SDEV Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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38e LÉGISLATURE, 1re SESSION
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international
TÉMOIGNAGES
TABLE DES MATIÈRES
Le jeudi 25 novembre 2004
¿ | 0905 |
Le président (L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)) |
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD) |
Le président |
M. Errol Mendes (professeur , Droit international et droit de la personne, conseiller auprès du bureau du Secrétaire général de l'ONU, À titre individuel) |
¿ | 0910 |
Le président |
Lgén Richard Evraire (président, Conférence des associations de la défense) |
¿ | 0915 |
¿ | 0920 |
Le président |
Mme Kathy Vandergrift (directeur politique, Vision mondiale Canada) |
Le président |
Mme Lina Holguin (agente de représentation, OXFAM) |
Mme Kathy Vandergrift |
Mme Lina Holguin |
¿ | 0925 |
¿ | 0930 |
Le président |
Mme Kathy Vandergrift |
¿ | 0935 |
Le président |
Lgén Richard Evraire |
Le président |
M. Alex Neve (secrétaire général, Section anglaise, Amnistie internationale (Canada)) |
¿ | 0940 |
¿ | 0945 |
Le président |
Lcol Frank Jewsburry (Canadian Friends of Sudan) |
¿ | 0950 |
¿ | 0955 |
Le président |
M. Nicolas Palanque (chef des opérations d'urgence, CARE Canada) |
À | 1000 |
Le président |
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC) |
À | 1005 |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ) |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.) |
M. Stockwell Day |
Le président |
M. Stockwell Day |
Le président |
M. Errol Mendes |
M. Stockwell Day |
Le président |
Mme Kathy Vandergrift |
À | 1010 |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
M. Errol Mendes |
À | 1015 |
M. Stockwell Day |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
Mme Kathy Vandergrift |
Le président |
Lcol Frank Jewsburry |
À | 1020 |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Stockwell Day |
Le président |
M. Alex Neve |
Le président |
M. Alex Neve |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Alex Neve |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Stockwell Day |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
Col Alain Pellerin (directeur exécutif, Conférence des associations de la défense) |
L'hon. Ed Broadbent |
À | 1025 |
Col Alain Pellerin |
L'hon. Ed Broadbent |
Col Alain Pellerin |
M. Alex Neve |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Navdeep Bains |
Mme Kathy Vandergrift |
À | 1030 |
Le président |
M. Errol Mendes |
Le président |
M. Nicolas Palanque |
À | 1035 |
Le président |
Mme Lina Holguin |
Le président |
Lcol Frank Jewsburry |
Le président |
M. Navdeep Bains |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
À | 1040 |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
M. Stockwell Day |
Le président |
L'hon. Ed Broadbent |
Le président |
M. Marcus Pistor |
À | 1045 |
M. Stockwell Day |
Mme Diane Bourgeois |
M. Marcus Pistor |
L'hon. Ed Broadbent |
M. Marcus Pistor |
Le président |
Mme Kathy Vandergrift |
M. Marcus Pistor |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Diane Bourgeois |
M. Errol Mendes |
Mme Kathy Vandergrift |
À | 1050 |
Le président |
Mme Diane Bourgeois |
Le président |
Col Alain Pellerin |
Le président |
Col Alain Pellerin |
Le président |
Lcol Frank Jewsburry |
M. Marcus Pistor |
Le président |
M. Marcus Pistor |
Le président |
M. Marcus Pistor |
Le président |
M. Marcus Pistor |
Le président |
Col Alain Pellerin |
M. Stockwell Day |
M. Navdeep Bains |
M. Stockwell Day |
L'hon. Ed Broadbent |
À | 1055 |
Le président |
Col Alain Pellerin |
M. Marcus Pistor |
Le président |
CANADA
Sous-comité des droits de la personne et du développement international du comité permanent des affaires étrangères et du commerce international |
|
l |
|
l |
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 25 novembre 2004
[Enregistrement électronique]
* * *
¿ (0905)
[Traduction]
Le président (L'hon. David Kilgour (Edmonton—Mill Woods—Beaumont, Lib.)): Mesdames et messieurs, je pense que nous avons le quorum.
Avant de commencer l'audition des témoins, je crois que M. Broadbent a une motion ou un rappel au Règlement.
L'hon. Ed Broadbent (Ottawa-Centre, NPD): Monsieur le président, suite à notre dernière discussion avec les personnes qui avaient des contacts avec la population indigène des Philippines touchée par les activités de la société minière canadienne, nous avons parlé de les faire comparaître devant le comité le 16 décembre. Les représentants des populations indigènes ne peuvent pas venir en décembre, mais ils pourraient venir en février.
Je voudrais donc proposer une motion pour changer la date du 16 décembre qui avait été prévue à une date en février, l'année prochaine.
(La motion est adoptée.)
Le président: Nous avons l'honneur de recevoir de très éminents témoins pour discuter ce matin d'un sujet d'une importance cruciale. Chacun sait, je crois, qu'il dispose de cinq minutes. Je sais que c'est terriblement court pour un tel sujet, mais nous aurons, j'espère, plus de temps pour les questions.
Si vous voulez bien, nous allons commencer par M. Mendes.
Merci de vous être joint à nous.
M. Errol Mendes (professeur , Droit international et droit de la personne, conseiller auprès du bureau du Secrétaire général de l'ONU, À titre individuel): Je vous remercie, monsieur le président, vous et les membres de votre comité.
Je serai très bref. Je ne vais pas lire tout mon document afin de gagner du temps. Je commencerai par la page 3, pour ceux qui l'ont reçu.
Le conflit dans le sud du Soudan et la région du Darfour est fondamentalement une lutte pour le pouvoir, les ressources et l'argent dans ce pays marqué par la tragédie. Jusqu'ici, pour tenter de mettre fin au génocide, la communauté internationale a surtout axé ses efforts sur le partage du pouvoir et de la richesse, notamment par un futur référendum sur l'indépendance. Elle est complètement passée à côté de l'argument qui pourrait se révéler le plus persuasif pour forcer le gouvernement de Khartoum à cesser son génocide et ses crimes contre l'humanité, à savoir la dette croissante du Soudan.
Le gouvernement britannique—et cela figure en annexe—a affirmé que l'énorme dette extérieure du Soudan que le pays ne pourra pas maintenir indéfiniment à un tel niveau, pourrait être une importante incitation à la paix, mais que la communauté internationale devra déployer des efforts exceptionnels. Cette dette extérieure s'élève actuellement à 24 milliards de dollars US, dont 20 milliards sont en souffrance. Ces sommes sont dues à des créanciers commerciaux, à des pays membres du Club de Paris, à des créanciers arabes et à des organisations multilatérales.
Le ministère britannique du Développement international est d'avis que la normalisation des relations avec les créanciers internationaux et une remise de dette dans le cadre de l'Initiative PPTE pourraient apporter une paix durable, moyennant des injections massives de capitaux de la communauté internationale vers les agences multilatérales, une fois les arriérés réglés. Ce que le gouvernement britannique ne dit pas explicitement, c'est que, si elle le voulait, la communauté internationale pourrait utiliser cette dette extérieure à la fois comme carotte et comme bâton afin d'empêcher le gouvernement de Khartoum de poursuivre son génocide déguisé.
Le plus frustrant, c'est que selon le PNUD, le Soudan a entrepris des pourparlers avec les institutions financières internationales afin de normaliser ses relations avec elles sans que la communauté mondiale exige qu'il mette fin à ce qu'il faut considérer comme des crimes contre l'humanité et un génocide au Darfour. Le PNUD indique qu'en 2002, le Soudan a entrepris de normaliser ses relations avec le FMI, la Banque mondiale, le Fonds de l'OPEP, la Banque africaine de développement et le Fonds arabe pour le développement économique et social. Or, malgré les événements dans le sud du pays et au Darfour, le FMI a redonné au Soudan son droit de vote et ses droits connexes en reconnaissance de ses efforts de réforme structurelle.
Le Canada demande au monde d'accepter le principe voulant que la souveraineté s'accompagne de la responsabilité de protéger ses citoyens et que, si un État souverain refuse de le faire, il faut envisager la possibilité d'une intervention humanitaire internationale.
S'il y a un pays où une telle intervention serait justifiée, c'est bien celui où le gouvernement de Khartoum a créé la tragédie en cours. Mais avant même une intervention de ce genre, la communauté internationale devrait faire jouer au maximum les leviers financiers dont elle dispose contre ce gouvernement.
C'est une simple question de droits de la personne. Si le gouvernement soudanais a la possibilité d'alléger le fardeau de sa dette, qui peut garantir qu'il ne se servira pas des ressources ainsi dégagées pour se procurer encore plus de matériel militaire afin de poursuivre ses visées génocidaires? La remise d'une partie de la dette d'un gouvernement coupable de génocide, sans conditions strictes et sans surveillance efficace, reviendrait à financer indirectement les actes commis par ce gouvernement contre sa propre population. En outre, l'absence de suivi efficace des obligations de rééchelonnement de la dette pourrait contribuer à enrichir le régime corrompu de Khartoum.
Le FMI a d'ailleurs reconnu ce risque lorsqu'il a révisé les échéances de remboursement des paiements en souffrance du Soudan, en 2002, de manière à ce que le gouvernement de Khartoum puisse rembourser ses emprunts au Fonds arabe. Dans le cadre de cet accord de rééchelonnement, le Soudan s'était engagé à réduire ses dépenses militaires et à gérer ses revenus pétroliers de manière plus transparente. Compte tenu de ce qu'a fait le gouvernement de Khartoum depuis 2002, ces engagements apparaissent comme une farce tragique présentée en avant-plan d'une indescriptible tragédie humaine.
Le Canada peut jouer un rôle de premier plan pour amener les institutions financières internationales et les clubs de créanciers à adopter une stratégie efficace contre les agissements du gouvernement de Khartoum au Darfour. Le premier ministre Paul Martin est un leader respecté dans la communauté financière mondiale, pour avoir présidé le groupe des ministres des Finances du G-20, qui inclut les membres les plus influents du FMI, de la Banque mondiale et du Club de Paris, ainsi que les pays abritant certains des principaux créanciers commerciaux du Soudan.
Le Canada et notre premier ministre pourraient se servir de leur autorité morale et de leur rôle de premier plan dans le G-20, de même que de leurs liens étroits avec les dirigeants actuels de la Banque mondiale et du FMI—et profiter de la visite prochaine du président Bush à Ottawa—pour réclamer la tenue d'une conférence internationale qui pourrait réunir par exemple les membres du G-20, la Banque mondiale et le FMI, et qui porterait sur la possibilité de lier toute assistance relative à la dette extérieure du Soudan à des mesures concrètes du gouvernement de Khartoum pour mettre fin aux exactions des milices janjawids contre les populations civiles du Darfour et négocier de bonne foi avec les groupes rebelles de la région.
¿ (0910)
Si les causes profondes de la tragédie humaine au Darfour sont liées à une lutte pour le pouvoir, les terres et les ressources, l'énorme dette extérieure rendra ces gains illusoires à long terme pour le gouvernement de Khartoum. Il est temps que nous nous servions de ce qui pourrait bien être un des leviers les plus puissants à la disposition de la communauté internationale pour mettre fin aux effusions de sang au Darfour avant qu'une précieuse branche de la famille humaine ne soit chassée de chez elle et peut-être même éliminée.
Merci, monsieur le président.
Le président: Merci.
J'aurais dû mentionner que M. Mendes est professeur de droit international et droits de la personne à l'Université d'Ottawa, et conseiller auprès du bureau du Secrétaire général de l'ONU.
Notre deuxième témoin est, je crois, le lieutenant-général Richard Evraire.
[Français]
Lgén Richard Evraire (président, Conférence des associations de la défense): Monsieur le président, merci de m'avoir invité à vous adresser la parole.
¿ (0915)
[Traduction]
Je voudrais vous parler des mesures que le Canada pourrait prendre face à la crise humanitaire dans la région du Darfour au Soudan. Je veux surtout vous présenter l'opinion de la Conférence des associations de la défense à l'égard de l'approche tridimensionnelle dont on a beaucoup parlé, mais que le gouvernement n'a pas encore officiellement appliqué à sa politique étrangère, et qui repose sur la défense, la diplomatie et le développement. Je vous parlerai du rôle essentiel que les forces militaires jouent dans ces trois fonctions en vous faisant voir à quel point la limitation des ressources militaires du Canada a réduit ses options en matière de politique étrangère.
La crise humanitaire au Soudan exige une attention immédiate de la part de la communauté internationale. Malheureusement, les Nations Unies ont tardé jusqu'ici à prendre des mesures concrètes pour améliorer la sécurité. Bien entendu, le plus important et le plus urgent est de faire cesser les tueries. Le rétablissement de la sécurité est une tâche qui revient aux forces militaires et une condition préalable à la reconstruction nationale au Soudan. On peut également espérer que des troupes des pays de l'Union africaine pourront sécuriser le pays le plus tôt possible.
Les interventions humanitaires au Soudan et dans les pays où il y a eu de graves violations des droits de la personne comme au Rwanda, au Kosovo et en Afghanistan devraient, selon moi, reposer sur le principe de la responsabilité de protéger, un principe auquel souscrit le gouvernement canadien et qui oblige à repenser la notion traditionnelle de la souveraineté des États. Selon ce principe, les États ont la responsabilité de protéger leurs propres citoyens et d'assurer leur sécurité, et lorsqu'ils ne peuvent pas ou ne veulent pas assurer cette protection et cette sécurité, le principe traditionnel de la non-intervention dans les affaires d'un État doit céder le pas devant la responsabilité que la communauté internationale a d'agir, de préférence avec la bénédiction du Conseil de sécurité des Nations Unies, mais sans cette bénédiction si elle ne vient pas.
La Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des États, qui est l'auteur du rapport sur la responsabilité de protéger, s'est demandé quelle est l'autorité qui devrait autoriser une intervention militaire. L'ONU constitue le premier choix, mais la question est de savoir si c'est le seul. Nous espérons que la situation actuelle au Darfour sera réglée par le Conseil de sécurité, mais il ne faudrait pas que l'incapacité de ce dernier d'intervenir empêche sa résolution.
La situation dans la région du Darfour exige que la sécurité soit rétablie. Il n'est pas possible de déployer utilement et efficacement l'aide humanitaire dans une région tant qu'une force militaire compétente n'est pas déployée pour empêcher que les civils qui ont besoin de cette aide humanitaire soient tués. Un environnement sûr faciliterait également les efforts diplomatiques visant à résoudre la crise dans la région et ailleurs au Soudan.
Notre premier ministre est aujourd'hui en visite au Soudan. Le gouvernement canadien voudra peut-être recommander une approche tridimensionnelle pour résoudre la crise qui sévit au Darfour ainsi que dans le sud et l'est du Soudan, de même que dans les autres pays où sont commises de graves violations des droits de la personne. Si le Canada intervenait militairement, cette approche nécessiterait une bonne coordination entre le ministère de la Défense nationale, les Affaires étrangères et l'Agence canadienne de développement international qui sont respectivement responsables de la défense, de la diplomatie et du développement.
Curieusement, mais malheureusement pour les Canadiens qui consultent le site Web du gouvernement du Canada, on a l'impression que ces trois activités, soit la défense, la diplomatie et le développement, qui sont très visibles en Afghanistan, sont menées là-bas indépendamment l'une de l'autre alors que les objectifs et les interventions des Affaires étrangères, des Forces canadiennes et de l'ACDI sont clairement décrits dans le site Web. À notre avis, ce site Web explique mal les liens et les synergies qui doivent exister entre les fonctions que remplissent ces trois ministères.
En donnant l'impression qu'il s'agit de missions distinctes, on ne montre pas que le travail extraordinaire des membres des Forces canadiennes et des autres forces militaires de l'ISAF et de l'opération « Enduring Freedom » en Afghanistan contribue de façon directe et essentielle au succès des missions diplomatiques et d'aide humanitaire.
En Afghanistan, l'aide humanitaire, c'est-à-dire la dimension développement, et la tenue d'élections démocratiques, qui représente la dimension diplomatie, n'auraient pas pu réussir sans la présence des forces militaires, soit la dimension défense.
Bien entendu, il faut reconnaître que certains problèmes sont associés à cette approche tridimensionnelle. Il faut notamment nommer un ministère responsable, s'entendre sur les principaux objectifs, et surtout, fournir des ressources adéquates.
La Conférence des associations de la défense estime que le Canada ne devrait pas tenter une approche tridimensionnelle à moins d'avoir la coopération de tous les ministères concernés et un centre de coordination vraiment fonctionnel où seront représentés tous les ministères et organismes gouvernementaux participants. Chacune des trois dimensions doit disposer des ressources voulues pour que cet effort soit couronné de succès ou même envisageable. Par exemple, l'insuffisance actuelle des ressources militaires a peut-être éliminé ou limité les options du gouvernement en ce qui concerne les initiatives humanitaires ou diplomatiques.
Le Soudan entre-t-il dans cette catégorie? Les Forces canadiennes manquent actuellement de personnel formé pour répondre à la demande, ce qui a eu notamment pour résultat que le gouvernement a décidé de réduire les engagements outre-mer afin de leur laisser le temps nécessaire pour se remettre d'un déploiement excessif.
Si l'approche tridimensionnelle devient un élément de la politique étrangère du Canada de demain, nous exhortons le gouvernement à faire en sorte que ces efforts soient suffisamment financés. Michael Ignatief a fait valoir, de même qu'Andrew Cohen dans son ouvrage intitulé While Canada Slept: How We Lost our Place in the World, la nécessité d'accroître les ressources allouées à ces trois dimensions si le Canada veut jouer un plus grand rôle dans le monde. La dimension défense est certainement essentielle pour une intervention humanitaire dans la région du Darfour. Mais de façon plus générale, le rétablissement de la sécurité par les forces de l'Unité africaine doit, sans aucun doute, être le premier objectif, du moins pour le moment. À cet égard, la CAD tient à bien préciser que les soldats ne sont pas des travailleurs sociaux armés. Les deux disciplines que sont la défense et le développement doivent être évidemment reliées, mais elles ne doivent pas être fusionnées. Ce principe s'appliquera certainement au déploiement des équipes de reconstruction provinciales en Afghanistan, qui sera prochainement annoncé.
Il est évident que les Nations Unies se sont révélées jusqu'ici incapables d'intervenir efficacement au Soudan. Nous espérons que le déploiement éventuel de nombreux contingents de l'Union africaine apportera la sécurité et la stabilité dont ce pays a grand besoin. Toutefois, la lenteur de ce déploiement et les pertes de vies humaines qui en résultent sont le triste résultat de l'absence de forces militaires suffisamment puissantes et facilement déployables. C'est un rôle que le Canada et les autres pays industrialisés, ceux du G-20, par exemple, pourraient jouer en appliquant le principe de la responsabilité de protéger et en apportant un soutien militaire suffisant aux forces de l'Union africaine pour sécuriser la région du Darfour grâce à une aide humanitaire et en déployant des efforts diplomatiques pour résoudre la crise interne. Notre premier ministre n'a cessé de réclamer un rôle plus important pour le Canada sur la scène mondiale. Un traité pourrait définir ce genre de rôle.
L'énoncé tant attendu de la politique du gouvernement à l'égard de la sécurité internationale devrait nous donner une idée précise de la politique étrangère et de la politique de défense du Canada. Nous exhortons le gouvernement à faire en sorte qu'un financement suffisant soit prévu pour l'application de ces politiques.
¿ (0920)
[Français]
Monsieur le président, mesdames et messieurs, sachez que la Conférence des associations de la défense reconnaît que la sécurité des citoyens est de toute première importance dans cette crise qui sévit au Soudan, non seulement au Darfour, mais aussi dans le sud et l'est de ce pays.
[Traduction]
Pour conclure, nous appuyons le déploiement d'une force militaire compétente de l'Union africaine pour rétablir la sécurité et protéger les civils innocents au Darfour. Nous croyons également qu'une politique étrangère tridimensionnelle donnerait au Canada l'occasion de jouer un rôle plus important dans le monde. Cela doit s'accompagner d'une augmentation des ressources disponibles pour les trois dimensions de cette politique. Dans ce contexte, je n'hésite nullement à souligner le sous-financement chronique dont souffrent le ministère de la Défense nationale et les Forces canadiennes, comme chacun sait. Le Canada doit se conduire en citoyen du continent nord-américain et du monde conscient de ses responsabilités. Les Canadiens n'attendent pas moins. Ils s'attendent également à ce que leur gouvernement donne aux hommes et aux femmes qui participent aux missions diplomatiques, humanitaires et militaires de notre pays à l'étranger les ressources dont ils ont besoin pour accomplir le travail qui leur est confié.
Merci beaucoup.
Le président: Merci, Général.
Le groupe de témoins suivant est composé de Kathy Vandergrift, directeur politique de Vision mondiale; Lina Holguin, d'Oxfam; Alex Neve, secrétaire-général d'Amnistie internationale et de Frank Jewsburry, des Amis canadiens du Soudan, qui comparaît à titre personnel.
Qui va prendre la parole? Je crois que c'est vous, madame Vandergrift, ou tout le monde veut-il parler?
Mme Kathy Vandergrift (directeur politique, Vision mondiale Canada): Y a-t-il du temps pour chacun de nous?
Le président: Nous verrons. Qui veut commencer?
Mme Lina Holguin (agente de représentation, OXFAM): Je vais commencer.
Mme Kathy Vandergrift: Ensuite ce sera moi.
Mme Lina Holguin: Monsieur le président et membres du comité, je voudrais d'abord vous remercier d'avoir invité Oxfam Québec et Oxfam Canada à venir parler de la grave crise humanitaire qui touche le Darfour.
J'étais au Darfour en octobre. J'ai été témoin de ce que Kofi Annan a qualifié de la pire crise humanitaire mondiale. J'ai parlé à des gens qui avaient tout perdu, qui n'avaient rien à manger, très peu d'eau à boire et juste un bout de plastique pour s'abriter. Oxfam travaille au Soudan depuis plus de 20 ans. Dans toutes nos activités humanitaires, nous cherchons à promouvoir le respect du droit humanitaire international et la protection des civils. Nous avons pour mission d'apporter une aide humanitaire indépendante en fonction des besoins.
Nous voudrions aujourd'hui inciter le gouvernement canadien à prendre tous les moyens à sa disposition pour assurer le respect du droit humanitaire international et la protection des civils du Darfour contre la violence, la coercition et les privations. Un des camps que j'ai visité quand j'étais au Darfour est celui de Kalma. Il est situé à 45 minutes de Nyala, la capitale du Sud Darfour. C'est le plus grand camp pour personnes déplacées du Darfour. Il avait été construit au départ pour 25 000 personnes, mais en juillet, il en abritait 50 000. En octobre, le nombre de réfugiés atteignait 93 000 et des gens continuaient d'arriver. Dans le camp de Kalma, les gens vivent dans des conditions misérables et souffrent de malnutrition, de diarrhées sanglantes et d'hépatite E. La menace d'épidémies de choléra ou de paludisme demeure un sérieux problème dans tout le Darfour.
La possibilité d'améliorer la situation dépend de la sécurité, mais la sécurité s'est dégradée depuis trois semaines. De nouvelles attaques ont été lancées contre des villages de l'ouest et du sud du Darfour et on assiste à une augmentation du banditisme et à de nouveaux combats entre groupes armés rivaux. Cela signifie que plus de 150 000 personnes sont privées de ravitaillement. Certaines villes ne sont accessibles à l'équipe d'Oxfam que par hélicoptère. Le manque de sécurité constitue une menace quotidienne pour les civils. Les femmes et les fillettes qui s'aventurent à l'extérieur des camps sont victimes de formes extrêmes de harcèlement et de violence, y compris de tabassage, d'enlèvement et de viol. Lorsque les hommes s'aventurent hors des camps, ils risquent de se faire tuer. Des gens terrifiés disent que la police et les soldats du gouvernement ont été incapables de les protéger contre ces attaques.
Oxfam travaille auprès des personnes déplacées pour voir quel est le meilleur moyen de répondre à leurs besoins essentiels en contribuant à leur protection. À Kass, dans le Sud Darfour, par exemple, Oxfam distribue du bois afin que les femmes n'aient pas besoin d'aller en chercher au risque de se faire violer.
Notre approche intégrée sur le plan de l'eau, de l'hygiène et de la santé publique nous permet d'aider plus de 370 000 personnes au Darfour et au Tchad, mais les ressources sont limitées. L'ampleur de la crise est énorme et nous avons de la difficulté à y faire face. La situation semble vouloir s'aggraver. Comme la saison des pluies s'est terminée prématurément, on s'attend à de mauvaises récoltes et à une pénurie de nourriture un peu partout au Darfour. Le Programme mondial pour l'alimentation estime que deux millions de gens auront besoin d'une aide alimentaire au cours des prochains mois.
Oxfam se réjouit que le premier ministre Paul Martin ait jugé prioritaire la crise au Darfour et dans l'ensemble du Soudan. Nous espérons qu'il maintiendra cette situation en tête de liste de ses priorités jusqu'à ce que la crise soit résolue et qu'une paix durable soit obtenue.
Étant donné que le Conseil de sécurité de l'ONU n'a pas réussi à s'entendre sur une solution plus énergique pour le Darfour, à Nairobi la semaine dernière, nous exhortons le Canada à poursuivre ses pressions sur toutes les parties au conflit pour qu'elles cessent leurs attaques contre les civils et s'entendent sur un moyen de parvenir à un règlement politique. Nous exhortons également le Canada à insister pour que le gouvernement du Soudan respecte ses engagements et ses responsabilités à l'égard de la protection des civils au Darfour et de la conclusion rapide des négociations politiques à Abuja et Naivasha.
Oxfam se réjouit de voir le Canada appuyer le déploiement de plus de 3 000 soldats de l'Union africaine pour superviser le cessez-le-feu et protéger les civils. Le Canada devrait exercer des pressions sur l'Union africaine pour accélérer le déploiement de cette force dans les régions particulièrement critiques du Darfour. L'UA devrait travailler à l'intérieur des camps comme celui de Kalma où des tirs ont lieu régulièrement et dans les autres endroits où les gens sont forcés de se réinstaller. Elle devrait également se déployer dans l'ouest du Darfour et sur les principales voies d'accès où la forte présence de groupes armés autour des villages et des camps maintient les gens en captivité.
¿ (0925)
L'aide du Canada, tant sous la forme d'une aide humanitaire que d'un soutien à l'Union africaine, a joué un rôle crucial pour protéger les personnes déplacées, mais il reste encore beaucoup plus à faire. Nous vous exhortons à accroître la contribution du Canada.
Les partenaires locaux d'Oxfam au Darfour m'ont aussi demandé d'exhorter le Canada à ne pas perdre de vue le défi encore plus grand qui est d'aider les Darfouriens à reconstruire leur vie et d'aider le Soudan à s'attaquer aux causes profondes du conflit. Le développement à long terme n'est pas possible aujourd'hui, mais la reconstruction doit commencer, même au milieu du conflit.
Quand j'étais à Kalma, une femme est venue me dire qu'elle se réjouissait de nous voir là. Elle m'a expliqué que la présence d'Oxfam augmentait sa sécurité. Notre présence offre peut-être une protection à court terme contre la violence et la coercition, mais cela ne suffira pas à moins que la loi, l'ordre et la justice ne soient rétablis. Cette responsabilité incombe au gouvernement du Soudan et à la communauté internationale.
La visite du premier ministre au Soudan a fait espérer que le Canada poursuivrait ses efforts en vue d'un règlement du conflit. Nous espérons qu'il aidera la communauté internationale à passer des simples promesses à des mesures concrètes.
Merci beaucoup.
¿ (0930)
Le président: Merci beaucoup madame. Muchas gracias. Merci.
Qui est le suivant?
Madame Vandergrift.
Mme Kathy Vandergrift: Monsieur le président, merci d'attirer l'attention sur le Soudan et de nous avoir invités à vous rencontrer.
Vision mondiale a travaillé au Soudan pendant plus de 20 ans, les années de vaches grasses comme les années de vaches maigres, mais il y a surtout eu des années de vaches maigres au Soudan. J'ai moi-même comparu devant votre comité trois fois, au cours des quatre dernières années, pour parler du Soudan. Le drame actuel fait la manchette des journaux, mais la crise au Soudan n'est pas nouvelle et ne sera pas de courte durée.
Au Canada, le Sudan Inter-agency Reference Group, une coalition d'une vingtaine d'organismes qui travaillent avec des partenaires au Soudan, réclame depuis plusieurs années une politique canadienne plus énergique sur le Soudan. En tant que responsable de cette coalition, je peux vous informer que nous comptons persister jusqu'à ce qu'une paix durable et le respect des droits de la personne règnent dans toutes les régions du Soudan. Cela devrait être également le principal objectif d'une politique canadienne.
Je crois utile d'informer le comité des changements qui ont été apportés à la politique canadienne depuis quelques années. Cela montre comment la politique étrangère du Canada aborde la question des droits de la personne. Je citerai seulement deux exemples.
Dans les procès-verbaux de votre comité, on trouve des déclarations de fonctionnaires canadiens qui disaient, il y a quelques années, que les violations des droits de la personne au Soudan étaient, à leur avis, une conséquence regrettable du conflit. Si le conflit était réglé, ces violations disparaîtraient.
Heureusement, cette façon de voir a changé. Il ressort des déclarations récentes que les violations des droits de la personne sont considérées comme une des causes du conflit et qu'il faut donc y mettre un terme pour pouvoir résoudre le conflit au lieu de le faire seulement après coup. La plupart des ONG se réjouissent de ce changement. Ses répercussions sur l'intervention du Canada justifient toutefois que votre comité se penche davantage sur la situation au Soudan et s'intéresse aux moyens de renforcer la politique canadienne à l'égard des droits de la personne à l'occasion du prochain examen de la politique internationale.
Deuxièmement, il y a moins d'un an, on hésitait à s'occuper du Darfour par crainte de répercussions sur le processus de paix Sud-Nord. La crise au Darfour aurait pu être évitée. Tous les signes avant-coureurs étaient présents et nous en avons informé notre gouvernement. La politique internationale et la politique canadienne ont manqué de cohérence. Après le déclenchement de la crise au Darfour, on n'a tenu aucun compte des violations du cessez-le-feu signalées dans le sud du pays, parce que tous les regards convergeaient vers le Darfour, ce qui compromettait le renforcement de la confiance dans le sud.
Les fonctionnaires nous montrent maintenant les graphiques d'un plan d'action pour l'ensemble du Soudan. C'est déjà un progrès. Nous nous réjouissons de voir que le gouvernement prend au sérieux les craintes au sujet des tensions dans l'est du pays. Une analyse mettant l'accent sur la gouvernance et le respect des droits de la personne dans l'ensemble du Soudan nous paraît souhaitable. Nous espérons que la stratégie adoptée ne permettra pas qu'on continue de manipuler l'opinion internationale pour éviter d'avoir à rendre compte des actes contraires au droit international. J'espère que cette approche caractérisera également les recommandations de votre comité.
Je crois que le comité a beaucoup de pain sur la planche. Du point de vue stratégique, je suggérerais qu'en centrant immédiatement son attention sur le Darfour, le Canada peut aider à créer des conditions propices au retour volontaire des populations qui ont été déplacées de force. La protection des civils demeure une priorité, mais elle ne doit pas se limiter à l'aide humanitaire et à la sécurité dans les camps. Personne ne souhaite que ces déplacements soient permanents.
Il est instructif de voir ce qui se passe de l'autre côté de la frontière, au nord de l'Ouganda. Plus de 1,6 million de personnes se trouvent également dans des camps PDIP. Un bon nombre d'entre elles sont là depuis plus de 10 ans et le monde les a oubliées.
Les gens du Darfour craignent de perdre leurs terres et la possibilité de semer, ce qui entraînera une famine et une dépendance à long terme vis-à-vis de l'aide internationale. Une stratégie de retour volontaire obligerait à soutenir davantage les forces de protection de l'Union africaine et de prêter attention à la façon dont elles sont déployées. Il faut pour cela évaluer les conditions de retour, insister sur un plan de retour volontaire et non pas de rétablissement forcé comme cela s'est fait ces dernières semaines, et soutenir ces personnes après leur retour. Il faut empêcher les déplacements forcés de populations. Ces manoeuvres réussissent dangereusement au Darfour à l'heure actuelle.
Dans le sud, le Canada doit prendre des mesures énergiques pour soutenir et renforcer la récente résolution du Conseil de sécurité sur le processus de paix. On demande qu'un accord de paix véritable soit conclu d'ici décembre, mais il y a là rien de nouveau. L'insistance et la persistance que la communauté internationale manifestera à l'égard de la mise en oeuvre des accords démontreront que la responsabilité de protéger n'est pas purement théorique. Dans les deux régions, on constate que les accords sont violés impunément.
¿ (0935)
Allez voir le site Web de l'Union africaine. Vous y trouverez des rapports de violations avec preuves à l'appui. Le récent rapport de Human Rights Watch rapporte des déclarations des soldats sur le terrain qui se disent découragés parce qu'ils surveillent et rapportent les violations sans que rien ne soit fait au niveau politique.
Dans le sud, la mise en place de mécanismes de surveillance a pris un certain temps. Des enquêtes ont été menées au cours de l'année écoulée. On a rapporté des violations du cessez-le-feu dans le royaume de Shilluk et ces violations ont donné lieu à de nouveaux déplacements de populations, à des attaques contre des travailleurs humanitaires et l'impossibilité d'acheminer de l'aide, longtemps après la signature de ces éléments de l'accord de paix. En ce qui concerne le Sud Soudan, la population touchée est inquiète, mais rien n'a été fait et sa confiance dans ces accords de paix est ébranlée.
Je parle surtout de ces régions en sachant fort bien qu'il peut y avoir une marge entre la conclusion d'accords de paix et le respect du droit international à l'égard des droits de la personne. C'est un sérieux défi.
Votre comité pourrait largement contribuer à renforcer la politique internationale du Canada en attirant l'attention sur ce défi, en insistant pour que le Canada ne sacrifie plus les droits de la personne, parce qu'il n'y aura pas de paix durable au Soudan si ces droits ne sont pas respectés, et en explorant certaines recommandations stratégiques pratiques.
L'objectif à atteindre à court terme serait le retour volontaire des personnes déplacées dans leurs foyers au Darfour. L'objectif à moyen terme serait la mise en oeuvre des accords de paix, y compris une amélioration de la gouvernance. À long terme, l'orientation du prochain examen de la politique internationale pourrait conduire à une politique canadienne plus énergique et plus pratique à l'égard des droits de la personne, ce qui pourrait avoir également des effets positifs ailleurs.
Pour terminer, je voudrais vous offrir notre aide pour renforcer les stratégies du Canada à l'égard de son engagement international dans ces régions. J'ai une simple observation à formuler et quelques renseignements supplémentaires à vous fournir sur la stratégie qui fait appel aux IFI et à l'allégement de la dette.
Notre groupe d'ONG a présenté au gouvernement canadien une liste de balises pour l'allégement de la dette. En fait, la réaction du ministère des Affaires étrangères a été positive et votre comité pourrait donc explorer cette solution. Avec nos autres collègues, nous allons aussi soumis cette stratégie à l'Union européenne. Il va falloir se montrer persuasifs, mais voyez également ce que les ONG de l'Union européenne ont proposé. Ils ont suggéré une série de balises plus complexes pour l'allégement de la dette et un réengagement avec les IFI.
Ce sont là quelques pistes que vous pourriez suivre.
Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Général, je crois que vous devez partir à 9 h 45. C'est bien cela?
Lgén Richard Evraire: Oui, mais le colonel Pellerin me remplacera.
Le président: Très bien. Nous allons continuer.
Qui est le suivant?
Alex Neve, au nom d'Amnistie internationale.
M. Alex Neve (secrétaire général, Section anglaise, Amnistie internationale (Canada)): Merci, monsieur le président.
Bonjour. Amnistie Internationale apprécie vivement de pouvoir comparaître aujourd'hui devant les membres du comité.
Le Darfour est, sans aucun doute, le théâtre d'une terrible tragédie humaine. Malheureusement, ce n'est qu'un des chapitres, parmi bien d'autres, de la tragique histoire des droits de la personne au Soudan. Comme pour bien d'autres catastrophes de ce genre, il y a eu de nombreux signes avant-coureurs, mais les autorités soudanaises et surtout, la communauté internationale, n'ont rien fait pour l'éviter. Depuis l'escalade du conflit au Darfour au début de 2003, plus de 50 000 personnes ont été tuées. Au moins 1,4 million personnes, qui vivaient principalement dans des localités agricoles, ont été forcées de quitter leurs maisons, leurs villages ont été brûlés et leurs troupeaux et autres possessions ont été volés. Des milliers de femmes ont été violées.
Enfin, ces derniers mois, la communauté internationale s'est intéressée de beaucoup plus près à la situation, mais la crise persiste. La situation des droits de la personne au Darfour demeure précaire et les abus continuent.
Un profond fossé sépare les personnes déplacées du Darfour qui, on le comprend, ont perdu toute confiance dans leur gouvernement et craignent de quitter leurs camps sans une protection internationale, et le gouvernement qui continue à nier l'étendue des tueries et de la violence ainsi que sa propre responsabilité à l'égard de la crise. Ce fossé ne pourra être comblé que si le gouvernement soudanais change radicalement d'attitude et si la communauté internationale poursuit et augmente son engagement.
Il y a un certain nombre de recommandations et d'initiatives concrètes que le Canada devrait préconiser dans le cadre des efforts essentiels à déployer pour protéger les droits de la personne au Darfour. Mes collègues ont déjà fait un certain nombre de suggestions. La présence du premier ministre au Soudan aujourd'hui même est une bonne occasion à saisir et nous avons tous communiqué nos recommandations au Bureau du premier ministre avant sa visite. L'engagement du Canada dans la crise du Darfour ne doit pas s'arrêter aujourd'hui.
Tout d'abord, il est certain que les abus ne cesseront pas tant que le gouvernement n'aura pas mis au pas les milices janjawids soutenues par l'armée, qui sont les principales responsables de la violence et de la violation des droits de la personne. À chaque occasion, le Canada doit faire comprendre très clairement au gouvernement soudanais qu'il doit agir immédiatement pour désarmer et démanteler les milices janjawids.
Nous déplorons que la Résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies, qui a été adoptée à Nairobi vendredi, ne mentionne pas explicitement cet objectif essentiel. Le Canada doit veiller à ce qu'on ne le perde pas de vue et à ce qu'on n'accepte aucune autre excuse ou retard à l'égard du désarmement ou du démantèlement des milices.
Deuxièmement, un embargo obligatoire sur les armes doit être imposé au gouvernement soudanais afin qu'aucune des parties au conflit du Darfour ne puisse recevoir de matériel militaire ou connexe. Cet embargo doit rester en vigueur jusqu'à la mise en place de garanties réelles pour protéger les civils contre la violence et les crimes de guerre. Pour le moment, il n'y a qu'un embargo peu efficace des Nations Unies qui couvre seulement les groupes armés et qui n'est pas accompagné d'un mécanisme d'application ou de supervision. Un nouvel embargo des Nations Unies devrait être accompagné d'un mécanisme de surveillance disposant de ressources suffisantes, y compris un groupe d'experts qui fera régulièrement rapport au Secrétaire général ainsi qu'au Comité des sanctions des Nations Unies. L'organisme de surveillance doit pouvoir déployer des enquêteurs internationaux ainsi que des observateurs sur le terrain, qui seront postés aux principaux points d'entrée du Soudan afin d'assurer le respect de l'embargo des Nations Unies. Le Canada devrait exhorter le Conseil de sécurité à prendre cette mesure.
Troisièmement, il faudrait faire davantage pour assurer la sécurité des civils. Le Canada a apporté un soutien financier important à l'Union africaine, mais il faut faire plus. Il est essentiel que le Canada prenne maintenant d'autres mesures pour que les observateurs de l'Union africaine au Darfour aient suffisamment de ressources et la formation voulue pour pouvoir s'acquitter énergiquement de leur mandat, aussi limité soit-il, afin de protéger les civils dont la sécurité est menacée.
Amnistie Internationale a appris que les observateurs de l'Union africaine qui étaient présents lorsque la police soudanaise a attaqué, battu et aspergé de gaz lacrymogène les personnes déplacées du camp de Al-Geer, il y a deux semaines, ne sont pas intervenus, à part une tentative de médiation verbale. Nous demandons qu'on enquête sur cet incident, mais cela soulève des questions inquiétantes quant à la capacité de ces observateurs à s'acquitter de leur mandat qui est de protéger les civils confrontés à la menace imminente de violences.
¿ (0940)
Le Canada devrait intensifier ses efforts pour que le soutien apporté soit adéquat et bien utilisé et déployé. Il devrait augmenter le niveau de l'aide accordée. L'objectif visé devrait être la présence d'observateurs de l'Union africaine dans toutes les unités administratives du Darfour.
La justice revêt une importance cruciale. Depuis des décennies, d'horribles violations des droits de la personne ont été commises impunément dans toutes les régions du pays. C'est cette impunité qui favorise d'autres crises comme celle du Darfour. il est donc essentiel que les responsables des exactions commises au Darfour soient traduits en justice et rendent des comptes. Il est temps de rompe le cercle vicieux de l'impunité au Soudan.
Cela n'a pas été fait jusqu'à présent. Amnistie Internationale continue de demander au gouvernement soudanais de respecter son obligation d'assurer la justice—et le gouvernement canadien devrait en faire autant. Toutefois, nous doutons tous sérieusement que les autorités soudanaises aient la capacité et le désir de le faire. Il est donc essentiel que la commission d'enquête internationale en cours propose diverses options pour assurer la justice au Soudan, y compris le recours à la Cour pénale internationale et l'établissement éventuel de tribunaux soudanais et internationaux.
Le Canada est reconnu comme un chef de file international de la campagne contre l'impunité et il devrait participer activement aux efforts qui visent à mettre en place un mécanisme approprié pour rendre la justice au Soudan.
¿ (0945)
[Français]
Finalement, il faut trouver une solution nationale à la crise du Soudan. La crise doit être abordée d'une manière globale, garantissant la protection et le respect des droits humains de tous les individus. La communauté internationale a déplacé son attention d'une région à l'autre pour parer au plus pressé plutôt que d'adopter une approche cohérente et globale de la situation dans le pays pris dans son ensemble. Des cas similaires d'attaques contre les civils et de déplacements forcés de populations continuent d'être signalés dans d'autres régions du Soudan. Il est donc essentiel que le Canada travaille avec d'autres gouvernements pour renforcer la protection des droits humains dans tout le pays et briser ce cycle.
[Traduction]
La situation au Soudan apparaît, depuis trop longtemps, comme une crise humanitaire massive et insoluble qui aurait pu être évitée. Amnistie Internationale espère que la visite du premier ministre aujourd'hui dans ce pays—une visite qui témoigne du degré d'inquiétude des Canadiens—sera suivie d'une action renforcée et d'une détermination à travailler avec la communauté internationale pour mettre un terme à la crise et instaurer au Soudan un système de gouvernance qui respectera les droits de la personne dans l'ensemble du pays.
Merci.
Le président: Merci beaucoup.
Monsieur Jewsbury.
Lcol Frank Jewsburry (Canadian Friends of Sudan): Merci, monsieur le président.
C'est pour moi un plaisir d'être ici, au nom des Amis canadiens du Soudan pour parler de certain nombre de choses.
Les Amis canadiens du Soudan croient qu'il y a trois solutions pour améliorer la sécurité au Soudan. Premièrement, il y a la signature de l'accord de paix dans le sud du Soudan et la mise en oeuvre de tous ces éléments. Deuxièmement—et je tire mon chapeau à Amnistie Internationale—il y a le désarmement et le démantèlement des milices janjawids. Troisièmement, il s'agit de modifier la mission de la force de l'Union africaine afin de lui confier un rôle plus énergique pour protéger les civils et de lui apporter le soutien voulu.
Au cours des prochaines minutes, je parlerai surtout de la force de l'Union africaine, étant donné qu'à notre avis, pour mettre fin à la crise au Darfour, il est indispensable que le gouvernement du Soudan honore ses engagements en désarmant et démantelant immédiatement les milices janjawids, comme il l'a accepté de le faire.
Cette force étrangère a été constituée lorsque, le 8 avril, le gouvernement du Soudan et les groupes rebelles ont signé un accord humanitaire de cessez-le-feu. En plus de la neutralisation des milices, l'accord prévoyait la cessation complète des activités militaires, un accès sans restriction de l'aide humanitaire aux personnes déplacées et aux réfugiés, la concentration des groupes rebelles armés dans des secteurs définis et la mise en place d'une commission du cessez-le-feu et d'une force de surveillance. À la fin mai, le gouvernement avait signé un accord prévoyant l'établissement de la commission et de la force de surveillance, et le déploiement de cette dernière a commencé en juin.
Cette petite force de surveillance n'a pas amélioré la situation. Elle a été renforcée en août. Finalement, à la fin octobre, on a accepté qu'elle soit portée de 300 personnes à 3 500 dont 2 300 militaires, 800 policiers et quelques civils. Ces déploiements ont débuté à la fin d'octobre. Ils se poursuivront au cours des prochaines mois et il faudra leur apporter davantage de soutien.
Si la sécurité est assurée à court terme, le mandat de la force de l'Union africaine doit être modifié pour inclure la protection des civils et cela exigera une force beaucoup plus importante. Comme vous le savez, le Soudan est le pays d'Afrique le plus vaste. Sa superficie est équivalente à celle des États-Unis, à l'est du Mississippi. La région du Darfour s'étend sur 1 500 kilomètres du nord au sud et près de 1 000 kilomètres d'est en ouest. La région dans laquelle la force de l'Union africaine est déployée s'étend sur 800 kilomètres dans chaque direction. C'est la distance entre Ottawa et Windsor et la superficie de la région équivaut à celle de l'Ontario au sud de Sudbury. C'est donc une région très vaste. Au Kosovo, l'OTAN a déployé 45 000 soldats dans une région de la taille du parc Algonquin alors que l'Union africaine en déploie 3 500 dans une région de la taille du sud de l'Ontario. Ce que nous lui demandons de faire n'est pas vraiment possible avec une force de cette taille. Il va falloir l'augmenter et elle aura besoin du soutien de la communauté internationale.
Le centre de soutien le plus près de cette zone opérationnelle est situé à plus de 1 000 kilomètres de distance. Il n'y a pas de routes et pas de communications électroniques par téléphone. Il n'y a pas de système radio. C'est comme si vous aviez une petite force déployée au Canada au nord de l'Arctique et soutenue à partir d'Ottawa. La base principale est située très loin.
Les conditions climatiques difficiles qui donnent de la boue pendant la saison des pluies et des vents de sable et de poussière pendant la saison sèche vont augmenter énormément les besoins en maintenance de cette force, beaucoup plus que ce que penseraient la plupart des gens. La demande de logistique et de maintenance va donc sérieusement augmenter, simplement pour que les véhicules, l'équipement et les hélicoptères puissent continuer à fonctionner.
Le plan initial prévoyait qu'une bonne partie de l'infrastructure nécessaire à cette force serait fournie par le gouvernement soudanais. Compte tenu du renforcement des troupes, nous ne pensons pas que ce soit possible. Le Canada a une certaine expérience du déploiement de troupes à une grande distance de l'infrastructure de soutien principale et les Forces canadiennes ont de bons systèmes de communications. Comme vous vous en souviendrez peut-être, le Canada s'est taillé une bonne réputation en assurant le soutien logistique des communications des forces des Nations Unies par le passé. Quand j'étais dans la bande de Gaza, nous faisions partie de ce soutien logistique et nous avions une bonne réputation. Il est temps de nous relancer dans ce genre d'activités.
¿ (0950)
Il vaut la peine de mentionner que la force de l'Union africaine aura à la fois des contingents francophones et anglophones de divers pays et que nous pouvons faire la liaison entre elles.
Nous savons que les Forces canadiennes viennent de commencer la pause opérationnelle dont elles ont grand besoin pour se reposer, se ré-équiper et s'entraîner. Elles ont été lourdement surchargées de travail et ont gravement manqué de ressources ces dernières années. Elles ont épuisé tout leur équipement et, surtout, leur personnel. Nous pensons qu'il est presque à bout de forces.
Nous reconnaissons également que le Canada ne doit pas oublier son engagement vis-à-vis de la brigade multinationale d'intervention rapide des forces en attente des Nations Unies. Cette force pourrait être déployée dans le cadre d'une force onusienne qui sera appelée à intervenir quand l'accord de paix sera signé au Sud Soudan. Nous croyons néanmoins qu'on pourrait mettre à la disposition de l'UA un nombre limité d'experts en logistique et communications ou autres experts techniques, des détachements de communications, des spécialistes des communications à longue portée du Régiment des transmissions de Kingston, de même qu'un détachement du Service de cartographie. Il faut, en effet, disposer de cartes suffisamment exactes, qui n'existent pas pour la région du Darfour, pour assurer le succès d'une force de surveillance s'il faut faire des rapports et localiser un lieu géographique sur le terrain. Ce sont donc des ressources que nous jugeons essentielles.
Nous savons que le Canada s'est engagé à apporter une contribution monétaire importante à cette force et la fourniture d'hélicoptères est un excellent moyen d'assurer la mobilité opérationnelle indispensable, mais le Canada a mis au point un système de contrats civils baptisé CANCAP pour soutenir les missions militaires sur le terrain. La sécurité au Darfour est équivalente ou supérieure à celle qui règne en Afghanistan où CANCAP a donné de bons résultats. La capacité des Forces canadiennes de déployer la logistique nécessaire pour soutenir la force de l'Union africaine est peut-être limitée, mais ces limites ne s'appliquent pas à CANCAP ou aux entreprises équivalentes, sauf sur le plan financier.
Pour conclure, les Amis canadiens du Soudan se joignent aux autres témoins pour recommander d'exercer des pressions sur le gouvernement soudanais afin qu'il commence par signer l'accord de paix dans le Sud Soudan; que l'on exerce des pressions sur le gouvernement du Soudan par tous les moyens possibles pour qu'il désarme et démantèle les milices janjawids; que la mission de la force de l'Union africaine soit modifiée pour inclure la protection des populations civiles et qu'elle soit élargie selon les besoins; et que le Canada augmente son soutien à la mission de l'Union africaine en fournissant des conseils techniques et une logistique pour les communications, la cartographie et les contrats de soutien logistique.
J'avais préparé une déclaration liminaire que je n'ai pas lue. Je peux la remettre aux membres du comité s'ils le désirent.
Merci beaucoup, monsieur le président.
¿ (0955)
Le président: Merci, colonel Jewsbury.
Je crois que la seule personne qui n'a pas encore eu la parole est Nicolas Palanque, qui représente CARE Canada.
[Français]
Merci d'être venu. Vous pouvez parler en français si vous le voulez.
M. Nicolas Palanque (chef des opérations d'urgence, CARE Canada): Merci, monsieur le président. Madame et messieurs les membres du comité, CARE est honoré de pouvoir témoigner ce matin devant vous.
[Traduction]
Alors que mes collègues ont parlé de la situation au Soudan, je voudrais attirer l'attention du comité sur la crise au Tchad.
Comme vous le savez peut-être, environ 200 000 réfugiés se trouvent actuellement dans l'est du Tchad. La majorité d'entre eux vivent dans 11 camps qui sont gérés par divers ONG et organismes internationaux. Nous travaillons tous sous la direction générale du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés et quelques organismes travaillent uniquement à l'extérieur des camps auprès des réfugiés qui ont refusé d'aller dans les camps et qui vivent le long de la frontière. La plupart de ces camps sont surpeuplés, comme c'est le cas au Soudan. Certains d'entre eux ont été construits pour abriter 8 000 réfugiés, mais 12 000 ou 13 000 personnes y sont entassées. L'emplacement de ces camps est loin d'être idéal pour ce qui est des droits fondamentaux et des besoins des réfugiés.
Les pluies ont aggravé les conditions sanitaires très médiocres et ont augmenté le risque de maladies graves. Il y a eu des épidémies de choléra et l'hépatite E a récemment fait son apparition dans quelques camps. Un de nos coordonnateurs expatriés a dû être évacué vers Paris pour se faire soigner. Le niveau de malnutrition est un des plus élevés de la région. Centers for Disease Control and Prevention estime que 36 p. 100 à 39 p. 100 de la population souffre de malnutrition dans l'est du Tchad, et cela vaut tant pour les réfugiés que pour la population locale.
L'est du Tchad a une capacité d'absorption très limitée et même avant la crise c'était l'une des régions les moins développées du pays. Au départ, la population s'est montrée très accueillante et prête à aider les réfugiés avec qui elle partage les mêmes origines ethniques et historiques et a des liens très étroits, mais en l'absence d'aide de la part du gouvernement tchadien ou de la communauté internationale, les tensions sont maintenant nombreuses.
Il y a plusieurs questions importantes à soulever à propos de la situation au Tchad. Premièrement, il nous paraît essentiel que la communauté internationale et le Canada cherchent à prévenir l'instabilité politique dans l'est du pays. Depuis mai dernier, deux tentatives ont été faites pour renverser le président et le gouvernement. Le mécontentement qui existait déjà au Tchad avant la crise actuelle a été exacerbé en partie par l'afflux de réfugiés et ses répercussions sur les infrastructures locales. Le gouvernement local, les gouverneurs et les préfets se sont montrés coopératifs dans une certaine mesure, mais la médiation directe du président a été nécessaire à quelques reprises pour calmer des situations très tendues. Les contingents de l'armée et de la gendarmerie tchadiennes ont été très largement renforcés à Abéché et à d'autres endroits le long de la frontière.
Dans de nombreuses régions, le couvre-feu a été décrété à la suite d'une série d'incidents entre les réfugiés et la population locale. L'Armée française, qui a pris position au Tchad, surtout à Abéché, en vertu d'accords bilatéraux entre la France et le Tchad, assure la stabilité de la région. Elle gère les aéroports et patrouille intensivement la frontière pour « surveiller les incursions potentielles des milices ghanéennes et réduire la présence d'éléments armés inconnus ». En parlant avec des responsables militaires français, j'ai appris qu'une de leurs fonctions consistait à réduire la circulation des petites armes dans la région et de réduire le trafic transfrontalier vers le Soudan.
Il est essentiel de faire en sorte que le Tchad ne soit pas déstabilisé davantage par la crise, faute de quoi la communauté internationale pourrait avoir à faire face à une crise régionale aux conséquences humanitaires dévastatrices. D'autre part—et c'est peut-être une des façons de l'éviter—il est important de trouver très rapidement une solution pacifique au conflit. Je ne répéterai pas ce que mes collègues ont dit, mais j'exhorte le Canada à se servir de tous les moyens diplomatiques, et peut-être économiques, d'amener toutes les parties en cause à faire régner la paix dans l'ensemble du Soudan, aussi bien le Sud Soudan que le Darfour ou l'est du pays qui est en train de s'embraser.
Troisièmement, lorsqu'un règlement pacifique aura été conclu, il faut pouvoir garantir aux gens qu'ils pourront retourner chez eux en toute sécurité.
À (1000)
Enfin, comme je dispose de peu de temps, nous voudrions que le Canada veille à ce que le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés utilise tous les moyens à sa disposition pour s'acquitter de sa principale mission qui est de protéger les réfugiés. Il est scandaleux qu'il lui ait fallu un mois pour déployer des forces de maintien de la paix dans l'est du Tchad.
Merci beaucoup.
[Français]
Le président: Merci beaucoup. Je regrette énormément que vous ayez tous eu aussi peu de temps, étant donné qu'il s'agit d'un sujet tellement sérieux.
Je cède maintenant la parole à M. Day.
[Traduction]
M. Stockwell Day (Okanagan—Coquihalla, PCC): Merci, monsieur le président.
Je remercie infiniment chacun d'entre vous, non seulement pour vos exposés, mais aussi pour votre patience et votre persévérance. Malgré ce que vous avez vu et ce que vous savez quant aux mesures à prendre, vous faites preuve d'une grande patience devant l'inertie que vous constatez autour de vous.
Certains membres du comité ne sont pas ici aujourd'hui. C'est en partie à cause du débat d'urgence d'hier soir qui s'est prolongé tard dans la nuit au sujet d'une autre crise qui se produit actuellement en Ukraine.
Monsieur le président, je voudrais faire quelques observations, et cela sans sectarisme. Des critiques ont été adressées non seulement aux Nations Unies, mais à notre propre gouvernement. Je crois donc que nous sommes unanimes à vouloir que les choses bougent. Je crois que mes collègues seront d'accord avec moi pour dire qu'il n'est pas facile d'écouter raconter ce qui se passe sans éprouver un sentiment de responsabilité.
Certains thèmes sont revenus dans tous vos propos. Il est intéressant que des pacifistes, des travailleurs de l'humanitaire et des soldats soient réunis ici, parce qu'en temps de crise, les soldats et les travailleurs de l'humanitaire voient les mêmes choses en même temps et veulent qu'elles soient évitées et qu'elles ne se reproduisent plus jamais.
Quand Lina parle de deux millions de personnes dans le besoin, quand Alex parle d'une résolution de l'ONU qui ne mentionne toujours pas la question des milices janjawids et quand Kathy dit que ces groupes ont comparu trois fois devant notre comité, cela montre que nous devons agir. Aussi petit notre comité soit-il, nous pouvons nous entendre sur le texte d'une résolution, la présenter au Parlement et voir les choses bouger.
J'ai préparé une résolution. Elle s'inspire en partie des paroles et des témoignages de certains d'entre vous, mais je veux laisser à mes collègues le temps de poser leurs questions.
Sachez que lorsque nous en avons discuté à notre réunion de planification, la semaine dernière, nous étions d'avis que nous avions suffisamment parlé et suffisamment écouté, que nous n'avions pas de solution parfaite, mais qu'il fallait faire quelque chose. C'est dans cet esprit que la réunion d'aujourd'hui a été convoquée.
Je vais attendre pour proposer ma résolution. Peu m'importe si elle est modifiée et peu m'importe sous quel nom elle sera présentée, mais elle propose des mesures qui s'inspirent directement de ce que vous avez dit. Je voudrais que mes collègues l'examinent dans l'intervalle, monsieur le président.
Je ne vais pas prendre de temps pour poser des questions. J'aimerais voir si mes collègues ont quelque chose à demander ou à dire avant que nous ne passions à cette motion. Il y a toutefois cinq mots qui me hantent. Trois ou quatre d'entre vous les ont répétés. Ces cinq mots sont simplement : « Cela aurait pu être évité ».
Quand je pense à ces gens qui n'ont plus de toit, alors qu'ils pourraient vivre dans leurs maisons, qui sont malades et mourants, comme l'a dit Nicolas, alors qu'ils pourraient être en bonne santé, à ces femmes qui ont été violées et dépouillées de leur dignité et qui pourraient vivre en paix aujourd'hui, à ces gens affamés ou qui sont déjà morts de faim et qui pourraient avoir l'estomac plein, je suis hanté par ces mots : « Cela aurait pu être évité ».
Si nous pouvions garder ces mots à l'esprit pendant que nous discutons autour de cette table, à un moment donné je voudrais présenter une résolution, monsieur le président.
Merci.
À (1005)
L'hon. Ed Broadbent: J'invoque le Règlement, monsieur le président.
Le président: Monsieur Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent: Monsieur le président, il serait utile que la résolution de mon collègue nous soit soumise à l'avance, parce qu'elle pourrait nous fournir un contexte pour interroger nos témoins qui nous ont apporté des renseignements nouveaux. Je crois que ce serait utile.
[Français]
Le président: Êtes-vous d'accord sur cela?
Mme Diane Bourgeois (Terrebonne—Blainville, BQ): Je n'y vois pas d'objections, pourvu que cela ne nous empêche pas de poser nos questions et de faire nos observations.
Le président: Vous acceptez?
Mme Diane Bourgeois: Excusez-moi. Elle pourrait être mise sur la glace pour la durée de la rencontre.
Le président: Monsieur, est-ce que vous êtes d'accord?
[Traduction]
M. Navdeep Bains (Mississauga—Brampton-Sud, Lib.): Je partage ce sentiment, du moment que nous puissions poser quelques questions également. Mais je crois que ce serait un bon point de départ.
M. Stockwell Day: Je vais la distribuer.
Le président: Voulez-vous la lire afin que tout le monde dans la salle puisse l'entendre?
M. Stockwell Day: Je vais la lire. Comme je viens de la rédiger, je n'ai pas la version française, mais l'interprète pourra la traduire au fur et à mesure que je la lirai. Je vais la distribuer.
Encore une fois, vous pouvez y apporter des modifications. Je crois seulement que nous devons agir.
Certains d'entre vous entendront ou verront peut-être quelque chose qui manque dans ce texte, mais j'essaie de faire bouger les choses.
La motion serait formulée en ces termes :
Que le Canada mise sur son rôle de chef de file au sein du G-20, ses liens étroits avec les dirigeants actuels de la Banque mondiale et du FMI et la visite prochaine du président George W. Bush pour en arriver à une entente subordonnant toute aide fournie à l'égard de la dette extérieure contractée par le Soudan à des gestes réels posés par le gouvernement de Khartoum en vue de faire cesser les opérations menées par les milices janjawids contre la population civile du Darfour, de mettre en oeuvre les accords de paix et de négocier de bonne foi avec les représentants des différents groupes au Darfour, et que le Canada prenne aussi des mesures concertées mettant à contribution notamment les ministères des Affaires étrangères, du Développement et de la Défense pour aider l'Union africaine à régler la crise au Soudan. |
Le président: C'est tout à fait inattendu, mais M. Mendes a-t-il quelque chose à dire, ou quelqu'un d'autre?
M. Errol Mendes: Je suis entièrement d'accord.
M. Stockwell Day: Je pensais bien que cela vous rappellerait quelque chose, monsieur Mendes. Certaines de vos paroles se retrouvent dans ce texte.
Le président: Quelqu'un d'autre parmi les témoins a quelque chose à dire?
Madame Vandergrift.
Mme Kathy Vandergrift: Je ne sais pas s'il reste du temps avant que vous l'adoptiez. J'aurais aimé savoir à l'avance que vous imposeriez ces conditions, car comme je l'ai dit, les ONG ont proposé des balises pour l'allégement de la dette dans le cadre de l'Union européenne. Il vaudrait donc la peine de voir quelles étaient ces conditions, car elles avaient été préparées avec soin. Je ne les ai pas sous la main. Je pourrais vous les communiquer, mais malheureusement je ne les ai pas ici.
À (1010)
[Français]
Le président: Madame Bourgeois.
Mme Diane Bourgeois: Merci, monsieur le président.
Mesdames et messieurs, merci beaucoup d'être là ce matin et de nous parler de la réalité, de ce qui se passe sur le terrain.
On me corrigera si j'ai mal compris, mais je suis très étonnée que la représentante de Vision mondiale Canada, Mme Vandergrift, nous dise que ce comité-ci examine la situation du Soudan depuis quatre ans. Cela fait trois fois que vous vous présentez devant le comité, si j'ai bien compris, et cela m'étonne qu'on ne soit pas intervenu avec des mesures plus énergiques et que le comité n'ait pas pu faire progresser le travail du Canada face à la situation du Soudan. J'aimerais que vous me répondiez tout à l'heure. Je vais vous poser tout de suite mes questions parce que j'ai peur de manquer de temps.
Ma deuxième question s'adresse à M. Mendes. Dans votre document, vous dites:
Le gouvernement de Khartoum, au Soudan, empêche la communautéinternationale de mettre fin aux crimes contre l’humanité et au génocidequ’il a lui-même orchestrés au Soudan. |
J'aimerais que vous m'expliquiez ce que vous entendez par « empêche ». Il y a de petites choses que je n'ai pas comprises.
M. Errol Mendes: À quelle page?
Mme Diane Bourgeois: C'est le document intitulé « Le rôle essentiel des institutions financières internationales et des groupes de créanciers pour mettre fin aux crimes contre l'humanité et au génocide au Soudan ». À la première page, vous utilisez le mot « empêche », et je veux que vous me donniez plus de détails.
Troisièmement, j'aimerais faire un commentaire à l'intention de M. le président. Je suis nouvelle au comité et je ne sais pas si cela se fait, monsieur le président. Si nous sommes saisis de la situation au Soudan ce matin, c'est grâce à vous. C'est parce que vous y tenez énormément. Ce matin, des experts qui sont allés sur le terrain, des gens de grande valeur sont venus nous faire part de trois ou quatre éléments quant aux mesures que doit prendre le gouvernement, et ils sont d'accord sur ces éléments. Je pourrai en faire la liste tout à l'heure.
Je ne peux pas dire que je n'aime pas la proposition de mon collègue du Parti conservateur, mais je la trouve vague. Je voudrais que nous allions plus loin. Je voudrais qu'avant de sortir d'ici, nous ayons mis sur papier des propositions que notre comité pourra transmettre aux comités qui s'occupent de la justice, des droits de la personne et du commerce international. Il pourra même en saisir directement et le plus rapidement possible le bureau du premier ministre, lequel est actuellement au Soudan. Ainsi, les gens qui sont venus ce matin, qui se sont déplacés et qui ont eu la gentillesse de nous brosser un tableau complet et très réel de ce qui ne passe là-bas ne partiront pas d'ici sans avoir eu l'assurance que le comité va poser des gestes concrets pour améliorer le respect des droits humains et aider la population et les ONG qui travaillent sur le terrain.
Merci, monsieur le président. J'attends vos réponses.
[Traduction]
Le président: Monsieur Mendes.
[Français]
M. Errol Mendes: Madame Bourgeois, permettez-moi de vous répondre en anglais.
[Traduction]
C'est une question très importante et j'aimerais bien disposer d'une heure de plus pour en parler. Le gouvernement soudanais a lié les mains à la communauté internationale en l'empêchant, comme l'a dit mon collègue et ami Alex Neve, de prendre des mesures véritables à l'égard des crimes contre l'humanité et le génocide. Il joue une carte dont nous n'avons pas du tout parlé jusqu'ici. Il a des alliés très solides dont un sur lequel il sait pouvoir compter pour s'opposer à toute action du Conseil de sécurité et je veux parler de la Chine.
Voulez-vous des explications supplémentaires ou est-ce déjà une évidence?
À (1015)
M. Stockwell Day: Non, allez-y, s'il vous plaît.
M. Errol Mendes: La Chine a beaucoup investi dans les champs de pétrole et de gaz du Sud Soudan. D'après mes sources de renseignements, mes contacts, elle participe activement à la construction de routes et d'une infrastructure qui pourraient être également utilisées par l'armée dans le sud du Soudan et peut-être aussi au Darfour. Le Soudan compte beaucoup sur le fait que la Chine—après ce qui s'est passé hier, peut-être aussi la Russie—pourrait s'opposer à toute résolution du Conseil de sécurité. Voilà pourquoi les résolutions de Nairobi étaient très faibles, comme l'ont dit mes amis. En ce qui concerne le sud, On a simplement convenu de conclure un accord. Nous verrons ce qui se passera le 31 décembre.
Je partage entièrement l'opinion de mon collègue Alex Neve pour dire que le libellé de la résolution sur le Darfour—c'est ce que j'indique dans mon mémoire—est tellement faible qu'il ne vaut pas le papier sur lequel il est écrit. Cette résolution menace simplement de sanctions toute partie qui ne respecterait pas ses engagements. En réalité, cela ne veut rien dire.
Voilà pourquoi j'ai décidé, il y a un certain temps, de ne pas mettre l'accent sur les solutions humanitaires ou militaires à cette crise, mais de voir quel est le talon d'Achille de ce gouvernement tout à fait machiavélien qui agit à l'extérieur des limites de la civilisation. Quel est son talon d'Achille et comment s'en servir pour le ramener à la raison? J'en suis venu à la conclusion qu'il s'agissait de sa dette extérieure.
[Français]
Est-ce que c'est une réponse adéquate pour vous, madame Bourgeois?
Mme Diane Bourgeois: Oui, c'est excellent. Merci beaucoup.
[Traduction]
Le président: Madame Vandergrift.
Mme Kathy Vandergrift: Nous pourrions parler longtemps des enjeux politiques, mais très rapidement, cela nous ramène à la question que j'ai soulevée, à savoir dans quelle mesure on peut insister sur les droits de la personne tout en cherchant à obtenir un accord de paix. Je tiens à reconnaître le rôle que joue le gouvernement canadien en soutenant le processus de paix de l'Autorité intergouvernementale pour le développement dans le sud. Il a apporté, pour ce faire, de nombreuses ressources et a fait un excellent travail diplomatique sur ce dossier. Pendant un certain temps, il y a eu beaucoup de difficultés parce que Talisman Energy a investi au Soudan, ce qui a suscité la controverse.
La dernière fois que nous sommes venus ici, les membres de votre comité espéraient faire un voyage au Soudan. Nous leur avons dit ce qu'ils pourraient aller voir et en quoi cela pourrait éclairer l'élaboration de la politique canadienne. Les événements qui se sont produits au Canada ont empêché ce voyage. Je trouve encourageant que le comité soit déterminé à aller jusqu'au bout cette fois-ci, parce que la situation au Soudan exige ce genre d'action de la part d'un comité des droits de la personne. En tant que parlementaires, il y a de nombreux domaines dans lesquels vous pourriez jouer un rôle très efficace.
Je suis certainement d'accord en ce qui concerne la Chine. À ce sujet, je me réjouis de voir que Paul Martin, notre premier ministre, a soulevé la question en même temps que les questions commerciales à l'APEC, quand les Chinois étaient là. Je crois que c'est une bonne chose. Quand nous avons rencontré les représentants du gouvernement avant le départ, nous avons demandé ce que le Canada pouvait faire pour influencer la Chine, de même que la Russie qui expédie beaucoup d'armes vers le Soudan.
Par conséquent, nous devons voir quelle est l'influence que le Canada pourrait avoir sur les autres acteurs. La position de l'Union européenne au sujet du Soudan a été problématique à certains égards. Il y aurait peut-être certaines choses que le Canada pourrait faire également sur ce plan-là.
Le président: Quelqu'un d'autre a-t-il quelque chose à ajouter?
Colonel Jewsbury.
Lcol Frank Jewsburry: Oui.
Un des membres d'Amis canadiens du Soudan a également étudié la situation en tenant compte du fait que deux des principales présences étrangères au Soudan, l'Inde et la Chine, sont là à cause du pétrole. Il faut les rallier à notre cause si nous voulons avancer.
Le Canada entretient, je crois, des relations assez bonnes avec la Chine et l'Inde et peut donc les approcher.
L'autre suggestion se rattachait à la dette extérieure. Si nous pouvions trouver un moyen de mettre en mains tierces les recettes pétrolières en assurant à l'Inde et à la Chine qu'elles obtiendront quand même le pétrole, ces revenus pourraient servir à défrayer, du moins en partie, le coût de la mission de l'Union africaine et de l'aide humanitaire qui doit être apportée au Darfour. Ainsi, le Soudan n'aura rien à gagner s'il ne règle pas la situation.
Cette solution a été présentée comme quelque chose de réalisable. Je ne sais pas si c'est faisable ou non. Ce serait aux économistes et à d'autres de se prononcer.
Je vois le professeur secouer la tête et ce n'est donc pas possible à court terme. Ce serait peut-être quand même un moyen d'amener les Chinois et les Soudanais à céder pour des raisons humanitaires, du moment que leur approvisionnement en pétrole n'est pas compromis.
À (1020)
Le président: Merci, Colonel.
[Français]
Est-ce que vous avez terminé, madame Bourgeois?
Mme Diane Bourgeois: Merci beaucoup. Je reviendrai plus tard.
[Traduction]
Le président: Monsieur Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent: Merci.
Je voudrais, moi aussi, remercier tous ceux qui ont pris la parole ce matin. Tout le monde aura remarqué que leurs propos étaient très similaires. Bien entendu, il n'y avait pas de répétitions inutiles. Il n'est pas difficile de s'entendre sur cette question, du moins sur un certain nombre des sujets que les divers témoins ont abordés.
Je voudrais toutefois revenir à la résolution, si vous le permettez, et remercier mon collègue du Parti conservateur de l'avoir présentée. Je proposerais trois petits amendements, si vous le voulez bien. C'est ce qu'on pourrait appeler des amendements amicaux, qui découlent de ce que nous avons entendu ce matin, et qui préciseront davantage cette résolution que je trouve excellente. Je suis convaincu que tous les partis représentés au comité peuvent s'entendre sur cette résolution.
Je commencerais par la mention qui est faite des milices. Je préférerais un libellé plus énergique et parler des mesures que le gouvernement de Khartoum doit prendre pour « désarmer complètement les milices » et non pas simplement « faire cesser les opérations menées par les milices ». Je crois que cela souligne un peu plus les mesures à prendre contre la violence qui continue.
M. Stockwell Day: Votre intention est certainement amicale. Je ne sais pas si du côté militaire, quelqu'un a quelque chose à ajouter. À votre connaissance, les milices du Soudan sont-elles prévues dans la constitution?
Non? Très bien. Si c'est le cas, je n'y vois pas d'objection.
Le président: Oui, monsieur Neve.
M. Alex Neve: Je ne sais pas si je peux faire cette proposition.
Le président: Nous sommes un groupe amical.
M. Alex Neve: Je suggère seulement d'ajouter « désarmer et démanteler », car je crois important non seulement qu'elles soient désarmées, mais également démantelées ou dissoutes, si vous préférez.
L'hon. Ed Broadbent: Un de ces deux mots serait sans doute redondant… Pourquoi ne pas dire à la fois « désarmer et démanteler »?
Le président: Très bien.
M. Alex Neve: Oui.
L'hon. Ed Broadbent: J'ajouterais ensuite deux choses à la fin de la résolution et je vais les lire lentement. D'abord, je propose que le Canada prenne des mesures pour que les responsables des graves violations des droits de la personne au Soudan soient traduits en justice. Cela réglera la question de l'impunité, que je crois très importante.
Le président: Est-ce acceptable?
M. Stockwell Day: C'est entièrement acceptable, monsieur le président.
L'hon. Ed Broadbent: Et je propose ensuite que le Canada prenne des mesures aux Nations Unies pour l'imposition d'un embargo total sur les ventes d'armes au Soudan.
Le président: Colonel Pellerin, voudriez-vous en parler?
Col Alain Pellerin (directeur exécutif, Conférence des associations de la défense): Pas vraiment. Je suis d'accord avec le principe d'un embargo total. Le problème que pose un embargo dans un pays de la taille du Soudan, comme l'a mentionné le colonel Jewsbury, c'est qu'il n'est pas facile de le faire respecter.
L'hon. Ed Broadbent: Monsieur le président, si nos experts militaires qui sont ici, ou d'autres personnes, ont des changements à proposer à ce libellé, je serais prêt à les entendre.
À (1025)
Col Alain Pellerin: Le libellé me paraît acceptable…
L'hon. Ed Broadbent: Mais c'est la mise en oeuvre, n'est-ce pas?
Col Alain Pellerin: …c'est simplement que la mise en oeuvre d'une telle…
M. Alex Neve: Si je peux ajouter quelque chose, pour ce qui est de la mise en oeuvre et de l'application, il serait peut-être utile de souligner qu'il faut non seulement un embargo, mais également la mise en place d'un mécanisme de surveillance efficace.
Le président: Pouvons-nous l'ajouter également?
Monsieur Broadbent, voudriez-vous l'ajouter?
L'hon. Ed Broadbent: Oui, certainement. Si nous nous arrêtons un instant, le greffier pourrait peut-être insérer les mots voulus pour ajouter un mécanisme de surveillance.
Monsieur le président, pour en revenir à la résolution, deux de ces trois ajouts me semblent être des amendements amicaux qui rendraient les choses plus concrètes et tiendraient compte de certaines des opinions formulées par les témoins. J'invite toutefois nos témoins… Ont-ils tous reçu copie, ainsi que les membres du comité, du texte de la résolution?
Le président: Non.
L'hon. Ed Broadbent: Ils ne l'ont pas reçu. Cela pourrait être utile, car comme je l'ai déjà dit, je crois qu'il s'agit d'une excellente résolution. Elle est brève, mais si les témoins pouvaient en recevoir copie, ce qui ne serait pas bien long, ils pourraient peut-être trouver des choses à ajouter sur lesquelles nous pourrions facilement nous mettre d'accord.
Le président: Pouvons-nous donc laisser cette motion de côté jusqu'à la fin de la réunion?
L'hon. Ed Broadbent: Absolument.
Le président: Il nous reste une demi-heure. Avez-vous des questions à poser aux témoins?
L'hon. Ed Broadbent: Non, pas pour le moment. J'ai pris beaucoup de notes pendant leurs exposés et je n'ai pas d'autres questions.
Le président: Monsieur Bains.
M. Navdeep Bains: Merci beaucoup, monsieur le président.
Tout d'abord, je voudrais remercier tous nos témoins et, comme mes collègues, leur dire que nous apprécions leurs opinions éclairées sur cette question.
Tous ceux qui ont pris la parole ont parlé des graves violations des droits de la personne, des milliers de gens qui sont tués et des millions de personnes déplacées. Je tiens à dire que, comme mon collègue, je suis très déçu de voir que le gouvernement ou le comité, du moins par le passé, n'a pas pris de mesures énergiques. Si nous en avons pris, elles n'étaient pas aussi énergiques qu'elles auraient dû l'être et il est très décevant de voir que vous soulevez les mêmes problèmes depuis des années sans que nous n'ayons pris de mesures concrètes. Je tiens à dire très clairement que je suis très déçu. Toutefois, je peux voir que nous sommes tous prêts aujourd'hui à adopter une motion qui soulignera certains des problèmes dont on a parlé ici aujourd'hui.
J'ai des questions à poser. Elles sont au nombre de trois et quiconque voudra y répondre pourra le faire. Je sais que M. Jewsbury a beaucoup parlé du rôle de l'Union africaine au Soudan. Je vais donc poser toutes mes questions et vous pourrez y répondre si vous le désirez.
Tout d'abord, j'ai une question concernant le rôle de l'Union africaine. A-t-elle les compétences voulues? Nous allons certainement lui fournir des ressources financières et autres, mais possède-t-elle les compétences, les connaissances nécessaires pour mettre sur pied une mission de maintien de la paix viable dans cette région, pour une période prolongée?
Deuxièmement, je trouve très inquiétant que le gouvernement soudanais nie ce qui se passe avec les milices janjawids. Dans quelle mesure pouvons-nous lui faire confiance?
Cela m'amène à ma troisième question. Si nous allégeons sa dette, comment être certains qu'il n'en profitera pas pour financer davantage ce genre de génocide? Car il faut reconnaître qu'il est en plein déni. Nous allons éliminer sa dette massive, mais quelles garanties avons-nous? Si nous ne pouvons pas faire confiance à ce gouvernement, j'hésiterais beaucoup à réduire la dette d'un tel régime.
Voilà mes inquiétudes. J'aimerais vraiment savoir ce que vous en pensez.
Mme Kathy Vandergrift: La capacité de l'Union africaine pose certainement des questions, mais nous sommes nombreux à croire qu'il est important que les dirigeants africains s'occupent de cette situation. Nous pensons donc qu'il faut renforcer et soutenir le leadership africain au lieu du contraire. Il est certainement souhaitable que les autres pays d'Afrique dirigent cette action.
Notre position est donc très importante. D'après certaines discussions que nous avons eues, j'ai l'impression que les membres du ministère de la Défense nationale jouent un rôle utile. Leur mandat doit toutefois être renforcé par le Conseil de sécurité et il doit être soutenu.
En ce qui concerne vos inquiétudes au sujet de l'allégement de la dette et du financement du génocide, c'est une chose à laquelle nous avons beaucoup réfléchi. C'est pourquoi nous avons envisagé la possibilité de placer les recettes pétrolières dans des comptes spéciaux afin d'assurer une imputabilité. C'est une des raisons pour lesquelles nous avons proposé des balises afin qu'il n'y ait pas une remise de dette totale. Ce doit être progressif.
Nous voulons également qu'au départ la barre soit placée assez bas pour que nous obtenions une amélioration, mais il faudra qu'elle se poursuive. Voilà pourquoi nous avons proposé une série de balises progressives pour maintenir la reddition de comptes jusqu'à ce qu'une bonne gouvernance soit vraiment établie au Soudan.
À (1030)
Le président: Professeur Mendes.
M. Errol Mendes: En ce qui concerne les objectifs à atteindre, je suis d'accord avec Kathy. Toutefois, c'est très bien d'en proposer, mais encore faut-il que les gouvernements les acceptent. Cette formule a déjà été essayée ailleurs, mais les gouvernements ont refusé de l'accepter.
Le gouvernement qui a été le plus près d'accepter des balises est, curieusement, celui du Tchad, dans le cadre d'un projet de la Banque mondiale, le pipeline Chad-Cameroon. La Banque mondiale avait insisté pour que certaines recettes du pipeline soient consacrées à la santé et à l'éducation. Cette condition semble remise en question, mais je suis sûr que Nicolas sait mieux que moi ce qu'il en est.
Voilà pourquoi je suggère de n'accorder aucune remise de dette tant que des mesures réelles et vérifiables n'auront pas été prises sur le terrain. C'est là que l'Union africaine pourrait intervenir. Elle pourrait vérifier, pour le compte de la communauté internationale, si ces mesures sont vraiment mises en oeuvre.
Dans le cadre de cette supervision, étant donné que la semaine dernière encore le gouvernement bombardait des villages—apparemment, à 50 mètres du Centre de ravitaillement de CARE Canada—j'ajouterais à la résolution la mise en place immédiate d'une zone d'exclusion aérienne. Une puissance voisine pourrait faire respecter cette mesure avec quelques ressources supplémentaires et l'aide des pays occidentaux.
Deuxièmement, il faudrait aussi envisager l'imposition d'une interdiction de voyager, exception faite, bien entendu, des pourparlers de paix, à certains individus afin qu'ils ne profitent pas de leur capacité de voyager pour se servir de l'allégement de la dette....
Et enfin, pour ce qui est des armes financières que nous pourrions utiliser contre eux, il faudrait envisager de bloquer l'actif soudanais à l'extérieur du pays, car cet actif est important.
Pour ce qui est de l'Union africaine, nous devrions tirer des leçons de l'expérience d'ECOMOG, dirigé par le Nigéria, qui a… il y a eu des problèmes. Des accusations de violation des droits de l'homme ont été portées contre les forces militaires d'ECOMOG sous la direction du Nigéria, mais cette force a aidé à mettre fin au bain de sang en Sierra Leone ,bien que ce soit avec l'aide des Britanniques. Il y a donc, dans certaines régions de l'Afrique, une capacité militaire qui pourrait être utilisée… Encore une fois, je suis en train de sortir de mon champ de compétence. Les experts militaires pourraient examiner la question et voir quelles sont les capacités militaires qui se trouvent en Afrique de l'Ouest sous la direction du Nigéria, celles qui se trouvent en Afrique du Sud, qui possèdent une capacité militaire importante, pour établir un cadre logistique que la communauté internationale pourrait soutenir.
Le président: Pourriez-vous mettre sur papier ces ajouts à la motion, pendant que quelqu'un d'autre a la parole et nous verrons si le motionnaire et l'auteur de la motion d'amendement amicale les acceptent.
M. Nicolas Palanque: En ce qui concerne la force de l'Union africaine, j'étais au Libéria, il y a un an ou un an et demi, juste après le départ de Charles Taylor, quand les forces de la CEDEAO sont intervenues. Je dois dire qu'elles ont fait un excellent travail. Le niveau de professionnalisme des Nigérians et des soldats des autres pays… Il y avait un très bon mélange de troupes francophones et anglophones.
Dans l'est du Congo où la MONUC est présente, les choses ne vont pas aussi bien, mais il y a là-bas de nombreux soldats sud-africains qui font un excellent travail. Le niveau de professionnalisme que l'on peut constater dans ce genre de missions de maintien de la paix, même avec un mandat solide…
Je pense qu'au Darfour, le mandat joue un rôle clé. Ce mandat doit être très énergique pour qu'il n'y ait plus de violations des droits de l'homme. Si les troupes n'ont pas ce mandat, nous verrons la même chose que ce qui s'est passé au Rwanda.
Les ressources nécessaires sont présentes en Afrique, bien entendu avec le soutien financier de la communauté internationale, des pays de l'Ouest, mais les ressources humaines sont là et les troupes ont la formation voulue et la capacité de remplir cette mission.
À (1035)
Le président: Merci.
Y a-t-il autre chose?
Mme Lina Holguin: Juste une brève observation. Le Canada doit soutenir les efforts déployés par les Nations Unies et l'Union africaine pour amener les rebelles à respecter les droits de l'homme, à protéger les civils et à participer de bonne foi aux négociations politiques. En ce qui concerne l'Union africaine, comme je l 'ai mentionné dans mon exposé, elle doit être déployée là où le risque est le plus grand.
Le président: Colonel Jewsbury.
Lcol Frank Jewsburry: J'ai seulement deux commentaires très brefs. Notre opinion—ou du moins la mienne étant donné que je suis le conseiller des Amis canadiens du Soudan—est que l'Afrique dispose d'une capacité militaire. Ses principales faiblesses semblent se situer au niveau de la qualification du personnel pour monter l'opération, le transport, les communications et le soutien logistique. Mais pour ce qui est des forces militaires, l'Afrique en possède.
Au fur et à mesure que ces forces s'élargiront, les problèmes s'accentueront au niveau du commandement et du contrôle. C'est peut-être une faiblesse qui nécessitera une aide ou un soutien de l'extérieur, mais l'Union africaine ne manque certainement pas de ressources. Elle a des troupes et c'est une excellente chose, car le Soudan n'est sans doute pas le dernier pays où l'Union africaine va devoir déployer des troupes. Nous devons développer les capacités d'intervention en Afrique.
Pour répondre à l'autre question concernant le déni que manifeste le gouvernement, je dois vous demander ce que vous entendez par « déni » étant donné que nous le considérons comme l'architecte, le catalyseur et, dans bien des cas, l'auteur de ce que nous appelons un génocide, au Darfour.
Le président: Monsieur Bains.
M. Navdeep Bains: C'est exactement ce que j'ai voulu dire, à savoir que la crédibilité du gouvernement, qui est le responsable, est en doute. Je trouve donc très inquiétant que nous songions à éliminer ou réduire sa dette. Je crois qu'il faudrait l'attaquer personnellement en bloquant ses actifs à l'étranger. Il faudrait le traduire devant un tribunal international et nous pourrons réduire la dette s'il est remplacé par un nouveau régime ou s'il change radicalement d'attitude. Mais ce n'est pas une des premières mesures que je recommanderais personnellement, et cela me préoccupe beaucoup. Je tiens à le dire très clairement.
Je désire également souscrire à ce que M. Broadbent et Stockwell Day ont dit. Je crois personnellement qu'il s'agit d'une motion raisonnablement satisfaisante et que vous avez fait de bonnes suggestions que nous pouvons étudier. Votre participation serait très appréciée et il serait bon que nous recevions vos suggestions aujourd'hui sur les principaux aspects de cette question.
Le président: Absolument. Je pense que nous sommes d'accord là-dessus.
Madame Bourgeois.
[Français]
Mme Diane Bourgeois: Monsieur le président, je suis certaine que la motion est extrêmement intéressante, mais vous comprendrez que j'ai de la difficulté à travailler étant donné que je suis une francophone et que la motion est en anglais.
Plus tôt, j'ai demandé à ce qu'on s'assure que vos demandes, mesdames et messieurs, soient très clairement libellées dans la proposition, de sorte que vous n'ayez pas à revenir une quatrième fois pour demander au gouvernement du Canada de faire quelque chose.
Actuellement, je ne peux pas jauger la motion. J'apprécierais que dorénavant, nous ayons une version française des motions, si c'était possible. Je suis la seule francophone ici et je veux voir à mes affaires. Je veux que ce qu'on recommande au gouvernement du Canada soit très clairement libellé et je veux m'assurer que mes collègues fassent la même chose.
Ensuite, je voudrais qu'on nous dise ce que le comité fera de la proposition une fois qu'elle aura été bien libellée.
À (1040)
Le président: Vous avez parfaitement raison. Vous avez le droit d'avoir la motion dans les deux langues officielles. Il ne nous reste que 20 minutes. J'espère qu'il sera possible d'en faire la traduction avant 11 heures. Sinon, on pourra la faire plus tard.
Mme Diane Bourgeois: Ce n'est pas possible ce matin, et j'en conviens. Je voudrais simplement demander à mes collègues de penser. Je suis habituée à travailler avec des attendus. Je ne suis pas habituée à travailler avec une proposition dont les termes sont vagues. Je ne dis pas qu'ils ne veulent rien dire, mais ces mots sont très vague pour moi.
J'aurais aimé qu'on aille plus en profondeur. Étant donné qu'on a mis le point 1, cette discussion est importante pour nous.
Le président: Est-ce qu'on peut compter sur nos amis les interprètes, si on lit la motion lentement? Vous serait-il possible de...? Non?
Mme Diane Bourgeois: Je vais me fier aux gens qui sont ici pour bonifier cette proposition de manière à ce qu'elle aille dans le sens de ce que les témoins veulent. C'est important, et c'est pour vous que nous sommes là.
M. Errol Mendes: Si on fait une traduction française, j'aimerais aussi la lire.
Mme Diane Bourgeois: Oui, les mots sont importants.
M. Errol Mendes: Il y a parfois des différences entre l'anglais et le français.
Mme Diane Bourgeois: Voilà.
[Traduction]
Le président: Monsieur Day.
M. Stockwell Day: Je suis tout à fait d'accord avec notre collègue. Normalement, il faut un préavis d'au moins une journée pour les motions, ce qui donne suffisamment de temps pour les faire traduire. Le comité peut également accepter une motion à l'unanimité sans que ce délai ne soit respecté.
Si cette motion n'a pas été présentée avant, c'est parce que je voulais—nous voulions tous—entendre ce que chacun de vous avait à dire. Comme l'a déclaré le président, je ne sais pas si nos interprètes ont déjà traduit la motion pendant que je parlais. Je ne sais pas si c'est possible. Mais je comprends certainement les inquiétudes de notre collègue du Bloc québécois. C'est parfaitement légitime.
Même si je suis sérieux quand je propose d'ajouter autre chose si c'est nécessaire, n'oubliez pas que rien n'est plus pénible qu'un comité qui écrit un discours. S'il y a quelque chose d'important qui manque ou qui pourrait être ajouté, allons-y… Si ce texte ne présente pas les nuances les plus subtiles possible, excusez-moi, mais si c'est quelque chose qui manque et qui pourrait améliorer la motion, n'hésitez pas.
Le président: Monsieur Broadbent.
L'hon. Ed Broadbent: Comme je crois avoir été le premier à demander à nos témoins de faire des suggestions, je vais également me rétracter quelque peu. Je respecte et je comprends entièrement la remarque de notre collègue du Bloc québécois quant au fait que cette motion devrait être proposée dans les deux langues officielles. Cela dit, à moins qu'une erreur monumentale n'ait été commise quelque part, je proposerais presque que nous en restions là si c'est nécessaire pour régler cette question aujourd'hui.
Je crois important de tirer quelque chose de la réunion d'aujourd'hui. Nous avons déjà renforcé le contenu de la résolution et j'étais très satisfait de ses grandes lignes. Je ne pense pas qu'elle était trop générale, mais nous y avons ajouté des précisions.
Si nous devons en rester là en attendant qu'elle soit disponible en français pour pouvoir la faire adopter aujourd'hui, je serais d'accord, monsieur le président, si c'est nécessaire.
Le président: Nous pourrions peut-être demander à notre attaché de recherche, qui a essayé de prendre note de tout ce qui a été suggéré, de lire ce qu'il a noté…très lentement.
M. Marcus Pistor: J'ai essayé d'inclure tout ce qui a été suggéré.
La motion serait formulée en ces termes :
Que le Canada se serve de tous les moyens et voies possibles, en tablant notamment sur son rôle de chef de file au sein du G-20, ses liens étroits avec les dirigeants actuels de la Banque mondiale et du FMI, et la visite prochaine du président George W. Bush pour en arriver à une entente subordonnant toute aide fournie à l'égard de la dette contractée par le gouvernement de Khartoum… |
À (1045)
M. Stockwell Day: Pourriez-vous attendre un instant?
[Français]
Mme Diane Bourgeois: C'est bon.
[Traduction]
M. Marcus Pistor: ... « en vue de désarmer et démanteler les milices janjaweeds contre le »… désolé, nous n'avons pas besoin du reste.
L'hon. Ed Broadbent: C'est inutile. Les cinq mots suivants pourraient être supprimés.
en vue de désarmer et démanteler les milices janjaweeds, de mettre en oeuvre les accords de paix et de négocier de bonne foi avec les représentants des différents groupes au Darfour; |
que le Canada prenne des mesures concertées mettant à contribution notamment les ministères des Affaires étrangères, du Développement et de la Défense, dans le but d'aider l'Union africaine à résoudre la crise au Soudan; |
Que le Canada pose des gestes pour que les responsables des violations flagrantes des droits de la personne au Soudan soient traduits devant les tribunaux; |
Que le Canada agisse |
... et on pourrait ajouter « aux Nations Unies », mais ce n'est pas obligatoire...
pour établir une zone d'interdiction aérienne complète afin de protéger les civils, obtenir un embargo complet sur les armes et mettre en place les mécanismes de surveillance appropriés; |
Que le gouvernement envisage d'imposer des interdictions de déplacement à l'endroit d'individus ciblés et un gel des actifs du Soudan afin d'exercer des pressions sur le gouvernement soudanais. |
Il faudrait ensuite une phrase de conclusion qui parlerait du « respect de ses obligations ». Nous n'avons pas terminé cette dernière partie.
Le président: On pourrait dire « pour établir la paix au Soudan » ou quelque chose de ce genre.
Mme Kathy Vandergrift: Peut-être « se conformer au droit international »?
M. Marcus Pistor: Ou « se conformer à ses obligations ».
[Français]
Le président: Madame Bourgeois, qu'en pensez-vous?
Mme Diane Bourgeois: Monsieur le président, tout d'abord, je vous remercie de revenir sur la proposition et de m'aider à la comprendre. Si vous me le permettez, je vais me tourner vers les gens qui sont là et leur demander s'ils voient d'autres choses que nous pourrions mettre dans cette proposition. Pensez-vous que le comité pourrait aller plus loin pour vous aider dans votre travail?
M. Errol Mendes: Je pense que c'est...
Mme Diane Bourgeois: Cela vous convient?
M. Errol Mendes: Cela me convient, parce que si on y mettait plus de choses, on pourrait briser...
Mme Diane Bourgeois: Ce n'est pas grave. Il faut parfois en demander beaucoup pour en obtenir très peu.
M. Errol Mendes: C'est cela.
Mme Diane Bourgeois: Il faut aussi que les termes vous conviennent et que cela soit très précis.
M. Errol Mendes: Oui, cela me convient.
[Traduction]
Mme Kathy Vandergrift: Je suggérerais deux amendements assez amicaux qui pourraient être facilement apportés.
Au lieu de « mettre en oeuvre les accords de paix », je suggérerais de dire « mettre en oeuvre complètement » ou « d'instaurer un accord de paix global », parce que nous avons vu des accords de paix assez superficiels. En fait, le gouvernement canadien a insisté pour que cet accord de paix IGAD soit bien réel et pas seulement superficiel. Il faudrait donc dire « mettre en oeuvre complètement » ou « un accord de paix global ».
Un deuxième amendement, qui est lui aussi facilement acceptable, porte sur les mots « négocier de bonne foi avec les représentants des différents groupes au Darfour ». Cela précise avec qui ils doivent négocier. Pourrions-nous suggérer « avec les représentants des différents groupes au Darfour et ailleurs »? C'est parce que la situation menace de s'embraser dans l'est. La crise au Darfour résultait de celle du sud et il faut donc viser l'ensemble du Soudan. Nous ne pouvons pas continuer à procéder de façon ponctuelle.
À (1050)
[Français]
Le président: Madame Bourgeois.
Mme Diane Bourgeois: Monsieur le président, je me fais le porte-parole de M. Palanque et de madame parce qu'il faut regarder le problème de façon globale. Ce que vient de dire madame est extrêmement important, je pense.
Cela me convient tout à fait. Merci, monsieur le président.
[Traduction]
Le président: Colonel Pellerin.
Col Alain Pellerin: J'aimerais revenir sur la dernière phrase du texte original. Quand on la lit, on a l'impression que nous demandons aux Affaires étrangères, à l'ACDI et à la Défense nationale d'aider l'Union africaine à résoudre la crise au Soudan. Ça donne l'impression que nous abdiquons nos responsabilités vis-à-vis de la crise au Darfour en les faisant retomber sur l'Union africaine. À mon avis, c'est sans doute trop lui demander. La résolution de cette crise au Darfour dépasse le rôle que peut jouer l'Union africaine.
Ce sont là deux idées distinctes. Je conviens que nous devrions faire le maximum pour soutenir l'Union africaine dans le rôle qu'elle jouera sur le terrain au Darfour, mais je crois que le Canada a des responsabilités à assumer à l'égard de la crise au Soudan.
Le président: Permettez-moi simplement de vous poser cette question. Je crois que le Canada ne s'est jamais engagé à envoyer des soldats sur le terrain, contrairement à la Grande-Bretagne et à l'Australie. Quels autres pays ont promis d'envoyer des troupes si l'Union africaine le leur demandait? Pourriez-vous nous le dire?
Col Alain Pellerin: Je n'en suis pas certain.
Le président: Quelqu'un le sait-il?
Colonel Jewsbury?
Lcol Frank Jewsburry: Non, je ne le sais pas. Le Canada n'a certainement pas promis d'envoyer des troupes.
M. Marcus Pistor Il s'est engagé à envoyer des conseillers.
Le président: D'accord.
M. Marcus Pistor: C'est ce que j'ai entendu dire aujourd'hui.
Le président: La nouvelle provenait-elle du Soudan?
M. Marcus Pistor: Oui.
Le président: Il nous reste environ cinq minutes et je crois que nous allons devoir libérer la salle.
Pourriez-vous lire le texte une fois de plus?
Si nous sommes tous d'accord, y compris nos témoins—je suis sûre qu'ils souligneront les problèmes si nous ne le faisons pas—nous allons essayer d'adopter cette motion au cours des cinq prochaines minutes.
M. Marcus Pistor: La motion serait formulée ainsi :
Que le Canada se serve de tous les moyens et voies possibles, en tablant notamment sur son rôle de chef de file au sein du G-20, ses liens étroits avec les dirigeants actuels de la Banque mondiale et du FMI, et la visite prochaine du président George W. Bush pour en arriver à une entente subordonnant toute aide fournie à l'égard de la dette contractée par le gouvernement de Khartoum en vue de désarmer et démanteler les milices janjaweeds, d'instaurer un accord de paix global et de négocier de bonne foi avec les représentants des différents groupes au Darfour et ailleurs |
... et vous pourriez commencer une nouvelle phrase ici afin de rendre le texte plus lisible.
Le deuxième paragraphe pourrait se lire ainsi :
Que le Canada prenne des mesures concertées mettant à contribution notamment les ministères des Affaires étrangères, du Développement et de la Défense, dans le but d'aider l'Union africaine à résoudre la crise au Soudan. |
Le président: D'accord?
Col Alain Pellerin: C'est le même libellé qu'avant.
M. Stockwell Day: Vous pourriez ajouter quelque chose comme « et les autres parties légitimes ».
M. Navdeep Bains: Ou « et les autres parties prenantes »?
M. Stockwell Day: Oui, ou « et les autres parties prenantes ».
L'hon. Ed Broadbent: En tant que membre du comité, je suis assez satisfait du libellé original, car je crois qu'il insiste là où il faut. Je ne pense pas que cela nous décharge de nos responsabilités. Je serais pour le maintien du libellé, monsieur le président.
À (1055)
Le président: Très bien.
Col Alain Pellerin: Cela me semble acceptable.
M. Marcus Pistor: Voici quel serait le paragraphe suivant :
Que le Canada pose des gestes pour que les responsables des violations flagrantes des droits de la personne au Soudan soient traduits devant les tribunaux; que le Canada agisse pour établir une zone d'interdiction aérienne complète afin de protéger les civils, obtenir un embargo complet sur les armes et mettre en place des mécanismes de surveillance appropriés; que le gouvernement envisage d'imposer des interdictions de déplacement à l'endroit d'individus ciblés et un gel des actifs du Soudan afin d' exercer des pressions sur le gouvernement soudanais pour qu'il respecte ses obligations aux termes du droit international et des accords de paix. |
Le président: Est-ce acceptable? Est-ce que nous sommes tous d'accord?
Des voix : D'accord.
Le président : Nos témoins peuvent-ils voter? Je suppose que non.
Je crois que nous y sommes. Merci d'être venus. Merci 10 000 fois. C'était une réunion très utile.
La séance est levée.