AGRI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 5 juin 2003
Á | 1115 |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.)) |
M. Stewart Wells (président, National Farmers Union) |
Á | 1120 |
M. Terry Boehm (vice-président, National Farmers Union) |
Á | 1125 |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Terry Boehm |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Terry Boehm |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Neal Hardy (président, Saskatchewan Association of Rural Municipalities) |
Á | 1130 |
Á | 1135 |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Ivan Ottenbreit (directeur, District I, Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan) |
Á | 1140 |
Á | 1145 |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Ivan Ottenbreit |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Ivan Ottenbreit |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne) |
M. Ivan Ottenbreit |
M. David Anderson |
M. Ivan Ottenbreit |
M. David Anderson |
M. Ivan Ottenbreit |
M. David Anderson |
M. Ivan Ottenbreit |
M. David Anderson |
M. Ivan Ottenbreit |
M. David Anderson |
M. Ivan Ottenbreit |
M. David Anderson |
M. Stewart Wells |
Á | 1150 |
M. David Anderson |
M. Stewart Wells |
M. David Anderson |
M. Neal Hardy |
M. David Anderson |
M. Neal Hardy |
M. David Anderson |
M. Neal Hardy |
M. David Anderson |
M. Neal Hardy |
M. David Anderson |
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne) |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Garry Breitkreuz |
M. Neal Hardy |
M. Garry Breitkreuz |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Garry Breitkreuz |
M. Terry Boehm |
Á | 1155 |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Garry Breitkreuz |
M. Terry Boehm |
M. Garry Breitkreuz |
M. Terry Boehm |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Garry Breitkreuz |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Garry Breitkreuz |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Garry Breitkreuz |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Garry Breitkreuz |
M. Stewart Wells |
Mme Arita McPherson (directrice de la politique agricole, Saskatchewan Association of Rural Municipalities) |
 | 1200 |
M. Garry Breitkreuz |
M. Neal Hardy |
M. Garry Breitkreuz |
M. Neal Hardy |
M. Stewart Wells |
M. Ivan Ottenbreit |
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur) |
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC) |
 | 1205 |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Rick Borotsik |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Rick Borotsik |
M. Ivan Ottenbreit |
Mme Arita McPherson |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
 | 1210 |
M. Terry Boehm |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
M. Stewart Wells |
M. Rick Borotsik |
M. Stewart Wells |
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)) |
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.) |
M. Terry Boehm |
M. Claude Duplain |
M. Terry Boehm |
 | 1215 |
M. Claude Duplain |
M. Neal Hardy |
M. Claude Duplain |
M. Stewart Wells |
M. Claude Duplain |
M. Terry Boehm |
Le président |
M. Claude Duplain |
M. Neal Hardy |
 | 1220 |
M. Stewart Wells |
Le président |
M. Terry Boehm |
Le président |
M. Dick Proctor (Palliser, NPD) |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Dick Proctor |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Dick Proctor |
M. Neal Hardy |
M. Dick Proctor |
 | 1225 |
M. Neal Hardy |
M. Dick Proctor |
M. Stewart Wells |
M. Dick Proctor |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Dick Proctor |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Dick Proctor |
M. Stewart Wells |
 | 1230 |
M. Ivan Ottenbreit |
Le président |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Terry Boehm |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Terry Boehm |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Stewart Wells |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Neal Hardy |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Neal Hardy |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Neal Hardy |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Neal Hardy |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Neal Hardy |
Mme Rose-Marie Ur |
 | 1235 |
M. Stewart Wells |
M. Terry Boehm |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Stewart Wells |
 | 1240 |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Stewart Wells |
M. Terry Boehm |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Neal Hardy |
Mme Rose-Marie Ur |
M. Terry Boehm |
M. Stewart Wells |
Mme Rose-Marie Ur |
Le président |
M. Dick Proctor |
Le président |
M. Claude Duplain |
 | 1245 |
M. Ivan Ottenbreit |
M. Claude Duplain |
M. Terry Boehm |
M. Stewart Wells |
M. Claude Duplain |
M. Terry Boehm |
 | 1250 |
Le président |
Mme Arita McPherson |
Le président |
M. Stewart Wells |
Le président |
M. Claude Duplain |
Le président |
M. Claude Duplain |
Le président |
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.) |
Le président |
M. Stewart Wells |
Le président |
M. Stewart Wells |
Le président |
 | 1255 |
M. Terry Boehm |
Le président |
M. Stewart Wells |
Le président |
M. Neal Hardy |
· | 1300 |
Le président |
M. Ivan Ottenbreit |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le jeudi 5 juin 2003
[Enregistrement électronique]
Á (1115)
[Traduction]
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur (Lambton—Kent—Middlesex, Lib.)): La séance est ouverte. Conformément à l'article 108(2) du Règlement, nous nous réunissons aujourd'hui pour une session d'information sur l'approbation du blé génétiquement modifié et son impact sur l'agriculture canadienne.
Nous accueillons comme témoins, représentant le Syndicat national des agriculteurs, Stewart Wells, président, et Terry Boehm, vice-président; pour le compte de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities, Neal Hardy, président, et Arita McPherson, directrice de la politique agricole; et au nom de l'Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan, Ivan Ottenbreit.
Qui va ouvrir le bal? Étant donné que c'est Stewart qui a été présenté en premier, peut-être qu'il pourrait commencer. Nous allons entendre des déclarations de dix minutes, et celles-ci seront suivies de questions et de commentaires.
M. Stewart Wells (président, National Farmers Union): Merci, madame la présidente.
Comme vous l'avez dit, je suis accompagné de Terry Boehm, vice-président du Syndicat national des agriculteurs, qui habite tout près de Saskatoon, en Saskatchewan. Nous allons séparer entre nous le temps qui nous a été accordé. Je ferai la première partie de notre présentation, et Terry enchaînera.
Le SNA est la seule organisation agricole nationale bénévole avec adhésion directe au Canada. C'est également la seule organisation agricole constituée par une loi du Parlement, ce en 1970. Le SNA est heureux d'avoir cette occasion de présenter le point de vue des agriculteurs relativement au blé génétiquement modifié au Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire.
Aux fins de la politique et du présent mémoire du SNA, les expressions «modification génétique», «génie génétique» et «biotechnologie» sont tout à fait synonymes et signifient exclusivement la modification ou le transfert direct de matériel génétique à l'aide de techniques de l'ADN recombiné. Ces définitions sont conformes à celles qui sont utilisées dans le rapport publié en janvier 2001 par la Société royale du Canada.
Le SNA est la première organisation agricole à avoir élaboré une politique globale sur les produits de modifications génétiques--et celle-ci est disponible sur demande chez nous et est affichée sur notre site Web. Nos membres ont déterminé que tous les produits modifiés génétiquement ne sont pas nécessairement une bonne affaire ni une mauvaise affaire, mais que chaque produit doit être évalué individuellement. Par conséquent, aux fins de cette présentation, nous mettons l'accent sur le «blé Roundup Ready», qui est la première variété soumise à l'approbation de l'administration fédérale.
Je vais sauter ici par-dessus quelques points, car je sais que ceux-ci ont été couverts dans les séances antérieures tenues par le comité. Je vais donc réellement commencer avec le point 3 de notre texte, et qui se trouve à la page 4.
Nous sommes notamment préoccupés par le secteur biologique et par ce qui pourrait ou non y survenir. Le canola GM a rendu presqu'impossible cette culture par les agriculteurs biologiques. La combinaison dans l'approvisionnement des semences, le déplacement du pollen et le manque de ségrégation concrète sont tels que les agriculteurs biologiques ne peuvent pas être certains que leur canola est libre de produits génétiquement modifiés.
À l'heure actuelle, les détenteurs de brevet de produit GM n'ont pas assumé la responsabilité de prendre soin des semences GM et de les gérer à l'extérieur du laboratoire. Cette question est en litige devant les tribunaux dans deux causes distinctes au Canada: la cause Percy Schmeiser et une cause facilitée par le Saskatchewan Organic Directorate.
L'introduction d'autres cultures GM laissera aux agriculteurs biologiques de moins en moins de choix de cultures. La question des produits biologiques s'applique à tout le blé génétiquement modifié et non pas seulement au blé Roundup Ready.
Au point 4, nous parlons de l'augmentation des coûts agronomiques. Quelques agricultures cultivent maintenant le canola génétiquement modifié Roundup Ready et de nombreux autres champs ont été contaminés inopinément par le canola Roundup Ready.
L'épandage de glyphosate permet de tuer la plupart des mauvaises herbes, laissant le canola intact. Mais lorsque le blé Roundup Ready est semé en rotation sur l'exploitation, alors l'équation change. Tout d'un coup, il y a deux cultures qui sont résistantes au glyphosate: les agriculteurs devront appliquer des produits chimiques différents et en quantité de plus en plus grande pour se débarrasser des végétaux intrus. Sur la base du choix actuel de produits et de leur prix, les chercheurs du Manitoba ont estimé ces coûts accrus à 400 millions de dollars par an, et ce uniquement pour l'Ouest du Canada.
Ces chiffres sont disponibles. Ce travail a été effectué par Rene Van Acker, de l'Université du Manitoba. J'en ai copie ici, et si cela vous intéresse, vous pourriez obtenir cela directement auprès de lui.
Le point 5 concerne en fait quelque chose que nous avons constaté ce printemps seulement. Il y a des liens entre les formulations de glyphosate et l'augmentation des maladies. Par exemple, le fusarium est une très grave et coûteuse maladie du blé, et des études ont montré que les formulations de glyphosate augmentent la propagation du fusarium.
La culture du blé Roundup Ready ferait augmenter de façon spectaculaire la propagation et l'incidence du fusarium. De très bas niveaux de fusarium--et il y a une erreur typographique dans le document que vous avez, car il faudrait moins de 10 p. 100 et non pas moins de 1 p. 100--sont suffisants pour rendre le blé inutilisable comme produit alimentaire destiné aux humains et aux animaux, et donc complètement sans valeur.
Toujours au sujet de ce pourcentage, les exploitants de silos-élévateurs acceptent d'acheter en tant que céréales fourragères du grain contenant jusqu'à 5 p. 100 de fusarium. Vous vous faites écarter des catégories supérieures de blé et de blé dur si vous avez 0,25 p. 100 ou 0,5 p. 100 respectivement, si vous essayez de vous classer dans les premières tranches.
Il importe de faire plus de travail dans ce domaine, mais notre position est que le blé Roundup Ready ne devrait pas être approuvé tant que l'on n'aura pas compris les liens entre les formulations de glyphosate et le fusarium. Différentes souches de fusarium attaquent diverses cultures, mais le fusarium est une grave maladie qui attaque la pomme de terre, et il se pourrait donc que cette recherche soit élargie pour englober toute une gamme de cultures différentes, dont la pomme de terre.
Il s'est fait un peu de travail à la station de recherche de Swift Current. C'est de là que proviennent la documentation et les études. Les chercheurs ont eu de la difficulté à obtenir davantage de fonds en vue de poursuivre leur travail, mais tout juste en avril de cette année, ils ont reçu un peu d'argent dans le cadre d'un programme d'investissement jumelé, et cela va leur permettre de poursuivre leurs travaux, qui sont en cours à l'heure actuelle.
En ce qui concerne le point 6, la ségrégation du blé génétiquement modifié, cela n'est pas possible. Au récent congrès du SNA, Rene van Acker, le phytologue manitobain, a affirmé que la contamination des reproducteurs est inévitable. Le déplacement du pollen du blé, le croisement extérieur, le pontage génétique et le mélange mécanique ainsi que la contamination attribuable aux événements météorologiques créeront exactement les mêmes problèmes que ceux que nous avons connus avec la contamination des semences de canola homologuées.
La ségrégation n'est pas possible à la ferme et nous serions donc aux prises avec divers niveaux de contamination dans tout le système.
Là-dessus, je vais maintenant céder le micro à Terry Boehm.
Á (1120)
M. Terry Boehm (vice-président, National Farmers Union): Bonjour et merci.
J'aimerais commencer par vous présenter des excuses. Je vais m'écarter du texte, et je sais que cela posera peut-être quelques difficultés aux francophones dans le groupe. I am very sorry.
Je vais commencer avec le point 7. Des dommages environnementaux et des dommages aux cultures de tierces parties vont très certainement se produire. De récentes annonces faites par Agriculture Canada ont principalement porté sur une nouvelle technologie génique visant à produire des semences stériles. Avec ce nouveau produit, la semence génétiquement modifiée est viable, mais toute semence produite par un croisement extérieur avec une semence non génétiquement modifiée est stérile.
Cela signifie que les producteurs qui ne les adopteront pas verront leurs semences détruites par la semence génétiquement modifiée. Les agriculteurs désireux de réutiliser leurs propres semences en seront empêchés. Dans le cas des agriculteurs biologiques, leurs semences seront contaminées de nouveau par les cultures génétiquement modifiées. L'ancienne technologie du « terminateur » stérilisait la semence génétiquement modifiée--elle se stérilisait toute seule. La nouvelle technologie stérilise la semence de quelqu'un d'autre, ce qui en fait en définitive une technologie prédatrice.
Cela soulève encore une fois la question de savoir si les détenteurs de brevet sont responsables des préjudices causés par leurs produits.
Un aspect qui ne fait semble-t-il pas l'objet de beaucoup de discussions est celui du transfert génétique horizontal--des mécanismes qui surviennent lorsque des transgènes sont transmis à des bactéries par le biais de résidus d'ADN laissés par la matière végétale morte ou la matière végétale vivant toujours dans le sol. Ceci est manifesté par des gènes marqueurs résistants aux antibiotiques de matières végétales génétiquement modifiées transférées à des bactéries. Je tiens à souligner qu'il n'est pas nécessaire que ce matériel soit vivant, et il s'agit d'un mécanisme qui s'inscrit en dehors de la pollinisation, ce qui semble être le point focal dans les dossiers de contamination et de culture. Cela s'inscrit à l'extérieur des concepts en matière de stérilité des semences récemment annoncés par Agriculture Canada.
La méthodologie en matière de stérilité des semences soulève encore une autre question. Pendant des milliers d'années, notre approvisionnement alimentaire s'est appuyé sur des graines qui poussent. Choisissons-nous la bonne option si nous décidons à partir de maintenant d'appuyer notre approvisionnement alimentaire sur une graine qui ne poussera pas--sur des technologies prédatrices ou de type « terminateur »? Le milieu naturel a moyen de s'adapter et d'intégrer des changements de façons imprévisibles. Devrait-on offrir au milieu naturel l'option de produire des graines stériles?
Éventuellement--et c'est le point numéro 8--un groupe ou un individu demandera «Pourquoi ne pas laisser le marché décider?» Cette solution semble simple, mais elle ne l'est pas.
Premièrement, du côté du consommateur, l'acheteur ne dispose pas de l'information nécessaire pour prendre une décision. Le gouvernement du Canada n'a pas appuyé l'étiquetage obligatoire pour les produits contenant des OGM; par conséquent, le consommateur est obligé d'acheter dans l'ignorance. Deuxièmement, du côté de l'agriculteur, il y aura malheureusement toujours des agriculteurs qui cultiveront ou utiliseront un produit s'il n'est pas explicitement interdit.
La dieldrine est un insecticide hautement efficace lorsqu'elle est utilisée pour lutter contre la sauterelle et si elle n'était pas interdite, des agriculteurs l'utiliseraient toujours. Ce produit a été interdit à cause de ses effets secondaires nocifs sur le reste de l'environnement. Il en est de même du fréon, le CFC qui était utilisé dans les systèmes de climatisation. Le fréon et la dieldrine étaient utilisés par une société qui n'en connaissait pas les effets secondaires néfastes pour l'environnement. Le marché est incapable de prendre ce genre de décisions responsables.
Point numéro 9: l'approbation du blé GM concentre encore plus la maîtrise de nos disponibilités alimentaires entre les mains d'une poignée de sociétés multinationales de production de semences et de pesticides. Ces sociétés sont en train de changer fondamentalement notre système d'approvisionnement alimentaire avec la privatisation de la recherche et du développement, la législation sur les droits de propriété intellectuelle et la contamination génétique généralisée. Ces questions qui sont en jeu sont exposées dans un document rédigé par Devlin Kuyek et intitulé Contamination and Corporate Control of Canada's Seed Supply. M. Kuyek est en train de faire son doctorat sur les droits des phytogénéticiens.
En réduisant la recherche publique et en créant un cadre législatif qui récompense les détenteurs de brevets d'organismes vivants, le gouvernement a été le fer de lance du changement. Une conséquence de la transformation est qu'au moins deux causes opposant les agriculteurs et les sociétés productrices de semences sont maintenant devant les tribunaux, et d'autres vont certainement suivre. Dans ces affaires, c'est l'argent des agriculteurs qui est utilisé pour subventionner les deux côtés qui s'opposent et les résultats formeront la base de la politique gouvernementale.
Si les citoyens formulent la politique publique par l'intermédiaire des tribunaux, pourquoi alors élisent-ils et paient-ils des gens au Parlement? Cette question se rattache peut-être en fait aux changements que compte mettre en place le premier ministre quant au financement des partis politiques dans ce pays. Si les changements qu'il propose sont en fait adoptés, nous reviendrons peut-être avec le temps à des politiques publiques qui apportent à nouveau un certain équilibre entre l'intérêt public et l'intérêt privé.
Á (1125)
Pour en revenir aux variétés--
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Vous avez dépassé le temps qui vous était alloué, et je vous demanderais donc de boucler rapidement.
M. Terry Boehm: Très bien. J'ai une conclusion d'un paragraphe que j'aimerais beaucoup vous lire, après quoi je m'arrêterai.
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Très rapidement, je vous prie.
M. Terry Boehm: Notre recommandation finale est que le Syndicat national des agriculteurs recommande très fortement que le gouvernement du Canada empêche la venue du blé GM dans la chaîne alimentaire et dans les champs du Canada sans tenir compte adéquatement des préoccupations des agriculteurs, de l'industrie et des consommateurs du Canada. Les agriculteurs ont encaissé de durs coups sur les plans transports et autres, et nous ne sommes pas prêts à perdre encore un autre marché, en l'occurrence notre marché du blé. Nous nous sommes écartés du lin génétiquement modifié, ce qui a sauvé ce marché--
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Merci de votre exposé.
Monsieur Hardy.
M. Neal Hardy (président, Saskatchewan Association of Rural Municipalities): Bonjour, tout le monde. C'est un plaisir pour moi d'être ici pour vous entretenir d'une question qui est selon nous importante pour les producteurs de la Saskatchewan et du Canada en général. Au nom de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities, je vous remercie de l'occasion qui m'est ici donnée de vous entretenir aujourd'hui du processus d'approbation du blé génétiquement modifié.
Je m'appelle Neal Hardy, et je suis président de la Saskatchewan Association of Rural Municipalities. Comparaissent également ici aujourd'hui au nom de la SARM, Jim Hallick, directeur, Arita McPherson, directrice la politique agricole, et Ken Engel, directeur exécutif.
La SARM est le groupe de coordination des 297 municipalités régionales que compte la Saskatchewan. Toutes les terres agricoles de la Saskatchewan se trouvent à l'intérieur des limites de ces municipalités régionales. La SARM est quelque peu unique en ce que notre association a pour mandat de traiter et de questions agricoles et de questions municipales, et c'est pourquoi nous sommes ici aujourd'hui.
Au cours des dernières années, nos membres ont à répétition exprimé leurs inquiétudes quant à l'introduction possible du blé transgénique. Bien que le principal souci concerne l'incidence que pourrait avoir le blé génétiquement modifié sur nos marchés, les membres de la SARM sont également très préoccupés par le secret entourant les essais menés avec le blé Roundup Ready--que je vais dorénavant appelé blé RR.
Les auteurs de la technologie et l'ACIA ne divulguent pas depuis quelques années les endroits où sont menés les essais confinés. Nous savons qu'en Saskatchewan plusieurs essais du genre ont été réalisés. Nous avons entendu dire qu'il y a eu 23 sites cette année, mais nous ne savons pas où.
Les producteurs sont mal à l'aise face au fait qu'il soit possible que l'on cultive dans leur région du blé RR sans qu'ils ne soient au courant. J'ai joint en annexe à notre mémoire les résolutions que nous avons adoptées relativement au blé RR, et vous pourrez donc les lire plus tard. D'après ce que j'ai compris, vous n'avez pas pu les faire traduire en français à temps--nous vous les avions fait parvenir par courriel tard la semaine dernière. Nous regrettons qu'il n'y ait personne dans nos bureaux qui soit en mesure de les traduire. Je m'en excuse, mais vous en obtiendrez copie. Vous en avez le texte, et je suis certain que les députés le recevront.
Je vais aujourd'hui m'attarder sur l'aspect incidence sur le marché et sur les moyens qui pourraient être envisagés pour régler le problème. Notre inquiétude relativement au blé RR ne concerne pas la science engagée dans sa mise au point. Je tiens à ce que cela soit bien clair: ce n'est pas la science qui nous préoccupe. Comme je l'ai déjà dit, c'est l'incidence que cela pourrait avoir sur notre marché pour tout le blé que nous cultivons au Canada. Quatre-vingt-deux pour cent des marchés internationaux du Canada pour le blé de printemps de l'Ouest ont fait savoir à la Commission canadienne du blé qu'ils ne veulent pas et qu'ils n'achèteront pas de blé génétiquement modifié--en d'autres termes, tolérance zéro.
Vu que le blé est la plus importante culture d'exportation du Canada et que la majorité du blé est produit dans les prairies, principalement en Saskatchewan, où il y a 55 millions d'acres de terres, l'envergure de l'incidence potentielle sur le marché devient très claire. Nos producteurs ne peuvent pas se permettre de perdre ces marchés.
Si le Canada autorise la production de blé GM avant que nous n'ayons en place des systèmes adaptés, cela coûtera très cher à nos producteurs. Je ne pense pas qu'il me faille en dire plus, vu l'incidence qu'a eu la maladie de la vache folle--une seule vache atteinte--sur notre capacité de vendre aux États-Unis. La situation ne sera pas différente si ce blé génétiquement modifié se trouve mêlé à notre grain.
Jusqu'à ce que nos marchés l'acceptent, et je parle ici des marchés auxquels nous vendons--les marchés à prix élevé auxquels nous vendons du blé de qualité élevée--nous ne pouvons tout simplement pas accepter cela sur le marché. Nous ne pouvons pas accepter que ces céréales soient mêlées à nos grains.
Pour empêcher les dommages que causerait sur les marchés une introduction hâtive de blé GM, le gouvernement canadien doit commencer tout de suite à prendre des mesures face au blé GM. Il ne suffit pas d'attendre que le blé RR soit rendu plus loin dans le processus de mise au point. Monsanto a déjà demandé pour le blé RR les homologations requises en matière de salubrité pour la consommation humaine, la consommation animale et l'environnement. Si Monsanto obtient les approbations demandées, alors elle pourrait procéder à des essais sur le terrain non restreints dès l'an prochain.
À l'étape de la distribution non confinée, il y aurait un plus grand risque de contamination de blé non GM par du blé Roundup Ready, par le biais du déplacement de pollen, du déplacement de graines ou de la plantation de semences contaminées. Avec les camions et les élévateurs, il n'y a pas moyen à l'heure actuelle de séparer ce grain du reste. Le Canada ne peut plus garantir que le blé que nous exportons est libre de graines génétiquement modifiées. Il n'y a pas à aller très loin pour le constater. Il suffit de regarder le canola GM qui est en vente. Essayez de trouver un boisseau ou une tonne de canola qui ne contient pas du canola GM--si vous y parveniez, je serais vraiment très surpris. Le canola GM compte sans doute déjà pour 10 p. 100, voire plus.
Tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas la technologie requise pour détecter rapidement la présence de blé GM et des systèmes de manutention qui permettent de séparer le blé GM du blé non GM, alors il nous faut nous concentrer sur les moyens de prévenir les effets néfastes que pourrait amener le blé Roundup Ready.
Bien sûr, le meilleur moyen de prévenir toute contamination de l'approvisionnement de blé et les effets subséquents que cela pourrait avoir serait de mettre fin aux essais confinés sur le terrain de blé RR en attendant de cerner avec plus de certitude l'incidence de pollinisation croisée de blé et d'espèces connexes. Nous demandons au comité de réfléchir sérieusement à cette option. Si cette approche n'est cependant pas retenue, alors il nous faut nous pencher sur d'autres moyens de contenir le blé Roundup Ready. Je suis par ailleurs certain que d'autres grains modifiés de façon semblable vont émerger en cours de route.
La solution que nous préconisons est d'apporter des changements au système de réglementation actuel de telle sorte que l'incidence sur le marché soit l'un des facteurs à prendre en compte avant d'autoriser la culture de blé GM dans le cadre d'essais sur le terrain non restreints.
Nous demandons au comité d'appuyer l'adoption de règles en matière d'analyse coûts-avantages dans le processus d'approbation de blé GM. De telles analyses n'enlèveraient rien aux approbations fondées sur la science. Ce serait une opération distincte.
Á (1130)
Nous avons endossé les principes que la Commission du blé et d'autres dans l'industrie aimeraient voir suivis dans le cadre d'analyses coûts-avantages obligatoires.
Premièrement, les évaluations et les décisions relativement à l'enregistrement potentiel de variétés GM devraient être effectuées au cas par cas.
Deuxièmement, l'évaluation coût-bénéfice devrait être aussi objective et quantitative que possible.
Troisièmement, les coûts et les avantages évalués devraient être ceux susceptibles d'avoir une incidence tout au long de la chaîne de valeur du blé, les effets sur les revenus des producteurs se voyant peut-être accorder le plus de poids.
Quatrièmement, le processus devrait englober la consultation de toutes les parties touchées. Les parties touchées seraient limitées à celles pour lesquelles la distribution non confinée ou l'enregistrement d'une récolte GM présenteraient des risques ou des avantages économiques directs.
Cinquièmement, le critère de l'incidence sur le marché ne devrait pas forcément modifier les critères d'approbation sur le plan salubrité en vigueur à l'heure actuelle ni les critères présentement utilisés par les comités de recommandation de l'homologation.
Sixièmement, la transition entre les règles actuelles et un régime de réglementation axé sur le critère de l'incidence sur le marché devrait être aussi simple et aussi directe que possible.
La raison pour laquelle nous sommes favorables à une approche axée sur la réglementation par opposition à une approche volontaire est que nous tenons à veiller à ce que les intérêts des agriculteurs soient pris en compte comme il se doit dans le cadre du processus. Une approche volontaire dans le cadre de laquelle on compterait sur l'auteur des technologies pour ne pas livrer le fruit de ses expériences n'accorderait pas suffisamment de poids aux intérêts des agriculteurs. Les auteurs de nouvelles technologies ne seraient pas forcément incités à se refuser à livrer leurs produits aux marchés. C'est le fruit de leur travail. Ils ont dépensé beaucoup d'argent. Ils veulent en distribuer le produit. De fait, des travaux de recherche menés à l'Université de la Saskatchewan montrent que les auteurs de ces technologies peuvent être incités à distribuer du blé GM car, comme je l'ai souligné il y a un instant, ce sont les auteurs de ces semences transformées qui bénéficient le plus de leur distribution.
Encore une fois, il me faut souligner que nous ne voulons aucunement porter atteinte au processus d'homologation scientifique du blé RR ou d'autres grains. Le critère obligatoire d'incidence sur le marché que nous prônons ne serait qu'encore un autre outil distinct du processus scientifique d'homologation à des fins d'alimentation humaine, d'alimentation animale ou environnementales. Nous tenons à veiller à ce que tout le blé canadien demeure un produit très prisé sur le marché international.
L'évaluation d'impact sur le marché proposée pourrait en fait venir compléter l'actuel système axé sur la science. À l'heure actuelle, les caractéristiques de l'utilisation finale comptent pour une large part dans le cheminement d'une nouvelle variété de blé dans le processus d'élaboration, car ce sont les caractéristiques du produit d'utilisation finale qui comptent pour les acheteurs de blé canadiens.
Si notre blé ne satisfaisait pas les normes de rendement établies, alors il ne serait pas acceptable aux yeux des consommateurs. Des modifications génétiques du genre Roundup Ready n'auront peut-être pas d'incidence sur les rendements du blé à la boulangerie et dans les minoteries, mais en bout de ligne, le produit doit satisfaire les consommateurs, car c'est à eux que nous vendons.
En conclusion, nous souhaitons que l'investissement dans la biotechnologie se poursuive. La biotechnologie offre le potentiel d'amener d'énormes avantages et pour les producteurs et pour les consommateurs. Il nous faut cependant mettre en place des systèmes pour traiter maintenant du blé RR, car le marché n'est pour l'heure tout simplement pas prêt. La SARM appuie l'ensemble de conditions élaborées par un comité de l'industrie et qui devraient être remplies avant l'introduction de blé GM. Nous demandons que le comité ici réuni appuie lui aussi ce concept. Le gouvernement et ses responsables de la réglementation doivent commencer maintenant à travailler aux changements à apporter au système de réglementation afin que nous ne nous retrouvions pas dans une situation devenue impossible à renverser, et je pense que nous comprenons tous l'importance de cela.
Je ne saurais trop insister sur l'urgence de la prise immédiate de mesures. D'ici la même époque l'an prochain, l'État du Montana pourrait très bien avoir entrepris des essais sur le terrain non retreints de blé Roundup Ready, et nous nous ne sommes pas du tout prêts pour cela.
Vu que les systèmes requis ne sont pas en place et qu'ils ne le seront pas dans un avenir prévisible, l'introduction prématurée d'une variété de blé génétiquement modifié pourrait avoir de graves conséquences néfastes. Tant que nous n'avons pas de tests mobiles pour la ferme pour détecter le blé GM, des systèmes de ségrégation éprouvés, des seuils de tolérance internationaux établis et des marchés garantis pour notre blé GM, il serait irresponsable d'introduire le blé RR, et les producteurs de blé canadien et le reste de l'industrie en paieraient le coût en bout de ligne.
Les organisations à vocation agricole et le secteur sont très favorables à la mise en oeuvre des changements de réglementation sur la base des principes dont nous avons traité ici aujourd'hui. Nous demandons que vous appuyez ces changements et que vous assumiez un rôle actif en vue de leur mise en oeuvre.
Merci.
Á (1135)
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Merci, monsieur Hardy. Vous êtes très sensible au passage du temps.
Nous allons maintenant poursuivre. Mme McPherson n'allait pas prendre la parole. Nous passons donc au dernier groupe.
M. Ivan Ottenbreit (directeur, District I, Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan): Je m'appelle Ivan Ottenbreit, et je représente l'Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan.
Bonjour et merci de l'occasion qui m'est ici donnée de vous entretenir aujourd'hui de la question controversée du blé génétiquement modifié et de son incidence possible sur l'agriculture canadienne.
L'Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan (APAS) est une organisation agricole générale. Nous en sommes à la troisième année de notre mandat, qui est d'offrir aux agriculteurs une organisation de producteurs formée de représentants démocratiquement élus, non partisane et représentant la base, et centrée sur les municipalités rurales. J'aimerais également souligner que l'APAS ne fait pas de levées de fonds auprès du secteur agroalimentaire et représente ainsi strictement les opinions des producteurs.
En tant qu'organisation agricole générale de la Saskatchewan, l'APAS a une vision de l'agriculture dans laquelle la rentabilité est rendue aux producteurs de la Saskatchewan, les générations plus jeunes ont les moyens d'assurer le futur de l'agriculture et les producteurs de la Saskatchewan sont traités de façon équitable, ce à l'échelle tant nationale qu'internationale.
Les fermes familiales de la Saskatchewan sont de petites entreprises et elles apportent une contribution importante à l'économie de la Saskatchewan et à celle du Canada. L'industrie agroalimentaire de la Saskatchewan fournit près de 40 p. 100 des emplois dans l'économie saskatchewanaise et contribue 9,5 p. 100 du PIB de la Saskatchewan. Les exportations annuelles de produits agroalimentaires de la Saskatchewan ont une valeur d'environ 4,5 milliards de dollars. De manière générale, l'industrie agroalimentaire profite à tous les Canadiens en leur procurant de la nourriture saine et abordable, des emplois et un environnement propre et durable.
Tout au long de son histoire, le succès de l'agriculture canadienne a été dépendant de la disponibilité de marchés intérieurs et d'exportation viables pour ses produits. En tant que représentante des agriculteurs de la Saskatchewan, l'APAS tient énormément à veiller à ce que les politiques nationales et les politiques de commerce international offrent aux producteurs canadiens un marché équitable et profitable.
Pour ce qui est de la mise en contexte, Neal Hardy, de la SARM, a couvert une part importante des choses dont nous allions vous entretenir, alors je serais peut-être un peu plus concis que le texte que nous vous avons fourni.
Le blé est un élément très important de la production agricole canadienne. Il est une culture importante dans la rotation que pratiquent de nombreux producteurs dans leur cycle de production. La production, la manutention et la mise en marché du blé sont importantes pour l'agriculture et pour l'économie au grand complet du Canada en créant de nombreux emplois et en apportant une contribution positive à la balance commerciale du pays.
Les producteurs canadiens cultivent le blé pour le vendre. Puisque nous disposons d'une très grande capacité de production de blé et d'une population relativement petite pour consommer ce qui est produit, il est important que le Canada soit en mesure d'exporter le blé produit qui excède les besoins des consommateurs canadiens. Au cours d'une année moyenne, cela représente environ 84 p. 100 de notre production. Le blé est important pour le Canada et pour les Canadiens.
En ce qui concerne l'incidence sur le marché, selon la Commission canadienne du blé, l'agence canadienne responsable de la mise en marché du blé de l'Ouest du Canada, 82 p. 100 de ses clients ont indiqué qu'ils ne voudraient ou qu'ils ne pourraient pas acheter du blé génétiquement modifié. Par ailleurs, et ce qui est plus important encore, certains pays ont indiqué qu'ils ne voudraient ou ne pourraient pas acheter de blé provenant d'un pays produisant du blé génétiquement modifié. Il ne s'agit pas d'un nouveau débouché, mais bien d'une perte de possibilités de marché existantes.
Au Canada, les producteurs ont été encouragés à être plus à l'écoute du consommateur et à adapter leur production à la demande du marché. Nous devons être très sensibles à cette demande. Il y a dans le monde une très importante capacité de production de blé, et il y a présentement d'importants volumes de blé très fortement subventionnés sur le marché dans lequel les producteurs canadiens doivent livrer concurrence aux autres. L'accès aux marchés payants est très difficile. Le Canada ne doit pas désavantager le blé canadien sur le marché mondial.
Nous devrions tenir compte de notre expérience avec le canola. Le canola n'a plus accès au marché européen du canola depuis que nous avons commencé à produire du canola génétiquement modifié. L'Australie, qui se dit libre de tout canola GM, a eu accès à ce marché. Sa production et sa part de marché ont augmenté grâce, en partie, au fait que le Canada ait perdu accès au marché européen de canola.
Passant maintenant à des questions connexes, le Canada est un chef de file mondial en matière de recherche en biotechnologie. Nous voulons que cela continue. La science impliquée est importante s'agissant de questions de santé et de salubrité. Les tests environnementaux sont eux aussi extrêmement importants, car il nous faut veiller à ne pas introduire quelque chose qui soit susceptible de porter atteinte à notre environnement et (ou) à notre capacité de produire de la nourriture. Nous soutenons le maintien des tests qui sont en place à l'heure actuelle. Nous préconisons le recours à un test supplémentaire--un test qui déterminerait l'acceptation par les consommateurs.
Il n'est pas raisonnable d'encourager les producteurs d'un pays à pourvoir à la demande d'un marché et d'ensuite homologuer et autoriser la production d'une culture qui n'a pas été acceptée par les consommateurs. Il est important de se rappeler que les producteurs doivent vendre ce qu'ils produisent. Il est également important de se rappeler ce que 82 p. 100 des clients actuels du Canada ont dit quant à leur volonté d'acheter du blé GM. Nous ne pouvons pas obliger nos clients à acheter quelque chose dont ils ne veulent pas.
Á (1140)
Une fois du blé GM relâché dans le système de production canadien il sera très coûteux et très difficile, voire impossible, de déclarer activement toute livraison exempte de produit GM.
Si un nombre important de clients du Canada continuent d'acheter du blé canadien, l'image et la valeur du blé canadien en souffriront à l'échelle internationale. Le Canada est depuis longtemps un fournisseur de blé de première qualité très respecté et ce à l'intérieur d'un marché très fragile. Il ne nous faut pas porter atteinte à cette réputation. Si nous le faisons, les coûts pour les producteurs seront élevés. Le coût pour l'économie canadienne le sera lui aussi.
Le Canada a un certain nombre de systèmes d'identité préservée (IP) utilisés pour de petites quantités de produits destinés à des marchés bien particuliers. Les systèmes de préservation d'identité ou d'expédition séparée sont un bon outil pour livrer un produit bien précis correspondant aux besoins du client. Nous ne pouvons pas tenir pour acquis que nous avons la capacité de faire cela sur une échelle correspondant à la récolte canadienne de blé. Même si nous pouvions faire une ségrégation précise, certains pays n'achèteraient pas auprès du Canada du simple fait que nous cultivons ici du blé GM.
Pour ce qui est des questions de processus, le cadre législatif et de réglementation pour l'agriculture canadienne, le travail en biotechnologie et les autorisations doit être équilibré. Il nous faut également respecter les intérêts légitimes et des innovateurs et des agriculteurs qui utilisent la technologie créée par ceux-ci. Les décisions en matière d'améliorations issues de nouveaux développements en biotechnologie doivent tenir compte des besoins du marché et viser l'amélioration de la commercialisation des produits agricoles canadiens. Le risque de créer des coûts déraisonnables liés aux activités de réglementation et le risque de créer des difficultés sur le plan légal pour les producteurs et les organes de mise en marché devraient être examinés avant l'approbation de toute innovation biotechnologique. Des ressources adéquates doivent être assurées pour veiller à ce que l'on suive une approche effective et scientifiquement saine dans le contexte de la réglementation de la biotechnologie.
Nous autres, de l'Association des producteurs agricoles de la Saskatchewan, sommes très préoccupés par les questions non encore résolues. Nous nous opposons à l'heure actuelle à l'enregistrement du blé génétiquement modifié. L'étude d'impact sur l'environnement est un élément important de l'évaluation du blé GM. Ce sera la première plante herbacée résistante au glyphosate jamais introduite. Ce sera une situation très différente de celle du contrôle d'une plante dicotylédone résistante au glyphosate, cette catégorie de plantes pouvant être très facilement contrôlées grâce à des moyens relativement coûteux déjà existants.
La société Monsanto a déclaré qu'elle n'allait pas distribuer de blé GM tant qu'il n'y aurait pas en place avant introduction un produit de contrôle volontaire et rentable. Que cela signifie-t-il du point de vue du producteur? Le contrôle volontaire n'a pas encore été instauré et le terme «rentable» est très relatif, selon la perspective dans laquelle l'on s'inscrit.
Le Canada a en place une protection de brevet pour 17 ans dans le cas de tout nouveau produit chimique élaboré. Cela signifie qu'il n'y a sur le marché aucune force concurrentielle à l'oeuvre et qui puisse offrir une protection côté prix aux producteurs en vue de contrôler le blé GM.
Quelles sont les ramifications d'une telle situation? Monsanto dit que notre travail avec le blé Roundup Ready ne suppose aucune modification telle que ce blé serait plus susceptible à la pollinisation croisée que toute variété de blé conventionnelle ou à toute autre caractéristique biotechnologique possible susceptible d'être un jour introduite sur le marché.
La clé pour permettre à tous les types de systèmes de culture de coexister est d'établir des seuils et des tolérances raisonnables et de trouver des solutions gérables qui maintiennent le choix pour les cultivateurs et les acheteurs de blé canadien.
Plusieurs questions importantes sont ici soulevées. Il est clair que les seuils n'ont pas encore établis ni négociés. Il n'y a encore en place aucun seuil de tolérance convenu à l'échelle internationale. Nous ne savons pas s'il existe des solutions gérables pour les questions environnementales. Celles-ci exigeront une entente à l'échelle mondiale et pas simplement des normes canadiennes.
Nous ne savons pas s'il existe des solutions gérables aux problèmes agronomiques. Dans l'Ouest du Canada plus particulièrement, les gens craignent l'incidence que cela pourrait avoir sur l'environnement et sur les pratiques agronomiques. La culture sans labour est devenue un système de culture très courant dans l'Ouest du Canada. Cette pratique est considérée comme étant plus écologique car elle réduit l'érosion des sols, améliore la qualité des sols, utilise moins de carburant et séquestre du carbone à ce jour, gratuitement.
Notre capacité de maintenir cette pratique dépend de notre capacité de contrôler les ressemis spontanés. La récolte qui est considérée pour l'enregistrement est résistante au produit. C'est la méthode principale de contrôler les plants spontanés.
Il n'existe à l'heure actuelle sur le marché aucune méthode de contrôle rentable des ressemis spontanés que les producteurs puissent utiliser pour contrôler un plant de blé résistant au glyphosate. Même si ce plant n'est peut-être pas plus susceptible à la pollinisation croisée qu'une variété de blé conventionnelle, il répand néanmoins des caractéristiques différentes à d'autres populations de plantes lorsqu'il y a croisement. Quelles sont les conséquences pour les plantes sauvages de l'introduction chez elles d'une résistance au glyphosate?
Á (1145)
En conclusion, l'introduction de blé génétiquement modifié soulève de nombreuses questions tout à fait uniques. Ces questions sont plus importantes que celles que l'on connaît relativement à l'enregistrement d'autres produits GM. Il s'agit d'une plante herbacée résistante au glyphosate. Le Canada n'a pas mis au point de système permettant d'identifier et de séparer différentes variétés de blé qui ne sont pas visuellement distinctes l'une de l'autre.
Quatre-vingt-deux pour cent de nos clients ont indiqué qu'ils ne veulent pas acheter de blé génétiquement modifié. Certains pays clients ont dit qu'ils n'achèteraient pas de blé d'un pays qui produit du blé génétiquement modifié. Les accords concernant les tolérances pour le matériel GM et les chargements sont des accords qui doivent être négociés à l'échelle internationale. Ce ne sont pas des normes que le Canada peut mettre en place de façon unilatérale.
Nous ne pouvons pas homologuer le blé GM tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas obtenu réponse aux nombreuses questions qui ont été soulevées relativement à l'environnement et aux pratiques agronomiques par suite de l'introduction dans notre système de production de blé transgénique. Nous ne pouvons homologuer le blé GM en vue de sa production au Canada tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas acceptation générale de ce produit sur les marchés mondiaux et que le Canada n'aura pas mis en place des systèmes permettant de garantir l'intégrité et la réputation du blé canadien.
En conclusion--et cela ne figure pas dans notre mémoire, mais j'ai ici quelques notes--il nous faut l'acceptation sur le marché céréalier. Le premier blé GM introduit doit être accepté par nos clients. La perception est la clé de la séduction des marchés mondiaux. Pour dire les choses simplement, en ce qui concerne la première introduction de blé GM, nous ne pouvons pas nous permettre de nous tromper. Son entrée doit être positive. Ce blé ne peut pas s'inscrire dans la lignée de désastres passés, et je citerais à titre d'exemple le maïs StarLink.
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Le temps qui vous était alloué est écoulé, monsieur. Aviez-vous terminé?
M. Ivan Ottenbreit: J'ai simplement un tout petit commentaire ici. Puis-je le faire?
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Faites vite.
M. Ivan Ottenbreit: Le rejet par l'APAS du blé Roundup Ready ne signifie pas qu'il faut rejeter tout le blé transgénique. Certaines caractéristiques possibles futures du blé transgénique--par exemple résistance au fusarium par Syngenta, résistance à la gale par DuPont, amélioration des propriétés en matière de mouture et de boulangerie par Monsanto et cécidomyie du blé--livreront à l'avenir des avantages intéressants aux agriculteurs, aux consommateurs et à l'environnement.
Le résultat net est que le blé Roundup Ready nuira au sol et à l'environnement des prairies du Canada car nous risquerons de perdre le semis sans labour et le programme mettra fin à sa pratique et à sa croissance futures. C'est pourquoi nous recommandons que tout blé transgénique futur soit approuvé ou rejeté sur la base de ses mérites.
Merci.
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Merci.
Nous allons maintenant passer au premier tour de table. Monsieur Anderson, vous disposez de sept minutes.
M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Je vais simplement enchaîner sur cette dernière déclaration. Comment pouvons-nous accepter d'autres blés transgéniques--vous dites que vous n'êtes pas opposés à tous--lorsque la question concerne leur caractère transgénique?
La question dont nous parlons ici est celle de la séparation. Je pense que certaines organisations commencent à prendre pour position qu'elles n'aiment pas le blé Roundup Ready mais qu'elles seraient certainement ouvertes à l'introduction d'autres choses. Mais si l'on doit commencer à parler d'évaluation d'impact sur l'environnement et d'autres choses du genre, ces mécanismes sont là parce que le blé est transgénique, non pas parce qu'il s'agit de blé Roundup Ready ou d'autres choses.
M. Ivan Ottenbreit: Pour commencer, la première étape est d'obtenir l'acceptation du marché. Une fois ce pas franchi, nous aurons alors le consensus de nos clients.
M. David Anderson: Pensez-vous qu'il y aura acceptation par le marché du blé résistant au fusarium étant donné qu'il est différent du blé Roundup Ready?
M. Ivan Ottenbreit: Non. Premièrement, il nous faut obtenir le consensus de nos clients à l'égard du blé GM. La deuxième étape interviendra lorsqu'il y aura une demande d'homologation du blé Roundup Ready, car celui-ci ne cadre pas avec les modes d'exploitation en vigueur dans l'Ouest du Canada.
M. David Anderson: D'accord, mais vous ne pouvez pas dire aux cultivateurs que vous êtes en faveur de certaines variétés de blé GM mais que vous n'aimez pas le blé Roundup Ready.
M. Ivan Ottenbreit: Mais si. Nous disons ici que la décision devrait être fondée sur les mérites de la variété.
M. David Anderson: D'accord. Les mérites sont--
M. Ivan Ottenbreit: Toute science n'est pas bonne. Il y en a des mauvaises.
M. David Anderson: Appuyez-vous la contestation du moratoire européen sur l'approbation d'organismes génétiquement modifiés?
M. Ivan Ottenbreit: Oui.
M. David Anderson: Très bien. Et les autres organisations?
M. Ivan Ottenbreit: Il nous le faut.
M. David Anderson: Le SNA?
M. Stewart Wells: Nous avons certaines préoccupations quant à la façon dont le Canada aborde la chose et s'appuie sur la philosophie voulant qu'en engageant des accords internationaux vous pouvez obliger quelqu'un à manger quelque chose qu'il ne veut pas forcément manger.
Á (1150)
M. David Anderson: Obliger ces pays à ouvrir leurs marchés. Personne n'a à manger les profits.
M. Stewart Wells: Il semble qu'au lieu de faire preuve de bon sens et d'user de persuasion, l'on tente d'utiliser un bâton, par exemple une entente commerciale internationale, pour obliger légalement quelqu'un à faire quelque chose, et le résultat lorsqu'on use de pareilles tactiques n'est jamais bon.
M. David Anderson: Vos organisations appuieraient-elles la poursuite d'une interdiction de ces restrictions en matière de biotechnologie--en vue d'obtenir une situation dans laquelle des restrictions en matière de biotechnologie ne seraient pas une raison d'interdire des produits si ceux-ci ne posent pas de problème de santé ou de salubrité? Seriez-vous favorables à ce que cette voie soit poursuivie à l'échelle internationale?
M. Neal Hardy: Tant et aussi longtemps qu'il y aura conformité aux normes du marché afin que l'on puisse écouler notre produit. Nos marchés sont la clé de tout.
M. David Anderson: Et vos normes de marché sont quoi?
M. Neal Hardy: Il faudrait que les lois, quelles qu'elles soient, correspondent aux normes de marché ou aux normes de vente à l'étranger. Quelle que soit la question à l'étude, si les besoins du marché étranger ne sont pas satisfaits, alors nous devrions passer à autre chose. Tant que l'on n'aura pas vu d'analyse au cas par cas, c'est très difficile à dire.
M. David Anderson: Puis-je vous demander de quelle manière vous décidez si le marché va accepter quelque chose si vous n'autorisez pas le lancement d'un produit sur le marché pour voir si celui-ci l'accepte?
M. Neal Hardy: Je suppose qu'il doit y avoir des essais.
Le marché est plus gros que cela; nous le savons tous. Le marché, ce sont les gens. La maladie de la vache folle est un excellent exemple de ce qui se passe à l'heure actuelle--excusez-moi, je ne devrais pas utiliser ce terme. C'est une très bonne illustration de ce qui se passe. Si les gens ne vont pas accepter... C'est pourquoi l'on est en train de mener tous ces tests; c'est parce qu'il faut que le marché accepte.
Il faut procéder au cas par cas. Quel que soit le produit, il faut l'acceptation du marché. À l'heure actuelle, pour quelque raison--en Europe en particulier, mais dans de nombreux autres pays aussi--les gens ne veulent rien avoir à faire avec le transgénique. Si un produit renferme des éléments génétiquement modifiés, les gens n'en veulent pas.
M. David Anderson: Mais cela n'est pas un problème. On ne force pas les gens. Le produit arrive sur le marché; le marché ne l'accepte pas--les gens disent «Non merci, nous n'en voulons pas»--alors vous ne l'avez plus sur le marché. C'est ce que nous avons constaté dans le cas de la graine de lin. Nous avons vu cela avec StarLink.
M. Neal Hardy: Mais le problème est de savoir comment faire pour éviter qu'il ne se mélange au reste? Vous et moi sommes tous deux agriculteurs. Nous savons comment les choses se mélangent.
M. David Anderson: D'accord, c'est là une toute autre question.
Je vais céder le micro à mon collègue. Il lui faut quitter et il souhaitait poser quelques questions, mais nous reviendrons sur certains de ces éléments.
M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Puis-je partager une partie du temps et peut-être utiliser ici une partie du temps du Bloc, étant donné qu'il n'y a pas à la table de représentant du Bloc?
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Nous en discuterons, au bout de trois minutes.
M. Garry Breitkreuz: D'accord. Merci beaucoup. Je vais utiliser mon temps ici aussi rapidement que possible.
J'aimerais commencer par vous remercier. Je ne pense pas que nous vous ayons formellement tous remerciés d'être venus. J'apprécie vos exposés et je pense qu'ils ont été bien reçus.
Je vais vous poser des questions que mes voisins me posent tout le temps, et j'espère que vous pourrez livrer les réponses au comité. Nombre des gens qui m'entourent expriment les mêmes préoccupations que vous.
Premièrement, combien d'agriculteurs partagent le point de vue que vous avez soumis au comité? Pourriez-vous donner au comité une idée du pourcentage d'agriculteurs que vous pensez représenter? Je parle aux fermiers et il est difficile pour moi de jauger. La plupart d'entre eux disent les mêmes choses que vous. Il y en a d'autres qui ne disent pas la même chose. Quel est le pourcentage?
M. Neal Hardy: Cela est impossible. Je rencontre beaucoup d'agriculteurs. La plupart adopteraient cette position, mais pas tous--pas tous, cela est certain. Il y en a toujours qui ont un avis différent; ils estiment que les marchés finiront par accepter. Ma question est de savoir quand.
M. Garry Breitkreuz: Et aviez-vous quelque chose à dire?
M. Ivan Ottenbreit: Oui, j'aimerais répondre.
À l'APAS, nous avons à l'échelle de la Saskatchewan 12 membres du Conseil. Nous avons plus de 120 représentants. Nous allons tenir un congrès la semaine prochaine. Je peux vous dire que lors de notre réunion annuelle en décembre il n'y a pas eu une seule voix dissidente, pas un seul qui ait dit que le blé transgénique était une bonne chose. Nous comprenons tous l'incidence et sur les marchés et sur nos pratiques de culture sans labour. Tout le monde est inquiet.
M. Garry Breitkreuz: Très bien. Je pense qu'il importe de prendre cela en note.
Oui?
M. Terry Boehm: J'aimerais répondre en utilisant un exemple que j'ai cité plus tôt au sujet de la graine de lin GM. À l'époque où cette variété a été homologuée, et je parle du lin Triffid, la Saskatchewan Flax Development Commission a lancé une initiative visant à faire déshomologuer cette variété afin de sauver le secteur du lin au Canada. L'Europe compte pour au moins 70 p. 100 de notre marché d'exportation du lin. La variété Triffid était aux mains des producteurs de semences, prête à être commercialisée, et nous nous sommes retranchés, avons lutté fort pour qu'elle soit rayée par l'ACIA et avons détruit ces stocks de semences dans le but de sauver cette industrie--qui est conséquente, bien qu'elle perde de son importance comparativement au secteur du blé au Canada.
La très grande majorité des producteurs de lin était tout à fait en faveur de cette initiative et en sont encore aujourd'hui reconnaissants. Je peux dire que les producteurs de blé réagiraient exactement de la même façon car nous sommes plus ou moins les mêmes.
Á (1155)
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Excusez-moi, Garry, un instant.
Je demande le consensus pour que M. Breitkreuz utilise le temps du Bloc. Ai-je le consensus du comité?
Des voix: D'accord.
M. Garry Breitkreuz: J'aimerais poursuivre un certain nombre de questions que des agriculteurs me posent tout le temps et j'aurais besoin de ces réponses.
S'il y a contamination de nos produits du blé avec les produits dont nous parlons aujourd'hui, les responsables de l'élaboration de ces produits pourraient-ils être tenus responsables des pertes de revenu subies par les agriculteurs pris individuellement? Pensez-vous qu'il y aurait une certaine compensation pour les cultivateurs si quelque chose tournait mal dans tout le processus? C'est là l'une des questions que vous avez soulevées, celle de la contamination de l'approvisionnement en blé. Pensez-vous que ces innovateurs--Monsanto, etc.--pourraient être tenus responsables?
M. Terry Boehm: À l'heure actuelle, en vertu de la loi en matière de droits à la propriété, non. La Saskatchewan Organic Directorate est en train de lancer une cause précédent quant à la responsabilité en matière de contamination et de perte de la capacité de cultiver du canola. Mais jusqu'ici, l'affaire Schmeiser nous a montré, bien qu'elle soit en route pour la Cour suprême, que les responsabilités semblent en fait revenir au cultivateur qui se retrouve avec un intrus dans ses champs. Le fournisseur--l'entreprise qui a cette variété et qui n'en a pas contrôlé la distribution--n'est pas du tout responsable, semble-t-il.
M. Garry Breitkreuz: En d'autres termes, si nous ne faisons pas ce qu'il faut, c'est le fermier qui pourrait se retrouver avec le petit bout du bâton.
M. Terry Boehm: Absolument.
M. Garry Breitkreuz: Quelqu'un d'autre aimerait-il ajouter quelque chose?
M. Ivan Ottenbreit: J'aimerais ajouter qu'en janvier 2002, la Saskatchewan Seed Growers Association, dans le cadre de la semaine de la production tenue à Saskatoon début janvier, a parrainé une rencontre dans le but d'examiner ce genre de questions. Agriculture Canada et Monsanto étaient censés être deux des représentants; les deux avaient convenu de participer à un panel. Très peu de temps avant l'événement, les deux parties se sont retirées du panel et ont refusé de participer à la discussion prévue. Les questions que vous posez ont été soulevées ce jour-là sur le parquet et les réponses semblaient être que c'est toujours entre vous--l'agriculteur et son avocat--et le juge. Ce n'est donc pas clair du tout.
M. Garry Breitkreuz: Un grand nombre d'agriculteurs n'ont pas les poches profondes qu'il faut pour ces avocats.
C'est bien cela?
M. Ivan Ottenbreit: J'ajouterais qu'en dehors des agriculteurs qui lancent des actions collectives... C'est toujours aux tribunaux qu'il revient de décider, et je ne sais si c'est la façon de faire.
M. Garry Breitkreuz: Je passe maintenant à ma question suivante. Il y a également de l'opposition à cela aux États-Unis. Cette opposition pourrait-elle avoir une incidence sur l'octroi de licences au Canada? Et, toujours dans ce contexte, pourrait-on, si on ne fait pas ce qu'il faut, s'exposer à des poursuites de la part des États-Unis et à la fermeture de la frontière?
M. Ivan Ottenbreit: Absolument.
M. Garry Breitkreuz: Il y a là, en fait, deux questions.
M. Ivan Ottenbreit: La fermeture de la frontière? Personnellement, je pense que les États-Unis devraient homologuer d'abord le blé transgénique. Trente pour cent du marché américain sont accaparés par le blé de force roux de printemps. Ils devraient d'abord l'homologuer et faire les essais; nous pouvons quant à nous attendre et regarder. Seuls 30 p. 100 de leurs exportations correspondent à du blé de force roux du printemps. Renversez les choses: 82 p. 100 de nos exportations sont du blé de force roux du printemps, alors ce serait dramatique pour nous.
Si cela doit être homologué quelque part en premier, ce devrait être aux États-Unis. Nous espérons pouvoir suivre l'approche australienne: que l'on attende de voir et peut-être que nous pourrons récupérer des ventes.
M. Garry Breitkreuz: Y a-t-il des opinions dissidentes, ou bien quelqu'un d'autre aurait-il quelque chose à ajouter?
M. Stewart Wells: Hier, j'ai posé une question très semblable au négociateur commercial en chef du Canada, Steve Verheul, et j'ai parlé tout particulièrement du chapitre 11 et de l'ALENA. Sa réponse, encore une fois, a été de dire que si les États-Unis ont suffisamment d'argent et suffisamment d'avocats, alors ils peuvent contester plus ou moins n'importe quoi.
Mme Arita McPherson (directrice de la politique agricole, Saskatchewan Association of Rural Municipalities): Pour enchaîner sur ce qu'a dit Ivan au sujet du fait de faire homologuer en premier aux États-Unis le blé transgénique, je pense qu'il nous faut être très prudents en la matière, car il n'y a pas de mur à la frontière. Nous voyons sans cesse venir au Canada des États-Unis des variétés non homologuées.
Il y a eu certains cas dans l'Est de la Saskatchewan, et dont je suis certain que vous êtes au courant, des variétés non homologuées qui sont entrées dans notre système. Cela crée des préjudices économiques. Je pense qu'il nous faut être très prudents en la matière.
 (1200)
M. Garry Breitkreuz: Oui, et c'est important.
M. Neal Hardy: C'est justement ce que j'allais dire. J'allais également ajouter que la fermeture de la frontière, si cela devait commencer ici et si l'on fermait la frontière, imposerait de lourdes pressions à nos producteurs là-bas.
L'autre aspect est que je pense que, vu la façon dont ont été élaborés la loi et les règlements, il faudrait sans doute recourir aux tribunaux, et qui en a les moyens? Je suis agriculteur et mes poches ne sont pas très profondes. Je n'ai pas l'argent pour faire cela--même pas dans le cadre d'un recours collectif.
Je ne pense pas que les choses devraient être ainsi. Je crois que c'est là que devrait intervenir la responsabilité du gouvernement du Canada, pour veiller à ce qu'en tant que producteurs nous ayons le genre de protection dont nous avons besoin.
Monsanto peut être active sur le terrain, mais nous aussi. Je ne suis pas en train de dire que cette société ne devrait pas être là. Je dis que nous devons tous deux avoir cette possibilité et qu'il nous faut être protégés à ce niveau.
M. Garry Breitkreuz: Une autre chose qu'ils demandent est pourquoi cette discussion est si différente de celle entourant le canola. Vous êtes tous au courant de ce qui s'est passé avec le canola. Ceux qui sont très en faveur du blé transgénique demandent «Pourquoi en faites-vous tout un plat, alors qu'il n'y a pas eu tout un plat dans le cas du canola?» Pourriez-vous nous expliquer en quoi cela est différent?
M. Neal Hardy: C'est différent pour les agriculteurs de la Saskatchewan. Nous cultivons chaque année jusqu'à 22 millions d'acres de blé. Nous cultivons deux à trois millions d'acres de canola. Sur le simple plan des chiffres, cela change beaucoup de choses.
L'autre aspect est que nos principales ventes ont toujours été aux pays d'Europe et autres; le canola n'a jamais compté parmi nos gros vendeurs. Cette situation a eu une incidence sur nos ventes totales de canola; elles ont été décimées. Ce sont là certaines des raisons à cela.
Je ne sais pas non plus si les gens savaient à quel point cela pouvait se répandre. Lorsqu'ils ont pour la première fois accepté d'entrer dans le système, je ne suis pas convaincu que quiconque était heureux. Nous avions tous des terres de mauvaise qualité qui étaient plus ou moins sales. Tout le monde a utilisé le système pour nettoyer sa terre.
Notre souci est le suivant, et je pense que cela a été soulevé et par Terry et par Ivan: une fois qu'on en sera rendu là, qu'est-ce qu'on en fera? Est-ce que cela va devenir en soi une mauvaise herbe ou une plante opportuniste? Ce sont toutes là des questions qui sont restées sans réponse et auxquelles je ne connais pas la réponse non plus.
M. Stewart Wells: Je pense que certaines des autres organisations axées sur les consommateurs voient que le blé est utilisé dans davantage de produits que l'huile de canola. Toute l'amande du blé est utilisée, ce qui verse le blé dans une catégorie différente.
Je pense moi aussi que le blé est différent, car le comité a entendu Gordon Harrison, président de la Canadian National Millers Association, dont l'organisation reçoit énormément d'appels de ses clients, au Canada et aux États-Unis, qui ne veulent pas du tout que cela soit introduit dans le système. Il y a donc bien plus de pression, de ce côté-là que dans le cas de la discussion sur le canola.
Selon Rene Van Acker, le conflit direct entre le canola Roundup Ready et le blé Roundup Ready pourrait coûter aux cultivateurs jusqu'à 400 millions de dollars de plus par an. Où les cultivateurs de l'Ouest du Canada vont-ils aller chercher 400 millions de dollars de plus?
M. Ivan Ottenbreit: Lorsque le canola Roundup Ready a été introduit, j'irais jusqu'à dire que les cultivateurs ignoraient en gros la technologie. L'on ne peut pas la renverser--le génie est sorti de la bouteille. Notre expérience avec le canola nous a laissé à tous un mauvais goût dans la bouche, et cela va se reproduire avec le blé. Nous nous tournons maintenant vers l'avenir et nous disons que nous ne voulons pas répéter ce qui s'est passé avec la canola.
La vice-présidente (Mme Rose-Marie Ur): Merci. Le temps dont vous disposiez est écoulé.
Monsieur Borotsik.
M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PC): Merci d'être ici.
Il me faut reconnaître que nous avons déjà entendu cet argument, alors je ne pense pas que grand-chose ait changé depuis la dernière fois que nous vous avons acceuillis au comité. C'est tout à votre honneur; vous êtes fidèles à la position adoptée.
Stewart, dans votre préambule, vous dites «nos membres ont déterminé que tous les produits modifiés génétiquement ne sont pas nécessairement une bonne affaire ni une mauvaise affaire, mais que chaque produit doit être évalué individuellement». C'est bien, et je sais que chacune des organisations représentées ici a dit qu'elle n'est ni opposée à la biotechnologie, ni opposée aux produits GM ni opposée au progrès. Mais dans votre déclaration vous énoncez un si grand nombre de conditions que je ne sais si un quelconque produit de la biotechnologie ou transgénique pourra jamais être approuvé.
Par exemple, Stewart, vous dites «Nous ne sommes pas contre, mais nous croyons qu'il y a des produits positifs et des produits négatifs...», et vous enchaînez en disant «Il y a le transfert horizontal, il y a les gènes terminateurs, il y a les semences stériles et il y a l'acceptation par le marché». Lorsque vous réunissez toutes ces conditions, lorsque vous les mettez toutes ensemble, pouvez-vous envisager que votre organisation accepte un jour un organisme génétiquement modifié ou manipulé?
 (1205)
M. Stewart Wells: Je pense que je répondrai en disant que nous pensons qu'il serait irresponsable de commencer à distribuer des produits à moins d'avoir réglé toutes ces questions et d'avoir tenté de cerner quelles seront les ramifications.
M. Rick Borotsik: Je comprends ce que vous dites. Ma question pour vous est la suivante: pensez-vous qu'il soit un jour possible de résoudre toutes ces questions?
M. Stewart Wells: Mais si vous ne le faites pas, et si vous ne vous essayez pas, quelle est la probabilité que vous obteniez toujours en bout de ligne un bon résultat?
M. Rick Borotsik: Je déduis de votre réponse que si l'on remplit toutes les conditions et tous les critères, dans votre esprit, aucun organisme génétiquement modifié ne sera jamais approuvé.
M. Stewart Wells: Ce n'est pas du tout là une déclaration ou une représentation juste.
M. Rick Borotsik: Ivan?
Premièrement, je pense que vous avez parlé «d'acceptabilité par le marché» et «d'acceptation par le consommateur».
M. Ivan Ottenbreit: Oui, «acceptation».
M. Rick Borotsik: D'accord, donc «acceptabilité par le marché» et «acceptation par le consommateur». Je ne conteste pas cela. Il vous faut manifestement vendre aux consommateurs.
Mais permettez-moi de vous donner un exemple de quelque chose qui a été évoqué tout à l'heure. Nous venons à l'instant de parler de blé résistant au fusarium avec une tolérance de 10 p. 100 et du fait que la valeur de ce blé devienne nulle. À un moment donné--et cela pourrait arriver plus tôt ou plus tard--une variété de blé résistante au fusarium pourrait être mise au point en recourant à des techniques de manipulation génétique. Nous pouvons cultiver cette variété dans les régions céréalières du Manitoba et de la Saskatchewan, et nous pouvons ajouter de la valeur au produit pour le producteur; mais tout d'un coup, le consommateur n'est pas prêt à l'accepter, pour quelque raison--le motif principal étant l'activisme.
Vous dites que cela ne devrait pas arriver--que parce que le consommateur ne va pas l'accepter, nous ne devrions pas envisager le blé résistant au fusarium.
M. Ivan Ottenbreit: Mon commentaire en réaction à cela est qu'a priori le consommateur a toujours raison. Si la couleur de la voiture ne lui plaît pas, le consommateur a toujours « raison », même s'il a tort. Nous ne pouvons lui forcer la main.
Mais dès lors que vous avez l'acceptation par le consommateur ou que celui-ci dit qu'il ne voit pas de problème avec ce qui lui est proposé... Il doit se faire en la matière énormément d'éducation. Il n'y a pas de réponse simple; c'est compliqué, car l'on parle ici de biotechnologie. C'est concis, et cela peut permettre de réaliser des choses bien précises, mais il n'y a pas de consensus général. Il n'est pas si facile que cela d'en arriver à un consensus général relativement aux travaux transgéniques.
M. Rick Borotsik: Je comprends cela. Mon objet ici n'est pas d'avoir un débat ou une discussion. Je comprends votre position; je comprends que le consommateur a toujours raison, et je comprends la nécessité de convaincre le consommateur au fil de l'élaboration de ces produits.
Mais vous m'avez dit «Si cela devait arriver, alors le blé résistant au fusarium ne devrait jamais être lancé sur le marché». Il ne devrait jamais aboutir là, bien que ce soit bon pour nous en tant que producteurs et bon pour nous en tant que consommateurs--même si nous l'ignorons. Si cela n'est pas accepté, alors il n'y aura tout simplement pas le feu vert.
M. Ivan Ottenbreit: C'est exact.
Que peut-on faire?
Mme Arita McPherson: Dans notre déclaration, nous avons parlé de l'analyse coût-bénéfice, où cela entre en ligne de compte, car l'acceptation par le marché fait partie de l'analyse coût-bénéfice. Mais si cette analyse détermine que la culture de blé résistant au fusarium serait plus avantageuse pour l'industrie par rapport aux marchés que nous perdrions, alors ce pourrait être envisagé.
M. Stewart Wells: J'aimerais donner une très courte réponse.
Vous êtes revenue sur la question du blé résistant au fusarium. J'aimerais revenir au lien possible entre l'utilisation de glyphosate et l'aggravation du problème du fusarium. Ne serait-il pas responsable de notre part de faire le tri dans tout cela avant d'homologuer un produit qui va imposer l'utilisation de quantités plus importantes de glyphosate?
Il me semble que ce que je vous entends véritablement dire c'est que si nous couvrons toutes ces éventualités, cela demandera trop de temps pour amener ces produits sur le marché.
M. Rick Borotsik: Je ne pense pas qu'ils soient jamais amenés sur le marché. Je crois qu'il y a toujours de l'activisme qui aurait certainement pour résultat...
Dans les critères que vous avez élaborés, ce que vous voyez, c'est ce que vous allez avoir. Il n'y aura pas d'amélioration, pas de biotechnologie, pas de nouvelles cultures dans un proche avenir si l'on doit appliquer vos critères. Je ne pense pas que cela change jamais.
Terry, vous avez parlé des problèmes très réels du secteur biologique ou de la destruction d'un secteur biologique viable.
En passant, pensez-vous que tout ce qui a été génétiquement modifié ou génétiquement manipulé est synonyme du blé Roundup Ready? Est-ce que le génétiquement modifié et le génétiquement manipulé et le blé Roundup Ready sont pour vous synonymes?
Une voix: Oui.
M. Rick Borotsik: L'un de vous dit non de la tête mais l'autre est en train de dire oui de la tête.
Lorsque vous parlez, donc, de produits GM, parlez-vous du Roundup Ready? À l'heure actuelle, en cette époque que nous vivons, est-ce que le blé GM c'est la même chose pour vous que le blé Roundup Ready. Est-ce cela que vous êtes en train de dire?
M. Stewart Wells: Comme nous l'avons dit dans notre déclaration, c'est cette variété qui est la première à faire l'objet d'une demande d'homologation, et c'est pourquoi c'est elle qui attire toute l'attention.
M. Rick Borotsik: Vous avez déclaré que n'importe quelle variété de blé ou d'organisme génétiquement modifié va détruire le marché biologique très viable qui existe à l'heure actuelle.
Quel pourcentage du blé cultivé à l'heure actuelle est biologique?
 (1210)
M. Terry Boehm: Stewart pourra peut-être répondre plus facilement à cette question que moi.
M. Stewart Wells: Je ne peux pas vous donner un nombre exact. Je suis cultivateur biologique, mais le pourcentage est très bas. Le pourcentage de terres agricoles consacrées à la culture biologique en Saskatchewan serait inférieur à 5 p. 100.
M. Rick Borotsik: Dans votre mémoire vous avez fait état de la «Destruction d'une industrie organique viable».
M. Stewart Wells: Mais l'important est... Par exemple, sur mon exploitation biologique, nous avons abandonné dans notre rotation la culture du canola, bien que nous en ayons cultivé quelque fois dans les années 80 et les années 90. Nous en avons abandonné la culture car nous savions que nos voisins cultivaient du canola Roundup Ready et nous ne pouvions pas nous permettre de mettre en péril notre certification biologique. Il y a des cas d'agriculteurs aux États-Unis et au Canada--mais je ne suis pas tout à fait certain de la situation au Canada--qui ont perdu leur certification, leurs récoltes ayant été contaminées par le champs d'un voisin.
M. Rick Borotsik: Vous dites que 5 p. 100 du marché est biologique?
M. Stewart Wells: Non, j'ai dit moins...
Le président (M. Paul Steckle (Huron—Bruce, Lib.)): Nous allons maintenant passer à M. Duplain, du parti au pouvoir.
[Français]
M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): Je vous remercie beaucoup d'être ici aujourd'hui. Cela nous fait vraiment plaisir de vous recevoir et je pense que c'est très important que vous soyez venus nous rencontrer afin de faire connaître les doléances de toutes les personnes sur le terrain. Je pense qu'il faut vraiment que le gouvernement travaille en collaboration avec vous tous afin de trouver une solution en ce qui concerne le blé génétiquement modifié.
J'aurais quelques questions techniques au sujet de choses que vous avez dites et dont j'avais plus ou moins entendu parler. Ma première question sera pour M. Terry Boehm. Vous avez parlé tout à l'heure de gène transféré à une bactérie qui peut rester dans le sol. Est-ce que vous pourriez expliquer un peu plus ce que vous vouliez dire par là?
[Traduction]
M. Terry Boehm: Oui, certainement. Il y a des mécanismes de transfert de gènes, et notamment de transgènes, autres que la pollinisation et les mécanismes qui interviennent dans les semences sur lesquels se concentrent nombre d'entre nous. Mais ces autres mécanismes sont en train d'être ignorés ou bien n'interviennent pas beaucoup en ce moment dans la recherche fondamentale qui se fait.
Par exemple, dans le cas de certaines cultures GM l'on utilise un marqueur de gène résistant aux antibiotiques dans le processus d'insertion et de transfert de gènes. Ce matériel, qu'il soit originaire d'une plante, d'une racine, d'un plant de blé ou autre, demeure intact pendant quelque temps dans le sol. Il y a des bactéries qui peuvent absorber ce gène résistant aux antibiotiques et devenir ainsi elles-mêmes résistantes aux antibiotiques.
C'est très complexe. Vous savez que je ne suis pas biochercheur, mais lors d'un symposium international sur la biosécurité tenu à Saskatoon en l'an 2000, des chercheurs d'Europe ont présenté un papier expliquant que c'est bel et bien ce qui se passe. Ces chercheurs veulent également déterminer les effets des points chauds biologiques pour que ce transfert horizontal de gènes ait lieu: ils pensent que cela pourrait par exemple se faire à l'intérieur du système digestif d'insectes.
Mais il y a beaucoup plus de mécanismes que la pollinisation. Il y a d'autres mécanismes qui permettent cette transposition de gènes et cette contamination et ces ramifications que j'ai évoquées.
Ce qui m'inquiète, c'est le relâchement dans l'environnement de ces plantes qui ont des transgènes, car ce phénomène ne se serait jamais produit à partir du bassin génétique en conditions de propagation ou de mutagenèse conventionnelle, car ces gènes n'existaient tout simplement pas parmi ces populations de plantes sauvages. Nous n'avons pas la moindre idée de ce que seront les ramifications à long terme.
Lorsque le premier moteur à combustion interne a pour la première fois crachoté il y a de cela 150 ans, qui aurait pu imaginer qu'un siècle plus tard ce moteur allait modifier le climat de la planète? Je pense que nous jouons ici avec une chose très puissante, qu'Agriculture Canada a annoncée avec grande pompe.
[Français]
M. Claude Duplain: La bactérie peut se transférer dans d'autres plantes indigènes, mais est-ce qu'elle peut aussi contaminer de nouveau le blé non transgénique qu'on pourrait replanter?
[Traduction]
M. Terry Boehm: Les renseignements à cet égard ne sont pas concluants. L'exemple utilisé était que ce mécanisme pourrait transférer la résistance aux antibiotiques à des bactéries par le biais du sol. Mais le papier auquel je songe n'était pas concluant quant à la question de savoir si le transfert pourrait se faire de la bactérie à une plante autre.
Mais je pense que ce qui est important c'est qu'il existe des mécanismes que nous ne comprenons pas et que la vie de nos sols est complexe. Le fait que le gène de matériel végétal mort soit viable pour être transféré à un autre organisme vivant devrait soulever un certain intérêt, voire certaines craintes.
 (1215)
[Français]
M. Claude Duplain: Monsieur Hardy, vous avez dit plus tôt que 10 p. 100 du blé au Canada était contaminé. Est-ce une donnée scientifique, ou si ce sont des choses dont vous entendez parler? Vous avez dit cela tout à l'heure, que 10 p. 100 du blé serait contaminé.
[Traduction]
M. Neal Hardy: Non, je n'ai pas dit 10 p. 100 du blé. J'ai dit 10 p. 100 de tout le canola que nous produisons. Dix pour cent probablement du canola que nous produisons contient du canola génétiquement modifié--en d'autres termes, pollinisation croisée et tout le reste. Il n'y a rien de scientifique là-dedans, mais c'est simplement ce dont nous avons parlé. Mais je pense qu'il y a très peu et peut-être même pas du tout de canola sur le marché qui ne contienne pas au moins certaines graines de canola génétiquement modifié.
[Français]
M. Claude Duplain: Oui. Vous avez une réponse?
[Traduction]
M. Stewart Wells: Oui, merci.
Il s'est fait de la recherche sur la pureté d'échantillons de graines de canola, toujours à l'Université du Manitoba--Rene Van Acker et Lyle Friesen. L'on dispose donc en vérité de très solides données quant à la contamination de la semence de canola homologuée.
[Français]
M. Claude Duplain: J'aimerais poser encore deux questions. Je vous demanderai de répondre assez rapidement parce que j'ai l'impression que je vais commencer à manquer de temps.
S'il y a une possibilité de cultiver du blé génétiquement modifié et que vous être contre, une chose est sûre, c'est que ce sont les agriculteurs qui vont le cultiver. Vous dites que tout le monde est contre. Par conséquent, on ne devrait pas trouver beaucoup de personnes au Canada qui voudraient cultiver ce blé. Advenant le cas où ce blé serait acceptable, les États qui travaillent sur cette question devront tenir compte de la capacité de vendre ce blé et de son acceptation. Je ne crois pas que, actuellement, les marchés et les consommateurs soient prêts à cela; on le voit. En plus, il faudra trouver des agriculteurs qui veulent bien le cultiver. Vous semblez dire que pas un agriculteur n'est en sa faveur.
Quel est le nombre de gens qui vont vouloir cultiver ce blé commercialement, puisque vous dites que tout le monde est contre?
[Traduction]
M. Terry Boehm: Je pense qu'il suffit d'un cas--et nous avons un parfait exemple avec l'ESB relevée dans une seule vache--et nous pourrions très vite voir nos frontières se refermer et nos céréaliculteurs mis en quarantaine. En vérité, le blé GM c'est comme l'ESB pour les céréaliculteurs.
Il suffit que la variété soit mise en distribution--et il suffit d'un très faible pourcentage de cultivateurs qui soient intéressés--et vous avez tout d'un coup emprunté un chemin tel que tout le monde est contaminé, que l'on ait ou non décidé délibérément de cultiver ce blé.
L'autre problème est le phénomène de la pollinisation croisée du blé. C'est ce qu'il fait. Il ne faut pas beaucoup de temps--le canola est un bon exemple--et tout d'un coup vous êtes contaminés.
Vous ne pouvez pas dire catégoriquement que tous les producteurs refuseront de le cultiver. Il y en a qui le cultiveront, et c'est là le problème. C'est pourquoi ce blé ne doit pas être homologué.
Le président: Juste une courte question.
[Français]
M. Claude Duplain: Oui, ce sera une courte question.
Vous faites des recommandations. Êtes-vous contents de la manière dont le gouvernement travaille présentement, avec tout ce qui s'élabore autour du blé génétiquement modifié? Vous faites des recommandations, oui; la Commission canadienne du blé, aussi, avait fait des recommandations. Est-ce que vous êtes contents de la façon dont cela se déroule au gouvernement?
[Traduction]
M. Neal Hardy: Eh bien, je peux répondre à cette question. Je pense qu'il y travaille. Je pense qu'un comité comme celui-ci, qui nous entend et nous écoute, pourrait rapporter directement ce message, pour le livrer de la part du gouvernement et de la part de l'opposition. Entendre ce que nous disons, écouter ce que nous disons et mettre en place certaines, sinon toutes, nos recommandations seraient un important pas en avant.
Ce qui nous préoccupe, comme nous le disons depuis le début, n'a jamais été l'aspect scientifique. Je pense que cela est bien et qu'il nous faut progresser. Il nous faut obtenir l'acceptabilité sur le marché, et lorsque ce sera fait, nous avancerons.
Beaucoup de gens aimeraient cultiver ce blé, mais si vous le cultivez et que vous ne pouvez pas le vendre, ou si dix agriculteurs le cultivent et que cela contamine les choses pour tous les autres, alors nous perdons tous. Nous perdons tous très gros. Pour l'Ouest du Canada, et tout particulièrement pour la Saskatchewan, où nous cultivons du blé sur des millions d'acres, c'est un gros marché.
Oui, donc, je pense qu'ils y travaillent et j'ose espérer qu'ils continueront de faire ce qu'ils font, car j'estime que c'est un pas positif.
 (1220)
M. Stewart Wells: Au sujet de cette question, notre organisation s'inquiète depuis très longtemps d'une situation de conflit d'intérêt dans laquelle se trouve le gouvernement canadien et notamment le ministère de l'Agriculture, car c'est ce ministère qui essaie en même temps de promouvoir et de réglementer ces produits. Nous nous demandons sérieusement si le ministère peut faire ces deux choses à la fois.
Par exemple, l'accord original d'étude et de mise au point du blé Roundup Ready a été négocié entre Monsanto et le gouvernement du Canada et, à ma connaissance, personne n'a encore jamais vu le document original, l'entente originale. Nous ne savons donc pas ce qu'a signé le gouvernement canadien et quelles sont ses obligations découlant de cette entente originale. Et ce n'est là que le début. Le gouvernement du Canada a utilisé beaucoup d'argent des contribuables pour promouvoir la biotechnologie en général.
Nous voyons là un conflit et nous pensons que ces activités devraient être menées à distance. Et nos préoccupations ont été appuyées par le rapport de janvier 2001 de la Société royale. Ce rapport dit en gros la même chose.
Le président: Soyez très bref, monsieur Boehm.
M. Terry Boehm: Nous sommes également préoccupés par les changements proposés au processus d'homologation de variétés. Nous estimons que nombre des critères, y compris... Il y a à peine un an, il me semble, une acceptation de marché ou quelque chose du genre, s'agissant d'une homologation d'une variété, a été supprimée en douce, et cela nous inquiète beaucoup. Nous nous inquiétons beaucoup des ramifications quant aux droits des phytogéniticiens et à la privatisation de la recherche--même s'il s'agit de deniers publics, le travail est guidé par des intérêts privés--et tout ce qui s'ensuit.
Le président: Très bien. Nous allons maintenant passer à M. Proctor.
M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Merci, monsieur le président.
Permettez-moi de me joindre à Garry Breitkreuz pour vous souhaiter à tous la bienvenue ici aujourd'hui et pour vous remercier de vos trois excellentes présentations.
J'aimerais enchaîner sur la question générale que M. Duplain a posée vers la fin de son tour quant à votre niveau de satisfaction à l'égard de tout ce qu'a fait jusqu'ici le gouvernement dans ce domaine.
Vous tous, étant donné que vous venez de la Saskatchewan et du secteur agricole, êtes sans doute de fidèles lecteurs du Western Producer. Vous savez sans doute qu'on y a rapporté il y a quelques mois qu'il y avait autrefois une clause de définition de mérite lorsqu'on examinait de nouveaux produits. Cela a été tranquillement abandonné au cours des dernières années. Je devine, vu les propos que vous nous avez tenus ce matin, que vous tous seriez en faveur de la réinsertion de cet article ou de quelque chose de semblable.
J'aimerais entendre vos observations et être bien certain que je suis ici sur la bonne piste. Nous pourrions peut-être commencer par M. Ottenbreit, et chacun pourrait répondre à tour de rôle.
M. Ivan Ottenbreit: Oui, nous sommes d'accord avec vous là-dessus. Il nous faut absolument faire en sorte que cela se produise... Je viens de perdre le fil de ma pensée.
J'aimerais simplement revenir à ce qui a été dit tout à l'heure, soit que si le gouvernement pense qu'il est sur la bonne voie, alors j'ose espérer qu'il appliquera le principe de précaution, qui a été recommandé par le Comité consultatif canadien de la biotechnologie. Celui-ci dit que dans le cas qui nous occupe, pour assurer une entrée positive pour le premier blé transgénique, en tant que comité vous devez certainement appliquer le principe de précaution.
Pourriez-vous reformuler votre question?
M. Dick Proctor: Il y avait une clause de définition de mérite. Il s'agit en gros d'une analyse de l'impact sur le marché avant l'introduction sur le marché d'un nouveau produit. Cela a été en place pendant environ dix ans, en tout cas au moins de 1990 jusqu'en 2001, puis cela a été supprimé--
M. Ivan Ottenbreit: Oui, c'était le fait du comité de recommandation relativement aux grains des prairies. Oui, nous croyons fermement que l'acceptation par le marché doit être réintroduite dans le processus.
M. Dick Proctor: Merci.
Monsieur Hardy.
M. Neal Hardy: C'était là l'essentiel de toute notre déclaration: il nous faut avoir l'acceptation par le marché.
M. Dick Proctor: Permettez-moi d'enchaîner là-dessus, car vous avez répondu à une question de M. Breitkreuz en disant qu'il y a toujours certains agriculteurs qui sont en faveur de cela, mais qu'ils sont nombreux à s'y opposer à l'heure actuelle.
Vous avez indiqué au début de la séance avoir apporté tout un tas de résolutions de la SARM mais qu'étant donné qu'elles n'avaient pas été traduites, vous ne pouviez pas nous les livrer. Lorsque ces résolutions seront soumises à un congrès de la SARM, vont-elles militer contre l'introduction de blé transgénique? Quelle est en gros la marge par laquelle ces résolutions sont adoptées?
 (1225)
M. Neal Hardy: Eh bien, elles se font adopter à l'unanimité ou presque. Nous en avons eu une en 2001, qui a été adoptée à l'unanimité, et encore une autre en 2002. Il y avait dans l'assistance 2 000 agriculteurs, alors ce n'était pas qu'une poignée de gens. La résolution a été adoptée à l'unanimité, ou presque.
Le niveau d'acceptation n'est pas très fort. Lorsque tout le monde vote en faveur, ceux qui ne sont pas en faveur ne vont pas lever la main, alors il pourrait y en avoir quelques-uns. Mais la grande majorité de nos délégués, qui sont tous producteurs, ont voté non, disant: laissez cela de côté.
M. Dick Proctor: Laissez-moi entendre simplement ce qu'en dit le Syndicat national des agriculteurs, après quoi je vous reviendrai, monsieur Ottenbreit.
Stewart.
M. Stewart Wells: En ce qui concerne la clause qui a été retirée des lignes directrices du PRRC, nous avons plus qu'un intérêt passager pour cette question, car en 2001, nous avons pris connaissance de l'existence de cette clause. L'on commence à croire que l'on a fait la mauvaise chose en ce qui concerne cette clause. Nous l'avons soumise à beaucoup de députés et à l'Agence canadienne d'inspection des aliments et en avons discuté avec eux. Nous en avons discuté avec toutes les personnes dont nous pensions que cela pouvait les intéresser, et le résultat net est que cela a été supprimé en douce quelques mois plus tard.
D'après ce que j'ai lu des témoignages devant le comité ici réuni, l'ACIA est censée déposer d'autres documents à ce sujet. Je serais très intéressé de savoir d'où est venu l'ordre de retirer cette clause, car quelqu'un avait eu la prévoyance de l'y insérer il y a environ dix ans.
M. Dick Proctor: Merci.
Monsieur Ottenbreit.
M. Ivan Ottenbreit: J'aimerais simplement ajouter à ce qu'a dit Neal. J'étais présent au congrès. Je suis conseiller municipal régional. Lors de ces deux congrès, le vote a été unanime, mais les conseillers régionaux sont déjà allés, en Saskatchewan, jusqu'à adopter des résolutions disant qu'ils veulent être libres de GM--de blé Roundup Ready. Tout cela figure au dossier.
M. Dick Proctor: D'accord.
M. Ivan Ottenbreit: Il y en a environ huit à dix sur un total de 297. Ce qui pourrait se produire si l'on nous accule est que peut-être que tous les conseillers régionaux déclareront qu'ils vont faire adopter des résolutions disant qu'ils veulent être libres du blé Roundup Ready.
M. Dick Proctor: Un autre aspect de la question, et chacun d'entre vous y a à sa façon touché, est qu'il me semble que c'est un petit peu une situation à la David contre Goliath. Nous avons l'industrie de la biotechnologie, qui semble-t-il a des poches très profondes pour la recherche, et je pense que M. Wells a dit dans sa déclaration qu'il y a un frein ou une incertitude quant à la question de savoir s'il va y avoir un financement continu pour mener jusqu'au bout l'étude sur le fusarium et le glyphosate.
Est-ce là un grand sujet de préoccupation? M. Hardy a parlé d'environ 23 sites d'essai dont on aimerait connaître les coordonnées, et ainsi de suite. Est-ce un sujet de plus en plus préoccupant?
M. Stewart Wells: Eh bien, je pense que oui. Heureusement qu'il y a eu un soulagement récent car les gens travaillant à la station de recherche de Swift Current ont reçu des fonds. Mais avant cela, les autorités auxquelles ils avaient fait leur demande leur avaient refusé par trois fois du financement. Il y a donc une petite lueur d'espoir à ce niveau-là.
Mes idées en la matière sont que les chercheurs ne devraient pas avoir à quémander de l'argent pour faire de la recherche qui est dans l'intérêt du public. Cette recherche, en bout de ligne, pourrait finir par exonérer les entreprises et leurs produits, ou peut-être pas, mais ces chercheurs ne devraient pas avoir à quémander et à se trouver dans l'impossibilité d'effectuer des recherches scientifiques solides faute d'argent.
Pour ce qui est de l'aspect David et Goliath, j'étais l'invité de l'ACIA et de Santé Canada lors d'une réunion tenue là-bas il y a presque exactement un an. Ils examinaient ces questions et oeuvraient à leurs lignes directrices. Il y avait là quelque 60 personnes, beaucoup de représentants d'entreprises, y compris le représentant de Monsanto qui était ici aujourd'hui. J'ignore s'il est toujours dans la salle. Lui et moi avons partagé une table pour l'après-midi.
La question qui leur a été posée était d'ordre scientifique: nos entreprises devraient-elles avoir à déposer des études et des données sur ce qui se passe dans le sol par suite de l'introduction dans l'environnement de leurs nouvelles plantes et de leurs nouveaux produits? Leur réponse unanime a été que non, les compagnies ne devraient pas avoir à déposer ces données scientifiques car cela coûte trop cher et qu'il devrait revenir aux contribuables et aux universités de ce pays de faire ce travail; que ce ne devrait pas être aux entreprises de le faire.
Mais si les cultivateurs disent que cela va nous coûter trop cher de cultiver le blé et de contaminer notre approvisionnement de blé, la réponse est que cela n'est pas scientifique, que l'on ne peut pas parler de commercialisation car cela ne s'appuie pas sur la science. Les gens utilisent donc le mantra de la science pour mettre fin au débat. Ils l'utilisent sélectivement.
 (1230)
M. Ivan Ottenbreit: J'aimerais réagir à la question de David contre Goliath. J'ai le sentiment que Monsanto s'est infiltrée chez les agriculteurs. La compagnie s'est infiltrée au sein du gouvernement. Elle s'est infiltrée dans les universités. Elle a très bien exposé son point de vue. Elle fait du bon travail de promotion. Si je détenais des actions dans Monsanto, je serais en train de la féliciter pour ses efforts.
Mais pour vous montrer à quel point la société est un Goliath, j'ai fait publier un article dans un quotidien au sujet d'une réunion que j'avais organisée dans ma ville. On y a soulevé la question du blé transgénique et j'avais dit à l'époque que l'on ne pouvait pas contrôler les ressemis spontanés. L'entreprise détient les droits pour la technologie Terminator et elle pourrait introduire cette variété, bien qu'elle dise s'être engagée à ne pas le faire. Mais qui peut dire si cet engagement va tenir? Elle introduira alors le gène Terminator. S'il y a pollinisation croisée avec notre approvisionnement en blé conventionnel, Monsanto aura une graine élite et pourra contrôler tout le secteur des semences de blé.
J'ai reçu une lettre de Monsanto, qui, comme je le disais, avait certaines présomptions et prétendait être relativement neutre en la matière. Une chose que m'a dite la personne qui m'a écrit cette lettre est que le blé Roundup Ready allait servir de plate-forme pour l'introduction future de caractéristiques nouvelles et améliorées.
Ce que cela signifie est que nous n'avons pas besoin de blé résistant de type Roundup Ready; il nous faut d'autres caractéristiques. L'essentiel est qu'il y a un manque d'argent. Ils veulent que soit mise en place une entente d'utilisation de la technologie. Ils pourront ensuite superposer tous ces autres gènes, et si donc vous voulez acheter un blé résistant au fusarium, vous allez devoir signer une entente du genre et prendre avec le blé Roundup Ready. Or, nous ne voulons pas de cela.
Alors qui est David et qui est Goliath?
Le président: Madame Ur.
Mme Rose-Marie Ur: Merci, monsieur le président.
Je suppose que j'ai été négligente. Je remercie en général les gens à la fin, mais j'aimerais vous remercier maintenant des déclarations que vous avez faites plus tôt.
Savez-vous s'il y a à l'heure actuelle un autre pays qui fait de la recherche sur des produits transgéniques?
M. Terry Boehm: Eh bien, je pense qu'il se fait énormément de recherche partout dans le monde au sujet de produits alimentaires GM. Je sais qu'ils font de la recherche en Europe, au Canada, aux États-Unis et au Royaume-Uni. Mais je pense que votre question exige une description plus étoffée. À quels produits GM songiez-vous?
Mme Rose-Marie Ur: Eh bien, le fait est que nous ne sommes pas seuls dans cette recherche.
M. Terry Boehm: Très juste.
Mme Rose-Marie Ur: Monsieur Wells, aviez-vous quelque chose à ajouter?
M. Stewart Wells: J'allais simplement dire que dans le domaine général de la recherche il y a eu des rapports ce printemps selon lesquels le Royaume-Uni serait en train d'envisager d'obliger les compagnies de biotechnologie d'insérer un brin supplémentaire d'ADN dans leurs produits afin que l'on puisse facilement les passer au scanner. L'on n'aurait alors à chercher qu'un élément d'ADN. Cela déboucherait sur l'étiquetage automatique, car il serait alors très simple d'étiqueter les produits.
Et je pense que tout juste cette semaine en Europe ils ont peut-être adopté un seuil de 0,5 p. 100 pour l'étiquetage obligatoire, ce qui est très important pour nous.
Mme Rose-Marie Ur: Il n'y a aucun doute là-dessus.
Monsieur Hardy, l'un de vos commentaires concernaient l'acceptabilité du marché. Quelle est votre proposition quant à la direction que l'on devrait poursuivre? Vers quoi pensez-vous qu'il faudrait tendre?
M. Neal Hardy: Aller dans le détail demanderait beaucoup de temps, mais l'acceptabilité du marché à l'extérieur de notre pays, surtout pour notre blé, relève de la Commission canadienne du blé--et à l'intérieur également, et une part de responsabilité revient également aux minoteries. Je comprends que les minotiers ont eux aussi des problèmes quant au blé transgénique.
Si nous avons l'acceptation du marché--et je veux parler ici de la possibilité pour nous d'écouler notre blé dans les pays qui affichent à l'heure actuelle la tolérance zéro--alors nous aurons atteint ce seuil. Pour y parvenir, il y a un long processus. Il nous faut faire beaucoup de travail pour obtenir l'acceptation du produit par le marché.
Qu'on vende à l'Allemagne, à la France ou à un autre pays, les gens qui achètent le produit doivent d'abord l'accepter, puis il faut que leurs consommateurs l'acceptent. Cela revient donc à vous et moi. Si vous saviez qu'il y avait du blé transgénique dans votre pain--que le pain est fait de blé génétiquement modifié--l'accepteriez-vous? Je ne suis pas en train de vous poser la question. Ce que je dis, c'est que c'est la question qu'il vous faudrait poser au consommateur.
Toutes les connaissances et tous les renseignements que nous avons à ce jour indiquent que les gens ne sont pas encore prêts à l'accepter à ce niveau-là.
Mme Rose-Marie Ur: Je suis certaine qu'il est très difficile pour les consommateurs de prendre une telle décision, car nous nous appuyons sur la science, la technologie et tout le reste. Il serait très difficile pour eux de choisir une voie pour décider quels critères ils utiliseraient pour accepter ou rejeter ledit produit. Ils comptent sur la recherche effectuée par le gouvernement et par le secteur privé pour obtenir ces renseignements.
M. Neal Hardy: C'est dans une certaine mesure la peur de l'inconnu et l'ESB est un bon exemple. Avez-vous mangé du steak hier soir? Les risques qu'il s'y soit trouvé quoi que ce soit de néfaste sont de un sur un billion, mais il y a ce petit élément... Une fois que cela fait la une des journaux, une fois que c'est connu du public...
J'imagine que c'est la crainte que nous avons en tant que producteurs. Il nous faut l'accepter avant de commencer à le cultiver. Nous ne sommes pas en train de dire qu'il ne serait pas bon à cultiver. Nous ne disons pas qu'il ne satisfait pas toutes les exigences. Nous disons que nos marchés ne sont pas prêts à l'accepter.
Mme Rose-Marie Ur: Vous avez fait une remarque intéressante dans votre déclaration liminaire au sujet du secret entourant tout cela, du fait que l'ACIA ne divulgue pas toutes ces activités de recherche. Sauf le respect que je vous dois, étant donné l'opposition que provoque cette recherche, ne pensez-vous pas que ce soit vraisemblablement là le bon protocole à suivre? Malheureusement, tout le monde n'a pas la même optique, et il y a peut-être des gens qui pourraient ou qui voudraient--je ne dis pas qu'ils le feraient--fausser les expériences menées sur ces parcelles d'essai. Soyons réalistes ici. Nous vivons dans le monde de la réalité.
M. Neal Hardy: Je comprends cela, mais il vous faut comprendre mon objectif en tant que producteur. Si vous cultivez 40 acres de blé transgénique à côté de moi et que je ne suis pas au courant, il se peut qu'il se fasse de la pollinisation croisée. Je ne suis pas au courant. Je suis producteur, mais je l'ignore. Peu m'importe en réalité ce que vous cultivez, tant et aussi longtemps que cela n'arrive pas dans mon marché et dans mon produit.
Mme Rose-Marie Ur: Mais je suppose, sauf tout le respect que je vous dois--et nous pourrons parler de l'ESB et de la situation qui est en train d'être vécue en ce moment--l'ACIA n'est surpassée par aucun autre pays dans ce qu'elle fait. Je ne parviens vraiment pas à comprendre pourquoi ce serait néfaste pour une communauté qu'elle contrecarre ce qui pourrait être fait avec une parcelle d'essai. Je pense qu'il nous faut lui supposer plus de bon sens que cela.
M. Neal Hardy: Elle fait un excellent travail avec l'ESB. C'est certainement un bon exemple. Je ne veux pas prétendre le contraire. Et elle fait probablement un excellent travail avec le reste. Ce que je dis c'est que c'est l'inconnu qui nous préoccupe.
Mme Rose-Marie Ur: Mais, malheureusement, rien n'est garanti dans la vie.
M. Neal Hardy: Non. Je comprends cela aussi.
Mme Rose-Marie Ur: Monsieur Wells.
 (1235)
M. Stewart Wells: Je pense que le parallèle, avec l'exemple de l'ESB, est que si l'ACIA était sur le terrain en train de mettre ces troupeaux en quarantaine sans le dire à quiconque--c'était un secret d'État; la presse ni personne ne pouvait obtenir d'information là-dessus. Cela aurait suscité de réelles inquiétudes. Mais elle est présente sur le terrain et le processus a l'air relativement transparent. L'agence dit où se trouvent les troupeaux. Elle fait le travail.
Dès qu'une affaire devient un secret d'État, cela crée beaucoup d'énergie et d'excitation. Les gens veulent savoir pourquoi c'est un secret d'État. Le ministre de l'Agriculture de l'Île-du-Prince-Édouard, par exemple, est toujours très fâché. Je lui ai parlé en mars à l'Île-du-Prince-Édouard. Il avait demandé au gouvernement du Canada de déterminer où dans l'Île-du-Prince-Édouard se trouvaient les parcelles d'essai, et on a refusé de lui communiquer les coordonnées. Pourtant, d'après ce que je sais, l'utilisation des terres relève dans ce pays des provinces, et le ministre de l'Île-du-Prince-Édouard continue de penser qu'il a le droit de savoir. Or, on lui oppose un refus.
Craint-on que le gouvernement de l'Île-du-Prince-Édouard y dépêche des vandales pour corrompre les parcelles d'essai?
M. Terry Boehm: J'ajouterais également que c'est une question fondamentale que celle du concept du bien public et de savoir pour qui le gouvernement et l'ACIA travaillent. L'objet est-il de protéger les parcelles d'essai de Monsanto ou bien de protéger les consommateurs, les producteurs, les minotiers et les agriculteurs canadiens et ceux qui sont préoccupés par ce qui se passe dans les fermes de recherche et expérimentales du gouvernement? Ces fermes n'appartiennent pas à Monsanto mais bien aux citoyens canadiens.
Mme Rose-Marie Ur: C'est donc difficile à juger, car quelque part dans mes notes ici j'ai écrit que M. Wells a indiqué que le gouvernement est en situation de conflit d'intérêt en faisant la recherche et tout le va-et-vient. Serions-nous en train d'avoir une discussion différente ici si Monsanto n'avait entrepris aucune recherche en matière de GM? Cela aurait-il été plus acceptable aux yeux des témoins ici présents?
M. Stewart Wells: Je pense qu'en ce qui nous concerne, nous serions beaucoup plus à l'aise si le gouvernement du Canada faisait le genre de travail de recherche autonome qu'avait réclamé la Société royale. C'est le concept selon lequel l'on s'en remet toujours aux données produites par les entreprises parce qu'on ne dispose pas du personnel et des ressources requises pour mener les expériences soi-même qui fait que les consommateurs dans ces autres pays sont en train de dire que ce n'est peut-être pas dangereux de manger cette miche de pain, mais qu'ils vont éviter de le faire tant et aussi longtemps que cela leur est possible.
 (1240)
Mme Rose-Marie Ur: Monsieur le président, je ne veux pas être hostile ici, mais cette inquiétude à l'égard du blé transgénique n'est-elle pas largement alimentée par le secteur de la production biologique?
M. Stewart Wells: Non, c'est tout simplement un élément de l'équation.
Les moyens d'existence mêmes des producteurs biologiques sont en jeu ici, car, à ma connaissance, il n'y a dans le monde aucune agence de certification biologique qui acceptera la moindre contamination transgénique du produit. Pour ces producteurs, c'est toute leur vie. Pour d'autres producteurs, la question est celle de ces coûts supplémentaires de 400 millions de dollars, de savoir quoi faire avec ce qui est dans les champs et qui va s'en occuper. Mais c'est extrêmement important pour eux.
Toutes les décisions rendues jusqu'ici dans l'affaire Percy Schmeiser disent que peu importe la façon dont les graines se sont retrouvées sur votre exploitation, elles appartiennent à Monsanto, mais celle-ci n'a aucune responsabilité de venir corriger le problème. Cela crée de réelles difficultés pour des agriculteurs. Et ceux qui ont entendu cette décision et qui savent à que point la question est grave sont vraiment bouleversés.
M. Terry Boehm: Je suis un céréaliculteur conventionnel en Saskatchewan. Notre exploitation fait un tout petit moins de 4 000 acres. Nous sommes très préoccupés et tout à fait opposés à l'introduction de blé transgénique, comme c'est le cas de mes voisins.
Un exemple petit mais néanmoins significatif est que nous avons maintenant été ramenés à environ 80 points de livraison de grains dans les prairies, par suite de ce que j'appellerais une mauvaise législation en matière de transport. De façon générale, ces points de livraison sont également des points de vente de produits chimiques. Pour ce qui est du point de livraison auquel j'ai accès, et qui dessert une assez vaste région, les agriculteurs ont décidé sciemment de ne pas acheter de produits de Monsanto. Ils ne les achètent pas parce qu'ils sont fermement opposés à l'initiative Monsanto d'introduire du blé transgénique; ils viennent tout récemment de dire qu'ils sont à la recherche de l'équivalent chimique chez un autre fabricant.
Mme Rose-Marie Ur: Merci, monsieur le président.
M. Neal Hardy: Puis-je ajouter encore quelque chose, monsieur le président?
À notre congrès du printemps dernier, quelque 2 000 ou 2 200 agriculteurs ont voté presque à l'unanimité en faveur de l'imposition d'une restriction et du rejet du blé transgénique. Le mouvement englobe donc bien plus que les agriculteurs biologiques, bien qu'il faille dire que les moyens d'existence de ces derniers sont différents et pourraient être directement touchés.
Non, les producteurs ne sont pas encore prêts à accepter ce blé parce qu'ils ne pensent pas pouvoir le commercialiser.
Mme Rose-Marie Ur: Si les États-Unis allaient de l'avant avec ce blé, serions-nous davantage en faveur ici?
M. Terry Boehm: Je ne le pense pas. Je pense que nous serions contents. Nous aurions à satisfaire un vaste marché qu'ils auraient perdu.
M. Stewart Wells: Tout juste le mois dernier, j'ai rencontré des parlementaires de l'Ouest de l'Australie, et c'était là leur approche avec nous. Ils nous ont dit: Allez-y et homologuez le blé Roundup Ready, car nous pourrions alors servir vos marchés et vous ne pourriez jamais les récupérer. Ils l'ont dit le sourire aux lèvres.
Mme Rose-Marie Ur: J'imagine que l'avenir nous dira qui avait raison et qui avait tort.
Merci, monsieur le président.
Le président: Très bien.
Monsieur Proctor, vous avez déclaré tout à l'heure que vous ne vouliez pas intervenir. Souhaitez-vous maintenant intervenir?
M. Dick Proctor: Oui, c'est avec grand plaisir que j'aimerais de nouveau les remercier ici au nom des députés pour cette séance fort édifiante de ce matin. Merci à la SARM, merci à l'APAS et merci au SNA.
Le président: Monsieur Duplain, je pense que vous vouliez intervenir à nouveau avec une courte question.
[Français]
M. Claude Duplain: Oui, j'aurais encore une ou deux questions. Comme je l'ai dit tout à l'heure, je suis très content quand on vient présenter des mémoires. Cela nous fait travailler en collaboration avec les gens qui sont sur le terrain afin que le gouvernement puisse prendre les bonnes décisions et que ce comité puisse faire de bonnes recommandations. Je pense que c'est vraiment important de travailler main dans la main.
Il y a quelques affirmations que vous avez faites qui me font un peu tiquer. Dans votre introduction, parlant d'étiquetage, vous faites une comparaison avec le fait que le gouvernement n'avait pas accepté l'étiquetage obligatoire des OGM. Vous devez être au courant que des groupes de consommateurs sont venus témoigner et nous dire qu'ils n'étaient pas d'accord sur l'étiquetage obligatoire des OGM.
Vous faites une deuxième affirmation quand vous dites, et je vais reprendre vos mots exacts, que Monsanto ou d'autres compagnies «avaient infiltré le gouvernement». Je trouve ça un petit peu fort. J'aimerais que vous donniez des explications à ce sujet, parce que je trouve ça fort que de dire que le ministère a été infiltré.
 (1245)
[Traduction]
M. Ivan Ottenbreit: Je suppose qu'il me faut répondre à cela. Peut-être que le terme infiltration était un peu fort, mais pour ce qui est de la Commission canadienne du blé, par exemple, je peux vous dire que d'actuels employés de Monsanto travaillaient autrefois à la Commission. Ces gens sont au courant de tout ce qui se passe à la Commission du blé. Ils entretiennent de bons rapports.
En tout cas, il semblait que Monsanto avait besoin de toutes sortes de soutien pour son programme. Le simple fait que l'entreprise ait adhéré au programme de l'initiative conjointe signifie qu'elle est dans les bureaux de l'ACIA. Ce sont des gens très intelligents; ils ont participé à la construction d'installations de recherche en Saskatchewan dans des universités et à d'autres choses du genre.
J'aimerais dans ce contexte revenir sur la question de l'incidence environnementale et de la culture sans labour. La société Monsanto a été la principale entreprise à appuyer les opérations de culture sans labour en Saskatchewan et dans tout l'Ouest du Canada. Son produit, le glyphosate, est un élément clé. Maintenant, l'entreprise en a perdu le contrôle parce que son brevet a expiré, et j'imagine que les fonds commencent à manquer.
Il semble maintenant qu'elle soit en train de faire exactement le contraire. Elle est en train de détruire une bonne chose qu'elle a créée. Voilà ce que je vois, cette volte-face. Je ne sais pas: j'imagine qu'il y a quelqu'un là-bas qui doit rendre des comptes à un conseil d'administration et aux actionnaires, et la boîte doit gagner de l'argent, peu importe de quelle façon elle s'y prend et sur qui ses activités ont une incidence.
[Français]
M. Claude Duplain: Quand on travaille sur de tels produits, qu'on les développe, d'après vous, quelle en est la raison première? Pour quelle raison travaille-t-on sur du blé génétiquement modifié? Quelle est la raison de base? Est-ce que c'est l'aide économique?
[Traduction]
M. Terry Boehm: Cela semble certainement être le cas. Nous avons une longue histoire de désintérêt pour les variétés de semences élaborées par les chercheurs publics et avons, en 1991, adopté des lois destinées à protéger les droits des sélectionneurs.
On a réduit le financement versé aux institutions de recherche publique qui distribuaient des variétés et des semences aux agriculteurs en vue de leur propagation bon marché. La reconnaissance du bien public a ici été perdue. La production publique de bonnes variétés, bon marché, et leur distribution bon marché bénéficient aux clients et à l'industrie--et à toute l'économie du Canada--en bout de ligne.
Au lieu de cela, l'idée est que l'on a d'une façon ou d'une autre créé un cadre de réglementation qui autorise l'introduction générale d'un nombre important de variétés au mérite douteux--réduisant les exigences en vue de l'homologation de ces variétés, réduisant les délais et la recherche... Toutes ces choses ont créé la possibilité d'exploitation économique par des entreprises comme Monsanto.
M. Stewart Wells: Au sujet de ce point, l'une des choses qui ressortent des états financiers de Monsanto pour sa dernière année est que la société a l'an dernier perdu 2,5 milliards de dollars canadiens dans le cadre de ses opérations mondiales. Sur son site Web, l'entreprise impute cela aux ventes de Roundup, qui ont été inférieures aux prévisions.
J'en déduis que la société a financièrement intérêt à pousser autant et aussi vite que possible le blé Roundup Ready, car il lui faut en vendre de plus en plus.
[Français]
M. Claude Duplain: Si on fait une ségrégation des variétés, par rapport au blé normal qu'on va cultiver, cela représente tout un système. Je pense que si c'est produit, le marché voudra qu'une ségrégation soit vraiment faite, mais tout cela va amener des coûts supplémentaires, donc, on n'empêchera pas nécessairement la production de ce genre de blé parce qu'il va coûter trop cher à produire. D'un côté, ce sera moins cher, mais de l'autre, s'il faut faire une certaine ségrégation, l'application de règlements qui devraient être très précis ferait en sorte que...
[Traduction]
M. Terry Boehm: Je ne dis pas le contraire, mais la question fondamentale est celle de savoir s'il est possible de créer un système de ségrégation efficace qui permettra de garantir les seuils de tolérance de nos acheteurs. Je ne pense pas que ce soit le cas. On en a eu la preuve avec le canola. La vraie vie est beaucoup plus compliquée qu'un cadre de réglementation et de ségrégation.
Je vais vous donner un exemple. Sur ma ferme, nous avons un compartiment de grains dans lequel j'entrepose semences et grains. Il comporte cinq compartiments. Les souris sont allées chercher du canola deux compartiments plus loin et sont venues en placer deux boisseaux au-dessus de mon blé dur biologique que je cultive. Si je n'avais pas remarqué cela et si j'avais chargé le tout dans ma semeuse et que j'étais parti semer, j'aurais perdu ma certification biologique. J'aurais eu de la contamination. Il m'a donc fallu renettoyer ce grain.
C'est là un tout petit exemple, mais nous utilisons aujourd'hui d'énormes installations de grains en vrac tel qu'il est vraiment impossible d'assurer une ségrégation efficace, et le coût serait phénoménal. Je pense que c'est une chose qui a été citée par certaines entreprises optimistes: une fois qu'on aura été contaminé, eh bien, l'on n'aura plus à se préoccuper de la ségrégation, car ce sera de toute façon chose impossible.
 (1250)
Le président: Madame McPherson, souhaitiez-vous intervenir à ce sujet?
Mme Arita McPherson: Juste un rapide commentaire. Vous avez raison en ce sens que ces systèmes de ségrégation viendront augmenter les coûts des producteurs, et c'est là l'un des facteurs dont il faudrait tenir compte dans le cadre de l'analyse coûts-avantages: quels systèmes seraient requis pour assurer la ségrégation d'une récolte, la gardant à part, et quelle incidence cela a-t-il sur vos coûts et quelles autres ramifications pourrait-il y avoir?
Le président: Monsieur Wells, un bref commentaire.
M. Stewart Wells: J'appelle ces genres de coûts--coûts de ségrégation et autres--les coûts cachés des modifications génétiques, car vous ne les voyez pas par la suite et les entreprises ne sont pas en train de proposer de prendre en charge ces coûts cachés. Ces coûts cachés vont revenir aux contribuables, aux agriculteurs ou aux consommateurs de ce produit.
Nous en avons déjà aujourd'hui des exemples concrets, car la Commission canadienne des grains et la Commission canadienne du blé sont en train de dépenser l'argent des contribuables pour essayer de déterminer comment payer ces systèmes qui vont nous aider à éviter ces problèmes. Les coûts cachés, dont celui de la ségrégation, ont donc déjà été répercutés sur nous.
Le président: Monsieur Duplain, avez-vous terminé?
[Français]
M. Claude Duplain: Est-ce que vous voulez poser des questions, monsieur le président? Je peux vous céder mon temps de parole, si vous voulez poser des questions, parce que vous n'avez pas souvent l'occasion de le faire .
[Traduction]
Le président: J'aurais une courte question.
[Français]
M. Claude Duplain: Posez vos questions avant.
[Traduction]
Le président: Monsieur Maloney, avez-vous quelque chose à demander?
M. John Maloney (Erie—Lincoln, Lib.): Non.
Le président: Eh bien, j'ai écouté avec grand intérêt... Et je vous présente mes excuses. Je suis de ceux qui accueillent en cette période de l'année de nombreux groupes scolaires. J'en avais deux à rencontrer ce matin et l'un d'eux est arrivé en retard. En tout cas, voilà la raison, et non pas l'excuse, et qui explique pourquoi je n'étais pas ici--et je ne m'excuse pas pour cela, car je pense que les enfants sont très importants.
Il me faut dire que j'ai été plutôt intrigué par certains des commentaires. L'un de ceux qui m'a peut-être le plus intrigué, en tout cas d'après ce que j'en ai compris, est celui selon lequel vous auriez davantage confiance si c'était le gouvernement qui faisait la recherche plutôt que des sociétés privées indépendantes, qui contrôlent donc de ce fait les obtentions végétales et ainsi de suite. Ai-je bien compris?
M. Stewart Wells: Je pense que oui.
Le président: Cela impose donc directement au gouvernement la responsabilité de voir comment nous pourrions faire. Je comprends cela.
M. Stewart Wells: Encore une fois, il s'est trouvé que c'était Monsanto, mais c'est Monsanto qui faisait, il y a plusieurs années, la promotion de l'hormone de croissance pour les bovins. Le SNA est beaucoup intervenu dans la question et en bout de ligne le gouvernement a pris la bonne décision. Mais pendant ce processus, des chercheurs d'Agriculture Canada avaient allégué que Monsanto leur avait en fait offert de l'argent, des pot-de-vin, pour obtenir qu'ils donnent leur aval et ce sont là de très graves allégations et ces chercheurs n'ont jamais reculé. Voilà donc le genre de pressions économiques que peuvent exercer ces entités privées.
Le président: Nous avons parlé du principe de précaution, et je pense que c'en est un qui doit être très strictement respecté. J'estime qu'il s'agit d'un très important principe. Je suis également convaincu que si nous voulons prendre des décisions, et compte tenu du climat actuel entourant l'ESB, je suis certain que nous conviendrions tous que la décision ultime de la réouverture des frontières va être fondée sur la science et non pas sur des éléments politiques. Pouvons-nous appliquer ce même principe scientifique dans le cadre des arguments que l'on a entendus ce matin pour ou contre l'introduction de blé transgénique, quelle que soit la variété ou quel que soit le gène?
Étant donné que dans de nombreux milieux, en tout cas à l'intérieur des cercles politiques--c'est notre perception, mais j'imagine que c'est également la réalité dans la plupart des cas--il y a des pays qui bloquent l'accès du produit, et c'est notamment le cas des pays de l'Union européenne, simplement à cause d'une question de barrière non tarifaire--ils en font une barrière pour empêcher que des pays puissent accéder à des marchés--serait-il raisonnable de croire que si les données scientifiques permettaient de prouver sans l'ombre d'un doute...?
Personne ne m'a jamais dit cela, et je ne prône ici ni une position ni l'autre. Je dis simplement que si la science pouvait fournir la preuve que l'utilisation de ces produits, génétiquement modifiés ou autres, n'aurait aucun effet néfaste pour la santé--à moins, bien sûr, qu'il soit question de plantes et de protéines animales ou d'autres choses du genre, ce qui est tout à fait différent, et ce n'est pas de cela que l'on parle ici--si cela était le cas, donc, cela n'éliminerait-il pas un grand nombre de nos problèmes?
Vous voulez asseoir cette question sur la science. Serait-il juste d'utiliser l'argument voulant que dans ce cas-ci également on voudrait utiliser la science?
 (1255)
M. Terry Boehm: Je pense que la science a été systématique pour couper le débat. Si vous voulez élargir la définition de la science, il y a les sciences sociales, les sciences économiques, la philosophie, l'éthique et ainsi de suite. Toutes ces sciences sont valables. C'était le domaine initial du gouvernement.
Il est intéressant de constater que la science a démantelé la relation entre l'Église et l'État il y a de cela plusieurs siècles et qu'elle a maintenant réussi à s'insérer à la place de l'Église. Elle exige la foi, le secret et de l'argent.
Je pense qu'il n'est pas du tout approprié que l'on ne tienne compte que de la science lors de telles décisions. La sagesse humaine, accumulée pendant les siècles et les millénaires, n'est pas le seul fruit de la science. Elle a été bâtie sur des considérations morales et éthiques. Elle a été bâtie sur des décisions politiques--certaines mauvaises, mais nombre d'entre elles très bonnes.
Je me demande si nous aurions des institutions démocratiques ou des comités si l'on s'appuyait purement sur la science--je songe à ce comité-ci, par exemple. En effet, le nouveau système d'homologation des variétés qui est en train d'être proposé dit: les renseignements appartiennent à l'entreprise; nous ne voulons plus faire d'essais d'évaluation des variétés dans le champs pendant trois ans; nous voulons vous livrer les renseignements compilés sur une seule année--ce qui, vu notre environnement, est parfaitement inutile, car les conditions climatiques varient énormément d'une année sur l'autre. Il vous faut étaler cela dans le temps. Je m'opposerai donc fermement à ce que l'on ne se base que sur la seule science.
Le président: Monsieur Wells, vous avez indiqué votre désir d'intervenir.
M. Stewart Wells: Je pense que tous les groupes ici présents sont du même avis, et certains des groupes ont utilisé l'expression principe de précaution et en ont parlé. C'est pour nous une façon de veiller à prendre suffisamment de temps. Cela impose des délais suffisants pour essayer de régler certaines de ces questions.
Le principe de précaution n'empêche pas l'arrivée sur le marché de toutes les mauvaises drogues mais, de façon générale, les consommateurs sont relativement satisfaits des médicaments qui finissent par leur être proposés. Cela a été l'une des pierres angulaires de ce mouvement de ressac de la part des consommateurs, de la part d'organisations, de la part de la Société royale, le gouvernement du Canada n'utilisant pas le principe de précaution pour évaluer ces produits.
L'on parlait autrefois beaucoup d'équivalence substantielle, ce à l'ACIA et ailleurs. Cela s'est plus ou moins estompé au cours des deux dernières années.
J'aimerais cependant revenir sur la question du maïs StarLink aux États-Unis. Cette variété a été homologuée mais seulement comme aliment pour animaux dans le cadre de tout le système de réglementation américain. C'est devenu une question de salubrité, car l'on a retrouvé des aliments pour animaux dans des produits destinés à l'alimentation humaine même au Canada. L'on ne savait pas que ces produits y étaient présents, mais ils s'y sont retrouvés à cause de travail scientifique incomplet.
Comme je le disais, donc, personne n'est en train de faire le travail de recherche sur ce qui se passe concrètement dans le sol dans lequel poussent les aliments destinés à notre consommation. Personne ne sait vraiment ce qui s'y passe. L'on est animé par un genre de foi qui nous fait croire que nous allons planter une graine et qu'elle va pousser; si les conditions climatiques sont bonnes, alors nous aurons une bonne récolte.
Le président: Monsieur Hardy, auriez-vous quelques remarques finales...?
M. Neal Hardy: J'allais simplement dire que vous pouvez prouver du point de vue scientifique que le produit est bon et sûr. Nous n'avons jamais argué qu'il était bon ou mauvais, car nous ne sommes pas chercheurs. Mais le grand public qui va l'acheter--et les fabricants dans ces différentes chaînes d'alimentation--doit être convaincu qu'il n'y a pas de danger. Et si les données scientifiques peuvent être livrées à ces gens, ils diront: « D'accord, c'est bon. Nous l'accepterons et nous l'achèterons et nos producteurs pourront le vendre ». Nous n'avons jamais dit que la science n'était pas bonne; nous croyons qu'elle est bonne.
L'ESB est un mauvais exemple, car c'était le cas d'une seule vache dans tout un troupeau. Nous ne sommes pas en train de produire d'autres vaches comme celle qui était atteinte de l'ESB, et nous n'essayons pas non plus de vendre cette bête sur le marché. C'est un tout autre jeu ici.
· (1300)
Le président: Monsieur Ottenbreit.
M. Ivan Ottenbreit: Le Comité consultatif canadien de la biotechnologie est en train de dire que ce n'est pas toute la science qui est bonne, mais qu'il faut en juger au cas par cas. Je pense que cela est tout à fait opportun et j'ose espérer que le comité reconnaît que c'est la vérité. Comme je l'ai répété tout à l'heure, une fois que le monde aura accepté toutes ces cultures transgéniques, il nous faudra néanmoins toujours évaluer chaque récolte selon ses mérites. Il ne s'agit pas d'une solution simple à un problème complexe. Il s'agit d'un problème complexe et il va y avoir des solutions complexes.
Le président: Il est clair qu'il nous faudra faire preuve de toute la diligence requise. Ce matin, nous avons clairement remué et troublé les eaux, en tout cas c'est ce que je pense. J'ose espérer que nous obtiendrons davantage de clarté au sujet de cette question qui, comme vous venez à l'instant de le dire, est fort complexe. Il est certain qu'il y a ici différents éléments qu'il nous faudra examiner. C'est une très grave question.
Je sais bien que nous ne sommes pas venus ici pour parler de l'ESB, mais je pense que nous conviendrions tous qu'il s'agit d'un cas pour lequel nous n'allons pas tendre vers la réouverture des frontières à moins que la science ne donne le feu vert. Il y a des endroits où la science devient juge et partie. Dans ce cas-ci--en tout cas d'après les commentaires que vous avez faits--il ne semble pas que cela puisse fonctionner dans chaque cas.
Merci beaucoup, tous et chacun d'entre vous. Je m'excuse de ne pas avoir été ici pendant toute la durée de la réunion, mais je pense que nous comprenons assez bien ce que vous souhaiteriez que nous fassions et ce que vous pensez de cette question. Merci encore d'être venus comparaître ce matin.
La séance est levée.