LANG Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION
Comité permanent des langues officielles
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 16 septembre 2003
¿ | 0905 |
Le président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)) |
¿ | 0910 |
M. Pierre Foucher (professeur de droit, Université de Moncton) |
¿ | 0915 |
Le président |
Mme Martha Jackman (professeure titulaire, Faculté de droit, Université d'Ottawa) |
¿ | 0920 |
¿ | 0925 |
¿ | 0930 |
Le président |
M. Tory Colvin (président, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law) |
¿ | 0935 |
Le président |
M. Rénald Rémillard (directeur général, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law) |
Le président |
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD) |
¿ | 0940 |
Le président |
M. Pierre Foucher |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
M. Yvon Godin |
¿ | 0945 |
Mme Martha Jackman |
M. Yvon Godin |
Mme Martha Jackman |
M. Yvon Godin |
Mme Martha Jackman |
Le président |
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.) |
M. Pierre Foucher |
M. Eugène Bellemare |
¿ | 0950 |
M. Pierre Foucher |
M. Eugène Bellemare |
M. Pierre Foucher |
M. Eugène Bellemare |
Mme Martha Jackman |
M. Pierre Foucher |
¿ | 0955 |
Mme Martha Jackman |
Le président |
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.) |
Mme Martha Jackman |
Le président |
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ) |
À | 1000 |
M. Pierre Foucher |
M. Benoît Sauvageau |
Mme Martha Jackman |
Le président |
M. Tory Colvin |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
M. Tory Colvin |
Le président |
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.) |
À | 1005 |
M. Rénald Rémillard |
Mme Martha Jackman |
M. Raymond Simard |
M. Pierre Foucher |
M. Rénald Rémillard |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Tory Colvin |
À | 1010 |
Le président |
M. Tory Colvin |
Le président |
M. Tory Colvin |
Le président |
M. Yvon Godin |
À | 1015 |
M. Pierre Foucher |
M. Yvon Godin |
M. Pierre Foucher |
M. Yvon Godin |
M. Pierre Foucher |
M. Yvon Godin |
M. Pierre Foucher |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Tory Colvin |
Le président |
À | 1020 |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
Mme Martha Jackman |
Le président |
Mme Martha Jackman |
Le président |
À | 1025 |
M. Pierre Foucher |
Le président |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
M. Rénald Rémillard |
Le président |
M. Pierre Foucher |
Le président |
Mme Martha Jackman |
Le président |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
À | 1030 |
M. Benoît Sauvageau |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
M. Yvon Godin |
Le président |
CANADA
Comité permanent des langues officielles |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 16 septembre 2003
[Enregistrement électronique]
¿ (0905)
[Français]
Le président (M. Mauril Bélanger (Ottawa—Vanier, Lib.)): Si vous le permettez, messieurs et mesdames, nous allons entreprendre nos délibérations.
Pour la gouverne des gens qui sont ici ce matin ou qui nous écoutent, je dirai que le Comité des langues officielles de la Chambre des communes avait entrepris le printemps dernier, à la demande de la Chambre--c'était un renvoi de la Chambre--, une étude sur le sujet du projet de loi C-202, ce projet de loi ayant été retiré. Il s'agit des soins de santé pour les communautés de langue officielle vivant en situation minoritaire.
Notre étude comportait deux volets, dont le premier a été un peu examiné: il s'agissait d'élaborer, dans le domaine de la santé, un programme semblable à celui qui existe du côté des langues d'enseignement. Le deuxième volet, et c'est celui qui nous préoccupe aujourd'hui, est le volet juridique et constitutionnel. Il s'agit de savoir si, dans toutes nos lois, notre Constitution, les jugements et ainsi de suite, il y a jurisprudence en cette matière. C'est un débat qui est très ouvert, et nous l'entreprenons.
Je dois confirmer à mes collègues que nous tiendrons encore quelques réunions, mais que nous devons faire un rapport à la fin d'octobre et que nous devons respecter ce délai. Il nous sera donc peut-être nécessaire de tenir une ou deux réunions de plus que d'habitude. Nous allons tenter de minimiser le nombre de réunions, mais nous devons quand même faire un certain travail.
Je voudrais aussi vous dire que la présence, demain, d'un autre témoin pour discuter du même sujet a été confirmée, mais que cette personne ne sera ici qu'à compter de 16 h 30. De 15 h 30 à 16 h 30 demain, nous parlerons à huis clos de nos travaux futurs. C'est tout pour l'instant.
Pour nous aider dans nos délibérations, nous recevons aujourd'hui quatre personnes: le professeur Pierre Foucher, professeur de droit à l'Université de Moncton; Mme Martha Jackman, professeure de droit et professeure invitée à la Faculté de droit de l'Université de Victoria; M. Tory Colvin et M. Rénald Rémillard, qui sont respectivement président et directeur général de la Fédération des associations de juristes d'expression française de common law.
Je ne sais pas si vous vous êtes entendus sur l'ordre dans lequel vous voulez prendre la parole ou si vous voulez suivre l'ordre qu'il y a présentement, mais nous nous entendons sur le fait que vous aurez approximativement 10 minutes chacun et qu'il y aura par la suite un échange entre vous et les membres du comité.
Monsieur Foucher, vous avez la parole.
¿ (0910)
M. Pierre Foucher (professeur de droit, Université de Moncton): Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, bonjour. Merci de votre invitation.
J'ai repris les éléments qui étaient dans le document de recherche qui nous a été soumis et j'ai tenté d'apporter des réponses aux différentes questions qui étaient posées dans ce document. Ce matin, je vais simplement passer en revue avec vous les différents éléments pour vous offrir ce que je pense être les réponses dans l'état actuel du droit.
La première question qui nous avait été posée était celle-ci: est-ce que le principe non écrit de protection des minorités garantit un droit à des soins de santé dans sa langue? Dans l'état actuel de la jurisprudence, ma réponse est non. Il y a au moins trois arrêts dans lesquels les tribunaux d'appel ont refusé de voir dans ce principe des obligations indépendantes à l'égard des gouvernements. Donc, si le principe n'a même pas réussi à empêcher les gouvernements de poser des gestes qui avaient pour effet d'affecter négativement le sort des minorités, il pourra encore moins obliger les gouvernements à offrir des services. Il faut souligner que la Cour suprême du Canada ne s'est pas encore prononcée sur ces questions.
La deuxième chose qu'on nous demandait de regarder était l'article 15 de la Charte et le principe de non-discrimination. Dans l'arrêt Eldridge, on laisse entendre que le refus de fournir des services de traduction payés aux personnes sourdes privait ces personnes du droit à des soins de santé de façon discriminatoire. Si la langue maternelle est visée par l'article 15, ce qui n'est pas encore confirmé, cela signifie que le fait d'offrir des soins de santé dans une langue que le patient ne comprend pas représente de la discrimination.
Il y a des limites à cet argument. D'abord, cela ne viserait que la langue maternelle. Deuxièmement, une personne bilingue ne pourrait pas profiter de ce droit. Il faudrait prouver que la personne ne comprend pas ce qu'on lui dit. Troisièmement, cela s'appliquerait à toutes les langues et pas seulement aux langues officielles. En dernier lieu, cela donnerait droit aux services de traduction seulement et non à des services directs.
En troisième lieu, on nous demandait d'explorer les paragraphes 16(1) et 16(3) de la Charte. Le paragraphe 16(1) garantit l'égalité des langues officielles et le paragraphe 16(3) représente ce qu'on appelle le principe de progression: il engage le Parlement et les gouvernements à favoriser la progression vers l'égalité. Jusqu'à présent, ce principe a été interprété de façon à ne pas empêcher les gouvernements d'adopter des mesures qui favorisent la progression vers l'égalité. Cela ne les oblige pas à agir.
Dans l'arrêt Beaulac, la Cour suprême a convenu que le paragraphe 16(1), qui consacre l'égalité linguistique, signifie que les droits qui existent à un moment donné doivent être appliqués également. Encore une fois, cela n'oblige pas les gouvernements à rajouter des droits.
Donc, si le droit à des soins de santé dans sa langue était rajouté dans une loi, soit la Loi sur les langues officielles, soit la Loi canadienne sur la santé, ces deux articles auraient un impact. Le paragraphe 16(3) ferait en sorte que cette loi ne pourrait être contestée sur la base d'autres articles de la Charte et le paragraphe 16(1) ferait en sorte que l'égalité linguistique imposerait des obligations positives aux gouvernements pour s'assurer que ce droit est mis en oeuvre également.
On nous demandait ensuite d'examiner le paragraphe 20(1) de la Charte, celui qui impose au gouvernement fédéral l'obligation d'offrir des services dans les deux langues dans les bureaux centraux et là où il y a une demande importante. Je pense que les soins de santé que le gouvernement fédéral fournit directement font partie des services visés par l'article 20. Le gouvernement fédéral a donc l'obligation de les offrir dans les deux langues.
¿ (0915)
J'ajoute ici une chose qui n'est pas dans mon mémoire. Le paragraphe 20(2) de la Charte, qui vise le Nouveau-Brunswick, a le même effet. Le Nouveau-Brunswick a aussi l'obligation constitutionnelle d'offrir des soins de santé dans les deux langues.
Est-ce qu'on pourrait rajouter un nouveau droit à des soins de santé dans sa langue dans la Charte? Ce serait très difficile, parce que pour réussir à faire amender la Charte de manière à reconnaître un tel droit, il faudrait le consentement de l'ensemble des partenaires de la fédération.
On nous demandait ensuite d'analyser la partie VII de la Loi sur les langues officielles. La partie VII exprime l'engagement du gouvernement canadien à favoriser l'épanouissement des communautés et la progression vers l'égalité de statut et d'usage des deux langues.
La Cour fédérale a rendu un jugement le 8 septembre dernier, dans lequel elle octroie une ordonnance qui force l'Agence canadienne d'inspection des aliments à respecter la partie VII, ce qui signifie que la cour estime que la partie VII a une force obligatoire et peut conduire à des ordonnances.
Le gouvernement canadien a donc l'obligation, en vertu de l'article 41 de la loi, de faire ce qui est en son pouvoir pour favoriser le développement des soins de santé dans les deux langues et, en vertu de l'alinéa 43(1)d) de la même loi, la ministre du Patrimoine canadien a l'obligation de prendre des mesures pour aider les provinces à fournir des soins de santé dans la langue de la minorité.
On nous demandait d'examiner le principe de l'accessibilité dans la Loi canadienne sur la santé. À ma connaissance, il n'a pas été interprété au niveau linguistique par les tribunaux, mais il se peut que si on l'interprète conformément au principe non écrit de protection des minorités, il comprenne l'accès à des soins de santé dans sa langue.
On nous demandait si le Transfert canadien en matière de santé pourrait englober une dimension linguistique. Certainement. La loi garantit aux citoyens du Nouveau-Brunswick, de l'Ontario et du Québec, avec des nuances dans lesquelles je n'entrerai pas tout de suite, le droit à des soins de santé dans leur langue.
Finalement, le Parlement peut-il légiférer pour imposer des obligations linguistiques en matière de santé? La santé est normalement une compétence provinciale, et la langue est un accessoire de la compétence. Donc, en principe, le droit à des soins de santé dans sa langue relève des provinces.
Il est vrai que le Parlement a certaines compétences en santé, sous le chef de ses responsabilités en droit criminel, en cas d'urgence ou dans l'intérêt national. Il peut aussi utiliser son pouvoir de dépenser, comme en éducation, et je pense que ce serait là la voie la plus sûre au plan juridique. Donc, par son pouvoir de dépenser, le Parlement canadien pourrait, dans la Loi canadienne sur la santé ou dans la Loi sur les langues officielles, reconnaître un droit à des soins de santé dans sa langue et son obligation à lui, comme en éducation, d'aider les provinces à remplir cette mission.
Merci.
Le président: Merci, monsieur Foucher.
Madame Jackman, à vous la parole.
Mme Martha Jackman (professeure titulaire, Faculté de droit, Université d'Ottawa): Je voudrais également remercier le comité de m'avoir invitée ce matin. Mon domaine d'intérêt et d'expertise est celui du droit à la santé. Je dois dire que la présentation de mon collègue le professeur Foucher était extrêmement complète et que je suis entièrement d'accord sur toutes les constatations qu'il a faites. Je dois cependant dire qu'en tant que professeure ou expert constitutionnel, j'ai plutôt tendance à parler du volet de l'accès à la santé dans les deux langues. Je pense que le professeur Foucher a bien décrit l'état actuel de la loi. Plutôt que de simplement reprendre les mêmes propos sur les mêmes questions, j'aimerais prendre quelques minutes pour discuter avec vous des points sur lesquels on pourrait pousser le volet de l'accès à la santé dans les deux langues.
Il est tout à fait exact que jusqu'à maintenant, les tribunaux ont interprété tant la Charte canadienne que les principes non écrits du Renvoi relatif à la sécession comme étant des obligations surtout négatives; c'est-à-dire qu'on empêche l'État d'agir plutôt que de l'obliger à agir. Ce qui est intéressant et assez exceptionnel, cependant, c'est que dans la Charte canadienne, on a des garanties positives dans le domaine des droits linguistiques, par lesquelles on impose aux gouvernements l'obligation d'agir. Je pense qu'en raison de la mentalité ou de l'esprit dans lequel on a tendance à aborder les langues officielles, on est vraiment choyés dans ce domaine. Les tribunaux ont l'habitude de penser en termes positifs plutôt qu'en termes négatifs. Je pense que les principes non écrits qui ressortent du Renvoi relatif à la sécession sont un bon point de départ pour insister sur l'obligation de fournir les services dans les deux langues plutôt que sur l'obligation de ne rien faire.
Dans l'affaire Lalonde, dans le jugement de la Cour d'appel de l'Ontario sur l'hôpital Montfort, il est bien vrai qu'on a dit au gouvernement de l'Ontario que son comité avait eu tort d'interpréter la loi ontarienne comme permettant la fermeture de l'hôpital Montfort. En fin de compte, le gouvernement de l'Ontario a dû continuer à dépenser de l'argent pour fournir des soins de santé en français dans l'est de l'Ontario. Oui, c'est une interprétation négative des obligations enchâssées dans les principes non écrits, mais je pense qu'on a la possibilité d'interpréter ces dispositions ou ces principes comme imposant un devoir d'agir, parce que les droits constitutionnels des minorités linguistiques n'ont pas beaucoup d'effet s'ils n'imposent pas d'obligations positives.
Pour ce qui est de l'article 15 de la Charte, je crois qu'il y a un point très intéressant dans la décision rendue dans l'affaire Eldridge. Comme vous le savez très bien, depuis l'affaire Mahé, on prétend régulièrement dans la jurisprudence sur l'article 15 que cet article 15 ne protège pas contre la discrimination fondée sur la langue. On trouve un fondement à cet argument dans un petit obiter dictum du juge en chef qui, pour moi, n'a vraiment rien à voir avec l'article 15 dans le contexte non scolaire. Ce qui est intéressant dans l'affaire Eldridge, c'est que lorsque le gouvernement de la Colombie-Britannique a voulu décourager la Cour suprême du Canada de trouver à l'article 15 un droit aux services d'interprétation pour les personnes sourdes, il a dit que si on offrait des services d'interprétation aux personnes sourdes pour les soins de santé, cela causerait la faillite financière du système de soins de santé parce qu'on serait obligé d'offrir les services de santé dans d'autres langues minoritaires. La Cour suprême n'a pas du tout répondu que ce n'était pas un problème parce que l'article 15 ne protège pas contre la discrimination fondée sur la langue. La cour a simplement répondu que ce n'était pas dans l'affaire Eldridge qu'on allait décider si, oui ou non, il était justifié de limiter l'accès aux services de santé pour les personnes d'autres langues minoritaires, mais qu'il fallait que la cause soit présentée et qu'on examine la situation de chaque groupe.
¿ (0920)
Je trouve très encourageante l'approche de la Cour suprême dans l'affaire Eldridge. Elle aurait bien pu répondre que cela ne causait pas d'inconvénients parce que les personnes sourdes sont protégées par le motif du handicap physique et que d'autres minorités linguistiques n'ont aucune protection en vertu de l'article 15, mais elle n'a pas du tout répondu de cette façon.
Pour moi, l'affaire Eldridge nous permet d'argumenter beaucoup plus facilement que l'article 15 de la Charte protège contre la discrimination fondée sur la langue. Évidemment, cela ouvre énormément de possibilités, parce que l'article 15 offre à chacun et chacune la même protection de la loi. Dans le contexte des services de santé, il est évident que cela pourrait assurer aux minorités de langue officielle l'accès aux services de santé dans leur propre langue. Comme Pierre l'a bien dit, dans l'affaire Eldridge, il est question des services de traduction. Dans le régime de soins de santé, il faut des services de santé pour les personnes sourdes. Je pense qu'on peut plaider le fait que les minorités de langue officielle ont besoin de services livrés dans leur langue. On peut insister beaucoup plus facilement sur ces services que sur les services pour les personnes sourdes.
Donc, pour moi, l'article 15 offre des possibilités extrêmement intéressantes pour les arguments que le comité veut faire valoir.
L'autre fondement de la réclamation dont le comité discute est l'article 7 de la Charte canadienne. L'article 7 garantit à chacun et chacune le droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne. On ne peut porter atteinte à ces droits sauf en conformité avec les principes de justice fondamentale.
Nous n'avons pas, à ce jour, énormément de jurisprudence sur la partie de l'article 7 qui a trait au domaine de la santé. D'ailleurs, des tribunaux inférieurs ont rejeté l'argument voulant que l'article 7 protège l'accès aux services de santé, notamment l'accès, pour les personnes atteintes du sida en Colombie-Britannique, à une subvention étatique pour des médicaments coûteux.
Récemment, au Québec, nous avons eu la décision dans l'affaire Chaoulli, sur laquelle la Cour suprême du Canada se penchera au mois de mars. M. Chaoulli a plaidé que l'ensemble des règlements provinciaux en matière d'assurance-santé rendent difficile l'accès aux services de santé privés en vertu de l'article 7 de la Charte canadienne.
Dans l'affaire Chaoulli, au Québec, la cour de première instance a rejeté l'argument voulant que l'article 7 garantisse le droit à l'accès aux soins de santé privés, mais la juge de première instance a reconnu que l'article 7 garantissait l'accès aux soins de santé publics. La Cour d'appel du Québec a soutenu la décision de la juge de première instance, en trois décisions qui vont un peu dans toutes les directions, mais on n'a certainement pas remis en question les propos de la juge de première instance, qui a affirmé que s'il y avait une protection à l'article 7 de la Charte, elle concernait l'accès aux soins de santé publics.
Je pense qu'il y a, là aussi, un argument extrêmement important qu'on peut faire valoir: dans le cas des minorités linguistiques, pour répondre aux exigences de l'article 7, les soins de santé doivent être accessibles dans le sens de la Loi canadienne sur la santé et donc dans leur langue. On verra ce que le Cour suprême aura à dire sur l'article 7 dans l'affaire Chaoulli. J'ai entendu parler de certaines interventions de groupes revendiquant dans le domaine de l'égalité, et je serai moi-même impliquée pour ce qui est de l'aspect de la pauvreté. Il me semble qu'il y a un aspect linguistique intéressant qui pourrait être soulevé par un intervenant du domaine des droits linguistiques, mais je n'en ai pas entendu parler à ce jour.
¿ (0925)
Je voudrais vous proposer une dernière chose. Je suis depuis longtemps les tentatives visant à modifier la Loi canadienne sur la santé. Maintenant, on a le rapport de M. Romanow, qui propose des modifications importantes à la Loi canadienne sur la santé.
D'un point de vue stratégique, si j'étais membre de votre comité, j'aurais tendance à explorer la possibilité d'atteindre vos objectifs législatifs au moyen de la Loi sur les langues officielles plutôt qu'au moyen de la Loi canadienne sur la santé. Les raisons de cela sont un peu parallèles à la distinction que j'ai faite quant aux droits négatifs et aux droits positifs dans la Charte canadienne. Aussitôt qu'on soulève auprès des provinces la possibilité de modifier la Loi canadienne sur la santé, ça va mal. Les provinces continuent à insister, avec raison dans une certaine mesure, sur le fait que la compétence constitutionnelle en matière de services de santé est une compétence provinciale. Il est évident que le fédéral a le pouvoir constitutionnel de dépenser dans le domaine de la santé. Donc, il incite les provinces à faire ce qu'il veut, soit les objectifs de la Loi canadienne sur la santé, en leur versant des sous. Mais même là, les provinces résistent de plus en plus à ce moyen d'imposer des objectifs fédéraux dans le domaine de la santé. À mon avis, dans le domaine des droits linguistiques, on ne voit pas autant cette résistance.
On est habitué à ce que le fédéral dépense pour renforcer l'accès des minorités linguistiques à l'éducation et aux services dans leur langue. D'un point de vue stratégique, puisque le fédéral ne peut atteindre cet objectif qu'en dépensant et qu'on a déjà un mécanisme de subvention bien établi, qui semble bien fonctionner, dans la Loi sur les langues officielles pour l'accès aux services, le fait d'ajouter l'accès aux soins de santé à la Loi sur les langues officielles serait beaucoup plus efficace, tant en termes de la politique et des objections des provinces qu'en termes du mécanisme de mise en application.
M. Romanow a bien dit dans son rapport que le gouvernement fédéral n'appliquait pas la Loi canadienne sur la santé. On a des contraventions assez importantes à la Loi canadienne sur la santé au niveau de l'accessibilité, et pour des raisons politiques d'ordre extrêmement élevé, le gouvernement fédéral n'intervient pas. Le vérificateur général du Canada, dans son rapport de 2000, a dit exactement la même chose: le gouvernement fédéral n'applique pas la Loi canadienne sur la santé. On a l'habitude d'appliquer la Loi sur les langues officielles. Pourquoi alors choisir un outil qui ne marche pas nécessairement très bien dans le domaine de la santé, sauf au niveau symbolique? Pour moi, mieux vaut adopter un mécanisme qui, on the ground, comme on dit en anglais, fonctionne relativement bien.
Voilà mes propos. Merci.
¿ (0930)
Le président: Merci beaucoup, madame Jackman.
Monsieur Colvin.
M. Tory Colvin (président, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law): Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, merci beaucoup de nous avoir invités. C'est un plaisir et un honneur d'être ici pour vous adresser la parole. Deuxièmement, monsieur le président, je vous prie d'excuser mon prénom. Je vous assure que ce n'est pas moi qui me le suis donné.
Tout d'abord, je vais expliquer un peu qui nous sommes. La Fédération des associations de juristes d'expression française est le regroupement des sept associations, au niveau provincial, de juristes d'expression française à travers le pays. Toutes les provinces à majorité anglophone, sauf Terre-Neuve-et-Labrador et l'Île-du-Prince-Édouard, y sont représentées. Notre mandat est de travailler avec les associations pour faire avancer l'accès à la justice en français et, plus largement, la protection et l'avancement de la minorité francophone dans les provinces majoritairement anglophones.
Il y a deux aspects à notre présentation: tout d'abord, ce que j'appellerais le cadre constitutionnel et, deuxièmement, le pouvoir fédéral de dépenser dans les domaines provinciaux, ce dont nous avons déjà entendu parler ce matin.
Notre Constitution remet les questions de santé principalement aux provinces, à l'exception des territoires, qui restent toujours domaine fédéral.
Le gouvernement fédéral a aussi l'obligation de faire respecter le concept de l'égalité de nos deux langues et même de le promouvoir. J'interprète cela comme étant l'obligation, non seulement de protéger les francophones en situation minoritaire, mais aussi de faire avancer le statut du français dans la mesure où il a le pouvoir de le faire.
Nous ne disons pas que le gouvernement fédéral doit intervenir dans un domaine provincial, mais il y a des façons déjà acceptées qui permettent au gouvernement fédéral de jouer le rôle qu'on s'attend à ce qu'il joue. Il est certain que le gouvernement du Canada a le pouvoir de dépenser, de donner de l'argent aux provinces pour des fins qui sont de compétence provinciale. On peut citer l'éducation et le Régime d'assistance publique du Canada. Donc, pourquoi le gouvernement ne le ferait-il pas en matière de santé?
La Loi sur les langues officielles doit être une des toiles de fond contre lesquelles les principes de santé sont dressés, tant à travers nos lois qu'à travers notre Constitution. Notre fédération a toujours été d'avis que le gouvernement du Canada avait le pouvoir et même le devoir de protéger et de faire avancer les francophones en situation minoritaire. La Loi sur les langues officielles a été interprétée par les tribunaux comme une partie, voire une élaboration de notre Constitution.
Dans la discussion sur la cause de l'hôpital Montfort, la Cour d'appel de l'Ontario a accepté que l'existence d'un hôpital de langue française jouait un rôle essentiel et peut-être même constitutionnel dans le maintien de la société de langue française en Ontario.
Si la langue parlée dans l'offre des services de soins et l'enseignement des spécialistes de la santé est essentielle à l'existence de la communauté francophone en Ontario, pourquoi ne le serait-elle pas partout au pays? Pourquoi cette obligation linguistique et peut-être même constitutionnelle ne serait-elle pas mise en oeuvre partout au pays?
Le paragraphe 16(3) de notre Charte des droits et libertés parle de la progression vers l'égalité de nos langues officielles, c'est-à-dire de faire avancer les droits des citoyens de vivre, de parler et de s'éduquer dans leur langue. On peut commettre un crime en français partout dans ce pays. On peut être jugé pour ce même crime en français partout dans ce pays. Pourquoi ne pourrait-on pas se faire soigner aussi facilement en français? La progression de l'égalité qui ressort du paragraphe 16(3) n'en demande pas moins.
La Loi sur les langues officielles peut être vue comme un engagement du gouvernement à protéger les minorités.
¿ (0935)
Le paragraphe 43(1), en particulier, donne au gouvernement fédéral le rôle d'encourager les gouvernements provinciaux à favoriser le développement des minorités francophones et à leur offrir des services aux niveaux provincial et municipal. La solution, à notre avis, est d'imposer dans le domaine de la santé des conditions qui favorisent l'épanouissement des communautés francophones en situation minoritaire.
Nous croyons que le concept du sixième principe d'égalité linguistique est essentiel et même constitutionnellement obligatoire. Comme Parlement, vous avez le pouvoir d'attacher des conditions linguistiques au financement. Je dirais même que vous en avez l'obligation. Merci.
Le président: Merci, monsieur Colvin.
Est-ce que M. Rémillard veut également faire une intervention?
M. Rénald Rémillard (directeur général, Fédération des associations de juristes d'expression française de common law): Ça va, merci. J'ai déjà contribué en partie à la présentation de M. Tory Colvin.
Le président: Merci, monsieur Rémillard.
Merci beaucoup, messieurs et mesdames.
Nous allons maintenant passer à un échange. Normalement, nous nous limitons à sept minutes, mais j'ai l'impression qu'on pourra revenir à une ou deux reprises.
Monsieur Godin, vous avez la parole.
M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Merci, monsieur le président.
Il nous fait plaisir de recevoir nos invités ici, à Ottawa, pour entendre leur opinion. J'ai quelques questions à poser au professeur Foucher de Moncton, de la belle province d'où je viens. Il se fait beaucoup de travail du côté des francophones, et je suis le dossier depuis plusieurs années.
Vous parliez tout à l'heure de l'article 15. Vous sembliez dire que si on se prononçait là-dessus, cela engloberait plus que les langues française et anglaise. Je me pose des questions là-dessus. Le gouvernement fédéral est responsable des deux langues officielles. On demande toujours ce qui arrivera dans le cas des autres langues. Par l'immigration, on fait venir des gens ici. On a l'obligation de respecter ces gens, mais ils doivent apprendre une des deux langues ou les deux langues si possible, ou posséder l'une des deux langues à leur arrivée au Canada. Je me demande donc d'où vient cette idée. Au fond, au Canada, il y a deux langues officielles et on n'est même pas capable de les faire respecter présentement.
J'aimerais avoir des précisions sur ce que vous avez dit sur l'article 15 et les autres langues.
¿ (0940)
Le président: Voulez-vous répondre tout de suite?
M. Pierre Foucher: Si on incluait la langue dans les motifs de discrimination énumérés à l'article 15, le risque serait que d'autres communautés linguistiques invoquent le même principe et disent que si les francophones ont droit à des services dans leur langue dans les provinces où ils sont minoritaires, pourquoi n'y auraient-elles pas elles-mêmes droit?
Qu'est-ce qu'on peut leur répondre pour contrer cet argument? La seule réponse possible serait qu'il y a deux langues officielles au Canada et que les minorités francophones ne sont pas dans la même position que les autres minorités.
Lorsque j'ai écrit cela, je n'avais pas entendu la présentation de ma collègue Mme Jackman. Je pense que l'approche qu'elle propose est très intéressante, parce que l'article 16 de la Chartre garantit l'égalité des langues officielles comme telles. Donc, d'un point de vue stratégique, il serait peut-être préférable de procéder au moyen de l'article 16 plutôt qu'au moyen de l'article 15 pour éviter d'ouvrir une boîte de Pandore et d'avoir de la difficulté à répondre aux arguments de ceux qui demanderaient des services dans des langues autres que les langues officielles.
M. Yvon Godin: Monsieur le président, en réalité, cela pourrait s'appliquer en tout temps parce qu'on parle de minorités. Si on parle de minorités, ça pourrait s'appliquer dans n'importe quel domaine, et pas seulement dans celui de la santé. Dans la Loi sur les langues officielles, on dit qu'il y a deux langues que le gouvernement doit respecter. Je suis d'accord avec vous que si on donne de l'argent, il doit y avoir un principe, comme dans le rapport Romanow.
J'aimerais aussi avoir des commentaires sur le rapport Dion. Plusieurs millions de dollars ont été dépensés pour les langues officielles. Que pensez-vous de la position du gouvernement sur la santé? Il y a le rapport Romanow d'un côté et le plan Dion de l'autre. Selon vous, qu'y a-t-il dans le plan Dion pour aider les communautés francophones et même anglophones en situation minoritaire?
Le président: Monsieur Foucher, vous pouvez répondre à cette question, mais nous vous avions demandé d'examiner le cadre législatif, et le plan Dion n'est pas nécessairement compris dans cela. Nous comprendrions donc que vous puissiez ne pas avoir de commentaires à faire. Je voulais dire cela pour bien diriger le débat aussi.
M. Pierre Foucher: Je ne me suis pas préparé en fonction du plan Dion, mais si vous insistez, je vais vous demander de me donner cinq minutes pour démarrer mon ordinateur et je pourrai aller le trouver. Je ne peux pas vous répondre tout de suite.
Le président: Me permettez-vous d'intervenir, monsieur Godin? C'est que vous ouvrez une porte intéressante. M. Foucher a dit quelque chose d'intéressant au sujet de...
M. Yvon Godin: Il l'a dans son tiroir.
Le président: Vous avez donné une réponse très catégorique quand on vous a demandé si le gouvernement pouvait agir par l'entremise de ses transferts. Cela entre dans le sujet. Vous avez dit qu'il pouvait certainement le faire.
M. Pierre Foucher: Je suis convaincu que oui.
Le président: Si vous pouviez élaborer là-dessus, cela rejoindrait la question de mon collègue.
M. Pierre Foucher: Cela fait partie du pouvoir de dépenser, et cela est possible en autant que les conditions sont associées à l'argent et qu'on ne cherche pas à réglementer le système comme tel. Les tribunaux ont toujours reconnu que le gouvernement fédéral avait le droit d'attacher des conditions à l'argent qu'il dépense. Si le gouvernement fédéral décidait qu'en matière de santé, l'argent qu'il va dépenser sera assorti d'une certaine condition, soit que les minorités aient accès à des services dans leur langue, et qu'il y aura des conséquences financières si ce principe n'est pas respecté, cela passerait le test des tribunaux.
M. Yvon Godin: D'accord, mais le gouvernement fédéral pourrait consacrer plus d'argent à cela, étant donné les coupures qu'il a faites.
Vous parliez tout à l'heure du système de santé privé au Québec. Vous disiez que si c'était privé, on n'avait pas besoin... C'est vous, Martha, qui en avez parlé?
¿ (0945)
Mme Martha Jackman: C'est moi.
M. Yvon Godin: Si le système privé est financé par le gouvernement... Ce n'est pas ce qu'on suggère, car on ne veut pas avoir un système privé au Canada, et je veux être bien clair à ce sujet. Je ne veux pas faire aujourd'hui la promotion d'un système de santé privé parce que je suis à 150 p. 100 en désaccord sur un système de santé privé, mais vous laissiez entendre qu'il n'y avait pas d'obligation en matière de langues officielles dans les soins de santé privés. C'est ce que j'ai cru comprendre, et j'aimerais avoir des précisions là-dessus.
Mme Martha Jackman: Si vous me le permettez, je vais simplement répéter que la cour de première instance, au Québec, était entièrement d'accord avec vous. La cour a dit que si la Charte canadienne accordait un droit relié à la santé, il s'agissait de l'accès aux soins de santé publics. La cour a rejeté l'argument voulant que la Charte protège l'accès aux soins de santé privés. La Cour de première instance au Québec était entièrement d'accord avec vous, et nous espérons que la Cour suprême du Canada sera du même avis et dira qu'on a au Canada un droit à l'accès aux soins de santé publics.
M. Yvon Godin: N'y a-t-il pas un danger que le gouvernement passe à côté de cela en laissant le secteur privé s'installer et en disant que maintenant, ce n'est plus de sa juridiction?
Mme Martha Jackman: J'espère que non. Dans notre intervention, nous allons plaider le fait que la Charte canadienne, tant à l'article 7 qu'à l'article 15, exige que le gouvernement agisse de façon positive, comme dans le domaine du droit à l'éducation en langue minoritaire, pour assurer aux Canadiens et Canadiennes l'accès aux soins de santé.
En ce qui a trait à l'accès aux soins de santé dans les deux langues officielles, comme le professeur Foucher l'a bien expliqué, notre argument est que, pour avoir la même protection de la loi dans le domaine de la santé, les minorités linguistiques doivent avoir accès aux soins de santé dans leur langue.
Mais il y a un inconvénient quand on passe par le chemin de l'article 15 de la Charte, comme le professeur Foucher l'a expliqué, et par celui de la Loi canadienne sur la santé. Comme la Cour suprême l'a reconnu dans l'affaire Eldridge et comme Romanow l'a aussi beaucoup souligné, les valeurs d'égalité sous-tendent la Loi canadienne sur la santé, et il devient très difficile de justifier un traitement plus favorable des minorités linguistiques de langue officielle. C'est pour cela qu'il vaut mieux passer par la Loi sur les langues officielles. On a l'habitude de comprendre la raison de cela et on a beaucoup moins de choses à justifier.
Je suis absolument d'accord avec mon collègue le professeur Foucher qu'il n'y a aucune limite au pouvoir du gouvernement fédéral d'assortir des conditions à l'argent qu'il transfère aux provinces pour le domaine de la santé. Comme la cour l'a reconnu récemment dans l'affaire Eldridge, c'est en dépensant que le fédéral peut atteindre ces objectifs. Pour moi, il doit dépenser du côté linguistique plutôt que du côté de l'égalité en santé.
Le président: Merci. Je vais donner la parole à M. Bellemare parce qu'il doit se rendre à la Chambre dans cinq minutes. Nous passerons ensuite à M. Herron, à Mme Allard, puis on continuera.
M. Eugène Bellemare (Ottawa—Orléans, Lib.): Merci, monsieur le président. J'ai deux questions. La première est destinée à M. Foucher.
Vous avez dit que la loi garantissait aux personnes des services de santé dans leur langue. Est-ce que vous pourriez revenir sur vos propos en ce qui concerne la province de l'Ontario?
M. Pierre Foucher: En ce qui a trait à l'Ontario, c'est la Loi sur les services en français qui s'applique. En vertu de celle-ci, le gouvernement désigne des institutions et des services; lorsque ces derniers sont désignés, les services doivent obligatoirement être offerts en français. La loi ne précise pas de quels services il s'agit. En pratique, les services de santé ont été désignés. Certains hôpitaux ontariens ont été désignés; ceux-là ont l'obligation d'offrir ces services en français.
M. Eugène Bellemare: Il s'agit strictement des hôpitaux désignés?
¿ (0950)
M. Pierre Foucher: En effet.
M. Eugène Bellemare: Donc, quelqu'un ne pourrait pas exiger des services en français à Belleville ou à Oshawa.
M. Pierre Foucher: Il faudrait vérifier si ces endroits ont été désignés.
M. Eugène Bellemare: Ma deuxième question, monsieur le président, s'adresse à Mme Jackman.
Vous dites préférer avoir recours à la Loi sur les langues officielles plutôt qu'à la Loi canadienne sur la santé pour combattre ce problème. Mais quand on regarde de près la Loi sur les langues officielles, on constate qu'elle n'a pas de dents; elle ne donne pas lieu à des sanctions. Elle ne comporte rien de négatif; tout est toujours positif. La seule situation qui porte à conséquence se présente lorsqu'un ministère ne fait pas correctement ses devoirs en termes de services dans les langues officielles. On fait un rapport qui peut être désobligeant et... Mais quand une institution est visée, un secteur d'un ministère, par exemple, c'est traité avec la plus totale indifférence. Dix ans plus tard, si on retourne dans cette section du ministère, on voit que les mêmes lacunes existent toujours. Rien ne force ces personnes à donner des services dans les deux langues. On ne peut que les encourager.
Je vous entends tous les quatre dire depuis un moment que c'est peut-être une question d'argent. Si on accorde des fonds, on devrait émettre des conditions. À l'heure actuelle, la Loi sur les langues officielles n'est qu'incitative.
Si on accorde des fonds pour que les services soient offerts dans les deux langues, chaque fois que ces services ne seront pas offerts comme il se doit, on devra faire un rapport et souhaiter que les journaux écrivent un résumé de celui-ci. Puis dix ans plus tard, et ensuite un autre dix ans plus tard, la situation sera la même. Rien ne va aboutir. Est-ce qu'on est vraiment aussi faibles lorsqu'il s'agit de changer les choses?
Mme Martha Jackman: Je comprends très bien votre intervention et je suis tout à fait d'accord pour dire que la Loi canadienne sur la santé comporte des dispositions très puissantes en ce qui concerne sa mise en application. Si la province ne respecte pas les conditions imposées dans cette loi, le gouvernement fédéral est autorisé à réduire les transferts.
Le problème est que la loi est rédigée de cette façon, mais tel que le vérificateur général et la Commission Romanow l'ont souligné dans leur rapport, ces dispositions existent, mais elles ne sont pas mises en application par le fédéral parce que cela causerait des problèmes politiques trop importants. Par exemple, il ne devrait pas y avoir d'hôpitaux privés au Canada. On ne devrait pas imposer des montants supplémentaires aux patients. Le problème d'accessibilité est passablement prononcé dans nombre de régions au Canada. Or, le vérificateur général a découvert que le fédéral ne coupait presque jamais des fonds aux provinces. Donc, la loi et les dispositions en matière de mise en application sont là, mais elles ne sont pas imposées.
Ainsi, on peut se retrouver dans la même situation, à savoir qu'on envoie de l'argent mais qu'on n'impose pas de réductions. Je constate que la Loi sur les langues officielles ne comporte pas de mécanisme punitif dans le cadre de sa mise en application; or, à mon avis, les mécanismes punitifs de la Loi canadienne sur la santé n'ont pas non plus atteint leurs objectifs à cause du climat politique.
D'abord, il faut préciser qu'il est presque aussi difficile de modifier la Loi canadienne sur la santé que la Constitution canadienne; c'est le premier problème auquel vous êtes confrontés en tant que députés. Ensuite, je ne vois pas pourquoi une condition reliée à la langue devrait, plus que les autres dispositions déjà existantes, être ajoutée à une loi par l'entremise de dispositions punitives.
M. Pierre Foucher: Je voudrais compléter cette réponse et vous signaler, comme je l'ai fait dans ma présentation tout à l'heure, qu'il y a un mécanisme dans la Loi sur les langues officielles qui est exécutoire, et c'est la cour. On peut s'adresser à la cour pour faire respecter la Loi sur les langues officielles.
J'ai mentionné tout à l'heure qu'on venait d'ordonner au gouvernement fédéral de ramener quatre postes d'inspecteurs à Shippagan, dans le nord-est du Nouveau-Brunswick, alors qu'il les avait transférés à Shediac, ce qui était une contravention à la Loi sur les langues officielles. La cour lui a ordonné de ramener ces quatre postes là où ils étaient.
Il y a deux ou trois ans, le gouvernement fédéral avait demandé à l'Ontario de gérer ses contraventions. Les gens perdaient des droits à cause de cela, parce que la Loi sur les services en français de l'Ontario est moins généreuse que la Loi sur les langues officielles fédérale. La cour a ordonné au gouvernement fédéral de corriger la situation.
Voici donc deux exemples où il y a des ordonnances des tribunaux en vertu de la Loi sur les langues officielles. C'est vrai que lorsqu'on passe par le commissariat, il y a un rapport et des recommandations. Le commissaire est un ombudsman. Il n'est pas là pour faire la police, mais pour essayer d'améliorer les choses. Mais si on n'est toujours pas content ou s'il y a toujours des problèmes, on peut aller à la cour. C'est un avantage de la Loi sur les langues officielles qui, je pense, n'est pas dans la Loi canadienne sur la santé.
¿ (0955)
Mme Martha Jackman: Il n'y est certainement pas. Premièrement, ce que les provinces sont en train de négocier avec le fédéral, c'est justement la création de l'équivalent d'une commission. Est-ce qu'on va l'avoir? Je ne le sais pas. Deuxièmement, il est très difficile d'aller devant les tribunaux pour essayer d'appliquer la Loi canadienne sur la santé, parce que c'est une entente carrément fédérale-provinciale, sans mécanisme pour les particuliers.
Le président: Merci.
Monsieur Bellemare, ça va?
Madame Allard, allez-y.
Mme Carole-Marie Allard (Laval-Est, Lib.): D'abord, je voudrais féliciter tous les intervenants. Je trouve que vos présentations sont très complètes et très intéressantes. J'ai une question pour Mme Jackman. Je devrais peut-être dire Me Jackman, parce que j'imagine que vous êtes avocate aussi.
Vous avez mentionné que dans l'arrêt Eldridge, il y avait un obiter dictum du juge qui était encourageant, parce qu'il ouvrait la porte à une reconnaissance pour les minorités linguistiques par l'article 15 de la Charte canadienne des droits et libertés. Je voudrais vous demander si vous croyez vraiment que nous pouvons anticiper qu'un jour, la cour décidera, comme elle l'a fait d'ailleurs pour l'orientation sexuelle dont il est question aujourd'hui dans ce Parlement, que le droit aux services de santé pour les minorités dans leur langue pourrait effectivement découler de l'article 15 et y être inclus.
Ne trouvez-vous pas qu'il y ait un danger à faire dire à l'article 15 des choses qui n'étaient pas dans l'article au départ, lors de l'adoption de la Charte canadienne des droits et libertés, et que cela risque de nous faire dériver vers des précédents un peu dangereux?
Mme Martha Jackman: Je comprends très bien l'intervention, et c'est toujours le débat: d'un point de vue démocratique, est-ce que l'épanouissement qu'on voit à l'article 15 de la Charte est sain? Je dois avouer que d'après moi, cet épanouissement est vraiment très important. D'ailleurs, on n'aurait pas eu la protection pour les minorités d'orientation sexuelle sans cette interprétation. Ce n'est pas un motif qui est enchâssé de façon expresse, mais l'article 15 est rédigé de façon à être très ouvert, et le domaine dans lequel je revendique surtout cela est celui de la pauvreté. On tente de faire progresser la loi de la même façon du point de vue de la condition sociale, et pour les minorités linguistiques, c'est un motif important aussi.
Les tribunaux sont extrêmement conservateurs, et il n'est pas facile de faire passer un nouveau motif non énuméré. J'aimerais beaucoup qu'on reconnaisse la langue comme motif de discrimination prohibé. Est-ce que les tribunaux vont accepter? J'espère que oui, mais c'est moins évident à cause de ce débat-là. Est-ce que la protection que les minorités linguistiques ont est celle qu'on voit à l'article 16 et à l'article 23, point final? Moi, je n'accepte pas du tout ce point de vue.
Au Nouveau-Brunswick, on voit bien que les problèmes des minorités linguistiques ne sont pas uniquement ceux de l'accès à l'éducation dans leur langue. Il y a aussi une grosse lacune dans l'accès à d'autres services publics, d'autres services et programmes sociaux dans leur langue.
Le président: Merci.
Monsieur Sauvageau, allez-y.
M. Benoît Sauvageau (Repentigny, BQ): D'abord, je tiens à vous souhaiter la bienvenue et à m'excuser de mon retard. C'est un malentendu. Je croyais que c'était à 10 heures, tout simplement.
Je vais lire vos témoignages. Si jamais on a déjà répondu à ma question--parce que j'ai une question principale--, dites-le-moi, et je vais lire le compte rendu plus tard, comme je le fais après chaque réunion.
Ma question porte sur les soins de santé qui ne sont pas contestés, ceux dont on ne se demande pas s'ils sont d'application provinciale ou fédérale, c'est-à-dire les soins de santé offerts par le gouvernement canadien. Je pense aux hôpitaux militaires et aux services offerts aux autochtones. Ce sont donc des hôpitaux, mais qui sont administrés par le gouvernement fédéral. Là, il n'y a pas de problème d'interprétation de la Loi sur les langues officielles: le service bilingue doit être offert. À votre connaissance, est-ce que le gouvernement fédéral, là où c'est non contestable, respecte la Loi sur les langues officielles et offre les services aux Canadiens et aux Canadiennes dans les deux langues? Est-ce que vous avez déjà eu des conflits sur ces sujets?
À (1000)
M. Pierre Foucher: Je n'ai pas eu connaissance de conflits. Je pense que la commissaire aux langues officielles pourrait mieux répondre que moi, parce qu'elle est plus au courant de toutes les plaintes et de tous les problèmes qui circulent dans le réseau. Mais il n'y en a pas eu devant les tribunaux.
M. Benoît Sauvageau: Non.
Mme Martha Jackman: Vous êtes peut-être au courant du fait que dans le domaine de la santé, le gouvernement fédéral fait un effort important pour transférer la responsabilité des soins de santé aux gouvernements autochtones et aux trois territoires. Le problème que le professeur Foucher a souligné dans le domaine des contraventions est celui qu'on est en train de vivre dans les territoires en ce moment. D'ailleurs, il y a justement une contestation qui se prépare sur ces questions. Est-ce que la délégation de responsabilités aux territoires en la matière a un impact négatif pour les minorités linguistiques? C'est évident que cela va en avoir un. Si c'est un service que le gouvernement fédéral livre directement, l'obligation lui est imposée dans la Charte tout comme dans la Loi sur les langues officielles. Une fois qu'on délègue les responsabilités aux territoires, dans un sens, on n'est plus le gouvernement qui rend le service et cela pose un problème.
Le président: Merci.
Monsieur Sauvageau.
Monsieur Colvin, vous vouliez parler?
M. Tory Colvin: Je veux tout simplement ajouter que c'est exactement ce que nous avons vécu. En fait, c'était sous ma présidence à l'AJEFO que nous avons porté plainte au sujet de la question des contraventions. Ce qui ressort en partie de cette décision, c'est que lorsque l'on remet ces obligations et ces pouvoirs à un autre niveau de gouvernement, le transfert inclut aussi les obligations et les droits linguistiques.
Je sais qu'il y a plusieurs causes qui viennent des territoires. Notre vice-président, Roger Lepage, est en train d'en plaider. Le point principal, c'est que quand on remet cela à un autre niveau, on doit remettre le tout, tant les obligations que les pouvoirs.
C'est une bataille qui n'est pas terminée.
M. Benoît Sauvageau: D'accord.
J'aimerais faire une demande au greffier, si le président me le permet, ou à tout le moins demander l'opinion du président. Il serait peut-être intéressant de faire une étude parallèle. Oui, on doit étudier la façon de respecter les langues officielles dans les soins de santé administrés par les provinces, mais parallèlement à cela, pourrait-on demander qu'on fasse un petit travail pour s'assurer que là où le fédéral a un pouvoir direct, dans les hôpitaux où les soins de santé sont offerts par le gouvernement fédéral, on applique immédiatement et rapidement ce qui doit être fait, parce qu'il n'y a pas de contestation possible?
Le président: Monsieur Sauvageau, je pense que votre question est appropriée. On peut faire une recherche ou demander au Commissariat aux langues officielles si un état de la situation a été fait de ce côté-là. D'ailleurs, la commissaire viendra sans doute nous voir bientôt. Ce serait certainement une façon d'explorer cela.
On pourrait le faire d'une façon ou d'une autre.
M. Benoît Sauvageau: On peut demander au gouvernement fédéral d'inciter les provinces à offrir les services dans les deux langues, mais dans un premier temps, il doit prêcher par l'exemple.
Le président: C'est légitime.
M. Benoît Sauvageau: Merci beaucoup.
Le président: Monsieur Colvin.
M. Tory Colvin: Monsieur le président, il faudrait peut-être que le comité songe à inviter notre vice-président, Roger Lepage, qui est avocat à Winnipeg, parce que c'est justement lui qui plaide pour les communautés francophones dans les dossiers qu'évoquait Me Jackman.
Le président: On peut le faire, à moins que cela pose un problème, étant donné qu'il y a des causes devant les tribunaux. Il faut faire preuve d'un peu de prudence de ce côté-là. Mais on retient votre suggestion.
Monsieur Simard.
M. Raymond Simard (Saint-Boniface, Lib.): Merci, monsieur le président.
Soyez les bienvenus, messieurs et madame. Je m'excuse d'avoir manqué le début des présentations.
Vous avez plus ou moins répondu à toutes mes questions, mais j'ai un commentaire à faire. Peut-être pouvez-vous commenter là-dessus.
Au Manitoba, nous avons les centres de services bilingues où on dessert les communautés où il y a une représentation minoritaire assez importante. Croyez-vous qu'un tel modèle pourrait être possible en matière de santé? Par exemple, croyez-vous que l'hôpital Saint-Boniface, un des sept ou huit hôpitaux au Manitoba, pourrait desservir les francophones ou est-ce que vous voyez cela d'un mauvais oeil parce que cela ne répondrait pas aux besoins?
À (1005)
M. Rénald Rémillard: Je pense qu'en ce qui a trait au pouvoir de dépenser, rien n'empêcherait qu'un modèle soit développé, dépendant des régions et des besoins en matière de santé.
Je pense que c'est une chose qui est appelée à être différente dans chacune des provinces, parce que la réalité est différente dans chacune des provinces. À mon avis, ça pourrait être une modèle intéressant au Manitoba ou dans d'autres provinces.
Mme Martha Jackman: C'est d'ailleurs ce qui s'est produit lors de l'affaire Eldridge. La Cour suprême a simplement émis une déclaration selon laquelle le fait de ne pas offrir de services était inconstitutionnel, car on a identifié un hôpital dans la région de Vancouver qui se spécialise dans les services pour les personnes sourdes.
M. Raymond Simard: À long terme, il est peut-être plus réaliste de suivre un tel exemple plutôt que d'essayer d'offrir des services en français partout au Canada.
M. Pierre Foucher: Il faudra s'adapter à chaque province. Le modèle manitobain est intéressant dans l'Ouest, mais il s'appliquerait mal au Nouveau-Brunswick. La situation y est complètement différente.
M. Rénald Rémillard: [Note de la rédaction: inaudible] ...de l'idée au niveau scolaire. Je ne veux pas aborder la question de l'échelle variable. On doit quand même prendre en considération les réalités démolinguistiques de chaque province. Dans certains cas, il n'est peut-être pas réaliste de chercher à obtenir un hôpital entièrement francophone. Il vaudrait mieux viser à offrir des services ou élaborer un plan pour offrir des services dans une région, et il faudrait que la façon de rendre accessibles ces services soit adaptée à ces réalités. Je pense qu'il faut prendre en considération les différences régionales et provinciales.
Le président: J'aimerais poser certaines questions. Je voudrais d'abord remercier M. Foucher d'avoir porté à notre attention l'affaire Forum des maires de la péninsule acadienne et la décision qui a été rendue le 8 septembre dernier, car je ne connaissais pas cette cause. Pouvez-vous me dire s'il s'agissait d'une affaire en première instance et si on a fait appel de ce jugement?
M. Pierre Foucher: On ne le sait pas encore. Je présume que le gouvernement fédéral va interjeter appel car il ne doit pas être très content de la décision.
Le président: Je demanderais à notre greffier de remettre aux membres du comité un sommaire de cette décision de la Cour fédérale, ou peut-être même la décision complète, et de l'arrêt Eldridge parce qu'on a à discuter et cela pourra nous aider dans nos travaux.
Monsieur Foucher, vous avez mentionné plus tôt que reconnaître le droit à des soins de santé dans sa langue officielle nécessiterait un amendement et l'accord de l'ensemble des partenaires de la fédération. La Constitution prévoit aussi une formule d'amendement bilatérale, qui a été utilisée au moins à trois reprises, si je ne m'abuse: par le Nouveau-Brunswick lors de l'adoption de la Loi sur les langues officielles du Nouveau-Brunswick, par le Québec pour régler la question des commissions scolaires linguistiques et également par Terre-Neuve pour les termes régissant son adhésion au Canada.
M. Pierre Foucher: L'Île-du-Prince-Édouard y a eu recours pour ses bateaux.
Le président: Voilà!
Cette formule pourrait-elle, selon vous, être utilisée par une province qui désirerait garantir de façon constitutionnelle l'accès à des soins de santé dans les deux langues officielles du pays? Cela pourrait-il se faire de façon bilatérale?
M. Pierre Foucher: Oui.
Le président: Sans équivoque?
M. Pierre Foucher: Tout à fait.
Le président: Croyez-vous que les autres provinces pourraient s'y opposer sous prétexte que cela pourrait les toucher?
M. Pierre Foucher: Peut-être. Politiquement, il pourrait y avoir des difficultés, mais juridiquement, je ne vois pas d'obstacle.
Le président: Je m'adresse maintenant à Mme Jackman et M. Colvin. Je vous avoue que j'apprends encore tous les jours, notamment pour ce qui se passe dans les Territoires du Nord-Ouest. La décision Blais, qui n'a pas été contestée en appel par le procureur général du Canada, n'empêche-t-elle plus ce genre de non-transfert de responsabilités?
M. Tory Colvin: Théoriquement oui, mais il faut se rappeler qu'il s'agit d'un jugement de première instance et qu'il n'y a pas eu appel. Par conséquent, une autre cour de première instance doit théoriquement en tenir compte mais n'est pas obligée de s'y conformer. C'est ce qui pose problème. Malgré tout, la décision du juge Blais établissait clairement que lorsqu'on remet des pouvoirs à un niveau, on doit aussi transférer les responsabilités qui y sont rattachées.
À (1010)
Le président: Si le gouvernement du Canada n'a pas interjeté appel de la décision Blais par l'entremise du procureur général, cela veut dire qu'il l'accepte et qu'il est tenu de s'y conformer, n'est-ce pas?
M. Tory Colvin: On le présume.
Le président: D'accord. J'aimerais, monsieur Colvin, approfondir la question du transfert d'argent, pour la santé par exemple. Vous allez plus loin que vos collègues. Tout le monde dit que le gouvernement du Canada a le droit d'imposer des conditions au transfert d'argent pour la santé. M. Foucher, Mme Jackman et vous l'avez dit. Vous êtes toutefois allé plus loin. Vous avez dit non seulement qu'il en a le droit, mais aussi qu'il en a l'obligation. Je crois que c'est le terme que vous avez utilisé. Pourriez-vous élaborer là-dessus, s'il vous plaît? J'essaie de comprendre si vous voyez un manque de concordance entre la Loi sur les langues officielles et la Loi canadienne sur la santé.
M. Tory Colvin: Je suis peut-être un peu trop optimiste dans ce domaine et je vois que mes deux collègues ont été beaucoup plus modestes, mais je crois que lorsqu'on regarde la décision de la Cour d'appel de l'Ontario au sujet de l'hôpital Montfort et que l'on considère l'importance qui commence à être attachée aux principes non écrits, on peut discerner là-dedans non seulement le pouvoir, mais même l'obligation de prendre en compte les minorités et d'agir en leur faveur. Je pense que le plan Dion, dont on a parlé tout à l'heure, reflète cela. Je crois que le fait, par exemple, de ne pas porter le jugement du juge Blais en appel reflète cela aussi. Cela reflète la réalité qui découle de la décision Beaulac, qui dit qu'il faut une égalité réelle entre les deux langues officielles.
Je crois que depuis la décision Beaulac, on a tourné une page et que ça se voit un peu partout. Je crois que les principes non écrits, surtout quand il s'agit de protéger les minorités linguistiques dans les provinces anglophones, sont là et sont importants, et qu'on doit les prendre en compte quand on adopte des lois.
Je sais qu'on pourrait m'accuser d'être un peu osé, mais c'est peut-être ça que d'être avocat et de plaider: je crois vraiment que depuis 1998-1999, on vit une nouvelle époque en ce qui concerne les droits linguistiques et qu'il faut en tenir compte dans presque tous les domaines auxquels on a affaire. Je sais que certains s'inquiètent en se demandant si ça veut dire qu'on va faire un hôpital du style Montfort dans un petit village comme Nipigon, dans le nord de l'Ontario, où il y a peut-être deux francophones. Non, ce n'est pas ça. Mais la technologie, de nos jours, nous permet bien des choses. Par exemple, la télémédecine permet à un patient qui est dans un petit village des Territoires du Nord-Ouest d'avoir un entretien avec son médecin qui est à Ottawa ou à Montréal et qui reçoit toutes les données par informatique. Donc, on ne dit pas qu'il est nécessaire de construire d'énormes hôpitaux francophones partout dans le pays, mais seulement qu'il faudrait penser à des façons de permettre un accès égal. C'est différent. Je crois que le rapport Romanow touche justement à ces questions d'accès égal et recommande entre autres, à la recommandation 28, l'accès linguistique.
Le président: Est-ce qu'il y a d'autres commentaires là-dessus? Alors, j'y reviendrai tout à l'heure.
Monsieur Godin, allez-y.
M. Yvon Godin: J'ai seulement quelques commentaires, et ensuite une question.
Premièrement, j'ai été très heureux de la décision sur les inspecteurs des aliments. J'avais même posé des questions à la Chambre des communes, à l'époque où les transferts avaient été faits à Shediac et où les services avaient été perdus dans la péninsule acadienne. J'ai été très satisfait de la décision qui a été prise. Maintenant, on va voir. Si le gouvernement interjette appel de cette décision, cela va montrer comment il appuie le rapport Dion. Il dit qu'il veut être plus ouvert, faire davantage et fournir beaucoup d'argent. Finalement, il y a une cour de première instance qui a dit que les inspecteur devraient retourner à Shippagan. C'est un test pour savoir combien le gouvernement est sérieux en ce qui a trait aux langues officielles.
Deuxièmement, l'Association des municipalités francophones du Nouveau-Brunswick va aller en cour sur la délimitation des circonscriptions. Les minorités francophones doivent être transférées dans une circonscription anglophone. Ce qui est intéressant là-dedans, monsieur le président, c'est que même les anglophones vont maintenant s'en aller. Ceux qui restent dans la circonscription disent qu'ils vont devenir vraiment minoritaires et qu'ils peuvent perdre des droits eux aussi. Il sera intéressant d'entendre le débat là-dessus. Le dépôt va se faire la semaine prochaine.
Revenons à une question que je trouve importante, surtout que le Nouveau-Brunswick est reconnu comme une province bilingue. Monsieur Foucher, tout à l'heure, vous parliez spécialement du Nouveau-Brunswick. On parle de services en français ou en anglais, dans les deux langues. Mais jusqu'où va le service? Par exemple, quelqu'un s'est déjà présenté à mon bureau en disant qu'il était allé à l'hôpital, qu'il s'était fait servir dans sa langue mais que quand il avait voulu avoir les rapports médicaux, on lui avait dit que c'était son problème. Il les a obtenus dans l'autre langue et il a été obligé de payer pour avoir toute la traduction de ses rapports médicaux. Quand on parle de services, on dirait qu'on parle seulement du service vocal, quand deux personnes se parlent, mais ça va plus loin que ça. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus, si vous en avez une. Est-ce qu'on parle d'un service complet?
À (1015)
M. Pierre Foucher: Je pense que ça couvre effectivement l'ensemble des services dispensés par les institutions. Est-ce que ça irait jusqu'au point où le médecin serait forcé de rédiger son rapport dans la langue de son patient? J'hésiterais à l'affirmer, étant donné que la relation médecin-patient est privée. On pourrait peut-être établir que l'hôpital a l'obligation de fournir la traduction du rapport dans la langue du patient. Mais forcer un médecin d'une clinique privée à servir le patient dans sa langue, voilà une question qui, disons, mériterait d'être étudiée davantage.
M. Yvon Godin: Monsieur le président, j'irais même jusqu'à inclure les rapports de l'hôpital.
M. Pierre Foucher: Oui, pour les rapports de l'hôpital, je suis...
M. Yvon Godin: Il peut s'agir de rapports des infirmières ou d'un rapport médical étoffé qui provient de l'hôpital lui-même et auquel un patient veut avoir accès.
M. Pierre Foucher: Les hôpitaux étant des institutions publiques, il faut que ce soit fait. À ce sujet, il n'y aucun doute dans mon esprit.
M. Yvon Godin: Il faut que les hôpitaux, surtout au Nouveau-Brunswick, puisque c'est reconnu par la Charte...
M. Pierre Foucher: Oui. De plus, il y a maintenant au Nouveau-Brunswick un commissaire aux langues officielles. On pourrait donc déposer une plainte auprès du nouveau commissaire, M. Carrier, qui ferait enquête sur la question.
M. Yvon Godin: Ça répond à ma question. Merci.
Le président: Est-ce que d'autres collègues voudraient intervenir à nouveau? Pour ma part, j'ai d'autres questions; je vais donc en profiter, si vous me le permettez.
Ma question est un peu théorique, dans le sens où plusieurs dispositions de la Charte des droits et libertés ou de la Loi sur les langues officielles peuvent être invoquées.
D'après ce que vous connaissez de la Loi sur les langues officielles telle qu'elle existe maintenant, est-il possible d'affirmer qu'en vertu de cette loi, le gouvernement du Canada, dans le cadre des présents transferts, est d'ores et déjà tenu d'appliquer et de respecter cette loi, et aussi de s'assurer que ces transferts sont assortis de la condition d'offrir des services de santé dans les deux langues dans les communautés de langue officielle en situation minoritaire?
M. Pierre Foucher: À la lumière de la décision rendue la semaine dernière par la Cour fédérale, je vous répondrai par l'affirmative. Le domaine visé dans le cadre de cette cause était sensiblement le même, soit l'inspection des aliments. Or, cette cour a implicitement reconnu que la partie VII de la loi, qui comporte l'engagement du gouvernement fédéral de faire la promotion des minorités, peut conduire à des ordonnances judiciaires; elle est donc exécutoire.
Or, qu'est-ce qu'on trouve dans la partie VII? Une disposition, en particulier, selon laquelle le gouvernement fédéral s'engage à aider les provinces à mettre sur pied les services dans les deux langues. À la lumière de ce jugement, il y a donc une obligation de la part du gouvernement fédéral.
Le président: D'accord. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires à ce sujet?
M. Tory Colvin: Le débat visant à déterminer si c'est exécutoire ou déclaratoire dure depuis bientôt 10 ans. C'est l'objet du projet de loi du sénateur Gauthier. On a toujours soutenu que c'était exécutoire. Cela précise tout simplement qu'on va faire telle chose, mais ce n'est pas forcément la position de...
Le président: À ce chapitre, je précise que la question a été posée--par M. Simard, je crois-- au ministre Dion la dernière ou une des deux dernières fois où il est venu témoigner. Le ministre a alors répondu--et je m'en veux de ne pas avoir réagi assez vite à ce moment-là--que ces programmes et ces transferts relevaient presque toujours de compétences partagées. C'est pourquoi, à son avis, le gouvernement du Canada ne peut--et l'on pourra vérifier les transcriptions pour s'assurer que je rends exactement ses propos--imposer cela en vertu de la partie VII de la loi.
Quelqu'un aurait pu à cette occasion penser à la question suivante, qui est valable. Je vais donc vous la poser. Je peux comprendre que le gouvernement du Canada hésite à affirmer que la partie VII de la Loi sur les langues officielles est exécutoire lorsqu'on est en présence de compétences partagées. Cependant, lorsqu'il s'agit de programmes fédéraux ou de toute compétence strictement fédérale, la loi sera-t-elle exécutoire? Est-ce ce à quoi on peut s'attendre?
À (1020)
M. Pierre Foucher: Oui, la loi serait exécutoire dans le cas de programmes exclusivement fédéraux. Il reste que la difficulté, comme toujours, vient du fait que la santé est un domaine qui relève des provinces.
Le président: Je reprends ma question. Est-ce qu'un programme de transfert tel que le Transfert canadien en matière de santé et de programmes sociaux est un programme fédéral ou un programme partagé?
M. Pierre Foucher: Oui.
Le président: Oui quoi?
M. Pierre Foucher: C'est un programme fédéral partagé.
Le président: Ce serait les deux et la loi ne serait donc pas exécutoire.
M. Pierre Foucher: Eh bien, il faudrait une interprétation judiciaire. Le débat continue, comme l'a dit M. Colvin.
Le président: Voici une autre question. Supposons qu'une personne anglophone part de l'Ouest canadien et se rend dans la péninsule acadienne ou quelque part au Québec, qu'elle a besoin de services de santé et se présente à l'institution publique, mais n'a pas accès à des services en anglais alors que la Loi canadienne sur la santé lui garantit un accès. Peut-on dire à ce moment-là que ses droits sont brimés, qu'il s'agisse des droits qui lui sont reconnus par la Loi canadienne sur la santé ou par la Charte des droits et libertés?
Mme Martha Jackman: Votre question est très intéressante, à mon avis, parce que la discussion a surtout porté jusqu'ici sur l'accès de la communauté locale aux services. Il est très, très intéressant que vous demandiez ce qui se passe quand on vient d'ailleurs. En ce qui a trait aux lois provinciales en matière de minorités linguistiques, je crois qu'il y a une différence. Mais évidemment, du point de vue de la Charte et de la Loi canadienne sur la santé, le contenu est le même, qu'on vienne d'ailleurs ou qu'on soit résident. Donc, l'article 7 ou 15 de la Charte garantit l'accès aux soins de santé.
Le problème est que la Loi canadienne sur la santé ne définit pas bien la notion d'accessibilité et que ce n'est pas appliqué. Oui, c'est le cas en principe, mais quand j'arrive dans un milieu unilingue où l'on parle l'autre langue officielle et que je n'ai pas un service médical convenable, je ne peux avoir recours au mécanisme de plainte de la Loi canadienne sur la santé parce que ce mécanisme est inexistant. C'est une entente fédérale-provinciale qui, pour l'instant, ne prévoit pas de mécanisme de mise en application individuel.
Mon collègue Sujit Choudhry de l'Université de Toronto prétend que selon le modèle de l'affaire Finlay, qui avait trait au Régime d'assistance publique du Canada, un particulier pourrait se présenter devant les tribunaux pour essayer de faire appliquer la loi. Mais il faudrait quand même mener une lutte assez importante pour convaincre les tribunaux d'accepter une telle plainte.
Le président: Alors...
Mme Martha Jackman: Pour résumer, je dirai que pour la charte, ça va; il n'y a aucun inconvénient. Si j'ai raison de dire que la Charte, dans son article 7 ou son article 15, enchâsse un droit à l'accès aux services de santé dans sa langue, il n'y a aucun inconvénient. Mais si on doit se fier à la législation provinciale en matière de droits linguistiques ou à la Loi canadienne sur la santé, c'est beaucoup moins évident, selon moi.
Le président: Est-ce que d'autres personnes voudraient commenter sur cette notion? Est-ce que mes droits d'être servi par le régime public de soins de santé sont restreints à ma province ou à mon lieu de naissance ou de résidence, ou s'ils sont transférables n'importe où au Canada? Est-ce que ce sont des droits régionaux, locaux ou nationaux?
À (1025)
M. Pierre Foucher: Si l'accessibilité comprend un aspect linguistique, ce sont des droits nationaux. Si l'accessibilité ne comprend pas d'aspect linguistique, ce sont, pour l'instant, des droits provinciaux. Le gouvernement fédéral ne peut agir que par l'entremise de la Loi sur les langues officielles et par celle de son pouvoir de dépenser, en aidant les provinces à fournir des services. Quant aux provinces elles-mêmes, les seules qui ont des obligations sont, comme je l'ai dit, l'Ontario, le Québec et le Nouveau-Brunswick, qui se sont créé des obligations dans leurs lois. La seule province qui a une obligation constitutionnelle est le Nouveau-Brunswick.
Le président: Est-ce que d'autres collègues veulent poser des questions?
Monsieur Sauvageau.
M. Benoît Sauvageau: J'aurai une question à poser, si vous me le permettez, mais après le départ des témoins. Je veux vous en aviser tout de suite.
Le président: D'accord. Monsieur Foucher, madame Jackman, monsieur Colvin, monsieur Rémillard, voulez-vous ajouter quelque chose?
M. Rénald Rémillard: Je veux tout simplement réitérer que le fait de savoir si l'accessibilité comporte maintenant une composante linguistique devrait être débattu. Ce serait certainement une chose à ajouter avec beaucoup de précision. Les tribunaux hésitent toujours à aller plus loi, surtout quand il s'agit de la question linguistique.
Le président: Je vous remercie.
Monsieur Foucher, c'est à vous.
M. Pierre Foucher: Je voulais simplement, en terminant, féliciter le comité de son travail et lui souhaiter bonne chance.
Le président: Ce travail n'est pas facile et est d'une complexité extrême. Il touche à plusieurs questions: les juridictions fédérales-provinciales, la Constitution, la Charte des droits, les buts visés par la Loi sur les langues officielles et ainsi de suite. Nous ferons de notre mieux pour tirer certaines conclusions, mais j'ai l'impression que nous risquons de devoir nous contenter de poser des questions qui nous mèneront à d'autres réflexions et qui amèneront nos gouvernements—cela ne se limite pas au gouvernement du Canada—à d'autres réflexions.
Nous allons donc continuer. Comme je vous le disais, nous recevons demain après-midi une autre personne à 16 h 30, mais à 15 h 30, il y aura séance à huis clos sur nos travaux futurs.
Madame Jackman, vous avez demandé la parole. Elle est à vous.
Mme Martha Jackman: J'aimerais abonder dans le même sens. Je trouve absolument formidable ce que vous faites. On constate trop souvent une nette division entre les droits linguistiques et les autres droits, surtout au niveau social. Les minorités linguistiques au Canada sont souvent économiquement défavorisées. Les droits linguistiques tels qu'on les interprète de façon traditionnelle, le droit à un avocat, le droit à l'éducation dans sa langue ne sont pas les plus gros problèmes pour les minorités. Je suis ravie de voir que vous abordez ce domaine. Merci.
Le président: Il s'agit en effet un peu d'une aventure. Il s'agit d'un travail de longue haleine. Je crois que nous allons profiter énormément de vos propos. Nous allons les relire, les digérer et ils vont certes se retrouver d'une façon ou d'une autre dans notre rapport, qui est prévu pour la fin octobre. Je cède la parole à M. Sauvageau.
M. Benoît Sauvageau: Ma question est la suivante. Le 10 juin dernier, le ministre de la Défense nous a affirmé que le 9 juin, c'est-à-dire la veille de son témoignage, il avait eu le temps, avec son personnel, de préparer un plan stratégique pour la Défense nationale. À votre demande, monsieur le président, il devait transmettre au greffier du comité et aux membres du comité ce plan stratégique, qui était prêt depuis le 9 juin. J'aimerais savoir si on en a obtenu copie.
Le président: Non.
À (1030)
M. Benoît Sauvageau: Merci beaucoup.
Le président: Passons à un autre sujet. J'ai reçu une lettre de M. Jean-Pierre Kingsley, le directeur général des élections, datée le 12 septembre dernier. Vous vous souviendrez qu'il avait demandé qu'ait lieu une rencontre le 17 septembre, c'est-à-dire demain, pour étudier la question du rapport entre la Loi sur les langues officielles et les élections, le redécoupage de la carte électorale, etc. On sait que ce débat fait rage dans certains coins du pays. J'ai trouvé regrettable qu'on ait prévu tenir cette rencontre demain de 14 heures à 17 heures étant donné que certains de nos collègues ont des fonctions formelles en Chambre durant la période des questions et ce au même moment. Cette lettre du 12 septembre confirme donc que la rencontre se prolongera effectivement de 17 heures à 19 heures pour accommoder nos collègues. Nous étions au moins trois, Mme Thibeault, M. Godin et moi-même, à avoir signifié notre intérêt à y participer. Nous pourrons donc continuer entre 17 heures et 19 heures demain. Monsieur Godin, vous avez la parole.
M. Yvon Godin: Monsieur le président, je tiens à souligner qu'il est regrettable que cela ait lieu demain pendant la période de questions, d'autant plus que le gouvernement dépose demain son projet de loi visant à changer la date du mois d'août pour une autre au mois d'avril. J'ai certainement l'intention d'intervenir lors du débat sur ce projet de loi car il va empêcher, quant à moi, la cour de se prononcer. Il faudrait être à deux endroits en même temps. Il sera difficile d'être ici, parce que le débat va se terminer vers 17 h 30. Serait-il possible que notre rencontre se tienne de 18 heures à 20 heures?
Le président: Monsieur Godin, je ne peux rien confirmer parce qu'il ne nous appartient pas d'établir les heures des rencontres organisées par le directeur général des élections. Nous avons, par contre, toute liberté de...
M. Yvon Godin: La présidence peut faire une suggestion.
Le président: Oui. J'en avais déjà fait une et nous avons obtenu deux heures de plus. De plus, rien n'empêche le comité d'inviter qui que ce soit.
Sur ce, je vous remercie encore une fois d'avoir été présents aujourd'hui. Cela a été très utile. Bonne journée.
La séance est levée.