INST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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STANDING COMMITTEE ON INDUSTRY, SCIENCE AND TECHNOLOGY
COMITÉ PERMANENT DE L'INDUSTRIE, DES SCIENCES ET DE LA TECHNOLOGIE
TÉMOIGNAGES
[Enregistrement électronique]
Le jeudi 4 octobre 2001
La présidente (Mme Susan Whelan (Essex, Lib.)): Je déclare la séance ouverte.
À l'ordre du jour aujourd'hui, l'examen du projet de loi C-23, Loi modifiant la Loi sur la concurrence et la Loi sur le tribunal de la concurrence.
Nous sommes heureux d'accueillir ici ce matin du ministère de l'Industrie, le commissaire de la concurrence, M. Konrad von Finckenstein. Il est accompagné aujourd'hui de M. Marcel Morin, sous-commissaire adjoint de la concurrence, et de M. François-Bernard Côté, directeur de la Section du droit de la concurrence.
Sans plus tarder donc, monsieur le commissaire, je vous cède la parole.
M. Konrad von Finckenstein (commissaire de la concurrence, Loi sur la concurrence, Bureau de la concurrence, ministère de l'Industrie): Merci beaucoup, madame la présidente. Merci de m'avoir invité à venir vous parler du projet de loi C-23.
[Français]
Ce projet de loi reflète la précieuse contribution que le Comité de l'industrie a faite dans son rapport de juin de l'année dernière et la contribution des projets de loi individuels de certains députés de ce comité. Comme vous le savez, on a tenu des consultations en profondeur sur ce sujet, consultations qui ont été effectuées par le Forum des politiques publiques, qui a tenu 12 tables rondes dans tout le Canada.
Comme vous le savez, la Loi sur la concurrence a pour objet de promouvoir la concurrence et l'efficience du marché canadien afin que les Canadiens et les Canadiennes puissent bénéficier de bas prix, d'un choix de produits et de services de qualité.
Le projet de loi dont vous êtes saisi et très important pour suivre l'évolution de notre économie et donner au Bureau de la concurrence les instruments appropriés pour remplir sa mission.
Essentiellement, le projet de loi comporte quatre modifications d'une grande importance pour nous. Il interdit l'envoi de documentation trompeuse; il facilite l'accès aux éléments de preuve se trouvant à l'étranger; il améliore le déroulement des instances devant le Tribunal de la concurrence; et il donne au Bureau de la concurrence le pouvoir de rendre des ordonnances provisoires.
Je vais traiter ces questions une par une.
En ce qui concerne la documentation trompeuse, le bureau reçoit chaque année des milliers de plaintes au sujet d'une grande variété de sollicitations postales adroitement rédigées qui trompent le lecteur en le portant à croire qu'il a gagné un prix, mais qui exigent du présumé gagnant d'engager des frais pour obtenir le prix en question. Les frais engagés pour participer au concours dépassent invariablement la valeur du prix reçu. En fait, dans la vaste majorité des cas, le prix n'est jamais reçu.
Les Canadiens visés par ces envois sont souvent les membres les plus vulnérables de notre société—surtout les personnes âgées. Dans plusieurs cas, les pertes peuvent atteindre des milliers de dollars. De plus en plus, l'étendue de ces arnaques est internationale. Les arnaqueurs situés dans un pays ciblent les victimes dans un autre pays. Le Canada est en train de se développer la réputation d'être le «paradis» de telles arnaques qui ciblent des Américains, c'est pourquoi il est important d'adopter maintenant ces dispositions. On tente aussi d'y faire une distinction entre les entreprises légitimes et les autres.
Cette modification créerait une infraction en interdisant l'envoi d'avis par tout mode de communication (a) tendant à faire croire à leurs destinataires qu'ils ont gagné et (b) exigeant de ceux-ci qu'ils versent une somme d'argent pour pouvoir toucher le prix. Il n'y aurait pas d'infraction, toutefois, lorsque le destinataire gagne véritablement un prix et que l'avis répondait aux exigences.
Vous aurez comme témoins des représentants du Barreau et d'autres. Ils vous demanderont: Comment va-t-on procéder? Comment cela fonctionnera-t-il? Le bureau est doté de pouvoirs discrétionnaires considérables. Pour ces raisons, je vous ai remis aujourd'hui l'avant-projet des directives afin que vous puissiez voir comment nous allons mettre en oeuvre ces dispositions—et comment nous définissons un prix, comment nous définissons un paiement, etc.—et j'espère que cela étoffera un peu le projet de loi et vous donnera un aperçu de nos intentions. Cela créera également plus de certitude pour le secteur des affaires.
Ce qui m'amène à la coopération internationale.
[Français]
Dans le contexte actuel de l'économie mondiale, il est indispensable, pour faire appliquer les lois relatives à la concurrence, de pouvoir obtenir des éléments de preuve se trouvant à l'étranger. Dans le but d'enquêter avec précision sur des allégations d'abus de position dominante concernant une entreprise multinationale, nous devons avoir accès aux éléments de preuve pertinents qui se trouvent souvent outre frontières. Actuellement, nous n'avons aucun moyen d'obtenir cette preuve.
Les modifications proposées relatives à l'entraide juridique faciliteront la collecte des preuves au nom du Canada concernant les affaires civiles en matière de concurrence, comme l'abus de position dominante et les fusionnements. Ceci fera en sorte que les décisions de mise en application relatives à la concurrence nationale soient prises au Canada.
La proposition établit les normes minimales auxquelles devront satisfaire les accords, en reprenant essentiellement le système actuellement appliqué aux affaires criminelles en vertu de la Loi sur l'entraide juridique en matière criminelle.
[Traduction]
Essentiellement, il s'agit de pouvoir faire au civil ce que nous pouvons faire au criminel: obtenir des éléments de preuve à l'étranger afin de prendre les décisions ici au Canada. Ici encore, afin de bien montrer ce que nous avons en tête, j'ai déposé un traité modèle. La loi permettrait au ministre de la Justice de conclure des traités avec des pays qui offrent des garanties suffisantes. Aux termes de ces traités, il y aurait échange d'information.
La nouvelle partie III, qui permet de conclure des traités, et le modèle du traité rendent très clair le fait qu'une telle autorité ne puisse pas être utilisée au nom d'un autre pays sans d'importantes garanties. Le ministre de la Justice doit être convaincu que ce pays a essentiellement le même régime en place pour assurer le caractère confidentiel de l'information que nous, et deux juges doivent émettre des ordonnances—le premier pour réunir les éléments de preuve et le second pour que ceux-ci soient remis à un autre pays. Donc clairement, nous avons inclus des garanties pour protéger nos entreprises.
• 0915
Permettez-moi de vous prévenir que lorsque les représentants
du Barreau canadien comparaîtront ici, ils vous diront probablement
qu'il faut également modifier l'article 29 qui porte sur les
renseignements confidentiels.
À notre avis, ce n'est pas le cas. La partie III, telle que rédigée, constitue un code autonome qui vise l'obtention d'éléments de preuve à l'étranger et comporte des garanties inhérentes suffisantes. Nul besoin de toucher à l'article 29 qui à notre avis est la loi en vigueur et n'a pas besoin de modification.
Un dernier point à ce sujet. Il n'y a rien dans les nouvelles dispositions proposées qui autorise le bureau à envoyer à l'étranger des renseignements déjà en sa possession pour qu'ils soient utilisés comme preuve, qu'ils aient été obtenus de façon volontaire ou obligatoire.
Le point suivant porte sur l'amélioration des procédures devant le tribunal. Le Tribunal de la concurrence s'est avéré très coûteux en temps et en argent et par conséquent n'est pas très utile.
Les modifications proposées permettraient au tribunal, tout d'abord d'entendre des renvois sur des questions portant sur un point particulier d'une affaire ou sur une affaire particulière, au lieu de procéder à l'instruction complète de l'affaire.
Deuxièmement, le tribunal obtiendrait le pouvoir de déterminer des frais de façon à réprimer les procédures dénuées de tout intérêt et empêcher les actions frivoles et les manèges.
Troisièmement, le tribunal pourrait rendre des décisions par voie de procédure sommaire afin de statuer rapidement lorsqu'il estime que la demande ou la défense n'est pas véritablement fondée.
Je pense qu'il nous faut ces trois modifications qui permettront un meilleur emploi du temps du tribunal et permettront à celui-ci de mieux contrôler ses procédures.
Le dernier point porte sur les ordonnances provisoires. Il est essentiel, dans une économie où tout bouge rapidement, de pouvoir agir promptement afin d'empêcher qu'un préjudice irréparable ne soit causé. Actuellement, le tribunal ne peut pas rendre d'ordonnance provisoire dans la plupart des circonstances, à moins que le bureau ne lui en ait fait demande. Toutefois, il nous est impossible de présenter cette demande tant que nous n'avons pas réuni des éléments de preuve, ce qui prend du temps. Dans l'intervalle, très souvent, la victime du comportement anticoncurrentiel risque de ne plus être en affaires.
Les modifications proposées comprennent donc des dispositions qui permettraient au tribunal de prononcer des ordonnances provisoires dans trois cas: s'il estime qu'en leur absence la concurrence subirait un préjudice irréparable; si un concurrent risque d'être éliminé; ou si la personne risque une perte substantielle de part de marché et de revenu ou tout autre préjudice auquel le tribunal ne pourrait plus tard remédier.
Le commissaire détient ces mêmes pouvoirs actuellement en ce qui concerne les sociétés aériennes. Dans le cas qui nous intéresse, nous présenterions une demande au tribunal, qui en se fondant sur les mêmes critères, pourrait émettre une ordonnance temporaire pour nous donner le temps de faire enquête. Ces ordonnances seraient provisoires et l'ordonnance finale évidemment ne pourrait être rendue qu'après une procédure complète et une décision du tribunal.
[Français]
Il y a d'autres modifications à la loi, que l'on appelle des modifications administratives.
Je voudrais faire mention brièvement des diverses modifications incluses dans le projet de loi. Elles comprennent les révisions proposées au processus d'ordonnance par consentement, aux dispositions concernant les ordonnances temporaires relativement aux pratiques commerciales trompeuses et aux avis consultatifs liant le commissaire.
Bien que ces modifications soient essentiellement de nature administrative, elles seraient de grande valeur pour assurer le bon fonctionnement de la loi.
[Traduction]
Pour nous, ces modifications administratives sont d'une importance considérable pour faciliter le travail quotidien du bureau.
Maintenant, permettez-moi de dire quelques mots au sujet de quelque chose qui n'apparaît pas dans le projet de loi mais dont vous êtes tout de même saisis, l'accès privé.
Vous vous rappellerez que dans le projet de loi C-472 il était proposé d'autoriser l'accès des parties privées au Tribunal de la concurrence dans des affaires refus de vente, de ventes liées, de limitations de marché et des pratiques d'exclusivité—comportements susceptibles d'examen en vertu des articles 75 et 77 de la Loi sur la concurrence.
Les litiges de ce genre portent essentiellement sur des questions privées entre vendeurs et acheteurs. La proposition envisagée dans le projet de loi C-472 aurait permis de telles demandes seulement avec l'autorisation du tribunal afin d'éviter tout litige stratégique. Le projet de loi prévoit l'émission d'ordonnances d'interdiction seulement, de sorte qu'il n'y aurait pas de dommages-intérêts ni d'incitatifs à intenter des poursuites pour obtenir de l'argent. Enfin, le tribunal aura le pouvoir d'accorder les dépens de façon à maintenir l'ordre nécessaire et de réprimer les procédures frivoles.
• 0920
En renvoyant le projet de loi C-23 au comité avant la deuxième
lecture, le ministre voulait donner au comité l'occasion d'étudier
l'accès par les parties privées et de voir s'il peut ou non y avoir
consensus.
Vous vous rappellerez que les consultations menées par le Forum des politiques publiques avaient révélé des divergences d'opinions entre les intervenants au sujet de cette proposition, mais le forum avait néanmoins conclu qu'il serait possible de parvenir à un consensus si des changements étaient apportés à la proposition.
D'après ce que je peux voir, les partisans de l'accès privé soutiennent que cette mesure permettrait d'apporter une solution à certaines des lacunes du système et font valoir les trois points suivants.
D'abord, on croit qu'en raison des ressources limitées du bureau, des affaires légitimes ne sont pas portées devant le tribunal. Il se pourrait, par exemple, que le bureau accorde une faible priorité aux affaires de portée très locale ou dont les effets sur l'économie sont minimes. Toutefois, l'accès privé dans de tels cas pourrait compléter les mesures publiques d'application de la loi.
Deuxièmement, selon le régime actuel, les demandeurs ne disposent d'aucun autre recours si le bureau n'accorde pas de priorité élevée à une affaire ou s'il considère qu'il n'y a pas lieu d'aller plus loin. Les partisans de l'accès privé croient que les personnes morales et physiques devraient avoir la possibilité d'intenter leurs propres poursuites dans de tels cas, surtout puisque très souvent, s'ils ne trouvent pas de solution au problème, sont acculés à la faillite.
Et troisièmement, il existe peu de décisions rendues en matière de pratiques susceptibles d'examen et certains soutiennent que l'accès privé enrichirait la jurisprudence. C'est ce qui s'est passé en Australie où la plupart des lois, dans ce domaine, découlent d'affaires privées. Cela permettrait ensuite au monde des affaires de mieux comprendre les principes juridiques applicables.
Évidemment, de solides arguments ont été avancés contre l'accès privé. Certains croient fermement que l'accès privé pourrait être utilisé à des fins stratégiques. Par exemple, une entreprise de grande envergure disposant de ressources abondantes pourrait intenter une ou plusieurs actions contre des entreprises plus petites aux ressources limitées. Il serait également possible que les entreprises, quelle que soit leur taille, entament ou menacent d'entamer des poursuites dans l'espoir de décourager une concurrence vigoureuse. Cela pourrait faire partie d'une stratégie de négociation dont le but est de harceler un rival.
Deuxièmement, d'autres font valoir que les garanties proposées pour éviter l'utilisation de poursuites à des fins stratégiques seront inefficaces et qu'il est douteux que même les garanties les plus strictes soient efficaces; une fois la porte ouverte à l'accès privé, quelles que soient les garanties, des poursuites stratégiques suivront.
Troisièmement, c'est vrai qu'il importe d'établir une jurisprudence et que celle-ci serait utile, mais son enrichissement ne représente pas une raison suffisante pour exposer les entreprises canadiennes aux coûts et aux perturbations qui suivraient l'augmentation de litiges privés.
Le bureau continue de croire qu'une forme quelconque d'accès privé est nécessaire afin de fournir un complément aux dispositions de la Loi sur la concurrence. C'est à votre comité de voir si le moment est opportun et quelles modifications il faudrait. Comme l'a déclaré le ministre dans une lettre à la présidence de ce comité, un vaste consensus lorsque l'on veut modifier considérablement une loi cadre, telle que la Loi sur la concurrence.
Je m'attends à ce que le comité entende tous les sons de cloche et soit donc ainsi bien placé pour déterminer, en se basant sur les mémoires reçus, si le consensus nécessaire pour adopter l'accès privé, avec des garanties importantes, telles que celles examinées par le processus FPP, a été atteint.
Maintenant permettez-moi, afin de bien faire le tour de la question, d'aborder deux autres sujets.
[Français]
Le processus de consultation incluait aussi des questions reliées aux dispositions de la Loi sur la concurrence relatives au complot et à l'abus de position dominante dans le secteur de l'alimentation. Les participants à la consultation avaient exprimé le souhait que les dispositions relatives au complot soient modernisées, mais estimaient en général qu'il fallait approfondir le débat, l'analyse et la consultation sur cette importante question.
Pour faciliter le débat, le bureau a engagé trois experts renommés pour faire des études sur ce sujet. Rob Russell, de Borden Ladner Gervais à Toronto, Al Gourley, de Macleod Dixon à Calgary, et Yves Bériault, de McCarthy Tétrault à Montréal, ont fait des études qui sont maintenant sur notre site web. On aura une conférence organisée par le secteur privé le 12 octobre, qui sera consacrée exclusivement à la réforme de l'article 45. À la suite de la conférence, le bureau fera des consultations en profondeur auprès des personnes concernées, au cours de l'hiver et au printemps, sur la réforme de l'article 45.
• 0925
Relativement au possible abus de position
dominante dans le secteur de l'alimentation, le bureau a
demandé trois études pour
faciliter le débat.
Le Dr Stephen Ferris, de l'Université
Carleton, le Dr Guofu Tan, de
l'Université de la Colombie-Britannique, et le Dr
Jean-François Wen, de l'Université de Calgary, ont
fait des études que vous trouverez sur notre site web.
En se fondant sur ces études, le bureau est en train de
préparer des lignes directrices pour le secteur
de l'alimentation qui seront bientôt publiées.
[Traduction]
J'espère qu'en abordant ainsi l'article 45 et les situations de position dominante dans le secteur de l'alimentation, que nous serons en mesure de faire avancer la chose. Toutefois, ce n'est pas à l'ordre du jour aujourd'hui et très franchement, nous ne sommes pas prêts, et c'est pourquoi nous avons commandé ces études. Nous allons les publier, en espérant faire avancer les connaissances dans le domaine.
L'année dernière, j'ai comparu devant le comité au sujet du rapport VanDuzer. J'ai aussi lu votre rapport provisoire, dans lequel vous avez fait plusieurs suggestions, et nous y avons donné suite. Premièrement, nous avons suivi vos conseils et publié des lignes directrices au sujet de l'abus de position dominante, qui sont maintenant en vigueur. Ces lignes directrices ont été bien accueillies. Deuxièmement, nous sommes en train de préparer des lignes directrices sur les prix abusivement bas ou sur la réforme de la politique actuelle.
Madame la présidente, je suis désolé d'avoir pris tellement de temps mais je tenais à vous donner un aperçu de notre position par rapport à toutes les questions soulevées au Forum des politiques publiques. Nous croyons que le projet de loi C-23 arrive à point nommé. Il prévoit des mesures concrètes afin de traiter du problème des arnaques sous forme de concours et nous donne les outils nécessaires pour obtenir des éléments de preuve situés à l'étranger. Il va nous permettre d'améliorer le processus du Tribunal de la concurrence et autorisera le tribunal à émettre des ordonnances de cesser et de s'abstenir. Enfin, le projet de loi C-23 permettra de doter le Canada d'une loi sur la concurrence moderne et adaptée qui encourage une concurrence saine et vigoureuse pour toute la population canadienne.
Merci beaucoup et je serai heureux de répondre à vos questions.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur le commissaire.
Nous allons maintenant vous poser des questions. Nous allons alterner, et je donne la parole à M. Rajotte en premier.
Monsieur Rajotte, allez-y.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, AC): Merci, madame la présidente.
Monsieur le commissaire, je vous remercie de votre exposé ce matin. Je ne veux pas vous poser une question au sujet de l'accès privé. Il est évident que vous préconisez l'accès privé ici dans votre déclaration. Si vous êtes favorable à un genre d'accès privé, c'est sans doute parce que vous croyez qu'il existe des lacunes dans notre système actuel. J'aimerais donc vous poser quelques questions de base en ce qui concerne le système actuel. Vous êtes saisis de combien de cas chaque année? Combien de cas font l'objet d'un examen? Combien de cas sont ensuite renvoyés au Tribunal de la concurrence? J'aimerais également vous demander s'il existe d'autres façons de régler la question que vous avez soulevée en ce qui concerne les ressources limitées et ainsi de suite. J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Konrad von Finckenstein: Le projet de loi fait ressortir la nécessité des dispositions complémentaires dans la Loi sur la concurrence pour permettre un certain accès privé. Comme vous le savez, il est difficile de mettre en application plusieurs dispositions parce qu'il faut faire une distinction entre des agissements anticoncurrentiels et une concurrence vigoureuse. On ne peut pas toujours les départager clairement et, en effet, cela peut varier d'un cas à l'autre. Il faut examiner les faits de chaque cas.
À l'heure actuelle, le système fonctionne comme suit: si une entreprise croit qu'elle est victime d'agissements anticoncurrentiels—un problème qui relève des procédures au civil—, c'est nous qui sommes saisis du cas. L'entreprise dépose une pétition nous demandant de faire enquête. Nous faisons enquête et si on trouve une preuve adéquate de tels agissements, nous essayons de régler le problème—normalement sans entamer des poursuites judiciaires—en convainquant les gens de changer de comportement. Si cela ne se fait pas, nous nous adressons au tribunal pour obtenir une ordonnance à l'intention de cette entreprise pour la faire cesser et s'abstenir.
Nous prenons rarement une telle mesure. C'est un domaine difficile du droit, surtout lorsqu'on tient compte de nos ressources limitées. De plus, dans notre rôle d'organisme public, nous nous penchons sur des questions d'une plus grande portée ayant une incidence économique sur tout le pays ou toute la région, etc. Ces questions comprennent le refus concerté de vente, la vente liée, etc. En général, il s'agit de problèmes entre deux entreprises, des problèmes qui existent le plus souvent entre un fournisseur et un distributeur, et les problèmes sont essentiellement de nature privée. Les cas ayant une incidence économique importante ou les cas de nature juridique compliquée justifiant le renvoi à un tribunal sont plutôt rares. Nous réglons un bon nombre de ces problèmes par l'entremise de ce qu'on appelle les autres instruments de règlement. Mais certaines entreprises croient sans doute que nous n'intervenons pas assez. Je ne vois pas pourquoi on ne devrait pas permettre à ces entreprises d'essayer de convaincre un tribunal, en se servant de leurs propres moyens, de la nécessité d'émettre une ordonnance.
• 0930
On espère que les garanties qui ont été préconisées, qui se
trouvent dans le projet de loi C-472 et qui ont fait l'objet de
discussions devant le FPP, telles que l'aval du tribunal, aucun
dommage pécuniaire—une injonction suffit—et les frais
judiciaires, empêcheraient toute utilisation de cette mesure pour
des fins stratégiques. Naturellement, il est impossible d'empêcher
le recours aux poursuites stratégiques et il y aura toujours un
certain risque. Mais dans l'ensemble, nous estimons que cette
mesure complétera les dispositions. Comme le ministre ainsi que son
prédécesseur l'ont bien souligné, il s'agit d'une loi cadre. Le
ministre ne veut pas procéder à moins d'obtenir un consensus
général quant à ces questions et à moins de s'assurer que ces
mesures sont cohérentes sur le plan économique. Il a
essentiellement demandé à ce comité de se pencher sur cette
question.
M. James Rajotte: En ce qui concerne le nombre de cas dont vous êtes saisis maintenant, quel pourcentage est réglé par l'entremise de ce que vous appelez les autres instruments de règlement? Combien de cas sont renvoyés au Tribunal de la concurrence?
M. Konrad von Finckenstein: Je suis désolé mais je n'ai pas les chiffres sous les yeux. Je peux certainement les transmettre à la présidente qui peut les distribuer aux membres du comité.
Il n'y a pas plus de un ou deux litiges au civil par année. Cela vous donne une idée de l'ordre de grandeur. Quant aux autres instruments de règlement, je n'ai pas les chiffres exacts ici. C'est un nombre important. La plupart des cas sont réglés de cette façon sans que l'on s'adresse au tribunal.
M. James Rajotte: En ce qui concerne l'utilisation stratégique de l'accès privé, vous venez de dire qu'on ne pourrait jamais l'empêcher complètement. Comment rassurer les entreprises qui sont vraiment préoccupées par cette question?
M. Konrad von Finckenstein: Eh bien, on peut toujours entamer des poursuites judiciaires même si on ne s'adresse pas au Tribunal de la concurrence. L'important, c'est d'être sûr de son coup. Nous vous disions que si la loi exigeait l'aval du tribunal, on doit d'abord convaincre le tribunal que l'on a un cas défendable et, deuxièmement, l'incitatif de poursuivre est éliminé parce que vous n'allez pas recevoir de l'argent—tout ce que l'on peut obtenir, c'est une injonction—et, enfin, il est même possible que vous aurez à payer vos propres frais judiciaires ainsi que les frais de l'autre partie si vous n'obtenez pas gain de cause. Ce processus serait doté d'une mesure de dissuasion adéquate qui empêcherait tout cas frivole.
Ceux qui s'opposent à l'accès privé pensent toujours qu'une telle mesure nous mène au modèle américain. La situation aux États-Unis est complètement différente. Premièrement, vous n'avez pas à payer les frais judiciaires; deuxièmement, le modèle prévoit le recours collectif et, troisièmement, il prévoit également les triples dommages. On ne veut pas de telles mesures chez nous. Notre approche ne ressemble pas du tout à l'approche américaine. Il s'agit d'une approche très modeste et limitée par rapport à l'action stratégique, que vous ne pouvez pas empêcher. À notre avis, il s'agit d'une approche qui sera très limitée.
La présidente: Merci.
Merci beaucoup, monsieur Rajotte.
Monsieur McTeague, allez-y.
M. Dan McTeague (Pickering—Ajax—Uxbridge, Lib.): Merci, madame la présidente.
J'aimerais dire bonjour à monsieur le commissaire et à son personnel. Nous examinons cette question de la modernisation de la Loi sur la concurrence depuis plusieurs mois. Nous avons sous les yeux les changements qui s'imposent et qui sont le fruit de nombreuses années de travail à décortiquer la question.
Monsieur le commissaire, je veux m'assurer que le projet de loi tient compte des intérêts des consommateurs et de la petite entreprise qui représentent l'essentiel de ceux que nous, les députés, sommes appelés à défendre. Pour cette raison, je comprends pourquoi la question de l'accès privé peut soulever des inquiétudes. Comme nous l'avons vu au FPP, le même groupe de personnes, organisé par un ou deux groupes, peut recycler ses membres cinq ou six fois et donner l'impression qu'un consensus général est impossible.
J'ai pour vous, monsieur le commissaire, une question à propos de ce qui a été dit dans le contexte global. Lors d'une conférence récente sur la politique de la concurrence tenue le 21 juin, les personnes suivantes ont fait des observations en ce qui concerne le droit à l'accès privé.
Pour sa part, l'Australie a
-
[...] donné à ses citoyens le droit d'intenter des poursuites en
matière de concurrence. «Cette mesure était relativement importante
à une époque où le gouvernement réduisait les budgets des
organismes de réglementation publics.» «Le nombre de poursuites
privées tend ensuite à augmenter.»
C'est ce qu'a dit M. Allan Fels, président de la Australian Competition and Consumer Commission.
Voici une deuxième citation:
-
«Je ne vois pas pourquoi la politique publique limiterait l'accès
au tribunal au seul commissaire [...]»
• 0935
C'est ce qu'a dit quelqu'un que vous connaissez peut-être,
M. Howard Wetston, l'un de vos prédécesseurs, qui est actuellement
vice-président de la Commission des valeurs mobilières de
l'Ontario, poste auquel l'a nommé le gouvernement provincial.
Ma dernière citation est tirée des propos de M. Frédéric Jenny, vice-président du Conseil de la concurrence en France:
-
«Auparavant, les sociétés pouvaient être victimes de la Loi sur la
concurrence parce que les organismes de réglementation pouvaient
punir leur mauvaise conduite. À l'heure actuelle, les sociétés
peuvent se prévaloir de la Loi sur la concurrence pour se défendre
des abus commis par d'autres».
Monsieur le commissaire, j'ai trouvé très intéressant de vous entendre dire que le bureau croit encore qu'il est nécessaire d'autoriser un certain accès privé pour compléter les dispositions de la Loi sur la concurrence. Compte tenu des dispositions qui ont été retirées dans mon projet de loi, le projet de loi C-472, au sujet des ordonnances provisoires et des mécanismes de sauvegarde dont vous avez parlé, croyez-vous maintenant que les inquiétudes mentionnées par des particuliers, que ces poursuites seraient en fait des litiges stratégiques, sont bien fondées ou croyez-vous plutôt que la proposition qui nous a été soumise garantirait que les poursuites devant les tribunaux seraient entamées de bonne foi et ne constitueraient pas des litiges frivoles, vexatoires et stratégiques?
M. Konrad von Finckenstein: Pour commencer, aucune proposition ne vous a été soumise. La proposition dont je parlais a été présentée au FPP. Je tenais à apporter cette correction car vous avez dit «la proposition qui nous a été soumise».
M. Dan McTeague: Je voulais parler des ordonnances provisoires et des décisions sommaires dont vous avez parlé.
M. Konrad von Finckenstein: Oh, d'accord. Désolé. C'est exact.
Ce que j'ai dit dans ma déclaration, au sujet de l'accès privé, c'est qu'il faut compléter les dispositions à ce sujet. Le bureau a fait un examen très complet de cette question. On peut trouver deux études sur notre site Web. Dans l'une, nous faisons une comparaison internationale de ce qui a été fait en matière d'accès privé dans d'autres pays et des effets que cela a eus. L'autre étude examine les coûts et les avantages des litiges entamés par le bureau et montre combien il en coûte pour préparer ces litiges.
Comme je l'ai dit, nous estimons qu'il faut compléter tout cela. La Loi sur la concurrence permet déjà certains litiges privés. Si l'une des dispositions de la Loi sur la concurrence est enfreinte, la victime de l'infraction peut maintenant de son propre chef intenter des poursuites et réclamer des dommages-intérêts. Et cela se fait. Par exemple, il y a eu des condamnations importantes pour complot dans le domaine des vitamines. On constate maintenant que de nombreuses sociétés qui ont acheté des vitamines de ces entreprises entament des poursuites et réclament des dommages- intérêts parce qu'elles ont été victimes de ce complet.
Si une société reçoit une ordonnance du commissaire lui interdisant certaines pratiques, une ordonnance d'interdiction, et que cette entreprise viole l'ordonnance, la victime de l'infraction peut avoir recours au tribunal et demander des dommages-intérêts. Ces dispositions existent déjà dans la loi. Cela n'est pas nouveau. Les sociétés ont déjà certains recours grâce à l'article 36 proposé. Ce que nous souhaitons, c'est permettre le recours au tribunal dans les quatre cas que j'ai mentionnés. Comme vous l'avez dit, «d'autres autorités en matière de concurrence estiment que cela arrive à point nommé.»
Notre opinion à ce sujet est qu'il s'agit là de questions foncièrement privées entre les acheteurs et les vendeurs—le refus de transaction, les ventes liées, la limitation de marché et les pratiques d'exclusivité. Dans la plupart des cas, les victimes de ces pratiques sont des petites ou moyennes entreprises. Elles devraient avoir la possibilité de se défendre si elles croient que ces pratiques nuisent gravement à leur chiffre d'affaires et que notre bureau n'est pas d'accord ou qu'il estime que l'affaire n'est pas suffisamment importante. Voilà en gros notre position.
M. Dan McTeague: Monsieur le commissaire, certains d'entre nous trouvent intéressant que vous disiez, vous qui êtes le seul à pouvoir renvoyer ces affaires devant les tribunaux, qu'il pourrait y avoir d'autres moyens ou d'autres motifs d'adopter cette mesure, compte tenu des moyens de sauvegarde qui pourraient être proposés ou qui se trouvent déjà dans le projet de loi C-23—des moyens de sauvegarde qui pourraient également se retrouver dans le projet de loi C-472.
Je me demande si vous croyez aussi... Un certain nombre d'études laissent entendre que les entreprises du secteur privé sont les mieux en mesure de détecter les pratiques déloyales qui peuvent avoir des répercussions immédiates sur leur marché. Et compte tenu du temps qu'il faut pour que certains dossiers aboutissent devant le tribunal—par exemple, il a fallu une année complète dans le cas de WestJet—, ne serait-il pas possible à certaines entreprises de faire instruire leurs affaires plus tôt? N'est-il pas exact que bien des Canadiens pourraient être privés de justice économique sans accès privé, dans les cas que votre bureau estime ne pas être suffisamment importants pour justifier un recours?
M. Konrad von Finckenstein: Non, je ne suis pas d'accord avec vous. Comme je l'ai dit, nous croyons qu'il est nécessaire d'autoriser l'accès privé pour compléter le système. Ce sera à vous de décider s'il faut le faire maintenant et s'il existe pour cela un consensus. Ces litiges ne sont pas faciles à préparer et à réaliser et ils nécessitent beaucoup de temps car, comme je l'ai dit, l'une des décisions les plus importantes que nous devons prendre est de savoir quelle est la différence entre une pratique déloyale et une concurrence vigoureuse.
• 0940
Je ne peux certes pas vous dire si les entreprises privées
seront capables de préparer leur dossier plus rapidement ou non. Je
sais simplement qu'il nous faut à nous beaucoup de temps car nous
sommes conscients de l'importance de la décision. Si nous entamons
une procédure contre une société pour abus de position dominante,
cela peut nuire à la réputation de cette entreprise, à la valeur de
ses actions et à ses relations avec ses entrepreneurs, entre
autres. Nous ne le faisons donc pas à la légère. Nous ne le faisons
que dans les cas où cela est nécessaire et où il faut rétablir la
justice économique.
Il faudrait éviter que les sociétés privées usent également de ces pouvoirs à mauvais escient, qu'elles puissent nuire aux autres ou les utiliser à des fins stratégiques. C'est ce qui explique les nombreux mécanismes de sauvegarde qui ont été proposés. Ces mécanismes sont-ils suffisants? C'est à vous de décider. À notre avis, ils permettront d'éviter des litiges stratégiques dans la plupart des cas. Mais on ne pourra jamais les empêcher dans tous les cas.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur McTeague.
[Français]
Monsieur Bergeron, s'il vous plaît.
M. Stéphane Bergeron (Verchères—Les-Patriotes, BQ): Merci, madame la présidente.
Monsieur von Finckenstein, monsieur Morin, monsieur Côté, soyez les bienvenus au comité.
C'est la première occasion que j'ai d'échanger avec vous dans le cadre des travaux du Comité de l'industrie. Je suis un nouveau membre de ce comité et je suis donc encore en train de me familiariser avec les très nombreux dossiers qui relèvent de ce comité, mais j'ai eu l'occasion de voir à quel point le travail risque d'être passionnant au cours des prochaines semaines.
J'ai deux questions, l'une touchant des dispositions prévues dans le projet de loi C-23 et l'autre ne touchant pas, malheureusement, des dispositions prévues dans le projet de loi C-23, mais peut-être le comité voudra-t-il ajouter certaines dispositions. J'aimerais vous entendre là-dessus.
D'abord, concernant les dispositions touchant l'élimination des pratiques trompeuses, je m'interrogeais par rapport à l'interdiction d'envoyer des publicités faisant état de prix gagnés et ainsi de suite. Je me demandais si vous aviez fait les vérifications nécessaires pour voir en quoi cette loi proposée aurait pour effet, ou bien de compléter, ou bien de court-circuiter des lois déjà en vigueur dans certaines provinces, notamment au Québec, où il y a la Loi sur la protection du consommateur et la Loi sur les loteries et courses, qui peuvent avoir une incidence à ce niveau-là.
Mon autre question touche une situation qui a mis en lumière l'importance potentielle du Bureau de la concurrence. C'est la question de l'augmentation effrénée des prix de l'essence ou des fluctuations des prix de l'essence ces derniers mois ou ces dernières semaines.
Ma collègue de Jonquière, notamment, vous a fait parvenir le 10 juillet dernier et le 23 janvier, un peu plus tôt dans l'année, des plaintes concernant les prix très élevés dans la région du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Il semble que vous ne soyez pas en mesure, en vertu des dispositions actuelles de la loi, de faire enquête tant qu'il n'y a pas de preuves écrites de collusion de la part des plaignants. Cela, c'est en vertu des dispositions de l'article 25, où on a une application très large du terme «indûment».
D'une part, verriez-vous d'un bon oeil un resserrement de la loi vous permettant d'avoir les coudées plus franches pour les enquêtes à ce niveau? D'autre part, comment verriez-vous, en termes plus précis, un resserrement de la loi? Comment nous suggéreriez-vous de formuler éventuellement un tel resserrement?
M. Konrad von Finckenstein: Merci. Je vais demander à mon avocat général de répondre à la question de la constitutionnalité de ce que nous faisons. En bref, on n'a pas de problèmes. Les rôles de la province et du fédéral sont bien établis. Me Côté va vous expliquer cela en profondeur.
M. François-Bernard Côté (directeur, Section du droit de la concurrence, Services juridiques ministériels, ministère de l'Industrie): Monsieur Bergeron, j'aimerais vous dire qu'en ce qui concerne les relations entre le fédéral et le provincial en cette matière, il s'agit de savoir à quel mal on s'attaque. Qu'est-ce que l'on veut corriger avec la loi ou le projet de loi?
• 0945
La loi du Québec vise la protection du
consommateur. Il y a toutes sortes de mesures en
vigueur pour
protéger le consommateur. En ce qui nous concerne, ce
sont des activités qui comportent des représentations
frauduleuses, des représentations trompeuses qui ont à
la fois un effet sur le consommateur qui, en bout de
ligne,
est victime de fraude par ce type de
comportement, et sur le reste
de la concurrence. Si vous êtes un concurrent honnête et
que vous n'attirez pas vos clients par la fraude et
tout ça, vous êtes vous-même victime parce qu'un de
vos concurrents agit de façon illégale. La loi
fédérale et la loi provinciale, à mon avis, sont loin de
s'opposer. Elles se combinent pour
protéger le public en général.
Le dernier aspect, et vous le noterez peut-être dans le discours du commissaire, c'est qu'en pratique, il y a beaucoup de ces activités qui sont de nature internationale. Donc, à ce niveau-là, cela relève peut-être plus du domaine d'expertise du gouvernement fédéral que d'un gouvernement provincial, étant donné la nature de nos activités avec les pays étrangers.
J'espère que ça répond à votre question.
M. Stéphane Bergeron: Pour reprendre la question que je vous posais, diriez-vous que la loi qui nous est proposée serait complémentaire, qu'elle aurait pour effet d'apporter un complément aux lois déjà en vigueur dans certaines provinces, dont le Québec qui, comme je le disais plus tôt, a sa Loi sur la protection du consommateur et sa Loi sur les loteries et courses?
M. François-Bernard Côté: C'est absolument ça. On ne s'attaque pas au même mal. Peut-être que l'Office de la protection du consommateur et la régie vont s'attaquer à ce problème par la bande, mais on l'attaque à différents endroits.
M. Konrad von Finckenstein: Pour ce qui est du prix de l'essence, vous êtes chanceux car M. Morin vient de la section criminelle et connaît bien ces dossiers.
Marcel.
M. Marcel Morin (sous-commissaire adjoint de la concurrence par intérim, Division des affaires législatives, Direction générale de la politique de la concurrence, ministère de l'Industrie): Je veux souligner une chose par rapport à ce que François a dit.
Lorsque le comité a examiné le projet de loi C-20, qui portait sur la Loi sur la concurrence, il y a trois ans, certains témoins avaient mentionné que certaines provinces n'étaient pas aussi ferrées que le Québec au niveau de la Loi sur la protection du consommateur. Des dispositions comme celles-ci vont contribuer à renforcer les pouvoirs de certaines provinces qui ont ont moins.
Quant aux dossiers de Mme Girard-Bujold, le bureau a reçu des documents à ce sujet-là. Les dossiers ont été examinés.
Quant à la cueillette de preuves, il ne s'agit pas uniquement de la preuve écrite. Ça comprend aussi de l'information orale. Il ne faut pas nécessairement que la preuve soit écrite. Au niveau des complots, il est vrai qu'il est parfois difficile d'obtenir la preuve. C'est pour ça qu'on précise toujours que les personnes qui détiennent de l'information doivent nous consulter au bureau. Le bureau examine toujours ces dossiers de façon très sérieuse.
Pour ce qui est de la motion de Mme Girard-Bujold concernant le retrait du terme «indu» de la Loi sur la concurrence, un des problèmes que l'on perçoit, c'est que «indu» est un terme qui existe dans la loi depuis plusieurs années. Avant de l'enlever comme ça, il faudrait examiner le sujet afin de s'assurer que l'on ne crée pas de préjudice en l'enlevant.
À titre d'exemple, le terme «indu» signifie un impact sur la concurrence de nature importante, et on en a beaucoup débattu dans le cadre de nombreuses causes devant les tribunaux. Avant d'enlever le terme «indu» comme ça, il faudrait vraiment évaluer toutes les conséquences de cela parce qu'il y a plusieurs ententes qui existent actuellement. À titre d'exemple, plusieurs contrats de franchise et certaines alliances stratégiques seraient maintenant touchés par l'article 45. On toucherait donc à des ententes qui ne sont pas en soi anticoncurrentielles et qui pourraient maintenant être visées par l'article 45 si on enlevait subitement le terme «indu».
Dans le contexte, comme le commissaire vient tout juste de le mentionner dans son énoncé, et avec les études qu'on fait actuellement avec des experts sur l'article 45, un des régimes que ces personnes-là envisagent, c'est un régime criminel pour les vraies infractions de price fixing, de complot au niveau de la fixation des prix et du partage des marchés.
• 0950
Quant aux autres ententes
qui pourraient, dans certains cas, comme celui des alliances
stratégiques, avoir un effet sur la
concurrence, on aurait un régime civil qui pourrait
les examiner. Dans le cadre de cette étude-là, la
question du caractère indu sera discutée. Ce débat-là va
nous permettre d'éclaircir la question et
possiblement d'envisager des modifications,
si c'est nécessaire, dans le futur.
[Traduction]
La présidente: Merci.
Monsieur Bergeron, vous aurez votre tour de nouveau plus tard.
Monsieur Lastewka, à vous.
M. Walt Lastewka (St. Catharines, Lib.): Monsieur le commissaire, vous avez discuté avec M. McTeague des avantages et des inconvénients de l'accès privé. Mais dans votre rapport, vous avez mentionné que les partisans de l'accès privé font valoir que le bureau a des ressources limitées et qu'il n'a pas pu s'occuper de certains dossiers. Vous avez d'ailleurs dit vous-mêmes dans votre témoignage que vos ressources sont limitées. Dans votre déclaration, vous avez semblé dire qu'à cause de ces ressources limitées, votre bureau ne pouvait pas s'occuper de certains dossiers. Je ne suis pas certain de ce que vous entendiez par cela.
M. Konrad von Finckenstein: Comme tous les organismes d'exécution des lois, notre bureau a un budget limité. Il se commet plus d'infractions que nous ne pouvons en corriger et nous devons donc déterminer un ordre de priorité et traiter les cas qui ont les effets les plus grands, etc.
Dans les affaires civiles, mais dans d'autres affaires aussi, nous examinons les cas qui nous sont signalés ou les plaintes qui sont faites. Nous examinons leur effet économique. Nous examinons s'il existe de la jurisprudence à ce sujet ou s'il s'agit d'une nouvelle question. Nous examinons tous les effets que le problème peut avoir en matière de concurrence au sein du pays.
Certaines affaires sont de nature très locale et ne touchent qu'une entreprise—par exemple, le carburant qui lui est vendu. Cette affaire n'a pas d'effet en matière de concurrence sur une vaste zone, elle ne présente pas de nouveauté du point de vue légal, entre autres, et nous pouvons essayer de la résoudre sans avoir recours aux tribunaux. Il se peut également que nous n'ayons pas recours aux tribunaux parce que nous n'avons pas toutes les ressources nécessaires pour cela.
C'est la vie. Il faut voir ce qui est prioritaire et décider des cas qui seront traités. Il est parfois très difficile d'expliquer cela à un chef de petite entreprise pour qui la question peut être vitale. Ces choses-là ne sont jamais évidentes. Il est très difficile de faire la distinction entre une concurrence déloyale et une concurrence vigoureuse. Si l'accusé n'est pas prêt à changer ses pratiques et que nous n'arrivons pas à persuader les deux parties d'en arriver à un compromis, il faut beaucoup de temps et d'argent pour amener l'affaire devant les tribunaux. Parfois, nous ne le faisons pas.
L'accès privé signifie que si une petite ou une moyenne entreprise juge que l'affaire est absolument vitale pour elle, elle devrait avoir la possibilité de se défendre elle-même.
M. Walt Lastewka: Ce sera intéressant de voir tous les témoignages qui nous seront présentés. Je suppose que vous en avez déjà discuté avec les associations de petites entreprises, n'est-ce pas?
M. Konrad von Finckenstein: Oui.
M. Walt Lastewka: Ce sera intéressant d'entendre leur opinion et de voir si elles souhaitent avoir un mécanisme qui leur permettrait de faire entendre leur opinion et de défendre leurs intérêts.
M. Konrad von Finckenstein: Le Forum des politiques publiques a été excellent car il a réuni toutes les parties intéressées aux 12 tables rondes qui ont été organisées dans tout le pays.
Divers organismes commerciaux, dont la FCEI, y ont participé et ont fait connaître leur opinion. Je suppose que ces organismes comparaîtront devant vous. Vous pourrez alors leur poser la question. Je m'en voudrais de leur prêter des propos.
M. Walt Lastewka: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Lastewka.
Monsieur Strahl, allez-y.
M. Chuck Strahl (Fraser Valley, PC/RD): Merci, madame la présidente. Bonjour messieurs.
Comme M. Bergeron, je suis moi aussi nouveau à ce comité. Rien de mieux que l'étude d'une loi cadre comme celle-ci avant la deuxième lecture pour plonger dans le vif du sujet. Mais j'ai hâte d'en savoir davantage. Le sujet est très important, pour toutes sortes de raisons.
J'aimerais avoir quelques précisions sur la partie de votre mémoire qui traite de coopération internationale.
• 0955
Vous avez dit que le Barreau canadien s'opposera aux
dispositions de cette partie du projet de loi parce qu'elles
mettent en péril le caractère confidentiel des renseignements sur
les gens. Vous avez dit que rien dans cette loi n'autorise le
bureau à communiquer des renseignements. Le projet de loi contient-
il expressément une interdiction de le faire pour le bureau?
M. Konrad von Finckenstein: Non. Je ne veux pas vous induire en erreur sur ce que dit le barreau. Ce qu'il dit, c'est que l'article 29, qui traite des questions de confidentialité, dit que tous les renseignements qui nous sont confiés dans le cadre d'une enquête sont confidentiels et qu'ils ne peuvent être communiqués sauf si une ordonnance d'un tribunal l'exige. Notre politique est de contester ces ordonnances autant que nous le pouvons en invoquant des privilèges, etc. Cette mesure s'applique actuellement aux enquêtes que nous faisons au Canada et aux enquêtes internationales. Ce sont les restrictions qu'on nous impose.
Ce que nous demandons est entièrement différent. C'est une disposition dans laquelle on indique que le Canada signe des traités avec d'autres nations, dont les États-Unis, pour recueillir des preuves dans des affaires civiles. Dans un tel cas, la ministre de la Justice signera un traité.
Elle doit vérifier diverses choses, entre autres si le pays avec lequel nous traitons est responsable, s'il a des dispositions en matière de renseignements confidentiels, et s'il y existe une procédure établie dans ces domaines. Ces traités doivent donc s'inscrire dans un régime de concurrence élaboré.
La ministre signera ensuite un traité et, conformément à ce traité, l'autre partie pourra nous faire une requête. Nous consulterons un juge, nous obtiendrons une ordonnance, nous saisirons le document demandé et nous demanderons ensuite la permission au juge d'envoyer le document à la partie demanderesse. C'est une disposition entièrement différente. Elle donnera de bons résultats et elle n'a rien à voir avec l'article 29.
Le barreau est d'accord avec cela. Il est d'accord avec la nouvelle façon de procéder. Il dit toutefois que ce n'est pas suffisant et qu'il faudrait examiner également l'article 29. Pour ma part, j'estime que ce n'est pas nécessaire maintenant. L'article 29 actuel ne me dérange pas. Tout le monde sait ce qu'il signifie. Pourquoi ouvrir un autre panier de crabes? Nous avons déjà suffisamment de problèmes.
M. Chuck Strahl: Il s'agit donc seulement de recueillir des preuves dans d'autres pays.
Corrigez-moi si je me trompe, mais il n'existe pas à l'heure actuelle de moyen d'obtenir des renseignements dans d'autres pays, n'est-ce pas?
M. Konrad von Finckenstein: C'est vrai dans les affaires civiles. On peut toutefois recueillir des preuves dans les affaires criminelles.
M. Chuck Strahl: D'accord. Que fait le bureau, que devrait-il faire ou que peut-il faire si une entreprise préfère le fusionnement plutôt que l'alliance stratégique et souhaite fusionner deux grandes sociétés? Comme vous l'avez dit, c'est un problème qui se pose dans les grandes multinationales qui ont des filiales partout. La fusion peut être approuvée au Canada lorsque nous jugeons qu'elle n'est pas nuisible, les sociétés y procèdent pour constater un peu plus tard que les États-Unis ou un autre pays s'y opposent.
Je crois savoir que le projet de loi ne traite pas de cette question. Mais certaines sociétés pourraient dépenser des millions de dollars, connaître des millions de dollars de fluctuation dans le prix de leurs actions et ne pas être en mesure de réaliser la fusion.
M. Konrad von Finckenstein: À l'heure actuelle, lorsque des multinationales veulent se fusionner, il faut en avertir tous les pays dans lesquels les deux sociétés font affaire, et les autorités en matière de concurrence de ces pays doivent approuver la transaction. Ces autorités en matière de concurrence communiquent entre elles. Elles ne peuvent peut-être pas échanger les données qui ont été déposées sans en être autorisées par les entreprises, mais elles peuvent discuter entre elles des aspects théoriques de l'affaire, des problèmes qu'elle peut poser, etc.
Il existe une étroite collaboration entre elles, surtout entre les principaux pays, entre autres les États-Unis, l'Union européenne et l'Australie. Nous essayons de nous communiquer tous les renseignements autorisés par la loi et nous trouvons généralement des solutions relativement semblables.
Évidemment, chaque organisme doit s'assurer que le régime de concurrence de son pays demeure intact. Les effets d'une fusion peuvent différer d'un pays à l'autre. Cela signifie simplement que les parties à la fusion devront restructurer leur proposition de façon à ce qu'elle soit approuvée partout. Sinon, elles doivent l'abandonner.
M. Chuck Strahl: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci, monsieur Strahl.
Monsieur St. Denis, à vous.
M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.): Merci, madame la présidente.
Je remercie le commissaire et ses collègues. C'est un sujet très important et très intéressant.
• 1000
J'ai deux petites questions à poser, dont la première au sujet
de la documentation trompeuse. Nous nous entendons tous pour dire
que nous devons faire de notre mieux pour protéger nos citoyens,
surtout les personnes âgées plus vulnérables. Compte tenu du
vieillissement de la population, c'est un marché qui va toujours
croissant pour ceux qui seraient tentés d'en abuser.
Cela dit, vous avez déclaré que le Canada est en train de s'acquérir la réputation d'être un paradis pour les arnaqueurs. Je ne suis pas certain que ce soit vrai. Existe-t-il des données quantitatives à ce sujet ou cette opinion se fonde-t-elle sur des anecdotes? Et qu'entend-on par paradis? Cela signifie-t-il que ces arnaqueurs opèrent à partir du Canada pour faire leurs arnaques ailleurs, opèrent-ils ailleurs pour faire leurs arnaques ici, ou opèrent-ils ici pour arnaquer les gens ici? Pourriez-vous me dire un peu ce qu'il en est.
M. Konrad von Finckenstein: Il y a des arnaqueurs qui opèrent ici et qui commettent leurs arnaques ici également. Mais les cas les plus difficiles sont ceux des arnaqueurs qui opèrent ici mais commettent leurs arnaques aux États-Unis. C'est une industrie en pleine croissance. Les autorités américaines reçoivent de plus en plus de plaintes au sujet d'arnaques commises aux États-Unis à partir du Canada. D'après les statistiques américaines, on voit constamment que ces arnaques viennent principalement du Canada. Nous voulons lutter contre ces arnaqueurs et c'est en partie ce que vise cette mesure législative.
Certains arnaqueurs opèrent également en Australie et en Nouvelle-Zélande. Mais les arnaques qui se font là-bas viennent d'ici. Les arnaqueurs vraiment intelligents ne font pas de victimes au Canada. Aucune plainte ne sera déposée au Canada auprès des autorités provinciales, des procureurs généraux des provinces, non plus que chez nous, puisqu'il n'y a pas de victimes au Canada. Les victimes sont au Utah, en Floride ou ailleurs. Les plaintes sont déposées auprès de la FTC. Celle-ci nous en informe et nous essayons d'attraper les arnaqueurs, mais nous n'avons pas vraiment d'outils pour cela.
Deuxièmement, il est également important de ne pas s'en prendre aux innocents. Il existe beaucoup de concours légitimes dans lesquels on octroie des prix. Cette mesure législative énonce un code de conduite et les règles à respecter pour tenir un concours. Vous trouverez plus de détails à ce sujet dans les directives que je vous ai remises. Les concours en eux-mêmes n'ont rien de mauvais. Là où cela se gâte, c'est quand on veut arnaquer des gens, qu'on leur demande de payer et qu'on ne leur remet pas de prix.
M. Brent St. Denis: Permettez-moi de poursuivre au sujet de la deuxième partie, sur la coopération internationale et la collecte de preuves. Vous nous avez remis un modèle à examiner. Si je comprends bien, le Canada devrait signer une entente avec chacun des autres États; il signerait des ententes avec les États-Unis, l'Australie et la France, par exemple. Le Canada devrait-il signer un accord distinct avec chaque pays? N'est-il pas possible de mettre au point un protocole international, comme dans le cas des mines terrestres, par exemple? Faut-il faire cela au cas par cas?
M. Konrad von Finckenstein: Cela s'explique par le fait que dans bien des pays, les lois sur la concurrence sont relativement nouvelles. Il n'existe pas de tradition dans ce domaine. Souvent l'organisation n'a pas eu le temps de s'établir une réputation. Nous ne signerions de tels traités qu'avec les pays qui possèdent, à notre avis, un système de valeurs égal—ou qui offrent des garanties égales—à notre système à nous. Je crois surtout que nous signerions de telles ententes tout d'abord avec les États-Unis, puis avec l'Union européenne, probablement la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne, etc.
Nous nous retrouverons peut-être à signer des ententes avec de nombreux pays au fur et à mesure des progrès. La concurrence est un sujet très à la mode. Il y a 40 ans, 10 pays seulement avaient un régime dans ce domaine; à l'heure actuelle, environ 100 pays s'en sont dotés. Le degré de raffinement varie selon les pays, et on ne devrait signer d'accords qu'avec les pays dont on est sûr qu'ils respectent les règles et qu'ils respecteront les conditions accompagnant la remise de documents.
M. Brent St. Denis: Y a-t-il...
M. Konrad von Finckenstein: Excusez-moi, mon collègue voudrait ajouter quelque chose.
M. François-Bernard Côté: C'est possible. Cela s'est déjà fait dans d'autres domaines, dans le domaine pénal, par exemple. Il pourrait y avoir des ententes multilatérales entre un certain nombre de pays. Si les conditions de ces ententes multilatérales, ou de ces traités, sont les mêmes que celles de la mesure législative proposée, je crois que ces ententes pourraient permettre une bonne collaboration entre les pays pour que le Canada y retrouve ce qu'exige la loi.
M. Konrad von Finckenstein: C'est une réponse très optimiste. Nous sommes loin d'y être rendus. Mais pour ce qui est du fond, c'est exact.
M. Brent St. Denis: Je dois donc comprendre que même si c'est une bonne idée, une fois que la mesure sera adoptée, il faudrait probablement attendre encore des années avant d'avoir... Existe-t- il des ententes de ce genre ailleurs à l'heure actuelle? Des négociations sur ces questions sont-elles actuellement en cours?
M. Konrad von Finckenstein: Oui. Ce projet de loi est issu de la loi américaine. La loi américaine dit expressément que les États-Unis ne peuvent signer de traité de ce genre avec un autre pays à moins que ce pays dispose d'une loi contenant la réciproque. Une fois que ce projet de loi sera adopté, nous négocierons avec les Américains et nous signerons un traité avec les États-Unis.
M. Brent St. Denis: Merci, madame la présidente.
La présidente: Merci, monsieur Finckenstein.
La parole est à M. Rajotte.
M. James Rajotte: Merci, madame la présidente.
Je vais aborder deux des grands aspects de ces modifications. Le premier consiste à rationaliser les examens en matière de concurrence et le recours au tribunal en conférant au tribunal le pouvoir de déterminer des frais, de rendre des décisions sommaires et d'effectuer des renvois. Il y a également un quatrième aspect important, celui de l'élargissement du pouvoir du Tribunal de la concurrence de rendre des ordonnances provisoires.
Ces modifications visent à rationaliser le processus, et nous sommes tous d'accord avec cela. Mais dans vos observations, monsieur le commissaire, vous avez fait ressortir les effets négatifs que pourrait avoir l'augmentation du pouvoir et de l'influence du Tribunal de la concurrence, lorsque vous avez parlé de déterminer ce qui constitue une concurrence déloyale ou une concurrence véritable. Pourriez-vous nous en dire davantage sur les effets négatifs que pourrait avoir l'augmentation du pouvoir et de l'influence du Tribunal de la concurrence et indiquer comment on peut déterminer si la concurrence est véritable ou déloyale?
M. Konrad von Finckenstein: En fait, c'est le contraire. À l'heure actuelle, nous hésitons à demander l'avis du tribunal parce qu'il est un instrument très imparfait. Ce tribunal n'a pas le pouvoir de déterminer les frais et il ne peut donc pas contrôler sa façon de fonctionner.
Par exemple, nous avons aussi été saisis d'une affaire de fusion, dans le port de Montréal. Nous avons entrepris une action en justice. Nous n'avons jamais pu nous rendre à l'étape de l'enquête préalable car 54 requêtes ont été déposées, puisqu'il n'existait aucune sanction applicable au dépôt de requêtes. À mon avis, c'est un genre d'abus de procédure auquel on pourrait ainsi remédier. En rationalisant le fonctionnement du tribunal, celui-ci deviendrait plus utile. Il nous incombera encore de décider si nous voulons lui renvoyer les affaires ou non, et nous le ferons si nous croyons que nous ne serons pas enlisés dans un litige sans fin et que nous pourrons obtenir une décision.
Pour ce qui est des renvois, dans les cas de fusion, c'est souvent sur un élément contesté que repose l'approbation ou le rejet de la proposition. Par exemple, le désaccord peut porter sur l'interprétation d'une disposition ou sur son application. La mesure proposée nous permettrait, avec le consentement de l'autre partie, de consulter le tribunal. Il ne s'agirait pas de discuter de toute l'affaire. Ce que nous voulons, c'est une précision. Nous pourrions demander au tribunal comment il interprète une disposition quelconque.
De cette façon, nous pourrons accélérer le processus. Cela aidera les deux parties. Pour le bureau, cela signifie que les coûts seront moins élevés pour porter une affaire devant le tribunal. Une partie pourrait se rendre compte qu'un élément est essentiel à son plan d'entreprise. Elle ne voudra pas abandonner cet élément à moins d'y être contrainte. Très bien, dans ce cas, voyons si la loi l'y oblige ou non. C'est le genre de situation que le renvoi permet de régler.
Dans l'ensemble, ces dispositions nous aideront à avoir recours au tribunal...contrairement à ce qui se fait maintenant... On nous a beaucoup critiqués et les observateurs estiment que le processus ne marche pas, que le bureau est omnipotent et qu'il prend beaucoup de décisions. Les gens n'ont pas recours au tribunal car, à cause de la façon dont il fonctionne maintenant, c'est un instrument trop rigide et peu raffiné. Il est trop coûteux en temps et en argent d'y avoir recours. Grâce à cette mesure, nous pourrons demander aux tribunaux de résoudre les divergences d'opinions véritables. C'est à cela que servent les tribunaux.
Quant à la différence entre la concurrence déloyale et une concurrence vigoureuse, il n'y a pas de réponse simple. Il faut examiner les diverses dispositions de la loi, ce qui est prescrit, puis examiner les effets dans chaque cas. Il faut voir si la pratique est conçue pour obtenir cet effet ou conçue seulement pour augmenter au maximum les bénéfices.
Ce n'est pas une décision facile. Comme je l'ai dit, c'est l'une des décisions les plus difficiles à prendre, et les cas ne sont généralement pas tranchés. Nous tâchons de trouver une solution par la négociation dans la plupart des cas, mais si c'est impossible, avec des procédures rationalisées, nous serons de nouveau en mesure d'établir si l'activité peut être considérée comme étant monopolistique ou non.
M. James Rajotte: Merci.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Rajotte.
Madame Torsney, allez-y.
Mme Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci.
J'aime beaucoup cet article de la loi sur les cartes à gratter. C'est un dossier qui avait retenu mon attention avant que Mme Redman propose son projet de loi.
J'ai vu un grand nombre de ces cartes à gratter au cours des quelques dernières années, et lorsque j'ai lu les lignes directrices, je me suis interrogée sur certains aspects des articles relatifs à la non-application.
L'alinéa 53(2)a)—vous en faites mention à la page 2 de vos notes—dit ceci:
-
convenablement et loyalement, donne le nombre et la valeur
approximative du prix ou autre avantage, indique la répartition des
prix par région et mentionne tout fait qui modifie d'une façon
importante, à sa connaissance, les chances de gains;
Cette disposition permettrait-elle quand même à quelqu'un d'exiger un droit pour réclamer un prix, si l'on fournit ces informations?
M. Konrad von Finckenstein: Excusez-moi, je ne vous suis plus. Quel texte lisez-vous?
Mme Paddy Torsney: Ce sont les lignes directrices concernant la Loi sur la concurrence, page 2—excusez-moi, page 1—concernant la non-application.
En ce qui concerne la paragraphe 53(1), on dit, voici une carte à gratter, appelez à ce numéro 1-900 ou envoyez-nous 50 $, et vous pourrez réclamer votre prix. Je comprends cette disposition. Mais cela ne s'applique pas si on dit quoi?
M. Konrad von Finckenstein: Il s'agit des cas où l'on dit que vous pouvez gagner un prix à la condition de payer 20 $. Il vous appartient alors de décider si vous acceptez cela. Il n'y pas de tromperies ici. Vous savez que vous allez perdre 20 $; c'est le droit d'entrée. C'est vous qui décidez: vous allez de l'avant ou vous ne faites rien. C'est un concours équitable.
Si les gens veulent tenir de tels concours, je ne vais pas les en empêcher. Ce que nous essayons de faire, c'est les empêcher de dire: voici, vous pouvez gagner, et vous ne vous rendez pas compte que votre participation vous coûtera 20 $.
Mme Paddy Torsney: Mais ce qu'ils font, c'est qu'ils écrivent en caractères minuscules: «Nous sommes en droit d'exiger certains frais.» La plupart des gens sont tellement contents d'avoir gagné le prix après avoir gratté la carte, qu'ils ne remarquent même pas ça.
M. Konrad von Finckenstein: Voilà pourquoi nous utilisons les mots «convenablement et loyalement».
Mme Paddy Torsney: Mais comment allez-vous décider ça?
M. Konrad von Finckenstein: Je ne peux pas décider dans l'abstrait, mais je peux vous dire que s'il y a un texte imprimé en lettres minuscules au bas de la carte, si cela dit que j'ai gagné 2 000 $, et que plus bas on révèle d'autres renseignements imprimés en format d'un millimètre, alors de toute évidence, ce n'est pas convenable.
Nous avons en fait une définition de ce qui constitue «convenablement et loyalement» au bas de la page 4.
M. François-Bernard Côté: Non, c'est au bas de la page 3; on y annonce la page 4.
Mme Paddy Torsney: Je suis heureuse de voir que vous ne vous y retrouvez pas, parce que c'était mon cas aussi.
M. Konrad von Finckenstein: Vous voyez, il est dit:
-
la divulgation a été faite de manière suffisamment visible, avant
que le participant éventuel ne subisse un inconvénient quelconque.
Voilà pourquoi nous émettons ces lignes directrices, précisément pour ce genre de cas. Si vous êtes arnaqueur de votre métier, vous allez essayer de les contourner. Si vous êtes un participant honnête, vous allez les lire et vous dire: Qu'est-ce que je dois faire pour me débarrasser du Bureau de la concurrence? Respectez ces lignes directrices, et vous saurez quoi faire.
Mme Paddy Torsney: Sauf que, sauf votre respect, l'idée que l'arnaqueur se fait du «convenablement» peut être légèrement différente de la vôtre.
J'ai parlé à certains de ces arnaqueurs, et ils s'imaginent que leurs informations sont parfaitement claires. Je pourrais peut- être éplucher mes dossiers et vous en montrer quelques-uns, et nous pourrions avoir une petite discussion sur ce qui pourrait marcher ou ne pas marcher, et ainsi je serais un peu plus à l'aise.
M. Konrad von Finckenstein: Bien sûr, je serai très heureux d'en parler avec vous, mais soyez tranquille, en vertu des dispositions actuelles, nous avons intenté des poursuites contre un grand nombre d'arnaqueurs, même si ces dispositions n'étaient pas aussi bien ciblées pour ce qui est de la publicité trompeuse, et le reste, et nous en avons obligés plusieurs à modifier ou à cesser leur façon de faire—mais pas assez, je suis d'accord avec vous.
Mme Paddy Torsney: Il ne s'agit pas seulement des personnes âgées; j'ai vu des tas de gens de tous âges se faire arnaquer par ces gens-là.
L'autre question que j'ai a trait à la partie des principes généraux, page 3, sous la rubrique Détermination des frais engagés au deuxième paragraphe:
-
Par exemple, sont jugés acceptables les frais engagés pour payer
les primes d'assurance automobile avant la livraison d'une voiture
obtenue gratuitement.
Les responsables devraient ainsi s'assurer que le gagnant a une assurance automobile, et cela n'oblige pas le gagnant à acheter une assurance automobile de cette entreprise-là, n'est-ce pas?
M. Konrad von Finckenstein: C'est exact.
Mme Paddy Torsney: Je serais inquiète, bien sûr, s'il s'agissait d'une prime d'assurance gonflée.
M. Konrad von Finckenstein: Exactement.
Mme Paddy Torsney: Bien.
• 1015
Ce qui me préoccupe aussi, c'est que lorsque nous avons déposé
ce projet de loi, il se divisait en deux parties: la première
portait sur ces cartes à gratter, et la deuxième visait ces
personnes qui utilisent un logo du gouvernement sur leurs
enveloppes qui donne à croire qu'elles représentent le
gouvernement. Elles utilisent le drapeau canadien, mais peut-être
pas les deux barres; elles donnent à leur correspondance une allure
gouvernementale, elles écrivent «bureau de l'impôt», ou quelque
chose d'autre, au lieu de Revenu Canada ou ADRC, ou elles utilisent
de pseudo-logos du gouvernement. Ils sont nombreux à faire cela, et
je reçois alors des plaintes me disant que tel bureau du
gouvernement m'a envoyé telle chose.
Il existe quelque chose du genre maintenant qui frise l'illégalité. C'est une lettre de quelqu'un qui est distribuée dans tous les hôtels et qui vous dit que vous pouvez récupérer la TPS si vous utilisez son entreprise. La lettre est marquée d'un joli logo qui ressemble à celui de Tourisme Canada, mais en fait, vous devez payer un droit. Je reçois des plaintes de gens qui me disent: je veux ravoir mon argent du gouvernement, cependant, il s'agit d'une entreprise privée. Je crains que nous n'ayons pas réglé ce problème dans ce projet de loi-ci.
M. Konrad von Finckenstein: Nous avons en fait des cas de ce genre. Il n'en est pas question dans ce projet de loi-ci parce qu'il s'agit seulement de publicité trompeuse. C'est de cela qu'il s'agit; vous prétendez être quelqu'un que vous n'êtes pas.
Dans des cas comme celui-là, si vous avez une feuille d'érable sur votre correspondance et que vous utilisez des caractères ou un format qui essentiellement donnent l'impression qu'il s'agit d'un organisme gouvernemental, vous contrevenez alors à la loi telle qu'elle est libellée maintenant. Il n'est pas nécessaire d'ajouter des dispositions particulières pour contrer ce genre de chose.
Nous avons plusieurs cas à l'étude où il s'agit exactement de cela. Je sais de quoi vous parlez. Malheureusement, dès que nous arrivons à mettre la main au collet d'un de ces entrepreneurs, un autre semblable ouvre ses portes le lendemain.
Mme Paddy Torsney: Oui, je vais chercher dans mes dossiers et m'assurer que vous allez poursuivre tous ces gens-là parce que cela dérange beaucoup mes électeurs, et je crois que l'on dégrade ainsi le logo du gouvernement.
M. Konrad von Finckenstein: C'est exact. Parfaitement d'accord avec vous.
Mme Paddy Torsney: Très bien.
La présidente: Merci beaucoup.
[Français]
Monsieur Bergeron.
M. Stéphane Bergeron: Merci, madame la présidente. Comme on dit chez nous, c'est fou comme le temps passe vite lorsqu'on est en bonne compagnie.
Je m'excuse de revenir sur la question de la fixation des prix de l'essence, mais on n'a pas eu le temps de vider la question tout à l'heure, du moins à mon point de vue. D'autre part, comme je le disais tout à l'heure, pour la plupart de nos concitoyennes et concitoyens, le Bureau de la concurrence est quelque chose d'un peu lointain, d'un peu ésotérique. Mais lorsqu'on parle de la fixation des prix de l'essence dans chacune de nos circonscriptions, il y a tout à coup un éclairage nouveau, un éclairage intéressant qui vient chercher chacun de nos concitoyens et chacune de nos concitoyennes sur cette question-là.
J'ai bien entendu dire qu'une preuve écrite n'était pas nécessaire, qu'une preuve orale pouvait également convenir. Je l'ai bien compris, mais je l'avais bien compris précédemment aussi. Ne voyez-vous pas un problème à ce que le plaignant doive lui-même fournir des preuves ou des éléments de preuve pour qu'on puisse aller de l'avant? C'est comme si on demandait à quelqu'un qui vient de subir un vol avec effraction chez lui de trouver des éléments de preuve avant d'aller voir les policiers et de leur dire qu'il vient d'être victime d'un vol avec effraction. Est-ce que ça ne devrait pas être le travail du Bureau de la concurrence que de trouver ou de de déterminer ces éléments de preuve au lieu de demander au plaignant de le faire?
Maintenant, si, comme je l'ai compris, l'élimination du terme «indûment», à l'article 45, n'est pas la façon de procéder pour permettre au Bureau de la concurrence d'avoir les coudées plus franches pour faire enquête dans des cas comme celui-là, que nous suggérez-vous? Dans la mesure où vous pensez que les règles actuelles sont trop strictes, que nous suggérerez-vous pour vous permettre d'avoir les coudées franches et de faire enquête beaucoup plus facilement qu'avec les règles contraignantes que nous avons actuellement?
M. Konrad von Finckenstein: Mon collègue répondra à votre question sur la preuve et je répondrai à la question sur l'article 45.
M. François-Bernard Côté: Je voudrais qu'on se comprenne bien sur l'article 45 de la Loi sur la concurrence. C'est une infraction que de s'entendre soit pour augmenter les prix de façon déraisonnable, soit pour influencer la concurrence de façon indue.
La première chose que la Couronne doit prouver hors de tout doute raisonnable est qu'il y a eu une entente. Or, habituellement, les ententes sont de nature secrète, parce que c'est l'essence du complot: la conspiration est secrète.
M. Stéphane Bergeron: C'est l'essence du complot...
M. François-Bernard Côté: Exactement. Il faut donc trouver une preuve de cette entente. De quelle façon recevons-nous les plaintes habituellement? Les prix de l'essence augmentent tous en même temps; donc, on fait une plainte au bureau. Quelqu'un vient dire qu'ils se sont entendus, car les prix ont tous augmenté en même temps. D'accord, on fait une enquête. Le fait que les prix augmentent tous en même temps peut être le résultat d'une entente illégale, mais peut également être tout simplement le résultat du fait qu'un commerçant augmente son prix de deux cents, incitant ainsi le commerçant de l'autre côté de la rue à augmenter également son prix de deux cents. Il y a une explication raisonnable à cet état de fait. De là à prouver hors de tout doute raisonnable qu'il y a eu une infraction...
Vous me demandez si on doit faire enquête. Oui, on fait enquête, mais en l'absence de motifs raisonnables ou de soupçons, il est difficile de faire appel aux méthodes traditionnelles d'enquête, c'est-à-dire les mandats de perquisition et l'écoute électronique. Lorsque quelqu'un nous fait une plainte et dit que les prix ont augmenté, il nous est difficile de faire enquête. Pour cela, il faudrait faire de l'infiltration et lancer notre propre compagnie d'essence pour voir comment les choses fonctionnent à l'intérieur. En l'absence d'une indication que quelqu'un, parmi ces conspirateurs, aurait une raison de nous parler, il est difficile, au simple point de vue pratique, de faire une enquête.
M. Konrad von Finckenstein: En termes de réforme de l'article 45, notre white paper, qui a été distribué en mai de l'année dernière, suggérait une solution. Je crois qu'essentiellement, on va essayer d'établir un consensus sur cette approche. On aura une offense pour les complots de fixation des prix. Quant à tous les autres types d'infraction, on va essayer de les examiner sur le plan civil. Le terme «indu» est dans la loi pour donner de la flexibilité. Il y a des types d'actions qui ont un effet sur les prix, mais où l'activité principale n'est pas la fixation des prix, mais un possible arrangement entre compagnies.
Pourquoi ne sépare-t-on pas les deux sujets? La fixation des prix est un crime, et on va poursuivre les responsables. Dans le cas de tout autre arrangement qui peut avoir un effet sur les prix, on va examiner les dispositions civiles, et s'il y a là quelque chose qui n'est pas acceptable, il y aura une injonction.
Généralement, il y a un consensus sur une solution de ce type, mais il est très difficile de rédiger les détails. Qu'est-ce qu'une fixation, où est la barrière, etc.? C'est pour cette raison que nous avons engagé trois experts. Nous avons des études et nous aurons des débats. J'ai bon espoir que nous aurons à l'avenir une solution de ce genre.
[Traduction]
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Rajotte.
Monsieur Volpe, avez-vous des questions?
M. Joseph Volpe (Eglinton—Lawrence, Lib.): Non.
La présidente: Bien.
La parole est à M. Bagnell.
M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Merci. J'ai quelques petites questions.
Pour ce qui est de la tromperie, l'envoi de documents trompeurs, c'est très bien. Ma première question concerne l'exception où la personne gagne en fait le prix. Dans un tel cas, je veux seulement savoir s'il est possible, en vertu de ce projet de loi-ci, que ce qu'il en coûte pour aller chercher son prix dépasse la valeur du prix lui-même.
M. Konrad von Finckenstein: Vous devez dire dans votre avis original en quoi consiste le prix et quelle est sa valeur. Si vous gagnez le prix et que sa valeur correspond à ce qui a été dit, il n'y a pas d'infraction. Si, cependant, la valeur du prix est de loin inférieure à ce qu'on avait prétendu, il y a alors infraction.
M. Larry Bagnell: Cela ne concerne que l'avis que l'on reçoit par courrier. Est-il question du téléphone?
M. Konrad von Finckenstein: Il s'agit d'un avis qu'on peut recevoir sous n'importe quelle forme, et cela couvre l'Internet, etc. Vous parlez du téléphone, c'est là que le télémarketing trompeur est vraiment à l'oeuvre. C'est déjà mentionné dans la loi; la dernière modification traitait de cela. La présente modification a essentiellement pour effet de prendre la mesure que nous avions pour le téléphone et de l'étendre à l'écrit, qu'il s'agisse du courrier, d'Internet, de prospectus ou de n'importe quoi d'autre.
M. Larry Bagnell: Dernière question—vous n'êtes pas obligé d'y répondre, du moins pas en détail—je veux seulement savoir de combien d'argent on dispose pour s'assurer que la concurrence est équitable et pour faire respecter les dispositions de la loi. Par exemple, vous pourriez comparer le pourcentage de notre PIB que nous consacrons à l'application de lois de ce genre à celui des autres pays du G-8. Vous n'êtes pas obligé de répondre à cela maintenant.
M. Konrad von Finckenstein: Puisque vous m'en donnez l'occasion, je vais vous dire que lorsque je me compare aux autres pays du G-8, je suis sous-financé, peu importe la base de comparaison: per capita, PIB ou activité économique. Nous sommes presque les derniers de la classe.
La présidente: J'attire votre attention sur le fait que nous ne pouvons rien faire de ce côté dans ce projet de loi étant donné la proclamation royale dont il est fait mention au début.
Monsieur Strahl, allez-y.
M. Chuck Strahl: Merci.
Après l'intervention de Mme Torsney au sujet du logo du gouvernement, je me suis demandé si le Bureau de la concurrence avait déjà fait enquête sur cette affichette qui dit: «Ne volez pas, le gouvernement déteste la concurrence». D'accord. Il n'y a pas vraiment de rapport. Je pensais qu'il y en avait peut-être un.
La présidente: Revenons à notre sujet.
M. Chuck Strahl: Toujours à propos de ce problème de la concurrence internationale, des fusions et du fait que ces accords internationaux en sont encore au stade embryonnaire, je voudrais seulement savoir s'il faut d'abord un exemple, le premier étant peut-être un accord avec les États-Unis. C'est peut-être la façon de faire les choses, mais n'y a-t-il pas d'autres discussions sérieuses à ce sujet, disons, au sein du G-8 ou à l'OMC?
Dans mon esprit, étant donné que nous traitons de questions commerciales d'envergure mondiale, par exemple l'Accord de libre- échange des Amériques, ces mesures devront être compatibles avec ces accords. La concurrence internationale, les fusions et les zones commerciales, tout cela sera un jour inextricablement lié, et il me semble qu'il faut procéder à des discussions qui doivent dépasser le stade bilatéral. Il faut agir vite... Est-ce que je me trompe, ou n'est-ce pas la façon de faire les choses désormais?
M. Konrad von Finckenstein: Si. Vous avez parfaitement raison. La concurrence est une question d'envergure internationale. On en discute dans de nombreux forums. D'ailleurs, je ne serai pas ici la semaine prochaine parce que je dois aller à Paris pour discuter précisément de cette question à l'OCDE.
Le problème, c'est qu'il faut comprendre la nature de la concurrence. Pour qu'il y ait une concurrence convenable, l'autorité chargée de la concurrence a besoin d'informations qui sont des plus délicates pour l'entreprise. Il s'agit de transmettre des informations et d'obtenir des informations relatives à la stratégie et à la planification. Il s'agit d'informations sur la pénétration des marchés. Les entreprises hésitent beaucoup à nous communiquer ces informations. Elles vont nous les communiquer si elles y sont contraintes ou si elles doivent le faire dans le cadre d'une fusion... Mais elles ne nous communiquent leurs informations que parce qu'elles ont la certitude que nous allons en préserver la confidentialité, qu'elles ne se retrouveront pas entre les mains de leurs concurrents, et qu'elles ne seront divulguées qu'en vertu d'une ordonnance judiciaire.
Maintenant, si vous appliquez ce principe à l'échelle internationale, si vous avez une entreprise qui divulgue des informations dans un certain pays, elle voudra s'assurer que si nous les communiquons à un pays étranger, ce pays étranger va les traiter avec le même respect et qu'il aura une loi qui lui permettra de faire cela. Voilà pourquoi je dis que pour les États-Unis, il n'y a pas de problème. Pas de problème non plus dans l'Union européenne. D'autres pays ont des lois sur la concurrence, mais je ne crois pas qu'elles sont nécessairement respectueuses des mêmes critères que la nôtre, et voilà pourquoi il est trop tôt pour conclure un traité avec ces pays. Ce qui ne veut pas dire que cela ne se fera pas à l'avenir.
Toujours à ce sujet, tous les accords internationaux que nous avons négociés, par exemple l'ALENA, comportent un chapitre sur la concurrence. Le nouvel accord avec le Costa Rica comporte un chapitre sur la concurrence, et l'ALEA aura aussi son chapitre sur la concurrence, mais ils ne sont pas au même stade de développement.
La coopération dépend de la confiance que vous avez dans l'organisme homologue, pour les raisons que j'ai mentionnées.
M. Chuck Strahl: D'accord. Merci.
La présidente: J'ai quelques questions de plus à ce sujet, mais avant de les poser, il y a quelques points que j'aimerais aborder.
Vous avez dit entre autres que vous iriez à Paris. Le projet de loi C-26 modifie le cadre de la Loi sur la concurrence dans la mesure où il vous confère des pouvoirs propres à certaines industries, à vous le commissaire, parce que le tribunal n'était pas en mesure d'émettre des ordonnances de cessation. Comme le projet de loi C-23 change cela, ne devrions-nous pas supprimer le paragraphe 104(1)? J'imagine que des membres du barreau vont nous poser la question. J'aimerais avoir votre avis à ce sujet.
M. Konrad von Finckenstein: Les dispositions concernant l'industrie aérienne ont été ajoutées au projet de loi en raison de la situation très particulière où se trouve l'industrie aérienne. Nous avons un transporteur dominant à un moment donné dans les années 80 qui,...dans une industrie dont les actifs sont très mobiles. En modifiant tout simplement ses priorités, Air Canada pourrait littéralement contraindre un concurrent à fermer ses portes avant même qu'il ne se lance en affaires, ou, s'il est en affaires, saisir... Nous avons donc pensé que cette question était d'une urgence telle qu'il fallait ajouter cette disposition, et le commissaire doit avoir ce pouvoir.
Comme vous le savez, nous n'en avons fait usage qu'une seule fois jusqu'à présent. On a depuis intenté moult procès. L'affaire traîne encore devant les tribunaux. Jusqu'à présent, nous avons remporté toutes ces contestations. On l'a contesté sur le fond. On a fait appel du jugement. On l'a aussi contesté sur le plan constitutionnel. La contestation constitutionnelle fait également l'objet d'un appel. Je ne crois pas que vous ayez besoin de modifier le projet de loi. Comme je l'ai dit, ces dispositions ne concernent que l'industrie aérienne.
Le reste de notre industrie, heureusement, n'est pas aussi concentré. On ne retrouve pas ailleurs une telle domination. Par conséquent, les dispositions qui sont ici traitent de situations qui n'ont pas atteint le point critique que nous avons connu dans l'industrie aérienne.
La présidente: Si je comprends bien, cette modification a été apportée parce que le tribunal n'avait pas ce moyen d'intervenir, et le projet de loi C-23 donne le même genre de pouvoir au tribunal. Je veux seulement m'assurer de bien comprendre cela. On va probablement nous poser des questions à ce sujet au cours de nos délibérations.
M. Konrad von Finckenstein: Vous avez parfaitement compris, madame la présidente. Si ces nouvelles dispositions entrent en vigueur, on pourra faire valoir que les dispositions concernant les lignes aériennes ne sont plus nécessaires et devraient être abrogées.
La présidente: J'ai une autre question: il y a normalement un critère en trois parties en droit. Le nouvel article 103.1 énonce un critère différent. Pouvez-vous m'expliquer pourquoi il en est ainsi? Peut-être que M. Côté voudra...
M. Konrad von Finckenstein: Normalement, lorsqu'on demande une injonction interlocutoire ou quelque chose de ce genre, on essaie de prouver qu'un tort irréparable a été causé et que l'on ne peut pas remédier à la situation. Du point de vue de la concurrence, le tort est le plus souvent essentiellement d'ordre financier, et l'on peut remédier à cela. Il est donc très difficile d'obtenir une ordonnance provisoire, ou intérimaire, dans le domaine de la concurrence. Si le critère est ici quelque peu différent, c'est parce qu'on veut s'assurer que la personne qui est victime d'un abus demeurera en mesure de régler le problème.
On parle ici d'une réduction d'une part de marché, du fait de ne plus être en affaires, ou d'une situation à laquelle le tribunal ne peut remédier, parce que le tribunal n'est pas en mesure d'accorder des indemnités d'ordre financier. C'est un pouvoir qui est très circonscrit et très limité. Comme vous le savez, le maximum est de 80 jours. On ne peut pas dépasser ce délai. Cette disposition nous permet d'agir dans les cas extrêmes où nous pouvons nous adresser au tribunal et dire qu'à notre avis, la situation pourrait causer un tort irréparable à la concurrence, ou que telle ou telle personne va perdre irrémédiablement sa part du marché, et que par conséquent, il faut mettre un terme à tout cela. Et on a au maximum 80 jours pour agir.
Pour une injonction intérimaire courante, le critère est différent. Il n'est pas le même quant aux fins, parce qu'il s'agit d'une situation différente. Nous voulons que la concurrence continue d'exister. Il ne s'agit pas d'un préjudice irréparable comme on aurait l'habitude d'en voir—par exemple, une injonction intérimaire lorsque quelqu'un construit une maison qui endommage quelque chose de naturel qu'il sera presque impossible de réparer ou qui mettra beaucoup de temps à se rétablir. C'est pour cela que lorsqu'il s'agit d'argent, purement, les tribunaux hésitent à faire cela parce que l'argent, après tout, se remplace. Nous croyons que dans le présent cas il ne s'agit pas seulement d'argent, il s'agit d'une concurrence qui sera compromise. Donc, le critère est différent.
La présidente: Merci. Nous passons à M. McTeague et ensuite à Mme Torsney.
Monsieur McTeague, allez-y.
M. Dan McTeague: Merci, madame la présidente.
Monsieur le commissaire, beaucoup de gens autour de la table ne savent peut-être pas que lorsqu'on a recours aux tribunaux civils ou que l'on se tourne vers vous pour obtenir de l'aide, surtout dans des cas où les gens ne peuvent pas embaucher des gros avocats ou qu'ils n'ont pas des gros comptes en banque, certains agissements qui, pour vous, ne sont pas acceptables, certaines pratiques qui seraient jugées anticoncurrentielles, pourraient fort échapper à la loi.
• 1035
Beaucoup d'autres pays nous diront que si une certaine
pratique est interdite par vous-même ou par un tribunal et que
l'ordre était donné par le tribunal en premier lieu, à moins qu'il
ne soit possible d'en arriver à un accord avant d'en saisir le
tribunal, la chose se fait au cas par cas, individuellement. En
réalité, on envoie probablement le mauvais signal au monde des
affaires, c'est-à-dire qu'il faut une ordonnance pour interdire une
activité.
Donc, nous avons un scénario où beaucoup d'entreprises pourraient faire faillite, pourraient être victimes de ces pratiques anticoncurrentielles, et si vous n'avez pas la possibilité d'intervenir, monsieur le commissaire, il se pourrait fort bien qu'elles n'aient pas l'occasion de poser les questions significatives et importantes comme celles qui ont été exprimées par mon collègue du Bloc québécois concernant la question de collusion et l'industrie pétrolière.
Avec cela à l'esprit, monsieur le commissaire, j'ai présenté le projet de loi C-472 concernant certains domaines limités qui, à mon avis, toucheraient certaines activités importantes de l'industrie, surtout pour ce qui est du refus de vendre, de restrictions concernant le marché, des ventes liées et de l'exclusivité des ventes. D'autres m'en ont parlé et il ne fait aucun doute que notre comité, monsieur le commissaire, entendra un jour les gens qui nous diront que ce n'est tout simplement pas vrai, que ces choses n'existent pas, que c'est du fantasme et que nous devrions nous contenter de ne rien dire, de ne rien voir, de ne rien entendre.
Monsieur le commissaire, j'ai consacré beaucoup de temps à la question et beaucoup d'autres députés commencent maintenant à s'apercevoir qu'il y a des problèmes et que nos concurrents jouissent peut-être d'une situation où leurs pratiques ailleurs, dans d'autres pays, ne sont pas illégales tant que le Canada n'a pas décidé du contraire. Je me demande, parce qu'il sera important pour le comité de savoir exactement quelle est votre position à partir de maintenant, s'il y a des cas où vous croyez qu'on pourrait peut-être faire de bons arguments mais qu'on ne peut pas régler à cause d'une question de ressources, à cause d'une question de manque de perception concernant une question ou parce que votre loi sur la concurrence remonte à 1986 et a été rédigée, d'après certains, quoique d'autres le contesteront, par ceux-là même qu'elle devait contrôler?
M. Konrad von Finckenstein: C'est toute une pléthore de questions.
La présidente: Cinq minutes.
M. Konrad von Finckenstein: Tout d'abord, les parties du côté civil, comme je l'ai dit, sont difficiles à appliquer mais elles ont été très précisément rédigées de cette façon parce qu'on veut faire la distinction entre une conduite anticoncurrentielle et une concurrence vigoureuse et on ne veut pas lier les mains de l'économie ou édicter un code rigide et ainsi de suite. Notre économie comporte beaucoup trop d'activités pour pouvoir énoncer des règles globales. La loi comporte la souplesse voulue pour que le commissaire puisse enquêter et s'il croit, à la lumière des faits et des dispositions de la loi qui sont rédigées de façon très générale, qu'un certain comportement est anticoncurrentiel, il peut alors en saisir le tribunal.
Je crois que c'est un bon système. Je crois que ça nous donne le meilleur des deux mondes, une souplesse maximale, encouragement de l'économie, en permettant aux entrepreneurs de voir comment ils peuvent maximiser leurs profits. Cependant, il y a un contrôle, nous pouvons toujours nous en mêler et arrêter les choses. Les pénalités sont-elles suffisantes? Devrait-on pouvoir obtenir des dommages-intérêts aussi bien qu'une injonction? C'est une question que l'on peut débattre. De toute évidence, les législateurs, en 1986, ont décidé que les dommages-intérêts étaient inappropriés. Certains nous disent maintenant que le moment est peut-être venu de changer notre fusil d'épaule.
Dans notre livre blanc, nous avons proposé, et le FPP en a été saisi, que les affaires purement privées entre, pour le gros de la chose, deux hommes d'affaires ou compagnies n'ont pas à ameuter tout l'appareil du bureau de la concurrence et ainsi de suite. Cela devrait pouvoir se régler. Il peut y avoir certains cas où une plainte légitime n'est pas réglée à cause de priorités différentes ou de manque de ressources.
Je suis tout à fait d'accord avec ceux qui disent que pour compléter la Loi sur la concurrence, il faudrait y trouver quelque chose du genre de ce qui a été proposé par le FPP. Et je crois bien qu'il vous revient de décider si le moment est venu de le faire en vous fondant sur les témoignages que vous entendrez pour en arriver à un consensus.
M. Dan McTeague: Merci.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur McTeague.
Très brièvement, madame Torsney.
Mme Paddy Torsney: Deux choses. Le Nigéria est un des pays d'où nous parviennent beaucoup de ces lettres envoyées par ces fraudeurs. Travaillez-vous de concert avec le gouvernement de ce pays pour arrêter ce genre de chose?
M. Konrad von Finckenstein: Il s'agit de fraudes, en réalité, et de fraudes concernant des prêts. La GRC s'occupe de cela. Quand on me saisit de ces cas, je les renvoie à la GRC. Je ne sais pas dans quelle mesure les Nigériens coopèrent.
Mme Paddy Torsney: Il y a peut-être autre chose que vous pourriez m'expliquer. Postes Canada a un processus, je suppose, grâce auquel on peut vérifier les énormes quantités de courrier qui passent par ses services. Est-ce que cet organisme exige que les compagnies soit leur soumettent quelque chose démontrant qu'elles ont obtenu votre approbation, soit qu'elles respectent les directives du Bureau de la concurrence concernant les cartes de jeu? Devrait-il y avoir un processus? Franchement, cela vous aiderait à éviter un bon nombre de fraudes ou d'avoir à enquêter sur ces questions si ces choses n'étaient tout simplement pas livrées.
M. Konrad von Finckenstein: C'est une façon de s'occuper du problème. Le système n'est pas ainsi fait à l'heure actuelle.
Fondamentalement, nous sommes une agence d'enquête qui s'occupe de plaintes. Il ne nous revient pas d'approuver les gens d'avance ou de dire si ces gens respectent les lois ou non. Nous avons un programme de surveillance et les compagnies qui ont des inquiétudes peuvent toujours venir chez nous et nous dire ce qu'elles veulent faire. Nous leur donnerons des conseils et ainsi de suite. Mais cela se fait sur une base volontaire.
Mme Paddy Torsney: Il y a des frais?
M. Konrad von Finckenstein: Oui.
Mme Paddy Torsney: Combien en coûterait-il pour obtenir une lettre pour dire que la carte de jeu, par exemple, est conforme à vos directives?
M. Konrad von Finckenstein: Pas très cher. Quatre mille dollars, me semble-t-il. Je pourrai vous faire parvenir le chiffre exact.
Mme Paddy Torsney: Plus précisément à propos des cartes de jeu, pourriez-vous, si c'est possible, envoyer à notre comité des renseignements sur le degré de difficulté que cela représenterait? Combien en coûterait-il, au total, vu le nombre de ces cartes, si quelqu'un devait passer, disons, un jour par semaine, pour les vérifier et voir si c'est acceptable; ou si ce ne l'est pas, si ce n'est pas conforme, pour que nous puissions empêcher...? C'est un peu comme l'exemple de l'environnement. On ne veut pas se retrouver avec des dégâts irréparables sur les bras. Faisons de la prévention. Arrêtons les choses avant qu'elles ne commencent.
C'est surtout Postes Canada qui distribue ces cartes.
M. Konrad von Finckenstein: Oui, mais vous êtes en train de nous transformer en responsables de la réglementation, ce qui n'est pas vraiment notre rôle.
Mme Paddy Torsney: Il s'agit simplement d'une demi-personne une fois par semaine.
M. Konrad von Finckenstein: Il va sans dire que si la loi nous oblige à le faire, nous allons le faire. Mais pour le moment, nous nous occupons des enquêtes, pas de la réglementation.
Mme Paddy Torsney: Mais votre travail serait tellement plus facile si vous pouviez faire enquête dans le cas des questions très importantes, et laisser de côté cette question-ci.
M. Konrad von Finckenstein: Que voulez-vous qu'on fasse au juste à cet égard?
Mme Paddy Torsney: Quel serait le coût? Combien feriez-vous payer à une compagnie qui voulait distribuer ce genre de cartes? Avez-vous une idée des volumes de ces cartes? Quelle serait l'incidence d'une telle mesure sur vos coûts?
M. Konrad von Finckenstein: Je vais essayer de vous faire parvenir ce renseignement.
Merci.
Mme Paddy Torsney: Merci.
La présidente: Merci, madame Torsney.
J'ai sur ma liste le nom de M. Bagnell, suivi de M. Rajotte.
Monsieur Bagnell.
M. Larry Bagnell: Selon les dispositions actuelles, est-il possible que quelqu'un participe à un concours sans avoir choisi de le faire, c'est-à-dire qu'il y participe par défaut parce qu'il ne renvoie pas le formulaire? Serait-il possible que Reader's Digest envoie à tous ses abonnés une carte leur disant «Si vous ne renvoyez pas cette carte, vous participez automatiquement au concours?»
Mme Paddy Torsney: C'est l'option négative.
M. Konrad von Finckenstein: Voulez-vous savoir s'il est possible de faire cela ou si une telle pratique serait une violation de la Loi sur la concurrence?
M. Larry Bagnell: Oui, je veux savoir si ce serait une violation des nouvelles dispositions proposées.
Reader's Digest est un bon exemple. Beaucoup de personnes âgées reçoivent ces cartes les informant qu'elles participent à un concours. Je pense qu'elles n'ont jamais rempli de formulaire pour participer au concours.
M. Konrad von Finckenstein: Est-ce qu'elles doivent payer quelque chose? Est-ce qu'elles ont dû assumer un coût?
M. Larry Bagnell: Là n'est pas la question. Elles doivent envoyer ces cartes par la poste environ 20 fois afin de voir si elles passent à la prochaine étape. Vingt timbres représentent un coût important pour les personnes âgées.
M. Konrad von Finckenstein: En quoi consiste la tromperie?
Le problème qu'on essaie de corriger c'est la tromperie, où on fait croire aux gens qu'ils ont gagné quelque chose, alors que ce n'est pas vrai, et les cas où on fait payer les gens d'avance.
Dans la situation que vous avez décrite, je ne vois pas de coûts qui seraient imposés. On n'induit pas les gens en erreur, etc. Si Reader's Digest ou toute autre compagnie—je ne sais pas laquelle—décide de faire participer ses abonnés à un concours, rien ne l'empêche de le faire. L'abonné n'a pas à assumer des coûts. Il peut décider de ne pas en tenir compte.
Donc je ne vois pas en quoi il y aurait une victime.
M. Larry Bagnell: Je vais permettre aux gens de réfléchir à cela un peu.
• 1045
Deuxièmement, en vertu des dispositions proposées, serait-il
possible qu'une compagnie annonce un prix—une voiture par
exemple—qu'il y ait aussi comme prix 10 000 chaînes porte-clés
d'une valeur de 1 $, que la personne doive appeler un numéro 1-900
pour gagner et qu'on lui envoie un avis lui disant qu'elle a gagné,
sans préciser le prix—la voiture ou une chaîne porte-clés—et que
le coup de téléphone dure plus de cinq minutes et coûte plus cher
qu'une chaîne porte-clés de 5 $? Est-ce qu'il y a une disposition
qui fait que le coût qu'il faut payer pour obtenir le prix ne doit
pas dépasser la valeur du prix? Sinon, serait-ce une bonne idée de
prévoir cela?
M. Konrad von Finckenstein: Oui, la disposition stipule prévoit explicitement qu'il faut afficher la valeur du prix.
M. Larry Bagnell: Je sais qu'il faut afficher la valeur du prix, mais moi, je vous interroge sur ce qu'il en coûte pour l'obtenir. Est-il interdit de payer plus pour l'obtenir que la valeur du prix?
M. Konrad von Finckenstein: Il faut divulguer la valeur du prix. S'il faut payer pour l'obtenir, il faut divulguer combien cela coûte. Si le prix vaut 20 $ mais qu'il faut dépenser 30 $ afin de l'obtenir, vous devez le dire. Or, s'il y a des gens qui tiennent toujours à participer au concours, qu'ils le fassent, mais ils le feront en connaissance de cause.
M. Larry Bagnell: Quelqu'un a parlé tantôt des numéros 1-900. Les frais engagés peuvent varier selon le lieu de résidence du participant, et c'est quelque chose d'imprévisible. On compose le numéro sans savoir pendant combien de temps il faudra rester en ligne.
M. Konrad von Finckenstein: S'il s'agit d'un numéro 1-900, il faut signaler à la personne qui appelle que l'appel est à ses frais. Ce n'est pas un numéro 1-800, c'est un numéro 1-900, ce qui veut dire que l'appel n'est pas sans frais. Il faut divulguer cela.
M. Larry Bagnell: D'accord. Tout ce que je propose, c'est tout simplement d'empêcher que les frais engagés en vue d'obtenir un prix dépassent la valeur du prix. Je crois que cela faciliterait les choses pour ceux qui ne s'y retrouvent plus.
Merci.
M. Konrad von Finckenstein: Eh bien, monsieur Bagnell, nous avons publié ces lignes directrices, qui feront évidemment l'objet de consultation. Si elles ne sont pas assez claires ou s'il y a des lacunes à combler, nous le ferons bien sûr. L'idée, au fond, c'est que les participants au concours connaissent les risques.
La présidente: Merci.
Monsieur Rajotte, à vous la parole.
M. James Rajotte: Merci, madame la présidente.
Monsieur le commissaire, je pense que l'une des préoccupations des entreprises, si ce projet de loi prévoyait l'accès privé, serait la protection des renseignements commerciaux qu'elles considèrent comme confidentiels. J'aimerais savoir si vous avez des conseils ou orientations à donner au comité sur des façons de protéger les renseignements commerciaux confidentiels dans le cadre d'une instance engagée devant le Tribunal de la concurrence relativement à l'accès privé.
M. Konrad von Finckenstein: Il s'agirait de la même protection que l'on retrouve dans le cadre de tout litige, que ce soit en vertu de la Loi sur la concurrence ou non. Dans le cas d'une action au civil, il y a une procédure de communication préalable selon laquelle il faut grosso modo divulguer à la partie adverse les documents essentiels pertinents. Cependant, il y a des règles de procédure civile régissant le traitement des renseignements confidentiels par nos tribunaux, ce qu'il faut divulguer et ce qu'on n'est pas tenu de divulguer, et ces règles-là s'appliquent de la même façon en matière d'accès privé. Donc le recours à l'accès privé pour obtenir des renseignements sur les concurrents ne serait ni plus ni moins fréquent que le recours à l'heure actuelle à toute autre action au civil intentée par une entreprise contre une autre.
François, avez-vous quelque chose à ajouter?
M. François-Bernard Côté: C'est tout à fait juste. Les mesures existantes de protection des renseignements confidentiels s'appliqueraient. Normalement, cela se fait au moyen d'une directive de la cour ou du tribunal, pourvu qu'on établisse qu'il s'agit de renseignements importants d'ordre stratégique ou commercial.
M. James Rajotte: Mais une entreprise ne pourrait-elle pas s'en servir afin de découvrir les forces ou faiblesses d'un concurrent? Comment prévenir cela?
M. François-Bernard Côté: Il est difficile de répondre à cette question dans l'absolu. La protection existe, on n'a qu'à la demander pour l'obtenir. Mais je ne sais pas si votre scénario ne pourrait jamais se produire.
M. Konrad von Finckenstein: Dans le cas des fusionnements, surtout ceux qui sont litigieux, il s'agit probablement des renseignements les plus délicats que possède l'entreprise. Ce sont des renseignements sur les prix, des renseignements stratégiques et des renseignements sur les marchés. La procédure actuelle sert à protéger ces renseignements des tierces parties. Cette même procédure s'appliquerait à l'accès privé.
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La procédure judiciaire en matière de renseignements
confidentiels est très détaillée pour empêcher qu'un concurrent
s'en serve afin d'obtenir des renseignements auxquels il ne devrait
pas avoir accès. À ma connaissance, personne ne prétend que l'accès
privé pourrait, d'une façon ou d'une autre, donner accès à des
renseignements que l'on ne peut pas obtenir autrement.
M. James Rajotte: Bien qu'il ne s'agisse pas d'une instance engagée devant le Tribunal de la concurrence, beaucoup d'anciens employés des Lignes aériennes Canadien prétendent que lors des pourparlers avec Air Canada il y a plusieurs années en vue d'un fusionnement éventuel, on a ouvert les livres et que, voyant dans quelle situation Canadian se trouvait, Air Canada a décidé de faire marche arrière et d'attendre jusqu'à ce que Canadian se trouve dans une situation plus désespérée avant d'intervenir.
Il est vrai qu'il ne s'agit pas d'un cas précis devant le Tribunal de la concurrence, mais y a-t-il assez de garanties pour éviter qu'une telle chose ne se produise?
M. Konrad von Finckenstein: Écoutez, ce n'est pas la même situation. Il s'agit là de deux entreprises qui veulent fusionner, et l'entreprise faisant l'objet de l'acquisition prend toujours des risques en entamant des négociations en vue d'un fusionnement. L'autre partie veut l'ausculter afin d'évaluer son état de santé. On risque de trop divulguer de choses et donc de prêter le flanc à des prises de contrôle hostiles, ou bien l'autre entreprise décide d'abandonner parce qu'elle estime que le prix est trop élevé, tout en ayant obtenu des renseignements utiles qui l'avantageront sur le plan de la concurrence.
Cela n'a rien à voir avec les instances judiciaires. Ce sont les dangers inhérents lorsqu'on joue le jeu des fusionnements.
M. James Rajotte: Oui.
La présidente: Merci beaucoup, monsieur Rajotte.
Monsieur le commissaire, nous sommes en train d'examiner le projet de loi C-23, et en même temps nous examinons d'autres aspects, dont l'accès privé. Je suppose que j'essaie d'avoir une idée du calendrier de votre prochaine série de modifications. À ce propos, s'agira-t-il d'un projet de loi ou d'un autre document de travail? Peut-être que vous pourriez tout simplement nous donner une idée de vos intentions.
M. Konrad von Finckenstein: Nous croyons qu'il faut modifier progressivement la Loi sur la concurrence, la loi-cadre, pour nous assurer qu'elle reste à jour, et qu'il n'y a pas de changements abrupts. Après tout, elle a un énorme impact sur l'industrie d'un bout à l'autre du pays, et il faut prendre le temps d'assimiler ces modifications; nous devons connaître l'impact. Et c'est souvent très difficile de renverser la vapeur après coup.
Notre but est donc de nous assurer que la Loi sur la concurrence reste à jour. Nous avons un service de modifications qui relève de M. Morin et qui fait des recherches continuellement sur diverses questions pour nous assurer que nous sommes à jour.
Le temps est venu d'adopter les modifications dont vous êtes saisis, et qui font l'objet d'un consensus, à l'exception de la question de l'accès privé, dont nous discuterons. Nous préférerions que ces modifications-là soient adoptées très rapidement. Nous savons que l'article 45 devra attendre la prochaine série de modifications. Cela figure déjà à l'ordre du jour grâce au FPP. Suite à vos discussions et aux témoignages que vous entendrez, et aussi à vos conclusions définitives sur la concurrence, vous pourrez proposer d'autres questions sur lesquelles, d'après vous, il faudrait se pencher.
Supposons à titre d'exemple que vous estimiez que l'abus de position dominante devrait entraîner non seulement une ordonnance d'interdiction, mais aussi des dommages-intérêts. Vous pourriez bien mettre cela sur le tapis. Cela ferait alors partie de notre prochain train de modifications.
Nous procédons toujours de la même façon: nous commençons par un livre blanc qui jette les bases et qui explique de quoi il s'agit, comme nous l'avons fait cette fois-ci. Parfois, cela s'assortit de projets de loi d'initiative parlementaire, puisqu'ils soulèvent des questions très pertinentes qui méritent d'être abordées. Nous tenons des consultations et ensuite nous obtenons l'approbation nécessaire du Cabinet, et on vous saisit ensuite du projet de loi.
La présidente: Très bien.
Pour votre gouverne, le timbre signale l'absence de quorum, et non pas la tenue d'un vote.
Afin que tous les membres du comité soient sur la même longueur d'onde, étant donné que nous entreprenons notre examen du projet de loi C-23 et pour simplifier les choses, nous avons discuté de la meilleure façon de procéder. Dans sa lettre, le ministre nous a demandé de nous pencher sur la question de l'accès privé.
Il a été proposé que nous examinions la question de l'accès privé et le projet de loi C-23, avant de passer à notre rapport provisoire, afin de régler ces questions avant que vous ne passiez à votre prochaine série.
Vous nous dites aujourd'hui que vous n'avez pas l'intention de rédiger un projet de loi mais plutôt un document de travail, Ai-je bien compris?
M. Konrad von Finckenstein: Nous allons faire les deux. Il y aura un document suivi d'une mesure législative.
À mon avis, selon nous, il serait préférable de se concentrer sur le projet de loi C-23 et de le faire adopter avec ou sans l'accès privé. Vous pourriez ensuite poursuivre l'examen de la Loi sur la concurrence qui pourrait ensuite servir à la prochaine série de modifications et vous pourriez ajouter le rapport à ce qui se trouve déjà sur la table, c'est-à-dire l'article 45.
La présidente: Très bien. Avez-vous un échéancier pour votre prochaine série?
M. Konrad von Finckenstein: Tout dépend du moment où le projet de loi C-23 sera promulgué. À supposer que le projet de loi C-23 puisse être promulgué d'ici Noël ou Pâques, à mon avis, c'est à ce moment-là que la prochaine série serait lancée.
La présidente: Très bien. Si le comité est d'accord, pendant les quelques semaines à venir, nous pourrions examiner le projet de loi C-23 et l'accès privé, pour ensuite terminer la rédaction de notre rapport provisoire, avec peut-être des discussions en table ronde, aussitôt que nous en aurons fini avec le projet de loi C-23.
Nous vous remercions, monsieur le commissaire. Vous serez invité à revenir à la fin de cette période d'audiences, pour vous permettre d'apporter des informations complémentaires, une fois que nous aurons entendu tous les autres témoins. Je suis convaincue que vous suivrez de très près ce qui se passe à nos réunions.
M. Konrad von Finckenstein: Je vous remercie. Je reviendrai volontiers. Entre-temps, si certains témoins soulèvent des questions pour lesquelles vous aimeriez de plus amples renseignements, nous nous ferons un plaisir de vous les fournir.
La présidente: Merci. Nous vous en savons gré.
La séance est levée.