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NDVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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37e LÉGISLATURE, 1re SESSION

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


Témoignages du comité

TABLE DE MATIÈRE

Le jeudi 7 février 2002




¹ 1535
V         Le vice-président (M. David Price (Compton--Stanstead, PC))
V         M. André Marin (ombudsman, ministère de la Défense nationale)

¹ 1540

¹ 1545
V         Le vice-président (M. David Price)
V         Lieutenant général Roméo Dallaire (retraité, témoigne à titre personnel)

¹ 1555

º 1600
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Benoit
V         Lgén Roméo Dallaire

º 1605
V         Mr. Benoit
V          Lgén Roméo Dallaire
V         M. Benoit
V          Lgén Roméo Dallaire
V         M. Benoit

º 1610
V         M. André Marin
V         M. Benoit
V         M. André Marin
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)

º 1615
V         Lgén Roméo Dallaire
V         M. Claude Bachand
V          Lgén Roméo Dallaire

º 1620
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Stan Dromisky (Thunder Bay--Atikokan, Lib.)
V          Lgén Roméo Dallaire

º 1625
V         M. Stan Dromisky
V         Lgén Roméo Dallaire

º 1630
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD)
V         M. André Marin
V         M. Peter Stoffer
V         M. André Marin
V         M. Peter Stoffer

º 1635
V          M. André Marin
V          Lgén Roméo Dallaire
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne)
V          Lgén Roméo Dallaire

º 1640

º 1645
V         M. Rob Anders
V         Le vice-président (M. David Price
V         M. John O'Reilly (Haliburton--Victoria--Brock, Lib.)
V          Lgén Roméo Dallaire
V         M. John O'Reilly
V         Mr. André Marin

º 1650
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Bob Wood (Nipissing, Lib.)
V          Lgén Roméo Dallaire

º 1655
V         Mr. Wood
V          Lgén Roméo Dallaire
V         Mr. Wood
V         Le vice-président (M. David Price)
V          Lgén Roméo Dallaire
V         Le vice-président (M. David Price)
V         Le vice-président (M. David Price)
V          Lieutenant général Christian Couture (sous-ministre adjoint, Ressources humaines militaires, ministère de la Défense nationale)

» 1705

» 1710
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Claude Bachand
V         Lgén Christian Couture
V         M. Claude Bachand
V         Lgén Christian Couture
V         M. Claude Bachand
V         Lgén Christian Couture
V         M. Claude Bachand
V         Lgén Christian Couture

» 1715
V         M. Claude Bachand
V         Brigadier général Lise Mathieu (directeur général, Service de santé, ministère de la Défense nationale)
V         M. Claude Bachand

» 1720
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Bob Wood
V         Lgén Christian Couture
V         M. Bob Wood
V         Lgén Christian Couture
V         Mr. Wood
V         Lgén Christian Couture
V         M. Bob Wood
V         Lgén Christian Couture
V         M. Bob Wood
V         Bgén Lise Mathieu
V         Lgén Christian Couture

» 1725
V         Mr. Wood
V         Lgén Christian Couture
V         Mr. Wood
V         Lgén Christian Couture
V         M. Bob Wood
V         Lgén Christian Couture
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. Rob Anders
V         Lgén Christian Couture
V         M. Rob Anders
V         Lgén Christian Couture
V         M. Rob Anders
V         Lgén Christian Couture
V         M. Rob Anders
V         Lgén Christian Couture

» 1730
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. John O'Reilly

» 1735
V         Lgén Christian Couture

» 1740
V         M. John O'Reilly
V         Lgén Christian Couture
V         M. John O'Reilly
V         Le vice-président (M. David Price)
V         M. John O'Reilly
V         Lgén Christian Couture
V         M. John O'Reilly
V         Le vice-président (M. David Price)
V         Une voix
V         Le vice-président (M. David Price)
V         Lgén Christian Couture
V         Le vice-président (M. David Price)
V         Lgén Christian Couture
V         Le vice-président (M. David Price)










CANADA

Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants


FASCICULE 042 
l
1re SESSION 
l
37e LÉGISLATURE 

Témoignages du comité

Le jeudi 7 février 2002

[Énregistrement électronique]

¹  +(1535)  

[Traduction]

+

    Le vice-président (M. David Price (Compton--Stanstead, PC)): Bonjour, mesdames et messieurs.

    Je m'excuse de ce petit retard. Ce n'est pas du tout normal mais il y avait des votes à la Chambre et cela nous a pris un peu plus de temps que d'habitude pour arriver ici. Comme vous pouvez le remarquer, il manque encore une ou deux personnes. Elles ne devraient pas tarder, j'en suis sûr.

[Français]

    Monsieur Marin, c'est un plaisir pour moi de vous voir ici, de même que vous, général Dallaire.

    Nous pourrions commencer par une présentation d'une dizaine de minutes de chacun de vous et passer ensuite aux questions.

+-

    M. André Marin (ombudsman, ministère de la Défense nationale): Permettez-moi d'abord de vous remercier de m'avoir invité à comparaître aujourd'hui devant ce comité.

[Traduction]

    L'esprit non partisan de votre comité, la diligence et l'intérêt réels qu'il manifeste à l'amélioration du bien-être des membres du ministère de la Défense nationale et des Forces armées canadiennes ne cessent de m'impressionner.

    Comme votre temps est compté et comme je sais que vous avez certainement lu notre rapport spécial sur le traitement systémique des membres des FC atteints du syndrome de stress post-traumatique, ou SSPT, je n'entrerai pas aujourd'hui dans les détails. Je préférerais plutôt vous faire un bref exposé sur les questions de gestion du stress par les Forces canadiennes, y compris le syndrome de stress post-traumatique, depuis que les Forces canadiennes en reconnaissent officiellement la signification et l'importance.

    Beaucoup d'encre a coulé sur la nécessité de faire quelque chose et pourtant les enquêtes que nous avons menées nous incitent à conclure que depuis huit ans que les Forces canadiennes ont décidé que des mesures étaient nécessaires, au mieux nous ne pouvons parler que de balbutiements.

    Le premier indice d'une intervention officielle concernant le SSPT dans les Forces canadiennes est venu sous la forme de la publication d'une ordonnance administrative des Forces canadiennes, l'OAFC de mars 1994 qui définissait le SSPT comme «des troubles psychologiques chroniques qui peuvent se manifester dans une minorité de cas». Les rédacteurs de cette ordonnance pourraient facilement être qualifiés de clairvoyants dans la mesure où ce qu'ils disent et les instructions qu'ils donnent à la chaîne de commandement pour traiter des problèmes de SSPT présagent les recommandations contenues dans notre rapport spécial publié cette semaine--quelque huit ans plus tard.

    Écoutez ce qui suit.

[Français]

On devrait donner une éducation préventive à tous les groupes à risque élevé. Le leader, à tous les niveaux, devrait savoir que le manque de gestion appropriée dû au stress au moment d'un incident critique peut mettre en jeu le déroulement d'une mission et entraîner des coûts appréciables, autant du côté financier que du côté humain.

    De plus, cela entraîne des relations de travail tendues, une baisse de productivité, des absences inutiles et un retrait prématuré de membres hautement qualifiés.

[Traduction]

    Ensuite:

Les chefs doivent donc savoir reconnaître les IC (incidents critiques) en puissance et être prêts à faire appel aux militaires qui ont les compétences voulues pour assurer l'éducation préventive...

    L'ordonnance cite ensuite un certain nombre de facteurs dont la cohésion du groupe, le degré de réalisme de l'instruction et la formation spéciale.

    L'ordonnance signale que la confidentialité et l'entraide sont des ingrédients clés de ce processus.

    L'ordonnance parle aussi de difficultés d'adaptation pour certains militaires à leur retour et de séances de rapport au terme d'affectations de longue durée. Les commandants doivent faire en sorte que leur personnel soit prêt à faire face à ces incidents critiques et, à cette fin, doivent offrir un programme d'enseignement structuré et des séances de rapport appropriées.

    Toutes les questions contenues dans cette ordonnance de 1994 font l'objet des recommandations du rapport publié cette semaine, huit ans plus tard. Elles sont en fait l'aboutissement et l'écho de cette ordonnance.

    Depuis mars 1994, de nombreuses autres promesses et de nombreux autres rapports de la Défense et des Forces canadiennes n'ont pas connu beaucoup plus de succès au niveau de l'application. En 1998, le rapport McLellan recommandait la formation, par exemple, des chefs des Forces canadiennes pour le traitement de leur personnel blessé, y compris celui souffrant du SSPT.

    Vous vous souviendrez probablement que comité, en 1998, dans un rapport intitulé Pour aller de l'avant: Plan stratégique pour l'amélioration de la qualité de la vie dans les Forces canadiennes, recommandait que les recommandations du rapport McLellan

soient adoptées le plus tôt possible et que l'on prenne des mesures connexes pour inculquer aux chefs que savoir manifester de l'empathie est une partie intégrante de l'art du commandement.

    Dans sa réponse à votre comité, les Forces canadiennes déclaraient:

Le contenu des cours destinés aux chefs est modifié de façon à ce que ces derniers reçoivent la formation appropriée dans le domaine de la prestation de soins aux blessés.

    Bien que des enseignements aient été tirés, notre enquête conclut à des progrès qualitatifs et quantitatifs minimes, voire inexistants en termes de formation destinée aux chefs des Forces canadiennes sur le SSPT en 2002.

    Les exemples de nobles déclarations et de promesses vertueuses à tous les échelons pendant toute cette période jusqu'à aujourd'hui ne manquent pas. Les progrès concrets, eux, ont été sclérotiques.

    La formation et l'éducation sont les clés du changement d'attitude. Le manque d'initiatives concrètes a laissé perdurer et se répandre les préjugés et les attitudes négatives envers les victimes du SSPT. Malgré le formidable soutien public qui a accueilli la publication de notre rapport au début de la semaine, la validité de ce syndrome continue à être contestée.

    Prenez le Kingston Whig-Standard, le lendemain de la publication de notre rapport, qui cite un ancien chef des Forces canadiennes:

«Nous ne l'avons jamais qualifié de syndrome»... «Nous les traitions de poules mouillées et leur recommandions de changer de métier et de livrer des pizzas au centre-ville à Kingston»... «Ce ne sont pas des soldats de carrière».

    La situation évoluant à une allure d'escargot, les soldats et leurs familles continuaient à souffrir. Pendant les heures qui ont suivi la publication de notre rapport spécial, nous avons reçu une douzaine de nouvelles plaintes de soldats au bout du rouleau, y compris une note écrite à la main qui m'a été envoyée et que j'ai reçue il y a quelques heures par lettre recommandée et dont l'auteur menace de se suicider.

    Cela ne peut continuer.

    Nous avons fait 31 recommandations qui portent sur la prévalence du SSPT, sur les attitudes, l'éducation, la formation et les procédures liées au déploiement, l'éducation pour le personnel soignant et les problèmes systémiques. Tout en reconnaissant l'existence de quelques bonnes initiatives, les efforts actuellement déployés pour lutter contre le SSPT manquent de coordination, d'efficacité et de l'ampleur nécessaire pour vraiment parler de progrès.

    Par exemple, l'initiative de soutien par les pairs des Forces canadiennes, qui a notre appui plein et entier, ressemble à ce que la majorité des forces policières font depuis le début des années 80, mais la version des Forces canadiennes, actuellement, ne peut compter que sur trois conseillers et n'entrera pleinement en vigueur qu'en 2004. Que doivent faire les victimes en attendant?

    Entre-temps, nous déployons un contingent de 750 soldats pour participer à des opérations de combat. Je vous demande d'appuyer nos recommandations, et en particulier la recommandation visant la création d'un poste de coordonnateur du SSPT, poste relevant directement du chef d'état-major, ce qui permettra de galvaniser tous les secteurs de l'armée et de donner la priorité à cette question.

¹  +-(1540)  

    Le SSPT ne concerne pas un secteur militaire plus particulier qu'un autre. Il touche l'armée de terre, il touche la marine, il touche les ressources humaines, il touche le secteur médical et il touche la formation. Il nous faut une solution qui prenne en compte tous ces secteurs, qui assume toutes les responsabilités et s'exprime à un niveau qui lui confère tout le poids et toute l'autorité du bureau du Chef d'état-major.

    Nous n'avons plus te temps de faire d'autres études ou de considérer ces questions comme un simple problème de relations publiques. Nous ne pouvons pas nous laisser endormir par un faux sens de sécurité et de quiétude. Garder le cap est dépassé. Il nous faut agir.

    Merci.

¹  +-(1545)  

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci.

    Général Dallaire, vous avez une déclaration?

[Français]

+-

    Lieutenant général Roméo Dallaire (retraité, témoigne à titre personnel): Monsieur le président, madame et messieurs, c'est la deuxième occasion que j'ai de me présenter devant votre comité pour discuter du sujet du stress post-traumatique et de ses effets sur les membres des Forces canadiennes.

    Alors que j'étais général trois étoiles, sous-ministre adjoint aux Ressources humaines, je m'étais présenté devant vous, en 1998, pour définir la situation, exprimer des soucis sur l'avenir du programme et exposer ce que l'on croyait en penser à ce moment-là.

    Ce fut une session très houleuse au cours de laquelle le chef de la Défense et moi avons eu quelques mots. C'est lui qui a poursuivi le débat car, à ce moment-là, j'étais à quelques mois de totalement m'écrouler et de devenir totalement incapable d'occuper efficacement quelque fonction que ce soit, et j'ai pris un congé de maladie de six mois.

    La séance avait été houleuse parce que j'avais eu l'impression que mes collègues du moment tentaient de considérer le problème comme relevant de la maladie et ne faisant pas partie des besoins opérationnels normaux ou des difficultés opérationnelles du moment.

¹  +-(1555)  

[Traduction]

    Donc d'avoir perdu mon sang-froid à ce moment-là n'a probablement été aussi productif que cela aurait dû l'être. Cependant, je crois que quand on réfléchit à ces instants et à l'état d'esprit dans lequel je me trouvais, c'était un cri du coeur de quelqu'un qui était blessé, et qui l'est toujours, de quelqu'un qui essayait de faire comprendre que nos unités opérationnelles comptaient un grand nombre de victimes et que ces victimes n'étaient pas des victimes ordinaires mais plutôt des victimes «collatérales». À l'époque on parlait d maladies, il fallait même les mettre en quarantaine pour qu'ils ne contaminent pas les autres membres des unités. Ce terme a été utilisé il n'y a pas trois mois par un commandant de bataillon des Forces canadiennes.

    Le contenu du rapport déposé cette semaine est à la fois opportun et approprié. Je dis qu'il est opportun car nous semblons entrer dans une ère où la présence, la réalité de ces victimes et les méthodes professionnelles de traitement...mais aussi les changements d'esprit dans les unités. L'atmosphère dans les unités, la culture concernant ces victimes semble changer.

    Je trouve difficilement admissible que ne soit pas déjà beaucoup plus en place un système sophistiqué et universel de soutien pour ces victimes. Notre sens de l'urgence nous interdit que soit atteint ce niveau de déclin sophistiqué. Les soldats, les marins et les aviateurs non seulement continuent à en souffrir, ce qui aune incidence sur leur efficacité opérationnelle, mais leurs familles, leurs unités et eux-même doivent parfois aller jusqu'à certains extrêmes pour essayer d'éliminer cette douleur. Il reste des victimes et pour certains, au risque même de leur vie.

    Donc, j'ai été invité et je souhaite vous parler de cette situation du SSPT. Néanmoins, je ne souhaite pas minimiser le fait que même en temps de paix—compte tenu de la variété des tâches, de la nature des réductions d'effectifs, et de l'incidence de la demande sur les Forces canadiennes, tant en opération qu'en garnison—nous sentons un degré plus élevé de stress et de traumatisme dans l'atmosphère générale des Forces canadiennes, simplement parce que nous les poussons littéralement à bout. J'espère donc en conséquence que l'examen nécessaire de la politique reconnaîtra que les effectifs sont un élément capital des Forces armées, aussi capital, si non plus, que le matériel, la technologie et les structures de commandement et de contrôle.

    Mesdames et messieurs, j'aimerais aborder dans mon exposé, si vous me le permettez, trois points principaux. Le premier est qu'encore aujourd'hui, comme nous avons pu le constater avec ceux qui ont commenté ce rapport et qui ont décrit les victimes du SSPT, on continue à parler de maladie. Nous continuons toujours à parler de maladie. Nous continuons à parler d'un problème de santé mentale. Nous continuons à minimiser le fait que ces victimes du SSPT sont affectées physiquement au niveau du cerveau avec le déséquilibre mental inhérent que cela provoque. Ce sont des blessés. Ce ne sont pas des malades; ce sont des blessés.

    Et encore aujourd'hui, quand un soldat revient d'une mission avec un membre en moins ou avec un trou dans le dos, que sais-je, la méthode pour résoudre le problème, pour réconforter la famille, les nouveaux systèmes mis en place qui répondent plus aux besoins, non seulement au niveau du ministère de la Défense, d'aide dans les arcanes de la bureaucratie, de la paperasse, mais aussi au ministère des Affaires des anciens combattants qui ont adopté des mesures importantes dans ce domaine... Nous faisons de notre mieux pour que le concerné et sa famille ne soient pas abandonnés, soient soutenus, nous allons même jusqu'à l'aider à trouver du travail.

    Il n'y a pas de tel scénario pour les victimes du SSPT. Nous continuons à essayer de faire reconnaître à ces victimes le statut de blessé. À titre de soldats, de marins et d'aviateurs blessés, ils doivent bénéficier du même respect et du même soutien non seulement des Forces armées mais de la population civile. Quand une personne arrive à la légion ou dans une autre organisation avec un membre en moins, c'est évident, on manifeste un énorme respect pour l'invalidité soufferte par cette personne et pour le traumatisme postérieur.

    Il faut donc commencer par reconnaître que les victimes du SSPT sont des blessés. C'est une blessure comme une autre. L'impact de cette blessure est immuable. Ce qu'on espère avec le temps, avec les thérapeutes et le soutien d'amis, c'est construire une prothèse qui nous empêche de tomber dans cet état de dépression incroyable qui peut mener et qui mène au suicide, et dans de telles circonstances, il faut qu'il y ait quelque chose auquel s'accrocher—, pour s'arracher à cette spirale de la mort et se faire aider à vivre encore au moins un jour pour réfléchir à son avenir. Ce sont des victimes de blessures physiques et mentales, rien de moins.

    Le deuxième point dont j'aimerais vous parler, avec votre permission, est celui de tout ce contexte du soutien des pairs, nouvelle initiative lancée par un jeune major, lui-même une victime, qui a servi avec moi au Rwanda et qui continue à bénéficier d'un soutien. J'espère qu'il en a autant qu'il en a besoin tant sur le plan professionnel sous forme d'aide thérapeutique mais aussi de la part de ses collègues. Je trouve beaucoup de mérite à cette initiative.

    Il y a deux instruments essentiels à la base de la construction de cette prothèse. Il y a tout d'abord l'aide thérapeutique professionnelle. C'est inévitable. Il n'y a pas de guérisseur pour cela. Il ne s'agit pas de dire «avec le temps, ça ira mieux». Avec le temps cela empire à moins de ne bénéficier de cette prothèse. Avec le temps on finit par avoir une vision numérique de chacun de ces scénarios traumatisants et ils vous hantent en permanence. Il suffit d'une odeur, d'un bruit, d'un commentaire pour vous faire basculer.

    J'étais en Sierra Leone au mois de décembre. Je traversais la rue. Il y avait un vendeur avec une machette et des noix de coco. Il écorçait la noix de coco et c'était blanc en dessous. En traversant je l'ai vu faire et j'ai trébuché. Alors que j'essayais de continuer à traverser, j'ai entendu le bruit de la machette s'enfonçant dans cette noix de coco. Je me suis retrouvé paralysé. Pendant cinq minutes—pendant quatre minutes et quelques secondes—je n'ai plus été là, je n'étais plus du tout là. Heureusement qu'il y avait des gens pour me soutenir et m'aider à continuer mon chemin.

    Cette vulnérabilité est toujours présente. La thérapie professionnelle est un des éléments indispensables de cette prothèse. Ensuite il vous faut de bons copains, des pairs, des amis, des collègues qui étaient des collègues avant que vous ne subissiez cette blessure et qui restent vos collègues, c'est à espérer.

    Il faut plus que la famille. Souvent la famille ne comprend pas et on n'a pas la patience de tout expliquer. Il faut quelqu'un qui ait vécu la même expérience, qui peut écouter attentivement—rarement donner des conseils, mais juste écouter. Ne pas rire, ne pas s'enfuir, mais pleurer et être sensible.

    Dieu merci, après la Seconde Guerre mondiale, nous avions la légion. Bon nombre des samedis j'ai vu mon père et quelques-uns de ses copains se réunir autour d'une petite table d'Arborite et il me donnait cinq sous pour acheter des chips et un Coke et pour aller jouer à la table de billard. Il y en avait toujours un d'entre eux qui pleurait, ou ils seraient tous en train de mourir de rire. Ils consommaient beaucoup de bière. C'était la thérapie de l'époque, qui a eu pour résultat que beaucoup de gens sont devenus alcooliques, mais certains d'entre eux ont réussi à surmonter cela et à mener une vie honnête avec leur famille.

    La question des pairs s'applique non seulement aux particuliers, mais aussi au milieu, l'unité, le lieu de l'affectation. Il manque toujours ces dimensions-là. Nous sommes toujours en train d'écarter ces gens parce que nous sommes de nouveau dans une situation où, tout comme à la fin de la Seconde Guerre mondiale, nous avons des forces armées composées d'anciens combattants et de civils. Certains des anciens combattants se sont bien remis de leurs expériences ou n'ont jamais vécu de traumatisme. Ils chantent le même refrain que les civils: «Je ne serai jamais malade comme eux. Je ne serai jamais l'un d'eux.» Ce genre de prétention crée un scénario où les blessés sont écartés de la société et les remet en état dépressif.

    Des collègues qui pourraient éventuellement devenir de bons soldats et bien servir le pays sont souvent détruits par le commandement et par leurs pairs. J'utilise le terme détruit parce que certains d'entre eux se suicident car il ne leur reste rien. La famille ne peut pas comprendre. Ils sont rendus à une étape quelconque de leur thérapie, et leurs pairs, la loyauté sur laquelle ils ont compté pendant des années, ont disparu.

    Dans les Forces canadiennes, on commence à peine à parler de toute cette dimension. Il existe toujours des commandants de bataillon très prompts à vouloir se débarrasser de ces gens-là parce qu'il leur faut des troupes opérationnelles. Ils ont une lourde tâche mais une pénurie de troupes et doivent donc rester concentrés. Ils y parviennent, mais à quel prix : ces victimes demeureront victimes et leur état empirera.

    La dernière question que je voulais soulever—j'ai épuisé mon temps, alors veuillez m'excuser—est celle des familles. Mesdames et messieurs, il n'y a presque rien pour les familles. Les centres de soutien aux familles ont été mis sur pied pour venir en aide et ont repris beaucoup des tâches confiées au détachement arrière. Je ne le nie pas. Toutefois, ces centres ne sont pas à la hauteur pour aider les familles de soldats qui reviennent blessés ni pour offrir l'aide médicale aux membres de ces familles pour les aider à composer avec le stress et le traumatisme qu'ils éprouvent. Ils font ce qu'ils peuvent à cause des médias. À 18 h, ma famille ne parle toujours pas à table; nous sommes tous en train d'écouter les informations de Radio-Canada. On veut toujours savoir quel journaliste va nous déclarer tués, abattus, ou autre.

    En principe, les familles ne reçoivent toujours rien pour les aider à obtenir les soins thérapeutiques ou médicaux. J'ai dû payer de ma poche pour ces soins pour deux membres de ma famille parce que les régimes provinciaux, les assurances ne couvrent pas assez. Il n'y a rien pour ceux qui sont inscrits au ministère des Anciens combattants ni pour ceux qui servent encore. Le régime est loin de tenir compte des besoins des proches.

º  +-(1600)  

    Ma famille a été blessée parce que j'ai été blessé en fonction. Il ne s'agit pas d'une responsabilité qui revient aux provinces. Si ma famille ne m'avait pas appuyé, peu importe combien de thérapies je suivais, je ne retournerais jamais aux forces armées. Je ne serais plus accepté, ou bien je perdrais ma famille et ma thérapie aurait moins de succès à cause de l'absence des perspectives holistiques que nous avons de nous-mêmes.

    Et enfin, il est question de ramener des troupes pour 12 ou 24 mois pour leur permettre de se remettre en vue de futures missions. Que faisons-nous pour aider ces soldats à se remettre pendant ces 12 ou 24 mois? Quels programmes existent-ils pour ces familles et ces particuliers pour les aider à réduire le niveau de stress engendré par ce nouveau genre d'opérations pour que ces derniers puissent continuer à vivre sachant toutefois qu'ils en souffrent les répercussions, qu'il y a eu des moments difficiles, mais qu'ils sont prêts pour la prochaine épreuve, au lieu de les laisser là, les renvoyer de nouveau, et s'attendre à ce que toute la famille s'écroule. On ne trouve rien à ce sujet dans les livres. Il est essentiel d'y songer si nous voulons assurer la capacité opérationnelle de nos forces armées parce que ces victimes, tous les soldats que vous enverrez, peuvent devenir victimes de cette blessure et peuvent mettre les autres à risque.

    Merci de votre patience.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci beaucoup, général, et merci, monsieur Marin, pour deux très bons exposés.

    Notre temps sera un peu limité, mais je commencerai avec M. Benoit. J'imagine que vous avez des questions.

+-

    M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Merci beaucoup, monsieur le président.

    C'est un plaisir de vous voir tous les deux.

    Général Dallaire, on vous a cité à la radio ou à la télévision il y a quelques jours disant que vous n'êtes toujours pas confiant que beaucoup de commandants reconnaissent la légitimité de cette maladie. Avez-vous des commentaires là-dessus?

+-

    Lgén Roméo Dallaire: Monsieur Benoit, je viens juste de vous expliquer avec beaucoup d'émotion—j'espère—qu'il ne s'agit pas d'une maladie, mais plutôt d'une blessure. Et deuxièmement, oui, les commandants, les commandants subordonnés et les sous-officiers doivent faire tout ce qu'ils peuvent pour que leurs troupes soient à la hauteur de la lourde tâche que leur confie le gouvernement—et que j'approuve sans réserve—et ils sont donc moins portés à tenir compte des besoins de ceux qui auraient des problèmes ou qui les cachent encore.

    N'oubliez pas, monsieur, que sept ans plus tard, sur les 12 commandants qui étaient avec moi au Rwanda au début de la guerre lorsque les Belges ont quitté, neuf se sont totalement écroulés comme je l'ai fait, le dernier il y a à peine deux mois. On ne peut pas se le permettre. Si on les met sur la liste des effectifs non disponibles pour raisons de santé ou on les transfère à un autre régime, ce n'est qu'une façon pour les forces armées de poursuivre leur travail, mais les forces armées n'admettent toujours pas qu'une victime du SSPT est un collègue blessé qu'on ne doit pas abandonner, mais qu'on doit plutôt aider.

º  +-(1605)  

+-

    M. Léon Benoit: Le problème est-il qu'il ne soit pas reconnu comme étant une blessure? Ou est-ce que les commandants sont surchargés de travail à cause de nos énormes engagements militaires? Est-ce pour une autre raison, ou toutes celles-là?

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Merci pour énumérer ces raisons, et il y a aussi le fait que même dans le milieu civil, les personnes blessées ou atteintes d'une maladie mentale sont également rejetées ou écartées. Ce ne sont pas des blessures courantes ou des maladies comme le cancer, alors on les trouve au sein des forces armées. Nous sommes issus du milieu civil. Nous avons des mères et des pères aussi. Nous avons vécu tout cela. Et cette idée d'avoir des effectifs à 100 p. 100 opérationnels laisse très peu de marge de manoeuvre pour les moins forts ou les blessés, ce qui inflige cette énorme flétrissure à ceux qui ne peuvent pas répondre aux exigences de la tâche parce qu'il s'agit d'une blessure entre les oreilles plutôt qu'à une jambe ou au dos.

    Pouvez-vous croire que quelqu'un a dit dernièrement que le SSPT d'aujourd'hui est semblable aux problèmes de dos dans les années 70 et 80, ce qui a engendré beaucoup de fainéantise? Voilà ce qu'on a dit. Nous avions beaucoup de problèmes de dos parce que nous n'étions pas en forme et ne faisions pas les choses comme il faut. Faire la comparaison entre les deux est une preuve flagrante de...

+-

    M. Leon Benoit: Au-delà des considérations personnelles et militaires, sur le plan économique, comme nous l'a dit M. Marin dans son exposé, il faut absolument traiter ce genre de blessure et le plus rapidement possible afin que les soldats puissent reprendre leur service car plus ce genre de blessure est traité rapidement, plus les chances de réussite sont grandes. Du point de vue économique il n'y a pas que le coût du traitement.

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Depuis que je m'occupe de ces questions, depuis 1997, à l'échelon supérieur, jamais un trois étoiles ou un bureaucrate n'a dit qu'il faudrait quand même imposer certaines limites. Pour des raisons de temps et de méthodologies pour mettre en place ces programmes, nous en sommes encore à la phase d'apprentissage et les programmes déjà existants ont du mal à faire face.

    Supposons que deux blessés sur dix soient victimes du SSPT. Si vous pouvez les affecter dans un service où ils continuent à être opérationnellement fonctionnels même si ce service n'est pas en première ligne, c'est une économie de centaines de milliers de dollars en termes d'instruction, de formation et d'expérience. Si on les perd, on perd toute cette expérience accumulée nécessaire pour mener ces nouvelles missions complexes. C'est donc un problème opérationnel qu'il faut résoudre.

+-

    M. Leon Benoit: Monsieur Marin, à propos des solutions que vous proposez pour mieux faire votre travail, selon votre mandat, c'est au ministre que vous devez rendre compte de vos activités et non pas au Parlement.

    Dans beaucoup de pays, il y a un inspecteur général des affaires militaires dont les pouvoirs étendus lui permettent d'enquêter sur ce qui va et ce qui ne va pas et de proposer des remèdes. C'est un poste qui a de l'autorité.

    Certains inspecteurs généraux comptent dans leur service un bureau d'ombudsman qui traite des problèmes des militaires. D'après moi, si nous avions un tel inspecteur général, les possibilités de résultat seraient beaucoup plus grandes, certains problèmes ne seraient pas simplement cachés sous le tapis, et de véritables mesures seraient prises. C'est une chose que l'Alliance canadienne réclamait il y a un ou deux ans dans un document intitulé Canada Strong and Free (un Canada fort et libre).

    Pensez-vous que le Canada devrait avoir un inspecteur général?

º  +-(1610)  

+-

    M. André Marin: C'est une question plus vaste à laquelle je ne me sens pas en mesure de répondre.

    Simplement, monsieur Benoit, je dirais que j'aurais du mal à imaginer ce qu'un inspecteur général aurait pu faire de plus que nous dans ce cas particulier. Nous avons produit un rapport de plus de 200 pages et interviewé 200 personnes. Nous avons transcrit les interviews. Nous avons bénéficié de la coopération de tout le monde, du chef d'état-major jusqu'à la base.

    Pour répondre à la première partie de votre question sur la manière dont nous nous assurerons que nos recommandations seront suivies, monsieur le président, nous avons l'intention d'adopter une démarche de coopération avec le ministère au niveau de l'application de ces recommandations et de publier un rapport de résultat dans neuf mois.

    Notre rapport n'est pas inflexible. Beaucoup de nos propositions sont faites de manière à ce que la chaîne de commandement puisse faire preuve de créativité au niveau de l'application des recommandations. Notre intention est donc de travailler avec la chaîne de commandement pour veiller à la mise en place de chacune de ces recommandations. Notre intention est de publier un rapport de résultat d'ici neuf mois pour informer le ministre et le public de l'évolution du dossier.

+-

    M. Leon Benoit: Il reste que vous n'avez pas de pouvoir coercitif.

+-

    M. André Marin: Non.

    Monsieur le président, si vous me donnez une petite minute, je me permettrais d'ajouter une observation à une réponse donnée tout à l'heure par le général Dallaire. Nous avons remarqué une coupure entre la théorie et la pratique, entre les ordonnances et les directives de la hiérarchie et ce qui se fait réellement sur le terrain. Le général Dallaire a parlé du problème de concrétisation des programmes. C'est à ce niveau qu'il y a une coupure. Ces programmes sont accompagnés de documents pleins de bonnes intentions, comme le document de 1994 auquel j'ai fait allusion dans ma déclaration préliminaire. Huit ans plus tard, où sont passés tous ces programmes? Ils ne sont nulle part.

    Si nous avions dit dans ce rapport que 10 à 20 p. 100 de ceux qui reviennent d'opérations souffrent de tuberculose, serions-nous en train de réfléchir à une recommandation particulière ou nous demanderions-nous si c'est de notre ressort? Serions-nous toujours dans le vide? Si notre rapport avait parlé de tuberculose, je parie que des mesures immédiates et massives auraient été prises et nous ne serions pas ici aujourd'hui. Un programme aurait été mis en place et serait déjà en cours.

    Donc pour ajouter aux propos du général Dallaire, je dirais qu'il faut pouvoir traiter le SSPT comme une jambe cassée. Ce syndrome, en plus de son effet érosif sur le moral des Forces canadiennes, a un effet sur la rétention de personnel et sur les aspects financiers, et il faut qu'il soit reconnu, immédiatement.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci.

    M. Bachand.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Merci, monsieur le président. Permettez-moi d'abord de saluer M. Marin et de lui dire que j'ai lu le rapport, et que je trouve que c'est un rapport très complet, mais surtout très courageux. Il a aussi le grand mérite de reconnaître officiellement maintenant, sur la place publique, que cette blessure existe. Elle a toujours existé d'ailleurs. On l'a souvent nommée en d'autres termes, mais ce rapport fait en sorte que c'est mis devant l'opinion publique. Je pense que les gens prennent conscience de cela maintenant.

    C'est dommage qu'on n'ait pas beaucoup de temps car j'aurais une question pour vous, monsieur Marin. Je vais la garder pour le deuxième tour. Si jamais il n'y avait pas de deuxième tour, je vous reverrai.

    J'ai surtout une question pour le général Dallaire que je veux aussi saluer comme un des grands commandants de l'ancien Collège militaire royal de Saint-Jean. Je me souviens de l'avoir rencontré là, la première fois. Je veux vous dire, mon général, que les gens de Saint-Jean ne vous ont pas oublié. Les gens se rappellent très bien de votre passage. Ils ont toujours beaucoup admiré votre leadership et surtout votre franc-parler, que vous avez démontré encore aujourd'hui.

    Je suis membre, moi aussi, d'une légion et j'assiste aux scènes dont vous nous parlez. Cependant, il y a plusieurs scènes dans une légion. Les gens sont très fiers, par exemple, de lever leur pantalon et montrer une blessure de guerre, une cicatrice, une jambe en moins, un bout de membre en moins, mais quand vient le temps de parler du véritable problème psychologique, par exemple, là on assiste à des débordements d'émotion qui touchent beaucoup.

    Je pense que nous, qui n'avons pas vécu le même type de stress, avons parfois un peu de difficulté à comprendre que ces gens-là peuvent pleurer comme des enfants. C'est vrai qu'il est important qu'ils aient des amis autour d'eux qui les comprennent. C'est vrai que cela est primordial pour moi.

    On peut bien dire que l'on sympathise avec eux et reconnaître le fait qu'ils ont vu des scènes terribles durant la Deuxième Guerre mondiale, mais je pense qu'il s'agit du type de blessure qui font en sorte que si on n'en a pas fait l'expérience personnellement ou si on n'est pas allé sur le théâtre des opérations soi-même pour voir toutes ces scènes, ce n'est pas crédible de dire à quelqu'un que l'on sympathise avec lui.

    Il y a un problème par rapport à cela, à ma connaissance. C'est ce que je veux vous poser comme question. D'après moi, il y a un problème de culture d'institution, pas au niveau politique. Ça, c'est la question que j'aurais adressée à M. Marin. Dans la structure militaire, la culture de l'institution de l'armée canadienne et de toutes les armées, c'est d'essayer de développer des surhommes et des superfemmes, autant du point de vue physique que psychologique. C'est un peu comme s'ils reniaient la formation et l'éducation qu'ils ont reçues dans l'armée que de dire... L'Armée dira qu'elle a échoué avec ces gens-là. C'est ça qu'elle va dire. C'est cela qui est difficile.

    Je me demande jusqu'à quel point, même avec une volonté politique, on peut changer cette structure. J'ai porté l'habit, moi-même, en entraînement à Valcartier, il y a quelques mois. J'avais le goût, moi-aussi, d'être fort. J'avais le goût d'affronter n'importe qui. Si j'avais vu quelqu'un de faible qui avait envie de pleurer, je me serais demandé ce qui n'allait pas et je me serais dit qu'il n'était pas à sa place.

    Il me semble qu'à partir du moment où l'on met l'habit et qu'on a une vie militaire bien remplie, on a de la difficulté à reconnaître que c'est un échec pour le système. Y a-t-il une réponse à cela? Premièrement, mon analyse est-elle correcte?

º  +-(1615)  

+-

    Lgén Roméo Dallaire: Vous êtes tombé pile. La difficulté que vous avez à comprendre est tout à fait naturelle.

    L'exemple que je donne à l'occasion aux gens pour tenter de les faire ressentir ces traumatismes, est le suivant. Pensez à un enfant de trois ans que vous connaissez, une nièce ou un neveu. Pensez à cet enfant de trois ans et imaginez-vous que non seulement sa tête a été ouverte par une machette, mais qu'il a le bras coupé en petits morceaux, comme un salami. Pensez à cet enfant. Imaginez cela, et vous allez pouvoir sentir que le traumatisme vous met hors de vous-même.

    Il y a quelque temps, les Forces armées m'ont demandé de participer justement au projet de Gérald Mathieu et de son équipe, qui porte sur le changement de culture. Il s'agit de voir comment on peut faire pour que les gens demeurent aussi imprégnés du désir, qu'ils puissent faire face au fait qu'ils vont peut-être mourir et reconnaître tout de même que ceux qui sont blessés doivent être gardés dans le milieu, que l'on doit les aider à bâtir leur prothèse et les respecter.

    On m'a offert de travailler avec eux, et c'est ce que je vais faire de façon plus spécifique à partir de la première réunion qui aura lieu lundi. Notre mandat est de trouver comment, justement, on peut inculquer aux non-vétérans et aux vétérans qui ont passé par ces choses, cette sensibilité vis-à-vis de ceux qui ont été blessés et qui souffrent particulièrement de cette blessure quasi hypocrite.

+-

    M. Claude Bachand: Donc, vous convenez comme moi que du côté de la culture de l'institution de l'armée canadienne, il y a du chemin à faire. La réaction, non seulement celle des hautes autorités militaires, mais aussi celle des gens avec qui cette personne se trouve sur le terrain, celle des camarades qui la voient victime d'un stress post-traumatique, n'est pas la même que si elle s'était fait couper un doigt en devoir.

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Quand j'ai pris ma retraite, souvent les gens qui me rencontraient me disaient que quand je souffrais de cette maladie, ils ne savaient trop comment me parler ou comment m'approcher. Donc, en fin de compte, ils me laissaient seul. Il y avait des moments où ça faisait mon affaire, mais à d'autres, j'aurais bien aimé recevoir de l'aide.

    Mais il y a eu tout de même des pas importants de faits dans les Forces canadiennes. Je suis sûr que Christian Couture va en parler. On s'aperçoit quand ce type de blessure se produit et on sort le malade, même temporairement, pour l'aider et si, à l'évidence, on constate qu'il est totalement démuni... J'ai eu le cas d' un lieutenant-colonel qu'il a fallu faire évacuer en l'espace de 24 heures parce qu'il était devenu fou, et fou dangereux; il tirait du pistolet dans mon quartier général

    Alors, il y a toutes sortes de degrés. Mais aujourd'hui, on est beaucoup plus sensible au problème. Il y a beaucoup plus de systèmes de réponses en place. La question qui se pose est plutôt la suivante: a-t-on vraiment atteint l'objectif de faire en sorte que chaque blessé de ce type, dont la blessure est beaucoup plus difficile à identifier, reçoive des soins équivalents à ceux reçus par celui qui est blessé par balle ou par obus et dont le bras risque de se gangrener s'il n'est pas soigné?

º  +-(1620)  

[Traduction]

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci beaucoup.

    Monsieur Dromisky, c'est à vous.

+-

    M. Stan Dromisky (Thunder Bay--Atikokan, Lib.): Merci beaucoup.

    Je me dois de féliciter le général. Je dois vous dire que vos témoignages m'ont touché personnellement ainsi que d'autres membres de ma famille. Nous vous avons regardé à la télévision et nous avons lu les articles dans les journaux. Tout ce que je peux dire, c'est qu'il vous a fallu un énorme courage pour témoigner car vous êtes officier supérieur, et pour faire les déclarations que vous avez faites. De mon point de vue, il faut beaucoup plus de courage pour faire le genre de choses que vous avez faites depuis que vous avez pris votre retraite, que de faire face à un ennemi armé d'une mitraillette, d'un canon, de bombes, que sais-je.

    Je suis heureux et fier que vous ne vous soyez pas caché et que vous n'ayez pas fui votre problème. Dans un sens, vous contribuez à la sensibilisation et à l'éducation de l'opinion publique canadienne. De tout cela il résultera certainement des conséquences positives, mais par-dessus tout, il reste des milliers d'inconnus qui en souffrent également. Nous ne savons pas combien il y en a parce qu'il n'y a pas de dossiers, d'après ce qu'on m'a dit, et il faut que cela change, cela ne fait aucun doute. Mais ce sont ces gens qui collectivement peuvent travailler avec vous pour que la population, et tout particulièrement les politiciens, finissent par réclamer des mesures.

    Permettez-moi de faire un petit retour en arrière. J'ai été membre d'un comité spécial qui étudiait les relations entre les forces actives et la réserve quand M. Collenette était ministre de la Défense nationale. J'ai constaté certaines petites choses très troublantes au niveau de la mentalité des militaires. Encore aujourd'hui, chaque fois que j'écoute un officier supérieur, je me demande: est-ce là sa perception de la réalité, d'après des coutumes et des traditions qui se perdent dans la nuit des temps?

    Je vous regarde et je me dis que vous avez servi longtemps et je me demande ce qui est arrivé aux soldats qui ont souffert pendant les années où vous commandiez. Avez-vous eu connaissance de certains cas? Qu'arrivait-il à ceux qui étaient diagnostiqués comme ayant des troubles mentaux ou des troubles de la personnalité—des expériences traumatisantes qui ont fini par prendre le dessus—et pour lesquels on n'a rien fait? Est-ce que ce sont des signes de faiblesse? Est-ce que les officiers supérieurs continuent à le considérer comme des signes de faiblesse? Je crois que vous avez déjà répondu à certaines de ces questions mais j'aimerais vous entendre encore.

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Je ne nierai pas que même aux échelons supérieurs certains contestaient la validité du SSPT et préféraient parler de traumatisme ou carrément de problèmes de santé mentale. Cette différenciation, et bien entendu la thérapie, les coûts, les pensions, et tout cela tendent aujourd'hui à faire réfléchir les gens à deux fois avant de déterminer s'il s'agit de SSPT ou d'une autre sorte de déficience mentale qui n'a rien à voir. En espérant que cela ne soit par aussi grave que le SSPT, mais il reste qu'on ne peut en diminuer l'effet.

    J'étais commandant adjoint de l'armée. Je suis revenu d'une année au Rwanda dont quatre mois pendant la guerre. J'ai assumé le poste de sous-commandant de l'armée trois semaines après. C'est ainsi qu'on pensait à l'époque: reprise du travail immédiat et le temps effacera tout.

    J'avais un chauffeur qui était caporal. Il avait été à Sarajevo comme photographe d'unité dans le bataillon du 22e Régiment. Il a travaillé pour moi pendant deux ans et je ne me suis jamais aperçu du degré de ses souffrances. En fait, vers la fin de la deuxième année, il m'a même demandé la permission de participer à une autre mission. Je lui ai répondu: «Non, je ne pense pas que tu devrais y aller». J'ai finalement changé de poste et mon successeur l'a laissé partir. Il est drogué et alcoolique. Il est dans les forces et cela fait maintenant pratiquement quatre ans qu'il est en thérapie. Il est blessé à un point, dans son cas on pourrait parler de véritable cas clinique. Il était à l'époque membre d'une unité formée, d'une unité solide, et pourtant ces opérations en ont fait une victime.

    Nous étions simplement en train d'apprendre que la situation n'était plus comme à Chypre, que ce n'était plus vraiment la guerre froide, que c'était des opérations de maintien de la paix mais que sur le plan opérationnel, c'était quand même très exigeant. La situation et les circonstances étaient différentes et tout d'un coup nous nous retrouvions avec des blessés.

    J'ai commandé la brigade en 1992 lorsque nous avons commencé à envoyer les premières troupes en Bosnie. En fait, mon bataillon a été le premier à aller en Bosnie. Nous avons eu une victime, un type qui a été tué, qui a été coupé en deux par un missile antichar. Le cas a été traité pratiquement de la même manière que celui d'un casque bleu stationné à Chypre qui, ayant bu un coup de trop, a eu un accident de plongée ou quelque chose de ce genre, et dont on rapatriait le corps. Il nous a échappé que c'était quelqu'un qui avait été tué en mission et que si désormais il y avait des victimes, il nous fallait changer d'attitude au niveau de l'aide apportée aux blessés et à leurs familles.

    Nous avons très mal traité la famille. Nous n'avons rien fait de plus que s'il s'agissait d'un soldat en Allemagne s'étant tué dans un accident de moto. Il a été rapatrié et enterré entre la grand-mère et un sombre crétin mort au volant pour avoir trop bu. Nous avons donné comme d'habitude un petit peu d'argent et une croix et nous n'avons rien fait de plus, le gouvernement, la population canadienne n'ont rien fait de plus pour sa famille. Nous lui avons dit: «Oui, votre fils a sacrifié sa vie en mission et il importe que nous vous en remercions.» Cela ne sert à rien si nous n'arrivons même pas à expliquer pourquoi il est aussi important que nous participions à ces missions, ce à quoi je crois entièrement, et si nous ne le reconnaissons pas.

    Depuis il y a eu toutes sortes d'autres choses. On parle même de la création d'un cimetière national. Je ne suis pas d'accord avec le site choisi, mais c'est une autre histoire. Nous avons fini par reconnaître que notre pays est en paix, mais que nos troupes sont en guerre. Elles reviennent de guerre avec des blessures et il faut les traiter comme des troupes revenant de guerre, comme des anciens combattants, et leur faire sentir le même sens d'appartenance pour avoir fait leur devoir. Leurs familles doivent sentir que le sacrifice était digne d'être fait parce que c'est pour défendre nos valeurs, nos droits, etc. Nous n'y sommes pas encore.

º  +-(1625)  

+-

    M. Stan Dromisky: J'aimerais simplement poser une petite question à ce sujet.

    Pourrait-il y avoir des éléments du programme de formation qui, dès le départ, prépareraient le personnel des forces armées à faire face à certaines des expériences traumatiques qui pourraient les attendre à l'avenir?

+-

    Lgén Roméo Dallaire: Oui, monsieur. Je pense que les missions vont continuer à être complexes, comme celle d'aujourd'hui en Afghanistan. Les choses sont différentes et on peut évidemment s'attendre à des pertes de toutes sortes.

    Il s'est fait beaucoup de travail de préparation afin d'identifier, avec des films et d'autres outils, qui pourrait être touché. Je pense que les unités font un effort concerté pour maintenir leur cohésion afin que l'individu ne se sente pas isolé. C'est la même chose que d'utiliser une veste antiballes pour vous protéger d'une mort par shrapnel ou par balles : il n'y a pas plus de garantie de ne pas se faire tuer ou blesser avec ce genre de protection que d'échapper au SSPT. C'est une blessure. Ce n'est pas quelque chose que l'on enseigne. Il faut s'y préparer, tout comme il faut être préparé à toutes les autres pertes possibles.

    Quoi qu'il en soit, il faut reconnaître qu'il y aura ces pertes. Et il faut y faire face avec la même dignité et le même sentiment d'urgence que si quelqu'un avait perdu une jambe.

º  +-(1630)  

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci.

    Le temps est écoulé pour ces témoins. J'aimerais vous demander si vous voulez rester encore un peu. J'ai ici une liste d'intervenants, et j'aimerais faire un tour et donner à chacun la chance de poser des questions si vous voulez bien rester encore 20 ou 25 minutes.

    Une voix: Aucune difficulté.

    Le vice-président (M. David Price): Très bien. Nous allons donc passer à M. Stoffer.

+-

    M. Peter Stoffer (Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore, NPD): Merci, monsieur le président. Je m'excuse auprès de vous deux d'être arrivé en retard. Lorsqu'un parti politique n'a que 13 membres, il faut parfois être à deux comités en même temps.

    Tout d'abord, monsieur Marin, j'aimerais dire à quel point je suis heureux de ce rapport. Je me suis rendu à la base militaire de Shearwater et au centre de ressources militaires Shearwater dans ma circonscription et on y est extrêmement heureux. C'est ce que les femmes et les hommes—les conjoints des militaires—disent depuis très très longtemps. Or voici que leurs propos se retrouvent sur le papier. Je dois dire que ce rapport leur donne un peu d'espoir. Je vous félicite et je félicite tous ceux qui ont travaillé à ce rapport.

    J'ai une question. À la page 109, vous dites qu'un soldat a dit telle chose et, à la page 99, que le commandant d'une grande base a dit telle autre chose. Vous dites aussi qu'un officier de très haut rang d'un bataillon a dit telle et telle chose. Dans tout ce rapport, vous ne donnez jamais le nom de qui que ce soit, sauf du caporal McEachern et de quelques autres.

    À la lecture, j'ai eu l'impression dans tout le rapport que le sentiment d'ostracisme vit toujours dans les forces armées et que si quelqu'un parle, soit c'est un signe de faiblesse, ou vous êtes un rapporteur. Dans tout ce rapport donc, vous affirmez que telle personne a dit telle chose, mais vous ne donnez pas de noms. J'aimerais savoir si c'est parce que ces personnes ne souhaitaient pas être identifiées ou est-ce parce que si vous les aviez identifiées, elles auraient été frappées d'ostracisme et ensuite punies dans les forces armées?

+-

    M. André Marin: Tous ceux qui s'adressent à notre bureau pour quoi que ce soit ont une crainte incroyable de représailles. Ils téléphonent, et ils veulent savoir s'il y a des militaires dans le bureau, si on fait l'écoute des lignes téléphoniques, si quelqu'un a accès à l'appel, ou si nous allons diffuser le fait qu'ils ont téléphoné à notre bureau. Cela représente en général un obstacle à l'établissement d'une relation avec les plaignants, quel que soit le sujet. Nous faisons face à cette même situation dans tous les cas.

    Dans ce cas-ci, dans le cas du syndrome de stress post-traumatique, c'est particulièrement accablant. On ne veut pas être associé avec ce syndrome car cela signifierai qu'on est un soldat faible. Ceux qui révèlent qu'ils souffrent du SSPT sont frappés d'ostracisme. Pour cette raison, pour protéger ces gens, pour les rassurer, la plupart des citations sont anonymes.

+-

    M. Peter Stoffer: Ce que je veux savoir aussi, monsieur, c'est si on trouve dans les forces armées le financement nécessaire pour répondre aux besoins des soldats qui reviendraient d'Afghanistan et qui souffriraient du SSPT. Nous savons que ce sera le cas. Est-ce que les ressources sont disponibles actuellement pour faire face aux besoins de ceux qui vont rentrer chez eux?

+-

    M. André Marin: Le lieutenant-général Couture peut probablement mieux répondre à cette question. Nous n'avons pas fouillé la question, mais je peux dire que la question de financement n'empêche pas d'adopter les recommandations qui sont contenues dans ce rapport.

+-

    M. Peter Stoffer: Très bien. J'ai une autre question, monsieur.

    En ce qui concerne une aide quelconque, en lisant le rapport, je me suis dit qu'il y a la légion et les associations d'anciens combattants de l'armée et de la marine: ces associations comptent 450 000 membres. Comme vous le savez, nombre d'entre eux ont fait la Deuxième Guerre mondiale et la guerre de Corée et ont vu aussi des choses terribles. Ils sont nombreux à avoir vécu des expériences plutôt traumatisantes.

    Est-ce qu'il vous est venu à l'idée ou à l'idée des forces armées de songer à cette branche du service pour aider les militaires actuels qui souffriraient du SSPT?

º  +-(1635)  

+-

     M. André Marin: Je pense que ça vaut la peine d'être exploré.

    Ce que nous avons constaté au cours de notre examen de la question, c'est que ce n'est pas depuis l'an dernier ou depuis 10 ans que le stigmate existe. Il existe depuis toujours. On a même exécuté certains soldats pendant les guerres. Il faut faire face à cela.

    De temps à autre, nous trouvons des gens qui comprennent la situation et nous tentons d'obtenir leur collaboration. Comme je l'ai dit, la sensibilisation est nécessaire encore plus dans le cas des anciens membres des forces armées à cause de toutes les fausses idées qui entourent ce genre de syndrome. Pour cette raison, nous faisons très attention.

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Déjà, la légion prend de 15 à 20 p. 100 des dossiers du ministère des Anciens combattants.

    Deuxièmement, l'amiral à la retraite Murray, sous-ministre des Anciens combattants, a un comité dont je fais partie. Je représente les membres des Forces canadiennes. C'est le chef de l'état-major qui m'a nommé à ce comité.

    Le comité a fait un travail incroyable pour que le ministère s'occupe de ces dossiers. Au sein de ce comité, on trouve toutes les associations, même les associations de maintien de la paix.

    Le chef des associations de la Deuxième Guerre mondiale, Cliff Chadderton, a dit qu'il considère que ce que vivent les troupes maintenant est pire, dans la plupart des cas, que ce qu'ils ont vécu au cours de la Deuxième Guerre mondiale, à cause de la nature même du conflit, à cause de la cruauté. Ils appuient donc énormément cette nouvelle génération d'anciens combattants.

    Au sein de la bureaucratie, il est très difficile de faire comprendre aux fonctionnaires qu'il s'agit d'anciens combattants d'une nouvelle génération, qu'il ne s'agit pas simplement de gens qui ont été blessés à Chypre ou en Allemagne. Le nouveau rôle est différent de celui de défendre le pays. Changer le modèle, créer ce nouveau contrat social entre le gouvernement, la population canadienne et les soldats dans leur nouveau rôle de règlement de conflit, de défense de nos droits humains et de nos valeurs à l'étranger... Le contrat social n'existe pas par écrit, et voilà pourquoi le gouvernement a tant de difficulté à expliquer les pertes et pourquoi nous envoyons des gens sur ces missions. Et les membres des forces armées et leurs commandants, à tous les niveaux, éprouvent de la difficulté à expliquer les pertes à leurs soldats et nous avons certainement du mal à expliquer les pertes à leurs familles.

    Imaginez tous les réservistes qui sont littéralement des bombes à retardement dans toutes les villes du pays, songez à l'appui qu'on leur donne et songez à ce qu'ils pourraient imaginer comme aide et appui et songez au risque qui les guette dans leurs collectivités à cause de leur mal.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Vous n'avez plus de temps, Peter.

    Monsieur Anders, nous vous écoutons.

+-

    M. Rob Anders (Calgary-Ouest, Alliance canadienne): Les soldats qui sont déployés à l'étranger ont parfois pour mission de «faire la paix» plutôt que de la maintenir. À cause des règles d'engagement, il faut assister à des événements que personne ne souhaite voir, et dans lesquels on préférerait pouvoir intervenir pour y mettre fin. Ces situations ne sont peut-être pas à l'origine de tous les cas dont nous parlons, mais je suppose qu'elles constituent un facteur important dans une bonne proportion d'entre eux. Vous avez certainement une bonne expérience à ce sujet.

    Pourriez-vous dire au comité si, à votre avis, il est opportun qu'on envoie nos soldats dans ces missions d'établissement de la paix où ils sont amenés à regarder les belligérants s'entre-déchirer sans pouvoir intervenir?

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Je considère que l'emploi de nos militaires dans cette nouvelle génération de conflits est essentiel non seulement pour préserver une certaine stabilité entre les belligérants, mais aussi pour aider les plus modérés d'entre eux à l'emporter sur les extrémistes. Ce sont les extrémistes des deux camps qui créent l'essentiel des problèmes et bien souvent, les modérés ne sont pas en sécurité dans leur propre camp. Grâce à la présence de nos troupes, les modérés sont plus en sécurité pour travailler à la recherche d'une véritable solution sans craindre à tout moment de se faire attaquer par un extrémiste, peu importe son camp.

    Vous savez, on parle de rétablissement de la paix, de maintien de la paix et de promotion de la paix. Voilà autant de termes qui ne sont plus de notre temps. Je ne pense pas que nous soyons en guerre actuellement, au sens classique du terme. Nous sommes en conflit. Nous participons à des missions de résolution de conflits, où la réponse ne doit pas venir d'une ou deux batailles, dont on revient en faisant le décompte des ennemis abattus avant de se déclarer vainqueurs. Nous nous sommes attelés à un travail multidisciplinaire à long terme, où l'armée et la sécurité ne constituent que des éléments parmi d'autres.

    Quand on passe 20 ou 40 ans en Sierra Leone, il faut intervenir à différents niveaux pour aider le pays à retrouver une certaine stabilité pour se tirer d'affaire. En Afghanistan, si tout le monde se retire au bout de deux ans, à l'exception de quelques intervenants humanitaires, la situation ne va pas s'améliorer; on va simplement la stabiliser jusqu'à ce que les mêmes événements se produisent de nouveau.

    Nous intervenons dans ces conflits à cause de l'ampleur et de la complexité des missions qu'ils nécessitent et pour lesquelles nous recevons des mandats très élaborés. Et si un général vient vous dire qu'il ne faut pas s'y engager à moins d'avoir une voie de sortie, une stratégie bien définie et un mandat bien précis, dites-lui qu'il fait fausse route. Ces missions ne sont jamais simples. Il s'agit de savoir si nous avons les outils et les moyens d'action nécessaires et si nous comprenons bien le problème.

    Je vais vous donner un dernier exemple. Nous avons passé 50 ans à l'OTAN à comprendre les verbes d'action. Voilà ce qui nous intéresse avant tout: attaquer, défendre, se retirer, poursuivre. Chacun connaissait le sens de ces mots. Aujourd'hui, et depuis les années 90, nos verbes d'action sont, par exemple, «créer une atmosphère de sécurité». Qu'est-ce que cela signifie? S'agit-il de défendre le pays si des combattants auxquels j'ai donné un ordre de démobilisation déclenchent une attaque contre lui? Est-ce que je vais me contenter de les regarder faire en espérant qu'ils respectent les règles du jeu? Qu'est-ce que cela signifie? Quelle est la doctrine applicable? Quelles sont les nouvelles méthodes de résolution des conflits de ce genre qui misent sur le politique, l'humanitaire et la reconstruction? Nous fonctionnons encore au coup par coup, parfois avec de bons résultats, parfois avec des résultats désastreux. Cette doctrine de nouvelle génération fait actuellement défaut.

    Et pour terminer, parlons des conséquences. Actuellement, la difficulté la plus complexe qu'affrontent les militaires, c'est l'élément éthique et moral des décisions qu'ils prennent. Le problème n'est pas simple. Celui qui vous tire dessus n'est pas un militaire portant lui aussi un uniforme.

    Je vais vous donner un exemple. Un caporal à la tête d'une section de dix hommes arrive dans un village et s'arrête à une barrière assez rudimentaire, mais gardée par une vingtaine de miliciens armés de fusils et de machettes. Au-delà de la barrière, le caporal voit 200 ou 300 personnes qui circulent dans le village. Au milieu de la foule, il voit une jeune fille de 14 ou 15 ans, qui porte un enfant sur son dos, selon la coutume locale, et qui s'apprête à tuer à coups de machette une autre jeune fille qui porte elle aussi un enfant sur son dos. Que va faire le caporal? Va-t-il tirer dans la foule pour qu'elle se disperse? Va-t-il franchir la barrière et aller sauver cette jeune fille, quitte à faire Dieu sait combien de victimes? Faut-il qu'il abatte la jeune fille à la machette, au risque de tuer aussi son enfant pour sauver l'autre jeune fille? Ou va-t-il simplement passer son chemin en se disant qu'il n'y peut rien, que ce n'est pas son mandat et qu'il n'est pas autorisé à intervenir?

    Les crimes contre l'humanité ne font même plus partie du mandat de nos militaires, d'après le chapitre 6. C'est uniquement lors des missions du chapitre 7 que les crimes contre l'humanité exigent une réaction, qui n'est pas toujours déclenchée, car nous n'allons pas au bout de nos règles d'engagement, nous les interprétons plutôt de façon limitative, car nous voulons couvrir nos arrières, étant donné que nous sommes toujours assujettis aux lois du Canada, au droit militaire, etc.

º  +-(1640)  

    Alors, que fait ce caporal? Il négocie interminablement et, à la fin de la négociation, il ne réussit pas à franchir la barrière, la jeune fille et l'enfant sont tués. Essayez de vous mettre à la place de ce caporal.

    Que se passe-t-il chez les soldats de sa section? Comment réagissent-ils aux problèmes moraux et éthiques auxquels ils sont confrontés? Ils ont entre 18 et 21 ans. Ce ne sont pas des philosophes. Ce sont des enfants de ce pays, qui partagent nos valeurs, si élevées soient-elles, et qui s'efforcent de trouver ce qu'il faut faire dans une mission aussi complexe.

º  +-(1645)  

+-

    M. Rob Anders: Merci.

+-

    Le vice-président (M. David Price: J'ai deux noms sur ma liste. M. Bachand a aimablement renoncé à son temps de parole pour que M. O'Reilly et M. Wood puissent poser une question chacun.

    Monsieur O'Reilly, c'est à vous.

+-

    M. John O'Reilly (Haliburton--Victoria--Brock, Lib.): Ce sera très bref. Je sais que vous n'aimez pas que le secrétaire parlementaire pose des questions.

    Général Dallaire, je me suis déjà entretenu avec vous, de même qu'avec M. Marin. Je vous remercie de votre présence.

    Vous avez fait un pas de géant. Notre comité essaie de faire un pas de plus. Il faut toujours progresser. Mais comment surmonter les difficultés? Vous avez fait une chose extraordinaire, et je tiens évidemment à vous en féliciter. Le problème, c'est toujours d'identifier un danger, de l'annoncer, de s'entourer de conseils, malgré la crainte d'être déconsidéré, et de trouver des ressources disponibles qui pourront s'occuper des populations en danger. Dans le cas du général Dallaire, son officier supérieur a refusé sa demande de renfort et il n'a pas pu protéger ces populations. Il faut revenir en arrière sur les causes de cette tragédie.

    Comme le sait le général Dallaire, j'ai déjà été pompier. Nous avons déjà parlé ensemble de ce qu'on éprouve dans ce genre d'activité et des souvenirs qui reviennent vous hanter. C'est à cause de tout cela que j'ai démissionné. Et ces souvenirs me hantent toujours. Vingt ans après, ils n'ont toujours pas disparu, mais je bois beaucoup de bière, et c'est assez efficace.

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Il me suffit d'en boire deux.

+-

    M. John O'Reilly: Je me souviens de votre conseil.

    Quand j'ai bu une bière, je peux toujours parler de mes problèmes, jusqu'à ce que la bière devienne elle-même un problème.

    Mais comment peut-on surmonter...? Faut-il renforcer le rôle des aumôniers? Le Collège des Forces canadiennes devra-t-il accentuer son effort de formation? Je suis à la recherche des causes systémiques du problème. Nous savons que le stress post-traumatique existe, et nous en connaissons les causes. Nous savons comment il fonctionne. Mais comment y faire face? Comment est-ce que les gradés de haut rang y font face? Comment est-ce qu'on y fait face dans les aumôneries, dans les collèges, au Collège royal militaire, avec tous les nouveaux qui se présentent?

    Voilà pourquoi je parle d'un problème systémique. À votre avis, quel est ce problème systémique, comment faut-il y faire face et quelles recommandations le comité peut-il faire à ce sujet? Voilà mes questions en résumé.

+-

    Mr. André Marin: Nous avons recommandé plusieurs solutions dans notre rapport. La première se rapporte au programme de formation et s'applique à tout, de la formation des recrues jusqu'au Collège militaire royal en passant par l'apprentissage continu. Les besoins réels en matière de prestation doivent être intégrés au système et non pas seulement à un programme, comme c'est le cas actuellement. Il n'y a à l'heure actuellement aucune sensibilisation au syndrome du stress post-traumatique, rien pour conscientiser les gens à ce que c'est, comment il survient et comment réagir à ce genre de situation comme chef, comme membre de la chaîne de commandement.

    Pour ce qui est du traitement, les forces armées ont établi cinq cliniques à l'échelle du pays pour faire face au SSPT—aux cas de trauma et stress opérationnels. Ces cinq cliniques se trouvent toutes sur des bases militaires. Ceux qui veulent obtenir des soins sont pratiquement unanimes—je pourrais probablement dire unanimes—pour dire qu'en s'adressant à une de ces cliniques, vous ne pouvez éviter d'être accusé de faiblesse. Cela va à l'encontre du but recherché.

    Nous avons donc recommandé notamment d'ouvrir ces cliniques à l'extérieur des bases militaires pour voir si cela ne réduirait pas ce genre de stigmatisation. Ce faisant, on pourrait aussi permettre au reste des forces armées de rattraper le retard par le biais de la formation et d'autres mesures. Toutefois, ce n'est pas une solution permanente. C'est une solution qu'on doit au moins essayer jusqu'à ce que l'attitude prévalant au sein de l'organisation en général évolue.

    Nous avons soumis cette idée à la plupart des prestataires de soins qui sont d'accord pour dire qu'il serait bon de déplacer ces cliniques temporairement. Ceux qui ne sont pas d'accord avec l'idée de centres de soutien pour trauma et stress opérationnels, ces cliniques, à l'extérieur des bases militaires, estiment que, au contraire, on pourrait empirer la stigmatisation, car cela équivaudrait à dire que ce n'est pas au sein de la famille des Forces canadiennes qu'ils pourront se faire traiter.

    À l'heure actuelle, vous ne pouvez être soigné sur une base militaire car, si vous le faites, c'est faire preuve de faiblesse comme soldat. Nous ne suggérons pas d'installer toutes ces cliniques à l'extérieur des bases militaires, mais, à tout le moins, de faire l'essai avec une pour voir ce que cela donne. C'est à nos yeux une des recommandations les plus importantes pour que les membres des forces armées obtiennent des soins.

    C'est grâce à la sensibilisation qu'on changera l'attitude des gens, et aussi grâce à l'appui des pairs et à la réadaptation des soldats. À l'heure actuelle, pour autant que nous puissions l'évaluer, il semble que presque tous les membres des Forces canadiennes souffrant de SSPT ont dû partir. Ce que nous préconisons, c'est une approche qui permettrait la réadaptation et le recyclage du soldat plutôt que son renvoi. C'est tout à fait logique compte tenu de l'investissement initial et du facteur humain. Lorsqu'on aborde la situation sous cet angle, on peut garder ces personnes au sein de l'armée, en faire de nouveau des soldats productifs et, à long terme, amener les gens à changer d'attitude. Ce changement ne se fera pas du jour au lendemain, mais c'est ainsi qu'il se fera.

º  +-(1650)  

+-

    Le vice-président (M. David Price): Monsieur O'Reilly, je suis désolé de vous interrompre, mais nous avons très peu de temps.

+-

    M. Bob Wood (Nipissing, Lib.): J'adresserai ma question à vous, monsieur Dallaire, dans le même ordre d'idées.

    Vous avez parlé de reconnaissance de cette maladie et M. Marin vient de suggérer d'ouvrir des cliniques à l'extérieur des bases militaires. À votre avis, ne serait-il pas préférable que ces cliniques restent sur les bases pour rehausser la visibilité et, du coup, la reconnaissance de cette maladie? N'est-ce pas là ce qu'on recherche? N'est-il pas préférable de régler d'abord le refus de reconnaître cette maladie et, pour ce faire, ne serait-il pas plus indiqué de le faire dans les bases militaires?

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Nous vivons une phase transitoire. Autrement dit, les changements culturels nécessaires ne se sont pas tous produits et les forces armées n'ont pas encore toutes les capacités nécessaires pour faire face à cette situation. Pendant cette phase de transition, pendant que nous nous dirigeons vers plus de stabilité, nous espérons créer cette capacité qui se composera, à mon sens, d'éléments militaires et civils car on ne peut tout faire à l'interne. D'ailleurs, on ne veut pas tout faire à l'interne. Il faut avoir accès à des thérapies sur place. Pour soigner un réserviste, vous voulez un thérapeute qui est bien au courant de la situation. Peut-être est-il possible de prévoir des services thérapeutiques sur place plutôt que d'obliger les soldats à aller jusqu'à Valcartier.

    La façon dont ça se fait encore... Imaginez que vous êtes à bord d'un autocar allant de Kingston à Ottawa. Vous devez vous rendre à la clinique à Ottawa. L'autocar est bondé de gens qui ont le rhume ou peut-être même le cancer, qui sait. Vous êtes là, vous ne semblez pas malade à première vue et lorsqu'on vous demande pourquoi vous allez à Ottawa, vous répondez que c'est pour aller à la clinique. Votre copain vous répond: «Eh bien, j'ignorais que cela t'avait affecté à ce point.» Au retour, on vous demande comment s'est passé le traitement, comment était le psychiatre. Le simple fait d'être en présence de ses pairs est dévastateur. Les personnes souffrant de SSPT devraient pouvoir obtenir des soins sans que tous le sachent pour éviter la stigmatisation. C'est un problème que nous tentons encore de résoudre.

    J'estime qu'il faut chercher des solutions multidisciplinaires. L'aumônier et tous les autres intervenants qui tentent d'aider le malade et sa famille doivent être en mesure de travailler de concert, et non pas en tentant de dominer les autres, à la mise en place de solutions mettant à profit les compétences multiples des militaires et des civils, les connaissances civiles adaptées à la situation militaire, y compris les civils qui dispensent des soins aux membres des forces armées et à leurs familles. La solution est à mon avis multidisciplinaire et je crois que le projet de Gérald Mathieu nous permettra de rassembler tous ces éléments.

    Les thérapeutes ont la responsabilité d'amener les malades à reconnaître qu'ils le sont. Il ne faut pas attendre que les malades prennent l'initiative de consulter un thérapeute ou débarquent en catastrophe chez lui. C'est chercher les malheurs, c'est irresponsable. Les thérapeutes devraient pouvoir aller dans les unités, dans ces milieux, déceler les cas de SSPT, et ce, de concert avec les échelons supérieurs.

    Cela nous amène à la question fondamentale des changements culturels. Comment modifier les attitudes? Pour ce faire, il faut plus qu'une séance d'information, qu'un CANFORGEN ou qu'un bulletin sur papier lustré. Il faut que des êtres humains parlent à d'autres êtres humains, qu'ils soient crédibles ce faisant et qu'ils les convainquent de la nécessité de changer. Cela doit se faire de façon continue, car de nouvelles recrues se joignent constamment aux forces armées.

    Quand aurons-nous rattrapé notre retard et aurons-nous reconnu cette maladie de sorte qu'il ne nous restera plus qu'à suivre l'évolution de la situation? Je prétends que pour changer les attitudes et la culture à cet égard dans le milieu militaire, il faut deux ou trois ans d'initiatives très professionnelles menées par des gens comme M. Grenier et son groupe de pairs, à qui il indique comment s'adresser aux troupes pour leur faire comprendre cette maladie.

    N'oubliez pas l'exemple que j'ai donné plus tôt. Dites aux caporaux qui partiront en mission demain qu'ils pourraient faire face à une situation semblable. Ils ne pourront rester insensibles, surtout si vous leur demandez quelle serait leur réponse. Posez-leur les questions avant qu'ils partent et demandez aux chefs de leur donner des réponses. Cela ne se fait pas souvent.

    C'est une situation complexe pour tous, y compris les chefs; c'était compliqué pour moi aussi. Mais l'on ne peut se contenter de mesures ponctuelles. Vous ne pouvez demander à un pauvre caporal de prendre toutes ces décisions en se fondant seulement sur sa propre force émotive, ses propres valeurs et son propre code d'éthique.

º  +-(1655)  

    Les chefs doivent lui donner des points de repère pour le convaincre qu'il fait de son mieux, que les pertes sont inévitables et qu'il doit les accepter. Nous n'avons pas encore atteint ce niveau de subtilité, mais les problèmes sont très subtils.

    J'estime qu'il nous faut deux ou trois ans de discussions franches et ouvertes sur ce que cela signifie, cette nouvelle génération de conflit, des discussions auxquelles participeraient autant les soldats que les généraux trois étoiles, qui profiteraient d'un petit rappel. Dans cette nouvelle génération de conflit, le SSPT est beaucoup plus fréquent que les blessures par balles, ou causées par des mines ou des shrapnels. Puisque tel est le cas, que cela soit bien clair, car les Forces canadiennes ne cesseront pas de participer à ces missions. Je serais le premier à préconiser la poursuite de ces missions, mais pas comme cela, pas en imposant ce fardeau à des caporaux qui n'ont peut-être pas la capacité nécessaire ou le sentiment d'être appuyés dans certaines des décisions très complexes qu'ils prennent.

+-

    M. Bob Wood: Vous dites donc que des cliniques hors base seraient préférables?

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Non, il faut les deux.

+-

    M. Bob Wood: Je vois. Merci.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci beaucoup, général et monsieur Marin. Comme d'habitude, vous avez été une source précieuse d'information pour nous. Et vous êtes toujours aussi éloquents. Nous vous remercions.

    Nous faisons une pause de deux minutes.

+-

     Lgén Roméo Dallaire: Puis-je remercier M. Marin? Aussi, j'aimerais remercier tout particulièrement le général Joe Sharpe à qui M. Marin a confié cette initiative en raison de sa crédibilité considérable au sein des Forces canadiennes. Il a su mener à bien cette initiative avec brio.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci.

»  +-(1700)  


»  +-(1703)  

[Français]

+-

    Le vice-président (M. David Price): Nous voici de retour. Je veux souhaiter la bienvenue au lieutenant général Couture et au brigadier général Mathieu. Vous ferez d'abord un bref discours et nous vous poserons ensuite des questions.

+-

     Lieutenant général Christian Couture (sous-ministre adjoint, Ressources humaines militaires, ministère de la Défense nationale): Monsieur le président, étant donné l'heure avancée, je vais m'en tenir à des commentaires assez brefs pour laisser un peu plus de temps aux questions.

    Le président: Je vous en remercie.

    Lgén Christian Couture: Alors, monsieur le président, mesdames et messieurs membres du comité, je vous remercie de nous avoir invités, le général Mathieu et moi, à venir vous parler cet après-midi des blessures reliées au stress opérationnel,

[Traduction]

    dont le SSPT est le mieux connu.

    Les problèmes associés au SSPT ne sont pas nouveaux. Dans les conflits du passé, le SSPT était mieux connu sous le nom de stress de combat, épuisement au combat ou traumatisme dû aux bombardements. Souvent, on prenait ces symptômes pour des signes de lâcheté ou de faiblesse, à tort. Mais le Canada n'a pas connu de guerre depuis longtemps et ce n'est qu'il y a quelques années que nous avons repris conscience de l'existence du syndrome du stress post-traumatique.

    Il faut se rappeler qu'entre 1953 et 1992, le SSPT ne surgissait pas vraiment comme problème parce que les Forces armées participaient surtout à des opérations de la guerre froide, et nos militaires faisaient très peu de missions de combat ou de maintien de la paix difficiles. Depuis le début des années 1990, cependant, les militaires canadiens ont participé à de nombreuses opérations, souvent dans des conditions intenses et dangereuses.

    Il ne faut pas oublier non plus que les blessures de stress des opérations ne se limitent pas aux opérations de combat. Elles peuvent survenir dans de nombreuses circonstances. Je peux vous donner l'exemple de l'écrasement de l'avion Swiss Air, après lequel de nombreux militaires qui ont participé à la récupération des restes humains et des décombres se sont trouvés hautement traumatisés.

    Plus nous avons approfondi nos connaissances de ce problème, plus nous l'avons pris au sérieux et plus nous intervenons pour le prévenir et le soigner.

    Comme vous le savez, nous avons beaucoup fait au cours des dernières années pour améliorer la qualité de vie de notre personnel. Nous avons entrepris une réforme de grand envergure de notre système de soins de santé.

[Français]

une réforme de fond en comble, dois-je avouer.

[Traduction]

    Nous avons aussi lancé plusieurs nouvelles initiatives de santé mentale, nous fixant comme priorité le traitement du SSPT. Nous allons tout faire pour fournir à ceux qui souffrent d'une blessure physique ou mentale, surtout dans le cas du SSPT, les bons traitements dispensés par des professionnels spécialisés, soit militaires ou civils.

    Nous continuons de consacrer des ressources importantes à la prévention et au traitement du SSPT et aux blessures de stress opérationnel, et ces services sont tous disponibles aux membres de la force régulière comme au personnel des réserves. Je vais vous décrire certaines des initiatives prises au cours des deux ou trois dernières années.

    En 1999, nous avons mis sur pied cinq centres de traumatologie et de traitement du stress, et en 1998, nous avons établi le programme d'aide aux membres des Forces canadiennes, service optionnel et confidentiel qui aide les membres et leur famille à résoudre des difficultés personnelles de toutes sortes.

    En mai 2001, nous avons établi le projet, dirigé par le major Grenier, du Centre de soutien pour trauma et stress opérationnels, le CSTSO, qui est justement le projet mentionné par le dernier témoin.

    Ce projet vise à créer un réseau national de soutien par les pairs à l'intention des membres et des anciens combattants blessés et de leur famille. Le premier cours pour les coordonnateurs du programme des pairs aura lieu du 18 février au 1er mars à Mississauga, en Ontario. Tout de suite après, les participants vont mettre sur pied des centres de soutien à Edmonton, Winnipeg, Petawawa et Halifax.

    Nous avons choisi quatre sites pour le projet pilote avant d'étendre le programme à tous les membres des Forces canadiennes. Il faut découvrir comment le programme va fonctionner, et je suis convaincu qu'il sera une réussite et je crois qu'il aura des effets très positifs.

    Nous voulons utiliser ces sites pilotes aussi pour valider les matériaux pédagogiques et les modules de formation préparatoires au déploiement en collaboration avec des professionnels de la santé et la chaîne de commandement. Ces sites feront également office de maîtres d'oeuvre pour l'élaboration de la méthodologie requise pour opérer un changement de culture dans l'institution afin d'éliminer la stigmatisation des blessures de stress opérationnel.

    Depuis avril 1999, en collaboration avec le ministère des Anciens combattants, nous avons ouvert un centre de soutien aux membres blessés et aux anciens combattants et à leur famille.

    Monsieur le président, la santé et le bien-être de nos militaires est de très haute importance pour nous. Cela nous tient à coeur, et nous allons continuer de mettre sur pied les programmes et les activités nécessaires.

    Lorsque M. Marin a déposé son rapport, nous avons constaté tout de suite que nous sommes sur la bonne voie, mais que nous sommes encore loin du but, et nous en sommes conscients. Nous accueillons favorablement les recommandations de l'ombudsman, dont plusieurs sont déjà partiellement mises en oeuvre ou le seront. Quant aux autres recommandations, si nous pouvons élaborer des initiatives plus tôt que prévu, nous allons le faire.

    L'amélioration de notre capacité de répondre au SSPT dépend en partie de la sensibilisation de nos membres au fait que les blessures de stress opérationnel telles le SSPT, bien qu'elles ne soient pas visibles, sont des blessures aussi réelles que les blessures physiques.

    Nous devons continuer à sensibiliser nos membres, et nos officiers particulièrement, au fait que le SSPT existe réellement et peut être traité. Ce rapport va évidemment nous aider à faire cela. D'ailleurs, nous avons fait beaucoup de formation préparatoire au déploiement afin de garantir que les militaires envoyés en Afghanistan auront l'aide professionnelle et le soutien par les pairs dont ils auront besoin pour composer avec les blessures de stress opérationnel telles le SSPT.

    Si le SSPT est diagnostiqué assez tôt, il peut être traité plus efficacement.

»  +-(1705)  

    Tout comme pour une blessure physique, les effets à long terme du SSPT peuvent varier d'un traitement réussi, suivi d'un retour au service actif, à une invalidité de longue durée, qui peut limiter les possibilités d'emploi ou même rendre la personne inapte au service. Dans ce dernier cas, nous avons la responsabilité d'aider la personne à faire la transition à la vie civile, en collaboration avec le ministère de la Défense nationale et le ministère des Anciens combattants.

    Monsieur le président, on pourrait avoir l'impression que nous avons découvert le SSPT en lisant le rapport déposé par M. Marin. Eh bien, je peux vous dire que ce n'est pas ce rapport qui nous a fait découvrir le SSPT. Au cours des dernières années, nous avons pris connaissance de plus en plus de ce syndrome, et nous avons fait enquête sur ses causes et sur les traitements possibles.

    Néanmoins, nous accueillons favorablement ce rapport et ses recommandations. Nous nous engageons à prendre toutes les mesures nécessaires pour bien soigner nos militaires. Aider les hommes et les femmes qui souffrent des blessures de stress opérationnel telles le SSPT est une tâche très difficile. Nous reconnaissons la nécessité de continuer d'améliorer les services auxquels nos militaires ont accès. Bien sûr, ce rapport va nous être d'une utilité précieuse dans la continuation des progrès que nous avons déjà faits depuis trois ans.

    J'avais dit trois minutes et j'en ai utilisés quatre, et je vais donc m'arrêter ici, monsieur le président. Je serai heureux de répondre aux questions.

»  +-(1710)  

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci beaucoup, général. C'est un très bon départ.

    Malheureusement, nous avons perdu certains députés de l'opposition. C'est drôle de voir comment les choses changent, mais le Bloc est de nouveau l'opposition officielle.

    Monsieur Bachand, vous avez la parole.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand: Merci, monsieur le président.

    Permettez-moi d'abord de saluer le lieutenant général Couture, qui est du Royal 22eRégiment.

+-

    Lgén Christian Couture : [Note de la rédaction: inaudible]

+-

    M. Claude Bachand: Moi de même, monsieur. Je suis toujours fier qu'un Québécois ou un Canadien français, comme mes collègues pourraient dire, mais un des nôtres, monte jusqu'en haut de la structure. Sachez que je suis du Royal 22e Régiment moi-même, de la section 2 du 2e bataillon, groupe n° 3.

    Après une section, qu'est-ce que c'est?

+-

    Lgén Christian Couture: Un peloton: compagnie A, peloton 3.

+-

    M. Claude Bachand: Exactement. Vous le savez mieux que moi. Vous étiez-vous renseigné?

+-

    Lgén Christian Couture: Non, mais j'ai commandé le 2e bataillon.

+-

    M. Claude Bachand: Je veux aussi saluer le général Mathieu, qui a un rôle modèle parce que sur 70 généraux, je pense qu'il n'y a que deux femmes. Je pense que c'est important. C'est une pionnière.

    Il y a beaucoup de femmes qui me parlent des femmes qui portent le grade de général dans l'Armée canadienne. Il n'y en a pas beaucoup, donc, je pense que vous avez une grande responsabilité comme femme aussi. Je voulais vous dire qu'il y a beaucoup de femmes qui vous admirent parce que j'en entends parler régulièrement.

+-

    Lgén Christian Couture: Il n'y a aucun doute dans mon esprit. Tous mes collègues, de mon niveau et même d'un niveau moins élevé sont convaincus que les blessures reliées au stress opérationnel sont très réelles. C'est très certainement réel, il n'y a aucun doute dans mon esprit et les gens en sont convaincus.

    La culture dont vous parlez est évidement transmise à tous les niveaux, et déjà chez les recrues. Oui, on forme des gens résistants et forts, tant mentalement que physiquement, et certains, qui ont déjà été en période d'opérations ou qui ont seulement fait des exercices qui se rapprochent d'une opération réelle, ont dû faire preuve de beaucoup de force et de résistance. Il ne s'agit pas nécessairement d'être fort dans le sens de pouvoir lever d'énormes poids de plusieurs livres, il faut de l'endurance tant mentale que physique. En anglais on emploierait le mot stamina, qui serait peut-être plus approprié.

    Dans toute la formation que reçoivent nos chefs de tous les niveaux et les membres des Forces armées canadiennes de tous les niveaux, quand on parle de blessures physiques et de la façon de les traiter, il s'agit toujours de blessures physiques qui sont visibles, qui sont faciles à voir et à analyser. Une blessure invisible est extrêmement difficile à comprendre. Tant que vous ne l'avez pas vécue ou tant que vous ne l'avez pas vue, on peut vous l'expliquer autant comme autant et vous pourrez toujours dire « oui, d'accord ». Cependant, une préparation adéquate, un entraînement adéquat, une éducation adéquate fera voir toutes les facettes d'une telle blessure: ses causes, ses symptômes, les traces qu'elle laisse, les réactions qu'elle entraîne et l'impact qu'elle peut avoir. Mais aussi et surtout, cela pourra faire comprendre aux gens que cette blessure est très réelle et qu'elle cause, malheureusement, des limitations au même titre qu'une blessure physique.

    Quand une blessure de ce genre est traitée, qu'elle est guérie, ou du moins contrôlée--il existe peut-être une prothèse pour employer le mot du général Dallaire un peu plus tôt--et que la personne peut fonctionner, il nous revient à nous, à tous les échelons hiérarchiques, de nous assurer qu'un blessé soit traité comme il le faut, qu'il soit reconnu pour ce qu'il ou elle est et ramené dans son unité le plus rapidement possible, si c'est faisable. C'est pourquoi on s'y est engagés avec tous les services qui font partie de mon organisation, entre autres les services médicaux.

    Malheureusement, ça ne peut pas toujours être possible. Alors, à ce moment-là, il faut se rendre à l'évidence et notre responsabilité, encore une fois en tant que chef militaire, est de nous assurer que ces gens-là reviennent à la vie civile de façon adéquate, responsable et digne, avec l'aide du ministère des Anciens combattants.

»  +-(1715)  

+-

    M. Claude Bachand: J'aurais maintenant une question pour le général Mathieu.

    Il me semble avoir lu des rapports dernièrement qui reconnaissaient tous qu'il existait un certain manque de médecins à l'intérieur des Forces armées canadiennes et qu'il était difficile d'en recruter. J'ai cru lire aussi dans le rapport de l'ombudsman qu'il manquait un peu de thérapeutes pour traiter le syndrome post-traumatique. Le fait qu'il en manque, c'est un peu comme dans le cas des rotations qui se produisent trop souvent: ces gens-là sont surchargés. J'imagine, sans être moi-même thérapeute, que ce doit être dur aussi d'entendre des histoires d'horreur du matin au soir.

    Pouvez-vous d'abord nous donner un aperçu des soins médicaux qui sont prodigués à l'intérieur des Forces armées canadiennes, et nous dire s'il est vrai qu'il y a un manque de médecins, et plus particulièrement par rapport au syndrome post-traumatique? Est-ce qu'on a un nombre suffisant de thérapeutes actuellement pour aider les gens qui se présentent aux centres de thérapie? Est-ce qu'on a envisagé un plan précis de recrutement, si vous nous confirmez qu'il en manque?

+-

    Brigadier général Lise Mathieu (directeur général, Service de santé, ministère de la Défense nationale) : En ce moment, le personnel qui dispense des soins est, dans son ensemble, à court de 300 membres. Il est à court de 50 médecins, d'infirmières, de travailleurs sociaux, d'adjoints médicaux et d'adjoints aux médecins. En plus de cela, il y en a 3 p. 100, ou une soixantaine, qui sont en congé de maladie à long terme à cause de la surcharge de travail et il y en a une trentaine d'autres qui sont sur ce qu'on appelle SPHL, qui sont donc en voie de retourner à la vie civile pour les mêmes raisons.

    Donc, le  care provider burn out, comme on dit en bon français, est certainement une réalité; c'est un gros problème. C'est aussi un problème difficile, en ce sens que le manque de personnel en soins de santé qui nous touche se fait aussi sentir dans toute la communauté canadienne.

    C'est donc vous dire que tout le personnel en soins de santé que je peux engager, je l'engage. Il y a ceux qui n'existent pas, mais aussi ceux qui travaillent ailleurs et qu'on n'arrive pas à attirer, bien qu'on essaie de le faire. Il n'y a absolument rien qui m'empêche d'engager tous ceux qui sont prêts à venir travailler avec nous.

+-

    M. Claude Bachand: Est-ce qu'on va avoir un deuxième tour?

»  +-(1720)  

+-

    Le vice-président (M. David Price): On va essayer.

    M. Wood.

[Traduction]

+-

    M. Bob Wood: Je vais continuer dans la même veine que  M. Bachand.

    M. Marin a dit, généraux, qu'il nous manque un tiers du personnel nécessaire pour aider nos soldats qui reviennent des missions à l'étranger.

    Pour poursuivre ce que disait M. Bachand, combien de personnes est-ce qu'il nous faut? Savez-vous combien de personnes il nous faut—grosso modo—pour aider les gens qui reviennent des différentes missions? Vous êtes sur le point de mettre en place quatre ou cinq projets pilotes, n'est-ce pas?

+-

    Lgén Christian Couture: Le projet pilote dont nous parlons est...

+-

    M. Bob Wood: Pour le SSPT.

+-

    Lgén Christian Couture: ... le CSTSO, le réseau de soutien pour stress opérationnel, et ce n'est pas d'ordre médical. C'est un groupe de soutien par les pairs. Il est synchronisé avec le travail du fournisseur des soins de santé, mais à l'extérieur des services de soins de santé. Les psychiatres n'y participent pas, mais le groupe profite de l'aide des travailleurs sociaux et des psychologues. Si nous n'avons pas ces intervenants parmi nos militaires, nous les embauchons de l'extérieur, si possible. En fait, il y a des travailleurs sociaux et des psychologues civils qui travaillent pour nous.

    Un de nos problèmes, et le général Mathieu l'a mentionné, c'est que dans le milieu civil, il y a une pénurie de ces gens-là. Nous savons, comme tout le monde, que nous faisons face à une pénurie de professionnels de la santé et de certains spécialistes médicaux. Nous faisons notre possible pour trouver, attirer et recruter ces gens. Mais pour fournir des soins de façon stable et continue à la clinique de la garnison...

+-

    M. Bob Wood: Nous traitons de ce rapport.

+-

    Lgén Christian Couture: ... y compris le SSPT, par l'intervention d'un tiers, nous pouvons embaucher des praticiens civils spécialisés dans le domaine que nous cherchons. Est-ce que c'est un succès partout? Je demanderais au général Mathieu d'y répondre. Mais si nous n'avons pas à l'interne ce dont nous avons besoin, nous achetons le service dans le milieu civil.

+-

    M. Bob Wood: De combien d'argent parlons-nous? Est-ce qu'il y a un problème d'argent pour aider ces gens? Avons-nous les fonds disponibles pour aider ces gens de façon professionnelle?

+-

    Lgén Christian Couture: J'ai mentionné dans ma déclaration que nous sommes en train de renouveler et de rebâtir notre système de soins de santé. Comme vous le savez, les soins de santé coûtent très cher. Je viens de terminer mon budget pour la prochaine année financière. Dans le cas des ressources médicales dont nous avons besoin, j'ai presque tout ce que j'ai demandé. Cela comprend les services de santé généraux et l'argent dont le général Mathieu et son équipe ont besoin pour s'occuper de certains des problèmes qui découlent des troubles de santé mentale.

    Sur le plan financier, les ressources ne posent pas de problème à l'heure actuelle, car le ministère s'est engagé à fournir les ressources nécessaires pour s'attaquer à ce problème, ce fléau—c'est le seul mot qui me vient à l'esprit. Mais parfois même de l'argent ne peut aider, parce que nous ne pouvons pas trouver les gens possédant les compétences voulues.

+-

    M. Bob Wood: Général Mathieu, voulez-vous ajouter quelque chose?

+-

    Bgén Lise Mathieu: Je voudrais tout simplement me faire l'écho du général Couture. Je n'ai aucune difficulté à obtenir les ressources dont j'ai besoin pour soigner les gens. Mais j'ai du mal à acheter les services externes, car il y a une pénurie. Mais de mon point de vue, l'argent n'est pas le problème.

+-

    Lgén Christian Couture: En fait, entre 1999 et 2002, nous avons doublé le budget pour les soins de santé. Cela vous indique jusqu'à quel point nous prenons au sérieux les questions de soins de santé—les blessures, les victimes, les maladies chez nos gens.

»  +-(1725)  

+-

    Mr. Bob Wood: Savez-vous combien cela coûterait? Ou est-il trop tôt pour le savoir?

+-

    Lgén Christian Couture: Je ne pense pas que le coût soit un problème.

+-

    M. Bob Wood: Très bien, je suis content d'entendre cela.

+-

    Lgén Christian Couture: De mon côté, le coût ne pose pas de problème. Comme je l'ai déjà dit, pour bien des recommandations, nous avons déjà quelque chose. Nous y avons déjà pensé, ou nous sommes en train de préparer quelque chose, et maintenant nous avons besoin d'en déterminer l'efficacité actuelle ou future et d'effectuer les changements nécessaires. Donc à mon avis, l'argent n'est pas une considération pour le traitement de cette blessure.

+-

    M. Bob Wood: Je devrais savoir la réponse, mais est-ce que les réservistes sont couverts?

+-

    Lgén Christian Couture: Oui, monsieur. Les réservistes y ont plein accès, surtout dans le cas du SSPT.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Monsieur Anders, vous avez cinq minutes.

+-

    M. Rob Anders: Y a-t-il des soldats en Afghanistan à l'heure actuelle qui souffrent du SSPT? Par là, je veux dire que nous avons envoyé un groupe d'Edmonton avec le 3ebataillon, des membres du PPCLI, et on estime qu'à Edmonton, il y a 750 soldats—je crois que c'est le chiffre que j'ai entendu—

+-

    Lgén Christian Couture: Est-ce qu'ils allaient en Afghanistan?

+-

    M. Rob Anders: Oui. Mais les 750 dont je parle... À Edmonton, il y avait plusieurs soldats qui souffraient du syndrome de stress post-traumatique avant leur déploiement en Afghanistan. Étant donné qu'il n'y avait pas assez de ressources—je dis ça très poliment—, est-ce qu'on a envoyé des soldats en Afghanistan qui souffraient du syndrome de stress post-traumatique? En d'autres mots, avaient-ils ce syndrome ou des symptômes de ce syndrome avant d'être envoyés là-bas?

+-

    Lgén Christian Couture: Nous avons un processus de présélection pour les soldats qui sont déployés. Je suis persuadé que ce processus, appliqué correctement, aurait permis de déceler les cas de syndrome de stress post-traumatique.

    Maintenant, est-ce que je serais prêt à jurer qu'il n'y a aucun soldat en Afghanistan souffrant du SSPT ou ayant des symptômes du SSPT... Non, mais je suis persuadé que tous ceux qui ont eu de tels symptômes ont été éliminés de la mission par le processus de présélection.

    Les troupes déployées ou en train d'être déployées vers l'Afghanistan ont la formation qu'il leur faut, qui d'après moi est suffisante au stade prédéploiement pour les aider à reconnaître le syndrome du SSPT et à composer avec les situations dans lesquelles elles pourraient se trouver. De plus, elles sont déployées avec un appui des professionnels et de leurs pairs. Dans des cas pareils, l'appui des pairs est extrêmement important—je dis cela de ma propre expérience—et ils ont cet appui. Je suis persuadé qu'ils vont très bien.

    De plus, ils ont accès à la chaîne médicale de la coalition, qui comprend un appui médical—des psychiatres, des psychologues et d'autres professionnels. Si cela s'avérait insuffisant, on ferait les ajustements voulus. Et nos troupes quittent le pays et sont déployées vers l'Afghanistan avec l'appui qu'il leur faut pour les protéger du syndrome de stress post-traumatique.

+-

    M. Rob Anders: Bon. Je comprends.

    Je note aussi qu'à la page 124 de votre rapport, vous indiquez que très souvent les conjoints ne sont pas consultés et que...

+-

    Lgén Christian Couture: Je m'excuse, monsieur.

+-

    M. Rob Anders: Voilà, je cite du rapport: ici à la page 124, au paragraphe 747, vous indiquez que fréquemment les conjoints ne sont pas consultés. Puis on parle des problèmes qu'il y a eus avec votre processus de présélection avant le déploiement.

    Je comprends donc ce que vous essayez d'expliquer, mais je note aussi que votre rapport indique que la présélection ne se fait pas de façon élargie dans toutes les circonstances. Ce n'est pas cohérent. Le processus est appliqué à certains endroits, mais pas à d'autres. Bon.

    J'aurais aussi une question sur la période de convalescence accordée aux soldats.

    M. Dallaire parlait de 12 à 24 mois de convalescence. Il a demandé ce qu'on faisait pour aider les gens à se rétablir. En fait, le repos ne suffit pas; ils ont besoin de plus, surtout pour ce qui est du syndrome de stress post-traumatique. Mais si je ne m'abuse, ils n'ont pas 12 à 24 mois pour se rétablir, donc j'aimerais savoir combien de temps on leur accorde.

+-

    Lgén Christian Couture: Tout d'abord, j'aimerais parler du processus de filtrage. Je ne crois pas que ni moi ni quiconque à mon niveau ait jamais prétendu que notre processus de filtrage est un outil parfait. Nous perfectionnons cet outil chaque fois que nous nous en servons. Toutes les fois que nous faisons ce genre de filtrage, on contrôle son efficacité après coup. S'il se passe quelque chose dans le théâtre des opérations, la première question posée concernera le genre de filtrage qui a été pratiqué. Il y a donc un contrôle constant.

    Dans son rapport, M. Marin aborde la question d'un processus de filtrage normalisé et amélioré, ce que je ne remets pas en question.

    Combien de temps faut-il à ceux qui souffrent du SSPT pour guérir? Je ne le sais pas. Mais pour ceux qui nous reviennent sans en avoir souffert—et Dieu merci si c'est le cas—d'après mon expérience personnelle, je crois qu'il faut au moins 12 mois pour récupérer.

    D'après notre politique actuelle, personne ne devrait être redéployé à l'extérieur du pays dans les 24 mois qui suivent son retour et seul le haut commandement peut accorder une dispense. On peut aller jusqu'à 12  mois. Si c'est moins de 12 mois, il faut alors une dispense signée. La personne doit être examinée convenablement parce que nous savons que les déploiements multiples ont un effet cumulatif même si nous ne comprenons pas tout à ce propos. C'est quelque chose que nous étudions à l'heure actuelle et nous espérons trouver réponse à nos questions.

    La politique préconise aussi que pendant les 60 premiers jours après leur retour, les gens ne seront pas envoyés ailleurs. Ils demeureront sur la base, ou très près de celle-ci et du foyer, et il leur sera accordé un certain temps qu'ils pourront passer en famille tout en essayant de se réintégrer au mode de vie canadien.

    En plus, nous introduisons un processus de contrôle suivant le retour qui comprend un questionnaire détaillé. Il y a une entrevue menée par un travailleur social, un psychologue ou un psychiatre, quelqu'un de qualifié, qui interviewera non seulement le membre des forces armées mais aussi les membres de sa famille dans les trois ou quatre mois qui suivent son retour. Ce processus s'applique à tout le monde.

    Grâce à cela, nous espérons atteindre le but suivant: si quelqu'un présente des symptômes quelconques sans les reconnaître ou si nous découvrons que quelqu'un a besoin d'un traitement, alors nous fournirons ce traitement. Je crois fermement que la détection précoce de ces cas permet de les soigner avec succès.

    Il y a un navire qui arrive au Canada d'ici quatre ou cinq jours. Nous entreprendrons ce processus dans trois mois, c'est-à-dire vers le mois de mai.

    C'est la première fois que nous le faisons. Auparavant, nous distribuions un questionnaire où l'on demandait aux gens si quelque chose s'était passé pendant leur tour de service. Si la réponse était négative, cela s'arrêtait là. En cas de réponse positive, on envoyait la personne en question chez un médecin militaire et nous nous occupions du cas à partir de ce moment-là.

    J'ai été déployé à l'extérieur du pays quatre fois et j'ai dû préparer environ une douzaine de contingents pour service outre-mer. Quand les soldats reviennent, ils n'ont qu'une chose en tête: rentrer chez eux et être laissés en paix. Ils sont très réfractaires à ce genre de questionnaires et de tests. Ils veulent simplement rentrer chez eux. C'est là un problème.

    Donc, il nous faut de toute façon avoir ce genre de questionnaire, au moins avant qu'ils reviennent au pays, mais il nous faut retourner les voir après. Il semble que le mieux, c'est de les revoir quelques mois plus tard. Nous les examinons aussi pour toute autre maladie physique, mais cette entrevue précise servira aux fins que je viens de décrire.

»  +-(1730)  

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci.

    M. O'Reilly.

+-

    M. John O'Reilly: Merci, monsieur le président.

    Et merci beaucoup d'être venus. C'est un plaisir de traiter avec des experts.

    J'ai un tout petit quelque chose ici. Je crois que les cliniques hors base mentionnées dans ce rapport constituent une des solutions qu'on devrait étudier. Envoyer des gens en Afghanistan et à Kandahar n'est pas la même chose que de les envoyer au Kosovo et en Bosnie ou en Macédoine en mission de maintien de la paix. Le stress est d'un genre différent. Je suis allé à Kosovo et en Bosnie et c'est sûr qu'il y a du stress. Mais je ne crois que c'est comme se faire tirer dessus tous les jours ou de nettoyer des tunnels où il y a des gens qui veulent vous tuer. Je crois que nous allons voir un plus grand nombre de cas que l'on retrouve dans une situation de guerre plutôt que dans une situation de maintien de la paix.

    Le problème que je vois au niveau de la population en général, c'est que la pratique de la médecine générale change. Le médecin de famille ne veut plus être un généraliste. Il ne veut plus traiter avec des gens qui font de l'emphysème et qui ne veulent pas arrêter de fumer ou qui sont obèses et souffrent d'hypertension. Ils en ont assez d'arriver au bureau tous les jours, d'avoir là une quarantaine de personnes et de savoir qu'elles n'écouteront pas nécessairement leurs conseils. Les jeunes médecins insistent de plus en plus: ou vous suivez leurs consignes ou vous allez en clinique.

    La face changeante de la médecine est un problème, à mon avis. Donc, lorsque je vois une recommandations portant sur les cliniques hors la base, cela me semble solutionner quelques problèmes; tout d'abord on traite avec un genre de clinique ouvert 24 heures sur 24 tous les jours ou bien avec le genre de clinique traitant de situations et de cas d'urgence un peu partout au pays. Ces cliniques sont dotées d'un personnel de soutien. À l'heure où l'on se parle, les jeunes médecins diplômés ne savent plus comment donner une intraveineuse parce qu'il y a des équipes spécialisées en intraveineuse ou des infirmières praticiennes qui donnent les piqûres pour la grippe et les allergies. Dans le temps, les médecins de famille frais émoulus étaient prêts à vous faire une appendicectomie et quoi d'autre encore. La situation est différente de nos jours. Ils se dirigent de plus en plus vers les cliniques parce qu'ils y trouvent l'équipe dont ils ont besoin.

    D'après le rapport, les collègues en service social n'ont pas l'expertise voulue pour soigner le SSPT. Je me demande quelle résistance vous opposeriez aux cliniques hors base qui pourraient vous accorder la confidentialité et le professionnalisme voulus si vous ne pouvez pas recruter vos propres professionnels. Le problème n'existe pas uniquement pour les militaires. Toutes sortes de petites municipalités du Canada rural manquent de médecins. Je viens d'une vaste région rurale où de plus en plus de retraités s'installent tout en gardant leurs médecins à Toronto et à Hamilton. Ils y vont en voiture parce qu'ils ont des problèmes à trouver des gens.

    La plupart des médecins en milieu rural, au Canada, n'acceptent plus de patients et les gens vont aboutir en clinique. Franchement, les cliniques sont de plus en plus professionnelles et généralistes et on y fait à peu près tout. Ils ont une base fantastique en psychiatrie. Je demande tout simplement ce que vous pensez de tout cela.

»  +-(1735)  

+-

    Lgén Christian Couture: Vous avez parlé de «résistance». Qui a dit que je résistais?

»  -(1740)  

+-

    M. John O'Reilly: Je vous demandais si c'était le cas.

+-

    Lgén Christian Couture: Je n'ai pas opposé de résistance. J'ai dit qu'il s'agit d'une recommandation très intéressante qu'il faut étudier et analyser très soigneusement. Une clinique du genre CSTSO est quelque chose de très spécialisé. Je ne crois pas que nous pourrions trouver les spécialistes dont il est question dans toutes les cliniques du centre-ville. Il nous faudrait la créer et la doter des spécialistes nécessaires, militaires et civils, à mon avis. Là n'est pas la question, parce que c'est faisable.

    Il nous faut utiliser une approche holistique de la santé. Nous parlons de stigmatisation, de reconnaissance, des gens, du leadership, de l'éducation et ainsi de suite. Cette recommandation propose un projet pilote. Il faut décider où monter le projet et quel en sera le contenu. Comment mesure-t-on le succès relatif de cette méthode comparée aux autres, et ainsi de suite?

    Je n'ai jamais dit que j'opposais de la résistance. Si les gens pensent le contraire, peut-être me suis-je servi de la mauvaise terminologie. Je ne vais pas faire les choses à brûle-pourpoint parce que je veux savoir exactement dans quoi je m'embarque. Je ne veux pas que mes soldats servent de rats de laboratoire. Je ne veux pas non plus gaspiller mes ressources. Il me faut donc apprendre et étudier très attentivement la question pour savoir dans quoi je m'embarque.

    En réalité, je n'ai pas peur d'avoir recours aux ressources à l'extérieur de la base. Le projet CSTSO, quatre projets pilotes, en réalité, débutera dès le 1er mars à Edmonton, Winnipeg, Petawawa et Halifax. C'est Halifax ou Victoria parce qu'il nous faut les gens. Ils seront au centre-ville. Ce projet de CSTSO se fait de concert avec le ministère des Anciens combattants. À certains endroits, nous utiliserons leurs locaux et, pour parer à toute éventualité, à certains endroits nous sommes en pourparlers avec la légion pour nous servir de leurs locaux.

    Les services hors base ne me font pas peur. Si les gens pensent que je ne veux pas avoir recours à de tels services parce que je porte l'uniforme et que je veux que tout se fasse à l'interne et ainsi de suite, ces gens-là se trompent royalement. Je veux savoir exactement dans quoi je m'embarque.

+-

    M. John O'Reilly: Monsieur le président, je ne crois pas avoir laissé entendre qu'il y avait quoi que ce soit...

+-

    Le vice-président (M. David Price): Votre temps est écoulé depuis un bon moment déjà.

+-

    M. John O'Reilly: Je le sais, mais je crois que nous arrivons enfin à un résultat.

    Des voix: Oh, oh!

    M. John O'Reilly: Vous prendrez de mon temps.

    Le vice-président (M. David Price): Vous avez 10 secondes.

    M. John O'Reilly: Ces cliniques hors base ne font pas que de la médecine générale, mais on trouve aussi dans cette catégorie des cliniques psychiatriques disponibles deux jours semaine en région rurale. Il s'agit tout simplement d'un renvoi à...

+-

    Lgén Christian Couture: Bon, je comprends. Monsieur O'Reilly, c'est ce que nous faisons régulièrement. Je suis désolé de vous avoir mal compris. J'ai cru vous entendre dire que j'étais contre cette façon de faire, ce qui n'est pas le cas. C'est ma faute.

    Monsieur le président, je suis désolé d'avoir pris tout son temps, mais j'aimerais vous dire une chose. Nous avons dit tout à l'heure qu'il nous manque certains spécialistes. Parfois, on les retrouve au centre-ville et nous leur envoyons tout le temps des patients. Si c'est de cela qu'il s'agissait, oui, nous le faisons régulièrement.

+-

    M. John O'Reilly: Parfait, c'était l'essentiel de mon propos. Merci.

[Français]

+-

    Le vice-président (M. David Price): Merci beaucoup, général Couture et général Mathieu.

    On a mis un peu plus de temps que prévu. J'espère qu'à cause de cela, ça ne nous coûtera pas trop cher en heures supplémentaires.

+-

    Une voix: Monsieur le président, on me paye 24 heures par jour, sept jours par semaine.

[Traduction]

    Je suis de garde.

[Français]

+-

    Le vice-président (M. David Price): J'ai l'impression que ce n'est pas la dernière fois qu'on va vous voir ici parce que c'est un sujet qui nous concerne de plus en plus.

+-

    Lgén Christian Couture: Je ne demande pas mieux, mon cher monsieur. De plus, il y a le rapport qui a été soumis par M. Marin. Ce n'est pas notre intention de seulement le regarder une fois et de le mettre de côté. En fait, j'ai avisé mon personnel qu'il fallait maintenir un contact avec l'ombudsman. On va le faire parce qu'il y aura parfois certaines choses pour lesquelles on va vouloir avoir une espèce de clarification. On veut comprendre exactement ce qui a été dit.

+-

    Le vice-président (M. David Price): Vous et M. Marin avez parlé du rapport sur la qualité de vie. Ce rapport doit être déposé au Parlement à chaque année.

+-

    Lgén Christian Couture: On est en train de l'écrire. J'ai vu l'ébauche la semaine dernière.

-

    Le vice-président (M. David Price): Merci beaucoup.

    La séance est levée.