La Chambre reprend l'étude, interrompue le 26 novembre 2004, de la motion portant que le projet de loi , soit maintenant lu une deuxième fois et renvoyé à un comité.
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Monsieur le Président, comment voulez-vous que le Bloc québécois puisse entériner la création d'un ministère dont le mandat signifie une ingérence dans les champs de compétence du Québec et des provinces? Il ne faut certes pas se surprendre d'une telle attitude puisque le gouvernement nous démontre, une fois de plus, ce qui est devenu sa marque de commerce.
Il y a consensus au Québec sur le fait que le développement social relève de sa juridiction, tout comme la santé, l'éducation, les affaires municipales, et j'en passe. La logique veut qu'il soit indécent pour le Bloc québécois de cautionner un tel abus de pouvoir, d'autant plus qu'il s'agit ici d'un domaine qui touche de si près la population.
Quoiqu'il en soit, faut-il se souvenir que le Québec n'a jamais entériné l'entente-cadre sur l'Union sociale en 1999. Malgré le fait que 97 p. 100 des fonds émanant de ce ministère seront assignés aux personnes âgées, admettons que ce champ de compétence—que le fédéral s'est malencontreusement approprié—n'aurait jamais dû être concédé par les provinces. En effet, en agissant ainsi, elles ouvraient une brèche aux intrusions fédérales en matière de développement social.
Outre le noble but qui est de protéger et possiblement d'améliorer les assises sociales du Canada, comment peut-on avoir la certitude que nous n'assisterons pas à nouveau à un viol de nos compétences. Le passé étant garant de l'avenir, nous pouvons facilement appréhender la réponse.
Comme nous le savons tous maintenant, le ministère du Développement social découle de la scission de l'ancien ministère des Ressources humaines. Son rôle sera de veiller à la mise en place d'un système susceptible d'assurer un revenu adéquat aux personnes âgées, aux personnes handicapées, aux familles et aux enfants.
Ce nouveau ministère, par le biais des 12 000 fonctionnaires sous sa juridiction, devra gérer un budget de l'ordre de 53 milliards de dollars à injecter dans les assises sociales, mais cela, à l'unique condition de respecter les champs de compétence des provinces et des territoires, comme il s'y est engagé dans le discours du Trône.
Il incombera au nouveau ministre du Développement social de s'assurer du déroulement des faits et cela, bien entendu, à l'intérieur des paramètres reconnus aux provinces. La mission du ministère du Développement social est d'améliorer le mieux-être des personnes, des familles et des collectivités par l'entremise de toute une série de mesures adaptées.
Comme vous le savez certainement, le Québec a une expertise dans la majorité des champs d'action visés. L'évidence veut donc que nous assistions encore une fois à un dédoublement des coûts. On peut d'ores et déjà soupçonner que les résultats seront tout aussi aléatoires qu'improvisés vu le manque de volonté de concertation qui, elle, est nécessaire à toute réussite dans une telle sphère de compétence et dans un tel contexte.
Ce n'est pas peu dire, mais comme il s'agit d'une cagnotte de 53 milliards de dollars, dont une portion de 97 p. 100 sera versée au Régime de pensions du Canada et au programme de la Sécurité de la vieillesse, il devient impératif d'éviter tout cheminement en parallèle.
Quoi de plus normal pour valider l'inquiétude du Bloc québécois que de se rapporter à la vérificatrice générale du Canada qui invoque, depuis plusieurs années, le fait que certaines dépenses, notamment la prestation fiscale canadienne pour enfants, se retrouvent dans les dépenses fiscales mais n'apparaissent pas dans la ventilation des dépenses du ministère. Comme transparence, on a déjà vu mieux.
Une attitude aussi cavalière ne peut qu'envoyer un très mauvais message aux députés du Bloc québécois.
Pour en arriver à mettre en place ce nouveau ministère, il est sûr que certaines lois seront modifiées ou tout simplement abrogées afin d'édicter de nouvelles règles dont celle visant la protection et l'accessibilité des renseignements personnels d'un autre ordre que ceux qui sont gérés en vertus des cas du Régime de pensions du Canada et de la Loi sur la sécurité de la vieillesse. Il y a donc, dans cette nouvelle démarche, une problématique supplémentaire susceptible de compliquer davantage le processus d'évaluation des dossiers, laquelle problématique est loin d'être négligeable.
Dans les faits, face au remboursement du Supplément de revenu garanti, le Bloc québécois a déjà fait son lit depuis plusieurs années. En effet, il revendique des revenus importants pour plusieurs québécois et canadiens qui en ont été privés sous prétexte qu'ils n'ont pas été informés adéquatement des critères d'accessibilité.
Uniquement pour le Québec, il s'agit d'un montant au-delà de 800 millions de dollars qui n'a pas été versé aux personnes y ayant droit depuis 1993. Malgré le fait qu'environ 100 millions de dollars aient été récupérés depuis lors, il faut reconnaître qu'il s'agit d'une procédure douteuse d'autant plus que le gouvernement au pouvoir refuse toujours de retourner aux ayants droit la pleine rétroactivité du manque à gagner.
En ce qui a trait à l'inclusion et à la participation gouvernementale s'y rattachant, il faut se rappeler que, lors du budget de 2004, les libéraux ont annoncé de nombreuses mesures dont des déductions fiscales visant à l'intégration des personnes handicapées. Le Bloc québécois ne peut que se réjouir de telles initiatives, mais juge que personne n'est mieux placé que le gouvernement du Québec pour mener à bien une telle démarche.
Pour ce qui est des collectivités dynamiques, différents programmes, comme le Programme de partenariats pour le développement social, particulièrement accessible aux organismes à but non lucratif, l'Initiative sur le secteur bénévole et communautaire, favorisant l'amélioration des relations avec les bénévoles, et le programme Nouveaux Horizons pour les aînés seront des mesures facilitantes, à ne pas en douter.
Par contre, les relations de tous les organismes communautaires québécois avec le réseau de la santé et des services sociaux étant au beau fixe, il est difficile d'admettre qu'un palier de gouvernement encore plus lointain puisse mieux gérer ou pondre une politique mieux adaptée, compte tenu du fait que le Québec est déjà plus que familier avec l'approche existante.
Face à la nouvelle initiative fédérale visant à mieux comprendre la petite enfance, voilà le plus bel exemple de dédoublement des programmes en matière d'éducation. Il s'agit d'un programme purement provincial, d'autant plus que les professionnels québécois s'y adonnant, tant dans les secteurs de la santé que dans le réseau public de l'éducation, sont à la fine pointe des techniques modernes d'approche dans ce dossier.
Une nouvelle ingérence se dessine à l'horizon par le biais de la Prestation nationale pour enfants. Il s'agit d'un programme garantissant un soutien financier aux familles à faible revenu ayant des enfants, en favorisant une plate-forme nationale où les versements seraient calculés en fonction des revenus et dépenses par le biais du programme de Prestation canadienne pour enfants. C'est bien sûr que le but avoué du gouvernement est d'avoir de la visibilité, cette formule faisant d'ailleurs les frais du ministre.
Cette intervention fédérale s'inscrit dans le cadre de l'entente sur l'Union sociale. Or, à ce que je sache, cette entente n'a jamais été entérinée par le Québec. Si le fédéral veut continuer à agir de façon unidirectionnelle, qu'il ait au moins la décence de dédommager le Québec qui mise déjà sur des programmes adaptés et performants en la matière, et cela, de l'avis général.
Au-delà des problèmes d'harmonisation des programmes en cette matière, un autre problème se dessine relativement au calcul des prestations fédérales pour enfants. L'exemple des garderies à 5 $ en est la plus belle preuve.
Certaines familles perdent plus en déductions fédérales qu'elles ne gagnent par la mise en place des garderies. En raison du refus par le gouvernement fédéral d'harmoniser ses critères avec ceux du Québec, un manque à gagner d'environ 70 millions de dollars a, de ce fait, été imputé aux familles québécoises.
Afin d'éviter tout imbroglio du genre, le Bloc québécois propose plutôt l'instauration d'un crédit d'impôt remboursable s'adressant à toutes les familles ayant des enfants à charge, quel que soit le revenu. Un approche du genre serait beaucoup plus équitable et répondrait davantage à la réalité des familles québécoises. Il en est de même face au programme mis sur pied en 2000 intitulé Initiatives du développement de la petite enfance, sous DRHC, qui avait comme mandat de soutenir la petite enfance.
De 2000 à 2005, 2,2 milliards de dollars devaient être versés aux provinces et territoires afin d'atténuer la misère humaine, plus particulièrement chez les familles à faible revenu. Le gouvernement du Québec ne peut valider une telle ingérence, puisque ladite attitude du fédéral contrevient à plusieurs articles de juridiction provinciale.
Un autre sujet laissant libre cours à la moindre interrogation est le suivant. Tel qu'annoncé dans le discours du Trône de 2004, le gouvernement fédéral, fidèle à son image d'usurpateur de privilèges, compte bien poursuivre un rôle d'inquisiteur en accélérant la réalisation de projets dans le cadre multilatéral pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants.
Pour les mêmes raisons invoquées précédemment face à la pénalité encourue par les parents d'enfants québécois bénéficiant du programme des garderies à 7 $, on ne peut acquiescer à une telle initiative, puisqu'elle devient punitive pour plusieurs familles.
Finalement, quand on parle des services de garderies pancanadiennes, qui faisaient déjà partie de l'enjeu électoral de 1993, l'expérience du Québec prouve hors de tout doute que nous n'avons nullement besoin d'une intrusion fédérale qui risquerait même d'être gênante, compte tenu du degré de performance de notre propre système.
La présumée entente de principe du 2 novembre 2004 demeure tout autant caricaturale qu'irréalisable dans le contexte actuel. Aucun élu québécois, particulièrement dans ce champ d'activité, ne pourra accepter une ingérence fédérale sans la moindre garantie d'un droit de retrait avec pleine compensation. C'est d'ailleurs ce à quoi le gouvernement fédéral s'est engagé lors du discours du Trône de 2004, rappelons-le, en acceptant le sous-amendement du Bloc québécois stipulant que les compétences des provinces soient intégralement respectées et que les pressions financières appelées déséquilibre fiscal soient allégées. De ce fait, le gouvernement fédéral s'engageait à respecter toutes les juridictions du Québec. Malgré que le discours du Trône contienne une multitude de possibilités déguisées d'ingérence, nous ne serons pas dupes d'un tel subterfuge.
Il s'agit de souligner qu'en matière de santé, un champ de compétence exclusif au Québec, le gouvernement fédéral doit respecter l'entente sur l'asymétrie et cesser de demander toute reddition de comptes.
En matière d'environnement, le BAPE a largement fait ses preuves au Québec. On peut facilement constater les efforts du Québec pour mettre en oeuvre le Protocole de Kyoto. Le projet d'équité nationale fédéral devrait peut-être aussi déboucher sur un autre accord asymétrique, vu que nos devoirs sont à jour.
Dans le projet des villes, le Québec est maître d'oeuvre en matière d'infrastructures municipales. La détermination des priorités et la répartition des fonds lui reviennent. Les sommes provenant de la taxe sur l'essence seront-elles transférées sans condition? Nous en doutons, bien que la logique voudrait qu'il en soit ainsi.
Au fil des années, le gouvernement du Québec a réussi à se doter de politiques sociales enviables, tant sur la scène nationale que sur la scène internationale. Il n'a de leçon à recevoir de personne. Vous le savez pertinemment puisque vous copiez allègrement les mesures québécoises de développement social. Sa compétence québécoise est reconnue et fait naturellement consensus au Québec.
Le système fonctionne parce que la structure et les institutions qui relient la population, les organismes et le gouvernement permettent de comprendre les besoins et d'agir en conséquence, que ce soit en créant des outils efficaces, on l'a prouvé, ou que ce soit en injectant des fonds nécessaires pour un financement stable à long terme.
Ce qui nous fait défaut, vous le savez, et j'espère que le gouvernement va le reconnaître, c'est une marge de manoeuvre insuffisante causée par le déséquilibre fiscal. Vous avez le pouvoir de réparer cette injustice. Nous exigeons que vous le fassiez.
La population du Québec refuse désormais que le gouvernement fédéral abuse de ses prérogatives pour soutirer et garder les fonds qui lui reviennent. Seul un droit de retrait avec pleine compensation financière nous convaincra de la bonne foi du fédéral dans ce dossier et pourrait nous inciter à voter en faveur du remaniement du ministère.
Respectez vos engagements du discours du Trône qui vous ont permis de rester au pouvoir. C'est une question de respect et d'intégrité. Il y va de la santé et de la sécurité des Québécoises et des Québécois.
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Monsieur le Président, je me réjouis d'avoir l'occasion de parler en faveur du projet de loi C-22.
Ce projet de loi vise essentiellement à instituer officiellement le ministère du Développement social, qui a été créé au mois de décembre dernier lorsque l'ancien ministère du Développement des ressources humaines a été divisé en deux. Cette division faisait partie du programme gouvernemental de renforcement des fondements sociaux du Canada.
Le projet de loi C-22 est plus qu'une simple mesure administrative. En légalisant le ministère du Développement social, le projet de loi sert de complément aux autres mesures du gouvernement qui visent à renforcer les fondements sociaux du Canada et à améliorer les relations entre le gouvernement et les Canadiens.
Autrement dit, en appuyant le projet de loi C-22, nous ne ferions pas que créer un nouveau ministère, nous appuierions le fait que le gouvernement du Canada est déterminé à servir les Canadiens d'une manière juste, inclusive et efficace. En confiant à ce nouveau ministère le mandat de s'occuper des programmes et des politiques de développement social, les députés reconnaissent le développement social comme étant l'une des caractéristiques clés de l'identité canadienne et l'une des préoccupations du gouvernement relativement à chacun des Canadiens.
En adoptant cette mesure, nous légalisons le ministère du Développement social et nous confirmons que nous souscrivons à son mandat.
Quel est vraiment le mandat que nous confions à Développement social Canada? Celui de renforcer les assises sociales en favorisant le bien-être et la sécurité du revenu des Canadiens. Le mandat est peut-être clair, mais les activités du ministère à l'appui de ce mandat sont à la fois nombreuses et diverses.
Le développement social est devenu le point de convergence de toutes les politiques et de tous les programmes d'ordre social visant les enfants, la famille et les aidants naturels, les personnes handicapées et les personnes âgées. Le ministère est également chargé de l'Initiative sur le secteur bénévole et communautaire. En pratique, le ministère du Développement social, c'est 53 milliards de dollars mis au service de la population canadienne. La majeure partie de ce montant sert de soutien au revenu de Canadiens, par exemple, les personnes âgées, les personnes handicapées et les enfants.
Le nouveau ministère a aussi été créé afin d'agir comme centre d'expertise en matière de politique sociale et de programmes au profit de l'ensemble de la population. À ce titre, il constitue un point central de la politique sociale au sein du gouvernement du Canada.
L'objectif consiste à aborder la politique sociale comme un tout, grâce aux rapports entre le ministère et les autres ministères et sociétés d'État, par exemple, Ressources humaines et Développement des compétences Canada, Santé Canada, Affaires indiennes et du Nord Canada, Finances Canada, Patrimoine canadien, Justice Canada, Citoyenneté et Immigration Canada et l'Agence canadienne du revenu.
Beaucoup des programmes et des politiques de ces organisations fédérales peuvent avoir une incidence sur les intérêts des Canadiens sur le plan de la politique sociale. Le rôle de DSC consiste donc à travailler en collaboration avec ces organisations pour voir à la définition et à la satisfaction d'objectifs communs.
Le nouveau ministère travaille également dans des domaines de compétences partagés avec les provinces et les territoires. Dans un régime fédéral comme le nôtre, la responsabilité du développement social est souvent partagée avec les gouvernements provinciaux et territoriaux et le rôle de liaison entre le fédéral, les provinces et les territoires est d'une extrême importance. Ainsi, le ministère travaillera avec ses vis-à-vis provinciaux et territoriaux à la planification d'un nouveau système national d'apprentissage pour la petite enfance et de garderies. Ce n'est là que l'un des nombreux domaines de collaboration fédérale-provinciale-territoriale dans lesquels oeuvrent le ministre du Développement social et son ministère.
Bien sûr, le ministre et le nouveau ministère travaillent en étroite collaboration avec les collectivités concernées. Parmi les porte-parole de ces groupes, mentionnons les experts en services de garde, les représentants des personnes handicapées, des personnes âgées et des nombreux autres groupes qui ont besoin de notre attention et de notre soutien.
Toute cette activité peut se résumer en un énoncé qui définit le but de Développement social comme étant celui d'oeuvre à la compréhension des attentes des Canadiens et des Canadiennes sur le plan social et à leur traduction en politiques, programmes et ententes qui répondent aux besoins individuels tout en respectant les objectifs nationaux.
Pour parler en termes pratiques, le nouveau ministère travaille de plus d'une façon à satisfaire les principaux objectifs sociaux, et notamment: continuer d'offrir du soutien du revenu aux personnes âgées; aider les personnes handicapées à participer pleinement à la société canadienne; réitérer l'importance que les enfants aient le meilleur départ possible dans la vie; soutenir les rôles et les activités du secteur bénévole et du secteur communautaire sans but lucratif au sein de notre société.
Ce projet de loi nous permettra de réaliser ces objectifs à l'aide d'une structure organisationnelle qui assure un développement intégré des politiques et l'offre de programmes d'une façon rentable. En effet, les deux ministères, Développement social Canada et Ressources humaines et Développement des compétences Canada, ont été pensés de manière à réduire les bouleversements et à s'assurer que la population canadienne continue de recevoir un service à guichet unique sans anicroche.
Voici quelques-unes des façons particulières dont le nouveau ministère du Développement social s'attaque déjà aux tâches qu'exige la réalisation de son mandat. En regroupant sous le même toit les programmes de sécurité du revenu et autres programmes sociaux visant les personnes âgées, les familles, les enfants et les personnes handicapées, le ministère devient le lieu central d'une politique sociale à l'échelon fédéral. En appuyant le travail du ministre du Développement social et du ministre d'État (Familles et aidants naturels) et le travail de ces derniers auprès des groupes d'intérêt, le ministère se penche sur les grands enjeux sociaux touchant la population canadienne, par exemple, les services de garde de la petite enfance, le développement des enfants en bas âge et les moyens d'assurer la participation active et le respect des personnes âgées et des personnes handicapées.
Développement social Canada vise à offrir les programmes et les services que la population canadienne attend du gouvernement fédéral. Ce projet de loi ferait en sorte que le ministère et ses 12 000 employés au pays puissent continuer d'offrir tous les programmes et tous les services nécessaires.
Je suis fière de défendre ici ce projet de loi et j'invite tous les députés à l'appuyer.
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Monsieur le Président, je suis heureux d'avoir l'occasion de participer au débat. Comme l'ont mentionné des députés ministériels qui ont pris la parole avant moi, le projet de loi C-22 est essentiellement un projet de loi d'ordre administratif. Nous ne tentons pas de minimiser son importance, mais il s'agit, ni plus ni moins, d'un projet de loi d'ordre administratif.
J'ai passé du temps à réfléchir au travail qu'il faudrait réellement accomplir à l'échelle nationale pour éradiquer la pauvreté au pays. Dans ce projet de loi, le gouvernement propose de mettre en place une structure pour s'attaquer à ce problème.
Je préférerais de beaucoup que la Chambre réfléchisse à ce qu'a dit mon collègue de Sault Ste. Marie, notre porte-parole en matière de services sociaux, à ce sujet. Il a parlé avec son coeur et il a prononcé un discours remarquable, inspiré de sa propre expérience dans sa circonscription et avec les banques d'alimentation. Il a parlé du travail qu'il a effectué à l'Assemblée législative de l'Ontario, où nous avons siégé ensemble. Il s'est battu pour faire en sorte que la question de la pauvreté figure à l'ordre du jour. Il a travaillé sans relâche pour s'assurer que personne n'oublie que des enfants ont faim. Il a apporté avec lui cette passion et ce dévouement dans cette enceinte. Je ne suis pas le moindrement étonné que son premier discours officiel à la Chambre porte sur cet enjeu très important. J'exhorte les députés à prendre un instant pour lire son discours. Je crois que les députés comprendront ce qui motive mon intervention.
D'entrée de jeu, je reconnais que nous, au NPD, autrefois le CCF, aimons croire que notre raison d'être consiste à s'attaquer aux problèmes d'inégalités dans la société. À certains égards, mes propos seront semblables à ceux tenus par mes collègues du Bloc, mais à d'autres, il se peut que les députés bloquistes aient des réserves. On pourra en discuter dans la période réservée aux questions et réponses.
Je veux parler du fait que Tommy Douglas a été élu récemment La plus grande personnalité canadienne. Il était reconnu comme étant l'un des hommes les plus avant-gardistes. Il se portait à la défense du citoyen ordinaire. Malheureusement pour un nombre beaucoup trop grand de Canadiens moyens, en particulier les enfants, le fait de survivre de peine et de misère correspond à la réalité.
Je sais que certains se plaisent à stéréotyper les bénéficiaires de l'aide sociale, et nous pouvons jouer à tous les petits jeux que nous désirons. Ce sont des jeux et rien de plus. Cependant, nous ne pouvons d'aucune façon rendre acceptable la pauvreté des enfants.
Avant d'être élu député et par la suite, j'ai pu voir la passion que soulevait la question de la pornographie juvénile, à juste titre. Ce que j'aimerais voir, et ce que le NPD aimerait voir, c'est la même passion pour la question de la pauvreté des enfants. Ne vous y méprenez pas, dans les deux cas il s'agit de violence faite aux enfants.
Notre pays est l'un des plus riches au monde. Le Parlement n'a pas tenu l'engagement qu'il a pris envers sa population il y a 15 ans, presque mois pour mois. Le député actuel d'Ottawa-Centre, qui était alors député d'Oshawa, avait présenté une motion, adoptée à l'unanimité par la Chambre, visant à fixer comme objectif national l'élimination de la pauvreté des enfants. Où en sommes-nous aujourd'hui? Selon un rapport du Conseil national du bien-être social le taux de pauvreté des enfants est à la hausse.
La Chambre ainsi que tous les députés qui étaient là quand la motion a été adoptée ont la responsabilité d'éliminer la pauvreté des enfants. Cela ne s'est pas produit. Qui doit rendre des comptes? Qui est responsable? Qui s'en soucie?
J'entends le premier ministre en poste parler de son engagement à respecter ses objectifs sacrés de réduction de la dette. Oui, il est important de réduire la dette. Pourquoi cependant est-ce plus important que la pauvreté des enfants? La Chambre était unanime à ce sujet il y a 15 ans. Toute la Chambre, et non seulement un parti ou le parti au pouvoir, a affirmé à l'unanimité que la pauvreté des enfants était une priorité. Il semble qu'après l'adoption de la motion, le dossier a été rangé.
Il semble que, dès que la motion a été adoptée, elle a été classée. Les députés l'ont oubliée. Ils ont fait leur bonne action de la journée. Ils ont tous dit de belles choses sur les enfants. Cependant, ils ont oublié les enfants. Ce qui importe vraiment, ce sont les entreprises. Comprenez-moi bien. Les entreprises sont importantes. Elles génèrent la richesse, elle-même cruciale évidemment pour l'avenir du pays, mais les entreprises ne sont pas la seule chose qui importe.
Je ne le dis pas avec fierté, mais la pauvreté se répand chez les enfants de Hamilton, ma ville natale. Et pourtant, dans le contexte mondial, Hamilton est l'une des collectivités les plus riches. D'autres pays aimeraient bien connaître le dynamisme économique de cette ville. À titre d'exemple, en Ontario, une femme monoparentale âgée de 25 à 49 ans ayant un fils âgé de 10 à 12 ans reçoit 1 106 $. Le coût mensuel moyen de l'épicerie est de 212 $. Je n'arrive pas à imaginer comment une mère et son fils peuvent survivre avec 212 $. Le loyer moyen est de 737 $. Cela leur laisse 157 $, une fois la nourriture payée, si on suppose que le montant total couvre la nourriture et le loyer. Nous nous demandons pourquoi les banques alimentaires connaissent une croissance et pourquoi de plus en plus de gens vivent dans la rue.
Comment cela se traduit-il au plan national? C'est là que je vais peut-être heurter de front mes collègues du Bloc québécois. J'en suis conscient et je suis prêt à m'expliquer. Je n'accepte pas que le gouvernement donne de l'argent aux gouvernements provinciaux pour qu'ils versent une prestation pour enfants, mais qu'il laisse les provinces, notamment l'Ontario—et j'ignore si d'autres font la même chose—récupérer cette prestation. C'est honteux. À une époque, c'était le gouvernement Harris, mais peu m'importe que le gouvernement soit conservateur, libéral ou néo-démocrate. En accordant cette prestation, le gouvernement du Canada a reconnu qu'il fallait aider les enfants vivant dans la pauvreté. Il verse l'argent au gouvernement provincial qui peut récupérer de la main gauche ce que verse la main droite, réduisant ainsi à néant l'effet positif de cette prestation sur la famille.
Ce n'est pas acceptable. La Chambre est le porte-parole de l'ensemble du pays. Lorsque la Chambre des communes se donne, à l'unanimité et tous partis confondus, un objectif aussi important que l'élimination de la pauvreté des enfants sur une période de 15 ans et verse de l'argent destiné à ces enfants, aucun gouvernement provincial ne devrait pouvoir faire obstacle à cet objectif, de quelque manière que ce soit. Il y a là une obligation imposée par la Chambre et par le gouvernement national. J'ai honte de vivre dans l'une des provinces dont le gouvernement...
Une voix: Plus fort.
M. David Christopherson: Je vais parler plus fort à l'intention du député parce que, lorsqu'il s'agit de la pauvreté des enfants, je veux être entendu. Tous les néo-démocrates se feront entendre de toutes leurs forces. La vérité, c'est que...
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Tout à fait, monsieur le Président, et j'apprécie beaucoup votre intervention, car comme je l'ai dit d'emblée et tout le long de mon intervention, mes propos portent sur le projet de loi C-22, c'est bien le cas.
Dans leurs discours, les députés du parti ministériel ont fait de belles tirades sur les avantages fabuleux dont profiteraient les Canadiens. Je soutiens qu'on peut restructurer les ministères à volonté, mais que, si on ne met pas concrètement en place les programmes et les crédits voulus pour aider les gens sur le terrain, dans leur foyer et dans leurs collectivités, là où cela compte, alors le projet de loi C-22 ne vaut pas le papier sur lequel il est imprimé.
Voilà l'observation que je présente et c'est pourquoi j'affirme qu'elle est pertinente dans ce débat, très pertinente. Il n'est pas surprenant que ce soit un député ministériel qui veuille me faire taire, parce que le gouvernement veut nous faire croire que c'est tout une réalisation. Ce n'en est pas une. Que les enfants se couchent le ventre vide, c'est de cela qu'il faut s'occuper. Et c'est une tâche énorme.
Un député ministériel va probablement parler du programme national de garderies. C'est merveilleux. J'en suis ravi. On ne compte plus les fois où le gouvernement a promis un tel programme. On dirait qu'il va donner suite à sa promesse. Selon moi, c'est uniquement parce que le gouvernement est minoritaire. C'est la seule raison.
Dans ce contexte de gouvernement minoritaire, la Chambre peut travailler pour les Canadiens. En voici un autre exemple. Si le gouvernement était majoritaire, je crois que le projet de loi C-22 serait considéré comme l'alpha et l'oméga de ce qu'il ferait pour s'attaquer au dossier des services sociaux, c'est-à-dire aider les Canadiens qui vivent dans la pauvreté. Toutefois, vu que le gouvernement est minoritaire, cela ne suffira pas.
La situation était la même lorsque le régime de pensions a été créé. À l'époque, le CCF, l'ancêtre du NPD, a obligé un gouvernement libéral minoritaire à prendre ses responsabilités. C'est ainsi que nous avons obtenu le Régime de pensions du Canada. C'est ainsi que nous avons obtenu les soins de santé universels. C'est Tommy Douglas qui a lancé le bal, en Saskatchewan. Les Libéraux dirigeaient un gouvernement minoritaire lorsqu'ils ont été obligés d'aller de l'avant. Rétrospectivement, on voit bien que, pendant des décennies, les libéraux ont pris et repris des engagements extraordinaires. Celui-ci en est un autre.
Je ne me souviens pas d'avoir entendu le premier ministre parler de la création d'un nouveau ministère du Développement social comme de la solution finale. En fait, je ne suis pas certain que cela changera grand-chose. Nous allons l'appuyer. Je tiens à être clair là-dessus. Nous ne sommes pas contre. Il n'y a pas vraiment matière à opposition ou approbation. Il s'agit de la restructuration d'un ministère. Je préférerais de loin ne pas avoir à utiliser ces acrobaties parlementaires pour rattacher des arguments concernant la pauvreté des enfants au projet de loi dont nous sommes saisis. J'aurais voulu que nous nous en tenions uniquement à la question de la pauvreté des enfants plutôt que de l'obscurcir avec cela, mais c'est la seule possibilité que nous avons et nous saisirons toutes celles qui s'offriront à nous.
J'espère que quelqu'un du gouvernement m'aidera à comprendre, au cours des 10 minutes de questions et d'observations, où il pense en être relativement à l'engagement d'éradiquer la pauvreté des enfants, alors que les statistiques nationales actuelles montrent que nous allons dans la mauvaise direction. Pour nos collègues ministériels qui vont prendre la parole après moi et sans doute chanter les louanges du projet de loi C-22, j'espère qu'ils mettront de côté leurs textes préparés à l'avance et expliqueront aux Canadiens pourquoi leur gouvernement n'a pas répondu à leurs attentes.
Il n'y a pas que les libéraux; ils sont les premiers responsables comme ils forment le gouvernement, mais il ne sont pas les seuls en cause. Nous le sommes tous. Il s'agissait d'une décision unanime de la Chambre. Cela devrait vouloir dire quelque chose. Alors, quand nous entendons les députés ministériels se vanter du projet de loi C-22, je veux les entendre nous dire où ils pensent qu'ils en sont en ce qui concerne la pauvreté des enfants, car je ne le vois pas.
Je ne le vois pas. Je ne constate pas beaucoup de passion par rapport à cette question. Je ne suis pas ici 24 heures sur 24. Je n'ai pas entendu beaucoup de choses à ce sujet. Je peux nommer deux ou trois collègues qui se sont exprimés à ce sujet, mais il y en a beaucoup plus qui ont parlé de réduction de la dette, des taux d'intérêt, ou de libre-échange. Toutes ces questions ont beaucoup d'importance, mais je veux croire que, au Canada, à la Chambre des communes, l'éradication de la pauvreté des enfants en a tout autant sinon plus.
Ce n'est pas le seul domaine où nous avons de gros problèmes en tant que société. Tout cela se tient, car le projet de loi C-22 porte sur la structure d'un ministère en particulier. Dans le contexte global de toutes les obligations du gouvernement, du Parlement national, envers tous les Canadiens, cette structure va au-delà des subtilités relatives à manière de structurer le ministère.
Les compressions imposées aux provinces par l'actuel premier ministre lorsqu'il était ministre des Finances sont loin d'être étrangères à la situation. Cela a même beaucoup à voir avec les statistiques que j'ai citées au sujet de ce qui se passe à Hamilton et des défis que nous avons à relever, étant donné que l'ancien premier ministre Mike Harris a été du genre à prétexter les compressions pour réduire les paiements de transfert aux municipalités, pour réduire le financement de programmes destinés justement à soutenir les gens que ce ministère est censé aider.
La Chambre se souvient-elle que, en 1995, fort de sa majorité, le premier ministre nouvellement élu, Mike Harris, a réduit de 21,6 p. 100 le revenu des plus pauvres parmi les pauvres. C'étaient des personnes déjà pauvres, la plupart ayant des enfants, et il a réduit leurs revenus de 21,6 p. 100.
Imaginez ce qui se passerait en cette enceinte si le leader du gouvernement à la Chambre déclarait que le gouvernement allait déposer un projet de loi visant à réduire de 21,6 p. 100 la rémunération des députés. Ce serait le branle-bas général. Or, à ma souvenance, ni le gouvernement du Canada, ni la Chambre n'ont fait beaucoup de bruit lorsque cela s'est passé dans la province la plus populeuse du pays.
Je n'ignore pas où résident les responsabilités selon la Constitution, mais je souhaite faire valoir que cette Chambre nationale a une obligation. Quelles voix se sont fait entendre? Où étaient les nouveaux ministères? Je vois que mon collègue libéral s'impatiente quelque peu. Où étaient donc les projets de loi du type C-22 pour faire obstacle à ce genre d'initiative?
Il faut dire que la responsabilité est largement partagée puisque, compte tenu de la dynamique de l'époque, pratiquement personne n'a protesté. On n'a presque rien dit parce qu'il était de bon ton à ce moment là de rendre les pauvres responsables de leur situation. C'était leur faute, se plaisait-on à dire. Il convenait donc tout à fait que le gouvernement réduise leurs revenus, question de leur faire la leçon. C'est comme ça que l'on voyait les choses à l'époque.
Je cite cette période de notre histoire non pas uniquement à titre de leçon de sens civique, mais aussi pour montrer le climat qui règne dans ce pays, dans ce pays immensément riche et privilégié, et pour rappeler qu'une chose pareille a pu se produire dans la province la plus populeuse sans que personne ne proteste. Où étaient alors les discours grandiloquents? Quand a-t-on condamné le gouvernement qui a agi de la sorte? Où étaient les nouvelles lois, les projets de loi du genre du projet de loi C-22 pour empêcher les gouvernements d'agir ainsi ou pour prévoir des compensations ou bien, bon sang! des mesures quelconques en pareil cas? Que l'on ait pu laisser les plus pauvres des démunis se faire enlever 21,6% de leur revenu relève du mystère, mais cela s'est bel et bien produit.
Il y a 15 ans, je croyais que la motion de la Chambre avait bel et bien pour but d'empêcher qu'une telle chose se produise. Je croyais que nous agirions vraiment pour résoudre les problèmes qui seraient portés à notre attention.
Je serais beaucoup plus heureux si nous avions sous les yeux un projet de loi prévoyant des mesures concrètes pour aider les enfants et les autres personnes qui vivent dans la pauvreté. Et nous n'avons même pas parlé de gens qui ont un handicap physique, un handicap psychologique ou un autre problème et qui ne peuvent plus bénéficier des programmes et des mesures de soutien qui ont été sacrifiés sur l'autel des compressions budgétaires. Voilà qui ferait tout un débat pour la Chambre.
Je demande aux députés de m'excuser d'avoir haussé le ton ainsi, mais la frustration est grande lorsqu'on sait qu'on pourrait faire mieux. Je crois que tous les députés se préoccupent du problème de la pauvreté. Je le crois sincèrement. Mais il faut que ces préoccupations se traduisent par des mesures aussi énergiques que celles qui résultent des convictions profondes de certaines personnes à propos de la réduction de la dette et du libre-échange, mais cette fois avec l'intention d'aider les enfants et les familles qui croupissent dans la pauvreté, et plus particulièrement à l'approche du temps des fêtes.
Nous devrions y réfléchir et admettre que nous avons une obligation. Nous ne nous sommes pas acquittés collectivement de cette obligation. Étant donné que le gouvernement actuel est minoritaire, nous avons la chance de mettre tous ensemble l'épaule à la roue. Il faudra un peu plus que le projet de loi C-22.
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Monsieur le Président, même si le député a essayé de parler du projet de loi, il a passé beaucoup de temps à expliquer que, s'il s'agissait vraiment d'une bonne mesure législative, nous pourrions résoudre des problèmes comme la pauvreté des enfants. Je le renvoie à un livre intitulé
The Child Poverty Solution, un ouvrage rédigé par quelqu'un que je connais très bien, moi, en l'occurrence.
J'y explique ce qui s'est passé en 1989. Le député devrait connaître les faits. En 1989, le député d'Ottawa-Centre prenait sa retraite. C'était un vendredi. Le jeudi soir, il y a eu, dans son bureau, des négociations avec Brian Mulroney et Jean Charest; les personnes présentes se sont demandé quoi faire pour que le député puisse léguer un héritage sans engager le Parlement. Ils se sont entendu sur cette nouvelle formulation préconisant que la Chambre « s'emploie à réaliser l'objectif d'éliminer la pauvreté », j'ai bien dit « s'emploie à réaliser l'objectif d'éliminer », ce qui est différent de « élimine ». Le député devrait dire les choses telles qu'elles sont.
Ce que je tiens vraiment à dire au député c'est que, s'il examine les statistiques concernant la pauvreté des enfants, il constatera que 54 p. 100 de tous les enfants vivant dans la pauvreté au Canada font partie de familles monoparentales qui, elles, représentent 15 p. 100 de toutes les familles de notre pays.
Par conséquent, si nous voulions un jour, au cours de n'importe quelle législature, adopter une motion en vue d'éliminer la pauvreté des enfants, il nous faudrait, en réalité, régler le problème de l'éclatement de la famille au Canada. C'est une question sur laquelle nous ne pouvons pas légiférer. En fait, nous ne pouvons pas dicter par la loi le comportement des gens.
La pauvreté des enfants est une mesure du SFR, le seuil de faible revenu. Le député doit savoir ce qu'est le SFR. C'est une mesure relative. Si nous donnions aujourd'hui 10 000 $ par année à chaque Canadien, il y aurait toujours autant de pauvres, parce que la pauvreté est essentiellement évaluée en fonction des personnes se trouvant au bas de l'échelle. Il nous faut une mesure absolue.
Le député connaît-il la différence entre la pauvreté mesurée en fonction du SFR et une mesure de la pauvreté fondée sur un panier de consommation? Est-il d'avis que, pour évaluer la pauvreté au Canada, il nous faut établir un véritable seuil de la pauvreté de manière à pouvoir le mesurer et agir en conséquence, parce que, quoi que nous fassions en nous fondant sur une mesure relative comme le SFR, il restera toujours des gens au bas de l'échelle.
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Monsieur le Président, nos enfants constituent la plus précieuse ressource du Canada. C'est pourquoi, en dépit de ses efforts pour éponger le déficit, le gouvernement du Canada continue de placer les besoins des enfants en tête de liste. En effet, le gouvernement du Canada investira, au cours du présent exercice, plus de 13 milliards de dollars dans les programmes destinés aux enfants et à leur famille. Je conviens toutefois que nous devons faire davantage.
J'aimerais mettre en évidence l'engagement du gouvernement envers les enfants, nos réalisations à ce jour, le travail qui reste à faire et comment l'adoption du projet de loi C-22 donnera au nouveau ministère du Développement social un plus grand pouvoir d'action en ce qui a trait aux enfants.
Aucun gouvernement ou ordre de gouvernement ne peut répondre seul aux besoins des enfants. Nous savons cela. C'est pourquoi il est si important que le gouvernement du Canada collabore efficacement avec les gouvernements provinciaux et territoriaux. Je déplore ces dispositions de récupération. Nous avons travaillé d'arrache-pied pour établir ce partenariat qui commence à produire des résultats.
En 1998, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont conclu une entente historique ayant mené à la création de la prestation nationale pour enfants que l'on a qualifiée de plus important programme social au pays depuis le régime d'assurance-maladie.
Dans le cadre de ce programme, nous travaillons de concert pour prévenir et réduire la pauvreté chez les enfants, pour veiller à ce qu'il soit toujours plus logique pour les parents, du point de vue économique, de travailler que de recevoir de l'aide sociale et finalement, pour réduire les chevauchements et les dédoublements et pour rationaliser nos efforts.
Les provinces, territoires et premières nations offrent les services et les programmes, et le gouvernement du Canada fournit de l'aide financière sous forme de prestations mensuelles aux familles avec enfants. Par exemple, en 2002-2003, la prestation fiscale canadienne pour enfants a fourni 5,3 milliards de dollars en prestations à plus de 80 p. 100 des familles canadiennes avec enfants. Un supplément destiné aux familles à faible revenu a permis d'ajouter au total 2,4 milliards de dollars, dont 40 p. 100 des familles canadiennes avec enfants ont bénéficié.
Le plus récent rapport d'étape prouve que le programme produit de bons résultats. En 2000, la prestation nationale pour enfants a permis de diminuer le nombre de familles à faible revenu d'environ 5 p. 100. Autrement dit, environ 23 000 familles, c'est-à-dire 55 000 enfants, n'étaient plus considérées comme des familles à faible revenu. Le programme commence à porter fruits.
Pour simplifier la chose encore plus, cela signifie qu'en moyenne, la prestation nationale pour enfants procure 1 800 $ supplémentaires aux familles à faible revenu. Il s'agit là d'un grand pas vers la réduction du degré de pauvreté des enfants au pays, mais il nous faut en faire plus et nous en ferons plus.
C'est pour cette raison que le gouvernement du Canada a annoncé l'an dernier qu'il ajouterait 965 millions de dollars par année au Supplément de la Prestation nationale pour enfants d'ici 2007-2008. Un seul enfant qui vit dans la pauvreté est un enfant de trop.
Le partenariat sur lequel repose la création de la Prestation nationale pour enfants se fonde sur l'approche de collaboration au sein du pays visant à répondre aux besoins des enfants et de leur famille. En effet, un an après l'introduction de la Prestation nationale pour enfants, le gouvernement du Canada et ses homologues provinciaux et territoriaux ont mis en place un Plan d'action nationale pour les enfants. Ce plan d'action présente leur vision commune en ce qui a trait aux enfants se fondant sur quatre grands objectifs: la santé, la sécurité, la réussite en matière d'apprentissage ainsi que la responsabilité et l'engagement social. Nous savons que si nous ne venons pas en aide aux enfants très tôt dans leur vie, il arrive souvent que nous les perdions et que nous perdions aussi l'extraordinaire potentiel qu'ils ont à offrir. C'est un très mauvais service à rendre à nos enfants et à notre pays.
Laissez-moi vous présenter trois initiatives qui démontrent bien comment le partenariat nous permet de concentrer nos efforts sur les besoins des enfants. En 2000, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont mis en oeuvre l'Entente sur le développement de la petite enfance pour aider les enfants à réaliser leur plein potentiel. Chaque année, le gouvernement du Canada investit 500 millions de dollars dans quatre grands secteurs, soit les programmes prénataux, les centres de ressources familiales, les services de garde et les services communautaires.
Cette entente a déjà produit des résultats positifs. Par exemple, au Manitoba, 6 000 femmes vulnérables ont obtenu l'aide nécessaire pour mener une saine grossesse. C'est très important.
Cependant, tous ces efforts sont insuffisants pour répondre aux besoins criants en matière de soutien et de services pour le développement de la petite enfance. Voilà pourquoi l'an dernier, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux ont bonifié leur engagement en concluant une nouvelle entente multilatérale pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. À ce titre, le gouvernement du Canada s'est engagé à verser plus d'un milliard de dollars sur cinq ans à ses homologues provinciaux et territoriaux afin d'appuyer les nouveaux investissements consacrés aux programmes et services d'apprentissage et de garde de jeunes enfants d'un bout à l'autre du Canada.
Il est essentiel que tous--enfants, adultes et membres de la collectivité--puissent poursuivre leurs apprentissages afin de profiter au maximum des possibilités s'offrant à eux. C'est pourquoi le gouvernement du Canada a mis en place un projet pilote intitulé « Comprendre la petite enfance ». Grâce à cette initiative, 12 collectivités sont en mesure de mieux comprendre la multitude de facteurs influençant le développement des enfants. À l'aide de cette précieuse information. elles pourront prendre des décisions éclairées au sujet des politiques et des investissements qui leur conviennent. À la lumière des premiers résultats positifs de cette initiative, le gouvernement a prévu, au Budget 2004, des fonds pour élargir le programme à jusqu'à 100 collectivités au Canada au cours des sept prochaines années.
Tous ces programmes établissent une importante fondation pour l'avenir de nos enfants, mais il y a toujours une ombre au tableau. Je parle bien sûr de l'apprentissage et la garde des jeunes enfants.
Les Canadiens nous ont laissé savoir que la garde d'enfants devait figurer parmi les priorités, et nous sommes d'accord. Ils nous ont indiqué que les services de garde devaient favoriser le développement émotionnel, intellectuel, social et physique des enfants. De plus, ils veulent des services de garde abordables et à la portée de toutes les familles souhaitant y participer. Il est maintenant temps de mettre en place un système national pour l'apprentissage et la garde des jeunes enfants. Le gouvernement du Canada s'est engagé, dans le discours du Trône, à aller rapidement de l'avant dans ce dossier, ce qu'il a fait.
En novembre, les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux se sont entendus sur les principes communs qui guideront l'élaboration d'une initiative nationale sur l'apprentissage et la garde de jeunes enfants. J'aimerais préciser qu'il s'agit des mêmes principes que ceux identifiés par les parents et les experts, soit la qualité, l'universalité, l'accessibilité et le développement.
Il reste encore beaucoup de travail à faire et nous sommes déterminés à jeter les bases de ce système le plus rapidement possible. Les ministres ont convenu de se rencontrer au début de 2005 pour finaliser une entente, et cela donne beaucoup d'espoir et c'est extrêmement intéressant pour notre pays et pour nos enfants.
Le gouvernement du Canada, quant à lui, accordera un montant additionnel de cinq milliards de dollars sur cinq ans pour faire de ce projet une réalité sous peu. L'évolution rapide du plan d'action pour les enfants requiert une attention spéciale de la part du gouvernement du Canada. Il est nécessaire de mettre en place un ministère qui sera consacré au bien-être social des enfants, de leur famille et de tous les Canadiens. Ce ministère devra être doté de l'expertise et de l'expérience nécessaires pour comprendre que l'éducation des jeunes enfants et des programmes d'apprentissage et de garde de jeunes enfants de qualité sont nécessairement liés au rendement économique, aux investissements dans la santé et les services sociaux, à la planification urbaine et à l'équité sociale. C'est pourquoi il est si important de consacrer dans une loi la structure ministérielle de Développement social Canada annoncée en décembre dernier, et j'espère que nous y parviendrons.
En divisant en deux portefeuilles le développement social et le développement des ressources humaines, le gouvernement leur accorde à chacun davantage de poids et de légitimité. Ainsi le gouvernement pourra consacrer au plan d'action pour les enfants toute l'attention qu'il mérite.
La collaboration entre le gouvernement du Canada et ses homologues provinciaux et territoriaux s'est avérée efficace pour répondre aux besoins des enfants. Il est maintenant temps de franchir la prochaine étape de ce processus continu en créant le ministère du Développement social.
J'encourage fortement tous les députés à appuyer la loi proposée. Nos enfants méritent rien de moins que toute l'attention que nous pouvons leur donner. Je peux dire aux députés que, en tant que nouvelle députée, ce sera une grande priorité pour moi-même, ainsi que pour notre gouvernement, de faire passer au premier plan les besoins des enfants, et ce projet de loi est une première étape.