HEAL Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.
Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.
STANDING COMMITTEE ON HEALTH
COMITÉ PERMANENT DE LA SANTÉ
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 29 mars 2001
La présidente (Mme Bonnie Brown (Oakville, Lib.)): Bonjour, mesdames et messieurs. La séance est ouverte.
Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous examinons la relation entre la politique d'exclusion à l'égard de certains donneurs et la sécurité des approvisionnements en sang au Canada. Nous recevons un certain nombre de témoins qui représentent plusieurs organismes.
Comme on vous l'a dit, je crois, chaque organisme nous fera une déclaration préliminaire de cinq minutes. Nous passerons ensuite aux questions des députés.
Conformément à notre liste, nous entendrons d'abord Brian Huskins ou Douglas Elliott de la Société canadienne du sida ou, s'ils le désirent, ils pourront se partager les cinq minutes.
M. Douglas Elliott (conseiller juridique, Société canadienne du sida): Merci, madame la présidente.
Pour ceux qui ne le savent pas, je suis avocat et j'ai représenté la Société canadienne du sida devant la Commission d'enquête Krever. J'ai une longue expérience en droit de la santé. En fait, jusqu'à tout récemment, j'étais membre du Conseil consultatif des sciences de Santé Canada.
La Société canadienne du sida estime que le questionnaire actuellement utilisé est périmé. L'exclusion qui nous inquiète, en ce qui concerne les hommes qui ont eu des relations sexuelles avec d'autres hommes depuis 1977, a eu son utilité et a été appuyée énergiquement par des organismes comme le AIDS Committee of Toronto lorsqu'elle a été mise en place en 1986. Toutefois, les changements survenus entre-temps ont rendu cette question non seulement inutile, mais même dangereuse. Nous estimons qu'il faudrait remplacer cette question par une question plus neutre.
N'oublions pas que l'on a commencé à empêcher les homosexuels de donner du sang en 1982 aux États-Unis, à une époque où il n'y avait pas de test et où il s'agissait d'une mesure scientifique et tout à fait raisonnable en attendant la mise au point d'un test. Quand le test est devenu disponible, cette question visait en fait à renforcer la sécurité des approvisionnements en sang jusqu'à ce que nous soyons convaincus de l'exactitude du test et pour nous prémunir contre les résultats erronés.
Il y a aujourd'hui deux raisons fondamentales pour lesquelles nous estimons que cette question n'est plus nécessaire. La première est que les tests se sont améliorés au point de devenir la meilleure garantie qui soit et d'être extrêmement précis. L'éclipse sérologique est très courte, de quelques semaines seulement, et l'inclusion de cette question ne fait pas grand-chose pour augmenter la sécurité.
Pour ce qui est des aspects négatifs de cette question, on a tendance à croire qu'il vaut mieux poser plus de questions. C'est ce qui ressort des documents juridiques, qui sont de plus en plus longs, parce que les avocats ont peur de les abréger. Si certaines questions étaient logiques à une certaine époque, on considère qu'elles le sont toujours.
La tragédie des années 80 nous a appris que nous n'avions pas su protéger notre approvisionnement en sang parce que nous continuions à procéder comme nous l'avions toujours fait, sans y réfléchir. Malheureusement, pour ce qui est de cette question, nous continuons à procéder comme nous l'avons toujours fait, sans y réfléchir.
• 1120
Je crois que c'est surtout par crainte de poursuites devant
les tribunaux. Les gens ont peur que si les questions sont
modifiées, cela risque de susciter des actions en justice.
Nous estimons que, telle qu'elle est formulée, cette question est dangereuse pour plusieurs raisons. Premièrement, elle crée un faux sentiment de sécurité chez les donneurs de sang hétérosexuels qui sont déjà moins conscients des risques associés à leur comportement que les hommes homosexuels. N'oubliez pas que, lorsque cette question a été posée pour la première fois en 1986—et j'étais alors membre du AIDS Committee of Toronto—beaucoup de gens nous ont accusés disant que nous causerions une épidémie de sida chez les homosexuels. En fait, les nouveaux cas sont maintenant répartis également entre les homosexuels et les hétérosexuels et l'incidence du sida continue d'augmenter chez ces derniers.
La deuxième raison pour laquelle nous pensons que c'est dangereux est que cela dissuade de mettre cette question à jour en fonction des changements dans le profil épidémique car on se fie au précédent historique plutôt qu'aux données scientifiques actuelles. Cela empêche également les organismes qui oeuvrent dans le domaine du sida de coopérer avec la Société canadienne du sang pour éduquer les donneurs à risque, parce qu'on diffuse des messages contradictoires. Par exemple, le site Web de la Société canadienne du sang cite, parmi les sources de contamination par le VIH, le fait d'avoir des relations sexuelles pour de l'argent ou de la drogue. Nous ne pouvons pas approuver ce genre de message, car cela ne tient pas debout. Le sida n'est pas transmis par l'argent.
Mes observations suivantes portent sur l'approvisionnement en sang. N'oubliez pas que chaque fois que nous refusons des donneurs en bonne santé, nous mettons en danger les gens qui ont besoin de sang car nous avons encore des pénuries de sang. La politique actuelle a deux répercussions négatives sur notre approvisionnement en sang. D'une part, les jeunes, qui sont absolument indispensables pour assurer l'avenir de l'approvisionnement en sang, ne veulent pas donner de sang. Ils ne veulent pas le faire parce qu'ils ont l'impression qu'il s'agit d'une politique pleine de préjugés et réactionnaire et cela a causé des boycotts dans les universités. C'est une conséquence qu'il ne faut pas perdre de vue. Elle met en danger la sécurité des Canadiens. Deuxièmement, on refuse le sang des hommes homosexuels en bonne santé qui ne sont pas séropositifs. Ce sang pourrait sauver des vies.
À notre avis, la politique actuelle est périmée et doit être révisée. L'épidémie de sida n'est pas terminée pour la communauté homosexuelle, mais nous croyons qu'une question neutre mettant l'accent sur les comportements risqués protégerait suffisamment l'approvisionnement en sang. Par exemple, en plus de demander aux gens s'ils sont séropositifs—et je dirais que la majorité des homosexuels savent s'ils le sont ou non alors qu'on ne peut sans doute pas en dire autant des hétérosexuels—on pourrait demander: «Avez-vous eu des relations sexuelles sans protection avec un nouveau partenaire sexuel au cours des 12 derniers mois?» Cette question porte sur les activités à risque, elle est scientifique et elle protégera l'approvisionnement en sang sans avoir les effets négatifs que je viens de décrire.
Nous tenons à donner la priorité à la sécurité, mais une sécurité réelle au lieu de compter sur une pseudo-science qui a des effets sociaux dangereux. Les Canadiens méritent mieux.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Elliott.
Nous entendrons maintenant Roger Leclerc.
[Français]
M. Roger Leclerc (directeur général, Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida): Bonjour. Je vais parler en français.
Je représente la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida. Ma présentation, que j'ai remise en français au greffier et qu'il fera traduire et vous remettra par la suite, est peut-être un peu moins technique que ce qui a été présenté par la Société canadienne du sida, mais elle en rejoint les grandes lignes.
D'entrée de jeu, je voudrais mentionner que le don de sang n'est pas un droit constitutionnel pour la Coalition des organismes communautaires québécois de lutte contre le sida, mais plutôt un geste individuel que des individus décident de poser. Nous reconnaissons donc au système sanguin, aux collecteurs de sang le droit d'assurer la qualité et la sécurité de ce système.
• 1125
De la même façon, la discrimination est prohibée au
Canada. Cela relève d'un droit constitutionnel qui
touche l'individu. La Constitution et surtout les
moeurs défendent la discrimination sous tous rapports.
Donc, on se retrouve dans un conflit entre deux communautés, deux sociétés qui ont des droits constitutionnels: d'une part, la population en général qui a le droit d'avoir accès à du sang sécuritaire et, d'autre part, une communauté gaie qui a collectivement un droit constitutionnel, celui d'être reconnue comme citoyens et citoyennes à part entière.
Ici, je fais la distinction entre le droit des individus gais qui veulent donner du sang et le droit de la communauté gaie qui a des droits en tant que collectivité.
Donc, ma présentation portera davantage sur l'écart entre ces droits et sur la façon d'équilibrer la sécurité du système sanguin qui, pour nous, est une priorité et les droits autant des individus que des collectivités.
Il est clair que l'objectif de la COCQ-SIDA est de réduire la transmission du VIH; c'est la bataille que nous menons depuis plus de 10 ans maintenant et certains de nos groupes, depuis plus de 15 ans. Par ailleurs, les gais ont droit à une prévention adéquate. Les gais représentent, au Québec à tout le moins, 75 p. 100 des personnes qui vivent avec le VIH encore aujourd'hui. C'est donc une communauté qui, dans son ensemble, est très touchée par le VIH et, à ce titre, elle doit recevoir et a droit à des services préventifs adéquats.
Plusieurs études démontrent que pour être adéquate, la prévention dans la communauté gaie passe obligatoirement par la reconnaissance des droits individuels et collectifs de cette communauté. En ce sens-là, la COCQ-SIDA a appuyé, par exemple, la reconnaissance du mariage chez les gais, non pas à cause de la valeur symbolique du mariage, mais à cause de sa valeur symbolique quant à la reconnaissance des gais et lesbiennes comme citoyens et citoyennes à part entière de même que des responsabilités qui rattachées à cette reconnaissance.
Selon nous, pour que le travail de prévention dans la communauté gaie soit efficace, il doit aller de pair avec une reconnaissance pleine et entière du rôle de citoyen des gais et, à ce titre, du droit de donner du sang.
La sélection des donneurs de sang est la première étape qui assure la qualité et la sécurité du système de distribution sanguine. Il y a deux autres étapes qui sont: les tests de laboratoire, la réglementation et la vérification des banques de sang. Je ne m'étendrai pas sur ceux-là pour m'en tenir à la sélection des donneurs de sang.
Il y a déjà plusieurs critères selon lesquels on peut rejeter des donneurs de sang, par exemple le fait d'avoir été tatoué. La liste de ces critères est longue. Aucun de ces rejets n'est basé sur l'appartenance à un groupe, sur le simple fait d'appartenir à un groupe. Ils sont toujours basés soit sur des comportements, soit sur des événements qui se sont produits dans la vie des individus et les rendent, pour un laps de temps donné, inaptes à donner du sang de façon sécuritaire.
Dans le cas des gais, leur rejet collectif comme donneurs de sang n'est plus un rejet d'individus en fonction de certains comportements éventuellement à risque, mais plutôt en fonction de leur appartenance à la communauté gaie. En ce sens-là, cela prend le visage, aux yeux de l'ensemble de la communauté gaie et pour chacun de ses membres individuellement, d'une discrimination difficile à justifier par les raisons que la Société canadienne a énumérées et difficile à justifier dans le contexte où les choses ont évolué depuis que ce questionnaire a été conçu.
Cela pose toute la question de savoir si le questionnaire actuel est sécuritaire. Ici, je vais abonder fortement dans le même sens que la position adoptée par la Société canadienne du sida; nous croyons que les questions qu'on pose à l'heure actuelle, qui ne portent pas sur les comportements sexuels sécuritaires, mais plutôt sur l'appartenance à des groupes identifiés, mettent en danger la collecte de sang. Actuellement, des hommes hétérosexuels peuvent très bien avoir des comportements non sécuritaires et, par conséquent, être des vecteurs de transmission. Or, le questionnaire ne le prévoit pas. Par contre, il élimine automatiquement tout homme gai, quels que soient ses comportements sexuels. C'est ici que le bât blesse.
Donc, à notre avis, il est clair qu'on devrait poser plutôt des questions sur les comportements non sécuritaires des individus, quel que soit leur groupe d'appartenance, au lieu de questions sur leur appartenance à un groupe défini ou non.
• 1130
Par ailleurs, il serait intéressant d'évaluer quels
sont les risques potentiels. Je ne
sais pas quel est le pourcentage de la population qui
donne du sang ou qui veut donner du sang, mais je
présume que qu'il doit être de 5 à 10 p. 100
et que de 90 à 95 p. 100 des gens ne donnent pas de sang
ou ne veulent
pas donner de sang. On peut présumer que chez les
gais, on a un pourcentage semblable, ou peut-être
même moindre, parce qu'il y a des gais, dont
je suis, qui, pour des raisons politiques, refusent de
donner du sang à cause de cette discrimination dont les
gais sont victimes. Il faudrait peut-être faire
une étude pour évaluer le risque
qu'il y aurait à accepter des gais
si on leur posait des questions sur leur comportement
sexuel.
Pour nous, il est clair que, pour assurer la sécurité du système sanguin, les questions devraient porter sur les comportements sexuels des individus, quel que soit leur groupe d'appartenance.
Je voudrais conclure sur un autre aspect. Pour les collectes de sang, actuellement, on sollicite la population de façon très humanitaire. Là je caricature, mais on devient un héros si on donne du sang. En m'empêchant de donner du sang, on m'empêche d'être un héros. Peut-être faudrait-il revoir la façon de solliciter des donneurs de sang pour essayer de diminuer cet aspect de gloriole, de gloire passagère qui entoure les donneurs de sang. Déjà le débat serait sans doute un peu moins émotif.
Par ailleurs, la collecte de sang se fait souvent dans des lieux de travail ou des milieux scolaires. Dans un milieu de travail, par exemple, l'employeur incite très fortement ses employés à donner du sang. Ne pas y participer fait de moi, ou bien un individu qui n'est pas assez humanitaire pour donner du sang, ou bien un individu qui a une raison très perverse de ne pas en donner. Il faudrait peut-être revoir ça aussi.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur Leclerc.
Ce sera maintenant au tour de M. Valois ou de M. McCutcheon.
[Français]
M. Laurent McCutcheon (vice-président à l'action politique, Table de concertation des gais et lesbiennes du Québec): Je m'appelle Laurent McCutcheon. Je suis accompagné de M. Pierre Valois.
Je vous remercie de nous permettre de prendre la parole pour nous exprimer aujourd'hui. La Table de concertation des gais et lesbiennes du Québec est un organisme qui regroupe plein d'organismes et d'individus, une sorte de fédération d'organismes québécois pour la défense des droits des gais et lesbiennes du Québec.
D'entrée de jeu, je peux dire que je partage ce qui a été dit par mes prédécesseurs, mais que l'objectif de notre intervention d'aujourd'hui est de sensibiliser les décideurs publics aux effets négatifs de l'exclusion systématique des homosexuels de la possibilité de faire don de leur sang, d'inciter les décideurs à chercher des solutions capables d'assurer la protection de la santé publique tout en évitant de discriminer un groupe de personnes sur la base de son identité. Donner de son sang est plus qu'un geste de générosité, c'est aussi un devoir de citoyen. Même en étant hautement responsables, les homosexuels ne peuvent honorer ce devoir.
Il importe de soutenir tous les efforts visant à assurer la protection de la santé publique et de mettre en place tous les moyens de contrôle visant à exclure des donneurs à risque. Cette prévention relève de la responsabilité sociale, et les homosexuels y souscrivent. Elle vise la protection de tous les receveurs, y compris les homosexuels qui, eux aussi, sont d'éventuels receveurs.
La Table de concertation ne dispose évidemment pas de l'expertise nécessaire pour se prononcer sur les méthodes de contrôle. Elle doit s'en remettre aux spécialistes. Par ailleurs, au Canada, personne ne remettra en cause que les homosexuels ont été le premier groupe touché par l'infection du VIH et en ont été les premières victimes. De ce fait, ils ont été exclus de la possibilité d'être des donneurs de sang indépendamment de leur pratique sexuelle.
L'état d'urgence et la quasi-panique de l'époque ont dicté des politiques radicales. Toutefois, avec plus de 20 ans d'expérience, le temps est venu d'interroger le fondement de la politique et de se mettre à la recherche de solutions équilibrées, des solutions équilibrées entre les garanties à offrir aux receveurs et le respect du donneur. On devrait s'attendre à ce que les politiques d'exclusion des donneurs soient développées sur la base des comportements sexuels et des dangers liés à ces comportements. Le rejet systématique sur la base de l'orientation sexuelle, sans considération des pratiques, est discriminatoire.
Nous comprenons bien que l'objectif recherché est d'assurer la protection des receveurs. Toutefois, dans l'état actuel des choses, les homosexuels perçoivent la politique et son application comme un rejet systématique de leur orientation sexuelle.
• 1135
Imaginez un instant l'effet
d'une telle affirmation sur le jeune garçon qui prend
conscience de son homosexualité et qui se fait dire
qu'il présente un danger simplement du fait qu'il a une vie
homosexuelle. Il ne lui est pas permis d'aspirer à un
statut égalitaire tout en étant responsable.
Par ailleurs, on lui enseigne à se protéger en ayant
des pratiques sécuritaires. Du même souffle, on lui
interdit de faire don de son sang même s'il respecte
les consignes qui lui ont été données
par les mêmes autorités.
Dans le contexte où le sida n'est plus l'affaire exclusive des gais—les pratiques à risque sont maintenant connues—, pourquoi ne cherche-t-on pas à exclure les donneurs qui présentent des risques en raison de leurs pratiques plutôt que de leur orientation sexuelle? La politique actuelle ne fait aucune nuance. Elle produit des effets discriminatoires. Elle nuit à la crédibilité d'un important groupe de la société et risque de produire des effets pervers comme mes prédécesseurs l'ont déjà dit.
Le processus d'adaptation à sa propre orientation sexuelle est généralement difficile. Il fait appel au soutien de la famille, de l'école, du milieu de travail, de l'encadrement social et juridique.
Les décideurs en matière de santé publique ne peuvent faire abstraction des effets de leurs décisions sur les personnes qui sont exclues de la possibilité de donner de leur sang. Ils ont aussi l'obligation de prendre en compte tous les facteurs au moment de leurs décisions. Les moyens de contrôle et de prévention doivent être respectueux de tous les groupes de la société et ne doivent surtout pas entacher l'équilibre psychologique des personnes exclues.
L'exclusion des homosexuels, sans considération de leurs pratiques, risque aussi d'avoir des effets pervers. De même, ne se prive-t-on pas aussi de la possibilité d'un important réservoir de donneurs de sang? Au cours des dernières années, les homosexuels ont démontré, vis-à-vis des défis de la prévention, une capacité extraordinaire de responsabilité. Ils ont démontré qu'ils étaient des citoyens à part entière. Ils veulent être associés aux efforts de prévention et de protection du public. Nous soumettons que les décideurs ont l'obligation de concevoir des politiques non discriminatoires et respectueuses de tous les groupes de la société. Je vous remercie.
[Traduction]
La présidente: Merci, monsieur McCutcheon.
Monsieur Plater, de la Société canadienne de l'hémophilie.
M. John Plater (membre, conseil d'administration, Société canadienne de l'hémophilie): Merci beaucoup. Je dirai d'abord que je suis membre de la Société canadienne de l'hémophilie. Je siège au conseil d'administration. Je suis avocat, mais ce n'est pas à ce titre que je suis ici aujourd'hui. Je suis également un hémophile présentant une forte carence en facteur VIII qui a été infecté par le VIH et l'hépatite C.
Je suis incapable de parler en public du système d'approvisionnement en sang sans reprendre les propos du juge Krever, et c'est ce que je vais faire dans un instant. J'ai un mémoire écrit, mais il n'était pas prêt à temps pour pouvoir vous être distribué aujourd'hui. Je m'en excuse. Vous allez l'obtenir.
Le juge Krever parlait de l'opinion qu'il avait obtenue du conseiller honoraire de la Croix-Rouge canadienne en 1983. Le juge Krever a conclu que cette opinion, qui n'a pas été vraiment suivie, était très sage et qu'il aurait fallu la suivre. Le conseiller avait déclaré ceci:
-
Il n'est pas nécessaire que les preuves de contamination du sang
soient concluantes—la décision peut être prise à partir d'un
«doute raisonnable». Pour ce qui est du problème du sida en
particulier, la Croix-Rouge canadienne n'a pas à justifier au-delà
de tout doute scientifique qu'il existe un lien entre les «groupes
à haut risque» désignés et le sida, étant donné que s'il existe la
moindre possibilité de transmission de la maladie par le sang, la
Croix-Rouge canadienne a l'obligation morale et juridique de
protéger avant tout les personnes qui reçoivent du sang.
La Société canadienne de l'hémophilie demeure convaincue que toute élaboration de la politique relative à l'approvisionnement en sang doit accorder la priorité à la sécurité des receveurs. Elle doit toujours passer en premier.
Nous n'avons pas formulé de politique particulière à propos du sujet abordé aujourd'hui quant aux questions utilisées dans le questionnaire pour les donneurs. Nous savons également qu'il est souvent très difficile d'appliquer, en pratique, ce principe de sécurité au système d'approvisionnement en sang.
À l'heure actuelle, la Société canadienne du sang et Héma- Québec ont une tâche très difficile. Ils font constamment face à une demande croissante de produits sanguins de la part de personnes blessées, qui subissent des interventions chirurgicales ou qui ont d'autres besoins en sang. En même temps, on leur demande continuellement de réduire les risques au maximum et, dans certains cas, de faire l'impossible, c'est-à-dire d'éliminer tout risque.
• 1140
Nous savons que c'est difficile et c'est pourquoi nous
invitons constamment les autorités à réévaluer le système, le
dépistage des donneurs et les aspects techniques du système
d'approvisionnement en sang. Nous félicitons votre comité pour se
pencher également sur la question.
Si nous lisons les journaux, nous savons tous que l'approvisionnement en sang est constamment exposé à de nouvelles menaces. Il y a des risques de maladies que nous ne connaissons pas encore. La Société canadienne de l'hémophilie a trouvé encourageantes les mesures que la SCS et Héma-Québec ont prises récemment pour protéger l'approvisionnement en sang contre le risque théorique de nouvelles variantes de la maladie de Creutzfeldt-Jakob ou «maladie de la vache folle» pour ceux qui préfèrent le terme courant.
Nous savons également qu'il est très facile de se reposer sur les mesures de protection qui existe pour les maladies que nous connaissons de même que sur la technologie permettant de réduire les risques que représentent les pathogènes connus. Il est vrai que les tests et les méthodes d'inactivation des virus ont réduit le risque d'infection par le VIH et l'hépatite C, mais ces méthodes ne sont pas totalement efficaces.
Nous croyons également important de ne pas oublier qu'il y a une période silencieuse pendant laquelle le test ne permet toujours pas de dépister le VIH et qu'il y aura toujours un risque d'erreur humaine. Tout test, aussi bon soit-il, peut être mal appliqué. En même temps, nous ne pensons pas que les méthodes de dépistage des donneurs soient infaillibles. Elles ne sont aussi bonnes que les réponses données sur les questionnaires. Elles ne sont aussi bonnes que la personne qui reçoit ces réponses et pose des questions supplémentaires pour obtenir d'autres renseignements.
En fait, nous voulons être certains que les nouvelles technologies et les méthodes de dépistage traditionnelles qui ont fait leurs preuves iront toujours de pair au lieu d'être considérées comme de simples options. Nous voulons qu'elles soient pleinement comprises, qu'elles fassent l'objet de recherches approfondies, qu'elles soient continuellement mises à jour et qu'elles soient les meilleures possible. Mais nous croyons aussi qu'il faut les utiliser ensemble pour créer un système sécuritaire au lieu de choisir l'une ou l'autre de ces solutions.
Si l'on recommande d'apporter des changements aux méthodes de dépistage actuelles et aux critères d'exclusion des donneurs, en réduisant les restrictions qui existent ou en les augmentant, tout changement doit être apporté en fonction des connaissances scientifiques et d'une analyse approfondie des meilleures données existant non seulement au Canada, mais dans le monde entier.
Nous vous invitons à parler aux représentants de la Société canadienne du sang et d'Héma-Québec qui doivent, je crois, vous rencontrer prochainement et à leur poser des questions sur les recherches qu'ils entreprennent actuellement. Nous croyons qu'ils réexaminent la politique de dépistage. Ils étudient ce que font leurs homologues des autres pays, en particulier aux États-Unis et en Europe.
Enfin, avant d'apporter le moindre changement, et c'est une chose que nous avons apprise à la Société canadienne de l'hémophilie et que nous essayons de faire comprendre à tous les organismes publics qui prennent des décisions politiques, que ce soit à propos de l'approvisionnement en sang ou des soins de santé en général, ce genre de décisions doit être pris après avoir évalué ouvertement et publiquement les risques et avantages. Dans ce cas- ci, il s'agit des risques et des avantages de nouvelles restrictions ou, au contraire, de l'assouplissement des restrictions.
• 1145
Nous sommes d'accord avec nos amis qui sont ici aujourd'hui
pour dire qu'il est temps d'effectuer un examen approfondi du
processus de dépistage. Il y a eu des ajouts récents. Bien entendu,
l'exclusion des donneurs qui ont voyagé en Grande-Bretagne depuis
1980 et qui y ont séjourné plus de six mois de même que de ceux qui
ont séjourné en France a été accueillie avec beaucoup de
scepticisme un peu partout. Le Canada a été l'un des premiers à
décider d'imposer cette exclusion et nous avons vu que les autres
pays lui avaient emboîté le pas, ce que nous trouvons extrêmement
rassurant.
Il s'agit d'un ajout apporté à la liste. Nous croyons qu'il est temps de réexaminer toute la liste et de nous demander si nous faisons le maximum pour assurer la sécurité.
Après un examen approprié, si l'on détermine que certaines catégories sont trop générales, nous pourrions les modifier. Si certaines d'entre elles sont trop limitées, nous pourrions les modifier également.
Personnellement, la seule chose que j'aimerais que vous reteniez de ce que j'ai dit aujourd'hui est que la grande question soulevée ici est presque l'inverse de la question que nous nous posions au début des années 80. On se demandait alors si le risque était suffisant pour justifier des changements et maintenant nous nous demandons s'il a été suffisamment réduit pour justifier des changements. Il y a beaucoup de gens qui ne seront plus là pour entendre la réponse à cette question, mais je crois que nous leur devons de trouver la meilleure réponse possible, parce que la dernière fois, nous n'avons pas su le faire.
Merci.
La présidente: Merci, monsieur Plater.
Monsieur Fisher, s'il vous plaît.
[Français]
M. John Fisher (directeur général, Égalité pour les gais et lesbiennes (ÉGALE)): Merci. Il me fait grand plaisir de comparaître ici aujourd'hui avec M. Ron Chaplin, chef du Comité d'action politique d'ÉGALE et avec nos collègues d'autres organismes.
ÉGALE est un organisme pancanadien voué à la promotion de l'égalité et de la justice pour les personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles et transgenres. D'abord, je veux souligner qu'il y a beaucoup de personnes qui pensent que l'objectif d'éviter les questions discriminatoires est contradictoire avec le principe de protéger le système de sécurité du sang. Selon nous, ces deux principes sont complémentaires. Les personnes gaies et lesbiennes partagent l'objectif de protéger le système du sang.
[Traduction]
Mon collègue, M. Plater, a fait valoir que la sécurité devait être prioritaire. Pour atteindre cet objectif, nous avons besoin d'un questionnaire formulé de façon précise pour produire de bons résultats. Mes collègues des autres organismes ont indiqué pourquoi cette question n'est pas formulée de façon à atteindre cet objectif et je ne répéterai pas ce qu'ils ont dit.
Je tiens également à souligner que la fameuse question concernant les homosexuels n'est pas le seul problème. Il y a toutes sortes d'autres questions posées d'une façon qui était peut- être satisfaisante à l'époque où l'on était moins bien informé mais qui ont perdu leur utilité. Comme d'autres l'ont dit, c'est tout le questionnaire qu'il faut réviser.
J'avoue qu'il y a des questions formulées d'une façon tout à fait tendancieuse, par exemple la question demandant si vous vous êtes déjà injecté des drogues illégales au moyen d'une seringue. Bien entendu, l'usage des drogues n'est pas plus ou moins sûr ou risqué que la drogue soit légale ou illégale. Peu importe qu'elle soit légale ou illégale, que vous vous fassiez faire un tatouage ou que vous vous injectiez de l'insuline. La question devrait viser à s'assurer que les seringues étaient propres et qu'elles n'étaient pas partagées.
Il y a donc des principes sur lesquels nous pouvons tous être d'accord en ce qui concerne la sécurité de l'approvisionnement en sang et il y en a un autre auquel je pense que nous pouvons également tous souscrire: si nous pouvons obtenir des résultats tout aussi précis en posant des questions qui ne seront pas tendancieuses ou discriminatoires, nous devrions le faire.
On a donné des exemples de formulations de rechange. Pour éviter de nous répéter, je vais me contenter de dire que les risques qu'il y a à poser des questions mal faites peuvent être énumérés facilement et clairement.
Elles donnent des résultats qui ne sont pas justes. Les gens ne répondront pas de la même façon à des questions biaisées et à des questions neutres. Les gens ne vont pas révéler volontiers qu'ils ont consommé de la drogue, mais il y a beaucoup plus de chance qu'ils répondent honnêtement si on leur demande s'ils se servent d'une seringue propre.
• 1150
De même, les répondants ne diront pas volontiers qu'ils
appartiennent à un groupe à risque stigmatisé et en butte à de la
discrimination dans la société. Il y a beaucoup plus de chance
qu'ils répondent honnêtement si les questions sont impartiales et
portent sur les comportements.
Si l'on veut des réponses justes, il faut poser des questions neutres et objectives qui portent sur les comportements et les faits au lieu de l'appartenance à un groupe ou d'une identité, surtout lorsque l'on sait que le VIH est prévalent dans des groupes aux prises avec beaucoup de stéréotypes et de discrimination sociale. Il ne faut pas l'oublier et voir que l'impartialité est particulièrement importante ici, tout en reconnaissant que le VIH n'est pas cantonné à un seul groupe et menace tous les citoyens.
Le corollaire de ce qui précède, c'est qu'une mauvaise formulation aggrave les stéréotypes. C'est transmettre un message négatif à tous ceux qui s'adressent à la Société canadienne du sang ou consultent le questionnaire, peu importe qu'ils décident d'aller donner du sang, sont acceptés ou rejetés. L'information leur reste et influence leur conduite, ce qui ne va pas dans le sens de réduire les risques de la transmission du VIH par une bonne campagne d'information.
Mes collègues vous ont parlé du risque de perdre des groupes de donneurs sains à cause du boycottage sur les campus et ailleurs parce que les gens sont insultés par les questions actuelles. On crée un faux sentiment de confiance dans la filière du sang si l'on cible des groupes donnés et on en exclut donc d'autres qui sont peut-être menacés ou, plus précisément, des personnes qui ont des comportements qui les rendent vulnérables. Les questions ne sont pas formulées d'une manière qui nous porte à croire qu'elles donneront des réponses justes.
Pour toutes ces raisons, ÉGALE appuie la position de ses collègues: il faut réviser non seulement cette question, mais tout le questionnaire et il n'y a rien là qui soit incompatible avec la sûreté du système. De fait, cela va dans le même sens. J'espère donc que ces questions seront révisées en consultation et avec la collaboration des associations qui ont l'intérêt et l'expertise voulus pour les reformuler de façon moins biaisée.
Merci.
La présidente: Merci, monsieur Fisher.
Nous allons maintenant passer aux questions. Je donne d'abord la parole à M. Merrifield.
[Français]
M. Réal Ménard (Hochelaga—Maisonneuve, BQ): Je dispose de combien de temps?
[Traduction]
Soyez généreuse.
La présidente: Quand vous n'étiez pas là, on n'a pas été très strict et les gens ont fait preuve de bonne volonté. Je vais procéder de la même façon aujourd'hui et je vais voir combien de temps chacun prend. Il se peut que je vous envoie une note, monsieur Ménard.
Monsieur Merrifield.
M. Rob Merrifield (Yellowhead, AC): J'ai tendance à prendre énormément de temps.
La présidente: Non. Vous êtes très bref.
M. Rob Merrifield: Je vais essayer d'abréger un peu ce matin.
J'ai trouvé les exposés fort intéressants. J'ai écouté attentivement et je vais continuer de le faire.
Donner du sang est un acte tellement altruiste que c'est aller un peu loin, selon moi, d'y voir quelque chose de discriminatoire. Mais il y a beaucoup de gens qui en fait ne sont pas autorisés à donner de leur sang.
J'ai d'ailleurs déjà été dans cette situation et j'essaie régulièrement de donner du sang. Je ne crois pas que ce soit là un geste héroïque, mais une chose que je fais pour pouvoir aider les autres quand je le peux.
Quelle est exactement la question avec laquelle vous n'êtes pas d'accord? Je ne sais tout simplement pas quelle est sa teneur. Je ne m'en souviens pas depuis la dernière fois.
M. Douglas Elliott: Il y en a plusieurs, mais celle qui nous préoccupe particulièrement s'adresse aux donneurs de sexe masculin et demande: «Avez-vous eu des relations sexuelles avec un homme, ne serait-ce qu'une fois, depuis 1977?»
Je vais vous expliquer pourquoi cette question a été formulée ainsi. Lorsqu'elle a été posée, à partir de 1986, on pensait que le sida était entré en Amérique du Nord en 1977, ce qui est faux, et que le virus pourrait se retrouver dans votre sang pendant cinq ou dix ans sans pouvoir être détecté par des tests, ce qui est également faux. Mais cette question a été incluse et, comme pour bien d'autres choses dans la vie, on l'y a laissée par simple paresse.
• 1155
Il y en a également d'autres. Il y a des questions concernant
les relations sexuelles pour de l'argent. Il y a des questions sur
votre présence dans certains pays. Il y a une liste de pays
africains que je trouve étonnante.
Le problème est que ces questions ont été formulées aux États- Unis et que tous les autres pays suivent ce modèle de peur de se faire critiquer pour n'avoir pas suivi la norme.
En fait, une question s'adressant aux homosexuels a été jugée discriminatoire. Cette question était posée en Afrique du Sud où 99,9 p. 100 des cas résultaient d'une transmission hétérosexuelle. On singeait les États-Unis en posant cette question qui a été jugée discriminatoire. Les Sud-Africains ont créé une commission spéciale chargée de mettre au point une série de questions pouvant convenir à l'Afrique du Sud compte tenu de son épidémie de sida au lieu de se contenter d'imiter les États-Unis.
M. Rob Merrifield: Pour ce qui est de la sécurité publique, vous avez laissé entendre qu'on s'en prenait aux homosexuels en s'attachant au stéréotype. Mais les choses sont-elles différentes si quelqu'un a un tatouage ou un problème cardiaque ou de l'hypertension ou une maladie rénale ou le diabète ou encore le cancer? Ce sont également des maladies.
M. Douglas Elliott: Mais les hétérosexuels peuvent contracter le sida autant que les homosexuels.
M. Rob Merrifield: C'est vrai, mais la question à laquelle vous voyez des objections porte sur un acte, n'est-ce pas? Vous dites que le problème se situe là.
M. Douglas Elliott: Nous voyons des objections à cette question. Je vais vous donner un exemple du risque qu'elle peut représenter pour l'approvisionnement en sang.
C'est une question qui a été posée dans les années 80 à Terre- Neuve.
Je ne sais pas d'où vous venez, monsieur.
M. Rob Merrifield: Ce n'est pas vraiment important.
M. Douglas Elliott: De nombreuses jeunes femmes hétérosexuelles qui avaient donné du sang se sont aperçu, en donnant du sang, qu'elles étaient séropositives. Nous avons eu de la chance que les tests sanguins soient suffisamment précis pour qu'aucune goutte de ce sang ne pénètre dans le système d'approvisionnement. Toutefois, nous nous sommes préoccupés de l'épidémie de sida des années 80 qui semblait surtout s'abattre sur les homosexuels au lieu de l'épidémie de sida du XXIe siècle qui touche de plus en plus les jeunes, quelle que soit leur orientation sexuelle. L'âge de contamination moyen est maintenant de 23 ans.
Sans vouloir offenser les hétérosexuels, même si nous essayons depuis des années de les sensibiliser au fait qu'ils courent des risques, ils n'ont toujours pas compris. Ce sont maintenant eux qui représentent un danger pour l'approvisionnement en sang, plus que les homosexuels à qui vous dites qu'ils ne doivent pas donner de sang s'ils ont eu des comportements à risque et qui, en pareil cas, s'abstiennent d'en donner.
Pour le moment, notre approvisionnement en sang est sûr, en grande partie parce que les homosexuels ont été très conscients de leur responsabilité et je suis sûr qu'ils continueront. Mais si nous ne révisons pas le questionnaire, un de ces jours, une de ces jeunes femmes hétérosexuelles donnera du sang qui se glissera dans l'approvisionnement et nous aurons une nouvelle victime comme John Plater.
La présidente: Je crois que M. Plater voudrait répondre à M. Merrifield.
M. John Plater: Il existe une façon d'apporter, sinon une solution, du moins un changement. La question 29 demande si, au cours des 12 derniers mois, vous avez eu des relations sexuelles avec une personne dont vous ignorez les antécédents sexuels. Cette exclusion devrait certainement viser de nombreux hétérosexuels.
Il y a également deux questions qu'il faudrait se poser, selon moi, dans le contexte de diverses études, non seulement des études épidémiologiques, mais aussi des sondages. Il faut que ce soit étudié par des experts. Dans quelle mesure cette question ne permet-elle pas un dépistage suffisant en raison de la façon dont elle est formulée? Combien de personnes font des suppositions très erronées au sujet de leurs partenaires sexuels? Ne pourrait-on pas mieux formuler cette question de façon à dépister les gens dont M. Elliott a parlé?
La deuxième question doit porter à la fois sur les hommes qui ont des relations sexuelles avec d'autres hommes, les conjoints d'hémophiles et les personnes en provenance de certains pays. Il faut poser la question du point de vue épidémiologique, à savoir dans quelle mesure le risque est-il réduit en dehors de cette période de 12 mois? Les 12 mois cherchent à montrer que nous avons une certaine confiance dans la technologie que nous utilisons pour tester le sang.
• 1200
Il suffit d'examiner sérieusement quels sont les risques réels
que représentent certains groupes, certains comportements, etc., et
dans quelle mesure nous sommes prêts à reconnaître l'existence de
ces risques en modifiant les questions, par exemple en nous
centrant sur une période de 12 mois.
Je ne dis pas que ce soit le cas, mais encore une fois, pourquoi choisir 1977? Cette date devrait-elle se situer avant ou après? Si nous conservons la question telle qu'elle est formulée, pourquoi choisir 1977?
Il faut donc revoir tout cela avec un esprit complètement ouvert lorsque nous examinerons ces questions.
La présidente: Nous allons devoir passer à quelqu'un d'autre. Le temps de parole de M. Merrifield est terminé. M. Leclerc pourra peut-être continuer en réponse à une autre question.
M. Roger Leclerc: Vous pouvez en être certaine.
La présidente: C'est ce que je pensais.
Madame Scherrer.
[Français]
Mme Hélène Scherrer (Louis-Hébert, Lib.): Comme M. Merrifield, je tiens quelque peu pour acquis le fait que donner du sang... Ici, au Canada, on a de la chance, tout de même, parce ce que ce n'est pas rémunéré. Quant à moi, c'est déjà un avantage.
Donner du sang, ce n'est pas nécessairement non plus quelque chose d'excitant. Ce n'est pas très, très excitant. Je tiens pour acquis que personne ne va donner du sang, dans un premier temps, pour infecter quelqu'un ou dans le but de faire autre chose. Tenons pour acquis que les gens qui vont donner du sang le font vraiment dans un esprit d'altruisme parce qu'ils pensent que c'est effectivement leur responsabilité sociale de le faire. Alors, tenons pour acquis que tous ceux qui se présentent sont, habituellement, de bonne volonté, de bonne foi.
Je reviens au questionnaire, pas nécessairement par rapport au sida, mais dans son ensemble. Est-ce qu'un questionnaire comme tel assure vraiment la sécurité du produit? Quand on tient pour acquis que les gens qui y vont ne comprennent pas nécessairement les questions... Les questions ne sont pas toujours faciles, mais la question «Avez-vous eu des relations sexuelles depuis 1977?» est tout de même très claire. Mais il y en a d'autres par rapport à la médication et aux relations qui ne le sont pas. Est-ce qu'un questionnaire auquel on répond «oui» ou «non» et sur lequel on coche quelque chose est vraiment un instrument qui permet d'assurer la sécurité? Quand on aura décidé du questionnaire comme mesure de sécurité, on pourra décider ce qu'on mettra dans le questionnaire. Est-ce qu'un questionnaire dans lequel les gens répondent «oui» ou «non» avant de donner du sang est, selon vous, un élément vraiment sécuritaire?
[Traduction]
M. Douglas Elliott: M. Huskins devrait connaître la réponse.
La présidente: Monsieur Huskins.
M. Brian Huskins (représentant, Société canadienne du sida): Je vais vous faire part rapidement de mes antécédents. J'ai travaillé pour Santé Canada pendant la transition vers la nouvelle Société canadienne du sang et j'y ai siégé à plusieurs comités.
Pour répondre à votre question concernant le questionnaire, il y a des pays où il n'y a pas de questionnaire à remplir avant de donner du sang en raison du caractère altruiste de ce don. D'autres pays ont des questionnaires semblables au nôtre. Je vous répondrai qu'il y a plusieurs études—ce n'est pas moi qui peux vous les fournir, mais d'autres sont en mesure de le faire—démontrant qu'un questionnaire présente des avantages ou n'en présente pas sur le plan du dépistage pour ce qui est d'entrer dans les détails.
Au Canada, un processus est en cours sous l'égide de la Société canadienne du sang. Il devrait s'achever en novembre, nous l'espérons. Cette conférence, dont je dois vérifier le nom parce qu'il est très long, porte sur le VIH et l'hépatite véhiculés par le sang et l'optimisation du processus de sélection des donneurs. Cette conférence se penchera sur un grand nombre de ces questions.
Le processus en cours est-il pertinent? S'il y a quelque chose qui mérite d'être souligné, par quelqu'un comme moi qui oeuvre dans une perspective communautaire—je suis ici à titre de représentant de la Société canadienne du sida, et non pas de la Société canadienne du sang—c'est bien que nous avons, au Canada, un régime à deux composantes. Il y a d'un côté un organisme réglementaire, et de l'autre exploitant. Or, le changement de politique doit-il être à l'initiative du premier, en matière de réglementation, ou à l'initiative de l'exploitant?
J'ajoute immédiatement que, à l'heure actuelle au Canada, c'est bien souvent l'exploitant qui prend l'initiative. Voilà qui comporte des avantages, mais cela comporte également un défi, à savoir que, lorsqu'on a affaire à un environnement réglementaire à l'échelle internationale, cela crée des problèmes qui peuvent faire obstacle au changement.
Dans certains pays où il n'y a pas de questionnaire, tout fonctionne très bien. Le processus de vérification a fait beaucoup de chemin depuis 1983 où, en l'absence d'un test, il fallait évaluer les groupes à risque. Cela coulait de source. Il vaut la peine de le rappeler.
• 1205
Nous pouvons aujourd'hui nous pencher sur les activités à
risque et les tests sanguins s'améliorent chaque jour. On applique
le test d'amplification du génome pour l'hépatite et le VIH au
Canada, ce qui réduit d'une façon spectaculaire l'éclipse
sérologique. On va pouvoir l'appliquer à l'hépatite B très bientôt,
soit d'ici un an et demi à peu près, ce qui supprimera un autre
risque. De fait, nous cherchons le virus plutôt que les anticorps.
Ainsi, en matière de tests, la situation évolue très rapidement, de sorte que dès novembre me semble-t-il, nous allons avoir une meilleure idée de ce que nous réserve l'avenir. Il se peut bien que, pour un sous-comité parlementaire, le défi consiste à déterminer quel est au juste le rôle que doivent jouer les organismes de réglementation, quel degré d'initiative ils devront avoir comme participants au processus dans les rapports avec la Food and Drug Administration aux États-Unis ou les Conseils européens?
La présidente: Merci.
M. Ron Chaplin (président, Comité d'action politique, Égalité pour les gais et lesbiennes): Permettez-moi d'ajouter un bref commentaire d'ordre historique.
[Français]
M. Roger Leclerc: J'aimerais répondre à des questions.
[Traduction]
La présidente: M. Leclerc attend.
M. Roger Leclerc: En effet, depuis fort longtemps.
[Français]
La seule chose au monde qui est sécuritaire, c'est un cercueil six pieds sous terre, rien d'autre. C'est vrai que le questionnaire est très limité, d'où l'importance de bien le rédiger.
Ce que les groupes en prévention du sida défendent depuis des années, ce n'est pas l'appartenance à quelque groupe que ce soit, mais les comportements. Ce sont les comportements que le questionnaire doit viser, et rien d'autre. Qui que ce soit qui a un comportement non sécuritaire représente un danger. Donc, s'il doit y avoir un questionnaire, et on croit qu'il doit y en avoir un, il doit porter sur les comportements des individus.
Pour répondre à la question de savoir quelle est la différence entre demander à un homosexuel s'il a eu des relations sexuelles depuis 1977 et demander à une femme enceinte ou à un hétérosexuel s'il a, dans les 12 derniers mois, fait l'amour avec quelqu'un qu'il ne connaissait pas—d'ailleurs, il faudrait définir ce que veut dire «ne pas connaître»—, la différence, c'est que l'hétérosexuel, s'il répond oui, va pouvoir revenir l'année suivante et dire qu'il peut donner du sang. L'homosexuel sera automatiquement rejeté, individuellement et collectivement. C'est là que le bât blesse.
Que l'on assure la sécurité du sang... Je comprends très bien M. Plater quand il parle de l'obligation morale de protéger le sang contre vents et marées. J'adhère à ça, mais on a aussi une obligation morale de protéger les individus qui appartiennent à des catégories plus fragiles, qui ont des comportements moins sécuritaires et de leur assurer une protection, ce qui veut dire une prévention efficace. C'est là que surgit le problème entre deux collectivités qui ont toutes deux des droits. Là, on ne parle plus de sécurité, mais d'éthique et de morale.
Mme Hélène Scherrer: Je veux simplement renchérir là-dessus. Ce que le questionnaire essaie de faire, c'est non pas de dire qu'il y a une classe, une deuxième classe ou une troisième classe, mais d'identifier les personnes à risque, quelles qu'elles soient.
M. Roger Leclerc: C'est ça, son erreur. Il devrait identifier les comportements à risque chez les individus et non pas les personnes à risque.
Mme Hélène Scherrer: C'est ça, exactement.
Allons-y alors avec la terminologie. Après avoir lu le questionnaire, on devient facilement une personne à risque si on est consciencieux, car on doit s'arrêter pour se demander si on a effectivement pris des médicaments, si on est allé dans tel pays, si on est passé par là, etc. Ça devient tellement difficile.
Effectivement, je me pose de sérieuses questions quant à savoir si un questionnaire est vraiment un élément de sécurité. Même moi, qui comprends bien et qui vais prendre le temps de bien examiner le questionnaire, c'est certain qu'à un moment donné, selon une question ou une autre, je vais devenir une personne avec des comportements à risque. Ce qui va se produire, à ce moment-là, c'est qu'il n'y aura plus personne qui va donner du sang si on n'a pas un élément sécuritaire quelconque auquel on peut se fier, un test quelconque qui pourrait être fait rapidement avec tout le monde. Sinon, avec tout ce qui se passe actuellement, comme la fièvre aphteuse, le boeuf, ceci et cela, on sera tous, à un moment donné, des gens à risque. À ce moment-là, il n'y aura plus de gens qui vont donner. Répondre au questionnaire va devenir, chaque fois, un cas de conscience. Tôt ou tard, on va toujours être considérés à risque ou possiblement à risque. Alors, à ce moment-là, on va s'abstenir si on a vraiment une conscience sociale. Personnellement, je remets en cause le questionnaire comme élément de sécurité.
[Traduction]
La présidente: M. Chaplin souhaite formuler une observation.
M. Ron Chaplin: À titre de rappel historique, permettez-moi de signaler que les questions et le questionnaire—et tout particulièrement la question visant le VIH—ont été formulés par la Croix—Rouge des États-Unis et la Food and Drug Administration du même pays, pour composer avec un problème auquel on était confronté aux États-Unis.
• 1210
Vous avez tout à fait raison de souligner, madame Scherrer,
que le système états-unien n'est pas volontaire. Au Canada, le don
de sang est volontaire à 100 p. 100. Tel n'est pas le cas aux
États-Unis de sorte que, encore aujourd'hui, bien des gens sont
rémunérés pour leur sang, et la plupart des donneurs proviennent
des couches à faible revenu où les infections dont nous parlons
sont passablement répandues. Il vaudrait la peine de ne pas perdre
de vue cet aspect.
La présidente: Merci, monsieur Chaplin.
Monsieur Ménard.
[Français]
M. Réal Ménard: J'ai quatre questions, mais je voudrais rappeler aux membres du comité qu'il s'agit plutôt de 1977. La réalité est telle que, si depuis 1977, une personne a eu une relation sexuelle avec un partenaire de même sexe, elle est exclue. On a dit 1987 plus tôt, mais c'est bien 1977.
D'autre part, il n'y a pas que le questionnaire. Une série de tests pourront être présentés dans les banques de sang par Santé Canada. Le questionnaire est rattaché à des tests obligatoires dans les banques de sang déjà existantes.
Mes quatre questions sont les suivantes. Je vous les pose en rafale, compte tenu que la présidente sera moins gênée de vous couper la parole que moi.
Monsieur Leclerc, vous avez dit que, dans le système actuel—je pense que c'est une réflexion importante pour le comité—, des hommes hétérosexuels peuvent être des vecteurs de transmission et que le questionnaire ne les voit pas. J'aimerais que vous développiez votre pensée là-dessus.
Deuxièmement, existe-t-il des nouvelles technologies de détection qui pourraient réduire la fenêtre d'opportunité où la présence des anticorps n'est pas immédiatement révélée dans les tests? Est-ce que la technologie PCR permet cela? Notez que le comité devra faire rapport sur des éléments très précis. Le représentant de la Société canadienne de l'hémophilie nous rappelle avec justesse qu'on ne peut pas prendre le risque de changer les règles du jeu si on n'a pas la garantie raisonnable qu'il n'y aura pas de vecteurs de transmission additionnels.
La Commission Krever évalue actuellement à une chance sur un million la possibilité d'être contaminé lors d'une transfusion sanguine. Il est sûr qu'on ne pourra jamais réduire le facteur de risque à zéro, mais peut-on être encore plus performant? Existe-t-il de nouvelles technologies disponibles qui permettraient de faire cela?
Troisièmement, lorsque j'ai commencé à m'intéresser à cette problématique en 1999, j'ai consulté plusieurs personnes et un certain nombre d'épidémiologistes, dont le Dr Alary, qui, à mon sens, excelle dans cette profession, et le Dr Réjean Thomas, qui n'est pas un épidémiologiste mais un clinicien. On avait proposé un critère qui énonçait que tout homme ayant eu des relations sexuelles avec un autre homme depuis 1977 pouvait faire un don de sang à condition d'avoir passé tous les tests disponibles. Je vous rappelle qu'on se questionnait sur la possibilité d'y inclure le PCR, ce qui réduisait la fenêtre d'opportunité au maximum dans les banques de sang, et la pratique de l'abstinence au cours des six mois précédents. J'aimerais que vous vous prononciez sur la pertinence de ce critère si vous estimez posséder l'expertise nécessaire. Cela vous paraît-il une base de données intéressante pour revoir le questionnaire et obtenir un critère additionnel?
M. Roger Leclerc: Je vais d'abord parler rapidement des hétérosexuels.
En ce qui concerne les hétérosexuels en tant que vecteurs de transmission, la question demande: «Avez-vous eu une relation sexuelle avec quelqu'un d'inconnu dans les six derniers mois?». Si j'ai une relation sexuelle avec une fille que je vois au «cinq à sept» d'un bar à tous les jeudis soirs depuis six mois, celle-ci est-elle connue ou inconnue? Que veut dire «connu»?
En ce qui me concerne, le questionnaire tel qu'il est rédigé actuellement permet à des individus hétérosexuels de penser, en toute confiance, qu'ils ne sont pas des vecteurs de transmission du VIH alors qu'ils le sont.
Quant aux tests disponibles et à l'abstinence, nous n'avons jamais fait de prévention en proposant l'abstinence. Nous croyons que c'est une chose qu'on ne peut pas demander. Les individus peuvent choisir d'être abstinents de façon individuelle, mais le fait de demander à des gens d'être abstinents collectivement, avec la récompense de pouvoir donner du sang, nous apparaît irréaliste.
M. Réal Ménard: Mais vous convenez avec moi qu'il y a des gens qui, dans un parcours de vie, aussi difficile que cela puisse être, peuvent être abstinents pendant cinq, six, sept, huit ou neuf mois, et qu'avec ce critère, de pair avec la technologie nouvelle, on pourrait peut-être recevoir des dons de sang.
M. Roger Leclerc: Oui, mais cela a l'effet pervers de dire que si vous voulez avoir l'honneur de donner du sang, vous devez être abstinent, ce qui m'apparaît un peu difficile.
Mme Hélène Scherrer: Si tu veux être un héros.
M. Roger Leclerc: Oui.
M. Réal Ménard: On connaît tous ce genre de héros, madame Scherrer.
La présidente: Qui souhaiterait faire des commentaires au sujet de ces questions?
Monsieur Plater.
M. John Plater: Vous demandez tout d'abord s'il y a quelqu'un ici qui a la compétence voulue pour formuler des commentaires. Avec tout le respect que je dois à mes collègues, voilà justement un aspect qui m'inquiète. En effet, je ne suis pas certain que nous ayons la compétence voulue.
Ce qui m'inquiète, pour ce qui est des questions liées au risque et à l'état actuel de la technologie, c'est que, même si bon nombre de ceux qui sont ici sont au courant de ce qui se passe, je ne pense pas que l'un d'entre nous ait la compétence dont a besoin votre comité pour bien étudier la question.
J'aurais deux observations à formuler. Tout d'abord, M. Leclerc a abordé la question des droits concurrents. Elle se pose ici, la chose est indubitable. Nous savons bien que tout n'est pas parfait dans notre pays. Cependant, nous disposons de certaines connaissances en matière de droits concurrentiels. Selon la Charte et selon les codes des droits de la personne dont s'est dotée chacune des provinces, il existe des critères permettant de mettre en balance le risque auquel le public est exposé et la discrimination visant toute personne.
Pour ce qui est de la sélection des donneurs, les précautions oratoires sont inutiles. La sélection des donneurs est un acte de discrimination. C'est, par définition, de la discrimination. On exerce de la discrimination à l'égard des gens. Cette discrimination est-elle motivée? S'agit-il d'une mesure raisonnable dans ce contexte?
On entre à un moment donné dans une zone grise, et c'est une question de politique gouvernementale. À mon avis, la meilleure façon de décider consiste à procéder à un examen public où l'on reconnaît les risques qui existent et la mesure dans laquelle nous sommes disposés à exercer de la discrimination à l'égard des gens.
Dans ce processus, il faut faire deux choses. Il faut d'abord poser les bonnes questions. Nous serons contraints de préciser et de raffiner les questions dans le but d'atteindre deux objectifs: premièrement, isoler et supprimer les risques que nous ne sommes pas disposés à accepter; et deuxièmement, amener les gens au pays, peu importe qui ils sont, à donner d'eux-mêmes et à donner du sang.
Ne mettons pas la charrue devant les boeufs. N'allons pas demander à un groupe: «Accepteriez-vous la question x?», ou «Accepteriez-vous la question y?», ou «Est-ce que ça vous va?». Faisons la recherche voulue. Nous disposons de certaines informations. Réunissons-les, examinons-les comme il faut, et posons la question des droits de la personne. À partir de là, nous nous demanderons quelles sont les meilleures questions à poser.
La présidente: Merci.
Monsieur Elliott.
M. Douglas Elliott: J'aimerais répondre à la question de M. Ménard.
Tout d'abord, je suis tout à fait d'accord avec la question qu'a posée le célèbre Dr Thomas. Je pense que la Société canadienne du sida est en mesure de dire si une personne ne pose aucun risque. Le test est maintenant beaucoup mieux conçu, nous avons donc une période de six mois avec le test PCR. Le seul risque qui demeure est celui de l'erreur humaine, comme le disait M. Plater. Si l'on se trompe dans l'administration du test, personne ne peut dire que le test ne détectera pas d'anticorps après une période de six mois.
Cependant, cela ne règle toujours pas le problème que M. Leclerc a mentionné. On semble encore s'attarder sur l'idée que, pour une raison ou une autre, l'activité homosexuelle est implicitement plus risquée que l'activité hétérosexuelle. Ce n'est tout simplement pas le cas.
Nous ne voulons pas que des donneurs gais et séropositifs viennent infecter les gens. Ce n'est pas notre objectif. Nous voulons protéger l'approvisionnement en sang. C'est la chose la plus importante.
Mais, comme M. Leclerc l'a dit en répondant à la question sur la connaissance de son partenaire, c'est la question la plus dangereuse. Les études démontrent que les femmes hétérosexuelles prennent des risques parce qu'elles connaissaient le gars et qu'il avait l'air en bonne santé.
Nous avons des statistiques sur le comportement sexuel qui indique que près d'un tiers des hommes mariés, et peut-être 25 p. 100 des femmes, ont des relations adultérines. Ces personnes disent-elles qu'elles connaissaient leur partenaire parce qu'elles avaient une aventure avec lui ou elle? Et qu'en est-il des personnes avec qui elles couchent? On ne règle vraiment pas cet aspect du problème.
• 1220
En fait, on a entendu dire au cours de l'enquête Krever que
des jeunes gens à Terre-Neuve pratiquaient la pénétration anale
comme moyen de contraception. Ils ne pouvaient pas obtenir de
condoms à cause des attitudes sociales dans cette région. Voilà
pourquoi je suis tout à fait d'accord avec l'idée dont parlait
M. Leclerc.
Je ne suis pas du tout en désaccord avec M. Plater. Si l'on veut des résultats, il faut que les questions portent sur les activités à risque. On peut avoir de bonnes questions qui sont neutres et qui donnent des résultats, si l'on veut poser des questions.
Je suis d'accord avec Mme Scherrer qui dit qu'il faut se demander combien de gens on perd ou on éloigne en posant ces millions de questions.
Ma mère continue de donner du sang, Dieu merci. Elle se prête à ces questions. Mais il y a des tas de gens qui ne veulent rien savoir. Cela veut dire qu'on manque alors de sang pour aider des gens comme M. Plater, qui ont un besoin constant de produits sanguins. Il faut examiner tout le problème d'une manière scientifique et logique, sans préventions de part ou d'autre.
Les gais ne peuvent pas toujours se plaindre de discrimination s'il y a une question qui les exclut. Ce n'est pas vrai. Au même moment, il est également idiot de croire que la banque de sang est en sécurité si on pose une question qui écarte les gais.
La présidente: Merci.
M. Brian Huskins: Madame la présidente, je voulais aborder un autre sujet qui est une préoccupation certaine au Canada. Cela joue un plus grand rôle dans le monde et en Amérique du Nord. Pour les produits comme le facteur VIII, que M. Plater utiliserait, nous ne fournissons que 30 p. 100 du sang pour ce produit lorsqu'il est fractionné dans nos sources canadiennes.
Même si on dit qu'au Canada nous avons un système volontaire, le seul produit où nous sommes en fait autosuffisants, c'est le plasma frais congelé et certains produits qu'on obtient rapidement...
M. Douglas Elliott: Les globules rouges.
M. Brian Huskins: ... comme les globules rouges, oui. Le fait est que les produits sanguins au Canada proviennent encore, dans une proportion de 70 p. 100, des banques de sang ou autres des États-Unis.
Par conséquent, lorsque nous examinons ces questions au Canada, il faut se poser la question plus générale du fractionnement des produits en aval. On peut parler de cette question au Canada et y trouver remède.
À mon avis, les décideurs et les législateurs interviennent vraiment ici dans l'examen du contexte plus global. Si l'on change la technologie et tout le reste, comment allons-nous établir un meilleur système, où plus de gens pourront donner plus de sang, avec une sélection plus efficace et sécuritaire, où le receveur est protégé? Pour le produit qu'utilisent des gens comme M. Plater, 70 p. 100 n'est toujours pas fourni au Canada.
La présidente: Excusez-moi, je dois passer à un autre député.
Madame Sgro.
Mme Judy Sgro (York-Ouest, Lib.): Merci, madame la présidente.
Nous avons deux rencontres sur ce sujet. Qui allons-nous entendre à notre prochaine séance, madame la présidente?
La présidente: Le greffier pourra vous répondre.
Pendant que nous attendons, je tiens à dire à nos témoins que c'est notre toute première séance portant sur cette question. Nous n'avons pas de plan d'attaque. Nous n'allons pas chambouler le système du jour au lendemain. Nous ne faisons que poser les questions sur ce problème, essentiellement sur les pratiques d'exclusion, ce qui pourrait susciter d'autres questions et peut- être faire intervenir de nouveau les régulateurs, par opposition aux exploitants.
C'était une observation très intéressante, monsieur Huskins.
Je veux m'assurer que personne ne s'inquiète, nous n'allons pas partir en guerre comme Don Quichotte et prendre des mesures qui feraient reculer votre cause. Nous commençons tout juste à examiner cette question. Nous vous sommes très reconnaissants d'avoir accepté notre invitation aujourd'hui.
Mardi, nous allons...?
Le greffier du comité: Nous allons sûrement entendre des représentants de la Société canadienne du sang, et presque certainement d'Héma-Québec. Nous allons entendre également les représentants de Santé Canada qui ont la compétence voulue pour parler de cette question. Nous allons recevoir deux représentants de Hoffmann-La Roche Limitée, dont l'un est le gestionnaire de la technologie PCR dont on a parlé plus tôt.
Quelques témoins experts qu'avait recommandés M. Ménard n'ont pu répondre à notre invitation. Nous allons tâcher d'inviter au comité également des experts en épidémiologie et en immunologie.
Mme Judy Sgro: Nous comptons tenir maintenant deux audiences sur cette question, et peut-être d'autres audiences plus tard?
La présidente: Nous prendrons cette décision plus tard. Nous voulons réunir des informations de sources variées avant de décider de ce que nous allons en faire.
Mme Judy Sgro: D'accord.
J'ai appris beaucoup en écoutant nos témoins sur cette question. J'ignore au juste à qui je dois adresser ma question, ou si je dois plutôt la poser la semaine prochaine, mais j'aimerais savoir quand ce questionnaire a été mis au point. Quand l'a-t-on mis à jour ou examiné la dernière fois?
M. Douglas Elliott: On a modifié le questionnaire périodiquement. La question dont nous parlons a été ajoutée en janvier 1986—madame Sgro, vous n'étiez pas encore arrivée quand j'ai parlé de cela. Malheureusement, nous constatons un effet boule de neige: une question est ajoutée au questionnaire et elle n'en est jamais retirée. Les questions sont ajoutées les unes aux autres et l'on aboutit à cet amas encombrant dont madame la présidente parlait, de sorte que les gens sont agacés et effrayés de devoir répondre aux questions. Selon moi, il y a à cet égard un rôle véritablement important que l'organisme de réglementation et le Parlement sont appelés à jouer.
Il est très difficile de s'attendre à ce que l'exploitant prenne les devants et retire une question, ou semble en retirer une, même si c'est parfaitement justifié sur le plan scientifique. S'il en est ainsi, c'est par crainte de critiques de la part du public ou de poursuites judiciaires. Toutefois, si l'organisme de réglementation signale aux exploitants que ce que nous proposons est la meilleure façon d'assurer l'innocuité tout en augmentant l'approvisionnement, alors ils seront couverts. Je crains que le gouvernement fédéral n'ait pas assumé son rôle de chef de file à cet égard, et il est peut-être temps de commencer à y voir.
Mme Judy Sgro: Monsieur Elliott, quand on sait ce qui est arrivé par le passé avec l'approvisionnement en sang, vous conviendrez assurément que toute modification de ce genre est extrêmement délicate et qu'on devra en discuter compte tenu de moments particulièrement douloureux au Canada.
Je sais très bien qu'aucun d'entre nous n'a intérêt à ce que l'approvisionnement en sang soit contaminé; votre intérêt est le même que celui de n'importe qui d'autre, mais le défi est d'améliorer tout pour tout le monde sans poser de questions discriminatoires. Certaines de ces questions ouvrent la voie à des pratiques discriminatoires mais selon moi, en tout cas, c'est un domaine où il faudra se montrer extrêmement prudent au fur et à mesure que nous progresserons.
Je le trouve très instructif, mais je dois vous dire que je vais faire exactement ce que je pense que vous voulez que nous fassions tous—à savoir, veiller à ce que toute mesure que nous prendrons protégera l'intérêt public de chacun.
M. Ron Chaplin: Je rappelle aux membres du comité que nous avons tous le souci de maintenir la sécurité de l'approvisionnement en sang. Quand quelqu'un est infecté par le VIH ou un autre virus à cause de l'approvisionnement en sang, c'est une énorme tragédie. C'est également une énorme tragédie si quelqu'un est infecté par le VIH par un autre moyen, et parce que nous voyons des difficultés dans le cas du questionnaire, nous craignons qu'il ne constitue une
[Français]
entrave à la sécurité de la santé publique de tous les Canadiens.
[Traduction]
On induit le public canadien en erreur en ce qui concerne la façon dont le VIH est transmis et en l'absence de tout redressement d'information, sous forme de complément d'information venant de l'agence des services du sang ou de l'organisme de réglementation à Santé Canada, les Canadiens acquièrent de faux renseignements dans les cliniques de collecte de sang, des informations induisant en erreur sur le VIH.
La présidente: Merci.
C'était le tour de Mme Wasylycia-Leis, mais elle semble avoir disparu.
M. Réal Ménard: Elle m'a fait cadeau de son temps.
La présidente: Qu'il est malin!
Monsieur Charbonneau.
M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Merci, madame la présidente.
Si je comprends bien, une réponse affirmative à la fameuse question qui réfère à 1976 mène à une exclusion à vie, sans test. Y a-t-il d'autres questions qui mènent à des exclusions à vie si la personne répond affirmativement? Est-ce qu'il y a d'autres questions qui ont cette même conséquence?
[Traduction]
M. Douglas Elliott: Certaines sont très évidentes et délicates, monsieur Charbonneau. Si vous êtes séropositif, vous êtes évidemment exclu à vie. Mais d'habitude, on pose des questions comme: «Avez-vous depuis 1977 accepté de l'argent ou des drogues en échange de rapports sexuels?» Si vous répondez oui à cette question, vous êtes exclu à vie. Comme M. Huskins me l'a dit, est- ce que cela englobe un verre qui vous est offert? S'agit-il là de l'échange d'une drogue contre des rapports sexuels? Le cas échéant, on se retrouve dans la situation évoquée par Mme Scherrer, et un grand nombre de Canadiens sont exclus... En tout cas, je le suis certainement.
[Français]
M. Yvon Charbonneau: Madame la présidente, cette réponse porte le débat à un niveau plus élevé. Ce n'est pas une question de discrimination par rapport à des gens qui ont eu une activité homosexuelle il y a 20 ans ou depuis 20 ans. À plusieurs égards, ce questionnaire exclut les personnes sans qu'il y ait de possibilité de test entre la déclaration et le don de sang.
Cela nous amène à regarder ce questionnaire sous un angle beaucoup plus vaste. D'abord, y a-t-il lieu d'avoir un questionnaire? Dans l'affirmative, il faut compléter le questionnaire par certains tests, par certaines autres conditions pour pouvoir donner du sang. Il y a donc plusieurs angles à la question. Ce n'est pas seulement une question liée aux droits des personnes gaies ou de leur communauté. Il s'agit de savoir si des tests doivent être effectués lorsque des réponses semblent mener à un risque indu. On devrait aussi regarder la question sous cet angle.
S'agit-il de discrimination contre l'appartenance à un groupe, ou est-ce la sanction d'un acte, lorsqu'une personne affirme avoir eu une relation homosexuelle depuis 1976? Il n'est pas évident de répondre à ça. J'ai entendu un des témoins dire que c'est à cause de l'appartenance à un groupe. Ce n'est pas parce qu'une personne a eu une relation homosexuelle en 20 ans qu'elle appartient à un groupe. Cela devient un acte isolé.
Je pense qu'il faut regarder ça d'une manière beaucoup plus étendue. Autrement dit, ce n'est pas parce qu'une personne a eu une relation homosexuelle une seule fois qu'il s'agit d'une activité à plein temps. C'est plutôt une action isolée, comme la commission d'une infraction au code de la route ou un vol. Avoir volé une fois signifie-t-il être un voleur à plein temps? Non. Alors, je crois que la question de la discrimination selon l'appartenance doit être pondérée par beaucoup d'autres facteurs, puisqu'il y a d'autres questions dans le questionnaire qui mènent au même problème, celui de l'exclusion à vie pour avoir répondu oui.
L'échange d'argent, comme vous l'avez dit, ou la rencontre d'une personne inconnue sont aussi des problèmes. Ce n'est pas une question d'appartenance à un groupe, c'est une question d'exclusion sans test.
[Traduction]
La présidente: Monsieur Fisher.
M. John Fisher: Une des difficultés que comporte le libellé de la question provient du fait que l'on pose des questions sur l'identité et le comportement. Un groupe d'hommes qui ont des rapports sexuels avec des hommes se démarque, alors que l'on ne pose pas de question équivalente aux membres des autres groupes qui ont un comportement différent. Cela cible et isole un sous-groupe de la population canadienne qui ne pose pas nécessairement ou implicitement plus de risques que les autres à cause de son comportement.
Par exemple, j'imagine que le couple que formaient Jim Egan et Jack Nesbitt, qui avait eu une relation entre personnes de même sexe pendant 50 ans avant de mourir tragiquement l'année dernière, aurait répondu oui à la question «Avez-vous eu des rapports sexuels avec un homme une fois depuis 1977?» Posaient-ils implicitement un plus grand risque qu'un couple hétérosexuel dont la relation aurait duré 50 ans? À mon avis, non.
L'autre difficulté, qui revient à la question que Mme Scherrer a soulevée sur l'utilité même du questionnaire, est celle de savoir si les questions sont tellement subjectives qu'elles aboutissent à des réponses extrêmement divergentes dans l'esprit de ceux qui y répondent, auquel cas elles n'ont plus aucune utilité.
• 1235
Bill Clinton vous dirait que les rapports sexuels
correspondent à des choses différentes suivant les gens. Si vous
demandez à une personne: «Avez-vous eu des rapports sexuels?», je
pense que beaucoup vous répondront suivant leurs préconceptions de
ce que cela signifie, du genre de comportement qui constitue un
rapport sexuel.
Manifestement, les réponses par oui ou non ne renseignent pas ceux qui administrent le questionnaire car ils ne savent pas comment ceux qui y ont répondu envisagent subjectivement leurs propres expériences, ce qui est à l'origine de la réponse particulière qu'ils donnent.
Je voudrais dire une dernière chose concernant la discrimination. Effectivement, nous voulons que ces questions soient formulées de façon plus objective et neutre, qu'elles ne constituent pas un jugement, mais nous ne voulons pas que vous ayez l'impression que nos inquiétudes portent seulement sur les questions discriminatoires. Nous nous soucions également de la précision. Ces questions n'aboutissent pas à des résultats précis. Comme je l'ai dit dans mes remarques préliminaires, si on peut poser des questions qui aboutissent au moins à une précision égale sans pour cela porter un jugement, alors soit.
Je pense que cela revient à dire qu'il y a une distinction entre les intérêts de la collectivité, le fait de poser des questions neutres, les intérêts médicaux, la protection de l'approvisionnement en sang. Je me rends compte qu'il est utile que les membres du comité nous entendent séparément des groupes communautaires et des experts médicaux et qu'ils nous entendent séparément des gens qui ont la responsabilité d'administrer les programmes. Toutefois, je pense que cela porte à croire que nous avons des objectifs contradictoires ou du moins séparés, alors que selon moi, nos objectifs sont tout à fait en harmonie.
La présidente: Je pense que M. Valois voudrait faire une remarque.
[Français]
M. Pierre Valois (président, Table de concertation des gais et lesbiennes du Québec): J'ai juste un mot à dire à votre intention, monsieur Charbonneau. C'est bien certain que nous sommes d'accord avec vous que le questionnaire touche bien plus que la seule question de la communauté gaie. Mais je peux vous dire que le dommage est très présent. Si un gai vous dit simplement que le questionnaire est compliqué et vous demande quand on peut aller donner du sang, les gais vont tout de suite répondre qu'on doit oublier ça, car on ne veut pas de notre sang.
Quand nous aurons changé ces questions—bientôt, j'espère—qui font partie de l'histoire et qui vont probablement devenir plus raisonnables, j'espère qu'il y aura beaucoup de publicité là-dessus, parce que le dommage est très profond dans les communautés gaies et les communautés hétérosexuelles. Tout le monde sait qu'on ne veut pas du sang des gais. Donc, quand ce sera changé, faites beaucoup de bruit pour que cette espèce de saloperie, cette espèce de tache et d'opprobre qui ont été faits pour des raisons historiques, mais qui sont là et qui continuent d'être là, disparaissent de l'ensemble du climat social.
[Traduction]
La présidente: Merci.
Monsieur Merrifield, êtes-vous prêt?
M. Rob Merrifield: Oui, madame la présidente.
Je trouve la discussion fort intéressante. Selon moi, elle se résume à ceci: vous estimez qu'il y a de la discrimination à l'égard du groupe que vous représentez. Je vous répondrai que le questionnaire ne cherche pas à faire de la discrimination mais à protéger.
Quand vous dites que les questions n'ont pas évolué au rythme de la science, vous avez probablement un bon argument. Si c'est votre cheval de bataille, on peut le comprendre. Alors, il faut garantir la précision scientifique. Nous avons besoin de plus de renseignements sur cet aspect.
La présidente: Vous en aurez mardi.
M. Rob Merrifield: Je suis impatient d'assister à la réunion de mardi afin de voir ce qu'il en est.
La personne qui est assise à l'extrémité là-bas—et je ne peux pas lire son nom—a dit que toutes les questions étaient discriminatoires jusqu'à un certain point alors qu'on est animé des meilleures intentions du monde, à savoir protéger au maximum notre approvisionnement en sang. Nous ne sommes pas en présence d'une science exacte. Je souhaiterais qu'elle le soit afin que nous ayons la possibilité d'exclure toute discrimination tout en sachant qu'en tout temps notre approvisionnement en sang est sans danger.
Voici ma question: Suis-je à côté de la plaque? Est-ce ainsi que vous voyez les choses?
[Français]
M. Roger Leclerc: J'aimerais revenir sur «tout est discriminatoire». Oui, la discrimination est justifiée. On le répète et on ne le répétera jamais assez, on veut tous un système sanguin aussi sécuritaire que possible. L'idéal serait un test multifactoriel de 10 secondes. À chaque donneur on prend une goutte de sang et on le sait. Il y a le VIH, l'hépatite, la maladie de Creutzfeldt-Jakob, une liste à n'en plus finir. Mais on n'en est pas là.
Il faut distinguer la discrimination basée sur un comportement, quel qu'il soit, qui me rend non sécuritaire et le sentiment qu'a la société que les membres d'une collectivité, quelle qu'elle soit, ont tous des comportements non sécuritaires. C'est ça qu'on dit. Premièrement, quand on vous demande si vous avez eu une relation sexuelle avec un homme depuis 1977, on tient pour acquis que tous les gais, tous les gens qui ont des relations sexuelles ont des comportements non sécuritaires, ce qui est complètement faux. Toutes les études vont vous dire qu'il y a plus de pratiques anales chez les hétérosexuels qu'il y en a chez les homosexuels. Toutes les études disent que c'est faux. On part donc avec une prémisse qui est fausse.
• 1240
Deuxièmement, on exclut des gens sur la base de leur
appartenance plutôt que sur
celle de leurs comportements. Bien sûr,
celui qui a baisé une fois avec un gars à
l'adolescence ne s'identifiera pas comme un homosexuel.
Je vais vous dire bien franchement—et là, je vais
être méchant—, I don't care. Ce n'est pas lui
qui fait l'objet de discrimination
parce qu'il n'a pas ce sentiment
d'appartenance. Donc, la question ici n'est pas de
savoir si la discrimination est nécessaire.
Oui, elle l'est, et elle doit l'être.
Il doit y avoir, pour assurer la sécurité du sang, de la
discrimination basée
sur les comportements des individus, quelle que soit
leur appartenance, c'est tout. À l'heure
actuelle, on élimine des individus sur la base des
comportements qu'on croit qu'ils ont. Quarante-cinq
pour cent des gais ont des pratiques anales. De ce
nombre, quel pourcentage ont des pratiques à risque
et combien veulent donner du sang?
C'est ça, la discrimination inadmissible; ce
n'est pas le fait qu'il y ait la discrimination. Oui,
il devra y avoir de la discrimination, mais il faudra
qu'elle soit basée sur
les comportements des individus.
[Traduction]
M. Rob Merrifield: Je ne dis pas le contraire de ce que vous dites. Vous avez dit qu'il y a de la discrimination à l'égard de la communauté homosexuelle, mais il semble que le fondement de votre argument est que le groupe hétérosexuel est tout aussi dangereux. Cet argument ne tient pas. Si c'est une action qui met en danger l'approvisionnement en sang, peu importe qu'elle soit le fait des hétérosexuels ou des homosexuels. Il faut que la société soit protégée. Voilà ce que j'affirme.
Vous nous dites ce matin qu'il y a un décalage entre les données scientifiques et le questionnaire, mais le questionnaire n'est pas une science précise. Je pense que c'est avec les meilleures intentions... ce qui est arrivé.
Voici ma question: avez-vous demandé aux exploitants de modifier le questionnaire, puisqu'il s'agit d'un questionnaire évolutif?
M. Brian Huskins: Ils vous diront que c'est l'organisme de réglementation qui contrôle le questionnaire et inversement, l'organisme de réglementation vous dira que ce sont les exploitants qui le contrôlent. Personne ne prend l'initiative, c'est un dilemme.
La présidente: Monsieur Elliott.
M. Douglas Elliott: Monsieur Merrifield, j'ai vécu une situation personnelle à cet égard, quand on a constaté un boycottage sur les campus. À ce moment-là, la Croix-Rouge a demandé notre appui pour mettre un terme au boycottage. Nous avons rencontré ses représentants et nous avons demandé: «Comment pouvons-nous modifier les choses pour que l'accent soit mis sur les activités à risque, pour que le questionnaire soit mis à jour? Nous allons alors présenter ce nouveau questionnaire. Nous allons vous appuyer et donner notre aval aux questions pertinentes, ce qui effectivement, exclura un grand nombre d'homosexuels. Si la question est pertinente, nous convaincrons les jeunes gens sur le campus de donner du sang.»
Ce n'est pas ce qui s'est passé à cette rencontre. La Croix- Rouge nous a dit qu'elle ne pouvait pas changer le questionnaire et que nous avions une obligation sociale, celle de convaincre les jeunes que ce questionnaire était pertinent concernant le sida. Nous avons dit que nous ne pouvions pas faire cela.
Il ne faut pas oublier que nous aussi nous nous soucions de l'infection de l'approvisionnement en sang. Je ne sais pas si les membres du comité le comprennent. Les gens qui sont séropositifs sont de grands consommateurs de sang, puisque l'anémie est un effet secondaire courant de l'absorption de médicaments, et ceux qui les prennent n'ont pas les mêmes défenses que nous en présence de sang infecté. Ils s'inquiètent vivement de la sécurité du sang.
Mais nous voulons des distinctions logiques. La Croix-Rouge américaine séparait autrefois le sang en provenance de la population noire et celui qui provenait de blancs. C'était sa façon de procéder. Personne n'irait prétendre que c'était scientifique.
Nous voulons des distinctions scientifiques. Autrefois, les Irlandais étaient maintenus sur une île parce qu'on craignait la tuberculose. Ce n'est pas parce qu'on agissait ainsi au XIXe siècle qu'il faudrait en faire autant aujourd'hui. Il faut suivre l'évolution de la science pour protéger tout le monde.
La présidente: Merci, monsieur Merrifield.
Madame Scherrer.
[Français]
Mme Hélène Scherrer: D'abord, je pense qu'il faut vraiment prendre en considération le fait que les habitudes sexuelles ont changé énormément dans les 25 dernières années. Mes enfants, mes adolescents qui ont actuellement 18 et 20 ans, ne vivent pas leur sexualité de la façon dont nous vivions la nôtre. Je pense que le test ne tient pas compte de cela.
• 1245
Deuxièmement, j'ai encore un point d'interrogation
majeur sur les comportements, puisque si on y va avec les
comportements, le questionnaire
sera ainsi fait: «Êtes-vous mariée?» Je vais
répondre «Oui, je suis mariée depuis 25 ans».
«N'avez-vous eu qu'un seul partenaire?» Je vais
répondre «Oui». L'autre question devra être:
«Êtes-vous cocue?» Je vais répondre «Non».
La suivante sera: «En êtes-vous sûre?» Et je vais être
obligée de mettre un point d'interrogation. Je pense
qu'on n'en finira jamais.
Alors, si on prend les comportements, c'est exactement ça. Je vais dire qu'en ce qui me concerne, il n'y a aucun problème. Mais si on me demande si je connais mon partenaire très bien depuis 30 ans, si je suis cocue... Est-ce que je le sais? Alors, c'est ça. Vraiment, je me pose de sérieuses questions en ce qui a trait aux comportements.
Je reviens à ce que je disais. Je remets vraiment en question un questionnaire qui pourrait véritablement cerner cela et assurer la sécurité. Ma question est la suivante: est-ce que le Canada est un leader au niveau de la sécurité du sang? Qu'est-ce qui se fait ailleurs, dans les autres pays, qui, par exemple, reçoivent une bénédiction ou qui ont autre chose? Est-ce qu'on y va avec un tel questionnaire ou est-ce que d'autres mesures de sécurité sont prises?
[Traduction]
M. Douglas Elliott: Je pense que Brian est le plus compétent pour répondre à cette question.
M. Brian Huskins: Mardi, vous entendrez sans doute le témoignage de gens qui sont experts pour répondre à cette question. Je ne suis qu'un défenseur du consommateur. D'après tout ce que je constate, et surtout à l'occasion de la maladie de Creutzfeldt- Jacob, et la nouvelle variante de cette maladie, le Canada a certainement joué un rôle de chef de file à cet égard.
Nos questionnaires sont semblables à bien... qu'on se tourne vers la Grande-Bretagne, l'Allemagne ou les États-Unis. Il y a certainement une grande différence avec ce qui se passe en Australie, parce que là-bas on a fait des modifications. Et cela progresse. Le comité de la Food and Drug Administration qui se penche sur cette question s'achemine lentement vers une révision du questionnaire pour le modifier.
Je pense que le Canada pourrait jouer un rôle de chef de file à cet égard, à partir de données scientifiques solides, à partir d'études épidémiologiques et à partir des faits. Il serait très facile de se défiler et de ne pas être un chef de file, parce que nous pourrions blâmer la FDA ou d'autres.
Le Canada est-il un chef de file? Je pense que oui. Je pense que nous avons ce qu'il faut pour aller encore plus loin et rallier beaucoup d'autres pays, comme nous l'avons fait dans le cas de la malade de Creutzfeldt-Jacob. Nous avons été les premiers à élargir cette définition. Nous pouvons être un chef de file dans ce cas-ci.
Être un chef de file à cet égard n'est pas nécessairement mauvais, car cela signifie que l'on tient compte de tout ce qui est actuel, c'est-à-dire pas nécessairement le statu quo du système. Il s'agit de savoir qui va en prendre la responsabilité. L'exploitant ou l'organisme de réglementation? Pour l'instant, c'est l'exploitant. Je ne les blâme pas—ils font un travail remarquable en organisant une conférence—mais le Canada a une énorme possibilité d'être un chef de file à cet égard et il peut montrer la voie au reste du monde pour modifier cette façon archaïque de considérer la collecte de sang.
[Français]
Mme Hélène Scherrer: Madame la présidente, est-ce qu'il serait possible d'avoir une copie d'un questionnaire pour une prochaine séance, pour qu'on puisse voir de quoi a l'air le questionnaire?
[Traduction]
La présidente: Oui, nous avons déjà demandé au greffier de se le procurer pour notre prochaine séance.
Mme Hélène Scherrer: D'accord. Merci.
La présidente: Excusez-moi, nous aurions peut-être dû prévenir nos témoins que nous parlons d'un questionnaire que nous n'avons jamais vu. Vous avez présumé que nous en connaissions plus long sur le sujet que ce n'est le cas.
M. Roger Leclerc: Aucun d'entre vous ne pourra donner du sang.
La présidente: Peut-être bien mais je commençais à me demander si pour donner du sang, il fallait être dans la sécurité d'un cercueil, six pieds sous terre.
M. Brian Huskins: Madame la présidente, si vous obtenez copie du questionnaire, vous voudrez sans doute aussi copie des questions orales que l'on pose lors du processus.
La présidente: Les questions orales, d'accord.
M. Brian Huskins: En effet, il ne s'agit pas uniquement d'un questionnaire. Il y a des affiches sur les murs avec des questions également. Cela dépasse le questionnaire.
La présidente: On dirait qu'ils essaient de refouler les gens plutôt que de les attirer, étant donné toutes ces questions.
M. Ménard sera le dernier à poser des questions.
[Français]
M. Réal Ménard: Je veux d'abord faire un commentaire. En ce moment, Héma-Québec, ou n'importe quelle autre agence, ne pourrait pas décider des critères. Il faut que ça soit très clair que l'organisme de réglementation ne laisse pas le choix aux exploitants de décider du formulaire. Héma-Québec, ou n'importe quel autre détenteur de licence, se remet à une instance de réglementation fédérale qui est le Bureau des produits biologiques et radiopharmaceutiques. C'est une chose incontournable.
C'est pour cela que le changement potentiel que vous appelez de tous vos voeux ne peut venir que d'un changement dans la réglementation du gouvernement fédéral. C'est pour cela qu'on était un peu malheureux quand un activiste de la région de Québec a décidé de faire une fausse déclaration en pensant qu'Héma-Québec, sur ses propres bases, pouvait changer le questionnaire. Je crois qu'il faut un questionnaire, que c'est incontournable. Il faut un questionnaire couplé de tests respectueux des dernières technologies disponibles. Ça, c'est clair dans mon esprit. Et cela ne peut pas porter sur autre chose que le comportement.
• 1250
Maintenant,
comme législateurs, on ne peut pas se mettre à l'abri
de la possibilité qu'il y
ait de fausses déclarations.
C'est vrai au ministère du
Revenu et c'est vrai dans plein d'autres circonstances où
on a à exercer des contrôles. Alors, la question n'est
pas de savoir s'il faut qu'il y ait ou non un questionnaire.
Est-ce de savoir si les gens disent toujours la vérité?
Pour moi, ce n'est pas cela. Je ne
souhaite à personne d'être cocu, et j'espère que ce
n'est pas mon cas non plus, mais l'idée est qu'il
faut qu'on ait les technologies les plus récentes pour
réduire la fenêtre d'opportunité où les tests ne
peuvent pas révéler la présence d'anticorps.
Je ne suis pas d'accord avec mon collègue et ami, M. Charbonneau. L'enjeu pour la communauté gaie, c'est qu'elle a présentement un stigmate qu'aucun autre groupe de la société ne partage. On ne peut pas comparer la question 15 et la question 21. Par exemple, quand on vous demande si, au cours des 12 derniers mois, vous avez donné de l'argent ou des drogues pour avoir une relation sexuelle, cela peut donner une indication sur votre comportement marchand. Ça peut vouloir dire que vous payez pour avoir des drogues et, à la limite, que vous payez pour avoir des rapports sexuels. Mais ça ne dit pas si vous êtes gai, si vous êtes homme, si vous êtes femme, si vous êtes petit. Ce n'est pas ce que ça dit.
Il y a une seule question qui stigmatise et qui porte un préjudice envers la communauté gaie: «Depuis 1977, avez-vous eu une relation sexuelle avec un autre homme, même une seule fois?» Comme législateurs, il faut se demander si on croit que c'est acceptable. Je suis d'accord avec Roger Leclerc quand il dit que ce n'est pas un droit constitutionnel de donner du sang. Il y a plein de gens...
[Traduction]
La présidente: Vous êtes en pleine envolée, vous donnez votre opinion, mais vous êtes censé poser des questions.
[Français]
M. Réal Ménard: Madame la présidente, laissez-moi donc vivre un peu.
[Traduction]
La présidente: Je vous promets qu'avant qu'une décision ne soit prise...
[Français]
M. Réal Ménard: Je pose une question.
[Traduction]
La présidente: ... vous aurez l'occasion de nous donner votre opinion.
[Français]
M. Réal Ménard: Madame la présidente, je pose une question.
[Traduction]
La présidente: Pour l'heure, nous entendons des témoins.
[Français]
M. Réal Ménard: Oui, oui, vous avez raison. Mais comprenez que c'est une question qui me tient à coeur.
Je voudrais demander aux témoins, particulièrement à Roger Leclerc, ceci: est-ce que vous pouvez dire au comité quelle est, à votre connaissance, selon les technologies disponibles, cette fenêtre d'opportunité où on ne peut pas détecter la présence d'anticorps? Est-ce, par exemple, 22 jours, 18 jours, 12 jours? Au meilleur de votre connaissance, qu'est-ce que c'est? Je sais que vous ne vous présentez pas ici avec un point de vue scientifique, mais...
M. Roger Leclerc: Je ne suis pas un expert scientifique et peut-être qu'il y a d'autres personnes à la table qui pourraient répondre.
Il y a aussi ce nouveau test rapide, mais quelle en est l'efficacité? À l'heure actuelle, on peut réduire la fenêtre, mais il reste toujours une fenêtre. Brian serait probablement capable de donner plus de précisions techniques que moi.
[Traduction]
M. Brian Huskins: Je vais vous en dire deux mots. Il ne s'agit pas d'une réponse définitive. Mardi, vous entendrez des gens qui pourront vous donner une réponse définitive.
Par exemple, depuis qu'on est passé au test NAT, au nouveau test GAT, ou au test PCR, quel que soit le nom qu'on lui donne maintenant, on constate dans le cas d'une maladie comme l'hépatite C que la période silencieuse a été réduite considérablement et elle est passée de trois à quatre mois à 14 à 15 jours.
De même pour le VIH, quand on considère le test PCR, l'amplification en chaîne par polymérage, cette période est réduite d'autant—elle est d'environ deux semaines, car on examine le virus même, et non les anticorps. On examine le virus dans votre sang plutôt que les miettes d'anticorps que votre corps met du temps à produire.
Attendez donc la réponse des gens qui peuvent vous éclairer là-dessus, mais je peux vous dire qu'avec le test PCR, les périodes silencieuses sont réduites considérablement, et le test est beaucoup plus précis.
[Français]
M. Réal Ménard: Voyez, madame la présidente, je n'ai pas abusé. Il n'y a plus de questions.
[Traduction]
La présidente: Vous êtes si gentil.
Puisqu'il n'y a pas d'autres questions, je vais ajouter à l'intention de nos témoins qu'en fait, l'un des problèmes auxquels sont confrontés les gens du fédéral est que la plupart des sujets dont les citoyens du Canada veulent s'entretenir avec nous sont de compétence provinciale. On veut nous parler des listes d'attente, des ambulances, des lits d'hôpitaux, etc. Nous avons très peu de responsabilités à cet égard car cela relève des provinces.
Je tiens à vous remercier d'avoir rappelé que les politiciens fédéraux sont essentiellement les chefs de file en matière d'orientation et ont en fait la responsabilité de la réglementation de notre régime. À la vérité, je ne le savais pas avant que vous ne veniez témoigner.
Je tiens également à remercier M. Ménard d'avoir suggéré un sujet qui est de notre compétence, et sur lequel nous pourrons être en mesure de faire quelque chose.
• 1255
Je voudrais remercier les témoins d'être venus nous faire part
de leur très grande expérience, dont je ne me doutais pas. Je
m'attendais à entendre des opinions, mais je ne me rendais pas
compte que vous étiez à ce point au fait de la situation de
l'approvisionnement en sang.
Nous vous sommes reconnaissants d'être venus et d'avoir présenté des mémoires écrits, que le greffier va faire distribuer. Nous aimerions pouvoir vous rappeler si le dossier avance, et si nous en arrivons au point où M. Ménard va vraiment faire un discours convaincant—que nous ne voudrons certainement pas rater—lors du débat.
[Français]
M. Réal Ménard: Laissez-moi donc vivre un peu, madame la présidente.
[Traduction]
La présidente: Pour l'instant, nous ne faisons que réunir des renseignements et nous vous remercions beaucoup de votre temps.
La séance est levée.