SDEV Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le mercredi 16 février 2005
¹ | 1535 |
Le président (L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)) |
Mme Nadja Drost (agente de programme, Groupe d'orientation politique pour les Amériques, Conseil canadien pour la coopération internationale) |
Le président |
Mme Nadja Drost |
Le président |
Mme Nadja Drost |
¹ | 1540 |
¹ | 1545 |
Le président |
Mme Lilia Solano (director de Proyecto Justicia y Vida et professeur, Faculté de droit, Université nationale de Colombie) |
Le président |
Mme Lilia Solano |
Le président |
Mme Lilia Solano |
¹ | 1550 |
Le président |
M. Alex Neve (secrétaire général, Section anglaise, Amnistie internationale (Canada)) |
¹ | 1555 |
º | 1600 |
º | 1605 |
Le président |
Mme Jean Symes (coordonnateur de programmes, Inter Pares) |
º | 1610 |
º | 1615 |
Le président |
Mme Nadja Drost |
Le président |
º | 1620 |
Mme Nadja Drost |
Le président |
Mme Nadja Drost |
Le président |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
º | 1625 |
Le président |
Mme Jean Symes |
Le président |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ) |
º | 1630 |
Le président |
M. Alex Neve |
º | 1635 |
Le président |
M. Alex Neve |
Le président |
Mme Sheila Katz (représentante nationale des Amériques, Service international, Congrès du travail du Canada) |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
Mme Sheila Katz |
M. Alex Neve |
Le président |
Mme Sheila Katz |
Le président |
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD) |
º | 1640 |
Le président |
Mme Lilia Solano |
º | 1645 |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.) |
Le président |
M. Alex Neve |
º | 1650 |
Le président |
M. John Lewis (coordonnateur de programmes, Droits de la personne, KAIROS) |
Le président |
Mme Jean Symes |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC) |
º | 1655 |
Le président |
M. Alex Neve |
Le président |
M. Ken Luckhardt (représentant national, Département international, Syndicat des Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile) |
Le président |
M. Peter Goldring |
» | 1700 |
Le président |
Mme Jean Symes |
Le président |
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.) |
Mme Jean Symes |
» | 1705 |
M. Navdeep Bains |
Mme Jean Symes |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
Mme Sheila Katz |
Mme Diane Bourgeois |
Mme Sheila Katz |
Mme Diane Bourgeois |
» | 1710 |
Le président |
Mme Lilia Solano |
Le président |
Mme Jean Symes |
Le président |
M. Keith Rimstad (coordonnateur des programmes régionaux, Amnistie internationale (Canada)) |
» | 1715 |
Le président |
Mme Alexa McDonough |
» | 1720 |
Le président |
M. Ken Luckhardt |
Mme Alexa McDonough |
M. Ken Luckhardt |
Le président |
M. Alex Neve |
Le président |
» | 1725 |
Mme Jean Symes |
Le président |
Mme Jean Symes |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le greffier du comité |
Le président |
L'hon. Paddy Torsney |
Le président |
M. John Jones (coordonnateur, Colombie, Amnistie internationale (Canada)) |
Le président |
M. John Jones |
Le président |
Mme Sheila Katz |
Le président |
CANADA
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international |
|
l |
|
l |
|
TÉMOIGNAGES
Le mercredi 16 février 2005
[Enregistrement électronique]
* * *
¹ (1535)
[Traduction]
Le président (L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)): Chers collègues, je constate que les témoins sont plus nombreux que les membres du comité mais je suis sûr que cette tendance va s'inverser. Si le greffier et mes collègues le permettent, j'inviterais les témoins à prendre place autour de la table.
Je vous demande donc de vous asseoir à la table, si vous le souhaitez, en particulier les personnes qui vont répondre aux questions.
Il y a ici un grand nombre de personnes très bien informées. Je pense que c'est dans un souci de simplicité que M. Neve témoigne à chacune de nos séances, vous l'avez remarqué, quel qu'en soit le sujet.
[Français]
Quatre personnes vont prendre la parole, et les autres répondront aux questions. Mme Drost, la première intervenante,
[Traduction]
est l'agente de programme du Groupe d'orientation politique pour les Amériques du Conseil canadien pour la coopération internationale.
Je vous remercie tous d'être venus.
[Français]
Je cède la parole à Mme Drost.
[Traduction]
Mme Nadja Drost (agente de programme, Groupe d'orientation politique pour les Amériques, Conseil canadien pour la coopération internationale): Merci de m'avoir présenté.
Je suis la coordonnatrice du Groupe d'orientation politique pour les Amériques du Conseil canadien pour la coopération internationale. Nous constituons un groupe de travail qui regroupe près de 40 organismes canadiens qui s'occupent de droits de la personne et de justice sociale dans les Amériques.
Nous sommes également heureux d'avoir avec nous, Lilia Solano, une partenaire colombienne d'un de nos organismes membres, KAIROS.
Le Groupe d'orientation politique pour les Amériques a beaucoup travaillé avec plusieurs d'entre vous sur les questions qui touchent la Colombie et je tiens à vous dire que nous sommes très heureux d'avoir été invités à prendre la parole aujourd'hui.
Je vais vous donner un bref aperçu des sujets qui nous préoccupent. J'aimerais mentionner, comme je suis sûre que vous l'avez remarqué, que nous avons ici plusieurs spécialistes qui ne présenteront pas d'exposés mais qui seront ici, à titre de personnes-ressources, pour participer à la période des questions.
Puisqu'il s'agit d'un exposé conjoint, j'aimerais demander au président et au comité d'entendre notre exposé et de garder les questions pour la fin, si cela est possible.
Le président: Monsieur Goldring, cela vous convient-il?
[Français]
Il y a unanimité, comme toujours.
[Traduction]
Mme Nadja Drost: Nous espérons que vous utiliserez l'information que nous vous fournissons ici et que le comité admettra qu'il y a lieu de procéder à un examen approfondi de la situation en Colombie et dans la région, ainsi que des politiques qu'a adoptées le Canada à l'égard de ce conflit qui ne fait que s'aggraver.
J'aimerais présenter une résolution, si vous le permettez, que nous aimerions voir adopter par le sous-comité, de façon à vous donner une bonne idée du point de vue que nous avons adopté dans cet exposé.
Puis-je lire à voix haute le projet de résolution?
Le président: Allez-y.
Mme Nadja Drost: Merci.
Compte tenu du rôle important qu'a joué le Canada en tant que président du [groupe des 24 pays donateurs] en Colombie, du 1er janvier 2005 au 30 juin 2005, et en tant qu'ancien président pour le reste de l'année 2005; |
Compte tenu de la grave crise humanitaire qui règne en Colombie en raison d'un conflit armé permanent, dont Kofi Annan a déclaré qu'elle se situait, sur le plan de la gravité, immédiatement après celle du Soudan, qui s'accompagne de violations constantes des droits de la personne, de déplacements massifs de population, de massacres et d'assassinats; |
Compte tenu des facteurs économiques sous-jacents au conflit et de l'écart entre les revenus qui a eu pour effet d'exacerber le conflit; |
Compte tenu de la militarisation accélérée de la région andine et de la menace que représente la situation en Colombie pour la stabilité de la région; |
Compte tenu des tensions qui existent entre le gouvernement de la Colombie et les Nations Unies; |
Compte tenu de l'engagement qu'a pris le gouvernement canadien en matière d'action multilatérale et de droits de la personne; |
Étant donné que la dernière étude effectuée par le sous-comité de la Colombie remonte à 2002 et que la situation et le rôle du Canada ont continué à évoluer depuis lors, tout comme le contexte régional; |
Il est résolu : |
Que le sous-comité des droits de la personne et du développement international entreprenne une étude de la situation en Colombie, du contexte régional dans lequel elle s'inscrit, dans le but de déterminer les mesures que le Canada pourrait prendre pour intervenir dans cette crise humanitaire, promouvoir une paix négociée et juste, dans un cadre favorisant les droits de la personne. |
Que l'étude prenne en compte les représentations de la société civile colombienne de façon à ce que le comité comprenne bien tout l'impact que peut avoir ce conflit sur les personnes les plus directement touchées. |
Que l'étude examine nos relations avec la Colombie et les pays voisins pour s'assurer que tous les éléments de la politique internationale du Canada, qu'il s'agisse d'aide, de commerce, de sécurité et de diplomatie, s'harmonisent avec les engagements que nous avons pris dans le domaine des droits de la personne, notamment pour ce qui est des droits des travailleurs. |
Merci.
Le comité a décidé en 2002 que la situation des droits de la personne en Colombie méritait une étude. Il est heureux que le comité ait tenu plusieurs séries d'audiences tant au Canada qu'en Colombie à ce sujet et que des membres du sous-comité se soient rendus en Colombie. Cependant, depuis cette étude, la situation a beaucoup évolué. La dynamique du conflit armé interne en Colombie et le contexte extérieur ont beaucoup changé, et malheureusement, la lutte pour la défense des droits de la personne en Colombie se joue dans ce nouveau contexte.
Avant de décrire l'évolution de ce conflit, il est important de rappeler les conclusions de l'analyse de nos partenaires, qui indique que les causes fondamentales du conflit perdurent. Il se livre une lutte très vive pour la possession des ressources et de la richesse, pour savoir en fait qui les développe, les contrôle et en profite. La Colombie est un des pays d'Amérique latine où la répartition de la richesse est particulièrement inéquitable. Les inégalités sociales profondes sont exacerbées par le modèle économique actuel adopté par la Colombie, qui favorise la concentration du pouvoir et des ressources entre les mains d'une très petite élite.
L'écart entre les riches et les pauvres ne fait que s'aggraver. La société colombienne est profondément divisée sur le genre de développement économique qu'il faudrait poursuivre pour lutter contre la pauvreté et les inégalités traditionnelles et modifier les conditions sociales qui en résultent. De larges secteurs de la société civile, notamment les paysans, les indigènes, les défenseurs des droits de la personne et les syndicalistes s'opposent activement au programme économique que le gouvernement souhaite mettre en oeuvre. Ceux qui contestent les politiques économiques mises de l'avant par l'élite et le gouvernement actuel du pays, et les moyens utilisés pour les mettre en oeuvre sont la cible de violence, de menaces; ils font l'objet de mesures de détention et de stigmatisation.
La réforme structurelle que le gouvernement cherche à mettre en place est dictée par les politiques du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, qui débouchent sur la privatisation des entreprises publiques, l'augmentation des impôts, et du chômage et la perte de la sécurité d'emploi pour les personnes qui travaillent encore dans le secteur économique formel. Les programmes de privatisation ont pour but de transférer des ressources publiques au secteur privé, en particulier à des sociétés étrangères multinationales. Il est encore vrai que le nombre des syndicalistes assassinés en Colombie chaque année est supérieur à celui de ceux qui sont tués dans tous les autres pays au monde.
Les causes sous-jacentes à ce conflit demeurent mais le gouvernement a adopté de nouvelles tactiques pour étouffer le débat démocratique et la résistance à son programme économique.
J'aimerais attirer votre attention sur quelques aspects qui sont en train d'évoluer.
Tout d'abord, même si, selon le gouvernement, le nombre des massacres, des enlèvements et des déplacements forcés a diminué, les autres violations des droits de la personne, comme la torture, les disparitions, les détentions arbitraires et les violations de l'équité procédurale ont augmenté. Ces violations sont directement imputables aux agents de l'État.
Deuxièmement, les nouvelles lois et les réformes constitutionnelles qu'a introduits le gouvernement portent atteinte aux institutions fondamentales que sont le principe de légalité et la démocratie et vont ouvertement à l'encontre des recommandations en matière des droits de la personne. Ces mesures visent à restreindre les moyens dont disposent les juges pour assurer la protection des droits fondamentaux, à limiter le contrôle qu'exerce la Cour constitutionnelle sur l'exécutif, à affaiblir les mécanismes qui garantissent l'équité procédurale et les droits de la défense et à attribuer des pouvoirs judiciaires à l'armée, ce qui va directement à l'encontre d'une recommandation du Haut Commissaire aux droits de l'homme dans ce domaine.
Troisièmement, et ma collègue, Mme Solano, vous en dira davantage, l'espace civique neutre qui permettait aux citoyens de structurer leur contestation a
¹ (1540)
[Français]
Le président Uribe cherche à refuser de leur accorder la protection à titre de civils, en prétendant qu'il n'y a pas de conflit interne et que tous les civils sont responsables d'aider l'État dans sa lutte contre le terrorisme.
Les civils sont entraînés dans le conflit aux moyens d'initiatives telles que le réseau d'informateurs payés, le programme des soldats paysans et le projet de loi qui autorise les civils à porter des armes militaires.
Le refus de reconnaître le principe de distinction entre les civils et les combattants obscurcit un conflit interne complexe et rend plus difficile de trouver des solutions. Durant l'administration du président Uribe, des fonctionnaires ont attaqué des ONG s'occupant des droits de la personne tels qu'Amnistie Internationale en les désignant de groupes qui appuient le terrorisme ou qui lui sont utiles.
En plus des attaques dirigées contre la société civile, le gouvernement colombien critique de plus en plus le bureau du haut commissaire aux droits de l'homme des Nations Unies en Colombie, et des attaques personnelles ont été dirigées contre son directeur. À la demande du gouvernement colombien, l'envoyé spécial des Nations Unies en Colombie mettra fin à ses travaux en avril.
Le Canada doit examiner sérieusement les conséquences et les répercussions possibles que cette situation aura sur toute possibilité d'amorcer un processus de paix globale.
[Traduction]
Après vous avoir exposé certains changements importants survenus dans le contexte du conflit colombien depuis la dernière étude qu'a effectuée le comité, j'aimerais maintenant inviter nos témoins experts à vous brosser un tableau plus détaillé de la situation. Permettez-moi de vous les présenter rapidement : Lilia Solano du Proyecto Justicia y Vida en Colombie vous décrira les principales revendications de la société civile et les raisons qui les sous-tendent, Alex Neve d'Amnistie Internationale parlera des approches multilatérales et des institutions clés qui travaillent au renforcement des droits de la personne en Colombie et Jean Symes d'Inter Pares replacera le conflit en Colombie dans un contexte plus large.
Enfin, j'aimerais conclure en vous citant M. Jan Egeland, le sous-secrétaire général des affaires humanitaires des Nations Unies. Au cours d'une conférence de presse tenue en mai 2004, il a qualité la Colombie de «principal problème humanitaire, principal problème des droits de la personne et principal conflit de l'hémisphère occidental». Nous espérons que vous reconnaîtrez que le Canada, après les engagements qu'il a pris envers les droits de la personne et le multilatéralisme, ne peut demeurer inactif à ce sujet et qu'il doit, de façon urgente, réviser les politiques qu'il a adoptées à l'égard de la Colombie et de la région.
Je vous remercie.
¹ (1545)
[Français]
Le président: Merci beaucoup.
Qui est la prochaine? Señora Solano, por favor.
[Traduction]
Mme Lilia Solano (director de Proyecto Justicia y Vida et professeur, Faculté de droit, Université nationale de Colombie): Gracias.
Je vous remercie de me donner la possibilité de vous parler de mes expériences et de mes réflexions au sujet du contexte et du conflit en Colombie. Je pense que la plupart d'entre vous ont obtenu les deux pages qui sont en train d'être distribuées.
Le président: Avez ce document, madame McDonough?
Mme Lilia Solano: Je veux être sûre que vous comprendrez tous ce que j'essaie de dire. Je vous demande d'excuser mon mauvais anglais mais c'est devenu de nos jours la langue universelle.
Le président: Ne dites pas cela.
Mme Lilia Solano: Je veux simplement rapidement mentionner que je suis enseignante. Je suis professeure à la faculté de droit et de sciences politiques d'une des universités colombiennes. Je travaille également très étroitement avec un mouvement de défense des victimes des crimes contre l'humanité qui a été mis sur pied en Colombie. Je connais donc ce sujet non seulement à cause de la recherche que j'ai effectuée mais aussi grâce à mon expérience personnelle, à ma participation sur le terrain et à la lutte que je mène avec la population en Colombie.
Il convient de mentionner deux facteurs qui jouent un rôle essentiel dans l'évolution du contexte colombien actuel pour pouvoir comprendre la façon dont a évolué récemment le conflit en Colombie. Il y a a) les mesures tactiques qu'a prises le gouvernement du président Álvaro Uribe pour limiter l'espace dont dispose la société civile et b) les initiatives concrètes qu'a prises la société civile colombienne pour protéger ses droits civils et politiques qui sont de plus en plus restreints.
Pour ce qui est des mesures tactiques adoptées par le gouvernement colombien à l'égard du mouvement social, lorsque le projet de référendum du président Uribe a été défait par la mobilisation massive des forces sociales en 2004, le gouvernement central a décidé de mettre en oeuvre sa propre version d'une loi patriotique de façon à contrôler les mouvements sociaux. La Loi antiterroriste, qui a suscité de nombreuses critiques de la part d'organismes de défense des droits de la personne tant nationaux qu'internationaux, de la part de la communauté internationale et des Nations Unies, incrimine la participation à l'opposition politique et viole les droits et libertés civils et politiques qui sont inscrites dans la constitution colombienne et dans les traités et conventions internationaux.
Tout ceci a considérablement aggravé les tensions, l'armée cherchant à obtenir des résultats immédiats dans sa guerre contre la rébellion armée. Les droits procéduraux des citoyens ont été violés quotidiennement et parallèlement, les médias ont orchestré une campagne visant à montrer que le gouvernement jouissait d'une grande popularité. Cela a créé une atmosphère de sécurité artificielle dans ce pays. Cela n'empêche pas les membres des syndicats de faire l'objet d'attaques juridiques et physiques. Les ONG et les défenseurs des droits de la personne étaient et sont toujours continuellement harcelés et menacés tandis que le président Uribe continue d'essayer de modifier la législation en vue de créer un cadre juridique favorisant la mise en oeuvre des diktats du FMI.
Dans ce contexte, Álvaro Uribe a entamé des négociations avec le secteur paramilitaire, tout en poursuivant sa politique de privatisation—par exemple, TELECOM, Inravision, Ecopetrol, etc.—à des conditions défavorables aux syndicats, aux droits des travailleurs, à la propriété de l'État et à la souveraineté.
Du côté des initiatives prises par la société civile, les syndicats, divers regroupements et les organisations autochtones ont clairement fait savoir l'année dernière que les politiques du président Uribe sont nuisibles et ne favorisent pas la démocratie, la liberté et la justice. Pour le mouvement social colombien, le gouvernement central utilise un discours trompeur lorsqu'il décrit le conflit colombien en termes de terrorisme, de façon à s'aligner sur la rhétorique bushienne de l'après 9 septembre.
La rébellion armée colombienne n'est qu'un des nombreux symptômes d'une maladie très grave dont les causes profondes demeurent intouchées et même plutôt exacerbées par la mise en oeuvre de politiques inspirées par les sociétés multinationales. C'est pourquoi, aux yeux de la société civile colombienne, les négociations qui se poursuivent actuellement entre le gouvernement et les paramilitaires ont pour seul but de fournir un refuge et l'impunité juridique aux auteurs des crimes contre l'humanité récemment commis en Colombie. Le gouvernement discute avec des trafiquants de drogue bien connus qui ont réussi à se constituer des armées privées efficaces avec parfois l'appui pas très discret des agents et des organismes de l'État.
¹ (1550)
À mesure que le dialogue progresse, il devient de plus en plus clair que les paramilitaires suivent une habile stratégie au sujet de laquelle le gouvernement central doit rendre des comptes. Lorsqu'il était candidat à la présidence, le président Uribe a lui-même déclaré qu'un élément essentiel de son programme de paix était la réintégration dans la société des membres des organismes paramilitaires. Sa promesse s'accompagnait de l'octroi de l'impunité, non seulement à l'égard des crimes contre l'humanité commis par les paramilitaires mais aussi à l'égard de la structure financière reliée à la drogue grâce à laquelle fonctionnent ces groupes paramilitaires.
Le souci d'éviter tout problème juridique aux groupes paramilitaires suscite également des questions au sein de la communauté internationale au point où certains membres de l'establishment s'interrogent sur le bien-fondé de ces négociations. La mobilisation de la société civile, en particulier celle des victimes de crimes contre l'humanité, a eu des répercussions jusque dans le congrès colombien et a obligé les ministres du président Uribe à divulguer au public la nature des promesses faites aux paramilitaires.
La société civile colombienne est convaincue que le dialogue avec les paramilitaires n'est pas dépourvu de liens avec les ententes de libre-échange qu'imposent à la Colombie les États-Unis, agissant en tant que représentant du capital transnational.
Je sais que le temps passe vite, je vais donc passer au dernier paragraphe.
Contrairement à ce que nous souhaitons, la propagande dominante... l'intensité du conflit colombien n'a pas diminué sous l'administration du président Uribe. Les assassinats sélectifs et les déploiements de force se poursuivent, principalement à cause du rôle prédominant qu'ont joué les paramilitaires ces dernières années. Il est par conséquent essentiel que la communauté internationale joue son rôle de chien de garde et manifeste son appui à la société civile. Le fait que le gouvernement colombien négocie avec les paramilitaires doit être clairement dénoncé par la communauté internationale. Ces négociations ne sauraient justifier la criminalisation de la mobilisation de la société civile, qui exige la vérité et la réparation intégrale des abus, comme condition préalable à la réconciliation et à la paix.
Je sais très bien que le gouvernement colombien cite des chiffres qui montre que la situation des droits de la personne est en voie de s'améliorer mais nous qui travaillons avec les paysans, avec les syndicalistes, avec les communautés noires savons par expérience que cela n'est pas vrai et que c'est le contraire qui l'est. Tout ce processus vise plutôt à accorder l'impunité et le pardon à l'égard de ces crimes.
Le président: Gracias
Qui est le suivant?
Alex Neve.
Vous n'avez pas besoin de vous présenter, monsieur Neve.
M. Alex Neve (secrétaire général, Section anglaise, Amnistie internationale (Canada)): Merci. Je suis heureux d'être de nouveau ici cet après-midi. J'ai l'impression que j'ai maintenant un rendez-vous avec vous tous les mercredis après-midi. Il est évident qu'une stratégie visant à améliorer la situation catastrophique des droits de la personne en Colombie doit comporter plusieurs dimensions. Il y a, par exemple, évidemment le rôle vital et absolument central qu'ont joué les groupes infatigables et courageux de la société civile colombienne et qu'ils continueront à jouer pour rechercher des solutions.
Un autre aspect essentiel est, cependant, les pressions exercées par la communauté internationale. La Colombie se soucie de son image et de sa réputation internationales, notamment à cause de l'accroissement des liens commerciaux et des investissements avec les autres pays. C'est pourquoi nous sommes absolument convaincus que les pressions internationales peuvent jouer un rôle essentiel pour résoudre cette crise.
Pour être efficaces, les pressions internationales doivent être constantes, concrètes et sincères. Il faut qu'elles soient également exercées sur le plan des relations bilatérales comme sur celui des relations multilatérales.
La communauté internationale est impliquée de nombreuses façons dans la crise colombienne. Un exemple important au niveau mondial est le fait que les Nations Unies sont présentes sur le terrain en Colombie dans le domaine des droits de la personne depuis 1996, une présence qui s'est progressivement répandue dans les diverses régions du pays. En se fondant sur le travail effectué par ce bureau, le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme a proposé un programme global de réforme des droits de la personne en Colombie. Je vais vous résumer brièvement ce projet dans un instant.
Ces recommandations ont été présentées au gouvernement colombien. Elles figurent également dans les rapports annuels présentés à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Il est important de mentionner que le gouvernement colombien a accepté ces recommandations. La communauté internationale les a également acceptées et elle a invité le gouvernement à les mettre en oeuvre; le fait que ces recommandations ont été acceptées par tous les intéressés se reflète, par exemple, dans les déclarations des divers présidents qui ont été adoptées par la Commission des droits de l'homme ces dernières années.
Ces recommandations ont également été adoptées en juillet 2003 à la réunion de Londres sur l'appui international à la Colombie. La déclaration qui a été approuvée à la fin de cette assemblée notait, avec satisfaction, que le gouvernement colombien s'était engagé à mettre en oeuvre les recommandations formulées par le Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme et invitait le gouvernement colombien à les mettre en oeuvre rapidement.
Il y a donc beaucoup de bonnes paroles mais quelle est la réalité? En Colombie et ailleurs, les groupes qui représentent la société civile s'inquiètent beaucoup du nombre des déclarations faites récemment dans lesquelles on se réjouit des recommandations formulées par l'ONU, on félicite le désir du gouvernement colombien de collaborer à leur mise en oeuvre et on l'invite à le faire rapidement. Il y a eu beaucoup trop de déclarations et pas suffisamment d'actions et de progrès véritables dans la réforme des droits de la personne.
Un rituel assez prévisible semble se dessiner au sein de la Commission des droits de l'homme des Nations, et je vais vous donner, par exemple, trois brefs extraits des déclarations de son président adoptées par la Commission des droits de l'homme des Nations Unies au cours des trois dernières années.
En 2002, la Commission des droits de l'homme «engage» le gouvernement de la Colombie «à mettre en oeuvre les recommandations».
En 2003, la Commission des droits de l'homme «engage le gouvernement de la Colombie à mettre en oeuvre intégralement les recommandations».
En 2004,
[Traduction]
la commission engage toutes les parties concernées à mettre rapidement en oeuvre les recommandations prioritaires concrètes pour 2004 du haut commissaire aux droits de l'homme, ainsi que les recommandations que la commission a adoptées à sa 59e session et qui n'ont toujours pas été appliquées.
¹ (1555)
[Traduction]
Et bien sûr, la ritournelle des formules «engage à mettre en oeuvre, engage à mettre en oeuvre, engage à mettre en oeuvre», n'est pas une simple ritournelle. Elle est prononcée dans un contexte dont on vous a déjà beaucoup parlé, avec une toile de fond constituée de disparitions, d'assassinats politiques, de torture, de menaces de mort, et d'autres violations graves des droits de la personne contre les syndicalistes, les défenseurs des droits de la personne, les communautés indigènes, les enquêteurs du gouvernement sur les questions de droits de la personne, les femmes et beaucoup, beaucoup d'autres.
Le moment est arrivé d'abandonner le discours qui a caractérisé l'attitude de la communauté internationale à l'égard des droits de l'homme en Colombie, que ce soit la Commission des droits de la personne, que ce soit au sein des réunions du G24, ou dans celui d'autres instances multilatérales. Le moment est venu aujourd'hui d'assurer le respect de ces recommandations.
Il est triste de constater que la communauté internationale ne semble pas vouloir s'engager dans cette voie. Au début du mois, une réunion de suivi de l'assemblée de Londres sur l'appui international à la Colombie a été tenue, comme vous le savez très bien, à Carthagène en Colombie. La déclaration de Carthagène qui en est découlée est très décevante et ne renforce pas les pressions exercées sur la Colombie pour qu'elle respecte sa promesse de mettre en oeuvre les recommandations de l'ONU en matière de droits de la personne.
Bien au contraire. Nous estimons que cette déclaration montre que les pressions internationales s'estompent. Elle laisse entendre que certains progrès ont été réalisés dans la mise en oeuvre de ces recommandations et encourage la Colombie à aller de l'avant avec cette mise en oeuvre en suivant un échéancier le plus court possible. Il est particulièrement attristant que la déclaration de Carthagène marque un recul par rapport aux déclarations internationales antérieures qui soulignaient le rôle que jouait le gouvernement lui-même dans la crise colombienne, notamment grâce aux liens bien documentés existant entre les groupes paramilitaires et les forces de sécurité.
Les organisations de la société civile, tant en Colombie qu'à l'étranger, estiment que la Colombie a tout au plus pris des mesures minimales vers la mise en oeuvre des importantes recommandations formulées par l'ONU, et qu'en fait les nouvelles lois et pratiques, au lieu de favoriser leur mise en oeuvre, vont en fait à l'encontre de certaines recommandations clés et ont gravement ralenti le processus.
Quelles sont donc les mesures recommandées par les Nations Unies pour renforcer la protection des droits de la personne en Colombie? Je vous ai fait des copies en français et en anglais. Je ne sais pas si elles ont été distribuées mais cela est extrait du rapport de 2004 des Nations Unies à la Commission des droits de l'homme, et cela constitue une bonne description générale des recommandations.
Les recommandations portent sur six domaines généraux.
La première concerne la prévention et la protection. Les Nations Unies parlent ici de la nécessité de faire un certain nombre de choses pour améliorer la sécurité des défenseurs des droits de la personne et des autres groupes vulnérables en Colombie. Il est proposé de renforcer et de mieux coordonner le système d'intervention rapide dans le cas des violations des droits de la personne et d'élargir la présence, au plan national, des divers bureaux gouvernementaux concernant les droits de la personne.
Le deuxième secteur est celui du conflit armé intérieur. Un certain nombre de recommandations sont adressées à toutes les parties au conflit pour les inviter à respecter toutes les obligations juridiques internationales en vigueur.
Le troisième domaine est celui du principe de légalité et d'impunité. Les Nations Unies proposent, par exemple, que soient supprimés les liens entre les fonctionnaires publics et les membres des groupes paramilitaires, que les juridictions pénales militaires puissent être uniquement saisies des crimes reliés au service militaire et que l'indépendance des poursuivants soit protégée. On envisage d'autres mesures visant à assurer le bon fonctionnement de l'appareil judiciaire de façon à ce qu'il soit capable d'obliger les auteurs de violation des droits de la personne à rendre des comptes.
Le quatrième domaine est celui des politiques sociales et économiques. Les Nations Unies font ressortir sur ce point la nécessité d'élaborer une politique cohérente pour réduire les inégalités, lutter contre la grande pauvreté et prendre en compte expressément le principe de la gratuité de l'éducation primaire et l'augmentation des subventions accordées aux services de santé et au logement.
Le cinquième secteur est celui de la promotion d'une culture des droits de la personne. L'ONU suggère certaines mesures visant la nécessité d'adopter un plan d'action concerté en matière de droits de la personne et de droit humanitaire international. L'année dernière, l'ONU a montré, je crois, une certaine impatience face à l'absence de plan; elle a invité expressément le gouvernement colombien à au moins fixer un échéancier pour l'élaboration de ce plan au début de 2004, en vue d'achever l'élaboration de ce plan d'action d'ici la fin de 2004. Cela n'a pas été fait.
Le dernier secteur est celui de la coopération technique. On trouve là un certain nombre de recommandations mais il est important de noter que l'ONU a demandé l'établissement d'un calendrier de mise en oeuvre de ses recommandations. Là encore, l'ONU proposait que cet échéancier soit établi au début de 2004, ce qui n'a pas été fait.
º (1600)
Voilà donc ce qu'a dit l'ONU.
Comme je l'ai dit, il y a eu très peu de progrès dans la mise en oeuvre de ces recommandations importantes. Parallèlement, nous avons constaté une évolution qui va en fait à l'encontre de ces recommandations. Par exemple, la Loi 906 sur la justice et la réparation de 2004 risque de renforcer l'impunité dont jouissent les forces de sécurité dans le pays et revient sur les progrès déjà réalisés pour faciliter la poursuite des affaires de droits de la personne.
Deuxièmement, il est toujours préoccupant que des hauts fonctionnaires du gouvernement remettent encore souvent en doute la légitimité du travail des défenseurs des droits de la personne, ce qui les place dans une situation très dangereuse dans ce pays. On peut lire constamment des rapports nationaux, dont vous avez déjà entendu parler, concernant les exactions que subissent les défenseurs des droits de la personne de ces droits et les communautés vulnérables et le nombre élevé et régulier d'assassinats et autres violations graves des droits de la personne commis contre les syndicalistes, par exemple.
À notre avis, l'action de la communauté internationale a été malheureusement jusqu'ici un échec. La Colombie continue à faire face à une grave crise des droits de la personne. Les exhortations tant bilatérales que multilatérales invitant la Colombie à adopter le programme de l'ONU pour la réforme des droits de la personne sont acceptées en théorie mais demeurent en pratique lettre morte.
Le Canada a participé activement à toute une série d'initiatives multilatérales et nous félicitons bien sûr le Canada d'avoir adopté cette approche. Lorsque le sous-comité a effectué une étude approfondie de la situation en Colombie en 2002, ses recommandations invitaient vivement le Canada à collaborer avec les organismes et les institutions internationales, ainsi qu'avec les pays amis, pour résoudre la crise colombienne.
Trois ans plus tard, nous continuons évidemment à inviter le Canada à adopter une stratégie consistant à collaborer avec les autres États; il semble néanmoins que cette stratégie internationale devrait être révisée.
On pourrait prendre un certain nombre de mesures à ce sujet.
Premièrement, nous pensons qu'il est temps d'augmenter les pressions exercées sur la Colombie au niveau international dans des organismes comme la Commission des droits de l'homme. Une façon d'y parvenir serait d'aller au-delà du rituel traditionnel de la déclaration du président de la commission et d'adopter cette année une véritable résolution.
Deuxièmement, le moment est également venu de saisir l'Assemblée générale de l'ONU de la question de la Colombie. Pour commencer, le Haut-Commissaire des droits de l'homme des Nations Unies pourrait être invité à présenter un rapport à l'Assemblée générale, ce qui attirerait l'attention de l'Assemblée générale sur cette question et pourrait déboucher sur une résolution.
Troisièmement, il est absolument essentiel que le gouvernement colombien élabore immédiatement un plan d'action de défense des droits de la personne, combiné à un échéancier très clair. Il faut que la communauté internationale insiste clairement, de façon non ambiguë et cohérente pour que cette action soit prise.
Quatrièmement, la mission du bureau du Haut-Commissaire aux droits de l'homme en Colombie devra être renouvelée l'année prochaine, en 2006. Certains indices montrent que la Colombie cherche peut-être à réduire cette présence. Le moment est propice pour veiller à ce que la Colombie accepte ce renouvellement pour que l'ONU puisse préserver un bureau important, doté de crédits lui permettant d'agir dans les différentes régions du pays.
Au-delà de ces brèves suggestions, il est certain que la question de la bonne stratégie et de la bonne méthode à adopter par le Canada vis-à-vis la Colombie ne pourrait que profiter d'une mise à jour et d'un examen par le sous-comité.
Le travail effectué en 2002 était très important et très utile. La recommandation invitant le Canada à travailler étroitement avec la communauté internationale était essentielle. Trois ans plus tard, la stratégie internationale risque de stagner, les violations des droits de la personne se poursuivent à un rythme alarmant; le Canada doit agir pour proposer une approche internationale révisée et renforcée, une approche qui tienne également compte du contexte régional plus large dans lequel s'inscrit la crise colombienne.
C'est pourquoi nous espérons beaucoup que le sous-comité acceptera de procéder à une mise à jour de son étude de 2002.
Merci.
º (1605)
Le président: Merci, monsieur Neve.
Madame Symes.
Mme Jean Symes (coordonnateur de programmes, Inter Pares): Je m'appelle Jean Symes et je travaille pour Inter Pares.
Je vous remercie de nous avoir invités aujourd'hui et de vous intéresser à la situation en Colombie.
Comme le disait Alex, et comme vous le savez, nous aimerions beaucoup que le comité effectue une étude approfondie de la Colombie et du contexte régional dans lequel se situe ce problème. Je vais compléter l'exposé présenté au nom du Groupe d'orientation politique pour les Amériques en abordant certains aspects régionaux des questions examinées aujourd'hui ainsi que le rôle et les intérêts du Canada.
La dynamique en jeu n'est pas uniquement nationale—même si nous avons principalement centré notre attention sur la Colombie—elle est en fait régionale et englobe les cinq pays andins. De plus en plus, elle comprend également les pays du cône sud. Ces questions sont également hémisphériques, géopolitiques et impliquent très directement le Canada. Il faut les envisager de cette façon et adopter une approche stratégique qui tienne compte des facteurs complexes et puissants qui l'influencent. Il y a lieu de réviser et de reformuler la politique canadienne pour qu'elle tienne compte de cette réalité. Comme Alex le disait, les choses ont changé depuis votre dernière étude.
Bien sûr nous tenons pour acquis que l'approche adoptée par le Canada à l'égard de la Colombie et de la région andine conservera certains objectifs : la recherche de la démocratisation, la protection des droits de la personne, la stabilité sociale, économique et politique, tout cela dans le contexte de la souveraineté nationale, de l'autonomie et du principe de légalité, la préservation de l'intégrité et de la légitimité des institutions étatiques. Pour réaliser ces objectifs, le Canada doit bien comprendre l'action de l'autre grand protagoniste dans cette dynamique, à savoir les États-Unis.
Strategic Forecasting, Stratfor, la société de renseignement de sécurité américaine basée à Austin au Texas, a publié en janvier un bulletin intitulé The Andes: The Year of Living Dangerously. Ce bulletin lance en fait un avertissement très direct aux intéressés et montre que les intérêts américains se trouvent dans une situation critique, compte tenu des tensions graves que connaît la région qui pourrait subir très prochainement des bouleversements historiques. Si c'était le cas, ce serait également un moment historique pour le Canada. Il est nécessaire, à nos yeux, de procéder à un examen approfondi de cette question pour que le Canada soit sûr d'adopter la bonne approche pour promouvoir la justice et la paix dans la région.
La Colombie n'est pas le seul enjeu du conflit que connaît ce pays, si je peux m'exprimer ainsi. L'enjeu englobe en fait les Amériques, et en particulier, la région andine. Le Canada doit s'interroger sur la façon dont ce conflit et son issue touchent ses intérêts. Lorsque nous concentrons notre attention sur la seule Colombie et sur ce terrible conflit interne qui dure depuis des dizaines d'années, nous occultons deux éléments qui sont très importants. Le premier est que ce conflit est régional, comme je le dis, et deuxièmement, que les États-Unis sont un acteur essentiel de ce conflit, et que ce pays est déterminé à en définir l'issue.
Dans ce contexte, le Canada devrait faire cause commune avec les pays qui favorisent un processus non violent pour négocier une transformation sociale et économique permettant d'obtenir une paix permanente accompagnée de justice. Nous pensons que les parlementaires, et votre sous-comité en particulier, devront procéder à une enquête approfondie sur les questions en jeu de façon à élaborer un cadre d'orientation efficace pour le proche avenir dans le but de s'attaquer aux problèmes des droits de la personne que nous soulevons aujourd'hui ici.
Les intérêts des États-Unis dans cette région, tels qu'ils ressortent de leurs interventions constantes, sont énormes. Quels sont-ils? En quelques mots, les États-Unis visent la domination militaire, économique et politique de l'hémisphère, comme ils l'ont toujours fait. Plus précisément, les États-Unis ont trois grands intérêts dans la région : un espace favorable à l'idéologie économique du libre-échange dont ils font la promotion à l'échelle mondiale, un rôle dominant pour les intérêts économiques des États-Unis et l'intégration des pays des Amériques à la sphère économique américaine.
Est également en jeu la guerre contre les drogues, version américaine. La dernière édition de l'hebdomadaire des affaires The Economist montre l'ampleur de l'échec de cette politique et la mesure dans laquelle cette campagne antidrogue a encore une fois entraîné en Colombie une augmentation massive de la culture et de la production de cultures illicites dans les pays voisins, à savoir le Pérou, la Bolivie et l'Équateur.
Enfin, la guerre contre les drogues se combine aujourd'hui officiellement avec le troisième intérêt crucial des États-Unis dans la région, à savoir la guerre contre le terrorisme. Comme vous l'avez entendu avec les exposés précédents, le carnage qu'a entraîné le recours à la force militaire n'a pas seulement causé des pertes importantes de vies chez les combattants mais son pire effet découle de la participation des forces irrégulières qui a eu des répercussions sur les non-combattants et dans des secteurs très précis—en particulier pour les dirigeants syndicaux, les défenseurs des droits de la personne et les journalistes—qui ont été si bien ciblés que la Colombie est aujourd'hui le premier pays au monde pour le nombre des meurtres commis dans ces secteurs. La nature de ces enjeux n'est pas contestée et nous avons préparé un mémoire écrit que nous avons remis au greffier et qui contient d'autres sources et expose ces questions plus en détail.
º (1610)
Nous soulignons le fait que les États-Unis sont un acteur de plus en plus important dans ce conflit, parce que ce fait, plus que tout autre, jouera un rôle essentiel lorsque le Canada voudra définir ses rapports avec la Colombie et la région andine. C'est également un facteur qui jouera un rôle déterminant dans l'évolution de l'histoire dans les Amériques.
En novembre dernier, Donald Rumsfeld a fait savoir que la seconde administration Bush s'intéresserait de beaucoup plus près à l'Amérique latine et aux Antilles. Le responsable de ce secteur est le nouveau commandant du SOUTHCOM, qui a passé les deux années précédentes au côté de Rumsfeld, en qualité d'adjoint militaire principal. Stratfor, l'organisme de prévisions stratégiques que j'ai mentionné il y a un instant, note que SOUTHCOM va concentrer son action sur la Colombie et le Venezuela, les deux pays du domaine relevant de SOUTHCOM qui intéressent le plus les décideurs américains.
J'aimerais citer un passage de Stratfor. Le voici:
La présence militaire américaine va continuer à s'étendre au cours des prochaines années. Avant les élections du 2 novembre, le Congrès américain avait approuvé une augmentation de l'aide militaire fournie à la Colombie... Dans le cas de la mission des États-Unis en Colombie, Southcom travaille également en collaboration avec l'Équateur, le Panama et le Pérou pour renforcer la défense de leurs frontières avec la Colombie. |
Il est évident que les États-Unis vont s'engager de plus en plus ouvertement, sur le plan militaire, en Amérique latine, et ce processus a déjà débuté dans les régions frontalières de l'Équateur et du Venezuela. Notre mémoire contient d'autres détails et d'autres sources sur ce point.
Les États-Unis sont aujourd'hui en mesure, s'ils le souhaitent, de conduire des opérations avec les troupes colombiennes à l'intérieur des frontières du Venezuela. Que cette perspective soit objectivement probable ou non, le gouvernement du Venezuela estime que cela pourrait se produire. Il a annoncé à la fin du mois de janvier une nouvelle stratégie nationale en matière de sécurité, qui est fondée sur l'hypothèse que les États-Unis envahiront à un moment donné le Venezuela de façon à s'emparer de ses réserves de pétrole et de gaz naturel. Résultat, les tensions s'aggravent dans toute la région et les acteurs se tiennent prêts à toute éventualité.
À la lumière de cette évolution, le Canada doit préciser la mesure dans laquelle il partage les intérêts américains et se demander s'il est important de bien faire ressortir les différences qui existent sur ce point entre les intérêts canadiens et les intérêts américains. Nous soutenons que dans ce dossier, les intérêts du Canada ne sont pas identiques à ceux des États-Unis. Nous estimons que le Canada doit jouer un rôle indépendant, mais que cela ne sera pas facile. Les solutions que nous retiendrons devront tenir compte des relations que nous avons établies avec les autres pays d'Amérique, bien sûr, et aussi avec nos amis européens. C'est pour cette raison que nous invitons le comité à solliciter l'avis de tous les intéressés.
Nous ne sommes pas les seuls à penser que nous sommes à un moment critique. Le numéro de janvier du Financial Times a publié un article important. L'auteur est un spécialiste de l'Amérique latine, dans le domaine du terrorisme transnational, du trafic de stupéfiants et du crime organisé.
Voilà ce qu'il affirme dans cet article:
Les principaux pays des Amériques—les États-Unis, le Canada, le Mexique, le Brésil et l'Argentine—vont bientôt faire face à une grave menace sur le plan de la sécurité s'ils ne font rien pour corriger la situation qui règne dans la zone andine de l'Amérique du Sud. |
Je vais citer un autre passage. Le voici:
[Ces pays] doivent conjuguer leurs efforts et s'attaquer aux difficultés sociales, économiques et politiques qui sont à l'origine du chaos actuel et de l'affaiblissement des États dans les pays andins. |
Il conclut cet article en disant:
Si la seconde administration Bush persiste à nier la réalité, comme l'a fait la première administration, on risque fort d'assister à une «balkanisation» territoriale, ethnique et politique de la région andine. Cela se traduira par l'exportation vers le Nord et le Sud de l'hémisphère occidental de la violence, de la volatilité politique, des stupéfiants et de l'émigration. |
Il serait bon que le comité tienne compte de cet avertissement et décide d'examiner lui-même une situation en rapide évolution. Il faut que le gouvernement du Canada prenne en compte les changements importants que connaît actuellement cette région.
Une nouvelle communauté des nations sud-américaines, comprenant 12 pays dont la Colombie, a vu le jour le 1er janvier. Elle vise à réaliser l'intégration politique et économique de ces pays, en s'inspirant du modèle de l'Union européenne. Les pays d'Amérique du Sud ont lancé des initiatives communes pour travailler, selon leurs propres perspectives, sur la question du développement social, économique et politique. Ces initiatives historiques fournissent au Canada l'occasion d'appuyer et d'encourager des solutions élaborées localement aux problèmes auxquels ces pays font face. La Communauté des nations andines est une autre instance importante qu'il conviendrait de consulter. Ces organismes ont tous pour mission de travailler sur les problèmes d'intérêt commun par le biais d'un développement économique axé sur l'Amérique latine et la constitution d'alliances politiques.
º (1615)
Le nouveau président uruguayen, Tabare Vazquez, a récemment déclaré qu'il fallait que l'Amérique latine élabore un projet politique si elle voulait vraiment améliorer les conditions de vie de la population. Il a déclaré que, pour y parvenir, MERCOSUR et la communauté andine devraient conjuguer leurs efforts. Cela me paraît être un objectif auquel le Canada pourrait facilement donner son appui.
Nous examinons aujourd'hui la question des droits de la personne en Colombie et dans la région, mais il est évident que cette question est intimement liée à la lutte pour obtenir le droit de définir ce genre de projet politique, comme nous l'indique notre expérience ailleurs. Voilà ce qui est en jeu en Colombie aujourd'hui. Seule la mise en route d'un processus visant la justice sociale et le développement économique démocratique permettront d'obtenir la paix et la stabilité. Le Canada devra se pencher sur ce processus et en faire une étude approfondie s'il veut être en mesure d'élaborer ses propres politiques dans la région et définir son action.
J'aimerais conclure en reprenant la demande qu'a faite mon collègue pour que le comité entreprenne l'étude de la situation actuelle en Colombie dans le contexte de la région andine et des questions qui ont été soulevées aujourd'hui.
Je vous remercie.
Le président: Merci.
Madame Drost, y a-t-il un membre de votre groupe qui n'a pas encore pris la parole? Ou voulez-vous faire un commentaire sur ce qu'ont dit les fonctionnaires l'autre jour? Je crois savoir qu'il y avait quelqu'un qui voulait aborder cet aspect.
Mme Nadja Drost: Je crois que si vous avez des questions au sujet de ce qui s'est dit au cours de cette séance, nous serons heureux d'y répondre.
J'aimerais prendre quelques instants pour souligner l'expertise que possèdent les personnes autour de nous. J'ai le privilège de travailler avec des gens qui connaissent beaucoup de choses sur toutes sortes d'aspects de la situation en Colombie, et certains d'entre nous travaillent également dans des domaines précis.
Le président: Pourquoi ne nous présentez-vous pas ces personnes?
º (1620)
Mme Nadja Drost: J'aimerais beaucoup le faire, si vous le permettez.
Je vais commencer par Ken Luckhardt, représentant du Syndicat des travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile. Ken connaît bien les questions syndicales. Il y a Sheila Katz, qui est la représentante du Congrès du travail du Canada pour les Amériques. Elle essaie de contrer les efforts que déploie le gouvernement Uribe pour supprimer les syndicats colombiens. Il y a également Keith Rimstad d'Amnistie Internationale qui est responsable des campagnes de recrutement dans les Amériques. Il y a aussi John Jones, également d'Amnistie Internationale, qui peut vous parler des questions de sécurité en Colombie. Vous connaissez très bien Alex. Il peut bien sûr vous parler des approches multilatérales à l'amélioration des droits de la personne dans ce pays. Lilia Solano est spécialiste des questions d'impunité et de justice. Jean Symes peut parler du contexte régional. John Lewis, de KAIROS, connaît bien la question de l'impunité et de la justice ainsi que les droits des femmes. Marlen Mondaca de Save the Children peut parler de l'impact de ce conflit sur les enfants et sur les adolescents. David Bruer d'Inter Pares connaît bien la question des déplacements de population et des localités isolées.
Le président: Je vous remercie tous d'être venus. Voulez-vous indiquer les personnes qui devraient répondre aux questions?
Mme Nadja Drost: Nous verrons bien comment cela va se passer, si cela vous convient.
Le président: M. Day a la parole.
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Merci, monsieur le président.
Je dois vous dire que nous sommes un peu dépassés. Ce comité se réunit régulièrement, comme vous le savez, une ou deux fois par semaine, et entend des groupes de différents pays qui réclament, honnêtement et très sincèrement, que l'on fasse quelque chose pour lutter contre les situations catastrophiques auxquelles ils font face. Je ne dis pas cela pour atténuer notre responsabilité ou notre désir de faire quelque chose. Je pense qu'il existe des façons d'améliorer la situation en Colombie et dans la région. Je pense que les commentaires de Mme Symes, au sujet du caractère régional du problème, sont très importants. Je voulais vous dire cela pour vous indiquer que nos moyens d'actions sont très limités mais que malgré tout, nous voulons les utiliser pleinement.
Personnellement, je suis très désabusé et cynique lorsqu'on parle de faire une autre étude. Nous étudions beaucoup de choses ici. Je ne sais pas ce que notre pays a fait au sujet de la dernière étude. Je suis tout à fait d'accord avec ce que vous nous demandez. J'aimerais savoir ce que nous avons fait dans ce pays, en particulier sur le plan financier. Il faudrait procéder à un genre d'examen de notre performance. Ce n'est pas votre responsabilité, mais il faudrait que notre gouvernement effectue une sorte de vérification de rendement pour voir si notre action a permis d'améliorer certaines choses. Si nous pouvions améliorer ne serait-ce qu'un aspect, je me dirais que c'est excellent, nous avons fait quelque chose. C'est pourquoi notre comité se penchera par la suite sur la question de savoir s'il faut effectuer une autre étude. Je vous mentionne ceci pour vous expliquer ma position. Elle est un peu cynique, un peu désabusée, même si votre demande est tout à fait sincère.
Je pense que notre gouvernement devrait essayer d'augmenter les pressions exercées sur les gouvernements, en particulier sur la Colombie, par rapport à la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. Je pense cependant que cela suscite un certain cynisme. Lorsque je vois la liste des pays qui se partagent la direction de cette commission, je ne peux pas dire que je suis enthousiasmé. Cela me paraît néanmoins être une possibilité qu'il convient d'explorer.
Permettez-moi de mentionner également que les termes que nous utilisons ont toujours un aspect politique. Il faut faire attention à cet aspect, ce que l'on a appelé le discours anti-Bush, et l'utilisation dans un sens péjoratif du mot «privatisation». La Colombie fait face à de graves problèmes, et je pense qu'il faut plutôt examiner ce qui donne des résultats et éviter d'employer des expressions politiquement chargées qui risquent de froisser certaines personnes.
Je vais en rester là pour le moment mais si ce que je viens de vous dire ne vous donne guère d'espoir sur ce que nous pouvons faire, permettez-moi de vous raconter une petite histoire. Je me trouvais il y a deux ans à Carthagène, dans un quartier commercial, et j'essayais d'obtenir de l'argent d'un guichet automatique qui ne fonctionnait pas. J'ai demandé à quelqu'un qui se trouvait à côté s'il savait où il y avait un autre guichet en bon état. Il m'a répondu que non, il ne savait pas. Deux jeunes femmes qui me paraissaient être des étudiantes—ce qui m'a été confirmé par la suite—m'ont alors adressé la parole. Elles m'ont dit: «Vous voulez donc savoir où il y a un guichet automatique qui fonctionne?» J'ai répondu que ce serait très bien. Elles ont dit: «Venez avec nous, celles de ce quartier sont cassées, mais venez avec nous et nous vous montreront comment faire». J'étais légèrement nerveux, mais pas trop, et je me suis dit d'accord. Nous avons donc quitté ce quartier pour aller dans un autre et elles m'ont amené à un guichet automatique.
Madame Solano, ce que vous avez appelé votre mauvais anglais est bien meilleur que le peu d'espagnol que je connais.
Elles m'ont montré comment cela fonctionnait et elles se sont ensuite éloignées de la machine pour que ne pense pas qu'elles cherchaient à regarder le chiffre que j'utilisais. J'ai obtenu mon argent. Je me suis demandé si elles voulaient un pourboire. Elles m'ont dit: «Vous vous demandez sans doute pourquoi nous avons agi de cette façon». Elles avaient lu ma pensée. Je leur ai dit: «Oui, je me le demandais». Elles m'ont demandé: «Venez-vous des États-Unis?» J'ai répondu: «Non, je viens du Canada». Elles ont dit: «De toute façon, tout ce que vous savez au sujet de la Colombie, c'est qu'il y a de la corruption, beaucoup de drogue et que la situation est catastrophique. Nous voulions simplement que vous sachiez qu'il y a beaucoup de gens qui espère que la situation s'arrangera et nous pensons qu'il est possible de changer les choses».
º (1625)
Je termine mon intervention avec cette anecdote et je sais que ce n'est qu'un exemple. Je ne sais pas s'il y a vraiment un espoir général, mais c'est la raison pour laquelle j'espère que l'on pourra faire certaines choses. Je vous ai indiqué nos limitations. J'aimerais que nous fassions une vérification pour voir si ce que nous avons fait a donné de bons résultats. Je vous ai également fait part de mes réserves au sujet d'une étude.
Voilà mes commentaires.
Le président: Je suppose que tous les témoins veulent intervenir? Qui va commencer?
Mme Jean Symes: Pour ce qui est d'une évaluation très rapide de notre performance, je mentionnerais que la dernière étude que votre comité a effectuée, comme Alex le disait, a été très utile à ce sujet. Elle a débouché sur une révision complète du programme de coopération internationale qu'avait le Canada en Colombie, tout à fait dans le sens préconisé par le comité, et qui était axé sur les droits de la personne et le rôle de la société civile. C'est une étude très importante.
Lorsque l'ambassadeur a comparu lundi, il a fait une remarque à laquelle je souscris entièrement. Il a déclaré qu'il avait été énormément utile que tous les secteurs de la société civile puissent se réunir pour décrire comment ils voyaient la situation et comment, d'après eux, la communauté internationale pourrait les aider.
C'est grâce à des gens comme ceux dont vous parliez, M. Day.
La plupart des Colombiens sont des gens très intéressants, sérieux et très courageux. Tous les problèmes sont le fait d'une petite minorité importante.
En Colombie, les organismes de la société civile ont reçu une aide très importante, par le biais de la coopération internationale, de la part du Canada, de l'Europe et d'autres pays. Il me paraît important que le comité comprenne que ces organismes ont absolument besoin d'un tel soutien. Je pense que Lilia pourrait vous en dire davantage.
Je voudrais également revenir sur votre remarque au sujet du discours anti-Bush. Il ne s'agit pas ici de discours anti-Bush. Stratfor est une entreprise assez connue, un organisme du renseignement de sécurité, qui décrit la situation telle qu'elle est. Elle est obligée de le faire parce que ses clients sont des investisseurs. En fait, elle fournit de l'information et du renseignement aux autres gouvernements, y compris aux États-Unis.
Ce n'est pas un discours anti-Bush, mais je pense que vous savez tous, en tant que membres du comité des affaires étrangères, que les États-Unis influencent énormément la façon dont la situation mondiale évolue et que le Canada doit en tenir compte.
Il me paraît important d'examiner la situation sans idée préconçue et de voir clairement ce qui se passe et quels sont les intérêts en jeu. C'est une des raisons pour lesquelles nous pensons qu'il serait très important d'effectuer une étude. Nous pensons que cela concerne le rôle que le Canada peut jouer dans cet hémisphère.
[Français]
Le président: Merci beaucoup, madame.
Madame Bourgeois.
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, bonjour.
Beaucoup de gens se sont déplacés cet après-midi. Cela a un impact sur moi. Personnellement, je considère que lorsqu'on se déplace pour venir parler d'un problème à un comité en aussi grand nombre, c'est que cela doit être extrêmement important. En effet, je pense que le problème de la Colombie n'est pas simple. Tout comme vous, je pense qu'il mérite qu'on lui consacre un peu plus de temps.
Étant donné que je suis une personne visuelle, j'aurais aimé, lorsque vous parliez, avoir des diagrammes, des photos et être capable de repérer les lieux sur des cartes. Je vous avoue que lorsque vous parlez comme vous l'avez fait, les choses vont vite et on a parfois de la difficulté à faire les liens. Alors, il faudra probablement qu'on y revienne ou, tout simplement, qu'on demande au Comité permanent des affaires étrangères et du commerce international de se pencher sur cette question. C'est toutefois une question technique dont on discutera peut-être avec M. le président.
Vous avez parlé de la Colombie, qui est préoccupée par son image. Vous aviez tout à fait raison. J'ai fait une intervention à la Chambre la semaine dernière, et moins de deux jours plus tard, j'ai reçu une lettre de l'ambassadeur de la Colombie, je pense, me disant que je ne connaissais pas le problème. Or, je m'étais basée sur Amnistie Internationale, dont je sais qu'il s'agit d'un organisme qui n'est pas menteur. Par conséquent, j'avais probablement raison. C'est pour cela qu'on m'a envoyé tout de suite une lettre pour protester contre ce que j'avais dit à la Chambre.
Cela étant dit, vous avez mentionné plus tôt que la Déclaration de Cartagena était décevante. Quelqu'un nous l'a dit plus tôt. Par contre, l'ambassadeur, M. Duval, semblait très content lundi du document qui avait été signé. Alors, je veux savoir pourquoi, mesdames, messieurs, cette déclaration est décevante.
º (1630)
Le président: Alex, vous avez la parole.
[Traduction]
M. Alex Neve: Je peux faire quelques remarques au sujet de votre intervention, et d'autres voudront peut-être ajouter des commentaires.
Je crois que j'étais un des intervenants qui ont déclaré que nous avions été déçus par la déclaration de Carthagène. Cela s'explique par diverses raisons.
La déclaration ne reconnaît pas le rôle qu'a joué le gouvernement de la Colombie dans la crise que connaissent les droits de la personne. Par exemple, le problème des détentions massives, des exécutions extrajudiciaires et surtout, le maintien des liens qui existent entre les paramilitaires et les forces de sécurité sont des problèmes qui ne sont pas mentionnés du tout.
J'insisterais sur ce dernier aspect, parce que la Déclaration de Londres de 2003 reconnaissait qu'il y avait collusion entre l'armée et les paramilitaires. C'est une composante essentielle de la dynamique des droits de la personne en Colombie et c'est un très mauvais signe que l'on ait renoncé à reconnaître ce fait dans la déclaration de Carthagène.
La déclaration ne reconnaît pas non plus expressément l'existence d'un conflit armé interne en Colombie, ni celle d'une crise humanitaire et des droits de la personne. La déclaration mentionne les recommandations des Nations Unies en matière des droits de la personne dont j'ai parlé dans mon exposé et exprime un appui pour le rôle que joue le secrétaire général des Nations Unies, mais elle n'appuie aucunement le bureau qui existe en Colombie, le Bureau du Haut commissaire des Nations Unies aux droits de l'homme en Colombie. Il me paraît absolument essentiel que les gouvernements fassent savoir qu'ils appuient énergiquement le rôle que joue ce bureau en Colombie et le travail qu'il accomplit.
Il n'y a aucune référence expresse aux violations continuelles du cessez-le-feu par les paramilitaires dans les régions où ils devraient avoir déposé leurs armes. On craint beaucoup en Colombie qu'il devienne habituel que les organisations paramilitaires qui devaient officiellement être dissoutes continuent à commettre des exactions.
Voilà certains aspects de la déclaration que nous avons trouvés décevants. Je pense que cette description est encore aggravée par le fait qu'il y a eu, sur certains points, un recul. Cette déclaration n'est pas aussi ferme que celle qui a été faite en 2003 à Londres et il n'existe aucune raison d'être plus positif et moins inquiet en 2005 que c'était le cas en 2003.
Je ne sais pas si d'autres veulent ajouter quelque chose.
º (1635)
Le président: Une précision, avez-vous bien dit que vous ne pensez pas que nous aurions dû signer cette déclaration? Est-ce bien ce que vous avez dit?
M. Alex Neve: Si je parle au nom d'Amnistie, je ne dirais pas que le Canada aurait ou n'aurait pas dû signer cette déclaration mais nous pouvons néanmoins faire savoir que nous étions très déçus que la déclaration soit aussi creuse.
[Français]
Le président: Madame Katz.
[Traduction]
Mme Sheila Katz (représentante nationale des Amériques, Service international, Congrès du travail du Canada): Hier après-midi, quelques-uns d'entre nous ont participé à une discussion avec l'ambassadeur Duval, pour préparer les réunions que la Commission des droits de l'homme des Nations Unis va tenir à Genève le mois prochain. Il nous a déclaré hier que le document qui avait été signé à Carthagène, qui a été publié à Carthagène, n'est pas un document juridique. Il a excusé les lacunes du document en disant qu'il n'aurait de toute façon aucun effet.
Pour répondre à votre question au sujet de l'enthousiasme qu'il avait semblé manifester à ce sujet, je dirais qu'il est diplomate et qu'il a probablement appris pendant sa formation qu'un diplomate doit toujours montrer qu'il est heureux d'entreprendre un projet. Cela explique peut-être certaines choses.
[Français]
Le président: Merci.
Madame Bourgeois, vous avez la parole pour encore une minute, s'il vous plaît.
Mme Diane Bourgeois: On vient de nous dire quelque d'extrêmement important. Je voudrais savoir comment il se fait que le document qu'il a signé n'est pas un document légal. Peut-on m'expliquer cela? Si le document n'est pas légal, ce comité, qui a rencontré l'ambassadeur, pourrait peut-être faire revenir ce dernier et essayer de savoir comment faire pour qu'il puisse signer un papier qui soit légal.
[Traduction]
Le président: Je ne sais pas s'il y a d'autres avocats ici, mais je suis un avocat non pratiquant. Il y a beaucoup de documents qui sont signés et qui n'ont pourtant aucun effet juridique. Ce sont simplement des mots sur du papier.
Mme Sheila Katz: C'était un communiqué qui a été publié après une réunion ministérielle.
Est-ce bien cela?
M. Alex Neve: Il faut dire, je crois, que ce document n'est pas un document juridique, comme un traité, qui a un effet juridique contraignant au sein du système juridique international. Mais la plupart des règles internationales ne sont pas contraignantes. La plus grande partie du droit international est ce qu'on appelle un droit souple. Il prend la forme de résolutions, de déclarations et d'énoncés de principe et si ces éléments ne sont pas juridiquement exécutoires, c'est-à-dire qu'il n'est pas possible de poursuivre un gouvernement qui n'a pas respecté une déclaration, ils demeurent néanmoins des documents extrêmement importants et utiles parce qu'ils encadrent l'action politique de certains pays. En outre, ces déclarations jouent un rôle important parce qu'elles débouchent parfois sur l'élaboration de règles juridiques contraignantes.
C'est un document important. Il ne faudrait pas nier cette importance et les gouvernements devraient négocier sérieusement ce genre de déclaration.
Le président: Je vous invite à conclure.
Nous utilisons maintenant le temps de parole de Mme McDonough.
Mme Sheila Katz: Il est important d'ajouter qu'il s'agit là d'un groupe de pays donateurs. C'est un groupe de pays qui se réunissent pour parler des critères à appliquer pour poursuivre l'octroi d'une aide internationale au gouvernement Colombien.
Le gouvernement colombien a saisi cette occasion pour essayer de camoufler la situation désastreuse et la crise humanitaire qui règnent dans son pays. Je crois que c'est ce qu'il faut retenir de ce document.
Le président: Madame McDonough.
Mme Alexa McDonough (Halifax, NPD): Merci, monsieur le président.
Je vous demande de m'excuser d'avoir dû quitter la salle au milieu de votre exposé, mais j'avais un engagement que je n'ai pu remettre. Je vous apporter les salutations et les excuses d'Ed Broadbent, qui est membre de mon parti et du comité, et qui a du quitter Ottawa.
J'aimerais comprendre un peu mieux l'affaiblissement de la déclaration qui a suivi les réunions des 3 et 4 février à Carthagène. Je me sens doublement désavantagée parce que c'est à peu près le moment auquel j'ai dû me rendre au Moyen-Orient, de sorte que je n'ai pas vraiment suivi ce qui s'est passé.
J'essaie simplement de me baser sur ce que j'ai lu et entendu. Je crois qu'il faut nous demander pourquoi les pays donateurs ont adopté une position aussi accommodante. Qu'est-ce que cela veut dire? Qui a exercé des pressions pour affaiblir le ton de cette déclaration? Le Canada n'était-il pas assez fort pour résister à ces pressions? Est-ce que nous étions disposés à profiter de notre rôle de président pour faire avancer les choses? Bien sûr, l'affaiblissement de cette déclaration semble indiquer que la situation s'est améliorée en Colombie et ce n'est certainement pas ce que j'ai entendu.
J'aimerais donc avoir vos commentaires à ce sujet.
Deuxièmement, je ne suis pas complètement d'accord avec mon collègue Stockwell Day sur cette question, mais j'essaie désespérément de voir ce que le comité pourrait faire de concret pour influencer le choix des mesures que le Canada pourrait prendre dans ce domaine. Je ne pense pas qu'une autre étude soit la solution. Il faut se demander quelles sont les mesures que nous pouvons prendre, les moyens que nous pouvons utiliser, pour veiller à ce qu'un plan d'action humanitaire, par exemple, soit effectivement mis en oeuvre. Il ne semble pas que le Canada ait eu les moyens ou la volonté politique de proposer et de défendre cette solution à Carthagène. Il faut donc nous demander quels sont nos partenaires dans ces instances multilatérales. Quels sont les pays, parmi ce groupe de 24, avec lesquels nous pouvons travailler?
Enfin, y a-t-il d'autres instances des Nations Unies qui permettraient d'adopter des mesures plus efficaces? Il semble que l'ONU ait renoncé à retirer son représentant spécial. Le Canada devrait-il agir, notamment dans les instances multilatérales, pour que l'Assemblée générale se saisisse de cette question? Quelles sont les autres instances multilatérales qui pourraient être utiles? Je ne pense pas que le Canada ait les moyens ou la volonté d'agir seul.
Enfin, pour ce qui est du rôle des États-Unis dans ce secteur, nous sommes régulièrement en contact avec nos voisins et nos meilleurs amis, mais y a-t-il des moyens d'amener les États-Unis à adopter une attitude plus ferme, et en fait, de cesser de faire certaines choses?
º (1640)
Le président: Nous ne pouvons pas adresser toutes les questions à M. Neve.
Qui veut répondre à celle-ci?
Madame Lilia Solano.
Mme Lilia Solano: J'aimerais faire deux observations. Vous avez peut-être raison lorsque vous dites que vous n'aimez tous ces commentaires qui sont faits au sujet de Bush dans les mémoires. Nous pourrions fort bien parler de la politique étrangère de l'Amérique du Nord et pas de celle de Bush et dire qu'elle est désastreuse pour la Colombie. En Colombie, les États-Unis sont encore en train de faire la guerre au communisme, la guerre au terrorisme, la guerre aux narcotrafiquants. Les intérêts américains sont tellement puissants que les États-Unis sont bien souvent en mesure d'imposer leur volonté. Les intérêts américains dans mon pays sont une des causes du conflit. J'ai utilisé le nom de Bush parce qu'il est au pouvoir depuis quelque temps, mais cela est vrai pour l'ensemble de notre histoire.
Nous utilisons un langage politique parce que je pense que nous nous trouvons dans un lieu où il faut parler de politique. La plupart des problèmes des Colombiens viennent du fait qu'il y a des gens qui veulent reconstruire le pays et qui sont assassinés parce qu'ils veulent concrétiser ce projet, non pas en utilisant des balles, mais des moyens politiques.
C'est un problème. Nous devons le nommer; nous devons le décrire. Et nous ne pouvons livrer seuls cette lutte pour obtenir un pays. C'est pourquoi nous demandons à nos amis de nous aider.
Pour ce qui est de la déclaration de Carthagène, j'ai mentionné au début que le gouvernement Uribe envoyait des représentants à l'étranger, en particulier en Europe et parfois au Canada et aux États-Unis, pour prouver à l'aide de chiffres et d'enquêtes que la situation des droits l'homme est aujourd'hui la meilleure, que la situation s'améliore, et qu'il n'y a pas plus vraiment de violation grave des droits de la personne, pour que les autres pays puissent donner de l'argent à la Colombie pour financer le processus de paix engagé avec les paramilitaires.
Nous connaissons une autre version de cette histoire et nous devons la faire connaître. Le processus—les négociations avec les paramilitaires—vise uniquement à pardonner les crimes contre l'humanité qui ont été commis. Cela doit être dit. Nous devons faire savoir qu'il existe une autre version de cette histoire: il faut dire que le président s'est engagé à fournir un cadre, une loi, pour pouvoir pardonner des crimes. Nous devons le dire; nous cherchons des gens qui sont prêts à prendre position et à lutter avec nous contre cette impunité.
C'est une des choses que nous demandons en ce moment: aidez-nous dans notre lutte pour la justice, la vérité, et à obtenir réparation pour les nombreux crimes commis en Colombie. C'est un moyen parmi d'autres.
La déclaration de Carthagène reflète la position des gouvernements. Leurs représentants ont écouté les chiffres cités par Uribe, ils ont entendu les organisations de droits de la personne et les syndicats, et ils doivent tenir compte des deux versions de la réalité et présenter un document qui ne soit pas tout à fait favorable au gouvernement, et pas tout à fait favorable à la société civile. Nous demandons autre chose: une position ferme en faveur des droits de la personne et contre l'impunité.
Cela ne sera pas facile à obtenir. Il faudra lutter pour l'obtenir, parce que comme je l'ai dit hier, le sang coule en Colombie. Nous ne sommes pas les seuls à être concernés par ce problème; il faut que d'autres y soient sensibles également.
º (1645)
Le président: Gracias.
Cela fait sept minutes. Mme Torsney est l'intervenante suivante.
L'hon. Paddy Torsney (Burlington, Lib.): Merci. Tout d'abord, j'aimerais que tous les membres du comité aient une copie de la déclaration de Carthagène. Je pense qu'elle a été distribuée.
Le quatrième point consiste à «réaffirmer» la Déclaration de Londres, monsieur Neve. Elle poursuit donc dans la même veine, de sorte que les éléments qui se trouvaient dans la Déclaration de Londres se retrouvent dans la déclaration de Carthagène; je pense que tout le monde devrait en tenir compte. La déclaration ne dit «malgré ce que nous avons dit à Londres, voilà comment nous allons procéder». Elle réaffirme tous les engagements qui y ont été pris dans la Déclaration de Londres.
C'est pourquoi j'aimerais savoir si vous avez appuyé la Déclaration de Londres, parce qu'il serait intéressant, et peut-être même utile, de le savoir.
Deuxièmement, j'espère que nous pourrons obtenir une copie des déclarations qu'a faites M. Rishchynski à Carthagène, parce que je crois que tous les membres du comité y ont accès. En fait, il s'est adressé directement aux Colombiens qui assistaient à cette conférence en disant que la Déclaration de Londres allait encore plus loin, qu'elle nous engageait non seulement à partager une responsabilité mais qu'elle nous obligeait à rendre des comptes et à prouver que des progrès avaient été réalisés dans ces actions importantes. Il a déclaré: «Nous vous encourageons à intensifier vos efforts et à les renforcer pour mobiliser tous les Colombiens dans la recherche de la paix et pour donner une plus grande priorité aux programmes sociaux et aux questions de justice et de droits de la personne.
Le Canada est donc effectivement intervenu pour que les responsables rendent compte de leurs actions et j'inviterais tous les membres du comité qui s'intéressent à cette question de lire ce qu'avait à dire M. Rishchynski, parce que le Canada a participé à cette conférence.
J'aimerais également revenir sur ce qu'a déclaré M. Duval devant le comité et mentionner qu'il a répété que la Déclaration de Carthagène allait dans le sens de la Déclaration de Londres, qu'elle reconnaissait le travail effectué par la société civile et qu'elle soulignait l'importance de l'ONU. Ce sont des choses importantes pour nous et c'est pourquoi je me demande... Nous voulons tous faire tout ce que nous pouvons pour ramener la paix et la sécurité en Colombie, pour que les droits de la personne soient respectés et que les gens ne vivent pas sous une menace constante.
Je m'informe de ce qui se passe là-bas et je ne peux pas imaginer comment l'on peut vivre dans ces conditions, c'est pourquoi je vous demande de bien comprendre mon point de vue.
J'aimerais donc savoir, pour ce qui est de ce que le Canada peut faire à l'avenir, si vous pensez que nous devrions continuer à investir dans la société civile, à participer à ce débat, à faire tout ce que nous pouvons? Que voulez-vous que nous fassions?
Le président: Monsieur Neve, je pense que cette question importante s'adressait à vous.
M. Alex Neve: Je vais commencer par la question de la déclaration de Carthagène et celle de Londres, ainsi que du rapport entre les deux.
Il est bien sûr important que cette affirmation figure dans la déclaration. Oui, et nous l'avons souligné dans les campagnes et les rapports qu'Amnistie a publiés depuis lors.
Notre inquiétude venait du fait que la plupart de ces problèmes sont très graves, qu'ils perdurent, et qu'étant donné qu'aucun progrès n'a été réalisé depuis la Déclaration de Londres—par exemple, dans le domaine de la collusion entre l'armée et les paramilitaires—on ne pouvait se contenter de réaffirmer dans la Déclaration de Carthagène les principes énoncés dans celle de Londres. Il fallait y faire figurer des déclarations faisant état de la déception, des inquiétudes, du fait que les promesses qui avaient été faites sur ces sujets à Londres n'avaient pas été tenues.
Il était insuffisant de se contenter de mentionner en quelques mots que la Déclaration de Londres était toujours en vigueur. Il aurait fallu que ces questions fassent l'objet d'une attention très précise dans le document de Carthagène et que des inquiétudes soient exprimées à ce sujet.
º (1650)
Le président: Oui, madame Symes, ou...
Monsieur Lewis.
M. John Lewis (coordonnateur de programmes, Droits de la personne, KAIROS): Très rapidement, je vais poursuivre un sujet qu'a mentionné Alex, mais pour aller un peu plus loin, je dirais que la Déclaration de Carthagène reflète ce que nous avons constaté depuis à peu près un an dans nos relations avec le gouvernement colombien. Nous avons entendu hier l'ambassadeur Duval nous dire qu'on avait discuté pendant cinq ou huit heures du sens de l'expression «conflit interne» et je ne veux pas dire par là que ce n'est pas important. Le gouvernement colombien a finalement réussi à faire supprimer cette expression.
Il est vrai que ce document n'est pas juridiquement contraignant comme le sont les conventions de Genève dont nous avons parlé, mais ils ont un poids moral qui peut influencer des discussions futures. À nos yeux, l'affaiblissement de ce document est le résultat de l'évolution qui est survenue en Colombie avec le président Uribe, qui s'accompagne non seulement d'attaques verbales directes contre la société civile, y compris contre les brigades de la paix et Amnistie Internationale, mais qui prend également la forme d'une tentative concertée de la part des autorités colombiennes en vue de réduire les contrôles internationaux exercés bilatéralement à tous les niveaux et aussi ceux des Nations Unies.
Considérée isolément, la Déclaration de Carthagène ne semble peut-être pas très importante, mais elle reflète les efforts que déploie le gouvernement de la Colombie. C'est une des raisons pour laquelle nous souhaitons vraiment que le comité étudie cette question, parce qu'il y a eu un grand changement avec l'arrivée du nouveau gouvernement.
Le président: La période est à peu près écoulée.
Madame Symes, voulez-vous avoir le dernier mot? Nous donnerons ensuite la parole à quelqu'un d'autre.
Mme Jean Symes: Oui, j'ai une autre chose à dire au sujet de la Déclaration de Carthagène. Un aspect clé qui n'était pas mentionné dans le document et qui intéresse au plus haut point nos amis colombiens et nous aussi, est que ce document ne contient aucune déclaration visant à appuyer le rôle important que joue le système des Nations Unies, en particulier le rôle que joue la Commission des droits de l'homme des Nations Unies. C'est un organisme qui joue un rôle absolument essentiel. C'est ce rôle que le gouvernement actuel ne cesse de restreindre.
Si le comité souhaite faire quelque chose pour améliorer la situation, il serait très utile de demander au Canada de parrainer une résolution à Genève portant sur la question de la Colombie, parce que cela aurait un effet important sur la façon dont ce problème est perçu. Cela aiderait nos partenaires en Colombie ainsi que les gens de l'ONU qui y travaillent qui pourraient ainsi clairement montrer que la communauté internationale appuie l'oeuvre des Nations Unies dans ce pays, et plus précisément, celui du haut commissaire. C'est un travail extrêmement important et une résolution de ce genre serait fort utile.
Le président: Merci.
Monsieur Goldring.
L'hon. Paddy Torsney: Une question de procédure, monsieur le président. Je voulais simplement demander si nous allions obtenir une copie de la déclaration de l'ONU.
Le président: Eh bien, ce n'est pas la responsabilité du greffier.
Vous n'avez pas de copie de ce document?
L'hon. Paddy Torsney: Il ne s'agit pas du greffier. Je suis sûre qu'elle existe puisqu'en fait le Canada a exprimé son appui.
Le président: Allez-y.
Monsieur Goldring.
M. Peter Goldring (Edmonton-Est, PCC): Mesdames et messieurs, merci de nous avoir présenté vos exposés.
Je vais sans doute reprendre certains des aspects que d'autres ont évoqués, mais j'ai du mal à comprendre—et peut-être qu'avec quelques explications, nous pourrons tous comprendre cela un peu mieux—comment il se fait qu'autant de pays puissent se réunir et préparer une déclaration qui contient autant d'affirmations dans lesquelles ces pays réaffirment leur appui, reconnaissent les progrès réalisés et finalement donner l'impression que des progrès réels ont été faits grâce aux efforts que déploient le Canada depuis 25 ans et la communauté internationale depuis 50 ans.
Je lis votre résolution et je souscris à à peu près tout ce qu'elle contient. J'ai tout de même du mal à comprendre comment cette résolution pourrait déboucher sur une autre déclaration ou une entente sur ce que l'on pourrait faire, sans d'abord revenir, comme cela a été mentionné dans des commentaires précédents, sur ce que nous avons fait en vue d'évaluer notre action, pour ensuite choisir d'autres orientations et mettre en avant d'autres idées pour essayer d'apporter une solution à cette situation vraiment terrible.
Je me demande vraiment ce que nous pouvons faire pour préparer une déclaration beaucoup plus dynamique étant donné que près de 25 pays ont pris le temps de discuter de ce problème pour en arriver à cette déclaration qui suscite, d'après vos commentaires, toutes sortes de réserves et d'inquiétudes. Que pouvons-nous faire de plus?
º (1655)
Le président: Monsieur Neve, encore une fois.
M. Alex Neve: Eh bien, peut-être que Ken pourrait répondre.
Le président: Ken Luckhardt.
M. Ken Luckhardt (représentant national, Département international, Syndicat des Travailleurs et travailleuses canadiens de l'automobile): Nous vous avons demandé d'appuyer la décision de poursuivre l'étude sur la Colombie, mais j'aimerais rappeler aux membres du comité les raisons pour lesquelles ce comité a été mis sur pied au départ. Certains d'entre vous n'étaient peut-être pas membres de ce comité. Je dirais qu'il a été créé pour deux raisons. La première est celle de l'impunité. Je peux vous donner des chiffres qui concernent le mouvement syndicaliste, mais je ne veux pas vous parler uniquement de cet aspect, si ce n'est pour vous dire qu'au cours des 20 dernières années, quelque 4 000 syndicalistes ont été tués, pour le simple fait qu'ils appartenaient à un syndicat, et que dans seulement cinq de ces cas—5 sur 4 000—, les autorités colombiennes ont fait quelques efforts pour savoir qui était responsable de ces meurtres. Cela continue de se produire dans tous les secteurs de la société.
Ce sous-comité a été constitué au début de 2001 parce que des membres de la société civile du Canada—des groupes religieux, des groupes de défense des droits de la personne, des groupes de syndicalistes—ont répondu à un appel lancé de Barrancabermeja, localité dans laquelle 32 personnes avaient disparu et sept avaient été tuées au cours d'un massacre. La population de Barrancabermeja n'était pas en mesure d'obtenir justice localement. Ces gens ont demandé à la société civile canadienne de mettre sur pied un tribunal du genre de celui de Bertrand Russell qui serait chargé de faire enquête sur ce massacre et de l'examiner en profondeur. Nous avons consacré beaucoup de ressources à ce projet. Il y a eu des avocats canadiens, spécialistes des droits de la personne, qui ont donné leur temps gratuitement. Nous avons réuni neuf juges, des personnalités canadiennes éminentes, venant de différents secteurs et de différentes régions, qui ont entendu les témoignages. Des résidents de Barrancabermeja sont venus au Canada pour témoigner, et l'un d'entre eux a même été tué par la suite, lorsqu'il est retourné en Colombie. Voilà ce qui s'est passé.
Le rapport du tribunal a été transmis à Barrancabermeja où un autre tribunal a été constitué, ce qui a beaucoup inquiété le gouvernement colombien parce qu'il a compris tout à coup que la communauté internationale s'intéressait de près à la question de l'impunité.
Cette question n'est toujours pas réglée.
Au cours des audiences du sous-comité, la plupart des membres du comité ont eu la possibilité de rencontrer Kimy Pernia, le dirigeant de Embera Katío. Il était venu au Canada pour faire connaître aussi bien aux parlementaires qu'aux Canadiens, les effets qu'aurait le projet hydroélectrique Urrá qui était financé en partie par la SEE.
Je dirais que pour toutes sortes de raisons, le sous-comité devrait continuer à suivre ce qui se passe en Colombie à cause du problème de l'impunité et des liens que ce pays entretient avec le Canada. C'est une zone de conflit. Nous n'avons pas le temps aujourd'hui de parler des divers liens que le Canada, par l'intermédiaire de ses sociétés, de la SEE, de son gouvernement, de l'ACDI, entretient avec la Colombie, mais cet aspect devrait certainement représenter une partie importante des travaux de votre sous-comité. C'est pourquoi nous en faisons un cas spécial et demandons instamment au comité de poursuivre son étude sur la Colombie.
Enfin, pour ce qui est des commentaires de M. Day au sujet de la privatisation—je crois qu'il a quitté la salle—, je dirais que dans des pays comme le Canada et la Suisse, dans les pays démocratiques, il est possible de débattre de la question de la privatisation, mais lorsqu'on fait cela en Colombie, les gens se font tuer parce qu'ils s'opposent à cette politique. S'ils ne sont pas tués, s'ils ne disparaissent pas, s'ils ne sont pas déplacés ou forcés à s'exiler, ils perdent leur travail. Perdre son travail en Colombie ne fait qu'aggraver la précarité de la situation des travailleurs. Le cas de TELECOM, celui de l'industrie du pétrole, celui de l'industrie minière, l'idée de changer les lois minières pour qu'elles soient plus favorables aux sociétés minières canadiennes, voilà des questions qui touchent directement les liens qu'entretient le Canada avec une tragédie qui se déroule dans notre hémisphère.
C'est pourquoi nous vous invitons vivement à examiner sérieusement notre demande.
Le président: Monsieur Goldring, il vous reste deux minutes.
M. Peter Goldring: Merci.
Je trouve inquiétant de voir des déclarations comme celle-ci, qui nous donne une certaine idée de la situation, et d'apprendre ensuite par d'autres moyens qu'en fait, il n'y a pas... et que le gouvernement lui-même ne fait pas ce qu'il prétend faire dans la déclaration.
Ma position de départ est qu'il ne faudrait pas se contenter de consacrer d'autres ressources à cette question avant d'avoir évalué soigneusement la façon dont les ressources ont été utilisées jusqu'ici. Un des commentaires que l'on trouve ici parle de l'enseignement dans les écoles, de démocratisation, et de rechercher d'autres façons d'affecter nos ressources. Autrement dit, vérifier ce qui a été fait et comprendre qu'après 25 ou 50 ans, selon le pays concerné... les rapports préparés par votre groupe semblent indiquer que la situation a en fait empiré. Cela nous indique qu'il conviendrait de prendre un moment de réflexion pour analyser ce que nous avons fait, vérifier l'efficacité de notre action, et voir si nous sommes disposés bien sûr à poursuivre notre aide, cela est essentiel, mais également chercher d'autres façons de sensibiliser le pays à la démocratie, aux droits de la personne, à l'ordre civil. C'est peut-être le domaine sur lequel nous devrions concentrer notre action, de sorte que d'ici une vingtaine d'années, la génération suivante, une fois passée par les écoles, pourra faire progresser la société.
Est-ce bien là le domaine auquel nous devrions nous intéresser davantage?
» (1700)
Le président: Madame Symes.
Mme Jean Symes: Merci.
En Colombie, le problème ne vient pas du fait que la population ne sait pas ce que veut dire le respect des droits de la personne. En Colombie, le problème ne vient pas du fait que les gens n'en savent pas suffisamment au sujet des droits de la personne. En Colombie, le problème vient du fait qu'il y a un conflit d'intérêts et que d'un côté, il y a ceux qui possèdent le pouvoir et de l'autre, la population qui n'en possède pratiquement pas, comme Ken le disait, et que les gens qui s'opposent à ce que la petite élite colombienne veut faire sur le plan de la croissance économique et aux conséquences sociales qui en découlent sont assassinés.
C'est ce qui explique que les syndicalistes sont un groupe qui est visé par ces assassinats; c'est pourquoi ce sont les journalistes, les gens qui font rapport sur ces événements, c'est pourquoi ce sont les défendeurs des droits de la personne qui sont directement ciblés.
Les paysans, les gens qui vivent dans les collectivités rurales et dans des fermes, sont expulsés de leurs terres parce qu'il y a du pétrole dessous, parce qu'il y a des minéraux, parce que leurs terres feraient de bons pâturages ou qu'elles seraient bonnes pour la culture de la coca. C'est là, je crois, un des aspects sur lesquels le Canada a centré son effort.
Mme Torsney a raison de dire que le Canada a effectivement essayé de faire adopter une déclaration assez ferme à Carthagène, mais il n'a pas réussi à le faire à cause des forces en jeu. Comme vous le disiez, il y avait 25 pays autour de la table et ils n'ont pas réussi à s'entendre sur une résolution. Eh bien, en fait, il y avait des intérêts divergents, et je crois qu'en tant que politicien, vous savez certainement quels sont ces intérêts.
Je crois que c'est de ce côté-là que le comité devrait porter son regard. Si vous voulez savoir ce que le Canada doit faire à long terme, ce sont là le genre de questions sur lesquelles vous devez vous pencher.
Le président: Bien dit.
Monsieur Bains.
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.): Je veux tout d'abord remercier tous les membres du panel d'être venus aujourd'hui. Je sais que nous oublions parfois de le faire. Je veux également vous demander d'excuser mon retard. J'ai participé à un débat historique devant la Chambre des communes.
Cela dit, ma question ne portera pas uniquement sur la Colombie, mais je voudrais revenir sur ce que disait Mme Symes. C'est une question apparemment d'envergure régionale. Je ne pense pas que nous pourrons résoudre ces problèmes en nous limitant à un seul pays.
Je sais que M. Day n'est pas ici, mais je reconnais que nous ne pouvons pas ignorer le fait que les États-Unis jouent un rôle essentiel dans cette situation. Ce pays investit près de 42 millions de dollars, je crois, chaque année en Colombie pour l'aider dans sa guerre contre le terrorisme, contre les drogues et le reste.
Vous avez mentionné un aspect qui a attiré mon attention. J'aimerais que vous nous en disiez davantage, madame Symes, sur l'approche non violente que pourrait adopter le Canada. Pourriez-vous préciser votre pensée parce que j'estime que cela met en jeu la notion de responsabilité? M. Goldring a abordé cet aspect. M. Day a abordé cet aspect. Nous sommes prêts à investir de l'argent et à fournir des ressources, mais nous voulons également être en mesure de rendre des comptes sur l'emploi de ces fonds—allons-nous obtenir les résultats concrets que nous recherchons?
Je vous invite donc à parler de l'approche non violente qu'a adoptée le Canada. Je vous demande ainsi de fournir quelques éléments à ce sujet et nous pourrons ensuite revenir sur la question de savoir si nous obtenons les résultats souhaités.
Mme Jean Symes: Comme Lilia vient de le dire, nous avons très peu de ressources. D'un autre côté, il est également vrai que le Canada a obtenu d'excellents résultats avec les ressources qu'il a consacrées à la Colombie depuis quelques années.
Après le rapport du comité de 2002, le Canada a réorienté son programme d'aide sur la société civile. Il s'agit essentiellement d'aider des groupes de la société civile, comme les personnes déplacées, les jeunes, et de travailler avec les jeunes dans les villes, ce qui est très important, et dans les régions rurales, aider les paysans à se tenir à l'écart du conflit.
Ce sont là d'excellentes choses qui doivent continuer à se faire. Il y a, comme le disait Lilia, beaucoup de gens en Colombie qui essaient de se regrouper, d'adopter une approche non violente pour résoudre le conflit et pour qu'il puisse y avoir des voix dissidentes, un débat, sans que personne ne se fasse tirer dessus.
Pour ce qui est du suivi, je dirais que le programme de coopération internationale de l'ACDI utilise des mécanismes de suivi. Nous sommes en train d'examiner la façon dont les efforts diplomatiques sont suivis. Je ne sais pas de quels mécanismes dispose le Canada pour faire le suivi de son action diplomatique. Nous aimerions que les organisations indigènes, ou du moins les organisations régionales et locales, comme la nouvelle Communauté d'Amérique du Sud et la Communauté andine, reçoivent des fonds. Le Canada pourrait très bien jouer un rôle très important dans ce domaine.
En outre, pour ce qui est de travailler par l'entremise des Nations Unies, il y a d'autres façons d'agir que d'organiser des réunions aussi tendues que celle de Carthagène. Les prochaines réunions auront lieu à Genève, où se réunira la Commission des droits de l'homme. Ce sera une réunion très importante et le Canada pourrait jouer un rôle très important pour essayer de faire adopter une résolution sur la Colombie.
» (1705)
M. Navdeep Bains: Pouvez-vous nous dire ce que vous pensez de la façon dont le Canada travaille avec les États-Unis dans ce pays? Il me semble que ces deux pays n'ont pas la même stratégie. Je ne voudrais pas politiser cette question; j'aimerais plutôt mieux comprendre les domaines dans lesquels nous collaborons efficacement et ceux où il y aurait lieu d'apporter des améliorations. J'aimerais avoir vos commentaires sur ce point, si cela ne vous dérange pas.
Mme Jean Symes: Le International Crisis Group, une ONG dont le siège est en Belgique et qui est financée par le ministre des Affaires étrangères du Canada et par l'ACDI et qui fait de l'excellent travail, vient de publier une étude sur la guerre contre les drogues en Colombie. Je mentionne cet aspect pour répondre à votre question parce que c'est un aspect essentiel.
Les États-Unis ont très officiellement amalgamé leur guerre contre le terrorisme avec leur guerre contre les drogues. Le gouvernement colombien a fait la même chose. C'est une très mauvaise décision. Elle brouille les distinctions entre les diverses catégories et a entraîné en fait de graves problèmes en Colombie. Le rapport du International Crisis Group examine tout cela de façon détaillée et formule des recommandations pour éclaircir la situation.
Le Canada a adopté une approche différente; il s'est intéressé de près à des mesures comme l'éradication volontaire de la production de coca plutôt qu'aux arrosages aériens qui obligent les paysans à abandonner leur terre.
Il y a donc différentes approches. C'est un grand sujet et c'est une des raisons pour lesquelles nous aimerions que le comité examine cette question.
Le président: Merci.
[Français]
Madame Bourgeois, vous avez la parole.
Mme Diane Bourgeois: Merci, monsieur le président.
Il y a une parlementaire colombienne, Ingrid Betancourt, dont je n'ai pas entendu parler depuis longtemps, qui s'est élevée contre le régime de la Colombie et qui a été incarcérée.
Est-elle encore incarcérée ou a-t-elle été libérée?
[Traduction]
Mme Sheila Katz: Elle est détenue en otage...
[Français]
Mme Diane Bourgeois: Elle est prise en otage.
[Traduction]
Mme Sheila Katz: ... par les FARC depuis plusieurs années.
[Français]
Mme Diane Bourgeois: Elle s'était justement élevée contre l'impunité, contre l'impossibilité de pouvoir parler librement, et ainsi de suite.
Le 30 janvier 2005 s'est tenu à Porto Alegre le 5e Forum parlementaire mondial. J'ai entre les mains la déclaration finale.
Les parlementaires qui étaient là se sont élevés contre ce qu'ils appellent le « Plan Colombie ». Je cite un extrait: « Le Plan Colombie, autre cas d’ingérence inacceptable et de militarisation d’un pays, constitue une menace réelle et concrète pour la stabilité de la région. » Ces parlementaires ont réclamé une solution politique négociée au conflit social que traverse la Colombie. Ils ajoutent:
À la veille de la réunion de Carthagène nous demandons instamment à l'Union européenne et aux pays qui participeront à cette réunion de ne pas engager de fonds de coopération au développement en appui à la politique de guerre et d'impunité du gouvernement colombien. |
Est-ce que c'est, entre autres, quelque chose que vous demandez?
» (1710)
[Traduction]
Le président: Madame Solano.
Mme Lilia Solano: Merci.
Nous avons clairement indiqué qu'à l'heure actuelle, l'impunité est renforcée. L'impunité est un problème traditionnel en Colombie. Nous avons connu une longue guerre parce que le gouvernement avait garanti l'impunité à certaines parties. Il a pour projet de préparer une loi, un cadre juridique, qui aurait pour effet de légaliser, de pardonner tous les crimes commis.
Nous tenons à inviter le Canada à suivre de près la situation, non pas uniquement à connaître les chiffres officiels des violations des droits de la personne, mais aussi de faire une enquête plus détaillée sur la situation. Il faut que la communauté internationale dise clairement qu'elle n'appuiera pas un processus débouchant sur l'impunité, sur le pardon de crimes contre l'humanité. C'est ce qui se passe en ce moment et il existe de nombreuses façons de montrer qu'il existe de meilleures solutions pour le pays, que la situation ne durera pas éternellement et que le moment est peut-être venu de mettre fin à cette impunité. Nous ne pouvons le faire seuls; nous ne réussirons que si nous travaillons ensemble.
Je suis tout à fait d'accord avec vous sur tous ces points.
Le président: Madame Symes, je vous en prie.
Mme Jean Symes: Avec le Plan Colombie—le plan en vertu duquel les États-Unis fournissent la plus grande partie de leur aide militaire à la Colombie—et les plans qui ont suivi, parce que celui-là est maintenant un peu ancien, les États-Unis ont versé près de 3,3 milliards de dollars depuis 2000. La plus grande partie de cette aide a pris la forme d'une aide militaire, de sorte que l'on assiste à la militarisation de la Colombie et des pays qui l'entourent, à un rythme tout à fait surprenant.
Nous pensons que le Canada ne devrait pas participer à ce mouvement, et qu'il ne l'a pas fait jusqu'ici. L'aide internationale du Canada est accordée en dehors du cadre du Plan Colombie. Il serait peut-être intéressant que vous examiniez ces aspects-là.
Le président: Monsieur Rimstad.
M. Keith Rimstad (coordonnateur des programmes régionaux, Amnistie internationale (Canada)): Un petit rappel, le Canada a vendu aux États-Unis 33 hélicoptères excédentaires en 1998, qui ont constitué un élément essentiel du Plan Colombie, à savoir la fourniture d'un moyen de transport au premier bataillon colombien qui a été mis sur pied en vertu du Plan Colombie. Cela avait été signalé à la Chambre des communes à l'époque par Svend Robinson. C'est un aspect qui me paraît relié. Une bonne partie de nos rapports avec la Colombie ne se limitent pas à ceux qu'entretient avec ce pays le ministre des Affaires étrangères ou l'aide internationale. Une bonne partie de ces rapports touchent d'autres domaines, notamment ceux qui concernent la GRC et aussi le ministère de la Défense.
La question des hélicoptères n'est pas nouvelle, mais c'est un exemple des aspects que le comité pourrait, d'après moi, examiner de façon à approfondir l'examen qu'il a effectué en 2002 pour englober toutes les politiques adoptées par le Canada à l'endroit de la Colombie.
Il n'est pas vraiment nécessaire de parler en détail de cette période particulière, mais nous avons découvert un autre exemple... Il s'agissait en fait d'un rapport que nous avons trouvé dans un journal colombien qui mentionnait que la GRC avait fourni aux services de sécurité de la Colombie de l'équipement de surveillance qui valait près de 1,1 million de dollars. Cet équipement était utilisé pour effectuer une enquête sur une affaire criminelle ici au Canada, mais je n'ai jamais réussi à savoir, malgré les efforts que j'ai déployés pour obtenir des renseignements de la GRC, comment cet organisme allait suivre cet équipement et si celui-ci allait demeurer ou non en Colombie.
Il y a donc des aspects grâce auxquels nous pourrions connaître plus précisément la nature exacte de nos relations avec la Colombie et comprendre comment nous suivons ces relations, en particulier à l'extérieur des secteurs que nous suivons habituellement, sur le plan des droits de la personne. Comment évalue-t-on l'effet de ces relations sur les droits de la personne?
» (1715)
Le président: Merci, monsieur Rimstad. Je pense que... [Note de la rédaction: Inaudible] ... sur cette question des hélicoptères.
Madame McDonough.
Mme Alexa McDonough: Je ne peux même pas imaginer l'ampleur de la frustration que vous devez tous ressentir, 11 représentants qui en savent très long sur ce qui se passe en Colombie et qui font face à un groupe de parlementaires qui... Je ne sais pas si j'ai tout à fait raison, mais si l'on remonte à l'étude de 2002 effectuée par le comité et au tribunal pour la Colombie, je pense que les membres du comité ont tous changé depuis. Vous aimeriez compléter l'information dont disposent les membres du comité, ce qui serait fort utile, et vous devez chaque fois reprendre au début. D'une certaine façon, je dirais que le membre du NPD qui siège officiellement à ce comité est une exception sur ce plan parce qu'il continue à travailler sur la question des droits et de démocratie.
Je me demande si pour essayer d'être plus précis et plus concret, parce que je pense que certains membres du comité ont le désir de faire quelque chose, si vous ne pensez pas qu'il serait utile de... J'hésite presque à vous le proposer, parce que vous pensez que nous devrions faire notre travail et étudier cette question, mais je pense aux connaissances accumulées que vous possédez et je me demande si vous n'estimez pas qu'il serait utile—parce qu'il me semble à moi que cela serait extrêmement utile pour le comité—que vous proposiez, je ne sais pas quel serait le nombre magique, mais je dirais une demi-douzaine de recommandations précises et concrètes concernant des choses que le comité pourrait défendre et essayer de faire adopter. Permettez-moi de vous donner rapidement deux exemples.
J'ai rencontré ce qui est peut-être un microcosme de votre groupe, l'Atlantic Regional Solidarity Network, dans ma province il y a quelque temps. Il y avait dans ce groupe un dirigeant indigène et un syndicaliste colombien, et une de ces personnes, que j'avais déjà rencontrée, avait déjà fait l'objet de trois tentatives d'assassinat, tout comme le président des travailleurs de la mine, et je sais que Kenneth et Sheila connaissent très bien cette situation.
Il y a une chose qui m'a vraiment horrifiée, et je me suis trouvée un peu naïve de ne pas m'en être aperçue auparavant, c'est l'ampleur des exactions et des atrocités que l'on semble pouvoir relier à des sociétés canadiennes qui opèrent en Colombie. Je me demande si nous ne pourrions pas au moins essayer de voir ce que le comité pourrait et devrait faire pour contrôler les agissements des sociétés canadiennes en Colombie. Ce pourrait être au moins un début.
Deuxièmement, et j'hésite un peu à m'aventurer sur ce point parce que je ne dispose pas d'éléments précis, mais j'ai été encore plus horrifiée d'entendre rapporter—et il semble que cet aspect ait été étudié—qu'il y avait eu en fait certains cas où l'ACDI avait activement participé et collaboré avec le gouvernement colombien pour aider des sociétés canadiennes à contourner les pratiques environnementales et les pratiques en matière de relations de travail.
Je pense que si vous pouviez isoler certaines questions de ce genre que nous pourrions utiliser comme point de départ pour prendre des mesures concrètes, qui soient plus orientées vers l'action que suggérer une étude supplémentaire.
Je vous prie de m'excuser parce que je ne suis pas membre de ce comité. Il est donc possible que le comité ait déjà l'intention d'agir de cette façon, mais je mentionne ce point au cas où vous auriez des réactions ou des recommandations à nous faire.
» (1720)
Le président: Monsieur Luckhardt.
M. Ken Luckhardt: Je vais être bref et simplement appuyer la proposition suggérant au comité d'examiner cette voie, mais je vais le faire en vous citant un cas précis, si vous le permettez.
M. Day a parlé tout à l'heure du fait qu'il avait rencontré des jeunes Colombiennes qui l'avaient aidé à obtenir de l'argent d'un guichet automatique. Si le comité continue à s'intéresser à la Colombie, nous attirerons votre attention sur le cas d'une Colombienne qui vient d'arriver au Canada en qualité de réfugiée parrainée par des organismes du secteur privé. Elle est venue au Canada avec l'aide de la section locale des TCA de l'usine Ford d'Oakville, en Ontario. C'est la veuve d'un chef syndical de l'industrie du charbon. Elle se trouve maintenant au Canada en qualité de réfugiée parrainée par un organisme privé avec ses deux enfants. Elle a passé trois ans au Salvador en attendant d'être parrainée. Elle a été obligée de se rendre au Salvador et de quitter la Colombie parce qu'elle demandait justice pour le meurtre de son mari.
Son mari était le président du syndicat des mineurs de charbon. On l'a obligé, avec le vice-président du syndicat, de descendre d'un car qui conduisait des mineurs chez eux et il a été exécuté devant tous les membres du syndicat. Quatre mois plus tard, le président nouvellement élu a subi le même sort.
Pourquoi mentionner l'industrie du charbon? Cette femme pourrait apporter son témoignage personnel au sujet de l'assassinat des syndicalistes. Mais dans le même sens, je reviens au point d'Alexa, est-ce que nous savons vraiment combien de charbon bon marché et rougi du sang de ces personnes est envoyé par la Colombie en Nouvelle-Écosse? Et savons-nous si ce charbon a commencé à arriver à peu près à l'époque où les mineurs du Cap-Breton ont été congédiés? Autrement dit, il y a beaucoup de liens entre nos pays sur le plan du commerce et des investissements.
La référence à l'ACDI visait en fait un consultant de l'ACDI qui était chargé d'aider la Colombie à revoir son code minier.
Il y a donc beaucoup de liens et je pense que le comité...
Mme Alexa McDonough: Et ce qui a affaiblit le...
M. Ken Luckhardt: Il n'y a plus de syndicat. La société...
Le président: Merci.
Monsieur Neve, rapidement, s'il vous plaît. Il ne nous reste plus beaucoup de temps.
M. Alex Neve: Pour revenir à cette idée de trouver des mesures concrètes, susceptibles d'être prises rapidement, j'inviterais vivement le comité à ne pas oublier la recommandation qu'un certain nombre d'entre nous ont présentée au sujet de la présentation d'une résolution devant la Commission des droits de l'homme. J'insiste sur cet aspect parce que nous n'avons pas beaucoup de temps. La commission débute ses travaux dans un mois et je trouve tout à fait désespérante la perspective de revoir encore tous ces présidents faire des déclarations rituelles qui ne débouchent sur rien et qui n'aggravent pas les pressions multilatérales qui pourraient être exercées sur la Colombie, et qui sont très efficaces.
C'est en général l'Union européenne qui prend l'initiative des mesures que la commission adopte à l'égard de la Colombie. Je pense que le Canada devrait prendre les choses en main et avoir une discussion très sérieuse avec l'Union européenne pour indiquer clairement que le Canada estime qu'il serait tout à fait insuffisant de se contenter des déclarations du président de la commission, et inviter l'Union européenne à revoir sa stratégie et, si cela ne donne rien, le Canada devrait alors être prêt à faire preuve d'initiative et présenter lui-même une résolution.
Le président: Merci.
Il nous reste quelques minutes. Quelqu'un ou quelques-uns d'entre vous pourraient-ils nous dire quels ont été, d'après eux, les effets positifs de l'étude de 2002 sur la façon dont l'aide a été distribuée en Colombie ou vous pourriez peut-être nous en faire part par courrier, parce que je suis sûr que tous les membres du comité aimeraient le savoir.
» (1725)
Mme Jean Symes: Oui. Je pensais en avoir parlé, mais ce n'était peut-être pas très clair. L'étude de 2002 a été fort utile sur le plan de la coopération internationale et de la politique du Canada dans ce domaine. En Colombie, le programme d'aide a été progressivement complètement révisé—et revu dans le sens proposé par le comité—à savoir, il a été recentré sur les droits de la personne et la société civile. C'est un aspect très important. Cela a été fort utile.
Je pense que l'ACDI et le ministère de la Coopération internationale pourraient vous remettre un excellent rapport qui a été fait sur cette question. M. Rishchynski vous a également remis un bon rapport sur cette question.
Une des raisons pour laquelle nous aimerions que le comité reprenne cette étude est que le contexte a évolué et qu'avec les ressources du comité, il serait possible d'étudier de façon beaucoup plus approfondie certaines questions que les membres du comité ont soulevées. Une de ces questions est celle de la coopération internationale. Une autre serait ce que Keith a mentionné au sujet des autres éléments de la politique internationale et des relations internationales qui ne touchent pas les relations étrangères, ni la coopération internationale, mais la sécurité et le commerce, par exemple.
Le président: Un de vos collègues a remis une note dans laquelle il disait qu'avant la déclaration de Carthagène sur les réfugiés, des représentants auprès des délégations internationales—les sociétés civiles, les ONG, l'Église catholique, les municipalités et le secteur privé—ont tous remis des mémoires aux délégations internationales et que ces déclarations ont été entendues par les représentants des pays donateurs mais n'ont pas été prises en compte dans la déclaration de Carthagène qui a été préparée par ces mêmes pays le lendemain.
Est-ce que cela reflète vos opinions? Je le crois, n'est-ce pas?
Mme Jean Symes: Oui.
Le président: Vous avez mentionné de nombreux sujets sur lesquels nous devrons réfléchir. Je crois que notre séance est presque terminée. Si les collègues sont d'accord, nous voterons cette motion au cours de notre prochaine séance. Nous examinerons également la Colombie. Nous serons peut-être amenés à demander au CRDI de s'intéresser à la Colombie.
Avant que vous arriviez, madame Bourgeois, il y avait une recommandation... Avez-vous entendu la recommandation?
Mme Diane Bourgeois: Non. Paddy n'était pas là non plus.
L'hon. Paddy Torsney: Une précision, sur le plan de la procédure, les motions sont normalement présentées par les députés.
Le président: Elles le sont toutes, en fait.
L'hon. Paddy Torsney: Je ne sais pas si une motion a vraiment été présentée. Je ne sais pas si elle est formulée dans les deux langues officielles.
Le président: C'est une autre raison pour laquelle nous devrions probablement l'examiner au cours de notre prochaine séance.
L'hon. Paddy Torsney: Pour ce qui est de la période de 48 heures, quelqu'un ne devrait-il pas présenter la motion? Ça n'a pas encore été fait.
Le greffier du comité: Ce n'est pas une motion.
Le président: Nous examinerons la recommandation au cours de notre prochaine séance. Nous pourrons également examiner la question de savoir si nous voulons étudier ce que font certaines sociétés canadiennes en Colombie.
L'hon. Paddy Torsney: Sur cette question, je me demande s'il n'y a pas des sociétés canadiennes qui ont décidé de faire de bonnes choses dans le secteur commercial. Il n'est pas nécessaire que nos témoins nous fournissent immédiatement ces renseignements, mais j'espère qu'il y a bien une société qui fait du bon travail en Colombie et que vous serez peut-être en mesure de nous donner un exemple de ce genre de comportement plutôt que des comportements critiquables. Je suis sans doute une éternelle optimiste.
Le président: Monsieur Jones.
M. John Jones (coordonnateur, Colombie, Amnistie internationale (Canada)): Excusez-moi, je pensais que vous aviez terminé.
En fait, le Secrétariat international d'Amnistie Internationale avait préparé un mémoire pour cette réunion, à l'intention des députés membres du comité, au sujet de la sécurité en Colombie, qui est une situation fort complexe, ainsi que des différents niveaux d'insécurité et de violence. Ce mémoire présente ce sujet de façon très claire, du moins dans la mesure où une question aussi complexe peut être facile à comprendre.
Malheureusement, ce mémoire n'est pas terminé. Il n'a été achevé que hier. Nous n'avons pas eu le temps de le traduire en français. Mais nous en avons des copies avec nous. Cela pourrait au moins fournir des renseignements à ceux qui souhaitent en avoir.
Le président: Pourriez-vous le laisser sur la table pour que les personnes qui souhaitent en prendre une copie puissent le faire en sortant?
M. John Jones: Je le laisserai ici.
Le président: Madame Katz.
Mme Sheila Katz: J'aimerais savoir à quel moment la transcription des séances—celles de lundi, de mercredi et d'aujourd'hui—sera distribuée.
Le président: Je pense que cela prend quelques jours, n'est-ce pas? Les bleus prennent quelques jours. Vous pouvez obtenir les transcriptions sur Internet lorsqu'elles sont publiées. Cela prend entre une semaine et dix jours, parfois 11 jours.
Vous nous avez été fort utiles. Je pense que nous avons tous été touchés parce que vous avez dit. Il est possible que nous décidions de centrer nos travaux sur la Colombie lorsque nous examinerons les questions reliées au développement basé sur le respect des droits de la personne. Je pense que nous discuterons de cet aspect lorsque nous entendrons la semaine prochaine le CRDI, également sur la Colombie.
Merci à tous d'être venus.
La séance est levée.