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Les Débats constituent le rapport intégral — transcrit, révisé et corrigé — de ce qui est dit à la Chambre. Les Journaux sont le compte rendu officiel des décisions et autres travaux de la Chambre. Le Feuilleton et Feuilleton des avis comprend toutes les questions qui peuvent être abordées au cours d’un jour de séance, en plus des avis pour les affaires à venir.

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37e LÉGISLATURE, 2e SESSION

HANSARD RÉVISÉ • NUMÉRO 048

TABLE DES MATIÈRES

Le mercredi 29 janvier 2003




1400
V         Le Président
V DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS
V     La réception du nouvel an de la communauté libanaise
V         M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.)
V     La Médaille du jubilé de la reine
V         M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne)
V     L'Année internationale de l'eau douce
V         Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.)

1405
V     Le programme de stages Peter-Gzowski
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V     Samuel Clark
V         M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.)
V     Le député de LaSalle—Émard
V         M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne)
V     L'industrie cinématographique
V         L'hon. Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.)
V     Lafarge Canada
V         M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ)

1410
V     L'Ordre du Canada
V         Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.)
V     Brian Baker
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne)
V     L'alphabétisation
V         M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.)
V     Les affaires étrangères
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V     Les pilotes du Saint-Laurent
V         M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ)

1415
V     Le développement économique
V         Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.)
V     Les normes nationales sur l'eau potable
V         M. John Herron (Fundy—Royal, PC)
V     Rapport du commissaire à la protection de la vie privée
V         Le Président
V QUESTIONS ORALES
V     L'Irak
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)

1420
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Michel Gauthier (Roberval, BQ)

1425
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Michel Gauthier (Roberval, BQ)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)

1430
V         Le Président
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V         Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.)
V         Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)

1435
V     La Société canadienne des postes
V         M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Alliance canadienne)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V         M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Alliance canadienne)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V     La taxe sur l'essence
V         M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.)
V         M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ)
V         L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.)
V     L'éthique
V         M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne)
V         L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.)

1440
V         M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne)
V         L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.)
V     L'aide extérieure
V         M. John Harvard (Charleswood—St. James—Assiniboia, Lib.)
V         L'hon. Susan Whelan (ministre de la Coopération internationale, Lib.)
V     L'environnement
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         Le Président
V         L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.)
V         Le Président
V     Les sans-abri
V         Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD)
V         L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.)

1445
V     L'Irak
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V     Le développement des ressources humaines
V         M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne)
V         L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.)
V         M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne)
V         L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.)
V     La défence nationale
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V         Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ)

1450
V         L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.)
V     La santé
V         Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne)
V         L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.)
V         Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne)
V         L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.)
V     L'utilisation du français dans les institutions internationales
V         M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.)
V         L'hon. Denis Paradis (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique) (Francophonie), Lib.)
V     L'industrie
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)
V         L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.)

1455
V     Les infrastructures routières
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.)
V     Les espèces en péril
V         M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.)
V         L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.)
V     Le registre des armes à feu
V         M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne)
V         M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne)
V     Le Supplément de revenu garanti
V         M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ)
V         L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.)

1500
V     La Loi électorale du Canada
V         M. Dick Proctor (Palliser, NPD)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Le Président
V     Le bois d'oeuvre résineux
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)
V         L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.)
V     Présence à la tribune
V         Le Président
V         Le Président
V     Question de privilège
V         La fonction publique
V         M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Ind.)

1505

1510
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Le Président
V         M. Jim Pankiw

1515
V         Le Président
V     Recours au Règlement
V         Les questions inscrites au Feuilleton
V         M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne)
V         Le Président

1520
V     Les travaux de la chambre
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Le Président
V         Adoption de la motion
V AFFAIRES COURANTES
V     Réponse du gouvernement à des pétitions
V         M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V     La Loi électorale du Canada
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Le financement politique
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)

1525
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)

1530
V         M. Michel Gauthier (Roberval, BQ)

1535
V         M. Dick Proctor (Palliser, NPD)

1540
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)

1545
V     Délégations interparlementaires
V         M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.)
V     La Loi sur l'eau potable saine au Canada
V         M. John Herron (Fundy—Royal, PC)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi
V     Le Code criminel
V         M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Alliance canadienne)
V         Adoption des motions; première lecture et impression du projet de loi

1550
V         Le vice-président
V         M. Peter Adams
V     Les comités de la Chambre
V         Procédure et affaires de la Chambre
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V         Adoption de la motion
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V         Le vice-président
V         Adoption de la motion
V     Pétitions
V         La pornographie juvénile
V         M. John Herron (Fundy—Royal, PC)
V         Postes Canada
V         M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Alliance canadienne)
V         La pornographie juvénile
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne)
V         La recherche sur les cellules souches
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)
V         Postes Canada
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)

1555
V         La recherche sur les cellules souches
V         M. Peter Adams (Peterborough, Lib.)
V     Questions au Feuilleton
V         M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         Le vice-président
V     Demandes de documents
V         M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PCC)
V         M. Geoff Regan
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         Le vice-président
V         M. Geoff Regan
V         Le très hon. Joe Clark
V         Le vice-président
V         M. Geoff Regan

1600
V         Le vice-président
V         Le vice-président
V INITIATIVES MINISTÉRIELLES
V     LOI SUR LA PROCRÉATION ASSISTÉE
V         M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne)

1605
V         M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne)

1610
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne)

1615
V         Le vice-président
V         M. Myron Thompson
V         Le vice-président
V         M. Rob Merrifield
V         Le vice-président
V         M. David Anderson
V         Le vice-président
V         M. Myron Thompson

1620
V         M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne)

1625

1630
V         Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne)

1635
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Mme Diane Ablonczy

1640
V         Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne)

1645

1650
V     Le rapport du Commissaire à la protection de la vie privée
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V     La Loi sur la procréation assistée
V         M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne)

1655

1700
V         M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne)

1705
V         Mme Elsie Wayne (Saint John, PC)

1710

1715
V         M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.)

1720

1730
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Louis Plamondon
V         Le président suppléant (M. Bélair)

1735
V         M. Myron Thompson
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Louis Plamondon

1740
V         Mme Marlene Catterall
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Adoption de la motion no 71
V         Mme Bonnie Brown
V         Le président suppléant (M. Bélair)

1745
V         Mme Bonnie Brown
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Mme Marlene Catterall
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Jason Kenney
V         Mme Judy Wasylycia-Leis
V         Le président suppléant (M. Bélair)

1750
V         Mme Marlene Catterall
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Paul Szabo
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Chuck Strahl
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Rob Merrifield

1755
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V INITIATIVES PARLEMENTAIRES
V     La Loi sur l'assurance-emploi
V         M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD)

1800
V         Mme Diane St-Jacques (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.)

1805

1810
V         M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne)

1815

1820
V         Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ)

1825
V         M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC)

1830

1835
V         Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.)

1840
V         Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD)
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)

1845

1850
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)

1855
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         Mme Sue Barnes
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V Initiatives ministérielles
V     L'IRAK
V         (La Chambre se forme en comité plénier pour étudier l'article 13 des initiatives ministérielles sous la présidence de M. Bélair)
V         L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.)
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)

1900

1905
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)

1910
V         L'hon. Bill Graham
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)
V         L'hon. Bill Graham
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)

1915
V         L'hon. Bill Graham
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         L'hon. Bill Graham

1920
V         M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne)
V         

1925

1930
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         M. Stephen Harper
V         M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD)
V         M. Stephen Harper
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)

1935
V         M. Stephen Harper
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         Le président suppléant (M. Bélair)
V         M. Stephen Harper
V         Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD)

1940
V         M. Stephen Harper
V         M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ)

1945

1950
V         L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.)
V         M. Gilles Duceppe
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)
V         M. Gilles Duceppe

1955
V         M. Gerald Keddy (South Shore, PC)
V         M. Gilles Duceppe
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)
V         M. Gilles Duceppe

2000
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         M. Gilles Duceppe
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)

2005

2010
V         Mme Elsie Wayne (Saint John, PC)
V         Le vice-président
V         Mme Alexa McDonough
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         Mme Alexa McDonough

2015
V         M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.)
V         Mme Alexa McDonough
V         M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne)

2020
V         Mme Alexa McDonough
V         Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC)

2025

2030
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)

2035
V         Le très hon. Joe Clark
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         Le très hon. Joe Clark

2040
V         L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark
V         Le président
V         M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne)
V         Le très hon. Joe Clark

2045
V         M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.)
V         Le très hon. Joe Clark
V         M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD)
V         Le très hon. Joe Clark
V         M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.)

2050

2055
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)

2100
V         M. Clifford Lincoln
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         M. Clifford Lincoln
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)

2105
V         M. Clifford Lincoln
V         M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne)
V         M. Clifford Lincoln

2110
V         Le président
V         M. Clifford Lincoln
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)

2115

2120
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)
V         M. Stockwell Day

2125
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)
V         M. Stockwell Day
V         Mme Colleen Beaumier (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.)
V         M. Stockwell Day

2130
V         M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne)
V         M. Stockwell Day
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         M. Stockwell Day
V         M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.)

2135

2140
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)

2145
V         M. David Pratt
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         M. David Pratt

2150
V         M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne)
V         M. David Pratt
V         M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ)

2155

2200

2205
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)
V         M. Claude Bachand
V         M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne)

2210
V         M. Claude Bachand
V         Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.)

2215

2220
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)
V         Mme Sue Barnes

2225
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)
V         Mme Sue Barnes
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)

2230
V         Mme Sue Barnes
V         Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne)
V         Mme Sue Barnes
V         M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne)

2235

2240
V         L'hon. Gar Knutson (secrétaire d'État (Europe centrale et orientale et Moyen-Orient), Lib.)
V         M. Leon Benoit

2245
V         Mme Colleen Beaumier (secrétaire parlementaire de la ministre du Revenu national, Lib.)
V         M. Leon Benoit
V         L'hon. Gar Knutson
V         M. Leon Benoit
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)

2250
V         M. Leon Benoit
V         Mme Colleen Beaumier (secrétaire parlementaire de la ministre du Revenu national, Lib.)

2255
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)

2300
V         Mme Colleen Beaumier
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)

2305
V         Mme Colleen Beaumier
V         M. Jason Kenney
V         Mme Colleen Beaumier
V         M. Svend Robinson
V         Mme Colleen Beaumier
V         M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD)

2310

2315
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)
V         M. Svend Robinson

2320
V         M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.)
V         M. Svend Robinson
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)

2325
V         M. Svend Robinson
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         M. Svend Robinson
V         M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.)

2330

2335
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)
V         M. Yvon Charbonneau

2340
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         M. Yvon Charbonneau

2345
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)
V         Le vice-président adjoint
V         M. Yvon Charbonneau

2350
V         M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC)

2355

2400
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)
V         M. Bill Casey
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         M. Bill Casey

2405
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         M. Bill Casey

2410
V         Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.)

2415
V         M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne)

2420
V         Mme Carolyn Parrish
V         M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD)
V         Mme Carolyn Parrish

2425
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)
V         Mme Carolyn Parrish
V         M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Alliance canadienne)

2430

2435
V         Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD)

2440
V         M. Rahim Jaffer
V         Mme Alexa McDonough

2445
V         M. Rahim Jaffer
V         M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne)
V         M. Rahim Jaffer
V         M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.)

2450

2455
V         Le vice-président adjoint
V         Le président suppléant (Mme Bakopanos)






CANADA

Débats de la Chambre des communes


VOLUME 138 
NUMÉRO 048 
2e SESSION 
37e LÉGISLATURE 

COMPTE RENDU OFFICIEL (HANSARD)

Le mercredi 29 janvier 2003

Présidence de l'honorable Peter Milliken

    La séance est ouverte à 14 heures.


Prière


[Article 31 du Règlement]

*   *   *

  +(1400)  

[Traduction]

+

    Le Président: Comme nous avons l'habitude de le faire le mercredi, nous allons maintenant chanter Ô Canada, qui sera entonné par le député de Souris—Moose Mountain.

    [Note de la rédaction: Les députés chantent l'hymne national.]


+DÉCLARATIONS DE DÉPUTÉS

[Article 31 du Règlement]

*   *   *

[Traduction]

+La réception du nouvel an de la communauté libanaise

+-

    M. Shawn Murphy (Hillsborough, Lib.): Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui pour féliciter tous les organisateurs de la réception que tient annuellement la communauté libanaise de Charlottetown afin de souligner le nouvel an. La réception a eu lieu à l'hôtel Delta Prince Edward, le samedi 11 janvier.

    Les spécialités culinaires, la musique et la danse libanaises étaient à l'honneur, et les invités ont pu entendre l'excellente allocution sur la culture libanaise qu'a prononcée M. Abdallah Obeid, directeur des études arabes à l'Université d'Ottawa.

    Cette réception a réuni quelque 500 personnes, dont le lieutenant-gouverneur et le premier ministre de l'Île-du-Prince-Édouard ainsi que le maire de la municipalité de Charlottetown.

    La communauté libanaise est fière de sa longue et riche histoire dans la région de Charlottetown, où elle est implantée depuis plus d'un siècle. Les premiers immigrants libanais, ainsi que leurs descendants, ont apporté une grande contribution à la culture de la collectivité de Charlottetown et à l'économie de l'Île-du-Prince-Édouard.

    Au nom de la Chambre, je félicite cette communauté et les organisateurs de la réception du nouvel an.

*   *   *

+-La Médaille du jubilé de la reine

+-

    M. Grant McNally (Dewdney—Alouette, Alliance canadienne): Monsieur le Président, avant les vacances des Fêtes de fin d'année, j'ai eu l'honneur de présenter à plusieurs résidants des plus méritants de Dewdney—Alouette la Médaille du jubilé de la reine, en reconnaissance de leurs réalisations remarquables et de la contribution qu'ils apportent à nos collectivités et à notre pays.

    Ce sont: Jack Freeman, Wesley Johnson, la mairesse Sylvia Pranger et Ella Pretty, de la région d'Agassiz et de Harrison Hot Springs; Linnea Battel, Terry Gidda, Bill Harris, Victor Hollister, Eleanor Lobb et Catherine Marcellus, de la région de Mission; de Lorraine Bates, Crystal Boser, Tom Cameron, Lola Chapman, Carl Durksen, Bernice Gehring, le chef Peter James, Sheila Nickols, Mike Suddaby et Bonnie Telep, de la région de Maple Ridge et de Pitt Meadows.

    Au nom de la population de Dewdney—Alouette, je remercie chacun d'eux pour les heures innombrables qu'ils ont consacrées afin que nos collectivités soient un meilleur endroit où vivre.

*   *   *

[Français]

+-L'Année internationale de l'eau douce

+-

    Mme Yolande Thibeault (Saint-Lambert, Lib.): Monsieur le Président, le 12 décembre 2002, l'Assemblée générale des Nations Unies a proclamé 2003, l'Année internationale de l'eau douce.

    Cette décision va dans le même sens que les engagements pris par la communauté internationale, incluant le Canada, au Sommet du millénaire en 2000, puis en 2002 au Sommet mondial pour le développement durable à Johannesburg. Les dirigeants des pays du monde ont alors convenu de réduire de moitié, au plus tard en 2015, la proportion d'individus qui n'ont pas accès à l'eau potable et aux services d'assainissement de base, ou qui n'ont pas les moyens de s'en procurer.

    Si nous n'atteignons pas ces objectifs, les maladies mortelles continueront de faire des ravages et de se propager, l'environnement planétaire continuera de se dégrader et la sécurité alimentaire sera mise en péril avec les risques d'instabilité que tout cela peut entraîner. Bien sûr, les problèmes liés à l'eau sont plus aigus dans le monde en développement, mais les pays développés ne sont pas pour autant à l'abri.

    À l'occasion de l'Année internationale de l'eau douce, je suis convaincue que le Canada fera sa part pour protéger les précieuses ressources en eau douce de la planète, indispensables à notre survie et au développement durable au XXIe siècle.

*   *   *

  +-(1405)  

[Traduction]

+-Le programme de stages Peter-Gzowski

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux que la chaîne radiophonique de Radio-Canada ait honoré la mémoire de Peter Gzowski en établissant un programme de stages qui portera son nom. Peter était chancelier de l'Université Trent.

    Les stages offriront de la formation en radiodiffusion aux étudiants de dernière année de l'Université Trent à Peterborough, de l'Université Simon Fraser en Colombie-Britannique, de l'Université Memorial à St. John's et de l'Université McGill à Montréal.

    Peter aurait été très heureux qu'on lui rende hommage de cette manière. Ces stages ouvriront la porte de la profession à des jeunes gens. Les étudiants que le programme intéresse devraient communiquer avec les universités que je viens de mentionner ou consulter le site Web à l'adresse suivante: www.cbc.ca/gzowskiinternships.

*   *   *

+-Samuel Clark

+-

    M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Monsieur le Président, jeudi dernier, au nom du ministre des Anciens combattants, j'ai eu le privilège de présenter la mention élogieuse du ministre à un ancien combattant très éminent de la Deuxième guerre mondiale, M. Samuel Ervin Clark, qui réside à Woodstock au Nouveau-Brunswick.

    M. Clark a servi outre-mer avec la 1re Division du Canada. Outre le service exclusif à son pays, M. Clark a choisi de continuer à soutenir la cause des anciens combattants et de leur communauté depuis son retour de la guerre et pendant ses années dorées.

    M. Clark est un remarquable exemple d'une personne qui a consacré presque toute sa vie au bien-être des autres. Bien qu'aveugle au sens de la loi, M. Clark a dirigé le Woodstock Veterans Home pendant 39 ans sans être rémunéré. Son dévouement à ses confrères anciens combattants et à leurs familles témoigne de l'engagement de toute une vie envers des camarades dans le besoin et de sa remarquable générosité d'esprit.

    M. Clark mérite au plus haut point cet honneur. Les efforts constants qu'il a déployés pour aider les anciens combattants servent d'exemple à tous les Canadiens. Je suis très heureux de saluer son dévouement au service de son pays et de sa communauté.

*   *   *

[Français]

+-Le député de LaSalle—Émard

+-

    M. James Moore (Port Moody—Coquitlam—Port Coquitlam, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le député de LaSalle—Émard se considère comme le prochain premier ministre. Il a voulu s'impliquer dans le débat sur le projet de loi sur le financement des partis politiques.

    Cependant, il a dénoncé le Bloc québécois en anglais au National Post tout en appuyant sa légitimité en français sur les ondes de CKAC à Montréal. Pour moi, pour les Canadiens et pour les Québécois, un message bilingue est le même message en anglais et en français, et non pas de deux messages opposés, comme ceux qu'on a entendus de la part de l'ex-ministre des Finances.

[Traduction]

    Comme le député de LaSalle—Émard se voit déjà premier ministre du Canada, il veut parler du projet de loi sur le financement des campagnes électorales. Soulignons qu'il dénonce la légitimité politique du Bloc québécois, en anglais, dans le quotidien National Post tandis qu'il l'appuie sur les ondes de la station de radio francophone CKAC.

    À mon avis, un véritable message bilingue doit être le même dans le deux langues officielles. Le leadership national exige des messages nationaux uniformes dans les deux langues officielles, comme cette déclaration, non les entourloupettes linguistiques auxquelles se livre l'ancien ministre des Finances libéral.

*   *   *

+-L'industrie cinématographique

+-

    L'hon. Hedy Fry (Vancouver-Centre, Lib.): Monsieur le Président, l'an dernier, l'industrie cinématographique canadienne a produit des recettes de plus de 5 milliards de dollars et a fourni 134 000 emplois. En Colombie-Britannique uniquement, les retombées économiques de cette industrie se chiffrent à 2,8 milliards de dollars et à 25 000 emplois, ce qui place la Colombie-Britannique au troisième rang, après Los Angeles et New York, au chapitre de la production.

    Aujourd'hui, cette industrie traverse une crise qui laisse sans emploi la moitié des membres du syndicat du film en Colombie-Britannique. Quelle est la cause de cette situation? Essentiellement, la perte du report d'impôt sur les investissements pour les films étrangers et un remplacement inadéquat du crédit d'impôt. Dans le même temps, l'Australie et l'Irlande ont offert des incitatifs fiscaux améliorés que même le faible dollar canadien ne peut concurrencer. L'industrie cherche activement des solutions pratiques dont le ministre des Finances a été saisi.

    J'exhorte le gouvernement fédéral à mettre en place les incitatifs fiscaux à long terme qui renforceront la compétitivité du Canada dans cette industrie internationale fort mouvementée mais néanmoins très importante.

*   *   *

[Français]

+-Lafarge Canada

+-

    M. Robert Lanctôt (Châteauguay, BQ): Monsieur le Président, je tiens à féliciter les dirigeants de l'entreprise Lafarge Canada, dans ma circonscription. Celle-ci a remporté, conjointement avec la ville de Longueuil, le Prix Innovation en Procédé lors de la 12e édition des Prix Technologies de l'Association de recherche industrielle du Québec.

    Lafarge Canada a réussi à mettre au point un nouveau procédé, soit l'utilisation des cendres produites à partir de boues des eaux usées pour les intégrer dans un procédé industriel de fabrication de poudre de ciment.

    Grâce à cette innovation, plus de 10 000 tonnes de cendres pourront dorénavant être recyclées, permettant ainsi des économies de 150 000 $ pour la durée de ce projet de trois ans.

    La volonté innovatrice de Lafarge, située à Saint-Constant, résultera en une solution non polluante pour les résidus de cendres dus à l'incinération de boues des usines d'épuration des eaux usées.

    Nous croyons que cette nouvelle technologie québécoise rayonnera bientôt sur la planète.

*   *   *

  +-(1410)  

[Traduction]

+-L'Ordre du Canada

+-

    Mme Nancy Karetak-Lindell (Nunavut, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais féliciter les quatre Nunavummiuts qui viennent d'être décorés de l'Ordre du Canada.

    Zacharias Kunuk, d'Igloolik, obtient cet honneur pour le travail exceptionnel qu'il a accompli dans la préservation de la culture et des traditions inuites et la diffusion de celles-ci dans le monde. Son film Atanarjuat a remporté un succès international.

    Tagak Curley, de Rankin Inlet, le président fondateur d'Inuit Tapirisat du Canada, qui s'appelle maintenant Inuit Tapiriit Kanatami, et négociateur de la revendication territoriale du Nunavut, est décoré pour les efforts soutenus qu'il déploie pour le développement politique et économique du Nord.

    Helen Maksagak, de Cambridge Bay, est décorée pour son travail communautaire. En sa qualité de commissaire des Territoires du Nord-Ouest, puis du Nunavut, Helen exerce ses fonctions officielles avec grâce et dignité.

    Elisapee Ootova, de Pond Inlet, a rédigé un dictionnaire d'inuktitut et corédigé une encyclopédie des connaissances traditionnelles des Inuits.

    Ils ont tous les quatre fait leur part pour l'avènement d'un monde meilleur et ils sont des modèles pour nous tous.

*   *   *

+-Brian Baker

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'amorcer l'année en rendant hommage à un vrai héros de ma circonscription, celle de Wild Rose. Brian Michael Baker a été décoré de la Médaille de la bravoure par la gouverneure générale le 9 décembre 2002, pour son acte courageux du 4 novembre 2000. Ce jour-là, il a été frappé par une voiture en escortant une femme vers son véhicule en panne durant une violente tempête de neige à Crossfield, en Alberta.

    Quand la dépanneuse est arrivée sur les lieux pour enlever la voiture de la femme du terre-plein, M. Baker s'est porté volontaire pour escorter celle-ci de son véhicule d'urgence garé sur le côté de l'autoroute à quatre voix vers la voiture abandonnée de la femme. La visibilité étant amoindrie par le blizzard, il craignait pour la sécurité de la femme et lui a offert son bras.

    Ils étaient parvenus au milieu de la route lorsqu'une voiture, sortant brusquement du blizzard, a foncé sur eux à une vitesse excessive, compte tenu des conditions routières. Sans hésitation et sans songer à sa propre sécurité, M. Baker a poussé la femme hors de danger. Une fraction de seconde plus tard, il a été heurté de plein fouet par la voiture et projeté plusieurs mètres plus loin. En raison de ses vaillants efforts, M. Baker a subi de multiples blessures graves.

*   *   *

[Français]

+-L'alphabétisation

+-

    M. Claude Duplain (Portneuf, Lib.): Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je souligne aujourd'hui la participation du Secrétariat national à l'alphabétisation de Développement des ressources humaines Canada dans la mise en oeuvre de trois projets dans le très beau comté de Charlevoix.

    À Baie-Saint-Paul, le Service de formation en alphabétisation de Charlevoix recevra 20 000 $ pour développer une trousse d'information en intervention sociale pour le personnel oeuvrant auprès des personnes apprenantes souffrant de problèmes psychosociaux.

    À Forestville, l'organisme Plaisir de lire recevra 18 000 $ afin d'entreprendre une campagne de sensibilisation à l'alphabétisation dans la Côte-Nord.

    Finalement, à Baie-Comeau, la Maison Alpha ABC Côte-Nord recevra 9 518 $ pour produire un bulletin scolaire audio pour les parents peu alphabétisés.

    Ces trois exemples témoignent de la volonté du gouvernement canadien de donner à tous nos concitoyens les outils pour développer pleinement leurs capacités.

*   *   *

[Traduction]

+-Les affaires étrangères

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le Président, hier soir, comme beaucoup de Canadiens, j'ai regardé avec horreur George Bush déclarer clairement son intention de faire la guerre aux Irakiens. En même temps, il a annoncé que les États-Unis allaient de l'avant avec un dangereux nouveau système de défense antimissile dans le cadre d'une initiative de défense stratégique.

    Aujourd'hui, nous avons appris que le gouvernement libéral envoie des fonctionnaires aux États-Unis cette semaine pour vérifier le rôle que le Canada pourrait jouer dans ce dangereux programme. Les libéraux vont-ils vraiment laisser George Bush installer des armes nucléaires sur le territoire canadien dans le cadre de ce dangereux programme?

    Il est temps que le gouvernement libéral prenne enfin position sur ces graves menaces qui pèsent sur la paix mondiale. Le ministre libéral des Affaires étrangères rencontre demain le secrétaire d'État américain Colin Powell. Je l'exhorte à lui préciser clairement de la part des Canadiens que le Canada ne participera en aucun cas à une guerre contre le peuple irakien et que notre pays n'aura rien à voir avec le système américain de défense antimissile. Il n'y aura pas de marchés ni de sites d'installation de missiles.

    Enfin, les députés devraient pouvoir tenir non pas un débat, mais un vote sur cette question fondamentale.

*   *   *

[Français]

+-Les pilotes du Saint-Laurent

+-

    M. Michel Guimond (Beauport—Montmorency—Côte-de-Beaupré—Île-d'Orléans, BQ): Monsieur le Président, aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à des professionnels de la mer, soit les pilotes du Saint-Laurent.

    Le rôle joué par les pilotes du Saint-Laurent est d'une irréfutable importance. Grâce à leur maîtrise des particularités du fleuve Saint-Laurent, plusieurs catastrophes environnementales, économiques et sociales sont évitées.

    Les ancêtres des pilotes du Saint-Laurent ont exploré plus d'une baie et ce, souvent à leurs dépens. Les eaux restreintes de notre fleuve où les navires sont soumis à des contraintes et les facteurs naturels variables, nécessitent incontestablement la présence de ces professionnels de la navigation.

    Enfin reconnus officiellement par la Commission de lieux et monuments historiques du Canada, nos pilotes ont désormais une plaque en leur mémoire au Musée de la mer au phare de Pointe-au-Père, dans le Bas-Saint-Laurent.

    Le Bloc québécois se joint à moi afin d'exprimer, au nom de toutes les Québécoises et de tous les Québécois, notre plus grande reconnaissance et gratitude pour l'excellence du travail accompli par nos pilotes du Saint-Laurent. Que de milles marins parcourus depuis Abraham Martin en 1634!

*   *   *

  +-(1415)  

+-Le développement économique

+-

    Mme Diane St-Jacques (Shefford, Lib.): Monsieur le Président, plus d'une centaine de maires, d'élus municipaux et de responsables du développement économique des Cantons-de-l'Est et de la Montérégie sont à Ottawa aujourd'hui, afin de participer à un séminaire organisé par mon collègue le député de Brome—Missisquoi.

    Ils participent à des séances d'information sur des sujets liés aux programmes gouvernementaux. Je tiens à les remercier d'avoir répondu en aussi grand nombre à cette invitation.

    Leur présence confirme leur préoccupation et leur intérêt à développer de nouveaux outils et à créer des opportunités pour leur ville ou leur région.

    L'information qu'ils recueillent aujourd'hui pourra certainement servir à des entreprises et à des organismes de plusieurs municipalités.

    En terminant, je tiens à les saluer, à saluer les maires et les conseillers du comté de Shefford ainsi que ceux de mes collègues des comtés voisins. Je vous souhaite une bonne journée et je vous remercie pour votre appui et votre excellente collaboration.

*   *   *

[Traduction]

+-Les normes nationales sur l'eau potable

+-

    M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, le Canada est fondamentalement le seul pays industrialisé à ne pas avoir de normes nationales sur l'eau potable. Deux années se sont écoulées depuis que la majorité des députés à la Chambre ont appuyé une motion du Parti progressiste-conservateur visant à garantir que le Canada ait des normes nationales sur l'eau potable qui seraient inscrites dans une loi sur l'eau salubre.

    Deux années ont passé depuis que le gouvernement libéral a promis d'agir pour appliquer des normes en la matière. Aujourd'hui, je vais présenter un projet de loi d'initiative parlementaire tendant à établir des normes nationales pour assurer une eau potable saine au Canada. Dans une lettre qu'elle m'a envoyée en septembre, la ministre de la Santé déclarait que la responsabilité en matière d'eau potable n'incombait pas uniquement au gouvernement fédéral.

    C'est vrai, mais l'Association canadienne des eaux potables et usées croit fermement, à l'instar des Canadiens, que le gouvernement fédéral joue un rôle important et essentiel dans la préservation d'une eau potable saine dans tout le pays. Même la ministre de la Santé doit le croire également.

    Les compétences provinciales et territoriales doivent être reconnues et c'est ce qu'on fait dans ce projet de loi d'initiative parlementaire. Nous devons avoir des normes pour une eau potable saine qui seront inscrites dans la loi et exécutoires. Faisons en sorte que ce projet de loi soit un catalyseur qui nous rappelle à tous...

*   *   *

+-Rapport du commissaire à la protection de la vie privée

+-

    Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît. J'ai l'honneur de déposer le rapport 2001-2002 du commissaire à la protection de la vie privée.

[Français]

    Ce rapport est réputé renvoyé en permanence au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.


+-QUESTIONS ORALES

[Questions orales]

*   *   *

[Traduction]

+-L'Irak

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, en 1998, le premier ministre a fait la déclaration suivante:

     Mais ne vous y trompez pas, le bilan de Saddam montre qu'il ne respectera pas les solutions diplomatiques tant et aussi longtemps qu'elles ne seront pas assorties d'une menace d'intervention ou d'une intervention. Le moindre signe de faiblesse ou d'hésitation de notre part sera interprété comme une incitation [...] Le Canada ne peut pas ne pas prendre position dans un moment pareil [...] [si des mesures étaient prises] le Canada serait du nombre.

    Le premier ministre est-il toujours de cet avis?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Oui, monsieur le Président, et c'est pourquoi nous avons réclamé dès le début une résolution très claire au Conseil de sécurité. C'est de là que vient la résolution 1441. Il est très clair que, si Saddam Hussein ne respecte pas les règles établies par le Conseil de sécurité, il devra subir de graves conséquences pour cette erreur de jugement.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je vais revenir à la citation du premier ministre. Il a dit ceci:

    Le moindre signe de faiblesse ou d'hésitation de notre part sera interprété comme une incitation.

    Au cours des dernières semaines, le gouvernement et le premier ministre lui-même n'ont cessé de tergiverser sur la position à adopter. Le premier ministre a déjà dit ceci:

    Le Canada ne peut pas ne pas prendre position dans un moment pareil [...] [si des mesures étaient prises] le Canada serait du nombre.

    Que font exactement le gouvernement et le premier ministre pour montrer clairement que le Canada est déterminé à appuyer activement ses alliés?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous travaillons depuis longtemps à nous assurer que les Nations Unies envoient un message clair à Saddam Hussein. Nous avons travaillé pour obtenir une résolution afin que tous les pays du monde unissent leurs voix pour dire à Saddam Hussein qu'il doit désarmer.

    L'objectif est de désarmer Saddam Hussein. C'est ce que nous lui demandons tous de faire d'une même voix par l'entremise des Nations Unies. S'il ne se conforme pas à cette demande, il devra payer le prix.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, j'aimerais poser une question plus précise.

    L'Australie et la Grande-Bretagne ont toutes deux déclaré que Saddam Hussein violait de façon flagrante la résolution 1441. De plus, il devient de plus en plus clair que Saddam fait entrave au travail que les inspecteurs de l'ONU doivent effectuer conformément à la résolution, qui précise que le non-respect entraînera de graves conséquences.

    Le premier ministre croit-il aujourd'hui que Saddam Hussein se conforme à la résolution 1441 ou qu'il ne s'y conforme pas?

  +-(1420)  

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, il y a deux éléments qu'il est important de se rappeler. Le président des États-Unis a dit hier que, mercredi prochain, le 5 février, M. Powell présentera des preuves au Conseil de sécurité. Nous attendons de voir quelles sont ces preuves. Si les Américains ont vraiment des preuves, tant mieux. Ce sera bon que les gens le sachent. Il y a aussi M. Blix, qui présentera un autre rapport le 14 février.

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Voilà encore une autre non-réponse, monsieur le Président.

    Les forces alliées ont déclaré avec raison et en se fondant sur des preuves solides qu'elles ne croyaient pas que Saddam Hussein se conformait à la résolution des Nations Unies. La coalition multilatérale est déterminée à accroître la pression exercée sur Saddam Hussein pour le forcer à respecter les Nations Unies. Les pays de la coalition déploient des forces militaires dans la région. La Grande-Bretagne, l'Australie, la République tchèque, les États-Unis et d'autres estiment que le déploiement préalable de troupes est important pour amener Saddam à se conformer.

    Pourquoi le premier ministre n'est-il pas d'accord avec nos alliés?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Parce que, monsieur le Président, nous avons une politique très claire. Nous avons dit que nous allions suivre le processus établi par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Nous avons été les premiers à réclamer un tel processus, et nous le suivons à la lettre. Les prochaines étapes du processus seront le témoignage de M. Powell la semaine prochaine et le deuxième rapport de M. Blix, et nous préciserons notre position une fois ces deux étapes franchies.

[Français]

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il n'a pas répondu à ma question. Les forces alliées, comme la Grande-Bretagne, l'Australie, la Tchécoslovaquie et d'autres, soutiennent qu'elles ne croient pas que Saddam Hussein respecte le processus de l'ONU. Cette coalition multilatérale de pays est déterminée à intensifier la pression sur Saddam Hussein afin de le forcer à respecter l'ONU et, peut-être, à éviter une guerre.

    Pourquoi le premier ministre n'est-il pas en accord avec nos alliés?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est parce que nous croyons que l'unité du Conseil de sécurité est vitale. Nous voyons que le processus fonctionne.

    Je suis très content que le président des États-Unis ait dit qu'il y avait des preuves matérielles et qu'il allait les déposer la semaine prochaine au Conseil de sécurité. C'est l'endroit où il doit faire la preuve. Ensuite, M. Blix fera son rapport. D'ici le 14 février, nous saurons à quoi nous en tenir. C'est la position que nous avons préconisée dès l'été dernier et nous la suivons à la lettre.

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, dans son discours, hier soir, sur l'état de la nation, le président Bush a souligné que lorsque viendrait le temps d'attaquer l'Irak, et je le cite: «la détermination finale des États-Unis ne dépendra pas des décisions des autres nations.»

    Est-ce que le premier ministre peut nous dire s'il est, lui aussi, prêt à aller en guerre contre l'Irak, peu importe ce que décidera le Conseil de sécurité des Nations Unies?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, nous avons dit depuis le début que le processus devait se faire devant le Conseil de sécurité et en respect de la résolution du Conseil de sécurité.

    Nous attendons de voir ce que dira le Conseil de sécurité à la suite des témoignages de M. Powell et de M. Blix, soit les 5 et 14 février prochain.

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le Président, le premier ministre feint d'ignorer la situation. La France et l'Allemagne ont toutes deux dit que ça prendrait une deuxième résolution, qu'il peut y avoir un droit de veto.

    Le premier ministre vient de nous dire que l'unité du Conseil de sécurité est vitale. Si c'est si vital que cela, peut-il nous dire que s'il n'y a pas unanimité au Conseil de sécurité, si le Conseil de sécurité ne permet pas une intervention en Irak, il sera aux côtés des États-Unis en se moquant du reste de l'humanité? La population a le droit de savoir quelle est la position du Canada.

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, c'est très clair. Nous attendons la conclusion du Conseil de sécurité. On ne conclut pas, on ne prend pas de position hypothétique.

    Nous avons demandé un processus. Nous voulons que le processus soit suivi par tout le monde et lorsque le processus sera complet, nous verrons ce que dira le Conseil de sécurité et nous agirons librement, comme un pays indépendant.

+-

    M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, de toute évidence, le président des États-Unis considère qu'il a toutes les preuves nécessaires en main pour lancer une offensive contre l'Irak et il n'entend pas s'empêcher d'agir à cause du Conseil de sécurité de l'ONU. C'est très clairement ce qui transpirait de sa déclaration d'hier.

    Le premier ministre du Canada ne comprend-il pas que par son attitude, en refusant d'être plus clair sur la position canadienne, il contribue à affaiblir le rôle du Conseil de sécurité des Nations Unies, dernier rempart dont nous disposons pour peut-être éviter une guerre avec l'Irak?

  +-(1425)  

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, en demandant à tout le monde de suivre le processus du Conseil de sécurité, nous aidons le Conseil de sécurité. Si tout le monde prend des positions différentes, on se trouve à affaiblir le Conseil de sécurité.

+-

    M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, il y a deux attitudes actuellement, face à la question de l'Irak: il y a ceux qui considèrent que la guerre et la paix, c'est quelque chose de tellement important qu'on ne peut pas laisser cela entre les mains d'une seule nation, il faut le laisser entre les mains des Nations Unies; il y en a d'autres qui pensent que les États-Unis peuvent faire ce qu'ils veulent.

    En évitant de prendre une position franche et claire en faveur d'une deuxième résolution du Conseil de sécurité, le premier ministre ne réalise-t-il pas qu'il se place dans la catégorie de ceux qui laissent le soin aux Américains de décider, ce qui ne renforce pas les Nations Unies?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, pour la dixième fois, je vais répéter que notre politique est le respect du processus des Nations Unies et que nous attendons les deux rapports qui doivent être présentés les 5 et 14 février au Conseil de sécurité. Le Conseil de sécurité prendra une décision et ensuite nous prendrons la nôtre. On ne peut pas faire l'inverse; il faut suivre le processus.

[Traduction]

+-

    M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, j'ai une question à poser au premier ministre.

    Hier soir, le président des États-Unis a dit très clairement que son pays avait l'intention d'intervenir en Irak, avec ou sans l'approbation de l'ONU.

    Le premier ministre convient-il avec le président Bush que les Américains ont le droit de constituer une coalition de pays disposés à intervenir avec ou sans l'approbation de l'ONU? Peut-il nous donner l'assurance que, si les Américains agissent sans l'approbation de l'ONU, nous ne serons pas au nombre de ces pays?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, je ferai remarquer que les députés du NPD ne devraient pas participer très sérieusement au débat, car ils ont déjà dit que, même si l'ONU autorise une intervention, ils ne se rallieront pas. Ils ne devraient donc pas participer. Ils sont déjà sur la touche, mais nous estimons pour notre part que le problème est très sérieux. Nous souhaitons que tous les pays soient solidaires. Nous voulons que Saddam Hussein sache que les Nations Unies exigent une fois de plus qu'il désarme. S'il refuse, il devra subir de très lourdes conséquences.

+-

    M. Bill Blaikie (Winnipeg—Transcona, NPD): Monsieur le Président, au moins, nous sommes prêts à répondre à des questions difficiles, même si le premier ministre n'aime pas nos réponses. On ne peut pas en dire autant de lui.

    Je répète ma question. Le premier ministre est-il d'accord avec le président Bush pour dire que celui-ci a le droit de partir en guerre contre l'Irak sans l'approbation de l'ONU? Étant donné son respect pour le processus, je poserai une autre question: dira-t-il à la Chambre encore une fois pourquoi il n'autorise pas ses propres députés à exprimer leur choix quant à la participation du Canada à une guerre contre l'Irak?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, notre position est très claire. Nous entendons respecter la résolution du Conseil de sécurité. Nous savons déjà que le NPD ne respectera pas la décision de l'ONU si elle ne lui convient pas. Quant à nous, nous respectons cette institution, l'ONU, qui est notre meilleure garantie contre la guerre.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, le premier ministre Tony Blair se rendra demain à Camp David pour faire part au président Bush de la position de la Grande-Bretagne sur l'Irak.

    Ma question s'adresse au premier ministre. Quand se rendra-t-il à Camp David?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, le président des États-Unis n'a pas besoin de me consulter maintenant. Il connaît la position du Canada à ce sujet depuis le mois d'août. Nous avons toujours été très clairs.

    Oui, j'ai parlé à M. Blair à plusieurs reprises. Lorsque je l'ai vu en Afrique en octobre, je lui ai dit que la meilleure solution pour lui comme pour tout le monde était d'avoir une résolution des Nations Unies...

  +-(1430)  

+-

    Le Président: Le député de Calgary-Centre a la parole.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, hier, quand j'ai demandé quelles seraient les règles d'engagement relatives aux interventions des Forces canadiennes en Irak, l'hypothétique ministre de la Défense a répondu «Qui sait?».

    Il y a 54 membres des Forces canadiennes qui participent à un programme d'échange avec la Grande-Bretagne et certains d'entre eux jouent un rôle clef dans des divisions qui ont reçu l'ordre de se rendre dans le Golfe. Le lieutenant-colonel canadien Robert Scantland a dit que ces officiers avaient reçu «l'autorisation générale» de se déployer.

    Le ministre est-il en train de nous dire qu'il n'y a pas de règles d'engagement pour ces soldats canadiens qui se trouvent dans le Golfe et qui sont prêts au combat, ou alors est-ce qu'il donnait des renseignements erronés à la Chambre hier?

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, les renseignements que j'ai donnés à la Chambre n'étaient pas du tout erronés. Le député a posé des questions sur les règles d'engagement relatives à une participation hypothétique du Canada à une guerre hypothétique. Comme il s'agit là de deux hypothèses, il n'y a pas de telles règles d'engagement.

    Les troupes canadiennes qui travaillent actuellement dans la région ont des règles d'engagement très claires et précises, mais je ne crois pas qu'il serait dans l'intérêt de la sécurité nationale que je les révèle au grand public.

+-

    Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, Saddam Hussein n'est certainement pas hypothétique, et les problèmes qu'il cause ne le sont pas non plus. Le gouvernement libéral fait l'autruche, alors qu'il devrait prendre position au sujet de Saddam Hussein, qui ne réagit que sous la menace de graves conséquences militaires.

    Si nous voulons trouver une solution pacifique, le Canada doit être proactif et contribuer à maintenir les pressions internationales pour que Saddam désarme. Il faut prendre cette position, le temps presse.

    Pourquoi le gouvernement élude-t-il sa responsabilité d'aider nos alliés à éviter la guerre?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, au contraire, nous n'avons fait qu'exhorter nos alliés à faire en sorte que nous renforcions la plus importante institution qui sera le rempart de la paix mondiale pour les générations à venir, à savoir le Conseil de sécurité des Nations Unies, que le premier ministre appuie depuis le mois d'août, moment où il s'est entretenu avec le président Bush. Notre politique n'a pas changé. De ce côté-ci de la Chambre, nous n'avons fait que prendre des mesures dont nous pouvons être fiers, soit garantir la préservation et le renforcement des institutions internationales, pour le plus grand bien du monde entier.

+-

    Mme Deborah Grey (Edmonton-Nord, Alliance canadienne): Monsieur le Président, on ne parle pas de ceux qui effectuent des visites privées et qui disent combien ils sont charmants.

    Une coalition de nations déploie déjà des troupes dans la région du golfe Persique pour presser Saddam Hussein de respecter la résolution 1441 de l'ONU. Le Canada brille par son absence. Encore une fois, le gouvernement tergiverse, alors qu'il pourrait prendre des mesures concrètes pour aider à trouver une solution pacifique.

    Je répète la question, et il nous faut une réponse: quand le gouvernement se joindra-t-il à nos alliés pour déployer des forces à l'avance afin d'éviter une guerre?

+-

    Le très hon. Jean Chrétien (premier ministre, Lib.): Monsieur le Président, hier, lorsqu'on l'a interrogé au sujet du déploiement de militaires dans le golfe Persique, le chef de l'opposition a dit qu'on traverserait le pont quand on serait rendu à la rivière.

[Français]

+-

    Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, lors du vote sur le Protocole de Kyoto, le premier ministre a affirmé qu'il s'agissait d'un vote de parti qui engageait le gouvernement. Il a fait une déclaration semblable concernant son projet de financement des partis politiques.

    Je demande au premier ministre s'il ne juge pas que la question d'envoyer des troupes au combat n'est pas aussi importante et qu'à ce titre, elle mérite le même traitement qui a été appliqué à Kyoto, c'est-à-dire un vote à la Chambre qui engage le gouvernement.

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, si je ne m'abuse, cette question a été soulevée hier par un collègue de l'honorable députée. Elle doit fort bien savoir, puisqu'elle est une députée de cette Chambre, quelles sont les modalités de débats semblables. Elles ont été établies clairement depuis longtemps. D'ailleurs, il y en aura même un ce soir et il y en aura peut-être d'autres à l'avenir, compte tenu du grand intérêt. Les modalités existent en vertu des règles parlementaires de cette Chambre.

+-

    Mme Caroline St-Hilaire (Longueuil, BQ): Monsieur le Président, le leader du gouvernement à la Chambre doit lui aussi fort bien savoir que lorsqu'ils étaient dans l'opposition, les libéraux exigeaient que l'envoi de troupes au combat soit approuvé par un vote du Parlement. Or, ces mêmes libéraux ont changé cette tradition lorsqu'ils sont arrivés au pouvoir en 1993.

    Comment le premier ministre peut-il aujourd'hui justifier cette volte-face?

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il n'y a pas de volte-face. Avant l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement, il n'y avait aucun système uniforme qui existait au sujet de débats de ce genre.

    Nous avons établi une règle. Nous l'avons respectée chaque fois. Même pendant les intersessions parlementaires, j'ai communiqué personnellement avec le leader parlementaire de son parti pour que les comités se rencontrent afin d'avoir un forum pour débattre de la question du déploiement de troupes. Nous l'avons fait chaque fois. L'honorable députée doit sans doute le savoir, sinon son leader parlementaire le sait fort bien.

*   *   *

  +-(1435)  

[Traduction]

+-La Société canadienne des postes

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Alliance canadienne): Pour la plupart des Canadiens, monsieur le Président, la Société canadienne des postes est un organisme qui vend des timbres et qui livre le courrier. Pour les entreprises de messagerie du Canada, elle joue un autre rôle. Elle est devenue un monopole aux connexions libérales qui profite de sa domination du marché pour les acculer à la faillite.

    Selon les entreprises de messagerie, le nouvel associé de la Société canadienne des postes, Intelcom, qui est dirigé par des agents de financement du Parti libéral, utilise de l'information privilégiée et des tactiques d'intimidation pour accaparer la clientèle des fournisseurs de la Société canadienne des postes.

    Le ministre responsable ordonnera-t-il une enquête sur ces tactiques contestables ou croit-il que la Société canadienne des postes a le mandat d'acculer les autres entreprises de messagerie à la faillite?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): J'ai une longueur d'avance sur le député, monsieur le Président. Lorsque la nouvelle est sortie dans les journaux, aux environs de Noël, j'ai demandé à mes collaborateurs si elle était fondée.

    En fait, il s'agit d'un concordat commercial qui a été sanctionné par le conseil d'administration de la Société canadienne des postes. Cela n'a rien de suspect. Il n'a jamais été question de nuire le moindrement aux autres entreprises. On veut simplement avoir une voie concurrentielle et suivre toutes les règles.

+-

    M. Gerry Ritz (Battlefords—Lloydminster, Alliance canadienne): Voilà, monsieur le Président, le rempart libéral.

    Ce n'est pas par hasard que la Société canadienne des postes a décidé, sans préavis, d'acquérir cette entreprise de messagerie. La société Intelcom appartenait à des agents de financement du Parti libéral associés à l'ancien ministre libéral et actuel président de la Société canadienne des postes, André Ouellet, et à l'actuel ministre de la Justice et ministre chargé du Québec.

    Le mandat de la Société canadienne des postes est-il de livrer le courrier ou d'offrir des occasions lucratives comme celle-là à des valets du Parti libéral?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, les insinuations que fait le député à la Chambre des communes risquent de salir la réputation d'une personne honorable qui a siégé pendant des années à la Chambre et qui réussit aujourd'hui à merveille à rentabiliser la Société canadienne des postes.

    Nous avons la meilleure société des postes au monde. Grâce à sa bonne gestion, son président, l'honorable André Ouellet, nous assure une excellente réputation dans le monde entier.

*   *   *

[Français]

+-La taxe sur l'essence

+-

    M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Monsieur le Président, depuis 1995, le gouvernement fédéral perçoit une taxe spéciale de 1,5¢ par litre d'essence pour, disait-il, «aider à réduire le déficit», et ce, même si le déficit annuel a été réduit à zéro depuis 1998.

    Comme son déficit annuel n'existe plus depuis 1998, est-ce que le ministre des Finances peut nous dire à quoi ont servi les 740 millions de dollars qu'il a soutirés aux automobilistes du Québec?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, nous avons obtenu une grande réussite en éliminant le déficit. De toutes façons, nous avons maintenant la capacité de réduire les impôts, non seulement pour les automobilistes, mais pour tous les contribuables canadiens. Ainsi, nous avons réduit les impôts de 100 milliards de dollars en cinq ans.

+-

    M. Mario Laframboise (Argenteuil—Papineau—Mirabel, BQ): Monsieur le Président, il n'y a rien de drôle avec les taxes. Le ministre peut essayer de justifier son geste, mais il n'est pas convaincant.

    Compte tenu que son objectif de déficit zéro a été atteint depuis 1998, le ministre des Finances serait-il prêt à examiner la suggestion du ministre des Transports du Québec qui consiste à rapatrier le produit de cette taxe aux provinces pour financer le transport en commun?

+-

    L'hon. John Manley (vice-premier ministre et ministre des Finances, Lib.): Monsieur le Président, je sais que les provinces aiment bien les points d'impôt, mais parfois, elles les oublient. Elles les aiment beaucoup parce qu'elles veulent que nous les imposions et elles, elles veulent les dépenser.

    En ce qui me concerne, le ministre des Finances du Québec a la capacité d'imposer un impôt s'il le veut.

*   *   *

[Traduction]

+-L'éthique

+-

    M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je veux m'enquérir auprès de la présidente du Conseil du Trésor des piètres normes d'éthique concernant le remboursement des frais engagés lors de déplacements.

    La ministre du Patrimoine canadien a demandé le remboursement d'environ 80 000 $ de ce qu'elle qualifie simplement d'autres dépenses, sans reçu annexé.

    Le premier ministre a défendu cette façon de faire en disant qu'elle est conforme aux lignes directrices du Conseil du Trésor. Quelles lignes directrices autorisent les ministres à se faire rembourser des dépenses sans reçu?

[Français]

+-

    L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, depuis plus de 30 ans, les ministres du gouvernement font la réclamation de leurs dépenses de la même façon. Ils doivent signer une déclaration officielle dans laquelle ils statuent quelles ont été les dépenses qu'ils ont engagées dans les voyages qu'ils ont faits, la durée du voyage, les destinations ainsi que les dépenses d'hébergement et de repas.

    Il s'agit donc d'une déclaration officielle signée par le ministre qui peut être accessible selon la Loi sur l'accès à l'information.

  +-(1440)  

[Traduction]

+-

    M. Paul Forseth (New Westminster—Coquitlam—Burnaby, Alliance canadienne): Monsieur le Président, dans un climat où l'éthique des membres du Cabinet est discutable, il est incroyable que les règles du Conseil du Trésor n'obligent pas les ministres à soumettre des reçus pour se faire rembourser des dépenses. En fait, la vérificatrice générale s'oppose elle aussi à cette pratique.

    On devrait exiger des ministres ce que l'on exige des contribuables ordinaires. C'est très simple.

    La présidente du Conseil du Trésor s'occupera-t-elle de cette faille sur le plan de l'éthique, du statut privilégié dont jouissent les ministres d'en face, et exigera-t-elle des reçus pour toutes les demandes de remboursement de dépenses?

[Français]

+-

    L'hon. Lucienne Robillard (présidente du Conseil du Trésor, Lib.): Monsieur le Président, chacun des ministres qui doit réclamer un montant pour des dépenses doit faire une déclaration officielle. C'est donc son nom, sa parole dans ce document, affirmant qu'il a engagé des dépenses concernant les voyages qu'il a faits, l'hébergement ou les repas.

    Ce document officiel, signé par le ministre, est même accessible. Il peut donc être fourni à toute personne qui en fait la demande, selon la Loi sur l'accès à l'information.

*   *   *

[Traduction]

+-L'aide extérieure

+-

    M. John Harvard (Charleswood—St. James—Assiniboia, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse à la ministre de la Coopération internationale.

    Plus de 11 millions d'Éthiopiens ont besoin d'aide humanitaire aujourd'hui, et trois millions d'autres ont besoin d'un suivi étroit. Personne ne veut assister à une répétition de la tragédie qui est survenue en 1984 lorsque la famine généralisée a causé d'immenses souffrances et fait énormément de victimes en Éthiopie.

    La ministre pourrait-elle expliquer à la Chambre comment le gouvernement du Canada, par l'entremise de l'ACDI, répond à cette situation d'urgence?

+-

    L'hon. Susan Whelan (ministre de la Coopération internationale, Lib.): Monsieur le Président, pendant mon voyage récent en Éthiopie, j'ai vu de mes propres yeux les effets de la sécheresse et j'ai pu m'entretenir avec les habitants de certaines localités qui bénéficient directement de l'aide du Canada.

    Le 16 janvier, le gouvernement du Canada a annoncé l'octroi de 40 millions de dollars supplémentaires en secours d'urgence. Les secours seront déployés en partenariat avec le Programme alimentaire mondial, la Banque de céréales vivrières du Canada et d'autres ONG, ce qui portera notre contribution totale à 47 millions de dollars depuis septembre.

    Les Canadiens font preuve de leadership pour régler le problème de la sécheresse et de la famine en Éthiopie. Nous continuerons de suivre de très près l'évolution de la situation.

*   *   *

+-L'environnement

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Monsieur le Président, plus tôt ce mois-ci, le ministre de l'Environnement a discuté avec le responsable de l'agence de protection de l'environnement des États-Unis au sujet de l'assouplissement de certaines règles de l'agence concernant 18 000 centrales thermiques alimentées au charbon, et il a dit que cela n'aurait pas de répercussions sur la qualité de l'air au Canada.

    Étant donné que 5 000 décès au Canada sont liés à la pollution atmosphérique et qu'une grande partie de l'air pollué en provenance des États-Unis atteint le sud du Canada, et en particulier la ville où j'habite, Windsor, est-ce que le ministre est vraiment sérieux? Croit-il vraiment qu'en assouplissant ces règles qui...

+-

    Le Président: Le ministre de l'Environnement a la parole.

+-

    L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, comme le député, nous sommes conscients de la grande importance de la qualité de l'air et, comme il le faisait remarquer, si nous voulons améliorer la qualité de l'air qui vient des États-Unis, nous devons collaborer avec notre voisin du Sud.

    Plus précisément, je signale au député que, dans le cadre de la phase deux du calendrier d'exécution dont l'échéance est fixée à 2018, nous nous préoccupons des changements que subit la matière particulaire contenue dans l'ozone. Nous nous préoccupons également des niveaux de mercure. Nous entendons collaborer avec les Américains pour que ces problèmes liés à des polluants précis qui tuent...

+-

    Le Président: La députée de Vancouver-Est a la parole.

*   *   *

+-Les sans-abri

+-

    Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le Président, comment se fait-il qu'après trois ans et des dépenses de 300 millions de dollars pour résoudre le problème des sans-abri, nous faisons toujours face à un désastre national et n'avons pas de logements sociaux? Comment se fait-il qu'un enfant soit né sur le ciment, au beau milieu de l'hiver, faute de maisons d'hébergement pour femmes et enfants? Comment se fait-il que les personnes qui touchent le salaire minimum vivent dans la pauvreté et le désespoir?

    Autrefois, la qualité de la vie et la dignité humaine avaient un sens dans ce pays. Pourquoi les libéraux n'y accordent-ils plus d'importance? Que répond le premier ministre aux Canadiens qui vivent encore dans le froid, qui sont sans abri et qui vivent dans la pauvreté?

+-

    L'hon. Claudette Bradshaw (ministre du Travail, Lib.): Monsieur le Président, les organismes communautaires de partout au pays s'occupent du dossier des sans-abri. Je signale que nous sommes passés des lits en refuge aux logements de transition.

    En ce qui concerne le logement, depuis les déplacements que nous avons effectués dans le cadre de l'étude de l'itinérance, le gouvernement a injecté 680 millions de dollars dans le logement. En ce moment même, les provinces utilisent cet argent. Il reste encore beaucoup à faire, mais les efforts que nous déployons en partenariat avec les gouvernements provinciaux, les municipalités et les communautés permettent d'améliorer les choses au pays.

*   *   *

  +-(1445)  

+-L'Irak

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, par suite du dépôt du rapport Blix au Conseil de sécurité des Nations Unies lundi dernier, les États-Unis ont conclu que l'Irak était en violation substantielle de la résolution 1441.

    La Grande-Bretagne et l'Australie partagent cet avis, tandis que la France et l'Allemagne soutiennent qu'il faut accorder plus de temps aux inspecteurs. Quelle est la position du Canada?

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le Président, le premier ministre a déjà répondu très clairement à cette question à la Chambre aujourd'hui.

    Nous savons que Colin Powell se présentera devant le Conseil de sécurité le 5 février. Nous savons également que M. Blix déposera un autre rapport au Conseil de sécurité le 14 février.

    J'ai eu une longue conversation avec M. Blix aujourd'hui. Nous consultons constamment nos alliés et les représentants des Nations Unies pour veiller à ce que la résolution 1441 et les processus qui y sont exposés soient observés de manière à garantir, d'une part, le désarmement de l'Irak et, d'autre part, la paix et la sécurité dans le monde.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, le ministre de la Défense nationale a affirmé hier à la Chambre qu'il serait très difficile de dire quelles seraient les règles d'engagement.

    Il a indiqué aujourd'hui que les troupes canadiennes engagées avec les Britanniques dans le golfe sont assujetties à des règles d'engagement tellement secrètes qu'il ne peut les dévoiler.

    S'agit-il de règles d'engagement établies par les Canadiens, par les Britanniques ou par les Américains? Le ministre le sait-il seulement?

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je ne comprends pas la raison d'être de cette question. Je pensais avoir été suffisamment clair à ce sujet la dernière fois.

    Ce que j'ai dit et ce que je vais répéter maintenant, c'est que pour une situation hypothétique, qui pourrait ou non survenir dans l'avenir, nous n'avons évidemment pas de règles d'engagement.

    Il existe des règles d'engagement pour les militaires canadiens à bord des navires canadiens qui sont déjà là-bas. Je ne peux pas les révéler, mais il s'agit assurément de règles canadiennes.

*   *   *

+-Le développement des ressources humaines

+-

    M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, la période de rétroactivité pour les prestations de SRG n'est pas censée dépasser onze mois.

    En août 1999, un requérant a reçu un chèque de plus de 20 000 $ pour une période excédant cinq ans. Le ministre de DRHC d'alors avait antérieurement refusé sa demande. Le tribunal de révision de la SV avait rejeté son appel et tranché en faveur du ministre.

    Quelle sorte d'autorité parlementaire factice a donc servi à justifier l'émission de ce chèque?

+-

    L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le député devrait comprendre que, dans le cas d'erreurs administratives, le ministre a le pouvoir d'effectuer des paiements rétroactifs. C'est ce qui s'est passé en l'occurrence et c'était une façon adéquate de gérer le dossier.

+-

    M. Larry Spencer (Regina—Lumsden—Lake Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, ni la ministre, ni les bureaucrates ne devraient pouvoir renverser une décision du tribunal de révision de la SV ni émettre des chèques pour des dizaines de milliers de dollars par pure fantaisie.

    Aujourd'hui, j'ai écrit à la vérificatrice générale pour lui demander de se pencher sur ce dossier. La ministre du Développement des ressources humaines pourrait-elle aussi faire enquête et expliquer à la Chambre pourquoi son ministère a enfreint les règles en émettant arbitrairement un chèque de plus de 20 000 $?

+-

    L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, je répète que le système en place comporte une disposition qui limite à un an la période de rétroactivité pour la plupart des révisions de prestations de Supplément de revenu garanti.

    Le député reconnaîtra sans doute que, lorsque des erreurs administratives se produisent, nous devons prendre des mesures appropriées à l'égard des Canadiens en cause. Cela fait partie du processus et je crois personnellement que le processus est adéquat.

*   *   *

[Français]

+-La défence nationale

+-

    Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, le ministère de la Défense a décidé de fermer le laboratoire de référence en métrologie dimensionnelle de Québec, privant ainsi la région d'une expertise et de connaissances de haut niveau. Le ministère de la Défense n'a consulté personne, sauf la députée de Louis-Hébert, qui n'a rien fait.

    Je demande au ministre de la Défense pourquoi a-t-on fermé un laboratoire qui fonctionnait très bien?

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je n'ai pas une réponse détaillée à donner à la députée à ce moment-ci, mais je trouverai une réponse et je reviendrai demain pour en faire part.

+-

    Mme Christiane Gagnon (Québec, BQ): Monsieur le Président, je demande aussi au ministre de la Défense s'il entend se comporter correctement envers la région, et va-t-il suspendre sa décision et procéder à une véritable consultation du milieu scientifique et politique de Québec qui est très préoccupé par cette question?

  +-(1450)  

+-

    L'hon. John McCallum (ministre de la Défense nationale, Lib.): Monsieur le Président, je suis conscient de l'importance de la question et de la région et je ferai de mon mieux pour avoir une réponse très rapidement.

*   *   *

[Traduction]

+-La santé

+-

    Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le gouvernement fédéral se dit seulement disposé à envisager de nouveaux financements pour trois domaines prioritaires de la santé. Or, les provinces, qui fournissent les soins de santé, ont recensé huit domaines prioritaires pour lesquels il faudrait en tout 5,4 milliards de dollars.

    Pourquoi le gouvernement est-il disposé à envisager de nouveaux financements uniquement pour certaines des priorités cernées par les provinces?

+-

    L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, j'ai rencontré, début décembre, mes homologues provinciaux et territoriaux de la Santé et nous avons cerné les principales priorités.

    Si la députée se donnait la peine de lire le projet d'accord que le gouvernement du Canada a présenté aux premiers ministres provinciaux et territoriaux, elle verrait que les huit priorités en question y figurent.

+-

    Mme Carol Skelton (Saskatoon—Rosetown—Biggar, Alliance canadienne): Monsieur le Président, les provinces réclament un financement de 5,4 milliards de dollars. La ministre ne tient pas compte des priorités recensées par les provinces.

    Le gouvernement devrait négocier des accords pour que les nouveaux fonds soient mis au service des priorités provinciales.

    Pourquoi le gouvernement n'accorde-t-il pas aux provinces le financement de leurs priorités?

+-

    L'hon. Anne McLellan (ministre de la Santé, Lib.): Monsieur le Président, je souhaite vivement que la députée m'indique, cet après-midi ou à un autre moment, à sa convenance, les priorités provinciales et territoriales dont nous n'aurions pas traité d'une façon ou d'une autre dans notre projet d'accord.

    Je le répète, je suis convaincue que les priorités dont mes collègues provinciaux et territoriaux et moi avons discuté début décembre ont été prises en compte d'une façon ou d'une autre dans notre projet d'accord.

*   *   *

[Français]

+-L'utilisation du français dans les institutions internationales

+-

    M. Bernard Patry (Pierrefonds—Dollard, Lib.): Monsieur le Président, ma question s'adresse au secrétaire d'État à la Francophonie.

    On note que l'utilisation de la langue française au sein des institutions internationales accuse un recul. Le ministre pourrait-il nous dire ce qu'il entend faire pour promouvoir l'utilisation du français dans ces mêmes institutions internationales?

+-

    L'hon. Denis Paradis (secrétaire d'État (Amérique latine et Afrique) (Francophonie), Lib.): Monsieur le Président, le Canada s'occupe activement de la promotion du français dans les organismes internationaux. Lors du Sommet de la Francophonie de Beyrouth et lors de la dernière conférence ministérielle à Lausanne, j'ai annoncé que le gouvernement du Canada allait allouer 500 000 dollars pour favoriser l'utilisation du français dans les organismes internationaux à New York et Washington, plus précisément à l'ONU et à l'Organisation des États américains.

    Nous allons solliciter très bientôt des manifestations d'intérêt de la part des firmes canadiennes à cet égard.

*   *   *

[Traduction]

+-L'industrie

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le ministre de l'Industrie devrait savoir que le marché, libre de tout contrôle politique, constitue la meilleure façon d'assurer l'accès au service Internet à large bande, ou à haute vitesse.

    Le contrôle politique d'Internet est un échec. Qu'est-ce qui fait croire au ministre que, si le secteur commercial ne peut pas offrir un service, les contribuables le peuvent?

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, l'an dernier, nous avons alloué 105 millions de dollars aux localités de notre pays en leur demandant de travailler ensemble, et avec le secteur privé, à l'élaboration de plans afin de rendre les services à large bande accessibles dans ces localités.

    Nous comprenons que la meilleure façon de procéder est de former un partenariat entre le secteur public et le secteur privé. Nous recourons à ce genre de partenariat pour mettre cet important service à la disposition des Canadiens d'un bout à l'autre du pays.

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le Président, espérons que, dans ses calculs, le ministre n'a pas appliqué les mêmes règles que pour le registre des armes à feu.

    Financer des plans de développement qui ne peuvent être mis en oeuvre est un autre exemple de gaspillage de l'argent des contribuables. De nombreuses localités ont été omises dans l'annonce de vendredi dernier. L'annonce du ministre a davantage à voir avec la politique de l'assiette au beurre qu'avec l'accès des Canadiens au service Internet.

    Au lieu de se lancer dans une autre série de dépenses inconsidérées avec l'argent des contribuables, pourquoi le gouvernement libéral n'élimine-t-il pas tout simplement l'impôt sur le capital?

+-

    L'hon. Allan Rock (ministre de l'Industrie, Lib.): Monsieur le Président, la députée n'a pas l'heure juste. Les localités rurales, la Fédération canadienne des municipalités et les petites villes de notre pays accueillent favorablement cette occasion de coopérer avec les fournisseurs de service Internet et avec les intérêts commerciaux pour rendre ces services accessibles.

    Ce que nous faisons, c'est que nous permettons à ces petites localités de faire des propositions qui leur donneront accès au commerce électronique à l'intention de leurs PME ainsi qu' aux services de santé en ligne et à l'enseignement à distance. La députée devrait comprendre que c'est une manière d'ouvrir des débouchés dans les régions rurales du Canada.

*   *   *

  +-(1455)  

[Français]

+-Les infrastructures routières

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, un des dossiers qui préoccupe tous les élus de la région du Haut-Richelieu et de Brome—Missisquoi est celui de l'autoroute 35.

    Le ministre du Commerce international et l'ex-ministre des Finances, lors de leur visite à Saint-Jean-sur-Richelieu, ont tous deux affirmé que l'argent était disponible par l'entremise du Programme sur les infrastructures frontalières. Le gouvernement du Québec, quant à lui, est prêt à financer 50 p. 100 du projet.

    Qu'attend alors le ministre responsable des infrastructures pour signer le protocole avec Québec, mettre l'argent sur la table et respecter les engagements de son gouvernement?

+-

    L'hon. David Collenette (ministre des Transports, Lib.): Monsieur le Président, malheureusement, le Québec n'a pas encore signé l'entente pour les ponts et les réseaux routiers de la province, comme les autres provinces l'ont fait. Nous sommes prêts à signer l'entente et à considérer n'importe quelle route pour ce qui est d'un investissement.

*   *   *

[Traduction]

+-Les espèces en péril

+-

    M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Monsieur le Président, la Loi sur les espèces en péril a reçu la sanction royale en décembre.

    Le ministre de l'Environnement pourrait-il informer la Chambre de la date d'entrée en vigueur de cette loi ainsi que de ce que fait le gouvernement pour appuyer les activités d'intendance ainsi que la protection des espèces en péril et de leur habitat essentiel?

+-

    L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le Président, je peux informer le député que nous nous attendons à ce que la loi soit proclamée en juin. Je le remercie de l'appui qu'il accorde à cette mesure législative.

    En attendant, nous allons collaborer avec les provinces, les territoires et les propriétaires fonciers dans le cadre des programmes d'intendance prescrits par la loi et avec l'argent que le ministre des Finances a prévu dans les derniers budgets pour les activités d'intendance.

    Enfin, si des séances d'information supplémentaires sont nécessaires, nous en organiserons avant le mois de juin.

*   *   *

+-Le registre des armes à feu

+-

    M. Garry Breitkreuz (Yorkton—Melville, Alliance canadienne): Monsieur le Président, on continue de tenir le Parlement dans le noir au sujet du coût du registre des armes à feu. Peut-être le Comité des comptes publics arrivera-t-il enfin à apporter à ce sujet des éclaircissements qui se font depuis trop longtemps attendre.

    Le président du Comité des comptes publics peut-il fournir au Parlement et aux Canadiens un rapport d'étape concernant son examen prochain du fiasco fédéral des armes à feu?

+-

    M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je remercie le député de son excellente question.

    Le Comité des comptes publics entreprendra le 24 février ses audiences concernant le Programme canadien de contrôle des armes à feu. Nous convoquerons tout d'abord les témoins suivants: la vérificatrice générale, le ministre de la Justice, le sous-ministre de la Justice, la présidente du Conseil du Trésor ainsi que le PDG actuel et l'ancien PDG du Programme canadien de contrôle des armes à feu.

    Je vais être clair. Le Parlement a la responsabilité d'analyser le plus en profondeur possible ce scandale d'un milliard de dollars, au nom de tous les contribuables canadiens, afin de déterminer ce qui a pu se produire pour que l'on perde à ce point la maîtrise du programme.

*   *   *

[Français]

+-Le Supplément de revenu garanti

+-

    M. Marcel Gagnon (Champlain, BQ): Monsieur le Président, dans le dossier des personnes âgées que l'on a privées du Supplément de revenu garanti, deux fonctionnaires du ministère du Développement des ressources humaines du Canada sont venus nous dire en comité que si les personnes âgées ont réussi à se passer du Supplément de revenu garanti, cela prouve que cette aide de dernier recours ne leur était pas nécessaire.

    Je voudrais savoir de la ministre du Développement des ressources humaines si elle peut dire que les propos de ces deux fonctionnaires reflètent la position officielle de son ministère.

[Traduction]

+-

    L'hon. Jane Stewart (ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, le ministère et le gouvernement ont adopté la position officielle suivante: le supplément de revenu annuel garanti est un complément très important des programmes de revenu de retraite au Canada.

    Le supplément de revenu garanti contribue à répondre aux besoins immédiats des aînés. En offrant ce complément aux autres programmes de revenu de retraite, nous savons que nous offrons aux aînés canadiens un des meilleurs systèmes de soutien au monde.

*   *   *

  +-(1500)  

+-La Loi électorale du Canada

+-

    M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, nous avons déjà appris de la bouche de la ministre du Patrimoine que la mise en oeuvre de l'Accord de Kyoto a été retardée en raison de l'influence du grand capital. Nous apprenons maintenant dans les journaux que des députés libéraux, y compris des ministres, empilent de l'argent dans des comptes en fiducie secrets.

    Dans quelle mesure le gouvernement peut-il nous donner l'assurance que ces planques politiques seront démantelées et refusées en vertu de modifications à la Loi électorale du Canada?

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le député vient de violer l'accord auquel il avait consenti plus tôt aujourd'hui de participer à un exposé à huis clos sur le projet de loi, et il étale maintenant ces choses à la Chambre avant que le projet de loi soit présenté.

    Des voix: C'est honteux.

+-

    Le Président: À l'ordre s'il vous plaît. Nous sommes passés à la question suivante. Le député de Cumberland—Colchester a la parole.

*   *   *

+-Le bois d'oeuvre résineux

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le Président, le 23 décembre, le ministre du Commerce international a émis un communiqué dans lequel il annonçait que le gouvernement du Canada consentait une aide financière de 15 millions de dollars aux associations canadiennes du bois d'oeuvre résineux.

    Le communiqué sous-entend que cette aide ira aux associations dans toutes les régions du Canada. Y a-t-il des régions canadiennes qui ne recevront aucun cent de cet argent?

+-

    L'hon. Pierre Pettigrew (ministre du Commerce international, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de réitérer très clairement que nous appuyons l'industrie du bois d'oeuvre résineux partout au Canada parce que nous traversons une période difficile compte tenu des mesures punitives prises par les Américains.

    Comme le Canada atlantique n'est pas touché par les droits compensateurs le Bureau du bois de sciage des Maritimes a demandé à ne pas recevoir l'aide du gouvernement du Canada, afin d'éviter d'être visé par les représailles américaines. C'est à la demande expresse de cet organisme qu'aucune aide ne lui est versée. Néanmoins, nous appuyons l'industrie dans le reste du Canada parce que le gouvernement estime que le bois d'oeuvre résineux est un priorité absolue.

*   *   *

+-Présence à la tribune

+-

    Le Président: Je tiens à signaler aux députés la présence à la tribune de l'honorable Heather Forsythe, solliciteur général de l'Alberta.

    Des voix: Bravo!

+-

    Le Président: La présidence a été avisée d'une question de privilège du député de Saskatoon—Humboldt.

*   *   *

+-Question de privilège

+La fonction publique

[Privilège]
+-

    M. Jim Pankiw (Saskatoon—Humboldt, Ind.): Monsieur le Président, conformément à l'article 48 du Règlement, et conformément au préavis que j'ai donné, je soulève la question de privilège. L'incident en cause, qui a eu pour effet de me gêner dans mon travail de parlementaire, s'est produit durant le congé parlementaire et a conduit à un outrage à la Chambre des communes.

    À la suite de ce congé, je soumets cette question le plus tôt possible, étant donné que la Chambre n'a repris ses travaux que cette semaine.

    Dans le cadre de l'étude de l'accusation d'outrage à la Chambre que je porte à votre attention, il est essentiel, monsieur le Président, que vous-même et tous les députés compreniez que l'outrage, contrairement aux privilèges, ne peut être énuméré ou classé par catégories.

    C'est justement sur ce point que je vous demande de vous reporter à la décision que madame le Président Sauvé a rendue le 29 octobre 1980 lorsqu'elle a déclaré:

[...] bien que nos privilèges soient définis, la violation de privilège n'est pas circonscrite.

    Elle a également ajouté:

    On aura beau inventé de nouvelles façons de s'immiscer dans nos délibérations, la Chambre pourra toujours conclure, dans les cas pertinents, qu'il y a eu violation de privilège.

    Ce sentiment a été dûment réitéré par les Présidents Fraser et Parent dans leurs décisions rendues respectivement le 10 octobre 1989 et le 9 octobre 1997. Ces décisions portaient sur les violations de privilège là où il n'y avait aucun précédent et pour des délibérations qui n'avaient pas été envisagées.

    Ces décisions sont importantes, car l'outrage que je mets en lumière est semblable en ce sens qu'il est dans une certaine mesure sans précédent.

    Dans l'édition de 2000 de l'ouvrage de Marleau et Montpetit, La procédure et les usages de la Chambre des communes, on peut lire à la page 50 que:

    Le «privilège parlementaire» s'applique plutôt aux droits et immunités jugés nécessaires pour permettre à la Chambre des communes en tant qu'institution, et à ses députés en tant que représentants de l'électorat, d'exercer leurs fonctions. Il désigne également les pouvoirs dont la Chambre est investie pour se protéger ainsi que ses députés et ses procédures d'une ingérence indue et s'acquitter efficacement de ses principales fonctions--enquêter, débattre et légiférer.

    C'est relativement à l'exercice de mes droits d'enquêter en tant que parlementaire que j'ai été indûment gêné par certaines personnes au sein de divers ministères.

    Plus particulièrement, le 27 décembre 2002 et du 2 janvier au 6 janvier 2003, j'ai soumis des demandes de renseignements aux fonctionnaires au sujet de l'effet discriminatoire que le programme de bilinguisme du gouvernement avait sur les anglophones cherchant à obtenir un emploi et une promotion dans la fonction publique fédérale. Dans les deux cas, mon compte de courrier électronique parlementaire a servi à faire part des délibérations de la Chambre aux fonctionnaires.

    Les renseignements fournis aux fonctionnaires le 27 décembre 2002 étaient directement tirés du hansard et incluaient mon intervention et celle du secrétaire parlementaire de la présidente du Conseil du Trésor lors de l'étude de la motion d'ajournement du 4 décembre 2002. Ces renseignements ont été fournis à titre de service public, pour fournir de l'information sur une politique gouvernementale ayant fait l'objet d'un débat au Parlement.

    Du 3 au 6 janvier 2003, et en l'absence de tout effort de la part du gouvernement fédéral ou des syndicats pour consulter les fonctionnaires, j'ai consulté et sondé ces derniers relativement à la mesure dans laquelle le bilinguisme discriminatoire a eu un impact sur leur carrière et a nui à celle-ci.

    Je veux encore une fois mentionner mon renvoi à l'ouvrage de Marleau et Montpetit et à ce que ces derniers estiment être un privilège parlementaire ayant pour but de protéger les députés contre toute ingérence indue dans l'exercice de leurs fonctions.

    Je fais aussi allusion à une décision rendue le 20 février 1984 par le Président Francis suite à une question de privilège et portant que les efforts faits par un fonctionnaire pour empêcher la coopération d'un député constituent une présomption d'atteinte aux privilèges.

    En ce qui a trait au courriel du 27 décembre 2002, un employé de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, Peter Paton, a ordonné aux employés du ministère le 4 janvier 2003 de ne pas répondre et de supprimer ce courriel.

    Le 16 janvier 2003, le secrétaire du Conseil du Trésor et contrôleur général du Canada, Jim Judd, a cherché à nuire à la confidentialité du sondage envoyé par le truchement de mon compte parlementaire entre le 3 et le 6 janvier 2003 en invitant les fonctionnaires à ne pas y répondre.

    Le 17 janvier 2003, un fonctionnaire de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, Rob Wright, a fait la même chose en avisant les employés du ministère que ma garantie de confidentialité du sondage ne pouvait être assurée, ce qui constitue une tentative d'intimidation.

    Le 14 janvier 2003, Cathy McLaughlin, directrice adjointe du Programme de la diversité et des langues officielles à Développement des ressources humaines Canada, a demandé au personnel du ministère de ne pas répondre au questionnaire.

  +-(1505)  

    Le même jour, une directrice à DRHC, Shirley Kimery, a indiqué aux employés qu'ils ne devaient pas répondre au questionnaire. Chacune de ces interventions injustifiées porte atteinte à mon privilège à titre de député en ce qui a trait à ma liberté d'expression, à mon droit de faire enquête et d'utiliser le courrier électronique dans le prolongement des délibérations du Parlement. Qui plus est, monsieur le Président, même si vous jugez que les agissements de ces personnes ne constituaient pas une violation d'un privilège en particulier, il s'agit néamoins d'un outrage au Parlement.

    À cet égard, l'ouvrage de Marleau et Montpetit dit ceci, à la page 52 de l'édition de l'an 2000:

    L'outrage peut être un acte ou une omission. Il n'est pas nécessaire de faire réellement obstacle au travail de la Chambre ou d'un député; la tendance à produire un tel résultat suffit.

    Au fil des années, les députés ont signalé à la Chambre des tentatives faites en vue de faire obstacle à leur travail ou de les empêcher de s'acquitter de leurs responsabilités, mais il n'existe aucune règle stricte au sujet de la façon dont ces obstacles se produisent.

    C'est ce qu'ont fait valoir madame le Président Sauvé dans sa décision du 29 octobre 1980, et Marleau et Montpetit dans leur ouvrage à la page 52. De toute évidence, quand on analyse ces cas, on ne doit pas chercher à établir si l'obstruction était de nature physique, mais si l'acte a porté atteinte au privilège parlementaire d'un député, l'a empêché de s'acquitter de ses obligations ou a porté atteinte à l'autorité ou à la dignité de la Chambre.

    Dans la même veine, je me reporte à la page 115 de la XXIe édition de l'ouvrage d'Erskine May, qui traite de l'outrage. L'auteur souligne qu'il n'est pas possible de dresser la liste de tous les actes qui peuvent être considérés comme un outrage. Par conséquent, les incidents de ce genre doivent être évalués à la lumière du droit des députés d'exercer leurs fonctions sans ingérence indue.

    La dernière chose que je voudrais dire au sujet de cette question concerne la façon dont l'outrage s'est produit. La question est très importante car, comme Joseph Maingot l'indique à la page 94 de son ouvrage intitulé Proceedings in Parliament:

     On ne doit pas perdre de vue que les «délibérations du Parlement» ne sont pas le seul critère, ou le seul critère auquel la Chambre des communes peut se référer pour déterminer si elle a compétence dans un domaine donné. L'outrage au Parlement survient rarement pendant des «délibérations du Parlement», mais vient plutôt de l'extérieur de la Chambre...

    Cet aspect était au coeur même de la question, au sujet de laquelle le Président Francis a rendu la décision à laquelle je faisais référence. Dans cette décision du 20 février 1984, qui a créé un précédent, le Président Francis a statué que le refus de collaborer d'un fonctionnaire aurait indubitablement pour effet d'entraver le député dans l'exercice de ses fonctions.

    En guise de résumé et de conclusion, je crois que les actions des personnes qui ont fait obstacle à mes efforts en vue de m'informer et de communiquer avec des fonctionnaires constituent bel et bien un outrage au Parlement.

    Monsieur le Président, je crois que, après examen, vous constaterez que j'ai démontré que les actes des personnes nommées ont eu pour effet d'entraver l'exercice de mes fonctions parlementaires. Je rappelle encore une fois ce que dit Maingot:

    L'outrage au Parlement survient rarement pendant des délibérations du Parlement, mais vient plutôt de l'extérieur de la Chambre...

    Aussi, monsieur le Président, si vous jugez qu'il y a eu outrage à la Chambre, je serai disposé à présenter la motion appropriée.

  +-(1510)  

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je voudrais répliquer brièvement à cette question de privilège. Celle-ci comporte trois ou quatre éléments, et je serai très bref.

    Le député a parlé de liberté de parole. Je ne pense pas qu'il ait dit avoir fait l'objet de menaces s'il prenait la parole à la Chambre ou lors d'une séance de comité parlementaire. Il aurait été fondé à le faire, mais il ne l'a pas fait. Il n'a pas même pas fait d'allégations à cet égard.

    En ce qui concerne ce que le député a appelé son enquête, c'est une manière tout à fait incorrecte d'interpréter cet aspect du privilège. Cela a trait au fait que les comités parlementaires convoquent des gens pour qu'ils relatent les faits tels qu'ils sont, pour qu'ils disent la vérité, etc. Personne n'a jamais dit qu'un député avait le droit de déranger quelque 200 000 fonctionnaires, peu importe le nombre, en leur adressant des courriels. Je ne crois pas qu'on puisse dire que cela justifie ce que le député a fait.

    En ce qui concerne la confidentialité, peut-on traiter de confidentiel un courriel adressé à 200 000 personnes? C'est ce que prétend le député, que son droit à la confidentialité a été violé.

    Enfin, si les hauts fonctionnaires ont donné ordre à leurs employés de ne pas répondre à ces courriels importuns et insultants, qu'ils fussent adressés par un député ou n'importe qui d'autre, tant mieux parce que cela dérangeait leurs employés dans leur travail.

+-

    Le Président: Je tiens à remercier le député de Saskatoon—Humboldt d'avoir soulevé la question de privilège ainsi que le leader parlementaire du gouvernement pour sa contribution. Je vais prendre l'affaire en délibéré et je ferai part de ma décision à la Chambre en temps opportun.

    Toutefois, pendant que j'y suis, j'aimerais faire quelques brefs commentaires au sujet du contexte des questions abordées par le député de Saskatoon—Humboldt.

    Comme le savent les députés, je prends très au sérieux ma responsabilité de gardien des droits et des privilèges de chacun des députés de la Chambre ainsi que de la Chambre en tant qu'institution.

    En ce qui concerne les communications électroniques du député au cours des récents jours, il a été porté à mon attention que l'utilisation que fait le député des services de la Chambre, notamment du courrier électronique, a créé des difficultés sans précédent.

    En bref, le volume des messages et la taille de ces derniers sont tels qu'ils entravent non seulement le fonctionnement de l'ensemble du système ici à la Chambre, mais également le fonctionnement des systèmes en place dans les divers ministères et organismes du gouvernement. L'effet sur divers destinataires extérieurs a été si toxique qu'une alerte a été émise à l'échelle du gouvernement au sujet de ces envois qui sont jugés comme du pollupostage dangereux et répréhensible en raison de leur effet négatif sur le fonctionnement des systèmes qui les reçoivent.

    Par conséquent, en tant que votre Président, j'ai mis dans la balance les droits du député et ceux de tous les autres députés et je suis parvenu à la conclusion suivante: en attendant qu'on adopte des lignes directrices spécifiques pour réglementer la diffusion massive de messages électroniques, comme nous réglementons la diffusion massive de messages par la poste, j'ai donné ordre aux fonctionnaires de la Chambre de contacter les députés dont les activités entravent le bon fonctionnement des systèmes de la cité parlementaire et d'ailleurs pour leur demander de mettre fin à ces activités destructrices.

    Des solutions de rechange seront proposées dans la mesure du possible. Si un député n'obtempère pas, j'ai donné des instructions aux fonctionnaires pour qu'ils suspendent le compte de ce dernier.C'est-à-dire qu'il n'aura plus de courrier électronique.

    Je tiens à souligner que ces mesures ne seront prises qu'en cas d'abus des services fournis aux députés, abus qui entravent l'utilisation continue et sans entrave de ces services par tous les députés.

    Je remercie la Chambre de son attention.

+-

    M. Jim Pankiw: Monsieur le Président, à ce propos, je voudrais vous informer que, lorsque j'ai appris que les systèmes du gouvernement, qui n'avaient pas été modernisés depuis 1984, n'étaient pas en mesure d'acheminer ces courriels, j'ai demandé à mon adjoint de collaborer avec les préposés à la technologie de l'information. Ils ont élaboré un système permettant d'envoyer ces courriels sans causer d'embouteillage, qui n'était nullement mon intention.

    Je suis certainement disposé à...

  +-(1515)  

+-

    Le Président: Je remercie le député et, comme je l'ai dit, je continuerai de surveiller la situation.

*   *   *

+-Recours au Règlement

+-Les questions inscrites au Feuilleton

[Recours au Règlement]
+-

    M. John Williams (St. Albert, Alliance canadienne): Monsieur le Président, le 14 novembre 2002, j'ai inscrit au Feuilleton la question no 47 au sujet des «Pertes de fonds publics attribuables à une infraction, un acte illégal ou un accident», concernant le ministère de la Défense nationale.

    Comme vous le savez, monsieur le Président, de nouvelles règles régissent la disposition des questions au Feuilleton lorsque le gouvernement n'y répond pas dans le délai de 45 jours. L'alinéa 39(5)b) du Règlement dit:

    Dans le cas où une question reste sans réponse à l'expiration de ce délai de quarante-cinq jours, cette absence de réponse de la part du gouvernement est considérée comme renvoyée d'office au comité permanent concerné. Dans les cinq jours de séance suivants ce renvoi, le président du comité convoque une réunion pour se pencher sur l'absence de réponse de la part du gouvernement.

    J'ai reçu une réponse du ministère de la Défense nationale, mais il n'a déposé qu'une réponse partielle, le 27 janvier 2003, à la question que j'ai posée. À la fin de sa réponse, il a déclaré:

    Cependant, le ministère de la Défense nationale a obtenu des renseignements représentant 93 000 $ des 220 000 $ évoqués dans la question no 47 (voir le tableau ci-joint) et fournira les autres renseignements dès que possible.

    Monsieur le Président, j'attire votre attention sur ce dernier passage «et fournira les autres renseignements dès que possible».

    Il s'agit d'une réponse, mais ce n'est pas une réponse à la question que j'ai posée. En principe, on peut dire que nous avons reçu une réponse du ministère de la Défense nationale, mais celui-ci admet ouvertement qu'il n'a pas répondu à la question et qu'il fournira l'information « dès que possible », pour reprendre ses propres mots. Aucune échéance n'est prévue dans la réponse. Nous ne savons pas s'il est question de jours, de mois ou d'années. Le ministère a donc décidé qu'il peut répondre au Parlement en fonction de son échéancier à lui, et non pas en fonction de celui du Parlement.

    C'est le monde à l'envers. Les réponses aux questions sérieuses posées par le Parlement devraient être déposées à la Chambre dans les 45 jours, et non pas selon un échéancier à la discrétion du ministre qui n'a même pas donné une idée du délai.

    L'information demandée dans la question no 47, le 14 novembre 2002, était autrefois publiée de manière détaillée dans les Comptes publics du Canada. Le gouvernement a depuis décidé de grouper ces montants et d'en faire rapport sous forme de montant global. Cela porte atteinte à l'ouverture et à la transparence exigées dans une démocratie, ouverture et transparence qui seront encore plus minées si le ministère peut fournir l'information à sa guise, lorsqu'il le juge opportun.

    Puisque l'alinéa 39(5)b) du Règlement est une nouvelle disposition, je ne voudrais pas que nous commencions du mauvais pied; je vous demande donc, monsieur le Président, de renvoyer la question au Comité permanent des comptes publics ou au Comité permanent de la défense nationale et des anciens combattants, étant donné que cette question est restée sans réponse.

+-

    Le Président: Je remercie le député de St. Albert de son recours au Règlement. Évidemment, j'ai de l'empathie pour le député qui estime ne pas avoir obtenu de réponse satisfaisante. Je dois dire qu'il est difficile pour le Président d'intervenir et de déterminer si une question est adéquate. Habituellement, la présidence a tendance à ne pas se mêler de cela. J'en reparlerai plus tard au député. Je n'arrive pas à trouver la citation que je cherche à ce sujet. J'en reparlerai au député au moment opportun.

*   *   *

  +-(1520)  

+-Les travaux de la chambre

[Travaux de la Chambre]
+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, il y a eu des consultations entre tous les partis représentés à la Chambre, et je crois que vous trouverez qu'il y a consentement unanime pour que je propose cet après-midi la motion suivante:

    Que, aux fins du débat conformément à l'article 53.1 du Règlement, et ce, aujourd'hui seulement, l'expression «quatre heures après le début du débat» prévue au sous-alinéa 3)d) du dit article se lisent «six heures après le début du débat».

    Autrement dit, après nous être consultés, nous avons convenu de prolonger ce soir le débat de deux heures afin de permettre à un plus grand nombre de députés d'y participer.

+-

    Le Président: Le leader parlementaire du gouvernement a-t-il le consentement unanime de la Chambre pour proposer la motion?

    Des voix: D'accord.

    Le Président: La Chambre a entendu la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)


+-AFFAIRES COURANTES

[Affaires courantes]

*   *   *

[Traduction]

+-Réponse du gouvernement à des pétitions

+-

    M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, conformément au paragraphe 36(8) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer, dans les deux langues officielles, la réponse du gouvernement à 18 pétitions.

*   *   *

+-La Loi électorale du Canada

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) demande à présenter le projet de loi C-24, Loi modifiant la Loi électorale du Canada et la Loi de l'impôt sur le revenu (financement politique).

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Le financement politique

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, le projet de loi que je viens de déposer, qui s'inscrit dans le plan d'action en huit points en matière d'éthique annoncé le 11 juin 2002, respecte l'engagement qu'a pris le premier ministre d'améliorer l'équité et la transparence du système électoral canadien. Les changements en question s'appuient également sur le remaniement de notre législation électorale, le projet de loi C-2, que j'ai présenté pendant la dernière législature afin de moderniser de nombreux aspects de la Loi électorale du Canada.

    Il existe depuis longtemps une perception, à tort ou à raison, que certains groupes dans la société--les grandes entreprises, les syndicats et les personnes bien nanties—exercent une influence indue sur le système politique, en partie par l'entremise de leurs contributions financières aux partis politiques et aux candidats. Ce projet de loi vise à corriger cette perception et a aussi pour but d'accroître l'équité et la transparence dans notre système politique en prévoyant que l'obligation de divulguer toutes les contributions reçues et tous les contrôles financiers s'appliquera à l'ensemble des intervenants politiques concernés.

[Français]

    Les partis et leurs candidats sont déjà assujettis à l'obligation de divulgation, tandis que d'autres intervenants ne le sont pas.

    En vertu du projet de loi, les associations de comté et les candidats à la direction ou à l'investiture d'un parti seront obligés de divulguer les contributions qu'ils ont reçues, de même que les dépenses qu'ils ont encourues au Directeur général des élections du Canada.

    De plus, les dépenses des candidats à l'investiture dans les comtés seront limitées à 50 p. 100 du montant accordé aux candidats du même district électoral lors de la dernière élection.

[Traduction]

    Autre élément essentiel, ce projet de loi interdit d'accepter des dons de la part de sociétés, de syndicats et d'autres associations. Une exception mineure à cette interdiction permettrait toutefois à ces trois types de donateurs de verser un maximum de 1 000 $ par année à l'ensemble des candidats et des associations locales d'un parti enregistré.

    Le projet de loi limitera également le montant des contributions individuelles. Un plafond annuel de 10 000 $ sera imposé aux contributions faites par un individu à un parti enregistré, à toutes ses associations locales, à ses candidats et à une investiture. Un individu pourra verser la somme de 10 000 $ à tous les candidats se présentant à la direction d'un parti.

    Toutes ces réformes augmenteront la confiance des Canadiens à l'égard de leur système électoral.

  +-(1525)  

[Français]

    Bien entendu, l'élimination quasi totale des contributions des sociétés et des syndicats, jointe aux nouvelles limites imposées dans le cas des contributions individuelles, aura des conséquences sur les finances des formations politiques, de même que, à un degré moindre, sur celles des candidats.

    Pour cette raison, le projet de loi prévoit accroître l'aide financière déjà existante et déjà fournie aux partis politiques et aux candidats.

    Ainsi, le pourcentage des dépenses électorales remboursables aux partis passera de 22,5 p. 100 à 50 p. 100—ce qui est déjà le cas pour les candidats, on s'entend—et la définition de ce qui constitue des dépenses électorales remboursables sera élargie, afin d'inclure les frais de sondages. Le plafond pour les dépenses admissibles sera proportionnellement haussé.

    Le seuil d'admissibilité pour le remboursement des dépenses d'un candidat sera réduit de 15 à 10 p. 100 du nombre valide des voix exprimées dans la circonscription.

    Cela permettra à un plus grand nombre de candidats—dans ce cas, de candidats défaits—d'être remboursés à la suite d'une élection.

    Comme c'est déjà le cas dans trois provinces, les partis enregistrés seront admissibles à une allocation trimestrielle fondée sur le pourcentage de votes obtenus pendant la dernière élection générale.

[Traduction]

    Les mesures contenues dans ce projet de loi rendent compte des consultations que j'ai menées auprès d'un large éventail d'experts et d'intervenants, ainsi qu'auprès des autorités provinciales d'un bout à l'autre du pays. Elles s'inspirent aussi des mesures prises au chapitre du financement politique dans beaucoup de provinces canadiennes et dans d'autres pays.

[Français]

    C'est avec plaisir que je travaillerai avec tous les députés de cette Chambre à renforcer les liens entre les Canadiens et Canadiennes et leurs représentants politiques, et à accroître la confiance de la population dans l'intégrité de notre système électoral. Un système qui, par ailleurs, est déjà reconnu comme étant l'un des meilleurs au monde.

[Traduction]

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le Président, il s'agit d'un sujet très important. J'aurais voulu que nous traitions de la question de la réforme du financement des campagnes électorales et de la législation électorale dans le cadre d'une entente plus large entre les partis et, en toute franchise, en toute justice envers tous les intervenants.

    Malheureusement, la réalité c'est que le gouvernement dépose cette mesure législative en raison des problèmes d'image du Parti libéral liés à la corruption et aux scandales et en raison de la lutte de pouvoir au sein du Parti libéral lui-même. Certaines des idées émises dans le projet de loi ne sont qu'à moitié réfléchies et, comme vous le savez, suscitent des divisions même au sein du caucus gouvernemental.

    L'idée maîtresse proposée consiste à remplacer les contributions des sociétés et des syndicats comme fondement du financement des partis politiques par des contributions forcées auprès des contribuables. À notre avis, cette solution est pire que le problème.

    Si les actionnaires et les travailleurs syndiqués ne veulent pas que leur argent serve à financer des partis politiques en particulier, pourquoi devraient-ils y être forcés en tant que contribuables?

    Si les partis politiques dépendent de l'argent des PDG de sociétés et des dirigeants de syndicats, pourquoi ne devraient-ils pas obtenir l'argent directement de ces personnes et d'autres qui partagent ces points de vue? Je vais signaler une petite lacune dans la mesure législative. Pourquoi ne devraient-ils pas pouvoir financer les partis même s'ils ont leurs propres entreprises, leurs propres sociétés de portefeuille privées. Pourquoi ne seraient-ils pas en mesure de financer les partis par l'entremise de ces instruments si nous parlons de leur propre argent?

    Nous devrions attirer l'attention sur le fait qu'une importante partie de l'argent des contribuables sert à financer les partis politiques fédéraux. D'après nous, les contribuables financent déjà les partis politiques à hauteur de quelque 60 p. 100. Le projet de loi ferait passer ce pourcentage à près de 80 p. 100, sinon plus.

    Je devrais dire qu'en s'opposant à la mesure législative l'Alliance canadienne prend une position de principe. Même pour nous, qui ne sommes pas naïfs, une bonne partie de ce que le gouvernement propose servirait les intérêts à court terme de l'Alliance canadienne. Nous, comme tous les partis, pourrions bien gagner de l'argent. À long terme, notre parti et le système ne s'en porteront que mieux si nous finançons nos activités au moyen de l'argent que nous aurons versé librement des personnes qui nous accordent en fait leur appui.

    La pire idée véhiculée dans cette mesure législative a trait aux nouvelles allocations directes consenties aux partis eux-mêmes et fondées sur les derniers résultats électoraux. Dans ce cas, non seulement les partis seraient-ils isolés des sentiments que peuvent exprimer leurs propres anciens partisans, mais encore on demanderait à des personnes n'ayant jamais appuyé un parti de devenir des partisans de ce dernier, qu'il s'agisse du Bloc québécois, du NPD ou de notre parti.

    Il n'est pas étonnant de constater que le plus grand bénéficiaire de cette disposition serait le Parti libéral. C'est assez caractéristique dans un éventail de propositions figurant dans une loi électorale, en particulier en ce qui concerne la radiodiffusion, secteur où le Parti libéral s'accorde plus de temps, payé et non, qu'à tout autre parti.

    Certaines de ces dispositions sont probablement inconstitutionnelles. Toutefois, nous savons que cela n'a jamais gêné les libéraux dans ce domaine législatif.

    Il est également malavisé de bonifier les avantages fiscaux, qui seraient liés exclusivement aux dépenses. Très peu de contribuables comprennent que les dons qu'ils consentent à des partis politiques ouvrent droit à un crédit d'impôt. Toutefois, même après cela, lorsque les partis politiques dépensent l'argent recueilli, ils en tirent d'autres avantages fiscaux, dans bien des cas tant à l'échelle locale qu'à l'échelle nationale. Ce n'est qu'un besoin irrépressible de dépenser. Nous exprimons de nouveau ici la même réserve. Il n'y a absolument aucun lien entre cela et le fait que les électeurs veulent ou non un soutien accru de ces partis.

    Si je m'en tiens aux seules dispositions de cette mesure législative, je constate que, outre ce que j'ai déjà mentionné, de 30 à 40 millions de dollars supplémentaires viendront des fonds publics.

    Le document renferme de bonnes idées, mais même ces dernières présentent des failles. La notion de divulgation est bonne dans le cas des courses à la direction. J'ai souligné notre appui à cette mesure. Malheureusement, le document comprend des dispositions qui rendraient difficile la participation à une lutte en vue d'une mise en candidature pour se poser en rival du titulaire en poste.

  +-(1530)  

    Nous parlons de limites, mais il n'y a pas de limites aux montants qui peuvent être versés dans les fiducies privées des politiciens, ce qui constitue un oubli très sérieux. Puis, en dernière analyse, il n'y a pas de limites à la participation des contribuables eux-mêmes à ce genre de financement.

    Historiquement, les gouvernements ont toujours cherché à faire consensus au sujet de la législation électorale. J'espère que c'est ce que nous ferons en comité. Le député de Vancouver-Ouest—Sunshine Coast y pilotera pour nous ce dossier. Certaines idées exprimées méritent d'être acceptées, beaucoup devraient être rejetées et d'autres devraient être améliorées, mais le gouvernement ne peut certes pas compter sur l'appui de l'Alliance canadienne, à moins que ne soit modifiée la philosophie reposant sur un financement illimité de la part des contribuables.

[Français]

+-

    M. Michel Gauthier (Roberval, BQ): Monsieur le Président, je serai bref. Je voudrais simplement souligner l'initiative gouvernementale dans le domaine du financement des partis politiques.

    Dans le contexte du dépôt de ce projet de loi, on se rappelle tous du grave problème du scandale des commandites. Le gouvernement avait bien besoin, je pense, de redorer son image et de faire en sorte que les citoyens puissent reprendre confiance en la démocratie et dans la façon dont les choses sont faites par les politiciens fédéraux.

    Depuis plusieurs années, soit depuis neuf ans, le Bloc québécois exige une modification du financement des partis politiques. Depuis plus de 25 ans, nous avons la chance de vivre au Québec avec une législation semblable à celle qui est déposée, une législation d'ouverture, une législation qui fait place à la démocratie, une législation qui assure à nos concitoyens et concitoyennes que les choses se font le plus correctement possible. Si une chose est importante en politique aujourd'hui, c'est bien de s'assurer que ceux et celles qui la pratiquent soient au-dessus de tout soupçon.

    On ne peut pas feindre d'ignorer l'importance des lobbys dans le domaine politique, des gens qui ont une influence toujours grandissante auprès des gouvernements et des politiciens en place. Heureusement, la nouvelle Loi sur le financement des partis politiques va permettre aux hommes et aux femmes de cette Chambre d'être indépendants face aux différents lobbys, face aux dons financiers qui pourraient être faits d'une façon ou d'une autre, permettant à des groupes, à des individus ou à des compagnies d'influencer indûment des décisions politiques devant être prises.

    Je suis donc extrêmement heureux d'annoncer au gouvernement que nous allons concourir à adopter ce projet de loi. Les députés du Bloc vont appuyer cette initiative et nous l'accueillons avec énormément de plaisir. Nous disons simplement aux gens que oui, il y a un prix, mais il y a un prix à la démocratie. Ce n'est jamais cher pour assurer à nos concitoyennes et concitoyens que la démocratie sera préservée, que chacun et chacune qui souhaite faire de la politique sur la scène canadienne pourra s'exprimer le plus correctement possible, avec des chances égales pour tous. C'est ce que nous souhaitons et c'est ce que le projet de loi permet de faire.

    À première vue, le seul problème que je vois dans le projet de loi, ce sont les actuelles courses au leadership. Elles ne sont pas couvertes par les règles. Je sais qu'il aurait probablement fallu prévoir des dispositions particulières, mais malheureusement, cela me semble être un manque important, un manque sérieux.

    Pour le reste, au fur et à mesure où nous aurons l'occasion de découvrir le projet de loi et de le travailler, je peux dire que les députés du Bloc québécois, qui sont habitués de vivre au Québec avec une loi semblable, l'appuieront avec beaucoup de plaisir.

    J'invite ceux et celles qui seront contre une telle mesure législative d'aller vérifier auprès des électeurs du Québec, de quelque allégeance qu'ils soient, s'ils se priveraient maintenant de la Loi sur le financement des partis politiques. Le taux de satisfaction concernant cette loi du Québec, qui existe depuis plus de 25 ans si ma mémoire est fidèle, est extrêmement élevé. On ne voudrait pas s'en défaire. Au contraire, les gens travaillent actuellement à l'améliorer et à rendre encore plus parfaites les modalités de la loi pour permettre une démocratie saine, sans taches et sans influence.

    Je salue l'initiative du gouvernement. Je le redis encore une fois, nous allons l'appuyer.

  +-(1535)  

[Traduction]

+-

    M. Dick Proctor (Palliser, NPD): Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de livrer les réflexions de mon parti sur cette importante mesure législative

    D'abord, par votre intermédiaire, monsieur le Président, j'aimerais signaler au leader du gouvernement à la Chambre qu'il constatera, en lisant le compte rendu, que la question que j'ai posée dans cette Chambre au sujet de la Loi électorale du Canada, il y a 40 minutes environ, n'a absolument rien à voir avec une séance d'information technique qui a eu lieu plus tôt aujourd'hui. Tout était du domaine public. Honnêtement, la réponse n'était pas justifiée dans les circonstances.

    Pour ce qui du projet de loi, il me semble que le gouvernement se lance à la poursuite de trois objectifs. Premièrement, il dit que qu'une plus grande transparence et une communication plus ouverte s'imposent. Le Nouveau Parti démocratique est d'accord sur ce point.

    Deuxièmement, le gouvernement veut promouvoir l'équité. Il est évident que nous devrions tous être d'accord sur ce point.

    Enfin, troisièmement, le gouvernement veut dissiper la perception selon laquelle les gros donateurs influencent indûment le processus politique. Je reprendrai ce point dans un moment.

    Depuis des années, notre parti et nombre d'électeurs au Canada estiment cette question importante. Pas plus tard que la fin de semaine dernière à l'occasion de son congrès d'investiture, notre parti a adopté une résolution concernant les dons à des partis politiques. Nous avons convenu que les dons devraient être faits exclusivement sur une base individuelle. Nous avons préconisé l'imposition de limites pour les tiers partis, nous avons dit qu'une part du financement devait provenir des deniers publics, notamment sous la forme d'une contribution annuelle, disposition prévue dans le projet de loi comme nous pouvons le constater, et que la participation publique appropriée devait être déterminée avant que nous puissions aller de l'avant.

    Je crois que les Canadiens sont vraiment inquiets lorsqu'ils prennent connaissance des montants des dons, par exemple des dons faits au député de LaSalle—Émard, et qu'ils constatent qu'une entité appelée Groupe ABC a versé 10 000 $ pour sa campagne à la direction, que la compagnie 398536 Alberta Ltd. a versé des milliers de dollars ou que la compagnie 90808353 Québec Inc. a fait un don elle aussi. Nous ne sommes pas au courant, et la population canadienne n'est pas au courant.

    Il est donc approprié que le gouvernement présente un projet de loi interdisant ce type d'activités, ce type de contribution financière aux partis politiques, aux candidats à la direction des partis ou des associations de comté, ou à d'autres candidats.

    Nous voulons faire une étude exhaustive de ce projet de loi. Nous sommes d'accord en principe avec ses dispositions, mais nous tenons à nous assurer que le financement se fait de façon régulière. Nous sommes en faveur d'une réglementation accrue des activités des tiers partis. Je n'ai rien vu à ce sujet dans le projet de loi. Le ministre...

    L'hon. Don Boudria: C'est devant les tribunaux.

    M. Dick Proctor: D'accord. Le ministre dit que cela viendra et nous prenons sa parole.

    Je ferai cependant remarquer que nous n'avons pas eu beaucoup de veine dans nos démarches au Canada en vue de faire respecter par les tribunaux les limites imposées aux tiers partis. Peut-être qu'avec les changements proposés, il sera plus facile pour les tribunaux de rendre des jugements restreignant les activités des tiers partis, mais cela reste à voir.

    La limite individuelle de 10 000 $ suscite une certaine inquiétude sous ce rapport. Elle s'établit à 3 000 $ au Québec et au Manitoba, les deux provinces où il existe déjà des mesures législatives de cette nature. D'après ce que j'ai compris, il s'agit de 10 000 $ par année par parti politique, et non d'un montant total. Quelqu'un pourrait donc donner 10 000 $ aux conservateurs, 10 000 $ aux néo-démocrates et 10 000 $ aux libéraux. Selon nous, il sera très difficile d'éviter cette perception que les grands donateurs ont une influence sur la politique si une personne bien nantie est autorisée à verser en dons 40 000 $ à 60 000 $ à des partis politiques. Nous aimerions nous pencher très attentivement sur cette question.

    En conclusion, je répète que nous sommes d'accord en principe avec le projet de loi, mais nous voulons en examiner les moindres détails. On dit que les difficultés surgissent dans les détails. Nous voulons que la démocratie transparaisse à travers les détails.

  +-(1540)  

[Français]

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, il n'y a aucun doute que le système de financement des partis politiques au Canada a grandement besoin d'une réforme majeure.

[Traduction]

    Le bilan sordide du gouvernement témoigne de l'effet pervers de l'argent et du favoritisme, qu'il s'agisse des scandales de Groupaction ou des privilèges accordés à des amis qui ont entraîné la démission de ministres et l'expédition de M. Gagliano au Danemark. J'imagine que c'est là la version du gouvernement du programme de protection des témoins.

    La ministre du Patrimoine canadien a déclaré qu'il existait, à l'évidence, un lien entre les dons faits par des entreprises et la politique du gouvernement. Le paradoxe réside dans le fait que le premier ministre, qui a présidé à ces abus systématique, propose aujourd'hui de s'attaquer au problème alors que le mal est fait. Il cherche peut-être à régler ainsi des comptes avec les gens de son parti, mais ce n'est pas comme cela qu'on dirige un pays.

    Cela dit, nous sommes tout ce qu'il y a de plus favorables au principe de la réforme du financement des campagnes et nous examinerons attentivement les détails de cette proposition, car c'est souvent derrière les détails que se retranche le gouvernement.

[Français]

    Voilà pourquoi mon parti, au lendemain de l'élection de 1988, a mis sur pied la Commission royale sur la réforme électorale et le financement des partis.

[Traduction]

    Cette commission avait pour mission de protéger le système de toute influence indue. En outre, lors de notre assemblée nationale annuelle en août, mon parti a proposé plusieurs réformes plus précises.

    Il nous faut reconnaître que le système politique canadien a été considérablement modifié par la multiplication des groupes d'intérêt puissants à visées étroites, dont beaucoup ont accès à de vastes sommes d'argent. Il est malsain, du point de vue de la démocratie, que le système de parti puisse être manipulé par les riches et les puissants. L'apparence d'une influence indue est une grande source de cynisme au sujet de la vie publique. Cela aussi, il convient de le changer.

    Le premier ministre a déclaré devant des journalistes que cette question témoignera de la confiance que son gouvernement inspire. Pourquoi agirait-il de la sorte? C'est une question d'éthique politique fondamentale. Les députés ne devraient pas être liés par le pouvoir qu'exerce leur parti, comme ils ne devraient pas être liés par le pouvoir que procure l'argent. Si le premier ministre a le courage de ses convictions, qu'il fasse valoir son point de vue et qu'il nous laisse décider de son bien-fondé. Soumettons cette question importante à un vote libre à la Chambre.

*   *   *

  +-(1545)  

+-Délégations interparlementaires

+-

    M. John O'Reilly (Haliburton—Victoria—Brock, Lib.): Monsieur le Président, conformément à l'article 34(1) du Règlement, j'ai l'honneur de déposer à la Chambre, dans les deux langues officielles, le rapport de l'Association parlementaire canadienne de l'OTAN. Il s'agit du rapport de la délégation officielle qui a représenté le Canada à la 48e session annuelle de l'Assemblée parlementaire de l'OTAN, tenue à Istanbul, Turquie, du 15 au 19 novembre 2002.

*   *   *

+-La Loi sur l'eau potable saine au Canada

+-

    M. John Herron (Fundy—Royal, PC) demande à présenter le projet de loi C-346, Loi visant à assurer une eau potable saine au Canada.

    Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de présenter à nouveau ce projet de loi intitulé Loi visant à assurer une eau potable saine au Canada.

    Ce projet de loi inscrit essentiellement les normes nationales d'eau potable dans une loi au lieu de les traiter simplement comme des lignes directrices. Les députés savent peut-être que nous sommes l'un des rares pays au monde à ne pas être doté de véritables normes nationales alors que le public a le droit de savoir si l'eau contient une substance susceptible de nuire à la santé des êtres humains.

    Je présente le projet de loi simplement parce que la Chambre a adopté une motion en ce sens le 8 mai 2001 et que quatre des cinq partis politiques l'ont appuyée. Comme cela fait deux ans et que le gouvernement n'a rien fait, j'aimerais que la loi serve de catalyseur pour susciter le débat afin que le gouvernement respecte la promesse qu'il a faite aux parlementaires le 8 mai 2001.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

*   *   *

+-Le Code criminel

+-

    M. Jim Gouk (Kootenay—Boundary—Okanagan, Alliance canadienne) demande à présenter le projet de loi C-347, Loi modifiant le Code criminel (suppression de la condamnation avec sursis dans le cas de délinquants violents).

    --Monsieur le Président, la modification que je propose d'apporter au Code criminel vise à retirer de la liste des infractions pouvant donner lieu à une condamnation avec sursis tous les crimes énumérés à l'annexe 1. Je précise, pour l'information des députés, que les crimes énumérés à l'annexe 1 sont notamment le détournement d'un aéronef, l'incitation à des contacts sexuels, l'exploitation sexuelle, l'attentat à la pudeur, la tentative de viol, le viol, le complot en vue de commettre un meurtre, le vol, la prise d'otage et l'enlèvement.

    Lorsque la condamnation avec sursis a été instaurée, la population et nous-mêmes avons constaté avec horreur que les personnes accusées d'infractions comme l'agression sexuelle violente avaient droit à la condamnation avec sursis, une possibilité qui s'offre au juge lorsque ce dernier considère qu'il n'est pas dans l'intérêt public d'emprisonner un accusé. Le juge peut alors accorder un sursis et l'accusé n'a pas à purger sa peine en prison.

    Je désire supprimer cette option pour tous les crimes violents. L'ancien ministre de la Justice et actuel ministre de l'Industrie a déclaré que cette mesure n'avait jamais été conçue pour les délinquants violents. Mon projet de loi corrigera donc cette erreur.

    (Les motions sont réputées adoptées, le projet de loi est lu pour la première fois et imprimé.)

    M. Jim Gook: M. le Président Dans l'intérêt de la sécurité publique, je demande que le projet de loi ne soit pas lu une deuxième fois, mais plutôt renvoyé directement au comité où il sera étudié par tous les partis dans un contexte non partisan, et je demande le consentement unanime à cet effet.

  +-(1550)  

+-

    Le vice-président: Le député de Kootenay—Boundary—Okanagan a-t-il le consentement pour demander le consentement unanime?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

+-

    M. Peter Adams: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je voudrais obtenir le consentement unanime pour revenir à la présentation de rapports de comités.

    Le vice-président: D'accord?

    Des voix: D'accord.

*   *   *

+-Les comités de la Chambre

+-Procédure et affaires de la Chambre

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, j'ai l'honneur de présenter le quinzième rapport du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre concernant la liste des membres et des membres associés des comités de la Chambre et je voudrais proposer l'adoption du rapport.

    (La motion est adoptée.)

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, si la Chambre y consent, je propose:

    Que la liste des membres du Comité permanent de la procédure et des affaires de la Chambre soit modifiée comme suit: Rodger Cuzner pour Wayne Easter, Lynn Myers pour Tony Tirabassi, Benoît Sauvageau pour Pierre Brien.

+-

    Le vice-président: La Chambre a entendu les termes de la motion. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    (La motion est adoptée.)

*   *   *

+-Pétitions

+-La pornographie juvénile

+-

    M. John Herron (Fundy—Royal, PC): Monsieur le Président, je suis très heureux d'intervenir à la Chambre pour présenter une pétition dûment certifiée par le greffier des pétitions, et de le faire au nom de l'une de mes électrices, Deborah Moss, de Canaan Forks, au Nouveau-Brunswick.

    Les pétitionnaires demandent au Parlement de protéger tous les enfants en prenant toutes les mesures nécessaires pour déclarer illégal comme il se doit tout matériel faisant la promotion et la glorification de la pornographie juvénile sous toutes ses formes. C'est le minimum que nous devons à nos enfants. Je suis heureux d'avoir l'occasion de présenter cette pétition.

*   *   *

+-Postes Canada

+-

    M. Darrel Stinson (Okanagan—Shuswap, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter au nom de mes électeurs une pétition demandant au Parlement de soutenir les courriers des routes rurales.

    Les courriers des routes rurales demandent au Parlement d'abroger un paragraphe de la Loi sur la Société canadienne des postes, soit le paragraphe 13(5), qui les empêche de négocier collectivement afin d'améliorer leurs salaires et leurs conditions de travail. Les pétitionnaires croient que ce déni d'un droit fondamental permet à la Société canadienne des postes de maintenir des salaires et des conditions de travail à un niveau injuste et constitue une discrimination à l'égard des travailleurs ruraux.

*   *   *

+-La pornographie juvénile

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir de nouveau pour présenter une autre pétition. À l'heure actuelle, un total de 3 645 électeurs des districts de Airdrie, Calgary et Cochrane, dans ma circonscription, exhortent le gouvernement à légiférer sans tarder pour proscrire et éradiquer la pornographie juvénile de la face de la terre, et il va sans dire que j'appuie cette initiative.

*   *   *

+-La recherche sur les cellules souches

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de présenter une pétition au nom de nombreux Canadiens, dont des électeurs de ma circonscription, Mississauga-Sud, concernant la recherche sur les cellules souches. Les pétitionnaires estiment, comme moi, que la vie commence dès la conception. Par conséquent, ils attirent l'attention de la Chambre sur le fait que les Canadiens appuient la recherche éthique sur les cellules souches, qui a déjà révélé un potentiel encourageant pour trouver des remèdes et des thérapies concernant plusieurs maladies.

    Les pétitionnaires soulignent également que la recherche sur les cellules souches non embryonnaires, également désignées cellules souches adultes, connaît des progrès importants sans poser les problèmes de rejet par le système immunitaire, ni les problèmes d'éthique liés à la recherche sur les cellules embryonnaires. Par conséquent, les signataires exhortent le Parlement à appuyer les mesures législatives qui favorisent la recherche sur les cellules souches adultes dans le but de trouver les traitements et les thérapies dont les Canadiens ont besoin.

*   *   *

+-Postes Canada

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je présente une pétition de la part de citoyens de différentes régions de l'Ontario qui sont préoccupés du fait que la Loi sur la Société canadienne des postes nie aux facteurs des routes rurales le droit à la négociation collective. Par conséquent, les pétitionnaires demandent au Parlement d'abroger le paragraphe 13(5) de la Loi sur la Société canadienne des postes.

*   *   *

  +-(1555)  

-La recherche sur les cellules souches

+-

    M. Peter Adams (Peterborough, Lib.): Monsieur le Président, je présente une pétition au nom des citoyens du comté de Northumberland qui défendent la cause de nombreuses personnes atteintes notamment de Parkinson, d'Alzheimer, de diabète, de cancer, de dystrophie musculaire et de traumatisme médullaire. Les pétitionnaires soulignent que la recherche sur les cellules souches s'est avérée efficace pour traiter ces problèmes de santé et ils demandent au Parlement de concentrer ses efforts législatifs sur la recherche visant à élaborer les traitements et les thérapies nécessaires pour lutter contre ces maladies et venir en aide aux Canadiens qui en souffrent.

*   *   *

[Français]

+-Questions au Feuilleton

+-

    M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, je suggère que toutes les questions soient réservées.

+-

    Le vice-président: Est-on d'accord?

    Des voix: D'accord.

*   *   *

[Traduction]

+-Demandes de documents

+-

    M. Geoff Regan (secrétaire parlementaire du leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.): Monsieur le Président, auriez-vous l'obligeance d'appeler les motions portant production de documents nos P-15 et P-16 au nom de l'honorable député de Calgary-Centre?

Motion no P-15

    Qu'un ordre de la Chambre soit donné en vue de la production de copies de tous les rapports du conseiller en éthique concernant l'ancien Soliciteur général.

Motion no P-16

    Qu'un ordre de la Chambre soit donné en vue de la production de copies de tous les rapports du conseiller en éthique concernant l'ancien ministre de la Défense nationale.

+-

    M. Rick Borotsik (Brandon—Souris, PCC): Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. J'aimerais que le secrétaire parlementaire explique à la Chambre pourquoi il a eu des réponses sur la production de documents pour deux des questions qui ont été déposées par l'honorable député de Calgary-Centre alors qu'il y en a toujours dix en suspens. Le secrétaire parlementaire pourrait-il nous dire pourquoi nous n'avons pas de réponse pour les dix autres?

+-

    M. Geoff Regan: Monsieur le Président, je n'ai bien sûr aucun renseignement à ce sujet en ce moment. Je devrai vérifier pour pouvoir donner une réponse au député. Je crois que ces réponses relèvent des ministères et qu'elles doivent nous être envoyées sous peu. J'espère les recevoir bientôt, mais je vérifierai et je ferai savoir à notre collègue ce qu'il en est.

    Monsieur le Président, le rapport en question est considéré comme un conseil donné au gouvernement et il ne peut être rendu public--je parle de la motion no P-15--comme le premier ministre l'a déclaré à la Chambre des communes, le mardi 22 octobre 2002. En réponse à une question de l'honorable chef de l'opposition, le premier ministre a alors dit ceci:

    J'ai reçu le rapport de ce dernier. Je rappelle que le conseiller en éthique est chargé de me conseiller. En outre, lorsqu'il formule des recommandations, que ce soit à moi, aux ministres, aux députés ou aux fonctionnaires, ces communications sont confidentielles.

    Je demanderais donc au député de retirer sa motion.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le Président, je ne retire pas la motion. Je pense que c'est un non-sens que le Parlement n'ait pas accès aux rapports du conseiller en éthique. C'est un droit et un principe fondamentaux du Parlement et de la population du Canada que de connaître les faits. Je ne retire donc pas la question.

+-

    Le vice-président: La motion est renvoyée pour débat ultérieur, conformément au paragraphe 97(1) du Règlement.

    Qu'en est-il de l'avis de motion no P-16 portant production de documents, inscrit au nom du député de Calgary-Centre?

+-

    M. Geoff Regan: Monsieur le Président, il n'y a pas eu de rapport écrit sur cette question. Par conséquent, je demande au député de retirer sa motion.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le Président, c'est matière à débat.

+-

    Le vice-président: En conséquence, la question est renvoyée pour débat ultérieur, conformément au paragraphe 97(1) du Règlement.

+-

    M. Geoff Regan: Monsieur le Président, je demande que tous les autres avis de motion pour production de documents restent au Feuilleton.

  +-(1600)  

+-

    Le vice-président: Est-ce d'accord?

    Des voix: D'accord.

[Français]

+-

    Le vice-président: Je désire informer la Chambre qu'en raison de la déclaration ministérielle, les ordres émanant du gouvernement seront prolongés de 23 minutes.


+-INITIATIVES MINISTÉRIELLES

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

[Traduction]

+-LOI SUR LA PROCRÉATION ASSISTÉE

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 27 janvier, du projet de loi C-13, Loi concernant la procréation assistée, dont le comité a fait rapport avec des propositions d'amendements, et des motions du groupe no 4.

+-

    M. Gurmant Grewal (Surrey-Centre, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je prends la parole encore une fois au nom des électeurs de Surrey-Centre pour terminer mes observations au sujet du projet de loi C-13, concernant les techniques de procréation assistée et la recherche connexe.

    Nous nous opposons au projet de loi, à moins qu'il ne soit amendé. Avant de poursuivre mes observations, je vais résumer mes propos d'hier.

    Le rapport minoritaire de l'Alliance canadienne recommandait que le projet de loi définitif reconnaisse clairement l'embryon humain comme un être humain et que la déclaration du Parlement comprenne l'expression «respect de la vie humaine». Tous les êtres humains possèdent les droits fondamentaux à la vie et à la liberté. J'ai également dit qu'il est dans l'intérêt supérieur de chaque enfant de connaître l'identité de ses parents. Aucun donneur de spermatozoïdes ou d'ovules ne devrait rester anonyme.

    Il faudrait que les cliniques de procréation assistée soient autorisées et strictement réglementées. Tous les règlements devraient être déposés devant le Parlement et renvoyés d'office au Comité de la santé.

    J'ai également dit que j'appuie et encourage fortement la recherche et le développement en sciences de la santé, ainsi que la recherche sur les cellules souches adultes. C'est pourquoi nous demandons un financement accru de la recherche sur les cellules souches adultes. J'appuie les dispositions interdisant le clonage humain ou thérapeutique, les hybrides d'animaux et d'êtres humains, la présélection du sexe, les modifications de la lignée cellulaire germinale, l'achat ou la vente d'embryons et la rémunération des mères porteuses.

    La maternité de substitution à visées commerciales serait interdite, mais les frais des mères porteuses pourraient être remboursés. Ainsi, la maternité de substitution pourrait devenir une activité commerciale. C'est pourquoi nous nous opposons à la motion no 52.

    La ministre de la Santé cherche à annuler les amendements apportés au comité qui rendraient obligatoires les services de consultation pour les mères porteuses. L'Alliance canadienne a appuyé ces amendements. On se trouve à diluer les mesures souhaitées par le Comité de la santé, qui voulait que ces services soient dispensés par un tiers plutôt que par une clinique de fertilité.

    Devenir mère porteuse est une affaire très grave, au point que le Comité de la santé a jugé bon d'amender le projet de loi pour interdire ce rôle aux femmes de moins de 21 ans. En effet, il peut avoir des conséquences profondes pour les relations entre mari et femme, à l'intérieur des familles, et entre la mère porteuse et les parents adoptifs, et par-dessus tout pour les enfants eux-mêmes. Le recours à des services de consultation devrait donc être obligatoire. Je me demande pourquoi la ministre de la Santé n'explique pas et ne défend pas son amendement.

    Nous nous opposons également à la motion no 72. Là encore, la ministre cherche à annuler un amendement du comité assujettissant les membres du conseil d'administration de l'agence aux règles sur les conflits d'intérêts. Ces administrateurs ne devraient avoir aucun intérêt commercial dans le domaine de la reproduction humaine assistée ni dans les recherches qui y sont liées, par exemple les cliniques de fertilité, les entreprises de biotechnologie, etc.

    Imaginez qu'un employé ou un investisseur dans une entreprise de biotechnologie possédant des intérêts financiers dans des recherches sur les cellules souches embryonnaires prenne des décisions sur la réglementation de cette recherche, et notamment sur la définition du terme «nécessaire» à l'article 40. Imaginez encore que le directeur d'une clinique de fertilité élabore la réglementation sur les limites des dons de sperme et d'ovules ou sur le nombre d'embryons produits pour les traitements de fertilisation in vitro. La loi doit prévenir les conflits d'intérêts de cette nature. La ministre doit expliquer et défendre ces amendements.

    Bref, nous nous opposons au projet de loi. Quant aux diverses motions que j'ai signalées, j'ai précisé si nous les appuyions ou les rejetions. Qu'il soit bien clair que j'appuie la recherche sur les cellules souches, mais que nous souhaiterions assujettir à un moratoire de trois ans la recherche sur les cellules embryonnaires.

  +-(1605)  

+-

    M. Deepak Obhrai (Calgary-Est, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole en ce début d'année, au nom des électeurs de Calgary-Est. Je suis très heureux de participer au débat sur le projet de loi C-13, intitulé Loi concernant les techniques de procréation assistée et la recherche connexe.

    Tous les députés se souviendront qu'au début de l'année, la société Clonaid a annoncé qu'elle avait cloné le premier bébé humain. Cette annonce a créé une onde de choc partout dans le monde. Elle a aussi choqué et stupéfié tous les dirigeants religieux et les personnes qui défendent la dignité de la vie humaine. Cette annonce m'a aussi stupéfié, et j'espère que nous n'approuverons pas la recherche dans ce domaine.

    Le projet de loi à l'étude ne vise pas à favoriser le clonage, mais plutôt la recherche sur les techniques de procréation humaine. Les conséquences de ce type de recherche sont nombreuses.

    Nous avons tenté de rédiger, au comité, un projet de loi qui tienne compte de cet aspect. Le comité a fouillé la question et a présenté son rapport. Le document recommandait d'examiner la question, d'établir des règles et de mettre un terme à la recherche débridée, qui risque de prendre une tangente que l'ensemble de la société ne souhaite pas. Le rapport recommandait plutôt le respect du principe fondamental de la vie humaine.

    Le gouvernement a déposé le projet de loi C-13, qui est censé traiter de cette question. Ce projet de loi vise effectivement à instaurer un certain contrôle, établir des règles, assurer des comportements éthiques et une approche éthique de la question. Toutefois, fidèle à lui-même, le gouvernement n'a proposé qu'une demi-mesure; en effet, il a déposé un projet de loi qui vise à tout résoudre mais qui, en définitive, n'aboutira à rien. C'est la raison principale pour laquelle l'Alliance canadienne s'oppose au projet de loi C-13.

    Mon collègue a présenté de nombreux amendements. Nous espérons que ces amendements, qui renforceront le projet de loi, seront acceptés. Nous serions alors en mesure d'aborder toutes les questions et de supprimer toutes les échappatoires possibles dans le système. Le sujet soulève un débat très animé au sein de la société canadienne.

    Dans la motion no 72, le gouvernement a créé une agence qui aura pour mandat d'établir des lignes directrices éthiques ainsi que des règles qui régiront la recherche sur les cellules souches, embryonnaires ou adultes.

    Le problème, c'est que, comme toujours, il semble y avoir une absence d'engagement réel de la part du gouvernement. Pour une raison ou une autre, ce dernier semble craindre de prendre fermement position. Le projet de loi ne prévoit aucune ligne directrice sur les conflits d'intérêts. Le ministre peut nommer qui il veut au conseil d'administration de l'agence.

  +-(1610)  

    Si le ministre nomme une personne assujettie aux règles sur les conflits d'intérêts, qu'est-ce qui empêche cette personne d'être en situation de conflit, de travailler pour une entreprise de biotechnologie, par exemple? Évidemment, le ministre va dire que ce n'est pas possible et qu'on fera preuve d'une diligence raisonnable. Mais là encore, quel est le problème? Pourquoi ne peut-on pas mentionner dans le projet de loi, pour que ce soit clair, qu'une personne qui se trouve en conflit d'intérêts ne sera pas nommée au conseil d'administration? C'est clair et simple. Et pourtant, ça ne figure pas dans le projet de loi, qui donne le pouvoir au ministre.

    Les Canadiens savent à quoi s'en tenir quant à la transparence du gouvernement. Ils sont au courant de la gabegie du registre des armes à feu.

    Cet après-midi, le gouvernement a présenté son projet de loi sur le financement des partis politiques. C'est maintenant, alors que son régime tire à sa fin, que le premier ministre propose cette mesure législative. Il veut laisser sa marque, mais il concède maintenant que son espoir que le protocole de Kyoto le fasse entrer dans l'histoire s'amenuise et que son plan pour l'Afrique se heurte à de graves difficultés. Il veut nous laisser cette mesure législative en héritage en dépit de l'opposition de ses propres députés. Il parle de transparence, mais la feuille de route du gouvernement à cet égard laisse les Canadiens perplexes. Ce même manque de transparence se retrouve dans ce projet de loi.

    Il est renversant de voir à quel point le gouvernement craint de s'engager sur un terrain où les gens sont davantage tenus de rendre des comptes. Je ne sais pas de quoi le gouvernement a peur. Le premier ministre refuse à ses députés de l'arrière-ban la responsabilité de leurs décisions. Pensons au vote que nous avons tenu pour choisir les présidents de comité. C'est le premier ministre qui s'y opposait.

    La feuille de route du gouvernement en matière de transparence et d'ouverture est bien connue et les Canadiens ne se laisseront pas avoir. La même chose est en train de se passer dans le dossier de la recherche sur les cellules souches, qui est un sujet d'avenir. Les possibilités qu'offre la recherche sur les cellules souches, notamment celle de trouver un traitement pour les nombreux maux dont souffre la race humaine, sont énormes. On souhaite que ce genre de recherche ait lieu, mais d'une manière acceptable pour les Canadiens. Nous ne voulons pas nous retrouver dans la situation où une compagnie venue de nulle part annonce avoir cloné un être humain.

    Il est d'une importance critique que, dans le cadre du débat sur ce projet de loi, nous, les députés de l'opposition officielle, soulignions ce que nous estimons être les failles du projet de loi. Par conséquent, il nous est difficile d'appuyer cette mesure.

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir au sujet de ce projet de loi.

    Je tiens d'abord à féliciter une personne et un groupe. Je félicite le porte-parole de l'Alliance canadienne, le député de Yellowhead, pour le travail remarquable qu'il a fait dans ce dossier. Je félicite aussi le comité, qui a fait de très bonnes recommandations et présenté de très bons amendements à la ministre, amendements que la ministre veut par ailleurs supprimer, ce que je ne comprends vraiment pas.

    La ministre devrait être à la Chambre en train d'expliquer, par exemple, pourquoi le couple demandeur, la mère porteuse et son partenaire, les enfants et toutes les parties concernées ne devraient pas être tenus de se prévaloir des services de consultation. Étant donné les bouleversements relationnels que pourrait occasionner la situation, la consultation devrait être obligatoire pour toutes les parties concernées.

    Pourquoi diable la ministre refuse-t-elle de rendre ce type de consultation obligatoire, comme le recommande le comité? Cette motion n'a aucune raison d'être si la ministre n'est pas dans cette enceinte pour expliquer sa position. Que la ministre ne soit pas libre pour venir défendre sa position dans cette enceinte est tout à fait absurde.

    Je suis désolé de m'être laissé emporter, mais je tiens à souligner que...

  +-(1615)  

+-

    Le vice-président: Permettez-moi de vous interrompre très brièvement pour rappeler à la Chambre, vu que nous venons tout juste de revenir du congé de Noël, que nous avons comme pratique de longue date à la Chambre de ne pas faire allusion à l'absence d'un de ses membres étant donné les tâches très variées que nous sommes tous appelés à effectuer dans le cadre de nos fonctions.

+-

    M. Myron Thompson: Monsieur le Président, je n'ai pas voulu faire allusion à l'absence ou à la présence de quiconque. Je voulais simplement parler du fait que ni moi ni les membres de cette Chambre n'ont eu du ministère ou du cabinet de la ministre d'explication aux raisons sous-jacentes quant à la présentation de ce genre de propositions.

    En tant qu'opposition, un des principaux problèmes auquel nous avons été confrontés avec pratiquement tous les ministères, DRHC, Justice et Patrimoine par exemple, a été l'obligation de rendre compte. Voilà un domaine où le gouvernement montre toujours et encore sa faiblesse. Que la ministre veuille défaire un amendement présenté par le comité, qui exigeait que les membres du conseil d'administration de l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée...

+-

    Le vice-président: Une fois de plus j'hésite à interrompre le député, mais le député de Yellowhead invoque le Règlement.

+-

    M. Rob Merrifield: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. C'est sans conteste l'une des mesures législatives les plus importantes que nous examinerons au cours de la trente-septième législature. Il est important que nous y mettions tout le sérieux nécessaire. Puis-je demander s'il y a quorum?

+-

    Le vice-président: Je constate que le quorum est atteint. Nous reprenons le débat.

+-

    M. David Anderson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Aux fins du compte rendu, alors qu'il semble que le quorum soit atteint, je remarque qu'il n'y a que trois députés de l'Alliance, un pour écouter le député...

+-

    Le vice-président: Avec tout le respect que je vous dois, il ne s'agissait pas d'un rappel au Règlement mais cela m'encourage de voir que davantage de députés sont présents à la Chambre. C'est toujours très agréable pour le Président.

+-

    M. Myron Thompson: Monsieur le Président, j'ai voulu faire honte au ministre de l'Environnement, qui a commis une telle erreur alors que je venais tout juste d'être sévèrement semoncé pour avoir parlé de ceux qui sont ici et de ceux qui ne le sont pas. Il ne devrait pas faire cela. On pourrait penser qu'en sa qualité de ministre il sait mieux.

    Nous parlions de reddition de comptes avant d'être obligés de demander que l'on vérifie le quorum. C'est un des principaux points faibles du gouvernement libéral. La preuve en a été faite à maintes reprises, et cet aspect a été abordé dans tous les rapports du vérificateur général que j'ai pu lire. La reddition de comptes est si faible qu'on ne peut même pas demander des reçus à des ministres qui présentent des relevés de dépenses de 80 000 $ à 100 000 $.

    Toutefois, le comité accomplit un excellent travail en veillant à ce qu'en vertu de la motion no 72, les administrateurs de l'agence aient à rendre des comptes. Le comité voulait que les administrateurs soient assujettis aux règles concernant les conflits d'intérêts. Cette idée a du bon sens. C'est ce qu'on appelle une bonne reddition de comptes. Nous ne pouvons nous permettre qu'il y ait des conflits d'intérêts en ces domaines. Ces questions sont très importantes.

    Voici qu'une ministre veut supprimer cet amendement. Elle ne s'inquiète pas de la possibilité de conflits d'intérêts au moment de nommer des administrateurs et elle veut que le conseil relève directement du ministre.

    Quand allons-nous décider en cette Chambre que nous sommes le Parlement des Canadiens, que nous avons des responsabilités à leur égard et que le fait de relever du Parlement est une bonne idée dans le cas des conseils d'administration et des comités qui travaillent pour nous? Pourquoi relèvent-ils toujours d'une seule personne?

    Le manque de reddition de comptes est déplorable. C'est une honte, et c'est une pratique à laquelle il faudrait mettre fin. J'espère que les organismes dirigeants commenceront à réfléchir à cette question. Si nous voulons vraiment rendre des comptes aux personnes qui nous élisent, nous sommes en droit de savoir ce qui se passe, au même titre que le ministre.

    Malheureusement, nous avons constaté dans le passé que les rapports ne sont parfois pas aussi exacts qu'ils devraient l'être, et nous aimerions prendre directement connaissance de ce qui se passe. Moi-même, en ma qualité de député, j'aimerais prendre connaissance directement de ce qu'ont à dire les divers comités qui travaillent pour notre compte, au lieu de n'entendre que la ministre qui insiste pour qu'on ne fasse rapport qu'à un ministre et à personne d'autre.

    Si nous faisions appel à notre imagination, nous pourrions penser à toutes sortes de choses qui pourraient déraper chez ces gens qui n'auraient pas à respecter les règles concernant les conflits d'intérêts, et peut-être aussi à d'autres choses qui pourraient avoir une incidence sur ce qu'ils cherchent à faire avec cette mesure législative.

    J'encourage réellement tous les députés à ne pas appuyer la motion no 72, en particulier, ni la motion no 52, qui mine les desseins du comité et ses vaillants efforts en vue de trouver des solutions qui feront en sorte que toute cette idée puisse fonctionner à merveille.

    Nous sommes plutôt emballés par les rapports que l'on reçoit concernant certains aspects de la recherche sur les cellules souches adultes, dont celles prélevées du cordon ombilical d'un nouveau-né, et les avantages qu'on peut en tirer. Je pense qu'on devrait renoncer définitivement à créer des embryons à cette fin. Ce n'est pas une bonne idée.

    Monsieur le Président, vous trouverez peut-être que le discours prononcé hier soir à la télé par le président Bush n'a pas grand-chose à voir avec le sujet d'aujourd'hui, mais je me suis réjoui d'entendre le président des États-Unis assurer au peuple américain que jamais, sous sa présidence, il n'autorisera la clonage d'être humains dans son pays. J'aimerais voir notre premier ministre se lever et déclarer que, tant qu'il dirigera ce pays, le clonage ne fera pas partie des plans du Canada. On ne devrait pas cloner des êtres humains. Il n'appartient pas aux humains de jouer ainsi avec la vie.

  +-(1620)  

    Je préfère, quant à moi, la méthode de reproduction classique. C'est peut-être parce que je suis un peu plus vieux, mais le clonage m'apparaît comme une chose tellement dangereuse que j'ai été vraiment heureux d'entendre le président Bush tenir ces propos au peuple américain. J'aimerais que le premier ministre tienne le même genre de propos aux Canadiens.

+-

    M. David Anderson (Cypress Hills—Grasslands, Alliance canadienne): Monsieur le Président, voici que nous débattons à nouveau de la Loi sur la procréation assistée, dont nous avons déjà été saisis avec le projet de loi C-56. Il est surtout question ici des amendements du groupe no 4. Je tiens à présenter quelques observations générales avant de parler plus particulièrement des motions et amendements du groupe no 4.

    Une des raisons pour lesquelles nous devons discuter de cette question importante, c'est que nous allons planter le décor non pas seulement pour un seul projet de loi, mais pour une façon de légiférer à l'égard des gens. Nous allons établir un projet de loi qui va décider d'une façon de légiférer à l'égard des êtres humains dans notre société. Les conclusions auxquelles en arrivera la Chambre sur notre façon de légiférer et les décisions que nous prendrons à l'égard d'autres êtres humains auront d'énormes répercussions.

    Par exemple, nous avons vu depuis cent ans ce qui arrive lorsque des gouvernements et des idéologies décident que des êtres humains ne sont pas uniques et se résument à des unités économiques fondamentales. Pendant trois ans, à l'université, on nous a assommés avec la théorie politique de Karl Marx voulant qu'on puisse analyser tous les événements d'un certain point de vue économique et que les êtres humains doivent se conformer à ce point de vue et à cette analyse. Selon cette idéologie, les personnes ne sont jamais uniques. Elles sont considérées comme des marchandises à utiliser.

    Fait intéressant, nous avons vu cette théorie appliquée tout au long du dernier siècle par divers gouvernements socialistes et communistes. Ces régimes ont été les plus brutaux de toute l'histoire de l'humanité. Il importe que l'on reconnaisse et que l'on comprenne le caractère unique de la vie humaine.

    Je songe ici à deux ou trois exemples. En Russie, Staline a voulu contrôler les collectivités agricoles de la classe moyenne au point de les affamer à mort. Il ne se préoccupait nullement du caractère unique, du caractère individuel ni de la grandeur de la vie humaine.

    Encore aujourd'hui, en Chine, on assujettit les individus à la volonté de ce qu'on appelle la collectivité. C'est ainsi qu'on brutalise des gens dont le seul tort est de ne pas penser comme leurs dirigeants.

    Au Soudan, un autre régime socialiste n'est que trop heureux de faire la guerre contre de l'argent. Il se préoccupe peu du peuple ni, semble-t-il, de la vie de ses administrés.

    Il est important de décider quelle attitude ou position nous adopterons à l'égard de la vie humaine. Si nous adoptons, relativement à l'individualité et au caractère unique de l'être humain, une position qui manque de fermeté, cela résultera assurément en une perte de compassion envers autrui. Nous ne sommes pas aussi à l'abri de ce genre de chose que nous voudrions bien le penser.

    Le gouvernement refuse, dans bien des cas déjà, de se prononcer sur des questions qui font entrer en ligne de compte la valeur de la vie humaine. Plus tôt cette semaine, nous avons passé une journée à parler de la protection des enfants dans le contexte de la pornographie juvénile. Le fait que le gouvernement refuse de se prononcer de manière directe et résolue sur la question de la pornographie juvénile prouve justement, à mon avis, qu'il est ce ceux qui ne veulent rien avoir à faire avec ce qui se rapporte à la reconnaissance de la valeur suprême de la vie humaine.

    Le printemps dernier, j'ai eu l'occasion de rencontrer des policiers dont le travail a trait à ce genre de matériel. J'ai assisté à l'exposé qu'ils ont présenté et je suis d'accord avec mon collègue de Wild Rose pour dire qu'il est injustifiable de laisser les choses continuer plus longtemps.

    La position du NPD selon laquelle, pourvu que les créations proviennent de l'imagination, elles doivent pouvoir se justifier, m'a mise mal à l'aise l'autre jour. Après m'être entretenu avec des policiers qui oeuvrent quotidiennement dans le domaine de la lutte contre la pornographie juvénile, je suis devenu moins tolérant, je crois. Celle-ci est répugnante. Elle est abjecte. Le refus de trancher la question fait clairement ressortir l'attitude du gouvernement envers le public.

    Il nous faut pencher sérieusement sur deux questions. D'abord, quand la vie humaine débute-t-elle? Selon la loi, celle-ci débute à la naissance, mais cela n'a pas de bon sens du point de vue scientifique, et c'est franchement absurde. Cela m'est revenu à l'esprit l'autre jour en regardant une annonce de bière. Sur l'affiche, on pouvait voir un foetus dans le ventre de sa mère. Le message était le suivant: quand vous buvez, l'enfant s'en ressent. J'ai trouvé intéressant que les compagnies de bière reconnaissent le fait que foetus et embryons sont des êtres humains, alors que le gouvernement refuse de le reconnaître.

  +-(1625)  

    Il est évident d'après moi qu'il y a création d'un être humain lorsque se produit l'union du matériel génétique et que tous les éléments de l'ADN sont transposés. Que nous soyons d'accord ou pas, c'est seulement à ce moment-là, scientifiquement parlant, que la vie humaine commence réellement.

    Les scientifiques ont bien essayé de nous lancer sur de fausses pistes en nous disant, par exemple, avoir décidé arbitrairement que la vie commençait après une période de 14 jours. C'est une décision qui n'a aucun fondement scientifique. C'est ni plus ni moins une façon d'esquiver le débat scientifique et de refuser de discuter du moment où commence réellement la vie humaine.

    En général, les scientifiques ont manqué à leur devoir de définir clairement quand commence la vie humaine. Ils risquent de se disqualifier en ne traitant pas honnêtement de la question. Pour beaucoup de scientifiques, c'est davantage une question économique que scientifique ou éthique. Ils veulent avoir les coudées franches. Ils veulent avoir la liberté de mener des expériences. Ils ne veulent pas discuter des choix moraux qu'il faut faire et ils tentent par tous les moyens de se soustraire à ce genre de discussion. Il est important que quelqu'un au pays se penche sur la question, et je crois qu'il incombe au Parlement de le faire sérieusement et de la trancher.

    Je crois que nous pouvons accepter que c'est au moment de la conception, lorsque le matériel d'ADN est réuni, que commence la vie humaine. Il y a une autre question importante qu'il faut se poser. Que vaut la vie humaine? Depuis le début des temps, nous considérons que la vie humaine est précieuse dès la conception. La question a été maintes fois débattue au fil des ans, mais la plupart des systèmes de croyance, des religions et des philosophies ont accepté ce fait jusqu'à il y a quelques années.

    Cette notion et ces valeurs ont été dépréciées dans certains milieux et à certaines époques. L'exemple par excellence est Adolf Hitler en Allemagne nazie qui a mis de l'avant l'idéologie que tous les êtres humains ne méritaient pas de vivre jusqu'à leur mort naturelle. Il a ciblé des groupes particuliers. Nous savons qu'il a ciblé des groupes raciaux, les faibles, les handicapés, les groupes visuellement identifiables. Dans plusieurs régions, la couleur ou le teint de sa peau suffisait pour qu'une personne soit interrogée et persécutée.

    Cela me fait penser à l'adage selon lequel nul ne fait ce qu'il estime inacceptable. Nous justifions tous notre comportement et nous sommes prêts à le faire. Il ne faut pas oublier que la préoccupation centrale de Hitler était la génétique; elle visait simplement une étape différente du développement. Nous devons être très prudents par rapport au sort que nous réservons à cette question et au projet de loi et à la façon dont nous commençons à traiter les autres êtres humains et la vie humaine.

    Je veux parler un peu du résultat d'une longue réflexion sur la vie humaine. Si nous ne pouvons arriver à nous entendre sur la valeur de la vie humaine, nous nous exposerons toujours à des conséquences inévitables. Si nous accordons peu de valeur à la vie humaine et que nous ne lui reconnaissons pas un caractère unique dès son commencement, nous dévalorisons toujours les êtres sans défense et ceux qui ne peuvent se faire entendre. Je pense que nous commençons déjà à être témoins de cela aux Pays-Bas, où de nombreux patients hospitalisés ne savent même pas qu'ils sont euthanasiés. Ils n'ont pas voix au chapitre. Ils n'ont pas la capacité ou la force de refuser. À cause de cela, ils n'ont pas la possibilité de dire non.

    Comme je l'ai dit, le gouvernement semble incapable de régler le problème de la pornographie juvénile. Le gouvernement n'arrive pas à régler le problème. Il se montre disposé à vivre avec une mauvaise décision des tribunaux, une décision que certains qualifieraient même de néfaste. On commence à manifester une attitude désinvolte par rapport à la vie humaine dans de nombreux secteurs, et j'espère que ce n'est pas ce qui est en train de se produire dans notre pays.

    Cette désinvolture par rapport à la vie humaine s'accompagne aussi d'une volonté d'attribuer des valeurs différentes à différents êtres humains. Le problème s'est posé avec Tracy Latimer il y a quelques années, le père de la fillette ayant décidé de mettre un terme à sa vie et le gouvernement s'étant muré dans un silence inconfortable sur cette question, et il continuera de se poser. J'espère que l'examen que nous ferons de la vie humaine ne se fera pas au détriment d'autres individus que certains pourraient juger inutiles dans notre société, c'est-à-dire les personnes handicapées et les personnes âgées.

    Je sais que le temps qui m'était imparti tire à sa fin, mais j'aurai l'occasion de reparler de cette question plus tard. Nous devons toutefois reconsidérer ce que nous faisons ici, prendre la question au sérieux et faire preuve de beaucoup de prudence en nous aventurant sur ce terrain et en nous penchant sur le sort à réserver à la vie humaine.

  +-(1630)  

+-

    Mme Diane Ablonczy (Calgary—Nose Hill, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravie d'intervenir aujourd'hui au sujet de ce groupe d'amendements qu'il est proposé d'apporter au nouveau projet de loi sur les techniques de procréation.

    Nous nous réjouissons de savoir qu'une agence sera créée pour surveiller les activités des cliniques de procréation assistée. Nous sommes d'avis qu'il est très important d'exercer cette surveillance. La plupart des autres démocraties mûres l'exercent depuis un certain temps déjà. On ne devrait pas laisser le champ libre à la procréation assistée, car de ces techniques naissent des enfants dont il convient de protéger les intérêts, avant et après coup. La création de cette agence est une excellente nouvelle pour nous. Nous l'attendions depuis longtemps et nous en souhaitons la mise en place dans les meilleurs délais.

    Nous nous en doutons, il convient de réglementer plus strictement ce domaine d'activité. Compte tenu des progrès de la science et du fait que certains en repoussent les frontières bien au-delà de ce que la prudence morale et éthique dicterait, nous ressentons le besoin de resserrer la réglementation, de façon à accroître la sécurité du processus et à le rendre d'une utilisation plus efficace pour les parents éventuels.

    Les cliniques de procréation assistée devront désormais obtenir un permis de cette agence que crée le projet de loi, et en observer la réglementation. L'agence sera assujettie à la Loi sur l'accès à l'information, afin que les Canadiens puissent à leur tour la surveiller un tant soit peu, prendre part à son fonctionnement et s'en faire une certaine idée. On a même prévu à son égard un mécanisme de reddition de comptes.

    Nous appuyons l'amendement qui exigerait que l'agence établisse des formulaires standard et précise certains renseignements qu'il serait obligatoire de communiquer aux personnes qui ont recours à la procréation humaine assistée. Nous pensons que ce genre d'uniformisation sera très utile et nécessaire lorsque des personnes donneront, utiliseront et élimineront du matériel reproductif humain.

    En février 2001, le vérificateur général a dit clairement que le Canada éprouvait des problèmes graves avec ses banques de sperme, notamment en ce qui a trait à la tenue incorrecte des registres et à la présence de donneurs inadmissibles. Tout cela fait peur, quant on songe que toute la raison d'être de ce processus est de produire des enfants qui risquent d'être affectés par toutes sortes d'activités liées à leur naissance. L'uniformisation et la standardisation sont des mesures extrêmement importantes pour protéger les intérêts des enfants.

    Toutefois, la ministre veut faire échec à certaines des recommandations formulées par le comité. Nous n'appuyons pas la démarche de la ministre à cet égard.

    Premièrement, la ministre veut s'opposer à la recommandation selon laquelle les personnes qui siègent à l'agence de contrôle de la procréation assistée ne doivent pas être en conflit d'intérêts. La ministre dit que c'est correct si des personnes qui sont chargées de réglementer la procréation humaine assistée sont aussi des intervenants dans ce domaine.

    Il ne faut guère d'imagination pour comprendre que des personnes qui ont un intérêt directement lié à l'étendue des activités permises ne devraient pas prendre les décisions dans ce domaine. Les décisions ne devraient pas être prises par ces personnes. Nous ne comprenons pas comment la ministre pourrait dirait qu'il n'y a rien de mal à ce que des personnes en situation de conflit d'intérêts prennent les décisions dans ce domaine important. La ministre n'est pas ici pour expliquer pourquoi il devrait en être ainsi.

  +-(1635)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je rappelle à la député qu'elle ne peut faire mention de l'absence d'un autre député.

+-

    Mme Diane Ablonczy: Monsieur le Président, permettez-mois de reformuler et de présenter mes excuses. La ministre n'a pas expliqué à la Chambre pourquoi elle estime cet amendement important ou nécessaire. À défaut d'une justification, nous ne pouvons que nous opposer à la décision qui permet à des personnes en conflit d'intérêts de prendre des décisions d'une telle importance. Les directeurs de projets et les personnes qui possèdent des intérêts financiers dans la procréation humaine assistée manqueraient de toute évidence de la crédibilité et de l'objectivité nécessaires pour prendre des décisions à ce chapitre.

    Nous émettons également des réserves à l'égard de l'amendement proposée par la ministre en vue d'abroger la recommandation du comité selon laquelle la moitié des administrateurs de l'Agence de contrôle de la procréation assistée doivent être des femmes, encore une fois parce que la ministre n'a donné aucune explication à la Chambre à ce sujet.

    Nous savons que la procréation assistée vise vraiment à répondre aux besoins des femmes. Les hommes sont également visés, particulièrement en contexte familial, mais pas dans tous les cas. Nous estimons qu'il doit y avoir une forte représentation féminine lors de la prise de décisions de cette nature. Il n'est peut-être pas nécessaire que cette représentation soit de 50 p. 100, mais nous nous inquiétons certainement du fait que les femmes puissent être exclues à un point inacceptable du fonctionnement de l'agence. Néanmoins, comme les femmes sont les principales clientes, je crois même qu'on peut dire que ce sont elles qui ont accès à cette importante technique, leurs voix doivent être entendues.

    Je répète encore une fois que nous aimerions savoir pourquoi la recommandation a été retirée. Nous voulons nous assurer que les femmes ne sont pas exclues sans motifs valables par leurs pairs masculins d'un domaine dominé par les hommes. J'exhorte la Chambre à se pencher de nouveau sur cette question.

    Le Comité de la santé doit choisir les administrateurs en fonction de leur sagesse et de leur jugement. Nous convenons certainement de cela. Le critère du mérite doit avoir un poids considérable, mais les personnes les plus visées par ces activités doivent également avoir une participation importante.

    Nous accordons une certaine valeur aux amendements visant à garantir un financement adéquat à l'agence. Cela va de soi. Il est inutile de créer une agence qui ne dispose pas des fonds nécessaires pour faire son travail. Nous sommes favorables à un amendement obligeant l'agence à définir un mode de règlement des différends pouvant comprendre un processus d'arbitrage, en cas de désaccord entre l'agence, les donneurs, les détenteurs d'une autorisation ou d'autres parties intéressées. Je suppose qu'il est passablement difficile, si les dirigeants de l'agence peuvent se trouver en situation de conflit d'intérêts, de voir comment ce mécanisme de règlement des différents pourrait fonctionner en toute impartialité, mais il sera évidement extrêmement important de disposer d'un tel mécanisme.

    Ce groupe d'amendements comporte une disposition intéressante au chapitre de la reddition de comptes. À l'origine, l'agence devait rendre des comptes chaque année au Parlement, mais la ministre voudrait changer cela afin de pouvoir faire rapport elle-même des activités de l'agence. Nous ne sommes pas d'accord avec l'idée que les rapports de l'agence soient filtrés par la ministre. Nous sommes d'avis que, dans ce domaine important, il vaut mieux y avoir le moins de filtrage politique possible. J'aimerais bien que la ministre nous explique pourquoi elle propose cet amendement, que nous rejetons du simple fait qu'il crée un obstacle indésirable entre le Parlement et l'agence.

  +-(1640)  

    Enfin, nous croyons que les personnes qui concluent une entente de maternité de substitution doivent être conseillés. La ministre aimerait que les services de consultation ne soient plus obligatoires, bien qu'ils demeurent accessibles. Nous pensons qu'ils devraient être obligatoires.

+-

    Mme Val Meredith (South Surrey—White Rock—Langley, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureuse d'intervenir à l'étape du rapport des amendements du groupe no 4 proposés au projet de loi C-13, sur les techniques de procréation.

    Comme on l'a déjà dit, nous voulons que la nouvelle agence rende des comptes et qu'elle ait des procédures transparentes permettant aux Canadiens de bien voir comment cette loi va les toucher et comment le gouvernement va répondre aux nouvelles modifications législatives.

    Nous nous préoccupons des modifications que la ministre a apportées et qui vont à l'encontre des recommandations que le Comité de la santé a faites lorsqu'il a étudié en détail ce projet de loi sur les techniques de procréation. Le Comité de la santé a précisé clairement qu'on s'engageait dans une nouvelle voie et que certaines pratiques et procédures allaient causer de l'inquiétude aux Canadiens. Le comité voulait garantir une protection et un certain contrôle sur la façon dont ces techniques allaient être utilisées.

    Le comité a été plutôt direct sur la façon dont il voyait l'agence chargée de superviser l'application de cette loi. Il voulait que l'agence rende des comptes et fasse rapport au Parlement. Pour une raison que j'ignore, la ministre veut que le contrôle demeure au sein de son propre ministère et entre ses mains en ce qui concerne le rapport au Parlement et la reddition de comptes.

    Cela nous pose des problèmes. Nous croyons que pour qu'une agence rende des comptes et soit transparente, elle doit être séparée le plus possible du niveau politique. Notre parti veut que cette agence soit quelque peu indépendante de la ministre afin qu'elle puisse s'acquitter de son travail, examiner les techniques, voir comment le projet de loi sera utilisé, comment les règlements seront respectés, et réagir en fonction de cela.

    Les membres du comité ont jugé qu'en raison de la nature de la question, les femmes devaient être bien représentées au sein du conseil d'administration de l'agence. On a cru qu'il était important que les femmes puissent participer à la surveillance de la réglementation des techniques de procréation dans la loi. Pour une raison quelconque, et je trouve cela plutôt surprenant, la ministre a jugé que cela n'était pas nécessaire. Elle a dit qu'un conseil formé d'hommes seulement suffirait. Encore plus surprenant, elle a conclu qu'une agence formée d'une seule personne pourrait suffire. Cela nous inquiète.

    Il doit y avoir plus de détails sur la façon de constituer cette agence, sur ses membres et sur ceux qu'elle représente. Je crois personnellement qu'une agence de la sorte, qui s'intéresse aux techniques de procréation assistée, doit compter dans ses rangs des représentants des différents groupes possédant les connaissances et les capacités requises pour surveiller l'évolution future dans ce domaine. Elle devrait regrouper des représentants du milieu médical et du milieu scientifique, ainsi que des représentants des citoyens ordinaires capables de faire valoir les opinions de la population à l'égard de ces nouvelles techniques. Voilà un changement que nous souhaitons, pour que la mesure législative reflète mieux ce que le Comité de la santé avait recommandé.

    Nous voudrions que la ministre revoie comment l'agence sera constituée et qui en fera partie. Nous aimerions que la ministre nomme une femme au conseil d'administration. C'est maintenant qu'on peut se pencher sur ces problèmes et amender le projet de loi en conséquence.

  +-(1645)  

    Notre parti souhaite aussi que, lorsque les gens désireux de fonder une famille et d'avoir des enfants auront recours à ces nouvelles techniques de procréation, ils soient mis au courant des options qui s'offrent à eux. Les techniques de procréation sont de plus en plus diverses et accessibles. Plus de gens savent maintenant qu'il peuvent avoir recours à ces techniques pour fonder une famille. Je ne suis pas certaine qu'on leur explique parfaitement leurs options, les façons de procéder et les ramifications juridiques possibles.

    L'Alliance canadienne est d'avis qu'il faudrait établir un programme pour que ces gens soient non seulement mis au courant, mais exhortés à bien comprendre tous les aspects juridiques. Obligatoire serait peut-être un mot trop fort. Cependant ils devraient avoir recours aux techniques de procréation en sachant parfaitement ce que cela signifie.

    Je ne crois pas qu'il soit exagéré de demander à la ministre de voir à ce que tous les renseignements possibles soient fournis à ces personnes afin qu'elles ne se trouvent pas un jour dans une situation imprévue, ou dont elles n'avaient pas été informées.

    Je vais élargir le débat en parlant du cas des médicaments qui ont été prescrits à des gens sans que ceux-ci ne sachent avec précision quels en étaient les effets secondaires et quels dommages ils pouvaient causer. Nous en constatons maintenant les répercussions parce que des gens ont intenté des poursuites judiciaires pour non-divulgation de tous les risques. Le processus est très coûteux lorsqu'il se produit quelque chose de fâcheux et que les intéressés n'ont pas été pleinement informés des risques.

    Nous aurions dû exiger que les médecins informent leurs patients des effets secondaires des médicaments qu'ils leur ont prescrits. Nous devons agir de la même façon dans le domaine des technologies de reproduction. Nous pourrons éviter bien des conflits juridiques si nous sommes très clairs dès le début. Si la seule option est de rendre la divulgation obligatoire, il faut le faire.

    Ainsi, les personnes recourant aux technologies de reproduction le feront en toute connaissance de cause. Je ne pense pas que ce soit trop demander. Il est vraiment élémentaire que, dans un domaine nouveau qui évolue constamment comme celui-là, l'on donne de tels renseignements aux personnes qui y ont recours.

    Nous voulons modifier le projet de loi au moyen des amendements du groupe no 4. D'une part, il est question de l'agence et de sa composition, qui siégerait à son conseil et comment celui-ci rendrait compte au Parlement et non au ministre. D'autre part, il est question de l'obligation de conseiller tous ceux qui ont recours aux techniques de reproduction, afin qu'ils en saisissent bien tous les aspects des procédures dont ils feront l'objet.

    J'invite le gouvernement à garder l'esprit ouvert et à ne pas hésiter à amender le projet de loi afin d'en élargir la portée et de le clarifier, bref de l'améliorer. Nous pourrons ainsi éviter des écueils, simplement en prenant notre temps et en faisant bien les choses du premier coup.

*   *   *

  +-(1650)  

+-Le rapport du Commissaire à la protection de la vie privée

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Avant que ne reprenne le débat, je tiens à informer la Chambre qu'une erreur s'est glissée dans le dépôt du rapport du Commissaire à la protection de la vie privée sur des lois provinciales très semblables. Ce rapport est renvoyé définitivement au Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires et non, comme on l'a annoncé plus tôt, au Comité permanent de la justice et des droits de la personne.

*   *   *

+-La Loi sur la procréation assistée

    La Chambre reprend l'étude du projet de loi C-13, Loi concernant la procréation assistée, dont le comité a fait rapport avec une proposition d'amendement; ainsi que du groupe de motions no 4.

+-

    M. Roy Bailey (Souris—Moose Mountain, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis heureux de participer à ce débat et d'exprimer mon point de vue en tant que père et grand-père de huit petits-enfants; c'est dire que je suis ici depuis plus longtemps que la plupart des gens. Pendant toute ma vie professionnelle, j'ai travaillé auprès des gens. Près de la moitié des personnes qui viennent me consulter à mon bureau de circonscription ne le font pas pour des raisons purement politiques, mais davantage pour avoir des conseils. Je le respecte et je suis honoré qu'ils le fassent.

    Le sujet à l'étude préoccupe les Canadiens. Nous qui sommes leurs représentants, nous devons réfléchir très sérieusement à la façon dont nous rédigerons le projet de loi, afin qu'il soit représentatif de tous les Canadiens. Je ne puis concevoir que le gouvernement fédéral propose, par l'intermédiaire des députés qui le représentent au sein du Comité de la santé, de se décharger du problème sur les gouvernements provinciaux, car il y aurait alors dix réglementations différentes. Je sais bien que ce n'est pas ce que propose le gouvernement, mais comme le sujet relève de la santé, j'espère que les gens comprendront qu'il s'agit d'élaborer ici un programme et une politique à l'échelle nationale.

    Je tiens à ce que ce soit parfaitement clair, sinon il y aurait tant d'incompréhension que les gens pourraient blâmer les gouvernements provinciaux si jamais des écueils se présentaient. Tous les rapports et amendements que produira la comité devront être présentés à la Chambre. Je ne dis pas qu'il ne faut pas les présenter aussi au ministre de la Santé, mais la Chambre devra absolument en être saisie.

    Je trouverais très préoccupant que les services-conseils ne soient pas standardisés. Les personnes qui dispenseront ces services, dans quelque province que ce soit, et c'est sans doute ce qui va se passer, devront appliquer des méthodes aussi uniformes que possible à la grandeur du Canada. C'est très important.

    Les mêmes formulaires devront être utilisés en Colombie-Britannique et à Terre-Neuve-et-Labrador. Il est très important qu'il en soit ainsi à la grandeur du Canada, car si une erreur fondamentale se produisait, c'est le Parlement qui serait blâmé. C'est pourquoi il nous apparaît important que la question soit traitée comme un dossier national.

    Il faut que les gens sachent qu'il ne s'agit pas d'une transaction commerciale que l'on fait parce qu'on est incapable de concevoir, par exemple. Il faut donc s'assurer que les personnes qui souhaitent avoir recours à l'adoption ou à la maternité par substitution ont la maturité voulue et qu'elles ont été conseillées, préparées et informées comme il faut avant de donner suite à leur demande. Il ne s'agit pas d'une transaction personnelle au même titre que l'achat d'une automobile ou d'une nouvelle maison. Il s'agit d'une affaire très sérieuse.

  +-(1655)  

    Ma recommandation au comité, et je sais qu'une somme considérable de travail a été accompli, serait qu'aucun de ses membres n'ait quelque intérêt commercial ou financier que ce soit pendant qu'il occupe ces fonctions. Il ne doit y avoir absolument aucun rapport entre les membres du comité et tout le processus; ceux-ci ne doivent tirer aucun avantage personnel de leur participation aux travaux du comité. De plus, la composition du comité devrait transcender les barrières politiques. Ma conception de ce comité est celle d'un comité composé de personnes expérimentées, sages et prudentes, pas nécessairement issues du milieu scientifique et médical, mais de personnes qui en ont vu d'autres, comme on dit, et qui sont conscientes des incidences possibles.

    Faisons bien les choses et faisons-les bien du premier coup. Adoptons une position ferme à l'égard de ce que le comité représente ou des sujets qui auront été abordés, Qu'ils le veuillent ou non et peu importe leur allégeance, les députés feront l'objet d'un examen minutieux si les bonnes procédures ne sont pas mises en place dès le départ.

  +-(1700)  

+-

    M. Rick Casson (Lethbridge, Alliance canadienne): Monsieur le Président, c'est un plaisir de parler de nouveau du projet de loi C-13 à l'égard de ce groupe d'amendements. Mon collègue de Souris—Moose Mountain a mentionné certains des problèmes qui semblent si évidents que nous ne devrions pas avoir à en parler. Une personne nommée à une agence qui régira le secteur des techniques de reproduction de notre société ne devrait pas avoir un intérêt direct dans, disons, une clinique de fertilité. C'est logique. Parfois, on nous accuse de ne pas être très logiques quand nous façonnons les lois, mais ça, ça l'est.

    Avant de commencer, j'aimerais mentionner que, actuellement, le député de Yellowhead est membre du Comité de la santé et que c'est lui qui suit ce projet de loi au nom de l'opposition officielle mais que, avant, c'était Preston Manning, l'ancien chef de notre parti, qui s'occupait de ce dossier. Le travail qu'il a fait dans ce dossier, les connaissances qu'il a apportées à la table, et les gens qu'il a fait venir pour présenter leur point de vue sur la question ont produit probablement l'un des meilleurs comités et l'un des meilleurs rapports que la Chambre ait jamais connu, certainement de mon temps. Je tenais à mentionner que Preston Manning avait énormément contribué à cette étude et à ce rapport.

    La question des mères porteuses est réellement un élément important de tout ce dossier. Nous trouvons que la motion no 52, proposée par la ministre de la Santé, cherche à contrecarrer un amendement proposé par le comité. Et ça recommence! J'en parle souvent. Il se fait du bon travail au comité. On fait venir des gens comme témoins et un comité pluripartite décide de ce qui serait le mieux en fonction de l'information qu'il a recueillie, puis la ministre s'amène et essaie de défaire le travail du comité. Selon moi, c'est tout simplement mal.

    Voici ce que la ministre de la Santé essaie de faire, quant à la question des services de consultation offerts aux femmes qui veulent être mères porteuses. La ministre de la Santé dit que les services de consultation devraient simplement être offerts si besoin est, que ça ne devrait pas être obligatoire, que les personnes qui s'engagent sur cette voie ne devraient recevoir des services de consultation que si elles en ont besoin. Toutefois, dans le cadre de cet aspect du débat sur les techniques de reproduction, nous estimons qu'ils devraient être obligatoires, que les gens devraient avoir une connaissance complète de toutes les ramifications et de tous les problèmes qui existent. On peut citer des exemples dans d'autres pays pour illustrer à quel point la question est complexe, et quels en sont les effets sur la mère, le père et les parents adoptifs, ainsi que sur les relations qui se créent et pourquoi on risque de s'embourber dans des litiges sans fin.

    Il est important que la consultation soit abondante. Elle devrait être obligatoire. Une personne acceptant de jouer le rôle de mère porteuse devrait être très consciente de tous les problèmes. Nous nous opposons à la motion no 52 pour les motifs suivants: le comité avait raison et la ministre cherche à revenir sur cette question.

    Nous appuierons la motion no 55. C'est celle dont parlait plus tôt mon collègue. Selon moi, elle traite de façon tout à fait sensée de l'uniformisation des formulaires et des modalités de communication des renseignements dans le cas d'un don. Il est tout à fait sensé d'intégrer cela dans le projet de loi. C'est la raison d'être de cet amendement. Nous l'appuierons. Les formulaires devraient être utilisés dans toutes les cliniques spécialisées dans le traitement de la fertilité, ainsi qu'à l'occasion de toute transaction mettant en cause du matériel reproductif humain.

    La mauvaise tenue de dossiers de certaines banques de sperme a posé des problèmes dans le passé. Il est parfois impossible de déterminer qui étaient les donneurs, ou les conséquences des situations ayant mal tourné. Il est très important de se doter de règles uniformes et de les appliquer à tous les volets de l'industrie. Qu'il s'agisse d'une clinique spécialisée dans le traitement de la fertilité, d'un hôpital ou de l'agence, tous devraient fonctionner selon les mêmes règles.

  +-(1705)  

    La motion no 72 nous pose également des problèmes. C'est une motion où la ministre cherche à défaire le travail du comité. Le comité voulait notamment avoir la certitude absolue que quiconque siège au conseil de l'agence exerçant le contrôle sur ce système de technologie reproductive ne se retrouverait pas en situation de conflit d'intérêts par rapport à quelque décision qui pourrait être prise. On serait porté à penser que cela va de soi, mais ce n'est pas le cas, encore une fois. Il faut que ce soit précisé en toutes lettres, mais ce ne l'est pas. Prenons un cas où une personne exploitant une clinique spécialisée dans le traitement de la fertilité réussit d'une façon ou d'une autre à se faire nommer au conseil et compte parmi les gens chargés de se prononcer sur les limites, notamment sur le nombre d'expériences possibles portant sur des embryons, et ainsi de suite. Cet aspect doit être clarifié. Il ne sera pas abordé dans la mesure législative, parce que la ministre a cherché à défaire le travail du comité.

    Pour ce qui est de l'agence, elle doit échapper à toute influence de l'industrie. On doit limiter le nombre d'embryons qu'il est possible de créer. Le problème que je perçois ici, c'est qu'en l'absence d'un mécanisme de contrôle assez strict, nous créerions alors une industrie effectuant le commerce des embryons. C'est une situation que nous devons éviter à tout prix. C'est faire le commerce de la vie humaine.

    Il y a aussi toute la question de la différence entre les cellules souches embryonnaires et les cellules souches adultes. La plus grande partie des progrès et du bon travail accomplis, sans compter les espoirs donnés à ceux qui souffrent de la maladie de Parkinson, de la sclérose en plaques et d'autres maladies terribles, est le résultat des travaux et de la recherche sur les cellules souches adultes. La recherche sur les cellules souches embryonnaires est déficiente. Il y a des problèmes; il faudrait que les gens prennent des médicaments anti-rejet durant le reste de leur vie. Il y a eu tellement de progrès du côté des cellules adultes que, selon nous, un moratoire d'au moins trois ans devrait être imposé à la recherche sur les cellules souches embryonnaires, afin que l'on puisse examiner plus en profondeur ce qui s'est fait et ce qui continue de se faire du côté de la recherche sur les cellules adultes.

    Seulement au cours de la dernière année, des progrès étonnants et magnifiques se sont produits dans le domaine de la recherche sur les cellules souches adultes. Si nous continuons dans cette voie et si nous élargissons nos efforts de recherche sur les cellules adultes avant de passer aux cellules embryonnaires, nous pensons que les progrès et les découvertes seront tels qu'il ne sera pas nécessaire de faire appel aux cellules embryonnaires, c'est-à-dire de créer la vie pour détruire la vie.

    Ce ne sont là que quelques-unes des préoccupations que nous avons relativement au projet de loi et aux amendements du groupe no . Nous discuterons plus tard du groupe no 5 lorsque le moment sera venu.

    Cela dit, je répète qu'il faut se pencher sur la situation en vertu de laquelle un comité siège, étudie un dossier, puis présente un rapport et des amendements auxquels la ministre essaie ensuite de faire échec. Ce n'est pas le moment d'examiner cette question, mais il est certain qu'il faudra le faire dans le cadre d'une étude du fonctionnement global de la Chambre.

+-

    Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le Président,au moment de prendre la parole aujourd'hui je suis un peu secouée, comme je l'étais en début de semaine, lorsque nous avons discuté de pornographie juvénile. Aujourd'hui, nous discutons de recherche sur les cellules souches embryonnaires. Il s'agit de toutes petites cellules qui sont de minuscules bébés. Nous discutons d'êtres vivants, et tous les députés doivent en être conscients.

    Je n'arrive pas à croire que nous envisageons ce genre de recherche au Canada. L'autre jour, à Saint John, au Nouveau-Brunswick, j'ai reçu par la poste un modèle en plastique de ce qui est censé être un embryon de 12 jours. C'est un tout petit bébé. Si tous les députés le voyaient, ils ne discuteraient même pas de recherches sur les cellules souches embryonnaires.

    Le député de l'Alliance qui vient de parler a dit qu'il se faisait des recherches sur les cellules souches adultes, et qu'elles ne posaient aucun problème d'éthique. Ces recherches sont aussi beaucoup plus prometteuses. Il n'est pas question de nous y opposer. Comme on l'a déjà dit, ces cellules sont utilisées aujourd'hui pour traiter la maladie de Parkinson, la leucémie, la sclérose en plaques et de nombreuses autres maladies. Nous sommes tous d'accord. J'ai la très profonde conviction que les chercheurs devraient faire porter leurs efforts sur les cellules souches adultes. Il y a un risque d'utilisation inacceptable de ce minuscule embryon, qui est un enfant. La vie commence dès la conception.

    Examinons le projet de loi, le nouveau groupe de motions et les motions nos 52 à 77. La ministre cherche à annuler un amendement du comité exigeant que les membres du conseil d'administration de l'Agence canadienne de contrôle de la procréation assistée soient assujettis aux règles sur les conflits d'intérêts. Le Comité de la santé estime que les membres du conseil ne devraient posséder aucun intérêt commercial dans le domaine de la procréation assistée, ni dans les recherches connexes. Il a parfaitement raison. Les membres du conseil ne devraient pas avoir de tels intérêts. Ils peuvent devoir discuter des cliniques de fertilité et des entreprises de biotechnologie, et le conseil doit faire rapport. Imaginez qu'un employé ou un investisseur d'une entreprise de biotechnologie possédant des intérêts financiers dans des recherches sur les cellules souches embryonnaires prenne des décisions, au nom des Canadiens, sur la réglementation de ces recherches. C'est inadmissible.

    Nous sommes ici pour protéger les enfants à naître, les cellules embryonnaires. J'ai vraiment été consternée au cours des quelques derniers mois lorsque je me suis mise à étudier ce qui s'était passé dans ce dossier et la tendance qui se dégageait. Je regarde les députés ici et d'autres jeunes gens. Lorsque je vois un nouveau-né, je ne peux m'empêcher de me demander comment on pourrait vouloir faire disparaître une cellule et empêcher la naissance d'un tel enfant. Il est évident que nous vivons dans un monde mené par la haute technologie et que nous devons faire beaucoup de recherches. Toutefois, de nos jours, c'est sur les cellules souches adultes que la recherche devrait porter. Personne n'aura quoi que ce soit à redire à ce sujet.

    Lorsque la science médicale est aussi avancée qu'elle l'est de nos jours, il devient parfois important d'établir des différences entre ce que nous pourrions faire et ce que nous devrions faire. C'est exactement ce que nous faisons ici ce soir. La science et la technologie nous ont fourni un autre sujet de débat dans cette discussion qui est loin d'être récente. Le projet de loi à l'ordre du jour, avec les amendements et les innombrables motions qui ont été déposés par les députés à ce sujet, vise à réglementer la reproduction humaine, la recherche sur les cellules souches et le clonage. En aucun cas nous ne devrions avoir recours au clonage.

    

  +-(1710)  

    

    J'ai écouté moi aussi le discours sur l'état de l'Union prononcé par le président des États-Unis. En aucun cas les États-Unis ne permettraient le clonage. Pourquoi le ferions-nous au Canada? On a affirmé que cette mesure législative imposerait des limites au genre de science brutale que certains considèrent comme une façon acceptable de parvenir à ses fins. Ce qui me préoccupe le plus, c'est que cela permet la recherche sur les cellules souches embryonnaires et la destruction de foetus humains au nom de la recherche scientifique.

    Cela n'est pas le Canada. Ce n'est pas le genre de recherches que nous voulons voir au Canada. On permet ce genre de recherches, même s'il a été établi que les cellules souches adultes ont une bonne partie de ces qualités médicinales que les chercheurs tentent de trouver dans les embryons. Que ferait-on si quelqu'un affirmait que les cellules souches prélevées chez des bambins de trois ans en pleine santé avaient de grandes chances de permettre de trouver un traitement pour guérir le cancer?

    J'espère que le projet de loi sera modifié avant qu'on nous demande de nous prononcer, mais je tiens à être très claire ce soir. En toute conscience, je ne peux pas appuyer un projet de loi qui permet la recherche sur les cellules souches embryonnaires. J'ai fait de mon mieux pour exprimer clairement ma position sur cette question. Honnêtement, est-ce que quelqu'un peut soutenir qu'il est tout à fait acceptable de prendre la vie de bambins de trois ans au nom de la science médicale? Si nous trouvons cruel et barbare de prendre la vie d'un bambin de trois ans, pourquoi, en tant que société et en tant que gouvernement, ne trouvons-nous pas tout aussi cruel et barbare de prendre la vie d'un embryon sain dans le sein de sa mère?

    Je m'adresse à mes amis de la Chambre. Nous avons un problème dans notre façon de voir les choses ces jours-ci. C'est ce que je constate depuis le début de la semaine. Les embryons humains sont des être humains, et aucun député ne devrait soutenir le contraire à la Chambre.Nous savons tous que la vie commence au moment de la conception. Regardons les jeunes gens qui sont ici aujourd'hui. Leur aurions-nous enlevé la vie? Non. Il suffit de les regarder pour savoir que nous ne pourrions pas faire cela.

    Je dois avouer que je suis contre la destruction d'embryons humains pour quelque motif que ce soit, y compris pour la recherche scientifique. Nous devons veiller à ce que ceux qui ont des intérêts financiers dans la recherche sur les cellules souches embryonnaires ne prennent pas de décisions à la place des Canadiens au sujet de la réglementation de cette recherche, y compris de la définition du mot « nécessaire » qu'on trouve à l'article 40. Imaginons qu'un directeur d'une clinique de fertilité établisse un règlement sur les limites de dons de spermatozoïdes et d'ovules, sur le nombre d'embryons produits pour servir à la fécondation in vitro. Dans ce projet de loi, nous devons nous assurer d'éviter les conflits d'intérêt.

    Où est la ministre, qui devrait expliquer pourquoi cet amendement doit être présenté? Que nous est-il arrivé? Pourquoi permettons-nous que tous nos principes soient bafoués?

    L'amendement exigerait que le ministre de la Santé dépose un rapport annuel. Non, nous voulons un rapport annuel transparent au sujet de la réglementation de la procréation assistée et de la recherche connexe, et nous préférerions que l'agence elle-même produise ce rapport. Nous voulons une agence indépendante, et non une agence dirigée par le ministre de la Santé ou quelqu'un d'autre. Lorsqu'il est question de la vie d'un être humain, nous voulons que cette agence indépendante puisse faire rapport à la Chambre des communes.

    Je prie pour que tous les députés n'appuient pas ce nouveau groupe. Nous appuyons la majeure partie des amendements qu'ont présentés les députés d'opposition, mais tous les députés ministériels doivent être responsables et protéger l'embryon, le petit enfant qui se trouve dans cet embryon. Tous les députés doivent affirmer qu'ils ne permettront pas la recherche sur les cellules souches embryonnaires, qu'ils permettront plutôt la recherche sur les cellules souches adultes. Nous accepterons cela, mais nous refusons carrément qu'on enlève la vie à un enfant pour effectuer de la recherche.

  +-(1715)  

+-

    M. Paul Szabo (Mississauga-Sud, Lib.): Monsieur le Président, dans les motions du groupe no 4 présentées à l'étape du rapport du projet de loi C-13, il s'en trouve quatre que j'ai parrainées et je voudrais vous parler brièvement de l'une d'entre elles. Les députés ont fait de l'excellent travail en ce qui concerne la motion no 55 que j'ai présentée et qui préconise l'adoption de formulaires standard pour les cliniques spécialisées dans le traitement de la stérilité.

    Le Canada compte 24 cliniques de ce genre. Certaines bénéficient de financements publics et sont associées à des hôpitaux comme le Centre de fertilité de l'hôpital d'Ottawa. Néanmoins, d'autres cliniques privées de traitement de la stérilité, que les députés devraient connaître, ont refusé de comparaître devant le Comité permanent de la santé pour expliquer comment elles fonctionnaient, nous montrer leurs formulaires et nous dire comment les choses allaient. Il se trouve ainsi de ces cliniques qui ne veulent pas parler de leur fonctionnement, ni au Parlement, ni aux Canadiens.

    J'estime qu'il est très important que nous exigions l'harmonisation des formulaires dans l'ensemble des cliniques de traitement de la stérilité pour que notre agence puisse, lorsqu'elle est amenée à se prononcer sur leurs demandes concernant des travaux de recherche et autres questions ayant trait à l'utilisation de matériels, le faire en toute connaissance de cause, en s'appuyant sur de l'information fournie avec un consentement éclairé et normalisée à l'échelle de l'industrie. J'espère que tous les députés appuieront la motion no 55.

    La motion no 61 préconise l'application de la Loi sur les langues officielles à l'agence. Je tiens à remercier le député d'Ottawa—Vanier, le président du comité des langues officielles du Parlement, qui a prononcé un discours très éloquent à ce sujet. Je sais également gré à la députée de Saint-Lambert pour avoir appuyé la motion qui était en réalité la sienne. Comme elle était membre du comité, elle ne pouvait pas présenter de motion. Je l'ai fait à sa place et je suis ravi de lui annoncer que le gouvernement a accepté de faire sienne cette motion.

    La motion no 75 concerne le président de l'agence et le nombre de fois dont son mandat de trois ans pourra être renouvelé. Dans l'état actuel des choses, on ne sait pas très bien combien de fois une personne peut être reconduite dans ces fonctions. J'ai vérifié auprès de la présidence du Comité des comptes publics pour connaître les conditions habituelles pour ce qui concerne la Commission d'accès à l'information et d'autres agences ou organismes quasi judiciaires similaires. À compter d'aujourd'hui, nous sommes convenus qu'un total de six ans est des plus indiqués et semble correspondre le plus à ce qui se fait ailleurs. J'ai proposé dans la motion no 75 que le mandat soit de trois ans avec possibilité de renouvellement une fois, ce qui nous donne un maximum de six ans.

    La motion no 77 demande l'établissement d'un mécanisme de règlement des différends pour l'agence. Je ne saurais dire à la Chambre combien seront délicates les questions liées aux donneurs de spermatozoïdes et d'ovules, aux donneurs d'embryons, à la fécondation in vitro, aux cliniques de traitement de la stérilité, aux chercheurs et aux activités commerciales. De nombreuses parties sont associées à l'utilisation d'embryons humains, à l'extraction de cellules souches et à leur utilisation à un certain moment. Des problèmes surgiront. Des gens auront des désaccords. Il y aura des interprétations de cette mesure législative. J'estime très important qu'un mécanisme de règlement des différends soit incorporé dans le projet de loi et soit une condition préalable à une autorisation. Cela éviterait à l'agence de longues procédures judiciaires qui bouleverseraient beaucoup le déroulement des activités.

    Je voudrais commenter la motion no 71. La ministre de la Santé a décidé qu'elle voudrait supprimer l'article de la motion que le comité a présentée à l'étape du rapport qui vise à établir un équilibre entre les sexes au conseil d'administration. À mon avis, personne ne contestera le fait que droguer des femmes au maximum pour qu'elles produisent davantage d'ovules, afin de recueillir des ovules pour les féconder, pour les faire passer par toutes sortes de procédures intrusives et toutes sortes de pressions socioéconomiques, est une question qui concerne les femmes.

  +-(1720)  

    Il ne fait aucun doute dans mon esprit que, sur cette question de société et de santé des femmes, les femmes doivent être représentées au moins à 50 p. 100 au conseil d'administration de cette agence. Je félicite la députée de Winnipeg-Centre-Nord, qui a présenté cette requête au comité et qui l'a convaincu de l'accepter. Nous l'avons approuvée en son nom et je veux qu'elle sache que nous l'appuierons entièrement pour que la motion de la ministre visant à supprimer cet article soit rejetée par la Chambre.

    La motion no 72, de la même députée, qui a travaillé très fort, dit que, dans ce dossier, un conflit d'intérêts est une question sérieuse. Pouvez-vous imaginer, monsieur le Président, la brevetabilité de certaines de ces technologies et des technologies connexes qui en découleraient? Beaucoup de gens auraient des intérêts pécuniaires et nous ne connaîtrions pas l'identité d'un grand nombre d'entre eux.

    Le comité a dit que nous ne voulons pas que le conseil d'administration d'une agence soit rempli de gens qui soient totalement absorbés, intéressés et qui sachent tout. Nous voulons des gens sages. Nous voulons des gens raisonnables. Nous voulons des gens dont les évaluations seraient objectives. Nous voulons des gens qui prendraient de bonnes décisions. Nous voulons des gens qui ne pourraient directement ou indirectement être en situation de conflit d'intérêts ou susceptibles de posséder un intérêt pécuniaire en raison d'une autorisation ou d'une recherche.

    La motion no 12, présentée par la ministre de la Santé, qui abrogerait l'excellente motion du comité proposé par la député de Winnipeg-Centre-Nord, est très importante. Lorsque nous avons soulevé cette question, un haut fonctionnaire a dit ce qui suit au comité:

    Le code de déontologie exige des administrateurs à temps plein une divulgation complète de leurs intérêts financiers, ce qui n'est normalement pas le cas des administrateurs à temps partiel.

    Il a ajouté:

    Ceux-ci en revanche sont assujettis aux principes du code de déontologie. Le raisonnement suivi dans le cas du code de déontologie est que les conséquences d'un conflit d'intérêts pour un administrateur à temps partiel ne sont pas aussi lourdes que pour le président, qui est à temps plein, qui se trouve à être le président directeur général de l'agence.

    Les membres à temps partiel ayant plein droit de vote--les risques de conflits sont moindres pour un membre à temps plein. C'est absurde, selon moi.

    Il a ajouté:

    Exiger la divulgation complète de leurs intérêts financiers pourrait dissuader des gens d'accepter un poste à temps partiel peu rémunéré.

    Nous avons une agence de 13 employés. Je trouverai 13 personnes qui sont prêtes à servir au sein d'une agence très importante et qui sont disposées à prendre le temps de déclarer leurs conflits d'intérêts et à s'assurer de bien faire leur travail.

    La motion no 72, au nom de la ministre, qui consiste à abroger les dispositions relatives aux conflits d'intérêts, doit être rejetée. Je demande à la Chambre d'appuyer le rejet de la motion no 72.

    La motion no 52, au nom de la ministre, modifie le projet de loi en ce qui a trait aux services de consultation. De nombreux témoins nous ont dit que les personnes qui vivent une fécondation in vitro subissent des pressions et conséquences considérables. Ils nous ont dit ne pas avoir su ce qui se passait. Ils n'ont pas obtenu l'information. Personne ne leur avait dit ce qui allait vraiment se passer.

    Le comité a proposé un amendement au projet de loi qui disposait que l'agence doit faire en sorte que la personne qui vit une fécondation in vitro obtienne ces services de consultation. La ministre veut abroger cet amendement et dit simplement que ces services seront mis à la disposition de cette personne. Nous avons inscrit qu'il faut «s'assurer» que la personne reçoit ces services parce que nous estimons que c'est absolument nécessaire.

    Je propose donc:

    Que la motion no 52 soit modifiée par adjonction, après le mot «personne», de ce qui suit:«et de veiller à ce que la personne les reçoive».

  +-(1730)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare l'amendement recevable. La question porte sur l'amendement. Plaît-il à la Chambre d'adopter l'amendement?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de l'amendement veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les oui l'emportent.

    Et plus de cinq députés s'étant levés:

    Le président suppléant (M. Bélair): Le vote par appel nominal sur l'amendement est reporté.

[Français]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 53. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui appuient la motion veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les non l'emportent.

    Et plus de cinq députés s'étant levés:

     Le président suppléant (M. Bélair): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

+-

    M. Louis Plamondon: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Il m'apparaît très clair que lorsque vous avez dit «les non l'emportent», personne ne s'est levé en cette Chambre. On dispose donc ainsi de la motion. Le Règlement est très clair là-dessus.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): À l'ordre s'il vous plaît. Pour répondre à l'objection du député de Bas-Richelieu—Nicolet—Bécancour, lorsque j'ai soumis la question à la Chambre, vers la fin, au moins cinq députés se sont levés, à demi, pour signifier leur intention. J'accepte le fait qu'il y ait quand même eu la moitié d'un mouvement.

  +-(1735)  

[Traduction]

    Le prochain vote porte sur la motion no 55. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont contre veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les non l'emportent.

    Et plus de cinq députés s'étant levés:

    Le président suppléant (M. Bélair): Le vote par appel nominal sur la motion est reporté.

+-

    M. Myron Thompson: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Ce n'est pas d'hier que je siège à la Chambre, mais on m'a toujours dit que si un député veut voter, qu'il s'agisse d'un vote favorable ou défavorable ou d'un vote par assis et levé, le député doit être à sa place pour se prévaloir de son droit. Je crois que le ministre de la Justice devrait s'asseoir à sa place s'il veut se prononcer sur la question.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Même si le ministre n'était pas à sa place, plus de cinq députés se sont levés pour s'assurer qu'il y ait un vote par appel nominal.

[Français]

+-

    M. Louis Plamondon: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je reviens sur le point précédent. Vous avez dit que vous avez vu cinq personnes se lever. Je suis convaincu, si vous regardez la cassette vidéo, que les cinq personnes qui se sont levées n'étaient pas à leur place. On devrait donc disposer de cet amendement.

  +-(1740)  

[Traduction]

+-

    Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, j'interviens au sujet du même rappel au Règlement. J'aimerais obtenir une précision. Normalement, la présidence n'exige pas que les députés soient à leur place pour voter, dans le cas d'un vote par oui ou non comme dans celui d'un vote par appel nominal. Si l'usage a changé, je voudrais bien qu'on me le dise.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je devrais peut-être prendre conseil auprès de la Chambre. Il s'agit de quelque chose d'assez nouveau. Les greffiers ne trouvent pas les dispositions pertinentes dans le Règlement, pas immédiatement en tout cas.

[Français]

    Seriez-vous d'accord pour que nous passions à la prochaine motion?

    Une voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Dès que nous trouverons quelque chose à ce sujet, nous reviendrons à la Chambre.

[Traduction]

    Je demanderais aux députés, dans un esprit de coopération, de bien vouloir regagner dorénavant leur place au moment de voter par oui ou non.

    Le prochain vote porte sur la motion no 64. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui.

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui s'y opposent veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): À mon avis, les oui l'emportent.

    Et plus de cinq députés s'étant levés:

[Français]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Le vote par appel nominal sur la motion est différé.

    La prochaine mise aux voix porte sur la motion no 71. Plaît-il à la Chambre d'adopter la motion?

    Des voix: D'accord.

    Des voix: Non

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui sont en faveur de la motion veuillent bien dire oui.

    Des voix: Oui

    Le président suppléant (M. Bélair): Que tous ceux qui s'opposent veuillent bien dire non.

    Des voix: Non.

    Le président suppléant (M. Bélair): Je déclare la motion adoptée.

    (La motion no 71 est adoptée.)

[Traduction]

+-

    Mme Bonnie Brown: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Le président nous a fait distribuer hier une liste de motions, dans l'ordre. À mon avis, nous avons sauté les motions nos 53 et 61. Je ne sais même plus sur quelle motion portait le dernier vote. Mettons-nous aux voix une motion sur deux, ou quoi? Comment est-ce que ça marche?

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Disons pour commencer que le vote portait sur la motion no 71. On me dit que, dans le groupe no 4, cette motion a été modifiée.

  +-(1745)  

+-

    Mme Bonnie Brown: Monsieur le Président, ce tableau n'est-il pas le même que celui qui nous a été remis hier? Quel ordre suivez-vous? Il serait très utile que vous nommiez les numéros.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Cette motion était la motion no 71.

    Pour clarifier, je précise que nous avons voté sur l'amendement à la motion no 52...

    Une voix: Non, pas l'amendement.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): On me dit que nous ne pouvons voter sur la motion no 52 à moins d'avoir d'abord mis l'amendement aux voix. Nous avons fait les motions nos 53, 55, 61 et 64 et nous venons de...

[Français]

+-

    Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, j'invoque le Règlement. Je pense que nous avons oublié la motion no 61.

[Traduction]

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Le Bureau m'indique que nous avons passé la motion no 61. Vérifions les bleus.

+-

    M. Jason Kenney: Monsieur le Président, dans la foulée du recours au Règlement de ma collègue d'Oakville, je précise que j'ai consulté d'autres députés et que nous ne savons pas avec certitude quelle a été la dernière motion présentée à la Chambre.

    À mon avis, il faudrait reprendre le vote sur cette motion au moins, étant donné la confusion qui règne au Bureau et que la présidence elle-même n'est pas sûre.

+-

    Mme Judy Wasylycia-Leis: Monsieur le Président, mon recours au Règlement porte sur votre interprétation de la motion no 71 que nous avons étudiée et au sujet de laquelle nous avons déjà voté, selon vous. Premièrement, il n'est pas clair que cette notion ait été présentée. Deuxièmement, cinq députés se sont levés dans tous les coins de la Chambre et peut-être ne les avez-vous pas vus. Par conséquent, je demande qu'on revoie la présentation de la motion no 71.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La seule façon de régler le cas est d'obtenir le consentement unanime pour que la motion no 71 soit de nouveau mise aux voix. Est-ce d'accord ?

    Des voix: D'accord.

  +-(1750)  

+-

    Mme Marlene Catterall: Monsieur le Président, avant que la question soit remise aux voix, je vous demande d'examiner la bande et les bleus. Vous avez clairement dit le numéro de la motion. Vous avez lu clairement la motion. Elle a été mise aux voix et adoptée avec dissidence. Je ne vois pas pourquoi nous devrions reprendre le vote.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je me rappelle très bien avoir mis aux voix la motion no 71, mais il n'y a pas consentement unanime maintenant.

+-

    M. Paul Szabo: Monsieur le Président, j'ai reçu la liste que vous lisez pour appeler les motions. J'ai aussi la liste qui nous a été fournie lorsque la présidence nous a informés des motions qui seront étudiées à l'étape du rapport. Quand je lis les motions du groupe no 4, je constate qu'elles sont dans le même ordre.

    Monsieur le Président, je crois que si vous examinez les bleus, vous constaterez que vous avez oublié les motions nos 53 et 61.

    Si je suis attentif au débat, et je ne puis examiner toutes les motions individuellement, je sais par leur numéro si je dois dire oui ou non, et c'est la même chose pour le whip. Cependant, si vous en sautez une, vous déréglez notre séquence de votes.

    Cela étant dit, le dernier point, c'est que la députée d'Oakville et moi-même comptions parmi les cinq députés qui se sont levés, mais, il faut bien le dire, il semble que lorsque vous avez dit que les oui l'emportaient, vous avez regardé là-bas pour voir si cinq députés s'étaient levés. Vous n'avez pas regardé de ce côté-ci. Je sais qu'il y avait au moins quatre ou cinq députés là-bas, en plus des deux ici. Il s'agit d'une importante disposition relative au traitement équitable entre les sexes qui doit être débattue davantage et mise aux voix.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Vérifions les bleus. S'il y a lieu, nous apporterons les correctifs qui s'imposent.

+-

    M. Chuck Strahl: Monsieur le Président, je suppose que je devrai attendre que la présidence se branche. Lorsqu'après avoir décidé de reprendre le vote sur la motion no 71 la présidence reçoit d'autres motions, elle remet sa décision en question. À moins qu'elle ne se contredise, la présidence a décidé que nous voterions de nouveau. Nous aurons un véritable problème si la présidence déclare qu'elle compte faire une chose, puis prend une décision pour ensuite accepter n'importe quel argument et revenir au point de départ. Nous devons tenir un autre vote parce que vous avez déjà rendu une décision sur la question.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): J'aimerais avoir l'attention du député de Fraser Valley. Il faudra consulter la transcription. Je croyais avoir obtenu le consentement unanime pour revenir à la motion no 71, mais le whip en chef du gouvernement s'est levé cinq ou dix secondes après pour annuler tout ce que nous avions tenté de faire.

    Des voix: C'est honteux!

    Le président suppléant (M. Bélair: C'est cela: ce que vous dites ne m'importe pas.

    Nous passons à la motion no 72. Avez-vous tous entendu?

+-

    M. Rob Merrifield: Monsieur le Président, La confusion règne. Je crois que la dernière décision était que la présidence vérifierait à la transcription comment les choses s'étaient passées afin de tenter de clarifier la situation.

    Selon l'horaire, le débat devait se poursuivre jusqu'à 17 h 53. Il est plus tard que cela.

    À mon avis, la présidence devrait prendre le temps d'examiner la situation et, à la reprise du débat, nous pourrions revenir où nous en étions. C'est une suggestion que je fais.

  +-(1755)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je rajoute encore ceci pour faire bonne mesure: comme il est 17 h 53, la Chambre passe aux initiatives des députés selon l'ordre indiqué au Feuilleton d'aujourd'hui.


+-INITIATIVES PARLEMENTAIRES

[Initiatives parlementaires ]

*   *   *

[Traduction]

+-La Loi sur l'assurance-emploi

    La Chambre reprend l'étude, interrompue le 12 décembre 2002, de la motion: Que le projet de loiC-206, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi (personne quittant son emploi pour prendre soin d'un membre de sa famille), soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.

+-

    M. Pat Martin (Winnipeg-Centre, NPD): Monsieur le Président, c'est avec grand plaisir que, à l'instar des nombreux intervenants qui ont déjà pris la parole sur le projet de loi au cours de la première heure suivant sa lecture, j'appuie fermement l'idée noble, honorable et très valable que nous propose le député de Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore.

    Je dois dire tout d'abord que, depuis les cinq ans que je le connais, le député de Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore défend cette question au sein de notre caucus et à la Chambre. Le député a reconnu le grand besoin et l'énorme lacune qui existe à l'heure actuelle dans notre système de soins de santé à l'égard des soins à domicile. Il n'a cessé de se faire le champion de cette question. Il doit être aujourd'hui très gratifiant pour lui de voir que son projet de loi en est à sa deuxième heure de débat, pourra être mis aux voix et, l'espère-t-il, en arrivera logiquement à être adopté.

    Je tiens en outre à signaler que le parti au pouvoir, que le gouvernement actuel a manifestement compris l'importance du projet de loi, car—et c'est tout à son honneur—il a emboîté le pas au député et a laissé entendre, il a expliqué, en fait, dans des communiqués récents concernant le prochain budget, que le gouvernement allait présenter dans le budget de février 2003, espérons-le, une mesure de maintien du salaire des personnes qui s'absenteront de leur travail pour pouvoir prendre soin d'un parent. Il vaut la peine de signaler et d'applaudir la décision, mais n'oublions pas d'où vient l'idée!

    On dit qu'il ne faut jamais douter qu'un petit groupe de personnes vraiment motivées peut changer le monde et que c'est en fait la seule façon dont le monde ait jamais changé. Je crois que nous en avons un parfait exemple aujourd'hui. Je signale que cette parole admirable est de Margaret Mead.

    Je crois comprendre que le projet de loi vise à protéger l'emploi d'une personne obligée de s'absenter de son travail pour s'occuper d'un membre de la famille, d'un être cher ou d'un parent invalide ou vivant avec une maladie et qui est confiné à la maison. C'est-à-dire que cette personne ne risquera pas de perdre son emploi parce qu'elle doit s'absenter. Elle pourra rester chez elle pour soigner un parent malade et toucher des prestations de soutien du revenu ou de congé de maladie aux termes du régime d'assurance-emploi au même titre que si elle était en chômage ou malade.

    Le projet de loi prévoit élargir l'application de la Loi sur l'assurance-emploi. Il faudrait qu'elle soit modifiée pour pouvoir inclure cette disposition dans la liste des catégories ou des critères aux termes desquels une personne serait admissible à l'assurance-emploi. Est-il possible de douter de la nécessité de cette modification, compte tenu des nombreuses interventions favorables entendues au cours de la dernière heure?

    Est-il possible d'en douter vu l'appui accordé par des groupes comme l'Association canadienne des individus retraités, qui compte deux ou trois millions de membres qui souscrivent à l'idée? Est-il possible d'en douter lorsque les Infirmières de l'Ordre de Victoria du Canada et la Société canadienne du sida disent appuyer l'idée? De nombreuses ONG à but non lucratif ont appuyé et proposé la même mesure que celle mise de l'avant par notre collègue, le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore.

    Il s'agit d'une disposition on ne peut plus raisonnable, plus particulièrement lorsque nous gardons présent à l'esprit, et je le rappelle aux députés, que le fonds de l'assurance-emploi affiche un excédent de 750 millions de dollars par mois, non pas par année mais bien par mois, et sept ou huit milliards de dollars par année. Quel meilleur usage faire de cet excédent que de verser des prestations à une personne obligée de s'absenter de sont travail pour soigner un être cher malade? Je crois que c'est tout à fait approprié, logique et réalisable, parce que nous savons que l'argent est là.

    

  +-(1800)  

    

    N'oublions pas d'où vient le fonds de l'assurance-emploi, qui affiche un excédent phénoménal. Il est constitué par les contributions des employeurs et les cotisations des employés. Le gouvernement ne verse pas un sou dans le fonds de l'assurance-emploi. Autrement dit, ce sera un programme d'assurance autogéré à la disposition d'un travailleur qui se retrouve dans la situation regrettable de devoir s'occuper d'un être cher qui est malade.

    Ma propre expérience m'aide à comprendre la situation. Ma mère est maintenant âgée de 84 ans et elle est handicapée. Elle a reçu son congé de l'hôpital et elle aura besoin de soins chez elle. Étant donné que nous n'avons pas de régime national de soins à domicile, le système des soins au foyer est en difficulté. Dans ma province, il est incapable d'assurer des services suffisants à une femme comme ma mère, qui a besoin de soins 24 heures par jour.

    Si j'étais un travailleur ordinaire habitant à Winnipeg, et si ce programme était à ma disposition, je pourrais prendre un congé analogue à un congé de maternité ou de paternité pendant 50 semaines, ce qui est la nouvelle règle pour les congés de maternité, si je ne m'abuse. Je pourrais alléger la tâche du système de soins à domicile, qui ne peut franchement pas fournir des soins suffisants, et utiliser de façon tout à fait légitime les ressources du fonds de l'assurance-emploi pour prendre un congé et m'occuper de ce membre de ma famille.

    Comme je l'ai déjà dit, un élément essentiel du projet de loi fort bien pensé du député est que la sécurité d'emploi serait garantie. Mon employeur ne pourrait pas me congédier, me pénaliser, ni m'infliger des sanctions disciplinaires si je me retrouvais dans cette situation regrettable. N'importe quelle personne raisonnable conviendra qu'il serait foncièrement inadmissible de punir un travailleur parce qu'il doit prendre un congé.

    Le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore a dit que nous vivrions dans un monde merveilleux, dans un monde meilleur. J'estime que c'est le travail du caucus du NPD de soulever cette question. Songez à quel point le Canada serait meilleur si nous prenions certaines de ces mesures logiques, réalisables et très réalistes pour colmater les brèches dans notre système de sécurité sociale.

    Je suis très heureux d'ajouter mon nom à la longue liste de Canadiens qui font partie du réseau que le député a tissé d'un bout à l'autre du pays depuis qu'il a commencé à s'intéresser activement à cette question il y a cinq ans, des gens qui regardent le débat ce soir. Je suis très heureux d'ajouter mon nom à cette très longue liste de Canadiens qui se préoccupent de leurs concitoyens et de faire passer le projet de loi à la prochaine étape logique. Je suis certain que j'entendrai aujourd'hui des remarques positives des députés des autres partis. Je défie qui que ce soit à la Chambre de trouver une bonne raison qui empêcherait que cette mesure ne devienne loi dans notre pays.

    Je parle au nom des électeurs de Winnipeg-Centre, que je représente, au nom des nombreuses familles qui se trouvent dans la même situation que moi dans le moment puisque ma mère âgée a besoin de soins à domicile, au nom des personnes âgées qui sont membres de l'Association canadienne des individus retraités et aussi, je crois, de l'Association des syndicalistes retraités du Canada. Ses 1,5 million de membres ont également donné leur appui à cette initiative des plus nobles et valables. Nous nous rendrions service si nous pouvions tous prendre la parole un après l'autre, quel que soit notre parti, pour appuyer une initiative aussi noble et valable.

    Le Canada ne pourrait qu'en bénéficier. Qu'on me donne une raison qui nous empêcherait de le faire. L'argent est là. C'est notre argent, et non l'argent du gouvernement fédéral. Nous, qui parlons au nom des Canadiens, disons que l'argent de l'assurance-emploi devrait être utilisé à des fins de maintien du revenu pour les gens qui en ont besoin et pour rien d'autre.

    Je vais prendre les minutes qu'il me reste pour rappeler aux gens que ces sommes versées dans la caisse d'assurance-emploi par les employeurs et les employés doivent servir à donner des prestations d'assurance-emploi aux personnes qui en ont besoin. Cet argent ne doit pas être utilisé à d'autres fins. Si nous nous servons de l'argent de l'assurance-emploi à d'autres fin que le maintien du revenu, c'est une violation d'obligation fiduciaire. En fait, c'est carrément de la fraude si nous prélevons de l'argent sur le chèque de paie d'une personne dans un but précis et que nous l'utilisons à des fins complètement différentes. C'est fondamentalement mal.

    Ce projet de loi vise à donner des prestations d'assurance-emploi à des gens qui en ont besoin parce qu'ils doivent prendre soin d'un membre de leur famille qui est malade. C'est justifié. C'est une des utilisations prévues des fonds de l'assurance-emploi. C'est la bonne chose à faire. J'exhorte les députés de tous les partis à appuyer cette mesure.

[Français]

+-

    Mme Diane St-Jacques (secrétaire parlementaire de la ministre du Développement des ressources humaines, Lib.): Monsieur le Président, permettez-moi de féliciter le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore pour avoir lancé cet important débat au sujet d'une question qui ne manque pas d'intéresser de nombreux Canadiens et Canadiennes. Il s'agit en fait d'une question qui intéresse tout le pays parce qu'elle touche le milieu de travail, le régime de soins de santé et la société en général.

    

  +-(1805)  

    

    J'ai d'ailleurs vécu une expérience, l'an dernier, qui m'a sensibilisée à cette situation lors d'une levée de fonds pour Leucan. J'ai côtoyé à cette époque des parents qui avaient quitté leur emploi pour accompagner leur enfant malade. Cela m'a permis de constater les nombreuses difficultés et contraintes auxquelles les parents doivent faire face durant cette période si douloureuse.

    Je dois reconnaître que le projet de loi déposé par mon honorable collègue évoque des préoccupations que partage en effet le gouvernement du Canada.

    En réalité, il faut tenir compte du projet de loi C-206 par rapport à l'engagement qu'a pris le gouvernement du Canada dans le dernier discours du Trône.

    Dans le discours du Trône de septembre 2002, on a annoncé que le gouvernement avait l'intention de modifier les programmes existant pour permettre aux Canadiens et Canadiennes de s'occuper d'un enfant, d'un parent ou d'un conjoint gravement malade ou mourant, sans mettre en péril leur revenu ou leur emploi.

    Ces engagements montrent que le gouvernement se préoccupe des difficultés auxquelles sont confrontés de nombreux Canadiens pour concilier les exigences du travail et de la vie familiale.

    Mon collègue a incontestablement le coeur à la bonne place. Il se préoccupe de la situation difficile dans laquelle est plongé près d'un travailleur canadien sur quatre. Ces travailleurs ou d'autres personnes dans leur foyer prennent soin d'un membre de la famille, qui est âgé, handicapé ou gravement malade.

    De toute évidence, mon collègue se soucie profondément de ces gens dévoués qui doivent concilier leurs responsabilités familiales et les pressions du travail, soit une tâche colossale.

    Il est également indéniable que les efforts requis pour équilibrer toutes ces obligations souvent incompatibles pèsent lourd sur de nombreux Canadiens et Canadiennes. Nous savons que presque la moitié des Canadiens éprouve un niveau de stress professionnel moyen, sinon élevé. C'est presque le double par rapport à il y a 10 ans. Nous savons aussi que les femmes qui doivent concilier des responsabilités professionnelles et personnelles risquent deux fois plus d'éprouver un stress considérable.

    Cette situation conflictuelle ne se répercute pas seulement sur la santé et le bien-être personnel, lesquels sont déjà en soi une source de préoccupations. Les problèmes de santé mentale ou physique ont également des répercussions sur l'économie.

    Ces répercussions sont directement liées à la satisfaction au travail, à la perte d'intérêt envers l'organisation et à l'épuisement professionnel qui peuvent finalement contraindre l'individu à quitter son travail. Pour les entreprises canadiennes, c'est approximativement 20 millions de jours de travail et 2,7 milliards de dollars que représentent chaque année les absences du travail.

    Les contribuables n'y échappent pas non plus: les dépenses dans les services de santé augmentent. Le coût pour le système de santé canadien qu'entraîne le déséquilibre entre le travail et la vie personnelle est évalué à plus de 425 millions de dollars chaque année.

    Ce qui est inquiétant, c'est que la proportion d'employés s'occupant à la fois de personnes âgées et d'enfants est passée de 9.5 à 15 p. 100 au cours des 10 dernières années. Vu les tendances démographiques, la situation ne peut que se détériorer au fil des années à venir. C'est pourquoi les rapport Romanow et Kirby recommandent que le gouvernement du Canada assure le soutien du revenu et la sécurité d'emploi des aidants.

    Ce que le député tente d'accomplir au moyen du projet de loi C-206 est un acte de compassion digne d'éloges. Il ne fait aucun doute que nous devons nous pencher sur cette question.

    Rappelons à la Chambre que dans le discours du Trône, on reconnaît l'importance capitale que revêt la protection de l'emploi et le soutien du revenu pour les travailleurs en butte à des crises familiales, par exemple, celle d'un être cher gravement malade ou mourant.

    Je crois bien que tous les députés jugent inacceptable que 56 p. 100 des Canadiens et Canadiennes aux prises avec pareilles tâches s'absentent du travail sans rémunération.

    C'est pour cela que Développement des ressources humaines Canada s'emploie à élaborer des options stratégiques concernant un nouveau congé pour raisons familiales. Notre objectif premier consistera à répondre efficacement aux besoins des travailleurs canadiens et de leur famille.

    

  +-(1810)  

    

    Nous nous sommes engagés à modifier nos programmes existants pour que les Canadiens puissent prodiguer des soins à leur enfant, conjoint ou parent gravement malade ou mourant.

    Je dois maintenant mentionner une inquiétude que j'éprouve avec le projet de loi C-206, soit le fait de devoir choisir entre exercer un emploi ou prendre soin d'un être cher.

    Sur ce point, je suis très contente que le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore se soit montré ouvert à accepter des modifications à son projet de loi. C'est un travail qui pourrait être accompli en comité permanent.

    Selon l'amendement proposé, les gens devront quitter leur emploi ou être mis à pied pour recevoir des prestations d'assurance-emploi.

    Je suis certaine que tous les députés s'accordent pour dire que la dernière chose que nous voulons est que les Canadiens aient à choisir entre leur emploi et les soins à donner à un être cher gravement malade.

    Le nouveau congé pour raisons familiales que propose notre gouvernement permettrait aux Canadiens de s'absenter temporairement du travail pour prendre soin d'un enfant, d'un conjoint ou d'un parent gravement malade ou mourant.

    Les prestations que le gouvernement envisage d'offrir s'ajouteraient aux mesures de soutien destinées aux familles qui en ont le plus besoin. Elles éviteraient que des familles vulnérables ne sombrent dans la pauvreté. Qui plus est, elles aideraient les entreprises canadiennes à conserver leurs employés compétents, une question de première importance pour les employeurs à une époque où le bassin de travailleurs s'amenuise et où les travailleurs qualifiés sont en nombre insuffisant. Notre approche compatissante aux problèmes personnels des gens contribuerait à une économie plus productive.

    Notre initiative répondrait également à l'une des recommandations clés du rapport Romanow et permettrait d'atteindre les résultats visés dans un domaine de responsabilité du gouvernement fédéral.

    Je peux assurer mes collègues que nous consultons les gouvernements provinciaux et territoriaux, les employeurs et les intervenants pour aller de l'avant avec la conception de cette initiative. Nous sommes confiants que nous aurons leur appui.

    Selon un récent sondage COMPAS, 60 p. 100 des directeurs généraux et des cadres supérieurs d'entreprises sont favorables à l'idée que le gouvernement fournisse un soutien du revenu ponctuel aux employés qui doivent s'absenter pour prendre soin des membres de leur famille immédiate gravement malades.

    Je dois également signaler que selon les sondages, les entreprises canadiennes s'adaptent bien au congé parental prolongé que nous avons instauré il y a un an pour favoriser l'équilibre entre famille et travail.

    Bien entendu, nous sommes pleinement conscients des coûts de tels programmes, et nous voulons bien créer un programme adapté aux besoins les plus pratiques des Canadiens.

    Enfin, nous comprenons la générosité d'esprit de notre collègue. Il faut concrétiser les bonnes intentions en bons résultats pour les Canadiens aux prises avec de graves problèmes de santé familiaux. Notre objectif est de concevoir une initiative efficace et économique qui répond aux besoins, tout en étant souple et pratique.

    Il ne faut pas se méprendre. Le gouvernement du Canada reconnaît pleinement le défi auquel font face de plus en plus de travailleurs canadiens. Nous sommes résolus à leur donner le soutien qu'il leur faut pour affronter cette situation difficile.

    Je ne doute pas que le nouveau congé pour raisons familiales en voie d'élaboration tiendra compte des préoccupations de notre collègue. J'espère pouvoir compter sur son appui.

[Traduction]

+-

    M. Charlie Penson (Peace River, Alliance canadienne): Monsieur le Président, je suis ravi de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-206. Mon collègue de Medicine Hat a déjà parlé de cette mesure. Il est notre porte-parole dans ce domaine, mais je tiens à ajouter ma voix à la sienne.

    

  +-(1815)  

    

    Le projet de loi C-206 vise à modifier la Loi sur l'assurance-emploi dans le cas des personnes qui quittent leur emploi pour prendre soin d'un membre de leur famille. Je tiens tout d'abord à féliciter le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore pour nous avoir saisis de la question. Je pense que tous les députés mesurent toutes les difficultés et l'adversité qui frappent les familles dont l'un des proches est atteint d'une maladie terminale. Les familles dans ce cas sont confrontées à des choix très difficiles quant aux soins à dispenser à ce parent, tout en veillant à subvenir aux besoins des autres membres de la famille, comme aux leurs d'ailleurs. Ceux qui font le choix de s'occuper de leurs proches témoignent d'un grand courage et méritent le soutien de l'État. Kirby et Romanow l'ont d'ailleurs souligné dans leurs rapports respectifs.

    Les députés de l'Alliance canadienne croient fermement que la famille est un élément fondamental de la société. Nous trouvons donc valable l'idée de demander à l'État de venir en aide aux Canadiens qui décident de quitter un emploi rémunérateur pour soigner à la maison un membre de leur famille en phase terminale. Je dois dire que plusieurs personnes vivent déjà une telle situation. Ces gens n'ont peut-être pas tous quitté un emploi rémunérateur, mais des soins de ce genre sont prodigués régulièrement au pays, même à l'heure actuelle.

    La mesure législative proposée permettrait certainement de réduire le stress financier que vivent les gens qui se retrouvent dans une telle situation. De plus, un tel programme permettrait de réaliser des économies substantielles au niveau du régime public de soins de santé. Toutefois, ce qui importe avant tout est de reconnaître que les avantages sociaux et émotifs tirés des soins offerts par une personne aimée l'emportent de loin sur la solution de rechange qui est de placer la personne malade dans un établissement spécialisé.

    Toutefois, en établissant un lien avec le programme d'assurance-emploi, le projet de loi va à l'encontre de la théorie de l'Alliance canadienne qui est d'avis que le système d'assurance-emploi s'est trop éloigné de son objectif original qui en faisait un filet de sécurité pour les travailleurs ayant perdu leur emploi. Lorsque le programme a été mis sur pied, les primes devaient équivaloir aux bénéfices versés. Toutefois, depuis la mise sur pied du programme, toutes sortes de nouveaux éléments y ont été greffés et la vérificatrice générale a souligné que l'objet de la loi sur l'assurance-emploi n'était plus respecté, particulièrement en ce qui a trait au ratio primes-bénéfices. Notre parti est d'avis que le programme d'assurance-emploi devrait revenir à son objectif premier qui était de protéger les travailleurs en cas de perte d'emploi.

    Je comprends le désir de certains membres de lier cette initiative au programme d'assurance-emploi. Le primes exorbitantes prélevées tant chez les employeurs que chez les employés dans le cadre de ce programme ont engendré un excédent de 40 milliards de dollars à la fin du dernier exercice financier. C'est 25 milliards de plus que la somme de 15 milliards estimée nécessaire par l'actuaire en chef de Développement des ressources humaines du Canada pour faire face à un ralentissement de l'économie.

    Bien sûr, nous, les parlementaires, savons que l'excédent n'apparaît que sur papier, car les fonds de l'assurance-emploi vont choir dans le Trésor public. Selon Dale Orr, de la firme de prévisions économiques Global Insight, les 25 milliards de dollars en sus ont déjà été utilisés, en grande partie pour effacer la dette. Et quand bien même l'excédent serait toujours dans le compte de l'assurance-emploi, l'Alliance canadienne croit que la solution n'est pas de greffer d'autres projets de dépenses au programme. Le gouvernement fédéral devrait plutôt cesser de percevoir des sommes en trop des employés et des employeurs et réduire sensiblement les cotisations en fonction des prestations qui sont versées.

    Le financement des congés pour raisons familiales dans le cadre du régime d'assurance-emploi présente d'autres inconvénients. Il est important de le souligner puisque, même si l'intention était peut-être bonne au départ, il se peut que l'idée ne vienne pas des gens qui ont proposé le projet de loi. Une telle mesure éliminerait arbitrairement les personnes inadmissibles à l'assurance-emploi, c'est-à-dire les travailleurs autonomes. Je ne crois pas que les Canadiens veuillent que les agriculteurs, les petits commerçants, les entrepreneurs, les consultants et les camionneurs soient exclus d'un programme social aussi méritoire, et se trouvent ainsi laissés pour compte. En outre, étant donné cette tendance de nos jours à utiliser les services de travailleurs indépendants, au lieu d'embaucher du personnel, le nombre d'exclus risquerait d'augmenter considérablement avec le temps. La même logique s'applique aux congés parentaux, qui, à notre avis, devraient être gérés et financés indépendamment du régime d'assurance-emploi.

    De plus, en raison du vieillissement de la population, il existe une possibilité très réelle que l'adjonction du programme de congés pour raisons familiales au régime d'assurance-emploi finisse par surcharger le système, nécessitant du coup une augmentation des cotisations.

    

  +-(1820)  

    

    En conclusion, je pense que les intentions du projet de loi C-206 sont bonnes, et je félicite mon collègue pour son travail sur la question. Cependant, le gros problème avec ce texte de loi dont est saisie la Chambre aujourd'hui, c'est qu'il utilise le régime d'assurance-emploi comme moyen de financement. Il faut approfondir les études et le débat sur la question. À mon avis, il serait préférable de financer les congés pour raisons familiales au moyen d'un programme fédéral-provincial quelconque. Je ne peux donc pas appuyer ce projet de loi dont j'approuve l'intention mais qui, en étant rattaché à l'assurance-emploi, n'est pas acceptable pour l'Alliance canadienne.

[Français]

+-

    Mme Suzanne Tremblay (Rimouski—Neigette-et-la Mitis, BQ): Monsieur le Président, je suis vraiment très heureuse de prendre la parole dans le cadre du débat sur ce projet de loi. Le projet de loi C-206 modifierait la Loi sur l'assurance-emploi pour permettre aux personnes qualifiées d'aidants naturels de pouvoir quitter leur emploi pour prendre soin d'un membre de leur famille.

    Les objectifs que poursuit le député en présentant ce projet de loi sont fort louables. Cela fait longtemps que l'on veut trouver une façon de pouvoir aider les aidants naturels à venir en aide à leur famille. On sait très bien qu'aucune personne n'est mieux placée que l'aidant naturel pour accompagner quelqu'un qui est souffrant, soit vers le recouvrement de la santé, soit, malheureusement, vers une fin très humaine.

    On sait également que si on arrivait à mettre sur pied un programme pour les aidants naturels, on arriverait à soulager énormément les services de santé, le travail des CLSC, celui des cliniques qui prennent soin des personnes à domicile et ainsi de suite. Donc, le principe même du projet de loi est intéressant.

    À l'article 1, on prévoit des définitions. L'aidant naturel, c'est assez clair à comprendre, est la personne qui quitte son emploi—on dit qui quitte son emploi de gré ou de force—, mais qui veut prendre soin d'un membre de sa famille qui est malade ou qui a une déficience au sens de la Loi de l'impôt sur le revenu.

    Ensuite, on définit ce qu'est la famille au sens de la loi. Là encore, selon moi, la définition qui est donnée de la famille ne pose pas de problème.

    Mais où je m'interroge, c'est que les familles se rapetissent de plus en plus et que, bien souvent, l'aidant naturel ou l'aidante naturelle n'a aucun lien de parenté avec la personne qu'elle serait en mesure d'aider.

    Il y a toutes sortes de raisons. Il se peut que ce soit la voisine qui a développer une amitié avec une personne, soit que c'est quelqu'un qui a eu une relation au niveau du travail et qui, parce qu'elle a des liens avec elle, serait en mesure de lui porter secours étant donné que cette personne n'a aucune famille.

    La famille est donc beaucoup moins étendue qu'elle ne l'était auparavant. Dans la loi, on dit que ce sont les frères, la soeur, l'oncle, la tante et ainsi de suite, mais aujourd'hui, bien souvent, les familles ont des enfants uniques. Il faudrait aussi qu'on pense au fait que les membres d'une famille ne sont pas toujours vraiment proches.

    Avant, nous avions le cocon familial et tout le monde vivait ensemble. On avait même l'habitude de voir que dans un village, il y avait un, deux ou trois noms de famille. Maintenant, les jeunes doivent souvent partir de leur région d'origine pour aller chercher du travail ailleurs et se retrouvent très loin. Les parents restent tout seuls. Il faudrait songer à prévoir un mécanisme afin d'être capable d'étendre le concept pour permettre que quelqu'un qui est vraiment proche de la personne en difficulté puisse lui venir en aide.

    Il y a un autre sujet auquel il faudrait penser. Je serais personnellement très favorable à ce que ce projet de loi soit adopté majoritairement par les députés de la Chambre afin qu'on puisse renvoyer ce projet de loi en comité, qu'on puisse l'étudier en profondeur et qu'on puisse voir comment on pourrait l'améliorer de façon à financer ce programme.

    

  +-(1825)  

    

    Mon collègue de l'Alliance canadienne soulignait que cela posait un problème que de prendre les fonds dans la caisse de l'assurance-emploi. Il est certain que si seulement les personnes qui reçoivent des prestations d'assurance-emploi peuvent se prévaloir de ce congé, on aura un problème. On a de plus en plus de personnes qui sont des travailleurs et des travailleuses autonomes. Il faudra donc que ces gens puissent avoir les fonds nécessaires pour eux aussi être en mesure de devenir des aidants naturels.

    Étant donné que la caisse de l'assurance-emploi fait des surplus énormes qui se calculent en termes de milliards, il serait peut-être bon que le gouvernement puisse prévoir un mécanisme qui transfère une partie des surplus de l'assurance-emploi dans un fonds qui permettrait de gérer ce programme. Ce serait accessible à tous les Canadiens et toutes les Canadiennes qui pourraient avoir un certain type de besoins.

    Parfois, pour un aidant naturel, quitter son propre domicile pour aller prendre soin d'une autre personne peut, même s'il reste à proximité, occasionner des dépenses. Peut-être y aurait-il moyen de prévoir une façon d'aider l'aidant naturel même s'il n'est pas un travailleur qui reçoit des prestations d'assurance-emploi.

    Il faudrait prévoir les différentes facettes de ce problème. Il est certain que nous aurons une population de plus en plus vieillissante et que nous aurons besoin de plus en plus d'aide pour prendre soin de ces personnes. Il me semble important qu'on trouve un mécanisme qui s'adapte et qui puisse permettre à tout le monde de bénéficier de ce programme.

    On ne doit pas être pris, par exemple, dans le même carcan qu'avec les congés de maternité et les prestations spéciales pour congés de maladie qui, à l'heure actuelle, sont prises à même les congés des travailleurs et des travailleuses qui ont un emploi et qui peuvent se prévaloir de l'assurance-emploi. Il faudrait que le programme qu'on développera pour les aidants naturels aille beaucoup plus loin et soit en mesure d'englober l'ensemble des Canadiens et des Canadiennes.

    Je suis convaincue que si nous accueillons favorablement ce projet de loi en deuxième lecture, si nous le renvoyons au comité pour qu'il soit étudié et pour qu'on puisse tenir les audiences nécessaires pour que les gens apportent de l'eau au moulin, on aura vraiment fait oeuvre utile. Le gouvernement pourra peut-être décider, à la suite de cette étape, de se retourner de côté et de dire: «Écoutez, pour prendre soin de quelqu'un et pour aller de l'avant avec ce projet de loi, il m'apparaît important qu'on puisse en réécrire un autre qui contient toutes les remarques ayant été formulées.» Ainsi, on pourra un jour arriver à pouvoir vraiment venir en aide aux aidants naturels.

[Traduction]

+-

    M. Norman Doyle (St. John's-Est, PC): Monsieur le Président, je suis très heureux de pouvoir parler brièvement aujourd'hui du projet de loi C-206, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-emploi.

    On nous dit que le projet de loi vise à permettre à toute personne qui quitte son emploi pour prendre soin d'un membre de sa famille ayant une déficience ou qui est licenciée à cause des exigences incompatibles de son emploi de recevoir des prestations d'assurance-emploi pour une période pouvant aller jusqu'à 52 semaines.

    De nombreux groupes d'un océan à l'autre, notamment dans la province de Terre-Neuve-et-Labrador, verraient d'un bon oeil l'adoption de ce projet de loi, parce qu'il réduirait de beaucoup la pression qui s'exerce sur un système de soins de santé déjà chancelant. De plus, il nous permettrait d'assister à quelque chose de très rare dans notre pays. Il nous donnerait l'occasion de voir les gouvernements provinciaux obtenir un répit et probablement se décharger de certaines responsabilités sur le gouvernement fédéral, pour faire changement. Ce serait effectivement une mesure très positive.

    J'ai été très déçu d'entendre les alliancistes dire qu'ils n'appuieront pas le projet de loi. Cette mesure législative aiderait des familles partout au Canada. L'Alliance se pose en défenseur de la famille, mais elle n'a absolument pas l'intention d'appuyer le projet de loi, et c'est une honte.

    

  +-(1830)  

    

    Je veux féliciter mon collègue, le député de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, d'avoir proposé ce projet de loi. J'aurais aimé le faire à sa place, mais je le félicite, parce qu'il s'agit d'une excellente initiative.

    D'une manière générale, notre parti peut appuyer cette mesure. J'ai toujours été en faveur de lois et de politiques qui respectent et améliorent la famille, une des pierres angulaires de notre société.

    Le projet de loi comporte des éléments très intéressants. Il restreint le rôle d'aidant naturel à un membre de la famille proche: un époux, un conjoint de fait, un enfant, un petit-enfant, un frère ou une soeur. C'est très positif. En d'autres mots, il est inutile que des étrangers présentent des demandes. Le projet de loi traite de cas familiaux. Il ne s'applique pas aux entreprises commerciales de soins à domicile. C'est très bien ainsi, parce que cela protège l'intégrité même du projet de loi.

    La déficience en question doit également respecter les exigences de la Loi de l'impôt sur le revenu. Si la définition du gouvernement est aussi stricte que ce qu'il utilise pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées, nous pouvons être assurés que la caisse d'assurance-emploi ne sera pas submergée de demandes.

    L'aidant naturel doit avoir un fort lien avec le marché du travail. En d'autres termes, une personne qui est à peine admissible ou rarement admissible à des prestations d'assurance-emploi ne peut utiliser les dispositions touchant les aidants naturels pour obtenir 52 semaines de prestations d'assurance-emploi.

    La disposition n'est pas illimitée. Une personne ne peut toucher de l'assurance-emploi aux termes de cette disposition pendant plus de 52 semaines au total durant une ou plusieurs périodes dans un délai de deux ans. Le projet de loi prévoit qu'on peut prolonger la période de 52 semaines si un médecin atteste que les soins fournis sont nécessaires pour la santé et la sécurité de la personne ayant la déficience ou permettent à celle-ci d'éviter l'hospitalisation dans un établissement médical ou le placement dans un établissement de soins de longue durée.

    Enfin, le projet de loi exige que la rémunération gagnée durant la période où une personne est un aidant naturel soit réduite des prestations hebdomadaires d'assurance-emploi.

    C'est un bon projet de loi. J'espère que le gouvernement jugera bon de l'appuyer. Je crois comprendre qu'il va être renvoyé au comité. Qui sait, peut-être que quelques modifications y seront apportées.

    Étant donné que le gouvernement a réfléchi à haute voix dernièrement sur la possibilité de couvrir les soins à domicile dans le cadre de l'assurance-maladie, cette mesure législative va certainement dans ce sens. Elle a en plus l'avantage que, dans ce cas, les soins à domicile sont donnés par un proche parent, ce qui est très important pour la personne qui reçoit ces soins.

    Je veux revenir sur les dispositions qui exigent l'attestation d'un médecin pour prolonger les prestations au-delà des 52 semaines prévues sur une période de deux ans. Il n'est pas précisé clairement dans le projet de loi, et on peut espérer que ce sera fait au comité, qu'une attestation de médecin n'est pas nécessaire au départ pour que la personne en cause obtienne des soins à domicile. C'est une petite disposition que nous devrons probablement examiner et on peut espérer qu'au comité, certains ajustements y seront apportés.

    C'est une excellente mesure législative et nous n'avons absolument aucune hésitation à l'appuyer. Le projet de loi permettra à certains malades de bénéficier, à domicile, des soins compatissants de membres de leur famille. Il épargnera de l'argent au système de soins de santé et ne constituera pas un très lourd fardeau pour la caisse d'assurance-emploi. Tant que les soins à domicile ne seront pas couverts par l'assurance-maladie, c'est une très bonne première étape.

  +-(1835)  

+-

    Mme Judy Sgro (secrétaire parlementaire du ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole sur cette question, et je remercie le député de Sackville--Musquodoboit Valley--Eastern Shore d'avoir soulevé une question aussi importante que celle des soins prodigués par les aidants naturels. C'est un sujet qui intéresse de nombreux députés des deux côtés de la Chambre. Je suis heureuse que des députés de l'opposition partagent les valeurs du gouvernement et l'appuient dans les dossiers qu'il juge importants.

    Le sujet du projet de loi est abordé dans le discours du Trône de septembre 2002. Le gouvernement y indique clairement son intention de modifier les programmes existants pour permettre aux Canadiens de s'occuper d'un enfant, d'un parent ou d'un conjoint gravement malade ou mourant, sans mettre en péril leurs emplois ou leurs revenus.

    Nous félicitons le député pour son intention généreuse d'étendre les prestations aux personnes qui s'occupent non seulement de membres de leur famille immédiate mais également d'oncles, de tantes, de frères et de soeurs, et de personnes avec qui elles ont des liens de parenté par alliance, mais le gouvernement doit gérer les finances publiques de façon responsable. Il y a lieu de se demander si le député a évalué les coûts que pourrait engendrer la mise en oeuvre des modifications proposées dans le projet de loi C-206. C'est une chose de proposer une mesure généreuse, mais encore faut-il en évaluer les coûts pour le gouvernement et les contribuables.

    Au coût des prestations directes accordées aux aidants naturels s'ajouteraient les coûts résultant de la perte de travailleurs. De plus, les employeurs devraient engager des dépenses supplémentaires pour chercher, embaucher et former de nouveaux employés.

    Le projet de loi C-206 soulève des questions, non seulement en ce qui concerne la longue durée des prestations et la définition généreuse des personnes admissibles, mais également quant à la nécessité pour une personne de quitter volontairement son emploi ou d'être licenciée pour être admissible à des prestations. Est-ce vraiment la bonne solution? Je pense que le projet de loi devrait faire l'objet d'une étude et d'une réflexion plus poussées.

    Les Canadiens veulent travailler mais ne veulent avoir à prendre aucune de ces décisions. Cela va directement à l'encontre des efforts soutenus du gouvernement pour faciliter la participation au marché du travail. En fait, le principe qui vise à encourager les Canadiens à trouver et à conserver un emploi était au coeur même de la réforme de la Loi de l'assurance-emploi, en 1996. Le monde du travail contient déjà suffisamment d'embûches sans que nous encouragions les travailleurs à le quitter, avec l'espoir qu'un emploi les attendra lorsqu'ils seront en mesure de revenir sur le marché du travail.

    Le gouvernement est compatissant. Nous sommes conscients que la nécessité de concilier les exigences de la vie personnelle et celles de la vie professionnelle est une source de stress, et nous cherchons constamment des façons d'alléger le fardeau que cela représente.

    C'est pour cette raison que nous avons prolongé de six mois à un an les prestations de maternité et de congé parental. Le programme de soutien temporaire en vertu de l'assurance-emploi protège déjà les travailleurs contre le risque de perdre complètement leur emploi en raison de leur situation familiale.

    Comme nous l'avons annoncé dans le discours du Trône, en septembre, nous nous emploierons avec la même énergie à trouver des solutions aux problèmes des personnes qui prennent soin d'un proche parent gravement malade que nous l'avons fait pour les travailleurs qui doivent s'occuper d'un nouveau-né.

    Cela veut dire qu'il faut examiner tout l'éventail des programmes gouvernementaux. Il faut examiner toutes les questions qui intéressent les Canadiens, y compris la famille, le travail et la santé. Il faut comprendre que la vie des gens n'est pas gentiment compartimentée, si bien qu'une même personne peut être à la fois travailleur, parent et, souvent, aidant.

    Nous savons que près des trois quarts des Canadiens qui dispensent des soins à des personnes âgées fragiles ont aussi un emploi et que le pourcentage d'employés qui s'occupent à la fois de personnes âgées et d'enfants a presque doublé depuis dix ans. La prestation de soins est une question qui intéresse un fort segment de la population. Elle transcende en outre les frontières entre le travail, la famille et la santé.

    Le commissaire Romanow a déclaré, dans le rapport qu'il vient de déposer, que le concept de soins à domicile ne pourrait tout simplement pas exister au Canada, si ce n'était du soutien qu'apportent les systèmes sociaux et les aidants naturels. Il a signalé que près de 85 à 90 p. 100 des soins à domicile sont dispensés par des membres de la famille ou des amis.

    Lorsque des travailleurs doivent assumer tant de responsabilités en matière de soins à domicile, les conflits travail-soins sont inévitables. Les rapports Kirby et Romanow font tous deux état du besoin de garantir le soutien du revenu et de protéger l'emploi des aidants membres de la famille.

    

  +-(1840)  

    

    Je demande aux députés de bien vouloir noter que ces rapports ont établi un lien entre ces deux questions. Ils n'ont pas laissé entendre, comme le fait le projet de loi C-206, qu'il faudrait choisir entre un emploi et la prestation des soins. Le gouvernement examine un moyen d'aider les gens qui font face à ce dilemme.

    Nous estimons qu'une solution appropriée consisterait à élaborer une mesure permettant de soutenir directement les aidants naturels. Elle permettrait aussi à des Canadiens de s'absenter temporairement de leur travail pour prendre soin de membres de la famille immédiate qui sont gravement malades, sans craindre de perdre soudainement leur revenu ou leur emploi.

    Nous accueillons favorablement cette occasion de débattre et d'explorer des solutions aux problèmes auxquels doivent faire face les aidants naturels qui ont un emploi. Le projet de loi C-206 nous donne à tous l'occasion de participer à ce débat et de chercher les solutions qui sont nécessaires pour le faire progresser. Nous croyons fermement que le gouvernement fédéral a la possibilité de donner l'exemple en offrant une aide au revenu temporaire et une sécurité d'emploi aux aidants naturels qui sont sur le marché du travail.

    Bien sûr, nous sommes très conscients des coûts de tels programmes. Le défi que les parlementaires doivent relever consiste à transformer de bonnes intentions en bons résultats pour les Canadiens qui traversent des crises en matière de santé familiale. Le gouvernement entend élaborer une initiative peu coûteuse, adaptée aux besoins, souple et réalisable.

    En ce qui concerne l'auteur du projet de loi C-206, j'estime que son projet de loi montre à quel point il est une personne compatissante. Il a travaillé à ce projet de loi d'initiative parlementaire pour le présenter à la Chambre et faire progresser le débat. Espérons que nous pourrons bientôt nous doter d'un programme qui répondra aux besoins des Canadiens et qui tiendra compte des difficultés que beaucoup d'entre eux doivent affronter aujourd'hui.

+-

    Mme Wendy Lill (Dartmouth, NPD): Monsieur le Président, je tiens à remercier la députée d'en face de ses commentaires au sujet de cet important projet de loi. Je veux également relater une histoire que m'a racontée l'un de ses collègues au moment où j'entrais dans la Chambre. Il m'a fait part ce qui lui était arrivé il y a 10 ans. Une mère était venue le voir et lui avait dit que son fils était en train de mourir. Elle voulait rester chez elle avec son fils, mais il lui était impossible de toucher des prestations d'assurance-chômage. La seule solution pour elle était que son fils aille à l'hôpital. C'est ce qu'il a fait, au coût de 400 $ par jour, et c'est là qu'il est mort.

    Quand j'y pense, c'est tragique à tous les niveaux, car il en aurait coûté à l'époque 50 $ par jour, je crois, pour lui verser des prestations d'assurance-chômage et elle aurait pu rester chez elle pour s'occuper de son fils mourant. Cela aurait été la solution parfaite. Tout le monde aurait été gagnant. L'hôpital n'aurait pas eu à payer cette somme supplémentaire et nous savons tous au plus profond de nous-mêmes que si une personne est mourante, elle devrait être dans un environnement familier, entourée de ses proches. C'est de ça qu'il s'agit dans le projet de loi. Il propose un système qui ferait place à la compassion et qui répondrait aux besoins des familles canadiennes.

    Je suis très fière d'avoir un collègue qui a fait le travail nécessaire pour nous donner ce projet de loi. Il l'a rédigé de telle façon que nous pouvons tous en voir les possibilités, notamment le fait que le système pourrait fonctionner à l'avantage de chacun d'entre nous grâce à un régime qui est déjà en place, celui de l'assurance-emploi, qui est là pour fournir des prestations d'assurance quand les gens ont besoin de s'absenter, pour prendre soin d'un nouveau-né, par exemple, ce que le gouvernement a très justement institué récemment, faisant de ce régime un programme très progressiste. Le présent projet de loi est un autre élément de ce programme. Il se situe à l'autre extrémité du spectre, soit au moment où les gens quittent ce monde. Pourquoi ne pas instituer la même chose à ce stade de la vie humaine?

    Je tiens à exprimer mes remerciements pour cet important projet de loi et pour les commentaires que nous avons entendus toute la soirée. Le projet de loi a été très bien reçu et j'attends avec impatience les prochaines étapes et les débats qu'il ne manquera pas de susciter.

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le Président, je suis heureux de prendre la parole aujourd'hui pour participer au débat sur le projet de loi de mon collègue de Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, et je me joins à ceux qui m'ont précédé pour féliciter le député de sa conscience sociale.

    

  +-(1845)  

    

    Ce soir, nous débattons le projet de loi d'initiative parlementaire C-206, concernant les prestations d'assurance-emploi pour les personnes qui doivent prendre soin d'un membre de leur famille. Il ne fait pas de doute que la question des congés pour prendre soin d'un membre de la famille qui est très malade ou handicapé et des moyens à utiliser pour donner aux gens qui doivent s'absenter du travail pour cette raison le soutien et la protection dont ils ont besoin est une question importante que la Chambre doit examiner. Nous savons que les questions relatives au travail intéressent tout le monde, par exemple les employés et les syndicats, les employeurs et les gouvernements ainsi que les commentateurs sociaux. Tous ont reconnu la nécessité de mettre sur pied un genre de programme de congé pour les Canadiens qui doivent s'absenter du travail pour prendre soin d'un membre de leur famille.

    Nous avons beaucoup de preuves à regarder. Par exemple, près d'un travailleur canadien sur quatre dit qu'il ou que d'autres membres du ménage prodiguent des soins à des proches qui sont âgés, handicapés ou gravement malades. Nous savons aussi que presque la moitié des Canadiens ressentent du stress causé par la nécessité d'équilibrer travail et vie personnelle, stress dont le niveau peut varier entre modéré et élevé. La proportion est presque deux fois plus grande qu'il y a une décennie. Nous savons que les femmes sont plus de deux fois plus susceptibles de ressentir du stress relié aux efforts qu'elles doivent déployer pour allier responsabilités professionnelles et responsabilités familiales. Les travailleurs qui doivent prendre soin de personnes à charge, comme des enfants ou des parents âgés, signalent encore plus de conflits entre le travail et la vie familiale que leurs collègues. Le député soulève une question qui préoccupe beaucoup les Canadiens et qui occupe déjà une place élevée sur la liste de priorités du gouvernement.

    Il y a de nombreuses façons d'aborder cette question. Pour certains, c'est une question d'équilibre entre le travail et la vie personnelle. Pour d'autres, c'est une question de droit des travailleurs. Plus récemment, on a dit que c'était une question de santé. À titre d'exemple, Romanow et Kirby ont abordé la question dans le contexte du système de santé. M. Romanow nous a appris que de 85 à 90 p. 100 des soins à domicile sont dispensés par des membres de la famille et des amis. Dans son rapport, il conclut que les soins à domicile ne pourraient exister au Canada sans l'appui des réseaux sociaux et des aidants naturels. Le sénateur Kirby a également reconnu le rôle fondamental que jouent les aidants membres de la famille dans les soins à domicile. Il recommande expressément dans son rapport que des avantages soient consentis aux Canadiens qui choisissent de s'absenter de leur emploi pour fournir des soins palliatifs.

    Le gouvernement est sensible aux points de vue présentés dans ces rapports et reconnaît que l'attention portée à la question du soutien accordé aux aidants membres de la famille constitue un élément important du programme global de santé, mais il voit aussi là un problème clé lié au milieu de travail, en particulier dans le contexte des pénuries imminentes de main-d'oeuvre qualifiée dans bon nombre de lieux de travail au Canada.

    Nous avons des faits qui illustrent l'étendue du problème dans les lieux de travail au Canada. Premièrement, nous savons que des aidants membres de la famille 56 p. 100 travaillent aussi à temps plein et 12 p. 100, à temps partiel. Nous savons également ce qui suit: 69 p. 100 des femmes ayant des enfants de moins de 16 ans font partie de la population active; 75 p. 100 des hommes et 62 p. 100 des femmes fournissant des soins à des aînés occupent un emploi. La proportion des employés s'occupant à la fois d'aînés et d'enfants croît de façon draconienne puisqu'elle est passée de 9,5 p. 100 à 15 p. 100 au cours de la dernière décennie. Un sondage révèle que 77 p. 100 des travailleurs canadiens qui s'occupent de proches gravement malades ont dû prendre des congés pour prodiguer des soins compassionnels.

    La nécessité d'établir un équilibre entre les responsabilités liées à la prestation de soins et celles qui sont liées au travail a une grande incidence sur de nombreux travailleurs canadiens et sur leur lieu de travail. De plus, compte tenu de notre démographie, on peut supposer que l'incidence sur les lieux de travail va continuer de croître.

    Le fait de fournir des soins compassionnels tout en demeurant au sein de la population active a des répercussions importantes sur le marché du travail au Canada. Nous devons veiller à ce que les compétences et l'expérience précieuses des employés demeurent disponibles sur le marché du travail. Parallèlement, nous devrions chercher à les appuyer s'ils ressentent le besoin de s'acquitter de la responsabilité de donner des soins essentiels.

    

  +-(1850)  

    

    En d'autres termes, le gouvernement devrait réagir à ce problème en aidant les travailleurs qui ont temporairement besoin de soutien du revenu quand ils ne travaillent pas, mais en les autorisant quand même à demeurer sur le marché du travail. Les gouvernements ne sont pas les seuls à reconnaître ce besoin. Les employeurs sont de plus en plus conscients de la nécessité croissante d'offrir des congés temporaires pour que les employés puissent respecter leurs responsabilités familiales. Par exemple, un sondage réalisé dans des entreprises de grande et de moyenne tailles révèle que 59 p. 100 des entreprises offrent des congés familiaux, mais que seulement la moitié d'entre elles ont établi une politique officielle à cet égard. Le sondage révèle également qu'en règle générale le soutien en milieu de travail est généralement non payé, officieux et de très courte durée. En d'autres termes, on reconnaît de plus en plus la nécessité du soutien en milieu de travail pour les personnes soignantes, mais une approche systématique n'a pas encore été adoptée.

    Si on examine la question du point de vue gouvernemental, certaines considérations clés font surface. Premièrement, les représentants des employeurs et des employés reconnaissent la nécessité de programmes pour permettre aux travailleurs d'équilibrer leurs responsabilités professionnelles et familiales, mais aucune réponse systématique au problème ne semble venir du secteur privé. Deuxièmement, les travailleurs ont généralement besoin d'un soutien temporaire du revenu pour leur permettre de demeurer sur le marché du travail. Troisièmement, toutes les solutions doivent être abordables. Quatrièmement, les programmes proposés comme solutions par le gouvernement fédéral doivent comporter la participation des secteurs public et privé.

    Voilà les principales considérations qui orientent le gouvernement dans l'élaboration d'une solution appropriée pour respecter l'engagement pris dans le discours du Trône à l'égard de cette question. Je félicite encore une fois le député de son travail dans le domaine social et je le remercie d'avoir soulevé cet important sujet pour que la Chambre puisse l'examiner.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je signale à la députée de London-Ouest qu'il reste quatre minutes avant la période réservée aux initiatives parlementaires.

+-

    Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Monsieur le Président, si c'est possible, je renoncerai volontiers aux quatre minutes ce soir afin d'utiliser ce temps la prochaine fois que nous discuterons de cette question à la Chambre. J'ai besoin de plus de quatre minutes pour dire tout ce que je veux dire au sujet du projet de loi.

    Je suis très heureuse que nous tenions ce débat. Je crois profondément aux soins prodigués à un membre de la famille. Étant donné le vieillissement de la population, le besoin se manifestera certainement dans notre pays. Les données démographiques montrent que, d'ici 2011, notre population de plus de 65 ans augmentera de 23 p. 100.

    Qui donc prodiguera les soins? Habituellement, cette tâche incombe aux femmes. Et qui sont ces femmes? Elles travaillent déjà à la maison. Nous avons changé au cours des années.

    Une voix: Bien dit.

    Mme Sue Barnes: Oui, et je vais faire également une analyse financière. Si j'examine le libellé du projet de loi d'un point de vue financier, je dirair au député que le projet de loi sera très coûteux, car les sommes requises proviendront d'un fonds. Cependant, il est clair que le besoin existe. Je crois que nous pouvons accepter le projet de loi à titre d'objectif et j'aimerais qu'on atteigne cet objectif le plus tôt possible. Je ne suis pas d'accord avec la formulation actuelle du projet de loi, mais je peux assurer au député parrain de cette mesure législative que nous parviendrons éventuellement à un accord grâce à la consultation.

    À l'heure actuelle, au Canada, il y a un vide. Qu'est-ce qui est visé par le Code canadien du travail? Il n'y a que quelques provinces qui participent. J'ai effectué certaines recherches. Il semble que six provinces à peine au Canada offrent un congé sans solde à court terme aux gens qui ont des responsabilités familiales extrêmes ou qui doivent faire face à des urgences et s'occuper de parents. Un des problèmes que me pose le projet de loi de notre collègue c'est que la définition de «parents» est plutôt large. Ce sont des détails sur lesquels nous pouvons nous pencher.

    Le nombre de jours de congé sans solde permis par exemple aux termes du Code canadien du travail à l'heure actuelle est de 3 au Nouveau-Brunswick, de 5 en Colombie-Britannique, de 5 au Québec où il va être doublé, semble-t-il, pour passer à 10, de 7 à Terre-Neuve-et-Labrador, de 10 en Ontario et de 12 en Saskatchewan. Si une personne a une mère ou un père atteint du cancer, cela ne suffira pas.

    Un des autres domaines qui m'inquiètent réside dans les femmes travaillant à l'extérieur du foyer. Il y aura un stress supplémentaire si elles doivent quitter leur emploi. Il est question d'une chose qui est encore liée au travail plutôt que d'un congé volontaire. D'une façon ou d'une autre, je pense que nous pourrions ajouter au stress dans des situations familiales lorsque les personnes en question doivent quitter leur emploi. Nous n'avons pas besoin de cela. Il y a des façons de remédier à cette situation. Il y a des façons de procéder qui sont réalistes et qui peuvent répondre à de véritables besoins à l'intérieur des familles tout en ne privant pas le marché du travail de personnes hautement qualifiées et bien formées, y compris des hommes et des femmes qui offrent des soins dans leurs foyers. En fait, 81 p. 100 des Canadiens pensent à peu près la même chose. Lorsqu'on les interroge sur cette question, ils disent que le gouvernement fédéral devrait avoir un rôle à jouer en l'occurrence.

    C'est un remplacement temporaire. Je vais me faire l'avocat du diable dans le cas présent. Je vais dire que si je suis la personne malade, je n'ai pas droit aux 52 semaines que ce projet de loi prévoit pour l'aidant naturel avec des prolongations possibles, mais beaucoup moins que cela. C'est une autre question sur laquelle nous devrons nous pencher.

    Je suis heureux d'avoir l'occasion de participer au débat aujourd'hui. Je vais jouer un rôle alors que ce projet de loi ou un autre projet de loi du gouvernement franchira peu à peu les étapes. Je propose que nous unissions tous nos efforts pour régler la question.

  +-(1855)  

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La députée dispose encore de six minutes si elle veut les utiliser.

+-

    Mme Sue Barnes: Monsieur le Président, je n'utiliserai pas mes six prochaines minutes. Je laisserai à quelqu'un d'autre le temps de participer au débat.

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): La période réservée à l'étude des initiatives parlementaires est maintenant écoulée et l'article retombe au bas de la liste de priorité du Feuilleton.

[Français]

    Conformément à l'ordre adopté le lundi, 27 janvier 2003, la Chambre est maintenant constituée en comité plénier pour étudier la motion no 13, sous la rubrique des affaires émanant du gouvernement.

    [Note de la rédaction: Pour la suite du compte rendu, voir la partie B]

-Initiatives ministérielles

[Initiatives ministérielles]

*   *   *

[Traduction]

-L'IRAK

    (La Chambre se forme en comité plénier pour étudier l'article 13 des initiatives ministérielles sous la présidence de M. Bélair)

+-

    L'hon. Don Boudria (ministre d'État et leader du gouvernement à la Chambre des communes, Lib.) propose:

    Que le comité procède à un débat exploratoire de la situation en Irak.

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, lorsque la Chambre a débattu la dernière fois de la question de l'Irak au début du mois d'octobre, elle s'est attachée aux défis posés par le non-respect par l'Irak de ses obligations envers le Conseil de sécurité. Nous avons examiné la longue histoire cruelle du régime de Saddam Hussein, l'importance pour nous tous de parvenir à un désarmement, le rôle des Nations Unies pour assurer notre paix et notre sécurité collectives de même que les préoccupations humanitaires que nous partageons tous pour le peuple irakien.

    Au cours de ce débat, j'ai affirmé que le Canada tenterait de trouver une solution pacifique à cette crise par l'entremise des inspecteurs d'armement de l'ONU et par l'appui actif et complet de l'Irak dans le processus de désarmement.

[Français]

    L'objectif du gouvernement demeure le même, car notre confiance dans les Nations Unies était bien placée. Le Conseil de sécurité s'est montré à la hauteur du problème posé par l'Irak en adoptant à l'unanimité la résolution 1441. Cette résolution a permis aux inspecteurs du désarmement de revenir en Irak et a donné au gouvernement de ce pays une dernière chance de se conformer à ses obligations.

    Fin novembre, les inspecteurs sont retournés en Irak, après une absence de quatre ans. Depuis, ils se sont attelés à la tâche que leur a confiée le Conseil de sécurité. Encore une fois, certains ont exprimé des doutes sur la capacité des inspecteurs de se montrer à la hauteur de leurs responsabilités et ont prédit un échec rapide de la mission. D'autres se sont plaints que ce n'était qu'un piège tendu à l'Irak et que l'opération n'était en définitive qu'une manoeuvre occidentale provocatrice d'espionnage contre Bagdad.

    Mais ces sceptiques, mes collègues, avaient tort. Les équipes d'inspections ont fait du bon travail dans des circonstances très difficiles, procédant jusqu'ici à plus de 300 fouilles et saisies. Nous les félicitons de leur professionnalisme et de leur dévouement. Ils ont réussi à accéder à des sites qui avaient été interdits aux équipes d'inspection précédentes. Elles ont fait d'importantes découvertes comprenant notamment les obus vides de minutions chimiques. Elles font preuve de l'objectivité qui est essentielle pour montrer que ce processus représente une chance équitable pour l'Irak.

    Bref, les inspecteurs ont montré qu'ils ont la capacité et la détermination voulue pour s'acquitter de leur tâche, à condition de disposer du soutien dont ils ont besoin de la part de l'Irak. Par conséquent, quand M. Blix et M. ElBaradei demandent plus de temps, notre gouvernement croit qu'il faudrait le leur accorder.

  +-(1900)  

[Traduction]

    En même temps, comme l'a dit le premier ministre, il ne s'agit pas d'un processus d'une durée indéterminée. Le succès en est assuré dans la seule mesure où l'Irak comprend que c'est sa dernière chance de tout mettre sur la table et d'agir en conséquence. Malheureusement, la question reste toujours de savoir si le gouvernement irakien souhaite profiter de cette dernière change. Les inspecteurs ont vertement critiqué l'attitude du gouvernement irakien face aux inspections. Comme l'a dit M. Blix dans son rapport au Conseil de sécurité lundi:

...la résolution 1441 dispose que cette coopération doit être “active”. Cela ne suffit pas d'ouvrir les portes. L'inspection n'est pas un jeu de “catch”.

    Le gouvernement estime que l'Irak doit fournir activement des preuves et donner des réponses à toutes les nombreuses questions encore en suspens. Les inspecteurs ne sont pas satisfaits des réponses de l'Irak au sujet de ce qu'il est advenu de tonnes de gaz neurotoxique mortel. Ils attendent toujours que l'Irak leur dise la vérité sur son programme de missiles. Il leur faut des réponses au sujet de la recherche sur les armes nucléaires et biologiques. S'ils posent des questions c'est parce que la résolution 1441 exige des réponses.

    Il faut se rappeler que la résolution 1441 n'est pas un tigre de papier. Elle prévoit des conséquences graves si l'Irak ne se conforme pas à ce qui est stipulé. Les États-Unis, le Royaume-Uni et d'autres pays ont commencé à se préparer en vue d'un recours possible à la force contre l'Irak, si cela est nécessaire. Le Canada participe à des discussions militaires prudentes avec les États-Unis afin d'être lui aussi prêt, au besoin. Ce recours crédible à la force est un appui essentiel à la diplomatie, étant donné qu'il met de la pression sur l'Irak afin que ce pays respecte la résolution. Cela dit, je tiens à assurer la Chambre qu'aucune décision n'a été prise par le gouvernement en ce qui a trait au recours à la force, que nous considérons comme une mesure ultime.

    Certains ont accusé le gouvernement de manquer de cohérence dans ses politiques à l'égard de l'Irak. Pourtant, notre politique n'a pas changé depuis le dernier débat. D'aucuns insistent pour dire que le Canada devrait s'engager maintenant à recourir à la force, avant que nous ayons toutes les preuves nécessaires, ou avant que le processus des Nations Unies n'ait eu une chance d'aboutir. D'autres disent que le Canada ne devrait pas tenir compte de ce que la COCOVINU et l'AIEA pourraient découvrir, qu'il devrait faire fi de ses responsabilités en tant que membre de l'ONU et annoncer maintenant que nous ne jouerons jamais aucun rôle dans l'exécution des obligations imposées à l'Irak par le Conseil de sécurité.

    Le gouvernement n'est pas de cet avis et moi non plus. Je ne pense pas que les Canadiens soient de cet avis. Le Canada doit continuer à chercher une solution pacifique au défi que pose le non-respect par l'Irak de ses obligations internationales. Notre objectif est l'élimination complète des armes de destruction massive de l'Irak en faisant appel à des moyens pacifiques et en respectant la résolution 1441 du Conseil de sécurité. Nous pensons que la guerre peut être évitée de cette façon.

    Ce n'est pas le moment d'abandonner le processus de l'ONU, alors que les inspecteurs commencent à faire des progrès réels et que les pressions exercées d'une manière concertée par la communauté internationale commencent à faire en sorte que l'Irak collabore, même si c'est à contrecoeur. Il faut donner aux inspecteurs le temps nécessaire pour utiliser tous les moyens dont ils disposent. Tel est le message que je vais livrer au secrétaire Powell lorsque je vais le rencontrer demain, et tel est le message que le premier ministre a transmis au président Bush la semaine dernière, lorsque ceux-ci ont discuté des relations entre nos deux pays.

    Nos relations sont solides et elles se fondent sur un engagement envers des valeurs communes. Elles autorisent ce genre d'échange de vues et elles permettent à chacun de respecter le point de vue de l'autre, ce qui favorise la compréhension de nos préoccupations mutuelles.

    Je tiens à dire qu'il est possible que l'on recoure à la force pour appuyer les résolutions du Conseil de sécurité sur l'Irak. Il se pourrait bien que les inspecteurs en armement trouvent des preuves de la non-conformité de l'Irak. La feuille de route de l'Irak en matière de conformité n'est certainement pas bonne. Dans ce cas, nous devons être prêts à joindre le geste à la parole. Le Conseil de sécurité a convenu à l'unanimité que l'Irak subirait de lourdes conséquences faute d'honorer ses obligations.

    Même si nous reconnaissons que la guerre n'est pas inévitable, force est de reconnaître aussi qu'une solution pacifique dépend essentiellement de la coopération entière et active de l'Irak. Nous ne devons pas exclure une solution pacifique pas plus que nous ne pouvons exclure le recours à la force.

    Comme la Chambre le sait, le Canada et les États-Unis sont d'excellents amis et alliés. Ces deux pays travaillent en coopération et en partenariat depuis fort longtemps, et ils sont d'accord sur les questions importantes. Toutefois, ce n'est pas parce que deux pays sont amis et alliés qu'ils doivent adopter des approches identiques en tout temps. C'est en débattant leurs points de vue différents et en poursuivant des approches variées et à la fois complémentaires qu'ils réussissent à se conseiller et à s'épauler mutuellement.

    Les États-Unis bénéficient autant que nous du fait que le Canada mène une politique étrangère indépendante. Nous chérissons nos différences, et les États-Unis font de même. Notre partenariat ne s'en porte que mieux.

  +-(1905)  

    Au sujet de l'Irak, notre but est le même: le désarmement complet et confirmé de l'Irak par le truchement du processus de paix des Nations Unies.

    Hier soir, j'ai vu le président Bush dire comment les États-Unis prendraient leur décision. Il a dit:

    Le destin de cette nation ne dépend pas des décisions des autres.

    Les Canadiens n'en attendent pas moins de leur gouvernement. Pourquoi les Américains en attendraient-ils moins du nôtre qu'ils n'en exigent du leur?

    Le gouvernement collabore étroitement avec nos amis et alliés partout dans le monde qui partagent notre désir d'en arriver à une solution pacifique, et notre but est d'y parvenir grâce à nos institutions multilatérales. Les pays de la région se sont engagés à convaincre Saddam Hussein que l'Irak doit honorer ses obligations internationales pour le bien de son peuple et la stabilité de la région.

    Comme à nous, il leur tarde de voir l'Irak reprendre sa place au sein de la communauté internationale en tant que nation pacifique et prospère. Les Irakiens ne méritent rien de moins.

    Nombreux sont ceux qui se sont demandés si le Canada devait exiger qu'une deuxième résolution soit adoptée avant d'appuyer le recours à la force contre l'Irak. À mon sens, la question qu'il faut se poser est celle de savoir si le processus en cours établi par la résolution 1441 du Conseil de sécurité nous permet de répondre aux deux questions fondamentales auxquelles nous sommes confrontés: est-ce que l'Irak viole ses obligations en matière de désarmement envers la communauté internationale et est-ce que le recours à la force est la seule façon d'obliger l'Irak à remplir ses obligations?

    La résolution 1441 nous permet de répondre à ces deux questions. Aux termes de la résolution 1441, les inspecteurs sont retournés en Irak avec des pouvoirs renforcés et de nouveaux outils. La résolution 1441, et la menace non équivoque de graves conséquences en cas de non-respect qui y est sous-jacente, y compris le recours à la force, ont forcé l'Irak à respecter les voeux de la communauté internationale comme jamais auparavant. La résolution 1441 établit un processus par lequel le conseil recevra des rapports des inspecteurs, pour ensuite examiner les mesures qu'il convient de prendre, ce qui pourrait bien supposer une autre résolution.

    La résolution 1441 est adaptée à la situation actuelle, et elle prépare le terrain pour l'avenir. Efforçons-nous d'appliquer la résolution 1441 dans sa totalité avant de songer à ce qui pourrait être nécessaire.

    La guerre n'est pas inévitable, mais pour que le conflit soit évité, il faut que l'Irak se conforme pleinement à la résolution et collabore avec les Nations Unies. Le Canada appuiera la communauté internationale pour veiller à ce que l'Irak le fasse.

    En guise de conclusion, je répéterai ce qu'a dit le secrétaire général Kofi Annan:

    J'espère vraiment que l'Irak se conformera et que nous pourrons le désarmer pacifiquement. J'ai toujours espoir qu'il n'y aura pas de guerre.

    Nous devons nous aussi croire que la paix prévaudra.

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le président, j'ai écouté très attentivement les propos du ministre des Affaires étrangères. Il s'est fait un point d'honneur de dire que le gouvernement n'avait pas changé sa position. Or, je peux lui citer toute une série de déclarations faites au cours des deux derniers mois qui démontrent des changements non seulement dans la position du gouvernement, mais surtout dans le ton. Le ton ferme et plus décidé employé par le ministre ce soir a quelque chose de rafraîchissant.

    L'Alliance canadienne soutient que le Canada devrait collaborer plus étroitement avec la coalition britanno-américaine afin d'exercer le plus de pression possible sur Saddam Hussein pour qu'il désarme. Nous avons réclamé la participation du Canada aux exercices préalables au déploiement. Le gouvernement semble avoir rejeté cette position jusqu'à présent. Cependant, je note que le ministre a parlé de consultations entre les États-Unis et la Canada. J'oublie les mots exacts qu'il a employés, mais ces consultations portaient sur les préparatifs militaires.

    Le ministre veut-il dire que le gouvernement s'est engagé dans une forme limitée d'activité préalable au déploiement?

  +-(1910)  

+-

    L'hon. Bill Graham: Non, monsieur le président, ce n'est pas ainsi que je présenterais les choses. J'ai précisé très clairement dans mon discours que le gouvernement a toujours affirmé de façon très explicite, et que le premier ministre l'a répété à maintes reprises, que si la nécessité d'avoir recours à la force pour obliger Saddam Hussein à se défaire de ses armes conformément à la résolution 1441 et au processus mis en place par les Nations Unies est établie, le Canada sera de la partie.

    Toutefois, en évaluant les installations nécessaires, une planification militaire prudente exige que nous évaluions nos biens, que nous prenions des décisions, que nous discutions avec d'autres pays et que nous voyions ce que serait notre rôle. Le ministre de la Défense nationale a été en mesure de le faire, mais sans le moindre engagement. On n'en est pas aux dispositions militaires, à la décision d'envoyer des troupes ou quoi que ce soit de ce genre.

    Nous croyons fermement que, même si la menace de la force aide à faire respecter la diplomatie, il est très important dans ces circonstances que le monde sache que c'est le processus du Conseil de sécurité et des Nations Unies qui décidera de la façon de régler l'impasse et que si nous observons ce processus, nous le ferons d'une façon qui nous permettra de garantir que le recours à la force, le cas échéant, sera légitime. Toutefois, en fin de compte, la résolution de ce confit permettra d'assurer une certaine stabilité au Proche-Orient comme dans le reste du monde et de dissiper la peur de l'envahisseur étranger. C'est là le principe le plus important. Nous avons toujours été guidés par ce principe. Nous avons toujours soigneusement choisi nos mots et planifié nos actions. Nous continuerons de le faire.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le président, le ministre a dit qu'il était important de travailler dans le cadre des Nations Unies. Pourrait-il expliquer à la Chambre pourquoi le gouvernement a refusé jusqu'à maintenant d'affirmer sans ambiguïté qu'il ne recourrait à la force que dans ce cadre? Pourquoi cette ambiguïté? Le ministre pourrait-il nous l'expliquer?

+-

    L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, je ne crois pas que l'interprétation du député soit juste. Il n'y a eu aucune ambiguïté dans ce que nous avons dit: nous n'interviendrons que dans le cadre de l'ONU, qui est décrit dans la résolution 1441, et cette résolution est toujours à l'étude.

    Le président a dit hier soir que le secrétaire Powell irait au Conseil de sécurité de l'ONU le 5 février pour exposer son point de vue, voir avec le Conseil de sécurité ce que celui-ci peut faire ou décider dans les circonstances actuelles. Nous avons reçu le rapport des deux inspecteurs l'autre jour. Je me suis personnellement entretenu avec M. Blix l'autre jour, et nous attendons un nouveau rapport le 14 février.

    Selon moi, personne aux Nations Unies ou dans le monde, que ce soit aux États-Unis, en France ou dans d'autres pays qui expriment cette opinion et préconisent une option ou l'autre, ne dit en ce moment que le recours à la force est inévitable ni que c'est ce que nous ferons. Tout le monde s'efforce de travailler dans ce cadre et dans ce contexte. C'était exactement la position du Canada au départ, lorsque le premier ministre s'est entretenu avec M. Bush il y a un certain temps, et c'est toujours notre position. C'est la meilleure façon de parvenir en fin de compte à un résultat crédible et légitime.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le Président, hier, après le discours sur l'état de l'Union, il était très évident que les États-Unis se réservaient toujours le droit d'aller frapper tout seul ou, pour reprendre l'expression du président, avec une coalition de volontaires, ce qu'il appelait la «willing coalition».

    Maintenant, le ministre semble dire que la résolution 1441 suffit pour aller en Irak. Il dit qu'il va rencontrer Colin Powell bientôt. Lorsque Colin Powell va vous poser la question: «Est-ce que vous nous suivez en Irak dans un geste unilatéral, sans une deuxième résolution à l'ONU?», j'imagine, après ce qu'il vient de dire, que le ministre va répondre: «Oui, je vous suis en Irak». Est-ce que je me trompe?

  +-(1915)  

+-

    L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, je risque fortement de me lancer dans une zone hypothétique. Comme mon collègue le ministre de la Défense nationale, je reconnais le danger d'une mesure semblable. Mais je vous assure que ce que je dirai au secrétaire d'État, M. Powell, c'est que la sécurité à long terme des États-Unis et la sécurité du monde demandent que ce soit le processus de la résolution 1441 qui nous guide dans la résolution de cette affaire.

    On va voir ce qui se passe lorsque M. Powell va aller devant le Conseil de sécurité. Il faut regarder soigneusement ce qu'ils font, leurs délibérations et leurs décisions. Ils ont le pouvoir. La résolution 1441 indique clairement à l'Irak qu'il faut se conformer, sans quoi il y aura des conséquences graves.

    Toutes ces questions font actuellement l'objet des décisions du Conseil de sécurité. Laissons-les étudier ce processus, le soutenir, et par la suite, il faudra garantir que l'Irak soit désarmé, en même temps que les pays du monde soient protégés.

[Traduction]

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, il est juste de dire, je crois, que, à l'instar de tous les députés, le ministre vise essentiellement à débarrasser non seulement l'Irak, mais encore toute cette région et, au bout du compte, toute la planète, des armes de destruction massive. Le ministre a toujours été partisan—et l'a dit avec éloquence—de supprimer toutes les armes nucléaires de la planète et, en fait, de soutenir le peuple irakien et de le protéger contre la brutalité et les violations des droits de la personne dont il est victime.

    Cela doit se faire tant dans le cadre des Nations Unies que dans le respect du droit international. Ce qui m'amène à poser les questions suivantes.

    Ma première question concerne la nécessité d'une seconde résolution. Le ministre ne s'est toujours pas prononcé clairement là-dessus. La France et l'Allemagne ont déclaré clairement et sans équivoque que, si la communauté internationale décidait par l'intermédiaire du Conseil de sécurité de l'ONU que la résolution 1441 n'avait pas été respectée, elles n'appuieraient le recours à la force qu'après l'adoption d'une autre résolution l'autorisant.

    Quelle est la position du Canada là-dessus et sur le droit fondamental des députés de se prononcer sur la nécessité d'envoyer des hommes et des femmes à la guerre?

+-

    L'hon. Bill Graham: Monsieur le président, en réponse à la première question, j'ai essayé d'expliquer clairement que la résolution 1441 suit son cours. Lorsque cette résolution a été rédigée, elle l'a été de manière à laisser au Conseil de sécurité une certaine liberté pour agir selon les circonstances futures. Voilà pourquoi le gouvernement a toujours soigneusement évité de faire des hypothèses sur ce qui arriverait dans telle ou telle circonstance.

    Nous ne pouvons pas faire d'hypothèses parce que nous ne connaîtrons jamais les conditions exactes qui sont fixées. Voilà pourquoi j'ai dit que nous appuyons le processus et que nous appuyons le Conseil de sécurité qui est engagé dans ce processus pour l'instant. C'est au Conseil de sécurité qu'il appartiendra de décider de la nécessité d'une deuxième résolution. Cette décision sera prise ultérieurement, lorsque le secrétaire d'État Colin Powell se présentera devant le Conseil et que d'autres présenteront leurs preuves.

    À notre avis, rien n'a encore été prouvé. Comme le président Bush l'a dit hier, ces preuves seront présentées, mais il a aussi reconnu qu'elles ne l'avaient pas encore été. Le secrétaire d'État Colin Powell a dit que l'on recourra à la force au besoin. Cela ne sera nécessaire que si l'Irak ne se conforme pas aux conditions ou si la communauté internationale le juge nécessaire.

    C'est ce qui est prévu dans la résolution 1441. Voilà pourquoi nous appuyons ce processus. Voilà pourquoi nous refusons de nous perdre en conjectures sur les mesures qui pourraient s'avérer nécessaires dans l'avenir, dans une situation purement hypothétique.

    En ce qui concerne la Chambre, le gouvernement a toujours respecté celle-ci. Nous avons participé à des débats à la Chambre. Nous avons participé à la Chambre à des discussions sur des questions de la plus haute importance.

    Personnellement, je considère les décisions et les délibérations de la Chambre avec le plus grand respect. Je regrette de ne pouvoir rester ici ce soir, car je dois me rendre à Washington. Je puis donner aux députés l'assurance que le gouvernement tient compte des opinions de la Chambre, mais je leur rappelle aussi que le gouvernement a été élu pour assumer ses responsabilités.

    Le premier ministre a dit que le gouvernement avait été élu pour assumer ses responsabilités et que c'est ce qu'il fera quand viendra le moment de prendre des décisions. C'est le gouvernement qui décidera de l'opportunité de déployer ou non des troupes canadiennes. Si le gouvernement faisait un choix malavisé, la Chambre pourrait évidemment recourir à un vote de censure. Le gouvernement assumera toutefois ses responsabilités quant au déploiement de troupes, comme les Canadiens lui en ont confié le mandat en l'élisant.

  +-(1920)  

+-

    M. Stephen Harper (chef de l'opposition, Alliance canadienne): Monsieur le président, je me réjouis de la possibilité qui nous est donnée aujourd'hui de reparler de l'Irak.

    Qu'il me soit permis de récapituler la position dont j'ai fait part à la Chambre le 1er octobre 2002. J'ai soutenu alors que le moment était venu pour le Canada de s'engager à appuyer la coalition émergente des nations, notamment la Grande-Bretagne, l'Australie, les États-Unis et d'autres, dans leur détermination à faire clairement comprendre à Saddam Hussein que le refus de se conformer à un programme d'inspection inconditionnel justifierait des actes visant à supprimer les armes de destruction massive que l'on soupçonne l'Irak de posséder.

    J'avais fait observer que cette position est justifiée en droit international. En 1991, la guerre du Golfe, à laquelle le Canada a participé, n'a pas pris fin avec un armistice. Elle s'est terminée par un accord de cessez-le-feu par lequel l'Irak acceptait une série de résolutions de l'ONU exigeant l'inspection, sans aucune condition ni restriction, de tous les sites irakiens. Au cours des 12 années écoulées, l'Irak a défié cet accord et nombre d'autres résolutions, notamment la résolution no 1441, qui n'a pas été respectée.

    J'avais indiqué qu'il ne faisait aucun doute que Saddam Hussein possédait des programmes destinés à produire des armes de destruction massive. L'expérience le confirme. Les services de renseignement britanniques, canadiens et américains ne nous laissent aucun doute à ce sujet. Le non-respect et la non-coopération de Saddam Hussein avec les Nations Unies ne fait que confirmer cette information.

    Enfin, rappelant et maintenant que les Canadiens ne veulent pas faire la guerre, j'ai ajouté qu'ils tiennent néanmoins à préserver les intérêts du Canada en matière de sécurité nationale et ses valeurs en matière de diplomatie internationale. Les limites des déclarations de l'ONU ne correspondent pas à la politique étrangère du Canada, ni à nos besoins en matière de sécurité. Alors que le Canada a toujours tenté de travailler de concert avec les Nations Unies et d'autres organismes multilatéraux, il a également mis au point des politiques indépendantes avec ses alliés.

    Sur la foi de ces arguments, j'ai donné en octobre dernier au gouvernement les conseils suivants:

+-

     Premièrement, Si Saddam Hussein refuse de respecter une entente visant à accorder un accès inconditionnel et sans restriction aux inspecteurs des armements de l'ONU, le Canada devrait se joindre à ses alliés pour dire clairement à Saddam qu'un refus d'obtempérer entraînera des conséquences.

    Deuxièmement, si le Conseil de sécurité de l'ONU émet une déclaration pour exiger que l'Irak respecte ces conditions et que l'Irak ne les respecte toujours pas, le Canada devrait se joindre à ses alliés pour dire encore une fois à Saddam qu'un refus d'obtempérer entraînera des conséquences.

    Troisièmement, si des membres du Conseil de sécurité de l'ONU négligent d'insister de nouveau sur leurs propres déclarations antérieures, le Canada devrait se joindre à ses alliés pour veiller encore une fois à bien faire comprendre à Saddam qu'un refus d'obtempérer entraînera des conséquences.

    Quatre mois plus tard, et je veux être clair là-dessus, il est toujours possible de faire respecter les résolutions de l'ONU et d'obliger Saddam à désarmer sans aller en guerre. Pour que cela arrive, la communauté internationale doit appuyer sans réserve les résolutions actuelles de l'ONU, et nous devons comprendre la nature de Saddam Hussein. Ironie du sort, c'est le premier ministre actuel qui a déclaré en 1998:

    Mais ne vous y trompez pas, le bilan de Saddam montre qu'il ne respectera pas les solutions diplomatiques tant et aussi longtemps qu'elles ne seront pas assorties d'une menace d'intervention. Le moindre signe de faiblesse ou d'hésitation de notre part sera interprété comme un encouragement [...] Nous croyons que le Canada ne peut pas ne pas prendre position dans un moment pareil [...] [si des mesures étaient prises] le Canada serait du nombre.

    Si la communauté internationale en était davantage consciente aujourd'hui et si le gouvernement canadien demeurait fidèle aux paroles du premier ministre, nous aurions une bonne chance d'éviter la guerre. La résolution 1441 permettra au monde d'éviter la guerre uniquement si elle s'appuie sur une menace crédible de recours à la force.

    Dans les faits, cependant, des membres de la communauté internationale refusent d'appuyer l'application de la résolution 1441 des Nations Unies. Ils ne soutiennent pas la coalition multilatérale constituée de la Grande-Bretagne, de l'Australie, des États-Unis, de l'Espagne, de l'Italie et d'autres États, qui sont prêts à opposer à Saddam une menace crédible de recours à la force par le redéploiement d'effectifs dans la région du Golfe.

    La meilleure façon pour le Canada d'aider les Nations Unies est de se ranger sans équivoque aux côtés des pays qui sont prêts à agir pour évincer Saddam Hussein et éliminer ses armes. L'omission du Canada de se ranger aux côtés de ses alliés ne pourra engendrer qu'une des deux possibilités suivantes.

    La première possibilité est que l'ensemble de la communauté internationale décide de ne pas appliquer les résolutions du Conseil de sécurité. Le cas échéant, non seulement le tyran, Saddam Hussein, resterait-il en place mais, pire encore, il s'enhardirait davantage à menacer la région, son propre peuple et même la stabilité mondiale. Ses liens connus avec des organisations terroristes et la fabrication, par son pays, d'armes de destruction massive s'intensifieraient, ce qui ferait peser une menace encore plus lourde sur la sécurité du monde et augmenterait la possibilité d'une répétition des attentats du 11 septembre, ou de plus grave encore.

    Ne nous leurrons pas. En tant que pays le plus près des Nations Unies géographiquement, culturellement et économiquement, nous subirons inévitablement toutes les conséquences d'une attaque contre les États-Unis, si nous ne sommes pas nous-mêmes attaqués.

    Qu'une attaque se produise ou non, la non-application des résolutions visant à désarmer Saddam Hussein fera que l'ONU cessera d'être un intervenant crédible dans les questions de sécurité mondiale. Cette inaction serait tout à fait comparable à l'incapacité de la Ligue des Nations d'endiguer la montée du fascisme mondial dans les années 1920 et 1930.

    La seconde possibilité, et la plus vraisemblable, est la suivante: si le monde ne désarme pas Saddam Hussein, la coalition alliée dirigée par les États-Unis et le Royaume-Uni fera la guerre à l'Irak pour désarmer le régime malfaisant de Saddam Hussein.

    Le Canada se verrait forcé de choisir entre ses plus importants et plus proches alliés et de nombreux autres amis qu'il compte dans le monde. Nous nous verrions contraints d'aller en guerre ou d'éviter d'y participer.

    Le refus de certains membres de la communauté internationale de faire appliquer la résolution 1441 des Nations Unies et les résolutions précédentes, pour opposer à Saddam Hussein une menace crédible de recours à la force s'il refuse de désarmer, a indubitablement accru les probabilités d'une guerre.

    Qu'il soit également bien clair que, si les É.-U. et le R.-U. prennent la tête d'une coalition pour mener une offensive en Irak, cela sera parfaitement justifiable aux termes des résolutions actuelles des Nations Unies, même si cette intervention n'est pas spécifiquement approuvée au moyen d'une nouvelle résolution du Conseil de sécurité.

    Quelle position le Canada devrait-il adopter alors? Et sur quoi devrait-il fonder sa décision? Le Canada devrait adopter une position claire et faire preuve de leadership.

  +-(1925)  

    Notre parti n'adoptera pas une position en se fondant sur des sondages, sur des groupes de consultation, sur des émissions de ligne ouverte, sur des questions posées dans le bulletin parlementaire ou sur les caprices de l'opinion publique.

    Nous allons prendre position de la façon dont les véritables leaders et les grandes nations prennent des décisions en des moments marquants de l'histoire. Les véritables leaders, et je ne parle pas de brutes psychopathes comme Saddam Hussein, mais de véritables leaders comme les Canadiens ordinaires, ne veulent pas de guerre. Ils n'en ont jamais voulu.

    Mes parents et mes grands-parents ainsi que leurs nombreux parents et amis de leur génération m'ont toujours dit que la guerre est, au pire, une horreur et, au mieux, un très mauvais moyen de régler les problèmes de l'humanité. Ils m'ont également dit que cela n'avait pas empêché les Canadiens de partir souvent en guerre. Ils se souviennent même du temps où les Canadiens ont joué avec d'autres un rôle de premier plan dans la guerre, lorsque celle-ci est devenue le seul moyen de garantir la sécurité à long terme du Canada et du monde entier.

    À mon avis, le Canada finira bien par joindre les rangs de la coalition alliée, si la guerre contre l'Irak est déclarée. Le gouvernement canadien va se rallier, en dépit de son manque de préparation, de sa coopération défaillante avec ses alliés et de son incapacité de contribuer. En fin de compte, il y sera contraint par l'incertitude et l'indécision. Il ne fera pas son entrée comme un leader, mais ni vu ni connu, en bout de file.

    Il ne devrait pas en être ainsi. Cela est incompatible avec l'histoire remarquable de notre pays et notre réputation en tant que nation. Nous devons tenir bon dans l'épreuve et savoir prendre des décisions difficiles.

    Les députés alliancistes continueront d'adopter publiquement des positions fermes et de préconiser que les préparatifs militaires nécessaires soient faits pour que la guerre puisse être évitée. Je ne peux que prier instamment notre gouvernement de suivre notre exemple.

  +-(1930)  

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais remercier le leader de l'opposition d'avoir expliqué la position de son parti. Il a été clair et cela nous aide à comprendre le présent débat à la Chambre.

    La question que je dois lui poser, puisqu'il ne veut pas tenir compte des préférences des Canadiens au sujet d'un éventuel conflit, est pourquoi tient-il compte des préférences d'autres pays? Plus précisément, ma question au leader de l'opposition est la suivante: est-il maintenant convaincu qu'il existe des preuves suffisantes qu'une guerre entreprise par une coalition d'alliés sans l'autorisation des Nations Unies, et clairement contre la volonté du Conseil de sécurité, serait justifiée et est-ce que, à son avis, cela constituerait l'appui à la résolution 1441 dont il a parlé à la Chambre?

    Jusqu'à maintenant, nous n'avons pas beaucoup entendu le parti d'en face parler des Nations Unies. Nous l'avons beaucoup entendu parler de pourquoi nous devons faire preuve de leadership et coopérer avec certains autres alliés. Maintenant, si nous nous rangeons aux côtés des Nations Unies, ça nous mène où? Possédons-nous la preuve maintenant? Pouvons-nous intervenir maintenant? Est-ce que le leader de l'opposition appuie une guerre maintenant?

+-

    M. Stephen Harper: Monsieur le président, premièrement, je n'ai pas dit que nous ne tenions pas compte du point de vue des Canadiens pas plus que de celui des autres pays du monde, mais, en en bout de ligne, dans ce genre de dossier, nous prenons l'information que nous avons et nous faisons ce que nous pensons être à long terme dans l'intérêt de notre pays et du reste du monde. Je dirais que je ne suis pas certain que le ministre ait lui-même énoncé une position très différente. La différence est, bien entendu, que nous serions prêts à soumettre cette position à un vote à la Chambre des communes.

    Je pense que le ministre a répondu à sa propre question. Personne, y compris la coalition alliée, ne pense que nous sommes prêts à entrer en guerre aujourd'hui. Le secrétaire Powell doit retourner devant le Conseil de sécurité des Nations Unies pour de plus amples discussions, et nous allons recevoir d'autres rapports de Hans Blix et de l'équipe des inspecteurs des Nations Unies. Nous prendrons notre décision à partir des faits qui nous seront alors présentés, mais, conformément à la position que le gouvernement a enfin énoncée, et clairement je pense, en tant que pays souverain, nous n'excluons pas d'autres options.

+-

    M. Peter Stoffer (Sackville—Musquodoboit Valley—Eastern Shore, NPD): Monsieur le président, je suis vraiment étonné. À l'égard de la plupart des questions nationales, le chef de l'opposition officielle demande en public la participation des Canadiens, mais lorsqu'il s'agit d'une question sérieuse qui risque d'avoir un effet dévastateur sur le monde, non seulement dans l'avenir immédiat, mais aussi à long terme, il n'estime pas important de s'enquérir de l'opinion des Canadiens. Quoi qu'il en soit, ce n'est pas directement lié à la question.

    Est-ce que le député estime qu'il vaudrait la peine que les Nations Unies émettent une seconde résolution dans l'éventualité probable ou peu probable d'un conflit armé en Irak? Le député croit-il, comme la France et l'Allemagne l'ont suggéré, qu'il doit y avoir une seconde résolution?

+-

    M. Stephen Harper: Monsieur le président, comme je l'ai indiqué précédemment, je ne dis pas que l'opinion publique ne présente pas d'intérêt, mais je dis qu'il ne faut pas en être prisonnier.

    Je note que le Nouveau Parti démocratique a déjà pris position sur un futur plan d'action qui ne comporte ni la participation, ni l'opinion du public canadien ou des Nations Unies. Le Nouveau Parti démocratique s'opposera à la guerre en Irak quelles que soient les circonstances, comme il l'a fait en 1991. Or, une telle attitude aurait laissé Saddam Hussein en charge non seulement de l'Irak, mais aussi du Koweït.

    Pour ce qui est de la deuxième résolution, je crois avoir été clair dans mon intervention. L'Alliance canadienne n'estime pas qu'une deuxième résolution soit justifiée. Lors de la guerre du Golfe en 1991, il y a eu une série de résolutions concernant les conditions d'un cessez-le-feu. Pour l'Alliance canadienne, il est clair que légalement, une deuxième résolution ne s'impose pas. Il revient au Conseil de sécurité de décider si cette résolution sera de nature contraignante ou non contraignante et les alliés devront l'accepter.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, j'ai un peu l'impression d'être ici dans la fosse aux lions. Je veux quand même donner mon point de vue et poser une question au chef de l'opposition officielle.

    J'ai compris que le chef de l'opposition officielle ne croit pas beaucoup en l'ONU et je trouve cela dommage. Il me semble que c'est l'instrument que la communauté internationale s'est donnée pour régler les litiges. Il trouve même que la communauté internationale est trop timide pour ce qui est de respecter la résolution 1441. Le député dit que, finalement, il faudrait que le Canada se joigne à ses alliés pour faire une intervention uniquement sur la base de la résolution 1441.

    Je voudrais lui demander qui sont les alliés du Canada? Si les États-Unis seuls décident d'aller en guerre contre l'Irak, que fait-on des autres alliés? Il n'y a pas seulement les États-Unis qui sont les alliés du Canada. Je veux savoir ce qu'il entend par «alliés». Si l'ensemble des alliés disent non et que seuls les Américains disent oui, est-il toujours prêt à les suivre dans une guerre contre l'Irak?

  +-(1935)  

+-

    M. Stephen Harper: Monsieur le président, évidemment, avec l'arrangement des fauteuils, nous avons ce soir une nouvelle signification du mot «coalition».

    Parlons de l'importance des Nations Unies. Depuis la guerre du Golfe, en 1991, elles ont adopté une quinzaine de résolutions. C'est important pour la crédibilité de l'ONU que l'on fasse respecter ces résolutions. Si Saddam Hussein peut ignorer une quinzaine de résolutions sur ce sujet, quelle sera à l'avenir la valeur des Nations Unies? C'est une grande question.

    À mon avis, si les Nations Unies ne peuvent pas agir à l'avenir, c'est à chaque nation souveraine de prendre ses propres décisions. Les États-Unis vont le faire et je pense que le Canada et les autres pays vont prendre leur décision dans ces circonstances. Il n'y a pas encore de décision. Nous consultons nos alliés, et nos expériences passées nous permettront de décider d'une telle question.

[Traduction]

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le président, je remercie le chef de l'opposition d'avoir contribué au débat en fournissant d'excellentes informations. Il pourrait peut-être apporter d'autres précisions au sujet d'un ou deux points qui me préoccupent sincèrement.

    Si je lui demandais s'il appuie la démocratie, je suis convaincu qu'il répondrait oui. Dans ma circonscription, pour autant que je me souvienne, c'est la première fois qu'une question fait l'unanimité des électeurs qui communiquent avec moi. Ils ne sont pas en faveur de la guerre pour le moment. Je sais que des milliers et des milliers d'électeurs des circonscriptions de l'Alliance canadienne ont aussi donné leur avis à leurs députés. J'aimerais que notre collègue nous dise ce qu'il répond à ces électeurs.

    Ma deuxième question porte sur la résolution 1441. Il a déclaré que la non-conformité...

+-

    Le président suppléant (M. Bélair): Je regrette, mais je ne permets qu'une seule question.

+-

    M. Stephen Harper: Monsieur le président, nous avons constaté à peu près la même chose. Comme je l'ai dit durant mon discours, il est clair que les Canadiens ne veulent pas la guerre. Par ailleurs, les Canadiens ne veulent pas que Saddam Hussein continue à accumuler des armes de destruction massive, à passer outre aux résolutions des Nations Unies, et à agir ainsi librement, comme si les résolutions des Nations Unies n'existaient pas.

    De toute évidence, la solution serait que Saddam Hussein obtempère inconditionnellement et que nous évitions la guerre. Nous aurons peut-être à choisir entre deux options. J'espère que, si nous devons choisir ainsi, le député songera au meilleur intérêt à long terme. C'est ce que doivent faire les pays démocratiques. Les choix ne sont pas toujours faciles dans les pays démocratiques. Nous avons participé à la Seconde Guerre mondiale parce que quelques politiciens n'ont pas pu prendre les dures décisions qui s'imposaient au moment où il aurait été relativement facile de le faire.

    Nous devons faire notre propre évaluation de l'état du monde et de l'ampleur de la menace; nous devrons ensuite prendre une décision. Le député ne prendra certainement pas cette décision uniquement en fonction des électeurs qui communiqueront le plus souvent avec son bureau ce jour-là.

+-

    Mme Libby Davies (Vancouver-Est, NPD): Monsieur le président, j'ai écouté attentivement le chef de l'opposition. Je ne doute pas que les Canadiens seront horrifiés lorsqu'ils sauront quelle position l'Alliance a défendue ce soir. Cette position manque totalement de respect pour les Nations Unies. En disant qu'une deuxième résolution n'est pas nécessaire, l'Alliance manque totalement de respect envers le droit international et les Canadiens. Le député peut certes écarter du revers de la main les sondages et les bulletins parlementaires, il reste que, dans l'ensemble du pays, il y a un fort courant contre la participation canadienne à une guerre.

    Sur quoi se fonde le député pour justifier une violation du droit international uniquement pour que le Canada se range du côté des États-Unis dans une action unilatérale?

  +-(1940)  

+-

    M. Stephen Harper: Monsieur le président, comme je l'ai dit dans mes discours du mois d'octobre et de ce soir, j'estime que la position que j'ai prise est conforme au droit international. Je crois aussi que la pire chose qui puisse arriver aux Nations Unies, c'est que les membres de la communauté internationale soient confrontés à leur incapacité d'appliquer quelque 15 résolutions depuis 12 ans.

    C'est facile de dire non à la guerre. Personne n'en veut. Toutefois, je me demande comment se sent la députée lorsqu'elle dit à ses électeurs et à tous les Canadiens que si Saddam Hussein continue de produire des armes de destruction massive et de tisser des liens avec le terrorisme international, mais que ni nous ni personne d'autre ne ferons absolument rien pour l'en empêcher.

    C'est cela la position du NPD. Ses membres ont déjà dit qu'ils n'avaient que faire de l'opinion publique ou de la volonté de tout membre du Conseil de sécurité des Nations Unies.

[Français]

+-

    M. Gilles Duceppe (Laurier—Sainte-Marie, BQ): Monsieur le président, nous débattons ce soir d'un sujet important, soit la situation en Irak. Nous débattons de la guerre et de la paix, de la guerre ou de la paix.

    Depuis des semaines, des citoyens et des citoyennes m'interpellent. Ils sont inquiets et me demandent si le Canada ira en guerre et s'il y aura une guerre. C'est palpable, on le sent. Dès lors que l'on rencontre des gens, ils nous posent cette question. Cette question est rendue quotidienne.

    J'ai constaté que les Québécois et les Canadiens ne veulent pas la guerre. Je sais que les hommes et les femmes du Québec et du Canada ne partagent pas pour autant une sympathie pour Saddam Hussein. Ils n'ont aucune sympathie pour Saddam Hussein, pas plus qu'ils n'en avaient dans les années 1970 et 1980 alors qu'il était l'allié des États-Unis.

    Les Québécois et les Canadiens sont épris de liberté. Le débat, je le disais, est important, mais il est insuffisant. Il ne prendrait sa véritable dimension que dans la mesure où il serait décisionnel, où cette Chambre voterait pour exprimer la volonté des Québécois, des Québécoises, des Canadiens et des Canadiennes.

    Ce débat ne porte pas uniquement sur une intervention militaire ou non. Le débat aborde beaucoup plus largement comment intervenir dans une crise. Voilà la question essentielle. La question militaire ne fait que s'ensuivre, si elle doit suivre un tel problème.

    Le XXe siècle a été un siècle de conflits mondiaux et régionaux. Suite à la Première Guerre mondiale, nous avons connu la Société des Nations, qui a connu l'échec juste avant la Deuxième Guerre mondiale. L'ONU est née suite à la Deuxième Guerre mondiale. Depuis, plusieurs instances internationales ont vu le jour, dont, tout dernièrement, le Tribunal pénal international auquel, malheureusement, les États-Unis ont refusé de participer. Je le souligne car c'est important.

    La paix et la guerre, ont dit les hommes et les femmes suite à cette horrible Deuxième Guerre mondiale, doit relever désormais des Nations Unies et non pas d'un pays qui dominerait un autre pays ou tous les autres pays.

    Partant de là, deux attitudes sont à éviter: le militarisme à tout prix, comme je l'ai entendu hier soir lors du discours de George Bush, et également le pacifisme à tout prix.

    Nous aurions dû intervenir au Rwanda. Nous ne l'avons pas fait. C'est une erreur que de ne pas être intervenus au Rwanda. C'est pour cela que je dis que la question n'est pas la paix ou la guerre, mais quand doit-on à intervenir dans une situation.

    Il est de ces occasions où la guerre est nécessaire quand on sauve des vies humaines. C'était le cas au Rwanda. Nous ne l'avons pas fait et c'était une erreur. Est-ce le cas maintenant? Ce n'est pas le cas à l'heure actuelle.

    Dire comme George Bush que nous irons quelle que soit la preuve est une erreur. Dire comme d'autres que nous n'irons pas quelle que soit la preuve est aussi une erreur. Voilà deux miroirs qui se confrontent. Ce n'est pas ce qu'il faut faire.

    Que faut-il faire actuellement? Premièrement, il faut agir et n'agir que dans le cadre des Nations Unies. La résolution 1441 parle bien sûr des conséquences néfastes pour l'Irak si Saddam Hussein n'agit pas. Mais il y a un dernier paragraphe, le paragraphe 14, qui dit:

    

    Le conseil de sécurité reste saisi de la question.

    Qu'est-ce que cela veut dire? Qu'est-ce que le premier ministre devrait comprendre à la lecture du dernier paragraphe de la résolution 1441? Il devrait comprendre que par une seconde résolution ou au sein de la même résolution, les Nations Unies, par son conseil de sécurité, doivent évaluer la preuve et prendre une décision.

  +-(1945)  

    Sans cette décision, le Canada ne devrait pas intervenir sans l'aval du Conseil de sécurité. Cela devrait être clair pour le premier ministre comme pour tous les parlementaires ici à la Chambre.

    La résolution 1441 nous oblige à maintenir toutes les exigences face à l'Irak. Cela va de soi et je pense que cela fait l'unanimité ici. Elle nous invite également à rejeter toute intervention sans l'aval du Conseil de sécurité et non pas faire comme George Bush l'a dit hier: «Si le Conseil de sécurité n'est pas d'accord, nous irons quand même.» On ne peut faire cela.

    Quand le premier ministre et le ministre des Affaires étrangères nous disent ce soir que cela est hypothétique, ce n'est pas le cas. Si George Bush prend la peine de le préciser, c'est parce qu'il est au courant qu'il pourrait y avoir un droit de véto, que le Conseil de sécurité pourrait ne pas donner son aval, et qu'il tente d'amener des alliés à le rejoindre, sans l'aval du Conseil de sécurité.

    À cet égard, c'est lâche de la part du Canada de ne pas prendre ses responsabilités en affirmant: «Si le Conseil de sécurité n'y va pas, nous n'irons pas.» C'est cela que les Canadiens et les Québécois veulent entendre. C'est cela qu'ils n'entendent pas.

    La deuxième condition est que nous devons voter ici en cette Chambre. Quand j'ai entendu le premier ministre nous dire que l'environnement est assez important pour que l'on puisse voter ici en cette Chambre, qu'il s'agit d'un vote de confiance, quand il nous dit que le financement des partis politiques est suffisamment important pour faire l'objet d'un vote de confiance, je lui souligne que la guerre est aussi importante et que cela aussi constitue un vote de confiance.

    J'affirme au député de LaSalle—Émard, lui qui parle du déficit démocratique, qu'il s'agit d'un grave déficit démocratique de ne pas voter sur une question aussi grave que la guerre. Et je souligne au premier ministre qui menace d'élections les députés parmi les siens qui ne sont pas d'accord avec lui, qu'il les déclenche les élections sur la guerre, on verra bien. On laissera les gens parler.

    Nous devons voter ici, à la Chambre. Si le Conseil de sécurité nous dit qu'il faut aller en Irak, nous n'irons pas tant que nous n'évaluerons pas nous-mêmes la preuve du Conseil de sécurité. C'est cela la souveraineté. C'est le souverainiste québécois qui vient vous le dire à vous, représentants du gouvernement fédéral. Tenez-vous debout, soyez autant déterminés à assurer la souveraineté du Canada que nous voulons celle du Québec, et je serai de votre côté cette fois-ci.

    La troisième condition, c'est que d'aucune façon le Canada ne doit hypocritement faire indirectement ce qu'il s'interdirait de faire directement. Il n'est pas question de relever les Américains en Afghanistan pour leur permettre d'être plus nombreux en Irak. Tenir la poche du voleur pour mettre l'argent à l'intérieur, c'est également voler. On ne peut collaborer de cette façon, ce qui laisserait une belle image pour certains, mais ce serait une collaboration indigeste pour d'autres.

    Je m'adresse au premier ministre. Moi, souverainiste, je reconnais que M. Pearson, M. Trudeau, le chef du Parti progressiste-conservateur, dont je ne peux nommer le nom et M. Mulroney ont été à la hauteur de leur tâche. Ils ont su prendre des décisions quels que soient les diktats ou les suggestions fortement conseillés par d'autres pays. L'actuel premier ministre n'est pas à la hauteur de cette tâche. Il se faufile, il se défile et ne porte pas ses responsabilités.

    Des liens doivent être maintenus avec les États-Unis, certes. Ce sont des amis. Cependant, quand vous avez des amis, vous n'en êtes pas pour autant les serviteurs, les haut-parleurs. Il est de ces occasions où il est bon de dire à ses amis «vous vous trompez».

    Il y a une forte proportion du peuple américain qui ne partage pas l'avis de son gouvernement. Et peu importe qu'il le partage ou non, quel est notre rôle ici? Il s'agit de décider pour nous et par nous. Cela s'appelle la démocratie et c'est drôlement absent dans ce débat.

    Je termine en soulignant à ce gouvernement qu'il ne faut pas confondre Nations Unies et États-Unis. Voilà deux choses différentes. Ce pays qu'est le Canada et ce pays que voudrait être le Québec doivent se comporter de façon respectueuse de l'ensemble de l'humanité, se tenir debout, rechercher la paix et non pas, de façon servile, prendre des décisions sans preuve aucune.

  +-(1950)  

+-

    L'hon. Bill Graham (ministre des Affaires étrangères, Lib.): Monsieur le président, j'aimerais poser une question à notre collègue. Est-ce qu'il a entendu mes propos? Est-ce qu'il a entendu le discours que j'ai prononcé, où je disais que nous allons choisir dans l'intérêt du Canada, dans la pleine souveraineté du Canada? Nous déciderons si la guerre est nécessaire ou pas. C'est notre décision. C'est le gouvernement de ce pays qui va décider.

    C'est l'appel qu'il fait. C'est la responsabilité qu'il nous demande de prendre. Nous prenons cette responsabilité. Nous agissons dans cette optique. Nous devons regarder ce qui se passe et agir dans un sens voulant garantir à la fois le désarmement de l'Irak, la paix dans le monde et le succès de l'ONU, qui est la pierre angulaire du système de sécurité dans le monde. La politique de notre gouvernement, c'est la souveraineté du Canada et nous la respecterons.

    Je rejette entièrement la suggestion du chef du Bloc québécois qui dit que ce gouvernement n'agit pas souverainement dans l'intérêt des Canadiens.

+-

    M. Gilles Duceppe: Monsieur le président, j'ai bien entendu ce que le ministre a dit, mais j'ai également entendu ce qu'il n'a pas dit.

    Il n'a pas dit que le Canada n'irait jamais sans l'aval du Conseil de sécurité. Il n'a pas dit qu'il dirait demain au secrétaire d'État Powell que l'assertion du président Bush, à savoir que si le Conseil de sécurité ne le permet pas, les Américains s'y rendraient quand même s'ils jugent qu'ils doivent s'y rendre, et qu'ils s'y rendraient avec une coalition d'amis.

    Il aurait dû nous dire: «Nous ne serons pas parmi ces amis. Nous serons aux côtés du Conseil de sécurité. Nous serons avec les Nations Unies en espérant que les États-Unis y seront. Mais nous ne serons pas avec les États-Unis si les Nations Unies n'y sont pas.» C'est ce qu'il aurait dû dire et je ne l'ai pas entendu le dire.

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Monsieur le président, le chef du Bloc a mentionné plusieurs fois la question de la souveraineté. Pour moi, la souveraineté du Canada est très importante. C'est ce qu'il y a de plus important.

    Peut-il nous dire ce qui, à son avis, est le plus important: la souveraineté de l'ONU ou celle du Canada?

+-

    M. Gilles Duceppe: Monsieur le président, commençons par le Québec!

    Ce que j'ai dit, c'est que quelle que soit la décision du Conseil de sécurité, nous aurons ici à prendre une décision. Mais par ailleurs, cette décision, selon moi, ne peut aller sans l'aval des Nations Unies. Ce serait perpétrer tout un bouleversement dans ce coin du monde qui est déjà passablement bouleversé, à savoir le Moyen-Orient. C'est de cela dont il faut prendre conscience. Jusqu'à présent, aucune preuve n'a été apportée, strictement aucune preuve.

    Il y a eu bien sûr ce discours moralisateur hier soir; on nous a parlé des tortures et du reste. C'est vrai, c'est horrible et inacceptable, mais cela existait alors qu'il était l'allié des Américains. Cela existait sous Pinochet, qui était aussi l'allié des Américains. Donc, pour la morale, on repassera. Je pense qu'il faut privilégier le cadre des Nations Unies. Comme pays souverain, il faut intervenir de façon souveraine en disant que pour nous, cela va de pair avec les Nations Unies, qui sont en mesure de juger si la preuve est bonne ou pas. Nous jugeons également de cette preuve. Il faut donc pour maintenir notre souveraineté dans le cadre des Nations Unies.

    Une voix: Il faut un vote.

    M. Gilles Duceppe: Par un vote, bien sûr.

  +-(1955)  

[Traduction]

+-

    M. Gerald Keddy (South Shore, PC): Monsieur le président, le chef du Bloc québécois a parlé avec beaucoup d'éloquence et de ferveur. J'ai beaucoup apprécié ses propos. J'ai une observation à faire, et je voudrais qu'il dise ce qu'il en pense.

    Le député a parlé du rôle de notre pays, de notre confédération. Une partie du problème tient au peu de respect dont nous jouissons sur la scène internationale. Le Canada n'a plus les mêmes ministres ni les mêmes premiers ministres qu'autrefois. Nous avons été banalisés et marginalisés. Nous en sommes rendus à quémander des bombes et du matériel de communication pour nos avions au Kosovo. Notre gouvernement ose songer à partir en guerre sans consulter le Parlement. Je voudrais avoir une réponse.

[Français]

+-

    M. Gilles Duceppe: Monsieur le président, j'espère que le Canada—et un jour aussi le Québec—jouera un rôle plus important sur la scène internationale. Le Canada a d'ailleurs déjà joué un tel rôle. M. Pearson a eu un rôle déterminant dans l'histoire du développement des Nations Unies. J'ai aussi mentionné que MM. Trudeau, Clark et Mulroney ont également joué un rôle important. Je me souviens du boycott de l'Afrique du Sud. Les États-Unis n'étaient pas d'accord, mais M. Mulroney a tenu son bout quand même, et c'est à son honneur.

    Cela étant dit, comment devrions-nous jouer ce rôle? À mon avis, d'aucune façon nous avons intérêt à jouer les gendarmes. De toute façon, nous n'avons pas les moyens. Cependant, le rôle du Canada devrait davantage porter sur des missions de paix pour conserver cette image de respect qu'il a toujours et qu'il devrait conserver, afin de faire en sorte que dans des régions du monde où des peuples s'affrontent et où il y a des conflits internes entre des peuples, nous puissions intervenir pour tenter de les réconcilier. Voilà le type de réflexion que nous devrions faire.

    Plutôt que d'acheter des sous-marins nucléaires, il vaudrait peut-être mieux penser à développer des intervenants qui peuvent, de façon stratégique et tactique, intervenir pour renforcer la paix dans le monde.

[Traduction]

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le président, le député a parlé de la Cour pénale internationale. Saddam Hussein a tué plus de 220 000 Kurdes. Il a ordonné l'extermination de 60 000 chiites. Il est responsable de la mort de son propre peuple, y compris des femmes, des enfants, des personnes âgées, et il a fréquemment ordonné qu'on torture des enfants irakiens.

    Le député croit-il qu'il faut inculper Saddam Hussein de crimes de guerre et, dans l'affirmative, comment faudrait-il l'appréhender?

[Français]

+-

    M. Gilles Duceppe: Monsieur le président, à mon avis, effectivement, des accusations pourraient être portées contre Saddam Hussein devant un tribunal international, mais certainement pas par les Américains puisqu'ils n'en font pas partie. Finalement, on a vu que Milosevic a été cueilli à la suite de différentes interventions. On a vu que Pinochet a failli l'être, mais que Mme Thatcher l'a protégé, ce qui est fort honteux de sa part. Il y a des criminels de guerre. J'espère que Saddam Hussein sera parmi ceux qui devront comparaître devant un tribunal pénal international.

    Il y aurait aussi des gens de la CIA, qui ont provoqué le renversement de Salvador Allende pour appuyer Pinochet. Il y aurait les Marcos de ce monde, appuyés par les États-Unis. Si Saddam Hussein est aujourd'hui un criminel de guerre comme ennemi des États-Unis, il l'était tout autant à l'époque comme allié des États-Unis.

  +-(2000)  

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, je serai bref. D'abord, je tiens à féliciter l'honorable député pour son discours. Il ne faut jamais oublier que lors des attaques au gaz lacrymogène sur le peuple kurde à Halabja, en 1988, les États-Unis étaient silencieux et le Canada était silencieux.

    Ma question à l'honorable député et chef du Bloc québécois sera brève. Si jamais il y avait une possibilité de frappes militaires, est-ce que l'honorable chef serait d'accord pour dire que ces frappes et ces attaques militaires devraient non seulement être en accord avec une résolution des Nations Unies, mais aussi respecter les principes fondamentaux de la loi internationale?

+-

    M. Gilles Duceppe: Monsieur le président, je crois que oui. Si malheureusement il nous fallait passer aux actes militaires—c'est ce qui est soulevé—, seuls les cibles militaires devraient être visées. Il est totalement criminel de viser, comme dans certains endroits du monde, des infrastructures, des écoles et des parlements. On voit cela. C'est inacceptable. C'est totalement inacceptable. Tout cela devrait être sous l'autorité des Nations Unies et non pas sous l'autorité d'un seul pays qui décide au nom des Nations Unies.

    Une voix: Ce devrait être vertu de la loi internationale.

    M. Gilles Duceppe: La loi internationale va de pair avec les Nations Unies.

    Cependant, se pose la question des attaques préventives. Je sais que c'est ce qui est soulevé par la loi internationale. La loi internationale évolue et, heureusement, elle doit évoluer. Si de 1933 à 1936, avant Munich en 1937, avant les Sudètes, avant l'Anschluss, avant la prise de la Pologne en 1939, il y avait eu des attaques préventives contre Hitler, cela aurait été une bonne chose pour l'ensemble de l'humanité, même si la loi internationale ne le permettait pas. Cela étant dit, encore faut-il qu'il y ait des preuves. Nous avions des preuves d'un ordre suffisant contre Adolf Hitler. Les pacifistes ont eu tort de ne pas agir. Plusieurs n'ont pas pu faire le bilan après 1945 puisqu'ils n'y étaient plus. Encore faut-il qu'il y ait des preuves et, je le répète, à ce moment-ci, ces preuves n'existent pas.

[Traduction]

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le président, à mon avis, le débat de ce soir sur la crise irakienne doit porter sur quatre questions essentielles.

    Tout d'abord, les États-Unis et la communauté internationale vont-ils accorder aux inspecteurs le temps nécessaire pour faire leur travail, c'est-à-dire repérer toutes les armes de destruction massive en Irak et débarrasser de ces armes l'Irak et le monde?

    Ce n'est pas une simple question de temps. La question n'est pas non plus seulement de savoir si l'Irak coopérera totalement. Il faut aussi savoir si les États-Unis coopéreront pleinement avec les inspecteurs en désarmement de l'ONU.

[Français]

    Lundi, Hans Blix a indiqué clairement qu'il n'avait pas reçu une collaboration adéquate de l'Irak. Nous avons su cela. Mardi, après le discours de George Bush, il était clair aussi; il a confirmé que les États-Unis n'avaient pas complètement coopérés non plus.

  +-(2005)  

[Traduction]

    Revenons un instant au 18 novembre, date à laquelle les inspecteurs en désarmement ont entrepris leur tâche. Ils ont dit on ne peut plus clairement qu'ils avaient désespérément besoin de l'entière collaboration de tous les membres de la communauté internationale. Ils ont imploré les pays qui possédaient quelque preuve que ce soit relativement à des armes de destruction massive en Irak de présenter cette preuve.

    Au lieu de cela, qu'ont dit les États-Unis? Ils ont suscité la crainte, ont menacé de faire la guerre et ont constamment miné la confiance dans le travail qu'effectuaient les inspecteurs en désarmement. Ils ont constamment prétendu, jour après jour, qu'il y avait de graves violations, mais ils ne présentent pas de preuves.

    La deuxième question que nous devons examiner dans ce débat est celle-ci: le Canada va-t-il enfin abandonner sa position de plus en plus embarrassante et confuse et dire exactement ce qu'il pense d'une participation à une guerre en Irak?

    La plupart du temps, le ministre de la Défense dit: «Oui, monsieur Bush, le Canada va obéir.» À d'autres occasions, le ministre des Affaires étrangères dit: «Pas aujourd'hui, monsieur Bush; peut-être une autre fois.»

    Et quelle est la position du premier ministre? Qui peut imaginer, qui peut deviner, qui peut découvrir la position du premier ministre sur cette question? Il semble que cela dépende de l'heure et du jour. On dirait que le premier ministre effeuille la marguerite: «Oui, monsieur Bush; non, monsieur Bush; oui, monsieur Bush; non, monsieur Bush.» Quel fondement effrayant pour une politique étrangère indépendante et cohérente.

[Français]

    C'est une politique étrangère absolument inacceptable de la part d'un pays de bâtisseurs, fiers de leur histoire en matière de maintien de la paix et de diplomatie.

[Traduction]

    La troisième question qui se pose est la suivante: si les inspecteurs en armement indiquent dans le rapport qu'ils présenteront le 15 février au Conseil de sécurité de l'ONU que l'Irak continue de faire obstacle à leur travail et qu'il est tout à fait manifeste que ce pays fait de l'obstruction, et que de nouvelles directives de la part des Nations Unies s'imposent, le Canada cherchera-t-il des solutions de rechange créatives et diplomatiques à la guerre, ou encore intensifiera-t-il cette recherche? Car il y a d'autres solutions que la guerre.

    Enfin, la résolution 1441 n'accorde pas aux États-Unis ni à quelque coalition de pays soi-disant bien disposés le mandat de lancer une attaque militaire contre l'Irak.

    La deuxième résolution de l'ONU sanctionne une intervention militaire en Irak. Le gouvernement est-il disposé à s'engager ce soir, sans équivoque, à autoriser un autre débat complet et un vote à la Chambre des communes avant que soit prise toute décision d'envoyer des Canadiens et des Canadiennes au combat?

    Le Canada est confronté à un choix critique. Il peut être un partenaire résolu dans le cadre d'une coalition sans cesse plus grande engagée à créer des conditions propices à l'instauration de la paix ou des mesures qui susciteront la paix, ou encore il peut dilapider sa fière tradition d'artisan et de gardien de la paix et céder devant les pressions des États-Unis qui veulent que nous rentrions dans le rang.

    Les Canadiens et la collectivité internationale se sont exprimés clairement. Ils veulent que les inspecteurs de l'ONU soient autorisés à accomplir leur travail.

[Français]

    Les inspecteurs des armes doivent être appuyés afin d'accomplir leur travail.

[Traduction]

    Si la COCOVINU ne réussit pas à démanteler les armes de destruction massive repérées, le Canada devrait être au premier rang des pays qui rédigeront et mettront en oeuvre des règles et des protocoles sanctionnés par l'ONU afin de veiller à ce que l'Irak se départisse de ces armes et se voit interdire d'en produire d'autres.

    Peu de temps avant l'interruption de nos travaux pour la période de Noël, un groupe de spécialistes du Proche-Orient, c'est-à-dire le Comité coordonnateur canadien pour la consolidation de la paix et le Centre d'études sur la sécurité et la défense de l'École internationale Norman Paterson de l'Université Carleton, a recommandé des solutions de rechange claires et pratiques à la guerre en Irak. Ces experts ont exhorté vigoureusement le Canada à appuyer pleinement:

[...] un régime rigoureux et efficace de désarmement fondé sur des inspections sans entraves, des «sanctions intelligentes» ciblées et de futures mesures de surveillance et de vérification, en travaillant en collaboration avec d'autres pays membres de l'ONU faisant partie ou non du Conseil de sécurité et partageant cet objectif.

    Pas un pays au monde n'est mieux placé et n'a une plus grande responsabilité que le Canada pour dire en termes très clairs à ses plus proches voisins «Cessez de battre les tambours de guerre et entreprenez le dialogue». Le Canada doit retrouver sa voix pour la paix. Les Canadiens veulent que leur gouvernement soit une force militant pour la paix. Le 18 janvier, des Canadiens sont descendus dans la rue partout au pays par une température très froide pour dire non à la guerre en Irak. Je suis fière que le NPD, à l'occasion de son congrès de la fin de semaine dernière, ait appuyé cet appel en faveur de la paix.

    Ce soir, en cette chambre, par l'entremise de notre gouvernement, faisons-nous les porte-parole de ces sentiments et, au cours des jours et des semaines qui vont suivre, nous ne nous contentons pas de belles paroles et agissons en collaboration avec la collectivité internationale qui partage très largement la passion des Canadiens en faveur de l'adoption d'une solution pacifique et durable à la crise en Irak.

  +-(2010)  

+-

    Mme Elsie Wayne (Saint John, PC): Monsieur le président, je remercie la députée pour son intervention. La question que je désire poser à la députée ainsi qu'aux députés de son parti concerne nos forces.

    Le NPD a un excellent représentant au sein de notre Comité de la défense. Il a beaucoup d'aplomb. S'il devait y avoir une guerre contre l'Irak, quel rôle nos forces auraient-elles à jouer, selon lui, alors qu'elles ont besoin de quelque 35 000 hommes et femmes en uniforme de plus, alors que tous nos Sea King devraient être immobilisés au sol et que nous avons utilisé des sous-marins d'occasion inutilisables?

    Un de mes collègues de la Nouvelle-Écosse s'est entretenu avec l'ingénieur londonien. Ce dernier m'a aussi dit que le gouvernement l'avait fait venir ici pour qu'il répare les sous-marins d'occasion parce que nous n'avions pas d'experts pour le faire. Il était d'avis que ces sous-marins ne pourraient jamais être utilisés. Et nos militaires dans tout ça? Comment leur donnerons-nous fierté et dignité, compte tenu de l'état actuel de nos forces...

+-

    Le vice-président: Je suis désolé d'interrompre la députée, mais sa réponse est très longue.

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le président, pour répondre à la question, j'ai déjà indiqué que mon parti s'est prononcé clairement en affirmant que nos militaires ne devraient pas aller se battre en Irak.

    Et ce, pour plusieurs raisons. Je vais en donner deux. La première est que nos militaires sont déjà exploités à outrance. Nous savons qu'ils sont surchargés. D'ailleurs, ce sont des termes que le député à déjà employés, sauf erreur.

    Qui plus est, le Canada devrait être à l'avant-garde des pays qui croient à l'existence de solutions autres que la guerre et il devrait se joindre à toute coalition favorables à ces solutions, parce que cela ne va pas de soi. Il n'est pas garanti qu'attaquer l'Irak réglera le problème du stockage possible d'armes de destruction massive par le régime.

    Il faut essayer de trouver les solutions qui nous débarrasseront une fois pour toutes, non seulement en Irak mais partout dans le monde, des armes de destruction massive qui menacent de détruire la planète.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, je viens d'écouter la réponse de ma collègue. J'ai une question à lui poser sur ce qu'elle vient de dire.

    Je trouve que nous, du Bloc québécois, avons essayé d'éviter les extrêmes. On n'a jamais dit qu'il fallait y aller absolument et tout de suite avec les Américains, et nous n'avons jamais dit que nous n'irions jamais.

    Dans l'histoire de l'humanité, des erreurs ont été faites. Je pense entre autres à la négociation que Chamberlain a tenté avec Hitler. Ce dernier a continuellement exagéré.

    Il vient un moment où la communauté internationale—et cela peut être le cas avec l'ONU—va dire: «On a les preuves. Il ne veut pas désarmer. On a adopté la résolution 1441. Maintenant, nous allons adopter une résolution disant que nous devons désarmer Saddam Hussein.»

    Je me demande si ma collègue va jusqu'à dire que même s'il y a une résolution du conseil de sécurité qui dirait de passer à l'action, le Canada ne devrait pas accompagner la communauté internationale dans une opération pour désarmer Saddam Hussein après une deuxième résolution de l'ONU.

[Traduction]

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le président, je répète ce que j'ai dit, ce que mes collègues ont dit et ce que notre nouveau chef a déclaré fièrement et clairement au sujet de cette question.

    Premièrement, nous sommes entièrement d'accord qu'il faut désarmer complèment Saddam Hussein et l'Irak. Si le régime possède des armes de destruction massive, nous devons l'en débarrasser et en débarrasser le monde. Nous devons toutefois agir dans le contexte du droit international. Le plus inquiétant dans les menaces de guerre des États-Unis est que ses dirigeants se sont soudainement mis à parler de frappes militaires préventives, défiant ainsi carrément le droit international. Ils parlent de prendre les moyens nécessaires pour provoquer un changement de régime.

    Je suis convaincue que Saddam Hussein est un dictateur diabolique et qu'aucun d'entre nous accepterait de lui confier une charge publique ou de faire quoi que ce soit pour qu'il demeure en place. Toutefois, si les États-Unis ou un autre pays ou encore une coalition de pays décident d'engager des frappes militaires préventives et de provoquer un changement de régime en employant une force armée, Dieu seul sait ce que nous réserve l'avenir pour ce qui est d'assurer une paix durable et la stabilité pour les générations futures.

  +-(2015)  

+-

    M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le président, j'ai écouté très attentivement les commentaires de ma collègue. J'admire réellement sa position sur les Nations Unies.

    J'aimerais lui poser une question sur la résolution 1441, qui a été adoptée à l'unanimité. Nous disons que le processus de la résolution 1441 doit être respecté jusqu'au bout. S'il devait y avoir une seconde résolution, ce mois-ci ou le mois prochain, et que cette nouvelle résolution soit encore une fois adoptée à l'unanimité, 15 voix contre 0, s'opposerait-elle toujours à la résolution des Nations Unies?

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le président, c'est une question très raisonnable à laquelle vous me permettrez de répondre. Nous avons établi très clairement qu'une deuxième résolution devrait être adoptée avant que l'on puisse même songer à lancer une attaque militaire contre l'Irak. Toutefois, si une telle résolution était adoptée, elle n'engagerait pas tous les pays du monde à participer à une guerre contre l'Irak. Elle pourrait peut-être constituer le mandat justifiant une intervention militaire éventuelle.

    Il appartiendrait alors à chacun des pays souverain de décider pour lui-même de sa participation, après avoir étudié le mandat qui aurait été donné selon le scénario présenté par le député. Ferons-nous partie des pays qui participeront à une telle agression militaire ou dirons-nous plutôt que notre rôle consiste à continuer de rechercher inlassablement des solutions de rechange pacifiques? Notre rôle, et nous avons fait ce choix précédemment, consiste à nous engager et à participer au travail humanitaire.

    Je crois que les Canadiens se sont prononcés très clairement lorsqu'ils sont descendus dans les rues du pays. Ils ont affirmé qu'il fallait laisser tomber les sanctions et non les bombes. Cela devrait être beaucoup plus efficace pour aider non seulement à soulager la souffrance des Irakiens, mais à débarrasser la nation irakienne des armes de destruction massive, si jamais il en reste.

+-

    M. Myron Thompson (Wild Rose, Alliance canadienne): Monsieur le président, j'ai écouté la députée essayer d'expliquer que les autres qui ont pris la parole n'ont tenu que des propos alarmistes et belliqueux. Je ne comprends pas comment la députée ou toute autre personne peut penser que le discours de George Bush était alarmiste alors qu'il présentait les faits.

    Il n'est pas nécessaire que quelqu'un fasse un discours pour que nous craignions un individu comme Saddam Hussein, qui a prouvé au monde entier ce dont il est capable et ce qu'il fera. Il l'a montré en tuant des milliers de ses concitoyens.

    Une voix: Bush est une menace encore plus grande à la sécurité. Voilà ce que les Canadiens ont dit.

    M. Myron Thompson: Je ne sais pas qui ces gens-là préféreraient avoir comme voisin, mais moi, je vais rester loyal aux États-Unis.

    Nous n'avons pas besoin de discours alarmistes pour savoir ce dont Saddam Hussein est capable. Je veux m'assurer que mes enfants et mes petits-enfants grandiront dans un monde où ce genre de situation n'existe pas; il y a des gens qui ont le courage de prendre la parole et de dire qu'ils feront tout ce qu'il faut pour assurer la sécurité de nos enfants dans les années à venir.

    Je regrette, mais j'ai bien peur que, parfois, la discussion ne débouche sur aucune solution. La preuve en a été faite lors de la Première Guerre mondiale, lors de la Seconde Guerre mondiale et à un certain nombre d'autres occasions. Je ne comprends pas pourquoi la députée estime que George Bush est alarmiste. Saddam Hussein l'a été depuis que j'ai entendu parler de lui pour la première fois.

  +-(2020)  

+-

    Mme Alexa McDonough: Monsieur le président, deux expressions me viennent à l'esprit. La première, c'est que la négociation est toujours préférable à la guerre. Deuxièmement, permettez-moi de citer directement ce que le prédécesseur immédiat de l'actuel ministre des Affaires étrangères a dit au sujet de la menace croissante d'attaques préventives et de la notion d'un changement de régime. Il a dit ceci:

    Cela a redonné de la vigueur aux apôtres de la realpolitik, faisant sortir de l'ombre tous ceux qui trouvent condamnables les notions de coopération humanitaire, de justice internationale et de primauté du droit. Cela a donné naissance à une doctrine de prévention, qui accorde injustement aux États-Unis le droit d'être juge, jury et procureur contre tout pays ou toute personne qu'ils considèrent comme une menace, allant à l'encontre d'un demi-siècle de droit international et de la charte des Nations Unies.

    Le député peut parler de propos alarmistes de la part des néo-démocrates, mais nous ferions mieux de commencer à adhérer à la doctrine qui consiste à considérer du point de vue humanitaire les menaces à la sécurité mondiale qui sont certainement posées par l'Irak, mais qui sont posées aussi par le genre de tactiques auxquelles nos plus proches voisins, les Américains, ont de plus en plus souvent recours.

+-

    Le très hon. Joe Clark (Calgary-Centre, PC): Monsieur le président, ma première remarque portera sur la procédure. Je regrette grandement que le gouvernement choisisse de tenir des débats exploratoires au lieu de vrais débats suivis d'un vote. Je crois que c'est mauvais pour le Parlement. Cela confirme la réputation de cette Chambre comme une assemblée qui ne fait que parler, qui n'agit pas et qui n'a aucun pouvoir. C'est mauvais aussi pour la politique, parce que le gouvernement n'a ni le pouvoir que donnerait un vote ni accès au genre de consensus et de compréhension qui peuvent exister lorsque les gouvernements sont ouverts avec la population.

    Je ne veux pas m'attarder sur ce point, mais il y a une meilleure façon de faire les choses. Lorsqu'on se préparait pour la guerre du Golfe, il y a eu des votes régulièrement. Le comité permanent compétent a également tenu une audience continue. Le Parlement a eu amplement l'occasion de se faire entendre et de voter. Je recommanderais au gouvernement de procéder de cette façon à l'avenir.

    Il y avait évidemment une différence dans le cas de la guerre du Golfe. En effet, peu importe que les Canadiens aient été d'accord ou non avec notre gouvernement, le gouvernement du Canada avait une politique que nous avons expliquée, défendue et fait valoir dans le monde. Aujourd'hui, le gouvernement ne peut pas expliquer ce qu'il fait, parce qu'il ne sait pas ce qu'il fait.

    Je veux commencer par ce qui est clair dans le cas de l'Irak. Le régime en Irak est méchant, brutal et dangereux. Il est dangereux pour la région et il est dangereux pour le monde. Ce régime a mis au point des armes de destruction massive et il a montré qu'il est prêt à les utiliser. Tous, et très certainement les citoyens de l'Irak, bénéficieraient de l'avènement d'un nouveau régime. Il est également clair que depuis que des pressions sont exercées, l'Irak a commencé à écouter les Nations Unies et la communauté internationale. Il faut reconnaître que ces pressions n'auraient jamais été aussi fortes sans le leadership des États-Unis d'Amérique. Le seul fait que les inspecteurs des Nations Unies soient en Irak témoigne de la détermination des Américains.

    La question qui nous interpelle ici est celle de savoir ce que le Canada doit faire. Premièrement, nous devons prendre nos propres décisions en fonction de nos propres traditions. Je sais que le ministre a dû quitter ce soir pour se rendre à Washington. Je suis heureux du fait qu'avant de quitter il ait cité la phrase du discours du président qui a retenu mon attention, à savoir que le destin de cette nation ne dépend pas des décisions prises par d'autres. C'est incontestablement le genre de propos que les Canadiens devraient citer régulièrement au gouvernement des États-Unis.

    Une des difficultés auxquelles nous sommes confrontés, bien que je n'aie pas le temps d'en discuter en détail, est que le gouvernement s'est tellement peu préoccupé des relations entre le Canada et les États-Unis qu'il n'a pas le levier nécessaire pour dire non aux États-Unis relativement à des questions épineuses. J'en sais quelque chose. À titre de ministre des Affaires étrangères dans un gouvernement antérieur, j'ai eu à traiter une demande des États-Unis afin que le Canada endosse une question qui était très chère au président de l'époque, à savoir l'initiative de défense stratégique qu'on a appelé la guerre des étoiles. Nous avons pu dire non aux Américains et préserver de bonnes relations parce que nous avions mis en place un levier puissant avec les Américains.

    L'abandon par le gouvernement actuel des relations avec les États-Unis d'Amérique fait en sorte que nous sommes contraints, qu'on le veuille ou non, de choisir entre les Nations Unies et les États-Unis, ce qui est tout simplement un autre échec de la politique du gouvernement.

    Deuxièmement, nous devrions user de toute l'influence impartiale dont nous jouissons pour précipiter un changement dans le régime irakien, y compris de l'influence que nous avons dans la région et de celle que nous exerçons encore dans les pays en voie de développement, même si notre aide publique au développement diminue sans cesse. Nous devrions même essayer de trouver un lieu d'asile pour Saddam Hussein, si c'est là l'unique moyen pacifique de venir à bout de son régime. Bien qu'elle se soit amoindrie en raison des réductions de nos dépenses militaires et de l'aide officielle que nous offrons au développement, notre influence demeure très grande dans le monde.

    Troisièmement, et c'est un point clé dans le débat de ce soir soulevé par le chef du Bloc québécois et d'autres intervenants, nous devons respecter les Nations Unies ainsi que le droit international.

    Il se peut que la seule superpuissance au monde doive faire preuve de leadership et envisager des actions que d'autres nations ne sauraient envisager, mais notre pays, loin de se démarquer par sa puissance brute, mais par son leadership dans la création et le respect des institutions internationales, a lui aussi des responsabilités spéciales à assumer. Il n'y a pas que le régime irakien qui soit en cause, mais aussi le droit international et le respect des institutions internationales.

  +-(2025)  

[Français]

    Depuis toujours, le Canada joue son rôle en tant que membre de coalitions multinationales. Nous l'avons fait avec fierté et efficacité durant la guerre du Golfe. Nous l'avons fait sous l'égide de l'OTAN au Kosovo. Toutefois, nous l'avons toujours fait dans le contexte des Nations Unies et de la communauté internationale.

[Traduction]

    Avant de quitter, le ministre a parlé à deux ou trois reprises de travailler en collaboration avec les Nations Unies. Il juge hypothétique une intervention du Canada sans l'autorisation du Conseil de sécurité des Nations Unies, tout en laissant planer cette possibilité. Il devrait cesser ce petit jeu. Il doit indiquer clairement que le Canada n'agira pas sans l'autorisation des Nations Unies et écarter toute possibilité d'action indépendante.

    De tous les pays, le Canada est celui qui ne devrait laisser aucune équivoque quant à son respect pour les Nations Unies et le droit international. Il doit affirmer clairement son intention d'agir uniquement dans le cadre des initiatives sanctionnées par le Conseil de sécurité.

    Enfin, ce qu'il faut absolument ici, c'est que le Canada exhorte calmement, mais fermement, tout le monde à examiner froidement les conséquences de toutes les mesures proposées et, en fait, de l'inaction elle-même. Par exemple, quelle serait l'incidence d'une attaque, en particulier d'une attaque qui ne se ferait pas sous les auspices de l'ONU, sur la stabilité du Proche-Orient et surtout de régimes modérés comme l'Égypte ou la Jordanie ou le régime de l'Arabie saoudite? Quel effet aurait-elle sur la poudrière que constituent Israël et la Palestine? Dans quelle mesure exacerberait-elle le sentiment antiaméricain dans le monde musulman en général, de l'Afrique à l'Asie, en passant par l'Union soviétique? Que deviendrait la grande et véritable coalition qui s'est formée pour lutter contre le terrorisme? Ne risquerait-elle pas de se dissoudre par suite d'une intervention qui ne bénéficierait pas d'un appui général?

    Quelle raison avons-nous de croire que des puissances étrangères réussiraient à établir un nouveau régime en Irak ou même à assurer la survie de l'Irak? Quelle est la probabilité que la guerre soit brève? Qu'est-ce qui nous dit que les armes mêmes dont nous craignons l'existence ne seraient pas utilisées en désespoir de cause?

    Il est aisé d'être fasciné par le débat qui a cours aux États-Unis, débat naturellement alimenté par le statut de super-puissance de ce pays et par la difficulté qu'il éprouve parfois à voir le monde du même oeil avec lequel d'autres comme nous le voient. Nous avons toutefois la responsabilité, en tant que pays ayant une réputation indépendante, souvent notamment celle de collaborer très étroitement avec les États-Unis, d'être prêts à dire aux États-Unis des vérités difficiles à entendre, en leur déconseillant notamment de faire telle ou telle chose de telle ou de telle façon. Nous avons également une réputation en tant que partisans des Nations Unies pour les solutions multilatérales. Nous devons, lors des prochaines semaines cruciales à venir, mobiliser la communauté internationale et la sensibiliser aux conséquences de certaines des actions envisagées. Nous ne pouvons pas permettre que le Canada se laisse, par ambiguïté ou une quelconque autre dérive, aller à appuyer ces actions.

    Les deux prochaines étapes à suivre sont claires. Le secrétaire d'État Colin Powell doit, la semaine prochaine, se présenter devant le Conseil de sécurité avec la preuve de ce qui est avancé. Et il doit comprendre que le monde entier s'attend à voir cette preuve. On a vaguement mentionné hier soir, à plusieurs reprises, l'existence de rapports de services de renseignement. Nous devons en savoir davantage, non pas nécessairement la Chambre, mais les autorités doivent en savoir davantage sur la teneur de ces rapports. Il ne suffit pas de dire qu'ils existent. Nous devons pouvoir les examiner. Nous devons voir la preuve. Ensuite, évidemment, Hans Blix reviendra à la mi-février avec un nouveau rapport témoignant de l'acceptation par l'Irak des inspections en désarmement.

    Ce sont là des questions fort complexes. Je voudrais revenir au début de mon intervention. La capacité du gouvernement du Canada à réagir à ces questions complexes, à mobiliser l'opinion publique canadienne et à rallier le soutien dont nous avons besoin en cas de nécessité de prendre des décisions difficiles, se trouverait considérablement multipliée si le gouvernement du Canada acceptait de mettre davantage dans la confidence à la fois le Parlement du Canada et les Canadiens et qu'il permettait aux députés, comme l'ont fait des gouvernements précédents dans des conflits antérieurs, par exemple la guerre du Golfe, de voter sur la question de savoir si le Canada devrait, oui ou non, participer à ces actions menées par d'autres membres de la communauté internationale.

  +-(2030)  

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le président, je remercie le député de cette information, ferme et fort utile. À la fin de son discours, il a dit souhaiter que le gouvernement du Canada mette les parlementaires davantage dans la confidence.

    Le député croit-il que le président Bush a suffisamment mis le gouvernement dans la confidence, du point de vue de l'iformation qu'il a fournie au gouvernement ou aux cadres?

    Quand je les écoute, les chefs du Bloc, du NPD et du parti que représente le député semblent dire essentiellement la même chose, mais je veux m'assurer d'avoir bien compris. La position des trois est-elle grosso modo la même?

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, je crois qu'il est juste de dire que la position du NPD diffère de celle du Bloc québécois et du Parti progressiste-conservateur. De plus, je crois comprendre que la position de l'Alliance a ceci de différent qu'elle fait une beaucoup plus grande place à la collaboration avec les États-Unis, le Royaume-Uni, le cas échéant, l'Australie, le cas échéant, et un certain nombre d'autres pays que le président Bush a qualifiés de disposés à faire la guerre.

    J'estime, et mon parti comme moi, que le Canada est tenu d'agir sous les auspices des Nations Unies. Nous souhaiterions que le gouvernement le professe, qu'il agisse sous les auspices des Nations Unies non seulement maintenant mais tout le temps et qu'il exclue la possibilité de participer à toute intervention qui ne serait pas sous les auspices des Nations Unies.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Monsieur le président, nous apprécions tous les réflexions du très honorable député en matière de politique étrangère, mais je dois dire que je ne partage pas sa conclusion dans l'affaire qui nous intéresse.

    Il a dit que lui et son parti s'opposeraient à une intervention canadienne en l'absence d'une deuxième résolution du Conseil de sécurité de l'ONU.

    Le très honorable député et son parti ont-ils appuyé l'intervention concertée du Canada et de ses partenaires de l'OTAN au Kosovo, intervention explicitement réprouvée par le Conseil de sécurité de l'ONU, où les Russes avaient opposé leur veto?

    Voudrait-il aussi commenter les nombreux échecs tragiques des institutions multilatérales dans l'histoire? Elles n'ont pas toujours su faire respecter la sécurité et sauver des vies. Ainsi, l'ONU n'est pas intervenue pour sauver des vies au Rwanda. La Société des Nations n'a pas su s'opposer comme il convenait à la montée du militarisme allemand, ce qui a rendu cette institution caduque?

    Le très honorable député n'admettra-t-il pas que, même si les institutions multilatérales comme l'ONU sont préférables pour encadrer les interventions internationales, elles manquent parfois à leur mandat, préserver la paix, et que, dans ces circonstances, les démocraties libres et responsables, agissant de concert, doivent assumer les responsabilités que des organisations comme l'ONU ne saisissent pas correctement?

  +-(2035)  

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, les Nations Unies et les autres organismes multinationaux ne sont pas infaillibles. C'est sans doute parce qu'on leur soumet uniquement les questions les plus difficiles; un certain taux d'erreur est donc normal puisqu'ils ne doivent régler que les dossiers les plus complexes.

    Il nous incombe certainement de voir à ce que le système des Nations Unies fonctionne dans toute la mesure du possible; nous devons veiller à ce que le système multilatéral donne les résultats escomptés. Par conséquent, nous devrions résister à la tentation des petits groupes qui pourraient s'éloigner de la force de la tradition multilatérale, nuire sensiblement aux activités des Nations Unies et ainsi augmenter leur taux d'échec.

    Les Nations Unies peuvent agir efficacement. Comme je l'ai dit durant mes observations, je suis convaincu que si l'Organisation des Nations Unies n'avait pas subi la pression des États-Unis, elle n'aurait pas agi de façon aussi vigoureuse. Je suis convaincu que les inspecteurs sont là en grande partie à cause des pressions exercées par les États-Unis.

    L'un des effets les plus importants de ce conflit est sans doute que les autres nations ont encouragé les États-Unis à agir dans le cadre des Nations Unies. J'espère sincèrement qu'ils continueront à agir dans ce contexte. Sinon, j'espère que le Canada aura le courage d'affirmer qu'il appuiera une institution multilatérale et ne contribuera pas à la miner.

    Nous avons appuyé la participation dans le cas du Kosovo parce que, du moins au début, il s'agissait d'une intervention ayant fait l'objet de discussions entre les États-Unis et l'OTAN.

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Monsieur le président, j'ai bien entendu le chef conservateur dire que le Canada doit toujours agir sous les auspices des Nations Unies. Le Nouveau Parti démocratique est tout à fait d'accord avec lui.

    Il a poursuivi en disant que le NPD prône le contraire. Je voudrais demander au chef conservateur s'il est en conséquence d'avis que si une deuxième résolution des Nations Unies appelle au recours à la force pour obliger l'Irak à se conformer et à se défaire de ses armes de destruction massive, les Nations Unies devraient forcer les membres des Nations Unis à aller en guerre. Sinon, ne croit-il pas que tout pays souverain a un choix à faire quant au rôle qu'il entend jouer sous les auspices des Nations Unies?

    Enfin, en ce qui concerne l'affirmation faite à maintes reprises par son parti, notamment par son porte-parole en matière de défense, soit que les forces armées canadiennes sont lourdement taxées, ne convient-il pas qu'il serait plus conforme à notre fière tradition et aux exigences de la situation que nous jouions un rôle sur le plan humanitaire et sur celui de l'établissement d'une paix durable, plutôt que de participer aux combats là où nous n'aurions qu'un rôle limité à jouer de toute façon?

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, si on accepte l'hypothèse de la députée, l'ONU bien sûr en adoptant une résolution de ce genre, n'impose pas sa volonté à ses membres. Ils doivent exercer leurs choix. Je crois toutefois qu'il est très important qu'un pays comme le Canada dise clairement qu'il choisirait, dans ces circonstances, d'appuyer l'ONU, y compris militairement.

    Oui, nous sommes fortement affaiblis du fait que le gouvernement a laissé dégringoler les dépenses militaires tout comme il l'a fait pour les dépenses au titre du développement international. Nous sommes très affaiblis. Néanmoins, notre appui à l'opération des Nations Unies serait importante. La dernière fois que je me suis rendu à Chypre, l'effectif canadien de maintien de la paix n'était plus que de deux personnes, mais le drapeau canadien flottait malgré tout pour montrer que nous y étions là avec plus que de simples mots; nous étions également là pour indiquer l'engagement que nous pouvions prendre.

    Mais ce serait notre choix. J'espère que nous dirions que nous allions appuyer la position que prendraient les Nations Unies.

  +-(2040)  

+-

    L'hon. David Anderson (ministre de l'Environnement, Lib.): Monsieur le président, le très honorable député a dit quelque chose que je n'ai peut-être pas bien compris, il pourra certes acquiescer si c'est le cas, et c'est que nous devrions faire des pieds et des mains pour trouver un asile à Saddam Hussein, de toute évidence quelque part à l'extérieur de l'Irak.

    Il fait un signe de la tête de sorte que je crois qu'il l'a bien dit. Dans ce cas, presque tous les pays auxquels j'ai pensé dans la dernière minute diraient sans l'ombre d'un doute: «Si vous voulez trouver un asile pour Saddam Hussein, pourquoi ne pas l'accueillir chez vous?» Voudrait-il que Saddam Hussein vienne ici au Canada, dans sa propre circonscription de Calgary peut-être? Dans ce cas, accepterait-il d'accorder l'immunité contre des poursuites pour les crimes contre l'humanité de Saddam Hussein s'il venait bel et bien ici, ce que l.on nous poussera très fortement à le faire si nous adoptions la proposition du très honorable député?

    Pourrait-il répondre à ces deux questions?

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, le ministre ne devrait pas tout banaliser. Je crois que c'est une partie importante de la question maintenant, comme cela a été le cas durant la guerre du Golfe, de voir s'il y a des possibilités d'asile. Nous avons soulevé la question et en tant que ministre des Affaires étrangères, j'ai soulevé la question auprès d'autres pays à ce moment-là.

    Le Canada accepterait-il Saddam Hussein et lui offrirait-il l'asile? Non, nous n'en ferions rien.

    Le ministre, un ancien membre du ministère des Affaires étrangères, hausse les épaules, en prétendant ne pas savoir pourquoi je vais répondre de cette façon. Il connaît parfaitement les difficultés qu'il y a à organiser l'asile et il sait que cela peut être fait. Si on en croit les médias, il y a eu en fait des discussions actives au sujet de l'asile en Afrique du Nord dans les dernières journées de la guerre du Golfe. C'est une solution qui mérite d'être étudiée. Le Canada, avec son influence, ou du moins l'influence que nous avions dans le passé dans le monde en développement, est un pays qui pourrait jouer un rôle actif pour tenter de voir si cette solution est viable.

+-

    Le président: Je propose d'accepter trois questions, l'une de l'opposition officielle, l'une du gouvernement et l'une du Nouveau Parti démocratique. J'espère que la question et la réponse prendront moins d'une minute afin que nous puissions passer à la prochaine ronde.

+-

    M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le président, je remercie le député de ses observations et plus particulièrement l'observation voulant qu'il soit plus facile d'accrocher les Américains et de leur donner nos conseils si nous nous tenons côte à côte avec eux, du moins dans certains cas, au lieu d'agir comme le Parti libéral qui pense parfois qu'il doit réprimander sans cesse les Américains.

    Je voudrais interroger le très honorable député au sujet de sa conclusion voulant que, de tous les pays, le Canada doive respecter les Nations Unies et ses résolutions. Or, le paragraphe 4 de la résolution 1441 établit deux conditions alors qu'on dit que s'il y a de faussetés et des omissions dans les déclarations soumises par l'Irak ou que ce dernier pays ne se conforme pas en tout temps à la résolution et ne coopère pas pleinement à sa mise en oeuvre, cela constituera une violation flagrante par l'Irak de ses obligations.

    Il me semble que nous voulons avoir du respect, et je pense que c'est notre cas à tous, pour les Nations Unies et ses résolutions, mais cela fait 12 ans que l'Irak viole des résolutions et comme le rapport Blix le dit déjà, l'Irak les viole encore. Je pense qu'il est temps de montrer un certain respect à l'égard des Nations Unies en disant que l'Irak doit se conformer à cette résolution ou en subir les conséquences.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, en fait, cette décision doit être prise par les 15 pays membres du Conseil de sécurité. Dans une certaine mesure, la discussion pour savoir s'il faut une ou deux résolutions est artificielle si ce que nous voulons est une décision unanime du Conseil de sécurité. Si des pays membres dont le poids est considérable, particulièrement ceux qui ont un droit de veto au Conseil de sécurité, n'acceptent pas le mandat prévu dans la première résolution, une deuxième résolution s'avérera alors nécessaire. C'est une réalité pratique et les Nations Unies doivent agir.

    Le ministre de l'Environnement est parti. Il m'a interrogé au sujet de l'immunité. De toute évidence, si quelque chose pouvait être fait au sujet de l'asile, il faudrait alors examiner cette très épineuse question de l'immunité. Personne ne le voudrait, mais ce serait préférable à l'holocauste.

  +-(2045)  

+-

    M. Sarkis Assadourian (Brampton-Centre, Lib.): Monsieur le président, j'apprécie les arguments qu'a présentés le député, particulièrement lorsqu'il a dit que si la guerre se prolonge pendant trop longtemps en Irak, cela aura une incidence sur les pays voisins du Moyen-Orient, pour nos amis dans cette région, que l'Irak sera divisé et que le monde musulman s'élèvera contre les Américains. Ce sont des arguments très valables.

    Ma question porte sur la guerre de 1991, au cours de laquelle le président américain George Bush père comptait 36 alliés. Aujourd'hui, George W. Bush éprouve de la difficulté à se faire des alliés où que ce soit dans le monde. Il n'y a que trois pays où les dirigeants, non la population, appuient l'attaque planifiée contre l'Irak. Soixante pour cent des Américains sont opposés à la guerre. Le député pourrait-il expliquer pourquoi il y a une si grande différence entre la situation actuelle et celle qui existait en 1991, pourquoi les États-Unis n'ont pas d'alliés et se retrouvent essentiellement seuls au monde?

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, il n'était pas nécessaire d'envoyer des inspecteurs au Koweit pour savoir que les Irakiens s'y trouvaient. La situation était très claire. Il était facile de mobiliser des appuis.

[Français]

+-

    M. Yvon Godin (Acadie—Bathurst, NPD): Monsieur le président, en juin dernier, j'étais en Yougoslavie où sévissait la guerre, à cause de Milosevic. En marchant dans les rues, on voyait des bâtiments détruits et des gens qui avaient été tués.

    Je demande au chef du Parti progressiste-conservateur: Est-ce que ça vaut la peine d'aller en Irak? Des enfants et des innocents se feront tuer, et ce sera le prix à payer pour avoir Saddam Hussein.

    Si on disait oui à la guerre, est-ce que cela veut dire qu'on leur donnerait la permission d'entrer à Bagdad et faire tout ce qu'ils veulent? Dans ce cas, est-ce que votre parti refuserait d'appuyer les Nations Unies? La guerre, on sait quand elle commence, mais on ne sait pas comment elle finit. Une fois que la guerre est commencée, on n'a plus le contrôle.

    J'aimerais connaître la position du chef du Parti progressiste-conservateur.

+-

    Le très hon. Joe Clark: Monsieur le président, en effet, on ne peut pas, par notre manque d'action, donner la permission à Saddam Hussein d'utiliser les instruments à sa disposition pour commettre des atrocités envers des enfants et des innocents partout au monde.

    L'ancien chef du Nouveau parti démocratique vient de dire que Saddam Hussein est une menace qu'on ne peut ignorer. Il y a une raison qui justifie qu'il soit une menace. Ce n'est pas seulement parce qu'il n'est pas un bon homme, c'est parce qu'il est vraiment dangereux et qu'il possède probablement des armes de destruction massive.

    C'est pour cette raison qu'on doit considérer une réaction. On ne peut pas ignorer une menace comme celle-là.

+-

    M. Clifford Lincoln (Lac-Saint-Louis, Lib.): Monsieur le Président, le samedi 18 janvier, à Montréal, je me suis joint à un mouvement, à une manifestation en faveur de la paix. Il faisait un froid extrême. J'ai passé quelque temps à cette manifestation. Il y avait des gens de tous les âges, des jeunes et des moins jeunes, jusqu'à des enfants et des bébés dans les bras de leurs mères. On dit que 25 000 personnes ont participé à cette manifestation. Les organisateurs pensaient qu'il y en aurait 5 000 à 6 000. Il s'agissait d'une foule dense malgré le froid. Ces gens sont venus non seulement pour protester contre la guerre, mais pour manifester en faveur de la paix. C'est une grande différence. Avant d'être contre la guerre, il faut d'abord être en faveur la paix.

    J'écoutais hier le discours du président Bush. Après avoir parlé de l'économie américaine, il s'est mis à parler de la guerre. Il est devenu fébrile et passionné. J'ai remarqué que les ovations debout qu'il a reçues de tous les gens présents dans cette salle immense sont aussi devenues fébriles et passionnées lorsqu'il parlait de la guerre. Il me semblait qu'il y avait comme une excitation pour que les États-Unis aillent vers la guerre.

[Traduction]

    J'ai compris, à son langage corporel, à son émotion et à son discours que, plus que toute autre chose, il veut aller en guerre. J'en frissonne. Je trouve effrayante l'idée qui veut que les bombes et les missiles, intelligents ou non, puissent du jour au lendemain assurer la paix dans le monde.

    Je trouve cependant encourageant qu'aux États-Unis même, la population commence à réagir et qu'un vaste mouvement d'opinion réclame la prudence face à la guerre. Voici ce que déclarait, le 21 janvier dernier devant le National Press Club, le sénateur Kennedy dont la famille ne peut certainement pas être accusée de manquer de patriotisme:

    Nous pouvons sûrement entretenir de bons rapports avec d'autres pays sans adopter une politique étrangère agressive et intransigeante, qui complique la réalisation de nos objectifs sur la scène mondiale. Je demeure convaincu que cette guerre est une mauvaise guerre, décidée au mauvais moment. L'Irak ne représente pas une menace imminente, et une intervention contre ce pays détournera les États-Unis de deux menaces plus immédiates contre leur sécurité, à savoir le terrorisme et la crise de la Corée du Nord qui représente un danger manifeste et immédiat.

    Il a qualifié la politique du président Bush de nouvel unilatéralisme.

    S'il y a une chose sur laquelle les députés s'entendent, c'est que Saddam Hussein est un despote brutal et impitoyable, un dictateur qui a causé d'énormes ravages dans son propre pays et qui impose des épreuves épouvantables à sa population. Nous le savons, et nous ne lui trouvons aucune excuse.

    Par ailleurs, si nous voulons être logiques, comment réagirons-nous face au régime en place en Corée du Nord? Que ferons-nous du régime en place au Myanmar, en Lybie, ou au Zimbabwe? Lorsque nous en aurons fini de Saddam Hussein, allons-nous palcer dans notre mire tous les autres dictateurs du monde et leur déclarer la guerre l'un après l'autre jusqu'à ce que nous les ayons tous éliminés?

    J'ai lu la résolution de septembre dans laquelle le Congrès des États-Unis autorisait le président Bush à agir. Elle comportait deux conditions.

    La première oblige le président à informer le Congrès de l'échec, le cas échéant, des efforts diplomatiques visant à faire appliquer les résolutions des Nations Unies concernant les armes de destruction massive. La seconde condition exige du président qu'il atteste que les mesures prises contre l'Irak ne nuiront pas à la lutte contre le réseau terroriste d'Al-Qaïda. Ce sont là les deux conditions énoncées dans la résolution.

    Quelqu'un a-t-il entendu le président Bush parler de Ben Laden? Il fut un temps où il n'y avait pas une journée ni même une heure qui passait sans que l'on entende le président Bush parler de Ben Laden ou d'Al-Qaïda sur tous les réseaux américains. Soudainement, on n'en entend plus parler. Ils ont complètement disparu. Du jour au lendemain, Saddam Hussein est devenu Ben Laden. Il est une menace terroriste. Il va détruire les États-Unis et le reste du monde.

    Et Ben Laden? Et la Corée du Nord, comme l'a très pertinemment demandé le sénateur Kennedy? Aujourd'hui, le sénateur Kennedy est allé au Congrès demander qu'il revoie la résolution adoptée en septembre qui autorise le président Bush à aller de l'avant. Il a affirmé qu'il présenterait une mesure obligeant le président Bush à obtenir une nouvelle approbation avant de lancer une attaque militaire contre l'Irak. Nous ne parlons pas ici des libéraux à Ottawa, mais du sénateur Kennedy au Congrès des États-Unis, un grand patriote américain s'il en est.

  +-(2050)  

    Le sénateur Kennedy a dit ce qui suit:

    Beaucoup de choses ont changé au cours des nombreux mois depuis la dernière fois où le Congrès a discuté de la guerre contre l'Irak [en septembre dernier]. Les inspecteurs des Nations Unies sont sur place; ils font des progrès et leur travail doit se poursuivre. Oussama Ben Laden et la crise nucléaire en Corée continuent de constituer une menace beaucoup plus grande [que l'Irak].

    Que s'est-il passé pour que, tout à coup, on change de position et Saddam Hussein devienne le nouvel Hitler du monde moderne qui détruira la planète du jour au lendemain?

    J'ai eu la chance d'entendre hier soir une entrevue donnée par Mohamed Issami, un journaliste Français d'origine algérienne. Il a réussi à infiltrer le réseau Al-Qaïda de Paris qui est un des principaux réseaux d'Al-Qaïda. Il a pu gagner la confiance des membres de ce réseau et apprendre bon nombre de ses secrets. Il a publié un livre et a affirmé ne pas avoir peur de donner des entrevues, qu'il en acceptait les conséquences.

    Il a dit: «Je suis musulman. Je pratique fidèlement ma religion. Ma religion n'est pas celle de Saddam Hussein ou de Al-Qaïda. Je ne crois pas au meurtre, aux tueries.»

    Par la même occasion, il a fait cette mise en garde: Je peux vous dire, pour avoir infiltré une cellule d'Al-Qaïda, que j'ai entendu ces gens eux-mêmes dire que leur plus grand souhait, c'est que les États-Unis attaquent l'Irak, car ils auraient ainsi la meilleure excuse au monde pour recruter de nouveaux jeunes islamistes, de nouveaux jeunes futurs terroristes qui s'entraînent en Tchétchénie, en Afghanistan et ailleurs, pour mener une guerre terroriste sans fin, pendant des années, parce qu'ils considéreront toute attaque contre le monde musulman comme une attaque religieuse des chrétiens contre les musulmans. Ils polariseront le débat pour que de jeunes islamiques désespérés, ici, et là-bas, au Moyen-Orient, partagent avec eux le terrible sentiment que le monde est blanc et noir et que, à moins qu'ils ne fassent la guerre et ne recourent à la terreur, ils n'auront jamais une chance.

    Ils nous a prévenus d'être extrêmement prudents. Depuis une cellule d'Al-Qaïda, il a dit que la guerre aurait des conséquences désastreuses pour nous, dans le monde occidental.

    Quelles sont les conséquences d'une guerre? J'écoute le président Bush. Tous les B-52 du monde, tous les navires, les armements et les 60 000 soldats, que vont-ils faire? Ils vont bombarder l'Irak et le réduire en cendres. Ils vont détruire et tuer. Les bombes et les missiles ne font pas de distinction entre les jeunes et les vieux, entre les soldats et les civils. Ils détruisent et tuent des gens innocents. Ils tuent des enfants.

    Dix millions d'Irakiens ont moins de 18 ans. Une partie de cette population sera également tuée dans une guerre.

    J'ignore si les États-Unis écoutent nos débats, mais ce que nous disons aux Américains qui sont de notre avis, c'est: essayons par tous les moyens d'éviter une guerre. Recourons aux Nations Unies, non pas pour tenter de convaincre les autres pays qu'une guerre devrait avoir lieu, mais bien au contraire, pour laisser les inspecteurs poursuivre leur travail et pour utiliser tous les moyens à notre disposition pour que la guerre, si elle doit avoir lieu, et j'espère bien que non, soit la conséquence ultime et l'arme ultime. Je prie et j'espère que cela n'arrivera jamais.

  +-(2055)  

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Monsieur le président, c'était un lien intéressant que le député a fait entre ben Laden et Saddam Hussein. Il reconnaît que la coalition et la guerre au terrorisme ont eu raison de ben Laden, qu'on se prépare maintenant à la prochaine phase de la guerre au terrorisme et que cette phase s'achèvera lorsqu'on aura fait la paix en Irak.

    Le député a parlé des nombreuses victimes que la guerre ferait en Irak. Compte tenu des centaines de milliers de Kurdes et de chi-ites qui ont été tués, des personnes âgées, des femmes et des enfants qui meurent inutilement et de la torture constante telle que la lapidation des femmes comme l'exigent les vieilles lois qu'on a recommencé à observer, le député peut-il comparer le nombre de personnes qui sont certaines de mourir sous le régime de Saddam Hussein au nombre de personnes qui pourraient trouver la mort durant le processus de paix au Moyen-Orient.

  +-(2100)  

+-

    M. Clifford Lincoln: Monsieur le président, c'est dire qu'il faut comparer les tragédies pour trouver lesquelles font le plus de victimes.

    Je peux poser la même question à la députée. Combien la famine fera-t-elle de victimes au Zimbabwe? Six millions, estime-t-on. Combien le régime nord-coréen fera-t-il de victimes? Combien y aura-t-il de morts si le régime nord-coréen, que les États-Unis ont commodémment laissé tranquille, commence à utiliser des armes nucléaires? Selon le sénateur Kennedy, qui doit savoir ce qu'il dit parce qu'il a accès à tous les rapports de renseignement, ce régime est beaucoup plus destructeur que ne l'est celui de Saddam Hussein. Que faire avec?

    Force est de reconnaître que les Nations Unies sont l'arme qui permettra au bout du compte de renverser les dictatures, même si cela peut être long. Cela a été long dans le cas de Mobutu. Il a fallu beaucoup de temps pour venir à bout d'autres dictatures dans le monde. On ne saurait comparer la situation en Irak à celle de l'Allemagne hitlérienne. Ce serait très mal lire l'histoire. Avec une population de 80 millions d'habitants et des armes incomparables, l'Allemagne a envahi des pays beaucoup plus faibles qu'elle.

    La situation est complètement différente en Irak. Ce pays est pratiquement désarmé. L'Irak est un pays pauvre qui est incapable d'attaquer les États-Unis du jour au lendemain. La menace qu'il représente est le fruit de certaines imaginations fertiles. Comme le sénateur Kennedy l'a indiqué, la Corée du Nord est beaucoup plus susceptible de déclencher une guerre nucléaire que Saddam Hussein.

    Or, pourquoi laissons-nous ce pays tranquille? Pourquoi laissons-nous ben Laden tranquille? Il est libre de se déplacer, il est libre de semer la terreur. Pourquoi laissons-nous le régime de l'ex-Birmanie, le Myanmar, tranquille? Pourquoi nous montrons-nous soudainement sélectifs au point de compter les gens, de dire que cette guerre fera moins de victimes, pour justifier la guerre? Que se produira-t-il s'il y a plus de victimes que de survivants? Comment la députée peut-elle prédire combien de milliers de gens mourront lorsqu'il commencera à pleuvoir des bombes? Je ne voudrais pas être là.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, j'ai écouté avec intérêt le discours de mon collègue. C'est un discours que je qualifierai de très pacifiste, un peu comme la personnalité que je lui connais. C'est quelqu'un qui croit à la paix et je pense que c'est bien ainsi. Il a également fait un plaidoyer en faveur de l'ONU et, à ce sujet, nous nous rejoignons.

    Lorsqu'il dit qu'il faut donner toutes les chances à la paix, il y a différentes avenues possibles pour l'ONU. Je suis d'accord avec mon parti pour dire qu'il faut une deuxième résolution à l'ONU pour évaluer si, effectivement, il y a eu des manquements à la résolution 1441 et pour tracer la voie à une série d'actions suite à cette résolution.

    S'il est pour la paix, il faut lui donner le plus de chances possibles. Pour nous, cela passe par une deuxième résolution de l'ONU. La position de son gouvernement ne semble pas être celle-là pour le moment. Son opinion est-elle compatible avec la position de son gouvernement et préfère-t-il une deuxième résolution de l'ONU avant que l'on puisse passer aux actes?

+-

    M. Clifford Lincoln: Monsieur le président, j'ai parlé très ouvertement de cette question au premier ministre. Notre position est très claire. Nous soutenons la résolution 1441.

    La résolution 1441 va revenir devant les 15 membres du Conseil de sécurité le 5 février. M. Blix va produire un rapport. Avant que les États-Unis puissent persuader le reste du monde d'aller en guerre contre l'Irak et de mettre en vigueur les mesures prévues par la résolution 1441, il faudra qu'ils persuadent la Chine, la Russie, la France, l'Allemagne et tous les autres pays qui ne veulent pas de la guerre.

    Il faut donc d'abord passer par cette étape. Je pense que lorsque cette question sera débattue au Conseil de sécurité, les chances pour les États-Unis de convaincre les autres membres seront très minimes. Ils auront alors à décider s'ils vont en guerre avec les Anglais. J'espère que notre pays décidera, à ce moment-là, de ne pas aller en guerre puisque cette décision n'aura pas l'aval des Nations Unies.

[Traduction]

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Monsieur le président, je tiens à féliciter le député de son discours réfléchi et empreint de compassion.

    J'aimerais faire un bref commentaire relativement à la question posée par la députée de l'Alliance canadienne. Cette question me rappelle la fois où Madeleine Albright était interviewée par une journaliste du nom de Lesley Stahl. La journaliste lui a mentionné la possibilité que des centaines de milliers d'enfants irakiens meurent par suite des sanctions économiques imposées au peuple irakien. Elle a demandé à Madeleine Albright si elle était prête à accepter la mort de centaines de milliers d'enfants. Madeleine Albright a fait une pause puis a répondu que oui c'était un prix qu'il valait la peine de payer. Quelle réponse consternante. Nous savons qu'un très grand nombre d'enfants sont morts.

    Je veux demander au député, pour qui j'ai beaucoup de respect, de répondre à une question que j'ai posée au ministre des Affaires étrangères et à laquelle celui-ci n'a pas encore répondu. Si le gouvernement du Canada décidait de participer à la coalition militaire, que ce soit sous l'égide des Nations Unies ou en tant que membre de la coalition des partenaires pour une même cause—Dieu nous en préserve—le député est-il d'avis que la Chambre des communes devrait non seulement avoir l'occasion de débattre de cette question fondamentale de vie et de mort, mais aussi de voter sur celle-ci?

  +-(2105)  

+-

    M. Clifford Lincoln: Monsieur le président, c'est ce que je préférerais.

+-

    M. Chuck Strahl (Fraser Valley, Alliance canadienne): Monsieur le président, je crains que nous assistions à un autre de ces débats où les libéraux nous assurent qu'ils ont vraiment à coeur la question à l'étude. Personne ne doute de leur sincérité, mais je ne suis pas sûr que leur foi dans le processus onusien soit bien réaliste dans les circonstances.

    On a soupesé le besoin d'une deuxième résolution. Ce n'est pas d'une deuxième résolution dont on doit se soucier, mais d'une seizième.

    La voisine derrière chez moi avait l'habitude de compter jusqu'à 10 quand elle appelait ses enfants. Elle se rendait à neuf et comptait ensuite neuf et demi, neuf et trois quarts, neuf et sept huitièmes. Les enfants ne l'écoutaient pas.

    C'est un peu ce que je crains avec les Nations Unies: qu'on continue encore de faire la sourde oreille après seize résolutions. Que serait-il arrivé si les Américains n'avaient pas lancé d'ultimatum? Lorsque les Irakiens ont finalement compris que les Américains étaient sérieux, ils ont laissé revenir les inspecteurs.

    Je veux que les Nations Unies soient respectées, mais elles doivent être vraiment sérieuses quand elles adoptent une résolution. Autrement, il ne reste plus qu'à hausser les épaules et à se croiser le doigts. Nous avons espéré que les choses s'arrangeraient au cours des deux grands conflits mondiaux, de même qu'au Kosovo, jusqu'à ce que les forces alliées décident enfin d'intervenir, sans l'approbation des Nations Unies. Pourquoi? Parce qu'arrive un temps où une action multilatérale s'impose, sinon le multilatéralisme ne veut plus rien dire.

    Il faut protéger les Nations Unies en faisant preuve de fermeté dans l'application de ses résolutions. Et je ne parle pas de cette seconde résolution que l'on envisage, mais des 15 autres qui nous ont mené au point où nous en sommes. Je ne souhaite pas la guerre, mais si on ne prend pas les Nations Unies au sérieux, ou si on continue de passer outre à ses résolutions, les bouchers de ce monde continueront de sévir.

+-

    M. Clifford Lincoln: Monsieur le président, je me demande si le député qui m'a posé la question a compté le nombre de résolutions qui ont été adoptées au sujet d'Israël et de la Palestine et qui ont été laissées de côté au fil des ans?

    Je me demande, si nous prenions la peine d'empiler toutes les résolutions des Nations Unies auxquelles il n'a pas été donné suite, combien nous en compterions? Je me demande si les Nations Unies auraient été plus crédibles et plus fortes si les États-Unis n'avaient pas choisi en cours de route de verser leurs cotisations lorsque cela faisait leur affaire, de laisser les Nations Unies presque ruinées et de recourir aux Nations Unies lorsque...

    Une voix: Est-ce que vous passez ainsi à tabac votre voisin? Chez vous?

    M. Clifford Lincoln: Si le député me pose une question, il devrait me donner la chance d'y répondre. J'ai écouté son chef avec tout le respect que je lui devais. Je l'ai écouté lorsqu'il a posé des questions. Il a le droit de ne pas partager mon point de vue. Et s'il est d'accord avec moi j'en serais tout à fait désolé étant donné les positions qu'il a prises par le passé, du genre: faisons la guerre, larguons des bombes, armons-nous jusqu'aux dents et tirons continuellement et le monde sera le nirvana. Ce sera le paradis. Je ne crois pas moi-même en cela. Je ne crois pas en ce genre de théorie.

    Je dis que les États-Unis se sont moqués des Nations Unies. Lorsque cela convient aux Américains, tout va bien. Lorsque cela ne leur convient pas, ils ne versent pas leurs cotisations; ils passent outre à leur devoir. Ont-ils signé une convention des Nations Unies? Ils ne donnent pas suite à la convention sur la biodiversité. Ils ne respectent pas la Cour criminelle internationale. Ils n'ont pas ratifié l'accord sur les mines terrestres parce qu'il ne leur convenait pas. Ils n'ont pas signé le Protocole de Kyoto ni celui l'accord sur les armes biologiques. Ils signent un accord sur les missiles antibalistiques mais, soudain, ils s'en dégagent lorsque que cela ne leur convient pas. Ils font peu de cas du traité qu'ils ont signé. Ils s'en dégagent unilatéralement.

    Des voix: Oh, oh!

  +-(2110)  

+-

    Le président: À l'ordre, s'il vous plaît. Chers collègues, permettez-moi de vous donner mon point de vue en tant que président. Il est fort agréable que les députés puissent intervenir avec tant de flamme et d'intérêt sur un sujet aussi sérieux. Cela exige un petit effort d'attention et de respect supplémentaire, mais si nous voulons vraiment que se tiennent en cette enceinte des débats utiles qui sont à la fois passionnés et animés, il s'impose que nous soyons tous plus disciplinés.

    Je m'en remets à vous pour que le plus grand nombre possible de députés puissent s'exprimer librement et dans le respect d'ici la fin du débat.

+-

    M. Clifford Lincoln: Je pense que j'ai dit ce que j'avais à dire, monsieur le président. On m'a demandé pourquoi un grand nombre de résolutions des Nations Unies concernant l'Irak sont restées lettre morte en vertu de l'article 15. Je pourrais énumérer les diverses conventions des Nations Unies dont des pays comme les États-Unis n'ont pas tenu compte. Je pourrais mentionner des résolutions concernant le Moyen-Orient dont on a fait fi, auxquelles aucune suite n'a été donnée et qui auraient pu être invoquées par les divers pays, dont les États-Unis.

    On ne peut pas choisir un groupe parce qu'il fait notre affaire aujourd'hui. C'est devenu la mode, notre attention se porte sur l'Irak et, tout à coup, ce pays devient la grande obsession de M. Bush. On en oublie la Corée du Nord, qui fait pourtant peser une menace beaucoup plus grave, au dire d'un sénateur américain de longue date.

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Monsieur le président, les événements de la semaine dernière ont été une sonnette d'alarme pour les dirigeants. Nous avons appris lundi que les efforts des Nations Unies pour désarmer Saddam Hussein ont produit de piètres résultats. Passons rapidement en revue les graves préoccupations soulevées par M. Blix.

    Premièrement, la résolution des Nations Unies sur le désarmement de l'Irak exige que ce pays fournisse une liste détaillée de tous les fonctionnaires qui ont coopéré aux programmes précédents d'armement. Or, selon le rapport Blix, la liste fournie par l'Irak omet plus de 3 000 scientifiques et travailleurs de l'armement dont on sait qu'ils ont participé à des projets de mise au point d'armes dans le passé. Comment se fait-il que ces quelque 3 000 fonctionnaires aient disparu des registres?

    Cette omission donne à penser que Saddam croit que ces 3 000 fabricants d'armes possèdent des renseignements qui incrimineraient son régime et révéleraient l'existence de son programme de mise au point d'armes. La résolution oblige l'Irak à donner aux inspecteurs libre accès à ces gens n'importe quand, n'importe où et sans la surveillance de l'oncle Saddam.

    L'Irak n'en a rien fait. À chaque fois que les inspecteurs ont demandé d'interviewer l'une de ces personnes, on leur a dit que l'individu en question ne serait pas autorisé à leur parler sauf en la présence d'un représentant irakien nommé par Saddam Hussein.

    Deuxièmement, la résolution exige que l'Irak fournisse une description complète, exacte et à jour de ses programmes d'armement. Là encore, M. Blix n'est pas satisfait. La déclaration de 12 000 pages fournie par l'Irak est remplie de lacunes et de mystères. Ces ambigüités, selon M. Blix, laissent entendre que Saddam a en sa possession des neurotoxiques mortels de la classe VX, de quoi faire des milliers de gallons d'anthrax, 6 500 bombes chimiques qu'on ne peut retracer et un nombre inconnu d'ogives chimiques. Par ailleurs, l'Irak possède des missiles d'une portée supérieure de 150 kilomètres à ce qui est autorisé par les Nations Unies.

    Ensuite, les inspecteurs pourraient probablement trouver certaines de ces armes s'ils pouvaient entreprendre des vols de reconnaissance tel que prévu dans la résolution 1441. Toutefois, M. Blix et ses inspecteurs n'ont pas eu ce luxe. L'Irak refuse d'assurer la sécurité des avions de reconnaissance des Nations Unies.

    Sans la possibilité de mener des missions de reconnaissance aérienne, le travail des inspecteurs devient quasiment impossible. De quelle autre manière les inspecteurs pourraient-ils repérer l'emplacement d'installations probables de fabrication d'armes et de laboratoires chimiques mobiles? Que pourraient-ils découvrir qu'ils ne peuvent découvrir à moins de mener des vols de reconnaissance? La résolution exige l'accès total à toutes les installations soupçonnées de produire des armes ainsi qu' à tous les documents et dossiers connexes et, en vertu de cette partie de la résolution, l'Irak doit coopérer activement avec les inspecteurs, sans menacer les fonctionnaires des Nations Unies.

    Saddam Hussein a-t-il respecté cette condition? Pas selon M. Blix. Celui-ci dit, en effet, que l'Irak cache de l'information et que Saddam Hussein harcèle les inspecteurs. Il ajoute que 3 000 pages de documentation sur la production d'armes nucléaires ont été trouvées au domicile d'un scientifique irakien. Ce n'est pas ce qu'on appelle respecter une condition.

    Qu'est-ce que tout cela veut dire pour les inspecteurs en désarmement? Imaginez un pays de la taille de la Colombie-Britannique dont le régime cache des armes dans des laboratoires mobiles, voire des installations souterraines, où un contenant pas plus gros qu'un verre à boire peut renfermer suffisamment de botulisme ou d'autres toxines pour détruire une grande ville canadienne, et où des armes massives peuvent être dissimulées dans une simple valise.

    Sans reconnaissance aérienne ni accès à des témoins, la tâche est impossible pour les inspecteurs onusiens. S'il faut en juger par le rapport de M. Blix, on a toutes les raisons de croire que Saddam possède des armes de destruction massive et que, compte tenu de son bilan horrible de massacres, il risque fort de les utiliser.

    Comme d'autres mégalomanes avant lui, Saddam a fait preuve d'une incroyable propension à se tromper en envahissant l'Iran et le Koweït. Les dictateurs de sa trempe sont réputés pour leurs comportements erratiques, comme lorsqu'il a gazé à mort des milliers de ses compatriotes. C'est jouer à un jeu très dangereux que de parier qu'un tel monstre, qui a torturé systématiquement son peuple, va agir de façon prudente et pragmatique.

  +-(2115)  

    La menace ne vient pas seulement de ce que Saddam peut faire lui-même, mais de ce qu'il peut faire faire par d'autres. Grâce à ses relations avec des organisations terroristes, qui sont documentées, il pourrait déléguer sa terreur à des partenaires stratégiques. Il l'a peut-être déjà fait. Ces groupes n'hésiteraient pas à employer des armes horribles contre leurs ennemis jurés. Ils l'ont déjà fait.

    Les moyens de dissuasion traditionnels sont désuets auprès des amis terroristes de Saddam. Après tout, ces gens-là sont difficiles à tuer et ils n'ont pas peur de mourir. D'une façon ou d'une autre, ils n'ont pas vraiment à craindre de représailles. Saddam a intérêt à gagner du temps et à conclure des alliances stratégiques avec ces groupes supposément insensibles aux moyens de dissuasion, et nous avons intérêt à l'en empêcher.

    Cela m'amène au point suivant. Compte tenu de ces périls, il est difficile de comprendre les architectes d'une conciliation peu réaliste. Ceux-ci soutiennent que l'ONU devrait décider à elle seule de la réaction canadienne à cette crise.

    Le Canada respecte les Nations Unies mais, parallèlement, où avons-nous pêché l'idée que les Nations Unies sont infaillibles? Ce sont les mêmes Nations Unies qui, récemment, ont élu la Lybie dirigée par le tyran Mouammar Kadhafi, pour être le gourou mondial des droits de la personne. Ce sont les mêmes Nations Unies qui, dans le cadre du processus d'affectation par roulement, sont censées désigner nul autre pays que l'Irak à la présidence du Comité de désarmement, en mai. Où étaient les Nations Unies lorsqu'un général canadien a plaidé et littéralement pleuré en faveur d'une intervention de l'organisation pour empêcher un massacre qui s'annonçait selon lui au Rwanda? Les Nations Unies ne sont pas intervenues et plus d'un million de personnes ont été massacrées sans merci. Où étaient les Nations Unies au moment où se profilait le massacre au Kosovo? Ce n'est pas une institution infaillible, et nous commettrions une erreur si nous lui abandonnions totalement notre souveraineté.

[Français]

    Il est également important de considérer qu'il y a deux membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU, soit la France et la Russie, qui ont des intérêts en ce qui a trait au pétrole en Irak. Leurs intérêts peuvent porter ombrage à leur capacité de prendre une décision relative à l'Irak. Toutefois, il est important que le Canada essaie de convaincre la France et la Russie que leurs intérêts pétroliers ne doivent pas affecter leur jugement sur la question de l'Irak.

  +-(2120)  

[Traduction]

    Il n'y a pas que la sécurité internationale qui est en jeu. La pertinence même des Nations Unies ainsi que son avenir le sont aussi. Tout autant que nous souhaitons collaborer avec les Nations Unies, nous devons défendre notre souveraineté, la souveraineté canadienne, les intérêts et les valeurs du Canada qui sont menacés par cette situation. Nous devons les défendre.

    Nous devons maintenir implacablement l'objectif consistant à désarmer ce fou. Le Canada doit coopérer avec ses alliés pour transmettre à Saddam un message final selon lequel il a là l'occasion de désarmer et il doit la saisir. C'est donc dire qu'il faut déployer dès maintenant des soldats canadiens dans la région pour dissuader Saddam de faire fi des obligations fixées par les Nations Unies et lui faire comprendre qu'il ne peut continuer à faire obstruction aux inspecteurs de l'ONU, à M. Blix et à ses effectifs.

    Kofi Annan a dit il y a à peine quelques jours que le seul langage que comprend Saddam Hussein, c'est une démonstration de force. Nous avons vu cela se produire en 1995, lorsqu'une fois de plus Saddam Hussein a massé des milliers de ses soldats à la frontière kowétienne. Ce n'est que devant une démonstration de force qu'il a fait machine arrière.

    En conclusion, le régime de Saddam s'apparente en un sens beaucoup à celui de la dynastie des Bourbon. Il n'oublie rien et il n'apprend rien. Il n'a jamais oublié son rêve de dominer le monde arabe et il n'a jamais vraiment tiré de leçon des transgressions marquées par l'échec qu'il a commises.

    Quelles leçons en avons-nous tiré, c'est là la question qu'il faut poser. Sauf le respect que je dois aux députés d'en face, je dois répondre que ce n'est pas clair. Certains députés, s'étant autoproclamés ambassadeurs d'un apaisement irréaliste, vont trotter en Irak, remplis d'émerveillement à l'égard des premiers dirigeants de ce régime d'assassins. Ce genre d'aventure ne fait qu'alimenter la propagande du régime de Baghdad.

    Winston Churchill est celui qui a su le mieux résumer ce type de comportement lorsqu'il a dit qu'un conciliateur, c'est quelqu'un qui nourritun crocodile en espérant qu'il sera le dernier à être mangé.

    La réponse du premier ministre, nous en conviendrons tous, je crois, est loin d'être churchilienne. Une chose est sûre et claire : Saddam Hussein est l'incarnation du mal. Il doit obtempérer à la résolution de l'ONU ou subir les conséquences de son non-respect. Il ne s'agit pas de déclarer la guerre au peuple irakien. Il s'agit de nous débarrasser d'un dictateur retors qui menace la sécurité internationale et les valeurs qui sont chères aux Canadiens.

    De donjon du despotisme qu'il est actuellement, l'Irak pourrait devenir un flambeau de la liberté, mais cela ne deviendra réalité que si Saddam Hussein obtempère à la résolution.

    Le Canada doit se ranger du côté de ses alliés. Il faut que Saddam Hussein sache qu'il n'a d'autre choix que d'obtempérer et que nous n'avons d'autre choix que d'être ferme et inflexible tant qu'il ne se pliera pas à la résolution de l'ONU.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Monsieur le président, je veux féliciter mon collègue pour son discours, même si je suis complètement aux antipodes de sa position relativement l'ONU et à l'importance de réagir rapidement et de s'en prendre immédiatement à l'Irak.

    Un aspect de son discours a soulevé une certaine curiosité de ma part. Il pense que la Russie et la France pourraient avoir une prise de position un peu biaisée parce qu'elles ont déjà des intérêts pour le pétrole irakien. Soit dit en passant, l'Irak a probablement autant de ressources que l'Arabie Saoudite.

    Ne pense-t-il pas que les États-Unis pourraient avoir l'oeil sur les nappes de pétrole irakien? Est-ce que ce ne serait pas à l'avantage des États-Unis d'intervenir rapidement, même s'ils sont seuls? Ils pourraient dire: «Nous avons fait le travail, alors les nappes de pétrole qui sont en Irak sont à nous maintenant.» Est-ce que cela se peut que les États-Unis aient un intérêt pécuniaire pétrolier en particulier pour déclencher une offensive planifiée en Irak?

+-

    M. Stockwell Day: Pas du tout, monsieur le président. Maintenant, comme il n'y a pas de sécurité dans le monde, le prix du pétrole est élevé; ce n'est pas le moment pour les compagnies américaines et canadiennes de faire des profits. Ce n'est pas possible pour les pays occidentaux d'avoir comme but de prendre le pétrole à l'Irak. En Irak, le pétrole n'appartient pas aux compagnies américaines ou canadiennes, il appartient aux Irakiens.

    Maintenant, on apprend que deux pays, la France et la Russie, y ont des intérêts. Les profits pour les compagnies de l'ouest sont très bas car il n'y a pas de sécurité.

    Les États-Unis, le Canada et nos alliés, nous voulons tous la sécurité.

  +-(2125)  

[Traduction]

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Monsieur le président, le député a souvent parlé de M. Blix durant son discours. M. Blix a demandé qu'on lui accorde le temps de terminer son mandat tel que défini dans une motion unanime des Nations Unies. Il veut avoir le temps de parachever son rapport et je ne sais pas ce que contiendra ce rapport en bout de ligne. Le député croit-il qu'il faudrait accorder à M. Blix le temps nécessaire pour rédiger son rapport selon les critères qui lui avaient été fixés lorsqu'on lui a confié cette tâche?

    En outre, le député est-il d'avis que l'Irak représentera une menace pour les États-Unis et le Canada au cours du prochain mois ou des prochains deux, trois ou même quatre mois?

+-

    M. Stockwell Day: Monsieur le président, c'est une question intéressante. Tout d'abord, comme notre chef l'a expliqué ce soir, il faut bien comprendre que, du point de vue du droit international, l'Irak n'a pas respecté un cessez-le-feu qui a été signé. Ce cessez-le-feu était fondé sur certaines conditions que Saddam Hussein devait observer. Il n'a pas respecté ces conditions depuis 12 ans. On n'enfreindrait pas le droit international s'il y avait maintenant une intervention. Nous ne disons pas que pareille intervention doit avoir lieu maintenant, mais rétablissons clairement les faits par rapport à cet aspect du droit international.

    Il y a aussi un autre point qu'il faut bien comprendre. Quand il est question de droit, à quelque niveau que ce soit, les avocats doivent toujours pouvoir défendre l'un ou l'autre camp, de par leur formation. Je trouve intéressant d'entendre dire, parfois ici même à la Chambre, qu'il n'y a qu'une vision du droit international. Lorsque le mot international suit le mot droit, c'est comme s'il n'y avait qu'une seule vision. Ce n'est pas le cas, il y en a plus qu'une. De toute évidence, Saddam Hussein enfreint actuellement les conditions du cessez-le-feu.

    Cela étant dit, la position de l'Alliance canadienne est claire. Nous faisons preuve de persévérance et de patience en travaillant avec les Nations Unies. Si M. Blix demande une prolongation, nous devrions la lui accorder. Cependant, nous ne devrions pas le faire naïvement. Nous devrions agir ainsi en gardant les yeux bien ouverts.

    Comme je l'ai déjà dit, en ce moment même, ces armes dont l'existence n'a pas été divulguée sont actuellement à la disposition d'autres ennemis de l'Occident. Chaque jour où nous attendons, il y a un risque que ces armes se trouvent dans des sacs à dos, dans des barils ou autre chose dans n'importe quelle ville, dans un système de ventilation ou dans un avion. Gardons les yeux ouverts et ne soyons pas naïfs. M. Blix veut plus de temps, mais restons fermes et soyons conscients de ce à quoi nous sommes confrontés.

+-

    Mme Colleen Beaumier (secrétaire parlementaire du ministre du Revenu national, Lib.): Monsieur le président, sachant que les Irakiens utilisent des systèmes informatiques encore sous DOS et qu'ils n'ont pas renouvelé leur matériel ou leur technologie informatique depuis 1991, nous leur demandons de préparer un rapport complet comme s'ils étaient équipés avec les ordinateurs d'aujourd'hui.

    Je me demande si, dans ces conditions, les États-Unis réussiraient à produire un rapport de vérification détaillé sur leur armement de destruction massive en moins de 40 jours. Nous savons tous comment fonctionnent les systèmes de vérification. Prenons Enron, par exemple.

    Hans Blix a donné un B moins à l'Irak. Depuis quand un B moins est-il un constat d'échec?

+-

    M. Stockwell Day: Monsieur le président, la députée semble dire que le pauvre Saddam Hussein, qui meurt d'envie de dévoiler tous ses secrets, aurait de la difficulté à le faire faute d'équipement de haute technologie.

    La députée sait-elle que, en 1989, quand l'Afrique du Sud a été tenue de rendre pleinement compte aux inspecteurs en désarmement, elle a réagi avec la meilleure volonté du monde et dans la plus grande transparence, sans le DOS ou autre matériel dont la députée dit que Saddam Hussein manquerait?

    L'Ukraine a fait la même chose. Lorsque l'empire soviétique a été chamboulé, ce pays a réagi dans la transparence et avec bonne volonté, invitant la communauté internationale à inspecter ses armes de destruction et lui demandant de l'aider à s'en défaire.

    Le Kazakhstan a fait de même avec ses stocks d'armes. Il s'est ouvert au monde. Il a invité les autres nations à l'aider à se débarrasser de son armement de destruction massive.

    Saddam Hussein n'a jamais réagi de cette façon, avec ou sans DOS, et nous doutons qu'il le fasse un jour. Voilà pourquoi nous devons faire respecter cette résolution.

  +-(2130)  

+-

    M. Gary Lunn (Saanich—Gulf Islands, Alliance canadienne): Monsieur le président, j'ai écouté le chef de l'opposition officielle de Sa Majesté parler un peu plus tôt de l'importance pour le Canada de faire preuve de leadership. Il a déclaré que, si le Canada montrait un peu de leadership, ce serait probablement le meilleur moyen d'éviter la guerre.

    Je voudrais que le député m'explique en quoi le leadership est si important dans une situation comme celle-ci.

+-

    M. Stockwell Day: Monsieur le président, cette question est impérieuse. Encore une fois, nous pouvons jeter un coup d'oeil sur l'histoire.

    Un député a déclaré qu'il n'y avait aucun élément de comparaison entre Saddam Hussein et un être comme Adolf Hitler. Il y en a pourtant. Oui, il y en a. En effet, c'est ce que souligne A.J.P. Taylor dans son ouvrage volumineux sur la seconde guerre mondiale et sur les raisons qui l'ont provoquée. Cet auteur a clairement dit que les alliés auraient dû faire preuve de leadership dans les années 30 et tenir tête à Adolf Hitler en le menaçant de représailles armées de la part des nations alliées s'il continuait sur la même voie. Un historien de renom a affirmé que comme Hitler était convaincu qu'il n'y avait pas de risque ni de possibilité de représailles armées de la part des alliés, il a poursuivi son entreprise de dévastation et de destruction parce que les alliés n'ont pas fait montre de leadership.

    C'est pourquoi, dans des moments comme celui-ci, comme le député l'a indiqué, des pays comme le Canada doivent faire preuve de leadership. Malheureusement, notre capacité de réagir a été érodée. À chaque fois que le premier ministre ou qu'un membre du Cabinet se rend aux États-Unis, ils reviennent avec une position différente sur la question.

    Je suis désolé pour le ministre de la Défense nationale. Il est allé aux États-Unis la semaine dernière, mais après avoir tourné en rond pendant un moment et n'avoir trouvé personne de crédible à qui s'adresser, il est revenu et a énoncé la position que le Canada allait adopter. Toutefois, un jour ou deux plus tard, le premier ministre a déclaré que, non, ce ne serait pas cette position qui serait adoptée.

    Il est temps de faire preuve de leadership, de leadership des pays alliés, démocratiques, respectueux de la liberté et des droits de l'homme sans exception. Ce genre de leadership peut prévaloir dans la situation actuelle.

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Monsieur le président, le chef de l'opposition officielle de Sa Majesté a dit que l'Irak ne respectait pas la résolution 1441.

    Je me demande si le député pourrait expliquer ces manquements et dire, plus précisément, s'il y a matière à partir en guerre, à supposer qu'aucun autre problème ne surgisse?

+-

    M. Stockwell Day: Monsieur le président, M. Blix a déjà expliqué les manquements. Si le président m'y autorise, je vais passer la question en revue avec le député, mais je vois qu'il dit non. Cependant, j'ai déjà expliqué qu'il y avait eu des manquements graves.

    J'ai l'impression que le député voulait demander si ces manquements sont suffisamment graves. Il y a déjà des manquements graves. Nous sommes très inquiets. Quoi qu'il en soit, en surveillant de près ce que Saddam Hussein pourrait faire maintenant, poursuivons le travail.

    Je dirais au député qu'il y a des manquements lorsqu'on demande à quelqu'un de dire où se trouvent les armes prétendument détruites ou de prouver qu'elles ont été détruites et qu'il ne peut rendre compte ni des réserves de gaz VX, ce gaz innervant mortel, ni des éléments pouvant servir à fabriquer des milliers de gallons d'anthrax ni des 6 500 bombes chimiques.

    Nous faisons preuve de patience et de persévérance, mais j'ignore combien de temps cela peut durer encore.

+-

    M. David Pratt (Nepean—Carleton, Lib.): Monsieur le président, je crains que l'ancien chef de l'opposition officielle n'ait jeté un coup d'oeil sur mon discours.

    Je suis heureux d'avoir l'occasion d'exprimer mon point de vue sur cette question très grave de paix et de sécurité internationales. La question de savoir quand utiliser la force est la question la plus essentielle à laquelle un gouvernement puisse faire face. Elle ne devrait jamais être prise à la légère et ce doit toujours être le dernier recours.

    Je n'ai jamais rencontré un Canadien qui voulait aller à la guerre. À cet égard, je pense que nous sommes tous des militants pour la paix.

    Tous ceux qui ont vu les horreurs de la guerre, pas les images surréelles qui inondent nos écrans de télévision ces derniers temps, mais de près sur le terrain, qui ont lu dans les yeux des gens touchés, n'oublieront jamais cette expérience. La dévastation, les pertes, les vies brisées, les collectivités changées à jamais, les cicatrices mentales et physiques, dont un grand nombre ne s'effaceront jamais, font toutes partie des terribles horreurs de la guerre.

    J'ai vu de près la guerre en Sierra Leone et en Guinée, où les plus démunis ont été brutalisés de façons inimaginables.

    J'ai vu le visage de la guerre au Kosovo et en Bosnie, où des sociétés ont été abandonnées au chaos et où des tueries et des viols ont fait voler en éclat des vies jusque-là ordinaires. Tous ceux qui ont vu les effets de la guerre de près comprennent qu'elle doit être évitée.

    Même si la guerre inspire le dégoût partout dans le monde, en ce début du XXIe siècle, elle fait malheureusement toujours partie de la réalité. Nous semblons ne pas avoir appris grand-chose des terribles décennies du XXe siècle. Si nous avons appris quelque chose, j'espère que c'est le fait que les forces du mal et de l'agression, ceux qui ne respectent ni la vie humaine ni les droits de la personne, ceux qui menacent la paix du monde doivent être affrontés directement et avec détermination.

    Au fil des cent dernières années, nous avons essayé de mettre sur pied des organisations internationales nous donnant les outils diplomatiques et politiques voulus pour éviter les conflits. Les résultats de ces efforts ont été mitigés, c'est le moins qu'on puisse dire.

    Après la Première Guerre mondiale, la Société des Nations représentait le meilleur espoir d'une paix durable. Elle a perdu beaucoup d'influence lorsque ses résolutions n'ont pas été appliquées et lorsque les alliés ont perdu leur volonté collective de faire respecter le désarmement prévu par le Traité de Versailles.

    Devant la crise internationale que provoque la situation en Irak, je ne peux m'empêcher de penser aux paroles de Winston Churchill qui, en parlant de la situation en Europe dans les années 1930, avait dit:

...la stricte observation, à n'importe quel moment avant 1934, des clauses du Traité de paix portant sur le désarmement aurait assuré indéfiniment, sans violence et sans effusion de sang, la paix et la sécurité de l'humanité. On a négligé d'appliquer ces dispositions lorsque les infractions demeuraient anodines et on a répugné à le faire lorsqu'elles ont pris des proportions plus considérables. Ainsi, on a abandonné le dernier rempart qui aurait pu assurer une longue paix. Les crimes des vaincus trouvent leur origine et leur explication, mais pas leur pardon, dans les sottises des vainqueurs. Sans ces sottises, le crime n'aurait eu ni tentation ni conditions propices.

    Quoique différents en termes géopolitiques, le régime d'Adolf Hitler et celui de Saddam Hussein affichent de trop nombreux parallèles hallucinants selon moi. La lumière crue de l'histoire nous révèle les crimes commis par Hitler contre son propre peuple, ses voisins et l'humanité toute entière.

    Le sombre héritage de Saddam Hussein est sans doute de moindre envergure, mais si l'on pense aux millions de morts lors de la guerre Iran-Irak, aux milliers de victimes de l'invasion du Koweït et à la persécution des Kurdes, on peut dire que cet homme se classe définitivement parmi les plus grands tueurs de masse de l'histoire de l'humanité.

    Hitler a savamment rejeté les dispositions du Traité de Versailles pour réarmer ses troupes et doter son régime nazi des armes les plus modernes et destructrices de l'époque. De même, Saddam s'est habilement dérobé aux dispositions de près d'une douzaine de résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies. Comme l'a déclaré le chef des inspecteurs en désarmement, Hans Blix, l'Irak semble n'avoir pas encore vraiment accepté, même aujourd'hui, le désarmement qui lui est demandé.

    La communauté internationale a clairement constaté que Hitler ne se conformait pas au Traité de Versailles, parce qu'il était facile de voir les avions, les navires de guerre, les tanks et les sous-marins, mais l'arsenal de Saddam Hussein est plus facile à camoufler et potentiellement beaucoup plus destructeur. Un seul obus de 122 millimètres, du type de ceux qu'ont découverts les inspecteurs en désarmement récemment, rempli de gaz neurotoxique VX et lancé sur un stade pourrait tuer de 20 000 à 60 000 personnes.

  +-(2135)  

    Encore une fois, selon M. Blix, Saddam n'a pas déclaré l'existence de quantités non négligeables d'armes chimiques et biologiques, y compris des stocks d'agent neurotoxique VX, deux tonnes de nutriants ou de substance nutritive pour des agents biologiques comme l'anthrax, 550 obus d'artillerie chargés de gaz moutarde et 6 500 bombes chimiques. Alors que certains considèrent la non-conformité de Saddam comme une violation mineure, quiconque connaît la capacité destructrice de ces armes voit ces violations pour ce qu'elles sont: des violations pures et simples de la solution de dernier recours des Nations Unies, la résolution 1441.

    Alors que d'aucuns ont fait valoir qu'ils souhaitent avoir des preuves concrètes, M. Blix tranchera la question lundi avec sa déclaration au Conseil de sécurité. Il a réaffirmé le rôle des inspecteurs en désarmement en tant que vérificateurs du désarmement plutôt que comme des détectives cherchant une aiguille dans une botte de foin. Blix a déclaré, et je cite:

    Comme nous le savons, la double opération «déclaration et vérification» décrite dans la résolution 687 (1991) a trop souvent tourné au jeu du chat et de la souris. Plutôt que de se contenter de vérifier les déclarations et les preuves les étayant, les deux organismes d'inspection se sont employés à dresser un plan des programmes d'armement et à rechercher des preuves au moyen d'inspections, d'interviews, d'ateliers et d'enquêtes auprès des fournisseurs et d'organismes du renseignement.

    Si M. Blix a admis que le régime irakien coopérait en principe, mais non en pratique, il reste qu'après 12 ans de faux-fuyants, de subterfuges, de dérobade et d'obstruction, le désarmement du régime de Saddam Hussein demeure un objectif hors d'atteinte.

    Quand on a affaire à pareil régime criminel comme celui de l'Irak, l'histoire nous dit clairement que seul est acceptable un message des plus fermes exigeant un respect total des conditions. Car le défaut d'envoyer un message clair et ferme est toujours interprété comme un signe de faiblesse ou un manque de détermination. Pour forcer un pays délinquant à se conformer à ses exigences, la communauté internationale doit souvent, hélas, menacer de prendre les armes ou, en dernier recours, prendre les armes pour obliger le pays en cause à se conformer aux exigences afin de préserver la paix et la sécurité internationales.

    Dans la préface à ses écrits sur la Seconde Guerre mondiale, pour lesquels il a obtenu un prix, Churchill, qui a pris la parole dans cette enceinte durant les jours les plus sombres de la Seconde Guerre mondiale, a dit que ce conflit aurait pu être évité. Il a écrit, et je cite:

[...] comment les faiblesses des bons ont renforcé la méchanceté des méchants; comment la ténacité et la conviction qui sont les seules qualités pouvant assurer la sécurité des peuples modestes font cruellement défaut dans les structures et les habitudes des états démocratiques; comment, même dans les cas qui font appel à l'instinct de conservation, aucune politique ne peut être suivie pendant dix ou quinze ans à la fois. Nous verrons comment les conseils de prudence et de modération peuvent devenir les principaux éléments d'un danger mortel; comment le moyen terme adopté pour répondre à un désir de sécurité et de quiétude peut mener directement au désastre. Nous verrons combien absolue peut devenir la nécessité de mener une action internationale vaste pour de nombreux États au fil des ans, indépendamment des fluctuations des politiques nationales.

    Même si le régime de Saddam Hussein n'a plus beaucoup de temps devant lui, certains d'entre nous nous accrochons toujours à l'espoir que l'Irak pourrait désarmer sans qu'un seul coup de feu soit tiré et sans aucune perte de vie. Si cela n'est pas le cas, j'espère sincèrement qu'il y aura un effort uni et commun dans le cadre des Nations Unies en vue de désarmer ce régime et de s'assurer que la volonté collective de la communauté internationale prévaut.

    Si les Nations Unies n'assument pas leurs responsabilités et qu'ils ne font pas appliquer leurs résolutions, je crois que notre pays, de concert avec nos alliés traditionnels, soit les États-Unis, la Grande-Bretagne, l'Australie et les autres, devrait songer à la possibilité de participer à une coalition de pays aux vues similaires dans le but de désarmer ce régime. Nous avons déjà vu les Nations Unies ne pas intervenir au Kosovo, en Sierra Leone, dans l'ancienne Yougoslavie et au Rwanda.

    En dernière analyse, au cours des prochaines semaines, nous devrions avoir obtenu plus de renseignements de M. Blix, de M. Powell et du régime de Saddam Hussein. Dans l'optique de nos valeurs canadiennes, nous espérons sincèrement être en mesure de prendre une décision qui contribuera sensiblement à la paix et à la sécurité internationales.

  +-(2140)  

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, je tiens à féliciter le député pour ses propos pleins de bon sens. J'y ai noté cette grande tendance qui se dégage dans le débat de ce soir, soit celle de rappeler l'histoire, ce qu'il a fait avec beaucoup d'éloquence.

    Je suis d'accord avec lui quand il conclut que le Canada devrait se garder la possibilité de participer à une intervention alliée visant à appliquer les résolutions des Nations Unies, si cet organisme était incapable de le faire lui-même. J'aimerais cependant savoir s'il pense que les chances d'éviter un conflit réel, une véritable guerre en Irak seraient moindres si les pays alliés continuaient de menacer d'intervenir par la force en déployant des effectifs militaires dans la région, comme l'ont fait jusqu'à maintenant le États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie et d'autres pays.

    Autrement dit, ne croit-il pas que le Canada devrait envisager ou, à tout le moins, commencer à planifier un déploiement éventuel dans la région afin de donner plus de poids au message qu'il a lui-même exprimé dans son discours, soit que si l'Irak refuse de se soumettre à la résolution de l'ONU, il lui faudra en subir les conséquences?

  +-(2145)  

+-

    M. David Pratt: Madame la présidente, compte tenu de la situation actuelle en Irak, la menace d'un recours à la force constitue de toute évidence un élément crucial. Il est évident que les Américains prennent ce point de vue très au sérieux. Ils ont probablement déjà déployé plus de 100 000 militaires et les Britanniques acheminent quelque 30 000 militaires vers la région. Il existe d'ores et déjà une menace très crédible de recours à la force. Saddam Hussein ne peut avoir aucun doute quant à la détermination de certains éléments de la communauté internationale de désarmer son régime.

    Le problème qui se pose, bien entendu, est de savoir si le Conseil de sécurité agira ou non. En tant que puissance moyenne, le Canada a toujours oeuvré dans le cadre des institutions multilatérales. Nous avons toujours opté pour cette ligne de conduite. Depuis de nombreuses années, notre pays s'efforce de faire prévaloir la suprématie du droit sur la loi de la jungle, et je pense que nous avons obtenu de bons résultats.

    Cela dit, il nous faudra attendre de voir comment la situation tournera dans les jours qui viennent. La plupart des gens avaient probablement l'impression qu'il faudrait un certain temps avant de savoir comment les choses se passeraient en Irak, en ce qui concerne le rôle des inspecteurs en armement, la façon dont ils feraient leur travail, et le niveau de coopération offert par le régime.

    Beaucoup parmi nous ont certainement été surpris par le ton du rapport de M. Blix. Je crois qu'il a livré un message très dur, qui placera le régime de Saddam Hussein dans une situation très difficile au cours des semaines qui viennent. Saddam Hussein devra ou bien se plier très rapidement et collaborer, ou subir les conséquences des mesures prises par le Conseil de sécurité ou par d'autres instances.

    Je ne crois pas que nous soyons actuellement en mesure de porter un jugement. La situation évolue tellement rapidement qu'il m'apparaît plus prudent d'attendre les renseignements que produira M. Powell et l'information supplémentaire que nous communiquera M. Blix, et de voir si le régime de Saddam Hussein collaborera.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Madame la présidente, mon collègue d'en face a fait des observations sur l'application de la règle de droit. J'ai deux questions à poser.

    Si les Nations Unies autorisaient un mandat de recours à une force militaire contre le régime irakien, le député conviendrait-il avec moi que personne d'autre au monde ne peut déterminer si ce mandat est conforme au droit international et à la charte des Nations Unies, que, en fait, les seules personnes au Canada qui peuvent déterminer si nous devrions respecter ce mandat sont celles qui siègent à la Chambre? Par conséquent, conviendrait-il que nous devrions tenir un vote à la Chambre avant qu'il ne soit déterminé si nous respectons ce mandat et participons à une action militaire?

    Deux questions se posent. Sommes-nous les décideurs ultimes? Ensuite, devrions-nous tenir un vote?

+-

    M. David Pratt: Madame la présidente, si nous nous reportons à la pratique en vigueur à la Chambre au cours des 50 ou 60 dernières années, c'est-à-dire si l'on remonte à la Deuxième Guerre mondiale, on constate évidemment une déclaration de guerre le 10 septembre 1939. Je crois que c'est lorsque le Canada a déclaré la guerre à l'Allemagne nazie. Depuis cette époque, cependant, il n'est pas toujours facile de déterminer si le Parlement a voté ou non en faveur du déploiement et de l'engagement des soldats canadiens à l'étranger.

    À titre d'exemple, un important retard a été accusé lorsque les soldats canadiens se sont rendus en Corée. Je ne crois pas qu'il y ait eu de débat à la Chambre. Je pense que les soldats sont partis à l'été 1950 et que la Chambre n'a repris ses travaux qu'en septembre ou octobre. Si l'on se reporte à ce qui s'est passé, on constate que M. St. Laurent avait alors déclaré qu'il appartenait à l'exécutif de déterminer si le Canada devait ou non entrer en guerre, et que la Chambre a eu son mot à dire dans la mesure où elle s'est prononcée sur les crédits affectés à la guerre.

    Il y a eu un vote en 1990 au moment de la guerre du Golfe. Je ne crois pas que nous ayons tenu un vote au sujet du Kosovo, en 1999. C'est donc vraiment un bilan plutôt partagé.

    De toute évidence, quand il est question d'une grave crise internationale, il faut garder à l'esprit que les choses deviennent très difficiles dans certaines circonstances. C'est un facteur dont il faut tenir compte quand on s'arrête à ce que le public estime être le point de vue du Parlement. Si l'exécutif, en se fondant sur les données des services de renseignement et d'autres informations à sa disposition, en collaboration avec ses alliés, croit très fermement, et je dis cela sur une base tout à fait hypothétique, que le Canada doit participer à un conflit armé, et que cela doit faire l'objet d'un vote à la Chambre sans que tous les députés soient nécessairement au courant de toute l'information existante, nous pourrions avoir en bout de piste un message très contradictoire. Un tel message pourrait être envoyé aux personnes dont la collectivité internationale cherche à forcer la collaboration et la conformité, en rapport avec des résolutions de l'ONU, par exemple. Je crois que c'est un élément dont il faut tenir compte.

    Peut-être aurons-nous au cours des années à venir une plus grande jurisprudence parlementaire à ce sujet qui déterminera la voie qui satisfera à tous les besoins du Parlement de discuter de ces questions. Nous tenons ce soir un débat que je considère important, mais il y a d'autres facteurs que nous ne devons pas oublier.

  +-(2150)  

+-

    M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Madame la présidente, je trouve les propos du député intéressants. Son intervention était réfléchie, mais ce qui m'a frappé c'est à quel point elle était différente des autres interventions faites par des députés de son côté de la Chambre. Lorsque nous écoutons les députés de notre parti, nous reconnaissons des thèmes communs puisque nous avons les mêmes notes et séances d'information.

    J'aimerais que le député me dise si son caucus a tenu des discussions importantes au sujet de la guerre contre l'Irak. Les députés de son caucus ont-ils tous reçu la même information sur la guerre? Si c'est le cas, pourquoi son intervention ressemble-t-elle davantage à celle d'un député allianciste, le député doit prendre ça comme un compliment, que les autres interventions des députés de son côté de la Chambre?

+-

    M. David Pratt: Madame la présidente, le député a une drôle de façon de faire des compliments.

    Une chose est évidente de ce côté-ci de la Chambre, c'est la liberté de pensée que nous avons sur cette question. Nous pouvons exprimer nos points de vue. Voilà à quoi sert ce type de débat, et je crois que cela est extrêmement important.

    Il y a, quand on se tient avec le troupeau, une communauté de but et une homogénéité de position, mais en même temps il se peut que le débat ne jette pas une grande lumière intellectuelle sur le problème.

    Selon moi, un débat comme celui-ci est sain. Il est évident qu'il fournit aux députés l'occasion d'exprimer leurs points de vue et de se faire entendre. J'espère que les députés vont saisir cette occasion.

[Français]

+-

    M. Claude Bachand (Saint-Jean, BQ): Madame la présidente, d'abord, je trouve que le débat est très intéressant. Comme il y a de moins en moins de députés, je trouve que c'est aussi de plus en plus civilisé. Tout à l'heure, il y avait beaucoup de députés et la tension était forte. Je pense qu'il est important que chaque parti et chaque député puisse livrer le fond de sa pensée dans ce débat. C'est un débat important pour nous.

    Je veux d'abord commencer en faisant un peu d'histoire. Il me semble important de dire ce qu'est l'ONU. Depuis tout à l'heure, je pose des questions qui viennent appuyer l'ONU et ce n'est pas pour rien. Il faut se rappeler qu'au lendemain de la guerre, la communauté internationale s'est interrogée sur la façon de régler les litiges sur la planète Terre par le biais d'une coopération internationale.

    C'est important parce que lorsqu'on discute de problèmes fondamentaux à l'ONU et que la communauté internationale décide qu'il faut agir dans tel ou tel cas, cela met une pression terrible sur les gens qui font des choses de façon toute croche et sur les gens qui croient en la loi de la jungle.

    Avant l'ONU, c'était la loi de la jungle. Celui qui avait le plus d'armes ou celui qui était le plus fort était le lion le plus gros. C'est lui qui décidait et qui mangeait le terrain du voisin. Le problème s'accentuait et, finalement, lorsque la communauté internationale se rendait compte qu'il avait dépassé les limites et que c'était dangereux pour tout le monde, à ce moment-là, elle intervenait.

    La création de l'ONU est importante. Elle a la légitimité internationale pour régler des conflits. L'ONU est utile en ce qui concerne l'Irak.

    À mon avis, il y a un danger de laisser les superpuissances décider. Si elles se trompent, les conséquences sont terribles pour tout le reste de la planète. Il est donc important qu'on puisse passer par un forum international pour le règlement de problèmes comme celui auquel nous somme confrontés aujourd'hui.

    Je veux faire aussi un rappel historique sur ce qui nous a amené dans ce conflit avec l'Irak. Pourquoi l'Irak aujourd'hui? Il faut se rappeler qu'au lendemain de la guerre du Golfe, on avait mis sur pied tout un système d'inspection qui a duré jusqu'en 1998. Soudainement, le gouvernement irakien a dit qu'il ne pouvait plus tolérer la présence des inspecteurs sur son territoire et leur a demandé de partir.

    D'ailleurs, soit dit en passant, plusieurs inspecteurs avaient été accusés d'espionnage. La suite des choses a fait en sorte de démontrer que c'était vrai. Il y avait des espions parmi les observateurs américains ou internationaux. Ils espionnaient tout simplement l'Irak.

    Ce qui s'est passé, c'est que de 1998 à 2002, on n'a pas entendu les États-Unis dire qu'il faudrait peut-être retourner en Irak pour aller contrôler la situation. Pourquoi une période de silence de quatre ans de la part des États-Unis?

    C'est sûr que certains diront qu'il y a eu le 11 septembre. Effectivement, il y a eu le 11 septembre, et on s'est lancés à la poursuite de ben Laden. On ne l'a finalement jamais capturé et il est toujours en fuite.

    J'ai trouvé qu'à un certain moment, le président américain avait un peu l'air fou face à cette situation. Ils sont entrés en Afghanistan et n'ont jamais retrouvé ben Laden. À l'heure actuelle, on ne sait pas où il est rendu.

    Il me semble qu'il était facile pour les États-Unis de dire: «Il faut se trouver quelqu'un d'autre. Il faut avoir un nouvel ordre mondial et un nouvel ordre au Moyen-Orient.» C'est peut-être ce que les États-Unis se sont dit.

    Alors, le spectre de Saddam Hussein est ressorti. Pendant quatre ans, on ne s'en est pas préoccupé et, soudainement, en 2002, il fallait s'en occuper.

    Ce qui est arrivé, c'est que les États-Unis avaient l'air vraiment sérieux. À un point tel que la communauté internationale, justement par l'entremise de l'ONU, a dit: «On est mieux de s'en mêler et de discuter ensemble de ce qu'on fera avec le problème de l'Irak.»

    C'est ce qui est arrivé. L'ONU a commencé à en parler. De là, nous avons eu la résolution 1441. Il faut s'interroger à savoir si la résolution 1441 suffit actuellement pour justifier une intervention unilatérale des États-Unis.

    Selon nous, cela ne suffit pas. D'ailleurs, ce n'est pas pour rien que l'article 14 dit que l'ONU et le Conseil de sécurité restent saisis de la question

    Cela veut dire qu'ils veulent reconsidérer la situation. En anglais, on dit «revisit». Ils veulent regarder à nouveau s'il y a des preuves et, si c'est le cas, que fait-on maintenant? Agir de cette façon équivaut à donner une chance à la paix. Cela se retrouve à l'article 14.

    Entre-temps, les Américains nous arrivent avec une nouvelle doctrine internationale, soit la force préventive ou des frappes préventives.

  +-(2155)  

    C'est le retour à la loi de la jungle. C'est ne plus s'occuper de l'ONU. On justifie le fait que les États-Unis d'Amérique puissent dire que s'ils pensent que leur sécurité ou celle de leurs amis est en danger, ils se réservent le droit d'intervenir. Cela se fait forcément sans consulter l'ONU.

    Nous avons donc un problème à ce sujet. Si les États-Unis se permettent de laisser de côté ce qui se passe à l'ONU et faire leur propre justice, expliquez-moi ce qui peut maintenant empêcher le Pakistan d'aller attaquer l'Inde parce qu'ils vont dire: «Si les États-Unis le font avec l'Irak, nous aussi on peut le faire.»

    Qu'est-ce qui empêche la Corée du Nord d'attaquer la Corée du Sud, sur la base que la nouvelle doctrine internationale du droit international accepte des frappes préventives?

    Il y a un danger imminent avec ce type d'approche et nous, forcément, privilégions l'approche internationale. Cela n'empêche pas la souveraineté du Canada ou celle des États-Unis. En effet, si l'ONU annonce une deuxième résolution et se dit prête à passer à l'action armée pour régler le cas de l'Irak, chacun des pays qui compose le Conseil de sécurité va devoir retourner chercher un mandat de son peuple.

    Cela m'amène à mon deuxième point au sujet du vote. Un mandat du peuple, ce n'est pas juste le premier ministre et son conseil des ministres qui en décide. Depuis le début, nous disons que nous voulons qu'il y ait un vote lorsqu'on déploie des forces armées.

    Concernant Kyoto, on nous dit que c'est très important d'avoir un vote à la Chambre; sur le prochain projet de loi concernant le financement politique, on demande un vote de confiance à la Chambre. Alors pourquoi, lorsque c'est le moment de mobiliser l'armée et de l'envoyer dans un théâtre opérationnel dangereux, n'avons-nous pas ce type de débat à la Chambre?

    Je veux bien croire que nous avons des débats exploratoires, des débats de consultation. Mais lorsque c'est le temps de décider, nous ne sommes plus là. J'en veux pour preuve l'Afghanistan.

    La dernière fois, lorsque nous avons eu un débat exploratoire, les amarres des bateaux étaient larguées et ils étaient en route pour l'Afghanistan. Et nous, nous allions avoir un débat exploratoire. Voulez-vous me dire à quoi cela peut servir, une fois que les bateaux sont partis? On ne leur dira certainement pas de virer de bord et de revenir accoster.

    Il faut que le Parlement se prononce, il faut que les élus du peuple, les députés, se prononcent sur des questions aussi importantes que celle-ci.

    J'écoutais mon collègue, le député de Nepean—Carleton, qui disait plus tôt: «C'est mixte; des fois on l'a pris, des fois on ne l'a pas pris.»

    Lors de la guerre du Golfe, le Secrétaire d'État aux Affaires extérieures, l'actuel chef du Parti progressiste-conservateur, avait déposé une motion à la Chambre afin qu'il y ait un vote pour que le Canada participe à la guerre. La motion se lisait comme suit:

    Que la Chambre, constatant que le gouvernement de l'Irak n'a pas observé les résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies relatives à l'invasion du Koweït et à la détention de ressortissants de pays tiers, appuie les Nations Unies dans leurs efforts visant à assurer le respect de la résolution 660 et des résolutions subséquentes du Conseil de sécurité.

    Herb Gray, qui était dans l'opposition à l'époque—je peux prononcer son nom parce qu'il n'est plus ici—, avait déposé un amendement. Il disait que «cet appui ne devait pas être interprété comme une approbation de l'emploi des Forces armées canadiennes dans une action offensive, sans une consultation et l'appui ultérieur de la Chambre.»

    Il considérait donc que c'était important lorsqu'il était dans l'opposition. Il disait: «Les libéraux insistent sur le fait qu'avant de faire participer les Canadiens à toute offensive, la question devrait d'abord être présentée au Parlement et faire l'objet d'un vote.» Il voulait qu'on procède de la même façon que dans le cas de la Corée.

    Une voix: Qui a dit cela?

    M. Claude Bachand: C'était l'argumentation de Herb Gray.

    Aujourd'hui les libéraux arrivent au pouvoir et ce n'est plus important, on oublie cela. Vous comprendrez que nous ne sommes pas tout à fait d'accord et nous pensons que c'est important, aussi important que l'environnement et le financement des partis politiques.

    La décision d'envoyer des Québécois et des Canadiens en guerre exige non seulement une consultation, un débat exploratoire, mais il faut aussi qu'il y ait un débat officiel suivi d'un vote. C'est cela la voix des députés et je pense que c'est important dans une démocratie. Je pense également que le premier ministre ainsi que le Canada auraient beaucoup plus de légitimité

    Lorsque les Américains décident d'aller en guerre, je ne pense pas que le président puisse ignorer le Sénat américain, la Chambre des représentants. Il y a des débats et ils ont donné le mandat aux États-Unis avant les Fêtes.

    Ce n'est pas le cas ici. Jusqu'à maintenant, on nous dit qu'on ne tiendra pas compte du débat. Ce seront le premier ministre et le Conseil des ministres qui vont décider.

  +-(2200)  

    Quant à nous, il y a donc un problème majeur. Nous pensons qu'il est important que ces décisions majeures, qui concernent la jeune génération de Canadiens et de Québécois, passent d'abord par un vote à la Chambre.

    En résumé, en ce qui nous concerne, l'ONU est une instance importante qui ne porte atteinte à la souveraineté d'aucun pays. Je pense qu'un vote à la Chambre est très important. Si le premier ministre décide qu'il n'y aura pas de vote à la Chambre, c'est peut-être parce qu'il y a un problème dans son propre parti.

    Ce soir, on a entendu des versions bien différentes de la part des députés présents. Nous pensons qu'il est important que chacun des députés vote sur cette question.

  +-(2205)  

[Traduction]

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Madame la présidente, plus tôt ce soir, le chef du parti du député a convenu que, pour avoir tué des centaines de milliers de Kurdes irakiens, pour avoir ordonné l'assassinat de 60 000 chiites, pour avoir causé inutilement la mort des personnes les plus vulnérables de la société, des femmes, des enfants et des handicapés, et pour avoir poursuivi les tortures, les mutilations d'enfants avec de l'acide, Saddam Hussein devrait être traduit devant un tribunal international et accusé de crimes de guerre. Le chef du député en a convenu.

    Étant donné tout ce qu'il a dit aujourd'hui, je demande au député: comment Saddam Hussein devrait-il être appréhendé et traduit en justice?

[Français]

+-

    M. Claude Bachand: Madame la Présidente, il est bien évident que je vais dire la même chose que mon chef. Saddam Hussein n'est pas un saint. Il va sûrement devoir répondre de ses actes devant la communauté internationale. Si ce n'est pas au cours des semaines qui viennent, ce sera dans le futur. Le cas de Milosevic ne s'est pas non plus réglé du jour au lendemain. La communauté internationale, j'en conviens—des questions ont été posées sur le Kosovo par un autre député—, fut effectivement obligée d'intervenir en dehors du cadre de l'ONU parce que la Russie avait imposée son droit de veto. Je ne dis pas qu'il doit toujours en être ainsi. Si l'ONU n'est pas capable d'agir en tant qu'instrument international, il y aura sûrement un autre débat ici à la Chambre. On prendra peut-être d'autres décisions.

    Cependant, nous, du Bloc québécois, annonçons tout de suite que nous avons tellement confiance en l'ONU que, dans le cas de l'Irak, nous ne serions pas prêts à suivre les États-Unis dans un geste unilatéral qui ne tiendrait pas compte de l'ONU. On l'a déjà dit. Bien que tout à l'heure certains députés disaient qu'ils ne regardaient pas les sondages, nous les regardons d'un oeil discret. Il y a 62 p. 100 des Québécois et des Canadiens qui ne sont pas d'accord pour qu'on suive les Américains dans une guerre s'il n'y a pas eu une approbation de la part du Conseil de sécurité.

    Je pense donc que Saddam Hussein devra payer pour ses actes. L'histoire nous le dira, mais je suis certain que les livres vont considérer que Saddam Hussein est un tyran et un assassin. L'heure viendra où il sera soumis au jugement international.

[Traduction]

+-

    M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Madame la présidente, j'ai entendu le député dire dans son discours, à l'instar de beaucoup d'autres à la Chambre aujourd'hui, plus particulièrement des députés du gouvernement mais aussi des autres partis de l'opposition, que nous devrions donner plus de temps à Saddam Hussein. La question est de savoir combien de temps encore?

    La première résolution qu'avait acceptée Saddam Hussein, celle qui a amorcé ce processus depuis la guerre du Golfe, c'était la Résolution 687 du Conseil de sécurité des Nations Unies qui établissait les conditions du cessez-le-feu. Dans cette résolution qu'avait acceptée Saddam Hussein, il s'était engagé à remettre aux inspecteurs en désarmement toutes ses armes de destruction massive. Les inspecteurs n'avaient pas la responsabilité de les trouver, ce qui s'apparente à chercher une aiguille dans une botte de foin. Il incombait plutôt à Saddam Hussein de leur remettre les armes pour qu'ils puissent soit les détruire, soit en superviser la destruction.

    Les Nations Unies elles-mêmes avaient cité certains chiffres concernant ces armes peu après la guerre du Golfe. On avait parlé d'environ 30 000 ogives chimiques vides, de quelque 550 obus d'artillerie avec du gaz moutarde, de 400 armes biologiques, de 26 000 litres d'anthrax ainsi que du clostridium botulinum, du gaz neurotoxique VX, du sarin et ainsi de suite. C'est ce que les inspecteurs en désarmement des Nations Unies ont dit que Saddam Hussein possédait et dont il n'a pas rendu compte jusqu'à maintenant. Il a rendu très peu compte de ces produits jusqu'à maintenant et nous sommes 11 ans plus tard.

    Pas moins de 15 résolutions ont été adoptées à ce jour pour essayer de réparer une échappatoire qu'avait trouvée Saddam Hussein pour ne pas respecter l'accord de cessez-le-feu initial. Nous lui avons donné 11 ans.

    Les inspecteurs craignent qu'il ne continue à construire des armes de destruction massive. Nous savons qu'il les utiliserait parce qu'il l'a déjà fait contre des centaines de milliers de personnes et qu'il nous a menacés. Il est complice de douzaines de groupes terroristes qui ont dit très clairement qu'ils seraient tout à fait disposés à utiliser les armes contre des pays occidentaux, y compris le Canada.

    Je dois demander au député, en sachant tout ceci et en connaissant la véritable menace que Saddam Hussein et son régime font peser sur notre pays et d'autres pays occidentaux, combien de temps devrions-nous accorder à ce dictateur?

  +-(2210)  

[Français]

+-

    M. Claude Bachand: Madame la présidente, je remercie mon collègue de cette bonne question. Je ne dis pas combien de temps nous allons donner à Saddam Hussein. Je demande plutôt combien de temps nous allons donner au processus de paix pour arriver à compléter le dossier et faire en sorte de régler ce conflit sans que ce soit un conflit armé? C'est ainsi qu'il faut poser la question.

    J'ouvre ici une parenthèse. De 1998 à 2002, on n'a pas entendu les États-Unis insister pour le retour des observateurs. Ils n'ont pas dit: «On vient de les expulser. On va commencer à exercer des pressions pour que les observateurs retournent.» De 1998 à 2002, on n'en a pas entendu parler.

    Quant aux contacts avec les terroristes, on peut se poser la question à savoir s'il y en a effectivement avec eux. Je rappelle une citation du général Schwarzkopf. Il avait installé tous ses satellites. Je suis sûr qu'ils sont encore là actuellement. Je cite ce que disait le général:

[Traduction]

    «L'Irak ne peut pas cligner des yeux sans que nous le sachions.»

[Français]

    À mon avis, si les produits évoqués par le député étaient passés entre les mains des terroristes, les Américains interviendraient tout de suite. S'ils n'interviennent pas, c'est parce que cela ne se passe pas et qu'il y a une autre cause au conflit que les Américains veulent avoir. On en a parlé tout à l'heure. C'est peut-être le pétrole ou un vieux règlement de comptes.

    Chose certaine, la communauté internationale, par le biais de l'ONU, est justement là pour gérer cette crise. Ce n'est plus la loi de la jungle qui existe aujourd'hui, même si, à mon avis, les Américains veulent ramener la loi de la jungle. Ce sont les plus gros lions de la planète et ils vont manger les plus gros morceaux de la planète. Il est donc important que l'on reste sous l'égide de l'ONU. Donnons le temps à la paix de faire son oeuvre. Donnons toutes les chances à la paix et tout le temps nécessaire à la paix pour faire son oeuvre.

[Traduction]

+-

    Mme Sue Barnes (London-Ouest, Lib.): Madame la présidente, je me réjouis de participer ce soir au débat au nom de mes électeurs.

    Je n'ai jamais reçu autant de courriels, de lettres ni de fax que ces dernières semaines. Leur nombre a augmenté après certaines déclarations de mes collègues et, il y a quelques semaines, quand notre position est devenue un peu plus ambiguë. Je n'ai jamais senti rien de tel dans ma circonscription.

    C'est intéressant que d'autres députés rapportent que leurs électeurs leurs disent autre chose que ce que les miens me disent, car c'est la première fois que les électeurs qui communiquent avec moi me disent tous la même chose. C'est important, je crois. Et je suis d'accord avec eux que nous devrions attendre l'autorisation du seul processus multilatéral qui a fait ses preuves et dont nous faisons partie. C'est aujourd'hui la voix de la communauté internationale. C'est la voix du droit international que nous appuyons. C'est l'ONU.

    Il y a quelque chose qui nous est cher au Canada depuis l'époque de Pearson. Nous tenons à suivre la procédure établie. Ce n'est pas parce que nous pouvons aller en guerre que nous devons précipiter les choses. Il est inutile de précipiter les choses parce que le vent risque de tourner ou qu'il y a peut-être quelque chose là.

    Le premier ministre a dit qu'il nous fallait des preuves. Il l'a dit d'une très charmante façon. L'essentiel est qu'il nous faut des preuves. On en présentera peut-être la semaine prochaine à l'ONU. Nous n'avons pas des preuves suffisantes aujourd'hui. La situation est claire.

    Aucun de mes électeurs n'est assez naïf pour croire que nous ne devrions pas agir s'il existe des gaz et des armes de destruction massive, si la menace est imminente et si des gens d'un autre pays ne tiennent absolument aucun compte des voeux exprimés par l'ONU dans la résolution 1441, mais il ne devrait pas s'agir d'une action unilatérale. Il ne faudrait pas que ce soit seulement parce que nous avons des amis et des alliés et des intérêts économiques au sud de notre frontière. Cela ne suffit pas.

    L'idée d'une attaque préemptive nous est étrangère et devrait être étrangère à tous ceux dans le monde qui veulent la paix. Nous maintiendrons ce même principe au cours de ce siècle. Des attaques préemptives, quelle chose étrange! Je ne veux pas découvrir à quel point les bombes sont intelligentes de nos jours. Ce n'est pas important pour moi. Ce qui importe, c'est que les Canadiens puissent être représentés dans un Parlement; c'est aussi que je puisse regarder la télévision et voir des parlementaires en Angleterre et des gens manifester dans les rues dans le monde entier pour réclamer une application régulière de la loi et demander à ce qu'on ne s'empresse pas de se lancer en guerre. Il est important pour moi que nos alliés respectent le fait que nous avons dans ce pays une voix distincte.

    Je vis dans le sud-ouest de l'Ontario. La majeure partie des échanges bilatéraux entre nos deux grands pays se font par les ponts situés très près de ma ville. Je comprends les questions d'intégration économique, la nécessité pour nos pays de s'appuyer. Je peux comprendre que c'est une considération, mais ce n'est pas la seule.

    J'ai participé à une manifestation en faveur de la paix par une journée très froide, comme l'ont fait beaucoup d'autres Canadiens dans de nombreuses autres villes. Cette manifestation pour la paix était organisée par la collectivité musulmane. Il y a 30 000 musulmans canadiens vivant dans ma ville, London, en Ontario. Ils ont organisé cette manifestation avec des groupes multiconfessionnels. L'ancien évêque de l'Église catholique romaine est intervenu. L'Église unie, l'Église anglicane, la communauté juive et les fidèles de nombreuses autres religions ont manifesté ensemble. Il y avait là des membres d'organisations non gouvernementales et d'associations d'immigrants. Des gens originaires de l'Irak qui sont maintenant des Canadiens vivant dans ma ville sont intervenus. Il y avait des enfants, des jeunes, des vieux et des femmes. Tous ces gens ont parlé de la nécessité pour nous de prendre le temps de faire de la guerre le tout dernier recours.

  +-(2215)  

    Si les inspecteurs ont besoin de plus de temps, nous devrions leur en donner. S'il faut davantage d'inspecteurs, nous devrions prendre des mesures en ce sens. C'est certainement moins coûteux qu'une seule journée de guerre. Rien ne presse même si cela ne peut s'éterniser. Je suis de ceux qui disent que, si les Nations Unies ont malheureusement assez de preuves, nous devons prendre des mesures, et si mon gouvernement décide de prendre position en soutenant une action multilatérale sous l'égide des Nations Unies, alors je comprendrai.

    Certaines personnes de ma circonscription qui m'ont contactée au cours des dernières semaines sont allées plus loin que moi. Elles ne veulent pas de guerre même si les preuves sont là. Je ne partage pas ce point de vue. Je ne pense pas que ce soit responsable. Je crois qu'à titre de nation membre des Nations Unies, nous devons prendre notre place et faire notre part lorsque nous le pouvons.

    Lorsque j'étais jeune, mon père était dans les forces armées, dans l'ARC, et avant cela dans la RAF. J'ai vécu dans des bases militaires durant toute ma jeunesse. Je sais ce que cela veut dire lorsqu'un père ou un parent part en mission pour plusieurs mois. Je sais combien les membres de nos forces armées sont fiers et je sais qu'ils servent leur pays avec honneur, peu importe où ils sont envoyés. Là n'est pas la question. La question est de savoir comment, au cours du présent siècle, nous allons nous occuper de ces situations.

    À peu près à ce temps-ci l'an dernier je me suis rendue en Sierra Leone pour aider à former des femmes afin qu'elles soient candidates aux élections parlementaires. Nous avons pu constater les ravages de la guerre. Ce n'était pas une guerre faisant appel à une technologie de pointe. Je n'ose pas imaginer les dégâts causés par une guerre faisant appel à la haute technologie. Je sais que des erreurs humaines sont commises. Même lorsque nous utilisons des armes d'une efficacité incroyable telles que les missiles, des gens se font tuer. Je me souviens de notre ancien collègue, M. Axworthy, qui nous a rappelé les changements qui sont survenus au fil du temps et qui nous a dit ce qui se passe en temps de guerre. Auparavant, c'était des militaires qui étaient tués par milliers, tandis que maintenant ce sont plus souvent qu'autrement des civils.

    Je ne veux pas lancer la pierre aux États-Unis. Tel n'est pas le but de mon échange de vues avec mes collègues ce soir. Cela dit, les États-Unis semblent parfois parler de guerres de courte durée. La situation n'est pas réglée une fois que les bombes ont été larguées pour ceux dont l'économie est anéantie, dont les maisons sont détruites, dont les familles sont brisées et dont les gouvernements doivent composer avec un système parlementaire qui doit être rétabli sans transport ou sans eau potable.

    La situation persiste dans ce pays depuis de nombreuses années, soit depuis la dernière fois qu'il y a eu une guerre et que des sanctions économiques, concernant lesquelles nous avons donné notre accord, ont été imposées. Les gens souffrent encore et la situation perdure.

    Je suis ici ce soir pour ajouter ma voix à celles de mes électeurs, qui veulent qu'à titre de personne chargée de les représenter ici je dise à la Chambre qu'un bon processus est en place. Ce processus nous permettra d'obtenir la preuve nécessaire pour prendre une décision éclairée, et j'espère que c'est ce processus que notre pays va suivre.

  +-(2220)  

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Madame la présidente, je félicite la députée de s'être rangée du côté d'un grand nombre de ses électeurs et d'avoir parlé contre la possibilité d'une guerre contre les Irakiens, qui ont déjà souffert de façon tellement tragique à cause des sanctions économiques dont notre Parlement, par l'entremise du Comité des affaires étrangères, a recommandé la levée à l'unanimité.

    Je vois un des membres de ce comité qui avait joint sa voix à ceux qui ont lancé cet appel éloquent auquel son propre gouvernement n'a pas encore répondu.

    Je veux d'abord demander à la députée si elle appuie la position adoptée par son collègue, le président libéral du Comité de la défense, qui a dit que l'approbation des Nations Unies n'était pas nécessaire, que le Canada se joindrait à une coalition des pays prêts à intervenir sous la direction des États-Unis. Il a dit:

    Nous étions prêts à dire que, si les Nations Unies n'approuvaient pas une intervention militaire en Irak, nous n'irions pas. Je crois que ce serait se soustraire à une responsabilité nationale.

    C'est la position du président du Comité de la défense. Le ministre de la Défense a aussi adopté une position semblable à Washington. Par contre, le ministre des Affaires étrangères a une autre position. Quant au premier ministre, il a encore une autre position, mais elle n'est pas très claire.

    La députée pourrait-elle éclairer la Chambre et, par l'intermédiaire de la Chambre, les Canadiens, sur la position du gouvernement libéral sur cette question?

    Deuxièmement, et c'est très important parce que j'ai beaucoup de respect pour la députée, qui siège à la Chambre depuis déjà un certain temps, ne croit-elle pas que, sur une question aussi fondamentale, si des Canadiens sont en fait appelés à participer à une intervention militaire en vertu d'une résolution des Nations Unies ou autrement, chaque député devrait avoir le droit de voter, non pas de débattre simplement cette question fondamentale, mais bien de voter à ce sujet?

+-

    Mme Sue Barnes: Madame la présidente, le Parti libéral est comme une grande tente. Et c'est très heureux. C'est très heureux que nous soyons autorisés à nous exprimer en tant que parlementaires. Le fait que certains de mes collègues ne partagent pas mon opinion ne me dérange pas. Leurs électeurs leur font peut-être part d'opinions différentes.

    Ce qui me préoccupe, c'est qu'un processus est en place aux Nations Unies et si la résolution des Nations Unis est adoptée, quelle qu'elle soit, je la respecterais sans qu'il y ait un vote à la Chambre.

    C'est mon opinion personnelle. Je ne parle pas au nom du parti. Si nous étions confrontés à une situation où l'ONU n'avait pas sanctionné une action, mais que les États-Unis décidaient d'agir unilatéralement et qu'il y avait une débat visant à déterminer si le Canada devait participer à cette action, je préférerais alors qu'il y ait un vote à la Chambre.

  +-(2225)  

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, je crois bien paraphraser la députée d'en face en disant qu'elle a affirmé dans son intervention que l'ONU est la seule institution multilatérale qui fonctionne dans des situations comme celle dont il est question.

    Si c'est le cas, et elle pourrait peut-être indiquer si elle a eu son mot à dire à cet égard, comment peut-elle justifier l'appui que son parti a accordé à l'OTAN pour que l'organisation décide unilatéralement, sans tenir compte du Conseil de sécurité des Nations Unies, d'empêcher le gouvernement de la Serbie de procéder au nettoyage ethnique au Kosovo? À l'époque, a-t-elle appuyé cette décision unilatérale, non sanctionnée par l'ONU? Dans l'affirmative, serait-elle prête à reconnaître qu'il arrive parfois que l'ONU soit effectivement faillible, que les démocraties doivent parfois agir lorsque le processus de l'ONU ne fonctionne pas? Ne conviendrait-elle pas avec moi que l'inaction de l'ONU au Rwanda a montré que les Nations Unies ont parfois le tort de ne pas recourir à la force pour protéger des vies humaines?

    Je lui pose la question directement. Si l'ONU est toujours la seule institution multilatérale par l'intermédiaire de laquelle nous pouvons légitimement agir, alors pourquoi son gouvernement, apparemment avec l'appui de la députée, a-t-il appuyé l'action de l'OTAN au Kosovo et le largage de bombes sur le territoire irakien en 1998 qui n'avaient pas été autorisés expressément par le Conseil de sécurité des Nations Unies, mais qu'il s'agissait vraiment d'une action militaire «unilatérale» menée par les États-Unis et appuyée par le Canada?

+-

    Mme Sue Barnes: Madame la présidente, pour ce qui est de savoir si l'on devrait procéder ou non à des attaques préemptives, je réponds non, je ne suis pas d'accord pour que l'on ait recours à des interventions préemptives. Quant à savoir si cette organisation multilatérale est la seule à laquelle participe le Canada, à l'évidence, ce ne l'est pas. Mais, pour ce qui est de la résolution actuelle du Conseil de sécurité, il faut savoir que ce Conseil de sécurité est, pour l'instant, la seule instance habilitée à autoriser une intervention multilatérale. J'en suis convaincue.

    À certaines périodes de l'histoire, il y a eu des génocides de perpétrés. Les Nations Unies ont-elles jamais commis d'erreur dans le passé? Le député a dit quelque chose au sujet du Rwanda, si je ne m'abuse, et avec laquelle je serais d'accord.

    Une erreur ayant été effectivement commise dans le passé, doit-on en déduire que l'on devrait prendre les choses en mains et agir de manière unilatérale à un moment où toute action entraîne une réaction non seulement chez les voisins immédiats, mais aussi un peu partout dans le monde?

    On peut ergoter à souhait. Mais nous savons tous de quoi il retourne quand il est question de procéder à l'application régulière de la loi et de respecter le droit international établi. Ce n'est pas la même chose. Je n'ai pas besoin de voir des preuves quand j'assiste à un massacre, mais j'en ai besoin lorsqu'il s'agit de trouver des armes.

    Le fait est que nous avons le temps. Nous pouvons nous le permettre, Je ne comprends pas les députés qui s'empressent, pour des raisons que je ne m'explique pas, de sauter à la conclusion que la seule solution passe par une intervention militaire et non pas par le dialogue.

    Nous devons être prêts à mener une action forte, si cela s'avère nécessaire. C'est sans conteste. Mais ce n'est pas là l'action que je souhaite voir mon gouvernement mener dans ce cas.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Madame la présidente, je veux revenir sur une question très importante concernant le rôle de la Chambre et, plus particulièrement, celui des élus.

    Ai-je compris que, si le Conseil de sécurité des Nations Unies autorisait une intervention militaire contre l'Irak, la députée de London serait d'accord pour que le Canada y participe sans que la Chambre et les députés puissent se prononcer au nom de leurs électeurs sur cette question d'une importance fondamentale? Est-ce là ce qu'elle dit? Le cas échéant, comment diable peut-elle justifier cela?

    Elle pense peut-être qu'il est opportun d'envoyer des hommes et des femmes à la guerre après avoir examiné les preuves. C'est peut-être là sa position, mais chaque député a certainement le droit de se prononcer sur cette question au nom de ses électeurs.

    Je sais que la députée représente une circonscription où bien des gens se sont opposés à cela, notamment des membres des communautés arabe et musulmane du Canada.

    Pourquoi ce mépris envers le rôle du représentant élu? Pourquoi la députée n'est-elle pas en faveur d'un vote, même dans l'éventualité d'une intervention militaire autorisée par le Conseil de sécurité de l'ONU?

  +-(2230)  

+-

    Mme Sue Barnes: Madame la présidente, c'est tout simplement parce que, conformément aux lois de notre pays, le pouvoir exécutif a le droit d'agir ainsi dans pareille situation.

    Quant aux membres de la communauté musulmane de ma circonscription, ils ont joué un rôle par rapport à la résolution qui a été présentée à la population lors de notre manifestation en faveur de la paix, après les résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU.

+-

    Mme Cheryl Gallant (Renfrew—Nipissing—Pembroke, Alliance canadienne): Madame la présidente, si la députée reçoit un avis d'intention annonçant la perpétration d'une attaque au gaz ou autre contre la population de l'Amérique du Nord, à titre de députée, aurait-elle l'obligeance de partager cela avec les autres Canadiens, avant l'attaque?

+-

    Mme Sue Barnes: Madame la présidente, je répondrai très brièvement en disant que ce n'est pas une question valable.

+-

    M. Leon Benoit (Lakeland, Alliance canadienne): Madame la présidente, je suis ravi de participer à ce débat.

    Au fil des ans, le Canada s'est taillé une réputation mondiale et une fierté nationale en appuyant fermement la communauté internationale et nos alliés au titre de la défense de la paix et de la sécurité.

    Une menace d'intervention militaire crédible constitue une étape cruciale dans l'escalade de la pression diplomatique. C'est le seul genre de diplomatie que Saddam Hussein ait jamais comprise. En 1995, ce genre de menace l'a forcé à se retirer de la frontière du Koweït où il avait concentré des troupes pour attaquer de nouveau, à peine quatre ans après la fin de la guerre du Golfe. Seul le déploiement massif de troupes américaines l'a incité à se replier. L'an dernier, la menace d'une intervention armée l'a forcé à réadmettre les inspecteurs en désarmement. Aujourd'hui, la menace crédible d'une intervention militaire s'avère peut-être la dernière chance que nous avons d'éviter la guerre en Irak.

    La menace crédible d'une intervention armée constitue une option diplomatique que nous ne pouvons tout simplement nous permettre d'ignorer. Malheureusement, ce n'est pas un outil qui se trouve dans la boîte à outils diplomatique ou militaire du Canada. Le Canada ne peut pas contribuer dans une large mesure à un effort international pour désarmer l'Irak.

    Alors que nos alliés organisent une force internationale considérable en réponse à l'attitude récalcitrante de l'Irak, l'armée canadienne est à bout de souffle et reste en retrait. Le gouvernement a refusé à maintes et maintes reprises de donner des indications sur la contribution éventuelle des Forces canadiennes à l'effort pour désarmer Saddam Hussein. C'est vraisemblablement en partie parce que le gouvernement n'arrive pas à décider s'il veut participer à cet effort, mais c'est aussi parce que nos forces armées devront faire des pieds et des mains pour trouver de l'équipement et des soldats à envoyer, si la décision va dans ce sens.

    L'adaptabilité, le professionnalisme et la persévérance remarquables des hommes et des femmes qui servent dans nos forces armées ont donné de la crédibilité à la contribution militaire du Canada. Ce sont uniquement les actes et les efforts remarquables de nos militaires qui rendent les Forces canadiennes crédibles.

    L'état lamentable des Forces canadiennes est directement attribuable à une décennie de négligence de la part des libéraux. À titre de comparaison, pensons à ce que le Canada a contribué à la guerre en Irak en 1991, immédiatement avant que les libéraux prennent le pouvoir.

    Au total, 4 000 militaires canadiens ont servi en Irak et jusqu'à 2 500 se sont trouvés simultanément sur le théâtre d'opérations; il faut ajouter à cela un hôpital de campagne installé en Arabie saoudite et doté d'un personnel de 550 personnes. En outre, 2 000 militaires de plus, en poste au Canada et en Allemagne, ont assuré un appui direct à la guerre en Irak. Nous avons fourni 34 chasseurs CF-18, et jusqu'à 26 d'entre eux se sont trouvés en même temps sur le théâtre d'opérations, plus un Boeing 707 pour le ravitaillement en vol.

    La marine a fourni deux destroyers et un bâtiment ravitailleur, ainsi que six hélicoptères Sea King. Je rappelle à tous ceux qui écoutent que les hélicoptères Sea King avait douze ans de moins à l'époque. Il y avait même des pilotes plus vieux que leurs appareils, ce qui est impossible maintenant.

    Le Canada ne peut même pas envisager un engagement de la sorte aujourd'hui. Cette participation à la guerre du Golfe n'a pas eu d'impact sur l'issue du conflit, mais elle a suffi pour maintenir la crédibilité et la respectabilité du Canada à titre de nation engagée à travailler de concert avec la communauté internationale pour protéger la paix et la démocratie et faire respecter le droit international.

    En raison d'une décennie de négligence de la part du gouvernement, le Canada ne commande plus un tel respect. Toute contribution militaire que nous pouvons faire à l'effort international contre l'Irak aujourd'hui sera indirecte et minime d'un point de vue militaire, voire encore plus insignifiante du point de vue diplomatique, parce que nous ne jouissons plus de ce genre de respect.

    Je voudrais parler un peu de ce que le Canada pourrait faire sur le plan de l'effort militaire, soit en contribuant aux efforts de dissuasion, ce qui est le seul langage que semble comprendre Saddam Hussein, soit participer à la guerre si nous en venons là.

    En ce qui concerne l'aviation, nous pourrions fournir deux Aurora pour la surveillance et deux Hercules pour le transport tactique. Nous ne pouvons pas fournir autant de CF-18 que durant la guerre du Golfe et ils se limiteraient aux opérations de protection de la base d'opération. Comme ils ne sont pas équipés d'un système de communications compatible avec celui de nos alliés, ils ne pourraient pas être utilisés dans un rôle de combat. Il nous faudrait d'ailleurs recourir aux capacités américaines d'avitaillement en carburant en vol uniquement pour que nos CF-18 se rendent jusqu'en Irak. Tel est le triste état de nos forces actuellement.

  +-(2235)  

    La marine dispose de quatre ou cinq navires. Trois d'entre eux sont dans la région maintenant.

    Nous n'avons pas assez d'équipages pour faire voler nos Sea King. En ce moment même, nous avons des frégates qui n'ont pas d'hélicoptères à leur bord parce qu'il manque d'hommes d'équipage ou que les hélicoptères sont en réparation ou en révision.

    En ce qui a trait à l'armée, notre contribution serait sans doute semblable à celle que nous avons faite durant la guerre en Afghanistan, soit 800 soldats, y compris des membres de la FOI2 et de l'infanterie légère.

    Comparaissant devant un comité avant Noël, le chef de l'armée de terre, le général Jeffery, a dit que nous pourrions fournir 300 soldats si c'était absolument nécessaire, mais il a ajouté qu'il y aura un prix incroyable à payer. Il faudra y penser à deux fois parce qu'il y a un prix à payer.

    D'abord, une contribution aussi importante que celle évoquée ici dans l'une ou l'autre des armes serait extrêmement difficile pour nos effectifs et leurs familles. Ils ont déjà été déployés de façon excessive, au point que les problèmes familiaux sont plus nombreux que jamais. Beaucoup de nos soldats de métier, bien entraînés, ne veulent tout simplement plus rester dans l'armée, dans ces circonstances, et beaucoup souffrent du stress des opérations et de blessures. On ne saurait avoir un programme si chargé année après année.

    Deuxièmement, l'engagement dont j'ai parlé pour l'armée est tout à fait hypothétique, car nous n'avons pas la capacité de transport aérien stratégique pour amener nos troupes et leur équipement sur place.

    Ainsi, au moment des inondations du Manitoba et de la tempête de verglas dans la région d'Ottawa et au Québec, nous avons dû faire appel aux États-Unis pour transporter nos troupes et leur équipement afin d'aider les sinistrés. En Afghanistan, nous avons réussi à emprunter et quémander à nos alliés une capacité de transport stratégique pour nous rendre là-bas.

    Toutefois, étant donnée l'ampleur de l'engagement dans la région de l'Irak, nous ne pouvons vraiment pas compter obtenir de nos amis et voisins la capacité de transport stratégique pour emmener nos troupes là-bas. Il est fort douteux que nous puissions trouver un moyen de transporter nos troupes et notre équipement sur le terrain. Nous n'avons pas non plus de capacité de transport maritime. Le Canada ne peut accepter qu'un engagement bien plus modeste que ce dont il était capable par le passé, même lorsque le gouvernement est arrivé au pouvoir, il y a près de dix ans.

    Je résume. Nous avons besoin d'une capacité militaire comme moyen de dissuasion, car la seule chose que Saddam Hussein comprenne, c'est la menace de la force, une menace très réelle de recours à la force. Je voudrais aussi résumer en quoi consistent les dangers. Bien des députés ont remis en question ce soir la gravité des menaces auxquelles nous faisons tous face. Beaucoup ont demandé quelle menace pesait sur le Canada. Je voudrais donc faire un rappel.

    D'abord, l'accumulation par Saddam d'armes de destruction massive fait planer une grave menace sur la paix et la sécurité internationales. Saddam pourrait utiliser ces armes pour répandre la terreur ou les transférer à des alliés terroristes, et il compte bon nombre d'alliés parmi les groupes terroristes. Nous en avons vu une liste. Les inspecteurs en désarmement et d'autres ont établi des listes de groupes qui sont disposés à travailler avec Saddam Hussein. Nous savons donc que cette menace est très réelle.

    En ce qui concerne les armes de destruction massive, le régime irakien a conçu des armes de destruction massive, défiant ainsi de nombreuses résolutions du Conseil de sécurité de l'ONU, et je l'ai déjà mentionné. Il a fait fi de 15 résolutions. La résolution 1441 est la plus récente. Les inspecteurs en désarmement ont dit clairement que le régime irakien ne respectait tout simplement pas ces résolutions.

    Ainsi, la majeure partie de toutes ces armes de destruction massive, les quelque 30 000 ogives chimiques, les 550 obus d'artillerie remplis de gaz moutarde--ce ne sont pas des armes inoffensives—les 400 armes biologiques, les 26 000 litres d'anthrax, ainsi que le botulisme, l'agent VX neurotoxique et le sarin, des armes mortelles de destruction massive, n'ont pas été retrouvées.

    Une résolution de l'ONU a décrété le cessez-le-feu. Il n'y a pas eu d'armistice pour mettre fin à la guerre de Golfe, il y a eu un cessez-le-feu. Nous fonctionnons toujours sous un cessez-le-feu et Saddam Hussein a accepté les conditions de ce cessez-le-feu. Il a accepté de remettre toutes les armes de destruction massive aux inspecteurs en désarmement de l'ONU. Les Nations Unies et les inspecteurs disent très clairement qu'il n'a pas respecté les résolutions.

  +-(2240)  

    Quelle autre preuve nous faut-il pour dire que la menace est très réelle et existe toujours? Quel dictateur de la trempe de Saddam Hussein a déjà agi ainsi dans le secret? Combien de députés à la Chambre sont vraiment disposés à le croire quand il dit que l'Irak a détruit ses armes de destruction massive? À mon avis, aucun. J'espère qu'après avoir clairement réfléchi à cette situation, personne ne le croit.

+-

    L'hon. Gar Knutson (secrétaire d'État (Europe centrale et orientale et Moyen-Orient), Lib.): Madame la présidente, je comprends la position adoptée par l'Alliance canadienne. Elle n'est pas déraisonnable, mais elle ne correspond pas à la position adoptée par le gouvernement.

    Le Canada devrait s'engager à faire partie de la coalition afin d'accroître l'importance de la force alliée contre Saddam Hussein et d'accroître par le fait même la probabilité qu'il respecte la demande de désarmement que les Nations Unies lui ont transmise.

    Peut-on en arriver à un point où un important regroupement de forces pourrait avoir un effet contraire et transmettre à Saddam Hussein le message que la décision a déjà été prise d'aller de l'avant? Si Saddam Hussein était un homme rationnel et qu'il croyait que la décision d'intervenir a déjà été prise et que la guerre est inévitable, cela pourrait-il donner l'effet contraire? S'il avait des armes de destruction massive et s'il croyait que la décision d'intervenir était déjà prise, pourrait-il décider de les garder pour s'en servir au cours de la guerre plutôt que de les remettre?

+-

    M. Leon Benoit: Madame la présidente, il m'est impossible de connaître les pensées d'une personne aussi imprévisible que Saddam Hussein. Je suis tout simplement incapable de faire cela. Je sais toutefois que la seule chose qui a fait bouger Saddam Hussein dans le passé a été une importante démonstration de force chez lui. C'est la seule chose qui l'ait fait bouger.

    En 1995, quatre petites années après la fin de la guerre du Golfe, Saddam Hussein rassemblait des troupes pour envahir le Koweit. Qu'est-ce qui l'a arrêté? La seule chose qui l'a arrêté fut un déploiement important de forces militaires à la frontière par les États-Unis.

    L'an dernier, qu'est-ce qui a incité Saddam Hussein à laisser entrer les inspecteurs en désarmement armes de l'ONU? C'est le rassemblement d'un grand nombre de soldats à proximité de chez lui par les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Australie et toute une série d'autres pays. Ce genre de démonstration de force est notre seul espoir de régler cette situation sans aller en guerre.

    Combien de temps pouvons-nous attendre pour savoir ce qu'il va faire? En Corée du Nord nous avons attendu trop longtemps. La politique d'apaisement appliquée autour de 1994 en Corée du Nord a permis à ce pays de mettre au point des armes nucléaires. Nous sommes maintenant confrontés à une situation extrêmement difficile dans ce pays. Si nous n'avions pas suivi cette politique d'apaisement à l'époque, si nous avions forcé la Corée du Nord à se conformer, nous ne serions pas maintenant confrontés à ce genre de menace nucléaire.

    Je ne veux pas que l'on attende qu'une situation semblable se produise en Irak. Je ne veux certainement pas que les Canadiens, les Américains, les Britanniques ou toute autre nation, y compris le peuple irakien, aient à faire face à des armes de destruction massive.

  +-(2245)  

+-

    Mme Colleen Beaumier (secrétaire parlementaire de la ministre du Revenu national, Lib.): Madame la présidente, je voudrais tirer les choses au clair. Le député a dit que l'on a attendu trop longtemps avec le Corée du Nord. Laisse-t-il entendre qu'on aurait dû attaquer la Corée du Nord ou la Chine, ou pourchasser Mugabe? A-t-on une liste de ces tyrans qui disposent peut-être d'armes de destruction massive et doit-on s'en prendre systématiquement à chacun d'entre eux, ou plutôt choisir nos cibles? Je ne comprends pas.

+-

    M. Leon Benoit: Madame la présidente, j'ai entendu ce commentaire bien des fois. Évidemment, chaque situation est différente. Celle de la Corée du Nord est bien différente de celle de l'Irak sous certains rapports.

    Ce n'est que tout récemment que le monde occidental a appris les progrès accomplis par le Corée du Nord dans la fabrication d'armes atomiques. On espère toujours que la négociation portera fruit dans ce dossier. Mais on a commis une faute énorme en 1994 en laissant à ce genre de pays, et au régime qui le dirigeait, la capacité de fabriquer des armes nucléaires.

    La situation que l'on connaît actuellement ne se serait jamais produite si un groupe de pays s'était engagé à prendre des mesures contre la Corée du Nord en cas de violation des accords qu'elle avait signés et où elle s'engageait à ne pas fabriquer d'armes nucléaires. Malheureusement, nous avons observé une politique de conciliation, qui nous a conduits à la situation extrêmement difficile que nous connaissons actuellement. Mais il s'agit d'un problème différent de celui que pose l'Irak.

+-

    L'hon. Gar Knutson: Madame la présidente, le député a parlé d'une politique de conciliation. Je ne crois vraiment pas que quelqu'un puisse prétendre que la politique observée à l'égard de l'Irak ces jours-ci en soit une de conciliation. Des inspecteurs de l'ONU sont à l'oeuvre dans ce pays et ils font leur boulot.

    J'ai une question relativement précise pour le député : si M. Blix, dans le rapport qu'il doit déposer le 14 février, dit que les inspecteurs ont besoin de plus de temps, le député croit-il qu'une intervention militaire serait de mise à ce moment-là?

+-

    M. Leon Benoit: Madame la présidente, c'est une bonne question. Je crois qu'il ne faut pas oublier qu'il incombait, et qu'il incombe toujours, à Saddam Hussein de remettre ces armes de destruction massives aux inspecteurs des Nations Unies.

    Nous avons maintenant 15 résolutions parce qu'aucune mesure n'a été prise. C'est parce que nous avons suivi une politique d'apaisement que nous sommes dans une situation extrêmement délicate. Nous n'en serions pas là si les pays avaient fait front commun et s'étaient montrés sérieux quant à l'application des résolutions des Nations Unies.

    Non seulement sommes-nous devant la possibilité réelle d'une guerre contre l'Irak, mais il est fort possible, et je le déplore, que les Nations Unies perdent leur pertinence comme rempart de la sécurité dans le monde.

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Madame la présidente, le député a laissé entendre qu'il n'était pas trop tard pour trouver une solution au problème que pose la Corée du Nord. Il n'a pas dit comment, mais je suppose qu'il pense aux voies diplomatiques ou à une intervention autre que militaire. Si les voies diplomatiques échouaient, le député croit-il qu'il y aurait une guerre contre la Corée du Nord?

  +-(2250)  

+-

    M. Leon Benoit: Madame la présidente, je ne crois pas qu'il y aura une guerre contre l'Irak non plus. J'espère que les bruits de bottes à la porte de Saddam Hussein seront assez impressionnants pour empêcher la guerre contre l'Irak. C'est d'ailleurs l'objet du débat de ce soir.

+-

    Mme Colleen Beaumier (secrétaire parlementaire de la ministre du Revenu national, Lib.): Madame la présidente, je suis encouragée par la position du premier ministre et du ministre des Affaires étrangères, par le fait qu'ils ont adopté une position ferme à l'égard de l'Irak et qu'ils continuent de réclamer une solution multilatérale à la crise. Cependant, je les encouragerais à prendre une attitude plus proactive dans la recherche d'une solution pacifique négociée en Irak.

    Le Canada tient à faire respecter la résolution 1441 du Conseil de sécurité des Nations Unies et à désarmer le régime irakien. De plus, le Canada et la communauté internationale sont déterminés à faire régner la paix et la sécurité dans le monde. Cependant, comme l'Irak ne pose pas une menace imminente pour le Proche-Orient ou pour les États-Unis, on doit chercher d'autres raisons si la chasse à l'axe du mal qui motive cet appel aux armes est la détermination des Américains à assurer leur suprématie dans cette région. Ou cette guerre ne viserait-elle pas à prendre le contrôle de réserves pétrolières qui se classent au deuxième rang en importance dans le monde?

    Au départ, l'appel aux armes des États-Unis était fondé sur la nécessité d'un changement de régime. Puis, il a été axé surtout sur le désarmement et l'élimination des armes de destruction massive. Encore une fois, les États-Unis parlent d'un changement de régime au moyen d'une intervention militaire préemptive pour faire tomber Saddam Hussein. Où est la nécessité de se défendre?

    Une intervention préventive en l'absence d'une menace imminente est illégale. La guerre contre l'Irak, qui semble maintenant inévitable, n'est pas basée sur des faits établis, mais sur des suppositions; des suppositions au sujet d'événements qui pourraient se produire ou ne pas se produire; des suppositions quant à ce que l'Irak pourrait faire ou ne pas faire. La crainte de ce qui risque d'arriver n'est pas une raison suffisante pour déclarer la guerre. Le discours guerrier est maintenant passé de ce qui risque d'arriver à la notion que l'Amérique est menacée ou que la stabilité mondiale est en jeu. C'est une illusion.

    Premièrement, une intervention militaire en Irak ne serait pas une guerre défensive. Une attaque contre l'Irak serait préventive et basée sur des suppositions. Il n'y a pas de précédent à cela dans le droit international.

    Deuxièmement, la tyrannie qu'exerce Saddam Hussein sur son propre peuple ne peut être une raison suffisante pour faire la guerre. Nous devons chercher d'autres options. La nature même de la société internationale, ainsi que du droit et des normes internationales, est en jeu. C'est le processus qui est important, et il est menacé par une guerre préventive menée par les États-Unis.

    Je me permets de dire que l'on ne peut contraindre l'Irak à adopter un régime démocratique en bombardant ce pays. La démocratie ne s'impose pas, mais se développe au fil des décennies, comme elle l'a fait en Occident.

    Les États-Unis n'ont pas caché leurs intentions. S'il y a conflit, ils prendront le contrôle de l'Irak en tant que gardiens de ce pays. Une nouvelle forme de colonialisme n'intéresse ni le Canada ni les Canadiens. Nous ne voulons pas retourner à l'époque de l'impérialisme, époque où les rois étaient installés et les régimes renversés sans rime ni raison.

    Le rôle du Canada est, et a toujours été, de créer un environnement favorable à la démocratie. En tant que Canadiens, notre espoir est que la démocratie fleurira un jour en Irak. Cela ne sera pas le résultat d'une campagne de bombardements.

    L'Irak est un pays extrêmement divisé. Il n'y a pas d'alternative politique viable en vue et l'opposition interne a été férocement réprimée. L'Irak est aussi un pays en ruine. Les tentatives en vue de forcer Saddam Hussein à modifier son régime en lui imposant des sanctions et la dernière guerre ont coûté un million de vies irakiennes. Les civils irakiens et l'infrastructure de ce pays, y compris les routes, les ponts et les chemins de fer sont à bout. Les systèmes de purification d'eau, de traitement des égouts, le réseau électrique et l'industrie pétrolière sont dans un état lamentable. L'eau et le sol ont été contaminés par l'uranium appauvri utilisé pendant la guerre du Golfe. Ce qui fut jadis une économie civile indépendante n'est plus.

    Une guerre contre l'Irak entraînerait des souffrances supplémentaires pour le peuple irakien. Une invasion militaire pourrait causer jusqu'à 500 000 morts et déplacer 900 000 personnes qu'il faudrait nourrir et loger. Les hôpitaux irakiens ne peuvent recevoir d'autres blessés. C'est réellement une grave crise humanitaire.

  +-(2255)  

    J'ai vu de mes yeux la destruction de l'Irak. Certains m'ont reproché d'être allée récemment en Irak. Je tiens à bien préciser que ce n'est pas parce que je m'oppose à cette guerre que je défends le régime irakien. Je sais pertinemment que ce régime totalitaire a commis des atrocités. Je connais le contexte historique: la guerre Iran-Irak, les attaques chimiques contres les Kurdes, et l'invasion du Koweït. Je ne défends pas le régime. Je sympathise avec le peuple irakien, qui continue de subir le contrecoup des sanctions onusiennes. Un million de personnes, dont près de 600 000 enfants, ont été tuées par suite de ces sanctions. L'UNICEF estime que de 5 000 à 6 000 enfants meurent chaque mois en Irak. C'est inacceptable et c'est pour cela que le directeur du Programme alimentaire mondial de l'ONU en Irak et le coordonnateur des affaires humanitaires de l'ONU ont démissionné en février 2000. C'est aussi pour cela que l'ancien coordonnateur des affaires humanitaires de l'ONU en Irak, M. Halliday, a démissionné en 1998; pour protester contre les sanctions. Je l'ai déjà dit et je le répète: une guerre en Irak serait une guerre non provoquée contre des enfants.

    Cette opinion se reflète dans les milliers de lettres que j'ai reçues de Canadiens de Whitehorse à la Nouvelle-Écosse. Des mouvements sociaux, des organisations de défense des droits humains et des organisations de la société civile s'opposent en bloc à cette guerre. Les Canadiens ont bien précisé qu'ils ne veulent pas d'une guerre contre l'Irak.

    Comme l'a dit le ministre des Affaires étrangères, le Canada cherche une solution pacifique à la crise irakienne. Le Canada doit continuer à chercher cette solution pacifique par l'intermédiaire des Nations Unies. Nous devons nous opposer à cette guerre avec la communauté internationale. Il faut cesser de faire des menaces de guerre et entamer de véritables pourparlers de paix.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, je ne mets pas en doute le fait que cette question préoccupe la députée, mais je dois, au nom de nombreux Canadiens, mettre en doute la justesse de son jugement, tant en raison des propos qu'elle a tenus ce soir qu'à cause du voyage qu'elle a malheureusement fait récemment à Bagdad, voyage au cours duquel elle a apparemment rencontré des hauts fonctionnaires d'un des régimes les plus tyranniques du monde. Ce n'est pas là mon opinion sectaire. C'est la position adoptée par toutes les organisations de défense des droits de la personne du monde entier qui ont condamné le régime de Saddam Hussein comme étant l'un des plus tyranniques.

    La députée ne comprend vraiment pas la situation. Elle aurait peut-être dû écouter son collègue, le député de Nepean—Carleton, qui a cité les paroles de Winston Churchill au sujet de la confusion morale créée par les tenants de la conciliation.

    La députée aurait déclaré avoir reçu de hauts fonctionnaires de l'Irak des garanties selon lesquelles le régime irakien allait améliorer son dossier en matière de droits de la personne et revoir ses lois ainsi que son recours fréquent à la peine capitale. La députée pourrait-elle nous dire si elle a soulevé le cas des femmes qui ont été décapitées sur la place publique récemment en Irak à la suite d'accusations non prouvées de prostitution? A-t-elle soulevé la violence dont sont systématiquement victimes les femmes et les enfants de dissidents? A-t-elle parlé des enfants que des responsables des services secrets irakiens ont torturés devant leurs parents afin de soutirer des renseignements à ces derniers? La députée a-t-elle soulevée l'une ou l'autre de ces questions?

    En outre, la députée se dit terriblement préoccupée par le respect du droit international et opposée à toute intervention préemptive. Ne sait-elle pas que, dans ce conflit, c'est le régime irakien qui a enfreint le droit international? Quand elle parle d'interventions préemptives, ne sait-elle pas que les actions militaires envisagées pour faire respecter la résolution 1441 et les 15 autres résolutions qui l'ont précédée et que le Conseil de sécurité des Nations Unies a prises seraient en fait la poursuite des hostilités suspendues par un accord de cessez-le-feu arrêté en 1991, auquel le gouvernement de l'Irak a adhéré et en vertu duquel il s'est engagé à procéder à son propre désarmement total sous la supervision des Nations Unies? En d'autres mots, ne voit-elle pas que, du point de vue juridique, la guerre du Golfe de 1990 n'est pas achevée? On n'a pas signé de traité de paix. Ce n'est qu'un cessez-le-feu. C'est Saddam Hussein qui a amorcé ce conflit. La députée ne comprend-elle pas que ce tyran a fait fi de toutes les conventions relatives aux droits de l'homme ainsi que du droit international en passant outre à 16 résolutions adoptées par le Conseil de sécurité des Nations Unies? Comment peut-elle affirmer que des alliés du Canada, démocratiquement responsables, contreviennent au droit international alors que c'est en fait ce même droit international qu'ils cherchent à faire primer? Si elle se soucie à ce point du droit international, pourquoi ne soutient-elle pas les efforts visant à faire respecter la résolution 1441 du Conseil de sécurité?

    Enfin, si elle est défavorable à l'imposition de sanctions et au recours à la force pour assurer le respect de ces résolutions, que propose-t-elle en échange? Un plus grand nombre de missions de paix, pour discuter avec les larbins de Saddam Hussein à Bagdad? Est-ce ainsi, d'après elle, que l'on amènera le régime irakien à se conformer au droit international?

  +-(2300)  

+-

    Mme Colleen Beaumier: Madame la présidente, je ne crois pas que le ton condescendant de ces nombreuses questions soit passé inaperçu.

    Étant donné le grand nombre de questions, je vais m'en tenir à une seule, soit ma mission à Baghdad, ou mon voyage ou quel que soit le nom que veut bien lui donner mon collègue.

    J'ai entendu les critiques. En fait, je crois qu'on m'a appelé Hanoi Jane.

    Une voix: Bagdad Beaumier.

    Mme Colleen Beaumier: Baghdad Beaumier, Hanoi Jane, et je sais que le député est jeune et qu'il ne peut se souvenir que de quelques faits historiques. On se souviendra toutefois que Hanoi Jane avait absolument raison : le gouvernement des États-Unis et le dirigeant de la guerre au Vietnam ont reconnu que la guerre avait été une erreur, et le Canada n'a pas participé à cette guerre.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Madame la présidente, j'aimerais tirer un point au clair au sujet de la position de la députée. Elle a déclaré catégoriquement qu'il ne s'agissait pas de faire la guerre au peuple irakien. Elle a parlé avec éloquence de l'impact que les sanctions économiques avaient déjà eu sur les Irakiens. Comme moi, elle a visité un hôpital à Bagdad et elle a vu les enfants émaciés et tout le reste. Elle sait qu'il y aurait des centaines de milliers d'innocents irakiens qui seraient tués. Personne ne sait si Saddam Hussein figurerait parmi les victimes. Il y a eu une guerre en Afghanistan et Oussama ben Laden est toujours en liberté. Personne ne sait où il se cache. Nous savons qu'une des horreurs de cette guerre a été la mort de milliers de civils innocents. Personne n'en parle. C'est comme si leur vie ne valait rien.

    Ma question s'adresse à la députée de Mississauga. J'aimerais savoir quelle est sa position à l'égard d'une éventuelle résolution des Nations Unies appuyant une intervention militaire. Nous nous rappelons ce qui s'est produit lors de la guerre du Golfe. Personnellement, je m'en souviens très clairement. En 1991, deux pays avaient voté contre cette guerre. L'un d'eux était Cuba. L'autre était le Yémen, qui s'était prononcé contre au Conseil de sécurité. Je me rappelle très bien que l'ambassadeur américain s'était tourné vers l'ambassadeur yéménite et lui avait dit «Aucun vote ne vous aura jamais coûté aussi cher». Le lendemain, les États-Unis ont entièrement retiré l'aide de 72 millions de dollars qu'ils avaient consentie au Yémen.

    L'ambassadeur de l'île Maurice, un autre pays qui siège maintenant au Conseil de sécurité, a eu l'audace de remettre en question la possibilité d'une frappe militaire contre l'Irak. Il a été rappelé par son gouvernement qui lui a fait savoir que, s'il ne se taisait pas, les États-Unis allaient retirer l'aide consentie à l'île Maurice.

    Voilà le genre de pression et d'intimidation que l'on voit au Conseil de sécurité. Si cela réussit et si le Conseil de sécurité appuie une résolution, mon parti, je suis très fier de le dire, et notre chef Jack Layton, ont déclaré que nous n'allions pas appuyer la guerre et que le Canada devrait jouer un rôle différent.

    Quelle est la position de la députée dans les circonstances? Partage-t-elle l'avis de milliers de ses électeurs qui rejettent l'idée d'une frappe contre le peuple irakien ou appuie-t-elle la position de la députée de London qui a déclaré plus tôt qu'en pareil cas, il n'y aurait pas de vote et que nous devrions aller à la guerre?

  +-(2305)  

+-

    Mme Colleen Beaumier: Madame la présidente, je remercie le député de sa question. Je crois qu'il essaie de définir les enjeux.

    Cependant, nous sommes allés au Kosovo en ayant l'assurance qu'il y avait là-bas des charniers. Or, ce n'était pas vrai. À moins que nous ne puissions montrer de façon concluante que non seulement Saddam Hussein possède des armes de destruction massive, mais aussi qu'il est sur le point de les utiliser ou s'apprête à attaquer un autre pays souverain, je voterai non.

+-

    M. Jason Kenney: Madame la présidente, je tiens à féliciter mes collègues du NPD de leur cohérence. En effet, leur chef adopte la même position que le chef du CCF qui, en 1939, a voté contre le déclenchement de la guerre contre l'Allemagne.

    Je vais circonscrire le sujet et adresser à ma collègue une question très claire. Si elle s'oppose aux sanctions de l'ONU contre l'Irak, si elle souhaite la levée des sanctions et si elle s'oppose à tout recours hypothétique à la force, même avec l'aval de l'ONU, quels moyens propose-t-elle à la communauté internationale pour obliger le régime irakien à respecter ses obligations et le droit international qu'elle respecte tant?

+-

    Mme Colleen Beaumier: Madame la présidente, il s'agit d'hypothèses. Je voudrais qu'on me démontre au-delà de tout doute que Saddam Hussein possède les armes de destruction massive dont le député parle sans cesse.

    Il est vrai que je m'oppose aux sanctions économiques contre l'Irak, mais le Comité permanent des affaires étrangères, composé de membres de tous les partis, y compris l'Alliance canadienne, a voté à l'unanimité pour l'élimination du lien avec les sanctions contre l'Irak.

    Qu'est-ce que je propose? Nous devons poursuivre les observations en Irak. Nous devons aider les habitants de ce pays à rebâtir leur société et donner à la population les moyens de renverser le régime de l'intérieur. Le changement doit venir de l'intérieur. Imposé de l'extérieur, il ne sera pas durable.

+-

    M. Svend Robinson: Madame la présidente, la députée ne convient-elle pas qu'il devrait y avoir un vote à la Chambre avant que les Forces canadiennes soient envoyées au combat?

+-

    Mme Colleen Beaumier: Oui, madame la présidente.

+-

    M. Svend Robinson (Burnaby—Douglas, NPD): Madame la présidente, c'est avec un sentiment de futilité, de désespoir, de colère et d'angoisse que je prends part au débat de ce soir. Je suis très heureux de pouvoir suivre le cours du débat et, notamment, écouter les éloquentes observations de ma collègue, la députée de Halifax, et de notre porte-parole pour le Proche-Orient, qui a pris la parole plus tôt durant la soirée au nom de mes collègues néo-démocrates.

    Pourquoi ai-je parlé de futilité, de colère et de désespoir? Essentiellement pour deux raisons. D'abord, c'est parce qu'il faut se demander à quoi servent ces débats. J'ai pris part à nombre de débats exploratoires au fil des ans. Je trouve absolument incroyable que nous ne puissions convaincre le gouvernement qu'il a l'obligation envers la population qu'il dit représenter de laisser les gens exercer leur droit de vote sur la question des plus fondamentales de savoir si nos gens iront à la guerre.

    J'ai posé la question à trois ou quatre députés libéraux, et j'ai reçu trois ou quatre réponses différentes quant à savoir si la Chambre devrait se prononcer là-dessus.

    Je tiens à dire clairement, au nom de mes collègues du Nouveau Parti démocratique, qu'au lieu de tenir un débat exploratoire, qui n'est rien d'autre qu'une mascarade, nous devrions pouvoir nous exprimer et voter au nom des personnes que nous avons l'honneur de représenter dans le cadre de ce débat.

    En 1990 et 1991, lorsque les libéraux siégeaient dans l'opposition, Lloyd Axworthy était le porte-parole libéral en matière d'affaires étrangères. Lui et moi avions demandé d'une seule voix aux conservateurs de permettre la tenue d'un vote, ce qu'ils ont eu le mérite de faire. Il y avait eu un vote. Qu'est-ce qui a changé depuis l'époque où les libéraux siégeaient dans l'opposition en 1990?

    L'autre point qu'il convient de signaler, et le nouveau chef de mon parti, M. Jack Layton, l'a souligné avec éloquence, est que nous n'avons malheureusement pas de choix réel entre la position de l'opposition officielle et celle du gouvernement, au sujet de cette question fondamentale. Le chef de mon parti l'a bien rappelé, et les propos que tenait hier le chef de la soi-disant opposition lui donnent raison. Voici ce qu'il déclarait hier:

    Nous ne devons écarter aucune possibilité. La position défendue aujourd'hui par le premier ministre correspond exactement à la nôtre.

    Et voilà pour l'opposition! Elle couche dans le même lit que le gouvernement. C'est une alliance plutôt douteuse entre les libéraux et l'Alliance canadienne.

    Ce débat me paraît plutôt inutile et je me demande à quoi il servira. On sait déjà que le gouvernement ne tiendra aucun compte des opinions exprimées par les représentants élus, ni de l'opposition croissante à la guerre qui se manifeste d'un bout à l'autre du pays.

    Fait remarquable, le mois dernier, dans des villes et communautés de partout au pays, y compris, pour la première fois, à Iqaluit, des Canadiens, jeunes et vieux, des étudiants, des syndicalistes, des militants pour la paix, des dames âgées en colère, des intellectuels, des citoyens ordinaires, des mères et des pères de famille inquiets de l'avenir de notre planète, ont manifesté contre la guerre.

    Bien que je déplore qu'il soit le seul à le faire, je suis fier que le Nouveau Parti démocratique dise au gouvernement qu'il est contre toute guerre en Irak.

    Comme le disait éloquemment, plus tôt, la députée de Halifax, il faut laisser tomber les sanctions, et les bombes. C'est aussi notre position.

  +-(2310)  

    J'ai aussi l'impression que tout cela est futile car il était terriblement désolant de regarder George Bush prononcer son discours hier soir, sous les applaudissements frénétiques des deux côtés de la Chambre. Quel spectacle pathétique, particulièrement pour tous ceux d'entre nous qui se souviennent que les démocrates ont fermement et éloquemment résisté lors de la dernière guerre dans le Golfe. La population américaine s'exprime à l'heure actuelle.

    Cependant, en regardant George Bush, j'ai eu un sombre pressentiment, une terrible impression car il était évident qu'il était absolument déterminé à faire la guerre au peuple irakien, avec ou sans l'assentiment des Nations Unies. Il commande aux Nations Unies en disant « Nous allons venir le 5 février vous montrer les preuves. Si vous les acceptez, fort bien; sinon, tant pis. Nous sommes les maîtres du monde et nous formerons une coalition de la volonté ».

    Espérons que le Canada, notre gouvernement et notre premier ministre auront le courage de prendre position, de représenter la population de notre pays et d'affirmer que nous ne ferons pas partie de cette coalition, que nous préconisons la paix, que nous sommes pour la justice et non pour la guerre. Il ne doit subsister aucun doute quant à notre position à l'égard du régime de Saddam Hussein; nous l'avons dénoncé fermement. Ma collègue, la députée de Halifax, a dénoncé ce régime à maintes occasions. J'ajouterai que nous avons été beaucoup plus conséquents que les États-Unis et bien d'autres.

    Je n'oublierai jamais 1988. Je me trouvais à Genève, à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies peu après que Saddam Hussein eut noyéla petite ville kurde de Halabja sous un déluge de bombes chimiques. Le silence des États-Unis et du Canada fut assourdissant à l'époque. Où étaient donc ces pays ? Qui donc a fourni les précurseurs des armes biologiques et chimiques de Saddam Hussein dans les années 1980? Je crois que ce sont les mêmes que ceux qui appuyaient Oussama ben Laden en Afghanistan à la même époque. L'hypocrisie est absolument incroyable.

    Bush est prêt à faire la guerre. Il ne se soucie aucunement des Nations Unies ou de la position adoptée par le Canada. Il a Tony Blair de son côté, de même que l'Australie semble-t-il, mais pour l'amour de Dieu, pourquoi notre gouvernement ne se tient-il pas debout? Qu'est-il arrivé à cette tradition libérale qui a valu au premier ministre Pearson un prix Nobel tout à fait mérité? Malheureusement, encore une fois, elle a disparu.

    Le peuple irakien a déjà beaucoup souffert des sanctions économiques. Cette situation a été clairement rapportée avec documents à l'appui par Denis Halliday, Hans von Sponeck et d'autres. Nous, du Nouveau Parti démocratique, avons joint notre voix à celle des Canadiens pour demander l'annulation de ces sanctions économiques. Comment pourrait-on mieux libérer les Irakiens de la souffrance, de la faim et de l'humiliation auxquelles ils sont maintenant soumis qu'en leur donnant les outils qui pourraient leur permettre de rétablir la démocratie et les droits de la personne et de reconstruire leurs vies et leurs infrastructures bouleversées?

    S'il y a encore quelqu'un qui se demande si nous avons déjà parlé de tout cela, je tiens à dire que nous l'avons fait. J'étais à Bagdad en mai pour participer à une conférence avec Tariq Aziz qui était assis tout près de moi. Au cours de cette conférence, j'ai pris la parole et accusé son régime, au nom de mes collègues, d'avoir perpétré des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité, et j'ai affirmé qu'il devrait être traduit en justice. C'est là notre position, mais nous disons également qu'il ne devrait pas y avoir de guerre et que même si le Conseil de sécurité est poussé par la force ou par l'argent à appuyer la guerre, le Canada a toujours le choix. Il a le choix de travailler pour la paix et d'aider à rebâtir après une autre guerre dévastatrice. Je ne peux même pas imaginer ce que ce pourrait être.

    Ils auront encore une fois recours à l'uranium appauvri. Nous avons déjà vu les répercussions que cela peut entraîner. J'ai vu des enfants à Basra qui sont nés avec d'horribles malformations congénitales.

  +-(2315)  

    En terminant, je voudrais dire encore une fois au nom de mes collègues que nous sommes solidaires avec les gens de ce pays. Nous espérons qu'il y aura des centaines de milliers de Canadiens d'un océan à l'autre qui se joindront à nous le 15 février pour notre prochaine manifestation avec notre chef, Jack Layton, et tous les membres de notre caucus.

[Français]

    Nous serons partout au Canada, au Québec et dans toutes les régions pour dire non à la guerre et oui à la paix.

[Traduction]

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, le député et moi ne sommes pas du même avis sur beaucoup de simples questions de fait, et je ne suppose pas que nous puissions y apporter ici une solution. Toutefois, j'aimerais savoir sur quelle théorie il se fonde pour s'opposer en apparence à toute forme d'intervention militaire visant à imposer le respect des diverses résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

    Le député est-il un pacifiste? Croit-il que le recours à la force puisse un jour ou l'autre s'imposer? À mon avis, c'est une question tout à fait légitime. Ce n'est pas un raisonnement à l'absurde. En 1939, le chef du CCF a adopté une position que certains ont qualifiée de courageuse, alors que je la qualifierais personnellement d'inacceptable sur le plan moral, celui-ci ayant soutenu que l'on n'aurait pas dû recourir à la force militaire contre le régime nazi.

    J'aimerais savoir si le député en particulier et son parti en général pensent que le recours à la force militaire peut un jour ou l'autre être justifié et, le cas échéant, dans quelles circonstances.

+-

    M. Svend Robinson: Madame la présidente, bien sûr. En réalité, on n'a qu'à se reporter à la tyrannie d'Hitler et des nazis pendant la Deuxième Guerre mondiale. Je n'étais pas encore né à cette époque, mais je suis très fier du fait que, bien que le chef du parti de l'époque, J.S. Woodsworth, ait adopté une position que lui dictait sa conscience comme pacifiste, beaucoup d'autres, dont les représentants élus présents à la Chambre, ont vigoureusement appuyé la lutte contre cette tyrannie.

    Je ne suis pas un pacifiste. Je souligne que je faisais partie de ceux qui ont réclamé une intervention de la communauté internationale au Rwanda, et le monde est resté les bras croisés. J'étais parmi ceux qui ont demandé une intervention de la communauté internationale avant la boucherie au Timor oriental, et le monde est resté les bras croisés.

    Pour répondre à la question du député, non, je ne suis pas un pacifiste. Toutefois, je me dois de demander quels seraient les résultats d'une attaque militaire massive lancée contre les centaines de milliers d'Irakiens ayant déjà souffert? Non seulement serait-ce une catastrophe humanitaire environnementale, mais ce serait aussi une violation flagrante du droit international. Le droit international n'autorise tout simplement pas le recours à une frappe préventive pour éviter la possibilité d'une quelconque attaque. Imaginez le précédent que cela créerait. L'Inde, le Pakistan, la Russie et la Tchétchénie et qui d'autre encore s'en inspireraient.

    Une voix: Israël.

    M. Svend Robinson: Israël, assurément.

    Lorsqu'il est question de respect des résolutions de l'ONU, mettons un terme à l'hypocrisie et reconnaissons que si les États-Unis faisaient preuve de sérieux sur le plan du respect des résolutions des Nations Unies, ils exerceraient bien davantage de pressions sur le gouvernement israélien afin qu'il cesse enfin l'occupation illégale, déshumanisante et brutale de la Palestine et qu'il permette aux Palestiniens d'avoir leur État et d'entretenir une coexistence pacifique avec l'État d'Israël également.

  +-(2320)  

+-

    M. Larry Bagnell (Yukon, Lib.): Madame la présidente, à propos des résolutions de l'ONU qu'on a évoquées plusieurs fois ce soir, le député vient de mentionner certaines résolutions qui ne sont pas appliquées, ce qui mine la crédibilité des Nations Unies. Je sais que le député est un ardent défenseur des Nations Unies.

    Comment pouvons-nous résoudre ce problème? Les Nations Unies auraient-elles dû ne pas adopter ces résolutions? Comment le député propose-t-il qu'elles soient appliquées, s'il laisse entendre qu'elles doivent l'être?

+-

    M. Svend Robinson: Madame la présidente, non, nous appuyons fermement la résolution 1441. Cela ne fait aucun doute, tout comme nous appuyons les résolutions 242 et 338 et bon nombre des autres résolutions qui ont été adoptées. Nous appuyons tout autant la résolution 687, qui, soit dit en passant, prévoit un désarmement régional au Proche-Orient, et notre objectif ultime est l'éradication mondiale de toutes les armes de destruction massive.

    Nous croyons profondément aux institutions multilatérales, mais le drame, c'est que les États-Unis, probablement plus que tout autre pays au monde, manifestent un mépris total pour le multilatéralisme, qu'il s'agisse du tribunal pénal international, des mines antipersonnel, de l'accord de Kyoto, du traité ABM ou des armes biologiques.

    Leas États-Unis sont un pays qui recourt aux Nations Unies quand il le peut, mais lorsque les Nations Unies ne sont pas disposées à abonder dans son sens, il se passe de leur opinion. Nous disons que nous ne sommes pas disposés à accepter cette façon de faire, encore moins lorsqu'elle risque d'entraîner la mort de centaines de milliers de civils irakiens innocents.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, je me dois de réagir au faux-fuyant flagrant concernant la présumée contradiction relativement à l'application des résolutions de l'ONU. Le député fait référence aux résolutions 242 et 338 qui imposent des obligations à toutes les parties au Moyen-Orient, non seulement à Israël, et qui n'exigent pas de redonner tous les territoires annexés depuis la guerre de 1967. On pourrait en débattre toute la nuit. C'est manquer de franchise que d'établir un parallèlle entre ces résolutions et la résolution explicite 1441 au sujet de laquelle il n'y a pas réellement de débat quant à son intention.

    Le député s'oppose aux sanctions contre l'Irak. Il voudrait qu'elles soient levées. Il s'oppose au recours à la force même si elle est autorisée par le Conseil de sécurité de l'ONU pour obliger le régime à obtempérer. Que propose-t-il alors pour amener ce dictateur à respecter les engagements internationaux, le droit international, et à prouver qu'il ne possède pas d'armes de destruction massive? S'il est contre les sanctions économiques, contre l'utilisation des forces armées--de toute évidence la diplomatie n'a rien donné en 12 ans--que propose-t-il de concret comme solution?

  +-(2325)  

+-

    M. Svend Robinson: Madame la présidente, je m'insurge contre la suggestion du député voulant que d'une certaine manière les inspections par les Nations Unies n'ont pas progressé. Je ne sais pas si le député a entendu Mohamed EIBaradei, le chef des inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique, qui a déclaré qu'il n'y a pour l'instant aucune preuve qu'il y ait des armes nucléaires en Irak. C'était un véritable exploit parce qu'assez manifestement, et j'accepte ce que le député a dit, des preuves existent que certains préparatifs ont été faits. Les inspections ont porté fruit.

    Selon Scott Ritter, l'ancien chef des inspecteurs en désarmement des Nations Unies, les inspections ont grandement porté fruit tant en ce qui concerne les armes chimiques que biologiques. N'oublions pas que l'échec des inspections s'explique du fait que les Nations Unies, par l'entremise de la CIA, recourait à des inspecteurs à des fins illégitimes. Je crois que le député est également au courant de cela. Rolf Ekeneus, qui était le chef suédois très respecté du programme d'inspection, a lui aussi apporté des preuves à l'appui en ce sens.

    Nous devons écouter Blix et EIBaradei lorsqu'ils disent qu'il faut leur accorder plus de temps pour bien faire leur travail.

    Pourquoi précipiter la guerre? Et au bout du compte, s'il y avait une guerre, si des gens étaient tués, qu'arriverait-il ensuite? Qu'est-ce que cela signifierait ultimement pour la stabilité de cette région? Et finalement, qu'est-ce que ce régime particulier a à voir avec le combat contre le terrorisme? Hier soir Bush laissait entendre qu' un lien existait entre Al-Qaïda et Saddam Hussein, ce qui montre que personne ne comprend la nature d'Al-Qaïda.

    Le Nouveau Parti démocratique, notre chef Jack Layton, notre caucus et les membres qui assistaient à notre congrès la fin de semaine dernière, se joignent aux Canadiens pour dire «no to war, non à la guerre».

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la présidente, j'ai une brève question à poser. N'est-il pas vrai que le processus d'inspection des armements entre 1992 et 1999 a été plus efficace que la guerre du Golfe sur le plan du démantèlement et de l'élimination des armes de destruction massive en Irak?

+-

    M. Svend Robinson: Madame la présidente, la réponse courte est que cette observation est absolument juste. Le système fonctionnait efficacement. En 1998, les inspecteurs ont été forcés de se retirer à cause d'une menace de bombardement, qui a été mise à exécution sans l'approbation des Nations Unies, soit dit en passant, mais avec l'appui inconditionnel du gouvernement libéral.

[Français]

+-

    M. Yvon Charbonneau (Anjou—Rivière-des-Prairies, Lib.): Madame la présidente, ce débat sur l'Irak soulève beaucoup d'intérêt et de passion. Les enjeux sont majeurs. En effet, il y a un grave danger d'une guerre contre l'Irak, menée unilatéralement par les États-Unis et les alliés qu'ils pourront trouver, à défaut de pouvoir y associer le Conseil de sécurité des Nations Unies.

    Comme beaucoup d'autres de mes collègues, j'ai reçu des centaines de messages et d'appels de la part de personnes habitant mon comté sur cette question. Je voudrais les remercier et les féliciter d'avoir pris le temps de communiquer avec moi à ce sujet. Je vais lire quelques-uns de ces témoignages.

    Ici, j'ai une lettre d'une personne qui se nomme Josée--je ne dirai pas le nom de famille:

    Je vous écris en votre qualité de député de ma circonscription pour vous signifier ma vive opposition à la guerre contre l'Irak. Je crois en effet

    1) que le principe même d'une guerre préventive est aberrant et nocif pour la planète entière et que des solutions négociées doivent être toujours privilégiées;

    2) qu'il n'existe aucune évidence qu'elle telle guerre pourrait prévenir quoi que ce soit et qu'elle risque plutôt d'envenimer les mauvaises relations entre les peuples de cette région et l'Occident;

    3) que cette guerre servira avant tout les intérêts politiques et économiques des États-Unis.

    En conséquence, je crois que notre gouvernement a le devoir de se positionner clairement contre cette guerre et de faire toutes les pressions nécessaires au niveau international pour l'éviter.

    En souhaitant que le gouvernement canadien se souviendra qu'il doit représenter la population canadienne qui n'est pas en faveur de cette guerre.

    Je lirai un deuxième témoignage qui vient d'une personne qui habite sur la rue De Jumonville et qui se nomme Amélie:

    Vous le savez mieux que quiconque, les États-Unis s'apprêtent à lancer une offensive militaire en Irak. Cette intervention aura une grave incidence sur la population irakienne. [...]

    Selon les Nations Unies, la guerre du Golfe a fait entre 142 000 et 206 000 morts. Depuis 1991, l'embargo imposé à l'Irak a causé la mort de plus de 500 000 enfants. [...]

    De plus, les Nations Unies évaluent à 23 millions le nombre de personnes qui auront besoin d'assistance alimentaire pendant plus d'un an après une intervention armée. [...]

    Vous avez le devoir de trouver des façons non violentes de régler ce conflit. Que ferez-vous pour dire que vous vous opposez à la logique de la guerre et de la violence? Serez-vous un exemple pour mon enfant et pour les générations à venir?

    La position de cette personne se résume en quatre points:

    Non à une participation canadienne à la guerre, même avec une résolution du Conseil de sécurité.

    Oui à un vote libre au Parlement canadien.

    Non aux efforts guerriers des États-Unis.

    Oui à la fin des sanctions meurtrières contre le peuple irakien.

    J'ai une autre lettre d'un couple, Denis et Sylvie, qui habitent sur l'avenue des Vendéens, à Anjou:

    En tant que citoyens canadiens et citoyens d'Anjou, nous sommes tout à fait opposés à la participation du Canada à une guerre en Irak. En tant que représentant de notre circonscription, nous vous demandons de faire pression sur le Parlement afin:

    1) D'annoncer clairement la position du Canada advenant la déclaration de guerre des États-Unis à l'Irak sans mandat de l'ONU; [...]

    2) De cesser un alignement de plus en plus automatique sur la politique des États-Unis; [...]

    3) De geler immédiatement les budgets de la Défense et même de les diminuer [...]

    Et ce message continue.

    Je ne vous dis pas que je suis en accord à 100 p. 100 avec toutes ces demandes, mais je vois, d'autre part, que je n'ai reçu aucun message allant dans un sens opposé. Des centaines de messages que nous avons reçus, aucun dit qu'il faudrait que le Canada fasse alliance avec les États-Unis immédiatement, avec ou sans l'ONU, et aille faire la guerre en Irak. Aucun de ces messages ne va dans ce sens.

  +-(2330)  

    Je me dois de refléter ce sentiment, qui est très largement répandu, en particulier au sein de la population qui habite mon comté et au sein de la population du Québec et celle de la région de Montréal.

    Ce qui m'incite aussi à prendre la parole ce soir, c'est le discours de M. Bush hier soir. C'est un discours qui suivait le dépôt, lundi, du rapport des équipes d'inspection.

    Ce qui m'a frappé dans le discours de M. Bush, c'est à quel point le président américain s'est enfermé dans une rhétorique de guerre, de menaces et de force. Il s'est enfermé dans un discours où il prône l'unilatéralisme et la frappe préventive. Il s'est enrobé de patriotisme. Finalement, hier soir, il s'est même donné un air de prêcheur à la fin de son discours. Je vais lire le paragraphe de conclusion de son discours.

[Traduction]

    Les Américains sont un peuple libre, qui sait que la liberté est le droit de chaque individu et l'avenir de chaque nation. La liberté qui nous est chère n'est pas un don que l'Amérique a fait au monde, mais bien un don que Dieu a fait à l'humanité.

    Nous, les Américains, avons confiance en nous, mais pas en nous seuls. Nous ne connaissons pas et ne prétendons pas connaître toutes les ressources de la Providence, mais nous pouvons faire confiance au bon Dieu, à qui nous devons toute la vie et toute l'histoire.

    Puisse-t-Il nous guider maintenant et puisse-t-Il continuer de bénir les États-Unis d'Amérique.

  +-(2335)  

[Français]

    Je pense qu'il faut être très prétentieux pour se prendre à ce point pour des représentants et des élus de Dieu sur terre chargés, en tant qu'intermédiaires du ciel, d'apporter la liberté aux pauvres ignorants qui n'ont pas le bonheur d'habiter les États-Unis.

    M. Bush et les républicains américains n'ont pas beaucoup de légitimité pour se porter en arbitres et en justiciers internationaux. Élus de peine et de misère dans leur propre pays il y a deux ans, ils n'ont pas beaucoup réussi sur le plan économique et sur le plan des droits, bien au contraire. De plus, ils ont plongé leur pays dans des déficits.

    De quel droit donnent-ils des leçons à tout le monde? M. Bush n'a même pas obtenu la moitié des votes de la moitié des électeurs américains. Ce n'est pas d'être anti-américains que de rappeler à nos amis du sud qu'ils devraient faire leurs devoirs démocratiques chez eux d'abord avant de se prétendre les agents de la démocratie dans le monde. L'administration Bush n'a reçu aucun mandat, ni de la majorité des américains, ni de l'ONU, ni des Canadiens pour faire la guerre à qui que ce soit.

    L'option qui est devant nous en tant que Canadiens, c'est de travailler pour la paix dans le cadre de l'ONU. C'est de profiter des délais—il semble qu'il y aura peut-être encore quelques semaines d'inspection—pour mettre de l'avant des moyens qui sont de l'ordre de la coopération internationale. Il y a aussi d'autres types d'inspections qui pourraient être envisagées si celles-ci tournent en rond et si elles n'aboutissent pas.

    Mais c'est au Conseil de sécurité à en juger. À mon avis, il devrait y avoir un autre débat dans quelques semaines et l'adoption d'une autre résolution qui sera soumise à l'examen de tous les États membres de l'ONU, de tous les États membres du conseil de sécurité et de tous les parlements, comme le nôtre. Nous verrons à ce moment-là quels sont les meilleurs moyens à mettre de l'avant.

    Je pense que si nous nous éloignons de ce discours que nous avons entendu hier soir, un discours qui mène tout droit à la guerre de manière unilatérale, nous pourrions regarder d'autres moyens, tels le renforcement des programmes de coopération et le renforcement de mesures qui mènent à un dialogue avec un certain nombre de pays. Je pense que le Canada a une bonne réputation internationale et nous aurions tout intérêt à travailler en ce sens.

    D'ailleurs, ici dans ce pays, aux États-Unis, en Europe et partout dans le monde, nous avons beaucoup d'alliés qui nous appuient et qui nous accompagnent dans cette direction, car c'est la voix de la dignité et de la responsabilité et nous conserverions ainsi la confiance de la population canadienne.

+-

    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Madame la présidente, ce soir, nous avons vu un spectacle bizarre. Nous sommes ici pour discuter de la possibilité d'une guerre contre l'Irak et Saddam Hussein et nous venons d'entendre une attaque contre le président des États-Unis. C'est extraordinaire. Le député n'est peut-être pas d'accord avec la résolution 1441 de l'ONU.

    Est-il d'accord avec la résolution très claire selon laquelle il est possible qu'il y ait une démonstration de force contre Saddam Hussein s'il n'accepte pas la résolution? Le député est-il d'accord avec cette résolution?

+-

    M. Yvon Charbonneau: Madame la présidente, nous travaillons dans le cadre de l'ONU et de la résolution du Conseil de sécurité. C'est ce que j'ai préconisé d'entrée de jeu. Je suis heureux de voir que le premier ministre du Canada, par le dialogue qu'il a entretenu avec le président américain au mois de septembre dernier, a contribué avec d'autres chefs d'État à convaincre M. Bush de s'en remettre au Conseil de sécurité.

    À ce moment-là, il était gravement question que les États-Unis aillent tout seuls régler ce soi-disant problème de l'Irak. Les Américains ont accepté de passer par le cadre de l'ONU. Il en est ressorti la résolution 1441, mais ce n'est pas la fin de la démarche. Le Conseil de sécurité est demeuré saisi du dossier. Les inspections ont été entreprises. Nous avons un rapport qui dit que le travail est en cours. Sur le plan nucléaire, un système de surveillance est maintenant établi à la grandeur de l'Irak, d'après le rapport que nous avons vu lundi.

    Pour ce qui est des autres aspects chimiques et biologiques, des centaines d'inspections ont été faites dans des centaines de lieux. Il y a du travail à faire. Des demandes ont été adressées à l'Irak pour continuer de collaborer et de le faire encore davantage. Il faut du temps. Le secrétaire général de l'ONU a demandé davantage de temps. Je pense que ce n'est que raisonnable.

    De plus, nous pourrions envisager, lorsque d'autres rapports seront rendus publics dans quelques semaines, de renforcer le système d'inspection en faisant accompagner les inspecteurs de contingents militaires multinationaux. Il s'agit de suggestions qui ont été faites par des experts qui ont observé beaucoup de situations analogues à ce genre de conflits. On pourrait renforcer et donner encore davantage de muscle aux inspections avant de passer à la question de la guerre.

    Lorsqu'on va prendre une décision de passer à la guerre, que ce soit au Conseil de sécurité ou chez nos voisins américains, on ne peut pas savoir toutes les conséquences de cette décision. A priori, c'est bien beau de dire qu'on va téléviser des bombardements et ainsi de suite, mais cela va-t-il le moindrement changer la situation? Que s'est-il passé en Afghanistan? A-t-on changé l'état d'esprit d'un taliban en bombardant l'Afghanistan? On a certainement enlevé la vie à plusieurs personnes, mais on n'a pas fait évoluer la situation.

    Je ne pense pas non plus que ce soit la manière de faire évoluer la situation en Irak en pensant qu'avec des bombes on règle ce genre de problèmes. On ne fait pas évoluer les mentalités, on ne fait que causer des dégâts et agrandir des fossés entre les peuples, les nations et les civilisations. Il y a d'autres façons qu'on peut envisager dans le but d'en arriver à des résultats concrets, mais par des moyens pacifiques le plus longtemps possible.

  +-(2340)  

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la présidente, je veux féliciter le député de son discours. Il s'agit d'un discours bien informé, très intelligent et très progressiste.

    J'aimerais lui poser la question à savoir s'il est d'accord pour demander un vote à la Chambre des communes pour savoir si les députés sont en faveur ou non de déclencher une guerre contre l'Irak?

+-

    M. Yvon Charbonneau: Madame la présidente, c'est une question qui revient souvent. Il y a différentes opinions au sein des partis. Personnellement, je pense que c'est une question assez importante pour faire l'objet d'un vote de la part des députés.

    On nous dit que la Constitution prévoit que le gouvernement peut prendre des décisions en la matière, mais cela ne veut pas dire qu'il n'a pas le droit et la responsabilité d'entendre l'opinion des députés de cette Chambre par le biais d'un vote. Je crois que ce serait intéressant de se rendre jusque-là. Cela permettrait à chacun de voter selon ses convictions et de refléter le mandat de ses propres commettants. On le fait pour des questions beaucoup moins importantes. Nous votons plusieurs fois par semaine sur des questions dont l'importance est douteuse.

    On parle d'aller en guerre et d'associer son pays à une guerre. Il est question de vies humaines là où se fera la guerre et de la vie de certains Canadiens. Il est question de dépenses énormes, de milliards de dollars, on ne sait trop. On s'aventurerait là-dedans et on ne demanderait pas l'opinion des parlementaires par le biais d'un vote? Je pense que nous sommes très largement d'accord au sein de plusieurs partis pour avoir un vote sur cette question.

  +-(2345)  

[Traduction]

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, je dois dire que je trouve toujours particulièrement inquiétant de voir des députés dans cette enceinte intervenir, comme notre collègue l'a fait, relativement à une motion touchant l'incapacité répétée de l'un des régimes les plus tyranniques du mode de respecter les exigences de la communauté internationale.

    Le député applaudit les Nations Unies, mais l'Irak n'a justement pas respecté ses résolutions. Pourtant, le député passe la majeure partie de son temps à attaquer la légitimité morale des États-Unis et leur chef d'État, et il affirme que les États-Unis font preuve d'un « bellicisme unilatéral ».

    Cela vient d'un député qui est membre du gouvernement et un citoyen du pays qui profite depuis des décennies du fait que les États-Unis défendent notre souveraineté sur le plan militaire. Nous avons été en mesure d'avoir les plus faibles dépenses dans le domaine de la défense parmi les pays de l'OTAN parce que les États-Unis sont prêts à défendre le continent nord-américain, et le député a l'audace de monter sur ses grands chevaux moraux et de reprocher aux États-Unis notamment d'avoir libéré les Afghans.

    Une voix: Oh, je vous en prie.

    M. Jason Kenney: C'est très intéressant. Je vois une députée de Mississauga hocher la tête en signe de dégoût. Elle n'a peut-être pas vu les gens de Kaboul accueillir les soldats qui sont entrés dans cette ville pour les libérer du régime taliban.

    J'ai le sentiment d'être dans une sorte de séminaire de Noam Chomsky sur la théorie de la conspiration avec des gens qui ne vivent pas dans le monde réel.

    Le député affirme que nous n'avons pas fait changer d'idée aux talibans. Ce que nous avons fait, c'est changer les gens au pouvoir et implanter une démocratie naissante dans un pays qui en a désespérément besoin.

    Une voix: Qui peut croire cela?

    M. Jason Kenney: Le député pourrait peut-être parler aux représentants du gouvernement d'Hamid Karzai qui font de leur mieux pour créer une démocratie naissante avec l'appui de pays comme le Canada et les États-Unis.

    Le député prétend que sa solution de rechange réside dans des programmes de coopération et des mesures pour promouvoir le dialogue afin de résoudre le problème en Irak. Est-ce une blague? Le député s'attend-il à changer la façon de penser d'un tyran grâce à des mesures visant à promouvoir le dialogue et grâce à des programmes de coopération? S'il est opposé à des sanctions et à la force, croit-il vraiment que Saddam Hussein va respecter les 16 résolutions du Conseil de sécurité des Nations Unies et un cessez-le-feu imposé par le Canada et l'engageant dans des programmes de coopération et des mesures tendant à promouvoir le dialogue? Sur quelle planète vit-il?

+-

    Le vice-président adjoint: Je sais qu'il est tard, mais essayons de poursuivre de la même manière que nous l'avons fait au cours des dernières heures.

[Français]

    Je permettrai au moins une réponse de la part du député.

+-

    M. Yvon Charbonneau: Madame la présidente, je dirai au député qui vient de poser cette question que s'il y avait moins d'ignorance et moins de préjugés dans notre pays, aux États-Unis ou dans d'autres pays, on pourrait avancer un peu plus vers la tolérance et la compréhension. S'il y avait plus d'éducation un peu partout dans notre pays, aux États-Unis et ailleurs, on pourrait bâtir des liens durables. Les préjugés tomberaient et les dictateurs ne pourraient pas tenir en place aussi longtemps.

    Quant aux droits humains, on pourrait aussi en parler. Il y a tout un contexte. Si on veut changer des choses avec le temps, ce n'est pas avec des bombes et des guerres qu'on provoquera ces changements. On ne fait qu'approfondir les oppositions, la polarisation et la haine. Il y en a déjà suffisamment à l'heure actuelle. C'est en essayant de travailler dans un autre sens qu'on pourrait espérer des jours meilleurs.

  +-(2350)  

[Traduction]

+-

    M. Bill Casey (Cumberland—Colchester, PC): Madame la présidente, ce fut certainement une soirée intéressante. Je dois dire que j'ai fait un grand bout de chemin avec tout ce que les députés m'ont appris.

    Un député a parlé d'Israël et de la Palestine il y a une seconde, ce qui m'a fait penser à un incident survenu il y a quelques semaines. J'étais au téléphone en train de parler à une connaissance que j'ai à Jérusalem, un type que je connais bien qui a travaillé pour le ministère des Affaires étrangères en Israël. Nous nous demandions si l'Irak avait des armes de destruction massive. Je lui a dit que nous avions eu une réunion de comité et qu'aucune preuve ne parvenait à me convaincre que l'Irak détenait des armes de destruction massive. Nous avions une conversation décousue, puis soudainement, mon interlocuteur s'est tu. Après une minute de silence, il m'a dit que c'était très bien pour moi, assis bien confortablement, de faire des hypothèses sur les armes de destruction massive, mais que lui devait se procurer des masques à gaz pour ces enfants cet après-midi-là. Cela m'a secoué et je me suis mis à penser à quel point la question était sérieuse. Au Canada, nous sommes relativement loin, protégés et en sécurité, mais les gens qui risquent d'être touchés par les effets de la résolution 1441 des Nations Unies sont assurément dans une situation plus difficile.

    Certes, ce débat est intéressant, mais comme d'autres débats avant, en fait presque tous, il demeure vain. Nous avons tous exprimé notre point de vue et tâché de gagner les autres à notre idée, mais en bout de ligne, tout cela ne mènera à rien puisqu'il n'y aura pas de vote. L'exercice n'a d'autre utilité que nous permettre de faire connaître notre opinion, de dire ce que l'on pense et d'essayer d'amener les autres à comprendre notre point de vue. Encore une fois, cela ne mènera nulle part puisqu'il n'y aura pas de vote. Je ne comprends pas pourquoi, d'ailleurs, mais c'est ainsi. Une fois le débat terminé, nous allons tous rentrer chacun chez soi et reprendre nos travaux demain.

    Il y a une constante dans les propos de presque chacun des intervenants. Je ne veux pas sauter aux conclusions, mais il me semble que la plupart ont reconnu ce soir l'existence en Irak d'un régime dangereux s'étant rendu coupable de crimes horribles. Ce régime constitue une menace pour ses voisins et pour d'autres pays à travers le monde, et nous ne pouvons pas le laisser continuer d'agir à sa guise. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus.

    Ce sur quoi nous différons d'opinion, c'est le moyen d'action à adopter et le moment où on doit intervenir, et c'est de cela que j'aimerais vous entretenir.

    Si nous choisissons la mauvaise solution, nous devrons payer un prix énorme qui se mesurera en vies humaines, en destruction et en victimes. J'ai lu une demi-douzaine d'estimations différentes des pertes possibles, mais j'en ai vu une aujourd'hui qui prévoyait que, du côté irakien, les pertes pourraient se situer entre 1 000 et 50 000 militaires. Du côté des alliés, elles pourraient se situer entre 100 et 500 militaires. Ces chiffres ne tiennent pas compte des pertes civiles. De nos jours, dans une guerre, 80 p. 100 des pertes sont de nature civile. Les risques de pertes sont absolument incroyables. Nous devons déployer tous les efforts possibles pour éviter un conflit violent.

    Je sais que l'heure est grave, que le statu quo n'est pas acceptable et que nous sommes confrontés à une situation difficile, mais nous ne pouvons pas dire que nous ne tenterons rien parce que nous en avons marre, nous ne pouvons pas dire que le temps est écoulé, que nous allons aller en guerre et que 50 000 personnes vont peut-être mourir. Nous devons faire notre travail ici, et les Nations Unies doivent faire le leur. Les Américains doivent faire leur travail. Tous les pays doivent faire leur travail parce que les risques de pertes sont absolument horribles.

    S'il y a une guerre en Irak, nous savons quelle en sera l'issue. Les alliés dans le camp des États-Unis vont gagner la guerre. Cela ne fait pas l'ombre d'un doute, mais quel sera le prix à payer des deux côtés? Peu importe ce qu'il sera, il sera énorme.

    Lorsque ce problème s'est posé après des années d'échec, les Nations Unies s'en sont occupées le 8 novembre en adoptant à l'unanimité la résolution 1441. Cette résolution visait surtout à rétablir le mandat des inspecteurs en désarmement et à les remettre au travail sous la direction de M. Hans Blix. Aucune échéance n'a été fixée pour que M. Blix termine son travail.

  +-(2355)  

    Voilà ce qui me laisse perplexe. Je ne comprends vraiment pas que deux semaines à peine après l'arrivée de M. Blix en Irak, le président américain ait commencé tout à coup à dire que sa patience était à bout. Il a dit maintes fois que son pays devait agir sans plus attendre, qu'il en avait assez d'attendre. Je ne comprends pas cela. Je ne comprends pas que, après que l'ONU eut adopté la résolution à l'unanimité, les personnes mêmes qui avaient appuyé le rétablissement des inspecteurs en armement et qui leur avaient confié leur mandat commencent tout de suite à dire qu'elles en avaient assez d'attendre et que leur patience était à bout.

    Il faut donner aux inspecteurs le temps d'accomplir leur travail. Il n'y a que 60 jours qu'ils l'ont commencé. Je crois comprendre qu'ils ne disposent même pas de tout le matériel dont ils ont besoin pour trouver les armes de destruction massive, qu'elles soient nucléaires, chimiques ou biologiques. Il me semble que les inspecteurs doivent avoir le temps de remplir le mandat que les Nations Unies leur a confié au moyen d'une résolution unanime.

    S'il s'entête, l'Irak risque d'être victime d'une guerre, mais si nous ne laissons pas les inspecteurs en désarmement accomplir leur travail, l'ONU risque aussi d'être une victime. Nous avons entendu parler ce soir des faiblesses de l'ONU. Nous avons entendu parler de ses échecs. Ils ne font aucun doute. Toutefois, si une motion unanime des Nations Unies est contournée ou esquivée, la crédibilité et tout effort futur des Nations Unies s'en trouveront très sérieusement compromis.

    M. Blix a réclamé plus de temps pour compléter son mandat et je crois qu'on devrait assurément le lui donner. Je ne vois aucune raison pour qu'on ne le fasse pas. Le problème ne fait aucun doute. Le défi ne fait aucun doute. La menace à éliminer ne fait aucun doute. Il ne fait aucun doute que le premier rapport est plutôt décevant quant à la collaboration de l'Irak. Ce pays collabore en apparence, mais l'esprit n'y est pas. C'est tout simplement inadmissible.

    Par ailleurs, en ce moment même, il n'y a aucune menace éminente contre les États-Unis ou un autre pays de la part de l'Irak. Le monde entier a les yeux fixés sur l'Irak. Il n'y a pas de menace. Je le répète, il n'y a aucune raison de ne pas laisser Hans Blix finir son travail. En fait, il n'y a aucune raison pour que nous ne soyons pas tous en train d'essayer de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour trouver une solution non violente, et nous devrions épuiser toutes les options possibles avant d'envoyer nos jeunes faire la guerre, sachant combien de morts on prédit. Quant au choix entre la diplomatie et la violence, ou intervention militaire, nous devons faire ce qui nous incombe. Nous devons faire de notre mieux.

    Le Canada a un rôle à jouer. Nous avons été presque invisibles dans tout cet exercice à l'échelle du monde, mais il y a un rôle pour nous. Nous pouvons exiger des Nations Unies, nos alliés et nos partenaires, que l'on accorde à Hans Blix tout le temps dont il a besoin. Je le répète, il n'y a aucune raison de ne pas lui donner ce temps maintenant. Le système fonctionne. L'étau se resserre. Les inspecteurs sont sur place et peuvent aller où ils veulent sans entrave. Faisons en sorte qu'ils disposent du temps nécessaire. C'est ce que peut faire le Canada. Le Canada peut intervenir auprès des autres pays. Le premier ministre peut déclarer clairement que nous appuyons tous les aspects de la résolution 1441 et que nous insistons pour qu'on donne aux inspecteurs en désarmement le temps nécessaire pour mener leur tâche à bonne fin.

    Nous devrions également insister pour que, lorsque M. Blix aura terminé son rapport, ce dernier soit soumis au Conseil de sécurité pour qu'il prenne une deuxième résolution. La première résolution n'est pas claire; elle a été conçue pour ne pas l'être afin qu'elle soit adoptée sous sa forme ambiguë. Je pense que c'est une erreur. Néanmoins, c'est comme ça. La première résolution, 1441, est ambiguë. Une autre chose que le Canada pourrait faire serait de soumettre la question à un vote à la Chambre, mais je ne pense pas que cela se fera.

    Je rappelle à tout le monde que s'il y a une guerre, elle ne sera pas limitée à l'Irak. J'ai parlé de cet homme en Israël qui a acheté des masques à gaz pour ses enfants. Je pense que la guerre déstabilisera tout le Proche-Orient. Elle propagera la haine et encouragera probablement plutôt plus de terrorisme à l'avenir que moins. Elle ne sera pas juste limitée à une petite région.

    Il fut un temps où le Canada a joué un rôle éminemment respectable dans la communauté internationale. On nous écoutait. On nous demandait de participer. On nous invitait à participer. Aujourd'hui, nous sommes invisibles. En fait, nous entendons répéter sans cesse aux informations du soir ou du matin que les Britanniques ont dit ceci aujourd'hui, que la Russie a tergiversé sur cela, et que la France et l'Allemagne ont pris telle ou telle position. Les positions de ces pays sont clairement annoncées, mais on ne dit mot du Canada. C'est comme si nous étions invisibles. En ce moment même, le premier ministre Blair est aux États-Unis où il s'apprête à rencontrer le président Bush. Entre temps, notre ministre de la Défense se rend à Washington et ne trouve personne à qui parler.

    Je voudrais dire en conclusion qu'il ne fait aucun doute qu'une menace très grave pèse sur nous et qu'il convient d'y voir. Il ne fait aucun doute que la résolution 1441 des Nations Unies, étayée par la menace de recourir à la force, a convaincu Saddam Hussein de céder et de permettre au processus de fonctionner. Il faut à présent que nous permettions que ce même processus soit mené à terme. Le Canada doit cesser d'être invisible. Nous le devons à nos militaires et à tous ceux qui seront appelés à participer à un affreux conflit en cas d'échec de la diplomatie.

  +-(2400)  

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, je n'ai pas parfaitement compris la position du député. Il semble avoir une position semblable à celle du gouvernement qui est disposé à accorder davantage de temps et à ne pas recourir nécessairement à la force. Le chef de son parti a déclaré que le Canada ne devrait pas s'engager dans une intervention militaire sans la sanction du Conseil de sécurité des Nations Unies.

    Toutefois, lorsqu'il soutient que le système fonctionne, je suppose qu'il veut dire que les inspecteurs des Nations Unies travaillent bel et bien en Irak. Le député ne convient-il pas avec moi que le système ne fonctionnerait tout simplement pas sans la menace crédible de recours à la force que brandissent principalement les États-Unis et d'autres démocraties alliées? Si c'est précisément cette menace de recours à la force qui a poussé le régime irakien à en arriver où il en est, en l'occurrence à une semi-coopération, le député ne convient-il pas avec moi que le Canada devrait au moins politiquement, voire peut-être militairement, contribuer à la menace crédible de recours à la force pour s'assurer, comme il le dit, que le système continue à fonctionner? Croit-il plutôt que le régime irakien vient tout juste d'ouvrir ses portes à ces inspecteurs par simple bonté de coeur et qu'après douze années de refus de coopérer, il a soudainement changé d'attitude?

+-

    M. Bill Casey: Madame la présidente, le député n'écoutait pas parce que j'ai dit à plusieurs reprises que si le système fonctionne c'est uniquement en raison de la menace crédible agitée par les États-Unis. Je leur donne de très bonnes notes pour cela.

    Quelle que soit la raison, le système fonctionne maintenant. Nous avons reçu le premier rapport qui dit que tout n'est pas parfait. Tout n'était pas négatif mais tout n'était pas assurément positif. Le système fonctionne. M. Blix nous a présenté son premier rapport et je crois que le système continuera de faire ses preuves sous la menace de la force. Encore une fois, ce système ne fonctionnerait pas si ce n'était de la menace de la force, mais il fonctionne.

    Plutôt que de passer à la seconde étape et recourir à une guerre qui pourrait tuer des milliers de personnes, pourquoi ne pas laisser le système fonctionner un peu plus longtemps? Il n'y a aucune de raison de ne pas le faire.

    Je crois que notre position est très claire. Nous estimons que le Canada ne devrait pas participer à une guerre sans une deuxième résolution des Nations Unies. Il faut permettre à Hans Blix, et à personne d'autre, de revenir devant les Nations Unies présenter son rapport. Hans Blix doit déterminer si l'Irak a caché du matériel. Il doit préciser les manquements pour que les Nations Unies votent de nouveau, parce que la Résolution 1441 a été conçue en prévision d'un deuxième vote. Lorsqu'on parle de graves conséquences, on ne parle pas nécessairement d'une guerre.

+-

    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Madame la présidente, j'adresse ma question à mon collègue du Parti progressiste-conservateur. Les États-Unis ne cessent de dire qu'ils possèdent d'autres preuves que lui ont fournies ses services du renseignement. Nous les attendons. Le député convient-il avec moi que, pour permettre aux inspecteurs de faire leur travail le mieux et le plus efficacement possible, il serait logique que les Américains, s'ils disposent de cette information, la partagent immédiatement?

+-

    M. Bill Casey: Oui, madame la présidente, je crois effectivement que les États-Unis devraient fournir les preuves qu'ils possèdent. Ces preuves devraient être remises aux inspecteurs en désarmement et cela aurait dû être fait il y a déjà longtemps.

    Selon moi, les gens les plus crédibles dans tout ce débat sont les inspecteurs en désarmement. J'ai bien confiance que M. Blix et son équipe nous diront la vérité. On entend tellement d'histoires et de propositions; les renseignements et les mobiles sont si nombreux. Lors de la rencontre de notre Comité des affaires étrangères, j'ai demandé très précisément quelles preuves avaient été fournies au ministère des Affaires étrangères au sujet des armes de destruction massive. On m'a répondu qu'il y avait prépondérance de preuves subsistant depuis la dernière guerre et ainsi de suite, mais je n'ai rien pu voir de concret. Je suis sorti de la rencontre pas du tout convaincu qu'il y avait des preuves de l'existence d'armes de destruction massive.

    Encore une fois, je fais confiance aux inspecteurs en désarmement. Je crois qu'ils sont compétents. Ils ont le mandat. Tout ce qu'il leur faut maintenant, c'est un peu de temps pour remplir ce mandat.

  +-(2405)  

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la présidente, je voudrais d'abord féliciter le député de Cumberland--Colchester des efforts qu'il continue de déployer pour assainir le climat et faire avancer la cause de la paix au Proche-Orient en général. Je suis très heureuse qu'il nous ait parlé de ce représentant israélien avec lequel il s'est entretenu ces derniers jours et qui a reconnu avoir entrepris des démarches pour acheter des masques à gaz pour ses enfants.

    La question que je veux poser au député est la suivante. Il n'a jamais fléchi dans ses efforts pour maintenir le dialogue entre les dirigeants politiques israéliens et palestiniens afin de soutenir le processus de paix en Israël. Je me demande si, dans ses communications avec les Israéliens et les Palestiniens, il a fait l'expérience du même niveau d'horreur que la mission de paix que j'ai dirigée tout récemment dans cette région. Durant cette mission en Égypte, en Jordanie et en Israël, j'ai rencontré un nombre incalculable de gens, des Israéliens aussi bien que des Palestiniens, qui s'opposent vigoureusement à toute décision américaine d'attaquer l'Irak, en dépit du fait qu'Israël profite de l'appui indéfectible des États-Unis pour agresser la Palestine de façon régulière.

    Ensuite, je me préoccupe du fait qu'il se résigne à la notion qu'il n'y aura pas de vote à la Chambre. Je suis ici depuis presque cinq heures, et le seul député libéral qui a dit qu'il n'était pas en faveur de la tenue d'un vote est le ministre des Affaires étrangères. Si je ne m'abuse, les autres députés libéraux qui ont pris la parole sur la question ont dit qu'ils étaient en faveur de la tenue d'un vote là-dessus. Pourquoi le député se résigne-t-il donc à la notion qu'il ne peut y avoir de vote et qu'il n'y en aura pas?

+-

    M. Bill Casey: Madame la présidente, en fait, c'est étrange. La conversation que j'ai eue avec cet homme, à Jérusalem, a eu lieu il y a quelques semaines, mais ce matin, je me suis entretenu avec Amir Mamon, que certains députés connaissent sûrement. Il a longtemps été conseiller à l'ambassade d'Israël, à Ottawa. Je lui ai téléphoné ce matin pour connaître les résultats de l'élection en Israël. Quelques-uns de nos députés ont tenté d'inviter ici des députés de la Knesset et de l'Assemblée législative de la Palestine, et j'espérais qu'ils avaient été réélus. Ils l'ont tous été.

    À ce moment-là, il m'a dit comment ses deux fils s'adaptaient à la vie en Israël, avec la crainte, les pressions et la menace quotidienne d'actes éventuels de violence. Ils adorent vivre là-bas parce qu'ils sont chez eux, mais ils ont du mal à s'adapter.

    Chaque fois que je m'entretiens avec quelqu'un là-bas, il dit craindre les conséquences d'une guerre en Irak et des conséquences que cela pourrait avoir dans la région. Il nous est bien facile d'affirmer que nous devons nous débarrasser de Saddam Hussein, que nous aurons une courte guerre et que ce sera fini, mais ce ne sera pas une courte guerre. Ce sera une guerre horrible. Ce sera une grande guerre. Ce sera une guerre généralisée. Elle se répercutera sur toute la région. Elle touchera tous les pays musulmans. Elle créera des terroristes et nourrira la haine. J'estime que nous devons tout faire pour l'éviter.

    Au sujet du vote, je suis désolé de ne pas avoir compris la question, mais j'ai suivi les intervenants et j'ai pensé que tout le monde s'était dit en faveur d'un vote, sauf le ministre des Affaires étrangères. Nous devons nous demander pourquoi il n'y aurait pas de vote sur un enjeu comme celui-ci. J'ignore la réponse.

  +-(2410)  

+-

    Mme Carolyn Parrish (Mississauga-Centre, Lib.): Madame la présidente, je suis fière de dénoncer, au nom de la grande majorité des résidents de Mississauga-Centre, l'appel à la guerre lancé par les États-Unis d'Amérique.

    Le Canada est engagé dans des partenariats comme l'OTAN et l'ONU, qui assurent force et sécurité et une certaine certitude en période de difficultés.

    Je suis fière que le premier ministre et les ministres des Affaires étrangères et de la Défense aient rappelé l'opposition du Canada à toute action militaire contre l'Irak qui ne serait pas clairement sanctionnée par une résolution des Nations Unies.

    Face à l'impatience du président Bush de plonger dans la guerre contre l'Irak, et lui seul connaît les raisons de cette impatience, le Canada doit s'opposer à cette calamité énergiquement et sans relâche. Si ma mémoire est fidèle, nous n'avons jamais connu au cours des dix dernières années une situation plus profonde, plus urgente et plus déterminante que celle-ci. Je crois aussi que la situation préoccupe profondément tous les Canadiens, qui ont pourtant souvent tendance à faire preuve de complaisance.

    La situation actuelle oblige les Canadiens à affirmer la souveraineté de leur pays et son caractère authentiquement humain. Ne nous leurrons pas: le refus du Canada de participer à un conflit n'aura que peu d'influence sur la décision du président Bush d'aller en guerre, une guerre qu'il est impatient de déclarer. Toutefois, notre refus d'y participer sans preuve irréfutable d'une dévastation imminente constitue pour nous un enjeu moral. Nous sommes les démineurs, les négociateurs et les gardiens de la paix du monde, et non pas des va-t-en-guerre.

    La guerre n'est pas un jeu vidéo en couleur. Dans une guerre, de vraies personnes sont blessées, souffrent de la faim et meurent. Toute guerre a des conséquences dévastatrices, en particulier lorsqu'un pays démocratique comme les États-Unis est l'agresseur. Si le Canada approuve cette guerre ou décide d'y participer, nous devrons accepter d'en subir toutes les conséquences en gardant la tête haute. Pour ma part, c'est une perspective que je n'accepte pas.

    Tout en envisageant une coalition limitée avec les Bush et les Blair de ce monde, nous devons examiner les motifs possibles d'une attaque et être prêts à défendre ces motifs comme étant justes, raisonnables et urgents. Nous devons assumer la responsabilité d'une attaque contre un État souverain, l'un de ces nombreux États dont nous n'approuvons pas le régime politique. Si nous commençons à réorganiser l'échiquier hautement volatile du Proche-Orient, où nous arrêterons-nous?

    Un besoin insatiable de pétrole constitue-t-il une justification? La nécessité de relancer une économie stagnante ou de masquer la fraude et la mauvaise gestion par les grandes sociétés constitue-t-elle une justification? Sommes-nous prêts à participer à une intervention qui créera le chaos dans une région déjà instable, avec des résultats qu'on ne peut absolument pas prédire?

    Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur les effets qui découleraient d'un refus de collaborer avec un proche voisin et un allié, un géant accroupi juste de l'autre côté de notre frontière non défendue. Nous devons être prêts à subir des répercussions, économiques et autres, à endurer certains inconvénients pendant que nous nous en tenons à nos principes.

    Nous devons aussi tenir compte des conséquences à long terme que cette guerre aura sur la prochaine génération d'Irakiens. L'association des médecins pour la sécurité mondiale nous dit que 50 p. 100 de la population irakienne est âgée de moins de 18 ans. Sommes-nous prêts à aller en guerre contre des enfants, des enfants qui ont déjà subi des sévices et des privations inimaginables aux mains des adultes à qui ils ont été confiés?

    Chaque bombe qui sera larguée tuera des milliers de ces enfants. Chaque coup de feu tiré tuera encore d'autres enfants. Nous devrions nous préoccuper avant tout de ceux qui survivront, de ceux qui seront orphelins, qui seront dévastés et qui grandiront avec une haine encore plus profonde de la démocratie occidentale. Ils feront partie des dégâts subsidiaires, des épaves inévitables des puissantes marées de la guerre. Dieu seul sait les sentiments qu'ils porteront dans leur coeur en regardant leur pays ravagé par leurs libérateurs.

    Qu'adviendra-t-il des réfugiés, de cette marée de personnes miséreuses forcées de quitter leur foyer? Comment pouvons-nous justifier une décision qui changera de façon catégorique la vie de millions d'êtres humains?

    Nous reconnaissons tous que l'Irak a un dictateur démoniaque qui a torturé et tué sans merci son propre peuple. Pourtant, nous avons imposé des sanctions brutales qui ont affaibli la population civile au point où elle n'aura jamais la force de se débarrasser de ce monstre. L'Irak a été démoli à plusieurs reprises. Il y a peu d'infrastructures pour appuyer la technologie et l'éducation, et peu d'espoir d'autosuffisance, mais pourtant nous, du monde occidental, réclamons un changement de régime.

    Saddam Hussein est plus dangereux pour son propre peuple que pour nous, mais nous envisageons de lancer une attaque dévastatrice contre ces gens sans savoir de façon certaine si nous sommes en danger, ce qui serait la seule raison valable de recourir à la violence.

  +-(2415)  

    Il est aussi certain que des hommes et des femmes des forces occidentales mourront, seront blessés ou souffriront de problèmes psychologiques terribles à cause de la guerre. Quelle responsabilité avons-nous à l'égard de ces hommes et de ces femmes qui choisissent délibérément de défendre notre pays? Nous ne saurions les envoyer à la guerre avant d'avoir épuisé toutes les voies de rechange possibles à la violence ultime qu'on appelle la guerre.

    En tant que pays, nous souscrivons pleinement au droit international et aux solutions diplomatiques. Nous sommes des artisans et des gardiens de la paix. Nous devons respecter notre engagement à l'égard du mandat des Nations Unies, peu importe les demandes de nos voisins. Nous ne devons jamais compromettre la réputation que nous avons dans le monde, réputation que nous devons à Lester B. Pearson et qui nous confère un respect unique dans tous les pays où je suis allée. Nous n'en sommes pas encore au point de salir cette réputation.

    Les inspecteurs en désarmement n'ont pas encore trouvé d'armes assez puissantes pour présenter une menace sérieuse à la sécurité du monde libre. Ils ont réclamé plus de temps. La question est de savoir si l'Irak respecte pleinement les résolutions des Nations Unies exigeant qu'on laisse les inspecteurs fouiller le pays dans tous ses coins et recoins. Les réponses ne sont pas concluantes et les inspecteurs ont réclamé plus de temps.

    Saddam Hussein a été une menace dormante pendant plus de 12 années. Où est l'urgence? Pourquoi les inspecteurs des Nations Unies ne peuvent-ils pas avoir plus de temps? Cette guerre a été dépeinte comme étant une autre bataille dans la guerre contre le terrorisme. C'est se montrer irresponsable et vulgairement manipulateur que d'utiliser le terrorisme pour justifier une attaque qui n'a aucun lien avec le terrorisme contre un ennemi qui n'a aucun lien avec le terrorisme. Aucune preuve claire n'associe l'Irak au réseau Al-Qaïda. Où est le véritable coupable, Oussama ben Laden, qui a travaillé pour la CIA? Il n'en est nullement question dans le discours d'hier soir.

    En fait, aucune preuve absolue n'associe le gouvernement irakien à des organisations terroristes techniquement capables de perpétrer une attaque contre les États-Unis d'Amérique. L'Irak est un pays sans marine et sans force aérienne, un pays dont la population a subi la guerre et souffert de pénurie pendant des années. Comment peut-il présenter une menace sérieuse au complexe militaire le plus puissant de la planète?

    Certains voudraient nous entraîner dans la guerre en prétendant que, si nous n'attaquons pas les premiers, ce qui ne s'est jamais vu, Saddam Hussein pourrait entraîner le monde dans un bouleversement tel que nous n'en avons pas vu depuis la Seconde Guerre mondiale. C'est mettre à l'épreuve notre crédulité et faire insulte à notre intelligence collective. C'est également faire insulte aux 13 millions de soldats et aux 25 millions de civils qui sont morts au cours de cette guerre et ont rendu possible l'accession des États-Unis au rang de superpuissance.

    En envahissant l'Irak, nous montrons que nous n'accordons aucune valeur à la vie, à l'autonomie et à la dignité des Irakiens. Nous risquons de nous faire des ennemis qui chercheront avec plus de passion encore à causer du tort à l'Amérique et à ses alliés. Les attentats terroristes sont en train de devenir la vraie menace du XXIe siècle, et ce n'est pas une menace contre laquelle nous pouvons nous prémunir.

    Le terrorisme est la conséquence des privations, d'une mentalité suscitée et encouragée par le mécontentement. À sa source, on trouve la faim, la dévastation, l'impossibilité de rêver d'une vie meilleure.

    Enfin, je tiens à dire clairement que s'opposer à la guerre américano-britannique contre l'Irak n'est pas de l'antiaméricanisme. Disqualifier les Canadiens qui s'opposent à cette guerre parce qu'ils seraient antiaméricains ne sert qu'à limiter le débat. La décision de faire entrer notre pays en guerre doit être prise sans tenir compte du commerce ou de la proximité. C'est avant tout une question morale et non économique. C'est une question qui concerne l'éthique et la sécurité mondiale, non l'économie, la politique et la soif de pétrole. Aucune considération, sinon la preuve claire et irréfutable d'un danger imminent, ne justifie de jeter dans la guerre notre beau pays démocratique très tolérant et démocratique.

+-

    M. Jason Kenney (Calgary-Sud-Est, Alliance canadienne): Madame la présidente, la députée peut-elle nous dire si elle pense qu'il n'existe pas de preuves selon lesquelles l'Irak possède des armes de destruction massive, et qu'il n'y a pas de cause de conflit possible si l'on fait respecter ces résolutions? À son avis, pourquoi le Conseil de sécurité des Nations Unies a-t-il adopté la résolution 1441 et 15 autres résolutions avant d'exiger des preuves de désarmement? Selon elle, pourquoi le chef des inspecteurs Blix a-t-il déclaré hier que le gouvernement irakien ne semble toujours pas comprendre qu'il a l'obligation d'obtempérer?

    Elle semble croire qu'il n'existe pas de menace, imminente ou éloignée; qu'il n'existe pas de preuve réelle; que c'est là le dessein de quelque vaste conspiration des sociétés américaines, le tout étant assaisonné d'un peu d'argent venant de partout dans le monde et d'un peu d'impérialisme américain; ce sont là toutes les vieilles théories de la conspiration de la gauche paranoïaque.

    Ensuite, pourrait-elle expliquer ce qui a poussé la Syrie à voter en faveur de la résolution 1441 si ce pays croyait que l'Irak ne possède pas d'armes de destruction massive? Pourquoi les Nations Unies se sont-elles intéressées à cette question en novembre dernier s'il n'y a pas de problème, s'il n'y a pas de menace et s'il n'y a pas d'armes?

    Comme elle semble avoir la science infuse à ce sujet, peut-être pourrait-elle nous expliquer ce qu'il est advenu des 6 500 bombes chimiques qui faisaient partie de l'arsenal irakien il y a 10 ans et qui ont subitement disparu? Qu'est-il advenu du gaz VX qui a subitement disparu et qui n'a pas été mentionné dans le document que l'Irak a remis aux inspecteurs en armement? Qu'est-il arrivé aux autres produits biologiques qui étaient mentionnés dans les déclarations irakiennes d'il y a 10 ans et qui semblent avoir disparu alors qu'il n'existe pas de preuve de leur destruction et que les scientifiques ne sont pas en mesure de déterminer où ils se trouvent?

    Peut-elle nous expliquer ce qu'elle veut dire quand elle mentionne qu'il n'y a pas de menace imminente? Quelle est sa définition du terme imminent? Le problème ne tient-il pas aux états parias? Ne comprend-elle pas que le problème, c'est qu'imminent veut dire trop tard. Au moment où un missile scud plein de produits biologiques frappera Tel Aviv, il sera trop tard pour des centaines de milliers de personnes. Lorsqu'un flacon de gaz VX aura été remis à un membre du réseau Al-Qaïda et qu'il aboutira dans le métro d'une ville occidentale, il sera trop tard. Ne comprend-elle pas qu'en détruisant les armes on prévient la menace imminente? Ne comprend-elle pas cela car, il semble que le Conseil de sécurité de l'ONU l'ait compris.

  +-(2420)  

+-

    Mme Carolyn Parrish: Madame la présidente, la seule chose qui me paraisse imminente est que je perde patience vu l'heure tardive et mon grand âge. Je n'ai pas l'habitude de me laisser traiter de la sorte par une personne qui est à moitié plus jeune que moi, mais, par égard pour la Chambre, je répondrai à la question.

    Je n'ai jamais prétendu qu'il n'y avait pas de danger. Je n'ai jamais dit que l'on n'avait pas de raison valable d'aller sur le terrain. En fait, j'abonde dans le sens du député quand il affirme que la menace de violence a fait fléchir Saddam Hussein, ce qui est une bonne chose. Personne n'a dit que cet homme n'était pas dangereux. Il est en fait plus dangereux pour son propre peuple que pour les tout puissants États-Unis d'Amérique. À mon avis, il faudrait de nombreuses volées de pigeons voyageurs pour soulever l'un de ces missiles et l'amener jusqu'à la cible, car Saddam Hussein n'en a pas la capacité matérielle.

    Nous avons sur place une force onusienne de confiance qui affirme ne pas en avoir terminé avec ses inspections, et ne pas avoir fini de s'assurer qu'il n'y a pas suffisamment de danger imminent. Je suis parfaitement d'accord avec le travail des inspecteurs. Je suis parfaitement d'accord pour que M. Bush se précipite devant les caméras de la télévision dès qu'il en a envie pour y proférer des menaces furibondes, même si cela me fait peur. Mais je ne crois pas que le moment soit venu pour le Canada d'envoyer des soldats sur le terrain pour s'y faire descendre.

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    M. Joe Comartin (Windsor—St. Clair, NPD): Madame la présidente, au vu de l'importance que notre collègue d'en face accorde au rôle que le Canada devrait jouer, conviendra-t-elle que l'affaire est d'une importance si capitale, sur le plan de la politique nationale, qu'il serait utile de tenir un vote à la Chambre avant de prendre la décision de déclarer ou de ne pas déclarer la guerre à l'Irak?

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    Mme Carolyn Parrish: Nous ne sommes pas censés parler de ce qui se passe au sein de notre caucus, madame la présidente, mais j'ai demandé ce matin au premier ministre si nous ne pourrions pas faire suivre le débat exploratoire—et je crois comprendre qu'il s'agit en fait pour lui de décider s'il faut déclarer ou non la guerre—d'un scrutin exploratoire.

    Je suis persuadée que si nous en venons là, nous serons nombreux au caucus à le souhaiter, mais je voudrais dire officiellement que je favorise la tenue d'un scrutin exploratoire et que j'estime que notre gouvernement et notre premier ministre devraient permettre aux 301 députés de voter ouvertement au nom de leurs électeurs pour ou contre une décision aussi grave.

    L'Accord de Kyoto est un traité international et, conformément au régime parlementaire britannique, nous n'étions pas tenus de l'entériner par un vote, mais nous l'avons fait. Comme ceci n'est pas moins important pour mes électeurs que l'Accord de Kyoto, je suis donc entièrement et parfaitement en faveur que nous tenions un vote là-dessus.

  +-(2425)  

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la présidente, j'aimerais féliciter la députée de l'excellent discours qu'elle a prononcé ce soir et profiter de l'occasion pour la féliciter également d'avoir eu le courage d'assumer ses convictions en prenant la parole alors que peu de ses collègues étaient prêts à le faire sur la tenue essentielle d'un vote à ce sujet à la Chambre des communes.

    La députée a parlé avec beaucoup de passion et de connaissance des répercussions de ces sanctions brutales qui ont paralysé le peuple irakien et littéralement entraîné la mort de centaines de milliers d'enfants. On parle de 500 000 enfants tués.

    La députée saura que le Comité des affaires étrangères a voté, à l'unanimité je crois, pour exiger qu'on mette un terme à ces sanctions économiques. Bien sûr, ce comité était alors présidé par l'actuel ministre des Affaires étrangères. La député siège avec les libéraux, mais je me demande parfois pourquoi, puisque ses collègues ne semblent pas avoir le même courage dont elle a si souvent faire preuve pour faire part de ses convictions. Je dois cependant reconnaître qu'un nombre de plus en plus important d'entre eux le font ce soir. Je tiens à être juste.

    J'aimerais que la députée essaie d'aider ceux d'entre nous qui avons beaucoup de mal à comprendre comment le Comité des affaires extérieures a bien pu voter pour mettre fin aux sanctions et être devenu silencieux par la suite. Je suppose que le fait que le ministre des Affaires étrangères a déjà présidé le Comité des affaires étrangères et qu'il est de plus en plus ensorcelé par George Bush peut jouer. Comment se fait-il que le ministre des Affaires étrangères ne soit plus disposé à prendre position pour mettre un terme aux sanctions économiques brutales qui paralysent le peuple irakien?

+-

    Mme Carolyn Parrish: Madame la présidente, je voudrais tout d'abord intervenir fermement à nouveau et dire que je suis une vraie libérale. Cela veut dire que je suis légèrement à la droite sur le plan économique et beaucoup à gauche sur le plan social. Je suis très à l'aise de ce côté-ci de la Chambre et je le serai tant qu'une guerre ne sera pas déclarée sans l'approbation des Nations Unies. Je pourrais alors siéger dans l'un de ces sièges réservés aux indépendants là-bas.

    En ce qui concerne le ministre des Affaires étrangères, je le respecte énormément. C'est une personne formidable qui a soumis sincèrement cette recommandation au comité et permis aux intéressés de voter librement à l'unanimité pour formuler cette recommandation.

    Quelque chose de très étrange se produit lorsqu'on se retrouve au Cabinet. Certains disent qu'on perd alors tout bon sens, mais je n'en crois rien. Ce qui se produit, c'est qu'on doit travailler en tant que membre d'une petite équipe différente et qu'on est soumis à des restrictions différentes. Cependant, il n'y a personne à la Chambre que j'aimerais mieux voir à ce poste que le député de Toronto-Centre—Rosedale, car c'est un homme remarquable et je pense qu'il comprend la situation fort bien et il va travailler pour parvenir à ce qu'on prenne les bonnes mesures.

    Je voudrais également remercier les alliancistes car ils ont proposé l'une de mes marottes favorites, soit le fait de déléguer des pouvoirs aux comités. La petite insurrection qui a eu lieu avant Noël et à laquelle j'ai participé, lorsque nous avons fait en sorte que les présidents de comité soient élus par le groupe par scrutin secret, est juste un pas dans la bonne direction pour ce qui est de déléguer des pouvoirs aux comités. Ils ne sont pas là simplement pour discuter et présenter des résolutions dont tout le monde fait fi. De plus en plus, nous devons leur donner le pouvoir de soumettre des recommandations auxquelles on va donner suite. Je remercie le députée de ses compliments.

+-

    M. Rahim Jaffer (Edmonton—Strathcona, Alliance canadienne): Madame la présidente, mes sentiments sont partagés au moment où j'interviens dans ce très important débat. D'une part, en tant que musulman, j'éprouve énormément de sympathie pour les pays du Proche-Orient où il y a des troubles incessants et où la plupart des gens sont aux prises avec des difficultés constantes. De toute évidence, le fait de partager la même foi et de connaître l'importance des enseignements de l'Islam en matière de paix, de tolérance et de bonne foi et de ne pas voir ces valeurs respectées, particulièrement par des dictateurs radicaux, m'attriste toujours et je sais que ma communauté et nombre d'autres musulmans dans le monde partagent le même sentiment.

    D'autre part, comme j'ai également connu un régime semblable, ma famille ayant fui le régime dictatorial radical d'Idi Amin en Ouganda, et comme j'ai eu la chance de venir au Canada, je connais, à l'instar des membres de ma famille, la valeur de pays comme le Canada, les États-Unis, la Grande-Bretagne et d'autres qui s'insurgent contre les dictateurs radicaux dans le monde, contre les gens qui violent les droits de la personne et qui n'accordent aucune valeur à la démocratie. De toute évidence, nous avons eu la chance de nous installer dans un pays qui prône ces valeurs.

    Nous discutons aujourd'hui de l'opportunité de continuer dans cette veine et d'aider les gens qui rencontrent des difficultés comme celles que ma famille a connues avant de pouvoir venir s'établir au Canada.

    La résolution 1441 adoptée par le Conseil de sécurité en novembre dernier demandait à Saddam Hussein et au gouvernement irakien de s'engager à procéder au désarmement et à coopérer avec les inspecteurs en désarmement des Nations Unies. Malheureusement, cela ne s'est pas produit.

    Je vais essayer de décrire plusieurs situations où Saddam Hussein a refusé de se conformer aux termes de la résolution 1441 et d'expliquer ce que le Canada doit faire, à titre de nation, pour assurer la paix au Proche-Orient. Ce ne sera pas facile.

    Saddam Hussein a une longue histoire de non-conformité. Avant la guerre du Golfe de 1991, il a ordonné le recours à des armes chimiques contre l'Iran pendant un conflit qui a duré dix ans, et contre le peuple kurde dans le Nord. Plus de 1,5 million de personnes ont perdu la vie au cours de la guerre Iran-Irak.

    L'invasion du Koweït en 1990 était illégale aux termes du droit international. Les atrocités et les crimes commis par l'Irak durant son occupation sont bien documentés : meurtres, viols, torture, pillages de foyers et de trésors nationaux et destruction des puits de pétrole du Koweït, ce qui a donné lieu à de gigantesques catastrophes environnementales.

    Durant la guerre du Golfe, les missiles Scud de Saddam ont attaqué Israël, un pays non combattant; cela démontre bien que Saddam peut volontiers attaquer des pays sans la moindre provocation.

    Après la guerre du Golfe, dans le cadre du cessez-le-feu signé par l'Irak et des résolutions adoptées subséquemment par les Nations Unies, l'Irak avait accepté de désarmer et de permettre aux inspecteurs en désarmement de l'ONU de détruire une partie des armes chimiques. Cependant, en 1998, comme nous le savons, un grand nombre de ces inspecteurs en désarmement ont quitté l'Irak parce que le pays ne respectait pas les résolutions des Nations Unies.

    En outre, des efforts ont été déployés pour tenter d'aider le peuple irakien. Le programme Pétrole contre nourriture a été mis en place pour permettre à la population d'éviter de porter le poids des actions de Saddam. Ces mesures ont en fait été contournées par le régime irakien.

    Venons-en maintenant au non-respect de la résolution 1441. Récemment, soit le 27 janvier, l'inspecteur en chef Blix a fait rapport au Conseil de sécurité des Nations Unies de certains manquements de l'Irak, qui n'a donc pas tenu ses obligations aux termes de la résolution 1441.

    L'Irak devait déclarer tous les dispositifs et les armes chimiques, mais ne l'a pas fait. Le rapport de plus de 12 000 pages comportait de nettes omissions, surtout en ce qui concerne le gaz neurotoxique, l'anthrax et les bombes chimiques dans les charges militaires.

    L'Irak était censé donner accès sans condition à tous les sites. Il l'a fait, mais n'a déployé aucun effort pour y faciliter la tâche des inspecteurs. Respecter la lettre et non l'esprit de la loi, voilà vraiment le mandat qu'a suivi le régime irakien.

    L'Irak était censé garantir aux avions de reconnaissance des Nations Unies l'accès à tout son espace aérien, mais a refusé de ne pas pointer ses missiles sur l'avion des Nations Unies. Là encore, les inspecteurs ont eu du mal à se rendre sur place et à déterminer si des sites existent toujours, mais les Irakiens tentent de cacher ce fait également.

  +-(2430)  

    Comment le Canada a-t-il réagi à ce non-respect des conditions et quelle orientation devrions-nous prendre? Nous sommes-nous dirigés dans la bonne direction?

    Le Canada a, à juste titre, agi avec les Nations Unies pour régler le problème du non-respect des conditions par l'Irak. Nous continuons d'encourager le gouvernement et d'autres partenaires à mener à bien le processus de l'ONU.

    Le Canada a appuyé l'intervention multilatérale de 1990-1991 afin d'empêcher Saddam Hussein de rester au Koweit. Le Canada a appuyé toutes les résolutions de l'ONU adoptées au cours de la dernière décennie, depuis les résolutions prévoyant les sanctions en passant par celles établissant la formule « pétrole contre nourriture » jusqu'à la résolution 1441.

    Le Canada a aussi appuyé l'opération Renard du désert en 1998, lorsque Saddam Hussein a refusé de coopérer avec les inspecteurs des armements.

    Comme d'autres l'ont mentionné, même nous, de l'Alliance canadienne, avons mis en doute l'efficacité des sanctions. Lorsque les membres du comité comprenant des représentants de tous les partis ont accepté à l'unanimité d'assouplir les sanctions, en 2000 si je ne m'abuse, pour essayer d'aider ces gens-là, nous avons été solidaires de cette idée. Nous avons toujours mis en doute l'efficacité des sanctions imposées aux gens sur le terrain.

    L'Alliance canadienne a été aux premières lignes lorsqu'il s'est agi de faire pression sur le gouvernement du Canada pour qu'il discute, ici même à la Chambre, du problème du non-respect des conditions par les Irakiens et qu'il aborde cette question dans bon nombre des discours qu'il fait sur les affaires et la politique étrangère.

    Que faisons-nous à partir de là? Dans les recommandations que nous avons faites, bon nombre de mes collègues, y compris le chef de l'opposition et notre porte-parole en matière d'affaires étrangères, ont expliqué très clairement, contrairement à certains autres partis à la Chambre, ce que nous devrions faire dans les prochaines semaines, notamment en attendant la suite des événements. Il y a des choses fondamentales que nous pouvons continuer d'encourager le gouvernement et l'ONU à faire, par exemple, encourager les Nations Unies à aller au bout de leur processus.

    De toute évidence, la première recommandation, c'est que le Canada devrait continuer d'appuyer le processus des Nations Unies. Je pense que nous aimerions tous voir le système fonctionner par l'entremise de l'ONU et, espérons-le, respecter le processus pendant encore un certain temps.

    Comme mes collègues l'ont dit, le Canada devrait malgré cela commencer à se préparer, parce qu'il pourrait y avoir rupture du processus. Nous devons pouvoir nous préparer à une guerre éventuelle, notamment en travaillant avec nos alliés, le R.-U, les É.-U. et l'Australie. Comme bon nombre l'ont dit clairement, c'est la solution que nous souhaiterions voir en dernier recours, parce que personne ne sort gagnant d'une guerre.

    Cela ne veut pas dire que nous ne devons pas nous préparer, que nous ne devons pas travailler avec nos alliés et nous préparer au pire si tout échoue. Cela comprend l'envoi de planificateurs militaires au commandement central américain et la participation à l'élaboration de certains plans. C'est une réalité et nous devons nous y préparer.

    Voici ce qui suscite chez moi des inquiétudes. Dans les semaines qui viennent, j'attendrai avec impatience le déroulement du processus. Nous savons que M. Powell présentera très prochainement un rapport aux Nations Unies. Par la suite, Hans Blix mettra la dernière main à son rapport, à la fin février, espère-t-on.

    Il serait préférable d'attendre la présentation de ces deux rapports avant d'engager le Canada dans des actions militaires concrètes. Il ne reste que quelques semaines. Nous pouvons encore attendre.

    Toutefois, une intervention militaire est justifiée si, par exemple, dans les jours ou les semaines qui viennent, l'Irak prend contre un de ses voisins des mesures belliqueuses ou agressives qui menaceraient la stabilité dans la région, comme il l'a fait dans le passé contre l'Iran ou le Koweït. En outre, au cours du processus, les Nations Unies pourraient bien considérer comme nécessaire une intervention militaire en raison des violations de la résolution 1441.

    Évidemment, lorsque je parle de guerre, je sais, comme je l'ai dit au départ, que la plupart des Canadiens sont contre. Je crains que la guerre ne fasse qu'accroître un danger imminent au lieu de le désamorcer.

    Je crois qu'il faut s'y attendre, surtout si je tiens compte de ce que disent un certain nombre de musulmans au Canada et du fossé qui, hélas, se creuse entre les pays occidentaux et les pays islamiques. Cela m'inquiète beaucoup. Malheureusement, même si nous agissons dans l'intérêt supérieur des Irakiens en essayant de renverser un impitoyable dictateur, de nombreux radicaux risquent d'y voir le signe qu'il est temps de lancer de nouveaux attentats terroristes, avilissant l'islam d'une façon qui ne fait de bien à aucun groupe islamique.

    C'est une crainte, mais cela ne veut pas dire que nous ne devons pas être à l'affût de ce que nous pouvons faire pour promouvoir les droits de la personne et la démocratie dans le monde.

  +-(2435)  

    Bien franchement, un dirigeant comme Saddam Hussein est en place depuis bien trop longtemps et fait du mal à son propre peuple. Comme je l'ai dit, l'histoire de ma propre famille me dit assez que cela est inacceptable. Nous avons la responsabilité de nous joindre à nos alliés et de faire ce que nous pouvons pour l'empêcher.

+-

    Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Madame la présidente, j'ai une observation à faire à la suite de la description qu'a faite l'intervenant précédent des événements qui ont mené à l'évacuation des inspecteurs en désarmement en 1998.

    Le député a dit carrément que, bien que les inspecteurs en désarmement aient réalisé des progrès considérables de 1992 à 1998 pour démanteler et détruire les armes de destruction massive, ils ont fini par quitter l'Irak en raison de la non-coopération du gouvernement irakien et de son non-respect du processus d'inspection du désarmement. On sait que le processus d'inspection était en cours. Oui, il a essuyé des vexations, oui, il s'est heurté à des obstacles, mais il progressait néanmoins.

    Comme je l'ai mentionné plus tôt ce soir, il est clairement établi que beaucoup plus d'armes de destruction massive ont été détruites et démantelées en raison du processus d'inspection du désarmement, de 1992 à 1998, que pendant toute la guerre du Golfe. Si les inspecteurs ont quitté l'Irak en 1998, c'est parce que les États-Unis avaient espionné ce pays, compromettant ainsi le processus d'inspection du désarmement. Les États-Unis ont ensuite déclaré qu'ils comptaient bombarder l'Irak. Bien entendu, les inspecteurs ont quitté le pays.

    Le député n'est-il pas au courant de ce fait? N'y a-t-il pas lieu de corriger le récit des événements qui ont mené à l'évacuation des inspecteurs en désarmement?

  +-(2440)  

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    M. Rahim Jaffer: Madame la présidente, ce que j'essaie de dire, sans entrer dans tous les détails dont s'embarrasse ma collègue, c'est que les inspecteurs en désarmement ont manifestement soulevé des inquiétudes avant même que les États-Unis ne laissent clairement entendre qu'ils bombarderaient l'Irak.

    Le régime irakien a érigé de nombreux obstacles empêchant les inspecteurs en désarmement de faire leur travail. Il a refusé d'indiquer honnêtement où les armes étaient cachées ou fabriquées. Cela a suscité beaucoup d'inquiétudes et de tensions, au point où d'autres, jugeant que les inspecteurs en désarmement n'étaient pas en mesure d'accomplir efficacement leur travail, ont décidé d'engager leur participation.

    Voilà le noeud du problème. Le régime ne s'est montré aucunement disposé à respecter les résolutions des Nations Unis, et c'est ce qui explique où nous en sommes aujourd'hui. L'Irak a même violé à de nombreuses reprises la résolution 1441. Voilà pourquoi j'ai dit espérer qu'on pourra encore régler la situation par la voie onusienne et au moyen du processus vers lequel nous nous sommes orientés.

    Nous devrons nous poser une question dans les prochains jours, à mesure que le rôle du Canada se précisera. J'ai parlé de ce qu'a vécu ma famille et d'autres familles à travers le monde. Nous ne pouvons pas assister à ce genre de choses et laisser des gens connaître de telles épreuves sans réagir, surtout quand on a le bonheur de vivre dans une société libre et démocratique. Parfois, il faut agir. Espérons qu'une intervention militaire ne sera pas nécessaire, mais nous devons nous préparer à une telle éventualité.

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    Mme Alexa McDonough: Madame la présidente, je tiens à dire qu'aucun député de n'importe quel parti à la Chambre n'a dit que nous devrions rester sans broncher et ne pas nous occuper des craintes entourant les armes de destruction massive et la possibilité que Saddam Hussein détienne toujours de telles armes.

    Nous devons reconnaître qu'au cours du processus d'inspection du désarmement qui a mené au déclenchement des frappes aériennes américaines et à l'évacuation des inspecteurs en 1998, les inspecteurs ont témoigné. Il est attesté qu'entre 96 et 98 p. 100 des armes de destruction massive ont été détruites dans ce pays. Prétendre que le processus d'inspection du désarmement ne donne pas de résultat ne semble pas concorder avec la réalité.

    Le député ne se fait-il pas l'écho de la propagande inépuisable provenant des États-Unis? Comme nombre de députés l'ont dit ce soir, les États-Unis semblent déterminés à lancer une attaque contre l'Irak malgré la preuve que le processus d'inspection de l'armement, qui est frustrant, certes, donne néanmoins des résultats.

  +-(2445)  

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    M. Rahim Jaffer: Madame la présidente, le processus a très bien fonctionné pendant un certain temps, mais comme je l'ai dit, il ne fonctionne plus peu importe le type d'agression qu'invoque la députée. Le fait est que plusieurs inspecteurs en désarmement ont été incapables de faire leur travail et la tension accrue les a obligés de quitter le pays. Depuis quelques années, soit depuis le départ des inspecteurs, certains indices laissent croire à une reprise de l'accumulation des stocks d'armes de destruction massive. Malheureusement, le régime a mis un terme à la démilitarisation et a repris la construction de son arsenal militaire.

    Nous verrons si la députée croira l'information qui émanera des États-Unis. Colin Powell doit présenter un rapport à l'ONU. Nous pouvons essentiellement prendre les faits pour argent comptant si nous voulons croire ce que l'on nous dira. Hans Blix remettra également son rapport sous peu et nous serons en mesure de constater s'il y a eu augmentation de la capacité militaire de ce pays en particulier.

    Malheureusement, je crois qu'en bout de ligne, même si je voulais convenir avec la députée que les inspecteurs en désarmement ont obtenu toutes les réponses qu'ils cherchaient, ce ne serait pas la réalité non plus. De toute évidence, la vapeur était sur le point d'être renversée vers la fin des années 90, mais nous constatons maintenant que la situation s'est aggravée.

    Nous verrons ce que ça donnera. Le rapport initial de Hans Blix a soulevé d'importantes questions au sujet de la capacité militaire actuelle de l'Irak et au sujet des armes que le régime à réussi à fabriquer au cours des dernières années. J'ai hâte de connaître la réaction des États-Unis et de voir ce que le prochain rapport des inspecteurs nous apprendra.

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    M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, Alliance canadienne): Madame la présidente, mon collègue a parlé de l'expérience de ses parents en Ouganda et des terribles violations des droits de la personne qui ont été commises dans ce pays sans l'intervention des Nations Unies. En fait, comme le sait le député, lorsque Idi Amin a essayé d'étendre illégalement son territoire en Tanzanie, les Nations Unies n'ont toujours pas bougé. Lorsque la Tanzanie a finalement répliqué pour se protéger et qu'elle a pénétré en Ouganda, ce qui a mis fin pour de bon au règne d'Idi Amin, ce pays s'est fait réprimander au moyen d'une résolution des Nations Unies pour avoir pris des mesures contre l'Ouganda.

    Notre collègue a fait allusion à la foi des communautés islamiques et musulmanes. Dans nos analyses, on néglige trop souvent la compréhension des facteurs religieux qui entrent en jeu. Les musulmans ont été victimes d'un grand nombre d'atrocités, et dans plusieurs cas ceux-ci n'ont pas obtenu la protection de l'ONU.

    Une voix: Au Kosovo.

    M. Stockwell Day: Oui, le Kosovo est évidemment un autre exemple.

    Existe-t-il un climat de méfiance au sein de la communauté musulmane du Canada face aux Nations Unies, ou cette communauté tient-elle l'ONU en aussi haute estime que le font la plupart des autres Canadiens?

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    M. Rahim Jaffer: Madame la présidente, je remercie le député pour sa question réfléchie. Il me serait difficile de dire, pour l'ensemble de la communauté musulmane vivant au Canada, si elle souscrit ou pas aux actions de l'ONU, mais différentes personnes de cette communauté, dont certains membres de ma propre communauté, la communauté ismaïlienne, m'ont fait savoir qu'ils ne comprenaient pas très bien pourquoi les Nations Unies agissaient dans certains cas, mais de toute évidence pas dans d'autres.

    À quelques reprises dans le passé, la communauté musulmane internationale a exercé une influence positive sur les Nations Unies et des mesures ont été prises suites à ces démarches. Mais il y a eu des pays où les Nations Unies ne sont pas du tout intervenues, notamment là où ces musulmans en particulier, je songe au Kosovo et à d'autres régions dans le monde, se méfient beaucoup des motivations de cette organisation, lui soupçonnant des intérêts autres que ceux affichés, et de ce qui fonde son intervention ou son indifférence.

    L'argument est valable. Bien que je ne tienne pas à mettre toute la communauté islamique dans le même panier, je crois tout de même que c'est inquiétant de voir comment les interventions ont été décidées dans le passé.

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    M. Derek Lee (Scarborough—Rouge River, Lib.): Madame la présidente, nous avons eu un excellent débat ici ce soir sur cette question et, même s'il ne se terminera pas par un vote, il y a toujours la possibilité que, au fur et à mesure que les choses évoluent, on nous demande à un moment donné de nous prononcer.

    Sans répéter ce qu'ont dit mes collègues des deux côtés de la Chambre, je vais parler un peu de la question sous deux ou trois angles: celui du rôle du Canada à ce moment-ci de l'histoire et celui du rôle du Canada jusqu'à aujourd'hui. J'ai l'intention de faire ressortir la continuité.

    Certains dans cette Chambre suggèrent que le Canada est en train de modifier la manière dont il fonctionne à l'échelle internationale. À mon avis, je ne pense pas que le Canada ait changé. Nous avons régulièrement participé aux missions de maintien de la paix et d'édification de la paix là où cela était nécessaire; nous avons régulièrement participé aux initiatives collectives de sécurité des Nations Unies et de l'OTAN. Nous avons à notre actif la Corée, le Moyen-Orient, le Congo, l'Irak, la Bosnie et le Kosovo. Si l'on demandait au Canada de contribuer à une intervention collective de sécurité en Irak, je suis certain que le Canada jouerait un rôle dans ce pays.

    Il y a bien entendu des conditions préalables à remplir avant que cela ne se produise mais je suis certain que les Canadiens accepteront que le Canada continue à jouer un rôle avec les Nations Unies et l'OTAN, dans des circonstances différentes, certes, et selon des préconditions différentes. Nous l'avons déjà fait et nous le ferons encore.

    L'un des députés du Nouveau Parti démocratique a demandé ce qui était advenu de la manière de faire de Lester Pearson. C'est l'un de nos grands Canadiens; il a remporté le prix Nobel de la paix. Si je me souviens bien, c'était après que le Canada ait envoyé des forces dans la bande de Gaza, au Proche-Orient, pour y maintenir la paix.

    Il n'est pas nouveau que le Canada mette ses militaires au service de la sécurité collective. Cela ne fait que continuer. Je pense que, essentiellement, c'est la question à laquelle on nous demande de répondre.

    Je veux soulever trois points, qui ont peut-être déjà été abordés par d'autres, ou peut-être pas, mais je veux simplement m'assurer que cela a été mentionné dans ce débat. À mon avis, s'il finit par se passer quelque chose—et je n'appellerai pas cela une guerre mais plutôt une intervention collective pour la sécurité—cela ne découlera pas des événements du 11 septembre, mais bien de l'invasion du Koweit par l'Irak, de ce que nous avons appelé la guerre du Golfe il y a 11 ou 12 ans. C'est, dans un sens, un résidu de cette guerre. À la fin de cet engagement militaire, l'Irak a accepté de désarmer.

    À ce moment-ci, la plupart des observateurs pensent que l'Irak ne désarmera pas. Les inspecteurs poursuivent leur travail, comme on l'a mentionné, pour essayer de déterminer dans quelle mesure l'Irak a désarmé ou n'a pas désarmé.

    Pour renforcer mon argument, au cours de cette dernière période, nous avons maintenu des sanctions assez sévères contre l'Irak, des sanctions qui ont en fait causé du tort à des êtres humains dans ce pays. Nous avons maintenu des zones d'interdiction aérienne dans le nord et le sud de l'Irak, et d'autres choses se sont passées telles que des engagements tactiques militaires mineurs et des opérations des forces spéciales. Tout cela dure depuis dix ans sans qu'on n'en parle nécessairement aux nouvelles. L'Irak continue d'être un problème et n'a pas encore prouvé son désarmement ou son abandon des armes que nous savons qu'il possédait.

    Une intervention militaire en Irak pourrait même aboutir à la levée des sanctions imposées actuellement à ce pays, à l'acheminement de l'aide et des ressources dont les Irakiens ont tant besoin, et à la reconstruction du pays.

    J'aimerais maintenant parler des preuves de l'existence d'armes de destruction massive, ou de l'absence de telles preuves. Dans le domaine de la collecte de renseignements, il n'est pas toujours possible de dévoiler tout ce que l'on sait.

  +-(2450)  

    Il y a deux bonnes raisons à cela. Je parle de la collecte de renseignements sur la question de savoir si l'Irak possède ou non des armes de destruction massive enterrées, cachées, etc.

    La première raison pour ne rien divulguer est que nous révélerions ainsi nos sources. En disant à notre adversaire ce que nous savons, nous révélons probablement nos sources, et nous avons besoin de ces sources. La deuxième raison est que nous perdons ainsi notre avance, notre avantage. Nous perdons notre avantage, qui est de savoir qu'il ne sait pas ce que nous savons.

    Telles sont les raisons pour lesquelles les États-Unis et nos alliés ne voudront peut-être pas divulguer maintenant cette information. S'il y a une joute à finir là-dedans, ils se trouvent à divulguer leurs sources et partant, leurs renseignements.

    Si les États-Unis et les autres sont disposés à divulguer l'information aux Nations Unies le 5 février, c'est que la joute à finir est en cours, et Saddam Hussein devrait le savoir.

    Bref, comme le temps mis à ma disposition tire à sa fin, je dirai que s'il doit y avoir un engagement, cet engagement ne sera pas comme les autres. S'il le faut, nous nous engagerons.

  -(2455)  

+-

    Le vice-président adjoint: Comme il est 12 h 55, conformément à l'ordre adopté le lundi 27 janvier, le comité s'ajourne et je quitte le fauteuil.

[Français]

-

    Le président suppléant (Mme Bakopanos): Comme il est 0 h 56, la Chambre s'ajourne jusqu'à demain, à 10 heures, conformément à l'article 24(1) du Règlement.

    (La séance est levée à 0 h 55.)