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AGRI Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de l'agriculture et de l'agroalimentaire


NUMÉRO 023 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le jeudi 26 octobre 2006

[Enregistrement électronique]

(1115)

[Traduction]

    Merci, Mesdames et Messieurs, de comparaître aujourd'hui devant notre comité pour la poursuite de nos audiences sur l'avenir de la Commission canadienne du blé.
    Comme nous commençons avec 15 minutes de retard, nous prolongerons un peu la séance pendant la deuxième heure mais nous essaierons quand même de ne pas trop déborder.
    Je serai très rigoureux avec l'horaire. Vous serez limités à 10 minutes chacun. Je vous préviendrai une minute avant la fin de votre exposé, pour vous permettre de conclure. Essayez donc de faire tout votre possible pour dire tout ce que vous avez à nous dire en 10 minutes, si ce n'est moins, pour que nous puissions avoir une période de questions complète. Nous devrons prolonger un peu pendant la deuxième heure parce que le Comité de l'environnement a duré un peu plus longtemps qu'il n'aurait dû.
    Le greffier a remis un calendrier aux membres du comité. Nous en avions discuté l'autre jour et je vous invite à y jeter un coup d'oeil. Si vous avez des questions, parlez-en au greffier à la fin de la réunion. Je serai là aussi.
    Sans plus tarder, nous accueillons aujourd'hui William Van Tassel et Benoit Legault, représentant les producteurs du Québec; Wendy Holm, agronome professionnelle, qui comparaît à titre individuel; Stewart Wells, président du Syndicat national des cultivateurs; et David Rolfe, président de Keystone Agricultural Producers.
    Nous vous souhaitons à nouveau la bienvenue.
    Qui veut commencer? Selon ma liste, ce devrait être M. Van Tassel, des producteurs du Québec.
    Je ferai mon exposé en français mais je pourrai répondre à vos questions dans les deux langues. Pas de problème.

[Français]

    Au nom des 11 000 entreprises des familles productrices de grains du Québec que représente la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec, je vous remercie de nous avoir invités à cette séance du comité.
     Plus que jamais, dans le contexte de la grave crise des revenus que vivent les producteurs de grains du Québec et du Canada, nous nous sentons interpellés par tout sujet qui a une incidence sur les revenus des producteurs agricoles. Conséquemment, vous comprendrez que la remise en question des pouvoirs actuels de la Commission canadienne du blé revêt un caractère particulier pour notre organisation.
    L'un des principes chers aux producteurs de grains du Québec est celui du droit de la majorité de la profession de décider du mode de mise en marché afin de favoriser une mise en marché efficace ainsi qu'un prix optimal et équitable pour tous. Nous considérons que la Commission canadienne du blé existe et opère en vertu d'un tel principe.
    De son côté, la fédération a eu le mandat d'une majorité d'entreprises productrices de blé pour consommation humaine de prendre en charge la mise en marché de ce produit. La première saison nous a permis de comprendre à quel point il est important pour les producteurs de grains de prendre la place qui leur revient collectivement dans la chaîne de mise en marché.
    Par exemple, la mise en vente en commun du blé au Québec a permis de commercialiser plus de 70 p. 100 du blé québécois sur le marché de la consommation humaine, marché plus lucratif, comparativement à moins de 50 p. 100 auparavant. Cet outil collectif de mise en marché procure donc des avantages indéniables.
    De plus, à l'heure de la concentration des acheteurs et des intermédiaires et de la disparition de l'information nécessaire au fonctionnement des marchés, il devient incontournable d'offrir ou, à tout le moins, de maintenir les moyens légaux et réglementaires nécessaires à une certaine appropriation du pouvoir de négociation.
    Cette faiblesse du rapport de forces et cette vulnérabilité grandissante s'observent aussi aux États-Unis, alors que le United States Department of Agriculture, USDA, doit plus que jamais intervenir afin de s'assurer du bon fonctionnement des marchés, tel que la mise en place du Livestock Mandatory Reporting Act, sans compter l'existence de nombreux offices de denrées agricoles qui ont décidé, de façon réglementaire, d'imposer une négociation collective des prix et des conditions de vente.
    Par ailleurs, la décence politique requiert au minimum que le gouvernement du Canada laisse parler les voix démocratiques. Au Québec, l'instauration de la mise en vente en commun du blé ne s'est pas faite sans observer un processus démocratique clair et rigoureux. Par conséquent, tous les producteurs de blé de consommation humaine ont été consultés, et 70 p. 100 d'entre eux se sont prononcés sur la pertinence de commercialiser collectivement leur produit. De ce nombre, deux tiers ont voté en faveur de la mise en vente en commun. Le gouvernement a, à tout le moins, la responsabilité morale ultime d'observer les règles démocratiques les plus élémentaires.
    Pour l'instant, nous croyons que le gouvernement du Canada devrait investir tout son temps et ses efforts pour sortir le secteur des grains de la crise, et non pour exacerber et diviser les communautés agricoles qui souffrent déjà beaucoup.
    Je tiens à vous rappeler que notre secteur génère des revenus annuels de 8,6 milliards de dollars, soit plus de 23,5 p. 100 de la valeur totale du secteur agricole du pays, en plus d'employer plus du quart des familles agricoles. Notre importance déborde de ce statut de fournisseur de matière première, en devenant un élément vital de l'économie agricole et d'une panoplie d'entreprises associées à la production alimentaire. Globalement, ce secteur agricole est à la base d'une longue et complexe chaîne de valeurs.
    Les producteurs de grains du Canada sont aussi très productifs. Pour ce qui est des grains de l'est du pays, le rendement moyen du maïs au Canada se compare avantageusement à près de 50 p. 100 des superficies cultivées aux États-Unis. Pour ce qui est de la fève de soya, la productivité des fermes du Canada est en moyenne équivalente à celle observée sur les deux tiers des superficies cultivées aux États-Unis.
    Le marché des grains souffre beaucoup plus d'un renforcement du marché pétrolier et d'une politique américaine dépensière. Les deux derniers facteurs affectent injustement le taux de change et l'affaiblissement des prix. De plus, la force du marché pétrolier et la vigueur économique de plusieurs pays très populeux en plein développement ont un impact aussi direct sur le prix des intrants utilisés par le secteur des grains et devraient donc avoir un impact direct sur le prix des grains.
(1120)
    Hélas, le Trésor américain, avec ses investissements dans les subventions agricoles, empêche le marché de s'établir à des valeurs dites normales. La crise du secteur des grains est sournoise et elle a pris de l'ampleur au gré des divers Farm Bill des États-Unis et de l'accroissement du soutien du gouvernement américain au cours des 25 dernières années.
    Aujourd'hui, le gouvernement du Canada semble plus s'émouvoir de la liberté d'entreprise demandée par une minorité de producteurs et l'agro-industrie canadienne que du drame quotidien vécu par les familles agricoles qui produisent du grain.
    Ce drame est généré par les subventions des gouvernements américains et européens versées aux producteurs et qui faussent le marché mondial des grains. Nous faisons référence à un impact global de 1,3 milliard de dollars pour l'année 2000, mais tout porte à croire que ces valeurs ont probablement fait un bond important depuis les dernières années. Ceci n'est qu'un aspect du problème, alors que ces subventions récurrentes bouleversent le secteur des grains du Québec et du Canada dans son ensemble, et pas seulement au niveau des marchés.
    Les fermes canadiennes perdent de leur compétitivité, alors que l'endettement grimpe et les revenus nets chutent beaucoup plus rapidement que chez leur principal concurrent. S'ajoute un retard qui s'accumule au niveau de l'investissement dans les nouvelles technologies et, évidemment, dans l'environnement. L'impact sur la productivité se fait déjà sentir.
    Il est impossible, à nos yeux, de soutenir la compétition avec des producteurs si le gouvernement fait de la sécurité nationale une priorité. Selon toute logique, la classe politique fait et fera de la sécurité alimentaire une priorité complémentaire. Les producteurs agricoles du Canada doivent donc s'attendre au maintien des investissements massifs dans le secteur agricole aux États-Unis, de surcroît dans le contexte de l'échec récent des négociations de l'Organisation mondiale du commerce.
    Il est clair que nous ne pourrons lutter seuls contre un projet de cette ampleur. Le Canada ne peut se permettre d'avoir une politique qui se démarque trop de celle de son voisin en termes de priorités sectorielles. Les États-Unis investissent chaque année massivement et presque uniquement dans le secteur des grains.
    Le gouvernement canadien reconnaît maintenant publiquement que le Programme canadien de stabilisation du revenu agricole, PCSRA, ne répond pas du tout aux besoins du secteur des grains. Pourtant, ses dernières interventions sont sous le signe de la continuité. Cette situation s'ajoute à la disparition du Market Revenue Insurance program, en Ontario, ou à la diminution de la capacité d'intervention des programmes provinciaux, dont le Programme d'assurance stabilisation des revenus agricoles, ASRA, au Québec.
    Il est clair que le secteur des grains a des besoins différents des autres secteurs agricoles couverts par le PCSRA. Conséquemment, gérer les risques dans le secteur des grains signifie gérer selon deux volets, soit le soutien à court terme et la planification à long terme. Les circonstances exceptionnelles auxquelles le secteur doit faire face nécessitent une attention spéciale et un plan d'action spécifique devant être adopté par le gouvernement. Le but demeure d'offrir un soutien approprié et adéquat pour le secteur.
    À court terme, notre plan cherche à pallier les inconvénients et limites du PCSRA pour les producteurs de grains, en utilisant une mesure plus réaliste des rendements et des prix et en intégrant une flexibilité pour les particularités des régions et des différentes denrées. Le but demeure d'offrir un soutien approprié et adéquat pour le secteur.
    Il faudrait instaurer très rapidement des mesures transitoires, jusqu'à la révision du cadre stratégique agricole prévue en 2008, en introduisant un nouveau programme et en bonifiant le PCSRA, afin que ceci ne permette de pallier les dommages passés, présents et futurs — l'endettement — causés par les subventions des États-Unis. Ces aides devraient être versées en toute reconnaissance des critères de flexibilité nécessaires aux provinces qui savent le mieux répartir les ressources parmi leurs agriculteurs.
    À plus long terme, il faut instaurer dès 2008 une politique agricole canadienne compétitive qui permettra de contrer les effets pervers du Farm Bill des États-Unis. Les paramètres d'intervention s'ajusteraient en fonction du niveau de diminution des subventions internationales constatées à la suite de la réalisation des engagements pris par les divers pays membres de l'OMC.
    En conclusion, vu que le temps s'écoule, nous pouvons reconnaître que la commission n'est pas un outil parfait, mais personne ne nous convaincra du manque de pertinence de prendre en charge collectivement et de façon démocratique la mise en marché d'un produit agricole.
(1125)
    Nous sommes aussi excessivement déçus et frustrés qu'un tel sujet ait pris le pas sur la grave crise des revenus. Il ne faut pas oublier que si nous ne faisons rien, nous ne ferons plus partie de l'histoire. Organisations agricoles, députés, ministres, politiciens de tous les partis ont quand même été les précurseurs d'une agriculture qui a évacué les entreprises familiales, le dynamisme de ses communautés agricoles et surtout de sa souveraineté alimentaire.
    Merci de votre attention.

[Traduction]

    Merci, M. Van Tassel.
     Mme Holm, vous avez 10 minutes.
    Bonjour. Je m'appelle Wendy Holm. Je suis une agronome canadienne, une économiste des ressources et une journaliste agricole.
    Permettez-moi de dire dès l'abord que je n'ai pas d'intérêt sectaire sur cette question. Mes préoccupations sont celles d'une agronome. Dire que je suis inquiète serait loin de la vérité. Je vous remercie d'ailleurs de me donner la parole aujourd'hui.
    Je vais d'abord vous dire qui je suis. Je suis agronome professionnelle depuis plus de 30 ans. J'ai été présidente de l'institut des agronomes de la Colombie-Britannique, membre du conseil d'administration du Agricultural Institute of Canada, et agronome de l'année en C.-B. en 2000. J'ai reçu deux médailles de la Reine, en 1993 et en 2002. Comme économiste des ressources, j'ai reçu une formation spécialisée en économie, en politique de la concurrence, en politique du commerce international, en organisation industrielle et sur les effets de la réglementation sur la performance du secteur privé.
    Comme journaliste agricole, je publie une chronique mensuelle depuis 12 ans. Pour ces raisons, j'estime être qualifiée pour exprimer une opinion professionnelle sur les conséquences des mesures prises récemment par le nouveau gouvernement du Canada pour détruire le système du guichet de vente centralisé de la Commission canadienne du blé, seule entité protégeant les agriculteurs contre les gros conglomérats.
    D'autres témoins vous ont parlé en détail de l'importance de la Commission canadienne du blé pour l'agriculture des Prairies. J'ai moi-même consacré quatre chroniques à cette question depuis février. L'une d'elles, intitulée « Dual Desk is Code for Disaster », a reçu la médaille de bronze Frank Jacobs lors de la remise des Canadian Farm Writers' and Broadcasters' Awards à Winnipeg.
    Un système de vente double détruira le pouvoir des producteurs sur le marché. Avec la disparition de la Commission canadienne du blé, une somme estimée à 800 millions de dollars -- représentant les avantages que tirent directement les producteurs céréaliers de l'Ouest du pouvoir de vente du guichet unique de la Commission canadienne du blé -- sortira directement des poches des producteurs de l'Ouest et sera empochée par les grands sociétés céréalières et leurs actionnaires. La question qui se pose est de savoir pourquoi ce gouvernement, contre toute logique et contre son intérêt politique, tient absolument à respecter une promesse électorale qui détruira la Commission canadienne du blé? Si l'on a un doute, il suffit de voir qui va profiter du changement.
    Les grandes multinationales céréalières en veulent à la Commission canadienne du blé depuis le milieu des années 80, et c'est compréhensible puisque celle-ci assure aux agriculteurs plus de 800 millions de dollars de retombées sur lesquelles elles voudraient mettre la main. Les Américains réclament également la disparition de la Commission, pour des raisons similaires. Ils veulent bonifier leurs céréales de faible qualité avec les céréales de qualité du Canada et avoir accès à nos systèmes de frêt.
    En avril 2002, à la suite d'une rencontre avec de hauts représentants au commerce des États-Unis, le président de la commission du blé du Dakota du Nord, Maynard Satrom, disait aux producteurs que l'objectif commun du gouvernement des États-Unis et des producteurs de blé américains était d'obtenir la réforme du monopole de la Commission canadienne du blé. Deux semaines plus tard, devant le Sénat des États-Unis, le Département de l'agriculture affirmait que les privilèges du système de vente à guichet unique représentaient un « avantage déloyal » pour les producteurs de blé du Canada et que les céréales américaines devraient pouvoir faire librement concurrence aux céréales canadiennes sur le plan de l'accès au transport ferroviaire canadien. L'USDA, soutenant que les pratiques de la CCB limitaient l'accès des États-Unis à notre marché et rendaient les producteurs américains moins concurrentiels sur les marchés mondiaux, réclamait une « réforme fondamentale » d'organisations telles que la CCB afin de garantir que les producteurs américains soient définitivement traités de manière équitable sur le marché mondial.
    En mars 2003, une poursuite fut intentée sans succès devant l'OMC; elle fut portée en appel en mai, encore une fois sans succès. Les responsables soutenaient que la CCB accorde et préserve depuis fort longtemps un avantage concurrentiel aux agriculteurs canadiens sur les marchés mondiaux du blé. Qu'y a-t-il de mal à ça? C'est exactement ce qu'ils devraient faire pour donner un avantage comparatif à leurs propres agriculteurs. Selon Canadian Business Resource, le statut de la Commission comme vendeur unique du blé et de l'orge de l'Ouest canadien lui permet d'obtenir des prix préférentiels pour les agriculteurs sur des ventes annuelles de plus de 2 millions de tonnes dans plus de 70 pays. Toutes les recettes, moins les frais de commercialisation, sont rendus à environ 85 000 agriculteurs des Prairies. La CCB est fière d'avoir la réputation d'être un fournisseur de produits de grande qualité, d'être un fournisseur fiable, et de bénéficier d'un appui sans équivalent de ses clients. Coopérative privée appartenant à ses membres, elle se situe cette année au 95e rang des 500 premières entreprises du Financial Post, juste après SNC-Lavalin, Saputo Inc. et Canfor.
    Pour la Commission canadienne du blé, le double guichet de vente est à un souffle de disparaître. Ses concurrents multinationaux, dont les poches sont profondes, feront de meilleures offres qu'elles pour le blé, à court terme, et elle sera peu à peu asphyxiée. Après son départ, les primes aux producteurs de 30 $ à 45 $ la tonne que les économistes agricoles lui attribuent disparaîtront pour toujours. Mais les dégâts ne s'arrêteront pas là. L'effondrement de la Commission aura un effet de domino sur le reste de l'économie agricole des Prairies. Sans elle, le système des wagons de producteurs disparaîtra, tout comme les services ferroviaires de courte distance qui dépendent des expéditions par les wagons de producteurs. Les installations indépendantes de réception des céréales qui survivent aujourd'hui grâce à aux liens commerciaux de la Commission avec l'étranger ne tarderont pas à disparaître aussi, sur un marché dominé par les multinationales. Les services ferroviaires continueront de se détériorer car les agriculteurs n'auront aucune autre possibilité que de transporter leurs céréales sur des distances de plus en plus longues vers des élévateurs de plus en plus gros. Les céréales canadiennes deviendront des céréales génériques mélangées à celles d'autres pays, ce qui fera baisser les prix obtenus par les producteurs canadiens.
    Comme les quatre plus grandes firmes contrôlent 73 % des marchés céréaliers mondiaux, et 80 % si l'on y ajoute la cinquième, et que six grandes sociétés ferroviaires nord-américaines contrôlent les taux de fret et l'accès aux wagons, le moment est fort mal choisi pour affaiblir le pouvoir des agriculteurs sur le marché.
    Face à cette menace, la grande majorité des producteurs céréaliers de l'Ouest canadien, ainsi que les grandes organisations agricoles du Canada, ont exprimé leur opposition au projet.
(1130)
    Nous avons d'un côté les Américains, les grandes multinationales céréalières et le gouvernement Harper qui essayent de démanteler la Commission canadienne du blé et, en face, les agriculteurs canadiens, les organisations agricoles et le public qui essayent de les en empêcher. Harper sait fort bien que, si les agriculteurs pouvaient voter sur cette question, comme l'exige l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé, le système de guichet unique de la CCB resterait intact.
    Je soupçonne que c'est la publicité faite à cette affaire qui a forcé Harper à trop en faire. Museler les administrateurs de la CCB pour les empêcher de défendre les droits des agriculteurs au titre de l'article 47.1 et changer les règles de vote en plein milieu des élections pour tenter d'influencer le résultat en faveur du gouvernement serait inquiétant même dans un pays du tiers-monde. Le nouveau gouvernement le sait peut-être mais ce genre de tactique est inacceptable au Canada.
    J'ai choisi de conclure aujourd'hui avec une histoire qui illustre bien ce que je viens de vous dire.
    Dans ma fonction d'agronome, je suis allée à Saskatoon le 27 juillet pour appuyer les agriculteurs canadiens défendant la Commission canadienne du blé. J'estimais qu'ils avaient raison et que les professionnels devaient prendre position. Quand on m'a donné deux minutes au micro sur l'estrade de Vimy dans le parc, j'ai encouragé les autres agronomes à appuyer la CCB et le droit des agriculteurs canadiens à prendre cette décision. J'estimais que c'était mon devoir professionnel.
    L'après-midi, dans une salle bourrée à craquer, j'ai écouté des dirigeants agricoles de tout le Canada défendre la Commission et le pouvoir qu'elle donne aux agriculteurs. Plus tard, Chuck Strahl est sorti des réunions sur invitation auxquelles il avait participé de l'autre côté de la rue -- avec des gens appuyant la thèse du gouvernement Harper sur la CCB -- pour donner une conférence de presse.
    En tant que journaliste indépendante du Western Producer, j'y ai assisté et j'ai demandé au ministre si son gouvernement serait prêt à instaurer un système de double guichet de vente sans l'appui favorable des producteurs, en infraction à l'article 47.1 de la Loi. Je suis ensuite retournée en C.-B. rédiger ma chronique.
    Le lundi suivant, j'étais sur le point d'envoyer ma chronique d'août au Western Producer quand j'ai reçu un appel de ma directrice, Barb Glen, qui semblait ébranlée. Elle m'a dit qu'elle avait reçu un appel d'un membre du cabinet de Chuck Strahl -- et d'une autre personne -- indiquant que ma présence à la manifestation signifiait que le Western Producer n'était pas objectif. Ma chronique mensuelle, qui était publiée sur la page des éditoriaux dans la deuxième livraison de chaque mois depuis 12 ans...
    Une voix : [Inaudible].
    Mme. Wendy Holm : Quoi?
    Il me reste du temps. J'ai encore trois minutes.
    Ma chronique a été annulée définitivement le lendemain matin.
    Qu'est-ce qui a pu amener la revue à congédier un chroniqueur primé et très populaire, ayant gagné en trois ans quatre récompenses nationales pour ses articles et pour un éditorial?
    Encore une fois, voyez à qui ça profite.
    J'attire l'attention des membres du comité sur le document intitulé « Who Owns the Farm Media in Western Canada? » -- veuillez le distribuer, s'il vous plaît -- dans lequel je dresse la liste des administrateurs et de leurs affiliations. Vous pouvez y voir en particulier le nom de Brian Hayward, PDG d'Agricore, la plus grande société canadienne de manutention de céréales et de fabrication de provendes.
    Dans une lettre du 3 octobre adressée à un agriculteur, le cabinet de Chuck Strahl affirmait que Western Producer appartient à une société privée de Saskatoon, Western Producer Publications, qui l'exploite. En réalité, Western Producer est détenu et exploité par un conglomérat, Glacier Ventures International, dont l'un des administrateurs est un certain Brian Hayward, PDG d'Agricore.
    L'annulation de ma chronique dans le Western Producer sur un seul appel du cabinet de Strahl ne concerne pas que moi. Elle concerne surtout le droit des agriculteurs de discuter librement et honnêtement de leurs préoccupations et d'avoir des personnes comme moi, qui connaissent le domaine, pour s'exprimer vigoureusement en leur nom. Au lieu de ça, j'ai moi aussi été muselée.
    Comme je n'ai été invitée qu'il y a quelques jours à comparaître devant le comité, je n'ai pas d'exemplaires en français de mon document. Comme on ne peut distribuer de documents unilingues au sein du comité, ce qui est légitime, je l'ai publié sur un site Web spécial qui devrait intéresser le comité. Vous y trouverez entre autres choses une discussion plus complète de la propriété des médias agricoles, une entrevue de Barb Glen et moi-même sur CBC Radio One de Regina, et ma chronique censurée du Western Producer. L'adresse du site Web est www.theholmteam.ca. Tout fanatique de base-ball reconnaîtra l'origine de « l'équipe holm ».
    Tout économiste sait que la concentration du capital nuit aux collectivités. Il n'y en a pas de meilleur exemple que le secteur agroalimentaire. Les élévateurs sont continuellement confrontés à ce phénomène. La CCB est cruciale pour contrebalancer le pouvoir des multinationales et rendre de l'argent aux agriculteurs et à leurs collectivités. Le gouvernement Harper, de mèche avec les intérêts céréaliers américains et les grandes multinationales céréalières, ne voit dans l'agriculture des Prairies qu'un secteur de plus à privatiser. Alors qu'ils prenaient leurs propres décisions, les agriculteurs vont maintenant devoir accepter les prix des autres. Des exploitations solides et viables seront remplacées par des mega-exploitations supervisées par des gestionnaires.
    Si Ottawa peut faire fi de l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé, il peut tout aussi facilement détruire le cadre juridique encadrant les autres denrées agricoles. Il faut que les députés peuvent mettre fin à cette idiotie -- dès maintenant.
    Merci.
(1135)
    Merci, madame Holm.
    Je donne maintenant la parole à Stewart Wells, du SNC. Vous avez 10 minutes, M. Stewart.
    Le Syndicat national des agriculteurs remercie le comité de l'avoir invité à témoigner aujourd'hui.
    J'ai deux recommandations à présenter au comité et, si j'ai assez de temps, j'aimerais aborder une troisième question.
    La première recommandation est que le comité permanent utilise tous les moyens à sa disposition pour faire enquête sur les événements ayant entraîné les changements annoncés par le ministre de l'Agriculture au sujet de l'élection des administrateurs de la Commission canadienne du blé pendant le processus d'élection.
    La deuxième recommandation est que le comité permanent trouve le moyen de forcer le gouvernement fédéral à rembourser les frais directs de la Commission canadienne du blé, ainsi que les frais supplémentaires des agriculteurs individuels, résultant du changement des règles d'élection des administrateurs de la CCB pendant le processus d'élection.
    En ce qui concerne la première recommandation, le ministre de l'Agriculture a annoncé en Chambre la semaine dernière des changements au processus d'élection des administrateurs de la CCB pour cette année. Ce processus avait débuté la première semaine de septembre et était à moitié terminé quand le ministre a annoncé ces changements.
    En faisant son annonce, il a dit qu'il avait suggéré à la CCB d'apporter ces changements et que celle-ci avait accepté en disant que c'était une très bonne idée. C'était mardi dernier.
    Lundi de cette semaine, la CCB a publié sur son site Web une déclaration affirmant que les changements ne provenaient pas d'une suggestion du ministre mais d'une instruction. Elle a ajouté qu'elle n'avait pas eu l'occasion de dire si c'était une bonne idée ou non. Autrement dit, elle a directement contredit le ministre. On peut consulter la déclaration sur le site Web de la Commission.
    J'attire en outre votre attention sur d'autres informations disponibles sur le site Web de la Commission canadienne du blé qui sont susceptibles de vous intéresser. J'aimerais notamment déposer l'une de ces informations devant le comité. Il s'agit de l'exposé de la CCB devant le groupe de travail du ministre de l'Agriculture, qui figure aussi sur le site Web.
    Lundi, donc, la CCB a contredit le ministre et, hier, ce dernier a fait une autre déclaration au sujet de la modification du processus électoral. Encore une fois, il a tenté d'impliquer la Commission dans ce changement et a fait référence aux conclusions du comité d'examen du processus d'élection de la Commission canadienne du blé. En effet, un comité d'examen avait été mis sur pied et a déposé un rapport il y a près d'un an -- en novembre 2005. Le ministre a fait référence à ce rapport mais les changements qu'il a annoncés ne font pas partie de ses recommandations. Ils sont complètement différents des recommandations formulées par le comité en novembre 2005.
    En huit jours, nous avons eu deux explications différentes du ministre au sujet de ces changements, et les deux sont erronées. Nous demandons au comité d'examiner cette question. Penchez-vous sur ce qui s'est passé depuis le dépôt du rapport du comité d'examen du processus électoral, en novembre 2005, il y a 11 mois, afin d'essayer de comprendre pourquoi de tels changements y ont été apportés.
    Des gens en qui j'ai confiance et qui n'ont aucune raison de me mentir affirment que le ministre avait été informé des conclusions du comité d'examen et avait pris connaissance de ses recommandations; ils ajoutent qu'on lui avait dit dès février que, si des changements devaient être apportés conformément aux recommandations du comité d'examen, ils devraient l'être avant le début du processus d'élection. Ce n'est pas ce qui s'est passé. Les changements ont été apportés alors que le processus d'élection était déjà bien entamé. Le Syndicat national des cultivateurs s'élève contre la mise en oeuvre de tels changements pendant un processus d'élection. Nous sommes au Canada et on n'agit pas comme ça chez nous.
(1140)
    Cela m'amène à la deuxième recommandation, concernant l'augmentation des frais. Les dépenses du processus d'élection des administrateurs de la Commission canadienne du blé sont assumées en totalité par les agriculteurs de notre pays, c'est-à-dire ceux de la région de la CCB, et les changements apportés par le ministre au milieu de la période électorale ont entraîné des dépenses additionnelles. Les informations d'origine et la publicité d'origine effectuée par le coordonnateur des élections, Meyers Norris Penney, ne valent plus rien aujourd'hui. Il faut envoyer de nouvelles informations directement par la poste aux 36 pour cent d'agriculteurs qui ont été arbitrairement exclus de la liste, ce qui est aussi une dépense supplémentaire que la Commission doit assumer-- c'est-à-dire les agriculteurs par l'intermédiaire de la Commission. Il s'agit là d'une dépense directe pour la Commission.
    Il y a aussi une dépense indirecte pour les agriculteurs à cause du processus de déclaration. Des milliers d'électeurs légitimes ont été rayés de la liste. Des gens du Manitoba et de la Saskatchewan, ainsi que de la région de Peace River en Alberta, qui ont subi les conséquences du gel incroyable de l'été de 2004, n'ont produit que des grains de provende. L'année suivante, beaucoup d'entre eux ont subi les effets d'inondations et n'ont encore produit que des grains de provende. S'ils n'ont pas encore transporté leur production cette année -- et nous n'en sommes qu'au troisième mois de la période de livraison -- ils sont rayés de la liste.
    Au minimum, quand ils rempliront leurs déclarations, ces gens devront trouver un notaire public ou un commissaire à l'assermentation pour les faire vérifier. Certains se trouvent aujourd'hui à 25, 50 ou 100 milles de distance d'un commissaire à l'assermentation. Certes, leur dépense supplémentaire sera peut-être minime -- 10 $, 15 $, 20 $ ou 50 $ -- pour se rendre en voiture parler à un commissaire afin de faire modifier leur déclaration, mais il s'agira d'une dépense supplémentaire qui aura été imposée à des agriculteurs de l'Ouest canadien par le ministre de l'Agriculture.
    La piètre situation financière des agriculteurs de l'Ouest est parfaitement connue depuis plusieurs années. Donc, par notre deuxième recommandation, nous demandons au comité permanent de forcer le ministre de l'Agriculture à rembourser les dépenses additionnelles de la CCB ainsi que des agriculteurs.
    Ma dernière remarque est destinée à démontrer que l'on peut envisager différemment la Commission canadienne du blé. Nous avons entendu beaucoup d'arguments dans les deux sens, et il peut y avoir beaucoup de discussions, mais l'une des manières d'envisager la Commission est de la considérer comme un instrument législatif de commercialisation oeuvrant dans l'intérêt des agriculteurs de l'Ouest, tout comme un autre instrument législatif de commercialisation appelé « brevet ». Les gouvernements protègent les brevets afin d'accorder aux entreprises qui mettent au point de nouveaux produits un monopole -- un guichet de vente unique, si l'on veut -- qui leur permettra de maximiser les revenus tirés de ces produits.
    La Commission canadienne du blé fonctionne de manière très semblable. Elle est destinée à aider les agriculteurs à maximiser leurs revenus commerciaux afin qu'ils n'aient pas à retourner année après année devant les contribuables pour leur demander de les aider financièrement à survivre.
    Je tenais à vous présenter cette analogie avec le système des brevets, qui est un système fondé sur la loi. Monsanto, John Deere et toutes les autres entreprises de ce secteur tirent un bénéfice considérable d'un instrument de commercialisation législatif qu'on appelle la protection des brevets, et il n'y a aucune raison de priver les agriculteurs d'un instrument similaire en leur imposant une règle différente.
    Merci.
(1145)
    Merci, monsieur Wells.
    M. Rolfe, vous avez la parole.
    C'est certainement un plaisir pour moi de m'adresser ce matin au comité pour présenter la position de Keystone Agricultural Producers sur la Commission canadienne du blé.
    Keystone Agricultural Producers est la plus grande organisation d'élaboration de politiques agricoles générales du Manitoba. Notre rôle est de défendre les intérêts des familles agricoles de la province. Nous représentons environ 7 000 agriculteurs et familles agricoles du Manitoba. Si je m'adresse à vous aujourd'hui, c'est pour donner une voix aux agriculteurs du Manitoba, et je suis heureux de vous présenter notre position sur la Commission canadienne du blé et le guichet de vente unique.
    Il n'est certainement pas exagéré de dire que les modifications proposées par le gouvernement à la CCB marquent le début d'une transformation fondamentale de l'agriculture de l'Ouest canadien. Avant de vous exposer ce point de vue en détail, permettez-moi de souligner ceci : personne ne devrait sous-estimer l'incidence de l'abandon du guichet de vente unique. Il est crucial que les agriculteurs de l'Ouest obtiennent toutes les informations à ce sujet et soient parfaitement au courant des conséquences.
    En dernière analyse, c'est l'agriculteur qui doit décider. C'est son droit. Il est évident qu'un plébiscite est absolument indispensable. Premièrement, c'est ce qu'exige l'article 47.1 de la Loi sur la Commission canadienne du blé.
    Deuxièmement, le gouvernement n'a pas été élu dans l'Ouest canadien sur cette seule proposition ni par les seuls agriculteurs.
    Troisièmement, les agriculteurs détiennent un intérêt direct dans la CCB par le truchement des élections d'administrateurs.
    Quatrièmement, sur le plan opérationnel, la CCB est gérée par les agriculteurs et ceux-ci doivent avoir la possibilité de décider de son avenir.
    Depuis la création du GATT en 1984, nous avons toujours appuyé le guichet de vente unique et nous avons aussi appuyé les modifications apportées à la CCB pour lui permettre de mieux répondre à l'évolution des besoins des agriculteurs.
    Si nous réclamons aujourd'hui un plébiscite, ce n'est pas parce que nous sommes pour ou contre le guichet de vente unique, c'est uniquement parce que c'est aux agriculteurs qu'il appartient de prendre cette décision. Il est crucial que les agriculteurs et le gouvernement prennent le temps de bien réfléchir aux conséquences de toute décision unilatérale. C'est l'avenir qui est important dans ce contexte.
    L'une des questions en jeu concerne le pouvoir des agriculteurs. La CCB est le seul organisme de commercialisation des céréales qui rend directement aux agriculteurs tout le produit de la vente des céréales. Aucune autre structure n'agit comme ça. Nous avons assisté au cours des années à la disparition des coopératives céréalières qui étaient les instruments de pouvoir des agriculteurs. Aujourd'hui, ce sont des entités commerciales amalgamées à de grandes sociétés, multinationales ou non, qui n'ont de comptes à rendre qu'à leurs actionnaires de Toronto.
    Il est vrai qu'il y a une concentration industrielle croissante dans notre pays. Le nombre de sociétés céréalières a beaucoup baissé ces dernières années, ce qui influe non seulement sur qui achète nos céréales mais aussi sur qui nous vend nos importations.
    La Commission canadienne du blé repose sur un principe de commercialisation en coopérative. On est pour ou on est contre, il n'y a pas de milieu. Dans un système coopératif, c'est la règle de la majorité qui prévaut, et c'est la même chose dans le secteur de la gestion de l'offre : les producteurs s'unissent pour obtenir un meilleur prix pour chacun d'entre eux.
    La disparition du guichet unique aura des conséquences sur notre commerce international. Nous avons déjà vu aux États-Unis un certain nombre de poursuites intentées contre nos ventes et, chaque fois, c'est la CCB qui a assumé les frais de notre défense. Si le guichet unique disparaît, elle ne sera plus là pour défendre tous les agriculteurs de l'Ouest canadien. Il n'y aura pas d'organisation unique pour assumer cette responsabilité. Il n'y aura aucune agence pour résister aux poursuites commerciales, et celles-ci seront inévitables, personne ne doit en douter. Nous avons vu comment ont agi les agriculteurs américains dans le passé. Nous avons vu comment la commission du blé du Dakota du Nord, entre autres, n'a pas hésité à exiger des droits compensatoires quand nous avons tenté d'intenter des poursuites antidumping ou de porter d'autres contestations commerciales devant le gouvernement des États-Unis.
    La troisième question concerne les transports. Il n'est certainement pas difficile d'imaginer que les sociétés de chemins de fer commenceront à contester leur obligation de transporter les céréales de l'Ouest canadien aux taux de fret actuel. Je m'attends à ce qu'elles essayent d'obtenir la parité avec les taux de fret américains, qui sont sensiblement supérieurs aux nôtres. Cela provoquerait inévitablement des réactions en chaîne dans notre secteur.
(1150)
    Un autre problème -- que nous avons déjà connu dans le passé -- est celui du service. Qui sera là pour se plaindre si le service des sociétés de chemins de fer se détériore? Autrefois, c'était la CCB qui s'en chargeait au nom des producteurs céréaliers de l'Ouest. Si le guichet unique disparaît et si la CCB n'est plus là pour défendre tous les agriculteurs, qui pourra contester le mauvais service des sociétés de chemins de fer?
    La perte du guichet unique remettra inévitablement en question l'avenir des services ferroviaires de courte distance dans l'Ouest canadien, tout comme la possibilité pour les producteurs d'utiliser le système des wagons de producteurs qui permettent à toutes fins pratiques d'échapper aux frais de manutention et aux frais imposés par les élévateurs à la plupart des producteurs.
    Une autre conséquence directe au Manitoba sera la remise en question de l'avenir du port de Churchill au tarif actuel, voire sa survie, avec toutes les conséquences sur l'emploi et l'économie.
    En ce qui concerne la marque de commerce Canada, je ne pense pas qu'il existe une seule autre organisation qui joue un rôle aussi important que la CCB pour les agriculteurs de l'Ouest pour la défense de la marque Canada pour leur blé et leur orge. Si le guichet unique disparaît, cette marque sera-t-elle protégée ou le blé et l'orge vendus par le Canada deviendront-ils simplement des produits de marque Cargill, Louis Dreyfus, Agricore United, etc.? Perdrons-nous la marque Canada? Cela aurait de graves conséquences sur notre marché international.
    La CCB perdra-t-elle son influence? Si les multinationales se chargent de la vente internationale de nos céréales, auront-elles besoin de la Commission? Assumeront-elles la responsabilité de la garantie de qualité entre l'acheteur et le vendeur? La CCB pourra-t-elle encore intervenir en cas de litige entre les producteurs et les multinationales?
    Qui financera l'Institut international du Canada pour le grain, outil important de recherche, de développement des marchés et de relations avec les acheteurs et clients internationaux?
    La Western Grains Research Foundation est un outil de recherche pour les agriculteurs de l'Ouest financé directement au moyen du système de paiement final de la Commission canadienne du blé. Tous les céréaliers de l'Ouest qui vendent par le truchement de la CCB la financent et elle joue un rôle inestimable par la recherche qu'elle effectue sur de nouveaux produits et de nouvelles lignées céréalières. Qui la financera à l'avenir?
    En conclusion, j'affirme que cette décision du gouvernement va créer de l'incertitude sur le marché international car on ne saura plus à l'étranger qui vendra les céréales canadiennes à l'avenir. Elle a déjà créé de l'incertitude dans le monde agricole à un moment où il n'en avait certainement pas besoin. Nous avons déjà assez de problèmes, notamment sur le plan des revenus. Nous n'avons pas besoin d'une nouvelle couche d'incertitude.
    Il ne peut y avoir de système de commercialisation double. Ça n'existe pas. Ou il y a un guichet unique, ou il y a un marché complètement libre. Il ne peut pas y avoir de système panaché.
    Le gouvernement se doit de respecter le droit des agriculteurs de choisir l'avenir de la Commission canadienne du blé. Ce ne sera pas un choix facile à faire car nous devrons tenir compte de toutes les questions que je viens de poser, et ce ne sont pas les seules.
    Il faut que les agriculteurs aient la possibilité de se faire entendre en répondant à une question claire et neutre sur l'avenir de la Commission canadienne du blé. Il n'y va pas seulement de l'avenir de la Commission mais aussi de l'avenir des exploitations familiales de l'Ouest canadien.
    Merci de votre attention.
    Merci, monsieur Rolfe.
    Cela met fin aux exposés et nous permet d'ouvrir la période des questions.
    Une petite question d'ordre pratique d'abord. Il y a un garde de sécurité à la porte qui est chargé de vous empêcher de sortir avant la fin. Non, ce n'est pas vrai. En fait, il est là pour nous rappeler que le président élu des États-Unis doit emprunter notre couloir pour des raisons de protocole.
    Si certains d'entre vous doivent sortir, vous pouvez utiliser la porte de derrière jusqu'à environ 12 h 20. On a déplacé le portemanteau et, qui sait, vous aurez peut-être un plus beau manteau en sortant que quand vous être entrés. Quoi qu'il en soit, empruntez cette porte et si vous devez sortir.
    Merci.
    Messieurs, nous sommes un peu en retard. Pouvons-nous limiter les tours à cinq minutes au lieu de sept? Très bien.
    M. Easter, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Il est un peu ironique que ce soit le président du Mexique qui soit dehors car, si c'était le président de Cuba, ce serait une personne plus démocratique que notre premier ministre sur cette question.
    Des voix : Non.
    Ce sont vos cinq minutes...
    Certes, mais c'est vrai.
    ... qui commencent à défiler.
    M. Van Tassel, c'est à vous que je veux m'adresser. Vous avez dit être déçu qu'on ne consacre pas assez de temps aux revenus agricoles. Vous avez raison. Nous le regrettons aussi mais nous avons pensé que nous n'avions pas le choix car la Commission canadienne du blé est un problème urgent à cause de la décision prise par le gouvernement. Celui-ci semble vraiment déterminé à faire perdre tout son pouvoir à cette institution de commercialisation qui protège l'agriculteur contre les multinationales céréalières, et il semble prêt à tout pour arriver à ses fins.
    Nous avons vu le bâillon imposé à certaines personnes. Nous avons vu les changements à la liste électorale. Mais, avant tout, il y a la Commission canadienne du blé.
    Il y a aussi un guichet de vente unique au Québec. S'ils sont prêts à abolir le guichet de vente unique dans l'Ouest, il ne fait aucun doute dans mon esprit qu'ils s'attaqueront ensuite à celui du Québec car, si les puissances économiques veulent nuire aux agriculteurs, il semble que le gouvernement soit de leur côté et non pas du côté des agriculteurs.
    Ma question portera donc sur la question des revenus agricoles, étant donné l'OMC et la nouvelle réalité qui est qu'il n'y aura pas d'accord et que toute la politique est axée sur le découplage du revenu agricole, en réalité. Que devons-nous faire si nous voulons que nos agriculteurs survivent? À mon avis, nous devons faire autant que ce que font les Américains, dollar pour dollar, sinon nos agriculteurs ne survivront pas et l'avantage ira aux Américains.
    Nous avons entendu d'excellents exposés de la Fédération canadienne de l'agriculture à ce sujet, et je tiens à remercier tous les témoins qui se sont présentés aujourd'hui. Cela dit, commencez avec cette question car, en dernière analyse, c'est le revenu de l'agriculteur qui compte. La Commission du blé aide à optimiser le rendement de l'agriculteur. Comment le gouvernement du Canada va-t-il donc de répondre aux Américains, dollar pour dollar?
(1155)
    Merci, M. Easter.
    C'est pour ça que nous avons fait notre exposé car nous considérons que la question numéro un, si nous voulons assurer la viabilité de l'exploitation familiale, c'est le revenu agricole.
    Ce que nous demandons dans l'immédiat, c'est un programme d'accompagnement avec la flexibilité provinciale de le renvoyer aux producteurs céréaliers si c'est nécessaire, pour que ça coûte moins cher de faire plus de choses. À plus longue échéance, nous voulons un programme qui tienne compte des besoins des producteurs de céréales et d'oléagineux. Comme je l'ai dit, il nous faut une certaine souplesse et, comme au Québec, nous pourrions fonctionner avec un certain programme. Nous pensons que ça coûterait beaucoup moins qu'au gouvernement fédéral.
    La manière dont ça marcherait est que, bien sûr, nous prendrions en considération le coût pour les producteurs de la loi sur l'agriculture des États-Unis ainsi que des programmes européens.
    Ma question suivante est adressée aux trois autres témoins.
    David, vous avez mentionné plusieurs domaines dans lesquels nous allons courir de grands risques si nous perdons la Commission canadienne du blé et vous avez conclu en disant qu'il ne peut pas y avoir de marché double. Certaines personnes et le gouvernement pensent manifestement le contraire. Moi, je ne le pense pas. Ou on a un guichet de vente unique, ou on a un marché libre, c'est aussi simple que ça. Certains s'imaginent cependant que la Commission du blé pourra survivre si l'on abolit le guichet de vente unique. L'un de vous trois pense-t-il la même chose?
    Non.
    Absolument pas.
    Non. Nous l'avons déjà dit publiquement. Si l'on se penche sur l'historique de l'agence de vente centrale et des Commissions du blé volontaires qui existaient auparavant, la nature humaine étant ce qu'elle est, les gens livreront à la Commission quand ils verront les prix baisser mais ils essaieront de vendre ailleurs quand ils les verront augmenter. Dans ce scénario, ça ne peut pas être une option viable.
    Quand ces agences ont fait faillite, au siècle dernier, les faillites ont été spectaculaires. À l'époque, c'étaient certaines des faillites les plus retentissantes du pays et les agriculteurs et tous les Canadiens ont couru demander aux gouvernements provinciaux et fédéral de payer les pots cassés.
    Merci, M. Easter.
    M. Van Tassel...
    Puis-je faire une remarque à ce sujet? C'est un peu Wal-Mart à l'envers. Vous savez, une grande société arrive et matraque les prix pour éliminer ses concurrents. Nous avons ici des oligopoles ou des entreprises qui peuvent choisir dans quels secteurs elles veulent faire concurrence et dans lesquels elles ne le veulent pas. Leur intérêt commun est de soustraire des produits à la Commission du blé, dans l'immédiat, pour pouvoir ensuite augmenter les prix et asphyxier la CCB. C'est ce qui se passe dans les secteurs concentrés, et c'est pourquoi les économistes ne les aiment pas.
(1200)
    Merci, Mme Holm.
    Pour revenir à ma question, M. Van Tassel, M. Easter parlait du contrôle ultime et du retour à un guichet unique. Si tel est le cas, pourquoi en avons-nous trois au Canada? Au lieu de réinventer le fil à couper le beurre au Québec, pourquoi ne vous joignez-vous pas tout simplement à la Commission canadienne du blé?
    Je sais pas comment fonctionnent les lois de la Commission du blé. Si c'est la loi dans l'Ouest canadien...
    Je parle de la Commission canadienne du blé.
    Peut-être bien mais nous avons examiné comment elle fonctionne et comment on fonctionne au Québec. C'est un guichet unique où tout passe par notre... nous n'achetons pas vraiment vraiment les céréales. Notre organisation les vend mais elles appartiennent aux agriculteurs.
    Pourquoi n'essayons-nous pas de nous joindre à la Commission du blé? Écoutez, pour tout vous dire, peut-être que Benoit peut vous répondre.
    Oui, c'est probablement plus ça.
    Nous savons que c'est impossible. Il est dit dans la Loi que c'est seulement pour quelques provinces mais...
    On y indique cependant que toute région peut être ajoutée.
    Merci.
    M. Bellavance, pour cinq minutes.

[Français]

    Monsieur le président, le Québec est une société distincte, même dans le secteur de l'agriculture, ce qui ne veut pas dire que cela ne fonctionne pas, évidemment.
    Monsieur Van Tassel, la comparaison que vous avez faite des priorités du gouvernement était intéressante. Une des priorités ou des promesses du gouvernement conservateur était de mettre en place un marché mixte pour les producteurs de l'Ouest. Une autre visait à remplacer le Programme canadien de stabilisation du revenu agricole, qui n'a jamais fonctionné pour vous, et ce, depuis cinq ans. Tant sous l'ancien gouvernement que sous le gouvernement actuel, vous n'avez jamais réussi à toucher les indemnités accordées en vertu de ce programme.
    Vous nous avez présenté aujourd'hui des solutions concrètes. Dès mon élection, des gens de chez vous sont venus me voir. Pourquoi ce gouvernement, qui se dit nouveau et est censé avoir des idées pour vous, consacre-t-il tous ses efforts à apporter des changements à la Commission canadienne du blé et semble-t-il vous oublier complètement?
    Nous sommes ici pour essayer de changer les choses, pour faire valoir auprès du gouvernement le besoin d'assurer la sécurité du revenu agricole. Au Québec, le PCSRA donne moins pour le grain que la gestion de l'offre donne pour le lait, par exemple, alors que les besoins sont grands pour les grains. En effet, pour les marges de référence décroissantes applicables au grain, le PCSRA ne fonctionne pas.
    La flexibilité provinciale, qui permet de cibler les secteurs où il y a des besoins, peut coûter beaucoup moins cher au gouvernement.
    On est ici aujourd'hui pour faire valoir les besoins criants des producteurs de grain.
    Combien de membres la Fédération des producteurs de cultures commerciales compte-t-elle au Québec?
    Au Québec, il y a 11 000 producteurs de céréales. On travaille aussi beaucoup avec l'Ontario, qui en compte environ 28 000.
    Ces gens ont-ils un droit de vote.
    Normalement, oui.
    Vous avez eu recours à des moyens de pression près de ma région, soit à Trois-Rivières, et un peu partout au Québec. Vous avez commencé à y déverser du grain. Jean-Yves m'a dit que vous en avez également déversé devant des édifices fédéraux.
    Avez-vous communiqué avec le gouvernement, après avoir utilisé ces moyens de pression qui sont un peu plus spectaculaires? Vous êtes au bout du rouleau: des gens de chez vous font faillite, ils doivent vendre leur machinerie et leurs terres; d'autres ne peuvent payer leur épicerie. Est-ce qu'un représentant du nouveau gouvernement a tenté de communiquer avec vous pour voir comment il pourrait vous aider?
    Nous avons rencontré M. Strahl après avoir fait le déversement, qui se poursuit, d'ailleurs. Les producteurs ne veulent pas déverser du grain, mais ils sont au bout du rouleau. C'est un moyen qu'ils prennent pour attirer l'attention, mais également pour montrer leur désespoir. Nous avons rencontré M. Strahl, le ministre de l'Agriculture et de l'Agroalimentaire. Nous avons présenté nos points de vue, mais je pense que rien n'en est ressorti.
    Benoit peut peut-être en parler davantage.
    Pour l'instant, aucune information n'indique que l'on pense mettre en place un programme s'adressant précisément au secteur des grains. On nous parle encore d'un programme général destiné à tous les producteurs, ce que les journaux confirment. C'est ce qu'on nous a dit au cours de la dernière rencontre.
    Le Farm Bill américain vise principalement le secteur des grains, alors qu'au Canada, on veut compléter ou soutenir l'ensemble des revenus de tous les producteurs, ce qui pose problème. Il y a quelque chose qui ne fonctionne pas dans cette stratégie, laquelle ne semble pas évoluer. On a l'impression de ne pas avancer.
(1205)
    Le ministre vous a dit carrément qu'il ne ferait rien pour vous.
    Non, ce n'est pas ce qu'il a dit. À l'heure actuelle, cette question n'est pas à l'ordre du jour de la rencontre des ministres provinciaux et fédéraux qui aura lieu les 13 et 14 novembre prochains.
    Le ministre sera ici le 31 octobre prochain. Vous pouvez être assurés que le Bloc québécois fera plus que transmettre votre message: il posera des questions précises sur cette question.
    Depuis cinq ans, il y a 11 000 producteurs au Québec qui n'ont pas accès au soutien du revenu. Qu'en est-il du moral de vos troupes? Comment les gens se sentent-ils, actuellement? Si vous en êtes rendus à déverser du grain, c'est qu'en fin de compte, il ne vaut plus rien pour vous.

[Traduction]

    Merci, M. Bellavance.
    Courte réponse.

[Français]

    On le voit au cours des réunions, le moral est très bas. Normalement, les producteurs seraient en train de récolter, à ce temps-ci de l'année. Pour qu'ils prennent ainsi le temps de montrer leur désespoir, il faut qu'il y ait un problème réel.
    L'endettement des fermes n'a jamais été aussi élevé. Le moral est au plus bas.

[Traduction]

    Merci, André.
    M. Gourde, vous avez cinq minutes.

[Français]

    J'ai beaucoup de questions et j'aimerais avoir des réponses courtes. Je m'adresse au panel du Québec.
     Au Québec, présentement, la commercialisation du grain est mixte: elle peut être collective ou individuelle. La commercialisation du blé destiné à la consommation humaine est collective, et celle des autres grains est individuelle.
    Est-ce exact?
    Oui. Le règlement s'applique uniquement au blé. La mise en marché collective ne s'applique qu'au blé.
    Autrement dit, les producteurs peuvent vendre tous les autres grains, que ce soit du maïs, de l'orge ou autre, à n'importe quel marchand au Québec ou n'importe où dans le monde.
    Actuellement, ces grains ne sont pas visés par le règlement.
    D'accord.
    Est-ce un choix sur lequel les producteurs ont voté au cours d'une assemblée annuelle de la Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec?
    Oui. Les consultations qui ont lieu au cours de l'assemblée annuelle de la fédération portaient exclusivement sur le blé, mais un référendum a lieu en marge de l'assemblée générale annuelle. Il a été tenu auprès de l'ensemble des producteurs de blé.
    Pour l'instant, les producteurs se sont uniquement prononcés sur le blé. C'est d'ailleurs pour cette raison que le dossier du blé a avancé. Quant aux autres grains, l'ensemble des producteurs ne semble pas vouloir prendre en charge leur mise en marché.
    D'accord.
    Je suis un ancien producteur de grains. La Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec protège-t-elle bien ses agriculteurs?
    Pourriez-vous répéter votre question?
    La Fédération des producteurs de cultures commerciales du Québec représente-t-elle bien ses agriculteurs?
    Plusieurs centaines de producteurs assistent aux assemblées générales annuelles de la fédération. Si on ne les représentait pas bien, ils seraient sortis assez vite de ces assemblées.
    Pour avoir fait partie de votre fédération, je peux dire que vous représentez bien vos producteurs.
    Pensez-vous que d'autres organisations de producteurs de grains pourraient faire la même chose dans d'autres provinces?
    Les producteurs de la région doivent vouloir aller de l'avant et disposer des outils réglementaires pour ce faire. La plupart des provinces ont une loi sur la mise en marché des produits agricoles et peuvent prendre des décrets sur la mise en marché. Certains ont des pouvoirs limités.
    Je sais que l'Ontario a le pouvoir de le faire, qu'elle a d'ailleurs utilisé pour apporter certains changements dans le secteur du blé. Les autres provinces peuvent également faire la même chose en fonction de leur loi habilitante.
    Ma prochaine question s'adresse à tout le panel.
    Les producteurs du Québec disposent d'un outil de travail flexible et efficace: la commercialisation mixte. Les provinces de l'Ouest ne pourraient-elles pas disposer du même outil?
    Une fois que la majorité a décidé de prendre en charge sa mise en marché, les autres ne peuvent plus faire ce qu'ils veulent. Quand la profession s'est exprimée de façon majoritaire sur la prise en charge d'un produit, il n'y a plus de flexibilité.
    Je peux faire un lien avec la Commission canadienne du blé, qui, si je comprends bien, prend en charge seulement le blé et l'orge. On aurait pu le faire avec les autres grains, mais on s'est limité à ces deux denrées.
(1210)
    Le système québécois fonctionne-t-il très bien présentement?
    Oui, il fonctionne très bien. Nous améliorons beaucoup le pouvoir de négociation des producteurs. Ce n'est jamais parfait. Nous devons composer avec une très grande concentration des acheteurs, et pour ce faire, nous devons améliorer ces outils. Nos producteurs sont convaincus que ces outils leur permettent d'obtenir à la fois un prix équitable pour le blé et d'autres denrées, comme le porc, et de bonnes conditions de vente.
    Les producteurs du Québec sont prêts à évoluer.

[Traduction]

    M. Gourde, M. Wells souhaite également vous répondre.
    Merci, monsieur le président.
     Si je comprends bien votre question ou votre proposition, vous penchez vers des agences de commercialisation collective gérées au palier provincial, ce qui débouche inévitablement sur un nombre croissant de vendeurs. Au lieu de n'avoir qu'un seul vendeur, disons dans la région de la CCB, vous pourriez en avoir trois ou quatre en incluant la Colombie-Britannique et Peacer River. Il y en aurait un au Manitoba, un en Saskatchewan, un autre en Alberta et un autre encore à Peacer River et en Colombie-Britannique. En fin de compte, vous auriez cassé le marché en remplaçant un vendeur unique par quatre vendeurs se faisant concurrence.
    Je suppose que les créateurs de la Commission du blé et les agriculteurs qui l'avaient réclamée à l'origine avaient envisagé cette solution et conclu qu'elle ne serait pas aussi bonne qu'avoir une seule région pour tout l'Ouest canadien.
    M. Gourde, une dernière question.

[Français]

    Depuis que la Commission canadienne du blé a été créée, dans les années 1930, les volumes, les besoins et les marchés ont changé. L'agriculture canadienne a également évolué.
    La commission devrait-elle apporter des changements afin d'améliorer le revenu des producteurs canadiens, ne serait-ce que pour commercialiser de façon plus adéquate les différentes sortes de grains?

[Traduction]

    Vous vouliez une précision ou...
    Non, je ne savais pas à qui était posée la question. Si vous me permettez de répondre, je ne pense pas que les conditions aient tellement changé. Nous produisons tellement de céréales dans l'Ouest que la majeure partie doit être exportée. C'était le cas au début des années 1900 et dans les années 1920. À l'époque, une bonne partie de notre production partait en Grande-Bretagne. Aujourd'hui, environ 80 pour cent de nos grains doivent encore être vendus à l'étranger. C'est une très grande différence avec la situation au Québec ou en Ontario. Nous devons tellement exporter.
     Vraiment, je ne pense pas que les conditions aient changé. Il y a toujours en face des agriculteurs quatre ou cinq grosses multinationales qui contrôlent le secteur. Ça n'a pas changé depuis 1900, depuis la création de la Commission du blé.
    Merci, M. Gourde.
    M. Atamanenko, vous avez cinq minutes.
    L'une des choses dont on n'a pas beaucoup parlé durant ces audiences est la valeur ajoutée par la transformation. On y a fait allusion et j'ai le sentiment que nous pensons qu'il doit y avoir une certaine flexibilité et que le système doit être modifié pour ajouter plus de valeur par la transformation.
     Je vais mentionner plusieurs faits et vous demander d'y réagir. J'essaierai d'être aussi bref que possible.
    Si je comprends bien, il y a aujourd'hui beaucoup plus de valeur ajoutée par la transformation du blé et de l'orge au Canada. Ces dernières années, le marché intérieur est devenu le plus important. En 2001-2002, environ 2 boisseaux sur 10 étaient transformés chez nous, contre 1 sur 10 il y a 10 ans. La transformation du blé canadien et du blé durum dans nos minoteries a augmenté de 31 pour cent. Autrement dit, la capacité est passée de 7 700 tonnes par jour à environ 10 300 tonnes.
    Selon Milling & Baking News, une publication internationale de renom, la comparaison de la production de farine entre les principaux pays producteurs depuis 1990 montre que c'est le Canada qui a enregistré la plus forte croissance, avant l'Union européenne, les États-Unis, l'Argentine et l'Australie. Environ 32 pour cent de ce broyage se fait dans les provinces de l'Ouest, alors que c'est 15 pour cent dans l'Ouest américain.
    Trois nouvelles minoteries ont été construites dans l'Ouest canadien en cinq ans. La quantité de blé broyé par habitant est plus élevée au Canada qu'aux États-Unis. De nouvelles minoteries sont en préparation ou en construction, et une vient apparemment d'entrer en production à Chillliwack.
    Ce que me disent ces informations, c'est que le secteur de la transformation à valeur ajoutée est florissant et que la Commission du blé ne l'entrave pas du tout. De fait, par rapport à nos concurrents, notre situation est excellente.
    J'aimerais savoir comment vous réagissez à ces informations.
(1215)
    Je vais commencer avec M. Rolfe.
     Il est vrai que le secteur de la transformation s'est beaucoup développé dans l'Ouest canadien. Toutefois, je pense qu'un des facteurs de limitation de sa croissance a été non pas la Commission canadienne du blé mais l'absence d'accord adéquat à l'OMC sur l'exportation des produits transformés du Canada. Il y a plusieurs choses que nous pourrions certainement produire chez nous mais nous n'avons pas réussi à négocier un accord qui encouragerait notre secteur de la transformation à ajouter encore plus de valeur.
    Les informations que j'ai recueillies lors de réunions m'indiquent qu'il y a plus de valeur ajoutée dans la région céréalière de l'Ouest canadien que dans le Midwest américain, par exemple. Comparativement, nous faisons mieux sur le plan de la valeur ajoutée.
    Je peux mentionner plusieurs programmes que la CCB a mis en oeuvre pour stimuler encore plus d'ajout de valeur par les entreprises canadiennes. Je n'ai pas vendu de céréales cette année mais j'en ai vendu l'an dernier, heureusement, et j'aurais donc peut-être droit à un bulletin de vote pour les élections de cette année à la CCB.
    Mon grain me rapporte une prime de 3 $ la tonne parce qu'il est broyé au Canada, en Saskatchewan. Et ce, grâce à un programme mis en place par la Commission du blé. C'est un avantage direct pour moi et ça m'incite à ajouter de la valeur.
    De même, pour le producteur qui est vraiment intéressé, la CCB a mis en oeuvre un programme d'échange de stocks qui est sans égal pour aider les nouvelles coopératives ou entreprises. Ce que signifie ce programme, c'est qu'un agriculteur de Peace River, par exemple, peut ne pas y livrer ses propres céréales. La minoterie achète et broie des céréales locales mais, sur le papier, on dira que ce sont les miennes qui lui ont été livrées. C'est un incitatif extraordinaire pour moi à acheter une action dans cette entreprise.
    Je suis d'accord avec les deux intervenants précédents. Pour gagner du temps, je laisserai la parole à mes collègues du Québec.
    Je dois dire cependant que j'ai reçu des lettres de producteurs indiquant qu'ils souhaitent que d'autres céréales soient placées sous l'égide de la Commission canadienne du blé. Par exemple, selon eux, les prix des petits pois et du canola sont très bas par rapport à ceux qu'ils obtiendraient sur un marché réglementé.
    Quelqu'un peut-il répondre à ca?
    Oui. En ce qui concerne le blé, au Québec, nous essayons d'avoir une certaine qualité pour le marché de la valeur ajoutée. Nous essayons d'obtenir le maximum pour le producteur.
    Un autre facteur est que nous sommes proches de la frontière américaine. Je sais que nous sommes censés parler de la CCB mais je veux parler aussi du revenu. Nous allons ouvrir une usine d'éthanol mais l'agriculteur n'obtiendra pas plus pour son maïs à cause de la proximité du marché américain. L'acheteur peut aussi bien acheter du maïs américain. Quand on est plus éloigné, il faut ajouter les frais de transport. Quand on est proche de la frontière américaine, la loi américaine sur l'agriculture maintient les prix à la baisse, même si nous ne faisons pas autant d'ajout de valeur que nous le voudrions.
    Voulez-vous faire une dernière remarque, Stewart?
    Oui, en réponse à la dernière question. Le comité aurait peut-être intérêt à inviter la Canadian National Millers Association. Elle figure peut-être déjà sur votre liste.
    Nous en prenons note. Merci.
    Mesdames et Messieurs, je vous remercie. Je suis désolé de devoir faire vite, nous avons des contraintes incontournables.
    Nous allons entamer une deuxième heure d'audiences et j'invite les nouveaux témoins à prendre place le plus vite possible.
    Je suspends brièvement la séance puis nous reprendrons.
(1220)
    Nous reprenons nos travaux.
    Mesdames et Messieurs, je vous remercie de votre présence. Comme vous étiez ici, vous avez pu constater que nous avons pris un peu de retard. Je vais donc vous en tenir rigoureusement à 10 minutes par personne. Je vous souhaite la bienvenue.
    Jeff et Doug, vous avez 10 minutes chacun pour faire votre exposé.
    Merci de nous avoir invités devant le comité, monsieur le président. Je suis très heureux d'être ici.
    Je voudrais d'abord faire quelques remarques. Je suis un producteur de céréales et d'oléagineux d'Olds, en Alberta. Je suis aussi un agriculteur-administrateur élu d'Agricore United. Nous sommes très fiers qu'Agricore soit une société gérée par des agriculteurs avec un conseil élu d'agriculteurs. Nos membres agriculteurs nous donnent beaucoup de réactions sur les politiques gouvernementales et ont des opinions très fermes sur la manière dont le secteur céréalier du Canada devrait être géré. Je suis donc très fier d'être un administrateur d'Agricore mais je m'adresse à vous en tant que président de la Western Barley Growers Association.
    J'aimerais tout d'abord vous donner un bref aperçu de la production d'orge, de la commercialisation, de ce qui ne marche pas actuellement et des avantages que retireront à la fois le producteur et l'utilisateur final une fois qu'il y aura un système de choix pour la vente.
    Pour tirer profit de son pouvoir, un monopole doit contrôler l'offre. Pour l'orge et le blé, ce n'est manifestement pas le cas et c'est pourquoi la Commission canadienne du blé ne rend pas service au secteur d'ajout de valeur.
     La production d'orge est destinée à deux utilisations : l'alimentation du bétail et la production de malt. Sur toute l'orge cultivée dans les Prairies -- en moyenne, 12 millions d'acres --, 75 pour cent est ensemencée comme variété de brasserie mais seulement 25 pour cent de cette quantité est sélectionnée pour fabriquer du malt. Sur toute la production d'orge, qui se situe entre 11 et 13 millions de tonnes, 80 pour cent sert à l'alimentation d'animaux -- boeuf ou porc.
    Les choix de vente qui s'offrent aux producteurs d'orge de brasserie sont limités à la Commission canadienne du blé. En ce qui concerne les producteurs d'orge pour le bétail, nous pouvons utiliser le marché libre ou le système intérieur ou vendre à la Commission canadienne du blé pour l'exportation.
    Comme je l'ai dit, 75 pour cent de toute l'orge cultivée est une variété de brasserie. Pourquoi? Dans les programmes d'élevage actuels, on préfère l'orge de brasserie à l'orge fourragère car on estime qu'elle a plus de valeur. Certains élevages de bétail utilisent de l'orge fourragère, mais peu. Certaines quantités d'orge fourragère sont utilisées pour nourrir des porcs, notamment comme aliment à faible teneur en phytate.
    À l'heure actuelle, les éleveurs de boeuf ne payent pas d'incitatifs pour les protéines ou le degré de sécheresse quand il s'agit d'orge. S'ils sont situés assez près du parc d'engraissement, ils paient une prime pour la rondeur du grain, qu'ils apprécient. Voilà pourquoi la plupart des variétés d'orge de brasserie donnent actuellement un grain très rond. C'est ce que souhaitent les éleveurs.
    Pour l'orge, la CCB est généralement considérée comme le marché de dernier ressort. La CCB n'est pas active dans l'exportation d'orge fourragère car les marchés mondiaux sont approvisionnés par une production à moindre coût de l'ex-Union soviétique et d'autres pays. Les producteurs canadiens sont forcés de vendre leur orge de brasserie par le truchement de la CCB, ce qui a pour effet de masquer les signaux du marché. Ce n'est pas seulement frustrant pour les producteurs, c'est aussi regrettable pour les utilisateurs finaux. Il n'y a pas de transparence dans la commercialisation d'orge de brasserie par le truchement de la CCB, ce qui entraîne un manque d'information et de signaux de prix, ainsi qu'une réduction des possibilités de commercialisation pour les producteurs et les malteurs.
    Ceci ressort à l'évidence de l'absence totale d'investissements dans l'infrastructure d'ajout de valeur dans l'Ouest canadien. Deux malteries ont récemment été construites aux États-Unis plutôt qu'ici même, où l'orge est cultivée. Le secteur de la malterie s'est mondialisé et le secteur de la brasserie vient de commencer à faire de même. Les décisions d'investissement sont prises sur une base non pas régionale mais mondiale et, dans ce contexte, le Canada n'est pas considéré comme un pays d'investissement attrayant.
    Le secteur canadien de la malterie s'est presque totalement effondré à l'automne de 2003. À cause de la sécheresse dans l'Ouest, la production d'orge a été sérieusement limitée. Des pics de prix et la possibilité pour les producteurs de vendre à des prix records aux éleveurs de bétail ont pratiquement éliminé toute l'offre pour les malteries. Du fait des restrictions imposées par la Commission canadienne du blé, les malteurs n'ont pas pu obtenir les quantités dont ils avaient besoin car ils ne pouvaient pas offrir un prix suffisant pour faire concurrence au secteur de l'élevage. L'absence de réponse immédiate de la CCB a fait s'effondrer l'offre d'orge de brasserie.
    On cultive pourtant de l'orge de qualité, nous le savons tous. Toutefois, les producteurs vendent leurs orge de brasserie de qualité comme orge fourragère parce que c'est plus rentable. Cela fait que des quantités énormes d'orge ont dû être importées pour permettre au secteur de la brasserie de respecter ses engagements envers ses clients.
    Il est clair que le système de la Commission canadienne du blé est très contraignant pour notre secteur à valeur ajoutée de la malterie. Nos malteurs affirment que le problème n'est pas le prix de l'orge de brasserie. Ils sont prêts à payer plus pour obtenir de l'orge de brasserie ayant les qualités voulues mais le fait qu'ils ne puissent pas passer de contrats directement avec les producteurs limite leur aptitude à identifier les variétés dont ils ont besoin. Ils pourraient offrir des prix incitatifs selon les aptitudes agronomiques des producteurs, prix qui pourraient en bout de ligne être reversés aux producteurs parce qu'ils fourniraient le produit que demande l'utilisateur final.
(1225)
    L'obtention d'un prix collectif par la Commission canadienne du blé et le temps exigé pour augmenter les prix aux producteurs constitue une entrave pour l'orge de brasserie. Par conséquent, les brasseurs canadiens utilisent du malt provenant de l'extérieur de l'Amérique du Nord pour produire leur bière destinée au marché intérieur et à l'exportation. Le pouvoir que détient la CCB, conjugué à son droit de refuser les permis d'exportation sans droit de rachat, entrave également la circulation de l'orge, de brasserie ou fourragère, du Canada vers les producteurs de rye des États-Unis.
    Sur le marché de l'orge fourragère, il y a des restrictions quand la CCB n'a pas de programme d'exportation. L'orge est cultivée à moindre coût dans les pays étrangers et ceux-ci peuvent l'exporter plus facilement vers des pays qui étaient autrefois nos clients. Il n'existe aucun acheteur d'orge payant plus cher pour la qualité. La CCB a toujours été un acheteur de dernier ressort pour les producteurs, qui finissent par expédier l'orge de moindre qualité refusée par les éleveurs de bétail. Il faut ajouter à cela le refus des permis d'exportation sans droit de rachat pour permettre aux producteurs d'avoir accès au marché américain.
    On s'attend à ce que continue la baisse des exportations d'orge fourragère. Le Canada est entré dans une spirale descendante sur le marché mondial.
    On fait peu de recherches sur l'orge fourragère et, quand on compare la situation avec le maïs, on constate qu'il y a très peu de progrès. Ces deux céréales servent à l'alimentation du bétail mais on a obtenu des hausses de rendement spectaculaires avec le maïs pour répondre aux besoins des utilisateurs.
    L'expansion rapide du secteur des biocarburants a réduit dans une certaine mesure la crainte que nos éleveurs de bétail quittent le Canada pour aller s'établir près des régions de culture du maïs.
    Le marché de l'orge à usage industriel a également été limité par la CCB et son système de mise en marché. Une orge cireuse sans enveloppe a été mise au point pour l'extraction de beta-gluten dont les effets bénéfiques sur la santé sont connus, mais son rendement est inférieur à celui de l'orge vétue. Le rendement moindre de cette orge et le système de mise en marché de la CCB font que les producteurs ne sont aucunement incités à la cultiver. Par conséquent, cette possibilité d'ajout de valeur s'amoindrit continuellement et nous risquons de voir ce secteur potentiel quitter le Canada.
    Que peut-on faire et dans quels secteurs y a-t-il du potentiel? Les prix des céréales ne relevant pas de la CCB peuvent être fixés au Winnipeg Commodity Exchange ou dans le cadre de contrats négociés directement avec l'utilisateur final, par exemple un parc d'engraissement ou un courtier en denrées. Cela permet au producteur d'obtenir directement de l'argent liquide sans devoir attendre une vente collective ou de subir la période d'attente de 15 mois pour le paiement final.
    Les mécanismes de gestion du risque, comme les opérations de couverture ou les options de vente et d'achat, pourraient être bénéfiques au producteur et à l'utilisateur final.
     Un projet de bourse des denrées agricoles actuellement mis au point par la Western Barley Growers Association pour appuyer des partenariats de gestion du risque du secteur privé d'Agriculture Canada pourrait être extrêmement utile au secteur de l'orge. En assurant l'exécution des contrats et la transparence totale des prix, producteurs et utilisateurs bénéficieraient de la sécurité et de la possibilité d'utiliser les contrats pour garantir aux établissements financiers la liquidité des transactions.
    L'expansion du secteur des biocarburants au Canada risque aussi d'avoir un effet sur le marché de l'orge. Les cultivateurs ont fait une proposition dans le cadre de l'Initiative des marchés de biocarburants pour les producteurs afin de voir s'il serait possible d'ajouter de la valeur.
    Il est important de mettre au point des variétés d'orge destinées à la production d'éthanol et à l'élevage du bétail. Comme je l'ai dit, on fait très peu de recherches à ce sujet par rapport au maïs. Il s'agit là d'un domaine dans lequel on pourrait envisager une forte expansion dans un environnement de choix commercial.
    Les possibilités pour l'orge de brasserie sont limitées à cause des règlements de la Commission du blé. Tant que ces règlements n'auront pas été modifiés, notre possibilité de continuer à fournir de l'orge de brasserie sera sérieusement menacée.
    Cela débouche en dernière analyse sur la notion de choix commercial. Dans un tel système, l'exactitude, la symétrie et l'opportunité des informations auraient une incidence positive sur les facteurs suivants : mise au point de variétés d'orge fourragère et de brasserie pour mieux répondre aux besoins des utilisateurs; continuation de l'élaboration d'options de mise en marché avec le Winnipeg Commodity Exchange; amélioration des liens entre les malts, leurs brasseurs et leurs producteurs; création d'industries à valeur ajoutée avec possibilité de les localiser là où l'orge est cultivée; et émission de permis d'exportation sans droit de rachat pour permettre aux producteurs d'exploiter toutes leurs possibilités de commercialisation.
    Ces facteurs déboucheront sur l'expansion de la production d'orge, l'expansion des activités à valeur ajoutée et, en dernière analyse, la hausse des revenus des producteurs.
    En conclusion, les membres de la Western Barley Growers Association estiment qu'offrir un véritable choix de mise en marché permettra aux agriculteurs d'accroître leurs revenus et ajoutera de la valeur à l'industrie et à l'infrastructure de l'Ouest canadien. Cela permettra aussi aux producteurs de forger des relations avec les utilisateurs pour obtenir un produit possédant les caractéristiques qu'ils souhaitent et qu'ils sont prêts à payer.
    Une Commission canadienne du blé transformée, sans monopole, deviendra l'une de nombreuses options disponibles pour la mise en marché.
    Merci de votre attention.
(1230)
    Merci, M. Nielsen.
    M. Boyd, voulez-vous prendre la parole maintenant ou le ferez-vous avec Mme Husband?
    Non, je suis ici en mon nom personnel.
    Je m'appelle Boyd Charles, pas Charles Boyd. J'ai été invité à témoigner comme producteur de céréales biologiques. J'exploite en Saskatchewan une ferme de 10 000 acres de terres biologiques certifiées et j'ai beaucoup à dire sur la Commission du blé. Si j'ai tenu à témoigner, c'est d'abord pour vous dire comment la Commission du blé affecte la vente des céréales d'au moins un producteur biologique.
    Si j'ai renoncé à l'agriculture traditionnelle en 1999, c'est surtout pour pouvoir vendre ma propre production et ne plus dépendre de la Commission du blé. Depuis sept ou huit ans, je constate cependant que j'en dépends encore plus qu'avant.
    À l'exception d'une vente de grains de provende à un éleveur de poulets biologiques près de Winnipeg, je n'ai vendu aucun boisseau de céréales biologiques au Canada depuis 1999. Toute ma production est vendue en Europe, aux États-Unis ou au Japon. Je rachète chaque boisseau à la Commission canadienne du blé et je suis ici pour vous parler du système de rachat ridicule qui est imposé aux agriculteurs biologiques.
    En février, par exemple, j'ai racheté 462 tonnes de blé fourrager -- environ 15 000 boisseaux -- pour faire une expédition aux États-Unis. Mon contrat de rachat comportait un prix de 6,92 $ la tonne. Je n'ai obtenu le résultat final qu'à la fin de l'année céréalière et j'ai reçu l'autre jour par la poste une facture de 11 000 $, ce qui représente à peu près trois fois ce qu'il y avait dans le contrat d'origine. Je ne vois pas comment on peut gérer une entreprise quand on ne peut pas contrôler ses coûts. Je pourrais passer toute la journée à vous donner des exemples semblables sur les contrats de rachat.
    J'ai cultivé à contrat de l'orge de brasserie pour un malteur biologique du Missouri. Le produit a été accepté et je suis prêt à lui expédier 50 000 boisseaux. Les camions sont réservés, le contrat est signé et la seule chose qu'il me reste à faire est de racheter mon orge de brasserie à la CCB.
     J'ai téléphoné pour effectuer le rachat et je n'en ai pas cru mes oreilles. Ce jour-là, le rachat de l'orge de brasserie se transigeait à 2,65 $ le boisseau, ce qui signifiait que j'aurais dû envoyer à la CCB un chèque de l'ordre de 140 000 $. On m'a dit : « Pensez aux avantages ». Quand j'ai demandé ce qu'ils étaient, elle m'a répondu : « Ça vous ramènera à 56 $ la tonne ». Je n'aurais à payer que 1,20 $ le boisseau pour vendre mon orge à un malteur des États-Unis, après avoir trouvé moi-même le client et avoir tout fait moi-même.
    Ce qui me dégoûte le plus, c'est que la CCB ne pourrait même pas m'acheter des céréales si je les lui offrais. Je ne peux pas les transporter près de ses installations car je ne veux pas qu'elles soit contaminées. Les céréales biologiques doivent être expédiées dans un conteneur certifié. Donc, même si je lui offrais ma production, elle ne pourrait pas l'acheter, si j'en crois mon expérience passée. De toute façon, elle ne l'achèterait pas au prix auquel je voudrais la vendre.
(1235)
    Ce prix de 140 000 $ pour le rachat de mon orge n'est qu'une estimation. Je pourrais fort bien avoir une grosse surprise car je devrais attendre la fin de l'année céréalière, le 31 juillet de l'an prochain, pour que le prix de rachat réel soit fixé, puis octobre ou novembre pour recevoir une facture par la poste. Si c'est trois fois plus que la somme annoncée, comme ce fut le cas précédemment, la facture pourrait atteindre 400 000 $. Voyez-vous, on ne sait jamais sur quel pied danser.
    C'est comme si je me trouvais dans les années 1920 à Chicago et que j'exploitais un petit magasin de quartier et devais faire des paiements de protection à la mafia. Je suis un agriculteur de la Saskatchewan et, pour pouvoir exploiter ma ferme, je dois faire un paiement de protection -- vous pouvez appeler ça autrement -- à la Commission du blé. Je ne peux rien faire sans elle. C'est la seule comparaison que je peux faire.
    Elle n'a strictement rien à voir avec la vente de mes grains. Elle n'a rien à voir avec le transport de mes grains. Ce n'est pas elle qui a trouvé l'acheteur. J'ai dû payer toutes les dépenses mais je dois quand même lui verser un dollar le boisseau pour le privilège de lui vendre mes grains et ensuite les lui racheter. Si vous racontiez ça un Américain, il dirait que nous sommes tombés sur la tête.
    C'était la première chose que je voulais vous dire. Si vous ne pouvez faire qu'une seule chose, faites au moins que les agriculteurs biologiques ne soient pas sous sa coupe. Je ne connais aucun agriculteur biologique qui veuille être obligé de racheter ses produits à la CCB. En ce qui me concerne, en tout cas, j'aimerais pouvoir vendre mes céréales moi-même. Je négocie actuellement un contrat de vente de lin en Pologne, je vends un blé spécial au Japon, et je vends de l'orge de brasserie aux États-Unis -- et je n'ai besoin de l'aide de personne. Je veux simplement qu'on me débarrasse de cette bureaucratie, et surtout des rachats.
    L'autre chose dont je veux parler concerne le vote. Je ne connais aucun secteur dans lequel les membres n'ont pas un droit de vote égal. Je discutais en avion avec quelqu'un qui travaille chez Shoppers Drug Mart. La chaîne a été rachetée l'an dernier. L'acquéreur a acheté 52 pour cent de ses actions, ce qui veut dire qu'il a obtenu le contrôle de Shoppers Drug Mart puisqu'il avait la majorité des actions. Il a restructuré l'entreprise pour la rendre plus efficiente et a ensuite revendu toutes ses actions en gagnant beaucoup d'argent. Aujourd'hui, il n'en possède plus que 3 pour cent et n'a donc plus son mot à dire mais, quand il en détenait 52 pour cent, sa parole comptait pour beaucoup.
    Environ la moitié des producteurs de la CCB ne vendent pas de quantités suffisantes pour être des acteurs importants mais leur parole compte quand même autant que celle d'un agriculteur exploitant 10 000 acres. À mon avis, si l'on veut un système électoral équitable, il faut donner une voix par acre. Ainsi, le type qui exploite 10 000 acres et qui a beaucoup investi dans ses machines et ses terres aura au moins un peu plus de pouvoir que celui qui a son nom sur un carnet de permis mais n'a jamais vendu un seul boisseau. Il vous appartient de prendre une décision sur le droit de vote car 38 pour cent des gens n'ont jamais vendu un boisseau, et 50 pour cent -- si on les met tous ensemble -- en ont vendu environ 1 200. il est ridicule que des gens qui n'ont rien investi dans l'entreprise détiennent autant de pouvoir.
    Voilà mon point de vue.
    Merci de votre attention.
(1240)
    Merci, M. Charles. Veuillez m'excuser d'avoir interverti votre nom et votre prénom. C'est de l'ordre de « C'est du travail de fonctionnaire ».
    Je donne maintenant la parole à Mme Husband.
    Bonjour... ou plutôt, bon après-midi.
    Je suis heureuse que vous m'ayez invitée aujourd'hui car le gouvernement dit qu'il veut apporter des changements sérieux à la Commission du blé, pour les agriculteurs.
    Mon mari et moi-même exploitons en partenariat une ferme biologique du sud-ouest de la Saskatchewan. Nous exploitons depuis 39 ans sa ferme familiale, créée en 1900, et je voudrais vous parler un peu d'argent.
    J'ai lu récemment que les 85 milliards de dollars de PIB du Canada dépendent d'un approvisionnement adéquat en céréales. S'il y a suffisamment d'agriculteurs, l'approvisionnement sera adéquat, mais il se trouve que les enfants des agriculteurs de l'Ouest rejettent totalement l'agriculture. On ne peut pas gagner sa vie dans l'agriculture. Tout le monde sait que l'agriculture crée une richesse énorme mais, pour survivre, il faut que les agriculteurs puissent en obtenir une plus grande partie au lieu d'être des contribuables mendiants.
    Le législateur peut mettre immédiatement de l'argent dans les poches des agriculteurs en apportant immédiatement des changements à la Commission canadienne du blé. Avant de vous donner mes trois recommandations concernant l'amélioration du revenu net des agriculteurs, je vais vous donner quelques informations d'ordre général.
    Quand il a créé la CCB, le gouvernement lui a confié deux tâches distinctes. La plus connue est celle de la commercialisation régionale, qu'on désigne souvent par la partie II et la partie III -- l'organisation du marché -- de la Loi sur la Commission canadienne du blé. En vertu de la partie III, la CCB achète les céréales des agriculteurs qui les lui proposent. La partie III ne s'applique que dans une région, l'Ouest. Toutefois, l'organisation du marché n'est pas mon propos.
     La deuxième tâche de la CCB relève de la partie IV et concerne le système national de permis. Les permis sont valides dans tout le Canada, tout comme la Loi électorale du Canada s'applique à tout le Canada. Toutes les céréales destinées à une vente interprovinciale ou à l'exportation doivent faire l'objet d'un permis. Il n'y a aucune exception, comme Boyd a pu le constater, et seule la CCB peut délivrer des permis.
    Quand la partie IV a été ajoutée à la Loi, par une modification de 1947, il semble, selon des documents obtenus au titre de l'accès à l'information, que son objectif était d'instaurer une taxe nationale ou une taxe à l'exportation devant être payée au gouvernement, les coûts étant assumés par ce dernier.
    Chaque exportateur de n'importe quelle province est tenu de payer une somme décrite à l'alinéa 46 d) de la Loi. La somme est fondée sur les différences existant entre les prix du blé et des produits du blé à l'intérieur et à l'extérieur du Canada et, à cause de l'ALENA, la taxe à l'exportation est actuellement égale à zéro. Toutefois, il existe aussi une politique quasi inconnue de la Commission canadienne du blé qui a des conséquences différentes sur les agriculteurs des différentes provinces.
    Jean-Pierre vit au Québec et vend de l'orge fourragère aux États-Unis. Il obtient le permis d'exportation nécessaire de la CCB et expédie son orge au sud de la frontière. Jim, en Alberta, veut également vendre son orge et demande un permis d'exportation. La Commission le lui refuse. Sa politique est de rejeter toutes les demandes des régions désignées et Jim n'a aucune possibilité d'échapper à la CCB comme Jean-Pierre peut le faire. N'ayant aucun autre acheteur possible que la CCB, Jim peut décider de manger toutes ses céréales ou de les brûler. Finalement, il les vend à la Commission car il lui est impossible d'échapper à son monopole. Toutes les céréales vendues à la CCB deviennent des céréales de la Commission. Le droit de refus que détient celle-ci au titre de la partie IV, qui concerne l'octroi de permis, lui assure le monopole de l'achat au titre de la partie III.
    Je trouve toujours révoltant que la CCB fonde son pouvoir de monopole sur le rejet des demandes de permis. Si les administrateurs élus de la Commission, qui sont en grande majorité des gens de l'Ouest, voulaient faire les malins et décidaient de rejeter toutes les demandes d'exportation du Québec et de l'Ontario, la Commission pourrait vendre les céréales de l'Ouest sur les marchés établis des producteurs de l'Est et les députés feraient alors tous un peu plus attention au système national de permis et au rejet des demandes.
    La Loi sur la Commission canadienne du blé n'est pas une loi sur la prohibition. Je pourrais dire que même si les permis de la partie IV devraient être délivrés à tous les Canadiens de manière égale, ils ne le sont pas. En coulisses, les représentants de la Commission canadienne du blé, tenus par ceux qui dictent les politiques, continuent de nous refuser les permis, simplement parce que nous vivons dans l'Ouest, ce qui est discriminatoire.
    La Loi sur la Commission canadienne du blé n'est pas une loi sur la prohibition. Les tribunaux ne cessent de répéter que c'est une loi sur le commerce. Ils disent aussi que, selon la Constitution, l'exploitation d'une ferme est une activité agricole. Cela signifie que toutes les sociétés céréalières et les sociétés ferroviaires, décrites dans la Loi comme des « entreprises... pour l'avantage général du Canada » relèvent clairement des pouvoirs relatifs au commerce et font exactement ce que dit la Commission. Les agriculteurs ayant des céréales de producteur ne relèvent pas du pouvoir de la CCB en matière de commerce mais sont quand même assujettis au pouvoir de taxation de la partie IV.
    Je parie que vous ne saviez pas que la Commission du blé accorde en douceur des permis d'exportation à différentes catégories de demandeurs ayant réussi à négocier avec elle pour échapper à son monopole.
(1245)
    Cette politique interne méconnue permet également aux groupes qui suivent -- ce sont ceux que je connais -- d'échapper au système de vente collective de la Commission : 1) tout le blé et l'orge cultivés en dehors de la région désignée; 2) le blé et l'orge de semences sélectionnées cultivés dans la région désignée; 3) les variétés de blé spécialisées appelées couramment épeautre, kamut et engrain, cultivées dans la région désignée; 4) le blé et l'orge transformés cultivés dans la région désignée et servant à l'alimentation du bétail en vertu de l'Entente sur les aliments du bétail industriels d'exportation, ce qui représente des millions de boisseaux; 5) le blé et l'orge cultivés dans la région de Creston-Wynndel, pour laquelle des permis avaient été accordés avant 1998, lorsque cette région faisait encore partie de la région désignée; et 6) l'orge éthiopienne.
    Mon mari et moi avons le privilège d'avoir des permis d'exportation de la CCB pour notre orge éthiopienne, ce qui nous permet d'échapper au système de vente groupée de la Commission. Nous venons de faire une autre vente cet automne sans passer par le rachat et nous avons reçu plus de 8 $ le boisseau. Nous produisons une autre variété d'orge, non enregistrée, et la Commission ne délivre pas de permis d'exportation pour elle.
    Sous le gouvernement précédent, des agriculteurs de l'Ouest ont été poursuivis et emprisonnés pour avoir vendu sans permis d'exportation. Il s'agissait d'agriculteurs vivant dans la région désignée où les permis d'exportation sont automatiquement refusés. Le rejet des demandes de permis est la politique qu'utilise la CCB pour avoir son monopole dans l'Ouest canadien.
    Voici mes recommandations.
    Premièrement, le gouverneur en conseil peut et doit ordonner à la Commission du blé de délivrer des permis d'exportation aux agriculteurs de l'Ouest tout comme elle en délivre aux agriculteurs de l'Est. La CCB continuera d'acheter et de regrouper les céréales des agriculteurs qui la choisiront comme agent de mise en marché, comme actuellement. Comme il ne serait pas nécessaire de modifier la Loi, l'abolition du monopole pourrait être immédiate pour ceux qui souhaitent y échapper, comme nous. Cette liberté a été accordée à de nombreux autres demandeurs dans les six catégories que j'ai mentionnées. Tous ont pu échapper à la Commission parce qu'ils le voulaient et que la Commission a accepté de revoir sa politique dans chaque cas. Les personnes qui demandent la tenue d'un plébiscite dans l'Ouest sur qui il pourrait obtenir des permis d'exportation nationaux sont aussi crédibles que celles qui avaient demandé un plébiscite en 1929 pour savoir si les femmes auraient ou non le droit de vote.
    Deuxièmement, le gouvernement doit ordonner à la Commission du blé de respecter sa Loi et de cesser de prélever de l'argent dans les comptes groupés pour payer le système national de permis. Des millions de dollars ont été prélevés dans les comptes groupés de l'Ouest pour payer les frais de ce système, bien que ces frais soient censés être payés par le gouvernement fédéral.
    Troisièmement, le gouvernement fédéral peut et doit rembourser l'argent prélevé dans les comptes groupés pour payer tous les frais du système national de permis de la partie IV de la Loi sur la Commission canadienne du blé.
    C'est ça que payent les agriculteurs de l'Ouest : les frais de délivrance des permis provinciaux, interprovinciaux et d'exportation; tous les frais administratifs reliés à l'octroi et au refus des permis; tous les frais administratifs des grandes minoteries du Canada en vertu de l'Entente sur les aliments du bétail industriels d'exportation; tous les frais de conformité avec le système de permis, notamment les frais de collaboration avec les Douanes et les frais d'inspection; et tous les frais des réunions externes et internes et les frais de correspondance reliés à la partie IV et aux autres parties.
    Le recouvrement des frais, même pour une période de 10 ans, mettra des fonds dans les comptes groupés. Je réalise que l'Ontario et le Québec ont la vie belle car ils ne payent pas ces frais mais je vous demande votre appui pour transférer les frais du système de permis de l'Ouest au gouvernement fédéral. La Commission du blé aurait d'ailleurs dû envoyer une facture à ce sujet au gouvernement mais elle semble avoir pris l'habitude de faire comme bon lui semble avec les comptes groupés de l'Ouest. Sous le regard du ministre responsable de la CCB dans les gouvernements libéraux précédents, la Commission a pris de l'argent dans les comptes groupés de l'Ouest pour payer les dîners de collecte de fonds du parti libéral auxquels ont participé ses administrateurs et son personnel à raison de 400 $ l'assiette.
    À l'époque des gouvernements et des institutions patriarcales, personne ne réagissait à l'amenuisement des comptes de l'Ouest. J'attends aujourd'hui avec intérêt que le gouvernement actuel respecte l'engagement qu'il a pris envers les agriculteurs de l'Ouest de leur offrir le choix en matière de mise en marché. Les gouvernements qui ont la sagesse de faire confiance à leur peuple verront leur nation prospérer.
    Merci.
(1250)
    Merci, Mme Husband.
    Nous passons maintenant à Cherilyn Jolly-Nagel
    Merci.
    Je vous remercie d'avoir invité les Wheat Growers à comparaître aujourd'hui. Je m'appelle Cherilyn Jolly-Nagel et je suis présidente de l'Association. Je ne vais pas prendre de temps pour vous donner mes qualifications, la seule qui compte vraiment est que je suis une productrice.
    La Western Canadian Wheat Growers Association est une organisation de membres volontaires du secteur de l'agriculture de toutes les Prairies. Durant ses 36 années d'existence, l'Association a toujours défendu l'idée que les agriculteurs doivent avoir la liberté de décider comment ils veulent vendre leurs céréales. Nous souhaitons une CCB à participation volontaire, dans laquelle chaque agriculteur sera libre de choisir de vendre ses céréales individuellement ou en coopération avec les autres. Les agriculteurs de l'Ontario bénéficient du choix commercial depuis 2003 et en engrangent les profits. L'an dernier, ils ont cultivé une quantité record de blé.
    Notre Association souhaite l'harmonisation à l'échelle de tout le Canada des règlements sur la commercialisation des céréales. À notre avis, il est injuste que l'agriculteur ontarien puisse vendre son blé et son orge à qui bon lui semble, y compris pour l'exportation, alors que l'agriculteur de l'Ouest qui tente de faire la même chose est traité comme un criminel méritant la prison. Nous sommes très intéressés par les possibilités qu'offrira le choix commercial. Ce choix permettra aux agriculteurs d'accroître leurs revenus. Dans mon cas personnel, il me permettra de satisfaire des besoins de liquidités et d'entreposage.
    Durant le débat sur la Commission canadienne du blé, on a beaucoup parlé de tenir un plébiscite auprès des producteurs. Je comprends que cette idée puisse avoir un certain attrait politique mais j'estime qu'il est important de comprendre ce qui est en jeu. Hier, certains ministres ont déclaré que le gouvernement se doit de donner la parole aux agriculteurs, ce qui témoigne d'un certain sens politique. Toutefois, si l'on accepte l'argument que c'est la majorité qui doit décider de la manière dont moi, personnellement, je vendrai mes céréales, cela veut dire que l'agriculteur individuel ne peut jouir du même droit à la propriété que pratiquement tous les autres Canadiens.
    Les Wheat Growers estiment que chaque Canadien doit avoir le droit de posséder, d'utiliser et de vendre ce qui lui appartient, notamment si c'est le fruit de son talent et de son travail. La plupart des Canadiens peuvent vendre leurs biens à qui ils veulent. Dans mon cas, cependant, lorsqu'il s'agit de mon bien -- mes céréales -- beaucoup de politiciens semblent s'imaginer qu'ils savent mieux que moi ce qui me convient, ou semblent croire que mes voisins sauront décider collectivement ce qui est dans mon intérêt.
    Personne ici, ni personne dans le monde des politiques agricoles, ne peut connaître mon exploitation agricole mieux que mon mari et moi. Certes, il nous arrive de faire des erreurs. Nous avons parfois vendu notre canola et nos petits pois au mauvais moment. Toutefois, comme nous avons beaucoup investi dans notre exploitation, nous sommes tout à fait prêts à assumer la responsabilité de ces décisions commerciales, avec le risque et le profit qui les accompagnent.
    Cela dit, nous respectons complètement les agriculteurs qui veulent vendre leurs céréales en coopérative. Nous avons tous des compétences agricoles différentes. Certains d'entre nous sont d'excellents producteurs, d'autres, d'excellents commerçants -- tout comme il y a de bons soudeurs, chauffeurs de camion ou comptables. Ce qui me rend perplexe, c'est que les bons producteurs ont actuellement le droit d'utiliser leur talent au maximum de leur avantage alors que les bons commerçants sont privés de ce droit.
    Certains politiciens sont de bons orateurs, d'autres, non. cela veut-il dire que seuls les bons orateurs ont quelque chose à dire? J'espère que non. Ne serait-il pas préférable de laisser chacun utiliser ses compétences personnelles dans son propre intérêt plutôt que de laisser les autres décider quelles compétences chacun pourra ou non utiliser? Personnellement, je rejette l'attitude paternaliste de la Commission du blé et de ses partisans qui veulent en quelque sorte me renvoyer dans mon coin en me disant de ne pas m'inquiéter car elles font du bon travail pour moi.
    Une dernière remarque au sujet d'un éventuel plébiscite. D'aucuns affirment que la majorité des agriculteurs appuie actuellement la Commission canadienne du blé. Si l'on en croit une enquête récemment commandée par la Commission elle-même, c'est un mythe. En mai, elle a publié les résultats d'une enquête auprès de ses détenteurs permanents de carnets. Selon cette enquête, 54 pour cent des agriculteurs actifs ne sont plus favorables au monopole pour le blé, et 64 pour cent, pour l'orge.
(1255)
    Considérant ces résultats, posez-vous la question suivante : pourquoi les Wheat Growers sont-ils hostiles à un plébiscite? Tout simplement, pour une question de principe.
    Certes, je pense que nous aurions de bonnes chances de gagner -- si c'est le bon verbe -- un tel plébiscite si la liste électorale et la question sont crédibles Toutefois, comme je l'ai déjà dit, nous croyons que le droit de vendre son bien devrait être un droit individuel fondamental au Canada et non pas un droit dépendant de la majorité. À notre avis, tous les agriculteurs devraient avoir le droit de vendre leurs céréales à qui ils veulent, que ce soit eux-mêmes ou par le truchement de la Commission canadienne du blé.
    Aux partisans d'un plébiscite, je pose la question suivante : quelle devra être la majorité? Si vous pensez qu'il est insuffisant que moi-même vous dise individuellement que je veux pouvoir vendre mes céréales comme je l'entends, combien devrons-nous être pour décider? Si le résultat est partagé à 49 pour cent contre 51 pour cent, allez-vous obliger les 49 pour cent à continuer de vendre à la Commission du blé?
     Je vous assure qu'il ne s'agit pas là seulement d'un argument de liberté économique, même si nous attachons beaucoup de prix à ce principe. Nous avons aussi la conviction qu'offrir la liberté commerciale débouchera sur une hausse importante du revenu agricole et de l'esprit d'entreprise dans les Prairies.
    On vous a dit plus tôt que certains agriculteurs estiment que la CCB leur apporte une certaine valeur, ce que je respecte. S'ils estiment que la Commission ajoute de la valeur à leur exploitation, qu'ils en profitent. S'il est vrai que personne ne connaît mon exploitation mieux que moi, personne ne connaît la leur mieux qu'eux.
    Il se trouve cependant que beaucoup d'entre-nous ne pensons pas que la Commission canadienne du blé ajoute de la valeur à nos fermes. Au contraire, j'ai la conviction qu'elle nous coûte des dizaines de milliers de dollars en revenus perdus. Cela me fait penser à cette publicité insipide d'une carte de crédit sauf que, cette fois, c'est la Commission canadienne du blé qui a sa main dans ma poche.
    Les Wheat Growers conviennent que la Commission canadienne du blé a offert plus d'options de prix et de paiement ces dernières années. Vous pouvez en remercier notre Association car c'est nous qui avions réclamé ces changements. Pendant des années, la CCB prétendait qu'offrir aux agriculteurs autre chose qu'un prix de groupe entraînerait sa destruction. De fait, c'était considéré comme l'un de trois principes fondamentaux. Vous savez quoi? La CCB a commencé à offrir des contrats avec prix à terme et elle ne s'est pas effondrée. Aujourd'hui, elle prétend que c'était son idée.
    Bien que beaucoup de nos membres se soient prévalus de ces contrats, ce qui est devenu évident à nos yeux, c'est que la CCB ne nous donne pas une base honnête. Comme vous le savez probablement, les cours mondiaux se sont rétablis ces derniers mois et il est très frustrant pour nous que la Commission n'en ait pas profité.
    Pour le blé d'hiver, par exemple, le contrat à prix fixe de la CCB aux élévateurs canadiens est actuellement de 1 dollar de plus par boisseau, soit environ 20 pour cent de moins que ce qui est offert aux élévateurs américains. Pour le blé de printemps, la différence est d'environ 50 ¢ par boisseau et, pour le blé durum, 70 ¢ par boisseau. J'ai fait un bref calcul et, pour cette année seulement, cela représente une perte de revenus d'environ 46 000 $ pour ma ferme. Cette somme est largement supérieure au paiement de soutien que nous aurions jamais pu recevoir au titre du PCSRA.
    Nous ne vous demandons pas de nous croire sur parole. Nous vous encourageons plutôt a faire enquête vous-mêmes sur ces différences de prix. À notre avis, la Commission canadienne du blé a beaucoup d'explications à donner. Si son PDG passait moins de temps à faire de la politique et plus à s'occuper de marketing, peut-être que ces différences de prix ne seraient pas aussi élevées.
    Permettez-moi d'être claire : nous ne demandons pas le choix commercial pour avoir accès au marché américain. Nous le demandons pour être sûrs d'avoir accès aux prix mondiaux. Avec le choix commercial, les agriculteurs de l'Ouest constateront qu'ils obtiennent des prix plus élevés pour leur blé et leur orge.
    Comme il ne me reste pas beaucoup de temps, je tiens à faire quelques dernières remarques.
    Tout d'abord, je trouve extrêmement regrettable que la CCB semble consacrer plus de temps à faire de la politique qu'à s'acquitter de son mandat. Son PDG est sans doute le plus coupable à ce sujet. Au lieu de se consacrer à son travail et d'obtenir des rendements maximum pour les agriculteurs, il semble plus intéressé à prononcer des discours politiques et à participer à des lignes ouvertes à la radio pour défendre son monopole.
    Comment réagiriez-vous si l'on prélevait une partie de votre salaire pour la donner à un parti politique ou à un député d'un autre parti que le vôtre? C'est ce qui m'arrive. Mes dollars servent à défendre le monopole. Je ne comprends pas pourquoi la Commission ressent le besoin d'essayer de me convaincre. Je ne peux aller nulle part ailleurs mais elle estime quand même qu'elle doit m'adresser de la publicité sur le monopole.
    Comme la Commission n'est pas assujettie à l'accès à l'information, nous n'avons aucune idée des informations qu'elle a pu partager avec certains groupes d'agriculteurs ni des autres activités politiques qu'elle mène peut-être.
(1300)
    S'il est vrai que nous insistons pour que la CCB soit assujettie aux dispositions de la Loi fédérale sur la responsabilité dans l'immédiat, nous recommandons aussi qu'elle n'y soit plus assujettie dès que toutes les garanties gouvernementales auront été éliminées et que les agriculteurs auront obtenu le choix commercial.
    Merci.
    Nous allons passer à la période des questions en conservant la règle de cinq minutes pour le premier tour, si vous êtes d'accord. Nous n'aurons pas beaucoup de temps car le Sénat a réservé cette salle pour l'élection d'un président.
    M. Boshcoff, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Afin de ne pas perdre de temps, je vais poser toutes mes questions et les témoins décideront eux-mêmes auxquelles ils veulent répondre.
    Hier soir, le projet de loi C-300 a connu une défaite écrasante à la Chambre des communes, les quatre partis ayant tous voté dans une certaine mesure contre son adoption, ce qui indique que le Parlement ne souhaite pas la destruction de la Commission du blé. Nous savons aussi que, lors de l'enquête de printemps auprès des agriculteurs, 88 pour cent ont dit que l'avenir de la Commission devrait être décidé par les agriculteurs eux-mêmes. Pourquoi le ministre tient-il donc à continuer d'agir unilatéralement, selon une procédure qui est à l'évidence antidémocratique?
    Un peu plus tôt -- je sais que vous étiez alors tous dans la salle -- quelqu'un a dit que vous finiriez par être confrontés à des poursuites commerciales. Ça arrivera inévitablement, avec ou sans la disparition de la CCB. Les lobbyistes qui réclament avec le plus d'ardeur la disparition de la Commission du blé font partie du lobby céréalier des États-Unis -- vos concurrents. De fait, on disait dans un article de journal que les Conservateurs vont détruire ce que les Américains essayent de détruire depuis 12 ans. L'un d'entre vous veut-il répondre à cela?
    On a dit aussi dans la presse agricole que tout le monde sait aujourd'hui que la destruction de la Commission du blé nous emmènera à terme sur la pente savonneuse d'une taxe sur la gestion de l'offre, sous une forme ou une autre. Comme vous représentez des associations d'agriculteurs, vous devez certainement recevoir ce genre de message d'organisations différentes. Il n'y a pas qu'un seul groupe qui essaye d'identifier cela.
    Quatrièmement, quelle que soit votre position sur cette question, nous avons vu des gens perdre leur emploi, nous avons vu des gens être muselés, et nous avons vu une ingérence dans le processus d'enregistrement des électeurs puisque des milliers de gens sont privés du droit de vote. On pose aussi des questions sur la liberté de la presse, la liberté de parole et ce genre de choses dans l'Ouest canadien dont vous êtes les représentants. Le reste de la nation n'est sans doute pas au courant de tout ce qui se passe mais le phénomène semble s'amplifier. Certaines personnes s'inquiètent des efforts chroniques du ministre pour museler les gens.
    Cinquièmement, Mme Holm a parlé de l'érosion et, à terme, du démantèlement de l'infrastructure céréalière -- les wagons de producteurs -- nécessaire pour transporter les céréales. Comme je représente le port de Thunder Bay, je peux vous dire que nous pensons là-bas que le démantèlement de l'infrastructure ne pourra déboucher que sur des monopoles encore plus puissants de méga-multinationales qui écraseront les indépendants. Si nous sommes vraiment comme vous le dites un grand nombre de petits agriculteurs indépendants, la décision prise par le Parlement hier soir -- et c'est pourquoi elle a été si écrasante -- s'explique par la crainte que des agriculteurs soient poussés à la faillite par les méga-entreprises.
    Vous êtes cinq et c'étaient mes cinq questions.
(1305)
    M. Boshcoff, nous ne pouvons accorder que cinq minutes pour les questions et les réponses de chaque député et vous venez d'en prendre quatre et demie pour poser vos questions. Les témoins pourront vous répondre par écrit. Si vous voulez le texte des questions de M. Boshcoff, vous pourrez consulter le procès-verbal de la séance. Hélas, il n'y a plus assez de temps pour vous permettre de répondre maintenant. Quelqu'un veut-il essayer de répondre en 30 secondes pour...
    Allez-y, Mme Jolly-Nagel.
    Je vais essayer.
    Vous parlez de la destruction de la Commission canadienne du blé. Je peux vous assurer que les Wheat Growers n'ont aucunement l'intention d'y contribuer. Nous tenons absolument à ce qu'elle demeure une option viable, forte et compétitive pour les agriculteurs.
    Je suis d'accord avec vous quand vous dites que la décision doit être prise par les agriculteurs eux-mêmes. Toutefois, je suis une agricultrice, Carole est une agricultrice, Boyd est un agriculteur. Pourquoi devons-nous décider? Pourquoi cette décision concernant uniquement la commercialisation du blé et de l'orge doit-elle être prise collectivement? Je m'adresse aujourd'hui à vous pour vous dire que le système ne me convient pas et que, quoi que puissent en penser tous les autres agriculteurs, je devrais avoir le droit d'en sortir.
    C'est tout le temps que nous avions.
    M. Bellavance.

[Français]

    Merci de vos témoignages.
    On commence à voir qu'il y n'y a pas d'unanimité dans ce débat. C'est la raison pour laquelle il est important de le tenir. Je retiens des témoignages d'aujourd'hui, surtout le vôtre, madame Jolly-Nagel, que ce débat se situe entre la liberté individuelle et la liberté collective. Il y a une certaine logique dans le fait de dire que les autres n'ont pas à décider ce qu'on fait chez soi. Malheureusement, les choses ne fonctionnent pas toujours comme on le veut en société, et il faut tenir compte de ceux qui font partie de cette même société. Je parle de la société en général, même si on s'attarde ici aux producteurs agricoles de l'Ouest.
    Dire que la majorité ne peut pas décider pour une minorité implique qu'il y a un problème de démocratie. Dans le cadre de témoignages, on nous a dit qu'au Québec, on avait choisi un système de vente à comptoir unique dans le cas du blé. En Ontario, on fonctionne d'une autre façon. On a fait un autre choix. Dans l'Ouest, c'est présentement la Commission canadienne du blé qui est en place. Le débat qui a été amorcé — et une motion a même été présentée par mon collègue Easter concernant le choix qui devait être fait par les producteurs de l'Ouest —, concerne la tenue d'un référendum. Vous vous opposez à cette idée parce que selon vous, s'il y a un marché mixte, comme le proposent les conservateurs, chacun choisira son camp et tout le monde sera heureux. Or, les exemples concrets que nous connaissons démontrent qu'un marché collectif volontaire ne fonctionne tout simplement pas.
    L'Ontario a choisi de fonctionner d'une façon, et le Québec, d'une autre. Les gens de l'Ouest demandent, pour leur part, de pouvoir choisir. Est-ce que le véritable choix ne consisterait pas à décider s'il devrait ou non y avoir une Commission canadienne du blé? Est-ce que la meilleure façon de choisir en toute démocratie ne serait pas de faire un référendum?
(1310)

[Traduction]

    Il y a déjà un double système de commercialisation. Je vous ai parlé des gens qui échappent déjà au système de vente groupée de la Commission. Par exemple, un fabricant de provendes peut venir sur ma ferme, m'acheter mon grain, l'emporter, le transformer en provendes et l'exporter avec un permis de la Commission du blé. La Commission aurait pu lui interdire d'acheter directement à l'agriculteur. Elle aurait pu lui dire : « Nous allons acheter les céréales à l'agriculteur et vous les vendre ». Au lieu de cela, elle le laisse éviter complètement le système.
    Il faut un permis d'exportation pour exporter et beaucoup de fabricants de provendes achètent directement leurs céréales aux producteurs en évitant la Commission. Des millions et des millions de boisseaux échappent déjà à la Commission mais, si je vous comprends bien, vous dites que cela entraînera sa destruction. Ça ne l'a pas encore détruite. Des sociétés évitent complètement la vente groupée par la CCB.
    Quand nous avons demandé un permis à la Commission du blé, elle nous l'a donné. Nous ne passons pas par la vente groupée. Nous ne sommes pas dans son système de commercialisation. Nous obtenons un permis tout comme un producteur du Québec. Au Québec et en Ontario, quand un producteur veut un permis d'exportation, il adresse une demande à la Commission et il l'obtient.
    Je vous ai parlé de mon orge. J'ai obtenu mon permis d'exportation de la Commission et mon orge a été expédiée aux États-Unis. Quand M. Charles a présenté une demande, on lui a dit : « Non, vous n'avez pas de permis. C'est à nous que vous devez vendre. » Donc, certaines personnes obtiennent des permis. C'est ce que vous appelez le double système de commercialisation et il existe déjà. Vous ne le saviez peut-être pas.
     Une autre question, M. Bellavance? Il vous reste 30 secondes.
    Non? Nous passons donc à quelqu'un d'autre.
    M. Miller, vous avez cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    J'ai beaucoup de questions et je serai bref. La plupart appellent simplement un oui ou un non. J'espère que vous pourrez nous aider.
    Je veux d'abord préciser quelque chose, monsieur le président. J'aimerais voir les comparaisons dont a parlé Mme Jolly-Nagel. Elle a mentionné une perte de 46 000 $. J'aimerais avoir ses chiffres car son affirmation ne concorde pas avec d'autres choses que nous avons entendues. Si nous pouvions avoir les chiffres plus tard...
    Le Syndicat national des cultivateurs a dit que la production et la commercialisation du blé ont changé au cours des 70 dernières années. Êtes-vous d'accord ou non ?
(1315)
    [Inaudible].
    Merci.
    Je suis aussi un agriculteur, au fait. J'ai vendu du blé sous l'égide de la Commission ontarienne. À l'heure actuelle, j'élève du boeuf.
    Les éleveurs de boeuf de ma circonscription, ainsi que des parents et des amis que j'ai dans l'Ouest, me disent -- en blaguant -- espérer que la Commission du blé sera préservée car elle maintient les prix de l'orge à la baisse. Dit-on la même chose dans votre région?
    Oui, j'ai entendu la même chose.
    Merci.
    M. Wells disait que l'on n'agit pas comme ça au Canada. Je ne sais pas s'il parlait alors du fait de donner le choix aux agriculteurs, ce qui est le fond de la question, mais il a aussi mentionné dans ce contexte les listes de membres. Au sujet des modifications qui y ont été apportées, le gouvernement a dit qu'il fallait avoir vendu du grain au cours des deux dernières années pour figurer sur la liste. D'après vous, est-ce une condition injuste?
    M. Miller, voulez-vous parler de la liste électorale?
    Oui, veuillez m'excuser. Je parlais de la liste électorale.
    Jeff.
    Je peux peut-être vous répondre.
    Il faut comprendre que beaucoup de producteurs ont voté avec leurs semoirs. Ils ont voté en semant de l'orge, du canola ou des légumineuses qu'ils ne peuvent pas commercialiser eux-mêmes pour obtenir le meilleur prix possible. Beaucoup devront peut-être semer du blé ou de l'orge pour leur rotation culturale. Ne devraient-ils pas avoir le droit de voter?
    Les 16 000 producteurs rayés de la liste cette année reçoivent par la poste une déclaration légale. Qu'en est-il des autres qui produiront du blé ou de l'orge à l'avenir? Vont-ils aussi recevoir une déclaration par la poste?
    Merci.
    M. Horner a soulevé hier une question qui m'intéresse, et je sais que la plupart d'entre vous étaient présents à ce moment-là. M. Welles en a parlé aussi aujourd'hui. La Commission du blé considère qu'elle obtient toujours le meilleur prix.
    Il y a quelques années, l'honorable député de Malpeque, sous le gouvernement précédent, a envoyé en prison un groupe d'agriculteurs qui, selon moi, s'efforçaient simplement d'envoyer leurs produits sur un meilleur marché. S'ils obtenaient le meilleur prix possible à l'époque, pourquoi auraient-ils pris le risque d'aller en prison?
    Je crois me souvenir que, lors d'une poursuite intentée à Winnipeg il y a un certain temps, la Commission avait soutenu avec vigueur qu'elle n'était pas obligée d'obtenir le meilleur prix pour les agriculteurs et que sa seule obligation était de faire ce qu'exige la Loi, c'est-à-dire ce qu'elle pense raisonnable. Ce n'est pas la même chose. Le meilleur prix n'est pas ce que la Commission pense raisonnable. Il y a une grosse différence.
    La Commission ne peut pas savoir ce dont j'ai besoin pour que mon exploitation soit rentable. Elle ne connaît pas mes coûts de production. Donc, comment peut-elle connaître le prix convenant le mieux à ma ferme?
    D'ailleurs, le prix n'est même pas toujours la question primordiale. Les partisans de la CCB affirment que celle-ci leur donne un juste prix. Moi, le juste prix ne me convient pas, je veux obtenir le meilleur prix.
    En outre, comme jeune agricultrice, j'ai des besoins de liquidités différents de ceux de tous les autres agriculteurs. Chaque exploitant a des besoins de liquidités différents. Je suis donc obligée de prendre des décisions de commercialisation de mes grains hors-Commission en fonction du marché et d'attendre un an et demi pour recevoir mon chèque de la Commission.
    J'ai aussi des besoins d'entreposage. Je dépense 1 $ ou plus par boisseau pour l'entreposage des grains que la Commission ne vend pas.
    Je dois dire, Mme Jolly-Nagel, que ce sont les jeunes exploitants comme vous qui sont l'avenir de notre agriculture. Que nous soyons du parti gouvernemental ou d'un parti d'opposition, notre devoir est de veiller à ce que les gens comme vous puissent toujours cultiver avec profit.
    Merci.
    Merci, M. Miller.
    M. Charles.
    Je tiens aussi à répondre à cette question. J'ai racheté des céréales biologiques mais, en réalité, on ne rachète pas des céréales biologiques, On rachète des céréales ordinaires. Je fais ça depuis sept ans et je n'ai jamais reçu de chèque de la Commission canadienne du blé, pour aucun contrat. Pas un seul. J'ai toujours dû payer 1 $ ou 1,50 $ par boisseau en plus du prix groupé.
    Il ne faut pas être Einstein pour comprendre que le prix au Canada est toujours plus bas que le prix à l'exportation, sinon je recevrais un chèque de la Commission, n'est-ce pas?
(1320)
    M. Charles, j'ai une remarque...
    Votre temps de parole est écoulé, M. Miller.
    M. Boshcoff avait soulevé une question à laquelle je ne pense pas que les témoins aient répondu. Il s'agit des poursuites commerciales, c'est-à-dire du fait que, dès que la situation aura changé avec la Commission, nous serons automatiquement confrontés à des poursuites commerciales en série.
    Pouvez-vous me dire combien de poursuites commerciales il y a eu dans le passé au sujet du canola ou de l'avoine, c'est-à-dire de céréales hors-Commission? Dans certains cas, les Américains sont notre plus gros marché. Si vous pouviez inclure cette information dans votre réponse, ce serait utile.
    M. Atamanenko, pour cinq minutes.
    Je vous remercie beaucoup de votre présence. Je vais essayer d'être bref en espérant que vous aurez assez de temps pour répondre à toutes mes questions.
    M. Nielsen, vous avez peint un tableau assez sombre du secteur de l'orge et du malt. J'ai pris note de certaines de vos remarques -- que les brasseurs canadiens doivent se procurer du malt non canadien, etc.
    En revanche, je crois comprendre que la capacité de production de malt au Canada a connu la plus forte augmentation au monde au cours des 15 dernières années avec un accroissement de 350 000 tonnes, ce qui la porte à un total annuel de 1,2 million de tonnes. Aux États-Unis, par contre, la capacité a baissé. Nous produisons quatre fois plus d'orge de brasserie par habitant que les États-Unis. À l'heure actuelle, 75 pour cent de notre capacité intérieure se trouve dans les provinces de l'Ouest. Si ce phénomène est vrai et que notre situation est meilleure que celle de nos voisins, comment pouvez-vous dire qu'elle n'est pas encore très brillante? C'est ma première question.
    La deuxième s'adresse à M. Charles mais vous voudrez peut-être aussi y répondre. En ce qui concerne les céréales biologiques, par rapport aux céréales de la CCB, pensez-vous qu'il serait possible de préserver le guichet de vente unique pour le blé et l'orge non biologiques et d'exclure complètement les agriculteurs biologiques du système? Autrement dit, pouvons-nous fonctionner avec un guichet unique, pour que vous puissiez être libres et biologiques, à cause des caractéristiques particulières de votre secteur qui...
     Dans le même ordre d'idées, est-ce que la Commission du blé ne contribue pas à maintenir des prix dont votre ferme bénéficie?
    Comme nous n'avons pas beaucoup de temps, je vais en rester là. Cela vous permettra d'ajouter vos propres commentaires.
    Pouvons-nous avoir des réponses, Mesdames et Messieurs?
    Merci, Alex.
    Jeff.
    En ce qui concerne l'orge de brasserie, il y a actuellement une maladie -- le fusarium -- surtout au Manitoba et dans certains États du nord des États-Unis. Plus on va vers l'Ouest, moins on risque de la trouver. L'industrie du malt a donc quitté le sud du Manitoba et les États du nord pour cette raison.
    Nous savons que les deux usines qui devaient être construites dans l'Ouest canadien l'ont plutôt été aux États-Unis, l'une en Idaho et l'autre au Montana. Les sociétés concernées ont dit qu'elles ne pouvaient pas traiter avec un vendeur unique. Elles voulaient passer des contrats avec les producteurs pour obtenir les variétés de céréales ayant les caractéristiques exigées par leurs utilisateurs. Elles refusent de traiter avec un guichet unique.
    Merci.
    Mme Husband, voulez-vous ajouter quelque chose?
    Merci.
    Vous avez entendu ce matin Jeff vous dire qu'il ne gagne pas d'argent et M. Nielsen vous dire qu'il ne gagne pas d'argent. Par contre, nous avons le port de Churchill, la Commission canadienne des grains et tous les groupes qui reçoivent de l'argent de la Commission, comme ceux qui font de la recherche. Tout cet argent sort de nos poches.
    Certes, beaucoup d'usines sont construites mais nous, les producteurs, ne recevons pas plus d'argent. Nous ne faisons que payer l'infrastructure de l'industrie. Ça ne nous rapporte rien. C'est de l'argent qui sort de nos poches.
    Je comprends bien que beaucoup de groupes ne souhaitent pas la disparition de la Commission du blé car, dans ce cas, les gouvernements devraient commencer à payer pour la recherche, mais ça ne donnera aucun avantage aux producteurs.
    Il ne faut pas oublier que le mandat de la Commission du blé porte uniquement sur le blé et l'orge. Si elle continue de vendre ça, elle est vouée à disparaître.
    Dans ma région, le blé est une céréale de dernier ressort. On n'en sème que pour les rotations. On sème plutôt du petit pois, du canola, du pois chiche, du haricot, du lin, de l'avoine -- tout sauf du blé. Si c'était rentable et si la Commission du blé faisait un bon travail à la vente, comme dans le passé... Nos campagnes étaient un tapis d'or à l'automne. Aujourd'hui, vous pouvez faire 150 milles en voiture sans voir un seul champ d'or. C'est toujours jaune et blanc parce qu'on ne cultive plus de blé dans la province. Je vous donne le point de vue d'un producteur.
    Il faut bien comprendre ce qui se passe dans le pays. Le blé ne représente plus que 30 ou 40 pour cent de ce qui est vendu au Canada par la Commission du blé. Le canola est beaucoup plus rentable que le blé, aujourd'hui, et il y a d'autres cultures. Donc, si le marché libre est une si mauvaise solution, comment se fait-il que les cultures du marché libre donnent des résultats si supérieurs? C'est juste une remarque.
(1325)
    [Inaudible].
    Votre temps de parole est écoulé, M. Atamanenko, mais je vais laisser Charles conclure.
    Cherilyn, vous voulez ajouter quelque chose? C'est tout, donc.
    Je suis clairement en faveur du marché libre mais, dans mon cas, il ne marche pas du tout.
    M. Gourde veut faire un rappel au règlement.

[Français]

    Monsieur le président, mon collègue du Bloc québécois n'écoute pas nos témoins depuis 10 minutes. C'est important. Ces personnes se sont déplacées pour venir témoigner.

[Traduction]

    Merci, M. Gourde.
    M. Bellavance.

[Français]

    Ça mérite une réplique. J'écoute très bien. Le député sait fort bien que je comprends l'anglais et que je n'ai pas besoin de mon écouteur.
    D'autre part, le député qui vient de parler, M. Gourde, dort souvent pendant les réunions du comité. Certains témoins pourront le confirmer: il dort. Pour ma part, c'est quelque chose que je ne fais pas: je suis tout à fait éveillé.

[Traduction]

    Merci, Messieurs, d'avoir réveillé tout le monde à la fin de la réunion.
    Mme Jolly-Nagel, voulez-vous dire quelques mots de conclusion?
    À l'ordre.
    Je veux rapidement aborder la question de... veuillez m'excuser.
    À l'ordre.
    Continuez, s'il vous plaît.
    J'ai déjà posé cette question avant. Je me demande qui écoute.
    Messieurs, veuillez nous permettre de conclure cette séance.
    Mme Jolly-Nagel, s'il vous plaît.
    Ma conclusion est qu'il m'a fallu faire beaucoup d'efforts pour réorganiser ma vie et mon horaire afin d'être ici aujourd'hui. Je suis mère depuis peu de temps, je suis une agricultrice et, en plus, je suis chef d'une petite exploitation. J'ai dû faire quatre heures d'avion et, pendant le trajet, je n'ai cessé de me demander s'il y aurait autour de cette table quelqu'un qui serait prêt à m'écouter. Avez-vous déjà pris votre décision?
    Pourquoi nous avez-vous fait venir ici si votre opinion est déjà faite? Si vous n'avez pas besoin de nos informations, nous n'avons pas à vous les donner. Ce que nous vous disons, c'est que nous espérons que quelqu'un est prêt à écouter ce que nous avons à dire.
    Merci.
    M. Easter.
    Je peux vous dire que nous vous avons écoutée. J'ai pris des notes. Bien que je n'ai pas eu le temps de poser de questions, j'ai noté divers sujets sur lesquels j'ai l'intention de poursuivre mes recherches. Donc, même si nous ne sommes pas du même avis, nous vous écoutons.
    Permettez-moi maintenant de remercier les témoins d'être venus.
    Nous vous avons demandé des informations complémentaires au sujet des questions de M. Boshcoff et de moi-même. Pourriez-vous nous les envoyez plus tard? Le greffier vous en donnera la liste, si vous n'avez pas pu en prendre note. Merci.
     Nous vous remercions à nouveau d'avoir pris le temps de venir ici. Nous savons que cette question est très importante pour vous.
    Je m'adresse maintenant aux membres du comité. Vous avez tous reçu un calendrier au début de la réunion. Veuillez nous communiquer dès que possible vos listes de témoins. Le greffier prendra ensuite les contacts nécessaires pour la semaine prochaine. Nous avons un ordre du jour très général. Il va falloir convoquer les témoins.
     Vous voulez apporter une précision, M. Anderson?
    Je veux simplement répondre à une déclaration inexacte qui a été faite tout à l'heure. Mme Holms a parlé du ministre et du fait qu'elle a perdu son emploi. La direction du Western Producer a déclaré que le cabinet du ministre n'avait rien à voir avec la perte de son emploi. La rédaction en chef du Western Producer a publié un article à ce sujet. Les membres du comité peuvent le lire à loisir.
    Je tenais à apporter cette précision et aussi à féliciter mon collègue, M. Gourde, qui est toujours très attentif en comité.
    Merci.
    La séance est levée.