La Chambre reprend l'étude, interrompue le 29 octobre, de la motion: Que le projet de loi , soit lu pour la deuxième fois et renvoyé à un comité.
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Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir au sujet du projet de loi C-14, la loi sur les Tlichos, qui donnerait force de loi à l'accord intervenu le 25 août 2003, entre le gouvernement fédéral, le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest et le peuple tlicho.
Cet accord confère aux Tlichos la propriété d'approximativement 39 000 kilomètres carrés de territoire compris entre le Grand lac des Esclaves et le Grand lac de l'Ours et un pouvoir participatif et administratif sur un territoire encore plus vaste.
Cet document est unique parce qu'il porte à la fois sur le règlement de revendications territoriales et sur un accord d'autonomie gouvernementale. Il crée un précédent pour quelque 600 premières nations qui pourraient demander l'inclusion de dispositions similaires dans leurs accords respectifs.
Chaque jour, dans notre prière d'ouverture, nous demandons que le Parlement ait le pouvoir et la sagesse de légiférer à bon escient et de prendre des décisions judicieuses. Voilà ce que nous voulons tous à la Chambre. C'est ce que nous voulons pour le Canada et pour les Canadiens.
Le Parti conservateur du Canada appuie le règlement des revendications territoriales des Tlichos et l'accord d'autonomie gouvernementale qui les concerne, mais il a certaines préoccupations à l'égard de cinq éléments de cet accord. Je reviens à la capacité du Parlement d'édicter des lois pertinentes et de prendre des décisions éclairées. Je vais aborder les cinq points du projet de loi C-14 qui nous préoccupent plus particulièrement.
Premièrement, l'accord n'est pas définitif. Il prévoit la reprise des négociations si un autre peuple autochtone des Territoires du Nord-Ouest négocie dans l'avenir une entente qui serait avantageuse pour les Tlichos. L'accord n'est en rien définitif, ce qui devrait être la caractéristique de base de tout accord.
L'objectif fondamental de tout accord devrait être l'irrévocabilité. Quel est l'intérêt pour le Canada de signer des accords qui pourraient être rouverts en tout temps lorsqu'il négocie des règlements conventionnels et des accords sur les revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale? Dans le cas qui nous occupe, si un autre peuple autochtone des Territoires du Nord-Ouest négociait un accord avec le gouvernement fédéral et si les Tlichos trouvaient cet accord meilleur que celui qu'ils ont signé, ils pourraient tout simplement reprendre les négociations. Ce n'est pas avec des accords de ce type que nous ferons la promotion de l'unité et des rapprochements au Canada. Tout accord doit être avantageux pour toutes les parties intéressées, pas seulement pour le peuple tlicho, mais bien pour tous les Canadiens.
Nous ne souhaitons pas perpétuer la tradition du gouvernement libéral de présenter des mesures législatives qui encouragent plus la division que l'unité au Canada. C'est ce que le gouvernement libéral fait depuis des décennies. C'est ahurissant d'entendre les députés libéraux parler de la mosaïque canadienne et de la nécessité de s'assurer que les lois présentées soient équitables afin que le gouvernement soit solide et uni.
Le gouvernement libéral actuel, comme ses prédécesseurs, présente sans cesse des mesures législatives qui encouragent et nourrissent la division plus que l'unité du pays. Ils devrait avoir honte de leur dossier à cet égard. Ce n'est qu'un exemple de plus.
L'hon. Wayne Easter: C'est faux. Vous devriez avoir plus de bon sens que ça.
M. Richard Harris: Certains députés n'aiment pas entendre la vérité. Il est parfaitement établi qu'au cours des quelques dernières décennies, les divers gouvernements libéraux ont adopté des lois qui sèment la zizanie. Ils n'aiment pas se le faire rappeler mais il ne peuvent le nier.
Un des aspects les plus ahurissants du projet de loi C-14 est qu'il accorderait à la première nation tlicho le droit de conclure des accords internationaux et, dans certains cas, de s'opposer à ce que le Canada conclue des accords internationaux. En vertu de l'accord, le pouvoir des Tlichos de négocier des ententes internationales, nationales, interprovinciales et interterritoriales serait illimité. De surcroît, il est exigé, dans l'accord, que le gouvernement du Canada consulte la première nation tlicho avant de conclure toute entente internationale qui pourrait avoir une incidence sur les droits du gouvernement tlicho, de la première nation tlicho ou de ses citoyens. Ces mots sont très vagues et inquiétants: ils limitent considérablement les droits que la Constitution réserve au gouvernement fédéral.
Le Parti conservateur estime que le caractère vague du libellé de l'accord pourrait entraver le pouvoir du gouvernement fédéral de conclure des ententes internationales et des ententes avec les provinces si la première nation tlicho estime que celles-ci pourraient avoir une certaine incidence sur la nation tlicho ou ses citoyens.
Notre pays n'a pas besoin d'accords susceptibles de s'enliser dans des contestations judiciaires sans fin; voilà pourquoi nous devons avoir recours à une formulation précise et concise. Nous devons faire de notre mieux pour nous assurer que des termes comme « peut, devrait, pourrait, possiblement, éventuellement » ou « peut-être » ne figurent pas dans le texte de l'accord car ils peuvent donner lieu à des contestations. Nous avons l'obligation envers les Canadiens de faire en sorte que chaque texte législatif ou accord que nous concluons avec les provinces, les premières nations, ou d'autres peuples ou territoires ne contiennent pas des termes qui rendent douteux leur sens et qui peuvent aboutir à des contestations successives pendant des années.
Le Parti conservateur du Canada veut des accords dont la formulation est distincte et dont les termes sont très clairs, qui ne prêtent pas le flanc à des contestations en raison d'une formulation large pouvant induire des personnes à croire qu'elles peuvent les interpréter selon leur propre point de vue. Nous sommes tous capables de faire en sorte que les accords soient sûrs et solides et qu'ils prévoient des filets de sûreté pour tous les Canadiens.
Le système électoral prévu par l'accord nous préoccupe beaucoup. Les personnes habitant dans les territoires qui relèvent d'un nouveau gouvernement de la première nation tlicho doivent quand même relever de la compétence du Canada; en effet, tous les territoires, toutes les provinces et toutes les premières nations de notre pays font partie du Canada, ils sont tous régis et protégés par la Constitution canadienne et par la Charte des droits et libertés.
À notre avis, cet accord donnerait naissance à un système électoral à caractère racial. L'accord crée une nouvelle catégorie de citoyens, les citoyens tlichos, qui seuls ont le privilège de pouvoir être élus chefs. En outre, 50 p. 100 des membres élus du conseil doivent être des citoyens tlichos, ce qui va à l'encontre de notre Charte des droits et libertés. Nous devons faire en sorte que toute personne relevant de la compétence du gouvernement autonome tlicho soit traitée équitablement et conformément à la Constitution du Canada et à la Charte des droits et libertés, telles qu'elles s'appliquent à tous les autres Canadiens.
Je tiens également à souligner que l'accord contient un langage qui, selon moi, finira par causer des problèmes. L'accord semble en effet conférer beaucoup trop de pouvoirs d'autonomie gouvernementale à l'intérieur du pays, qui permettraient la création d'un autre pays ou d'une autre nation à l'intérieur du Canada. Ce gouvernement aurait des pouvoirs qui primeraient sur les pouvoirs du gouvernement du Canada lui-même, sur la Constitution du Canada et sur la Charte des droits et libertés. Cet accord est même dangereusement proche de permettre la création d'un pays dans le pays, comme nous sommes passés dangereusement proche de le faire dans le cas d'accords antérieurs.
Les libéraux ont dit avoir la volonté d'unir le Canada et d'avoir un Canada monolithique. En cas de doute quant à leurs intentions déclarées à cet égard, il suffit de considérer leurs tentatives passées dont il est actuellement question dans le dossier des commandites. Il suffit de voir combien d'argent ils ont dépensé pour cela et de quelle manière louche dans de nombreux cas, mais cela est une autre histoire. Ils ont dit combien il est important d'avoir un Canada monolithique, comprenant le Québec ainsi que l'ensemble des citoyens du pays, d'où qu'ils viennent, qu'ils soient citoyens canadiens ou immigrants reçus, un Canada uni. Le danger nous menace encore une fois, comme cela est arrivé dans le cadre d'ententes passées négociées avec les autochtones. Les termes des accords ont fait craindre la création de pays ou d'enclaves à l'intérieur du pays, l'apartheid, la partition, en raison du manque de bon sens et de l'utilisation d'un langage trop général dans les accords que nous avons conclus.
Lorsque je crois qu'un projet de loi susceptible d'entraîner des divisions est imposé aux Canadiens, je suis très heureux de dire que j'ai eu l'occasion de m'y opposer. C'est un autre cas où je suis fier d'intervenir.
L'accord sème de la confusion également sur le plan des compétences. Je viens d'en parler. L'accord décrit trois hiérarchies différentes pour déterminer quelle loi a prépondérance en cas de conflit: le droit fédéral, le droit territorial, le droit tlicho ou l'accord. Il n'est pas certain que les Tlichos pourront profiter de la protection offerte par la Charte canadienne des droits et libertés s'il y a conflit avec la constitution des Tlichos.
Je suis sidéré que le gouvernement ait permis un libellé aussi imprécis dans un document d'une telle importance. Nous essayons de créer pour le peuple tlicho un cadre d'autonomie gouvernementale qui va donner aux Tlichos le sentiment qu'ils peuvent faire de la planification à long terme et qui va permettre aux Canadiens d'être persuadés que la question est maintenant réglée. Nous n'y reviendrons pas sans cesse à l'avenir. La question ne fera pas l'objet de contestations constantes et ne causera pas une confusion permanente quant à savoir qui a le pouvoir.
C'est le gouvernement fédéral qui a le pouvoir. C'est lui qui est habilité à administrer le pays. Il établit des lois. Il délègue son pouvoir aux provinces et aux territoires. Les pouvoirs que le gouvernement fédéral délègue doivent être bons pour tous les Canadiens et bons pour l'accord. Ils ne devraient pas être remis en question dans les années futures.
Je me rappelle avoir parlé des dangers du projet de loi C-68, le tristement célèbre projet de loi sur l'enregistrement des armes à feu, lorsqu'il a été présenté à la Chambre en 1995. J'ai demandé au ministre de la Justice de l'époque, Allan Rock, s'il pouvait dire aux Canadiens si le projet de loi C-68 et les règlements qu'il renfermait s'appliqueraient à tous les Canadiens. C'était une question simple. Les libéraux nous avaient dit pendant plusieurs semaines que le projet de loi C-68 était une mesure législative s'appliquant à tous les Canadiens et que les règlements viseraient tout le monde. Les nouveaux parlementaires à la Chambre vont entendre ce type de réponses de la part des ministres. Le ministre de la Justice a dit à ce moment-là que le projet de loi C-68 s'appliquait de façon universelle. C'était acceptable, car il allait s'appliquer à tout le monde. Il a ensuite ajouté, comme en témoigne le hansard, que sa mise en oeuvre se ferait de façon souple. En d'autres termes, il s'appliquerait à tout le monde en théorie, mais pas vraiment en pratique.
Le projet de loi C-14 est une preuve éloquente qu'on tenait un double discours du temps du projet de loi C-68. L'accord donne expressément à la première nation tlicho le pouvoir d'adopter ses propres lois en matière d'armes à feu et de munitions. Le ministre avait dit que l'application du projet de loi serait souple. Cela n'a pas été conçu pour s'appliquer à tous. À maintes reprises, nous avons vu ce gouvernement déléguer des pouvoirs aux premières nations pour qu'elles régissent leurs propres règlements en matière d'armes à feu et de munitions.
Le projet de loi C-68 est devenu par la suite ce qu'on appellerait une mesure législative fondée sur la race parce qu'il s'appliquait exclusivement à un seul groupe de Canadiens, ce qui est très dangereux. Pourquoi voudrions-nous favoriser la division au lieu de promouvoir l'unité? Tous les Canadiens sont égaux et ont la même valeur au sein de la société canadienne et, en ce sens, ils doivent être traités de la même manière en vertu des mêmes lois, de la même Constitution et de la même Charte des droits.
Le Parti conservateur du Canada estime que l'autonomie gouvernementale doit avoir lieu dans le contexte de la Constitution canadienne, mais qu'elle doit avoir un caractère définitif, qu'elle doit être définie clairement et en termes absolus. L'accord ne peut pas être rédigé dans un libellé général qui risque d'entraîner de multiples interprétations après sa signature.
Dans un souci d'équité et d'égalité, un gouvernement conservateur veillerait à ce que les principes de la Charte des droits s'appliquent au gouvernement autochtone. Le moins que l'on puisse faire pour les membres de nos premières nations, c'est de leur assurer l'égalité et la protection aux termes de la Charte des droits et de la Constitution et de leur garantir, en signant les accords avec eux, qu'ils sont des citoyens égaux et qu'ils ont la même valeur que tous les autres Canadiens. Nous vivons dans un Canada uni, et non dans un pays où le gouvernement favorise la division.
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Monsieur le Président, tout accord conclu entre le gouvernement et quiconque, que ce soit une bande des premières nations ou une province, doit comporter des conditions d'exécution.
Certaines compétences sont déléguées aux provinces et certaines le sont aux premières nations. On suppose, lorsqu'il y a délégation, que les conditions de l'accord visé vont être respectées.
Depuis 1993, année de mon arrivée ici comme député, plusieurs projets de loi sur l'autonomie gouvernementale des premières nations ont été soumis à la Chambre. Chaque fois qu'il a été question d'obligation de rendre des comptes en vertu de l'accord, de la part tant du gouvernement fédéral que des premières nations, on a constaté des lacunes évidentes.
En matière d'autonomie gouvernementale, nous, du Parti conservateur, souhaitons que les objectifs soient atteints avec toutes les premières nations du pays dans le respect de la Constitution du Canada.
En 1992, l'accord de Charlottetown était bondé d'articles proposant d'accorder aux premières nations du pays des pouvoirs d'autonomie gouvernementale qui supplanteraient ceux des autorités fédérales, provinciales et régionales.
La population du Canada s'est penchée sur l'accord de Charlottetown, et notamment sur cet aspect. Elle en a débattu à fond. Elle a dit non à cet accord. Les Canadiens n'aimaient ni les conditions ni les grandes lignes de cet accord. De plus, la perspective des débats futurs qu'il risquait de susciter ne leur plaisait pas.
Le Canada a été bien servi par le rejet de l'accord de Charlottetown. Depuis qu'il a été rejeté, cependant, les libéraux, élus en 1993, n'ont cessé d'introduire peu à peu des dispositions de l'accord de Charlottetown dans toutes les mesures législatives proposées à la Chambre concernant les premières nations.
Ces mêmes dispositions de l'accord de Charlottetown qui ont été rejetées par les Canadiens ont été intégrées à tous et chacun des projets de loi présentés à la Chambre concernant les premières nations. Les mêmes dispositions qui ont été rejetées par les Canadiens à l'occasion d'un vote tenu dans l'ensemble du pays ont été réintroduites en catimini par les libéraux dans toutes les mesures qu'ils ont présentées.
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Monsieur le Président, le projet de loi C-14, l'accord sur les revendications territoriales des Tlichos, est inquiétant. Avant que j'explique pourquoi je trouve cet accord inquiétant, permettez-moi de dire qu'il s'agit d'un accord généreux et qu'il est normal qu'il en soit ainsi.
Cet accord donne au peuple tlicho 39 000 km2 de terre et 152 millions de dollars sur 15 ans. Il reconnaît qu'il n'y a pas eu d'entente finale entre l'État et les Tlichos. À cet égard, le fait que le gouvernement ait tenté de redresser cette lacune est aussi une bonne chose.
Cependant, l'accord comporte deux problèmes. Premièrement, il mine la souveraineté canadienne; deuxièmement, il n'a pas un caractère définitif. Notre parti croit dans l'autonomie gouvernementale des autochtones, mais à l'intérieur de la Constitution du Canada. Cet accord va bien au-delà de ce cadre et accorde l'autonomie gouvernementale au détriment du Canada.
Cet accord renferme trois chapitres qui nuisent à la souveraineté du Canada. Le Canada compte deux ordres de gouvernement souverains, soit les gouvernements fédéral et provinciaux. Tous les pouvoirs dans ces trois secteurs relèvent de ces ordres de gouvernement et de la Charte. Cet accord change cette structure fondamentale en ajoutant un quatrième palier de souveraineté qui est défini dans ses dispositions.
L'érosion de la souveraineté est due à deux chapitres de l'accord ayant trait aux traités internationaux et à un chapitre de l'accord qui cause pas mal de confusion sur le plan des compétences, qui pourrait se traduire par une diminution de la souveraineté du Canada. Les deux articles de l'accord auxquels je fais allusion, et qui entraînent une perte de souveraineté pour le Canada, concerne les traités internationaux. L'un d'eux est l'article 2.2.9, qui stipule:
L'Accord ne doit pas être interprété de façon à limiter ou à accroître le pouvoir des Parties de négocier et de conclure des ententes internationales, nationales, interprovinciales et interterritoriales.
Cet article nous permet de conclure que le gouvernement tlicho a le pouvoir de conclure des traités. L'article 7.13.2 stipule:
Avant d’accepter d’être lié par un traité international qui peut toucher un droit que l’Accord confère au gouvernement tlicho, à la Première nation tlicho ou à un citoyen tlicho, le gouvernement du Canada offre au gouvernement tlicho une occasion d’exposer, séparément ou dans le cadre d’une tribune, son point de vue au sujet du traité international.
Le droit de conclure des accords ou des traités internationaux constitue une prérogative exclusive de l'exécutif du gouvernement fédéral. Ces dispositions de l'accord diminuent donc la souveraineté du Canada et pourraient avoir des conséquences d'une grande portée dont les effets pourraient se faire sentir dans les décennies à venir.
Le deuxième élément de cet accord qui pourrait avoir pour effet de diminuer la souveraineté du Canada a trait à la confusion sur le plan du partage de compétences qui serait causée par le fait que les articles 7.7.2 à 7.7.4 prévoient cinq niveaux de pouvoir qui semblent entrer en conflit les uns avec les autres.
Dans notre pays, depuis l'avènement de la Confédération et l'adoption de la Loi constitutionnelle de 1867, nous avons vu assez de cas de confusion causée par des conflits de compétence entre le gouvernement fédéral et les provinces. La dernière chose qu'il faut faire, c'est ajouter encore à la confusion dans les relations fédérales-provinciales.
L'une des questions que je pose au gouvernement est la suivante: pourquoi a-t-il permis que cet accord porte ainsi atteinte à la souveraineté du Canada? Les traités internationaux relèvent de la compétence exclusive du gouvernement fédéral. Pourquoi celui-ci autoriserait-il un tiers à intervenir au sujet de la teneur d'accords internationaux, puisque cette prérogative appartient au seul palier fédéral?
Je me demande si cela s'inscrit ou non dans le cadre, nouveau, du fédéralisme asymétrique, en vertu duquel des ministres provinciaux sont autorisés à parler au nom du gouvernement fédéral à des conférences internationales. Cela me semble s'y inscrire parfaitement.
Voici l'autre question que je pose: qui parle au nom du Canada à ce sujet? C'est le gouvernement fédéral qui est en cause et il devrait protéger ses domaines de compétence et parler au nom de tous les Canadiens, et non pas renoncer graduellement à ses pouvoirs à l'occasion d'accords et de divers procédés d'aborder des traités internationaux.
Comme je l'ai mentionné déjà, une autre préoccupation au sujet de cet accord, c'est que rien n'y est définitif. L'une des choses qui m'intriguent au sujet du projet de loi C-14 et de cet accord, c'est que celui-ci diffère passablement de l'Accord définitif nisga'a que le gouvernement a conclu récemment . L'accord nisga'a était complet et définitif. Pour illustrer mon propos, je tiens à citer quatre de ses articles. L'article 22 dit ceci:
L’Accord constitue le règlement complet et définitif concernant les droits ancestraux de laNation Nisga’a au Canada, y compris le titre aborigène.
L'article 23 de l'accord nisga'a dit ceci:
L’Accord énonce de façon exhaustive les droits Nisga’a de l’article 35, l’étendue géographique de ces droits et les limitations à ces droits, dont les Parties ont convenu...
Plus loin, l'article 26 de l'accord nisga'a dit ceci:
Si, malgré l’Accord et la législation de mise en vigueur, la Nation Nisga’a a un droit ancestral au Canada, y compris le titre aborigène, qui est autre que les droits Nisga’a de l’article 35 tels qu’énoncés dans l’Accord, ou qui en diffère par ses attributs ou son étendue géographique, la Nation Nisga’a renonce (releases) à ce droit ancestral en faveur du Canada dans la mesure oùle droit ancestral est autre que les droits Nisga’a de l’article 35 tels qu’énoncés dans l’Accord, ou en diffère par ses attributs ou son étendue géographique.
L'article 27 dit ceci:
La Nation Nisga’a renonce (releases) à toutes les réclamations, demandes, actions ou procédures, de quelque nature que ce soit, et connues ou inconnues, que la Nation Nisga’a a eues dans le passé, a maintenant ou peut avoir dans l’avenir à l’encontre du Canada, de la Colombie-Britannique et de toutes les autres personnes, à l’égard ou découlant de tout acte ou omission, avant la date d’entrée en vigueur, qui peut avoir eu des effets sur tout droit ancestral de la Nation Nisga’a au Canada, y compris le titre aborigène, ou y avoir porté atteinte.
Ces quatre extraits de l'accord final avec les Nisga'as indiquent clairement qu'il s'agit d'un accord définitif entre l'État et la nation nisga'a. À l'inverse, l'Accord tlicho ne met pas de point final aux revendications. Selon l'article 27.6.1 de l'accord, les Tlichos recevront l'équivalent de tout avantage consenti à l'avenir à un autre groupe autochtone des Territoires du Nord-Ouest au moyen d'accords sur les revendications territoriales, d'accords sur l'autonomie gouvernementale, d'exonérations fiscales ou de lois.
Cet accord diffère radicalement de l'accord sur les revendications territoriales des Nisga'as. J'aimerais donc que le gouvernement me dise pourquoi il a changé de stratégie. Pourquoi faire pour un peuple autochtone ce qu'il n'a pas fait pour un autre?
Ce qui me perturbe le plus dans cette affaire, c'est le premier problème dont j'ai parlé, c'est-à-dire l'absence d'une prise de position ferme de la part du gouvernement pour empêcher toute érosion de la souveraineté du Canada.
L'ancien chef libéral Pierre Elliott Trudeau se retournerait dans sa tombe s'il avait connaissance du fédéralisme asymétrique et de l'érosion de la souveraineté du pays vers lesquels le gouvernement s'oriente depuis quelques années.
Le Canada est un pays fragile à l'identité fragile, et le gouvernement fédéral doit faire tout son possible pour sauvegarder cette identité de même que la souveraineté nationale pour que le pays se maintienne dans les années et les décennies à venir. Je crains que cet accord ne soit le point de départ d'un processus inéluctable d'érosion de la souveraineté du Canada et que, dans 50 ans, le gouvernement fédéral ne soit rien d'autre qu'un organe de coordination d'entités souveraines constituant ensemble une réalité purement géographique. Voilà la principale crainte de mon parti à propos de cet accord.
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Monsieur le Président, c'est inquiétant de voir un accord qui accorde au peuple tlicho un degré de souveraineté différent. À mesure que le Canada s'éloigne de son passé, où trois peuples fondateurs de trois cultures différentes, soit les Français, les Anglais et les autochtones, ont bâti notre pays, pour se transformer en un pays de plus en plus diversifié et multiculturel, où les centres urbains se font davantage le reflet de la grande mosaïque qu'est devenu le Canada, les accords de ce genre ne résisteront pas à l'épreuve du temps. Ils ne correspondront plus à ce que sera le Canada dans 50 ans.
Voilà pourquoi il est crucial, il me semble, que le gouvernement fédéral joue un rôle de premier plan dans ce dossier. Il devrait élaborer un ensemble de politiques affirmant que les Canadiens sont tous protégés par la Charte, qu'ils sont tous égaux devant la loi et qu'ils seront tous traités également par le gouvernement fédéral.
Dans certains secteurs, les choses ne se feront pas toutes de la même façon, surtout entre les provinces et le fédéral, et les politiques ne seront pas toujours mises en application de la même façon sur l'ensemble de l'immense territoire du Canada, mais, en bout de ligne, les citoyens canadiens méritent d'être tous traités de la même façon peu importe la région où ils vivent, que ce soit dans les Territoires du Nord-Ouest, en Colombie-Britannique, en Ontario ou dans les Maritimes.
Ce qui manque dans l'accord et dans l'approche générale du gouvernement à l'égard de nombre des politiques qu'il adopte ces temps-ci, c'est une vision de l'identité canadienne. Le gouvernement ne semble pas vouloir adopter des politiques et des mesures législatives garantissant que tous les Canadiens seront traités sur un pied d'égalité, indépendamment de leur race, de l'endroit où ils vivent et de leur langue.
À mon avis, c'est ce qui manque dans cet accord, et c'est inquiétant. Éventuellement, cette érosion graduelle de la souveraineté canadienne reviendra hanter, probablement pas le gouvernement actuel qui sera passé à l'histoire depuis belle lurette, mais de futurs gouvernements du Canada.
Un pays comme le nôtre, un pays si fragile qui était déjà invraisemblable à tant d'égards au moment de la Confédération, en 1867, a besoin de gouvernements forts au fédéral afin de rester uni, pas seulement uni pour le plaisir d'être uni, mais uni pour garantir la paix et la tranquillité sur son territoire, la prospérité pour tous ses habitants et l'existence de l'ensemble uniforme de services, de lois et de droits auxquels les Canadiens en sont venus à s'attendre de la part de leurs gouvernements.
Toutefois, depuis un certain nombre d'années, le gouvernement actuel en particulier mine doucement l'idée même d'une identité canadienne et d'un ensemble uniforme de normes pancanadiennes. Il l'a fait dans des accords comme celui-ci et dans la mise en oeuvre des politiques qu'il a adoptées. Je pense que, avec le temps, cela va revenir hanter le gouvernement qui sera alors au pouvoir. Voilà pourquoi le gouvernement doit, à mon avis, répondre aux questions concernant l'érosion de la souveraineté et le caractère non définitif du présent accord.
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Monsieur le Président, nous en sommes à la troisième journée des discours sur le projet de loi et, d'ici une demi-heure, la période des questions et observations sera terminée et nous reviendrons aux discours sans pouvoir interroger les députés sur leurs propositions. Je me bornerai à dire que tous les arguments que nous avons entendus ce matin ont été réfutés les jours précédents, comme le montre le hansard.
Quoi qu'il en soit, j'ai entendu quelque chose de troublant, ce matin, au sujet des articles 5.1 et 5.2 du projet de loi C-14, à savoir les cas de conflit entre l'accord ou le projet de loi et d'autres lois. Le député a présenté incorrectement certains principes fondamentaux, comme l'ont d'ailleurs fait d'autres députés de l'opposition.
Aux termes de l'article 2.8.4, en cas d'incompatibilité ou de conflit entre la loi de mise en oeuvre, fédérale ou territoriale, et l'accord tlicho, l'accord prévaut dans la mesure de l'incompatibilité ou du conflit. De même, en vertu de l'article 2.8.3, en cas d'incompatibilité ou de conflit entre les dispositions de l'accord et les dispositions de toute loi fédérale ou provinciale ou des lois tlichos, les dispositions de l'accord prévalent dans la mesure de l'incompatibilité ou du conflit. Aux termes de ce même article, en cas d'incompatibilité ou de conflit avec les dispositions d'une loi fédérale ou territoriale ou d'une loi tlicho, la loi de mise en oeuvre prévaut dans la mesure de l'incompatibilité ou du conflit.
Contrairement à ce que croient ceux d'en face, cela ne signifie pas que les lois tlichos prévaudront, mais que l'accord prévaudra et, d'ailleurs, l'article 7.7.2 de l'accord confirme que les lois fédérales prévalent. Le texte précise qu'en cas de conflit, aucune autorité ne prévaut contre la Couronne fédérale relativement aux affaires qui concernent les Tlichos.
Le député a-t-il saisi que les lois fédérales d'application générale prévalent? Comprend-il qu'il ne peut se contenter de lire uniquement la loi de mise en oeuvre, mais qu'il doit lire tous les articles? Je sais qu'il y a eu un malentendu. Ce que je dis, c'est que le député ne doit pas s'en tenir uniquement à son discours, il doit aussi lire l'accord et tous les documents d'appui, pour comprendre les dispositions conflictuelles pouvant engendrer une méprise. Vus ensemble, ces textes sont tout à fait logiques.
Je sais que c'est la dernière occasion que j'ai de le dire, mais j'espère que nous pourrons finalement entrer dans les détails du sujet, non pas dans le cadre d'un débat mais à l'étape du comité, où se fait habituellement ce genre de travail.
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Monsieur le Président, je vais tenter d'être bref parce que je tiens réellement à avoir suffisamment de temps pour répondre à des questions. Mes collaborateurs m'ont préparé un discours, mais je ne m'en servirai pas.
Je veux que les nouveaux députés des autres partis sachent qu'il arrive parfois, pas seulement dans le dossier dont nous sommes saisis, mais dans le cas d'autres projets de loi, que l'opposition prétende que la mesure législative à l'étude n'est pas constitutionnelle. Les gens, et les nouveaux députés en particulier, doivent comprendre que chaque fois que le gouvernement fédéral présente un projet de loi, toute une série d'experts constitutionnels l'étudient, et ce, quel que soit le parti qui l'a proposée. On ne présente jamais une loi qui n'est pas conforme à la Constitution parce que cela mènerait automatiquement à toute une série de contestations constitutionnelles devant les tribunaux.
Les experts étudient chacune des mesures législatives pour s'assurer qu'elles sont conformes à la Constitution. Cela ne signifie pas qu'on ne peut les contester, mais il arrive très rarement qu'une telle contestation soit accueillie, tout simplement parce que ces mesures ont été soigneusement étudiées.
L'opposition a soulevé quatre points importants. Au risque d'être un peu ennuyeux, je vais revoir les aspects techniques de l'accord et du projet de loi pour démontrer qu'aucune de ces objections ne tient la route. Je diviserai donc mes commentaires en quatre parties puisque la plupart des autres intervenants ont parlé de ces quatre points. Ils pourront donc se reporter à la partie de mon discours qui précise de quelle façon nous avons traité chacune de ces préoccupations.
Le premier point a trait au caractère définitif de l'accord. Les députés de l'opposition veulent s'assurer que l'accord a un caractère définitif. Ils demandent pourquoi le projet de loi inclut des dispositions prévoyant des changements dans l'avenir.
Dans le chapitre 1 de l'accord tlicho, une distinction est faite entre les droits fonciers et les autres droits. Une certitude est établie, tant pour les droits fonciers que les autres droits; par ailleurs, les droits fonciers ont aussi un caractère définitif. Tous les droits susceptibles d'être exercés doivent être énoncés dans l'accord. L'accord tlicho se fonde sur la technique de non-assertion, en ce sens que les Tlichos conviennent de ne pas revendiquer des droits fonciers autres que ceux qui sont convenus dans l'accord. Si les tribunaux devaient décider qu'il existe un droit visant des terres autochtones qui peut être revendiqué, mais que ce droit n'est pas inclus dans l'accord, les Tlichos conviennent de céder ce droit à la Couronne. Cette renonciation subsidiaire fait en sorte que l'accord constitue un règlement définitif en matière de droits fonciers.
Cette renonciation subsidiaire s'applique uniquement aux droits fonciers. Dans le cas des autres droits, qui englobent divers droits liés à l'autonomie gouvernementale, les Tlichos conviennent de n'exercer que ceux énoncés dans l'accord. Toutefois, ils peuvent demander que d'autres droits non fonciers soient reconnus. Si les deux parties s'entendent sur la reconnaissance de tels droits, ou si ceux-ci sont confirmés par les tribunaux, ces droits peuvent alors être ajoutés à l'accord tlicho et exercés en vertu de cet accord.
Le secteur où ils peuvent apporter des améliorations est celui de la taxation. L'article 27.6.1 permet un traitement équitable entre tous les groupes autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest relativement aux pouvoirs de taxation ou aux exemptions, afin que les régimes fiscaux dans les Territoires du Nord-Ouest soient compatibles et équitables. L'accord tlicho est le premier accord du genre dans les Territoires du Nord-Ouest et il est possible que des révisions soient nécessaires dans l'avenir relativement aux pouvoirs de taxation ou aux exemptions, par exemple lorsque d'autres revendications territoriales et d'autres accords d'autonomie gouvernementale dans les TNO seront finalisés.
Il est prévu que l'accord peut être modifié si une autre première nation bénéficie, dans son accord d'autonomie gouvernementale, d'un régime de taxation différent. Je suis persuadé que les députés d'en face ne voudraient pas que les gens de leur circonscription ne puissent pas avoir à accès à un avantage fiscal ou à une diminution de la fiscalité, si les autres Canadiens y avaient accès. Tout ce que fait cette disposition, c'est permettre que les membres vivant dans la zone tlicho bénéficient des mêmes modalités que tous les autres peuples autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest, et que les députés de l'opposition soient présents pour voter, espérons-le, sur tout accord de ce type. Ils ont un contrôle total sur toute modification de cet accord.
Je partagerai mon temps de parole, monsieur le Président, avec le député de Brant.
Le chapitre 2 porte sur les accords internationaux. L'opposition s'inquiète que le peuple tlicho puisse exprimer ses vues à propos d'accords internationaux qui a des incidences pour lui. Un gouvernement tlicho serait créé et doté de pouvoirs législatifs aux termes du chapitre 7. Toutefois, il n'aurait pas le pouvoir de conclure des accords internationaux. Les pouvoirs législatifs sont exclusivement exposés au chapitre 7, ainsi que les limitations et conditions relatives à ces pouvoirs, particulièrement en ce qui concerne les obligations légales internationales.
Le gouvernement du Canada conserve la compétence exclusive en vertu des accords internationaux, même s'il se peut que certains de ces accords puissent porter atteinte à un droit que l'accord tlicho confère au gouvernement tlicho, à la première nation tlicho ou à un citoyen tlicho.
Toutefois, le Canada a accepté d'offrir au gouvernement tlicho une occasion d'exposer, séparément ou dans le cadre d'une tribune, son point de vue au sujet d'un traité international futur, s'il est possible que ce traité porte atteinte aux droits des Tlichos, comme le prévoit l'article 7.13.2. Il convient de faire remarquer que cette offre n'est pas synonyme d'obligation de consulter. La consultation est un terme défini dans l'accord et elle représente un processus élaboré plus détaillé.
Le Canada a convenu de consulter le gouvernement de la première nation tlicho si le Canada doit comparaître devant un tribunal international lorsque le respect, parle Canada, d’une obligation légale internationale est remis en question en raisond’une loi ou d’une mesure prise par le gouvernement tlicho. C'est ce que dit l'article 7.13.5.
À n'en pas douter, tous les députés ici présents conviendront que si l'accord touche des gens, on devrait leur demander leur avis. Si le gouvernement tlicho adopte une loi ou prend une mesure qui empêche le Canada de s'acquitter d'une obligation légale internationale, l'article 7.13 de l'accord tlicho oblige le gouvernement tlicho à corriger sa loi ou sa mesure pour permettre au Canada de s’acquitter comme il se doit del’obligation légale internationale.
Les lois territoriales l'emporteraient également sur les lois tlichos en cas d'incompatibilité entre une loi tlicho et une disposition de la loi territoriale mettant en oeuvre une obligation imposée au gouvernement du Canada par un accord international. On trouve cette disposition à l'article 7.7.4. En outre, l'article 7.5.12 prévoit que toute loi tlicho concernant la fiscalité est assujettie auxobligations qu’imposent au gouvernement du Canada les traités, conventions etprotocoles internationaux concernant la fiscalité.
Si le gouvernement du Canada et le gouvernement tlicho ne s'entendent pas sur la question de savoir si la loi ou l'exercice du pouvoir des Tlichos empêchent le Canada de remplir une obligation juridique imposée par un accord international, la question serait soumise à l'arbitrage, conformément à l'article 7.3.14.
La troisième objection concerne la confusion au sujet des compétences. Aucune confusion n'est possible. Les compétences sont clairement énoncées. J'aborderai cela rapidement. Selon l'accord, les lois tlichos sont concurrentes aux lois fédérales et territoriales. Cependant, les Tlichos ont convenu explicitement que les lois fédérales l'emporteraient sur les lois tlichos, conformément à l'article 7.7.2, en cas d'incompatibilité. Les questions concernant les Tlichos ne l'emportent pas sur celles de la Couronne fédérale.
Le pouvoir des Tlichos d'élaborer des lois vise à compléter le pouvoir du gouvernement territorial et à être coordonné avec ce dernier. Les lois tlichos l'emporteraient sur les lois territoriales, conformément à l'article 7.7.3, en cas d'incompatibilité, sauf pour ce qui est des lois territoriales concernant les obligations juridiques imposées au Canada par un accord international, conformément à l'article 7.7.4.
Aux termes de l'article 2.8.4, une fois en vigueur, l'accord tlicho prévaudra sur la loi de mise en oeuvre territoriale ou fédérale, dans la mesure de l’incompatibilité ou du conflit . De même, aux termes de l'article 2.8.3, l'accord prévaudra sur les dispositions de toute autre mesure législative fédérale ou territoriale ou des lois tlichos, dans la mesure de l'incompatibilité ou du conflit. Aussi, aux termes de l'article 2.8.3, la loi de mise en vigueur l'emportera sur les dispositions de toute autre mesure législative fédérale ou territoriale ou des lois tlichos, dans la mesure de l'incompatibilité ou du conflit. Cela ne signifie pas que les lois tlichos prévaudront, cela signifie que l'accord prévaudra, et l'accord précise que les lois fédérales prévaudront.
L'article 2.10.7 de l'accord tlicho confirme que l'accord est basé sur une telle hiérarchie. Aux termes de l'article 2.10.5, si un tribunal confirme l'existence d'un droit ancestral de la première nation tlicho, non enchâssé dans l'accord tlicho, les parties devront lancer des négociations afin d'incorporer ce droit dans l'accord. L'article 2.10.6 prévoit que si les parties ne s'entendaient pas sur le texte d'une modification dans un délai d'un an, un arbitre serait appelé à trancher sur la question du texte de modification à incorporer dans l'accord tlicho.
Toutefois, conformément à l'article 2.10.7, l'arbitre ne pourrait que rédiger le texte de manière à ce qu’il soit conforme au libellé de l'accord tlicho et à la hiérarchie des lois que celui-ci prévoit: les lois sont parallèles, les lois fédérales, y compris les mesures concernant les obligations en vertu d'un accord international, prévalent sur les lois tlichos; les lois territoriales concernant les obligations en vertu d'un accord international prévalent sur les lois tlichos; autrement, les lois tlichos prévalent sur les lois territoriales.
J'espère qu'on me posera une question de manière à ce que je puisse faire le survol du chapitre 4, soit l'application universelle de la Constitution et de la charte. C'est le quatrième volet de mon discours.
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Monsieur le Président, en réponse à la dernière question, il a été mentionné à maintes occasions à la Chambre que toutes les lois fédérales relevant du Code criminel continueront de s'appliquer, y compris les dispositions législatives concernant les armes à feu. Cela aura préséance sur les lois tlichos. Cependant, si les Tlichos veulent imposer d'autres restrictions à leur peuple dans un certain nombre de secteurs, au même titre que le font les provinces et les municipalités, l'accord leur permettrait de le faire.
Je suis heureux que le député mentionne la Charte des droits et libertés. Je ne prononcerai pas toute la dernière partie de mon discours, mais une seule phrase pertinente, car je veux faire d'autres observations.
L'article 2.5 de l'accord conclu avec le peuple tlicho prévoit clairement ceci:
La Charte canadienne des droits et libertés s’applique au gouvernement tåîchô à l’égard de toutes les questions relevant de sa compétence.
J'ai été ravi d'entendre des députés d'en face dire que tout le monde doit être assujetti à la Constitution du Canada. Les Tlichos le sont aux termes de cet accord. J'espère que les députés des trois autres partis représentés à la Chambre et les médias se souviendront de cela lors de débats sur d'autres questions, dont celui sur les mariages homosexuels. La plupart du temps, les députés de l'opposition trouvent à redire sur la Constitution et la Charte des droits. Cette fois-ci, ils disent que tout le monde doit y être assujetti.
Un autre député a signalé que les Tlichos doivent toujours exercer leur autonomie dans le respect de la Constitution. Je suis ravi que d'autres députés aient dit que nous souscrivons aux principes de la charte. J'espère qu'ils s'en rappelleront dans le cadre d'autres débats.
On a par ailleurs souligné de l'autre côté de la Chambre que grâce à cet accord, le peuple tlicho sera propriétaire d'une région de 39 000 kilomètres carrés. Je suis heureux de voir que l'opposition est d'accord avec cela. Nous ne donnons pas la terre au peuple tlicho. Les Tlichos ont toujours eu des droits sur ce territoire. Nous définissons un nouveau partenariat dans le cadre duquel le peuple tlicho aura ses propres mesures législatives, tandis que d'autres auront accès à d'autres lois.
Pour terminer, le député a dit que je me comportais comme un libéral type. Je tiens à préciser que je suis heureux et fier d'être un libéral.
Ils ont parlé de la création d'un pays à l'intérieur du pays. J'ignore pourquoi l'opposition voudrait détruire les provinces et les municipalités. Elles ont leurs propres lois dans leur propre sphère de compétences.
Les députés de l'opposition ont également dit que nous créerions un quatrième palier de souveraineté, et c'est exact. Il y a maintenant un quatrième ordre de gouvernement. L'opposition doit comprendre que le pays compte des administrations municipales, des gouvernements provinciaux et des gouvernements autochtones
Il existe une différence essentielle, et les médias devraient en prendre bonne note, entre les libéraux et les députés de la loyale opposition de Sa Majesté dans cette enceinte. Par le passé, le Parti progressiste-conservateur appuyait sans réserve les efforts en faveur des premières nations, de leur autonomie gouvernementale et de leur identité au sein de ce pays pour renforcer cette nation. À maintes reprises, ce parti a voté contre toute évolution des accords concernant les revendications territoriales. La différence entre les deux partis, c'est que le nôtre célèbre la diversité. Nous ne favorisons pas la division. Nous célébrons...
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd’hui pour appuyer le projet de loi C-14, la Loi sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale du peuple tlicho.
Il s’agit d’une entente historique--la première aux Territoires du Nord-Ouest à combiner des revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale. Cette entente résulte de consultations et de négociations exhaustives menées avec honnêteté et ouverture pendant dix ans, qui ont exigé des efforts ciblés et soutenus. Le fruit de ces efforts est un accord tripartite entre le Canada, les Territoires du Nord-Ouest et le peuple tlicho.
L’assemblée législative des Territoires, à Yellowknife, a déjà ratifié l’accord et l’immense majorité du peuple tlicho l’a approuvé par voie d’un référendum spécial.Il nous incombe maintenant d’étudier cet accord, qui est au cœur du projet de loi C-14.
Je suis persuadé qu’un examen attentif de l’entente confirmera son importance primordiale pour le peuple tlicho et le Canada. Certains de mes collègues souligneront sans aucun doute des aspects particuliers du projet de loi; pour ma part, je voudrais fournir des détails sur les négociations et les consultations qui ont permis sa mise sur pied. Ma décision d’appuyer sans réserve le projet de loi C-14 se fonde en grande partie sur les efforts extraordinaires déployés par les hommes et les femmes qui ont participé à l’élaboration de l’accord tlicho. Pour apprécier à sa juste valeur l’entente en question, je pense que mes collègues doivent prendre connaissance des nombreux défis qu’ont dû surmonter les négociateurs.
Le peuple tlicho est l’un des nombreux peuples autochtones établis depuis des temps immémoriaux dans les vastes étendues que l’on nomme les Territoires du Nord-Ouest. Ces hommes et ces femmes ont un lien particulier et profondément spirituel avec la terre, qui a toujours assuré leur subsistance. Le concept de propriété et de contrôle du territoire leur était étranger jusqu’à tout récemment. Pour que les négociations puissent se dérouler avec équité, il fallait tout d’abord que le peuple tlicho en comprenne les enjeux.
Les négociateurs pour les Territoires du Nord-Ouest et le Canada ont fait face à différents défis. Ces hommes et ces femmes devaient, entre autres, s’assurer que l’entente serait profitable à la fois pour les Tlichos et pour tous les Canadiens. D’où la décision d’inclure le concept d’autonomie gouvernementale dans l’entente. Car seul un gouvernement responsable, à l’écoute de ses citoyens et leur rendant des comptes peut permettre aux Tlichos de prospérer dans un monde moderne et de préserver leur culture et leurs traditions.
Pour relever ces défis, il a évidemment fallu beaucoup de respect et de considération mutuels. Pour franchir la barrière de la langue et de la culture, la sensibilisation et la communication se sont révélées essentielles. Pour assurer le bon fonctionnement de l’autonomie gouvernementale et le respect de la culture locale, une constitution tlicho s’imposait. La constitution, tout comme l’accord lui-même, a été élaborée et ratifiée avec la participation active des citoyens tlichos.
Depuis le début des négociations, il y a près de dix ans, les trois parties ont veillé à la tenue d’un grand nombre de séances d’information et de consultation. À certaines étapes du processus, des séances publiques et des rencontres bilatérales ont eu lieu dans les quatre collectivités tlichos et à Yellowknife, la grande ville située la plus près. On a renseigné les représentants d’entreprises, de groupes d’intérêt et d’organismes publics et sollicité leurs commentaires. Des groupes de femmes, des associations industrielles et environnementales ont aussi participé activement à ces séances.
De nombreuses réunions ont donné lieu à des débats empreints de passion et d’émotion sur les avantages et les limites des diverses propositions. Les commentaires recueillis au cours de ces séances ont eu un impact marqué sur l’accord tlicho.En fait, les commentaires reçus sont à l’origine de plusieurs changements apportés: les critères d’admissibilité et d’inscription ont été modifiés et les frontières de la zone de gestion du Wekeezhii ont été précisées.
En outre, les opinions exprimées pendant ces réunions ont convaincu les négociateurs tlichos de mener des discussions distinctes avec leurs voisins autochtones dans les Territoires du Nord-Ouest, relativement au chevauchement des territoires. Les Tlichos ont reconnu que l’accord aurait un impact important sur ces groupes.
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Monsieur le Président, les Tlichos ont reconnu que leur accord aurait des répercussions importantes sur ces groupes. Pour veiller à ce que les relations futures entre toutes les collectivités autochtones soient harmonieuses, les Tlichos ont commencé à négocier des accords de chevauchement avec les Deh Cho et les Dénés de l'Akaitcho visés par le Traité n
o 8. À l'automne de 2000, ces discussions avaient conduit à des accords distincts avec chaque groupe. De plus, des accords de chevauchement ont été négociés avec les Dénés et Métis du Sahtu et les Gwich'ins.
En mars 2003, les négociateurs des trois parties ont paraphé l'accord tlicho, ce qui a conduit à un processus de ratification officiel. Pour veiller à ce que tous les Tlichos aient l'occasion d'étudier l'accord, les Tlichos ont produit une version simple, claire, rédigée en termes neutres, de l'accord. Des exemplaires de cette version simplifiée de 27 chapitres ont été distribués gratuitement.
Une période d'essai de trois mois a été prévue pour veiller à ce que toutes les parties intéressées aient une dernière occasion d'exprimer leurs opinions. Des séances de questions et de réponses ont eu lieu dans les quatre collectivités tlichos. On a fixé la date d'un référendum. Des campagnes ont été conçues et mises en oeuvre pour veiller à obtenir une forte participation des électeurs.
Les résultats de vote ont été dans une très large mesure positifs. En effet, 84 p. 100 de ceux qui ont voté se sont prononcés en faveur de cet accord.
Pendant que mes collègues étudient le pour et le contre de l'accord qui est au coeur du projet de loi C-14, je les encourage à examiner son contexte dans le cadre des relations qui évoluent rapidement entre les premières nations, les Inuits, les Métis, les habitants du Nord et les autres Canadiens.
L'accord tlicho propose une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Tlichos, une relation basée sur le respect mutuel et la reconnaissance mutuelle. L'accord donne des responsabilités et des droits précis aux Tlichos et met en oeuvre de nouvelles dispositions financières.
Aux termes de l'accord, le gouvernement tlicho et les citoyens tlichos sont assujettis à la Charte canadienne des droits et libertés, au Code criminel et à d'autres lois fédérales.
Je suis persuadé que l'accord tlicho améliorera également les négociations en cours avec d'autres groupes autochtones des Territoires du Nord-Ouest. L'accord renforce la valeur et la pertinence du processus de négociation. Voici d'ailleurs ce qu'a dit la Cour suprême du Canada à ce sujet:
En fin de compte, c'est par des règlements négociés de bonne foi et une attitude souple de toutes les parties [...] que nous réaliserons [...] l'un des buts fondamentaux de l'article 35(1), soit la conciliation de l'existence antérieure des sociétés autochtones avec la souveraineté de la Couronne. Soyons réalistes: nous sommes tous ici pour y rester.
L'accord tlicho va au-delà d'une reconnaissance mutuelle et il envisage une nouvelle relation fondée sur le respect entre les Canadiens et les premières nations, les Inuits, les Métis et les habitants du Nord. En appuyant le projet de loi C-14, la Chambre envoie aux groupes autochtones du pays un message puissant, un message de reconnaissance, d'espoir et de réconciliation.
J'exhorte mes collègues à approuver ce projet de loi sans délai.
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Monsieur le Président, je remercie l'intervenant précédent pour ses propos sur le projet de loi, mais j'aimerais lui poser une question au sujet de ce qu'il a dit pour ce qui est de donner de l'espoir aux autochtones, et le reste.
Bien avant que je siège à la Chambre, soit en 1993, et pendant toutes les années au cours desquelles j'y ai siégé, nous avons évoqué à de nombreuses reprises, à la Chambre et ailleurs, la situation absolument terrible qui règne dans de nombreuses réserves. Par « choses terribles », j'entends la pauvreté, le chômage, la toxicomanie, les suicides, le manque d'instruction, les atrocités qui sont commises dans les réserves et les problèmes qui nous ont été signalés par de nombreux autochtones de la base. On a fait état de corruption et de mauvaise gestion, et tous ces problèmes semblent toujours d'actualité. Nous en avons parlé. Nous voulons faire quelque chose à leur sujet. Nous voulons venir en aide aux gens qui souffrent.
Je suis entré dans des maisons qui avaient belle apparence, vues de l'autoroute, mais dans lesquelles il n'y avait ni eau courante, ni chambres, ni toilettes. Ces maisons n'ont jamais été aménagées à l'intérieur; elles ne sont qu'une coquille vide. J'ai parcouru le pays pendant environ deux ans et, dans de nombreuses réserves, je me suis retrouvé dans des roulottes et des autobus tombés en panne, dans lesquels des familles avaient tenté de s'installer avec leurs enfants. On y retrouve beaucoup de souffrance. Les soins de santé et l'eau propre y manquent.
Un rapport a été publié sur le pays où il faisait le mieux vivre. Je suis fier que le Canada ait facilement remporté ce titre à deux ou à trois reprises. Le Canada a donc été décrété le meilleur pays où vivre. Cependant, si on avait tenu compte des réserves indiennes, nous nous serions retrouvés au 38e rang. Dans les réserves, des conditions du tiers monde et la corruption règnent.
S'il existe un seul gouvernement qui s'y connaisse en corruption, nous pourrions croire qu'il s'agit du gouvernement actuel. La façon d'y mettre un terme serait de procéder à des élections honnêtes et le reste. Mais ces problèmes subsistent.
Je suis sûr que le député est au courant des atrocités qui sont commises dans les réserves. Pourrait-il m'indiquer de quelle façon cet accord ou tout autre du même genre va améliorer de telles situations? Comment cet accord va-t-il améliorer les conditions de vie des gens qui vivent dans ces réserves et qui ont désespérément besoin de notre aide?
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Monsieur le Président, j'estime que tous les députés partagent le point de vue selon lequel le gouvernement a la responsabilité de négocier et de régler les revendications globales qui restent en fonction des principes de l'équité et de la faisabilité.
Le Parti conservateur croit qu'accorder aux gouvernements autochtones le pouvoir de recueillir leurs propres revenus brisera le cycle de dépendance et que le rendement et la responsabilité d'un gouvernement autonome se trouvent améliorés lorsque les bénéficiaires des services participent aux coûts de ces derniers.
Bien que je souscrive à l'objet global du projet de loi C-14, soit la ratification de l'accord sur les revendications territoriales et l'établissement d'un gouvernement autonome pour le peuple tlicho, je ne puis appuyer ce projet de loi dans son libellé actuel.
L'autonomie gouvernementale doit s'inscrire dans le contexte de la Constitution du Canada pour assurer l'équité et l'égalité. Pour être ratifié, tout règlement de revendications territoriales globales doit se fonder sur une base mettant clairement en équilibre les droits des autochtones et ceux des autres Canadiens. Plus précisément, les accords négociés doivent se fonder sur des certitudes et des termes définitifs; ils doivent en outre prévoir des structures institutionnelles praticables de manière à ne pas entraver la façon dont tous les habitants du pays sont gouvernés. Hélas, le projet de loi ne tient pas compte de ces principes.
L'accord établira un précédent et servira de guide pour les revendications, les accords et les ententes d'autonomie gouvernementale à venir dans tout le Nord. J'espère que les députés ministériels prendront le temps de songer aux répercussions de cette mesure. S'il est adopté, le projet de loi créera un nouvel ordre de gouvernement pour quelque 3 500 personnes vivant dans une région s'étendant sur quelque 39 000 kilomètres carrés qui seront gouvernées par une constitution tlicho distincte.
Cette mesure, si elle entre en vigueur, pourrait compromettre la souveraineté du Canada parce qu'elle ne limite pas le pouvoir du gouvernement tlicho de conclure des traités interterritoriaux, interprovinciaux, nationaux et internationaux. Cela représente une claire et nette diminution du pouvoir du gouvernement fédéral et ne peut qu'entraîner de la confusion et des conflits juridiques dans l'avenir.
Il suffit d'examiner la façon dont le projet de loi prescrit la hiérarchie de pouvoir pour se convaincre qu'il entraînera de la confusion. Les articles 7.7.2 à 7.7.4 dressent l'ordre de préséance des lois comme il suit: les lois fédérales d'application générale, les lois territoriales mettant en oeuvre les ententes internationales canadiennes, les lois du peuple tlicho, les lois territoriales d'application générale et les lois fédérales particulières ayant trait au peuple tlicho. Autrement dit, les lois du peuple tlicho ont préséance sur les lois territoriales et aussi sur les lois fédérales concernant le peuple tlicho.
On pourrait croire qu'il s'agit d'un débat d'ordre technique qui n'intéresse que les constitutionnalistes, mais imaginons quelles seraient les conséquences d'un tel ordre de préséance si on l'appliquait à d'autres autorités publiques que les Canadiens connaissent beaucoup mieux. Ainsi, serait-il raisonnable de donner à une municipalité, par exemple la ville de Lincoln, d'où je viens, le pouvoir d'adopter des règlements qui primeraient les lois provinciales et fédérales? Je connais beaucoup de maires et de conseillers et peut-être même quelques simples habitants de ma circonscription de Niagara West—Glanbrook auxquels l'idée plairait à première vue, mais seulement à première vue.
Nous avons créé au Canada un enchevêtrement insensé de lois inapplicables qui entrent en conflit les unes avec les autres, ce qui est incompatible avec la structure de gouvernance établie par la Constitution du Canada.
Le gouvernement tlicho a le pouvoir d'établir des lois dans les domaines suivants: les permis de récolte du poisson; l'utilisation de l'eau pour l'aquaculture et d'autres activités; les limites de récolte du poisson; les dates de la récolte de poisson et l'équipement pouvant être utilisé à cette fin; les entreprises, les métiers, les professions et les activités de nature localesur les terres tlichos; le contrôle ou l’interdiction du transport, de la vente, de la fabrication, de lapossession ou de l’utilisation d’armes et de substances dangereuses; le contrôle ou l’interdiction du transport, de la vente, de la possession ou del’utilisation de substances intoxicantes; l'utilisation de la langue tlicho et la protection de la culture tlicho; la médecine traditionnelle; les ressources patrimoniales; l'adoption d'enfants tlichos dans les Territoires du Nord-Ouest; la taxation directe des citoyens tlichos sur les terres des Tlichos; les pouvoirs d'application de la loi.
Si, compte tenu de ce précédent, des accords semblables d'autonomie gouvernementale sont conclus dans le reste des Territoires du Nord-Ouest, je me demande quelles responsabilités et quels pouvoirs le gouvernement prévoit laisser aux gouvernements territoriaux. En établissant une telle structure de gouvernance, ce projet de loi nous entraîne sur une pente dangereuse.
L'application de la Charte canadienne des droits et libertés aux citoyens tlichos risque d'être compromise. L'accord avec les Tlichos et la Constitution tlicho parlent de conformité avec la Charte, mais pourtant on dit bien, à l'article 3.1 de la Constitution tlicho que celle-ci est la loi suprême de la nation tlicho. Embrouillé, contradictoire et inapplicable, voilà comment on devrait qualifier ce projet de loi en ce qui concerne la relation qu'il établit entre la Constitution du Canada, la Charte canadienne des droits et libertés et la Constitution tlicho.
L'accord lui-même prévoit un système de gouvernance fondé sur la race. Une nouvelle catégorie de Canadiens voit le jour. Ce sont les « citoyens tlichos ». Seul un citoyen tlicho peut être élu chef du gouvernement tlicho. De plus, au moins 50 p. 100 des conseillers élus doivent être des citoyens tlichos.
Ce projet de loi établit un système électoral fondé sur des considérations raciales. Selon cet accord, une personne non reconnue comme citoyen tlicho peut vivre dans la collectivité et y participer, mais n'a pas le droit d'être élue chef. Le gouvernement ne voit-il pas le problème fondamental que cause la création de différents niveaux de citoyens? Je soutiens non seulement que cela est contraire à la Charte des droits et libertés, mais aussi que c'est tout simplement inadmissible. Il ne faut pas être constitutionnaliste pour constater qu'il y a là des injustices flagrantes.
Enfin, malgré l'immense générosité du gouvernement, qui offre des terres, des fonds, des ressources et des pouvoirs aux Tlichos, il faut noter que cet accord n'est même pas définitif.
Je voudrais également mentionner un point au sujet de notre liberté d'accès à l'information. Au paragraphe 2.12, intitulé « Communication des renseignements », on dit:
Sous réserve de l’article 2.12.3, et par dérogation aux autres dispositions de l’Accord, ni le gouvernement, notamment les gouvernements communautaires tlichos, ni le gouvernement tlicho ne sont tenus de communiquer un renseignement qu’ils peuvent ou doivent refuser de communiquer aux termes de toute mesure législative ou loi tlicho relative à l’accès à l’information ou à la protection des renseignements personnels.
Nous pouvons encore une fois nous interroger au sujet des lois tlichos. Si le gouvernement a besoin de renseignements, y aura-t-il accès? Cela n'est pas très clair.
L'article 2.12.2 dit:
Lorsque le gouvernement, y compris le gouvernement communautaire tlicho ou l e gouvernement tlicho, a la faculté de communiquer des renseignements, il doit tenir compte des objectifs de l’Accord dans l’exercice de ce pouvoir discrétionnaire.
L'article 2.12.1 dit:
...refuser de communiquer aux termes de toute mesure législative ou loi tlicho relative à l’accès à l’information ou à la protection des renseignements personnels.
On peut donc se demander quelles sont exactement les exigences à respecter lorsqu'il est question de l'accès à l'information et des renseignements qu'il sera possible d'obtenir.
Ce projet de loi établit un système de gouvernance fondé sur des considérations raciales, il mine les pouvoirs fédéral et territorial et il suscite une confusion juridique qui permettra probablement à quelques constitutionnalistes de s'enrichir. Pour couronner le tout, l'Accord tlicho est laissé entièrement ouvert, de sorte que la question n'est pas vraiment réglée.
Cet accord et le projet de loi n'ont manifestement pas été examinés dans l'intérêt des Canadiens. Il n'existe aucun équilibre entre les besoins socioéconomiques des Tlichos et la nécessité pour le Canada de parvenir à un accord efficace et définitif qui établisse un ordre de prépondérance pratique. Ce projet de loi recèle beaucoup trop de lacunes pour être adopté. Tout ce que le gouvernement accomplira s'il est adopté, c'est qu'il créera de l'incertitude constitutionnelle et juridique pour des décennies à venir.
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Madame la Présidente, je suis heureux d'intervenir au sujet du projet de loi C-14, la Loi sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale du peuple tlicho.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je profite de l'occasion pour remercier les électeurs de Calgary-Nord-Est de m'avoir fait confiance en me choisissant de nouveau pour les représenter à la Chambre des communes. Je m'engage à continuer d'exposer comme il se doit leurs points de vue et leurs préoccupations, à Ottawa. Je remercie les citoyens de Calgary-Nord-Est de leur confiance.
L'accord intervenu entre le peuple Tlicho, le gouvernement du Canada et les Territoires du Nord-Ouest confère au peuple Tlicho le contrôle de 39 000 kilomètres carrés de territoire situé entre le Grand lac des Esclaves et le Grand lac de l'Ours. En voiture, il faut environ une heure et demie pour faire le tour de ce territoire d'une superficie appréciable où vivent 3 500 personnes. De toute évidence, ce sont d'énormes responsabilités pour ce genre de territoire.
Il ne fait aucun doute que de nombreuses activités sont à prévoir dans les Territoires du Nord-Ouest. Certainement, compte tenu du cadre où se situe ce territoire, les activités comprendront entre autres l'exploitation minière et la pêche. Le transport s'avérera un élément déterminant et aura certainement une incidence sur toutes les activités commerciales des entreprises et des gouvernements sur ce territoire.
J'estime nécessaire de mettre cet accord d'autonomie gouvernementale en oeuvre pour éviter les interminables imbroglios de compétences quant aux éventuelles activités sur le territoire. En ce qui me concerne, il est certain que le Nord recèle de grandes promesses et offre un potentiel énorme, non seulement pour ses habitants mais aussi pour l'ensemble des Canadiens. J'imagine que le gouvernement, en face, aimerait que les choses se déroulent sans anicroche, pour qu'il soit possible de mener des affaires dans le Nord de façon à ce que l'ensemble des Canadiens en bénéficient.
Cet accord est peut-être l'un des plus importants que le gouvernement du Canada ait conclu au cours des dernières années. Or, à mon étonnement, il n'a suscité que très peu d'attention, même si l'on sait qu'il est susceptible d'avoir des répercussions positives et négatives sur les intérêts à long terme du Canada.
Même si je ne peux donner mon avis sur toutes les questions qui ont été abordées jusqu'à maintenant, je vais aborder un ou deux points. Certaines de ces questions sont pour moi une source de préoccupation quand je pense à ce que certaines des dispositions de cette mesure impliquent vraiment.
Je vais m'arrêter sur les pouvoirs législatifs qui ont été conférés au gouvernement tlicho. Je sais que cela fait toujours l'objet de débats chaque fois qu'il est question de règlement de revendications territoriales ou même des activités qui se déroulent dans diverses réserves du pays. Même si les lois canadiennes s'appliquent en théorie à toutes les instances relevant des lois fédérales, en réalité, on peut se demander si c'est bien le cas.
J'ai déjà posé une question à l'une des secrétaires parlementaires au sujet de l'une des réserves du sud.
Comme mon parti, j'aimerais que ces revendications territoriales finissent par se régler. Cependant, nous voulons qu'elles soient réglées à l'avantage des habitants des territoires en question, mais aussi qu'elles contribuent au bien-être de la nation dans son ensemble et que ceux qui vivent sur ces terres soient assujettis aux lois canadiennes et qu'ils jouissent du même traitement équitable que tous les autres citoyens.
La secrétaire parlementaire a affirmé que toutes les réserves bénéficient du même traitement, mais je ne suis pas d'accord avec elle. Je visité de nombreuses réserves et, même en l'absence de revendications territoriales précises, leurs habitants ont été conditionnés à croire qu'ils forment une entité autonome et qu'ils ne sont pas assujettis aux lois du Canada et des États-Unis et à leur application. Pour une raison inconnue, il y a eu tellement d'ingérence politique que le bien-être même des gens vivant sur ces réserves a été remis en question. En effet, certaines personnes y sont menacées.
Le bilan des libéraux me préoccupe, non pas parce qu'on règle les revendications territoriales, mais parce que, lorsqu'il s'agit de mettre en oeuvre et d'appliquer les lois équitablement, dans l'ensemble du pays, le bilan des libéraux a été mis en question.
Je souhaite attirer l'attention sur un ensemble de déclarations ayant trait aux pouvoirs législatifs accordés au gouvernement tlicho. Deux de ces pouvoirs relèvent tout à fait de la compétence fédérale.
Le premier pouvoir a trait au transport, à la vente, à la possession, à la fabrication ou à l'utilisation d'armes ou de produits dangereux. Nous avons au Canada des lois d'application nationale à cet égard. Elles réglementent les armes à feu et les explosifs. Le Code criminel s'applique à toute personne qui contrevient à ses dispositions. Pourtant, il s'agit d'un domaine où le gouvernement tlicho sera en mesure de promulguer des lois pouvant donner le droit de fabrication ou d'utilisation d'armes et de produits dangereux.
Le second pouvoir a trait au contrôle ou à l'interdiction du transport, de la vente, de la possession, de la fabrication ou de l'utilisation de substances intoxicantes. Les Tlichos se sont vu accorder le pouvoir d'intervenir dans ces domaines. On ne voit pas clairement qui va faire observer quoi, s'il y aura un organisme d'exécution, et où pourront s'adresser les personnes accusées ou condamnées qui ne seront pas satisfaites des résultats relevant de la compétence des Tlichos.
Cela nous ramène à l'argument portant que le gouvernement tlicho semble avoir le dernier mot à tous les paliers de pouvoir dans le cadre de cette nouvelle compétence que le gouvernement souhaite établir. Où se situe donc le mécanisme d'appel dans tout cela?
J'aimerais aborder en dernier lieu la question de l'accès à l'information. Où et comment s'appliquent les règles d'accès à l'information, si toutefois elles s'appliquent? Selon ma lecture du projet de loi, il me serait très difficile, en ma qualité de député, tout comme il le serait à toute personne s'intéressant à la compétence du gouvernement dont la création est proposée, d'avoir accès à l'information portant sur ce gouvernement en particulier.
Je tiens à faire savoir ici que je n'appuierai pas ce projet de loi. Il faudra, selon moi, pousser plus loin le débat et obtenir davantage de contributions avant d'aboutir à un projet définitif en matière d'autonomie gouvernementale des Tlichos.
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Madame la Présidente, certains citoyens trouveront probablement le projet de loi discutable, et plus ils approfondiront leurs recherches, plus ils auront des réserves.
En réalité, cette mesure législative remonte à la proclamation émise en 1763 par le roi George III, il y a 301 ans presque jour pour jour.
Cela nous ramène à une situation qui doit être admirée dans ce grand pays qui est le nôtre, à savoir que nous nous sommes engagés à protéger les droits des citoyens, y compris ceux qui ne peuvent pas se protéger eux-mêmes. C'est pour cette raison que je m'oppose au projet de loi.
La Constitution protège les droits des autochtones et les décisions rendues par la Cour suprême du Canada, plus particulièrement en 1997, protègent et renforcent les droits des autochtones.
J'encourage quiconque est offensé par le projet de loi ou s'y oppose, à se renseigner sur l'histoire des revendications des autochtones dans notre pays. Il y a sur Internet, par exemple, beaucoup de sites qui offrent de l'information.
En tant que Canadiens, nous ne pouvons pas négliger ces droits. Nous devons protéger tous les citoyens, quel que soit leur statut. En ma qualité d'avocat, j'ai défendu les droits des autochtones devant les tribunaux de l'Alberta, et j'en suis très fier.
Personnellement, je suis en faveur du règlement de toutes les revendications en suspens. Je conviens avec le gouvernement fédéral que nous devons y donner suite. Mais, à quel prix?
Je ne peux pas appuyer un accord qui soustrait les citoyens d'une région du Canada à l'application de la Constitution ou de la Charte. Je ne peux pas appuyer un accord qui usurpe le pouvoir du fédéral de négocier avec les gouvernements étrangers, et je pense que cela causerait des problèmes importants et, malheureusement, sèmerait la zizanie dans notre pays.
Je crois que nous établissons un dangereux précédent. J'affirme qu'on peut soutenir avec succès que, aux termes de cette mesure législative, les citoyens tlichos auraient leur mot à dire sur tout accord international. Il se pourrait donc qu'il faille que les accords internationaux soient ratifiés par la bande tlicho avant que nous, en tant que pays souverain, puissions y adhérer. Je trouve cela très dérangeant.
Comme je le disais, je suis originaire du nord-est de l'Alberta. Je suis très fier de représenter une circonscription peuplée à 20 p. 100 d'autochtones. Je suis fier de compter parmi les membres de ma famille 20 personnes qui ont le statut d'autochtone et qui appartiennent à des bandes, soit en vertu d'un traité, du traité 8 en particulier, soit de par leur statut. Depuis les années 1970 je chasse, je fais du piégeage, je joue au hockey et je travaille côte-à-côte avec des autochtones dans le Nord-Est de l'Alberta. Ces Canadiens doivent être respectés et nos accords avec eux doivent eux aussi être respectés.
En tant que Canadiens, nous devrions être gênés et même avoir honte du fait que nous avons toujours refusé, depuis 300 ans, de négocier des accords sur les revendications territoriales des autochtones et qu'aucune entente n'a encore été signée. Nous aurions dû régler ces questions il y a des centaines d'années; elles ne feraient pas l'actualité aujourd'hui.
À l'instar de tous les membres du caucus conservateur, je respecte la culture et la diversité des peuples autochtones. Je me préoccupe franchement du sort du peuple tlicho. Les Tlichos seront-ils protégés par la Charte? Susciterons-nous plus de tensions au sein de la collectivité en créant deux classes de citoyens? Tous, hommes et femmes, seront-ils protégés?
Aujourd'hui, on nous demande d'approuver un accord définitif. Il s'agit en fait d'un accord définitif pour nous, mais pas nécessairement pour le peuple tlicho. Il serait impossible de revenir sur les principes de l'entente, mais les Tlichos pourraient obtenir de nouveaux avantages à l'issue de négociations avec d'autres bandes des Territoires du Nord-Ouest. Les Tlichos pourraient alors renégocier un accord définitif.
Il semble que l'accord soit perçu comme une décision définitive en matière de revendications territoriales, mais je n'y crois pas. L'avocat que je suis a parcouru le texte législatif et n'a pas vu comment cet accord pourrait être interprété comme une entente définitive.
Ce n'est pas que nous tentons de déterminer si l'accord sera juste ou combien il coûtera. À mon avis, l'accord n'a rien de substantiel. Ceux qui ont négocié l'accord ont sûrement tenu compte de tous les aspects possibles de la question et leur position doit être respectée.
Les Tlichos doivent être respectés et protégés. C'est ce qui me préoccupe. Ce qui compte, c'est l'avenir, l'harmonie chez les Tlichos mais aussi le règlement harmonieux de toutes les revendications territoriales futures des premières nations, dans les Territoires du Nord-Ouest et en Colombie-Britannique.
On compte actuellement 3 500 Tlichos reconnus aux termes de l'accord, mais combien seront-ils, dans 100 ans, à contrôler un territoire aussi étendu que le Nouveau-Brunswick? Je ne dis pas cela dans l'intérêt des autres Canadiens, mais pour ceux qui sont de descendance tlicho. Certaines personnes seront traitées d'une manière et d'autres différemment, alors que toutes sont originaires du même territoire traditionnel.
Selon moi, le gouvernement du Canada a l'obligation fiduciaire de conclure des accords définitifs avec les premières nations, mais pas aux dépens des autres membres de la bande, pas au mépris des droits que leur reconnaît la Charte ou de l'harmonie future de l'ensemble du Canada. L'autonomie gouvernementale est nécessaire et je crois pouvoir affirmer, au nom de tous mes collègues, que c'est la meilleure façon d'assurer les progrès des autochtones. C'est, de loin, la meilleure solution pour les Tlichos et pour l'avenir du Canada.
J'implore le gouvernement de voir plus loin que l'instant présent, et de ne pas s'en tenir à un règlement immédiat pour solutionner le problème et assurer le fonctionnement de l'économie afin de permettre aux Tlichos de connaître la prospérité économique, sans prendre en compte toutes les ramifications futures. J'implore le gouvernement de tenir compte de l'avenir du Canada, de l'avenir des Tlichos, qu'ils soient citoyens tlichos ou d'ascendance tlicho, de s'assurer qu'ils bénéficient d'une protection complète et irrévocable dans tous les domaines qui relèvent de la Charte, et que les Tlichos et le territoire qu'ils contrôleront, d'une superficie comparable à celle du Nouveau-Brunswick, soient assujettis à la Charte et à la Constitution. J'implore le gouvernement de conclure un accord définitif, pour qu'on ne puisse pas revenir en arrière, renégocier et perpétuer les dissensions.
Enfin, il est absolument indispensable que nous protégions notre souveraineté internationale. Nous devons faire en sorte que le gouvernement fédéral puisse, dans l'intérêt du pays, continuer de conclure des traités qui lient le peuple canadien sur le plan international, sans avoir à soumettre chacun de ces traités à la ratification de chaque bande.
Je crois que, dans l'intérêt du Canada, certaines choses ne peuvent être cédées par la négociation. En l'occurrence, je crois que nous sommes en train de renoncer à l'application de la Charte, de la Constitution et des droits reconnus par ces deux textes fondamentaux. Je ne crois pas que ce soit dans le meilleur intérêt du Canada et des Canadiens.
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Madame la Présidente, j'aimerais formuler quelques observations au sujet de l'accord.
Tous les députés de ce côté-ci de la Chambre s'entendent certainement pour dire que les accords qui font progresser les peuples autochtones sont tout à fait justifiés aux yeux des Canadiens. La prise de conscience, le respect à l'égard des peuples autochtones et une diminution de leur dépendance à l'endroit du gouvernement, tout cela est fort bien. Mais honnêtement, lorsque nous voulons améliorer un accord, je trouve un peu insultant que les députés d'en face laissent entendre que nous sommes contre les peuples autochtones, car cela n'est pas du tout le cas.
Cet accord représente un progrès énorme pour tous les Canadiens, mais je crois qu'il dépasse un peu la mesure. Certaines parties de cet accord suscitent de grandes préoccupations que j'aimerais aborder.
D'abord, et je crois être le premier à aborder cette question, l'accord crée ce qui semble être un système électoral distinct fondé sur la race. Tant l'accord que la Constitution des citoyens tlichos prévoient que la moitié des conseillers sont des citoyens tlichos. Ce type de gouvernement ou de structure n'existe nulle part ailleurs au Canada. Cela soulève de grandes préoccupations. Par ailleurs, il semble que l'accord conférerait à ce groupe de personnes le droit de négocier ses propres accords internationaux.
Je sais qu'il y a un tas de détails à examiner et nombre de points de vue quant à savoir où cela peut nous mener dans l'avenir, mais il n'en demeure pas moins que nous ne pouvons pas prédire l'avenir. Les députés d'en face pourraient-ils dire comment cela touche les droits des autochtones de négocier des traités relativement aux pêches? Peuvent-ils produire des armes et les vendre à l'échelle planétaire? Pourrons-nous intervenir dans le cas où de telles décisions seraient prises?
Par ailleurs, bien que les députés d'en face disent le contraire, cet accord engendre de la confusion en matière de compétences. L'article 3.1 de la Constitution tlicho établit que « La Constitution tlicho est la loi suprême de la nation tlicho ». Je ne sais pas ce que cela signifie. Est-ce à dire qu'ils doivent tenir compte des lois canadiennes ou ne sont-ils assujettis qu'aux lois qu'ils adoptent eux-mêmes?
Par ailleurs, je me permets de lire la partie de la Constitution tlicho indiquant ce que nous devons faire pour contester une loi tlicho. Voici:
Toute personne directement touchée par une loi tlicho peut en contester la validité. L'organisme compétent en la matière a le pouvoir d'annuler la loi tlicho faisant l'objet de la contestation ou d'en limiter l'application.
Tout cela est très bien et il semble que cela soit conforme à ce qui se produit ailleurs au Canada. Toutefois, si nous ne sommes pas d'accord avec les motifs d'une décision prise par les autorités d'une municipalité, par exemple, nous pouvons soumettre la question à un tribunal supérieur. Aux termes de la Constitution tlicho, cela n'est pas possible. On peut y lire ce qui suit:
En l'absence d'une loi tlicho prévoyant une procédure à suivre pour contester la validité des textes législatifs, une telle contestation doit prendre la forme d'un appel déposé devant l'Assemblée tlicho.
Cette Constitution ne prévoit aucune marge de manoeuvre et je crois que cela est résolument inconstitutionnel dans la structure canadienne.
Je ne tiens pas du tout à faire des commentaires sur les dispositions générales de l'entente. Ce n'est pas là une diversité que le Canada honore et respecte, la diversité du multiculturalisme. C'est une pomme de discorde. Cette mesure crée en fait toute une série de pays différents qui exercent leurs propres pouvoirs et qui sont en mesure de faire des lois et de négocier des traités internationaux au sein de notre pays.
Je viens de Cambridge en Ontario et je m'inquiète du genre de précédent qu'une telle mesure peut créer. Il y a dans ma collectivité des gens de toutes sortes d'origines ethniques, ce qui entraîne un pluralisme extraordinaire. Cela signifie-t-il que nous aurons dans cinq ou dix ans toute une série de petites collectivités qui pourront créer leurs propres lois et qui auront leur propre système judiciaire tout à fait indépendant? Avant d'aller plus loin dans ce dossier, nous devrions nous pencher sur les réalités que ces questions soulèvent.
C'est sûr que nous devons aller de l'avant pour le bien des peuples autochtones. Il ne fait aucun doute que le gouvernement en place n'a pas fait grand-chose pour eux au cours de la dernière décennie. Toutefois, nous avons été trop loin avec cette entente. Toutes les parties devraient y trouver leur compte. Dans le cas présent, cette entente est très positive pour les Tlichos, mais ce n'est pas du tout le cas pour le Canada et pour l'avenir de notre pays.
J'exhorte la Chambre à examiner cette entente à nouveau et à en évaluer soigneusement les répercussions secondaires. La réaction impulsive du gouvernement, qui tenait à tout prix à trouver une solution, menace l'avenir du Canada.
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Madame la Présidente, là encore, c'est un plaisir de prendre la parole sur cette question, surtout dans la mesure où elle a trait aux peuples autochtones et aux peuples des premières nations de notre pays. J'ai passé quelques années au Parlement, j'ai voyagé dans le pays et j'ai visité de nombreuses réserves. J'ai écouté de nombreuses personnes sur le terrain et entendu leurs préoccupations. Et ça dure depuis des années et des années.
Il y a un moment, un député libéral a dit que nous devrions voir certaines de nos propres déclarations. Malheureusement, la seule déclaration que j'ai trouvée chez les libéraux est la même litanie, dans les discours du Trône, répétée année après année : les conditions de vie dans les réserves sont honteuses et déplorables et les libéraux sont décidés à s'engager à faire quelque chose pour remédier à la situation.
Après une longue marche, voilà que nous avons l'actuel premier ministre. Et maintenant ? Je vous le donne en mille : il est un de ces leaders ayant dit être l'homme providentiel qui s'efforcera de régler les problèmes des réserves. C'est la même rengaine. Nous entendons ça sans arrêt depuis 1993, et même depuis plus longtemps. Nous avons entendu tout ce que les libéraux feraient, et pourtant, ce qui reste à faire concerne en grande partie des besoins très élémentaires.
Le Parti conservateur croit en l'autonomie gouvernementale et il croit que c'est une bonne chose. Toutefois, personne ne saurait contester le fait que cette autonomie doit être acquise dans le respect de la Constitution du Canada. Nous voulons nous assurer que c'est le cas pour tout règlement. Nous croyons aussi que cette autonomie doit être structurée de façon à faire en sorte que l'harmonie constitutionnelle soit telle qu'elle ne gêne pas les gouvernements d'autres régions de notre beau grand pays, notamment les gouvernements provinciaux et municipaux. Nous voulons que les choses soient faites comme il faut.
Ce qui compte pour moi et pour un grand nombre de personnes à qui j'ai parlé est très simple. Les accords et les règlements qui seront négociés vont-ils aider à régler le grave problème du chômage et de la pauvreté? Dans certaines réserves, le taux de chômage atteint 90 p. 100. Il existe aussi des dangers pour la santé et des endroits où il n'y a pas d'eau potable. Tous les Canadiens devraient avoir accès à de l'eau potable. Or, un bon nombre de réserves en sont privées.
Lorsqu'on voyage sur une grande route de l'Alberta, on traverse une réserve et on peut voir les logements dans cette réserve. Je croyais que c'était une bonne chose que des logements soient construits dans les réserves et je pensais qu'une telle mesure allait grandement améliorer la situation. Un jour, je suis arrêté pour me rendre dans la réserve. J'ai visité des maisons habitées par des gens. Ces maisons étaient des coquilles. Il n'y avait pas d'eau courante. Il n'y avait pas de chambres. Des couvertures étaient accrochées au plafond pour créer différentes pièces et assurer un minimum d'intimité. Il n'y avait absolument rien de fini à l'intérieur de la maison, mais celle-ci paraissait bien lorsqu'on la voyait depuis la route.
J'ai cru pendant des années que les choses s'amélioraient, jusqu'au jour où j'ai commencé à recevoir des appels de gens. Ceux-ci me demandaient de venir faire un tour et de voir ce qui se passait. La seule chose qu'ils aient demandée c'est d'être traités de façon équitable dans leurs propres réserves, mais la corruption qui règne est incroyable. Ce n'est pas le cas dans toutes les réserves. N'allez pas croire que je dis que c'est le cas dans toutes les réserves, parce qu'en fait il existe des réserves où les choses fonctionnent vraiment bien. Toutefois, il y a un grand nombre de réserves où ce n'est pas le cas. Partout au pays, nous entendons des autochtones de la base qui disent constamment...
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Madame la Présidente, de nombreuses personnes qui vivent dans les réserves, des autochtones de la base, ont communiqué avec moi et avec d'autres députés de cette Chambre pour se plaindre de la corruption dans leurs réserves et de la mauvaise gestion. C'est le mot qu'ils ont employé.
Nous savons qu'une vérification comptable est en cours. Nous savons que la gestion par une tierce partie a fait son entrée dans de nombreuses réserves à cause de cela. Nous savons que c'est vrai, car cela s'est passé dans une des plus grosses réserves de ma circonscription.
J'affirme simplement que cela se passe depuis des années et des années, et que ce gouvernement de magiciens continue d'annoncer dans son discours du Trône qu'il va s'attaquer à ces questions et mettre un terme à la pauvreté, au chômage, à la mauvaise qualité de l'éducation et à la mauvaise santé. Pourtant, nous pouvons aller dans une réserve aujourd'hui ou demain, et je vous garantis que si nous choisissons les bonnes et regardons autour de nous, nous trouverons des gens qui vivent dans des huttes, qui vivent dans de vieux bus délabrés, qui vivent dans des conditions dont nous ne voudrions pas pour nous, peu importe qui nous sommes ou d'où nous venons.
À mon avis, la plupart des députés d'en face ne sont jamais allés sur place constater ce qu'il en est. Ils n'ont pas le courage de le faire. Ils préfèrent prendre la parole à la Chambre des communes et souligner toutes les merveilles qu'ils accomplissent avec un accord comme celui-ci. Tout ce que je veux savoir, c'est si cet accord aidera vraiment à régler les problèmes qui perdurent depuis des années. Je parierais à dix contre un qu'il n'en sera rien, parce que les députés d'en face ne règlent pas ce genre de problème.
Je l'ai dit en comité l'an dernier, lorsque l'ex-ministre des Affaires indiennes, M. Nault, a présenté un projet de loi qui était censé régler tous les problèmes. Peu importe son titre. Il s'agissait d'un projet de loi épais comme cela. Une fois que les membres du comité ont terminé l'étude de ce projet de loi, ils ont proposé à peu près cette quantité d'amendements. Bon sang, s'il faut proposer autant d'amendements à un projet de loi mince comme cela, il doit y avoir quelque chose qui ne tourne pas rond. D'où provenaient ces amendements? Ce sont les autochtones de partout au Canada qui les ont demandés dans un effort pour rendre le projet de loi acceptable.
Quand allons-nous faire ce qu'il faut? Quand les Canadiens vont-ils comprendre que notre pays est l'un des meilleurs, sinon le meilleur endroit où vivre dans le monde, à condition que ce ne soit pas dans une réserve indienne? Les Nations Unies ont publié des rapports dans lesquels elles mentionnent que si l'on tenait compte des réserves au Canada, notre pays se classerait au 38e rang.
Tout ce que je veux savoir, c'est si nous allons conclure des accords issus de traités et de règlements qui vont changer la situation et qui feront en sorte que tous puissent aspirer à l'égalité au Canada? Nos amis des collectivités autochtones auront-ils accès aux mêmes possibilités en matière d'emploi, d'éducation et dans d'autres secteurs du fait de telles mesures ou allons-nous continuer de nous enfoncer dans les mêmes ornières?
Je peux vous assurer que s'il y a une chose qui justifie une révocation, c'est un gouvernement corrompu, je dis bien corrompu. Je veux qu'il n'y ait aucune équivoque sur le sens du mot que j'emploie.
Il est inexcusable que de telles conditions existent dans les réserves au Canada. Nous devons arrêter de rédiger des projets de lois indéchiffrables. Personne ne peut les comprendre parce qu'ils ont sûrement été rédigés par une douzaine d'avocats. Le Canadien moyen n'y comprend rien et, qui plus est, ils ne s'attaquent pas aux vrais problèmes.
J'entends quelqu'un rouspéter de l'autre côté, quelqu'un qui n'a sûrement jamais mis les pieds dans une réserve. J'aimerais lui en faire visiter une. J'aimerais l'amener dans les maisons où j'ai moi-même été pour qu'il puisse se faire sa propre idée. Au lieu de rouspéter il devrait faire le déplacement et voir de quoi il retourne. C'est leur passe-temps préféré de l'autre côté. C'est ce qu'ils font de mieux. Ils devraient plutôt se rendre sur place et se faire une idée de la situation.
S'ils veulent se rendre utiles, ils devraient commencer par admettre qu'il y a des problèmes. Ils devraient reconnaître que le taux élevé de suicide est très grave. Ils devraient prendre conscience du peu d'éducation que ces gens reçoivent. C'est un problème très grave. Ils devraient penser aux taux élevés de dépendance aux produits pharmaceutiques. La situation est réellement alarmante. Le député n'a pas vu ce que j'ai vu de mes propres yeux, pour m'être rendu dans des réserves à de nombreuses reprises.
L'hon. Sue Barnes: Ce n'est pas à vous de me dire ce que j'ai fait ou non, parce que j'en ai fait beaucoup. Et pas vous.
M. Myron Thompson: Je ne parlais pas de la députée. Je parlais de l'autre député là-bas. Peu m'importe ce que celle-ci a fait. D'après moi, d'ailleurs, elle n'a pas fait grand-chose.
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Madame la Présidente, je suis ravie d'intervenir au sujet de la Loi sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale du peuple tlicho. Il s'agit d'une mesure législative historique qui doit faire l'objet d'un examen attentif de la part de la Chambre.
Dans les Territoires du Nord-Ouest, le peuple tlicho est le dernier peuple autochtone à régler ses revendications territoriales, mais c'est le premier qui a négocié son autonomie gouvernementale en même temps dans le cadre d'un tel accord. Nous devons faire preuve de prudence et prendre notre temps en ce qui concerne cette mesure législative. Je signalerai plusieurs éléments qui, à mon avis, laissent à désirer dans le projet de loi.
Premièrement, cet accord n'est pas définitif. Il contient une clause de réouverture des négociations, au cas où d'autres premières nations des Territoires du Nord-Ouest négocient, dans les accords qui les concernent, des conditions alléchantes pour les Tlichos dans l'avenir. À cet égard, l'accord ne vise pas un objectif élémentaire simple, en l'occurrence un règlement définitif.
Deuxièmement, selon une interprétation du libellé de l'accord, ce dernier reconnaît aux Tlichos le droit de conclure des ententes à l'échelle internationale. Il y est dit que l'accord ne limite pas le droit du peuple tlicho de conclure des ententes internationales, nationales, interprovinciales et interterritoriales. Il y est également prévu que le gouvernement du Canada consultera le peuple Tlicho avant de conclure un accord international pouvant avoir une incidence sur les prérogatives du gouvernement tlicho, la première nation tlicho ou les citoyens tlichos.
Je crains que ce type de libellé puisse être perçu comme trop large et qu'il ne puisse imposer une restriction à un domaine qui relève exclusivement de la compétence du gouvernement fédéral.
Troisièmement, l'accord crée un système électoral fondé sur la race qui, certains s'en rappelleront, a fait l'objet d'un débat animé à la Chambre dans le cadre des discussions sur l'Accord nisga'a.
Aux termes de cet accord, on crée une catégorie de citoyens, les citoyens tlichos, qui sont les seuls à pouvoir être élus comme chefs. De plus, 50 p. 100 des conseillers élus doivent venir de ce groupe de citoyens tlichos. Certains pourront prétendre que cela va à l'encontre de la Charte canadienne des droits et libertés, mais cela pourrait certes faire l'objet d'une contestation devant les tribunaux.
Enfin, le problème le plus fondamental relativement à l'accord est la façon dont il traite la question des compétences. L'accord décrit plusieurs hiérarchies différentes pour déterminer quelle loi devrait avoir prépondérance en cas de conflit: le droit fédéral, le droit territorial, le droit tlicho ou l'accord lui-même. Je ne sais pas au juste si les citoyens tlichos seraient protégés par la charte en cas de conflit avec la constitution tlicho.
En tant que vice-présidente du Comité permanent de la condition féminine, je voudrais soulever une autre question relativement à cet accord. Je veux parler des biens matrimoniaux. Notre collègue de Portage—Lisgar a soulevé cette question au cours de la législature précédente lorsque ce projet de loi a été présenté sous la forme du projet de loi C-31. Je voudrais revenir sur certains points qu'il a soulevés.
Permettez-moi de citer le rapport intérimaire publié par le Comité sénatorial permanent des droits de la personne en novembre 2003 et intitulé Un toit précaire: les biens fonciers matrimoniaux situés dans les réserves. C'est une question dont on ne devrait pas faire fi. On disait ceci dans le rapport:
Je crois que l'un des droits fondamentaux dont nous bénéficions, ou dont nous devrions bénéficier, est le droit de vivre dans un endroit, une communauté ou une structure que nous appelons le « chez-soi ». Ce chez-soi est l'endroit où nous sommes en sécurité et où nous sommes protégés par notre famille et nos amis. Il s'agit de notre domaine privé, d'un endroit où nous oublions les soucis du monde extérieur et où nous nous retrouvons en famille. C'est également l'endroit où, en tant que couple, lorsque nous planifions de fonder une famille, nous assurerons la sécurité, la protection et l'amour aux membres de celle-ci. En tant que couple qui vise à établir une structure, et avec les contributions personnelles de l'un et de l'autre, nous faisons de cet endroit un univers intime. Nous ouvrons notre univers intime à la famille et aux amis, les accueillant avec chaleur lorsqu'ils nous rendent visite. Cependant, il ne faut pas se méprendre, cet endroit est bien notre univers intime.
Imaginez le stress qu'une femme peut subir quand elle sait que si ses rapports affectifs prennent fin, son univers s'écroulera. Imaginez le stress qui persiste lorsque cette femme a des enfants et qu'elle sait que non seulement elle mais aussi ses enfants devront bientôt quitter l'endroit qu'ils considèrent comme leur chez-soi. Dans certains cas, ils devront même quitter la communauté.
Il ne s'agit pas d'un choix facile quand il s'agit de prendre une décision concernant un mariage qui ne marche pas et que cette union doit prendre fin. Normalement, malgré un certain climat d'hostilité qui s'installe, la plupart des couples savent qu'ils doivent conclure une entente convenue entre les parties sur la disposition des biens, incluant la maison.
Il semblerait que ce ne soit pas le cas des femmes vivant dans les réserves car elles ne détiennent aucun intérêt dans la maison familiale. Aucun choix n'est donné en ce qui concerne la personne qui doit quitter le logement. C'est la femme qui doit partir, et dans la plupart des cas, c'est la femme et ses enfants. Quel choix! Se retrouver itinérante ou vivre un mariage malheureux, peut-être même recevoir des mauvais traitements. Est-ce que les femmes autochtones méritent cela? Non. Est-ce humain de leur faire subir une telle situation? Certainement pas.
Je crains, à l'instar de nombreux députés de mon parti, que ces questions de biens matrimoniaux ne soient pas convenablement, entièrement et dûment traitées dans cet accord et que, si nous procédons de la sorte, nous risquons vraiment de perpétuer la situation. Les réserves autochtones sont le seul endroit au Canada où de telles règles de propriété sont inexistantes. Il est important que nous reconnaissions ce fait et que nous nous engagions à saisir toutes les occasions pour corriger la situation.
Les députés de l'opposition ne doivent pas se contenter de s'opposer aux mesures législatives proposées, particulièrement dans le contexte d'un gouvernement minoritaire. Nous devons également faire valoir notre position sur des questions comme celle-ci. Permettez-moi de faire quelques observations sur la position qu'adopterait un gouvernement conservateur à l'égard d'un enjeu comme celui-ci.
Le Parti conservateur du Canada est d'avis que l'autonomie gouvernementale doit se faire dans le respect de la Constitution du Canada. Toutes les revendications territoriales globales en suspens doivent être réglées dans un cadre clair qui donne valeur égale aux droits des demandeurs autochtones et à ceux du Canada.
Les accords d'autonomie gouvernementale doivent être conçus de façon à préserver l'harmonie constitutionnelle et à ne pas nuire à la gouvernance générale du Canada. Afin d'assurer l'équité et l'égalité, un gouvernement conservateur veillerait à ce que les principes de la charte s'appliquent aux accords d'autonomie gouvernementale.
Le Parti conservateur du Canada est d'avis que les gouvernements autochtones devraient avoir le pouvoir de générer leurs propres recettes. Les accords entre les autochtones et le gouvernement fédéral doivent être définitifs, comme l'a été l'accord avec les Nisga'a, par exemple.
Pour terminer, je crois que les principes fondamentaux de l'accord sont bons. Le regroupement en un seul document d'un accord sur les revendications territoriales globales et d'un accord sur l'autonomie gouvernementale est une réalisation marquante dont les bonnes intentions méritent d'être soulignées.
Malheureusement, cet accord et le projet de loi sur sa mise en oeuvre ne sont pas à la hauteur des attentes que l'on devrait avoir, à juste titre, à l'égard d'un document de cette importance. Pour quelle raison? Je le répète: cet accord n'est pas définitif et il ne respecte pas complètement la Charte des droits et libertés ni l'autorité globale du gouvernement fédéral dans ses champs de compétence exclusifs. Il brouille les limites entre les compétences fédérales, territoriales et tlichos, à savoir laquelle l'emporte et dans quelle situation.
J'exhorte le gouvernement à tenir compte des déclarations de mes collègues sur ce projet de loi, en particulier celles de notre porte-parole, le député de Calgary-Centre-Nord. Avant de mettre en oeuvre de façon irrévocable, avec l'appui de la Constitution, un accord aussi important que celui-ci, nous devons être absolument certains que nous faisons la bonne chose.
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Madame la Présidente, j'aimerais faire quelques observations au sujet du projet de loi C-14, mais avant je tiens à dire que je suis entièrement d'accord avec le député de Wild Rose, qui a parlé des problèmes sociaux auxquels font face nos autochtones, de l'extrême pauvreté et des problèmes de drogue. Cela dure depuis longtemps. Aucun gouvernement ne semble s'attaquer adéquatement à cette situation. Le gouvernement a maintenant une occasion de se pencher sur ces problèmes.
Le projet de loi semble comporter beaucoup de jargon juridique. Un député de ce côté-ci nous a quelque peu étourdis pendant un bon moment avec des arguments juridiques en faveur du projet de loi, mais en bout de ligne rien dans ce projet de loi ne vient régler les graves problèmes auxquels ces gens sont confrontés. De nombreux gouvernements ont dépensé des sommes considérables, et le problème perdure. Je crois qu'il est regrettable que nous débattions de ces questions ici sans régler ces problèmes.
Bien d'autres arguments ont été soulevés pour expliquer l'opposition du Parti conservateur. Certains font valoir qu'il ne s'agit pas d'un accord final. Il est surprenant que l'accord contienne un article qui prévoit la réouverture des négociations si un autre groupe autochtone des Territoires du Nord-Ouest négocie des conditions attrayantes pour les Tlichos dans un futur accord. L'accord ne fait pas ce qu'il devrait faire, c'est-à-dire mettre en place quelque chose qui soit définitif.
C'est comme dire, personne n'a pensé à cela. Cet autre groupe y a pensé, mais pas nous, alors rouvrons l'accord. C'est ridicule. Pourquoi ne concluons-nous pas un accord final maintenant? Pourquoi avoir inclus une telle disposition? Il est assez surprenant qu'une telle disposition existe.
Nous nous opposons aussi au projet de loi car il semble reconnaître le droit des Tlichos à conclure des ententes internationales. Je trouve que cela est également surprenant. Nous sommes au Canada. Le Canada est supposé négocier les ententes internationales, non pas un petit groupe, qu'il s'agisse d'un groupe autochtone ou de tout autre groupe. C'est le Canada qui décide des ententes internationales.
Cet accord prévoit qu'il ne limite pas le pouvoir de la nation tlicho de conclure des accords internationaux, nationaux, interprovinciaux et interterritoriaux. Il oblige aussi le gouvernement fédéral à consulter la nation Tlicho avant de conclure un accord international qui pourrait avoir une incidence sur les droits du gouvernement tlicho, la première nation tlicho, ou un citoyen tlicho. Quand on parle d'un citoyen tlicho, parle-t-on d'une personne? Est-ce que c'est cela que l'on veut dire? Grands dieux ! Nous n'allons pas restreindre la marge de manoeuvre du gouvernement canadien au point qu'un citoyen peut se manifester et contester ses actes. Ce serait l'anarchie.
De ce côté, nous disons que la portée du texte est très large et qu'elle restreint de manière considérable l'exercice d'un pouvoir réservé au gouvernement canadien par la Constitution. Ce serait une innovation de taille aux lois du pays si nous devions accorder à un groupe ce qui est littéralement un droit de veto aux actions du gouvernement canadien.
Le troisième argument, bien entendu, est que l'accord instituerait un système électoral fondé sur des critères raciaux. Il créerait une catégorie des citoyens désignés par l'expression « citoyens tlichos ». Eux seuls seraient éligibles aux postes de chefs. En outre, 50 p. 100 des conseillers élus devront être des citoyens tlichos. Cette règle porte certainement atteinte à la Charte canadienne des droits.
Le dernier argument sur lequel je voudrais faire des observations est celui qui me préoccupe le plus. Je l'ai mentionné dans une question que j'ai posée à un député ministériel. Il a trait à l'article 5 du projet de loi C-14.
Quelqu'un a dit que cette interprétation était erronée. Pourtant, je lis le texte, et il y est écrit que les dispositions de la loi, de ses règlements et de l’accord l’emportent sur les dispositions incompatibles de toute autre loi fédérale, de toute ordonnance des Territoires du Nord-Ouest ainsi que de leurs règlements ou de toute loi tlicho. Cet article sur la primauté de la loi est vraiment étonnant.
Les députés ministériels nous ont dit que nous interprétions mal cet article. Mais je viens de lire exactement ce qui est écrit dans le projet de loi et je dois en conclure que la nation tlicho aura le droit de créer son propre code criminel. Le Code criminel du Canada ne s'appliquera pas dès lors que l'accord comprendra un article de nature pénale, qui l'emportera alors. On pourrait même dire, bien que le gouvernement ne soit pas d'accord, que l'accord passera avant la Charte des droits et libertés. Si j'étais un citoyen tlicho, je serais très inquiet qu'on puisse adopter des lois primant la Charte des droits et libertés.
L'article 5 fera le délice des avocats. Pendant une éternité, les tribunaux seront inondés de causes constitutionnelles s'appuyant simplement sur cet article, sans compter les autres articles dont mes collègues de ce côté de la Chambre ont parlé.
L'accord décrit trois hiérarchies différentes pour déterminer la loi qui aura préséance sur les autres en cas de conflit: la loi fédérale, la loi territoriale, les lois tlichos ou l'accord. Il n'est pas clair si les citoyens tlichos jouiront d'une protection en vertu de la Charte des droits et libertés en cas d'incompatibilité avec la constitution tlicho. C'est là le principal problème.
Bien entendu, le gouvernement libéral s'enorgueillit du fait qu'il a élaboré la Charte des droits et libertés. Ce dont il est présentement question est diamétralement opposé à la Charte des droits et libertés. Pourquoi donc vouloir l'appuyer? Je l'ignore. Il n'est pas logique de vouloir appuyer un projet de loi qui violera les droits de citoyens canadiens. J'encourage tous les députés, y compris les députés ministériels, à s'opposer au projet de loi, ne serait-ce qu'à cause de cette question précise.
Une autre partie de l'accord est confuse. L'article 7.1 prévoit une constitution tlicho. Bien que la constitution ne...
L'hon. Sue Barnes: Les Tlichos. Apprenez comment prononcer ce nom correctement.
M. David Tilson: Ma prononciation peut toujours être contestée, mais j'attends de pied ferme tout député qui voudrait contester ce que nous disons ici sur le fait que le projet de loi est déficient. Il comporte des lacunes importantes. Les libéraux se vantent de leur intention d'appuyer le projet de loi, mais ils ne peuvent fournir de réponse à toutes ces questions.
La constitution ne fait pas partie de l'accord, qui stipule, à l'article 7.1.2, que les droits, en vertu de la constitution tlicho, seraient aumoins équivalents à ceux énoncés dans la Charte canadienne des droits etlibertés, même si, aux termes de l'article 7.1.4, l'accord prévaut sur la constitution tlicho. Cependant, la constitution stipule qu'elle prévaut sur tout le reste. C'est comme un grand cercle.
Je viens de donner mes principaux arguments pour ne pas appuyer le projet de loi. Je ne peux appuyer le projet de loi contenant l'article 5, et j'encourage également les députés à voter contre.
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Madame la Présidente, j'ai écouté avec intérêt les observations de mes collègues et de certains députés ministériels. J'ai aussi écouté notre porte-parole des affaires autochtones, le député de Calgary-Centre-Nord, qui a fait d'excellentes recherches sur le projet de loi C-14.
Comme pour tout ce qui concerne les affaires autochtones, le projet de loi C-14 est une mesure complexe qui exige un examen approfondi et minutieux. Si je le dis, ce n'est pas que le Parti conservateur refuse de chercher une solution définitive pour un certain nombre de premières nations qui veulent obtenir des règlements territoriaux et des traités, mais parce qu'il faut procéder de façon équitable.
On a parlé du traité avec les Nisga'as. Lorsque j'étais moi-même porte-parole en matière d'affaires autochtones, j'avais appuyé ce traité. Celui dont nous sommes saisis aujourd'hui, et que j'ai lu, est très différent du traité signé avec les Nisga'as. Ce sont deux choses tout à fait distinctes.
Des députés se sont opposés à certains aspects du traité, notamment la primauté, bien que cette question ne me préoccupe pas particulièrement. Je suis davantage préoccupé par les aspects du traité qui se rapportent aux affaires internationales. Le gouvernement ne nous a toujours pas donné d'explications claires et concises à ce sujet. Les ministériels devraient pourtant examiner la question de beaucoup plus près.
L'article 7.13.2 stipule:
Avant d'accepter d'être lié par un traité international qui peut toucher un droit que l'Accord confère au gouvernement tlicho, à la Première nation tlicho ou à un citoyen tlicho, le gouvernement du Canada offre au gouvernement tlicho une occasion d'exposer, séparément ou dans le cadre d'une tribune, son point de vue au sujet du traité international.
Ça me paraît tout à fait sensé. Avant de ratifier un traité international signé par le gouvernement du Canada, il me paraît normal qu'une première nation veuille pouvoir l'examiner.
Voici maintenant ce que stipule l'article 7.13.3:
Si le gouvernement du Canada informe le gouvernement tåîchô qu’il considèrequ’une loi du gouvernement tåîchô ou une autre mesure prise par le gouvernementtåîchô dans l’exercice de sa compétence empêche le Canada de s’acquitter d’uneobligation légale internationale, le gouvernement tåîchô et le gouvernement duCanada discutent des mesures correctrices qui permettront au Canada de s’acquitterde son obligation légale internationale. Sous réserve de l’article 7.13.4, legouvernement tåîchô prend, à l’égard de sa loi ou de la mesure prise, les mesuresnécessaires pour permettre au Canada de s’acquitter de l’obligation légaleinternationale.
Cela me paraît également sensé. Le peuple tlicho voudra modifier ses propres lois, ce qui est conforme au bon sens. Venons-en maintenant au coeur du problème.
Le noeud du problème se trouve à l'article 7.13.4, où il est précisé ce qui suit:
Si l’arbitre, compte tenu de toutes les considérations pertinentes etnotamment des réserves et des exceptions que peut invoquer le Canada, détermineque la loi du gouvernement tlicho ou la mesure prise empêche le Canada des’acquitter d’une obligation légale internationale, le gouvernement tlicho prend, àl’égard de sa loi ou de la mesure prise, les mesures nécessaires pour permettre auCanada de s’acquitter de l’obligation légale internationale.
En vertu de la mesure législative, qu'est-ce qui empêcherait le gouvernement tlicho de vendre de l'eau en grande quantité? Il existe des ententes à ce sujet entre les provinces et les territoires. Nous n'allons pas nous mettre à exporter l'eau en grande quantité, même si l'eau traverse les frontières tous les jours en vertu d'ententes entre municipalités. Nous vendons de l'eau embouteillée aux États-Unis conformément à nos obligations selon l'ALENA et l'OMC.
Imaginez ce qui se passerait si la première nation tlicho se mettait à vendre de l'eau en grande quantité. Il y a toutes sortes de dispositions selon lesquelles le Canada ne peut supplanter la capacité des Tlichos d'agir comme entité internationale. Dans un certain cadre et dans certaines limites, je suis d'accord. Je ne suis pas contre du tout.
J'aimerais avoir des précisions. Le gouvernement en donne très peu, mais il a de grandes idées sur ce que cela va donner de merveilleux aux premières nations.
Nous avons un excellent exemple. Il s'agit de l'accord nisga'a où la première nation a la primauté pour diverses questions qui n'empiètent pas sur les obligations de l'État souverain du Canada et les responsabilités du gouvernement fédéral. Il y en a des douzaines d'exemples, mais le libellé de l'accord nisga'a est très clair. Pour ce qui est de la mesure à l'étude, le libellé n'est ni clair, ni définitif.
Qu'est-ce qui empêche le peuple tlicho de décider, dès le lendemain de la signature de l'accord, de vendre de l'eau en grande quantité? Y a-t-il quelque chose qui l'empêche dans le libellé actuel de l'accord? Il s'agit d'un exemple.
Nous aimerions voir le gouvernement déposer des mesures législatives simples, claires et responsables. Bon nombre de premières nations n'ont jamais signé de traités. C'est le cas de certaines bandes tlichos.
Il s'agit du pipeline de la vallée du Mackenzie. Il s'agit du gaz de l'Arctique acheminé par le territoire tlicho et de motifs ultérieurs du gouvernement. Ce dernier est si pressé d'exploiter les ressources du nord du Canada et, soit dit en passant, de les exploiter sans rien donner en retour aux trois ordres de gouvernement du nord du Canada. Il prend la part du lion des bénéfices, et le peuple tlicho devrait le reconnaître.
Le gouvernement n'est pas un bénéficiaire. Il n'agit pas toujours dans l'intérêt supérieur de ses clients, y compris le Yukon, les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut, pas plus qu'il n'agit de bonne foi quand il négocie avec les premières nations.
Il y a un résultat que l'on ne peut ignorer. Le traité, contrairement à presque tous les traités que j'ai eu l'occasion de lire, n'apporte pas de finalité. Il n'est pas libellé clairement et il ouvre la porte sur un très sérieux problème en matière internationale. Ce problème concerne ou pourrait concerner l'eau, notamment.
L'article 2.2.9 prévoit ceci:
L'Accord ne doit pas être interprété de façon à limiter ou à accroître le pouvoir des Parties de négocier et de conclure des ententes internationales, nationales, interprovinciales et interterritoriales, mais ceci n'empêche pas le gouvernement tlicho de conclure des accords...
J'ai entendu quantité de propos de la part de députés ministériels selon lesquels l'opposition n'a pas examiné le projet de loi avec un esprit clair et fait des déclarations iniques. J'ai appuyé nombre de bons projets de loi concernant les autochtones dans le passé, mais je considère que la mesure dont nous sommes maintenant saisis présente une grave lacune. Jusqu'à ce que j'entende la réponse sur cet élément du projet de loi, et non pas seulement des critiques à cet égard, je réserverai mon jugement sur la valeur du projet de loi pour le Canada et les premières nations.
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Madame la Présidente, c'est pour moi un honneur de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi. J'ai écouté avec intérêt les observations de certains des députés de ce côté-ci. Elles me semblent tout à fait fondées, et nous soulevons des préoccupations fort sérieuses.
Je voudrais parler surtout de deux questions fondamentales dans une société libre et démocratique, soit l'accès à l'information pour les citoyens et le principe de l'égalité de tous devant la loi.
Permettez-moi de m'attarder à un article de l'accord, le 2.12. Il traite de la communication des renseignements. Nous avons aujourd'hui au Canada des dispositions sur l'accès à l'information qui permettent aux citoyens de consulter l'information conservée par l'État. L'article dit ceci:
Sous réserve de l'article 2.12.3, et par dérogation aux autres dispositions de l'Accord, ni le gouvernement, notamment les gouvernements communautaires tlichos, ni le gouvernement tlicho ne sont tenus de communiquer un renseignement qu'ils peuvent ou doivent refuser de communiquer aux termes de toute mesure législative ou loi tlicho relative à l'accès à l'information ou à la protection des renseignements personnels.
L'article 2.12.2 ajoute:
Lorsque le gouvernement, notamment le gouvernement communautaire tlicho, ou le gouvernement tlicho a la faculté de communiquer des renseignements, il doit tenir compte des objectifs de l'Accord dans l'exercice de ce pouvoir discrétionnaire.
Enfin, l'article 2.12.3 dit:
Malgré les lois relatives à l'accès à l'information et à la protection des renseignements personnels, le gouvernement doit fournir à un gouvernement communautaire tlicho l'accès aux renseignements qu'il possède, autres que les documents du Cabinet fédéral et les documents du Conseil exécutif territorial, qui sont nécessaires à l'administration, par le gouvernement communautaire tlicho, d'un intérêt figurant à la partie 2 de l'annexe du chapitre 9 ou d'un bail visé par la partie 3 de l'annexe du chapitre 9.
Je soulève cette question de l'accès à l'information. Nous voulons nous assurer que les citoyens soumis à cet accord n'auront pas un accès moindre que celui des autres citoyens canadiens à des renseignements d'une importance vitale. La question est préoccupante, car l'accès à l'information est un pilier de toute société libre et démocratique.
Je voudrais aussi dire un mot du principe de l'égalité. Il s'agit d'un principe auquel tiennent la plupart des députés de ce côté-ci et auquel les députés d'en face se disent attachés également. L'ensemble de cet accord instaurera un régime électoral fondé sur la ségrégation raciale, ce qui va clairement à l'encontre de la Charte des droits, que nous chérissons.
Ceux qui sont citoyens tlichos acquièrent un statut très distinct. À titre de citoyens tlichos, ils bénéficient du droit de vote. Ils bénéficient des droits et des avantages accordés aux autres citoyens canadiens. Ils conservent leur identité d'autochtones du Canada, bénéficiant à ce titre de tous les droits constitutionnels actuels et futurs. Ils jouissent également de tous les avantages accordés aux Indiens inscrits et conservent les droits de chasse, de pêche et de trappe qui leur sont accordés par traité.
Je crains que nous ne soyons en train d'instaurer un système de droits qui feraient concurrence ou opposition à ceux d'autres groupes de Canadiens. Pour parvenir à cet accord, il semble qu'on ait envoyé par-dessus bord le principe de l'égalité.
À titre de Canadiens, nous sommes protégés par la Charte des droits. Cette charte fait partie de notre Constitution depuis 1982. Elle confère certains droits et certaines garanties à tous les Canadiens. Certains de ces droits que nous chérissons sont incorporés à la charte. À mes yeux, il n'est pas clair que la charte s'applique à ces citoyens, et cette question a été soulevée aujourd'hui par divers députés.
De prime abord, il semble passablement clair que, si nous prenions certaines des dispositions de cet accord et si nous les mettions en place dans une région comme celle d'Ottawa, ou dans ma circonscription, pour y instaurer un système électoral appliquant la ségrégation, les Canadiens ne l'apprécieraient pas. Or, sous le prétexte de parvenir à un accord, celui-ci comporte certaines dispositions lourdes de conséquences.
Qu'en est-il des principes que nous chérissons dans une société libre et démocratique--ils sont indispensables à une démocratie--soit les principes de transparence gouvernementale et d'égalité de tous les citoyens devant la loi? Je prie tous les députés de se demander si ce projet de loi respecte ces principes auxquels nous disons tant tenir. Tel ne semble pas être le cas, lorsque nous examinons certaines des dispositions de cet accord.
D'autres dispositions ont déjà été évoquées aujourd'hui. J'aimerais aborder certains autres éléments. Quels que soient les efforts consacrés à débattre un tel accord et peu importe ce qu'il en coûte pour y parvenir, lorsque nous arrivons enfin à un accord, celui-ci doit être définitif. Comment pourrions-nous faire supporter aux Canadiens de l'ensemble du pays un tel débat et un tel effort dans le but de parvenir à un accord, si celui-ci n'est pas définitif?
Je crains que le gouvernement ait créé une situation qui nous forcera à revoir souvent la question. Il crée un terrible précédent. Les Canadiens s'attendent à ce que cette entente présente un caractère définitif. C'est un aspect important de tout contrat. Nous voulons tous pouvoir croire que les dispositions sur lesquelles nous nous sommes entendus seront toujours en vigueur dans un an comme dans dix ans et plus. Une entente sans caractère définitif ne saurait être avantageuse, ni pour les Tlichos, ni pour les Canadiens en général.
On a également soulevé la question du droit de conclure des ententes internationales et je ne comprends pas pourquoi il n'y a pas eu davantage d'opposition à ce sujet. Nous avons vu ce qui s'est produit de l'autre côté lorsque certains ont laissé entendre que des provinces pourraient représenter le Canada sur la scène internationale. Nous savons que ce n'est pas le cas. C'est le gouvernement du Canada qui parle au nom de notre pays dans les débats et les négociations à l'échelle internationale.
Avons-nous maintenant ouvert la porte à un groupe de gens dans notre pays à qui nous voulons donner le droit de se faire entendre dans le cadre d'ententes et de discussions à l'échelle internationale? Comment cela pourrait-il fonctionner en pratique?
Nous n'accordons pas un tel droit de participation aux provinces, mais dans ce cas-ci, l'entente prévoit le droit de participer à des ententes internationales. C'est un pouvoir que la Constitution réserve au gouvernement fédéral, mais la présente entente l'étendra davantage.
J'ai déjà parlé du système électoral. Il est important de pouvoir compter sur une égalité fondamentale devant la loi. La Cour suprême a rendu récemment des décisions qui établissent clairement que tous les citoyens canadiens ont le droit de voter. Nous avons vu ce droit appliqué même dans les pénitenciers fédéraux.
Le seul fait de laisser entendre que seuls certains citoyens d'un secteur en particulier, c'est-à-dire les Tlichos comme on les appellera, pourraient être élus à certains postes ne peut que laisser croire à un système manifestement fondé sur des considérations raciales.
On craint également de créer un nouvel ordre de gouvernement. Il existe déjà des administrations municipales et le gouvernement actuel, qui a promis à bon nombre de reprises de leur venir en aide, leur a de façon assez ironique plutôt coupé l'herbe sous le pied. Le gouvernement crée maintenant un nouvel ordre de gouvernement.
Ce sont là certaines des questions sur lesquelles nous devons nous pencher.
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Madame la Présidente, il est ici question du projet de loi C-14, la Loi sur les revendications territoriales etl’autonomie gouvernementale du peuple tlicho.
Quelques mesures législatives importantes ont été présentées depuis le début de la 38e législature. L'une d'elles concerne la pornographie juvénile, un sujet très important, je pense, pour les Canadiens. À mon avis, le projet de loi à l'étude aura aussi des répercussions très profondes sur la société canadienne pendant de nombreuses années à venir. Je suis très heureux de participer au débat sur ce projet de loi, mais je suis aussi un peu préoccupé par certains points que le député de Calgary-Centre-Nord a fait valoir dans le cadre du débat. Les députés se souviendront qu'il a soulevé un certain nombre de questions au sujet de cet accord.
La Chambre est saisie d'un accord. Nous avons parfaitement le droit d'en discuter, de l'examiner et de veiller à ce qu'il soit dans l'intérêt supérieur du Canada et, bien entendu, du peuple tlicho. J'appuie le principe de l'autonomie gouvernementale autochtone. C'est une excellente idée à laquelle nous devrions aspirer. Je suis de cet avis pour diverses raisons.
Les députés se souviendront sûrement qu'aux termes de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, une responsabilité particulière a été conférée au gouvernement fédéral relativement aux autochtones du Canada. Depuis 137 ans, on ne peut pas dire que nous nous sommes très bien occupés des autochtones de notre pays. Ne serait-ce que pour cette raison, l'ensemble des Canadiens devraient trouver séduisante l'idée de l'autonomie gouvernementale autochtone. C'est une excellente idée parce qu'elle est légitime et que c'est ce qu'il convient de faire. Ajoutons à cela le fait que, à mon avis, notre société n'a pas très bien réussi à s'occuper des autochtones, ce qu'elle n'aurait pas dû essayer de faire, du reste. C'est toutefois ce qui était prévu dans la Constitution, à l'origine, et c'est donc là-dessus que nous devons nous fonder.
Par ailleurs, j'appuie le principe de l'autonomie gouvernementale autochtone parce que c'est ce qu'il convient de faire dans l'évolution de l'histoire canadienne. Je sais qu'il y a un grand nombre de collectivités des premières nations d'un océan à l'autre. Or, si l'on examine l'histoire du Canada moderne, on constate qu'à chaque étape de l'histoire de notre pays, les autochtones ont joué un rôle primordial dans le développement de cette moitié du continent.
Comme nous le savons, le Canada occupe deux millions de milles carrés dans la partie septentrionale de l'Amérique du Nord. Nous avons beaucoup de chance de posséder ce territoire et les nombreuses ressources naturelles qu'il contient. Cela n'aurait pas été possible si nous n'avions pas eu des alliés. Lorsque des colonies européennes se sont établies dans le nord du continent, les alliés qu'étaient pour elles les collectivités autochtones étaient absolument indispensables.
Les députés se rappelleront le régime français. Si nous songeons à Samuel de Champlain et aux gouverneurs qui l'ont suivi, nous constatons qu'il leur était absolument indispensable, pour avoir leur propre collectivité et leur propre société, d'établir ces alliances avec les autochtones qui se trouvaient déjà au Canada. Les colonies britanniques, au sud, étaient beaucoup plus peuplées. Elles avaient plus d'argent et de ressources à leur disposition. Pourtant, pendant plusieurs centaines d'années, le régime français s'est poursuivi et a prospéré au Québec et à l'extérieur du Québec, en partie en raison de la détermination du peuple et de ses alliés français et autochtones.
Il en est ainsi du régime britannique. Les Britanniques avaient jugé opportun et dans leur intérêt, dans un pays peu peuplé, de faire des autochtones du Canada leurs alliés. Par conséquent, les autochtones font partie intégrante de notre histoire.
En ce qui concerne ma région, Niagara Falls, le major-général sir Isaac Brock avait fait rapport à ce qui était alors l'équivalent du ministère de la Guerre britannique, je présume, de ce qui s'était passé pendant la guerre de 1812. Il avait dit que la victoire des Britanniques et des Canadiens à Detroit avait contribué à assurer que nous continuerions d'être indépendants dans cette région du monde. Il avait dit que le soutien de ses alliés autochtones était absolument indispensable et que cette victoire n'aurait pas pu être remportée sans eux.
Dans ces chapitres de l'histoire du Canada, nos alliés autochtones ont joué un rôle absolument indispensable pour que nous puissions demeurer une collectivité distincte dans cette partie du continent.
En outre, si nous songeons au développement de l'Ouest, de la Colombie-Britannique et des provinces de l'Ouest, nous constatons que, tout au long de l'histoire, dans cette région peu peuplée du pays, des traités ont été conclus avec les groupes autochtones locaux pour empêcher que les Américains ne s'installent dans les Prairies, en Colombie-Britannique, ou qu'ils n'agrandissent l'Alaska...