Le 8 octobre 2004--Le ministre de la Justice--Deuxième lecture et renvoi au Comité permanent de la justice, des droits de la personne, de la sécurité publique et de la protection civile du projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d’autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.
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Monsieur le Président, je suis heureux de parler du projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d'autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.
Le projet de loi C-2 traite d'une question qui préoccupe au plus au point de nombreux Canadiens, à savoir la protection des enfants contre les mauvais traitements, la négligence et l'exploitation. C'est aussi une question prioritaire pour le gouvernement, un engagement comme en témoigne le récent discours du Trône et le fait qu'il s'agit du premier projet de loi présenté au cours de cette législature.
Le projet de loi C-2 propose des réformes en matière de droit pénal qui sont très bien accueillies et il vise cinq grandes questions.
[Français]
Premièrement, il renforce les dispositions actuelles interdisant la pornographie juvénile.
Deuxièmement, il améliore la protection des jeunes contre les personnes qui pourraient les exploiter sexuellement en profitant de leur vulnérabilité.
Troisièmement, il modifie certaines dispositions portant sur la détermination de la peine pour les infractions commises contre des enfants, y compris la violence et la négligence, afin que ces peines reflètent davantage la gravité de ces infractions.
Quatrièmement, il facilitera les témoignages des enfants victimes ou témoins et des autres personnes vulnérables grâce à certaines mesures, notamment en assurant la cohérence et la clarté des règles relatives au recours aux moyens de facilitation des témoignages et en disposant que les enfants sont, d'emblée, compétents pour témoigner.
Enfin, il crée deux nouvelles infractions de voyeurisme interdisant l'observation ou l'enregistrement subreptice d'autrui dans des situations où l'on est en droit de s'attendre au respect de son intimité.
[Traduction]
Les lois criminelles canadiennes contre la pornographie juvénile sont parmi les plus rigoureuses du monde. Le projet de loi C-2 propose des réformes supplémentaires qui rendront ces lois encore plus sévères.
Le projet de loi C-2 propose les réformes suivantes concernant la pornographie juvénile. Il élargit la définition de pornographie juvénile pour inclure les formats audio et les documents écrits dont la caractéristique principale est la description d'activités illicites avec des enfants, si cette description est faite à des fins sexuelles.
[Français]
Il interdit toute publicité portant sur la pornographie juvénile. Il triple la peine maximale pour toutes les infractions de pornographie juvénile dans une poursuite à procédure sommaire, la faisant passer de six à dix-huit mois.
[Traduction]
Il fait en sorte que les infractions liées à la pornographie juvénile dans le but de réaliser des bénéfices soient des facteurs aggravants en ce qui a trait aux sentences. Il remplace les moyens de défense que sont la valeur artistique, l'éducation, le but scientifique ou médical ainsi que le bien collectif par un moyen de défense à deux volets fondé sur l'intention légitime et axé sur les préjudices causés.
Selon ce projet de réforme, la défense n'est possible que pour les actes qui découlent d'une intention légitime relative à la justice, la science, la médecine, l'éducation ou l'art et qui ne posent pas de risque excessif de préjudice à l'endroit des enfants.
Le projet de loi C-2 propose également d'améliorer la protection des jeunes contre les personnes qui pourraient les exploiter sexuellement en profitant de leur vulnérabilité. Selon le projet de réforme, les tribunaux doivent établir si le jeune est exploité dans la relation en examinant la nature et les circonstances de la relation, y compris l'âge du jeune, la différence d'âge, l'évolution de la relation et le degré d'autorité ou d'influence exercé sur le jeune.
[Français]
Ainsi, le projet de loi C-2 oblige le tribunal à s'intéresser à la conduite du prévenu à l'égard du jeune et non au fait que le jeune ou la victime aurait ou non consenti à cette conduite.
[Traduction]
On dénonce souvent les sentences imposées dans les cas où les victimes sont des enfants. Le projet de loi C-2 propose de nombreuses modifications qui visent précisément cette question.
Outre les modifications proposées relativement à la détermination de la peine dans les cas de pornographie infantile, le projet de loi C-2 propose de porter de 6 mois à 18 mois la peine maximale applicable, dans les cas de déclaration de culpabilité par procédure sommaire, pour les infractions d'ordre sexuel perpétrées à l'égard des enfants et pour les infractions visant l'omission de fournir les choses nécessaires à l'existence des enfants ou l'abandon de ceux-ci. En outre, la peine maximale applicable dans les cas de mise en accusation passerait de cinq à dix ans pour l'infraction d'exploitation sexuelle d'adolescents, et de deux à cinq ans pour les infractions visant l'abandon d'un enfant ou l'omission de lui fournir les choses nécessaires à l'existence.
Dans tous les cas de mauvais traitements à l'égard d'un enfant, le tribunal devrait accorder une attention particulière à la dénonciation et à la dissuasion de ce type de comportement, qui constituerait une circonstance aggravante pour la détermination de la peine.
Le projet de loi C-2 propose également des modifications au droit pénal, afin de donner une possibilité accrue aux enfants et aux autres victimes ou témoins vulnérables de faire un compte rendu clair, complet et exact des événements, tout en respectant les droits et libertés de l'accusé.
Le projet de loi C-2 permettrait d'utiliser des moyens visant à faciliter les témoignages dans trois catégories de cas: les cas mettant en cause une victime ou un témoin de moins de 18 ans, ou une victime ou un témoin ayant une déficience; les cas mettant en cause les victimes de harcèlement criminel, et les cas impliquant d'autres victimes et témoins adultes vulnérables.
Le projet de loi C-2 propose de modifier le critère d'utilisation des moyens visant à faciliter les témoignages dans les cas où toutes les victimes sont des enfants. Ces moyens seraient accessibles sur demande, à moins qu'ils n'entravent l'administration de la justice. Dans les cas de harcèlement criminel où l'accusé assure sa propre défense, la Couronne pourrait demander qu'un avocat soit nommé pour effectuer le contre-interrogatoire de la victime. Dans ces cas, le tribunal nommerait l'avocat, à moins que cela ne fasse obstacle à l'administration de la justice.
Dans les cas mettant en cause des victimes ou des témoins vulnérables, par exemple des victimes de violence conjugale ou d'agression sexuelle, la Couronne pourrait demander l'utilisation de moyens visant à faciliter le témoignage ou la nomination d'un avocat pour effectuer le contre-interrogatoire d'un accusé qui assure sa propre défense. Dans ces cas, ces témoins adultes devraient démontrer, en se fondant sur les circonstances de l'affaire, notamment la nature de l'infraction et tout lien existant entre eux et l'accusé, qu'il leur est impossible de faire un récit complet et franc des faits sans le recours à un moyen visant à faciliter leur témoignage.
[Français]
De plus, le projet de loi C-2 propose de modifier la Loi sur la preuve au Canada, afin de supprimer l'obligation de procéder à une audition pour déterminer la capacité du témoin à déposer, et afin de supprimer la distinction entre le témoignage sous serment et le témoignage sans serment.
Sous le régime du projet de loi C-2, l'aptitude à témoigner d'un enfant de moins de 14 ans dépendra de son aptitude à comprendre les questions et à y répondre, et non de son aptitude à exprimer ce que signifie pour lui le fait de prêter serment ou de dire la vérité. Il appartiendra ensuite au juge des faits, comme dans toute autre situation, de déterminer le poids à accorder au témoignage.
[Traduction]
Enfin, le projet de loi C-2 propose de moderniser le droit pénal en l'adaptant aux nouvelles façons dont sont perpétrés les actes de voyeurisme.
[Français]
Comme je l'ai dit au début, le projet de loi C-2 propose de nombreuses réformes du droit pénal qui seront bienvenues. La Chambre a déjà adopté une version antérieure de ce projet de loi. J'espère que cette nouvelle version renforcée recevra toujours l'appui des honorables députés.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui pour parler du projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d'autres personnes vulnérables).
Je tiens tout d'abord à préciser que certains aspects de ce projet de loi sont valables. Je me réjouis de ces mesures. Par exemple, le Canada a besoin d'une loi pour s'attaquer au voyeurisme et à la distribution de matériel voyeuriste. D'ailleurs, Mme Julia Buote, qui est originaire de ma province natale, le Nouveau-Brunswick, a aidé à mener la lutte en vue de l'adoption de lois plus strictes sur le voyeurisme. Je la félicite pour son travail. Nous avons aussi besoin d'une loi qui facilite le témoignage des enfants victimes et des témoins, et ce projet de loi est un pas dans cette direction.
Malheureusement, comme nous l'avons déjà vu à la Chambre, ces mesures intéressantes sont incluses dans un projet de loi qui est loin de répondre aux besoins des enfants du Canada. En bref, cette loi maintient la dangereuse échappatoire qui permet aux pornographes juvéniles de continuer d'avoir en leur possession du matériel qui devrait être illégal.
Une bonne partie de la controverse qui entoure les lois canadiennes sur la pornographie juvénile remonte à l'affaire John Sharpe. Dans le jugement Sharpe, la Cour suprême du Canada a déclaré que la défense fondée sur la « valeur artistique » que contient le Code criminel doit être interprétée aussi largement que possible. Cette déclaration a contribué à formuler la décision qui a permis d'acquitter M. Sharpe de deux chefs d'accusation pour possession de matériel pornographique juvénile dans le but d'en faire la distribution. Le matériel en question contenait des écrits violents portant sur des enfants vulnérables, mais le juge a conclu en bout de ligne que ce matériel avait une valeur artistique.
À l'échelle du Canada, les cas de pornographie juvénile ont été mis en veilleuse et le gouvernement libéral n'a rien fait pendant que l'affaire Sharpe suivait son cours. Pendant deux ans, les enfants canadiens ont été sans protection juridique contre les pornographes puisque la police était obligée de suspendre les enquêtes en attendant les résultats de l'appel.
La Cour suprême a conclu que la valeur artistique doit s'entendre « de toute forme d'expression pouvant raisonnablement être considérée comme de l'art » et que « toute valeur artistique objectivement établie, si minime soit-elle » fonderait le moyen de défense.
Lorsque le gouvernement libéral a enfin réagi à l'indignation provoquée dans la population par le jugement Sharpe, sa réponse a été tristement inadéquate. À trois reprises, avec le projet de loi C-20, puis avec le projet de loi C-12 et enfin avec le projet de loi C-2, que nous examinons aujourd'hui, le gouvernement a voulu donner l'impression qu'il lutte énergiquement pour la protection des enfants. Mais en fait, il laisse subsister des échappatoires qui constituent une menace pour les jeunes au Canada.
Le gouvernement est revenu à la case de départ et veut encore inclure dans la loi un moyen de défense analogue à celui de la valeur artistique, pour les personnes accusées de possession de pornographie juvénile.
Le projet de loi C-12, qui avait été présenté à la 37e législature, autorisait une seule défense contre des accusations relatives à la pornographie juvénile, à savoir le bien public, qui devait remplacer les moyens de défense prévus actuellement dans le Code criminel, soit la valeur artistique et le but éducatif, scientifique ou médical.
Les libéraux peuvent bien essayer de convaincre les gens en disant que la valeur artistique ne peut plus servir de moyen de défense, il n'en demeure pas moins que l'ancien ministre de la Justice a admis devant le Comité de la justice que le concept de bien public était plus large et qu'il englobait la valeur artistique. Comme le ministre l'a dit, la valeur artistique existe toujours au sens où une oeuvre d'art devra satisfaire au critère du nouveau moyen de défense fondé sur le bien public.
Il est intéressant de constater que, dans le jugement Sharpe, la Cour suprême examine la question du bien public. Elle précise que, selon les interprétations déjà faites du concept de bien public, celui-ci comprend « ce qui est nécessaire ou favorable à [...] l'activité [...] artistique ou à d'autres sujets d'intérêt général ». Lorsque les Canadiens ont découvert cette échappatoire, ils ont été indignés à juste titre.
Les libéraux proposent maintenant, dans le projet de loi C-2, une toute nouvelle échappatoire, qui s'appelle cette fois le « but légitime ». La nouvelle législation remplace le bien public par le but légitime. Ce moyen de défense pourrait être employé lorsque l'accusé aurait agi dans un but légitime relié entre autres à l'art et lorsque ses actes ne poseraient aucun risque indu pour des personnes âgées de moins de 18 ans. Donc, l'échappatoire de la valeur artistique est toujours présente, et le risque indu est laissé à l'interprétation des juges.
Dans la décision qu'elle a rendue en 2001 dans l'affaire Sharpe, la Cour suprême du Canada a dit qu'il fallait interpréter aussi largement que possible l'expression « valeur artistique », ce qui en dit long sur ce que les tribunaux pensent de ce genre de moyens de défense.
J'ai l'impression que les Canadiens se demandent pourquoi le gouvernement se livre à de telles contorsions pour offrir des échappatoires en cas de possession de pornographie juvénile. Je crois que le problème est que le gouvernement attache moins d'importance à la protection des enfants qu'à ce que les tribunaux diraient si nous adoptions une loi efficace.
Selon moi, établir un critère de risque indu est une insulte envers les Canadiens. Tout risque menaçant la sécurité des enfants devrait susciter la réaction la plus ferme possible.
Je demande au gouvernement d'écouter les gens qui sont aux avant-postes de la protection des enfants. Qu'il écoute les agents de police qui sont confrontés à la tragédie que constitue l'exploitation sexuelle des enfants. Je vais citer Scott Newark, vice-président et conseil spécial du Bureau consultatif pour les services aux victimes d'actes criminels. Voici:
Presque invariablement, comme dans l'affaire Sharpe, l'interprétation que font les tribunaux de l'article 1 est déterminante; franchement, au lieu que, pour chaque loi, ce soit les tribunaux qui décident quelle était l'intention du Parlement—et c'est mon expérience—ce dernier devrait préciser clairement son intention, particulièrement quand il faut choisir entre plusieurs priorités.
Là encore, l'affaire Sharpe est un parfait exemple. En l'occurrence, il a été reconnu que la pornographie juvénile, sous toutes ses formes, représente un risque pour les enfants.
Le sergent Paul Gillepsie, du service de police de Toronto a dit ceci:
Nous avons vu ce qui se passe quand on s'en remet à la police pour définir ce qui a du mérite artistique et ce qui n'en a pas. Nous allons devoir nous débattre avec cela pendant des années.
Dorénavant, la police devra déterminer, avant de faire quoi que ce soit d'autre, si quelque chose a un but légitime ou pose un risque indu.
J'aimerais parler également de certaines autres modifications proposées dans le projet de loi, notamment en ce qui concerne les peines maximales. Là encore, les Canadiens auront l'impression que le gouvernement libéral réprime sévèrement les crimes contre les enfants. Toutefois, alourdir les peines maximales ne sert à rien si les tribunaux ne les imposent pas. L'expérience nous a appris que l'alourdissement des peines maximales ne changeait rien dans la pratique. Ce qu'il faut, ce sont des peines minimales obligatoires, des peines qui veulent dire quelque chose. Il faut aussi éliminer la mise en liberté d'office et les peines avec sursis pour les prédateurs d'enfants.
D'un bout à l'autre du pays, les adeptes de pornographie juvénile sont condamnés à des peines avec sursis. Ils ne passent pas de temps en prison. Les Canadiens n'en sont peut-être pas conscients. Comment donc des peines maximales plus lourdes vont-elles être de la moindre utilité si les tribunaux imposent tout juste la peine minimale? Des peines maximales plus lourdes ne seront pas efficaces contre la pornographie juvénile à moins que les tribunaux ne les imposent.
Par ailleurs, le projet de loi n'interdit pas les peines avec sursis. Or, les prédateurs d'enfants devraient servir leur peine en prison et non pas dans la communauté.
J'aimerais aborder la question de l'âge du consentement à des relations sexuelles. En négligeant de relever l'âge du consentement, le projet de loi fait fi des exhortations des groupes de policiers, des défenseurs des intérêts des enfants et des autorités provinciales. L'âge du consentement devrait être relevé de 14 à 16 ans. Des sondages indiquent que 80 p. 100 des Canadiens voudraient qu'il soit porté à au moins 16 ans.
En 2001, les ministres provinciaux ont adopté, à l'unanimité, une résolution demandant au gouvernement fédéral de porter l'âge du consentement à au moins 16 ans.
Tout comme sa précédente incarnation, le projet de loi C-12, le projet de loi C-2 omet de hausser l'âge du consentement. Au lieu de cela, il ajoute une nouvelle catégorie, celle des personnes qui sont dans une relation où elles exploitent un jeune. La loi interdit déjà à toute personne qui est en situation d'autorité ou de confiance vis-à-vis d'un jeune, ou à toute personne à l'égard de laquelle celui-ci est en situation de dépendance, d'entretenir des relations sexuelles avec lui. Je ne comprends toujours pas comment l'ajout de cette nouvelle catégorie permettra aux jeunes de jouir d'une protection juridique accrue.
Tous les Canadiens se soucient beaucoup des enfants. J'estime que tous les députés veulent protéger les enfants. Les libéraux, cependant, s'obstinent à accorder davantage d'importance aux droits des criminels qu'aux besoins des enfants. Il faut que ça change.
Nous nous devons d'agir dans l'intérêt de nos enfants et d'éliminer toutes les échappatoires qui permettent la possession de pornographie juvénile.
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Monsieur le Président, j'en profite d'abord pour vous féliciter de votre accession à la vice-présidence de cette Chambre. Je sais que vous avez toujours été extrêmement préoccupé par les libertés des parlementaires et par la qualité des débats que l'on doit avoir dans cette enceinte et que vous serez, à votre façon, le gardien de nos libertés.
J'en profite également pour féliciter tous les nouveaux parlementaires et, bien sûr, mes nouveaux collègues du Bloc québécois. On connaît le mandat extrêmement clair et percutant que nous ont confié nos collègues du Québec, mais également les nouveaux collègues de l'autre côté de la Chambre.
Le projet de loi C-2 qui vise à modifier le Code criminel est extrêmement important. D'abord, il est important en ce qu'il donne suite à une décision de la Cour suprême, dans l'arrêt Sharpe, concernant la pornographie juvénile, et ensuite, il touche une question extrêmement sensible, soit la pédopornographie.
C'est donc une question extrêmement sensible, puisque, bien sûr, tous les parlementaires sont sensibles à tout ce qui, de près ou de loin, peut se rapprocher de l'exploitation des enfants. Toutefois, nous sommes aussi soucieux de ne pas vouloir mettre en place un système qui pourrait inhiber et qui pourrait faire en sorte que l'on puisse porter atteinte à la liberté des artistes, par exemple. Entre les deux, il y a un équilibre à atteindre, et nous pensons que la première mouture du projet de loi C-2 y parvient.
Commençons par le début. La définition de la pornographie juvénile, la pornographie infantile, est assez claire. Dans le Code criminel, depuis fort longtemps, il existait déjà bien sûr des dispositions concernant la pornographie juvénile. Ce qui est plus contemporain, ce qui est plus nouveau, ce sont maintenant tous les supports, tous les véhicules par lesquels cette pornographie peut prendre forme. Il s'agit bien évidemment des nouvelles technologies tel Internet au premier chef.
Par conséquent, pour les fins de ce débat, il faut avoir à l'esprit la définition que l'on donne de la pornographie juvénile. L'article 7 du projet de loi vise à modifier le paragraphe 163.1(1) du Code criminel, lequel se lit comme suit:
163.1(1)a) de toute représentation photographique, filmée, vidéo ou autre, réalisée ou non par des moyens mécaniques ou électroniques:
« Électroniques » veut dire ici, évidemment, une innovation. Je poursuis la lecture dudit article:
(i) soit où figure une personne âgée de moins de dix-huit ans ou présentée comme telle et se livrant ou présentée comme se livrant à une activité sexuelle explicite,
On comprend donc que le premier élément de la définition de pornographie juvénile implique la représentation d'un enfant de moins de 18 ans dans une activité sexuelle. Évidemment, on comprend que l'expression « activité sexuelle » est ici centrale.
Voici le deuxième élément de la définition:
(ii) soit dont la caractéristique dominante est la représentation, dans un but sexuel, d'organes sexuels ou de la région anale d'une personne âgée de moins de dix-huit ans;
Cette définition est importante, puisqu'elle doit nous assurer que lorsque la magistrature, soit un juge d'une cour de droit commun mais particulièrement un juge d'une cour criminelle, aura devant elle des personnes qui auraient été accusées de pornographie infantile ou de pornographie juvénile, il devra y avoir comme composante principale des représentions d'activités sexuelles d'une personne de moins de 18 ans.
Est-ce que cela veut dire que toute représentation d'activités sexuelles d'une personne de moins de 18 ans conduira la Couronne à porter des accusations en vertu du projet de loi dont la Chambre est saisie? Non, parce qu'il y aura, comme cela existe en droit criminel, des moyens de défense. Dans ce cas-ci, il y aura un moyen de défense qui pourra être invoqué.
Donc, on comprend qu'il y aura accusation s'il y a la définition que je viens de donner. Toutefois, on peut se disculper de cette accusation. Il pourra y avoir des situations ou des représentations de jeunes de moins de 18 ans ayant eu des activités sexuelles qui ne seront pas passibles de poursuites. C'est le moyen de défense, que propose le projet de loi, qui est centré sur un but légitime.
Qu'est-ce qu'un but légitime? Je vous donne la définition littérale du projet de loi. Ce dernier crée un seul moyen de défense dans des causes de pornographie juvénile, lequel ne s'applique que si l'acte en question a:
[...] un but légitime lié à l’administration de la justice, à la science, à la médecine, à l’éducation ou aux arts [...]
Pourquoi ce deuxième élément est-il important? C'est parce que dans la cause Sharpe, deux moyens de défense pouvaient être invoqués devant une cour. Je comprends que le projet de loi en reprend un.
Il est certain que si un télédiffuseur autorisé en vertu du CRTC présentait sur une chaîne publique une annonce publicitaire faisant la promotion d'un produit d'hygiène personnelle comme un savon, de la poudre pour bébés, des choses comme cela, et qu'on voyait un enfant dans un bain avec un autre enfant, bien sûr, une telle chose ne serait pas passible de poursuites en vertu du projet de loi dont la Chambre est saisie. Il est important de faire cette nuance.
Au moment de la divulgation du jugement de la Cour suprême dans la cause Sharpe, des inquiétudes avaient été soulevées quant à l'équilibre que l'on doit maintenir entre une protection musclée pour ceux qui veulent exploiter des enfants à des fins de pornographie juvénile et, bien sûr, le droit des artistes ou de professionnels, comme des psychiatres et des représentants d'autres professions associées, d'avoir du matériel qui puisse être utilisé à des fins artistiques ou professionnelles, mais non pas à des fins d'exploitation d'enfants.
Le projet de loi prévoit aussi d'autres modalités peut-être un peu moins importantes, mais qui ont quand même leur raison d'être. Entre autres, on facilite le témoignage des enfants de moins de 14 ans. Ce n'est pas une chose courante devant les tribunaux que d'admettre les enfants de moins de 14 ans. Normalement, il y a, au préalable, une enquête ou une pré-enquête. Le projet de loi facilitera le témoignage des enfants de moins de 14 ans. Nous comprenons qu'il est tout à fait indiqué de le faire dans un contexte où, dans l'appréciation de circonstances ou de faits qui pourraient nous amener à constater l'exploitation d'enfants à des fins de pornographie juvénile, leur témoignage peut incriminer ou disculper une personne.
Également, on facilite différentes modalités de témoignages avec des personnes significatives pour l'enfant, à l'aide de vidéo-conférences ou d'autres technologies de cette nature.
Nous, du Bloc québécois, sommes favorables au principe du projet de loi. Cependant, nous manifestons quand même quelques inquiétudes. Je n'ai pas entendu le secrétaire parlementaire du ministre de la Justice répondre à notre première inquiétude, qui est la suivante. Nous comprenons que le projet de loi établira des peines maximales, dépendamment des infractions considérées. Pour l'infraction principale que j'ai mentionnée, cela passera de 5 à 10 ans. Nous comprenons que certaines circonstances seront jugées comme aggravantes pour la détermination de la sentence. Toutefois, nous nous expliquons mal l'absence de peines minimales.
Je sais qu'une certaine discrétion est accordée aux tribunaux et aux juges quant à la détermination de la peine. Le député de Charlesbourg—Haute-Saint-Charles déposera en comité un amendement au projet de loi qui, je l'espère, sera appuyé par l'ensemble des parlementaires. Cet amendement visera à s'assurer, lorsqu'un procès se déroulera en vertu de la nouvelle infraction créée par le projet de loi C-2, qu'il y a des peines minimales, selon qu'il s'agira d'un cas de poursuites criminelles ou de poursuites en vertu de procédures sommaires. Cela apparaît important, puisque cela donne à la fois un plancher pour des peines minimales et un plafond pour des peines maximales.
En synthèse, nous sommes favorables au projet de loi car il offre une meilleure protection à l'endroit des enfants. Nous souhaitons y apporter un ou deux amendements concernant la détermination de la peine. Je suis sûr que tous les députés du Bloc québécois travailleront sérieusement lors des séances du Comité permanent de la justice.
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Monsieur le Président, il s'agit de ma première occasion de prendre la parole à la Chambre depuis les élections. Il y a tant de mes collègues dont je souhaite souligner l'apport et je désire remercier les électeurs de Windsor—Tecumseh de m'avoir réélu avec une majorité, je dois dire non sans fierté, considérablement plus grande que lors de l'élection précédente.
En fait, ce n'est pas de gaîté de coeur, que je prends la parole aujourd'hui pour discuter de ce projet de loi. Cela ne me fait pas plaisir parce que le sujet de la pornographie juvénile est tellement difficile. Je crois que tout parent ou n'importe quel adulte souhaitant donner aux enfants de notre société une protection raisonnable trouverait regrettable le fait de devoir se pencher sur ce problème.
Mais il s'agit bel et bien d'une réalité, réalité qui existe depuis longtemps et que nous devons reconnaître. La raison pour laquelle nous devons nous y attaquer est que la situation s'est aggravée, tant pour notre société que pour l'ensemble de la planète, à cause de l'avènement des nouvelles technologies, en particulier l'utilisation d'Internet par les pornographes.
Si on remonte 10 ou 20 ans en arrière, la production de pornographie juvénile était minime par rapport à ce qu'elle est aujourd'hui. C'est une réalité qui a pris beaucoup d'ampleur et la production est maintenant énorme, car elle peut être offerte à beaucoup plus de gens. Malheureusement, dans un certain nombre de cas, ce sont de jeunes enfants eux-mêmes qui y ont accès. Non seulement ce sont les victimes, mais souvent, on leur distribue cette pornographie sur Internet. Nous devons nous attaquer à ce phénomène.
De plus, le nouvel article qui a été inséré au sujet du voyeurisme arrive avec beaucoup de retard. En effet, à cause des progrès de la technologie, qui facilitent ce phénomène, il est beaucoup plus important qu'il y a une décennie ou deux. Je félicite le gouvernement d'avoir prévu cette disposition.
Je dois dire que je suis heureux que nous faisions ceci. Je pense que nous procédons ainsi simplement parce que nous avons un gouvernement minoritaire. Normalement, nous procéderions ainsi après la deuxième lecture seulement et le gouvernement chercherait à obtenir l'appui en principe à ce projet de loi. Il ne l'obtiendrait pas de notre parti à ce stade-ci.
C'est l'une des dispositions qui me posent certains problèmes, à savoir que malgré la méthode utilisée, il est question de l'intention évidente de faire cela subrepticement, grâce à un enregistrement ou par tout autre moyen. J'ignore au juste pourquoi nous prévoyons une échappatoire en l'occurrence et nous permettons un moyen de défense fondé sur le bien public. C'est une chose qui doit être examinée beaucoup plus en profondeur au comité et qui devrait être justifiée par le gouvernement. Ce sera un article que mon parti étudiera de très près, et qu'il amendera ou qu'il améliorera d'une façon quelconque pour qu'il n'y ait pas ce moyen de défense qui ne devrait pas exister par ailleurs.
L'autre question qui a probablement causé le plus de problèmes relativement au projet de loi C-20, le prédécesseur de ce projet de loi, est toute la question de la défense fondée sur la valeur artistique. Il est intéressant d'écouter les conservateurs à cet égard, car la défense fondée sur la valeur artistique a été insérée dans le Code criminel en 1993 sous un gouvernement conservateur, peu avant qu'il ne soit flanqué à la porte. Il est intéressant d'écouter les membres actuels du Parti conservateur attaquer ce moyen de défense avec tant de vigueur alors qu'on le doit au départ à leur parti.
La réalité, c'est qu'à la suite de l'affaire Sharpe, il est devenu manifestement inacceptable d'invoquer la valeur artistique au sens où elle est présentement définie dans le Code criminel. Voici la position de notre parti, et c'est aussi celle du Bloc. Nous sommes conscients qu'en raison de la Charte des droits et libertés, les tribunaux vont intervenir lorsqu'une personne du domaine artistique ou culturel se manifeste et affirme: « Je ne commets aucun crime, j'ai le droit de me livrer à cette activité parce que je bénéficie de la liberté d'expression. » Un équilibre s'impose donc.
Encore une fois, le Parti conservateur peut dire qu'il s'engage à éliminer toutes les échappatoires, mais il s'illusionne s'il croit que les tribunaux ne vont pas tenir compte du fait que nous avons une Charte des droits et libertés.
Nous devons donc reconnaître ce fait en notre qualité de députés responsables. Nous devons aménager le projet de loi de manière à ce qu'il protège au maximum et de façon absolue nos enfants, mais qu'il résiste aussi à toute contestation fondée sur la Charte des droits et libertés. Voilà le but que doivent se fixer tous les députés.
Il serait trop facile de simplement nous enfouir la tête dans le sable et d'affirmer que nous allons éliminer toutes les échappatoires et éliminer totalement la pornographie juvénile. Il est de notre devoir de jouer un rôle plus marqué et de trouver la formulation nécessaire pour protéger parfaitement nos enfants dans toute la mesure du possible et, en même temps, nous devons fournir aux tribunaux des lignes directrices. De cette manière, lorsqu'un artiste comparaîtra et établira que les documents qu'il produit ne contreviennent pas à la loi, nous saurons que notre projet de loi ne va pas à l'encontre de la Charte des droits et libertés et néanmoins protège nos enfants.
Voilà ce que nous devons faire, nous le savons. Je pense que même les conservateurs sont de cet avis. Relativement à la publication de documents juridiques, de traités de droit, de recueils de jurisprudence dans le domaine médical et éducatif, nous savons bien que des psychologues, des sociologues, des travailleurs sociaux et des psychiatres vont avoir accès à des documents et vont produire des documents qui seraient considérés comme de la pornographie juvénile si leurs fins n'étaient pas uniquement d'ordre éducatif. Nous reconnaissons ce fait.
Nous admettons également que nous allons vivre la même situation en ce qui concerne le domaine artistique. Nous devons déterminer le cadre approprié dans lequel les tribunaux pourront s'orienter eux-mêmes et être guidés par nous qui avons été élus par la population et qui assumons la responsabilité en ce domaine.
Je ne crois pas que ce projet de loi nous permette d'y arriver. Je ne crois pas que le double critère du but légitime et de l'absence de risque indu pour les enfants soit suffisant. Il ne fournit simplement pas assez de directives aux tribunaux.
J'ai pratiqué le droit pénal pendant un certain temps au début de ma carrière. Je dois admettre qu'en examinant cet article je me suis dit « Voici la défense parfaite pour les avocats de la défense ». J'ai sept ou huit années d'expérience dans ce domaine.
Nous pouvons faire mieux. Je le crois. Nous devrons faire mieux que le critère du but légitime établi ici. Si nous ne le faisons pas, pendant les cinq à dix prochaines années, les tribunaux seront saisis de litiges qui se rendront probablement jusqu'à la Cour suprême du Canada encore une fois. Selon moi, nous n'atteindrons pas l'objectif visé qui est d'assurer une protection maximale à nos enfants tout en conservant un juste équilibre avec les droits constitutionnels en vertu de la Charte.
Je veux passer de ce point à plusieurs autres. Il était intéressant de voir que l'édition d'aujourd'hui du Globe and Mail soulève une autre question. Je crois qu'il y en a beaucoup d'autres qui s'interrogent aussi sur l'ampleur du pouvoir discrétionnaire que nous conférons à nos tribunaux. Encore une fois, je crois que c'est notre responsabilité, en tant que législateurs responsables de ce projet de loi, d'y inclure tout ce que nous pouvons pour donner aux juges du pays d'avantage de repères et de lignes directrices. Ils l'apprécieront. C'est notre responsabilité.
Je terminerai en disant qu'il faut atteindre un équilibre entre le maximum de protection pour nos enfants et la reconnaissance du fait que, dans ce pays, nous appliquons la Charte des droits et des libertés. Nous devons arriver à concilier les deux.
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Monsieur le Président, à titre d'ancien éducateur, je suis attristé et troublé par le fait que des éléments de notre société exploitent les enfants. Le projet de loi C-2 est important pour que nous puissions nous attaquer à des problèmes qui, je crois, nous préoccupent tous, car il s'agit du bien-être des enfants.
Le projet de loi C-2, et plus particulièrement la partie qui porte sur la protection des enfants et d'autres personnes vulnérables, dans l'application de la Loi sur la preuve, est une mesure importante. Il est également important que nous l'adoptions le plus rapidement possible.
Selon moi, cette loi reflète aussi l'importance de la question pour l'ensemble des Canadiens, car il s'agit d'une mesure sur laquelle nous pouvons tous nous entendre. Personne ne peut tolérer ni approuver l'exploitation de jeunes enfants. Le projet de loi C-2 comprend des dispositions importantes qui sont des éléments de solution.
Ainsi, le projet de loi renforce les dispositions existantes sur la pornographie juvénile. La définition serait élargie de façon à englober les enregistrements sonores ainsi que des écrits décrivant des activités sexuelles interdites avec des enfants, lorsque la description est la caractéristique dominante.
Le projet de loi créerait une nouvelle interdiction visant la publicité de la pornographie juvénile, dont les auteurs seraient passibles, par procédure de mise en accusation, d'une peine maximale de dix ans d'emprisonnement. Il porterait de 6 mois à 18 mois la peine maximale applicable, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, pour les infractions visant la pornographie juvénile. De plus, le projet de loi C-2 remplacerait les défenses actuelles en matière de pornographie juvénile par une défense à deux volets fondée sur le but légitime, qui incorpore un critère fondé sur le préjudice.
Le projet de loi C-2 assurerait aux adolescents une meilleure protection contre l'exploitation sexuelle. Il prévoit des peines plus lourdes pour les infractions perpétrées contre des enfants. Le projet de loi faciliterait également le témoignage des enfants et des autres victimes et témoins vulnérables. Il créerait aussi de nouvelles infractions de voyeurisme.
J'appuie le projet de loi C-2. Les modifications qu'il propose sont toutes opportunes. Je voudrais cependant consacrer le reste de mon discours aux dispositions du projet de loi visant à mieux protéger les jeunes contre l'exploitation sexuelle.
Le projet de loi C-2 propose de créer une nouvelle catégorie d'infraction visant l'exploitation sexuelle d'un adolescent qui est en âge de consentir à une activité sexuelle, c'est-à-dire qui a au moins 14 ans mais moins de 18 ans. Aux termes des dispositions relatives à cette infraction, le tribunal devrait déduire de la relation entre une personne et un adolescent, et des circonstances qui l'entourent, que cette personne est dans une relation où elle exploite l'adolescent.
Le tribunal devrait tenir compte de plusieurs facteurs, notamment l'âge de l'adolescent, la différence d'âge entre la personne et l'adolescent, l'évolution de leurs relations et l'emprise ou l'influence de la personne sur l'adolescent. Le projet de loi C-2 contient des dispositions précises qui permettent au tribunal de déduire de la nature d'une relation entre une personne et un adolescent et des circonstances qui l'entourent, que cette personne est dans une relation où elle exploite l'adolescent.
Selon moi, cette directive tient compte du fait que tous les adolescents sont exposés à l'exploitation sexuelle. Elle reconnaît que les circonstances dans lesquelles se trouve un adolescent peuvent le rendre plus vulnérable à l'exploitation. C'est pourquoi le projet de loi oblige le tribunal à tenir compte de la nature d'une relation et des circonstances qui l'entourent, et établit une liste de facteurs, dans lesquels toute personne raisonnable reconnaîtra des indicateurs caractéristiques de l'exploitation.
On entend souvent dire que des jeunes sont contactés sur l'Internet par des personnes qui pourraient profiter de leur vulnérabilité. Prenons, par exemple, le cas d'un adolescent qui établit secrètement et rapidement une relation sur l'Internet. Aux termes du projet de loi C-2, le tribunal devrait voir dans ce fait l'indicateur d'une possible exploitation.
Un autre exemple dont on entend parler est celui d'une jeune personne qui entretient une relation avec une autre personne sensiblement plus âgée. Le projet de loi C-2 oblige clairement le tribunal à en tenir compte.
Le projet de loi C-2 reconnaîtrait qu'un adolescent risque d'être exploité sexuellement non seulement par une personne beaucoup plus âgée que lui, mais aussi par un pair d'environ le même âge. Le projet de loi C-2 s'appliquerait aux deux situations, car le gouvernement reconnaît qu'elles sont inacceptables et devraient être interdites.
Je comprends que les opinions varient sur la question de savoir si les adolescents devraient être sexuellement actifs et jusqu'à quel âge ils devraient attendre avant de le devenir. Or, le fait est qu'ils sont sexuellement actifs. En outre, les interdictions contre les activités sexuelles avec des personnes n'ayant pas atteint l'âge du consentement sont très générales. Elles ne font pas de distinction entre l'activité sexuelle qui consiste à s'embrasser et celle qui consiste à avoir des relations sexuelles. Je ne crois pas que les Canadiens veulent rendre criminel un adolescent de 17 ans qui en embrasse un autre de 15 ans, et le projet de loi C-2 ne le fera pas.
J'approuve l'objectif du projet de loi C-2. Il porte surtout sur la conduite coupable du contrevenant, et non sur le consentement de l'adolescent. C'est en fait la façon dont le droit pénal punit les agressions sexuelles en général, c'est-à-dire en se concentrant sur l'acte coupable du contrevenant, et non sur la victime. À mon avis, le fait que le projet de loi C-2 porte surtout sur l'exploitation de la victime par le contrevenant est le bon objectif et la bonne façon de faire.
Je ferai également remarquer que le projet de loi C-2 propose de doubler la durée de la peine maximale en cas d'exploitation sexuelle d'un adolescent, y compris pour cette nouvelle infraction dont on propose la création, en la faisant passer de 5 à 10 ans lorsque la peine est précédée d'une mise en accusation. Ensemble, la création de cette nouvelle infraction et le fait de doubler la durée de la peine maximale soulignent la gravité de cette forme d'exploitation sexuelle.
En outre, le projet de loi C-2 ferait passer de 6 à 18 mois la peine maximale, sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire, dans les cas d'infractions sexuelles où une personne fait des attouchements sexuels à un enfant, ou l'invite à en faire, et l'exploite sexuellement. Ces réformes ont été très bien accueillies par l'Association du Barreau canadien dans le cadre de l'ancien projet de loi C-12 présenté lors de la session précédente.
Le projet de loi C-2 exigerait, dans les cas de mauvais traitement d'un enfant, que les tribunaux chargés de déterminer la peine accordent une attention particulière aux objectifs de la dénonciation et à différentes propositions en vue de considérer cette conduite comme une circonstance aggravante pour la détermination de la peine.
Le projet de loi C-2 est important en raison des initiatives qu'il renferme. Il prévoit des réformes fort attendues au droit pénal, qui serviraient à protéger les membres les plus vulnérables de notre société. Le temps est venu d'examiner efficacement cette question. Je crois que le ministre, en présentant ce projet de loi, donne suite aux préoccupations que nous avons entendues lors de la dernière session de la législature précédente et au cours de celle-ci. Il est temps d'agir.
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Monsieur le Président, je suis heureuse de prendre la parole aujourd'hui au nom des électeurs de Fleetwood—Port Kells dans le cadre du débat sur le projet de loi C-2 sur la protection des enfants. Ce projet de loi est presque identique aux projets C-12 et C-20 présentés antérieurement. Ceux-ci visaient principalement à répondre à des préoccupations concernant les lois canadiennes sur la pornographie juvénile.
Les petits Canadiens méritent rien de moins qu'une protection absolue contre la pornographie juvénile. Cette mesure législative n'est cependant que de la poudre aux yeux. En tant que législateurs, nous avons la tâche difficile de trouver l'équilibre entre la protection des enfants contre l'exploitation sexuelle et la protection de la liberté de parole et de la liberté de pensée garanties par la Charte des droits et libertés.
Sur ce point, je suis tout à fait d'accord avec Cheryl Tobias, avocate au ministère de la Justice, qui a déclaré, dans son témoignage devant la Cour suprême dans l'affaire John Robin Sharpe, que, si les pédophiles jouissent d'un droit constitutionnel à la liberté d'expression, ce droit ne pèse pas lourd dans la balance par rapport aux intérêts des enfants, concluant qu'il ne faut pas immoler nos enfants sur l'autel de la Charte.
Nous avons besoin de lois qui ont des dents; autrement, elles ne feront qu'entraver le travail des policiers et des procureurs de la Couronne lorsqu'ils essaieront de mettre la main au collet des producteurs de matériel pornographique.
L'exploitation sexuelle des enfants ne devrait pas exister, mais elle se pratique encore des milliers de fois tous les jours. La volonté politique d'y mettre un terme semble manquer à ce gouvernement libéral, qui allie faiblesse et arrogance.
Le ministère de la Justice a proposé le projet de loi C-2 et ses prédécesseurs afin d'étendre l'infraction d'exploitation sexuelle et la définition de la pornographie et d'éliminer la valeur artistique comme moyen de défense dans les poursuites pour pornographie juvénile.
Le projet de loi accroît en outre les peines maximales dont sont passibles les personnes reconnues coupables de ces crimes. S'il est adopté, le projet de loi créera une nouvelle infraction de voyeurisme et une autre pour la distribution de matériel voyeuriste.
Le projet de loi C-2 constitue une réaction à l'affaire John Robin Sharpe, amateur de pornographie juvénile qui a été accusé de possession de matériel pornographique juvénile. Celui-ci a d'abord été trouvé coupable, mais a été acquitté en appel par deux instances inférieures qui ont fondé leur décision sur la Charte des droits et libertés.
Robin Sharpe possédait quelque 400 images de jeunes garçons âgés de moins de 14 ans se livrant à des activités sexuelles, ainsi qu'un recueil de contes intitulé Kiddie Kink Classics dont il était l'auteur. En mars 2002, la condamnation de Sharpe relativement à ces images a été maintenue par la Cour suprême; toutefois, en dernière analyse, il a été acquitté des accusations connexes qui pesaient contre lui relativement aux contes qu'il avait écrits, précisément parce qu'on a jugé que ces textes avaient une valeur artistique.
Cette décision a fait en sorte que le statut juridique actuel de la pornographie juvénile au Canada est trop permissif, de sorte que la sécurité des enfants s'en trouve menacée. Des versions antérieures du projet de loi C-2 visaient à supprimer l'échappatoire qui permet aux gens de créer de la pornographie juvénile en prenant la valeur artistique comme moyen de défense et en établissant une norme de bien public.
L'indignation du public a contraint les libéraux de laissé tomber la notion de bien public en tant que moyen de défense pour justifier la possession de matériel de pornographie juvénile. Ils ont remplacé le bien public par un nouveau moyen de défense fondé sur le but légitime. Le but légitime est défini comme incluant, entre autres, les arts.
Le Parti conservateur veut l'élimination de tous les moyens de défense qui justifient la possession criminelle de matériel de pornographie juvénile. Il n'y a rien d'artistique dans la pornographie juvénile. C'est mauvais et il est établi que ce type de pornographie mène à des agressions sexuelles à l'endroit d'enfants.
Les policiers et les procureurs n'ont toujours pas les outils nécessaires pour s'occuper efficacement des cas de pornographie juvénile. Dans les trois premières années où les membres de la section de l'exploitation des enfants de la police de Toronto se sont attaqués à la pornographie juvénile, ils ont effectué 27 arrestations et saisi 84 ordinateurs qui renfermaient des millions de photos. Toutefois, ces policiers ont été frustrés dans leurs efforts pour faire imposer des peines d'emprisonnement aux contrevenants. Les policiers consacrent souvent plus de temps à faire enquête sur les cas, que les contrevenants n'en passent à purger une peine d'emprisonnement. C'est aussi vrai en ce qui a trait à d'autres crimes.
Dans ma circonscription de Fleetwood—Port Kells, la culture de la marijuana est une préoccupation importante. La GRC a récemment annoncé qu'il y avait 4 500 cultures de marijuana dans la ville de Surrey. Cela représente environ 6 p. 100 des foyers dans cette ville.
Cette année, entre 2 000 et 3 000 cultures de marijuana feront l'objet de descentes et seront détruites dans la vallée du Fraser. De l'autre côté de la frontière, dans le comté de Whatcom, moins de dix interventions du genre seront menées. Cet écart s'explique par le fait que les peines imposées sont plus sévères dans l'État de Washington. Là-bas, les exploitants d'une culture qui comptent plus de 100 plants sont automatiquement passibles d'une peine d'emprisonnement de cinq ans. Dans le cas d'une première infraction, la peine prévue est de trois mois d'emprisonnement, en plus de la saisie des biens. En Colombie-Britannique, une personne peut être accusée pour la septième ou la huitième fois et continuer d'éviter la prison.
Le système judiciaire doit prévoir des peines plus sévères qui reflètent mieux les valeurs de la collectivité. Les peines maximales plus sévères prévues dans le projet de loi C-2 relativement à la pornographie juvénile et aux prédateurs ne seront pas efficaces si les tribunaux ne les imposent pas.
Le fait d'avoir des peines maximales plus sévères ne sert à rien si les tribunaux n'imposent pas les peines prévues. Or, nous savons par expérience que lorsque les peines maximales sont accrues, il n'y a pas de changement correspondant des habitudes en matière de détermination de la peine. Il faut donc des peines obligatoires et l'application de peines réelles, grâce à l'élimination des libérations d'office et des peines avec sursis pour les prédateurs d'enfants.
Les peines avec sursis qui ont permis à des agresseurs sexuels d'enfants, des meurtriers, des violeurs et des chauffeurs coupables de conduite avec facultés affaiblies de purger leur peine à la maison plutôt qu'en prison doivent être supprimées dans le cas des délinquants dangereux.
En 1999, 66 000 images pornographiques ont été retrouvées dans la maison du pédophile condamné Tony Marr. La police a passé une année à préparer la preuve contre lui, mais Marr n'a écopé que d'une peine avec sursis et d'une période de probation. L'une des conditions de sa probation était qu'il s'abstienne d'utiliser Internet et les ordinateurs à moins de raisons médicales ou professionnelles. Sur des vidéos de surveillance tournées récemment, on le voit pourtant s'affairer autour d'un ordinateur et échanger des CD-ROMS. Cela démontre l'absurdité des peines avec sursis.
On estime à plus de 100 000 les sites de pornographie juvénile sur le Web. Un groupe de chercheurs de l'Université de Cork en Irlande, qui étudie la pornographie infantile, affirme voir apparaître chaque mois en moyenne trois ou quatre nouveaux visages d'enfants victimes de mauvais traitements. Environ 40 p.100 des filles et 55 p. 100 des garçons sont âgés de 9 à 12 ans. Les autres sont encore plus jeunes. Le groupe estime que 50 000 nouvelles images de mauvais traitements aux enfants sont publiées dans les infogroupes chaque mois. Diverses études ont montré qu'environ 35 à 50 p. 100 des collectionneurs de pornographie juvénile ont eux-mêmes maltraité des enfants.
Au cours de trois dernières années, 44 p. 100 des gens arrêtés à Toronto pour possession de pornographie juvénile ont également été accusés ou condamnés pour exploitation sexuelle d'enfants.
Les coups de filet visant la pornographie juvénile aux États-Unis ont fourni aux autorités canadiennes 2 329 pistes, mais près de 2 000 n'ont jamais été vérifiées par la police. Cela est attribuable au fait que la plupart des collectivités n'ont tout simplement pas la volonté ou les ressources, ou encore d'agents formés pour faire le travail.
Le tueur d'enfant Michael Briere a reconnu qu'il avait été excité par les images de pornographie juvénile qu'il avait visionnées à l'écran de son ordinateur juste avant d'enlever, d'agresser sexuellement et de tuer Holly Jones.
Actuellement, le Code criminel fixe à 14 ans l'âge du consentement sexuel. Des rapports récents indiquent que des pédophiles de l'autre côté de la frontière attirent des enfants vulnérables au moyen d'Internet. Deux facteurs favorisent cette activité visant le Canada: premièrement, l'âge du consentement sexuel n'est que de 14 ans au Canada, soit l'un des plus bas dans tous les pays occidentaux; deuxièmement, avec plus de 10 millions d'Internautes, le Canada est l'un des pays les plus branchés au monde.
Selon une étude effectuée par Microsoft, 80 p. 100 des enfants au Canada vivent dans des foyers munis d'ordinateurs et 25 p. 100 ont déjà reçu une invitation de la part d'un étranger avec qui ils ont bavardé en ligne.
Internet est devenu un véhicule extraordinaire utilisé par les criminels pour attirer et maltraiter des petits Canadiens ainsi que pour diffuser du matériel illégal. La recherche indique que les pédophiles manipulent souvent les enfants en leur montrant des images sur Internet pour leur faire croire qu'il est acceptable pour eux d'avoir des rapports sexuels avec les adultes.
Le Code criminel a été modifié en 2002, de manière à criminaliser le racolage d'enfants au moyen d'Internet. Ce fut une étape importante au chapitre de la protection des enfants, mais...
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Monsieur le Président, je me fais un plaisir de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la preuve au Canada.
D'une façon générale, le projet de loi C-2 va dans le sens de l'engagement ferme du discours du Trône de réprimer la pornographie juvénile. Il élargirait la définition de la pornographie juvénile et ferait augmenter la peine maximale pour toute infraction liée à la pornographie juvénile. Il interdirait l'exploitation sexuelle des jeunes et ferait doubler la peine maximale prévue, qui passerait de 5 à 10 ans.
Le projet de loi créerait également deux nouvelles infractions de voyeurisme qui interdiraient la distribution du matériel voyeuriste et habiliteraient les policiers à saisir tout matériel pornographique ainsi obtenu.
Plus particulièrement, le projet de loi C-2 contient plusieurs réformes importantes de notre système judiciaire, que j'aimerais signaler à l'attention de la Chambre. Ces réformes modifieraient en les améliorant les modalités de témoignage devant les tribunaux. Les améliorations toucheraient trois grandes catégories de témoins: les victimes ou témoins juvéniles, âgés de moins de 18 ans, les victimes de harcèlement criminel et les témoins ayant un handicap qui leur rend la communication difficile.
La salle d'audience peut être un endroit intimidant et effrayant pour quiconque a été témoin d'un crime. Pour les victimes qui témoignent en personne, la comparution devant le tribunal peut être particulièrement traumatisante puisqu'elles doivent essentiellement revivre en détail les crimes qui ont été perpétrés contre elles et elles doivent le plus souvent le faire en présence de l'accusé.
Pour les victimes d'agressions sexuelles et d'autres crimes graves, ce processus peut causer un bouleversement émotif extrême. Ces victimes peuvent même éprouver beaucoup de difficulté à présenter un témoignage complet et sincère. Cela est particulièrement vrai pour les enfants qui ont été victimes d'agressions sexuelles ou pour les personnes handicapées vulnérables puisque ce sont les justiciables qui connaissent le moins le système de justice et qui comprennent insuffisamment le processus judiciaire.
Notre droit pénal répond déjà dans une large mesure aux besoins des jeunes victimes et des témoins qui doivent témoigner devant les tribunaux, mais nous devons atténuer davantage les tourments de toutes les victimes vulnérables. À l'heure actuelle, nous disposons d'un certain nombre de moyens destinés à faciliter les témoignages devant les tribunaux, comme l'utilisation de la télévision en circuit fermé pour prévenir les face-à-face entre les jeunes victimes et les accusés, l'installation d'un écran dans la salle d'audience pour qu'il n'y ait pas de contact visuel entre la victime et l'accusé, le recours à des déclarations enregistrées sur bande magnétoscopique, l'exclusion du public de la salle d'audience, les interdictions de publication et la nomination d'un avocat chargé d'effectuer le contre-interrogatoire d'une jeune victime ou d'un jeune témoin, au nom d'un accusé assurant sa propre défense.
Cependant, la loi actuelle oblige la Couronne ou les jeunes témoins à justifier le recours à pareils moyens devant les tribunaux. Cela fait problème pour deux raisons: les victimes juvéniles doivent présenter un témoignage supplémentaire devant le tribunal, ce qui aggrave leur traumatisme; et les avocats de la Couronne sont souvent découragés par le temps supplémentaire requis pour le traitement de la demande.
Par conséquent, le projet de loi C-2 clarifierait la situation en fournissant ces moyens sur demande plutôt qu'en obligeant les jeunes victimes et les témoins à prouver leur nécessité.
De plus, les réformes contenues dans le projet de loi C-2 permettraient aux victimes et témoins adultes vulnérables d'avoir accès à des moyens destinés à faciliter le témoignage lorsqu'ils peuvent démontrer qu'ils en ont besoin.
Plus important encore peut-être, le projet de loi se penche sur ces cas où un enfant est soumis à des heures et parfois même des jours de contre-interrogatoire direct par l'accusé lorsque ce dernier choisit de se défendre lui-même devant le tribunal. En choisissant de se défendre lui-même, l'accusé peut arriver à intimider davantage la victime grâce à son contre-interrogatoire.
Le projet de loi C-2 empêcherait l'accusé d'avoir recours à des manoeuvres d'intimidation en cour en nommant, à la demande expresse de la victime, un avocat pour mener le contre-interrogatoire. Ces réformes pourraient également s'appliquer aux victimes adultes pouvant démontrer qu'elles ont besoin d'aides au témoignage.
Les victimes de violence familiale ou d'agression sexuelle par exemple courent aussi un grand risque de revictimisation dans le cas d'un contre-interrogatoire mené par l'accusé.
Je suis persuadée que bon nombre de Canadiens se souviendront du cas bien connu de Robin Sharpe qui, à titre d'accusé, avait choisi de se défendre lui-même devant le tribunal contre des accusations de grossière indécence. On a accordé à M. Sharpe le droit d'effectuer lui-même le contre-interrogatoire de sa victime, faisant ainsi subir à la victime un grave traumatisme émotif et la rendant victime une nouvelle fois.
Le projet de loi C-2 empêcherait que de telles situations puissent se produire à l'avenir.
Les victimes de harcèlement criminel pourraient également demander qu'on nomme un avocat pour faire le contre-interrogatoire dans les cas où l'accusé décide de se défendre lui-même en cour. Le tribunal devrait accorder cette ordonnance à moins que cela ne porte atteinte à la bonne administration de la justice.
Le projet de loi C-2 propose aussi des modifications aux dispositions du Code criminel portant sur l'interdiction de publication, pour garantir que ces dispositions continueront de s'appliquer malgré l'évolution de la technologie des communications.
Ces réformes devraient intéresser tous les députés qui défendent les droits des victimes de crimes. J'espère que tous les députés les appuieront de façon à servir notre objectif commun, c'est-à-dire améliorer le traitement des victimes de crimes.
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Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de prendre la parole dans le cadre du débat sur le projet de loi C-2. Je tiens d'abord à vous présenter mes félicitations pour l'obtention de l'important poste qui est le vôtre dans ce Parlement où le gouvernement est minoritaire.
Peu de projets de loi dont sera saisie cette Chambre revêtiront l'importance du projet de loi C-2. Ce dernier vise plusieurs éléments, dont la lutte contre la pornographie infantile. Je suis d'avis—et cet avis est partagé par l'ensemble des collègues du Bloc québécois—que peu de responsabilités pour un député sont aussi importantes que celles de protéger les êtres, les personnes les plus vulnérables de notre société, en l'occurrence les enfants. Vous en conviendrez, les enfants sont notre plus importante richesse. Ils sont notre avenir. Ils méritent toute notre attention et, surtout, toute notre protection.
On pourrait débattre longtemps de cet enjeu, mais je crois que vous trouverez, au-delà de la rhétorique partisane en cette Chambre, que tous les députés veulent faire en sorte de lutter contre cette déviance sexuelle qu'est l'attirance envers des personnes mineures. C'est l'attitude que prendra le Bloc québécois dans tout ce débat. Depuis le début, nous avons eu à cet égard une attitude responsable et rigoureuse. Nous l'avons manifestée lors de la législature précédente lorsque nous débattions du projet de loi qui précédait celui-là. C'est également l'attitude que nous adopterons encore une fois, bien entendu, avec le projet de loi C-2.
Le projet de loi C-2 vise principalement trois choses, dont je faisais mention: lutter contre l'exploitation sexuelle des mineurs; lutter contre le voyeurisme, surtout à une époque où Internet est assez accessible et où les caméras et la technologie permettent de miniaturiser à peu près tout; et enfin lutter contre la pornographie infantile. Comme je ne dispose que de 10 minutes, je procéderai dans l'ordre inverse. Je voudrais commencer par la problématique de la pornographie juvénile.
Lorsque nous regardons un projet de loi, surtout un qui modifie le Code criminel, il est important de bien s'attarder aux mots qui se trouvent dans la législation et aussi aux définitions qui y sont incluses. Le projet de loi C-2 définit ainsi la pornographie juvénile, et je cite:
[...] « pornographie juvénile » s'entend, selon le cas:
a) de toute représentation photographique, filmée, vidéo ou autre, réalisée par des moyens mécaniques ou électroniques:
(i) soit où figure une personne âgée de moins de dix-huit ans ou présentée comme telle et se livrant ou présentée comme se livrant à une activité sexuelle explicite,
(ii) soit dont la caractéristique dominante est la représentation, dans un but sexuel, d'organes sexuels ou de la région anale d'une personne âgée de moins de dix-huit ans;
b) de tout écrit, de toute représentation ou de tout enregistrement sonore qui préconise ou conseille une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de dix-huit ans qui constituerait une infraction à la présente loi;
c) de tout écrit dont la caractéristique dominante est la description, dans un but sexuel, d’une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de dix-huit ans qui constituerait une infraction à la présente loi;
d) de tout enregistrement sonore dont la caractéristique dominante est la description, la présentation ou la simulation, dans un but sexuel, d’une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de dix-huit ans qui constituerait une infraction à la présente loi.
Pour qu'une personne soit trouvée coupable de pornographie infantile, ce qu'elle fait doit cadrer dans la définition que je viens de lire.
Un moyen de défense est créé. C'est là une différence assez fondamentale entre le Bloc québécois et le Parti conservateur.
En effet, le projet de loi crée un seul moyen de défense, celui de but légitime contrairement à l'ancien projet de loi. Grâce au travail en comité, nous avions modifié cela de façon assez importante parce que l'ancienne défense n'était pas de but légitime mais de bien public
Ce concept était très flou. Plusieurs intervenants étaient venus le critiquer pour cette raison. Dans la législation précédente, nous l'avions défini. La définition de but légitime, dans le projet de loi C-2, reprend la définition que nous avions insérée, en comité, au lieu de bien public. La définition disait que le but légitime pouvait avoir trait à l'administration de la justice, la science, la médecine ou l'éducation par exemple.
Cela permettait à certaines personnes de ne pas être trouvées coupables de pornographie infantile alors que ce qu'elles cherchent à faire, est, au contraire, de lutter contre celle-ci. Entre autres, cela peut être un psychiatre qui traite les déviants sexuels que sont les pornographes infantiles; un policier qui enquête sur des cas de pornographie infantile; une université qui enseigne à de futurs psychiatres ce qu'est la pornographie infantile.
Les amendements amenés au projet de loi C-2, la nouvelle façon de définir le moyen de défense, permettent de rendre celui-ci plus étroit. D'ailleurs, la liste d'activités que je vous ai mentionnées tout à l'heure est une liste fermée. Cela va rétrécir le moyen de défense.
Donc, pour être trouvé coupable de pornographie infantile, deux étapes sont à suivre. La première est de savoir si ce que la personne a fait entre dans la définition de pornographie infantile, qui est définie de façon assez serrée. Si oui, la deuxième étape est de savoir—et c'est un moyen de défense—si l'acte reproché poursuit un but légitime ou non.
Plusieurs inquiétudes ont été mentionnées en comité, notamment dans le cas d'un artiste qui écrit un livre dans lequel il, ou elle, raconterait sa première expérience sexuelle. La première question est de savoir si le livre est un écrit dont la caractéristique dominante est la description d'une activité sexuelle dans un but sexuel.
Il y a donc déjà une marche assez élevée. Cela permettrait à beaucoup d'artistes légitimes de ne pas se préoccuper de franchir la première étape. En effet, dans la majeure partie des cas, l'écrit qu'il ou elle a produit ne répond pas à la définition. Si par malheur cela était considéré comme de la pornographie infantile, le moyen de défense serait toujours disponible.
Le projet de loi C-2 permet ce juste équilibre pour une répression assez sévère, position que le Bloc québécois partage quant à la pornographie infantile, tout en laissant une certaine latitude aux médecins, aux policiers et à certains artistes. Par exemple, Michel-Ange qui fait une peinture ou une statue de nu ne sera pas considéré comme faisant de la pornographie infantile.
J'aimerais simplement dire ma déception. Je pense que le secrétaire parlementaire est au courant du fait qu'il n'y a pas de peine ni de sentence minimale pour les gens trouvés coupables de pornographie infantile. Ce que le ministre veut faire—c'est ce dont les membres de son équipe m'ont fait part—, c'est envoyer un message fort à l'effet que nous voulons lutter contre la pornographie infantile en augmentant les peines maximales.
Je pense qu'il y a matière à argumenter qu'une peine minimale serait aussi essentielle pour faire en sorte que quelqu'un trouvé coupable de pornographie infantile goûte obligatoirement aux joies du pénitencier.
Ce dont on parle, évidemment, ce sont les personnes qui nous sont les plus chères, qui sont aussi très fragiles: nos enfants. Quelqu'un qui touche à nos enfants de façon sexuelle mériterait d'avoir une sentence obligatoire de prison pour qu'il ne récidive pas.
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Monsieur le Président, je suis heureux de parler du projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d’autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.
À l'instar du ministre de la Justice, je pense que le projet de loi permettrait d'établir un cadre exhaustif pour la protection des enfants, les membres les plus vulnérables de notre société. Il accroîtrait la protection que le droit pénal prévoit contre la pornographie juvénile, il créerait une nouvelle infraction concernant l'exploitation sexuelle afin de protéger les jeunes entre 14 et 18 ans, il augmenterait les peines maximales prévues pour des infractions liées à des enfants, il faciliterait le témoignage des jeunes victimes et des autres personnes, il protégerait les autres témoins et victimes vulnérables et il créerait de nouvelles infractions liées au voyeurisme.
C'est de ces dernières infractions dont je voudrais parler plus particulièrement aujourd'hui.
La création de nouvelles infractions liées au voyeurisme est un bon exemple d'une situation où le droit pénal peut suivre l'évolution de la société. Le voyeurisme existe probablement depuis que l'homme a commencé à vivre en société. Les moyens utilisés pour pratiquer le voyeurisme ont toutefois évolué de manière draconienne ces dernières années. Pendant des siècles, la seule façon d'observer une personne à son insu, c'était de se cacher derrière un rideau ou de regarder par une fenêtre dans l'obscurité ou un trou percé dans le mur. À cette époque, quelqu'un qui voulait en espionner un autre devait intervenir personnellement. On aurait pu penser que la peur d'être démasqué aurait été un facteur de dissuasion suffisant.
C'était encore vrai il y a quelques années. C'était certainement le cas lorsque le Code criminel est entré en vigueur en 1892. Jusqu'à tout récemment, les Canadiens étaient suffisamment protégés par les interdictions concernant les intrusions de nuit ou les méfaits. Les choses ont changé depuis. Les principaux changements sont attribuables à l'arrivée d'Internet et à la miniaturisation des caméras et des dispositifs d'enregistrement. De nos jours, une caméra plus petite qu'un stylo peut être dissimulée dans une pièce et permettre à quelqu'un qui est assis devant un ordinateur dans un autre immeuble d'observer ce qui se passe dans la pièce.
Je ne dis pas que nous devrions devenir paranoïaques, mais il faut être conscients de cela. Nous croyons que la loi devrait couvrir les infractions perpétrées au moyen des nouvelles technologies. Le projet de loi C-2 nous propose d'adapter la loi afin de régler le problème de l'utilisation à mauvais escient des nouvelles technologies.
Le projet de loi prévoit de nouvelles infractions pour lutter contre les actes modernes de voyeurisme, les actes commis au moyen de petites caméras qui sont difficiles à détecter et des actes qui, s'ils sont commis maintenant, ne relèvent pas du droit criminel et ne laissent aux victimes d'autres recours que d'essayer de leur propre initiative d'obtenir une indemnisation devant des tribunaux civils.
L'infraction de voyeurisme comporte quatre éléments. Premièrement, elle suppose l'acte d'observer ou d'enregistrer. Deuxièmement, l'observation ou l'enregistrement doit se faire de manière subreptice, ce qui signifie qu'on ne peut raisonnablement attendre de la personne observée qu'elle voie la personne ou les moyens d'observation ou d'enregistrement. Troisièmement, la personne doit se trouver dans des circonstances suscitant une attente raisonnable d'intimité. Quatrièmement, les éléments d'un des cas précis ci-dessous doivent exister.
Le premier est un cas où la personne observée ou enregistrée se trouve à un endroit où on peut raisonnablement s'attendre à ce qu'une personne soit dans un état de nudité ou s'adonne à une activité sexuelle. Je crois qu'une salle de bain, une chambre à coucher ou une cabine d'essayage figurent parmi ce type d'endroit. Le deuxième cas se présente lorsqu'une personne est dans un état de nudité ou s'adonne à une activité sexuelle et que le but de l'observation ou de l'enregistrement est d'observer ou d'enregistrer une personne dans cette situation. Le troisième cas se présente lorsque l'observation ou l'enregistrement est effectué dans un but sexuel.
Le projet de loi C-2 interdit aussi la diffusion de matériel obtenu par la commission d'une infraction de voyeurisme. Les Canadiens sont attachés à leur intimité. Dans certaines situations, il existe une attente claire et raisonnable d'intimité. Ce projet de loi a été conçu dans le but de protéger cette attente d'intimité.
D'aucuns peuvent faire valoir que le projet de loi empêchera la collecte légitime d'informations lorsque ces techniques deviendront interdites. Lorsqu'il faut utiliser ces techniques pour servir le bien public, le projet de loi offre une défense fondée sur le bien public concernant les accusations de voyeurisme. Outre ces circonstances extraordinaires, le message est clair : l'utilisation de ces techniques est maintenant un comportement inacceptable et il deviendra un comportement criminel lorsque le projet C-2 aura force de loi.
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Monsieur le Président, je suis heureuse de cette occasion qui m'est donnée pour m'exprimer au sujet du projet de loi C-2, mais je ne retire aucune satisfaction d'avoir à parler à nouveau de l'exploitation des enfants. Le gouvernement libéral n'a pas protégé les enfants canadiens dans le passé, et le projet de loi est loin de corriger cette injustice.
En faisant du porte à porte durant la campagne électorale, j'ai été surprise de voir le nombre de personnes qui ont soulevé cette question. Cette préoccupation était très répandue. Des parents, des grand-parents, des enseignants, des policiers, des voisins et même des adolescents ont porté cette question à mon attention. Tous, sans exception, m'ont exhortée à exiger les mesures de protection les plus strictes qui soient.
Récemment, j'ai distribué dans la collectivité une publication sur la question. Les commentaires que j'ai reçus sont révélateurs.
Dwight, de Saskatoon, a été très clair lorsqu'il a affirmé: « Toutes les formes de pornographie juvénile sont inacceptables. » Brian, lui aussi de Saskatoon, a déclaré: « Je crois que les personnes qui ont en leur possession du matériel de pornographie juvénile devraient être poursuivies et être sévèrement punies. » Natasha, qui habite à Saskatoon, a pour sa part dit: « La pornographie juvénile ne devrait être tolérée d'aucune façon. Ces enfants sont notre avenir—cela ne doit pas être pris à la légère. » La pornographie juvénile la rendait « malade, malade, malade ». Je suis entièrement d'accord avec elle.
Tina a peut-être mis le doigt sur le vrai problème. Elle a déclaré que la mentalité changerait probablement si un jour l'enfant d'un député ou d'un haut fonctionnaire était exploité. J'espère sincèrement qu'il ne faudra pas en arriver là et je ne comprends pas pourquoi le gouvernement n'envoie pas un meilleur message aux Canadiens. L'inertie et l'indifférence libérales à l'égard de la protection de nos enfants sont inexcusables.
Dans le cadre d'un sondage effectué auprès de mes électeurs, les résultats ont été clairs. Lorsqu'on leur a demandé si, selon eux, tous les types de pornographie juvénile étaient inacceptables, 92 p. 100 ont répondu oui. Lorsqu'on leur a demandé si la pornographie juvénile pouvait être produite sans causer des torts à un enfant, 97 p. 100 ont dit non. Si 97 p. 100 des gens affirment que la pornographie nuit aux enfants, pourquoi le gouvernement ne fait-il rien pour y mettre un terme? Lorsqu'on a voulu savoir s'ils souhaitaient que la législation canadienne interdise tous les types de pornographie juvénile, 98 p. 100 des gens interrogés ont dit oui. Lorsqu'on leur a demandé si les individus pris en possession de pornographie juvénile devraient voir leur nom inscrit dans le registre national des délinquants sexuels, 96 p. 100 ont répondu oui.
C'est important, car cela montre à quel point les Canadiens croient que la pornographie juvénile a un lien direct avec les infractions sexuelles. Mes électeurs croient que cette question les touche de près, car lorsqu'on leur a demandé s'ils croyaient que la prostitution juvénile était un problème dans leur quartier, 83 p. 100 ont dit oui.
Les deux dernières questions du sondage m'amènent à la prochaine partie du débat touchant la pornographie juvénile et Internet. J'ai demandé à mes électeurs s'ils étaient tombés par accident sur de la pornographie offensante sur Internet et plus de la moitié ont dit oui. C'est important lorsqu'on songe à la dernière question qu'on leur a posée. On a voulu savoir si la pornographie sur Internet augmentait les risques d'exploitation sexuelle des enfants, et 89 p. 100 de mes électeurs ont répondu oui.
Mes électeurs ont été très clairs. Ils croient que la pornographie juvénile sous toutes ses formes devrait être interdite et ils pensent également que sa présence sur Internet est nuisible.
Au cours de la dernière législature, j'ai présenté un projet de loi d'initiative parlementaire visant l'installation, sur tous les ordinateurs publics accessibles à des mineurs, d'un logiciel qui bloquerait le matériel offensant et dangereux. Malheureusement, le déclenchement d'élections anticipées a mis un terme à cette importante initiative.
Un juge de ma circonscription m'a expliqué que cela constituait un problème croissant, comme il a pu le constater lorsqu'il s'est rendu récemment à une bibliothèque locale. Attroupé autour d'un ordinateur d'accès public, il y avait un groupe de jeunes enfants regardant des sites pornographiques.
Si cela se produit dans un endroit aussi public, on peut simplement imaginer ce qui se passe dans la chambre d'un enfant lorsqu'un parent est occupé à préparer le repas. Même lorsque les enfants sont supervisés, les choses les plus inattendues peuvent se produire au pire moment possible.
Une institutrice de première année était emballée d'obtenir dans sa classe l'accès à Internet, ce qui lui permettrait d'améliorer l'expérience d'apprentissage de ses élèves. Pour faire un exercice amusant, elle a demandé à ses élèves de nommer des animaux qu'ils voudraient étudier. Après avoir inscrit la liste de ces animaux au tableau, elle a demandé à ses élèves d'en choisir un par vote. Rappelons-nous qu'il s'agit d'enfants de première année; or, sans aucune intention malicieuse ceux-ci ont choisi la chatte.
Imaginez-vous être cette enseignante et avoir à expliquer à ces enfants qu'ils ne peuvent pas faire une recherche portant sur cet animal. Bien que cette situation puisse paraître amusante pour certains, elle n'est qu'un exemple du problème croissant que pose l'accès sans limite de la jeunesse à Internet. De façon accidentelle, les jeunes peuvent visualiser des documents pornographiques ou témoignant de violence, sans recevoir d'explication ou de conseil.
On peut imaginer la vision déformée de la sexualité que beaucoup d'enfants acquerront bien avant que leurs parents n'aient l'occasion de discuter de ce sujet avec eux. Ce projet de loi ne fait rien pour résoudre ce genre de problèmes et il ne règle pas les problèmes qu'il est censé régler.
Le moyen de défense fondé sur la valeur artistique me préoccupe beaucoup. Beaucoup d'artistes affirment que leurs oeuvres ne sont que de l'art, qu'elles ne sont pas nuisibles et qu'elles n'influencent personne.
Pourtant, si on consulte l'ordinateur et si l'on recherche dans Google l'expression « influence de l'art », on obtient 250 000 références. On entend souvent des artistes exprimer le souhait que leur art influence les gens d'une manière ou d'une autre. Eh bien je regrette, on ne peut pas jouer sur deux tableaux à la fois. Ou bien l'art produit un effet ont une incidence ou bien il n'en produit pas. J'invite les artistes canadiens à élever leur voix pour empêcher qu'une minorité de pervers ne se servent de l'art comme d'un prétexte pour faire accepter leur fétichisme.
Le député de Wild Rose a invité un policier de Toronto à rencontrer des députés et il nous a montré des images de pornographie juvénile. Celles-ci étaient abjectes et dégoûtantes et m'ont laissé une impression durable. Il ne m'est pas agréable d'affirmer que je peux encore me rappeler bon nombre de ces images en détail. J'éprouve beaucoup de sympathie pour nos policiers qui doivent travailler toute la journée avec de telles obscénités, avant de retourner chez eux et revoir leurs jeunes enfants. Cela doit imposer un grand stress à nombre de jeunes mères et de jeunes pères.
Le gouvernement libéral sait que ce projet de loi n'est pas le plus sévère qu'il peut proposer. Il sait que ce projet de loi laisse trop de place à l'interprétation et trop de zones grises. Il sait qu'il n'a pas tenu la promesse qu'il a faite aux Canadiens. Il sait aussi qu'élever de 14 à 16 ans l'âge de consentement fournirait à la police un outil important.
Nos policiers sont souvent impuissants lorsqu'il s'agit de prévenir l'exploitation des enfants, en particulier nos jeunes de la rue. Aussi longtemps que des adultes pourront avoir un accès sexuel aux enfants grâce à des lois laxistes, ils ne s'en priveront pas. Nous ne voulons pas que le Canada devienne davantage qu'il ne l'est déjà une destination touristique associée à la prostitution.
Dans les rues de nos villes, nous voyons souvent des prostituées à peine pubères vendre leur corps pour satisfaire une dépendance ou une autre. Nous voyons des policiers forcés de se croiser les bras, qui se contentent d'observer, car ils n'ont pas les outils qui leurs permettraient de s'occuper spécialement des enfants à la recherche de clients sexuels. Tant que notre gouvernement ne leur fournira pas les outils pour combattre ce type de crime, nous ne pourrons les blâmer pour ce qui ne tourne pas rond.
À Toronto, l'année passée, une fillette a été enlevée en rentrant à la maison, puis tuée. Son meurtrier affirme que c'est parce qu'il avait accès à la pornographie juvénile et qu'il en regardait qu'il a commis ce crime horrible contre cette enfant innocente. La police a été blâmée pour le grand nombre de délinquants sexuels dans la collectivité. Elle a également été blâmée pour les délais nécessaires pour retrouver le meurtrier. Elle a été blâmée pour ne pas avoir en premier lieu empêché tout accès à la pornographie juvénile.
Le gouvernement libéral devrait avoir honte. Les libéraux doivent porter l'odieux de ne pas avoir fourni à la police les outils juridiques et les ressources financières nécessaires pour empêcher et combattre de tels crimes. Ils en auraient maintenant l'occasion et ils ne font visiblement que se soustraire à leurs responsabilités.
J'ai certaines questions à poser à tous les députés ministériels. Lorsque leurs jeunes enfants ou leurs petits-enfants grandiront, pourront-ils leur dire qu'ils ont fait de leur mieux? Pourront-ils leur dire honnêtement qu'ils ne pouvaient pas faire mieux? Sont-ils fiers de ce projet de loi imparfait? Nous devons nous acquitter de nos obligations envers nos électeurs.
J'espère sincèrement que le gouvernement a l'intention d'amender son projet de loi pour tenir compte des souhaits de la majorité à la Chambre et de la majorité des Canadiens. Nos enfants comptent sur nous même s'ils l'ignorent encore.
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Monsieur le Président, je suis heureux de prendre part au débat sur le projet de loi C-2, qui porte sur la pornographie juvénile. Je pense que tous les députés sont d'accord pour dire que l'existence de la pornographie juvénile implique nécessairement que des enfants ont subi des agressions sexuelles.
Le projet de loi C-2 renferme des propositions de modification du Code criminel, mais nulle part dans le projet de loi on ne trouve de définition complète de ce qu'il faut entendre par pornographie. Dans le Code criminel, le terme «pornographie juvénile» s'entend:
a) de toute représentation photographique, filmée, vidéo ou autre, réalisée ou non par des moyens mécaniques ou électroniques:
(i) soit où figure une personne âgée de moins de dix-huit ans ou présentée comme telle et se livrant ou présentée comme se livrant à une activité sexuelle explicite,
(ii) soit dont la caractéristique dominante est la représentation, dans un but sexuel, d'organes sexuels ou de la région anale d'une personne âgée de moins de dix-huit ans;
L'alinéa b) est remplacée en partie par l'ajout de l'enregistrement sonore. Elle se lit maintenant comme suit:
b) de tout écrit, de toute représentation ou de tout enregistrement sonore qui préconise ou conseille une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de dix-huit ans qui constituerait une infraction à la présente loi;
Le projet de loi renferme de nouveaux alinéas c) et d) qui se lisent comme suit:
c) de tout écrit dont la caractéristique dominante est la description, dans un but sexuel, d’une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de dix-huit ans qui constituerait une infraction à la présente loi;
d) de tout enregistrement sonore dont la caractéristique dominante est la description, la présentation ou la simulation, dans un but sexuel, d’une activité sexuelle avec une personne âgée de moins de dix-huit ans qui constituerait une infraction à la présente loi:
Si le projet de loi C-2 est adopté, telle sera, dans sa totalité, la définition de pornographie juvénile.
Le projet de loi C-2 table sur l'apport constructif des parlementaires au cours des dernières législatures. Nous avons traité de sujets très délicats. La valeur artistique faisait gravement problème à la Chambre. Un autre sujet délicat était le bien public. Je ne suis pas convaincu que bien des gens comprenaient à l'époque le sens de bien public. C'est une expression qui ne faisait pas l'unanimité, mais avec laquelle nous pouvons encore travailler, à mon avis.
Dans ce projet de loi, on trouve un nouveau concept appelé «but légitime». Je pense que nous devrions employer une meilleure expression, et le comité pourrait peut-être nous aider à la trouver. L'important, c'est que nous devons communiquer avec les Canadiens au sujet de l'essence du projet de loi et l'essence de la démarche du gouvernement pour s'attaquer à ce grave problème que constitue la pornographie juvénile.
Par exemple, je dirais que la notion d'utilisation légitime pourrait être remplacée par celle de possession autorisée. Ainsi, les policiers qui saisissent du matériel dans l'exercice de leurs fonctions seraient autorisés à en avoir la possession. Un médecin qui fait des tests au sujet d'un cas particulier serait autorisé à avoir de la pédopornographie en sa possession. Même chose pour un scientifique qui en étudie les répercussions, etc. En éducation également, il pourrait y avoir une autorisation pour ceux qui forment les personnes appelées à intervenir dans la situation terrible des enfants victimes d'exploitation relativement à la pornographie juvénile.
Le projet de loi contient une disposition sur la valeur artistique. La question a été abordée par d'autres députés, et je voudrais en dire un mot. C'est l'affaire Robin Sharpe, au fond, qui a fait surgir cette question. Sharpe a été inculpé sous quatre chefs d'accusation. Deux étaient clairement liés à la possession de pornographie au sens du Code criminel et deux à la possession de matériel qu'il avait lui-même créé pour sa propre utilisation, à ce qu'il a dit. La Cour suprême a statué que la possession de ces documents, écrits ou images, ne pouvait être considérée comme possession de pornographie juvénile.
Je me suis demandé si toute cette question de valeur artistique était vraiment liée à ce que la Cour suprême a dit de la possession de documents créés par soi-même. Je ne suis pas juriste, et je ne suis pas sûr que ma thèse tiendrait, mais il me semble que la question serait probablement sans portée pratique. Si je créais un document clairement destiné à mon propre usage, je serais l'auteur, et personne d'autre ne serait au courant. Je ne le montrerais à personne d'autre. Si je le faisais, cela reviendrait à le distribuer, ce qui va à l'encontre des dispositions actuelles du Code criminel.
Par conséquent, si des documents que j'ai produits pour mon propre usage existent et si rien ne prouve qu'ils ont servi à quelqu'un d'autre, pourquoi aurais-je besoin de la protection de ceux qui produisent des oeuvres artistiques? En somme, si le document est réservé à mon propre usage, personne n'est au courant. Si quelqu'un est au courant, c'est qu'il l'a eu en sa possession, et il y a soudain un problème de production et de distribution de matériel pornographique.
Je crois que nous allons revenir sur une question que la Chambre a abordée bien des fois, celle des lois élaborées par les tribunaux. Comme on l'a dit, la Cour suprême du Canada a souvent dû prendre l'initiative parce que le Parlement ne le faisait pas.
Je crois que le moment est venu pour nous de nous assurer que le projet de loi reflète les valeurs des Canadiens. Je sais bien que nous n'éviterons pas la question, à savoir si les droits d'une partie vont à l'encontre des droits d'une autre.
Jetons un coup d'oeil à l'article 1 de la charte, suivant l'interprétation que la Cour suprême du Canada en a donné relativement aux valeurs sur lesquels se fonde une société libre démocratique. Ces valeurs sont les suivantes:
...respect de la dignité inhérente de la personne, l'engagement envers la justice sociale et l'égalité, l'accueil de tout un éventail de croyances, le respect de l'identité culturelle et des groupes, la confiance envers les institutions sociales et politiques qui rehaussent la participation des personnes et des groupes à la société.
L'énoncé est complexe, mais je crois qu'il inclut fondamentalement chaque croyance, chaque pratique et chaque action. Je ne vois pas comment nous pourrions avoir des lois qui ne seraient pas assujetties à la charte, alors que la Cour suprême du Canada a dit, essentiellement, que nous devons toujours protéger chaque personne en toute chose.
Tôt ou tard, il faut reconnaître la primauté des droits des enfants sur ceux d'autres personnes qui peuvent errer à la limite des mauvais traitements à l'égard des enfants.
Je pense que c'est l'essence même de la question. Je crois qu'il est extrêmement important que la Chambre envoie le projet de loi à un comité après la première lecture, et non pas après la seconde. Ce qui signifie que des amendements de fond pourront être apportés au projet de loi. Cela signifie aussi que des témoins pourront être convoqués sur des questions d'intérêt. Si le projet de loi avait été renvoyé au comité après la deuxième lecture, ces choses n'auraient pas été possibles. Je pense qu'il s'agit d'un changement important dans la manière d'étudier les projets de loi à la Chambre.
J'ai bon espoir que les membres du comité de la justice s'efforceront de clarifier le concept des tribunaux qui légifèrent, en particulier en ce qui a trait aux interprétations touchant la protection des personnes. La déclaration de la Cour suprême relativement à la façon d'interpréter l'article 1 de la charte est franchement trop générale. Nous devons mieux le comprendre.
Les députés feront mieux leur travail s'ils savent devant quoi ils se trouvent. Toutefois, je crois franchement que si nous ne décidons pas d'exposer clairement les choses aux Canadiens, nous échouerons.
Je suis heureux d'avoir participé à ce court débat sur le projet de loi C-2. Je crois que de nombreux députés ont indiqué, à la Chambre, que s'il y a un sujet à l'égard duquel la disposition de dérogation doit être invoquée, c'est la protection des enfants et la pornographie juvénile.
J'espère que tous les parlementaires saisiront l'occasion.
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Monsieur le Président, c'est avec plaisir que je prends la parole au sujet du projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel (protection des enfants et d’autres personnes vulnérables) et la Loi sur la preuve au Canada.
On y propose une série de modifications au droit pénal visant à améliorer considérablement la protection des enfants et d'autres personnes vulnérables.
Les éléments clés du projet de loi C-2 sont les suivants: renforcer les dispositions actuelles relatives à la pornographie juvénile; améliorer la protection des adolescents contre l'exploitation sexuelle; augmenter les peines pour les infractions commises contre les enfants; faciliter le témoignage des enfants et de toute autre victime ou de tout autre témoin vulnérable; créer de nouvelles infractions relatives au voyeurisme.
C'est un projet de loi utile que tous les partis devraient appuyer, et j'encourage tous les députés à le faire.
J'aimerais parler tout particulièrement des modifications proposées concernant la pornographie juvénile, sujet qui préoccupe énormément les députés ici réunis, mes électeurs de la région de Niagara, dont la Catholic Women's League et sa Campagne du ruban blanc, et bien sûr tous les Canadiens.
Presque tous les jours, au Canada et à l'étranger, les journaux font état de nouvelles accusations et condamnations pour pornographie juvénile. À mon avis, ce fait est indicatif de deux choses importantes. Du côté positif, les dispositions actuelles interdisant la pornographie juvénile semblent être efficaces. De l'autre côté, nous devons investir davantage dans la lutte contre l'exploitation des enfants que constitue la pornographie juvénile. C'est la raison pour laquelle nous avons le projet de loi C-2.
Le projet de loi C-2 élargit la définition de la pornographie juvénile de manière à inclure les enregistrements sonores. Particulièrement, il inclurait les enregistrements sonores qui préconisent ou conseillent une activité sexuelle illégale avec un enfant ainsi que les enregistrements qui ont pour caractéristique principale de décrire ou de représenter, pour un motif sexuel, une activité sexuelle illégale avec un enfant.
La définition des écrits de pornographie juvénile serait aussi élargie de manière à inclure les catégories d'écrits qui décrivent des activités sexuelles interdites avec des enfants lorsque cette description est la principale caractéristique de ces écrits et qu'elle cache un motif sexuel.
Le projet de loi C-2 rend aussi illégales la publicité de matériel de pornographie juvénile et la possession de ce type de matériel en vue d'en faire la publicité. Cette nouvelle infraction est un acte criminel passible d'une peine maximale de 10 années d'emprisonnement. Voilà un message d'alerte indiquant aux prédateurs que les actes criminels qu'ils posent sont passibles de poursuites et de l'imposition de lourdes peines.
Le projet de loi C-2 prévoit aussi des modifications importantes dans l'imposition des peines pour les infractions aux dispositions législatives sur la pornographie juvénile. Premièrement, il prévoit que la peine maximale pour toutes les infractions aux dispositions législatives sur la pornographie juvénile punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire sera triplée, passant de 6 à 18 mois. Deuxièmement, il fera de la perpétration d'une infraction aux dispositions sur la pornographie juvénile dans le dessein de réaliser un profit une circonstance aggravante dans la détermination de la peine. Autrement dit, ceux qui exploitent sexuellement les enfants au moyen de la pornographie juvénile dans le dessein de réaliser un profit se verront imposer des peines plus sévères.
L'intention et l'impact de ces modifications des peines infligées pour les infractions aux dispositions prévues en matière de pornographie juvénile sont rehaussées par le fait que le projet de loi C-2 prévoit en outre deux modifications aux principes de détermination de la peine du Code criminel.
Plus particulièrement, lorsqu'une infraction constitue un mauvais traitement à l'égard d'un enfant, le projet de loi C-2 indique aux tribunaux d'accorder une attention particulière aux objectifs de dénonciation et de dissuasion d'un tel comportement dans la détermination de la peine. Le projet de loi C-2 indique aussi aux tribunaux de faire du mauvais traitement d'un enfant une circonstance aggravante pour la détermination de la peine.
Par ailleurs, le projet de loi C-2 remplace les défenses fondées sur la valeur artistique ou un but éducatif, scientifique ou médical et le bien public par une défense à deux volets basée sur le but légitime et le risque indu. Cette nouvelle défense restreint les défenses existantes et remplace la défense fondée sur le bien public, qui avait déjà été proposée dans le projet de loi C-12 au cours de la dernière session parlementaire, par une défense claire et plus simple à comprendre. Cette nouvelle défense intègre la norme de préjudice adoptée par la Cour suprême du Canada lorsque celle-ci a confirmé la constitutionnalité de la loi canadienne sur la pornographie juvénile en 2001.
Aux termes du projet de loi C-2, une défense pour un acte criminel lié à la pornographie juvénile ne pourrait être présentée que si l'acte qui constitue une infraction a un but légitime lié à l’administrationde la justice, à la science, à la médecine, àl’éducation ou aux arts et ne pose pas de risque indu pour lesenfants.
Le nouveau moyen de défense ne change pas la nature pédopornographique du matériel. Ce qui est aujourd'hui de la pornographie juvénile aux termes du Code criminel, et selon les nouvelles dispositions du projet de loi C-2, demeurera de la pornographie juvénile.
Le projet de loi C-2 demanderait plutôt au tribunal de déterminer, dans chaque cas, si l'utilisation faite de la pornographie est protégée par ce moyen de défense. Par exemple, le moyen de défense pourrait être utilisé par un agent de police ayant en sa possession des photos pornographiques d'enfants, qu'il aurait acquises dans le cadre d'une enquête sur une affaire de pornographie juvénile. En pareil cas, la possession des photos servirait un but légitime, à savoir l'administration de la justice, et ne poserait pas de risque indu pour des personnes âgées de moins de 18 ans. À l'inverse, le même moyen de défense ne pourrait pas être utilisé par un pédopornographe ayant en sa possession les mêmes photos, pour son usage personnel.
Comme je l'ai mentionné au début, les Canadiens veulent que nous fassions davantage pour combattre la pornographie juvénile, et je suis content de voir que le projet de loi C-2 répond à cette attente. En plus des changements contenus dans le projet de loi C-2, le gouvernement a lancé, en mai 2004, une stratégie nationale en vue de protéger les enfants contre l'exploitation sexuelle faite par le truchement d'Internet.
Cette nouvelle stratégie est assortie d'une somme d'un peu plus de 42 millions de dollars, qui servira à élargir le Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants, le CNCEE de la GRC. Elle servira aussi à doter les forces policières des ressources nécessaires pour faire des enquêtes sur l'exploitation sexuelle des enfants dans l'Internet, y compris la pornographie juvénile, à sensibiliser davantage le public et à donner une envergure nationale au site Cyberaide.ca, un site rattaché à une ligne téléphonique ouverte en tout temps servant à communiquer aux autorités policières de l'information sur des cas d'exploitation sexuelle des enfants.
Le projet de loi C-2 et l'accroissement récent des ressources lancent un message clair et montrent sans équivoque que nous condamnons l'exploitation sexuelle, ainsi que la maltraitance et la négligence à l'égard d'enfants ou d'autres personnes vulnérables. Ces mesures disent haut et fort que nous avons déclaré la guerre à la pornographie juvénile. J'invite tous les débutés à appuyer le projet de loi pour qu'il soit adopté rapidement.
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Madame la Présidente, nous avons l'habitude de dire que nous sommes heureux de prendre la parole au sujet d'un projet de loi donné, mais, pour tout vous dire, je ne suis pas heureux du tout. Durant deux législatures d'affilée, nous avons pris la parole pour assurer la protection des petits Canadiens. Je ne peux pas croire que nous ayons débattu durant des mois et des années une mesure qui s'impose, une mesure aussi élémentaire que la protection de nos enfants, et je parle ici d'une protection absolue.
Nous savons que tout a commencé avec l'affaire Sharpe, lorsqu'un juge a décidé que le matériel pornographique avait une valeur artistique. Nous sommes au courant de tout cela. Les législateurs ont ensuite travaillé fort et ils ont remplacé l'expression« valeur artistique » par « bien public », ce qui ne change pas grand-chose. On examine actuellement l'expression « but légitime », à laquelle est rattaché le fameux petit mot à trois lettres, « art », qui se retrouve dans toutes les mesures proposées.
Il est difficile de croire, étant donné le nombre d'enfants, ces centaines et ces milliers d'enfants qui ont été tués, violés ou dévastés à cause de la pornographie juvénile, que l'institution que nous formons à la Chambre des communes soit incapable de présenter un projet de loi disant simplement que la possession, la distribution et la production de matériel pornographique qui exploite nos enfants ne seront pas tolérées, point.
Cela ne veut pas dire que le policier qui a saisi une partie du matériel d'un prédateur est dans l'eau chaude. Pas du tout. Ce policier ne cherche pas à exploiter les enfants, mais bien à défendre leur cause.
Je trouve absolument inconcevable que des adultes qui ont été élus à cet endroit ne soient pas arrivés, après trois ans, à élaborer un projet de loi solide et ferme, qui dit que nous adoptons la tolérance zéro à l'égard de l'exploitation de nos enfants que constitue la pornographie juvénile. Nous pourrions compter sur l'appui de 95 p. 100 à 98 p. 100 de la population, si nous allions dans cette direction.
Or, nous nous contentons de jouer avec les mots et de présenter des mesures législatives dans lesquelles il reste toujours ce petit quelque chose qui nous empêche de les appuyer. Nous ne pouvons pas voter en faveur d'une mesure qui ne fera pas disparaître complètement la pornographie juvénile. Aucune défense ne peut être invoquée à ce sujet. J'en ai vraiment soupé de voir le mot « art » figurer dans des mesures législatives à titre de moyen de défense en ce qui a trait à la pornographie juvénile.
J'aimerais dire à la Chambre ce que signifie l'art en ce qui a trait aux enfants. J'ai moi-même sept petits-enfants et je les aime tous beaucoup. J'ai une petite-fille. Les députés savent-ils ce que c'est que l'art? Chaque fois que je regarde ma petite-fille, je la trouve tellement jolie, je trouve qu'elle a un beau sourire et je pense que Dieu a fait un magnifique travail en créant cet enfant. C'est ce que j'appelle l'art du Créateur. C'est ce que je vois. Comment quelqu'un pourrait-il oser enlever cette petite fille ou la ramasser dans la rue comme c'est arrivé si souvent récemment pour la soumettre à l'exploitation maladive de prédateurs en faisant appel à ce que certains pourraient considérer comme une forme d'art?
Je ne comprends vraiment pas comment on peut même hésiter une seconde. Si la Charte des droits nous empêche de faire adopter une mesure législative qui donnerait des résultats positifs et assurerait une tolérance zéro à cet égard, bon sang qu'on ait recours à la disposition d'exemption. Les gens qui ont rédigé le texte de la Charte ont eu la sagesse de prévoir qu'un jour ou l'autre il pourrait se produire quelque chose qu'il serait difficile de régler en raison d'autres parties de la charte. Cela pourrait être inclus dans la disposition d'exemption et nous pourrions faire disparaître la pornographie juvénile. Mais quelle terrible pensée.
Je ne comprends vraiment pas. Je ne comprends pas comment les députés peuvent sourire en pensant qu'ils ont accompli quelque chose en acceptant qu'on inclue l'expression « un but légitime » dans le projet de loi.
Tout le monde sait, et si on ne le sait pas, on devrait le savoir, que les personnes qui sont trouvées en possession de matériel de pornographie juvénile se dénicheront fort probablement un avocat et invoqueront immédiatement comme moyen de défense que ce matériel a un but légitime. Elles ne gagneront peut-être pas leur cause, mais je peux presque garantir que nos tribunaux seront engorgés à cause de personnes qui chercheront à se défendre en invoquant cette expression. C'est inévitable. Pourquoi ne le feraient-elles pas?
Elles se sont défendues en invoquant la valeur artistique. Je garantis qu'elles tenteraient de se défendre en invoquant le bien public. Pourquoi n'invoqueraient-elles pas un but légitime? Quelque part, un juge pourrait convenir encore une fois qu'il y a un but légitime, une valeur artistique, ou quoi encore.
Récemment, on a arrêté un homme à Toronto. Qu'a dit cet homme qui a été arrêté et qui a assassiné une fillette? Il a dit que, lorsqu'il a été libéré du pénitencier, il a recommencé à utiliser du matériel de pornographie juvénile, et que cela l'a si gravement perturbé qu'il n'a pas pu s'empêcher d'assouvir ses désirs.
Je suis allé dans bien des pénitenciers et j'ai rendu visite à toutes sortes de contrevenants, particulièrement à ceux qui ont été arrêtés, accusés et condamnés pour des infractions de ce genre contre des enfants. Presque tous m'ont avoué que c'est la pornographie juvénile qui les avait influencés. Il y a aussi les pervers qui tentent de convaincre la population qu'il est sain de faire participer nos jeunes enfants à des activités sexuelles. Nous savons que cela se produit couramment.
Je ne comprends pas pourquoi des hommes et des femmes d'âge adulte qui sont élus à la Chambre ne peuvent pas admettre ensemble, un beau jour, que nous avons un problème parce que nous perdons trop de nos enfants, qu'ils sont gravement maltraités et que certains sont assassinés. Le problème est réel. Il y a trop de coeurs brisés et de familles meurtries, beaucoup plus que nous ne le méritons.
Présentons-nous à la Chambre des communes un bon matin et décidons, ce jour-là, qu'un groupe de personnes qui sont censées être intelligentes vont régler le problème. Allons-nous permettre que ce problème perdure jusqu'à ce que le prochain Parlement présente un autre projet de loi renfermant d'autres expressions pour tenter de protéger un droit quelconque comme la liberté d'expression ou la liberté de parole? Nous devons agir avec prudence. Foutaise!
Je ne sais pas comment nous en sommes arrivés dans ce pays au point où personne n'ose entrer dans un aéroport et crier: « Alerte à la bombe! » Toute personne qui le ferait aurait de graves ennuis. Personne non plus n'entrerait dans une salle de cinéma en criant: « Au feu! » Toute personne qui le ferait aurait de graves ennuis. À mon avis, personne non plus ne devrait avoir en sa possession du matériel de pornographie juvénile sans s'exposer à de graves ennuis sur-le-champ et sans tergiversations.
Que signifie la tolérance zéro pour ceux qui ont élaboré cette loi et qui l'ont présentée? À maintes reprises, des responsables m'ont affirmé en réponse à mes questions qu'ils avaient une politique de tolérance zéro au sujet de la drogue dans les pénitenciers. Eh bien, cela ne fonctionne pas. Il y a plus de drogue dans les pénitenciers que dans les rues des villes. Tolérance zéro. Mais qu'est-ce que ça peut bien vouloir dire? Pourquoi cherchons-nous toujours à couvrir tous les petits détails pour une chose aussi élémentaire?
Nous nous battrons sans répit pour assurer la protection de nos enfants et nous y parviendrons coûte que coûte. Nous ferons comprendre aux tribunaux que c'est la décision du plus haut tribunal du pays—que c'est la décision des Canadiens que nous représentons.
Pendant que nous y sommes, nous allons faire passer l'âge du consentement de 14 à 16 ans. Je pense que l'âge du consentement devrait être 25 ans, mais le faire passer de 14 à 16 ans serait suffisant. Il faut le faire. Comment pouvons-nous tolérer une mesure législative qui dit que des jeunes de 14 ans sont en mesure de faire face à ce genre de problèmes lorsqu'ils se retrouvent dans la rue et qu'on leur demande de se prostituer? Nous savons évidemment ce qui se produit. Dans toutes les villes, des jeunes de 11 et 12 ans se font arrêter.
Il n'y a pas de quoi être fier du fait que cela se passe dans notre pays. En fait, nous devrions avoir honte. J'aurais cru, après le premier débat sur cette question, qu'une mesure finirait par être prise pour véritablement mettre fin à cette situation et aider nos policiers à lutter contre cette situation très tragique.
Les policiers ne devraient pas avoir à regarder des millions d'images dégoûtantes afin de déterminer si celles-ci sont des oeuvres d'art, si elles ont une valeur artistique et ainsi de suite. De nombreux policiers de Toronto doivent examiner tout ce matériel répugnant afin de s'assurer de protéger les droits des pédophiles et des malades qui veulent s'en prendre à nos enfants.
Quand allons-nous avoir le courage de prendre position ici en tant que groupe? Nous avons un gouvernement minoritaire. On parle de collaboration. Collaborons aujourd'hui. Prenons dès aujourd'hui des mesures afin d'assurer la sécurité de nos enfants et d'éliminer la pornographie juvénile. Éliminer veut dire éliminer. Passons à l'action.
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Madame la Présidente, je prends la parole aujourd'hui pour commenter le projet de loi C-2, Loi modifiant le Code criminel et la Loi sur la preuve au Canada. En particulier, le projet de loi C-2 améliore la protection des enfants et d'autres personnes vulnérables, qui ont plus que toutes autres besoin d'une protection juridique ferme et efficace.
Le projet de loi C-2 donne suite à l'engagement pris dans le discours du Trône de réprimer la pornographie juvénile. Il propose des réformes au droit pénal qui renforceront les dispositions du Code criminel concernant la pornographie juvénile et les peines y afférant. Il crée une nouvelle catégorie d'exploitation sexuelle, facilite le témoignage des enfants et d'autres victimes vulnérables et, enfin, crée de nouvelles infractions de voyeurisme.
À l'égard de la législation contre la pornographie juvénile, le projet de loi C-2 étoffe les dispositions actuelles du Code criminel sur la pornographie juvénile et propose plusieurs éléments nouveaux. Entre autres, il élargit la définition de la pornographie juvénile pour englober la forme écrite et les enregistrements.
Le projet de loi C-2 interdit de faire de la publicité pour la pornographie juvénile et porte de 6 à 18 mois la peine maximale pour toutes les infractions relatives à la pornographie juvénile qui sont punissables sur déclaration de culpabilité par procédure sommaire. Cette mesure signifie sans équivoque qu'aucune infraction de pornographie juvénile n'est considérée comme mineure. Ce message doit être clair, constant et mis en pratique.
Le projet de loi C-2 offre une solution à la controverse entourant la question des moyens de défense actuellement recevables—nous venons d'entendre les propos passionnés du député de Wild Rose—à savoir la valeur artistique, le bien public, les fins médicales, scientifiques ou éducatives, en les remplaçant par deux moyens de défense basés l'un sur la légitimité du but et l'autre sur l'absence de risque indu, ce qui place les intérêts des enfants avant toute autre considération, comme il se doit.
La défense qui est proposée est un critère beaucoup plus étroit et beaucoup plus clair, qui inclut celui du risque indu utilisé par la Cour suprême du Canada quand, en 2001, elle a confirmé les dispositions actuelles concernant la pornographie juvénile.
Le projet de loi C-2 propose la création d'une nouvelle interdiction afin de mieux protéger les jeunes contre l'exploitation sexuelle. En vertu de cette nouvelle interdiction, les tribunaux prendront en considération la nature de la relation et les circonstances l'entourant, notamment des indicateurs précis d'exploitation—entre autres, l'âge de l'adolescent, l'âge de l'accusé et l'emprise ou l'influence exercée par ce dernier sur l'adolescent. Ainsi, le projet de loi C-2 met l'accent sur le comportement répréhensible de l'accusé plutôt que sur le soi-disant consentement du jeune.
Le projet de loi C-2 propose des réformes importantes pour que les peines imposées dans les cas d'abus et d'exploitation sexuelle des enfants reflètent mieux la gravité de ces crimes. Le message que nous voulons et que nous devons envoyer est que les actes dépravés de cette espèce ne seront pas tolérés par la société canadienne.
À mon avis, les autres facteurs dont on tient habituellement compte dans l'application de la peine, comme la réadaptation du délinquant et la justice vengeresse, doivent passer au second plan, pour que l'on accorde la prépondérance à la protection du public et à la volonté de la société de faire savoir très clairement qu'un tel comportement ne sera pas toléré.
Pour assurer la réussite des enquêtes concernant ce genre de crimes, le projet de loi C-2 propose des réformes qui vont faciliter l'obtention de témoignages en permettant une plus grande clarté et une plus grande cohérence des témoignages de personnes de moins de 18 ans, de victimes de harcèlement criminel et d'autres témoins vulnérables. Comme on l'a établi dans diverses affaires judiciaires, il s'agit d'une question difficile et contentieuse.
J'estime à cet égard que les règles doivent êtres uniformes et très claires et qu'il faut utiliser la technologie, et surtout les audiences à huis clos pour les jeunes enfants.
Dans toutes les circonstances, les réformes visent à aider et à protéger les témoins tenus pour vulnérables; c'est le cas, par exemple, de l'article qui propose d'élargir l'interdiction de publication pour englober les nouvelles technologies comme Internet. Il s'agit d'une mesure importante visant à protéger l'identité de toutes les victimes.
Je ne voudrais pas laisser entendre ici que cette mesure législative pourra résister à toutes les contestations qui la viseront. La cadence des progrès technologiques est très forte. Il n'y a pas si longtemps, la pornographie juvénile concernait essentiellement la chose imprimée. Aujourd'hui, c'est surtout d'Internet qu'il est question.
L'infraction de voyeurisme, pour sa part, avait surtout rapport aux personnes que l'on qualifiait de voyeurs. Aujourd'hui, la technologie et les gadgets foisonnent. Pensons aux caméras cachées et aux caméras de très faible encombrement, matériel avec lequel les autorités de police et d'enquête ont à composer. Nous pouvons comprendre les défis quotidiens que cela pose pour les responsables de l'application des lois.
Si l'on ajoute à cela toute la question des serveurs Internet, qui ne se trouvent pas, comme le savent tous ceux qui ont enquêté sur ce type de délit, au Canada. Ils sont éparpillés dans d'autres pays, dans le monde entier, ce qui a pour effet de compliquer les enquêtes, l'application des lois, les poursuites et les sanctions.
Pour ce qui est des témoins et des mesures prises pour protéger leur bien-être et leur identité, c'est aux tribunaux, comme dans tous les autres cas, qu'il revient de déterminer la force probante qui doit être accordée, en fin de compte, à leur témoignage.
La création proposée de deux nouvelles infractions de voyeurisme vaut également la peine d'être mentionnée. En établissant des facteurs d'interdiction en matière d'observation et d'enregistrement en secret d'une personne, le projet de loi établit un mécanisme de protection de tous les Canadiens contre l'exploitation voyeuriste.
J'ai passé en revue dans les grandes lignes certaines des principales propositions du projet de loi C-2. Il est évident que ces réformes ne sont pas seulement utiles; elles sont nécessaires. Un comité sera maintenant saisi du projet de loi. C'est un sujet que beaucoup de gens à la Chambre et un grand nombre de Canadiens de tous azimuts ont vraiment à coeur. Il ne fait aucun doute que le projet de loi sera amélioré par le comité avant d'être rendu à la Chambre.
J'aimerais me joindre à mes collègues de la Chambre qui ont pris la parole pour appuyer les réformes proposées au projet de loi. Les enfants et les autres personnes vulnérables sont ceux qui ont le plus besoin d'être protégés. Le projet de loi C-2 le reconnaît et propose une loi solide pour assurer une protection aussi essentielle.
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Madame la Présidente, je suis heureux de pouvoir parler de cette question. J'interviens dans le débat sur ce projet de loi avec des sentiments partagés. Il y a environ quatre ans, j'ai prononcé à la Chambre mon premier discours à titre de député et il portait justement sur cette question. Il est regrettable que quatre ans se soient écoulés et que nous soyons encore en train de discuter de ce sujet. Si nous en parlons encore, ce n'est pas seulement la faute du gouvernement, même s'il doit bien assumer une certaine part de responsabilité à cet égard, mais c'est aussi parce que les technologies et la réalité évoluent.
Je me réjouis que ce soit là une des premières mesures que le gouvernement présente à la Chambre, car ce projet de loi revêt une importance capitale. Pourquoi est-il important? Voici pourquoi:
Une femme d'Edmonton fait face à de multiples chefs d'accusation concernant la pornographie juvénile--dont certains mettant en cause son fis de six ans. [...] L'enquête--qui a permis de découvrir plus de 100 images de jeunes dans diverses poses ou scènes de sexualité explicites avec des adultes, aussi bien des enfants d'âge préscolaire que des préadolescents--a mené à l'arrestation d'un suspect par les policiers d'Ottawa, dans la capitale nationale.
Voici un autre article:
Selon les policiers, au moins huit enfants de Winnipeg ont été attirés dans la maison d'un présumé pédophile qui leur a promis de la nourriture, de l'argent et du matériel pornographique. [...] « Nous savons que cela durait depuis au moins trois mois », de dire les policiers de Winnipeg...
Voici un autre exemple:
Des membres du service de la Police provinciale de l'Ontario chargé de la lutte contre la pornographie juvénile, poste de Napanee, et de la section des crimes électroniques de la PPO ont porté des accusations contre un homme de 43 ans de [West] Napanee [en Ontario] à la suite d'une enquête sur la pornographie juvénile [...] l'homme a été inculpé sous deux chefs d'accusation concernant la possession de pornographie juvénile, un chef d'accusation lié à la distribution de pornographie juvénile et un chef d'accusation concernant le fait d'avoir attiré des jeunes afin de les exploiter.
Voyons cet autre titre: « 100 disques contenant de la pornographie juvénile saisis en Colombie-Britannique ».
Les exemples sont nombreux. Ce ne sont là que quelques résumés. J'ai plus de 300 pages d'articles concernant des enfants, la pornographie juvénile, les jeunes victimisés et les lacunes des lois partout en Amérique du Nord, et tous les événements relatés se sont produits au cours des deux dernières semaines.
Le problème est grave. Dans notre société, l'un des pires méfaits consiste à faire perdre aux jeunes leur innocence de façon prématurée. C'est par la télévision, la parole, le cinéma et la complaisance de notre société sur le plan moral que cela se fait. Malheureusement, à l'heure actuelle, nous y concourons également par nos lois du fait que nous n'avons pas recours à toutes les mesures possibles pour contrecarrer l'exploitation des enfants.
En 1987, le gouvernement progressiste conservateur de l'époque a réduit l'âge du consentement à l'activité sexuelle au Canada de 18 à 14 ans. On a justifié le changement en alléguant que le gouvernement ne souhaitait pas criminaliser les adolescents ayant des activités sexuelles avec d'autres adolescents, même si des accusations à cet effet n'avaient jamais été portées. Toutefois, du fait que l'on n'y précisait nullement l'âge du partenaire, la loi autorisait effectivement des adultes a avoir des activités sexuelles avec des enfants de 14, 15 ou 16 ans.
Aussi bien les procureurs généraux des provinces que l'Association canadienne des policiers souhaitent voir passer à au moins 16 ans l'âge du consentement. En faisant passer à 16 ans l'âge du consentement, nous offririons, selon les chiffres de Statistique Canada, la protection légale à environ un million de Canadiens âgés de 14 à 16 ans. Il n'en coûterait rien au Trésor. En changeant un seul mot, nous pourrions épargner bien des traumatismes et bien des abus à bien des gens. Pourtant, c'est trop demander à certains libéraux que de changer un seul mot pour mettre à l'abri un million d'enfants, c'est trop s'écarter de la rectitude politique et peut-être même trop simplifier pour être compris.
L'urgence d'agir pour combattre l'exploitation des enfants est devenue très concrète un 26 mars, il y a quelques années, lorsque John Robin Sharpe a été reconnu coupable de possession de quelque 400 photographies de garçons pratiquant des actes de sexualité explicite, mais a été acquitté des accusations selon lesquelles il fabriquait et distribuait de la pornographie juvénile sous la forme de ses propres écrits. Le juge Duncan Shaw a déclaré en effet que les écrits décrivant des scènes de violence sado-masochiste et de relations sexuelles entre des hommes et de jeunes enfants étaient répugnants sur le plan moral mais comportaient néanmoins un certain « mérite artistique .» Concrètement, cela veut dire que ces écrits sont licites et peuvent être publiés. Ainsi, John Robin Sharpe et d'autres pervers du même genre peuvent désormais prétendre au statut d'artiste et ainsi écrire et publier leurs pensées et désirs les plus démentiels concernant des activités sexuelles avec des enfants.
Pour obtenir une condamnation, la police et la poursuite doivent maintenant prouver que la pornographie juvénile en cause n'a pas la valeur artistique que présentait celle de John Robin Sharpe. Autrement dit, les meilleurs efforts des forces de l'ordre pour lutter contre la pornographie juvénile équivaudront à l'utilisation de fils d'araignée pour arrêter une locomotive, ce qui est évidemment impossible.
L'interprétation large de la notion de valeur artistique, soit celle qui a été faite dans l'affaire John Robin Sharpe, nous fait croire que la législation canadienne présente des faiblesses qui pourraient nous empêcher de protéger nos enfants du mieux que nous pouvons.
La demande de pornographie juvénile est telle que la production et la distribution d'oeuvres pédopornographiques se poursuivront. Dire le contraire est naïf et absurde. Dire qu'il est inoffensif de posséder ses propres écrits pornographiques, particulièrement en cet âge électronique où la transmission ou la diffusion de documents sur Internet est si facile, voire impossible à empêcher, c'est aller carrément à l'encontre des réalités modernes.
D'aucuns disent que nous devons prendre garde de ne pas restreindre la liberté d'expression. J'estime que s'il est un domaine où la société doit dire non, c'est bien celui de la pornographie juvénile. Je n'accepte pas l'idée que des gens puissent souiller des enfants physiquement ou dans leurs écrits. Je n'accepte pas l'idée que la victimisation des enfants puisse avoir une valeur artistique. Je n'accepte pas non plus l'idée que l'intention de susciter une passion perverse, illégale, immorale et répréhensible à tous égards dans notre société puisse être acceptable de quelque façon que ce soit, même si elle se fonde sur la notion tirée par les cheveux que les créateurs de pareille oeuvre choquante ne la partageront pas avec d'autres et la garderont pour eux.
La protection des êtres les plus vulnérables de la société constitue notre devoir et notre responsabilité les plus importants. Hélas, nous avons failli à la tâche. En novembre 2000, dans un rapport international sur les agressions sexuelles contre des enfants, l'organisme appelé End Child Prostitution, Child Pornography and Trafficking of Children for Sexual Purposes a dénoncé le Canada comme étant un refuge pour les prédateurs sexuels d'enfants. Il est fait état dans le rapport que le Canada compte parmi les pays où l'âge du consentement à l'activité sexuelle est le plus bas, soit 14 ans, comparativement à des pays qui ont relevé le leur à 16 ou 18 ans.
À une époque, le Canada était considéré comme un chef de file mondial pour ce qui est de combattre l'exploitation sexuelle des enfants. Des lois régressives quant à l'âge du consentement, des dispositions législatives qui laissent à désirer et l'absence générale de planification de la part du gouvernement fédéral sont en train de faire du Canada, selon le rapport, un lieu de rendez-vous pour ceux qui exploitent des jeunes à des fins sexuelles.
Nos gouvernements ont trahi nos enfants, les êtres les plus vulnérables de notre société. Nous trahissons les enfants. La tenue d'un débat sur ce projet de loi à la Chambre est un pas dans la bonne direction, mais beaucoup de travail reste à faire.
La décision dans l'affaire Sharpe a entraîné deux exemptions à la législation sur la pornographie juvénile: des documents comme les journaux intimes ou les dessins créés personnellement et conservés en privé et les enregistrements visuels d'une personne réalisés par cette personne se livrant à des activités sexuelles légales et qu'elle a conservés pour son usage personnel. La dernière exemption risquerait d'exposer des enfants âgés de 14 à 18 ans à une exploitation par des adeptes de la pornographie juvénile étant donné qu'ils se livreraient à des activités légales.
Du fait que le gouvernement a été incapable d'interdire toutes les relations sexuelles entre les adultes et les enfants, les enfants continuent de subir un risque inacceptable. Ce n'est qu'en augmentant l'âge du consentement que les enfants seraient vraiment protégés aux termes du Code criminel.
Il ne s'agit pas de criminaliser les relations sexuelles entre les adolescents. Comme dans le cas d'autres endroits qui ont un âge du consentement plus raisonnable, comme le Royaume-Uni, l'Australie et les États-Unis, une exemption s'appliquerait dans le cas de relations entre des gens d'à peu près le même âge pour veiller à ce que les adolescents ne soient pas criminalisés.
Le projet de loi C-2 va accroître les peines maximales pour les infractions reliées aux enfants. Ces infractions comprennent les infractions sexuelles, l'omission de fournir les choses nécessaires à l'existence des enfants ou l'abandon de ceux-ci. C'est inutile si les tribunaux n'imposent pas les peines, et nous savons par expérience que, lorsque les peines maximales sont accrues, il n'y a pas de changement correspondant des habitudes en matière de détermination de la peine.
Il faut donc des peines obligatoires et l'application de peines réelles, grâce à l'élimination des libérations d'office et des peines avec sursis pour les prédateurs d'enfants. La technologie moderne est plus avancée que les mesures législatives régissant l'utilisation de la preuve dans les cas de pornographie juvénile liés à Internet. Le projet de loi n'aborde pas ces lacunes et des modifications s'imposent afin de régler de façon efficiente et efficace les cas de pornographie juvénile.
Nous sommes préoccupés par le fait que le gouvernement ne semble pas disposé à accepter des amendements destinés à améliorer le projet de loi. En fait, durant la période des questions d'aujourd'hui, le ministre de la Justice l'a précisé clairement. Nous avons reçu une réponse différente du ministre qui m'a précédé.
Cependant, s'il y a un sujet sur lequel toutes les parties peuvent s'entendre, ce doit être la protection des enfants. Dans ce débat, je félicite le gouvernement d'avoir présenté ce projet de loi. Cependant, notre parti d'opposition et, je pense, tous les Canadiens vont condamner le gouvernement s'il n'accepte pas des amendements raisonnables pour protéger les membres les plus vulnérables de notre société, nos enfants.
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Madame la Présidente, je suis heureux de vous voir occuper le fauteuil de la présidence. Je vous félicite de votre accession à ce poste. Je sais que c'est bien mérité.
C'est la première fois que j'interviens à titre de nouveau député du comté de Pickering—Scarborough-Est. Au fond, c'est la deuxième fois que mon comté change de nom. En 1993, ce comté portait le nom d'Ontario. Ensuite, il s'est appelé Pickering—Ajax—Uxbridge. Maintenant, il porte encore un autre nom, soit Pickering—Scarborough-Est. Il me semble que je me transporte de plus en plus vers l'ouest. D'ici 10 ans, si cela continue, je serai en Alberta.
[Traduction]
J'ai le plaisir d'intervenir aujourd'hui au sujet du projet de loi C-2. Mes collègues des deux côtés de la Chambre ont parlé de manière très éloquente et appropriée de l'esprit non partisan dans lequel ce projet de loi est proposé. D'aucuns diront que nous ne sommes pas allés assez loin, mais je suis de ceux qui pensent sincèrement que nous pourrons faire ce qui convient pour protéger les enfants et que nous le ferons.
Il y a deux ans, j'ai lancé un forum à l'intention de collègues à la Chambre des communes, auquel ont assisté, Dieu merci!, tous les députés de la Chambre, pour inventorier le sentiment de gravité que tous les Canadiens normaux ressentent face à la question de leur frustration croissante devant la prolifération de la pornographie juvénile, et leurs profondes préoccupations à ce sujet, particulièrement en ce qui a trait à l'utilisation d'Internet, cette démarche se situant pour une bonne part dans la foulée de la décision Sharpe.
Chacun ici comprend bien ce qui peut se produire dans un contexte où le libellé que nous utilisons pour protéger les enfants d'une exploitation n'est pas clair. Avant tout, quel que soit le texte de loi qui est proposé, amendé ou discuté en comité, il doit être libellé de manière à résister à l'épreuve du temps, sans quoi nous devrons reprendre ce débat, comme beaucoup de députés l'ont dit en exprimant leur grande frustration.
Toutefois, avant de soumettre quelques idées que les comités voudront peut-être étudier, je souhaite parler de la dernière série de changements apportés au projet de loi, dont je pense qu'ils ont bien atteint leur but.
Il suffit de parler aux policiers. Je sais que des députés de ce côté-ci le font et il est certain que des députés d'en face le feront. Lorsque je parle àPaul Gillespie, du Service anti-exploitation des enfants de la ville de Toronto, ou à Bruce Smollett ou à Frank Goldschmidt, de la Division de la pornographie infantile de la Police provinciale de l'Ontario, ils me disent que quelque chose a changé depuis un an.
Au cours de débats antérieurs, j'ai parlé de la nécessité d'une stratégie coordonnée afin de garantir que nos services de police d'un océan à l'autre aient la formation et la perspicacité voulues, de sorte que lorsqu'ils reçoivent de l'information, ils savent comment la traiter pour s'attaquer immédiatement à l'affaire. La rapidité de leur intervention est cruciale.
Nous avons mis sur pied le Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants. L'effectif du CNCEE, comme on l'appelle ici, est passé de quatre personnes, l'année dernière, à vingt-six, cette année. De l'avis de divers organismes et de certaines personnes à qui j'ai parlé au cours de l'été, c'est l'une des mesures les plus courageuses et les plus heureuses qu'ait prises la Chambre des communes, et il faut l'en féliciter. C'est une mesure que nous avons tous appuyée. Nous y avons investi des fonds et, si je suis bien informé, le gouvernement provincial de Dalton McGuinty y a contribué pour cinq millions de dollars. Il y aura un effort coordonné à consentir afin d'assurer à cet organisme un financement permanent pour l'avenir.
Je tiens également à féliciter Microsoft. Personnellement, pourtant, je me suis opposé à la Loi sur la concurrence au cours des années et je me suis préoccupé des positions dominantes.
Par ailleurs, nous avons abordé la raison d'être de l'accès légal et nous devons débattre de cette question en comité et ailleurs. C'est clair, ceux qui se livrent à de la violence et souvent à des gestes dégradants en exploitant des enfants ont besoin d'un élément pour parvenir à leurs fins : éviter d'être repérés. Or, ils échappent à toute surveillance dans une proportion alarmante. Notre technologie, n'en doutons pas, les moyens d'accès légal que nous procurent les technologies les plus récentes permettent à ceux qui restent dans l'ombre de continuer à exploiter les enfants. Elles créent un marché pour les gens comme M. Briere, qui a affirmé: « Si je n'avais pas vu ces images, je n'aurais pas été poussé à tuer Holly Jones. »
Cette tragédie devrait convaincre la Chambre des communes qu'il faut veiller à ce que le bénéfice du doute, lorsqu'il s'agit de la protection de la vie privée et de l'utilisation de la technologie à des fins légales, serve tant soit peu à protéger les enfants.
Tout à l'heure, j'ai entendu le député évoquer certaines réserves au sujet de l'âge du consentement. Je constate, et c'est certainement une décision que le comité voudra examiner, qu'en Angleterre on a relevé l'âge de consentement de 16 à 18 ans. Nous savons, par ailleurs, que le Canada a été à l'avant-garde dans la lutte au commerce international du sexe. Nous prendrons bientôt connaissance de la jurisprudence à l'occasion de notre première cause. Quoi qu'il en soit, il est clair que nous devons réunir un maximum d'informations à jour et qui présentent les meilleures possibilités s'offrant à nous.
Je comprends toutes les répercussions de l'affaire Sharpe. J'ai fait connaître mes préoccupations à de nombreuses reprises. À notre réunion d'avril 2002, nous étions peu nombreux, il est vrai, mais nous sommes parvenus à un consensus sur la question de la valeur artistique.
Il s'agissait en effet d'une exemption sanctionnée par un tribunal qui, selon moi, était erronée. Il nous faut y travailler. Nous devons garantir qu'il n'y a pas de marge de manoeuvre et que l'exploitation des enfants n'a aucune valeur artistique. Il faut voir cette exploitation pour ce qu'elle est et elle est illégale.
Une autre condition qui vient de la Cour suprême du Canada concerne le matériel qui préconise ou conseille. Il s'agit d'une exemption qui, à mon avis, ne nous aidera aucunement à garantir que les enfants ne seront pas indûment exposés à des personnes qui ont l'intention de les exploiter. C'est pour cette raison qu'il y a beaucoup à dire et beaucoup à apprendre de ceux qui sont au premier plan du débat d'aujourd'hui.
J'espère que dans un an nous pourrons revenir à la Chambre des communes et affirmer qu'au lieu de réagir à ce qui s'est produit, nous avons été proactifs. Les meilleures pratiques, même si je déteste utiliser cette expression qui peut sembler à la mode, constituent au Canada la meilleure assurance que cela est possible. Nous devons utiliser tous les moyens dont nous disposons aux échelles nationale, internationale et régionale pour faire en sorte que nos enfants bénéficient de la meilleure sécurité et de la meilleure protection qui soient.
Il existe un certain nombre de points sur lesquels la Chambre des communes peut et doit arriver à un consensus.
[Français]
Entre-temps, je dois souligner que même si c'est toujours une question que les députés veulent aborder pour des raisons politiques, il existe aussi une grande contrainte au sein de la population à l'effet que cette situation ne soit pas exploitée de façon politique. L'enjeu politique devrait être évacué quand cela concerne la protection des intérêts de nos enfants qui forment notre avenir.
Notre avenir se compose simplement des jeunes qui, aujourd'hui, ont besoin du doute, de la capacité de douter, surtout quand cela a trait au prononcé d'une sentence par la cour.
[Traduction]
J'espère aussi que nous saisirons l'occasion pour entendre certains spécialistes qui jouent un rôle de premier plan, des psychologues et des psychiatres, qui comprennent l'esprit de ceux qui exploitent et agressent des enfants. Plus important encore, il y a des gens tels que le docteur Peter Collins, qui a travaillé auprès de la Police provinciale de l'Ontario pendant des années. Il était présent ici même, à la Chambre des communes, lors de ce passionnant forum sur la lutte contre la pornographie juvénile que nous avons tenu il y a quelques années. Il a prévenu la Chambre des communes et les députés qui participaient au forum que le fait d'avoir entre les mains du matériel de pornographie juvénile pour des gens malades constitue un déclencheur qui les aide à réaliser leurs fantaisies et à exploiter des enfants.
Je crois que ces personnes sont malades et qu'elles ont besoin d'aide médicale. Elles ont besoin d'être traitées. Elles n'ont pas besoin de raisonnement juridique pratique, branché ou obtus. Elles n'ont certes pas besoin que l'on dise que le bénéfice du doute fait toujours en sorte qu'on ne juge pas coupables des innocents. Nous comprenons tous cela.
Dans le cas qui nous occupe, ce dont on a besoin semble évident à tous les intervenants dans ce domaine. Étant donné la nouvelle qui a éclaté l'été dernier au coeur de la campagne électorale, les aveux de M. Briere, le temps est venu pour que le Parlement trouve tous les moyens permettant d'assurer qu'il a une très bonne compréhension de l'esprit criminel et des mesures à prendre dans des circonstances particulières.
Le député de Wild Rose a parlé plus tôt du recours à la disposition d'exemption. Je suis un de ceux qui ont voté en faveur de cette résolution à l'époque. En effet, certains d'entre nous, les députés de Mississauga-Est, de Huron et de London--Middlesex, ont voté du côté de l'opposition parce que nous avions affaire à une idée née de la frustration.
Je peux dire sans me tromper que si cela est une option, c'en est une de tout dernier recours. Je crois que nous avons les moyens d'agir. Selon moi, si nous sommes disposés à nous asseoir pour améliorer le projet de loi dont nous sommes saisis, comme nous l'avons fait avec le projet de loi qui a donné lieu à la création du Centre national de coordination contre l'exploitation des enfants, nous obtiendrons l'an prochain des résultats dans des dossiers que nous estimons troublants cette année. Nous nous devons d'agir au nom de nos enfants.
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Madame la Présidente, au début de ma première intervention à la Chambre des communes, je tiens à remercier ceux qui ont rendu mon élection possible.
Je tiens à remercier mes électeurs, dans la circonscription de Surrey-Sud—White Rock—Cloverdale, de la confiance qu'ils m'ont témoignée. Je suis très honoré de les représenter. J'entends faire de mon mieux et j'espère pouvoir, fût-ce modestement, répondre à leurs aspirations et à leurs attentes.
Je tiens aussi à souligner le travail acharné de mon équipe électorale et des centaines de bénévoles qui ont contribué à mon élection.
Enfin, je remercie ma femme, Andrea, et ma famille d'avoir fait leur part pour me faire élire.
Je vais parler aujourd'hui du projet de loi C-2, qui porte sur la protection des enfants et d'autres personnes vulnérables. Tous les Canadiens bien-pensants conviendront, je crois, que les enfants méritent rien de moins qu'une protection totale contre la pornographie juvénile. On ne saurait exagérer les effets dévastateurs qu'elle peut avoir sur les victimes, leur famille et notre société dans son ensemble.
Je suis sincèrement déçu que nous devions débattre une fois de plus un projet de loi libéral qui n'assure pas aux enfants la protection qu'ils méritent. Certes, je suis heureux que cette nouvelle version interdise la publicité de la pornographie juvénile, comme je l'ai proposé au Comité de la justice il y a un an, mais le projet de loi présente tout de même de graves problèmes, notamment la création d'un moyen de défense fondé sur le but légitime, la création d'une catégorie de délinquants ayant une relation d'exploitation, le fait que l'âge de consentement n'est pas porté à au moins 16 ans et le fait qu'aucune peine minimum n'est fixée. Je vais maintenant revenir de façon plus détaillée sur chacun de ces points.
La première mouture du projet de loi prévoyait un moyen de défense fondé sur la valeur artistique. Devant le tollé de protestations, le gouvernement libéral a fait marche arrière et parlé plutôt de défense fondée sur le bien public. Qu'une chose soit bien claire. Lorsqu'il s'agit de pornographie juvénile, il n'y a rien qui puisse servir le bien public. Pour peu qu'il y ait eu une différence, le moyen de défense fondé sur le bien public était plus étendu que celui fondé sur la valeur artistique, et les échappatoires étaient encore plus nombreuses.
Maintenant qu'il est évident aux yeux des Canadiens que la défense fondée sur le bien public est vide de sens, les libéraux en proposent une autre, fondée cette fois sur le but légitime. Le problème de cette approche, c'est qu'elle est identique aux autres. Elle permettrait toujours aux tribunaux d'excuser la pornographie juvénile sous prétexte qu'elle a une valeur artistique.
Nous, les Conservateurs, estimons que tout moyen de défense visant à justifier la possession de matériel pornographique doit être éliminé. Ce nouveau moyen de défense ne ferait que rendre l'obtention de condamnations plus difficile, en créant toutes sortes d'échappatoires juridiques qui pourraient servir à justifier la possession criminelle de matériel pornographique juvénile. S'il en est ainsi, c'est parce que, en droit criminel, il faut donner aux moyens de défense l'interprétation la plus large possible. En vertu de cette nouvelle disposition, Eli Langer pourrait encore invoquer un moyen de défense pour justifier ses tableaux pédophiles.
De plus, le projet de loi C-2 ne relève pas l'âge du consentement au contact sexuel entre adultes et enfants. Au lieu de cela, on crée une nouvelle catégorie d'infraction, soit «exploitation sexuelle ». Il s'agit d'une disposition imprécise qui ne garantit pas la protection dont les enfants ont besoin. Elle ne servira donc pas de véritable moyen de dissuasion et fera simplement s'éterniser les procès. Il serait nettement plus efficace d'oublier cette nouvelle catégorie et de relever l'âge du consentement.
Selon l'unité de lutte contre la pornographie de la Police provinciale de l'Ontario, il est urgent de relever l'âge du consentement. Les lois actuelles empêchent parents, policiers et organismes de services sociaux de protéger les garçons ou filles qui font l'objet de coercition de la part d'adolescents plus âgés et d'adultes, et de leur porter secours. Il existe un protocole international qui permet d'expulser des États-Unis ou du Mexique, dans les 12 à 24 heures, une fugueuse canadienne âgée de 14 ans mais, selon le commandant Ross MacInnes, qui travaille depuis 28 ans à l'escouade de la moralité de Calgary, la police ne peut rien faire si la fugueuse se trouve dans une autre ville canadienne, à cause des dispositions actuelles relatives à l'âge du consentement.
Les Canadiens souhaitent, dans une proportion de 80 p. 100, que l'âge du consentement soit porté au moins à 16 ans. Il y a à peine trois ans, tous les ministre provinciaux de la Justice ont adopté à l'unanimité une résolution demandant au gouvernement fédéral de porter l'âge du consentement à 16 ans. Comme cela a été mentionné à la Chambre, la plupart des pays démocratiques ont fixé l'âge minimum à 16 ans, et quelques-uns, dont le Royaume-Uni, l'ont fixé à 18 ans.
Le prétexte qui veut qu'on risque de criminaliser des actes entre deux adolescents en rehaussant l'âge du consentement ne tient tout simplement pas. Le Code criminel exempte déjà de poursuites les jeunes qui ont sensiblement le même âge. Cette disposition d'exemption en matière d'âge permet d'assurer que les jeunes ne font pas l'objet de poursuites. Cette exception est semblable à ce qui se fait ailleurs, par exemple au Royaume-Uni, en Australie et dans la plupart des États américains, mais où l'on prévoit aussi une disposition plus raisonnable en matière d'âge minimum pour donner son consentement. L'histoire a prouvé que la criminalisation des adolescents ne causait pas de problème avant qu'on abaisse l'âge du consentement.
Puisque le gouvernement a déjà reconnu dans sa législation que les adolescents n'étaient pas en mesure de contrôler leur consommation de tabac et d'alcool, tentant ainsi de les protéger contre les effets nuisibles de ces substances, pourquoi n'hausserait-il pas l'âge du consentement dans le but de protéger les jeunes contre les conséquences physiques et émotives de l'activité sexuelle précoce? En rehaussant l'âge du consentement, on affirmerait très clairement que la société canadienne a à coeur de protéger ses enfants et qu'elle s'oppose à l'activité sexuelle chez les enfants, et on donnerait ainsi aux parents et aux policiers un outil qui permettrait de sauver et de protéger les enfants.
Enfin, cette mesure législative ne répond pas aux préoccupations relatives à la détermination de la peine dans les cas d'infractions d'ordre sexuel perpétrées à l'égard des enfants. À l'heure actuelle, les peines ne tiennent tout simplement pas compte de la gravité des crimes. Selon Frank Goldsmith, de l'unité de lutte contre la pornographie de la Police provinciale de l'Ontario, l'une des plus importantes préoccupations a trait aux peines peu sévères imposées par les tribunaux. La peine la plus sévère qu'il ait jamais vue pour possession d'articles de pornographie juvénile est de deux ans moins un jour, ce qui correspond à une détention à domicile, alors que la peine maximale prévue pour cette infraction est de cinq ans d'emprisonnement. Il considère que, pour un pédophile, une détention à domicile ne correspond qu'à une simple réprimande, alors que les victimes, elles, sont condamnées à perpétuité puisqu'elles ne pourront jamais oublier ce qui leur est arrivé.
M. Goldsmith est d'avis que les peines avec sursis sont des peines ridicules puisque les personnes soumises à la détention à domicile se permettent tout simplement de quitter la maison quand elles en ont envie, sachant qu'elles peuvent toujours se défendre en disant qu'elles étaient en route pour l'école ou le travail. En fait, le détective Bruce Headridge, autrefois chef de l'escouade de la moralité de la police de Vancouver, affirme que l'imposition de peines avec sursis dans ces cas a jeté le discrédit sur notre système de justice.
Les pédophiles savent que notre système de justice ne considère pas la possession et la distribution de matériel de pornographie juvénile comme un crime ou un problème grave. Ils lisent des articles comme celui qui a été publié par la Presse canadienne dont le titre même précisait que la possession de matériel de pornographie juvénile était rarement punie d'un emprisonnement.
Je trouve renversant qu'il y ait des peines minimales pour la conduite en état d'ébriété, mais pas pour les infractions à caractère sexuel commises contre des enfants. Nous, les conservateurs, demandons au gouvernement libéral d'adopter des peines minimales obligatoires et d'abolir les peines avec sursis pour ce genre d'infraction.
En incarcérant les personnes trouvées coupables de possession de pornographie juvénile, on protège les enfants et on dissuade les individus qui voudraient exploiter sexuellement des enfants. Le juge Michael Moldaver, de la Cour d'appel de l'Ontario, a déclaré à ce sujet:
Les prédateurs sexuels d'âge adulte qui risquent la vie d'enfants innocents pour satisfaire leurs besoins sexuels déviants, doivent savoir qu'ils paieront un prix élevé pour leur comportement.
Certains sont d'avis que les peines minimales obligatoires ont pour conséquence d'entraîner les coupables dans un milieu où ils deviendront des criminels aguerris. Je peux dire que ce n'est pas vrai dans le cas des pédophiles, que l'on garde en isolement protecteur. On ne les laisse pas se mêler au reste de la population carcérale, parce qu'ils seraient agressés par des criminels endurcis, auxquels les crimes contre les enfants répugnent.
Il ne s'agit pas d'une banale infraction. Il s'agit d'enfants qui se font maltraiter. Nous avons besoin de peines minimales pour les protéger.
Pour conclure, je rappelle qu'une société vraiment libre et démocratique protège ses membres les plus faibles contre l'appétit de ceux qui, au nom de la liberté, serait prêts à avilir les enfants et à leur faire du mal. Je crois fermement qu'en privant ces gens de tout moyen de défense, au lieu de leur fournir des échappatoires, en prévoyant des peines minimales obligatoires, au lieu des peines avec sursis, en augmentant l'âge minimal pour donner son consentement, au lieu d'encourager les apôtres de la liberté sexuelle, nous redonnerions aux enfants la dignité dont ils ont besoin et nous affirmerions sans détour que, dans la société canadienne, ils doivent être respectés autant que tout autre être humain.
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Madame la Présidente, pour ce qui concerne le projet de loi C-2, il est assez évident que les enfants ont besoin de protection de nos jours. Nous vivons à une époque bien différente du passé. Les enfants sont très vulnérables à l'exploitation sexuelle. Les pédophiles et les gens qui sont friands de pornographie juvénile et qui tentent de violer les droits de nos enfants sont très bien organisés.
Toutefois, outre les enfants, il y a un autre groupe qui a besoin d'aide dans ce domaine. Il s'agit des parents.
Avant l'an 2000, j'ai exercé le droit en tant qu'avocat généraliste. J'ai eu à m'occuper d'un cas très difficile au milieu des années 90. Un beau jeune couple dans le milieu de la trentaine est venu me voir à mon étude. Ces parents avaient une fille de 14 ans qui entretenait une liaison avec un homme à la fin de la quarantaine. Ils sont allés voir la police, qui leur a dit qu'elle ne pouvait rien faire.
J'ai dit d'emblée à ces parents que la loi donnerait aux parents les moyens et la capacité de subvenir aux besoins de leurs enfants et de les protéger. Je leur ai fixé un rendez-vous pour le lendemain, précisant que dans l'intervalle, je ferais des recherches et aurais des réponses à leurs problèmes. J'ai passé pas mal de temps à faire des recherches sur la question, dans le Code criminel, la législation provinciale sur les services aux familles, et ainsi de suite. J'étais certain que les parents avaient le pouvoir de protéger une fille de 14 ans contre ce qui était manifestement une situation d'exploitation.
Je suis père de famille moi-même et je pense que la plupart des gens en cette Chambre ont été parents à un moment ou à un autre. Comme parents, nous savons que les enfants de 14 ans ne sont pas à une étape de leur vie où ils peuvent prendre des décisions de ce type. Ils ont besoin de davantage de maturité et d'éducation lorsque qu'ils soupèsent ce genre de décision. Je pense que ce domaine relève de l'autorité parentale.
En tout état de cause, lorsque ces parents sont revenus me voir le lendemain, ce fut une expérience embarrassante pour moi. Il m'a fallu leur dire que la Chambre des communes ne pouvait pas leur venir en aide dans ce genre de situation. J'étais le messager et, assez souvent dans ces situations, c'est le messager qui se fait prendre à partie.
Une des raisons pour lesquelles je suis à la Chambre, c'est parce que c'est ici que nous créons les lois du pays. Nous laissons tomber ces gens en n'examinant pas ce problème. Il suffirait d'apporter des modifications très mineures à la loi actuelle pour protéger les enfants, soit en faisant passer l'âge du consentement de 14 à 16 ans. Essentiellement, pour utiliser une expression courante, il suffirait d'un trait de plume et un million d'enfants pourraient être protégés par leurs parents. Les parents pourraient invoquer la loi. À l'heure actuelle, ils ne peuvent pas le faire. Ils ont les mains liées. La loi leur a lié les mains. Ils sont incapables de protéger ces enfants, qui sont à un âge très vulnérable.
Je peux assurer aux députés que les personnes qui font le commerce du sexe et qui exploitent des adolescents sont bien au courant de cette échappatoire. Elles l'exploitent dans toute la mesure du possible. J'estime qu'il incombe au Parlement d'agir à cet égard et de prendre des mesures qui pourront changer les choses.
Un autre aspect que je voudrais aborder concerne les moyens de défense. Chaque fois que le Parlement crée une infraction criminelle ou traite d'une infraction criminelle, puis décide d'exposer dans le Code criminel les moyens de défense pouvant être invoqués pour cette infraction, mis à part les moyens de défense qui trouve couramment dans la common law, il ferait mieux de formuler soigneusement ces moyens de défense.
Quiconque à la Chambre a obtenu un diplôme de droit et est au courant de notre système judiciaire sait comment un bon avocat de la défense peut utiliser des moyens de défense ambigus, formulés de façon vague. Le mot « art » peut englober bien des choses; c'est une notion très subjective. Les bons avocats de la défense que je connais et à qui on accordera cette marge de manoeuvre vont s'en donner à coeur joie.
L'accusé n'a pas à prouver l'existence d'un but légitime. La défense n'a pas à faire cela. N'importe quel diplômé en droit sait ce que la défense doit faire. Même un profane le sait. Je pense que même vous, madame la Présidente, le savez. Tout ce que la défense doit faire c'est de prouver l'existence de ce qu'on appelle un doute raisonnable.
Je suis convaincu que c'est ce qui s'est produit dans le cas de Robin Sharpe. Celui-ci avait un bon avocat qui a invoqué l'argument de la valeur artistique. Il a dit qu'il n'avait pas à prouver l'existence d'une telle valeur artistique, mais seulement à prouver qu'une telle valeur pouvait exister. Il pourrait y avoir une valeur artistique dans ce matériel. Or, si le juge accepte cet argument, il n'a d'autre choix que d'acquitter l'accusé, puisque c'est ce que prévoit la loi.
Je suis très perturbé par cette situation. Je ne nie pas qu'il puisse y avoir des buts légitimes. Le ministre de la Justice a dit que la police avait en sa possession du matériel de pornographie juvénile aux fins d'enquête. Je peux accepter cette raison, mais la notion de valeur artistique est beaucoup trop vaste. Nous avons sûrement au pays des juristes qui pourraient resserrer cette disposition et fermer la porte aux avocats de la défense qui contournent notre système judiciaire, permettant ainsi à des pédophiles et à des individus qui exploitent sexuellement des enfants de s'en tirer impunément et de s'adonner à ce genre d'activité au détriment de nos jeunes.
Le nombre de jeunes au pays diminue constamment, mais ces jeunes représentent notre avenir. Ce sont eux qui vont prendre le relais dans l'avenir. Il incombe au législateur de prendre le taureau par les cornes et d'adopter des mesures qui protégeront adéquatement nos jeunes, afin que ceux-ci puissent un jour utiliser pleinement leurs talents dans notre société, sans être hantés durant le reste de leur vie par un cauchemar provoqué par des sévices subis aux mains de prédateurs sexuels.
Il y a un événement qui s'est produit au cours de la dernière session qui m'étonne. Nous avions présenté une motion afin de faire passer de 14 à 16 ans l'âge du consentement. Il me semblait que c'était incontestablement la chose à faire ici à la Chambre. Or, la majorité des députés libéraux ont refusé d'appuyer cette motion. Par la suite, durant la campagne électorale, ils ont été tout étonnés d'entendre dire qu'ils étaient trop mous face au problème de la pornographie juvénile. Je parle ici d'une mesure très simple qui aurait assuré une protection réelle et qui aurait aidé concrètement les policiers et les parents à protéger les enfants de cet âge, qui sont particulièrement vulnérables. Ce n'est pas moi qui ai décidé de voter contre cette motion. Par conséquent, je me permets de dire « si le chapeau vous fait, portez-le ».
Sincèrement, je suis très déçu que certains journalistes qui rendent compte de nos travaux ne s'emploient pas plus consciencieusement à signaler ces questions très graves à l'ensemble de la population. Ils les abordent comme s'il s'agissait de questions mineures et sans importance. Les enfants exploités par des prédateurs sexuels, c'est une question extrêmement grave. Il s'ensuit des préjudices irréparables. Nous devrions protéger nos enfants.
La libération conditionnelle, c'est une autre question. À mon avis, lorsqu'un individu fait des choses terribles à autrui, la priorité numéro un de notre système de justice pénale devrait être d'assurer la protection du public. Les libéraux ne comprennent pas qu'un objectif légitime de notre système de justice pénale consiste à protéger les citoyens respectueux des lois qui souhaitent poursuivre tranquillement leur existence. Ce genre d'individu a rompu le contrat social. On ne peut vivre dans une société libre et démocratique lorsque des gens ne respectent pas les droits des autres personnes et des enfants. Lorsque ces individus enfreignent les lois, ils doivent en subir les conséquences. Les conséquences, c'est qu'ils sont incarcérés et qu'ils ne sont plus en liberté dans les rues pour causer des préjudices aux membres les plus vulnérables de notre société.
Je pense que les libéraux regardent trop de films américains. Ils sont obnubilés par la culture hollywoodienne. En fait, une bonne partie de Hollywood est dirigée par des adeptes de la philosophie libérale, avec un l minuscule. Je pense que, dans leur optique, il y a beaucoup de Jean Valjean dans notre société, c'est-à-dire des êtres qui sont accusés à tort, mais ils oublient ceux qui sont victimes de pareilles politiques.
La justice doit de nouveau protéger les êtres les plus vulnérables de notre société, notamment nos enfants. Le gouvernement nous a gravement laissés tomber à ce chapitre.
Je vous remercie de votre attention, madame la Présidente. Je pense que vous avez même acquiescé à certains de mes arguments et je m'en réjouis grandement. Je voudrais simplement rallier un plus grand nombre de vos collègues à mon opinion.
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Madame la Présidente, je souhaite commencer par vous féliciter de votre accession au poste de Présidente. C'est très agréable de vous voir occuper ce fauteuil et je suis très heureuse pour vous. Je crois que vous allez beaucoup apprécier ces nouvelles fonctions. Votre présence me facilite la tâche ce soir puisque je prends la parole non pas en tant que députée s'adressant à la Présidente, mais en tant que femme s'adressant à une autre femme.
Cela a été dit et redit, mais il faut le répéter : les enfants du Canada sont notre plus grande ressource naturelle. Nous prenons des mesures extrêmes pour protéger nos autres ressources naturelles et il ne devrait pas en être autrement des enfants canadiens. À cet égard, le projet de loi C-2 ne répond pas aux besoins. En fait, nous pouvons commencer dès la définition de ce qu'est un enfant. Le gouvernement définit un enfant comme toute personne âgée de 14 ans ou moins, alors qu'il devrait certainement s'agir de 16 ans ou moins.
La pornographie juvénile est une industrie de plusieurs milliards de dollars et les enfants canadiens devraient en être protégés. Comment y parvenir? Nous devons déployer tous les efforts possibles pour faire disparaître cette industrie, notamment en prenant des dispositions législatives faisant de la pornographie juvénile une façon fort peu intéressante de gagner de l'argent. Nous devons rendre les conséquences de la production ou de l'achat de pornographie juvénile tellement graves que le risque de se faire prendre et de se faire poursuivre sera trop grand. Il est tout simplement inacceptable que ces jeunes soient privés de leur jeunesse par des adultes cherchant à satisfaire leurs désirs pervers.
La pornographie juvénile est indéfendable. Même au nom de ce que l'on peut prétendre être de l'art. Nos tribunaux ont l'habitude de donner aux pédophiles des sentences qui n'ont rien d'exemplaire. Le cas de Karl Toft l'illustre bien. Cet homme était en position d'autorité dans une école de formation pour garçons. Il a agressé des centaines de garçons et leur a causé des torts irréparables, ce pour quoi il a dû purger une peine de 13 ans. Mais le comble, c'est que l'homme circule en relative liberté dans les rues d'Edmonton, où il vit dans une maison de transition en profitant de sa pleine pension du gouvernement.
Qui peut donc parler de justice dans ce cas, alors que bon nombre de ses victimes n'ont pas été en mesure de gagner leur vie à cause des sévices psychologiques qu'il leur a infligés?
En mars 2002, le juge Duncan Shaw de la Cour supérieure de la Colombie-Britannique a déclaré John Robin Sharpe non coupable de possession et de distribution d'écrits de pornographie juvénile en raison du mérite artistique de son oeuvre. Le juge Duncan n'avait pas le choix. La disposition pertinente était prévue au Code criminel à l'époque et le sera encore si le projet de loi C-2 est adopté. Dans la catégorie de l'intention légitime se dissimule le mot « art .» Pourtant, comment peut-on voir de l'art dans le fait de brutaliser un enfant? Demandons donc à l'enfant brutalisé s'il aurait autorisé la chose au nom du bien public. Demandons à un agent de la GRC qui doit traiter ce genre de document répugnant dans le cadre d'une enquête s'il arrive à y voir une correspondance quelconque avec ce qu'on appellerait de l'« art.»
Il y a un an ou deux, j'ai rencontré une délégation de la police de Toronto, à qui incombe l'horrible tâche d'intervenir quotidiennement dans des cas de pornographie juvénile. En gage de la confiance qu'ils nous témoignaient, les représentants de la police nous ont montré des films et nous ont raconté ce que la police est appelée à faire quotidiennement. Encore à ce jour, quand je ferme les yeux, je ne peux m'empêcher de revoir ces images. Nous prenons bien garde, à la Chambre des communes, de n'offenser la sensibilité de personne, aussi j'épargnerai aux députés les détails de ce que j'ai vu. Qu'il suffise de dire que nous ne pouvons tout simplement pas permettre que la situation actuelle se perpétue.
Je veux une loi qui ait beaucoup de mordant. Le projet de loi C-2, dans sa forme actuelle, n'en a pas suffisamment. Il faudrait remplacer les mots « passible d'un emprisonnement maximal » par « passible d'un emprisonnement d'au moins ». Il ne serait donc plus possible aux juges d'imposer à ceux qui maltraitent les enfants des peines à toutes fins utiles symboliques. La loi aurait du mordant. Je pourrais appuyer le projet de loi s'il en avait.
Si le gouvernement veut vraiment réprimer la pornographie juvénile, il doit protéger les droits des enfants, donner aux autorités les moyens nécessaires pour traduire ces pervers en justice et donner aux tribunaux le mandat d'appliquer la loi dans toute sa rigueur.
Je ne siège ici que depuis quatre ans, mais, au cours de cette période, j'ai entendu le gouvernement présenter des arguments faisant appel à la valeur artistique, au bien public, et il est maintenant question de but légitime.
C'est bien simple. madame la Présidente, vous êtes vous-même une femme et je suis certaine que vous comprenez aussi bien que moi qu'il n'existe aucune justification à la pornographie juvénile. Notre incapacité à protéger nos enfants constituerait un lamentable échec pour le gouvernement.
Ma circonscription, Kamloops—Thompson—Cariboo, regorge de ressources naturelles. On y trouve notamment une mine de cuivre. Une personne qui volerait du cuivre dans cette mine s'exposerait à toute la rigueur de la loi. Il devrait en être de même dans le cas du vol de l'enfance.
Nous devons, en tant que parlementaires, en donner l'assurance aux personnes que nous représentons.
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Madame la Présidente, je suis heureux de participer au débat sur le projet de loi C-2 au nom des électeurs de Newton—Delta-Nord.
Le projet de loi C-2 n'est qu'une mesure législative recyclée qui a déjà porté les numéros C-12 et C-20. J'ai déjà eu l'occasion d'aborder la question et mes collègues ont grandement contribué au débat sur la protection des enfants.
Le gouvernement libéral continue de recycler ce projet de loi sans pour autant prendre les mesures qui s'imposent. Devant l'indignation exprimée par la population et les pressions qu'elle exerçait, le gouvernement a dû renoncer à la mention du « bien public » qui aurait pu être utilisé comme moyen de défense par les personnes accusées de possession de matériel de pornographie juvénile. Le « bien public » a maintenant été remplacé par le « but légitime » qui peut, lui aussi, être utilisé comme moyen de défense. Selon la définition donnée dans le projet de loi, le but légitime peut être lié, entre autres, aux arts.
Les critères devant, aux termes du projet de loi, servir à déterminer si une relation est fondée sur l'exploitation sont vagues et subjectifs. Par ailleurs, en ne portant pas l'âge du consentement de 14 à 16 ans, les libéraux mettent les enfants canadiens en danger.
Étant donné qu'entre 70 p. 100 et 80 p. 100 des prostituées canadiennes commencent à s'adonner à cette activité alors qu'elles sont encore des enfants, notre obligation morale, en tant que législateurs, est de protéger les enfants. Ceux-ci ne méritent rien de moins que d'être entièrement protégés contre la pornographie juvénile.
Le projet de loi dont nous sommes saisis n'est que de la poudre aux yeux. Les libéraux n'ont pas tenu compte des témoignages des défenseurs des droits des enfants et des policiers de première ligne qui nous ont fourni une mine de renseignements pour rendre la loi plus efficace.
D'importants mécanismes pour assurer la protection de nos enfants ne figurent pas dans la mesure législative. De bonnes définitions auraient pu être utiles au lieu du bien public ou d'un quelconque but légitime pouvant être lié aux arts, qui sont nettement insuffisants.
Il y a aussi l'âge du consentement. Les libéraux ayant refusé d'interdire tout contact sexuel entre des adultes et des enfants, les jeunes continuent de courir des risques inacceptables. Ce n'est qu'en haussant l'âge du consentement qu'on parviendra à bien protéger les jeunes aux termes du Code criminel.
Tout comme les projets de loi C-12 et C-20, le projet de loi C-2 omet de relever l'âge du consentement au contact sexuel entre adultes et enfants. Dans toutes les démocraties occidentales, l'âge du consentement est d'au moins 16 ans. Au Danemark, en France et en Suède, il est de 15 ans. Dans beaucoup d'autres pays, dont l'Australie, la Finlande, l'Allemagne, la Hollande, Israël, la Nouvelle-Zélande, la Norvège et le Royaume-Uni, l'âge du consentement est de 16 ans. Malgré l'accord unanime des premiers ministres selon lesquels l'âge du consentement devrait être porté de 14 à 16 ans, le gouvernement libéral a négligé d'offrir cette protection à nos enfants. L'âge du consentement aurait même pu être porté à 18 ans.
Les libéraux n'ont tout simplement pas tenu compte des nombreux témoins qui ont comparu devant le comité par le passé demandant que les enfants soient protégés contre les prédateurs. Le gouvernement libéral a négligé d'offrir cette protection à nos enfants. Les enfants sont notre avenir et ils sont vulnérables. Ils méritent rien de moins qu'une protection totale contre les prédateurs. En notre capacité de législateurs, nous nous devons de protéger nos enfants, faute de quoi nous ne remplissons pas notre devoir.
Depuis mon arrivée ici en 1997, le gouvernement libéral n'a fait que tergiverser et se cantonner dans l'indécision en ce qui concerne la protection de nos valeurs familiales, que ce soit au sujet de l'âge du consentement ou de la protection de nos enfants.
En tant que législateurs, nous devons élaborer des lois plus strictes, et ce n'est pas en augmentant les peines maximales que nous y parviendrons. Nous voulons des peines minimales obligatoires pour les crimes comme la possession de pornographie juvénile, afin de veiller à la protection de nos enfants. C'est ici-même que nous devons faire de notre mieux pour protéger nos enfants.