INST Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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37e LÉGISLATURE, 3e SESSION
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mardi 27 avril 2004
Á | 1110 |
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)) |
M. Michael Binder (sous-ministre adjoint, Spectre, technologies de l'information et télécommunications, ministère de l'Industrie) |
Le président |
M. Michael Binder |
Le président |
M. Michael Binder |
Á | 1115 |
Á | 1120 |
Le président |
M. Marc O'Sullivan (directeur exécutif, Direction Radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes) |
Á | 1125 |
Le président |
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, PCC) |
M. Michael Binder |
M. James Rajotte |
M. Michael Binder |
M. René Bouchard (directeur général, Politique de la radiodiffusion et innovation, ministère du Patrimoine canadien) |
M. James Rajotte |
M. René Bouchard |
M. James Rajotte |
M. René Bouchard |
M. James Rajotte |
M. Michael Binder |
M. James Rajotte |
Á | 1130 |
M. Michael Binder |
M. James Rajotte |
M. Michael Binder |
M. James Rajotte |
M. Marc O'Sullivan |
Á | 1135 |
M. James Rajotte |
M. Marc O'Sullivan |
Le président |
L'hon. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.) |
M. Michael Binder |
L'hon. Joe Fontana |
Á | 1140 |
M. Michael Binder |
M. Jan Skora (directeur général, Réglementation des radiocommunications et de la radiodiffusion, ministère de l'Industrie) |
L'hon. Joe Fontana |
M. Michael Binder |
L'hon. Joe Fontana |
M. Michael Binder |
L'hon. Joe Fontana |
M. Michael Binder |
L'hon. Joe Fontana |
M. Michael Binder |
L'hon. Joe Fontana |
M. Jan Skora |
Á | 1145 |
L'hon. Joe Fontana |
M. Michael Binder |
Le président |
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ) |
M. Michael Binder |
Le président |
M. Michael Binder |
Á | 1150 |
M. Paul Crête |
M. Michael Binder |
M. Paul Crête |
M. Michael Binder |
M. John Cuningham (avocat, Services juridiques d'Industrie Canada, ministère de la Justice) |
M. Paul Crête |
Á | 1155 |
M. Marc O'Sullivan |
M. Paul Crête |
M. René Bouchard |
Le président |
M. Paul Crête |
M. René Bouchard |
M. Paul Crête |
Le président |
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.) |
 | 1200 |
M. Marc O'Sullivan |
M. Andy Savoy |
M. Marc O'Sullivan |
M. Andy Savoy |
M. Michael Binder |
 | 1205 |
M. Andy Savoy |
M. Michael Binder |
M. Andy Savoy |
M. Michael Binder |
M. Jan Skora |
 | 1210 |
Le président |
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD) |
M. Michael Binder |
M. Brian Masse |
Le président |
M. Andy Savoy |
Le président |
M. James Rajotte |
Le président |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Michael Binder |
M. Brian Masse |
 | 1215 |
M. Marc O'Sullivan |
M. Jacques Langlois (directeur général, Groupe Politique de radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes) |
M. Brian Masse |
M. Jacques Langlois |
M. Brian Masse |
M. Marc O'Sullivan |
 | 1220 |
M. Brian Masse |
M. Michael Binder |
L'hon. Joe Fontana |
M. Brian Masse |
M. Michael Binder |
M. Brian Masse |
M. Michael Binder |
M. Brian Masse |
M. Michael Binder |
M. John Cuningham |
M. Brian Masse |
M. John Cuningham |
M. Brian Masse |
Le président |
L'hon. Lyle Vanclief (Prince Edward—Hastings, Lib.) |
M. John Cuningham |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. John Cuningham |
 | 1225 |
L'hon. Lyle Vanclief |
Le président |
L'hon. Lyle Vanclief |
Le président |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Jan Skora |
L'hon. Lyle Vanclief |
 | 1230 |
M. Jan Skora |
 | 1235 |
L'hon. Lyle Vanclief |
Le président |
L'hon. Lyle Vanclief |
M. Jan Skora |
Le président |
M. James Rajotte |
M. John Cuningham |
M. James Rajotte |
M. John Cuningham |
 | 1240 |
M. James Rajotte |
M. John Cuningham |
M. James Rajotte |
M. John Cuningham |
M. Michael Binder |
M. James Rajotte |
M. John Cuningham |
 | 1245 |
M. James Rajotte |
M. John Cuningham |
M. James Rajotte |
Le président |
M. James Rajotte |
M. Marc O'Sullivan |
M. James Rajotte |
 | 1250 |
M. Marc O'Sullivan |
M. James Rajotte |
M. Marc O'Sullivan |
M. James Rajotte |
Le président |
M. James Rajotte |
M. Jacques Langlois |
M. James Rajotte |
M. Jacques Langlois |
Le président |
M. Brian Masse |
M. Marc O'Sullivan |
M. Brian Masse |
Le président |
CANADA
Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie |
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TÉMOIGNAGES
Le mardi 27 avril 2004
[Enregistrement électronique]
Á (1110)
[Traduction]
Le président (M. Brent St. Denis (Algoma—Manitoulin, Lib.)): Bonjour à tous.
Je déclare ouverte la séance du 27 avril du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie. Nous entamons notre étude du projet de loi C-2, Loi modifiant la Loi sur la radiocommunication. Ce projet de loi porte sur l'utilisation par les marchés gris et noir des signaux de télévision transmis par satellite.
Dans un instant, j'inviterai M. Binder à nous faire un exposé d'une dizaine de minutes au nom des ministères de l'Industrie et du Patrimoine.
C'est bien cela, n'est-ce pas monsieur Binder? Vous allez parler au nom des deux ministères?
M. Michael Binder (sous-ministre adjoint, Spectre, technologies de l'information et télécommunications, ministère de l'Industrie): En effet, au nom du ministère du Patrimoine et du ministère de l'Industrie. Nous sommes également accompagnés de collègues du CRTC.
Le président: D'accord, et ils auront cinq minutes pour faire un exposé.
Chers collègues, nous aurons besoin à un moment donné d'un peu de temps pour adopter une motion concernant un petit budget qui devrait nous aider à convoquer des témoins. Nous devrons également discuter du choix des témoins pour jeudi prochain. En votre nom, j'ai dressé une liste de témoins que vous devrez approuver, en vue de la séance de jeudi. Nous prévoyons entendre dans une même réunion la Coalition contre le vol de signaux par satellite, Shaw Communications ainsi que le Congrès ibéro-américain du Canada. Nous essayons de trouver un ou deux autres témoins pour la même séance, afin que les deux côtés de la médaille soient représentés jeudi. Nous pourrons y revenir plus tard.
Sans plus attendre, je céderai la parole à M. Binder.
Merci.
M. Michael Binder: Merci, monsieur le président.
Si vous permettez, j'aimerais me reporter à des diapositives que j'aimerais voir distribuer, si possible.
Le président: Vous pouvez commencer, monsieur Binder, car on est en train de les distribuer.
M. Michael Binder: J'aimerais d'abord vous présenter mes collègues. Je suis Michael Binder, sous-ministre adjoint d'Industrie Canada. Je suis accompagné aujourd'hui de Jan Skora, directeur général, Réglementation des radiocommunications et de la radiodiffusion; de John Cuningham, notre avocat; de René Bouchard, directeur général, Politique de la radiodiffusion et innovation; de Marc O'Sullivan, directeur exécutif de la radiodiffusion au CRTC; et de Jacques Langlois, directeur général, Politique de radiodiffusion, au CRTC.
J'ai pensé parcourir rapidement avec vous la liasse de diapositives pour établir le contexte dans lequel s'inscrit ce projet de loi. Si vous vous reportez à la page 2, vous comprendrez ce que ne vise pas à faire le projet de loi, ce qui est important.
Le projet de loi n'a pas pour objectif de modifier la politique culturelle canadienne en matière de contenu, ni de limiter les choix des Canadiens, ni même de surveiller les pratiques d'écoute télévisuelle des Canadiens. Il ne vise pas non plus à bannir du Canada les émissions américaines ni à conférer d'importants nouveaux pouvoirs aux inspecteurs.
Le projet de loi a plutôt pour objectif de combattre les activités commerciales illégales qui détruisent notre industrie de la radiodiffusion. Si vous trouvez mon langage un peu trop musclé, c'est parce que c'est effectivement la conséquence que peuvent avoir ces activités illégales.
Laissez-moi vous expliquer. Passons à la page suivante. Je crois que vous savez déjà comment cela fonctionne : il y a d'abord de la radiodiffusion, puis de la programmation, puis les signaux sont codés et distribués par satellite jusqu'à un dispositif que vous avez chez vous, qui décode le signal et l'envoie à votre téléviseur. Ce qu'il faut comprendre, c'est que le signal est codé parce qu'il s'agit d'un bien qui appartient au producteur et qu'il faut protéger le droit conféré au producteur sur le contenu donné.
À la diapositive 4, vous avez la façon dont la distribution fonctionne: les radiodiffuseurs—CBC, Radio-Canada et CTV—achètent leurs émissions, le contenu et leurs films de propriétaires d'émissions. Il pourrait s'agir de l'ONF, de Téléfilm, d'Hollywood, ou de propriétaires de contenu étranger. L'important, c'est de comprendre qu'ils paient pour obtenir deux droits, dont le droit de diffuser. Mais ce qu'il faut comprendre et dont nous discuterons, c'est qu'il s'agit ici du droit de diffuser au Canada. Il arrive très souvent qu'il s'agisse d'un droit exclusif de diffuser au Canada. Voilà pourquoi ce droit est acheté aux propriétaires de contenu, ce qui permet ensuite de distribuer les émissions dans vos foyers par satellite.
À la diapositive 5, vous voyez ce qui se produit lorsque quelqu'un arrive très adroitement à décoder l'émission codée et à la distribuer à des abonnés qui ne paient pratiquement rien.
À la diapositive 6, on vous explique ce que l'on entend par marché gris: ce sont des gens qui donnent de faux renseignements en prétendant qu'ils résident aux États-Unis, par exemple; par conséquent, ils ont le droit de recevoir des émissions américaines même si les services satellitaires américains n'ont pas de licence pour diffuser des émissions au Canada. La Commission fédérale des communications des États-Unis, la FCC, ne leur a en effet donné aucune licence leur permettant de diffuser leurs émissions au Canada. Autrement dit, par marché gris, nous entendons des gens qui prétendent être des citoyens américains afin d'obtenir les signaux.
Pour en avoir discuté avec DIRECTV et DISH Network, je puis vous dire que ces deux distributeurs par satellite ne desserviront pas sciemment des rediffuseurs canadiens car ils savent qu'ils n'ont pas les droits d'accès au marché canadien.
À la diapositive 7, on vous explique que c'est un problème grave dont l'ampleur ne cesse de croître. Mais je répète que nous visons surtout les revendeurs et commerçants illégaux. Vous devez bien comprendre cela. Si ce marché a connu une croissance exponentielle, c'est parce qu'il existe des gens, les revendeurs, qui ont fait du décodage, du décryptage et de l'ouverture de marchés noirs destinés aux citoyens canadiens un commerce extrêmement lucratif. Ce marché leur rapporte beaucoup, ils font beaucoup d'argent. D'après ce que nous avons appris suite aux raids policiers et saisies de matériel, c'est le marché noir qui domine aujourd'hui ce secteur de l'industrie.
Á (1115)
Soit dit en passant, l'industrie estime qu'environ 400 millions de dollars échappent chaque année au Canada. Pensez-y! Ce sont 400 millions de dollars de revenus qui nous échappent alors qu'ils pourraient servir à produire des émissions canadiennes et à créer des emplois.
Peu importe ce qu'a décidé la Cour suprême, ces commerçants ne craignent absolument pas la loi ni ne la respectent. À la diapositive 8, vous pourrez constater que ces gens-là visaient votre clientèle puisqu'ils annoncent même leurs produits dans The Hill Times. Ils cherchent donc à inciter des députés comme vous à vous prévaloir de services satellitaires gratuitement.
À la diapositive 9, nous affirmons clairement que les activités du marché noir liées à la télévision par SRD sont de toute évidence illégales. Nous parlons ensuite de la décision rendue par la Cour suprême du Canada. Si on parle aujourd'hui de «marché gris», c'est parce que pendant un certain temps, les tribunaux se sont demandés si le marché gris était légal ou pas. Or, la Cour suprême du Canada déclarait en avril 2002 que le marché gris était aussi illégal.
À la diapositive 10, nous nous demandons ce que sont les objectifs du projet de loi C-2. Le projet de loi vise au fond à mettre un terme au vol de signaux de programmation transmis par SRD, c'est aussi simple que cela. Il vise à protéger ceux qui créent et vendent les émissions télévisées et à faire en sorte qu'ils sont adéquatement rémunérés et que leurs activités sont rentables.
À la diapositive 11, on vous montre comment nous nous proposons d'y parvenir, avec quatre mesures. D'abord, il s'agit de rendre plus difficile l'obtention du matériel, et voilà pourquoi nous parlons d'instaurer des mesures destinées à contrôler les importations. Ensuite, nous voulons alourdir les peines imposées. D'après ce que nous dit la police, pour les revendeurs, les amendes s'inscrivent tout naturellement dans leurs frais généraux. Autrement dit, les amendes ne sont pas suffisamment imposantes pour décourager le marché noir.
Nous voulons également renforcer les possibilités pour l'industrie de réagir. Autrement dit, si nous fournissons des recours civils, nous croyons que l'industrie en profitera pour intenter des poursuites devant les tribunaux. Il deviendra ainsi beaucoup plus simple pour l'industrie de s'occuper d'elle-même plutôt que d'avoir recours à nous ou à la police pour traquer les revendeurs. Enfin, nous voulons moderniser les pouvoirs existants des inspecteurs.
Nous abordons de façon plus détaillée le contrôle des importations à la page 12. L'Agence des services frontaliers du Canada nous a expliqué qu'il était très difficile pour elle de contrôler les importations d'équipement illégal, et c'est pourquoi nous espérons pouvoir mieux juguler ce trafic illégal en exigeant des certificats.
La diapositive 13 explique l'alourdissement des peines. Rappelez-vous que les peines actuelles ont été établies dans la loi en 1991. Or, je le répète, l'industrie et la police nous ont convaincus que ces peines n'avaient aucun effet dissuasif, et c'est pourquoi nous croyons qu'elles doivent être alourdies, et qu'elles doivent être plus musclées.
Passons à la diapositive 14. Si nous fournissons à l'industrie les outils nécessaires pour mieux défendre ses intérêts, c'est à elle qu'il reviendra de prendre des mesures contre les revendeurs. L'industrie pourra alors mieux protéger ses droits.
La diapositive 15 aborde l'inspection. On semble s'inquiéter du fait que, dans cette disposition, nous accordons trop de pouvoirs aux inspecteurs. Or, si vous examinez l'article 8 de la loi, où se trouvent décrits tous les pouvoirs déjà conférés aux inspecteurs, vous constaterez que nous cherchons uniquement ici à préciser et à moderniser les pouvoirs existants. Rappelez-vous qu'au moment où la loi a été adoptée la première fois, on n'avait aucune idée de ce qu'étaient les ordinateurs, les téléphones cellulaires ni même les banques de données mobiles. Voilà pourquoi nous voulons moderniser ces pouvoirs.
Á (1120)
Bref, ce projet de loi est nécessaire pour assurer la survie et la prospérité de l'industrie de la radiodiffusion. Il ne s'agit absolument pas d'enrichir certaines grandes entreprises. L'industrie canadienne soutient un nombre important de producteurs de contenu culturel canadien et d'acteurs dans l'industrie, et nous ne pouvons certes pas permettre que tant d'argent lui échappe.
Je m'en tiendrai à cela. Je cède maintenant la parole à Marc.
Le président: M. O'Sullivan, du CRTC.
M. Marc O'Sullivan (directeur exécutif, Direction Radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Merci, monsieur le président.
Je vous ferai certains commentaires au sujet du projet de loi et j'aborderai brièvement la question du vol des signaux.
La Cour suprême a tranché cette question et la loi est claire: le vol ou le piratage des signaux de radiodiffusion est une activité illégale. Il y a deux ans, la Cour suprême statuait très clairement qu'au Canada, le décodage non autorisé de signaux encodés constituait une infraction à la Loi sur la radiocommunication, et ce, peu importe que les signaux proviennent du Canada ou d'ailleurs. Lorsque tous ferment les yeux devant le vol de signaux, la santé financière des entreprises de radiodiffusion et de distribution est sérieusement menacée, tout comme l'atteinte des objectifs énoncés par le Parlement dans la Loi sur la radiodiffusion.
[Français]
Le vol de signaux nuit aux Canadiens de bien des manières.
En premier lieu, le pays subit des pertes économiques. Le piratage de signaux a causé un préjudice à l'industrie canadienne de la radiodiffusion en la privant de revenus importants. Cette perte de revenus réduit la capacité des entreprises de distribution par satellite et par câble d'entretenir leurs infrastructures et d'investir dans des technologies novatrices.
Le deuxième préjudice est d'ordre culturel. En privant de revenus importants les entreprises de distribution par câble et par satellite, les télédiffuseurs, les producteurs d'émissions de télévision et les titulaires de droits de diffusion, le vol de signaux réduit la capacité des radiodiffuseurs d'acheter et de diffuser des émissions de télévision canadiennes.
Il cause aussi la diminution des contributions au Fonds canadien de télévision, lesquelles dépendent des revenus gagnés par les titulaires. Ce fonds sert à assurer le financement de productions canadiennes originales.
Le vol de signaux cause également un préjudice sur le plan social. En effet, le piratage viole les droits des détenteurs de propriété intellectuelle. La Loi sur le droit d'auteur, la Loi sur la radiocommunication et la Loi sur la radiodiffusion reconnaissent et protègent les droits des créateurs et des personnes à qui ils confient le contrôle de l'utilisation de leurs oeuvres. Ces lois incitent ainsi les créateurs à se consacrer à l'invention, à la créativité et à la communication.
[Traduction]
Bien que le CRTC ne soit pas responsable de l'application des lois sur le vol des signaux, il a le mandat clair, en vertu de la Loi sur la radiodiffusion, de réglementer et de superviser le système canadien de radiodiffusion. Le rôle de supervision peut donner l'occasion au conseil de rassembler les joueurs de l'industrie en vue d'un échange d'information et de points de vue.
Ainsi, l'an dernier, le président du CRTC, M. Charles Dalfen, a à deux reprises convoqué une réunion des PDG de BCE Inc., de Bell ExpressVu, de Star Choice, de Rogers Communications, de Québécor, de Shaw Communications, de CHUM, de Cogeco et d'Astral Media, ainsi que des représentants des associations des industries de la radiodiffusion et de la câblodistribution. Tous les participants ont précisé les mesures particulières que leur entreprise ou leur association mettaient en oeuvre pour tenter d'apporter une solution au problème du vol de signaux. Au cours de l'année qui vient de s'écouler, ils ont adopté des mesures encourageantes et ils ont accepté d'en rendre compte au conseil.
À notre tour, nous avons accepté d'informer les Canadiens des progrès réalisés au chapitre de la lutte contre le vol de signaux transmis par satellite, au moyen de notre rapport annuel de surveillance de la politique sur la radiodiffusion. Dans le dernier rapport de surveillance, nous avons exposé les mesures volontaires adoptées par chacune des parties intéressées afin de combattre le piratage. Ces mesures, de même que les modifications législatives discutées aujourd'hui, démontrent l'engagement du gouvernement et de l'industrie à combattre le vol de signaux.
Voilà ce que j'avais à dire. Je vous remercie et c'est avec plaisir que nous répondrons à vos questions.
Á (1125)
Le président: Merci, messieurs Binder et O'Sullivan.
Commençons les questions avec James Rajotte.
M. James Rajotte (Edmonton-Sud-Ouest, PCC): Merci, monsieur le président, et merci aux témoins d'avoir comparu.
J'aimerais au départ obtenir certaines précisions. Dans des documents transmis par Industrie Canada, on lit qu'environ 700 000 utilisateurs illégaux coûtent à l'industrie quelque 400 millions de dollars par année. Pouvez-vous nous dire d'où sont tirés ces chiffres?
M. Michael Binder: Je pense qu'il s'agit d'une étude entreprise par l'industrie et qui nous a été envoyée par celle-ci.
M. James Rajotte: Pouvez-vous nous dire comment s'appelle l'étude?
M. Michael Binder: Nous irons voir et vous ferons parvenir l'information.
M. René Bouchard (directeur général, Politique de la radiodiffusion et innovation, ministère du Patrimoine canadien): L'étude s'intitule « A Report to theCanadian Cable Television Association -Unauthorized Satellite Use In Southwestern Ontario ». Il s'agit d'un des documents déposés par l'industrie.
M. James Rajotte: Comment en est-on arrivé à ce chiffre de 700 000 Canadiens?
M. René Bouchard: Je ne sais pas quelle méthodologie a été suivie dans ce cas-ci, mais il y a différentes façons d'étudier l'incidence que ce phénomène a sur l'industrie. D'abord, ceux qui répondent à des sondages ne diront pas volontiers qu'ils volent des signaux transmis par satellite, et il est donc sans doute difficile d'obtenir une réponse précise. Mais cette étude-ci, de même que d'autres, demande au répondant s'il a des voisins ou des parents qui utilisent de l'équipement illicite pour avoir accès à des signaux transmis par satellite. De plus, on demande...
M. James Rajotte: C'est donc du ouï-dire, n'est-ce pas?
M. René Bouchard: Ce que je dis, c'est que l'on essaie d'estimer les pertes que cela représente pour l'industrie grâce à diverses sources. L'une des façons de faire, c'est le sondage. Mais il existe aussi l'étude que j'ai citée de l'Association canadienne de la télévision par câble.
De plus, l'industrie s'est demandé combien de gens s'étaient désabonnés du câble sans nécessairement se réabonner à la distribution des signaux transmis par satellite. C'est ce qui lui a permis d'évaluer à 700 000 le nombre d'abonnés perdus et à 400 millions la perte pour l'industrie.
M. James Rajotte: Si je pose la question, c'est parce que ce sont ces estimations qui ont entraîné le dépôt de ce projet de loi-ci. Il me semble qu'avant que notre comité juge de son bien-fondé, il devrait s'assurer d'abord de l'exactitude de l'information reçue. Je crains que le projet de loi ne se fonde sur des preuves qui ne sont peut-être pas aussi étayées qu'elles le devraient. On nous demande d'agir parce que apparemment 700 000 Canadiens forment un marché noir ou gris.
Il serait utile que nous recevions une copie de l'étude, ne serait-ce que pour nous y reporter.
M. Michael Binder: C'est un argument dont je prends bonne note.
Nous n'avons jamais prétendu qu'il s'agissait d'une étude scientifique. C'est comme lorsque l'on essaie de déterminer le nombre de personnes qui consomment des drogues : comme il s'agit d'une activité illégale, on ne s'en accuse pas nécessairement volontiers. L'industrie elle-même a fait plusieurs études, et lorsque ses représentants comparaîtront, vous pourrez leur poser précisément la question.
Mais tous les raids effectués, de même que tous les chiffres obtenus sur les sites Internet ainsi que le nombre de débranchements effectués, associés aux contre-mesures électroniques, les CME—sans oublier les appels que nous recevons—nous permettent de faire une assez bonne estimation. Mais vous avez raison : ce n'est qu'une estimation.
M. James Rajotte: Par ailleurs, dans votre exposé vous faites la distinction entre le marché noir et le marché gris, ce qui laisse entendre d'un point de vue politique qu'Industrie Canada les traite différemment, même si la Cour suprême a statué que tous deux étaient illégaux.
Industrie Canada fait-elle la différence entre ceux qui souhaitent avoir accès à des émissions non encore disponibles au Canada, d'une part, et, d'autre part, ceux qui refusent tout simplement de payer leur abonnement et s'adonnent au piratage? D'un point de vue politique, faites-vous la distinction entre ces deux genres de fraudeurs?
Á (1130)
M. Michael Binder: Nous séparons les deux parce qu'il règne une grande confusion sur ce type d'activités dans les tribunaux inférieurs. On n'a jamais remis en question la question de vol sur le marché noir. Par contre, sur le marché gris, ce n'était pas aussi clair, mais la Cour suprême du Canada a statué que les deux activités étaient illégales.
Quand à notre façon à nous de voir les choses, la loi c'est la loi : c'est donc illégal et dans notre ministère, nous appliquons la loi telle qu'elle existe aujourd'hui.
M. James Rajotte: Mais êtes-vous conscient du fait que de nombreux Canadiens veulent avoir accès à d'autres services de programmation que ceux qui sont fournis par les deux fournisseurs accrédités et que c'est la raison pour laquelle ils prennent des mesures qui sont désormais jugées illégales au Canada depuis que la Cour suprême a tranché?
M. Michael Binder: Je vais tenter la réponse suivante. Le Canada a certains des meilleurs systèmes de radiodiffusion du monde étant donné notre faible densité, notre petite population et notre immense territoire. Nous avons un taux de pénétration phénoménal du câble, de la radiodiffusion et des services satellitaires qui offre aux Canadiens un mélange et une diversité de contenu.
Est-ce possible de faire mieux? Bien sûr. Avons-nous les moyens de le faire? Certes. Comment? En s'adressant au CRTC! D'ailleurs, je crois savoir que le CRTC est déjà saisi de toute une série de nouvelles dispositions sur le contenu.
La situation est-elle parfaite? Nous visons la perfection, mais nous recherchons également un certain équilibre, en nous assurant que le marché de la radiodiffusion est vibrant, dynamique et concurrentiel, tout en étant suffisamment diversifié pour plaire à tous les Canadiens. Voilà le rôle que nous jouons, mais cela n'a rien à voir avec le projet de loi.
M. James Rajotte: Monsieur le président, les arguments de M. Binder sont excellents. Vous dites qu'il est possible d'améliorer la situation, et je souscris sans réserve à votre affirmation.
Monsieur O'Sullivan, il me semble que les câblodistributeurs ont justement essayé de combattre le problème à sa source et d'offrir des services à ceux qui regardent ailleurs. Ils ont en effet demandé au CRTC d'ajouter d'autres services à leur bouquet de chaînes, mais le conseil a refusé. Nous pouvons assurément souscrire à certaines des dispositions du projet de loi, mais si les Canadiens souhaitent obtenir des services non encore disponibles et que l'Association de la télévision par câble voit ces demandes d'ajout de canaux supplémentaires rejetées par le CRTC, on revient à la case départ. Pourriez-vous expliquer au comité pourquoi le CRTC a décidé de rejeter la demande?
M. Marc O'Sullivan: Vous parlez de la décision qui concerne le service HBO?
Á (1135)
M. James Rajotte: Oui.
M. Marc O'Sullivan: Le conseil essaie de trouver le juste équilibre entre les divers objectifs établis dans la Loi sur la radiodiffusion. Notre mandat nous est conféré par la Loi sur la radiodiffusion, et l'article 3 explique comment nous devons réglementer et superviser le système.
La Loi sur la radiodiffusion met clairement l'accent sur le contenu canadien, l'objectif supérieur étant de permettre le développement d'un système canadien de radiodiffusion qui donne un contenu canadien de la plus haute qualité possible. La loi exige que le système soit la propriété des Canadiens et soit contrôlé par ceux-ci, l'objectif principal étant de nourrir l'identité nationale et la souveraineté culturelle. Développer l'expression canadienne est un des objectifs, et le contenu canadien est censé prédominer. Il faut donc que chaque élément du système de radiodiffusion canadien contribue au contenu canadien. La loi prévoit aussi la diffusion en priorité de la programmation canadienne. Vous voyez donc que dans sa teneur globale, l'accent est mis sur le contenu canadien.
La loi énonce aussi d'autres objectifs, comme refléter la réalité multiculturelle du Canada, offrir une programmation variée et exhaustive, donner aux Canadiens dans la mesure du possible l'accès à la programmation canadienne et internationale.
Ce sont tous des objectifs que nous essayons d'équilibrer, et dans le cadre de la réglementation, nous accréditons des radiodiffuseurs canadiens et des entreprises de distribution canadiennes afin d'assurer ultimement la diffusion de contenu canadien sur les écrans. Cela constitue fondamentalement de l'interfinancement. Les radiodiffuseurs canadiens ont le droit d'avoir accès à de la programmation étrangère, et cette programmation non canadienne constitue souvent le moteur économique pour l'obtention de services canadiens. Cet interfinancement permet d'assurer la diffusion du contenu canadien, ce qui n'aurait pas été nécessairement économique autrement pour les radiodiffuseurs canadiens, étant donné la petitesse de notre marché. Nous cherchons constamment à trouver le juste équilibre entre ces deux objectifs, c'est-à-dire raffermir la situation économique des radiodiffuseurs canadiens tout en offrant aux Canadiens la plus grande diversité de programmation.
Dans sa demande de diffusion du service HBO et d'autres services aussi, l'Association de la télévision par câble reconnaissait que sa demande était contraire à notre politique et qu'il nous faudrait la modifier afin de permettre la distribution du service HBO et d'autres services semblables. Nous avons donc répondu à l'ACTC qu'il nous était impossible de changer les principes fondamentaux de la Loi sur la radiodiffusion et la façon dont cette dernière nous demande de gérer et de superviser le système canadien de radiodiffusion.
Les services de radiodiffusion canadiens ont obtenu notamment de HBO les droits de diffuser des émissions étrangères. J'en veux pour preuve l'émission The Sopranos diffusée sur CTV. Les radiodiffuseurs canadiens ont acheté les droits de cette programmation qui est, par ailleurs, disponible sur les services américains, et ce type d'émission constitue souvent l'armature économique des services canadiens. Mais si nous permettons la diffusion des services américains de la façon demandée, et que cela vienne s'ajouter à la liste des services satellitaires admissibles, nous minerions l'armature économique des radiodiffuseurs canadiens. Voilà le juste équilibre que nous voulons trouver. D'ailleurs, bon nombre des émissions transmises par certains de ces services, comme Six Feet Under ou The Sopranos, sont déjà diffusées sur les chaînes canadiennes. C'est une façon de raffermir la situation économique des radiodiffuseurs canadiens, ce qui leur permet à leur tour de produire et de diffuser plus de contenu canadien.
Le président: Je suis sûr que nous reviendrons là-dessus. Merci, monsieur O'Sullivan. James, nous reviendrons à vous plus tard.
Joe Fontana.
L'hon. Joe Fontana (London-Centre-Nord, Lib.): Merci.
Je pense que James à soulevé un point intéressant. Dans certains cas, c'est justement parce qu'elles veulent avoir accès à des services supplémentaires que certaines personnes commettent des actes illégaux. Il faut que nous comprenions que la population de notre pays est très hétérogène et que certaines personnes peuvent vouloir regarder un match de foot au Portugal ou même que ma mère veuille regarder sa série italienne préférée, alors que ces services ne sont pas offerts. Bien évidemment, je ne voudrais pas laisser entendre que ma mère transige sur le marché noir ou le marché gris; elle habite d'ailleurs maintenant dans une maison de retraite et je ne pense pas que ce genre d'établissement soit impliqué dans ce genre d'activité.
Il faut reconnaître qu'il y a une question parallèle qui a été soulevée : jusqu'où les gens sont-ils prêts à aller pour obtenir certaines choses. Le CRTC fait état des dispositions qui ont été prises, mais je pense qu'il serait important, pas dans le cadre de ce comité-ci, de déterminer dans quelle mesure le CRTC offre un choix adéquat à la population pour que celle-ci ne soit pas obligée d'agir illégalement pour avoir accès à ce qu'elle désire.
Je voudrais maintenant discuter des actes illégaux commis par les distributeurs et les sociétés qui appâtent le client éventuel en lui offrant quelque chose de gratuit, pour ce qui est du marché noir, des boîtes noires et des cartes. Par exemple, on pourrait empêcher l'importation de ces boîtes de décodage. Ces boîtes viennent des États-Unis et sont accompagnées de cartes, ce qui est tout à fait illégal. Nous allons rectifier cette situation en rendant obligatoires les certificats d'attestation, ce qui veut dire que sans certificat, la marchandise ne pourra pas entrer au Canada. Sommes-nous convaincus qu'en interceptant les équipements de décodage à la frontière, nous mettrons un terme à la diffusion directe illégale?
M. Michael Binder: Oui.
L'hon. Joe Fontana: Qu'en est-il de l'utilisation frauduleuse des cartes dans le cadre du système légal au Canada? Il s'agit de fausses cartes qui ont été reproduites. Si une personne est abonnée à l'un des deux systèmes canadiens et qu'elle réussit à dénicher une carte qui donne accès à une programmation ou des services bonifiés gratuitement, parce que la carte ne lui a rien coûté, ou à moindre coût, considère-t-on que cette personne transige sur le marché noir?
Á (1140)
M. Michael Binder: Tout à fait. J'ai entendu dire qu'il y a beaucoup de personnes qui ont accès à la programmation d'ExpressVu par le biais du marché noir, en détournant les signaux.
M. Jan Skora (directeur général, Réglementation des radiocommunications et de la radiodiffusion, ministère de l'Industrie): Il y a deux façons de régler le problème que vous invoquez, à savoir le détournement de services canadiens légitimes. Beaucoup de cartes dont vous parlez sont importées. Par conséquent, en imposant des contrôles à l'importation, il devrait être possible de réduire le nombre de cartes qui entrent au pays et y circulent. Voilà donc la première façon de s'attaquer au problème : les contrôles à l'importation. La deuxième façon, ce serait de renforcer les sanctions relatives à la vente de ces cartes, qu'elles soient accompagnées ou non de récepteurs satellites. Nous pensons qu'en renforçant suffisamment les sanctions imposées aux distributeurs d'envergure tout comme aux particuliers, nous parviendrons à freiner cette activité.
L'hon. Joe Fontana: Une petite clarification : les deux parties seront dans le tort. La première, c'est le distributeur et les sociétés qui participent à ce genre d'activité illégale. C'est pour ça que les sanctions vont être renforcées de façon significative. Même les gros distributeurs en sentiront les conséquences. Parallèlement, nous voulons également nous en prendre aux utilisateurs individuels. Je sais que ce n'est pas le rôle des inspecteurs d'appliquer la loi. C'est plutôt du ressort de la police, mais je ne sais pas dans quelle mesure les lois ont vraiment été appliquées. Peut-être que les représentants du ministère de l'Industrie pourraient nous éclairer à cet égard. Concrètement, les policiers interviennent-ils directement auprès des utilisateurs de boîtes grises ou noires, les accusant d'actes illégaux en vertu de la loi?
M. Michael Binder: Non. On cible vraiment les vendeurs. Il existe en effet des personnes qui vendent des milliers de cartes, de boîtes, etc. Cela rapporte gros. C'est du piratage, et chaque fois que des contre-mesures sont mises en place par les distributeurs, notamment de services par satellite, les utilisateurs doivent reprogrammer leur carte et, par conséquent, en assumer les coûts, etc. Ils brassent des sommes d'argent très importantes. La police ne s'est donc jamais vraiment intéressée aux particuliers.
L'hon. Joe Fontana: Des fois, il y a d'innocentes victimes, par exemple, les personnes qui utilisent les cartes. À la diapositive 13, quand vous parlez des particuliers, de qui s'agit-il exactement? On y précise qu'actuellement l'amende maximale pour les particuliers est de 5 000 $ et, pour les sociétés, de 25 000 $. On va faire passer ces amendes à 25 000 $ et 200 000 $, respectivement. S'agit-il de particuliers qui sont utilisateurs ou de particuliers qui agissent comme revendeurs? Je voudrais m'assurer d'avoir bien compris.
M. Michael Binder: L'amende maximale s'applique aux personnes qui piratent, transmettent et vendent les signaux.
L'hon. Joe Fontana: Donc, il s'agit de la personne qui participe à cette activité.
M. Michael Binder: Pas comme votre mère; rassurez-vous, nous ne poursuivrons pas votre mère.
L'hon. Joe Fontana: Il s'agit donc de revendeurs, et non de ma mère. Très bien.
M. Michael Binder: Ce n'est pas l'objet de ce projet de loi-ci.
L'hon. Joe Fontana: Je pourrais donc appeler ma mère et lui dire « Ne t'inquiète pas », même si elle ne participe pas à ce genre d'activité.
M. Jan Skora: La loi, qui comprend les amendes dont nous avons parlé, ne fait pas la différence entre les personnes qui se bornent à décoder les signaux et les personnes qui les distribuent. Il y a beaucoup de distributeurs. Et il y a également beaucoup de personnes qui décodent des signaux chez elles. Il est clair que les changements proposés ainsi que l'importance accordée à l'application de la loi par la GRC, ou par une autre organisation, témoignent du fait que nous voulons nous attaquer aux revendeurs, aux distributeurs. Mais la loi actuelle ne fait pas la différence entre ces deux groupes. Pour répondre autrement à votre question, je dirais ceci : il est illégal de décoder des signaux et les coupables sont passibles d'amendes, mais le gouvernement et la GRC veulent s'attaquer aux distributeurs, dont les activités ont un impact réel sur le marché.
Á (1145)
L'hon. Joe Fontana: Merci de cet éclaircissement.
Parallèlement au progrès technologique, on assiste à l'apparition d'un autre problème, à savoir la distribution libre de contenu artistique sur Internet. Nos discussions portent sur la transmission directe, d'un satellite à un téléviseur. Mais les signaux ne peuvent-ils pas être transmis à un ordinateur par le biais d'Internet? Bien évidemment, le projet de loi C-2 ne traite pas de ce cas. Quand pensez-vous qu'il faudra revoir la loi pour légiférer cela?
Ensuite, il n'est pas illégal de recevoir, quelle que soit la provenance, les programmes qui ne sont pas encodés. Une personne peut, en toute légalité, regarder un match de foot si celui-ci n'est pas encodé. De même, une personne ayant une antenne parabolique peut tout à fait regarder un programme qui n'est pas encodé.
M. Michael Binder: Bien évidemment, et il est vrai qu'il existe beaucoup de services gratuits. Il est tout à fait légal d'acheter une antenne parabolique et de recevoir toute la programmation qui n'est pas encodée. Nos diffuseurs offrent la programmation gratuitement et, par conséquent, on peut y avoir accès librement. C'est comme les signaux radio.
Pour ce qui est de votre question sur Internet, il suffit de penser qu'il y a à peine dix ans on ne savait pas de quoi il s'agissait. On ne sait pas ce que nous réserve l'avenir : Il se peut que tout le monde ait accès à la technologie à large bande et aux signaux télé. Peut-être que le secteur aura changé du tout au tout. Par contre, il faudra toujours trouver un moyen de payer le propriétaire du contenu. Je ne sais pas si vous vous intéressez au secteur de la musique, Internet lui a porté un dur coup. Peut-être que les modèles d'exploitation vont devoir être changés.
Il est donc possible qu'on revienne, dans cinq ou dix ans, mais on ne se préoccupe pas de cela pour l'instant. Nous voulons régler les problèmes du secteur tels qu'ils existent actuellement, et c'est vrai qu'il y a des problèmes qui exigent des solutions rapides.
Le président: Merci, Joe.
Paul Crête, suivi de Andy Savoy.
[Français]
M. Paul Crête (Kamouraska—Rivière-du-Loup—Témiscouata—Les Basques, BQ): Merci, monsieur le président.
Le Bloc québécois est en faveur de ce projet de loi. Il nous semble important que la question du piratage soit finalement suivie de plus près et que le problème soit enrayé. Cependant, j'aimerais faire deux remarques et entendre ensuite vos commentaires à ce sujet. Il s'agit des pouvoirs conférés à l'inspecteur. On parle ici de l'article 5 du projet de loi. Le rôle de l'inspecteur commence à ressembler beaucoup à celui de Big Brother. Ainsi, il va pouvoir, et je cite :
a) procéder à l'inspection de tout lieu s'il a des motifs raisonnables de croire que s'y trouvent un appareil radio,... |
b) examiner l'appareil ou le matériel s'y trouvant et tout autre objet qui leur est lié; |
c) examiner les données, registres ou documents comptables ou autres dont il a des motifs... |
Est-ce qu'il n'y aurait pas moyen de modifier cet article de façon à ce qu'il cible plus directement le piratage plutôt que de constituer une intrusion généralisée dans la vie privée?
M. Michael Binder: Ce n'était pas notre intention.
[Traduction]
Le président: Juste au cas, ne touchez pas à vos micros. Ils vont capter votre voix, où que vous soyez.
Merci.
[Français]
M. Michael Binder: Notre intention, ici, n'était pas de proposer que l'inspecteur ait des pouvoirs énormes.
[Traduction]
Si vous lisez attentivement l'article 8 de la loi qui porte sur les pouvoirs actuels, vous constaterez qu'il a été rédigé à l'époque où les ordinateurs et bases de données n'avaient pas une place aussi importante qu'aujourd'hui et où l'industrie du sans fil n'était pas tentaculaire.
Nous avions pour objectif la mise à jour et la clarification de ces pouvoirs. Nous n'avions pas l'intention de prôner une intrusion excessive. Nos avocats aiment que les dispositions soient très claires et nous ont proposé un libellé qui nous semble bien refléter les temps modernes. Nos objectifs se résument à ça.
Á (1150)
[Français]
M. Paul Crête: J'espère qu'on va pouvoir entendre le point de vue de témoins à ce sujet. Malgré ce qu'ont pu être vos intentions à l'égard du sens du texte, cela pourrait faire en sorte que des données soient utilisées à d'autres fins. Il s'est produit des incidents assez douloureux impliquant des inspecteurs de l'assurance-emploi. Ces derniers entraient chez les gens et menaient des enquêtes comme s'ils étaient en train d'accuser des criminels. Je ne voudrais pas qu'on se retrouve dans la même situation, mais on verra cela avec les témoins.
Mon autre question porte sur l'octroi des certificats d'importation. Le pouvoir donné au ministre--il s'agit présentement d'une ministre--est très large. Ainsi, à l'intérieur du projet de loi, on nous dit que le ministre doit tenir compte « de tous les facteurs pertinents », et pas uniquement de ceux qui sont suggérés.
Il semble donc qu'en plus d'une liste de facteurs, elle pourrait tenir compte d'autres choses et de tous les facteurs pertinents. Est-ce qu'il ne serait pas possible de délimiter cette liste de facteurs, de façon à s'assurer qu'aucune décision d'ordre moins rationnel ne soit prise?
M. Michael Binder: Il est difficile de constituer une liste incluant toutes les possibilités. C'est l'avis que nous avons reçu, mais il est peut-être possible d'en discuter.
M. Paul Crête: Par exemple, il pourrait y avoir une liste prioritaire et on pourrait indiquer qu'exceptionnellement, le ministre pourrait tenir compte d'autres critères. Il serait peut-être opportun d'étudier cette possibilité. Il ne faudrait pas, en raison d'éléments plutôt suggestifs qui ne seraient pas contenus dans les critères, créer un environnement juridique propice aux appels et aux contestations.
Selon notre interprétation, il serait toujours possible que quelqu'un affirme que la ministre n'a pas tenu compte d'un critère donné alors qu'elle aurait dû le faire. À mon avis, nous aurons intérêt à regarder cette question de plus près.
[Traduction]
M. Michael Binder: John, avez-vous quelque chose à ajouter?
[Français]
M. John Cuningham (avocat, Services juridiques d'Industrie Canada, ministère de la Justice): Oui, je peux dire quelque chose.
Comme vous l'avez dit, évidemment, il y a un premier critère: ce sont tous les facteurs pertinents. Ensuite, certaines choses sont spécifiquement identifiées. Comme l'a dit M. Binder, on ne peut pas dire aujourd'hui et on ne pourra pas dire dans une semaine ou même dans un an que les facteurs a, b, c, particulièrement a et b, sont les seules occasions où un certificat devrait être émis.
C'est davantage dans le sens de donner à la ministre une flexibilité qui lui permettra de considérer d'autres possibilités. En fait, l'idée au début était que le ministre aurait dû être limité à émettre un permis seulement dans certaines conditions. Mais en fin de compte, il est devenu évident qu'il pouvait y avoir d'autres possibilités ou situations qui ne n'étaient pas prises en compte par ces facteurs particuliers. Telle était l'approche. Pour le moment, je pense que c'est la réponse.
M. Paul Crête: J'ai une question pour M. O'Sullivan, qui est dans la même veine que celle de M. Rajotte.
Dans votre rapport, monsieur O'Sullivan, vous nous parlez de l'incidence sur le Fonds canadien de télévision. J'aimerais savoir si vous avez quantifié cette incidence. La question pourra être généralisée par la suite. Plus tôt, on a parlé d'études faites par l'industrie sur l'incidence économique de la situation actuelle. Est-ce qu'on a des chiffres provenant du gouvernement sur ces questions?
Mais tout d'abord, j'aimerais que vous élaboriez davantage sur l'incidence sur l'aspect culturel de la situation actuelle et que vous me disiez pourquoi il est pertinent de changer la loi.
Á (1155)
M. Marc O'Sullivan: Eh bien, comme M. Bouchard l'a indiqué, l'industrie estime que la valeur du marché perdu est de 400 millions de dollars. Nous n'avons pas fait notre propre étude. C'est l'industrie qui, constamment, nous fait part de son inquiétude.
Je vous ferai remarquer que dans l'industrie de la radiodiffusion, il y a des distributeurs, d'une part, des entités de programmation, d'autre part, et des producteurs, d'autre part encore, et que ces groupes s'entendent sur très peu de choses. Habituellement, ils argumentent les uns contre les autres. Mais s'il y a un sujet sur lequel l'industrie dans son entier s'entend, c'est le danger du piratage des signaux satellites.
Donc, nous n'avons pas de chiffre précis. Je n'ai pas fait allusion à un chiffre précis dans mes notes, parce que nous n'avons pas de chiffre provenant de notre propre recherche, cela pour les raisons énoncées, à savoir qu'il est difficile de faire dire aux gens si, oui ou non, ils ont des services illégaux.
Les P.D.G. de l'industrie tout entière nous ont souligné de façon constante, ces deux dernières années, l'importance de cet enjeu. On sait aussi que les câblodistributeurs et les compagnies de satellites doivent fournir un pourcentage de leurs revenus au Fonds canadien de télévision. Donc, toute perte de revenu a une incidence sur le Fonds canadien de télévision.
Je n'ai pas avancé de chiffre parce que nous n'avons pas de chiffre qui soit le fruit de nos propres recherches. Cependant, compte tenu des vives inquiétudes exprimées de façon constante par tous les joueurs importants de l'industrie, on reconnaît que cela a une incidence. C'est une incidence qu'on a de la difficulté à chiffrer, mais c'est une incidence véritable, sinon l'industrie ne serait pas à ce point inquiète.
M. Paul Crête: Si on se fie... Oui, allez-y.
M. René Bouchard: J'allais ajouter aux propos de M. O'Sullivan que les contributions faites présentement par les entreprises de distribution au Fonds canadien de télévision gravitent autour de 120 ou 125 millions de dollars.
On ne peut vous présenter des chiffres plus précis, parce que, comme M. O'Sullivan le mentionnait, c'est lié à la croissance de leurs revenus. Les chiffres de leurs contributions actuelles ne sont quand même pas négligeables, mais à partir du moment où des gens contournent le système et ne paient pas ces entreprises de distribution pour avoir accès aux signaux, les revenus de ces entreprises-là ne sont pas comptabilisés et la contribution au Fonds canadien de télévision n'est pas faite.
Aussi, il faut penser que lorsque ces entreprises de distribution reçoivent des revenus pour l'exploitation de leurs services, elles paient également des services spécialisés de radiodiffusion qui, eux, investissent dans la production.
À partir du moment où Bell ExpressVu et Star Choice n'ont pas de revenus pour les activités qu'ils réalisent, ils ne peuvent pas payer les entreprises de radiodiffusion qui produisent du contenu canadien et l'investissement ne se fait pas non plus à cet égard. Donc, ce sont deux incidences.
[Traduction]
Le président: Très rapidement.
[Français]
M. Paul Crête: Si les chiffres de l'industrie étaient réels et qu'on s'en servait pour faire le calcul, est-ce qu'on serait capable de dire, en bout de ligne, combien cela pourrait générer d'argent de plus pour le Fonds canadien de télévision et pour les autres, pour leur permettre de faire fonctionner leur machine?
M. René Bouchard: Je ne peux pas vous le dire immédiatement, mais nous pourrions certainement vous faire parvenir un chiffre. Effectivement, si on est capable d'estimer le manque à gagner, on est capable de dire ce qui n'est pas investi dans le Fonds canadien de télévision.
M. Paul Crête: Je l'apprécierais.
[Traduction]
Le président: Merci, Paul.
Andy Savoy.
M. Andy Savoy (Tobique—Mactaquac, Lib.): Merci beaucoup, messieurs.
Nous faisons face à un dilemme. Monsieur O'Sullivan, je comprends les inquiétudes que soulève l'interfinancement du contenu et son impact. C'est quelque chose que je soutiens, en général, mais je pense qu'étant donné la nature multilingue et multiculturelle de notre société et notre engagement envers l'immigration et le multiculturalisme, nous faisons face à une problématique grave.
C'est vrai qu'il y a un grand nombre de chaînes qui sont offertes sans abonnement, mais ce n'est pas toujours le cas. Les groupes dont j'ai parlé précédemment n'ont pas nécessairement accès au contenu religieux, culturel et linguistique de leur choix, et cela leur pose problème.
Pour ce qui est des services sans abonnement, que pourrait-on faire pour que les groupes intéressés puissent avoir accès au contenu de leur choix; avez-vous des recommandations? Est-ce que l'accès à ces chaînes sera limité ou moins facile? Quels seraient vos conseils à cet égard?
 (1200)
M. Marc O'Sullivan: La question porte sur le nombre de services disponibles en langues étrangères. Le CRTC a octroyé des licences à des fournisseurs canadiens de services en langues étrangères. Il y a d'ailleurs quatre services offerts sur des réseaux de câblodiffusion traditionnels qui sont offerts à Montréal, Toronto et Vancouver. Ces licences ont également été attribuées aux fournisseurs de cinq services spécialisés analogiques en langues étrangères et de 50 services numériques de catégorie 2, dont 10 ont déjà été lancés. De plus, 10 services en langues étrangères ont été autorisés sur la liste des services par satellite admissibles. Nous avons donc délivré des licences pour certains de ces services et nous en avons ajouté d'autres à la liste.
Nous sommes conscients du fait qu'il y a de plus en plus de demandes pour ce genre de services en langues étrangères et qu'il nous incombe de répondre à cette demande de notre mieux. Comme nous avons octroyé des licences aux fournisseurs de services canadiens, nous nous sommes efforcés d'assurer la viabilité de ces services canadiens en évitant qu'ils soient concurrencés par les services étrangers distribués par satellite et par câble qui ciblent le même créneau, c'est-à-dire qui offrent le même format ou genre que les fournisseurs canadiens des services en langues étrangères.
C'est l'analyse que nous effectuons lorsqu'on nous demande d'ajouter des services en langues étrangères à la liste des services admissibles. Nous déterminons dans quelle mesure le nouveau service ferait concurrence à un service canadien offert en langues étrangères. Nous analysons ensuite la programmation pour voir s'il y aurait dédoublement à ce niveau-là. Nous déterminons la nature du service, général ou créneau, pour ensuite déterminer s'il y a conflit avec un service canadien. Nous voulons que la population canadienne ait accès à un large éventail de services et que les fondements économiques des services canadiens soient protégés.
On parle beaucoup du fait que le marché canadien est petit. Il l'est encore plus dans le secteur des langues étrangères. Le public cible est alors un tout petit groupe. Notre objectif premier, c'est d'assurer la pérennité des services canadiens sous licence.
Le rapport du comité Lincoln portait notamment sur la souveraineté culturelle. Nous sommes conscients du fait que la demande de services en langues étrangères ne cesse de croître. Nous ne cessons de remettre en question nos politiques—et pas uniquement l'application de nos politiques—afin d'assurer la plus grande diversité possible, mais sans mettre en péril les services canadiens.
M. Andy Savoy: Je suis au fait de ce qui existe; la question qui nous intéresse, c'est plutôt ce qui n'existe pas.
Actuellement, c'est la demande qui détermine l'accès, essentiellement. Si le projet de loi C-2 est adopté tel quel, l'accès dépendra de la demande parce que les services doivent être commercialisables. Les services offerts au public cible doivent être rentables. Le problème, c'est que certains publics cibles ne comprennent que 5 ou 10 000 personnes—divers groupes culturels qui ont accès à la programmation de leur pays d'origine—et on leur dira: «Désolé, vous ne pourrez avoir accès au service qui vous intéresse qu'à partir du moment où la demande sera suffisante pour que la programmation soit diffusée sur les réseaux canadiens». Cela me pose de sérieux problèmes. Ce n'est pas comme cela qu'on pourra évoluer en tant que nation.
Pour ce qui est des personnes...
M. Marc O'Sullivan: Permettez-moi de répondre brièvement. Tout d'abord, ce sont les distributeurs qui doivent nous faire une demande d'ajout de services à la liste des services admissibles. Ils doivent donc d'abord déterminer s'il existe un marché, puis faire une demande. Après avoir reçu la demande, nous effectuons l'évaluation de concurrence dont je vous ai parlé.
M. Andy Savoy: Tout à fait, mais ce que vous dites me conforte encore dans mon point de vue : Il faut que le service en question soit rentable, et c'est cela qui m'ennuie.
M. Michael Binder: Un petit groupe communautaire pourrait se présenter au bureau du CRTC pour nous dire: «Nous voulons que telle programmation soit disponible». Le CRTC jouit d'un certaine marge de manoeuvre. Ce que j'essaie de vous faire comprendre, c'est qu'il ne s'agit pas de la même chose. La situation que vous décrivez relève plutôt de la Loi sur la radiodiffusion et non du projet de loi qui nous intéresse. Pour ce qui est du contenu, il existe différentes approches. Ce n'est pas l'objet du projet de loi dont nous parlons aujourd'hui.
 (1205)
M. Andy Savoy: Très bien.
Pour ce qui est des particuliers, monsieur Binder, il y a une différence marquée entre le décodage à des fins personnelles et le décodage dans un but commercial. Je comprends bien qu'il existe une certaine discrétion qui est d'ailleurs enchâssée dans le texte législatif. Sera-t-il possible de rassurer les personnes qui décodent des signaux à des fins personnelles plutôt qu'à des fins commerciales... ? Est-il possible, en fait, de faire la différence entre ces deux groupes et d'assurer la population canadienne que les personnes qui décodent des signaux à des fins personnelles ne vont pas encourir des amendes de 25 000 $, par exemple?
M. Michael Binder: Je préfère m'en remettre à l'expert juridique. Je ne sais pas si on peut, au niveau juridique, parler de différents degrés d'illégalité. Si une activité est illégale, elle est illégale. Par contre, je peux vous dire la chose suivante. Si le projet de loi est adopté, nous sommes d'avis que l'industrie sera intransigeante et s'attaquera aux revendeurs directement. Cette tâche ne reviendra ni à la police ni aux autres institutions parce que le secteur aura les outils dont il a besoin pour résoudre lui-même ce problème. En d'autres termes, il sera possible de traduire les revendeurs en justice et les activités illégales mèneront à des peines.
Il ne serait pas logique que nous poursuivions les particuliers. Nous pensons qu'en poursuivant les distributeurs, les particuliers se rabattront petit à petit sur le système canadien. Ce sont les revendeurs qui alimentent les particuliers. Je ne peux pas vous donner de garantie, mais il me semble logique qu'on s'attaque aux revendeurs illégaux qui alimentent le système, le système de base.
M. Andy Savoy: Si vous avez tout dit, passons à autre chose. J'ai une autre question à poser.
Pour ce qui est du marché des services diffusés sans frais, je vous ai parlé de l'importance des aspects culturels, religieux et linguistiques. Si le projet de loi C-2 était mis en oeuvre, le marché des services diffusés sans frais serait-il face à des obstacles, par exemple, des certificats à l'importation pour les sociétés qui doivent importer leur propre technologie? Combien de temps faut-il pour obtenir un certificat à l'importation? Ce marché, si vous voulez l'appeler ainsi, fera-t-il face à des problèmes au niveau des émissions offertes ou du groupe de téléspectateurs? La mise en oeuvre du projet C-2 poserait-elle des problèmes pour les marchés des services diffusés sans frais?
M. Michael Binder: Je ne pense pas.
Quelqu'un d'autre voudrait-il répondre?
M. Jan Skora: Oui. Les récepteurs des services diffusés sans frais ne seront pas affectés à moins qu'ils ne soient également des récepteurs de décryptage. En vertu du texte législatif, s'il s'agit d'un décrypteur, alors il est obligatoire d'avoir un certificat à l'importation.
Nous voulons justement que ces récepteurs qui sont uniquement des récepteurs de services diffusés sans frais puissent circuler librement comme c'est le cas actuellement. Voilà notre objectif.
Ensuite, nous avons toute une série de bureaux de district un peu partout au pays qui s'occuperont des certificats à l'importation. Nous pensons que le processus d'obtention d'un tel certificat sera relativement rapide... Il faut simplement donner des informations de base et ensuite le certificat est attribué à l'importateur en question qui peut alors importer l'équipement dont il a besoin dans le cadre de ses activités légales de distribution au Canada.
Donc, nous voulons faire évoluer les choses sur deux tableaux. Nous travaillons avec les Douanes depuis deux ans, de façon intensive depuis douze mois, pour nous assurer que les mesures qui figurent dans le projet de loi peuvent être mises en oeuvre rapidement.
Voilà nos objectifs, qui nous semblent réalisables.
 (1210)
Le président: Merci, monsieur Savoy.
Monsieur Masse.
Brian, il est possible que je sois obligé de vous interrompre pour qu'on s'occupe du budget des témoins, et je m'en excuse. Nous allons tout faire pour que vous ayez droit au temps qui vous revient.
M. Brian Masse (Windsor-Ouest, NPD): Ça va. Merci, monsieur le président.
Monsieur Binder, dans votre exposé, vous avez déclaré que la situation qui prévaut est en train de détruire notre industrie de la radiodiffusion. Pourtant, de 1999 à 2002, les ventes de produits satellites légaux sont passées de 6,1 à 21,2 p. 100. Elles ont plus que triplé. Quelles preuves indépendantes a votre ministère pour étayer cette allégation?
M. Michael Binder: Ce qui a contribué à cette croissance, c'est que nous avons réussi à mettre fin au monopole et à instaurer une certaine concurrence. Comme vous le savez, auparavant, c'était le monopole dans le secteur de la câblodistribution mais, dorénavant, il y a un choix.
Il y a deux éléments. Premièrement, des services sont offerts dans des régions qui ne disposaient pas de ce service auparavant. C'est ce qui a marqué le début de l'adhésion aux services satellites. Maintenant, ces entreprises commencent à rivaliser avec les câblodistributeurs dans les régions urbaines.
Pour revenir à votre première remarque, il est très difficile d'estimer l'ampleur des activités illégales. Toutefois, si nous ne nous attaquons pas à ce problème, on pourra acheter des droits de diffusion car les marchés gris et noir seront plus importants que notre marché original.
Dès qu'on a une masse critique, il faut que le marché soit suffisamment grand pour pouvoir répondre à ses besoins.
M. Brian Masse: Je ne prétends pas que vous avez tort, mais c'est très...
Le président: Puis-je vous interrompre?
Nous n'aurons probablement plus la quorum dans quelques minutes, car certains députés doivent se rendre à une autre réunion. Je vous interromps donc un moment.
Vous avez sous les yeux le budget proposé pour l'audition des témoins sur le projet de loi C-2. Y a-t-il des questions? S'il n'y en a pas, j'aimerais qu'on propose l'adoption de notre budget pour l'audition des témoins sur le projet de loi C-2.
M. Andy Savoy: J'en fais la proposition.
Le président: Oui, monsieur Rajotte.
M. James Rajotte: À la fin de la réunion, discuterons-nous de l'horaire de comparution des témoins?
Le président: Oui. Je voulais simplement faire adopter le budget au cas où nous en aurions besoin.
(La motion est adoptée [Voir le Procès-verbal])
Le président: Merci.
Monsieur Masse, merci.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
C'est toute une allégation que vous faites là. J'aurais cru que nous disposerions de nos propres informations, autres que ce chiffre de 400 millions de dollars provenant d'un sondage, même pas d'une étude. D'ailleurs, j'ai des réserves sur cette étude.
Par exemple, il y a bien des gens qui sont abonnés à Bell ExpressVu, mais qui ont aussi DIRECTV qui est plus fiable et dont les prix varient moins.
Cela m'amène à votre deuxième commentaire, à savoir que c'est «un problème grave dont l'ampleur ne cesse de croître». C'est l'autre question. DIRECTV peut escroquer l'industrie avec sa propre technologie et ses propres mesures de sécurité. L'industrie a lancé un nouveau produit qui bloque l'usage de DIRECTV, dans la plupart des cas, avec l'arrivée sur le marché d'une nouvelle carte. Quelles preuves avez-vous relativement à DIRECTV?
Je crains que les satellites de Bell et de Shaw, ceux qui sont achetés ici en toute légalité, fassent l'objet d'interférence de la part de ces serveurs. L'escalade se produit dans ce qu'on appelle le marché gris, n'est-ce pas?
M. Michael Binder: Vous soulevez là des questions très pertinentes.
J'ai simplement exprimé une inquiétude devant ce qui se passe dans le secteur de la musique. On a attendu un peu trop et il a ensuite été trop tard pour agir. Nous assistons au même phénomène dans le secteur de la radiodiffusion. Si on attend encore pour intervenir, il se pourrait que le marché gris se légalise. Cela mènera à une érosion des abonnements et des marchés.
Je crains ce que l'avenir nous réserve, car jusqu'à présent, nous n'avons pas été en mesure de freiner le piratage. Dès qu'un nouveau système est créé, il se trouve quelqu'un d'assez futé pour le pirater. Jusqu'à présent, nous n'avons pu freiner le piratage.
M. Brian Masse: Mais ce n'est pas nécessairement le problème du Canada. DIRECTV elle-même a pris de nouvelles mesures de sécurité pour ses propres produits.
J'ai maintenant une question pour M. O'Sullivan sur le marché libre des signaux non encodés et sur son incidence ici. Je sais que, d'après Industrie Canada, la réception de ces signaux, que ce soit par radio, télévision ou satellite, ne pose aucun problème.
Je vous donne un exemple. Dans ma circonscription de Windsor-Ouest et dans bien d'autres localités nord-américaines à la frontière des États-Unis, il est très facile de syntoniser des stations de radio et de télévision américaines. Ce qui est ironique, c'est que le seul contenu canadien que vous y trouvez, c'est la publicité que diffusent les entreprises canadiennes sur les chaînes américaines qui ont la plus grande part du marché.
J'ai l'impression que ce sont deux poids, deux mesures. En quoi ce genre de situation profite-t-elle au contenu canadien? Vous verse-t-on des redevances? Est-ce qu'une part des revenus de publicité vous revient par le biais de taxes ou autrement?
Il y a des entreprises canadiennes locales qui diffusent du contenu canadien, mais les gens choisissent de regarder les autres chaînes. Les entreprises canadiennes qui veulent faire de la publicité choisissent ces autres chaînes car elles savent que c'est là que se trouve le marché.
 (1215)
M. Marc O'Sullivan: Vous avez tout à fait raison. Les stations frontalières présentent un problème particulier. La radiodiffusion directe sans frais, de par sa nature, ne peut être contrôlée. Nous pouvons délimiter le rayonnement des signaux provenant de services canadiens et accorder des licences en conséquence, mais nous n'avons bien sûr aucune compétence relativement aux services provenant des États-Unis. Il est vrai que le débordement est important dans des endroits comme Windsor, et il arrive que des services de diffusion américains achètent beaucoup de publicité sur le côté canadien de la frontière.
Quand nous avons soulevé la question auprès de la Commission fédérale des communications, aux États-Unis, on nous a essentiellement répondu qu'on ne s'intéressait pas à la question. C'est un problème qui se limite à certaines régions et auquel nous ne pouvons pas grand-chose.
Nous pouvons difficilement limiter l'accès aux signaux de radio et de télévision en direct et gratuits par les Canadiens. Nous reconnaissons que cela a une incidence sur les marchés canadiens qui sont touchés, mais nous ne disposons pas des outils qui nous permettraient d'intervenir.
M. Jacques Langlois (directeur général, Groupe Politique de radiodiffusion, Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes): Il y a aussi une différence fondamentale. Ce projet de loi porte sur le vol d'abonnements. C'est un peu comme voler un abonnement à un magazine. Ce sont des abonnements que les gens doivent payer, alors que les services directs, eux, sont gratuits. Ce sont des ondes sous forme de hertz qui peuvent être captées par tous. Il y a donc une différence énorme et fondamentale.
M. Brian Masse: Oui, et c'est justement pourquoi j'estime que vous avez échoué avec ce projet de loi. Les gens ont accès à des signaux non encodés, à du contenu non canadien autant qu'ils le veulent, mais ils ne peuvent l'acheter légalement. Je connais des gens qui aimeraient beaucoup acheter l'accès à HBO, à Al Jazeera ou à d'autres chaînes diffusant des émissions culturelles, par exemple, qui seraient prêts à dépenser quelques dollars de plus si cela permettait la production de plus de contenu canadien au pays. Pourquoi ne pouvons-nous pas faire cela?
C'est contradictoire. On a un accès illimité et gratuit au contenu non canadien.
M. Jacques Langlois: Mais le contenu de ces chaînes gratuites de diffusion en direct est fort probablement le même que ce que diffusent les réseaux américains par l'entremise du câble, ce que nous appelons ici les « quatre-plus-un ». Ce sont des émissions auxquelles ils auraient accès de toute façon. Il y a des règles sur la substitution des signaux identiques prévoyant une indemnisation des radiodiffuseurs canadiens.
M. Brian Masse: Nous exerçons donc un certain contrôle. Nous contrôlons le genre de produits auxquels les gens voudraient avoir accès.
L'accès est contrôlé, puisqu'il n'y a que quelques émissions de HBO qui sont diffusées ici. Encore une fois, qu'il s'agisse d'Al Jazeera, de HBO ou de quelque autre programme culturel que les gens veulent voir, pourquoi ne pas permettre... Bien des citoyens que nous représentons regardent la télévision pas seulement pour se divertir, mais pour s'instruire, pour garder des liens avec des membres de leur famille en restant informés de ce qui se passe dans leurs communautés, etc.
N'y a-t-il pas une mesure que nous pouvons inclure dans ce projet de loi qui permettrait cela? Sans cela, j'aurais beaucoup de mal à approuver ce projet de loi. Pourquoi ne pas régler ce problème d'abord et ensuite aborder l'autre question?
M. Marc O'Sullivan: Comme je l'ai indiqué plus tôt, nous sommes régis par la Loi sur la radiodiffusion qui dit clairement que nous devons assurer la prépondérance du contenu canadien. Nous disposons quand même d'une certaine marge de manoeuvre. Le CRTC est constamment à la recherche de nouvelles façons d'accroître la concurrence pour que le plus grand nombre de gens aient accès au plus grand nombre de services possibles.
La situation des services en langues étrangères est différente, mais je crois que vous parlez essentiellement de services en anglais. Vous soulevez en fait les fondements économiques du secteur de la radiodiffusion canadien. En comparaison, dans le secteur du cinéma, il n'y a essentiellement aucun contrôle sur la diffusion ou la distribution. Le secteur du long métrage canadien représente environ 3 p. 100 des recettes des salles de cinéma du marché de langue anglaise. Il connaît plus de succès sur le marché de langue française. Mais sur le marché de langue anglaise, sans contrôles ni méthodes garantissant la diffusion de la programmation canadienne, on se retrouverait peut-être sans contenu canadien aucun sur les écrans. C'est là le juste équilibre que nous tentons de trouver.
Nous savons que la demande de nouveaux services ne cesse de croître. Dans un sens, plus vous offrez de services, plus on en veut d'autres. Au Canada, les gens ont accès à un nombre considérable de services, mais ils en veulent encore davantage. Nous tentons d'équilibrer tout cela sans toutefois miner l'industrie canadienne. Nous devons composer avec tout cela.
 (1220)
M. Brian Masse: Monsieur le président, j'aimerais avoir une précision. Je vous donne l'exemple de la mère de M. Fontana. Elle reçoit une carte encodée qu'elle glisse dans son appareil. L'entreprise de diffusion par satellite finit par le découvrir. Pourra-t-elle exiger 25 000 $ de cette dame aux termes de ce projet de loi?
M. Michael Binder: Nous allons poursuivre la compagnie qui lui a vendu la carte, et non pas cette dame.
L'hon. Joe Fontana: Je vous en remercie.
M. Brian Masse: Donc, si quelqu'un a l'une de ces cartes chez lui et qu'on la découvre, par suite d'une descente de police pour quelque raison que ce soit, il ne pourra être accusé d'avoir été en possession de cette carte encodée. Vous me le garantissez.
M. Michael Binder: Non, je ne peux vous le garantir.
M. Brian Masse: Ce n'est pas la première fois qu'on tourne ainsi autour du pot. Le fait est que si vous avez une carte de ce genre chez vous, vous pourriez faire l'objet d'une accusation, n'est-ce pas?
M. Michael Binder: Oui, car c'est une activité illégale. Moi, je vous dis simplement que nous ne prévoyons pas viser ces personnes. Cela reste néanmoins une activité illégale.
M. Brian Masse: Vous allez viser les entreprises.
M. Michael Binder: Oui.
M. John Cuningham: J'aimerais faire une distinction entre les poursuites au criminel et les poursuites au civil. Au civil, on ne peut obtenir plus de 1 000 $ d'une personne qui a utilisé une carte piratée à des fins non commerciales.
M. Brian Masse: Une entreprise peut poursuivre un particulier et obtenir compensation à hauteur de 1 000 $. Mais ce particulier peut aussi être condamné à payer une amende de 25 000 $.
M. John Cuningham: S'il y a poursuite au criminel.
M. Brian Masse: Chaque personne en possession d'une carte piratée pourrait donc payer jusqu'à 26 000 $.
Merci.
Le président: Merci, Brian.
Je cède la parole à Lyle Vanclief.
L'hon. Lyle Vanclief (Prince Edward—Hastings, Lib.): La page 13 du document de M. Binder dit que les activités illégales de décodage de signaux sont passibles d'une peine de 5 000 $ pour les particuliers, peine qu'on se propose d'augmenter à 25 000 $. Je viens de vous entendre dire que la peine maximale est de 1 000 $. Peut-être pourriez-vous m'aider à comprendre. J'aimerais aussi que vous me disiez comment se définit le particulier.
M. John Cuningham: Le montant de 1 000 $...
L'hon. Lyle Vanclief: Il n'est pas dans ce tableau.
M. John Cuningham: Ce tableau décrit les amendes prévues pour les condamnations au criminel. L'article 18 prévoit actuellement le droit d'intenter des poursuites au civil. Une procédure au civil peut donc être intentée par ceux qui satisfont à certains critères. Dans un tel cas, le demandeur pourra obtenir au maximum 1 000 $ si l'intimé ne s'est pas adonné à ces activités illégales à des fins commerciales et s'il n'a pas vendu de cartes piratées. Toutefois, s'il est prouvé que l'intimé s'est adonné à ces activités illégales à des fins commerciales et que le demandeur a droit à des dommages de 3 millions de dollars, c'est ce que ce dernier pourrait obtenir. Vous avez certainement remarqué qu'il y a des interdictions au criminel qui peuvent mener à des accusations devant un tribunal pénal et des condamnations. Des poursuites au civil pour dommages sont aussi possibles et permettent aux personnes lésées d'obtenir une certaine indemnisation.
 (1225)
L'hon. Lyle Vanclief: Monsieur le président, ce n'est toujours pas clair dans mon esprit.
Le président: Allez-y, Lyle, vous avez la parole.
L'hon. Lyle Vanclief: C'est probablement que je ne comprends pas vite.
Le président: Tout cela nous aide nous aussi.
L'hon. Lyle Vanclief: Mais le tableau de la page 13 du document de M. Binder décrit les peines pour les activités illégales qui peuvent être infligées à des particuliers.
Je sais qu'il peut y avoir des poursuites au civil et des poursuites au criminel. Ce monsieur vient de dire qu'au civil, pour quelque raison que ce soit, le maximum qu'on peut obtenir en dommages est de 1 000 $. Aidez-moi, je vous prie : ce tableau indique une peine maximale existante de 5 000 $ et une peine maximale proposée de 25 000 $ pour les activités illégales de décodage de signaux dans le cas d'un particulier.
Alors, que les activités illégales aient été découvertes par une autre entreprise ou non, ou que ce soit l'industrie même qui signale qu'une personne a chez elle de l'équipement de décodage qu'elle utilise pour ses propres besoins, que se passe-t-il? Il s'agit d'un particulier—il ne fait pas de commercialisation—mais s'agit-il bien d'une personne en particulier? Et que veut-on dire à la ligne suivante qui dit « entreprise »?
J'aimerais comprendre ce que signifient ces sommes de 5 000 $ et de 25 000 $?
Je ne veux pas donner mon approbation à quoi que ce soit, je veux simplement comprendre, car, il y a un moment, on a parlé d'une somme maximale de 1 000 $.
M. Jan Skora: Comme nous l'avons dit plus tôt, la loi actuelle ne fait pas de distinction entre ceux qui reçoivent frauduleusement les signaux pour leur propre usage et ceux qui reçoivent ces signaux et vendent toutes sortes de pièces d'équipement à des fins commerciales. La loi actuelle ne fait pas de distinction entre ces deux cas.
Quand nous avons élaboré ce projet de loi, nous avons tenté d'apporter le moins de changements possible tout en réglant certains problèmes. Nous nous sommes dit que, puisqu'on vise surtout les particuliers qui font non seulement du piratage, mais qui vendent de l'équipement de décodage, la peine pour ces personnes serait dorénavant de 25 000 $.
Vous avez raison de dire que celui qui pirate le signal chez lui, pour son propre usage, pourrait faire l'objet de poursuites et se voir imposer une peine de 25 000 $—si le tribunal estimait que c'était dans l'intérêt de la justice. Cela ne s'est pas produit jusqu'à présent, mais c'est possible.
Pour ce qui est de la somme de 1 000 $, comme notre conseiller juridique l'a indiqué, les poursuites au criminel se font aux termes de la Loi sur la radiodiffusion, habituellement après que la GRC a saisi de l'équipement de décodage. Ce sont ces peines que décrit le tableau de la page 13 et qui passeront de 5 000 $ à 25 000 $. Les poursuites au civil sont intentées par une entreprise telle que Bell ExpressVu, un câblodistributeur ou une autre qui s'estime lésée par ce genre de piratage et qui veut être indemnisée. La GRC n'intervient pas. C'est l'entreprise seule qui intente cette poursuite au civil pour obtenir un dédommagement.
M. Cuningham a déjà décrit les deux voies possibles. La première est celle où l'entreprise prouve que les dommages qu'elle a subis totalisent 3 millions de dollars; c'est la somme qu'elle réclame ensuite en dommages-intérêts. L'autre voie, que nous proposons ici, celle des dommages-intérêts fixés par la loi dans une disposition selon laquelle, dans certaines conditions, la cour juge qu'il y a eu des activités illégales et que des dommages-intérêts devraient être versés.
J'espère que cela vous aide un peu à comprendre.
L'hon. Lyle Vanclief: Certes, mais je pense sincèrement que nous avons besoin de plus de précisions. Quiconque lirait le projet de loi ou regarderait votre tableau pourrait s'imaginer à juste titre qu'on le considérerait comme un particulier et qu'il pourrait donc être assujetti à une peine de 25 000 $. L'explication que vous avez donnée précise certaines choses dans mon esprit à moi, mais je ne crois pas qu'elle précise grand-chose pour la population en général.
Sans vouloir vous contredire, je crois que les Canadiens vont s'arrêter, pour leur part, à l'article 6 du projet de loi. Ils ne vont pas chercher à comparer ce projet de loi-ci et la loi qu'il vise à modifier. Or, l'article 6 dit bien: «Dans le cas d'une personne physique, une amende maximale de vingt-cinq mille dollars». Elles sont bien belles les explications que vous m'avez données, mais sans vouloir vous contredire, elles resteront obscures pour la plupart des Canadiens. Peut-être devrez-vous donner plus d'explications.
Pour revenir à ce dont je voulais parler au départ, monsieur le président, on pourrait débattre longuement des chiffres, comme a voulu le faire M. Rajotte. Je respecte son point de vue, mais personne ne cherche à contester ici le fait que le piratage existe bel et bien. Aucun d'entre nous ne souhaite fermer les yeux : nous voulons tous y mettre un terme.
M. Savoy a dit des choses intéressantes et a fait de bonnes suggestions pour expliquer ce phénomène. Mais on parle ici d'un relativement petit groupe qui voudrait avoir accès à certaines émissions, si j'ai compris la réponse de M. Binder et de ses collègues. Toutefois, pour pouvoir répondre aux souhaits de ce petit groupe de gens et pour que ceux-ci aient accès au type de communication qu'il souhaite avoir, il faudra à mon avis d'autres mesures beaucoup plus larges que ne le prévoit ce projet de loi-ci.
Je sais qu'on ne peut en tenir compte, car cela dépasse la portée du projet de loi. Ce projet de loi-ci vise en effet à permettre au gouvernement d'intervenir de façon plus musclée en imposant des amendes aux contrevenants. Toutefois, le gouvernement devra tenir compte aussi des contrevenants dont nous venons de parler, car ils constituent un groupe de la société ayant des demandes particulières. Mais la société étant telle qu'elle est, dès que des demandes apparaissent, apparaissent également des fournisseurs, pas nécessairement toujours légaux, qui répondent aux demandes, qu'elles soient légitimes ou non.
Je me demande comment l'industrie et le CRTC peuvent notamment demeurer dynamiques et intervenir le plus possible pour réduire le phénomène illicite? Autrement dit, demandons-nous quelle est la cause du phénomène. C'est justement ce que nous faisons ici. Nous avons cerné la cause, mais pas réussi à résoudre les problème. Le projet de loi est certainement utile, et c'est pourquoi je lui accorde mon appui, mais nous ne sommes tout de même pas assez naïfs pour croire qu'il constitue la panacée. C'est un pas dans la bonne direction, et cela donnera plus de moyens à l'industrie et aux instances de réglementation pour sévir.
Monsieur le président, je terminerai par une question que l'on a plus ou moins abordée, celle de l'arrivée au Canada de l'équipement par la frontière. On a dit, je crois, que l'application de la loi était difficile à cet égard. Jusqu'à maintenant, il était illégal d'importer ce matériel au Canada, et nous disons vouloir continuer à maintenir cette interdiction d'entrée. Mais si nous n'avons jusqu'à maintenant rien pu pour empêcher l'importation illégale de ce matériel, comment pouvons-nous espérer pouvoir le faire à l'avenir? C'est comme si vous vous adressiez à la police pour faire baisser la limite de vitesse : si la police était incapable de faire respecter la limite à 50 kilomètres heure, comment pouvez-vous espérer qu'elle le fasse à 30?
Nous n'avons peut-être pas fait ce qu'il fallait et ne sommes peut-être pas intervenus de façon aussi musclée que cela aurait été souhaitable, mais qu'allons-nous faire pour empêcher que le matériel ne traverse la frontière?
 (1230)
M. Jan Skora: Vous posez là une excellente question : Cela fait un an et demi que nous jonglons avec ce problème.
L'organisation qui applique aujourd'hui les mesures douanières nous affirme qu'elle n'a aucun moyen aujourd'hui pour arrêter le matériel à la frontière. La situation est donc très difficile pour elle. L'agence a besoin d'une loi qui l'outille, tout comme le ministère de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire est outillé et a ce qu'il faut pour demander aux gens à la frontière s'ils ont un certificat d'importation. Voilà pourquoi, pour répondre aux préoccupations de l'agence en matière d'efficacité—puisqu'elle veut pouvoir laisser entrer au Canada le matériel légitime—nous avons conçu comme outil le certificat d'importation.
Cette mesure nous satisfait tout comme elle satisfait, semble-t-il, l'agence des services frontaliers. Celle-ci nous a confirmé que si ce régime entrait en vigueur, le traitement de chacun des cas à la frontière serait beaucoup plus rapide, que le matériel dûment muni d'un certificat d'importation pourrait être introduit au pays rapidement alors que le matériel non autorisé par certificat serait stoppé à la frontière. C'est l'objectif que nous voulions atteindre et voilà pourquoi nous avons conçu pour l'agence cette mesure qui, nous le croyons, sera beaucoup plus efficace que ce qui existe aujourd'hui.
Mais pour revenir à votre propos, je conviens avec vous que ce n'est pas la panacée. Il faut que tout un train de mesures soit mis en place—comme le contrôle à la frontière, l'application de la loi, le droit privé d'intenter d'une action, une campagne de publicité, l'information, etc. Mais nous sommes convaincus que ce mécanisme a de bien plus grandes chances de réussir, étant donné l'énorme quantité de matériel de tous genres qui traversent la frontière.
 (1235)
L'hon. Lyle Vanclief: À ce sujet...
Le président: Soyez bref.
L'hon. Lyle Vanclief: ... s'il faut un mécanisme permettant d'empêcher que toutes sortes de matériel traversent illégalement la frontière, qui doit agir? Le projet de loi ne mentionne rien : Il ne fait qu'imposer une amende si vous êtes dans l'inégalité. Que faut-il pour obliger l'instauration de ce mécanisme?
M. Jan Skora: Le projet de loi mentionne le certificat d'importation que le ministre de l'Industrie émettrait éventuellement et donc, le cas échéant, l'agence de contrôle des mesures douanières vérifierait la validité.
Le président: Merci, Lyle.
James, à vous la parole.
M. James Rajotte: Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir, comme M. Vanclief l'a fait, à la page 13. Vous ne cessez de dire que vous voulez cibler principalement les revendeurs, et non les consommateurs pris individuellement. Je pense que la plupart des Canadiens seraient d'accord avec votre objectif. Mais quelqu'un n'a-t-il pas dit également que le projet de loi ne fait pas la distinction entre les distributeurs et les usagers? Pourquoi le projet de loi ne fait-il pas cette distinction?
De plus, j'allais poser la même question au sujet des particuliers. La «personne physique» que mentionne le projet de loi me semble devoir être interprétée comme le particulier qui, à l'intérieur de son domicile, allume son téléviseur. Pourquoi le projet de loi ne fait-il pas la distinction entre... Il me semble que pour viser tous les distributeurs, il faut d'abord... certains distributeurs ne travaillent pas pour une compagnie. Il faut donc que l'on intente des poursuites contre ces revendeurs à titre de particuliers ou de personnes physiques.
Ai-je bien compris?
M. John Cuningham: Oui.
J'aimerais d'abord vous expliquer certaines choses. La Loi sur la radiocommunication comporte présentement une interdiction à l'alinéa 9(1)c), laquelle porte qu'il est interdit de décoder un signal sans l'autorisation du distributeur légitime. C'est le décodage qui, en soi, constitue l'infraction, et on présume que celui qui est propriétaire d'un des systèmes de décodage effectue un décodage sans autorisation à son domicile.
L'alinéa 10(1)b) de la même loi crée une autre infraction qui est la facilitation de l'acte par la fabrication, l'importation, la vente, la mise en vente de dispositifs ou de matériel.
Dans le cas de ces deux infractions, tout comme dans les lois en général, on fait la distinction entre les types de contrevenants. De fait, une des dispositions s'applique aux entreprises et une autre aux particuliers. En fait, ce ne sont pas des dispositions différentes, mais la même disposition qui fait la distinction entre ces deux cas, et cela se trouve dans la loi. Si le contrevenant est un particulier, il est passible d'une certaine amende et d'une certaine durée d'emprisonnement, qui ne sont pas les mêmes si le contrevenant est une personne morale, puisque celles-ci ne peuvent évidemment pas être envoyées en prison. Les personnes morales ne sont donc pas passibles généralement de peines d'emprisonnement.
C'est ce qui explique que mes collègues, je crois, puissent affirmer que la loi ne fait pas de distinction entre les différents types de personnes physiques. En effet, le particulier qui possède son entreprise est considéré comme une personne physique, même si l'entreprise n'est pas formée en société, tout comme l'est aussi le particulier qui décode avec son appareil les signaux dans son domicile. Il est donc vrai que la loi ne fait pas de distinction entre les deux genres de personnes physiques. Mais il reste que la loi crée deux différentes infractions, une à l'alinéa 9(1)c) et l'autre à l'alinéa 10(1)b).
Mais il faut bien comprendre que le projet de loi ne propose aucunement de modifier en quoi que ce soit la liste des activités illégales énumérées à l'alinéa 10(1)b) de la loi. Ces activités interdites constituent déjà une infraction et le projet de loi propose uniquement d'alourdir les peines imposées. Mais comme l'alinéa 10(1)b) inclut également dans les infractions la possession de matériel ou de dispositif, cet alinéa pourrait être invoqué pour intenter des poursuites contre l'individu qui a chez lui de l'équipement pour décoder.
M. James Rajotte: Trouve-t-on l'alinéa 10(1)b) dans l'une des dispositions du projet de loi?
M. John Cuningham: L'alinéa 10(1)b) est la disposition à laquelle renvoie le paragraphe 6(1) du projet de loi.
Le paragraphe 10(1) de la loi s'applique à plusieurs types d'infractions énumérées dans les alinéas a), b), c) et d), sauf erreur.
Une fois toutes les infractions énumérées, on dit que le contrevenant commet une infraction sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Il ne s'agit donc pas ni d'un acte criminel ni d'une infraction sujette à options, et la loi établit les montants des amendes dont est passible le contrevenant ainsi que la durée de l'emprisonnement.
 (1240)
M. James Rajotte: Je m'interroge au sujet de l'article 6, à la page 4 du projet de loi, et plus particulièrement du paragraphe (2.1) qui renvoie justement à l'alinéa 9(1)c). Or, celui-ci établit qu'il est interdit de
décoder, sans l'autorisation de leur distributeur légitime ou en contravention avec celle-ci, un signal d'abonnement ou une alimentation réseau; |
C'est très important, et je voudrais bien comprendre qui peut donc contrevenir à cette disposition. Supposons que je m'adresse à un ami qui vend des systèmes de décodage sur le marché noir pour lui demander d'en installer un chez moi. Supposons que j'achète cette dite carte à puce et que cet ami me l'installe sur mon appareil. Il est évident à mes yeux qu'il est un distributeur. Supposons que, une fois la carte installée, j'aille allumer mon téléviseur. N'est-ce pas moi qui suis en contravention de l'alinéa 9(1)c)?
M. John Cuningham: L'alinéa 9(1)c) interdit de décoder. Toutefois, lorsqu'il y a des enquêtes pour cibler les revendeurs ou les importateurs, celles-ci se font partiellement en vertu de l'alinéa 10(1)b), puisque l'on cible l'activité commerciale, c'est-à-dire la vente ou la mise en vente.
C'est d'ailleurs, du point de vue des preuves, beaucoup plus facile à prouver. En effet, pour établir les preuves d'une infraction en vertu de l'alinéa 9(1)c), il faut être en mesure de prouver qu'il y a eu véritablement décodage, ce qui est la plupart du temps impossible à moins de se trouver par hasard devant une personne qui est en train de faire du décodage, ce qui est très improbable, vous en conviendrez.
M. James Rajotte: Mais aux yeux du profane que je suis, il me semble que les alinéas 9(1)c) et 9(1) d) ciblent plutôt le consommateur, c'est-à-dire le particulier à son domicile. Si nous alourdissons les amendes afférentes à ces deux alinéas, c'est sans doute parce qu'il est plus facile d'obtenir des preuves contre les consommateurs individuels que contre le distributeur. Par conséquent, puisque vous avez affirmé à maintes reprises que le projet de loi visait à pourchasser les revendeurs et non pas les particuliers dans leur domicile, je constate que le projet de loi dans son libellé actuel n'y parviendra pas. Comprenez-vous où je veux en venir?
M. John Cuningham: Vous avez raison. Il y a ces deux différentes infractions. Les sanctions relatives à ces deux infractions augmentent, le paragraphe 6(1) couvre 10(1)b) et le paragraphe 6(2) porte sur plusieurs des autres infractions sous les alinéas 9(1)c) et 9(1)d), et 6(2.2) et 9(1)e).
Alors toutes ces infractions précises ont leurs propres éléments qui doivent être prouvés et vous avez raison, le décodage, de manière générale, c'est l'action que fait le consommateur et la vente au détail, que couvre 10(1)b, de manière générale, c'est l'infraction que commet le détaillant.
M. Michael Binder: Je pense que ce dont nous parlons, c'est de savoir si l'amende qui existe actuellement dans le projet de loi—sous sa forme actuelle—permet la même différenciation. Elle est maintenant de 5 000 $ et de 25 000 $ pour l'entreprise. Si l'on passe de 5 000 $ à 25 000 $, nous avons augmenté toutes les amendes, notamment celles qui s'appliquent aux personnes. Que cette augmentation soit justifiée ou non, nous pouvons en débattre, mais aux fins de l'enquête, lorsque vous allez porter des accusations... ce sont les vendeurs que nous voulons.
M. James Rajotte: Ce n'est pas ce que dit le projet de loi explicitement, et M. Vanclief, je pense, a fait valoir un point important, c'est-à-dire que lorsqu'on parle d'une personne, il faut préciser qu'il s'agit d'une personne qui n'est pas un simple consommateur. Si l'objectif de ce projet de loi, comme vous le dites, est de débusquer le distributeur et non le consommateur, il faut faire cette distinction. Je pense que cet élément était très valable.
D'autre part, si je comprends bien M. Cuningham, au paragraphe 9(1)—les alinéas c), et d), selon moi, et non pas e), mais bien c) et d), sont beaucoup plus faciles à prouver pour accuser le consommateur, plutôt que la personne qui est venue et qui a installé le dispositif ou qui a donné une carte à puces dans une ruelle. Par conséquent, si l'objectif du projet de loi est vraiment de débusquer le distributeur et non le consommateur, je pense que cet article est contraire à notre intention.
Corrigez-moi si je me trompe.
M. John Cuningham: Oui, avec le respect que je vous dois, je pense qu'à ce sujet précis, il est plus facile de prouver 10(1)b, que de prouver 9(1)c), parce que pour avoir la preuve de 9(1)c), il vous faut un agent muni d'un mandat ou autorisé à être sur les lieux qui surprenne une personne en train de décoder. C'est très difficile.
Avec 10(1)b), il faut une offre de vente. Par exemple, quelqu'un peut faire passer une annonce dans un journal local, vous prenez l'annonce et la présentez au tribunal et vous faites les liens entre l'accusé et l'annonce; vous dites que cette personne a tenté de vendre ces cartes. Il est beaucoup plus facile de prouver 10(1)b).
 (1245)
M. James Rajotte: Alors, si l'objectif du projet de loi est de poursuivre le distributeur et non le consommateur, est-ce qu'on ne devrait pas éliminer le paragraphe (2.1)?
M. John Cuningham: Comme mon collègue l'a dit, nous pourrions en discuter.
Je voudrais simplement signaler qu'il y avait une petite anomalie dans la loi actuelle, entre la sanction prévue pour 10(1)b, et la sanction de 9(1)c). La sanction actuelle en vertu de 10(1)b, est de 5 000 $ ou un an de prison. La sanction actuelle pour 9(1)c est de 10 000 $—c'est donc une amende plus élevée—mais on parle de six mois de prison, soit un emprisonnement moins long.
Visiblement, on a parlé de ce qu'il fallait faire et des options qui étaient envisagées, mais au bout du compte, on a décidé de les harmoniser—alors une personne coupable de 10(1)b et de 9(1)c)—que cette personne soit impliquée dans des activités commerciales ou non commerciales—est passible d'une amende de 25 000 $ ou d'un an de prison.
M. James Rajotte: Est-ce qu'il me reste du temps, monsieur le président.
Le président: Allez-y, James, si vous le voulez.
M. James Rajotte: J'aimerais revenir aux commentaires de M. O'Sullivan. Vous avez dit que le CRTC appliquait, en gros, la politique de radiodiffusion établie par le gouvernement, ce qui est vrai, et vous avez parlé de la volonté de refléter le multiculturalisme du Canada. Nous avons été contactés—je pense que c'est le cas de tous les membres du comité—par différentes communautés multiculturelles du Canada qui disent qu'elles souhaitent avoir accès à des services qui ne sont pas fournis par les deux fournisseurs de licence. Or, je pense que ceux-ci seraient heureux de leur fournir ces services.
Je pense que cette question sera une des questions les plus controversées de ce projet de loi—c'est-à-dire de s'assurer que les communautés multiculturelles ont accès aux services qu'elles désirent. Alors comment nous assurer que ce soit le cas? Avez-vous une réponse à cela?
M. Marc O'Sullivan: Cela fait partie du travail permanent de la commission que d'étudier les demandes de services supplémentaires. Effectivement, nous voulons pouvoir ajouter ces services, mais nous voulons le faire sans miner les services ethniques canadiens existant. Parce que ensuite, ceux-ci viendront dire: «Comment le CRTC a-t-il pu permettre à ces services étrangers d'arriver et de servir le même auditoire, avec le même genre de programmes que nous, et de nous faire du tort?»
Il nous faut étudier ces demandes au cas par cas. Nous devons examiner chaque demande, pour chaque service étranger que l'on demande d'ajouter à la liste des services disponibles. Puis il faut voir si ce type de programmes pour ce groupe ethnique n'existe pas déjà parmi les services canadiens. Si c'est le cas, il faut voir si ce service est directement concurrentiel, ou partiellement concurrentiel aux services existants.
Je pense que la commission entend la demande croissante pour davantage de services. Dans les mois qui viendront, elle sera plus à même de signaler comment elle souhaite pouvoir examiner ces questions de manière différente. On nous dit que ce test sur la concurrence serait trop restrictif et qu'il faudrait peut-être adopter une approche plus large.
M. James Rajotte: Est-ce qu'il n'y a pas de solution? Si vous voulez faire une demande auprès de l'Association canadienne de télévision par câble pour obtenir HBO, on pourrait dire d'une part que cette demande ne peut pas être acceptée parce qu'elle va menacer ou nuire aux services canadiens. Mais l'autre option, c'est de dire très bien, nous allons fournir davantage de services aux Canadiens. Mais nous ferons en sorte, par exemple, que les distributeurs investissent davantage dans les programmes canadiens en bout de ligne, plutôt que d'essayer de limiter le marché à l'entrée.
Est-ce que c'est possible?
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M. Marc O'Sullivan: En fait, il y a eu une demande qui a été étudiée de ce point de vue là, qui s'appelait quelque chose comme 49th Media, qui proposait de vendre de la publicité canadienne sur des services américains distribués au Canada et de réinvestir cet argent dans les programmes canadiens. Cette demande a été renvoyée parce qu'incomplète. Mais la réaction de l'industrie de la radiodiffusion canadienne a été la panique, parce que si vous proposez quelque chose qui change le modèle financier, il y aura des gagnants et des perdants et certains de ces perdants seront des entreprises canadiennes.
La réaction face à la proposition de HBO a été assez forte. Le président de l'Association canadienne de télévision par câble, Dean MacDonald, a dit qu'une grenade avait été lancée sur le système de radiodiffusion canadien, pour décrire les préoccupations—pas juste chez les radiodiffuseurs, mais également chez les producteurs—que cela avait suscité.
Alors vous regardez ce modèle et vous dites: nous allons changer le modèle économique de l'industrie. Chaque fois que l'industrie subit des changements importants, il y a toujours des gagnants, mais il y a également toujours des perdants.
M. James Rajotte: La raison pour laquelle j'ai soulevé cette question, c'est que David Asper en a parlé au comité. Lors du dernier examen sur les télécommunications, il faisait partie des diffuseurs qui ont recommandé d'augmenter les limites de propriétés. Beaucoup de membres du comité lui avaient fait la morale en lui disant: «Il faut être nationaliste et encourager les programmes canadiens».
Il a fait un petit test, je ne sais pas si vous voulez vous prêter au jeu. Il a demandé: «Combien d'entre vous pouvez me nommer le personnage principal de Blue Murder, sur Global?» Je ne sais pas si l'un d'entre vous peut me répondre.
M. Marc O'Sullivan: Et bien, cela a été annulé.
M. James Rajotte: En fait, c'est diffusé de nouveau, apparemment.
Le président: D'accord, James.
M. James Rajotte: Personne parmi les membres du comité n'a pu le nommer. Ensuite il a dit: «Combien d'entre vous l'avez déjà regardé?» Aucune main levée. Ensuite il a dit: «Combien d'entre vous avez déjà regardé Law and Order?» Tout le monde a levé la main. Il a dit: « Et vous me faites la morale au sujet des programmes canadiens?» Il a dit: «Est-ce que ce ne serait pas plus approprié d'avoir un modèle où l'on peut investir davantage d'argent dans la programmation pour avoir d'excellents programmes canadiens plutôt que de décider en haut qu'il fallait tel pourcentage de programmes canadiens?»
M. Jacques Langlois: C'est un élément clé, parce que beaucoup d'entre vous qui regardez Law and Order le regarde sur une chaîne de télévision canadienne, qui achète les droits à ce programme américain. Si HBO et toutes les autres « superstations » américaines et autres arrivaient au Canada, ce ne serait pas dans leur intérêt de vendre des droits aux Canadiens, parce qu'ils ont déjà accès au public canadien. Alors, les chaînes de télévision canadiennes n'auraient plus les droits des programmes américains. L'argent lié à la publicité serait perdu et c'est là que se ressentirait l'incidence financière de cette décision.
M. James Rajotte: Vous, vous parlez d'appuyer l'industrie canadienne plutôt que les créateurs canadiens.
M. Jacques Langlois: Il s'agit des deux. L'un ne va pas sans l'autre.
Le président: Brian, vous avez la dernière question. Il faut que l'on tienne une réunion sur la liste des témoins également.
M. Brian Masse: Merci, monsieur le président.
Monsieur O'Sullivan, au sujet des demandes auprès du CRTC 2003-36 et des chaînes qui attendent encore une réponse, on dirait qu'il s'agit d'un trou noir. Quand cette décision sera-elle prise? Avez-vous des directives précises? Je sais que si je demande certaines choses, vous avez six mois ou quelque chose comme ça pour me répondre. Quand le public canadien aura-t-il vent de ces décisions? Est-ce que les chaînes comme Al Jazeera sont différentes... les films d'art et autres, où il pourrait y avoir une passerelle entre ces films d'art et d'autres produits, qui sont complètement différents?
M. Marc O'Sullivan: Cette décision sera rendue au printemps, ce trimestre. En fait, plusieurs des demandes exigeaient quinze services supplémentaires au total. C'était parmi les plus grosses demandes que nous avions à traiter; il y a eu quelque chose comme 3 000 interventions. C'est assez controversé et nous avons appliqué la politique qui consiste à examiner l'aspect concurrentiel de la question.
Vous avez parlé d'Al Jazeera. Cette demande était assez complexe; et il y a même des questions relatives à la charte qui ont été soulevées dans le cadre de cette demande, alors celle-ci nous a pris beaucoup de temps. C'est la première fois que nous avions affaire avec des demandes aussi massives, pour autant de services. La décision sera donc rendue ce trimestre.
M. Brian Masse: Merci.
Le président: Merci, monsieur Masse.
Je souhaite remercier nos témoins de nous avoir accordé du temps ce matin.
Nous nous réservons le droit de vous inviter de nouveau si d'autres témoins posaient des questions auxquelles nous n'avions pas pensé aujourd'hui.
Cela dit, je vais demander à tous ceux qui ne sont ni parlementaires ni du personnel parlementaire de quitter la pièce aussi vite que possible pour que nous puissions tenir une réunion sur la liste des témoins. Nous allons suspendre la séance pour quelques minutes et passer à huis clos.
[La séance se poursuit à huis clos]