois vraiment que le gouvernement doit examiner le projet de loi de beaucoup plus près et s'assurer que les Canadiens, d'un bout à l'autre de ce grand pays, ne sont pas divisés selon qu'ils sont nés ici ou qu'ils ont choisi d'immigrer au Canada.

Ma question à mon collègue est la suivante: si le projet de loi n'est pas modifié, s'attend-il à une réaction négative de la part des Canadiens?

M. Janko Peric: Monsieur le Président, de concert avec les autres députés qui ont choisi le Canada, le député et moi partageons les mêmes sentiments que les cinq ou six millions de Canadiens pour qui c'est également le cas. C'est une triste journée pour nous car nous ne sommes pas aussi égaux que nos propres enfants.

Il faut que nous nous efforcions de corriger ça et de créer une mesure législative qui unira tous les Canadiens, quelle que soit leur ancienneté, que ce soit cinq jours ou 500 ans. Si nous voulons créer une société meilleure et plus forte, il faut que nous soyons traités comme des membres égaux d'une même famille.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, j'ai écouté les propos de mon collègue. Il a exprimé ses sentiments sincères et je le félicite de cette sincérité. Cela témoigne de la démocratie qui règne au pays, dont l'incarnation la plus parfaite est certes la Chambre des communes.

Il a parlé des citoyens de seconde zone parce que, à son avis, le rôle du pouvoir judiciaire est trop limité en ce qui concerne la révocation de la citoyenneté. Je rappelle à mon collègue qu'on ne peut révoquer la citoyenneté obtenue à la naissance. On ne peut donc pas comparer la citoyenneté reçue à la naissance à celle qu'on acquiert par la suite. Par définition, il est possible de retirer ce qui a été donné pour des motifs qui se révèlent faux, frauduleux ou illégaux en vertu des lois du Canada.

 

. 1555 + -

Il est impossible de retirer la citoyenneté obtenue à la naissance parce que la personne en cause n'est citoyen d'aucun autre pays. On peut révoquer la citoyenneté d'un citoyen naturalisé canadien qui, à la suite d'une enquête ou d'une décision de la Cour fédérale du Canada sur la recommandation du ministre, est trouvé coupable d'avoir enfreint les lois du pays, tout simplement parce qu'il n'aurait jamais dû l'obtenir. La citoyenneté a été obtenue au moyen de fausses représentations ou par la fraude. Il ne faut pas perdre de vue la présomption et le principe fondamental de la révocation fondée sur la fraude ou la fausse représentation.

Une personne ne peut pas affirmer qu'elle est un citoyen de seconde zone simplement parce qu'il suffit d'une recommandation du ministre pour lancer le processus. Je suis un citoyen naturalisé du Canada et je remercie le Canada des avantages qu'il a procurés à ma famille et à moi-même. Ma femme et moi avons quatre fils qui sont tous des citoyens canadiens de naissance.

J'aimerais que le député réfléchisse à cela et qu'il commente la nécessité de distinguer entre la citoyenneté obtenue à la naissance et celle qu'on acquiert. Quant au traitement par le système judiciaire, la possibilité d'appel devrait être assurée jusqu'au palier de la Cour suprême du Canada. Tout cela est une question de confiance et je ne vais pas déprécier la noble vocation de politicien.

M. Janko Peric: Monsieur le Président, mon collègue a raison de dire que nous devrions avoir le droit d'appel. Or, il n'est pas prévu dans le projet de loi C-16. C'est le reproche qu'on peut lui faire. Je serais le premier à expulser ceux qui obtiennent la citoyenneté en faisant de fausses déclarations ou en cachant des antécédents criminels. Mais les personnes en cause devraient avoir le droit d'en appeler directement à la Cour suprême. Nous ne devrions pas nous en remettre au ministre.

M. Steve Mahoney (Mississauga-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, je félicite le député de Winnipeg-Nord—St. Paul de son intervention, dans laquelle il a abordé la question de l'égalité.

Ce projet de loi devrait être l'occasion de nous réjouir. Je suis vice-président du comité, dont je faisais également partie lorsqu'il a étudié le controversé projet de loi C-63. De nombreux témoins ont comparu et nous ont fait part de leurs préoccupations. Tous les problèmes ont été soulevés et discutés. Malheureusement, lorsque le projet de loi était prêt à être adopté sous le numéro C-63, la session a pris fin et il est resté en plan au Feuilleton. Lorsque la nouvelle session a repris, le projet de loi a été présenté de nouveau, sous le numéro C-16.

Nous devrions nous réjouir, étant donné que le comité a largement eu son mot à dire et a beaucoup influencé la ministre et le ministère, qu'il a convaincus que certaines choses s'imposaient pour valoriser la citoyenneté canadienne. Or, au lieu de nous réjouir, nous nous enlisons dans un débat sur la prétendue création de deux catégories de citoyens au Canada.

Je respecte parfaitement la passion et les profondes convictions de mes collègues, mais nous risquons ainsi de faire croire aux nouveaux Canadiens, aux immigrants, que, lorsqu'ils comparaîtront devant le Bureau de la citoyenneté avec leur famille dans un assez proche avenir, par exemple le jour de la Fête du Canada, et recevront la citoyenneté canadienne, à laquelle ils attachent un très grand prix, cette citoyenneté aura moins de valeur que celle de quelqu'un comme moi, qui suis né au Canada. Il n'est pas juste de transmettre un message aussi négatif et aussi effrayant à des personnes qui sont impatientes de célébrer ce que bon nombre d'entre elles considèrent comme une renaissance.

 

. 1600 + -

Quelqu'un a dit plus tôt à la Chambre qu'on ne pouvait pas savoir ce que signifie la citoyenneté canadienne à moins d'être immigrant. On sous-entend par là que les personnes qui sont nées au Canada ne comprennent pas l'importance de la citoyenneté canadienne.

Autrefois, j'ai fait partie d'une délégation parlementaire chargée de surveiller la tenue d'élections libres en Croatie pour la première fois depuis la guerre. J'ai vu des gens, les larmes aux yeux, qui faisaient la queue dans la rue pour se rendre aux urnes. Je pouvais sentir leur douleur. Je pouvais sentir leur enthousiasme, leur excitation. Je pouvais sentir leur crainte que, d'une façon ou d'une autre, au moment où ils atteindraient la boîte de scrutin, leur droit de vote ne leur soit retiré, que Tito ne sorte de la photographie placée au-dessus de la boîte de scrutin, ou que le soldat armé, se tenant tout près, ne les empêche de déposer leur bulletin de vote. Le droit de vote est un des avantages de la citoyenneté. J'ai vu de mes yeux combien ce droit était important pour ceux qui ont vécu la guerre, la terreur et la haine. Je crois pouvoir comprendre cela, même s'il se trouve que j'ai eu la chance de voir le jour à Sault Ste. Marie, en Ontario, au Canada.

Ma femme est une immigrante d'Angleterre. Elle n'est pas venue au Canada sous la contrainte. Elle dirait peut-être qu'elle cherchait à s'éloigner de ses parents. Elle est venue au Canada en quête d'une vie meilleure. Elle était alors une jeune fille de 18 ans, aux yeux émerveillés, et enthousiasmée de venir dans le magnifique pays dont elle avait entendu parler. Elle est devenue citoyenne canadienne par choix. Si différence il y a, disons que ceux qui choisissent notre pays sont des êtres très spéciaux.

Si l'on veut parler de deux catégories de citoyens, on peut établir une certaine analogie avec les parents d'un enfant adopté qui vient de découvrir que son papa et sa maman ne sont pas ses parents biologiques. Les parents lui répondent toujours ceci: «Nous t'avons choisi. Tu es quelqu'un de très spécial.» Aux néo-Canadiens qui viennent dans notre pays en provenance de sociétés déchirées par la guerre ou d'endroits comme le Royaume-Uni, je dis ceci merci d'avoir choisi le Canada. Ce sont des gens comme eux qui ont contribué à bâtir notre pays.

Le projet de loi doit prévoir un mécanisme nous permettant de retirer le droit de citoyenneté et le droit de vivre dans un endroit exceptionnel à ceux qui nous ont trompés, qui sont venus ici sous de fausses représentations, qui mentent et qui cachent sciemment de l'information et auxquels nous avons accordé le droit de citoyenneté canadienne en leur disant que nous leur sommes reconnaissants d'accepter ce droit et de contribuer à bâtir notre société. S'agit-il là de deux poids et deux mesures? Comme mon collègue l'a mentionné, on ne peut retirer la citoyenneté acquise à la naissance. Il est injuste de comparer les deux.

Il existe des êtres monstrueux. Pensez au fait que Paul Bernardo est encore un citoyen canadien. Qui refuserait, s'il en avait le pouvoir, de retirer la citoyenneté canadienne à cet être malveillant? C'est toutefois impossible, car il est né ici. Il y a bien d'autres exemples, dont celui de Clifford Olson. Nous pourrions en citer d'autres. Il y a d'innombrables individus qui sont mauvais et qui conservent leur citoyenneté canadienne.

La seule option à notre disposition a trait aux gens qui arrivent chez nous et qui s'avèrent avoir été criminels de guerre ou avoir commis des crimes contre l'humanité; j'imagine le tollé que cela créerait dans la population canadienne si le gouvernement était impuissant à révoquer la citoyenneté de ces individus et s'il devait confier à un juge le soin de prendre cette décision au lieu de s'en remettre aux personnes dûment élues qui représentent les Canadiens, ceux qui, en premier lieu, ont accordé la citoyenneté aux individus en question. Les Canadiens accordent la citoyenneté. Ils doivent donc avoir la possibilité de la révoquer quand ils sont trompés.

 

. 1605 + -

L'autre argument qui est injuste et qui envoie un message épouvantable aux immigrants et à ceux qui demandent la citoyenneté canadienne est celui voulant qu'il n'y ait pas de processus d'appel. Parlons clairement. Le processus comporte cinq étapes et fournit au moins trois occasions de demander à la Cour fédérale un examen judiciaire des décisions qui sont prises au cours de ces étapes.

Je ne veux pas jouer sur les mots, mais un examen judiciaire est différent d'un appel, et voici comment il s'applique: le ministre envoie une lettre parce qu'il a une preuve satisfaisante qu'une personne a obtenu par fraude sa citoyenneté canadienne. Le ministre avise par écrit l'individu en question. Ce dernier a le droit de demander à la Section de première instance de la Cour fédérale d'en appeler de la lettre du ministre. Le tribunal convoque des témoins et entend les éléments de preuve. Le tribunal ne détermine pas seulement si le ministre a erré en droit ou non.

Voilà la différence. Dans un examen judiciaire, on tend à revoir le processus dans tous ses détails, à déterminer s'il y a eu une erreur d'interprétation de la loi, alors que, dans un processus d'appel, on s'oppose surtout à une décision, on la reprend complètement, on présente de nouveaux éléments de preuve et tout le reste. De toute évidence, quand la Section de première instance de la Cour fédérale procède à un examen judiciaire de la lettre du ministre et de l'avis à l'intéressé, elle doit convoquer des témoins, se pencher sur tous les éléments de preuve et tenter de juger si la décision est équitable ou non.

C'est très intéressant parce que, si la cour décide que la lettre n'aurait pas dû être envoyée et qu'il n'y a rien qui cloche en ce qui concerne l'individu, autrement dit que l'individu n'a pas commis de fraude, le processus s'arrête là. J'en entendu des gens d'en face et certains autres de ce côté-ci dire que ce n'était pas juste et que le gouvernement devrait avoir le droit d'interjeter appel. On veut jouer sur les deux tableaux. Si le gouvernement conserve le droit d'interjeter appel, on pourrait facilement se retrouver devant un cas de harcèlement.

Je n'arrive tout simplement pas à comprendre comment on peut prétendre à la fois vouloir protéger les droits de la personne— je vais revenir sur la question des droits de la personne et sur les questions humanitaires—et, dans le même temps, donner au méchant et puissant gouvernement le droit d'en appeler de la décision rendue dans le cadre d'une révision judiciaire par la Division d'appel de la Cour fédérale qui estime qu'il n'y a pas eu fraude. S'il en est ainsi, le dossier est clos et la personne conserve sa citoyenneté. Il me semble que c'est une façon de protéger les droits de cette personne.

Ce que je trouve encore plus intéressant, c'est que le Parti réformiste ou l'Alliance, peu importe son nom, soit contre cela, pour les raisons invoquées. Ses députés pensent que le pouvoir appartient plus adéquatement aux juges qu'aux politiciens. On sait bien, quand on veut dénigrer quelque chose, vaut mieux commencer par dénigrer les politiciens. Nous sommes tous une bande de méchants. Nous prenons tous des décisions avec des arrières pensées et on ne peut pas nous faire confiance. Ce sont là des propos qui parviennent jusqu'à nos oreilles.

Alors, j'aimerais bien savoir ce que l'opposition a pensé quand la Cour suprême de la Colombie-Britannique s'est montrée favorable à l'individu qui faisait la promotion de la pornographie infantile. Mais comment un juge peut-il en venir à rendre pareille décision? Oui, comment un juge peut-il prendre pareille décision et quelle solution préconisent-ils? La solution, selon eux, se limite à évoquer la clause dérogatoire, à taper sur les doigts du juge et à annuler la décision. Comme cette décision ne plaisait à aucun d'entre nous, nous avons décidé d'interjeter appel auprès de la Cour suprême du Canada.

 

. 1610 + -

Je ne m'étais pas rendu compte que mon temps était écoulé. J'espère que nous pourrons en débattre encore de façon positive, constructive, afin que les Canadiens puissent bénéficier des avantages réels du projet de loi C-16.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, personne ne demande de traitement spécial. On demande pour chacun le droit de défendre sa citoyenneté en vertu de la Charte. En somme, on demande l'application régulière de la loi.

Le député ne sera peut-être pas d'accord, mais l'application régulière de la loi, c'est le droit de faire appel de conclusions sur des faits à la Cour suprême, comme cela se fait tous les jours dans notre système judiciaire. Le problème, c'est que ce projet de loi nie aux Canadiens d'adoption le droit d'invoquer la Charte. Il leur refuse l'application régulière de la loi.

Nous ne voulons pas que la révocation de la citoyenneté soit une décision politique. Nous voulons que ce genre de décision relève des tribunaux, qui ne sont pas des entités politiques.

Au cours d'une visite qu'il effectuait la semaine dernière dans une circonscription voisine de la mienne, le premier ministre a déclaré qu'il y avait une chose fondamentale dans la vie de notre pays, c'est la nécessité de s'assurer que les droits des citoyens soient protégés par les tribunaux et non pas assujettis aux caprices des élus. Le premier ministre avait bien raison. Il faisait en cela référence au principe voulant que les juges soient tenus politiquement responsables.

Les droits d'une personne ne doivent pas tenir à un concours de popularité, parce que la loi est aveugle. C'est ainsi que la loi est appliquée, et non pas en fonction de la puissance ou de la faiblesse de chacun. Nous nous efforçons de traiter tout le monde sur un pied d'égalité.

Tous les groupes de défense des droits qui ont comparu devant nous, notamment B'nai Brith et M. Narvey, de la coalition des synagogues de Montréal, que la question des crimes de guerre, des crimes contre l'humanité et de l'holocauste préoccupait, ont plaidé en faveur du droit d'appel. Le député a-t-il l'intention de dire aux Canadiens d'adoption qu'ils n'ont pas le droit d'appeler d'une décision judiciaire? C'est exactement ce qu'il dit. S'il ne sait pas faire la différence entre l'appel d'une décision judiciaire et l'examen de cette décision, il a un problème.

Mon collègue a dans son bureau une note de M. Kenneth Narvey, dans laquelle ce dernier réfute les six raisons invoquées par le gouvernement.

Le député ne veut certainement pas refuser aux Canadiens d'adoption le droit à l'application régulière de la loi et à la protection de la Charte des droits. Si c'est le cas, il peut être certain que j'irai débattre de la question à ses côtés dans sa propre circonscription.

M. Steve Mahoney: Monsieur le Président, c'est la pire menace qu'on m'ait jamais faite. Si le député le veut, il peut venir dans ma circonscription et débattre avec moi n'importe où de n'importe quelle question, je suis prêt. Il ne s'agit pas de se perdre en attaques personnelles. Le député essaie de m'intimider, il me menace.

J'ai reçu cette note de M. Narvey, mais ce n'est pas ce dernier qui me l'a adressée. C'est le député de Kitchener—Waterloo qui me l'a fait parvenir, me disant que je devrais simplement être d'accord sur tous les points soulevés par M. Narvey. J'ai lu la note en question et je n'étais pas d'accord.

Tels sont les faits. Le député parle d'appel? Il parle de la protection des droits? Il ne faut pas exagérer. La procédure comporte cinq étapes et prévoit au moins trois possibilités de demander à la Cour fédérale de procéder à un examen judiciaire des décisions qui sont prises au cours de ces étapes. On peut aussi, moyennant autorisation, permission, interjeter appel, auprès de la Division d'appel de la Cour fédérale et de la Cour suprême, des décisions rendues à l'issue de ces examens judiciaires. Cela représente au total une possibilité de neuf examens et appels devant les tribunaux, sans compter l'examen judiciaire initial de la cour fédérale au tout début du processus de révocation.

 

. 1615 + -

Certains députés exagèrent au sujet de ce projet de loi parce qu'ils se laissent emporter par l'émotion et les réactions irrationnelles. Comme je l'ai dit, on devrait se réjouir au lieu de se perdre en attaques personnelles, en menaces ou en manoeuvres d'intimidation de tous les côtés de la Chambre.

M. John Bryden (Wentworth—Burlington, Lib.): Monsieur le Président, nous avons raté une excellente occasion car, comme vient de le rappeler le député de Mississauga-Ouest, nous sommes en l'an 2000 à débattre d'une nouvelle loi sur la citoyenneté pour le nouveau millénaire et voilà que nous sommes en profond désaccord sur des questions des plus fondamentales. Nous avons raté une occasion en or et j'en suis vraiment fort attristé.

Le serment de citoyenneté me pose problème dans ce texte. Je voudrais d'abord revenir rapidement sur la question soulevée par le député de Kitchener—Waterloo. À l'issue de ce débat, après tous les beaux discours, il ressort au fond des propos du député de Kitchener—Waterloo que nous mettrons en place un processus pour un groupe de Canadiens et un autre processus pour un autre groupe de Canadiens.

Comme le député de Kitchener—Waterloo, je trouve que cette disposition est foncièrement mauvaise et qu'il est possible d'en apporter la preuve. Selon le député de Winnipeg-Nord—St. Paul, cette différence de traitement s'expliquerait du fait que certains Canadiens sont nés sur ce territoire et que leur citoyenneté ne peut être révoquée car ils n'ont nulle part d'autre où aller. Il a ensuite présumé que la citoyenneté des néo-Canadiens pouvait être révoquée car ces derniers peuvent retourner dans leur pays d'origine s'il est découvert qu'ils sont entrés au Canada et ont demandé la citoyenneté en faisant de fausses déclarations.

Je rappelle au député Winnipeg-Nord—St. Paul que si des personnes originaires de l'Inde, pays qui ne reconnaît pas la double nationalité, décident de s'établir au Canada et d'en obtenir la citoyenneté, elles perdent d'office leur citoyenneté indienne. Ce que cela veut dire essentiellement, c'est que si l'on révoque la citoyenneté de cette catégorie de nouveaux Canadiens qui viennent de l'Inde, ces derniers ne peuvent pas retourner chez eux.

Le projet de loi C-16 ne prévoit pas cela, mais il devrait le faire. S'il le fait, il devra créer une nouvelle catégorie de Canadiens qui devront être traités selon un processus différent. Ce qui ne va pas, fondamentalement, dans ce projet de loi tel qu'il est actuellement libellé, c'est qu'il établit un régime différent pour la révocation de la citoyenneté, un régime judiciaire différent que celui qui serait applicable à d'autres Canadiens relativement à d'autres infractions à la loi. Je pense que le député de Kitchener—Waterloo a soulevé un point très important.

Le problème que j'ai avec cette mesure, monsieur le Président, est différent, mais très étroitement lié à ce dernier. C'est que le projet de loi C-16, tel que libellé actuellement, propose un nouveau serment de citoyenneté qui n'a jamais été débattu à la Chambre. Il propose un nouveau serment de citoyenneté qui, à mon avis, ne reflète pas ce que c'est que d'être canadien, qui ne reflète pas les fondements de l'identité canadienne.

C'est un nouveau serment de citoyenneté qui a été créé dans les officines gouvernementales. C'est un serment de citoyenneté qui a été créé quelque part par un fonctionnaire, voire par un sous-traitant, monsieur le Président. Nous ne connaissons pas la genèse du serment de citoyenneté prévu dans le projet de loi C-16. Or, quand il s'agit d'une chose revêtant une importance aussi vitale, nous devrions savoir et la Chambre aurait dû participer à sa conception. Hélas, elle ne l'a pas fait.

Le débat sur le serment de citoyenneté a une vraie genèse, à laquelle j'ai en fait participé. Quand je suis arrivé au Parlement en 1993, le premier comité auquel j'ai siégé a été celui de la citoyenneté et de l'immigration. Nous avons analysé en 1993-1994 ce qu'il fallait faire pour améliorer la loi sur la citoyenneté et l'adapter au nouveau millénaire. Le comité a demandé à tous les témoins qu'il a entendus et qui étaient de nouveaux venus au Canada ce que signifiait pour eux le fait d'être Canadien. De tous les comités dont j'ai fait partie, c'était le plus inspirant.

 

. 1620 + -

Nous avons entendu des gens de Croatie, comme mon ami de Cambridge. Nous avons entendu des gens de l'Asie du sud-est, des Antilles et du Royaume-Uni. Ils ont tous dit à peu près la même chose, soit que le Canada était admiré partout dans le monde et qu'il exerçait une forte attraction sur les gens de partout en raison de ses principes.

Le Canada est admiré partout dans le monde en raison des principes qui sont inclus dans la Charte des droits, de la règle de droit, de notre respect de la démocratie, de notre liberté de parole et de notre respect des droits humains fondamentaux. Nous avons entendu cela répété à maintes reprises.

Au moment de la rédaction du rapport, le comité a décidé qu'il devrait y avoir une déclaration de citoyenneté. Nous avons pensé qu'il serait merveilleux de reprendre les principes de la Charte canadienne des droits et de les inclure dans une déclaration servant de préambule au projet de loi sur la citoyenneté.

Pour ce qui est du serment, et je dois mentionner le serment, le comité a convenu à l'unanimité qu'il devait être revu. Je vais vous lire le serment actuel, qui sera modifié par le projet de loi C-16. Le serment présenté à notre comité en 1993-1994 disait seulement:

    J'affirme solennellement que je serai fidèle et porterai sincère allégeance à Sa Majesté la Reine Elizabeth Deux, Reine du Canada, à ses héritiers et successeurs, que j'observerai fidèlement les lois du Canada et que je remplirai loyalement mes obligations de citoyen canadien.

Je crois que pratiquement tous les néo-Canadiens entendus par le comité ont déclaré que ce serment était inadéquat. Ils ont dit avoir été déçus au moment de leur audience de citoyenneté, pas seulement en raison de la référence à un monarque étranger, mais parce qu'ils estimaient que ce serment ne donnait pas une idée juste de ce que c'est qu'être canadien.

Le comité a produit un rapport intitulé «Vivre ensemble». Je signale que nous avons entendu des néo-Canadiens et des gens qui sont nés au Canada. Les recommandations de ce rapport étaient premièrement qu'une déclaration de citoyenneté devrait exprimer la vision commune des Canadiens quant à leur avenir et l'importance qu'ils attachent à leur citoyenneté.

Deuxièmement, que la déclaration devait refléter les valeurs fondamentales de notre concept de citoyenneté.

Troisièmement, que le gouvernement devait songer à faire appel aux écrivains du Canada pour contribuer à la rédaction de cette déclaration. Nous voulions des poètes. Nous voulions amener tout le monde à exprimer ce que signifie être Canadien, en quelques lignes reflétant cet état d'esprit.

La quatrième recommandation était que la déclaration devrait être rédigée dans une langue noble et édifiante et inspirer la fierté d'être Canadien.

Que s'est-il passé? Cinq ans après, le projet de loi C-63, qui est maintenant le projet de loi C-16, a été déposé à la Chambre des communes. J'étais ici, à ma place, lorsqu'il a été présenté. Il ne comportait aucune déclaration de ce que signifie être citoyen canadien. On n'a pas modifié le préambule du projet de loi C-16. Au lieu de cela, ce que nous avons eu, c'est un serment d'allégeance réchauffé sans aucun lien avec ce que nous ont dit les néo-Canadiens lorsqu'ils ont comparu devant le comité. Ce qui est ahurissant, c'est que nous ne savons même pas d'où est tiré ce serment d'allégeance. Il est apparu soudain dans la mesure législative sans débat préalable, sans débat au second comité de la citoyenneté. Je vais le lire. Il dit ceci:

    Dorénavant, je promets fidélité et allégeance au Canada et à Sa Majesté Elizabeth Deux, Reine du Canada. Je m'engage à respecter les droits et libertés de notre pays, à soutenir nos valeurs démocratiques, à observer fidèlement nos lois et à remplir mes devoirs et obligations de citoyen(ne) canadien(ne).

Qui a écrit cela? Qui a eu l'audace d'écrire ces mots sans consulter les Canadiens? Qui a eu l'audace d'écrire ces mots sans les soumettre au Parlement où nous aurions pu les débattre, et quels sont ces mots du début à la fin? Voici les mots: «Je promets fidélité et allégeance au Canada.» Voilà qui est redondant. Les mots fidélité et allégeance, en anglais du moins, sont synonymes. Si nous analysons l'histoire du serment, nous pouvons voir comment nous en sommes venus à cette phrase. Elle provient de la phrase correspondante dans la version française du serment actuel qui est la suivante: «Je jure fidélité et sincère allégeance à Sa Majesté la reine.» C'est une traduction directe vers l'anglais de la version française de l'actuel serment, et c'est une mauvaise traduction. Tout professeur de français ou d'anglais à l'école publique ne l'approuverait pas.

 

. 1625 + -

Le serment continue comme suit: «Je m'engage à respecter les droits et libertés de notre pays.» Nous faisons mieux que ça. Nous respectons non seulement les droits et libertés de notre pays, mais aussi ceux d'autrui. C'est ce qui fait de nous des Canadiens. Il est inacceptable de limiter ce respect à notre pays uniquement.

Le serment poursuit en ces termes: «à défendre nos valeurs démocratiques». Les valeurs démocratiques sont perçues différemment selon le pays où l'on vit. Les habitants de l'Allemagne de l'Est se souviendront que cette région s'appelait en fait la République démocratique allemande. Le Congo, où les habitants s'affairent à se tuer le plus rapidement possible, s'appelle officiellement la République démocratique du Congo. Le Fidji, où une guerre civile a lieu et où le gouvernement est tenu en otage, s'appelle officiellement la république souveraine démocratique de Fidji. Autre exemple, la République populaire démocratique de Corée, qui est en fait la Corée du Nord.

Autrement dit, nous ne pouvons pas prêter allégeance aux valeurs démocratiques du pays auquel nous appartenons. Nous devons plutôt prêter allégeance à des valeurs démocratiques abstraites, parce que comme nous l'avons vu en Allemagne au cours des années 1930 qui ont mené à la Seconde Guerre mondiale, il semble que la dictature aime bien altérer les valeurs démocratiques pour se dissimuler derrière des allures de démocratie. Non. Si nous devons porter respect à des valeurs démocratiques, il doit s'agir de valeurs démocratiques abstraites.

On dit enfin: «à observer fidèlement nos lois et à remplir mes devoirs et obligations de citoyen(ne) canadien(ne)». Cela s'applique dans tous les pays du monde. Bien sûr que les citoyens doivent respecter le Code de la route, le Code criminel et les autres lois. Cela ne nous rend pas différents des autres à titre de Canadiens.

Lorsque ce serment a été présenté à la Chambre des communes, comme plusieurs de mes collègues, j'ai réagi de façon très négative. Nous avons très rapidement tenté de comprendre l'essence de ce que nous avions entendu devant ce comité en 1993-1994. Ce que j'ai proposé à ce moment-là, et il semble que je sois à peu près le seul à parler du serment de citoyenneté, c'est de revoir la formulation du serment de citoyenneté dans le but de tenir compte des cinq principes contenus dans la Charte des droits, qui sont les fondements mêmes de notre existence à titre de Canadiens. Ces cinq principes sont l'égalité des chances, la liberté de parole, la démocratie, les droits fondamentaux de la personne et la primauté du droit.

Le député de Kitchener—Waterloo est présentement au supplice dans son fauteuil, parce qu'il est d'avis que la primauté du droit n'est pas respectée, puisque nous avons deux procédures établies pour deux groupes de Canadiens distincts. Je crois que le député de Kitchener—Waterloo a raison. Nous ne pouvons avoir deux normes différentes. Tous les Canadiens doivent être traités de la même façon.

Je vais très rapidement passer en revue ces cinq principes. Je dois dire que lorsque j'ai proposé ça à la Chambre, les réactions ont été positives. Mais nous n'avons pas eu l'occasion d'en débattre autre que le fait que j'en ai parlé pendant le temps dont je disposais.

Ce que je veux souligner est l'évidence même. L'égalité des chances est réellement au centre de ce qu'être Canadien signifie. Nous sommes différents à bien des égards. Mais ce qui est essentiel, c'est que chacun d'entre nous, à titre individuel, ait l'occasion de se mesurer aux autres, sur un pied d'égalité, en vue d'avoir accès à ce que la vie à de bon à offrir. C'est donc une question d'assurer l'égalité des chances. C'est pourquoi nous, les libéraux, nous croyons au régime d'assurance-maladie. Nous croyons que, sans égalité en matière de santé, les gens ne peuvent être compétitifs.

Le deuxième principe est la liberté de parole. Beaucoup de néo-Canadiens qui ont comparu devant nous venaient de pays où ils ne jouissaient pas de choses comme la liberté de parole. La première chose qui se passe dans une démocratie qui veut devenir une dictature est qu'on musèle la presse. Bien qu'il soit parfois très dur pour nous, les ministériels, de supporter les attaques dont nous sommes presque quotidiennement la cible dans la presse nationale, cela fait néanmoins partie intégrante de la démocratie et c'est absolument essentiel. La liberté de parole est absolument essentielle.

 

. 1630 + -

J'ai déjà parlé de la démocratie.

Les droits fondamentaux de la personne ne sont pas une chose que nous les Canadiens défendons pour notre propre compte, c'est quelque chose que nous défendons dans le monde entier. Nous sommes sincèrement inquiets de ce qui se passe en Sierra Leone. Nous étions sincèrement inquiets de ce qui se passait en Bosnie et au Rwanda. C'est ça être Canadien.

Enfin, il y a la primauté du droit. Ce n'est pas tant obéir aux lois qui est important que d'en apprécier la valeur. Le fait qu'il y ait en face de moi des députés séparatistes, qui veulent démanteler le pays, témoigne de la vigueur de notre démocratie. Pourtant, je suis fier du fait qu'ils n'imaginent pas obtenir ce résultat autrement que par la primauté du droit. Ce sont de bons parlementaires, tout autant que moi de ce côté de la Chambre. Je suis fier d'être dans la même enceinte qu'eux, même si je rejette leur postulat fondamental. Ils croient qu'ils ne pourront atteindre leur but qu'en respectant l'application régulière de la loi, la primauté du droit. Je suis fier de siéger en cette Chambre avec des gens qui pensent ainsi.

J'ai proposé ce serment. La Chambre l'a rejeté, ce qui n'est pas surprenant. Une chose m'a déçu cependant: lorsque j'ai proposé ma version du serment comportant ces cinq principes, j'ai demandé qu'on procède à un vote libre et je ne l'ai pas obtenu. J'ai remarqué que, non seulement les députés de mon côté, mais aussi ceux du NPD, du Parti conservateur, et certainement ceux du Bloc québécois, ont voté en bloc. On n'a même pas essayé d'envisager la possibilité d'adopter un serment fait au Canada, un serment qui, quels que soient ses mérites et ses torts, aurait reflété les principes de la Charte des droits. Si les députés n'aimaient pas les autres éléments de ce serment, s'ils ne voulaient pas voir disparaître la référence à la Reine ou s'ils s'opposaient à l'idée de mentionner Dieu, soit. Cependant, ce texte reflétait parfaitement ce qu'est le Canada tel que l'exprime la Charte des droits, soit un pays où règne la liberté d'expression, la démocratie, la primauté du droit, l'égalité des chances et le respect des droits fondamentaux de la personne. Voilà ce que signifie être un Canadien. Tout nouveau Canadien arrivant dans ce pays le sait bien.

Dire que j'ai été déçu est un euphémisme. Je pense que le gouvernement et même le Parlement ont fait preuve de lâcheté, quoique je répugne à employer ce mot, en autorisant l'utilisation d'un serment de citoyenneté qui ne reflète pas l'esprit qui se rattache au fait d'être un Canadien, du moins du point de vue de la Chambre. On n'a pas débattu de cette question à la Chambre. C'est pourtant notre mandat. Cette Chambre est dépositaire de tout ce qui constitue la nationalité canadienne. C'est le point de convergence. Nous aurions dû débattre de ce serment. Il est répréhensible de ne pas l'avoir fait.

Comme le député de Cambridge, je me demande moi aussi ce que je ferai quand j'irai au bureau local de la citoyenneté assister à la cérémonie où ces nouveaux Canadiens idéalistes se présenteront devant le commissaire à la citoyenneté, et non plus maintenant le juge de la citoyenneté, et liront, la main levée, un serment de citoyenneté dont le gouvernement et le Parlement n'ont jamais débattu ni jamais eu le courage d'en examiner même la teneur.

Voici, à mon avis, un cas où nous avons besoin du Sénat. Je crois que la Chambre des communes a manqué à son devoir en laissant passer un serment de citoyenneté qui n'est empreint d'aucun élément du patrimoine et n'a aucun rapport avec ce que cela signifie réellement qu'être Canadien. Il s'agit simplement d'un serment qui a été créé quelque part à huis clos. Nous ne savons pas où. Nous nous attendons à ce que les nouveaux venus au Canada utilisent ce serment non seulement pour mieux comprendre le Canada, mais pour s'engager à faire partie du Canada. C'est inacceptable.

Je propose que le Sénat examine très attentivement ce projet de loi. S'il ne peut pas en arriver à un serment qui rende bien les principes de ce que c'est qu'être Canadien, je souhaite qu'il rejette le serment contenu dans la mesure à l'étude. Il est absolument inacceptable de proposer aux nouveaux Canadiens de prêter un nouveau serment, un serment soigneusement révisé, alors que jamais, en tant que parlementaires et en tant que Canadiens, nous n'avons participé nous-mêmes à la création de ce nouveau serment. Il incombe maintenant au Sénat de combler cette lacune.

 

. 1635 + -

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais faire quelques observations et féliciter le député d'avoir exprimé avec passion ses convictions au sujet du projet de loi dont nous sommes saisis.

J'ai en main copie d'un communiqué de l'organisme B'nai Brith Canada. Il dit que, si nous adoptons les motions nos 4 et 5, elles rendront le projet de loi plus équitable. Cet organisme est très prudent. Il croit que ce projet de loi est équitable et que, si ces motions étaient adoptées, le projet de loi serait renforcé. Je félicite l'organisme B'nai Brith Canada d'avoir présenté un argument aussi pondéré et de laisser les députés voter selon leurs convictions sur cette question. L'organisme ne brandit aucune menace.

J'attire l'attention de la Chambre sur un autre communiqué, diffusé par un groupe dirigé par M. W. Halchuk. Il dit que le projet de loi C-16 est discriminatoire et fondé sur la race. Il ajoute que, si un député appuie le projet de loi C-16, il devra faire face à des conséquences et perdre son siège est pire que de se voir «refuser l'investiture par le parti». Si nous recevons de tels communiqués de personnes qui veulent promouvoir la citoyenneté canadienne tout en minant la liberté et la démocratie dans les débats, c'est qu'elles tentent également de nous faire peur de tout simplement penser. Voilà la vraie menace à la citoyenneté canadienne.

Je suis citoyen adoptif du Canada. Je suis Canadien naturalisé. Ma loyauté envers le Canada est indéfectible. Mais j'estime que, si le projet de loi sur la citoyenneté est adopté, comme le député de Mississauga-Ouest l'a dit plus tôt au cours du débat, il y aura lieu de célébrer.

Je ne peux m'empêcher de commenter cette menace qui a été faite contre les députés par M. Halchuk. Je voudrais revenir sur une autre observation, soit «la citoyenneté est une question trop importante pour être laissée aux politiciens.» Que pense des politiciens la personne qui dit cela? Qu'on le veuille ou non, le gouvernement canadien et le Canada même continueront d'être dirigés par des politiciens et nous aurions avantage à croire en notre profession, au noble appel de la politique. Des menaces naissent la peur et elles n'ont pas leur place dans la chambre de la démocratie qu'est la Chambre des communes.

Le député de Kitchener—Waterloo a dit plus tôt que s'il y avait une violation de la Charte des droits et libertés, il y a un prix à payer pour cette violation. Cette loi existe déjà et doit être revue par la Cour suprême du Canada. Nous ne pouvons la retirer. Aucune loi du Parlement ne peut enlever à la Cour suprême du Canada le droit d'entendre un argument faisant état de la violation de la Charte des droits et libertés. Agiter la crainte que cela ne se fasse pas donne justement prise à la peur.

On a soutenu qu'il n'y avait pas de place pour un appel. À la page 8 du projet de loi, le paragraphe 18(4) prévoit ce qui suit:

    Le ministre donne sans délai avis de l'arrêté à l'intéressé et...

M. John Bryden: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le député de Winnipeg-Nord—St. Paul parle uniquement de l'intervention faite plus tôt par le député de Kitchener—Waterloo. Je viens de prendre la parole, et je souhaiterais que, s'il a quelque chose de constructif à dire de ma propre intervention, le député veuille bien le faire.

Le vice-président: Il est pris bonne note du rappel au Règlement. Le député de Winnipeg-Nord—St. Paul a la parole pour poser des questions ou faire des observations au sujet de l'intervention du député de Wentworth—Burlington. Je suis persuadé qu'il fera porter ses propos sur cette dernière intervention.

M. Rey D. Pagtakhan: Monsieur le Président, comme le député a fait lui aussi allusion à cette question, il est normal que je commente cet élément du débat. Comme je n'ai pas terminé, le député est allé un peu trop vite en affaire en disant que je ne parlerais pas de l'autre élément de son intervention. Je manquerai peut-être de temps, mais j'ai l'intention de le faire.

 

. 1640 + -

Permettez-moi de poursuivre mon discours, monsieur le Président. Avant d'être interrompu...

Le vice-président: Je dois rappeler au député qu'il a déjà pris cinq des dix minutes de la période des questions et observations. Il y a peut-être aussi d'autres députés qui veulent intervenir. Le député ne devrait pas tarder à conclure.

M. Rey D. Pagtakhan: Si vous me permettez, monsieur le Président, je voulais présenter des observations dans le cadre de la procédure parlementaire. En fait, je n'ai même pas envie de poser une question. Quoi qu'il en soit, je respecte votre opinion, monsieur le Président.

Le paragraphe 18(4) prévoit ceci: «Le ministre donne sans délai avis de l'arrêté à l'intéressé et», je tiens à le souligner, «de son droit de demander le contrôle judiciaire prévu à l'article 18.1 de la Loi sur la Cour fédérale.»

La primauté du droit est fondamentale, comme l'a signalé le député de Wentworth. La primauté du droit exige qu'aucun immigrant qui veut obtenir la citoyenneté canadienne ne viole sciemment ce principe de légalité.

Le principe de légalité est violé s'il y a fausse déclaration et fraude. Telle est l'essence même de l'infraction au principe de légalité, le non-respect de la loi elle-même. Le député de Wentworth a bien dit que nous ne devons pas avoir deux poids deux mesures en matière de citoyenneté. Je conviens que le projet de loi ne prévoit qu'une seule norme. Et c'est celle de la révocation de citoyenneté. Nous ne pouvons donc pas imaginer une autre norme pour les Canadiens nés au Canada, car nous n'établissons pas une autre norme pour ce qui est de révoquer la citoyenneté de naissance. Il est donc illogique de comparer les deux.

Compte tenu de la façon dont le député de Wentworth a présenté l'amendement qu'il propose d'apporter au serment, j'appuie en principe son amendement, car nous formons effectivement un seul peuple à l'égard de la suprématie de Dieu. Cette déclaration, je me permets de le rappeler à la Chambre, fait déjà partie du préambule à la Charte canadienne des droits et libertés. On peut la répéter ici, mais il me semble qu'elle figure déjà dans la loi fondamentale de notre pays. Telle est donc ma position là-dessus.

Quant à supprimer l'allégeance à la reine, je dois dire très franchement que je crois dans le patrimoine du Canada.

M. John Bryden: Monsieur le Président, il y a deux choses. Pour ce qui est du premier point soulevé par le député, on a encore une série de règles pour un groupe de Canadiens et une autre série de règles pour un autre groupe de Canadiens. À mon avis, cela va à l'encontre du principe de l'égalité devant la loi. J'ai beaucoup de difficulté à accepter cela. À cet égard, je trouve que le point soulevé par le député de Kitchener—Waterloo est très important et j'espère que le Sénat examinera cet aspect également.

Pour ce qui est de l'autre point, je remercie le député de Winnipeg-Nord—St. Paul pour son appui à l'égard de ce que j'essaie de faire avec le serment. Je dirai que la reine n'est pas le vrai problème ici. Le vrai problème, c'est que le serment devrait dire aux nouveaux venus dans notre pays ce que c'est que d'être Canadien et quels sont les principes fondamentaux de la charte. C'est ce qui importe le plus.

Le fait que la reine soit mentionnée ou non dans le nouveau serment n'a pas vraiment d'importance en bout de ligne—et je crois toutefois qu'il faudrait mentionner Dieu—mais nous devons avant tout énoncer les principes fondamentaux de la charte pour les nouveaux venus dans notre pays. Je vais les répéter encore une fois parce que je crois vraiment que ces principes nous unissent en tant que Canadiens. Ces principes sont les suivants: l'égalité des chances, la liberté d'expression, la démocratie, les droits fondamentaux de la personne et la primauté du droit. Ils n'existent pas seulement pour nous, Canadiens. Nous devrions voir à ce que ces principes soient respectés pour le monde entier. C'est ce que cela veut dire que d'être Canadien.

 

. 1645 + -

M. Inky Mark (Dauphin—Swan River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, tout d'abord, le député de Kitchener—Waterloo a parfaitement raison de dire que notre pays ne peut accepter deux catégories de citoyens. Il a raison de dire que nous devons tous être égaux.

Je suis renversé d'assister aujourd'hui à ce débat à la Chambre des communes, à l'aube d'un nouveau millénaire. Depuis des années, les Nations Unies affirment que le Canada est le pays du monde où bien des étrangers veulent s'établir, acquérir la citoyenneté canadienne, vivre dans la prospérité, la paix et l'harmonie et être traités équitablement, ce qui n'est pas toujours le cas dans leur pays d'origine. Le fait d'écouter aujourd'hui les interventions des députés du parti ministériel dans le cadre de ce débat m'a vraiment ouvert les yeux.

Comme je l'ai déjà expliqué, j'ai immigré au Canada en 1955, à l'âge de six ans, en provenance d'un pays déchiré par la guerre. Après avoir vécu ici 45 ans, j'ai peine à croire que l'on discute de la question de savoir si mon statut de citoyen canadien est équivalent à celui de mon fils ou de ma femme, tous deux nés dans ce pays.

De par son existence même, ce débat justifie qu'on fasse quelque chose au sujet du projet de loi à l'étude, qu'un comité l'examine et qu'il y apporte les amendements qui s'imposent. Je ne pense pas que notre pays puisse accepter le point que le député de Kitchener—Waterloo a soulevé, à savoir que la procédure différera foncièrement selon que l'on est un Canadien né dans ce pays ou un Canadien par choix. Si la procédure est différente, il faut alors faire quelque chose pour remédier à cela. À mon avis, cela n'unifiera certainement pas notre pays.

Nous nous targuons de vivre dans un pays multiculturel. Je suis certain que cette question sera une grande source de dissension. Je le répète, je ne peux croire ce que j'entends aujourd'hui dans le cadre de ce débat sur la citoyenneté et sur la signification du projet de loi pour notre citoyenneté.

Je voudrais citer la politique de l'Alliance canadienne relativement à l'égalité de tous les citoyens devant la loi. La politique numéro 61 dit:

    Nous affirmons l'égalité de tous devant la loi et le droit de chacun à la protection et aux avantages de la justice, sans discrimination.

En d'autres termes, si nous devenons des Canadiens, même si nous ne sommes pas nés au Canada, nous sommes alors traités comme des Canadiens à 100 p. 100. Il n'y a pas deux catégories. Nous obtenons les mêmes droits que tous et ne devons pas être traités comme des citoyens de seconde zone. C'est le débat qui a lieu à la Chambre aujourd'hui.

Ce projet de loi va abroger et remplacer l'actuelle Loi sur la citoyenneté adoptée en 1977. Le projet de loi C-16 renferme peu de modifications par rapport au projet de loi précédent, le projet de loi C-63. Il apporte plusieurs modifications à la loi actuelle afin d'offrir des lignes directrices mieux définies, de mettre à jour des dispositions, de remplacer les procédures actuelles, d'ajouter une nouvelle structure administrative et d'accroître le pouvoir du ministre de nier la citoyenneté à certains.

Le projet de loi C-16 est présenté comme la première grande réforme de la citoyenneté en plus de 20 ans, comme une tentative pour moderniser la loi afin qu'elle reflète mieux la véritable valeur de la citoyenneté canadienne. Cependant, même si certaines dispositions sont mieux définies que dans la loi précédente, le projet de loi C-16 ne constitue pas une réforme moderne importante. Je le répète, s'il s'agissait d'une réforme moderne, nous ne discuterions certes pas du statut de la citoyenneté comme on le fait dans le projet de loi. Des domaines essentiels ont été négligés alors que d'autres ont été modifiés de façon négative.

Le ministre a reçu en 1994 des recommandations du Comité permanent de la citoyenneté et de l'immigration, dominé par les ministériels. Je le répète, comme certains députés l'ont signalé, les témoins qui ont comparu devant le comité ont formulé de nombreuses recommandations dont on n'a pas tenu compte dans la rédaction de ce projet de loi. En fait, le gouvernement a mis plus de cinq ans à élaborer cette mesure législative qui ne donne même pas suite aux principales recommandations du comité.

 

. 1650 + -

Concernant la citoyenneté de naissance dont il est question au paragraphe 4(1), le projet de loi C-16 stipule que tous les enfants nés au Canada, à l'exception des enfants de diplomates étrangers, continueront d'acquérir automatiquement la citoyenneté canadienne, sans égard au statut d'immigration ou de citoyenneté de leurs parents.

À ce sujet, bien des pays dont sont issus les Canadiens ne reconnaissent qu'un seul statut. Ils n'autorisent pas la double citoyenneté. Moi-même, j'ai demandé à la Chine si elle reconnaissait la double citoyenneté et la réponse a été négative. En d'autres mots, si j'étais un jour expulsé de ce pays, où irais-je? Je ne le sais vraiment pas.

L'exigence applicable au citoyen par attribution, soit la présence au Canada, est énoncée à l'alinéa 6(1)b). Le projet de loi C-16 définit l'expression «résident permanent» de façon plus précise que ne le fait la loi actuelle. Celle-ci peut donner lieu à une interprétation fort vague. Certaines personnes ont été considérées comme résidant au Canada parce qu'elles y avaient un compte à la banque ou y possédaient des biens, alors qu'elles n'avaient jamais vraiment vécu en sol canadien.

Toujours sur le même point, en ce qui concerne les propos qui ont été tenus aujourd'hui concernant les indésirables, les gens qui ont un dossier judiciaire et qui sont entrés illégalement au Canada, je pense que personne ne s'objectera à ce qu'on s'en débarrasse. Là n'est pas la question. Ce dont il est question ici, c'est de citoyens bons, respectueux des lois et qui ont apporté leur contribution à notre pays. Il faut absolument protéger leurs droits.

En vertu du projet de loi, une personne doit avoir résidé au Canada 1 095 jours au cours des six dernières années précédant la demande de citoyenneté. Le projet de loi C-16 ne prévoit aucun mécanisme afin de déterminer les dates d'arrivée au Canada et de départ du Canada des personnes qui font une demande de citoyenneté, et il n'est pas question d'en mettre un au point.

Les pénalités pour les retards bureaucratiques figurent à l'alinéa 6(1)b)(i). La loi en vigueur permet aux individus dont la revendication du statut de réfugié est approuvée de compter chaque journée complète de résidence au Canada à compter de la date de la demande comme une demi-journée pour le calcul du total nécessaire pour faire une demande de citoyenneté. Le projet de loi C-16 élimine cette disposition, de sorte que désormais les personnes qui feront une demande de citoyenneté seront pénalisées pour les retards bureaucratiques, même quand ces retards ne leur sont pas imputables.

En ce qui concerne l'adoption à l'étranger, l'article 8 du projet de loi C-16 ne fait plus une distinction aussi grande entre un enfant étranger adopté par citoyen canadien et un enfant né au Canada. En vertu de la loi actuelle, un enfant étranger adopté par un citoyen canadien doit avoir été admis au Canada à titre de résident permanent avant de se voir octroyer la citoyenneté. La loi actuelle exige que l'enfant soit parrainé, qu'il ait subi des examens médicaux et que l'on ait procédé aux vérifications judiciaires et de sécurité nécessaires, exigence que supprime ce projet de loi. La nouvelle législation permettra aux parents adoptifs d'obtenir plus facilement la citoyenneté canadienne pour l'enfant en cas d'adoption à l'étranger.

Le projet de loi C-16 stipule que, pour que la citoyenneté puisse être octroyée à un mineur, l'adoption doit avoir créé un véritable lien de filiation entre l'adopté et l'adoptant, qu'elle doit avoir été faite dans l'intérêt supérieur de l'enfant, et qu'elle ne doit pas avoir été faite dans le but de contourner la loi canadienne de l'immigration et de la citoyenneté. En vertu du paragraphe 43(1), il appartient au ministre de définir ce qui constitue la filiation. L'article concernant l'intérêt supérieur de l'enfant a été ajouté au projet de loi C-63 au dernier moment, même si aucun témoin ne l'avait recommandé ou demandé, et il a été maintenu dans le projet de loi C-16.

À propos de la question de la redéfinition de la famille, l'article 43 du projet de loi C-16 confère au ministre le pouvoir de préciser qui peut faire les demandes prévues par la présente loi pour le compte d'un mineur et de définir ce qui constitue la filiation aux fins de détermination du droit à la citoyenneté pour l'application de la présente loi.

 

. 1655 + -

Les articles 31 et 32 du projet de loi C-16 font en sorte de maintenir la tradition de nominations politiques. Tous les juges de la citoyenneté deviendront des commissaires à la citoyenneté. Cependant, toutes leurs tâches seront accomplies par des fonctionnaires du ministère, à l'exception des cérémonies officielles et d'autres fonctions, au besoin.

Pour ce qui est des exigences linguistiques imposées à quiconque demande la citoyenneté, l'article 6 stipule que les demandeurs doivent avoir une connaissance suffisante de l'une des langues officielles du Canada. Toutefois, aucune disposition ne précise comment cela doit être déterminé ni par qui.

L'article 34 traite du serment de citoyenneté. Il semble y avoir eu peu d'apport public sur la teneur du nouveau serment figurant dans le projet de loi C-16. La ministre a préparé ce serment toute seule. Cela aurait pu être une occasion idéale de tenir un débat patriotique à l'échelle nationale. Je partage le point de vue de bon nombre de députés ayant dit que c'est un événement familial important et historique lorsque des gens prêtent leur serment d'allégeance au pays. Ce sera probablement l'événement le plus marquant de leur vie, abstraction faite du jour de leur mariage et de la naissance d'un enfant. C'est on ne peut plus important, et les Canadiens doivent pouvoir apporter leur contribution.

La première mesure législative de la ministre aurait dû avoir pour objet de corriger un système d'immigration inefficace, au lieu d'être axée sur la citoyenneté, surtout compte tenu du fait que la Loi sur la citoyenneté mentionne la Loi sur l'immigration à plusieurs endroits. Plus de cinq ans après que le comité permanent contrôlé par les libéraux eut fait ses recommandations concernant la citoyenneté, la ministre dépose de nouveau une mesure législative qui donne très peu suite aux recommandations.

La mesure législative confirme de nouveau que tout enfant né au Canada, sauf si c'est l'enfant d'un diplomate, est automatiquement un citoyen canadien. Cela va à l'encontre de ce qu'appuient le comité permanent, le ministère de la Citoyenneté et de l'Immigration, l'opposition officielle et de nombreux Canadiens. La ministre a fait preuve d'arrogance et de manque de respect envers le Parlement en proposant que des changements cruciaux soient apportés par celle-ci à huis clos et en permettant que des personnes ayant fait l'objet d'une nomination partisane conservent leur poste même après l'élimination de ce dernier.

En présentant cette mesure législative à la Chambre en première lecture alors qu'elle avait atteint l'étape du rapport à l'occasion d'une session précédente, le gouvernement se trouve à reconnaître que le projet de loi C-16 exige un examen plus approfondi. Toutefois, les changements minimums apportés au projet de loi auraient facilement pu l'être pendant l'étape du rapport. La ministre devrait se concentrer sur la correction de notre système d'immigration.

En conclusion, les propos que j'ai entendus aujourd'hui me montrent hors de tout doute que ce projet de loi doit encore faire l'objet de beaucoup de travail. Le principal élément que je dois de nouveau souligner et que le député de Kitchener—Waterloo a fait ressortir, c'est que le pays ne peut tolérer l'existence de deux classes de citoyens. Nous voulons tous être des citoyens de première classe. Il n'y a qu'un seul statut social.

Le vice-président: À l'ordre, s'i vous plaît. Conformément à l'article 38 du Règlement, je dois faire connaître à la Chambre les sujets qui seront abordés ce soir au moment de l'ajournement: la députée de Vancouver-Est, La santé; le député de Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, La santé.

M. Andrew Telegdi (Kitchener—Waterloo, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais tout d'abord féliciter le député de Dauphin—Swan River de son discours. Je peux lui dire que les questions juridiques dont nous sommes saisis sont plutôt complexes et qu'il a fallu y mettre le temps. À un moment donné, quand j'ai vu les graphiques et cherchai à reconstituer le tout, j'ai compris que le processus d'appel, offert partout ailleurs et se terminant à la Cour suprême du Canada, faisait défaut. Nous y donnons accès aux visiteurs qui viennent au Canada et qui commettent un délit grave parce que nous croyons à l'application régulière de la loi.

Venant de pays différents, le député et moi avons eu certaines expériences semblables. Nous reconnaissons tous qu'il faut agir dans le cas d'une personne qui commet un grave délit dans notre pays, ou qui a été un criminel de guerre ou qui a usé de moyens frauduleux pour entrer au pays. Nous reconnaissons aussi que les gens qui demandent le statut de réfugié pour entrer au Canada doivent souvent avoir recours à la ruse. Nous le savions lorsque nous appliquions la tolérance zéro envers les Juifs. Certains ont dû donner de faux renseignements pour entrer au pays. Nous sommes heureux qu'ils aient réussi et nous aurions aimé qu'un plus grand nombre d'entre eux réussissent.

 

. 1700 + -

Je crois que le député l'a bien dit. La Charte des droits, l'application régulière de la loi et la présomption d'innocence devraient s'appliquer à tous. Ce qui m'effraie dans tout ce processus, c'est que nous ne pouvons pas simplement commettre une diffamation contre quelqu'un en affirmant que cette personne est coupable d'une chose ou d'une autre pour ensuite ne pas pouvoir le prouver devant les tribunaux. Si quelqu'un est accusé de quelque chose, nous devrions respecter la procédure de défense établie. C'est un principe qui devrait s'appliquer à tous, et très certainement à ceux qui ont choisi de devenir citoyens.

M. Inky Mark: Madame la Présidente, le dossier de la citoyenneté et les autres dossiers du jour doivent être traités comme il faut, sans absolument aucune erreur. En examinant les moments sombres de l'histoire canadienne, nous voyons qu'il nous est arrivé de prendre de mauvaises décisions. En me rapportant à mes propres antécédents ethniques, je puis certes évoquer à cet égard la Loi de 1923 visant à restreindre l'immigration chinoise.

Je ne dirai pas que nous devrions comparer la mesure à l'étude à cette loi. Là n'est pas la question. Je veux cependant faire comprendre que nous ne pouvons pas commettre d'erreur quant à la façon dont nous traitons les immigrants venant de partout dans le monde pour s'établir au Canada. Nous devons procéder correctement. Il faut traiter tout le monde sur un pied d'égalité. L'époque est depuis longtemps révolue où les politiciens peuvent décider qui fera ou non l'objet de discrimination.

Notre pays se présente en modèle au reste du monde. La citoyenneté est une des clés pour devenir une société modèle aux yeux du monde. Il faut prêcher par l'exemple. On le fera en nous assurant que la mesure à l'étude est bien faite. Nous nous en trouverons tous plus heureux, et le reste du monde aussi. Il n'y a pas que les Canadiens qui s'en trouveront mieux, car les autres pays du monde s'inspirent de notre exemple.

M. Rey D. Pagtakhan (Winnipeg-Nord—St. Paul, Lib.): Monsieur le Président, le député estime-t-il que le fait de saisir la Section de première instance de la Cour fédérale du Canada pour constater les allégations de fraude, de fausse identité et d'illégalité, le fait d'aviser l'intéressé de l'intention imminente du ministre de prendre cet arrêté, le fait d'inviter l'intéressé éventuellement visé par cet arrêté à se prévaloir de son droit de demander le contrôle judiciaire prévu, font partie de l'application régulière de la loi? C'est là ma première question, car ces dispositions de protection sont d'excellentes mesures d'application de la loi.

Le député a parlé de son appréhension, une légère appréhension, et il vit au Canada depuis l'âge de six ans. J'imagine qu'il dirait qu'il est ici depuis plus de cinq ans. Je voudrais attirer son attention sur le paragraphe 18(5) qui concerne l'arrêté annulant ou révoquant la citoyenneté, qui porte ce qui suit:

    La prise de l'arrêté se prescrit par cinq ans après la date d'attribution, de répudiation, de l'autorisation du ministre au titre de l'article 14 ou de la réintégration.

En d'autres mots, une disposition de protection est prévue, soit la période de cinq ans, donc il n'a rien à craindre.

Enfin, le système actuel est en vigueur depuis 1920. En vertu de ce système, la citoyenneté peut être révoquée par le gouverneur en conseil, en fait par le Cabinet, sur rapport du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration. Le député peut-il citer un cas, dans toute l'histoire du Canada depuis 1920, pour ce qui concerne la question de la révocation de la citoyenneté, où nous aurions traité des personnes naturalisées canadiennes comme des citoyens de seconde zone?

 

. 1705 + -

M. Inky Mark: Madame la Présidente, il suffit de consulter les livres d'histoire pour aussitôt se rendre compte que de nombreux groupes ethniques ont fait l'objet de discrimination. L'obtention de la citoyenneté ne leur assurait pas pour autant la reconnaissance pleine et entière de leur état de citoyens.

Ce problème se pose de nouveau aujourd'hui dans le cas des femmes, qui ne sont pas toujours reconnues comme membres à part entière de la société. Au regard de la loi, je n'ai pas de doute à mon sujet. Je dis simplement que ce qui vaut pour les Canadiens de naissance vaut également pour les Canadiens d'adoption qui ont vécu suffisamment longtemps dans notre pays pour obtenir le statut de Canadiens à part entière. Ces personnes devraient être traitées comme des Canadiens de naissance et pas autrement.

M. Steve Mahoney: Même s'il y a fraude?

M. Inky Mark: Comme je le disais plus tôt, si ces personnes commettent une fraude, qu'on les renvoie. Le problème n'est pas là. Le problème tient au processus. Le processus devrait être le même pour tout le monde et s'appliquer à tous également.

[Français]

M. Ghislain Lebel (Chambly, BQ): Madame la Présidente, je veux intervenir brièvement.

Le député qui vient de s'exprimer nous demandait de citer un cas dans l'histoire du Canada où il y a eu de la discrimination. Je veux simplement lui rappeler le cas des Japonais durant la Seconde Guerre mondiale. Sans remettre en question son origine ethnique, je pourrais lui dire que les Chinois ont également été assez malmenés dans ce pays, de façon discriminatoire.

Je veux souligner que ce n'est pas parce que quelqu'un est né au Canada que la démocratie est acquise et qu'on n'a plus à s'en préoccuper. Sous des prétextes qui leur appartiennent, des gens se pensent les détenteurs de vérités absolues. Le premier ministre est un de ceux-là.

Pour ce qui est de la démocratie, on pourrait faire un lien avec le projet de loi C-20. Voilà un exemple de ce que peut être la démocratie dans un pays où elle n'est jamais remise en question et où on la prend pour acquise. C'est le danger.

Un député veut changer le serment d'allégeance. Pour moi, l'un ou l'autre, cela ne change rien. On remarquera le silence des Québécois dans ce débat. C'est significatif. J'aimerais que ceux qui tiennent ces discours nous répondent.

[Traduction]

M. Inky Mark: Madame la Présidente, je remercie le député bloquiste pour son excellente question concernant l'internement des Japonais.

Par ailleurs, durant la période 1914-1918, plus de 5 000 Canadiens ukrainiens ont été internés et plus de 80 000 ont été obligés de s'inscrire auprès du gouvernement, comme des criminels de droit commun. Notre histoire compte suffisamment d'exemples qui nous apprennent que si nous entendons adopter le projet de loi dans sa forme actuelle, nous devons le faire de la bonne façon.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): La Chambre est-elle prête à se prononcer?

Des voix: Le vote.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

La présidente suppléante (Mme Thibeault): À mon avis, les oui l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Convoquez les députés.

 

. 1710 + -

Et la sonnerie s'étant arrêtée:

La présidente suppléante (Mme Thibeault): Le vote est reporté à la fin de la période prévue pour l'étude des initiatives ministérielles.  

*  *  *

LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

 

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 15 mai, de la motion: Que le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

M. Dennis Gruending (Saskatoon—Rosetown—Biggar, NPD): Madame la Présidente, c'est pour moi un plaisir de parler aujourd'hui du projet de loi C-33, la Loi sur les espèces en péril. C'est toujours un plaisir de prendre la parole à la Chambre, mais je dois dire que mes collègues du NPD et moi sommes profondément déçus, pour des raisons que je vais détailler dans quelques minutes.

Premièrement, il est approprié de tenir un débat sur cette mesure législative juste après que la liste des espèces en péril dans le pays se soit allongée comme jamais auparavant. Récemment, 14 nouvelles espèces ont été ajoutées à la liste qui est mise à jour chaque printemps depuis 23 ans. Le nombre d'espèces d'animaux sauvages, de plantes, d'insectes et d'organismes marins menacés de disparition au Canada est maintenant de 354, un chiffre encore inégalé. Cela nous rappelle amèrement que le patrimoine naturel de notre pays est menacé. La vitesse à laquelle les espèces disparaissent de la planète constitue un indicateur de la santé générale de notre environnement et, en fin de compte, de notre propre santé.

La disparition de ces espèces constitue un signe d'alerte, un peu à la manière des canaris dont on se servait dans les puits de mines. Elle avertit du fait que quelque chose arrive à notre habitat. Souvent, ce quelque chose est directement lié aux activités de notre propre espèce.

Dans le monde entier, on observe la plus grande épidémie d'extinction que le monde ait connu depuis l'époque des dinosaures. À travers les âges, de deux à trois espèces disparaissaient en moyenne tous les ans pour des raisons naturelles, toutefois, à l'heure actuelle, de deux à trois espèces disparaissent toutes les heures. C'est alarmant. Et c'est presque entièrement dû à l'intervention humaine.

Les scientifiques estiment que d'ici 30 ans nous pourrions perdre 25 p. 100 des espèces existantes, si nous poursuivons sur notre lancée. Au Canada, nous avons nous-mêmes un grave problème en ce qui concerne les espèces en danger et les choses sont loin de s'améliorer.

Plus précisément, 27 espèces ont déjà disparu du Canada au cours des 150 dernières années. Nous savons qu'un total de 354 espèces sont actuellement en danger, et la liste s'allonge tous les ans. En fait, 43 espèces y ont récemment été ajoutées.

Je parle de certains de nos oiseaux et de nos mammifères préférés: le bélouga, le caribou des forêts, la chevêche des terriers et même le puissant grizzli. Il se pourrait que, au cours des décennies à venir, tous ces animaux n'existent plus en liberté, à moins que nous ne prenions des mesures décisives pour les protéger, eux et leur habitat.

Ce projet de loi s'est fait attendre. Cela fait presque 10 ans que les Canadiens attendent que le gouvernement fédéral propose une mesure significative pour protéger les espèces en voie d'extinction.

Je dois dire que le gouvernement Mulroney avait fait preuve de courage politique au sommet de la Terre, en 1992, en prenant l'engagement que le Canada adopterait des lois pour protéger les espèces vulnérables. Le Canada a été l'un des premiers pays à signer l'accord.

À cet égard, il est décevant qu'après une aussi longue attente, le gouvernement ne puisse rien offrir de mieux que le projet de loi C-33. Personne ne devrait être plus déçu que le ministre de l'Environnement, qui a misé sa réputation politique sur cette mesure législative.

J'ai dit que le caucus néo-démocrate était déçu par le projet de loi C-33 parce qu'il est fondamentalement faible. Et ce, en dépit des déclarations prétentieuses du gouvernement qui avait annoncé des mesures nationales de protection et des peines sévères pour ceux qui nuisent aux plantes, aux animaux et aux poissons qui risquent de disparaître à tout jamais.

 

. 1715 + -

Les Canadiens veulent une loi qui dit qu'elle va protéger les espèces menacées, et non une loi qui dit qu'elle peut les protéger. Ces espèces ont également besoin d'une telle loi. Toute la protection que ce projet de loi prétend offrir est laissée à la discrétion du ministre. La seule chose que le projet de loi oblige le gouvernement à faire, c'est de tenir des consultations, mais il n'oblige pas le ministre à écouter ces consultations ni même à y donner suite.

Le projet de loi C-33 est truffé de dispositions accordant un pouvoir discrétionnaire, à tel point que, s'il est adopté sans modifications de fond, il sera le plus faible en son genre en Amérique du Nord. Je savais que, un jour, les lois environnementales du Mexique seraient aussi rigoureuses que les nôtres, mais je ne m'attendais pas à ce que cela se produise aussi rapidement.

Il y a un an seulement, un sondage commandé par le Fonds international pour la protection des animaux révélait que les Canadiens voulaient que le gouvernement fédéral adopte des lois sévères pour protéger les espèces menacées d'extinction. Je vais donner quelques chiffres provenant de ce sondage: 91 p. 100 des Canadiens sondés estimaient que le gouvernement fédéral devrait protéger les espèces menacées, dans toutes les régions du Canada; 98 p. 100 reconnaissaient que la protection de l'habitat constituait un élément important si nous voulions protéger les espèces en péril; 80 p. 100 préféraient l'existence de lois fédérales destinées à protéger l'habitat complet des espèces menacées; 72 p. 100 estimaient qu'il revenait au gouvernement fédéral de jouer un rôle de chef de file pour protéger ces espèces en péril; enfin, au moins 97 p. 100 ont dit qu'il était important que les espèces menacées qui migrent au-delà des frontières soient protégées de façon égale dans tous les pays d'Amérique du Nord.

Dans une grande majorité, les Canadiens ont aussi déclaré qu'ils accepteraient de subir des répercussions économiques pour assurer la protection des espèces en voie de disparition. C'est important de noter que huit Canadiens sur dix préconisent l'imposition de restrictions aux industries dont les activités menacent les espèces en voie de disparition. Ils accepteraient une restriction des activités forestières, minières et même touristiques, par exemple.

Les Canadiens ont clairement donné au gouvernement le mandat de légiférer d'une façon exhaustive et significative pour protéger ces espèces vulnérables. À la place, le ministre nous présente un projet de loi faible et discrétionnaire.

Je voudrais m'arrêter quelques minutes sur les listes. De nos jours, une espèce est considérée en voie de disparition par suite d'une décision du Comité sur la situation des espèces en péril au Canada (COSEPAC), ou organisation scientifique responsable de repérer les espèces. Ce comité rend ses décisions en se fondant sur les meilleures données scientifiques disponibles. Or, si le projet de loi est adopté, une espèce sera considérée en voie de disparition seulement quand le ministre de l'Environnement le jugera bon.

Dans le style typique des libéraux, le projet de loi C-33 établit officiellement le COSEPAC comme étant l'autorité suprême pour déterminer quelles espèces risquent de disparaître. En même temps, le projet de loi empêche COSEPAC, qui prend ses décisions à partir de données scientifiques, de déterminer quelles espèces sont actuellement protégées par la loi. Le COSEPAC détermine quelles espèces qui sont en voie de disparition, mais n'aurait pas le droit, en vertu de ce projet de loi, de prendre des mesures pour protéger ces espèces, d'en dresser la liste.

Malgré le beau libellé du projet de loi concernant la connaissance des collectivités, la meilleure information accessible et son objet qui est de protéger nos espèces sauvages les plus vulnérables, tout, comme on peut le voir, repose sur l'opinion du ministre de l'Environnement. Le projet de loi n'exige même pas que l'opinion du ministre soit savante. Son opinion n'a pas besoin d'être fondée sur des données scientifiques. Elle peut être fondée, ou non, sur la liste produite par le COSEPAC.

Comme je l'ai dit, à l'heure actuelle, il y a plus de 350 espèces sur la liste des espèces en voie de disparition. Il importe de savoir si ces espèces seront protégées dès l'adoption de ce projet de loi. La navrante réponse à cette question est non.

Le jour où ce projet de loi deviendra loi, il n'existera plus aucune espèce en voie de disparition au Canada, du moins pas officiellement. Pas une seule espèce en péril aujourd'hui ne sera protégée en vertu de cette loi, tant que le ministre n'aura pas établi sa liste. La liste existante des espèces en péril, fruit de 23 années de travail du COSEPAC, ne sera pas considérée comme un droit acquis et ne sera pas incluse automatiquement dans cette loi. Quand une espèce en voie de disparition est-elle en voie de disparition? Quand le ministre le décide semble-t-il.

 

. 1720 + -

Ce qui menace avant tout les espèces est la disparition de leur habitat, l'endroit où elles vivent, se reproduisent et se nourrissent. La disparition des habitats est responsable de 80 p. 100 du déclin des espèces au Canada. Ce serait une pure perte de temps pour le Parlement que d'adopter une loi ne protégeant pas les habitats. Encore une fois, à cet égard, le projet de loi C-33 n'est pas à la hauteur.

Alors que d'autres pays, y compris le Mexique, ont rendu obligatoire la protection de l'habitat essentiel, le Canada propose une protection discrétionnaire. Je le répète, en vertu des dispositions de cette loi, une espèce sera protégée à la discrétion du ministre de l'environnement.

Si une espèce mérite d'être protégée, il peut s'écouler jusqu'à 30 mois avant que l'habitat ne soit vraiment protégé. Seuls les animaux, le nid ou la tanière sont protégés dans l'intervalle, et nous estimons que ce n'est pas suffisant.

Tout ce dont il est question ici ne concerne que le territoire domanial. Les terres provinciales et les propriétés privés ne sont pas visées par cette formule.

Parlant de propriété, je dois dire que ma circonscription compte des ruraux comme des citadins. Je tiens à parler des préoccupations bien réelles que nourrissent ces gens-là à l'égard d'une mesure législative qui risque de les toucher si elle est adoptée.

Je tiens à préciser que nous, du NPD, croyons que les gens devraient et doivent être indemnisés si leur vie est touchée par un plan fédéral visant à sauver une espèce menacée. Les propriétaires fonciers doivent être assurés qu'ils n'auront pas à essuyer personnellement une perte pour protéger un habitat. Si la terre est achetée, elle doit l'être avec le consentement du propriétaire et au juste prix du marché. Les travailleurs qui perdent leur emploi ou qui voient leur salaire diminuer doivent aussi être indemnisés. La même chose vaut pour les localités. La dernière chose que nous souhaitons, c'est que les grandes entreprises soient indemnisées, mais pas leurs employés.

Nous croyons comprendre que les Canadiens veulent que les espèces animales cessent de disparaître. Nous croyons comprendre aussi que le coût de la protection des espèces doit être assumé par tous et non seulement par les gens qui se trouvent à posséder les terres où vivent les espèces menacées.

À propos des droits de propriété, j'ai remarqué que, dans leurs allocutions, des députés de l'Alliance canadienne semblent dire aux agriculteurs et aux éleveurs que ce projet de loi menacent leur mode de vie même. Certains laissent entendre que le gouvernement fédéral saisira peut-être les terres des agriculteurs sans leur garantir d'indemnisation. Des propos comme ceux-là exploitent la peur. La Chambre peut avoir l'assurance que le NPD s'opposera à ce genre de tactique, à l'emploi de demi-vérités et à toutes les tentatives en vue de semer la crainte et les dissensions. Nous voulons un débat raisonné qui repose sur des faits.

Ce qui me déçoit le plus, dans le projet de loi C-33, c'est qu'il ne protège pas les espèces en danger dans des territoires où le gouvernement fédéral a une compétence claire et incontestée. Cela étonnera peut-être ceux qui ont prêté attention aux informations et aux propos du ministre de l'Environnement. Le gouvernement fédéral n'est même pas disposé à protéger les espèces et les habitats menacés sur l'ensemble des territoires relevant de sa compétence.

Des organismes comme l'Association canadienne des pâtes et papiers et l'Association minière du Canada estiment que le gouvernement fédéral devrait faire plus pour protéger la faune sur les territoires qu'il possède et régit.

Le projet de loi C-33 n'assure de protection que sur les terres fédérales situées au sud du 60e parallèle. C'est dire qu'il ne protège les habitats que sur un pourcentage infime des terres domaniales fédérales.

Le projet de loi ne protège pas non plus des espèces ou des habitats qui sont nettement de ressort fédéral. Je songe ici aux oiseaux migrateurs, aux espèces et aux poissons qui franchissent les frontières. Plus de 70 p. 100 des espèces menacées au Canada migrent aux États-Unis ou ont une aire spécifique qui s'étend jusqu'aux États-Unis. À cause du projet de loi C-33, un grand nombre de ces espèces perdront la protection dont elles bénéficient aux États-Unis du seul fait qu'elles franchissent la frontière canadienne. La Maison blanche et de nombreux sénateurs ont écrit au Canada pour l'exhorter à protéger l'habitat des espèces dites partagées.

 

. 1725 + -

On peut s'interroger sur les raisons pouvant expliquer ce manque de protection. À mon avis, celui-ci est en grande partie attribuable à des guerres intestines entre ministères. Ainsi, le ministère et la ministre du Patrimoine canadien refusent que des fonctionnaires d'Environnement Canada leur disent comment protéger les espèces en voie de disparition dans nos parcs. Quant au ministère des Pêches et des Océans, il n'a absolument pas l'intention de laisser des fonctionnaires d'Environnement Canada lui dire comment protéger l'habitat du poisson. La même chose vaut pour le ministère de la Défense nationale et les terres qui relèvent de sa responsabilité. Il s'agit là d'un grave problème interne.

Sur le plan politique, ce qu'il faut retenir, c'est que le premier ministre est farouchement déterminé à faire adopter une loi à ce sujet avant les prochaines élections. La seule façon d'y parvenir, c'est de proposer un projet de loi qui sert de guide au gouvernement fédéral, au cas où il se sentirait tenu de protéger les espèces menacées de disparition. Il s'agit d'un guide, mais aucune obligation n'est prévue dans le projet de loi.

Je veux parler brièvement du bilan du gouvernement en matière environnementale. J'ai été assez surpris de lire, dans le Globe and Mail du week-end dernier, la critique qu'Andrew Nikiforuk a faite d'un nouvel ouvrage important écrit par Maurice Strong, l'environnementaliste. Sur le plan environnemental, celui-ci décrit le Canada comme étant situé au nord du Mississipi, description vraiment saisissante qui n'est que trop vraie.

Nous avons discuté âprement de la pollution atmosphérique, mais il nous reste encore à ratifier le protocole de Kyoto ou à respecter les objectifs d'émissions fixés il y a des années. Nous avons parlé de dépolluer les Grands Lacs; c'était autrefois le plus important projet environnemental du monde, mais il ne figure plus dans les priorités du gouvernement fédéral. Comme nous le savons, un accord clé avec l'Ontario pour collaborer afin d'assainir les lacs est arrivé à échéance plus tôt cette année et il n'a pas encore été renégocié.

Alors que le gouvernement parle de la valeur des connaissances des gens dans les collectivités et des contributions importantes que les Canadiens peuvent apporter de leur propre chef, il est le premier à vouloir museler la Commission de coopération environnementale. C'est l'organisme de surveillance prévu aux termes de l'ALENA. Son travail consiste à aider les citoyens à dénoncer leurs propres gouvernements lorsqu'ils n'appliquent pas les lois sur la protection de l'environnement.

Je pourrais poursuivre, mais je vais donner un exemple supplémentaire. Nos parcs nationaux sont en crise à cause d'années de compressions financières et d'un manque total d'orientations de la part d'un gouvernement qui aime bien à parler d'initiatives environnementales, mais qui trop souvent ne prend pas les mesures qui s'imposent.

Je le répète, mes collègues néo-démocrates et moi-même sommes déçus par ce projet de loi. Étant donné qu'il y avait eu un projet de loi précédant celui-ci, le projet de loi C-65, nous pensions que cette deuxième tentative serait une nette amélioration. Cependant, cela n'est pas le cas. Les coups de téléphone et les lettres que nous recevons à nos bureaux montrent que les Canadiens et les organisations environnementales sont également déçus.

Le projet de loi laisse à désirer en ce qui concerne la protection des espèces en péril et de leurs habitats. Il permet une intervention politique, un lobbying politique et le recours au pouvoir discrétionnaire du ministre à toutes les étapes. Il ne prévoit pas d'indemnisation pour les travailleurs et les collectivités touchés économiquement par les plans d'action destinés à assurer la protection et le rétablissement des espèces en péril. Je sais qu'on envisage cela, mais on n'abordera cette question qu'une fois le projet de loi adopté, s'il l'est en fait.

J'espère qu'il ne sera pas adopté et j'exhorte mes collègues à le rejeter, à le renvoyer au ministre et à lui dire de soumettre une mesure législative qui va vraiment faire en sorte que les espèces en péril ne disparaissent pas, qui va empêcher la destruction des habitats, qui ne mélange pas la science et la politique et qui va assurer une distribution juste et équitable des coûts pour ce qui est de sauver des espèces en péril.

Enfin, le Canada mérite une meilleure loi que celle-ci pour empêcher que les espèces en péril ne disparaissent et il en a certes les moyens.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Madame la Présidente, ce sera un grand plaisir pour moi d'avoir la chance de parler de ce projet de loi dans quelques minutes. J'aimerais d'abord féliciter mon collègue du NPD d'avoir reconnu que la mise au point d'une liste scientifique des espèces en péril devrait être reliée à des données scientifiques et non uniquement à des choix politiques.

J'aimerais que le député nous explique pourquoi le gouvernement n'est pas prêt à accepter les conseils et l'avis unanime des groupes de l'industrie, qu'il s'agisse de l'Association canadienne des pâtes et papiers ou de l'Association des mines du Canada ou des groupes d'environnementalistes.

 

. 1730 + -

Pourquoi le député croit-il que le gouvernement a raté la chance de faire fond sur ce consensus alors que l'industrie était prête à reconnaître que le maintien de la biodiversité relève de la science et non d'un choix politique?

M. Dennis Gruendig: Madame la Présidente, je remercie mon collègue pour sa question. La réponse courte est que je ne comprends pas pourquoi le gouvernement choisirait une approche politique plutôt qu'une approche scientifique pour dresser la liste des espèces en péril.

Comme mon collègue l'a mentionné, l'industrie privée, qui, logiquement, devrait s'opposer à ce qu'on dresse la liste des espèces en péril d'une façon qui pourrait nuire à ses activités et, en bout de ligne, à ses profits, dit au gouvernement d'aller plus loin. Je ne crois pas que la pression soit venue du secteur privé. Je ne fais que spéculer, mais j'ai mentionné dans mon discours que, selon moi, une partie du problème était interne. Une certaine pression vient de divers ministères du gouvernement qui ne veulent pas que quelqu'un d'autre leur dise comment gérer ce qu'ils considèrent être leurs affaires, si je peux m'exprimer ainsi. Je dirais que ce ne sont pas seulement leurs affaires. Ce problème nous concerne tous.

Nous devons vraiment agir avant qu'il ne soit trop tard. Il n'y a pas seulement ces espèces qui sont en péril. À mesure que ces espèces disparaissent, nous devenons de plus en plus conscients de notre propre mortalité sur cette planète.

En résumé, je ne connais pas la réponse à la question posée par mon collègue. Je ne sais pas si c'est fondamentalement important que ces décisions soient fondées sur des données scientifiques plutôt que d'être de nature politique. À mon avis, la raison pour laquelle il convient que les décisions scientifiques soient prises par des scientifiques est évidente. J'ai peur que les lobbyistes se mettent à dire que les espèces sont sur des terres ou des plans d'eau utilisés par les humains et qu'elles ne devraient donc pas être protégées parce que cela aurait une incidence sur nous. Je ne veux pas que cela ouvre la porte à ce genre de lobbying, et je ne crois pas que nous ayons besoin de plus de lobbying à Ottawa. Ce sont nos espèces qui en souffriraient.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir dans le débat sur le projet de loi C-33. Je compte présenter un amendement tout à l'heure, mais je commencerai par quelques observations préliminaires.

Il n'y a peut-être aucun autre parti politique à la Chambre des communes qui en connaît autant sur les lois sur les espèces menacées que le Parti progressiste-conservateur du Canada. Les députés se souviendront que, en 1993, le Parti progressiste-conservateur a été décimé et qu'il ne restait plus qu'un couple de ses représentants. Nous avons réussi à élaborer notre propre plan de restauration pour encourager les Canadiens à investir dans les individus rescapés en 1993. Je suis très heureux de pouvoir dire que le Parti progressiste-conservateur est peut-être encore absent de certaines régions, mais que ce n'est que temporaire. Nous envisageons un rétablissement de l'habitat dans bien des régions du Canada. De ce point de vue, nous avons fait un excellent retour à la Chambre des communes. En témoigne, la naissance de Rosemary Kathleen Herron, il y a tout juste six semaines. L'espèce conservatrice grandit par bonds à mesure que nous nous rapprochons des prochaines élections.

Il y a au Canada 351 espèces considérées comme étant menacées ou en péril. Il n'existe aucune loi fédérale pour protéger ces espèces. La loi sur la protection des espèces sauvages en péril proposée par le gouvernement fédéral est attendue depuis longtemps. Cette loi avait été promise il y a longtemps, mais ce qu'on nous présente est très décevant. Le projet de loi est encore plus faible et moins efficace que le projet de loi C-65, qui avait été présenté en 1996, mais qui est mort au Feuilleton au moment du déclenchement des élections de 1997. Le nouveau projet de loi est inefficace dans plusieurs domaines clés, particulièrement pour ce qui est de la protection des habitats, ce qui est inacceptable.

La destruction de leur habitat, c'est-à-dire l'endroit où les animaux se reproduisent, élèvent leurs petits et se nourrissent, est la principale menace qui pèse sur les espèces en péril.

 

. 1735 + -

La perte de l'habitat est considérée comme la principale cause de la baisse de plus de 80 p. 100 du nombre des espèces au Canada. Or, dans le projet de loi C-33, la sauvegarde des espèces dépend d'un pouvoir discrétionnaire, et cela, même dans les régions—et je suis sûr que vous n'en reviendrez pas, monsieur le Président— qui relèvent du gouvernement fédéral. Le projet de loi n'exige pas la protection de l'habitat des espèces en péril. Il se contente de dire que le Cabinet peur le protéger. C'est l'une des grandes lacunes du projet de loi C-33.

La lacune la plus manifeste de cette mesure législative, c'est peut-être le fait que c'est le Cabinet, et non un organisme scientifique, c'est-à-dire le COSEPAC, ou Comité sur le statut des espèces menacées de disparition au Canada, qui désignera les espèces en péril. Le Parti progressiste-conservateur estime que la question de savoir si, oui ou non, telle espèce est en péril exige une réponse scientifique qui n'a rien à voir avec la politique. Même un rapport produit par un comité regroupant des représentants de tous les partis, y compris des députés libéraux et réformistes, exprime l'avis qu'il faut s'en remettre à l'établissement de listes scientifiques.

Le gouvernement a fait valoir que, si la liste du COSEPAC est adoptée automatiquement, les scientifiques risqueraient alors de faire l'objet d'intenses pressions. Cet argument n'est manifestement pas valable, puisque le projet de loi proposé n'y changerait rien.

Pour élaborer une mesure législative qui soit efficace, il faut l'appui et la collaboration des principaux intéressés. Le Parti progressiste-conservateur privilégie une politique faisant appel davantage à la carotte qu'au bâton. Nous estimons qu'il faut absolument encourager, reconnaître et récompenser la bonne gestion de l'environnement en offrant plus de carottes, de sorte qu'on ait moins de coups de bâton à distribuer au bout du compte.

Le programme que proposent les conservateurs est un programme fondé sur ces incitatifs et non pas un programme de nature punitive. Faire des criminels des meilleurs gardiens et protecteurs de nos terres—les agriculteurs et les propriétaires de terres à bois—n'encouragerait guère le genre d'attitude positive que nous cherchons à créer. Pour encourager ce genre d'attitude, il faut selon nous écouter les préoccupations de tous les intervenants, travailler et s'entendre avec eux sur une mesure législative efficace et, ce qui est plus important, les faire participer au processus de rétablissement des espèces en voie de disparition.

Le Parti conservateur estime que sans l'appui des provinces qui sont les principaux partenaires de la nation, sans l'appui des propriétaires fonciers privés, des utilisateurs des ressources et des communautés, la Loi sur les espèces en péril sera impossible à appliquer et conduira à ce que les gens qui suivent ce projet de loi appellent communément une mentalité de dissimulation.

Les députés connaissent sans doute cette coalition d'importants groupes environnementaux et industriels, connue sous le nom de groupe de travail des espèces en péril, dont font partie la Fédération canadienne de la nature, l'Association minière canadienne, l'Association canadienne des pâtes et papiers et le Sierra Club du Canada. Tous sont d'accord sur la nécessité de mettre en place une loi sévère.

Comme Hugh Windsor l'a fait remarquer il y a quelques semaines dans The Globe and Mail, ces intervenants ont mis leurs efforts en commun il y a deux ans dans le but de s'entendre sur l'ébauche d'une nouvelle loi sur les espèces en péril.

Le Parti conservateur a toujours cherché à arriver à un consensus en travaillant avec les intervenants, en s'efforçant de rapprocher les Canadiens et en élaborant des mesures législatives solides. C'est pourquoi nous avons décidé d'appuyer le travail de cette coalition.

Voilà également pourquoi notre déclaration de principe, que nous avons publiée en décembre dernier, deux semaines avant celle du gouvernement, s'est mérité un A de la part des membres de cette coalition alors que celle du gouvernement n'obtenait qu'un D. Nous travaillons à partir d'une position qui nous a valu la meilleure note de la part de l'industrie et des groupes environnementaux, alors que la position sur la base de laquelle a été élaborée la mesure à l'étude n'a reçu qu'une note médiocre.

Ces intervenants se sont entendus pour dire qu'au minimum, un projet de loi visant à protéger les espèces en péril devrait exiger la protection de l'habitat dans tous les secteurs relevant de la compétence fédérale et l'établissement d'une liste fondée scientifiquement des espèces en péril. Il s'agit d'éléments clés de notre plan progressiste conservateur qui sont absents du projet de loi C-33 du gouvernement.

On peut se demander comment il se fait que le gouvernement n'a pu pas tenu compte d'un pareil consensus entre l'industrie et les groupes environnementaux, de ce travail qui a été effectué au nom du ministère de l'Environnement.

La réponse, je regrette d'avoir à le dire, c'est que le gouvernement n'écoute tout simplement pas.

 

. 1740 + -

En réaction à la proposition du gouvernement, Pierre Gratton, de l'Association minière du Canada, a dit: «Nous pensons certainement qu'elle pourrait être plus énergique.» Robert Décarie, de l'Association canadienne des pâtes et papiers, a dit: «Nous pensons que le gouvernement fédéral aurait pu se montrer beaucoup plus énergique, du moins dans les limites de ses propres champs de compétence.»

Je voudrais profiter de l'occasion pour signaler les solides qualités de bon citoyens des membres de l'association minière et de celle des pâtes et papiers, et les féliciter de leurs efforts pour élaborer un vaste consensus canadien.

Plus de 70 p. 100 des espèces en péril du Canada migrent ou circulent aux États-Unis. Même la Maison-Blanche et nombre de sénateurs américains ont écrit au Canada pour l'exhorter à protéger l'habitat de ces espèces communes. Imaginez. Les Américains invitent maintenant le Canada à protéger l'environnement. Les choses ont bien changé depuis sept ans. Il y a bien longtemps que le Canada s'est battu contre les États-Unis pour protéger l'environnement.

C'est le gouvernement progressiste conservateur qui a forcé les Américains à négocier le protocole relatif aux pluies acides en 1987. Ce sont maintenant les Américains qui pressent les Canadiens de durcir notre loi sur l'environnement. Il importe de faire remarquer, toutefois, que la loi américaine relative aux espèces menacées a du mordant. Cependant, nous ne souscrivons pas à la méthode américaine de la carotte et du bâton, le groupe de travail sur les espèces en péril non plus.

La plupart des améliorations essentielles sont des questions fédérales internes auxquelles ne s'opposeraient ni les provinces ni les industries. Toutefois, l'absence de volonté politique continue de nuire à la rédaction d'un meilleur projet de loi.

Les lois provinciales sur les espèces menacées rendent obligatoire la protection des habitats, et sont donc plus fermes que cette proposition de loi sur les espèces en péril. Le Parti progressiste conservateur a toujours cru en un fédéralisme coopératif. Le Parti progressiste conservateur croit qu'une loi fédérale devrait servir de filet de sécurité. Autrement dit, elle ne devrait s'appliquer que s'il n'existe pas de protection équivalente dans les lois provinciales. Cela a été clairement souligné dans l'accord national sur la protection des espèces en péril, qui a été conclu par tous les gouvernements en 1996. Nous maintenons notre adhésion à ce plan.

Une loi équivalente serait définie comme étant une mesure prévoyant, au minimum, des listes scientifiques et la protection d'habitats essentiels aux termes d'ententes, de lois, de permis et de protocoles d'application, par l'entremise du cadre fédéral-provincial. En outre, d'autres éléments d'équivalence seraient établis et négociés relativement à des espèces en particulier, à l'aide du cadre de l'accord national sur la protection des espèces en péril.

Il est aisé de prouver que le gouvernement ne tient vraiment pas au fédéralisme coopératif. Quand je suis allé à Calgary à l'occasion de l'annonce de la position du gouvernement, en décembre dernier, je me suis mis en rapport avec l'honorable Gary Mar, un excellent ministre de l'environnement. Les fonctionnaires ou les collaborateurs du ministre fédéral n'ont jamais eu la courtoisie de communiquer avec le ministre Mar pour lui faire part de l'intention du gouvernement fédéral d'annoncer sa prise de position au jardin zoologique de Calgary. En fait, aucun député fédéral de l'Alberta n'a eu la courtoisie d'en informer le ministre Mar.

Si le gouvernement tient à renforcer le fédéralisme coopératif, s'il tient à coopérer avec ses partenaires provinciaux, il devrait à tout le moins indiquer aux ministres provinciaux compétents la date à laquelle il compte annoncer sa position officielle et les informer de cette position.

De façon générale, le projet de loi donnait au gouvernement libéral la possibilité d'améliorer son lamentable bilan en matière d'environnement. C'était une nouvelle occasion pour le premier ministre d'améliorer sa piètre performance dans le domaine de l'environnement. Les réalisations du gouvernement à cet égard sont peut-être plus compromises que les 351 espèces inscrites sur la liste des espèces en péril. Le projet de loi C-33 apporte la preuve que l'environnement est une faible priorité pour le gouvernement. En fait, je dirais même que l'environnement ne figure pas du tout sur la liste de ses priorités.

Pour illustrer mon propos, je rappelle que le Parti libéral exerce le pouvoir depuis sept ans déjà et qu'il n'a toujours pas, de son propre chef, adopté de loi sur l'environnement. L'an dernier, il a fait adopter des modifications à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, modifications qui ont fait l'objet de critiques généralisées en raison de certaines lacunes fondamentales. Tandis que la LCPE originale déposée par le Parti progressiste conservateur était un projet de loi novateur, la version révisée du Parti libéral ne renfermait que de modestes améliorations.

 

. 1745 + -

C'est là un bon exemple qui illustre ce que l'on entend par un bon dossier en matière d'environnement. C'est notre parti qui, lorsque nous formions le gouvernement, a négocié un protocole sur les pluies acides avec les États-Unis. C'est notre parti qui a proposé la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. C'est notre parti qui a incité la communauté internationale à élaborer le protocole de Montréal sur les substances responsables de la réduction de la couche d'ozone. C'est notre parti qui a fait en sorte que nos sites d'enfouissement respectent encore davantage l'environnement en proposant un protocole national sur l'emballage. Nous coopérons avec l'industrie. Par contraste, depuis sept ans qu'il est au pouvoir, le Parti libéral n'a proposé aucun projet de loi de son cru.

Alors que dossier en matière d'environnement est solide, le projet de loi dont nous sommes saisis ne remplit même pas la promesse faite par le gouvernement dans le discours du Trône d'adopter des dispositions législatives afin de protéger les espèces menacées et leurs habitats essentiels.

Quelle est la bonne nouvelle dans tout cela? La bonne nouvelle c'est que le gouvernement fédéral dépose enfin une mesure législative qui s'impose depuis longtemps sur les espèces menacées. La mauvaise nouvelle c'est que le reste du projet de loi ne prévoit pas grand-chose de bon pour ce qui est de protéger les espèces en péril, particulièrement en ce qui a trait à la bonne intendance de l'environnement.

Le projet de loi C-33 vise à reconnaître le besoin d'encourager et de récompenser l'intendance responsable. Toutefois, les fonds prévus, soit de 10 à 15 millions de dollars par année, ne représentent qu'une partie de ce qui est nécessaire pour contribuer au rétablissement des espèces présentement menacées. Il faudrait environ 50 millions de dollars l'an.

De nouveau, les libéraux, qui n'hésitent pas à lever des impôts et à dépenser, ne savent pas ce que sont des stimulants. On pourrait instaurer des stimulants fiscaux qui favoriseraient l'intendance. Ils aideraient les responsables de nos terres, les agriculteurs et les propriétaires de terrains, en les encourageant à adopter volontairement un comportement positif.

Le Parti progressiste conservateur estime que le projet de loi C-33 ne doit pas devenir un autre Kyoto où les provinces sont forcées de mettre en oeuvre un plan qui leur est imposé par le gouvernement fédéral. Il faudrait fournir aux provinces assez de ressources pour s'occuper des plans de rétablissement et assurer leur application efficace. S'il veut que cette mesure législative donne des résultats, le gouvernement fédéral doit travailler en collaboration avec tous les intervenants, les provinces, les propriétaires privés, l'industrie et les environnementalistes afin de veiller à ce qu'aucune des parties ne porte individuellement le fardeau du rétablissement alors qu'il existe une récompense commune manifeste en ce qui concerne le rétablissement des espèces.

La découverte d'espèces menacées sur la terre de quelqu'un ne devrait pas signifier l'interruption de tout développement. La solution consiste à gérer les terres de façon à ce que les espèces puissent continuer à survivre.

Outre les rares cas où la protection d'espèces menacées pourrait obliger le propriétaire foncier à absorber des coûts, le gouvernement devrait offrir une aide financière directe.

Je parlais de cette question avec le député de Lethbridge il y a quelque temps. Un des points faibles du projet de loi, c'est qu'il est trop vague. Il n'est pas clair et il soulève plus de préoccupations au sujet du régime d'indemnisation qui sera requis pour les mesures d'intendance positives visant à protéger les espèces menacées.

Le Parti progressiste conservateur estime qu'au moment de concevoir le plan de rétablissement avec les intervenants, il y a lieu de tenir compte de considérations d'ordre socio-économique; il est possible d'aboutir à un équilibre qui, d'une part, encourage l'intendance et, d'autre part, sauve les espèces menacées.

En outre, le projet de loi C-33 n'adopte pas la liste actuelle des espèces menacées au Canada comme liste initiale, bien que c'eut été le cas dans le projet de loi de 1996. Le gouvernement fait marche arrière. Une démarche plus pertinente consisterait à adopter au départ la liste actuelle du CSEMDC et à permettre au besoin des changements dans l'avenir, comme le prévoyait le projet de loi de 1996.

Je tiens à profiter de l'occasion pour présenter un amendement. Voici mon raisonnement. Lorsque le projet de loi a été déposé à la Chambre des communes en avril, la ministre a souligné que si le comité apportait des changements, le projet de loi connaîtrait le même sort que le document précédent qui est mort au Feuilleton il y a trois ans. Selon la Gazette de Montréal du 12 avril, le ministre a déclaré ceci: «Si vous déstabilisez cette mesure législative, elle va probablement disparaître, tout comme a disparu la précédente mesure législative». Avec ces menaces, le ministre demande effectivement au comité de ne pas faire son travail. Il fait un affront au processus démocratique à la Chambre.

J'exhorte le gouvernement à retirer le projet de loi et à écouter les intervenants qui ont trouvé un compromis réalisable, basé sur la collaboration. Je pourrais ajouter qu'ils sont très près de parvenir à un compromis tout à fait réalisable. Il suffit d'écouter l'Association minière du Canada. Il suffit d'écouter la Fédération canadienne de la nature, l'Association canadienne des pâtes et papiers, les propriétaires de boisés privés, la communauté agricole, le Sierra Club et les exploitants de ranchs. Les Canadiens veulent un projet de loi qui fonctionne. Or, ce projet de loi ne fonctionnera pas.

 

. 1750 + -

On peut pallier aux insuffisances de ce projet de loi en y apportant les changements nécessaires que j'ai exposés. Si on ne permet pas au comité d'y apporter des changements, j'exhorte le gouvernement à le faire. Je propose donc:  

    Que la motion soit modifiée par substitution, aux mots suivant le mot «Que», de ce qui suit: «le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, ne soit pas maintenant lu une deuxième fois mais qu'il soit lu une deuxième fois dans six mois à compter de ce jour.»

Cette mesure législative reçoit un appui considérable du public. En fait, les sondages montrent les uns après les autres que les Canadiens veulent...

Le vice-président: À l'ordre, s'il vous plaît. Le député ayant présenté un amendement, je crains que cela le mette dans l'impossibilité de faire un discours supplémentaire. Nous allons devoir traiter l'amendement qu'il a proposé. Le débat porte sur l'amendement.

*  *  *

LES TRAVAUX DE LA CHAMBRE

 

M. Bob Kilger (Stormont—Dundas—Charlottenburgh, Lib.): Monsieur le Président, j'invoque le règlement. Les représentants de tous les partis ont discuté entre eux et, conformément au paragraphe 45(7) du Règlement, ils se sont entendus pour reporter une nouvelle fois à la fin de la période consacrée aux initiatives ministérielles du mardi 30 mai 2000 les votes par appel nominal sur le projet de loi C-16 devant avoir lieu plus tard aujourd'hui.

Le vice-président: Y a-t-il consentement unanime pour procéder comme le propose le whip en chef du gouvernement?

Des voix: D'accord.

*  *  *

[Français]

LOI SUR LES ESPÈCES EN PÉRIL

 

La Chambre reprend l'étude de la motion: Que le projet de loi C-33, Loi concernant la protection des espèces sauvages en péril au Canada, soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité, ainsi que de l'amendement.

Le vice-président: L'honorable député de Davenport a la parole.

M. Yves Rocheleau: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'avais l'intention de prononcer un discours.

Le vice-président: J'ai déjà reconnu le député de Davenport. Je crois qu'il est normal pour un député du parti ministériel de prendre la parole après un député progressiste-conservateur.

[Traduction]

L'hon. Charles Caccia (Davenport, Lib.): Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la députée de Barrie—Simcoe—Bradford.

Comme d'autres députés l'ont déjà dit, les Canadiens s'attendent à ce que le gouvernement protège l'habitat des espèces en péril. Nous devons être à la hauteur de cette attente. Ce projet de loi, une fois amélioré, pourrait constituer un bel héritage s'il réussirait à préserver le riche patrimoine naturel du Canada. La survie et la protection des espèces en péril est une façon de joindre l'acte à la parole quand nous parlons de laisser un héritage et de ce que nous devons aux générations futures.

La situation est urgente comme l'a dit le député de Saskatoon—Rosetown—Biggar. On m'a dit qu'au cours de la dernière année, le nombre d'espèces en péril au Canada est passé de 340 à 353. On m'a aussi dit qu'une liste exhaustive comprendrait des milliers d'espèces car un grand nombre des espèces de la faune canadienne n'ont pas encore été évaluées.

 

. 1755 + -

Le projet de loi C-33, Loi sur les espèces en péril, a pour objet d'arrêter la disparition de notre riche patrimoine naturel. Ce projet de loi peut-il renverser la tendance?

Selon les scientifiques, la disparition de l'habitat est responsable à 80 p. 100 du déclin des espèces. La seule façon d'arrêter ce raz de marée destructeur est donc de protéger l'habitat des espèces en danger. Les Canadiens le savent. En fait, il y a déjà beaucoup de gens qui travaillent à la protection des habitats en danger par le biais de divers projets de conservations d'un bout à l'autre du pays. En outre, 91 p. 100 des Canadiens a qui on posait récemment la question ont répondu qu'ils pensaient qu'une loi protégeant les espèces en danger devait également voir à ce que leur habitat soit protégé. Ce degré d'appui est constant à l'échelle du pays, que ce soit dans les régions rurales ou les régions urbaines.

Le gouvernement, reconnaissant les efforts de conservation des particuliers, des localités et des organisations, débloquera 90 millions de dollars au cours des trois prochaines années pour financer des initiatives en matière de conservation. C'est un grand pas en avant. Les dispositions du projet de loi visant à offrir un filet de sécurité au cas où les provinces se refusaient à agir sont également encourageantes.

Enfin, le projet de loi décrit en détail les mesures à inscrire dans la stratégie de rétablissement afin d'assurer que toutes les menaces à la survie des espèces sont couvertes. Toutefois, puisque les Canadiens appuient résolument le rôle des scientifiques et qu'ils croient en une mesure législative qui protégera l'habitat des espèces en danger, nous devons voir à ce que le projet de loi atteigne ces objectifs.

À mon avis, sous sa forme actuelle, le projet de loi est loin d'atteindre ces objectifs. Permettez-moi de m'expliquer.

Les députés se rappelleront peut-être que, l'an dernier, 640 scientifiques canadiens très en vue ont signé une lettre qu'ils ont transmise au premier ministre et dans laquelle ils l'exhortaient d'adopter un projet de loi sur les espèces en péril. Ils ont tout d'abord demandé que la liste des espèces en péril soit transparente, qu'elle soit établie selon des données scientifiques et qu'elle soit libre de toute ingérence politique. Deuxièmement, ils ont demandé que l'on protège les habitats fauniques essentiels des espèces en péril, où qu'ils se trouvent. Malheureusement, ces deux éléments ne se trouvent pas dans le projet de loi.

Dans les termes actuels, il revient au ministre de convaincre le Cabinet du bien-fondé de l'établissement d'une liste des espèces sauvages en péril. Le ministre doit dresser une liste des espèces qui ont déjà été reconnues scientifiquement comme étant menacées. Cette façon de faire n'est pas satisfaisante, comme les données provinciales et l'expérience l'ont déjà démontré. Il n'y a qu'en Nouvelle-Écosse que la liste scientifique des espèces reçoit automatiquement la protection officielle en vertu de la loi. Certains sont d'avis qu'il devrait y avoir une certaine responsabilité politique à l'étape de l'établissement des listes.

Le projet de loi C-33 accorde déjà de vastes pouvoirs politiques discrétionnaires sur la pertinence et la façon de sauver les espèces en péril, à partir de la mise au point d'une stratégie de rétablissement jusqu'à l'établissement de plans d'action, en passant pas l'émission de permis et la conclusion d'ententes. Toutefois, si le gouvernement en poste devait décider de ne pas sauver une espèce, certaines dispositions du projet de loi permettent au ministre de ne pas agir. Je renvoie à l'article 41(2).

Les scientifiques canadiens ont également souligné le problème de la protection de l'habitat. Aux termes actuels du projet de loi, les interdictions relatives à la destruction de l'habitat essentiel d'une espèce en péril ne s'appliquent que sous la recommandation de tout le Cabinet. Je renvoie aux articles 59 et 61. Imaginez un peu par exemple le Cabinet devant unanimement déterminer l'étendue de l'habitat essentiel nécessaire par exemple pour le satyre fauve des Maritimes. Le ministre n'a pas le pouvoir d'adopter seul la réglementation nécessaire à la protection de l'habitat essentiel. Cela relève d'une décision collective du Cabinet.

J'aimerais maintenant parler du programme de rétablissement. En vertu du projet de loi, trois ministres compétents doivent élaborer un programme de rétablissement, dont des plans d'action, à l'intention des espèces inscrites. Le programme de rétablissement prévu ne suffira pas à protéger l'habitat des espèces en voie de disparition. Lorsqu'il appliquera un programme, l'un des trois ministres compétents pourra prendre des règlements concernant uniquement les espèces aquatiques, les espèces d'oiseaux protégés par la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et les espèces vivant sur le territoire domanial. C'est ce que dit l'article 53.

En ce qui concerne l'habitat essentiel, les règlements d'application fédérale devront être pris par l'ensemble du Cabinet.

 

. 1800 + -

Il y a de bonnes raisons de craindre que le ministre responsable sera tellement occupé à défendre devant le Cabinet les mesures qu'il souhaitera appliquer que cela engendrera inévitablement de graves retards dans la protection des espèces, des retards que nous ne pouvons pas nous permettre car, sans une intervention rapide, des espèces en voie de disparition vont disparaître. Toutefois, un projet de loi bien conçu permettra d'assurer une protection adéquate de l'habitat avant qu'il ne soit trop tard. C'est pourquoi j'aimerais faire, en terminant, quatre propositions.

Premièrement, il ne devrait y avoir qu'une seule liste définitive des espèces en voie de disparition, la liste scientifique. Deuxièmement, la protection de l'habitat essentiel relevant du gouvernement fédéral devrait être obligatoire. D'autres députés en ont parlé avant moi. Troisièmement, le ministre compétent, et lui seul, devrait être habilité à prendre des règlements de protection de l'habitat essentiel. Quatrièmement, dans les cas où une province omet d'agir, le gouvernement fédéral devrait pouvoir établir rapidement un filet de sécurité.

Comme on peut le voir, ce projet de loi, si on n'y apporte pas d'améliorations, ne pourra pas endiguer la tendance vers l'extinction d'espèces en voie de disparition au Canada. Si, par contre, des améliorations y sont apportées, il pourra contribuer grandement à assurer une gestion efficace du territoire et de sa faune. J'espère que le processus législatif, à l'étape du comité, sera suffisamment souple pour permettre d'apporter au projet de loi les amendements nécessaires, qui permettront de le renforcer et d'en faire, peut-être, la pierre d'angle de la politique générale du gouvernement fédéral concernant la protection des espèces en voie de disparition au Canada, dans l'intérêt de tous les Canadiens et en conformité avec nos engagements internationaux.

Mme Louise Hardy (Yukon, NPD): Monsieur le Président, je suis d'accord avec le député quand il dit qu'il devrait y avoir une seule liste, et une liste à caractère scientifique.

Je voudrais donner un exemple et demander son opinion à ce sujet. Je viens d'aller à Washington avec les Gwich'in, les autochtones du Yukon et de l'Alaska, pour les accompagner dans leurs efforts de lobbying afin d'obtenir une protection pour les terrains de mise bas de la harde de caribous de la Porcupine. Les autochtones canadiens dépendent de ce troupeau, mais les caribous vont mettre bas sur la côte de l'Arctique en Alaska. Le Canada a protégé l'habitat de son côté, mais pas les États-Unis.

Nous avons un peuple qui s'efforce de protéger l'habitat de la harde de caribous dont il dépend pour sa subsistance depuis plus de 20 000 ans. Cela fait 20 ans qu'il fait du lobbying, mais année après année les travaux de forage se rapprochent de plus en plus des terrains de mise bas de cette harde. Faute de protection pour cet habitat, le troupeau risque de disparaître, et les Gwich'in qui comptent sur ce troupeau pour leur subsistance depuis des milliers d'années disparaîtront eux-mêmes. J'aimerais que le député nous dise ce qu'il en pense.

L'hon. Charles Caccia: Monsieur le Président, la députée du Yukon a très bien présenté la question. Je ne peux pas ajouter grand-chose.

Nous sommes tous au courant du problème de la harde de caribous de la Porcupine, qui franchit la frontière canado-américaine sur le versant Nord. Nous sommes depuis des dizaines d'années aux prises avec ce problème, dont l'ampleur varie au fil du temps. L'avenir de cette harde dépendra de la détermination des deux gouvernements à contrôler et peut-être même à interdire l'exploitation du pétrole et des autres combustibles fossiles dans l'Arctique.

À une époque où les cours pétroliers étaient très élevés, des pressions très intenses s'exerçaient pour qu'on exploite les ressources pétrolières de l'Arctique très haut dans le Nord, même au nord de Tuktoyaktuk. À cette époque, c'est-à-dire au début des années 80, le gouvernement du Canada est intervenu auprès de Washington pour protéger la harde de la Porcupine.

Il se peut fort bien que des démarches s'imposent de nouveau, et j'encourage la députée à faire valoir son point de vue à l'occasion de la réunion du Conseil parlementaire de l'Arctique qui aura lieu en août prochain, à Rovaniemi, en Finlande. C'est la tribune idéale pour présenter des instances de cet ordre.

 

. 1805 + -

Je suis persuadé que le chef de la délégation canadienne, le député de Lachine, sera très réceptif au point de vue de la députée du Yukon.

M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je me demande si le député a entendu parler d'une politique appelée couramment «tue, enterre et tais-toi», et s'il appuie cette politique.

En raison de leurs lois concernant les espèces menacées, les États-Unis imposent des peines aux gens qui modifient les habitats d'une façon ou d'une autre. Par conséquent, bon nombre de propriétaires de ranch et d'agriculteurs des États-Unis ont décidé de tuer, d'enterrer et de se taire, soit de se débarrasser des animaux avant que les autorités ne puissent découvrir ce qui s'est passé, car il n'existe aucune forme d'encouragement, juste un châtiment. Autrement dit, il n'y a que des bâtons, mais pas de carottes, pour assurer la protection de ces animaux.

Le député compte-t-il proposer une telle politique au Canada et se retrouver avec des incitatifs qui encourageront les propriétaires de ranch et les agriculteurs du Canada à se débarrasser des animaux, au lieu d'offrir des incitatifs, des carottes au lieu de bâtons, qui protégeront les espèces menacées?

L'hon. Charles Caccia: Monsieur le Président, si le député de Calgary-Ouest s'était donné la peine de lire le projet de loi que nous débattons cet après-midi, il n'aurait pas posé cette question stupide, car ce n'est pas du tout l'objet du projet de loi. Comme il pose cette question, je dois l'exhorter à lire le projet de loi C-33 avant de commencer à soulever parmi ses électeurs des craintes totalement injustifiées.

Le député devrait savoir que le projet de loi n'adopte nullement le modèle américain. Par conséquent, le ministre de l'Environnement a conçu le système des carottes et un projet de loi bien équilibré. Le député devrait savoir également qu'un montant de quelque 90 millions de dollars a été affecté à l'intendance, au cours des trois prochaines années, et qu'un montant de 45 millions de dollars par année sera prévu par la suite pour encourager des initiatives d'intendance.

Pour conclure, nous n'avons nullement l'intention d'adopter une politique à l'américaine incitant à tuer, enterrer et se taire. L'approche canadienne sera très réfléchie et, espérons-le, efficace.

Mme Aileen Carroll (Barrie—Simcoe—Bradford, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de faire partie d'un gouvernement qui présente à la Chambre un projet de loi sur les espèces en voie de disparition au Canada. Je suis également ravie d'intervenir dans le débat sur ce projet de loi aujourd'hui.

En présentant cette mesure, le gouvernement respecte les priorités qu'il a énoncées dans le livre rouge et incluses dans le discours du Trône et dans nos engagements internationaux. De même, nous savons que, d'un océan à l'autre, les Canadiens sont massivement en faveur d'une mesure législative assurant la protection des espèces en voie de disparition au Canada.

Ce faisant, ils reconnaissent peut-être que le Canada se distinguait de ses voisins américain et mexicain du fait qu'il n'avait pas de telle loi. Son geste va au-delà de la simple comparaison puisque le Canada partage avec ces deux pays 70 p. 100 de ses espèces en péril.

En faisant pression sur le gouvernement pour qu'il légifère fermement à l'égard des espèces en voie de disparition, les Canadiens expriment leur préoccupation générale pour les questions environnementales et exigent que les gouvernements de tous les paliers calment leurs inquiétudes et fassent en sorte que les priorités environnementales soient synonymes de priorités gouvernementales.

Au premier rang de toutes les préoccupations environnementales, les Canadiens placent le projet de loi sur les espèces en voie de disparition. En effet, les Canadiens nous ont écrit davantage à propos de ce dossier qu'à propos de toutes les autres questions environnementales combinées. Ils nous demandent d'agir d'une manière courageuse et catégorique pour protéger les espèces menacées par l'urbanisation grandissante et la forte croissance économique. Bien qu'ils reconnaissent la nécessité d'équilibrer ces autres dimensions qui sont inhérentes à l'action gouvernementale bien développée, ils ne se contenteront pas de demi-mesures et ils seront implacables envers ce qu'ils jugeront comme des demi-mesures.

 

. 1810 + -

Les sondages sont vraiment très utiles pour connaître les opinions et les priorités des Canadiens, mais il vaut encore mieux de passer une journée à écouter ses électeurs et à les entendre dire exactement ce qu'ils pensent. C'est ce que j'ai fait vendredi, il y a une semaine, comme j'en ai souvent l'occasion le vendredi. Non seulement j'ai évité l'air raréfié de notre belle capitale, mais j'ai aussi échappé à l'atmosphère parfois étouffante de mon bureau de circonscription et je suis allée rencontrer les élèves de 5e année de la Portage View Public School le matin et les élèves de 8e année de la Maple Grove Public School dans l'après-midi. Ce sont deux écoles de Barrie.

Nous avons parlé de l'environnement et de la Loi sur les espèces en péril. Au-delà des détails concernant la protection des espèces en voie de disparition et de leurs habitats dont nous avons parlé, ce qui est ressorti avant tout des propos de ces enfants, et ce que j'ai observé avant tout sur leurs visages, c'est leur confiance à mon égard. Ils étaient convaincus que je veillerais sur leur avenir et que la faune et la biodiversité nécessaire à la vie de cette faune seraient protégées par un gouvernement qui a tenu parole, un gouvernement qui a pris toutes les mesures législatives nécessaires pour prévenir l'extinction de nos espèces précieuses, la disparition du legs de la nature, et pour protéger ces espèces afin qu'elles demeurent bien vivantes pour les générations et les époques à venir. Rien de mieux qu'une frimousse d'enfant pour nous rappeler quelles sont nos véritables priorités et quels engagements nous devons respecter.

Nous sommes saisis d'un projet de loi sur l'environnement qui comporte de nombreux éléments fort valables. L'organisme et le processus d'établissement de la liste officielle sont les éléments vitaux de tout projet de loi qui vise à protéger les espèces en péril. Le Comité sur la situation des espèces en péril au Canada, le COSEPAC, est un comité scientifique national qui exerce ses fonctions depuis 20 ans et s'est acquis une réputation internationale d'organisme scientifique crédible et objectif.

La nouvelle loi constituera le fondement juridique du COSEPAC; celui-ci demeurera indépendant du gouvernement. Cette caractéristique est essentielle et elle nous permettra de poursuivre un travail que nous avons très bien fait au Canada, à savoir l'établissement d'une liste.

Il y a quelques semaines à peine, le COSEPAC a porté de 340 à 353 le nombre d'entrées dans sa liste des espèces en voie de disparition ou en péril. Il ne fait aucun doute que tout le temps qu'on attendait une mesure législative aux paliers provincial et fédéral, la situation s'est détériorée au point de devenir critique. Cela nous force à agir promptement, mais avec un projet de loi qui soit à la hauteur. La façon de dresser la liste des espèces sera déterminante à cet égard.

La nouvelle loi comporte notamment deux composantes qui méritent notre attention et notre approbation. La stratégie gouvernementale insistera sur la bonne intendance et prévoira une indemnisation.

Le programme d'intendance comprendra des ententes entre les propriétaires fonciers, les gestionnaires et les gouvernements dans la mise en vigueur des plans de rétablissement des espèces menacées. Il comprendra des programmes d'acquisition de propriétés privées en vue de protéger l'habitat des espèces et de prévoir des stimulants économiques à une meilleure gestion des terres. Notre programme d'intendance contribuera à protéger les espèces sauvages qui ne sont pas en péril de telle sorte qu'elles ne soient jamais en péril.

Le projet de loi sur les espèces en péril prévoit qu'on indemnisera les propriétaires fonciers privés qui devront réduire considérablement l'utilisation de leurs terres pour protéger l'habitat essentiel d'une espèce. L'indemnisation diffère des stimulants à la bonne intendance étant donné qu'elle ne sera envisagée que lorsque la bonne intendance et d'autres mesures de sécurité n'auront pas suffi à protéger un habitat essentiel et qu'un filet de sécurité s'imposera donc. Il importe de signaler que l'indemnisation ne devrait pas excéder la valeur des stimulants qui auront été offerts dans le cadre de programmes de bonne intendance.

 

. 1815 + -

De nombreux aspects de ce projet de loi méritent notre attention, mais il est impossible de les aborder tous aujourd'hui. En tant que revenant au comité de l'environnement, je prévois faire exactement cela aux audiences du comité et entendre l'opinion et les préoccupations des témoins qui viendront discuter avec nous de cette mesure législative absolument vitale.

Il vaut la peine de signaler, toutefois, en ce début de débat, que beaucoup de groupes bien informés et éclairés ont déjà examiné le projet de loi aux diverses étapes de sa rédaction et nous ont fait bénéficier de leur expérience et de leurs observations. Je pense en particulier au rapport du groupe de travail sur les espèces en péril qui incarne la sagesse globale d'une alliance disparate et éclectique composée de membres de la Fédération canadienne de la nature, de l'Association canadienne des pâtes et papiers, de l'Association des sociétés minières, le Comité national de l'environnement agricole, de la Fédération canadienne de la faune et du Sierra Club du Canada. Je suis impressionnée quand un tel amalgame sait fonctionner si harmonieusement et trouver un terrain d'entente. C'est exactement le genre de communion qui fera le succès ou l'insuccès de cette mesure. Malheureusement, je me pose des questions quand eux-mêmes disent que le projet de loi ne va pas aussi loin qu'ils l'ont recommandé, notamment lorsqu'on considère qu'ils sont partis de points de vue très différents et qu'ils en sont quand même arrivés à une entente quant aux mesures que ce projet de loi doit prévoir pour protéger les espèces en péril du Canada. Ils semblent affirmer que le projet de loi doit aller plus loin.

Le groupe de travail appuie fermement la liste scientifique d'espèces en péril plutôt que le processus d'approbation par le Cabinet prévu dans le projet de loi. Il recommande que la liste du COSEPAC telle qu'elle existe maintenant soit reconnue comme étant la liste initiale d'espèces en péril. La loi récemment adoptée par le gouvernement de la Nouvelle-Écosse tient compte de ces deux recommandations. Le groupe s'inquiète de l'absence d'indemnisation pour les collectivités de travailleurs qui pourraient être déplacées par suite de mesures visant à protéger des espèces en péril.

À l'instar de tous ceux d'entre nous qui participent à l'élaboration des politiques gouvernementales, je me rends certes compte que le processus consultatif ne peut pas tenir compte des critères de tous les groupes intéressés, mais il reste qu'il évalue avec soin les points de vue tant des industries que des groupes environnementaux.

En conséquence, si je puis revenir à la norme que je me suis fixée à moi-même, afin d'écouter attentivement la prochaine génération qui nous a confié la survie de la faune, j'estime que nous devons écouter avec soin tous les avis judicieux qui seront exprimés et, en tant que comité étudiant ce projet de loi, nous assurer d'être accessibles, par tous les moyens à notre disposition, à tous ceux que concernent cette très vitale mesure.

M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, j'ai deux questions à poser à ma collègue. J'ai été quelque peu préoccupé lorsqu'elle a mentionné à quelques reprises la nécessité d'avoir un régime compensatoire. Une des choses qui préoccupent les propriétaires fonciers, les propriétaires de boisés et les agriculteurs d'un bout à l'autre du pays est la volonté du gouvernement d'élaborer un bon régime compensatoire.

Comment cela cadre-t-il avec ce que le ministre a dit le 23 septembre 1999, comme le rapportait le Sun de Vancouver. Le ministre a dit: «Un comportement responsable est quelque chose que nous attendons des gens, et non quelque chose que nous devons acheter.» Ma collègue pourrait-elle quelques remarques à ce sujet?

Mon autre question est la suivante: pourquoi la députée n'appuierait-elle pas un amendement à l'étape de l'étude en comité pour que la liste des espèces en péril soit fondée sur des données scientifiques au lieu d'être laissée à la discrétion du Cabinet?

 

. 1820 + -

Mme Aileen Carroll: Monsieur le Président, en ce qui concerne la déclaration que le ministre a faite au milieu de 1999 à l'effet qu'il ne croyait pas que ce genre de mesure législative nécessitait la mise en place d'un régime obligatoire, j'ai fait allusion à un processus consultatif. Les ministres qui viennent d'être nommés à leur poste et les députés d'arrière-ban partent parfois d'une certaine position et, à mesure qu'ils consultent les Canadiens et écoutent ce que ceux-ci ont à dire, ils peuvent rajuster leur position initiale pour tenir compte du point de vue des Canadiens. Ils ne veulent pas avoir l'air inflexibles ni l'être. Si on perçoit un mouvement de la part du gouvernement, représenté dans ce dossier par le ministre de l'Environnement, c'est là un signe de flexibilité et non de rétrogression.

Pour ce qui est de la deuxième question, c'est-à-dire si j'étais ou non en faveur d'un amendement à l'étape de l'étude en comité, en toute honnêteté, je ne crois pas que j'étais membre du comité au moment où cet amendement a été présenté, mais on me corrigera si je me trompe.

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la députée de Davenport a aussi parlé du processus d'établissement de la liste et du fait que ce processus devait être scientifique. Je pense qu'à cet égard, nous sommes tous d'accord avec elle.

Je ne comprends toutefois pas ce que la députée de Barrie—Simcoe—Bradford propose. Une fois la liste établie, à qui incombe-t-il d'octroyer les fonds pour un projet destiné à protéger une espèce en voie de disparition? La députée propose-t-elle que le COSEPAC soit chargé d'affecter les fonds nécessaires à un projet donné?

Mme Aileen Carroll: Monsieur le Président, ce que j'ai dit au sujet de l'établissement de la liste est lié aux recommandations du groupe de travail sur les espèces en péril. Ce groupe a recommandé que l'établissement de la liste relève de la communauté scientifique et qu'il ne s'agisse pas d'un processus politique.

Aujourd'hui, dans mes observations préliminaires, je n'ai pas parlé du financement ni des ressources et de l'infrastructure qui seront nécessaires pour protéger les espèces. Je n'ai rien contre le fait que le gouvernement joue un rôle clé à cet égard.

Je pense toutefois que, conformément à la recommandation, il serait préférable de laisser le soin d'établir la liste à ceux qui ont étudié la question et qui sont des spécialistes de ce sujet. Une fois que les scientifiques auront déterminé le genre de mesures qui s'imposent, le gouvernement sera parfaitement en mesure d'évaluer la meilleure façon de les mettre en oeuvre, compte tenu des coûts qui s'ensuivent. L'établissement de la liste est toutefois une question tout à fait différente.

M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui au sujet du projet de loi C-33. C'est une question qui a été débattue au cours de la dernière campagne électorale en 1997. Ce projet de loi fort nécessaire a enfin été déposé, et il était temps.

Il me semble d'après les débats qui ont précédé que la majorité des gens sont préoccupés par le contenu du projet de loi, mais pour des raisons fort différentes. Nous de l'Alliance canadienne nous préoccupons de certains des éléments du projet de loi et je vais tenter de préciser certains d'entre eux dans ma présentation.

Après un grand nombre d'années et un nombre presque aussi grand de ministres, je suis fort heureux de pouvoir intervenir enfin au sujet de la mesure législative visant à protéger les espèces menacées au Canada. Je tiens à souligner à quel point les espèces sauvages et la nature revêtent de l'importance pour les Canadiens et l'Alliance canadienne.

Les Canadiens apprécient la nature pour bon nombre de raisons différentes. Dans le passé, la survie même de beaucoup de nos ancêtres était tributaire de la nature. De nos jours, nous apprécions les espèces sauvages pour d'autres motifs. La notion de dépendance économique a largement fait place au point de vue selon lequel les espèces sauvages devraient être appréciées comme telles. L'affluence de notre société se reflètent dans l'enquête sur la nature menée en 1996 et ayant révélé que les Canadiens et les visiteurs au Canada ont consacré 11,7 milliards de dollars à des activités liées à la nature cette seule année-là.

 

. 1825 + -

Les espèces sauvages font partie intégrante de notre patrimoine et de notre identité et attirent des touristes venant de partout dans le monde. Par ailleurs, comme humains, nous sommes tributaires de la diversité des espèces sur la terre pour notre propre survie.

L'Alliance canadienne reconnaît l'importance de ce fait dans sa déclaration de principe qui précise que:

    Nous sommes déterminés à protéger et à préserver l'environnement naturel et les espèces menacées du Canada, et à assurer le développement durable de nos ressources naturelles abondantes, dans l'intérêt des générations actuelles et futures. Nous allons établir un équilibre entre la protection de l'environnement et le développement économique...

C'est cet équilibre crucial qui fait problème dans les déclarations des deux côtés de la Chambre. C'est le moyen et la façon d'instaurer cet équilibre qui est en cause.

Malheureusement, dans sa dernière mouture de loi sur la protection des espèces en péril, le gouvernement libéral ne parvient pas à établir cet équilibre.

Le projet de loi C-65 ne tenait aucun compte du droit à la propriété privée des propriétaires terriens. Il s'agissait d'un projet de loi favorisant la manière forte et reposant sur la réglementation gouvernementale plutôt que sur la collaboration avec les propriétaires terriens. C'est en partie grâce aux efforts déployés par les députés réformistes que le projet de loi n'a jamais été adopté. Il était modelé sur une loi des États-Unis qui est inefficace, qui repose sur la manière forte et qui, finalement, fait pour les espèces en péril exactement l'inverse de ce qu'il faut faire.

L'Alliance canadienne reconnaît que les propriétaires terriens sont des acteurs incontournables de la gestion des espèces en péril et, lors de son congrès de fondation tenu plus tôt cette année, l'Alliance a reconnu et affirmé le droit historique à la propriété et à la jouissance de ses biens qui existe en common law.

Depuis les élections de 1997, les députés de l'Alliance canadienne ont préconisé l'élaboration d'une loi responsable sur les espèces en péril, c'est-à-dire une loi reposant sur la collaboration et pas sur la confrontation, l'expropriation et l'indemnisation. Il n'est cependant pas étonnant que le gouvernement ne partage pas ce point de vue, ce qui est évident dans le projet de loi.

Le préambule du projet de loi est un texte de prime abord anodin qui reconnaît la nécessité d'instaurer une collaboration entre les différents paliers de gouvernement et parle d'efforts d'intendance de la part de chaque Canadien. Cependant, il devient vite évident que le projet de loi favorise davantage la manière forte que la concertation.

Pour en venir à la question des droits de propriété privée et à l'indemnisation, je dirais que les vrais écologistes et les vrais protecteurs sont ceux qui ont un contact quotidien avec la terre. Ce sont les propriétaires de ranch, les agriculteurs, les gens travaillant avec les ressources naturelles et les amateurs de plein air qui savent que la nature est aussi belle et fragile qu'elle l'est. Personne n'est plus conscient de la fragilité de l'environnement que ceux qui sont chaque jour en contact avec la terre.

Quand on pense que l'indemnisation est une des principales préoccupations des propriétaires fonciers, il est décevant de voir que le gouvernement ne soit pas vraiment intéressé à les indemniser. L'article 64 stipule que le «ministre peut—et non qu'il doit—indemniser toute personne des pertes subies en raison des conséquences extraordinaires que pourrait avoir l'application de la loi».

Le député de Saskatoon—Rosetown—Biggar a dit plus tôt qu'il ne pense pas que notre parti connaissait tous les faits quand nous avons parlé aux propriétaires fonciers et autres propriétaires. Je me demande si le député pourrait leur dire qu'ils n'ont rien à craindre en rapport avec cette mesure législative et que rien dans le projet de loi C-33 n'aura des répercussions sur leur gagne-pain. Nous ne pouvons pas leur dire cela parce que certains éléments du projet de loi préoccupent vivement les Canadiens. Nous devons traiter soigneusement avec eux.

Le projet de loi ne précise pas comment cette indemnisation sera payée. Il n'y a qu'une disposition obscure qui confère au gouverneur en conseil le pouvoir d'élaborer le règlement nécessaire. Cette seule disposition préoccupe beaucoup les Canadiens. Si le gouvernement entend verser une indemnisation, il faut établir exactement comment il procédera. Il affirme que la procédure figurera dans le règlement. C'est toutefois une chose que l'on devrait retrouver dans la loi. Si c'était le cas, nous pourrions nous pencher sur la question et la considérer d'un oeil favorable. Si l'on parle de valeur marchande et si cela doit aider les gens au moment où leurs terres leur sont enlevées ou sont expropriées, alors c'est une chose que l'on doit considérer. Selon la formulation actuelle du projet de loi, nous ne pouvons rien faire.

Il faudrait établir les procédures à suivre pour demander une indemnisation, les méthodes ayant servi à établir l'admissibilité d'une personne à ces indemnisations et les conditions de paiement. Je répète que la loi ne fait absolument aucune mention de la juste valeur marchande.

 

. 1830 + -

L'absence d'indemnisation a été la plus importante entrave au succès de la Loi sur les espèces en péril aux États-Unis. Le principal problème, c'est que la loi américaine sur les espèces en péril créé un genre de stimulation perverse qui pousse les propriétaires à considérer les espèces en péril qui se trouvent sur leurs terres comme des désavantages, et c'est exactement ce que nous devons éviter ici.

Nous ne pouvons pas adopter une mesure législative qui pourrait mener à considérer une espèce en péril comme un désavantage. Nous devons la rédiger de façon à ce que ce soit exactement le contraire. Si le Fish and Wildlife Service des États-Unis constate la présence d'une espèce en péril sur les terres de quelqu'un, ce dernier ne peut absolument pas modifier ses terres et il n'y a pas d'indemnisation. Il n'est pas étonnant de voir comment les propriétaires fonciers ont réagi.

Qu'est-ce que le Canada peut apprendre de l'expérience américaine en ce qui a trait à l'indemnisation? Il est clair qu'une indemnisation juste et équitable est essentielle pour assurer une application fructueuse de n'importe quelle loi. Les propriétaires fonciers ne doivent pas considérer la présence de la faune sur leurs terres comme un handicap, mais exactement le contraire.

L'indemnisation aidera le gouvernement à s'assurer le concours des propriétaires fonciers pour établir un climat de coopération qui permettra aux associations privées de poursuivre leur travail. De nombreux organismes ont eu beaucoup de succès en travaillant avec les propriétaires fonciers pour conserver l'habitat naturel et ils ont besoin que ces propriétaires gardent leur bonne volonté pour réussir dans leurs activités.

J'ai parlé de l'Alberta Fish and Game Association et de l'Opération Chouette des terriers. L'été dernier, j'ai eu le plaisir d'aller visiter Brooks en compagnie du député de Medicine Hat. L'association d'arrosants de l'est nous y avait invités. Tom Livingston, un membre du conseil d'administration, et quelques uns de ses collaborateurs nous ont amenés visiter la région et notamment le grand marais de la chouette des terriers qu'ils avaient constitué de leur propre initiative.

C'était très impressionnant. Les terres servent au pâturage. On y fait aussi de l'exploration et de la production pétrolière. Les terres environnantes font l'objet d'une exploitation agricole intense. Toutes ces activités s'y exercent alors que les chouettes des terriers y prospèrent. Cela est rendu possible grâce à l'amour que les gens ressentent naturellement pour leur territoire.

M. Livingston m'a expliqué que circuler en véhicule dans la prairie, même en roulant à 10 ou 12 kilomètres seulement sur les terres à pâturage, suffit à ruiner une acre de pâturage. Ils font très attention à la façon dont ils conduisent sur ces sols et à l'utilisation qu'ils en font. Ils les gèrent très bien.

Ducks Unlimited est un autre organisme qui a des accords d'achat et de conservation. La Société canadienne pour la conservation de la nature fait du très bon travail et a besoin qu'on l'encourage dans son rôle d'intendant.

L'article traitant de l'indemnisation oblige le gouvernement à faire preuve de responsabilité et à prendre en considération les conséquences sociales et économiques de ses décisions. Cet aspect à lui seul est très important. Si nous envisageons de mettre en place des programmes de mise en valeur des sols et des programmes de protection de l'habitat, nous devons tenir compte des conséquences des décisions à cet effet.

Les préoccupations à l'égard du droit à la propriété se retrouvent dans d'autres articles du projet de loi. Quand nous parlons du droit à la propriété, nous ne devons pas seulement penser à la possibilité qu'une personne perde ses terres, mais aussi à la possibilité que des gens empiètent sans raison valable sur les terres les uns des autres.

Cette question est abordée dans la demande d'enquête. Le gouvernement a été assez prudent pour éliminer les dispositions en matière d'action au civil qui figuraient dans le projet de loi C-65, mais a maintenu dans ce projet de loi une disposition permettant à une personne de demander au gouvernement l'ouverture d'une enquête. N'importe quelle personne peut aller dire au gouvernement qu'elle soupçonne qu'une infraction a été commise, et le gouvernement serait tenu d'ouvrir une enquête.

L'article 95 exige que le ministre compétent informe l'auteur de la demande du déroulement détaillé de l'enquête tous les 90 jours. Cette disposition doit être prise en conjonction avec l'article 90, qui permet à un agent de l'autorité de pénétrer dans une propriété privée et d'y circuler sans encourir de poursuites pour violation du droit de propriété. Si l'on y ajoute l'article 34, qui autorise le gouvernement fédéral à exercer ses pouvoirs dans une province, ailleurs que sur le territoire domanial, s'il estime que le droit de la province ne protège pas les espèces, on obtient un scénario terrifiant dans lequel les propriétaires fonciers ont très peu de ressources à leur disposition pour se protéger contre les mesures vexatoires.

Ce sont certaines des préoccupations qu'expriment les propriétaires fonciers et les gens dans le secteur des ressources. Ces préoccupations sont légitimes. Ils s'inquiètent à juste titre de ce que leurs terres sont menacées.

 

. 1835 + -

Je veux maintenant parler des choses que nous aimerions proposer. L'Alliance canadienne rejette l'approche autoritaire prise dans ce projet de loi. Pendant le peu de temps qui me reste aujourd'hui et au cours des débats à venir, j'expliquerai comment nous protégerons les espèces en péril.

Comme la majorité des Canadiens, nous avons toujours appuyé l'élaboration d'une mesure législative protégeant les espèces en danger, mais nous savons que pour en assurer le succès, il faut respecter les droits fondamentaux des propriétaires fonciers. Nous croyons que la coopération, et non la confrontation, donnera les meilleurs résultats. Nous croyons également que les gouvernements doivent être tenus responsables de leurs actes. À cette fin, nous croyons que la décision finale pour ce qui est de l'établissement de la liste, devrait relever du Parlement. Lui seul a reçu le mandat démocratique de soupeser les intérêts conflictuels de l'économie et de l'environnement.

Voilà la clé. Si un organisme entièrement scientifique établit la liste, il faut qu'un Parlement responsable reconnaisse cette liste et prenne toute mesure jugée nécessaire pour protéger les espèces en voie de disparition. On ne peut retirer de l'équation cette responsabilité parlementaire car le dossier prendrais alors une toute autre dimension.

Il y a un peu plus d'un an, j'ai eu l'occasion de visiter la forêt ancienne sur la côte ouest avec des gens qui m'ont accompagné pendant deux ou trois jours. Nous avons survolé les lieux en hélicoptère et nous avons pu observer une exploitation forestière plus respectueuse de l'environnement, certains changements mis en oeuvre, ainsi que certaines pratiques visant à sauvegarder les espèces en voie de disparition, à protéger la terre contre l'érosion et à protéger aussi les bassins hydrographiques. L'industrie est plus sensibilisée aux mesures à prendre. Elle s'efforce de les mettre en oeuvre.

On observe la création de nouvelles coalitions entre les groupes environnementalistes, l'industrie et les utilisateurs des terres qui s'unissent pour essayer de trouver une solution au problème. Le projet de loi présenté par le gouvernement doit être de nature à favoriser cette coopération et à rapprocher ces gens pour vraiment et sérieusement protéger les espèces en voie de disparition et notre environnement.

Si tous les intervenants participent au processus, on parviendra à élaborer des mesures législatives vraiment valables, non seulement dans le domaine des espèces en voie de disparition, mais aussi dans tous les dossiers environnementaux. Ainsi, nous pourrons voir à ce que le pays soit durable à long terme et préserver ce que nous possédons aujourd'hui pour les générations futures.

Le vice-président: Il reste encore trois minutes avant la fin de la période réservée aux travaux de la Chambre. Est-ce que la députée de York-Nord préfère dire qu'il est 18 h 41 afin d'éviter d'être interrompue? Je serais heureux de lui donner la parole, mais elle ne disposera que de trois minutes, elle aura donc encore sept ou dix-sept minutes, selon le cas, lorsque le projet de loi sera de nouveau à l'étude de la Chambre.

Mme Karen Kraft Sloan: Monsieur le Président, dans la mesure où j'aurai la possibilité de m'exprimer sur cette mesure législative fort importante, il me fait plaisir de dire qu'il est 18 h 41.

Le vice-président: Est-on d'accord?

Des voix: D'accord.

Le vice-président: La députée de York-Nord sera la prochaine personne à prendre la parole, pourvu qu'elle soit ici le jour où le projet de loi sera à l'étude.

*  *  *

LES CRÉDITS

JOUR DÉSIGNÉ—LA LOI CANADIENNE SUR LA SANTÉ

La Chambre reprend l'étude, interrompue le 18 mai, de la motion et de l'amendement.

Le vice-président: Comme il est 18 h 41, la Chambre procède maintenant au vote par appel nominal différé sur l'amendement à la motion des crédits.

Convoquez les députés.

 

. 1900 + -

Après l'appel du timbre:

Le président suppléant (M. McClelland): Le premier vote porte sur l'amendement.

 

. 1905 + -

(L'amendement, mis aux voix, est rejeté.)

Vote no 1322

POUR

Députés

Blaikie Davies Desjarlais Dockrill
Earle Godin (Acadie – Bathurst) Gruending Hardy
Laliberte Lill Martin (Winnipeg Centre) McDonough
Nystrom Proctor Riis Stoffer
Wasylycia - Leis – 17


CONTRE

Députés

Ablonczy Anders Anderson Assad
Assadourian Augustine Axworthy Bachand (Richmond – Arthabaska)
Bachand (Saint - Jean) Bailey Baker Bakopanos
Barnes Bélair Bélanger Bellehumeur
Bellemare Bennett Bertrand Bevilacqua
Bigras Blondin - Andrew Bonin Boudria
Bradshaw Brien Bryden Bulte
Byrne Caccia Cadman Calder
Cannis Caplan Carroll Casson
Catterall Cauchon Chamberlain Charbonneau
Chatters Chrétien (Frontenac – Mégantic) Clouthier Coderre
Collenette Cotler DeVillers Dhaliwal
Dion Doyle Dromisky Drouin
Duhamel Duncan Easter Eggleton
Elley Epp Finlay Folco
Fontana Forseth Fry Gagliano
Gallaway Gauthier Godfrey Goldring
Goodale Gray (Windsor West) Grey (Edmonton North) Grose
Guimond Harb Harvard Herron
Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Hubbard Iftody
Jackson Jaffer Jennings Johnston
Jordan Karetak - Lindell Keyes Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh)
Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson Kraft Sloan Lastewka
Lebel Lee Leung Limoges
Longfield Lowther MacAulay MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough)
Mahoney Maloney Manley Mark
Marleau Matthews McCormick McGuire
McLellan (Edmonton West) McTeague Ménard Mifflin
Mills (Red Deer) Minna Mitchell Muise
Myers Nault Normand Obhrai
Pagtakhan Paradis Patry Penson
Peterson Phinney Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri
Proulx Provenzano Redman Reed
Robillard Rocheleau Rock Saada
Scott (Fredericton) Sekora Sgro Shepherd
Solberg Speller St. Denis St - Julien
Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Szabo
Telegdi Thibeault Thompson (New Brunswick Southwest) Torsney
Turp Vanclief White (North Vancouver) Wood – 156


«PAIRÉS»

Députés

Copps Nunziata


 

Le président suppléant (M. McClelland): Je déclare l'amendement rejeté.

Le vote porte maintenant sur la motion principale. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

Des voix: D'accord.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

Des voix: Oui.

Le président suppléant (M. McClelland): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

Des voix: Non.

Le président suppléant (M. McClelland): À mon avis, les non l'emportent.

Et plus de cinq députés s'étant levés:

 

. 1910 + -

(La motion, mise aux voix, est rejetée.)

Vote no 1323

POUR

Députés

Blaikie Davies Desjarlais Dockrill
Earle Godin (Acadie – Bathurst) Gruending Hardy
Laliberte Lill Martin (Winnipeg Centre) McDonough
Nystrom Proctor Riis Stoffer
Wasylycia - Leis – 17


CONTRE

Députés

Ablonczy Anders Anderson Assad
Assadourian Augustine Axworthy Bachand (Richmond – Arthabaska)
Bachand (Saint - Jean) Bailey Baker Bakopanos
Barnes Bélair Bélanger Bellehumeur
Bellemare Bennett Bertrand Bevilacqua
Bigras Blondin - Andrew Bonin Boudria
Bradshaw Brien Bryden Bulte
Byrne Caccia Cadman Calder
Cannis Caplan Carroll Casson
Catterall Cauchon Chamberlain Charbonneau
Chatters Chrétien (Frontenac – Mégantic) Clouthier Coderre
Collenette Cotler DeVillers Dhaliwal
Dion Doyle Dromisky Drouin
Duhamel Duncan Easter Eggleton
Elley Epp Finlay Folco
Fontana Forseth Fry Gagliano
Gallaway Gauthier Godfrey Goldring
Goodale Gray (Windsor West) Grey (Edmonton North) Grose
Guimond Harb Harvard Herron
Hill (Prince George – Peace River) Hilstrom Hubbard Iftody
Jackson Jaffer Jennings Johnston
Jordan Karetak - Lindell Keyes Kilger (Stormont – Dundas – Charlottenburgh)
Kilgour (Edmonton Southeast) Knutson Kraft Sloan Lastewka
Lebel Lee Leung Limoges
Longfield Lowther MacAulay MacKay (Pictou – Antigonish – Guysborough)
Mahoney Maloney Manley Mark
Marleau Matthews McCormick McGuire
McLellan (Edmonton West) McTeague Ménard Mifflin
Mills (Red Deer) Minna Mitchell Muise
Myers Nault Normand Obhrai
Pagtakhan Paradis Patry Penson
Peterson Phinney Pickard (Chatham – Kent Essex) Pillitteri
Proulx Provenzano Redman Reed
Robillard Rocheleau Rock Saada
Scott (Fredericton) Sekora Sgro Shepherd
Solberg Speller St. Denis St - Julien
Steckle Stewart (Brant) Stewart (Northumberland) Szabo
Telegdi Thibeault Thompson (New Brunswick Southwest) Torsney
Turp Vanclief White (North Vancouver) Wood – 156


«PAIRÉS»

Députés

Copps Nunziata


 

Le président suppléant (M. McClelland): Je déclare la motion rejetée.



MOTION D'AJOURNEMENT

 

. 1915 + -

[Traduction]

L'ajournement de la Chambre est proposé d'office en conformité de l'article 38 du Règlement.

LA SANTÉ

Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, le 16 mai, à la Chambre des communes, j'ai demandé au ministre de la Santé combien de personnes devraient encore perdre la vie des suites de surdoses de drogues avant que le gouvernement réagisse. Le ministre s'est dit très préoccupé par la situation et a déclaré qu'il s'occuperait de ce problème complexe et tragique. Il a déclaré qu'il serait heureux de recevoir toute suggestion précise. Eh bien, j'en ai à lui présenter.

Le 13 avril, je lui ai envoyé une lettre expliquant en détail ce qu'il faut faire pour rendre notre collectivité plus sûre. J'ai fait beaucoup de recherche et je me suis entretenu avec beaucoup de personnes pour déterminer par quels moyens il serait possible d'abaisser le taux de criminalité et aider les utilisateurs de drogues injectables à retrouver leur dignité et leur santé. J'ai ensuite écrit au ministre de la Santé le 19 mai pour lui demander une rencontre. J'espère qu'il acceptera.

Nous devons savoir clairement si le ministre de la Santé est prêt à mettre en oeuvre les rapports et la série de recommandations qui lui ont été présentés par un groupe de médecins et de chercheurs scientifiques pour aider la collectivité à surmonter la crise dévastatrice qu'elle vit.

Le centre de ressources sur les toxicomanies est un élément essentiel de la solution, mais cela ne saurait suffire. Si le ministre tient autant que moi à alléger les maux épouvantables qui affligent les personnes et la collectivité, il doit accepter de mettre en oeuvre un programme d'intervention complet incluant de l'éducation, de meilleurs traitements, un recours accru à la méthadone, des lieux sûrs pour les injections ainsi qu'une aide au logement et un accompagnement social.

Je crois que le ministre connaît le dossier. Je crois qu'il sait au plus profond de lui ce que son ministère doit faire sur le plan médical. La question, c'est de savoir s'il a la volonté politique d'agir devant les éléments de preuve irréfutables qui ont été portés à sa connaissance. Quelle est la réponse du ministre?

[Français]

M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'aimerais répondre à la question posée par l'honorable députée concernant la situation grave dans l'est du centre-ville de Vancouver.

J'aimerais rappeler à la députée que le but de la Stratégie canadienne antidrogue est de réduire les méfaits associés à l'alcool et aux autres drogues. De plus, la Stratégie canadienne sur le VIH-sida et le Programme de prévention, soutien et recherche pour l'hépatite C travaillent avec les utilisateurs de drogues injectables et les organismes qui leur offrent du soutien dans la prévention de la transmission des pathogènes par le sang.

Les comités fédéraux-provinciaux-territoriaux représentant le secteur des médicaments, du VIH-sida, des services correctionnels, de la justice et de la santé de la population ont identifié les drogues injectables comme un problème prioritaire. Ces comités collaborent pour déterminer les meilleurs moyens d'aborder cette situation au Canada d'un point de vue coordonné et multijuridictionnel.

[Traduction]

Santé Canada a contribué à l'aménagement d'un centre de ressources pour les toxicomanes, à l'est du centre-ville de Vancouver, et participe à un partenariat entre les trois paliers de gouvernement, dans le cadre de l'accord de Vancouver.

 

. 1920 + -

Santé Canada offrira également son soutien au Downtown Eastside Women's Centre et à des activités communautaires, en mettant particulièrement l'accent sur les femmes autochtones qui risquent de contracter le VIH et sur celles qui sont atteintes du sida.

[Français]

En ce qui concerne ce qui s'est fait en Europe, je tiens à assurer que Santé Canada examine les expériences des autres pays afin d'évaluer la possibilité d'appliquer leurs conclusions au contexte canadien.

En conclusion, Santé Canada va continuer d'encourager, de faciliter et d'accroître la participation du public dans un dialogue basé sur l'information objective portant sur les meilleurs moyens de faire face à ce problème de santé et à ce problème social sérieux.

[Traduction]

LA SANTÉ

M. Greg Thompson (Nouveau-Brunswick-Sud-Ouest, PC): Monsieur le Président, je reviens à la charge au sujet de l'hépatite C. C'est une question dont on ne se débarrassera pas aisément pour la bonne raison que le gouvernement a négligé de s'en occuper en prenant des dispositions qui seraient jugées acceptables par les Canadiens.

Je fais référence à l'indemnisation des victimes de l'hépatite C. Ces personnes n'ont pas reçu un cent. Difficile de le croire. Voilà deux ans que cela dure, depuis qu'un accord est intervenu à ce sujet, et aucune des victimes n'a reçu le moindre sou. Les seules personnes à avoir touché de l'argent sont les avocats représentant le gouvernement fédéral. Je sais que les députés trouvent cela difficile à croire, mais seuls les avocats du gouvernement fédéral ont été payés. La question que j'ai posée au ministre il y a quelques semaines était: pourquoi? Pourquoi le gouvernement ne peut-il pas régler cette affaire?

Une des choses que j'ai mentionnées ce jour-là à la Chambre était le fait que l'Ontario a décidé d'indemniser les victimes non visées par l'offre d'indemnisation annoncée par le gouvernement fédéral. Cette offre ne s'applique pas aux victimes qui ont contracté la maladie avant 1986 et après 1991. Le premier ministre de l'Ontario, bien qu'il soit parfois critiqué à la Chambre, a eu le courage de dire: «Écoutez, nous allons indemniser ces victimes peu importe le moment où elles ont contracté la maladie. Elles méritent d'être indemnisées.»

Le gouvernement libéral d'en face n'a pas encore indemnisé une seule victime. Les seules personnes qui ont reçu de l'argent du gouvernement libéral sont les avocats qui l'ont représenté dans cette poursuite.

Nous, du Parti progressiste conservateur, demandons au gouvernement de passer aux actes dans ce dossier et d'indemniser les victimes, car les Canadiens veulent qu'elles soient indemnisées parce que ce sont vraiment des victimes. Nous voulons que le gouvernement fédéral bouge. Cette affaire traîne depuis des années. Il y a déjà deux ans que l'offre d'indemnisation a été annoncée. Les gens attendent encore. Ils ont besoin d'aide. Nous voulons voir des mesures concrètes. Le gouvernement passera-t-il enfin aux actes dans ce dossier?

[Français]

M. Yvon Charbonneau (secrétaire parlementaire du ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, au total, le gouvernement a engagé environ 1,4 milliard de dollars pour dédommager et aider les personnes infectées par l'hépatite C par le biais du système d'approvisionnement en sang.

De cette somme, notre gouvernement a déjà versé 875 millions de dollars afin de respecter ses obligations financières envers les victimes en vertu de la convention de règlement relative à l'hépatite C 1986-1990. Grâce à cette convention, laquelle a été approuvée par les tribunaux, nous avons probablement réussi à éviter dix ans de litiges. Un administrateur indépendant a été nommé par les tribunaux. Un processus de traitement des demandes a été mis en place, et les chèques destinés aux requérants devraient être émis sous peu.

En outre, dans le cas des personnes infectées avant 1986 et après 1990, le gouvernement s'est engagé à verser quelque 525 millions de dollars afin d'assurer des soins et non de l'argent. Car ce sont de soins dont les gens ont grandement besoin lorsqu'ils sont malades.

Nous avons consulté les gens dans l'ensemble du pays. Nous les avons écoutés et nous avons réagi en consacrant 50 millions de dollars à la recherche sur l'hépatite C et à l'établissement de programmes de soutien communautaire. Nous affectons également 125 millions de dollars à l'amélioration de la sûreté et de la surveillance de l'approvisionnement en sang.

[Traduction]

Je voudrais ajouter qu'une importante composante de notre contribution est une entente avec les provinces et les territoires sur le paiement de la moitié des coûts, jusqu'à concurrence de 50 millions de dollars, pour identifier et informer tous ceux qui ont été infectés par le virus de l'hépatite C par l'entremise du système d'approvisionnement en sang, afin qu'ils reçoivent les soins et les traitements dont ils ont besoin. Nous avons offert un transfert de 300 millions de dollars aux provinces et aux territoires. Notre plan est sensé et compatissant, il assure aux victimes de l'hépatite C les soins dont elles ont besoin.

Le vice-président: La motion d'ajournement étant adoptée d'office, la Chambre s'ajourne à 10 heures demain, conformément au paragraphe 24(1) du Règlement.

(La séance est levée à 19 h 25.)