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CC30 Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité législatif chargé du projet de loi C-30


NUMÉRO 012 
l
1re SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 20 février 2007

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Français]

    Bonne journée à tous. Nous avons le quorum.

[Traduction]

    Bienvenue à la 12e séance du Comité législatif chargé du projet de loi C-30.
    Nous accueillons trois témoins aujourd'hui. M. Michael Cleland, de l'Association canadienne du gaz, qui prendra la parole en premier. Ensuite, ce sera le tour de Matthew Bramley, directeur des changements climatiques au Pembina Institute, et de Gordon Lambert, vice-président du développement durable chez Suncor Energy Inc.
    Je signale aux membres du comité que le Comité de la procédure et des affaires de la Chambre siège juste après nous, à 11 heures. Il faudra donc avancer à un bon rythme, puisque ce sont les whips et les leaders en Chambre. Nous ne voulons certainement pas nous mettre les chefs à dos.
    Il ne faudra donc pas perdre de temps. Je rappelle à nos témoins que nous leur accordons dix minutes — de préférence 10 minutes ou moins — pour nous présenter leurs remarques liminaires, après quoi les membres du comité leur poseront des questions.
    Je vous rappelle tous que nous traitons du projet de loi C-30. Nous savons qu'il y a beaucoup de choses à dire, mais nous essaierons de concentrer nos remarques sur le projet de loi C-30 autant que possible et sur les moyens de l'améliorer.
    Sans plus tarder, je demanderais à M. Michael Cleland, président-directeur général de l'Association canadienne du gaz de nous présenter ses remarques liminaires.
    Monsieur Cleland, vous avez la parole.
    Merci, monsieur le président. J'essaierai de respecter les limites de temps imposées.
    Merci à vous et aux membres du comité de me permettre de prendre la parole aujourd'hui au sujet du projet de loi C-30.
    Très brièvement, l'Association canadienne du gaz parle au nom du secteur de la distribution du gaz naturel au Canada. En gros, nous approvisionnons en gaz naturel près de six millions de clients canadiens, entreprises et particuliers, d'un littoral à l'autre du pays.
    Aujourd'hui, je concentrerai mes remarques sur le projet de loi C-30, mais je voulais commencer par vous parler de l'utilisation du gaz naturel comme source d'énergie, de notre bilan en matière de réduction des GES et enfin du projet de loi C-30. Ensuite, j'aborderai le revers de la médaille, dont on n'entend pas souvent parler lorsqu'on étudie la question des émissions industrielles.
    En ce qui concerne le gaz naturel, vous avez les chiffres dans le document que je vous ai distribué. Je ne vais pas vous les lire, mais je vous dirais seulement que le gaz naturel représente un peu plus du quart de la consommation énergétique des Canadiens et que cette proportion augmente. Le gaz joue un rôle croissant dans la production d'électricité, dans les applications de génération distribuée et peut jouer un rôle accru dans le domaine des transports, bien que dans une moindre mesure.
    La raison de cette croissance est assez simple. Le gaz naturel, pour diverses raisons, est la source d'énergie préférée de beaucoup. Elle est souple, propre, fiable, abondante et peut grandement contribuer à nos objectifs en matière de qualité de l'air et de changement climatique. Le gaz naturel devrait jouer un rôle important dans la stratégie canadienne de lutte contre le changement climatique.
    En ce qui concerne notre bilan en matière de GES, notre participation directe a été relativement modeste. Mais nous participons au processus et nous sommes prêts à participer à n'importe quel système ou processus réglementaire. En réalité, nous avons réalisé certains progrès sur le front des GES : nous avons réduit nos émissions de 6 p. 100 depuis 2000 et d'un peu moins depuis 1990.
    Laissez-moi maintenant vous parler du projet de loi C-30. D'abord, en ce qui concerne les objectifs fixés de façon générale, l'ACG est en faveur d'un cadre qui comprend des objectifs à court, à moyen et à long terme. Nous pensons que cela permet une vision à long terme qui est nécessaire, ainsi qu'une perspective à court terme qui nous poussera à changer les choses. Le projet devrait-il aller plus loin? Devrait-il comprendre des cibles spécifiques et détaillées? Ma réponse est non, et je vais vous expliquer pourquoi.
    En ce qui concerne le Protocole de Kyoto, nous l'avons déjà dit devant des comités parlementaires, et je le répéterai aujourd'hui, il n'est pas physiquement possible de respecter nos engagements et, à notre avis, intégrer les objectifs de Kyoto dans le projet de loi C-30 reviendrait à le condamner à un échec certain, alors que les Canadiens nous demandent de concentrer nos efforts sur les possibilités de réussite.
    De toute manière, j'estime que ce genre de détails n'a pas sa place dans la loi. La loi doit établir un cadre et conférer un pouvoir de réglementation. Les détails devraient donc apparaître dans les règlements. Plus le C-30 comportera de détails, plus son cadre sera instable à l'avenir.
    En ce qui concerne le secteur de distribution du gaz naturel et les objectifs à atteindre, je n'entrerai pas dans les détails, mais je tiens à dire que nous avons fait beaucoup de travail avec Environnement Canada. Nous disposons des données à ce sujet. Nous sommes en bonne voie de comprendre comment nous pourrions nous conformer à un cadre réglementaire raisonnable, c'est pourquoi nous vous exhortons à adopter le projet de loi C-30 aussitôt que possible pour que le gouvernement puisse mettre ce cadre en place.
    J'aimerais maintenant dire quelques mots au sujet des réductions d'intensité. Je sais que c'est une question controversée. Nous voulons simplement signaler qu'un système axé sur l'intensité vous permet de vous concentrer sur ce que vous pouvez contrôler, et non pas ce que vous ne pouvez pas contrôler, et qu'il s'agit simplement d'un système de gestion. Un système axé sur l'intensité, selon l'importance du numérateur et du dénominateur permet en bout de ligne des réductions d'émissions absolues. Je crois qu'il faut aller au-delà du débat et chercher un cadre de gestion réaliste.
    En ce qui concerne les polluants atmosphériques — je sais que ce n'est pas la question principale, mais cela fait partie de C-30 et c'est tout de même important — nous croyons qu'il faut progresser sur ce front également. Nous ne sommes pas en mesure, comme d'ailleurs à mon avis la plupart des secteurs industriels, de progresser rapidement, parce que nous n'avons pas étudié le dossier. Nous sommes bien préparés en ce qui concerne les gaz à effet de serre, mais nous devons faire bien davantage en ce qui concerne les polluants atmosphériques.
    De toute façon, les polluants atmosphériques et la pollution locale sont des questions beaucoup plus complexes. Par conséquent, nous estimons qu'il est parfaitement approprié d'inscrire les polluants atmosphériques et les gaz à effet de serre dans le même cadre législatif mais qu'il faudrait adopter des règlements différents pour chacun.
    Entre-temps, nous nous attelons à la tâche. Nous avons embauché une entreprise externe pour qu'elle fasse un inventaire des polluants atmosphériques de notre secteur et nous pensons être aptes à progresser dans ce dossier relativement rapidement.
    J'aimerais insister sur deux options de conformité. Je sais qu'elles font l'objet d'un débat à ce comité. À notre avis, il devrait y avoir des options sur la façon de se conformer au règlement, dont deux nous semblent particulièrement importantes.
    D'abord, dans le cadre d'un système de compensation national il faut permettre la compensation des programmes de gestion axés sur la demande applicables aux services publics, comme notre secteur et le secteur de l'électricité en ont déjà. Depuis 2000, les efforts des sociétés de service public du Canada ont permis d'économiser quelque 700 millions de mètres cubes de gaz naturel. Cela représente la consommation en chauffage et en eau chaude de plus de 250 000 ménages. Avec les incitatifs appropriés, nous pouvons en faire encore plus. Une des façons de nous aider serait de permettre la compensation fondée sur la gestion de la demande applicable aux services publics comme mesures de conformité.
    Nous préconisons également, comme mesures de conformité, un fonds d'investissement technologique, qui nous permettrait d'investir pour l'avenir. Ce fonds pourrait être structuré de façon à protéger l'industrie du coût croissant des technologies. J'ajouterais qu'il faut absolument permettre des investissements, par le biais de ce fonds, dans diverses technologies, y compris, les technologies en aval.
    Je ne m'étendrai pas sur les contrôles de conformité, la surveillance et les rapports. Je dirais simplement qu'au cours de vos délibérations sur le projet de loi C-30, il faudra réfléchir à des façons de rendre ces processus plus efficients, efficaces et transparents. Vous trouverez dans notre mémoire un certain nombre de mesures à cette fin.
    Enfin, en ce qui a trait aux accords d'équivalence, l'AGC préconise un mécanisme qui évite le chevauchement et le double emploi dans les cas où les provinces veulent participer.
    La dernière chose que je voudrais dire, c'est que, sous sa forme actuelle, le projet de loi C-30 comprend une disposition qui exigerait presque d'avertir le public chaque fois qu'on allume la chaudière. En effet, en vertu de la loi actuelle, il faut faire rapport de toute émission de gaz à effet de serre, y compris le CO2. Je ne pense pas que ce soit l'objectif de la loi. C'est un élément mineur, mais il faudra y remédier.
    Monsieur le président, pour conclure, j'aimerais maintenant vous parler du revers de la médaille, de la perspective non industrielle. La moitié de l'énergie utilisée au Canada est consommée dans nos collectivités. Il va falloir changer notre comportement. Cela ne se fera pas avec un cadre réglementaire. Il y a d'autres choses que l'on peut faire et que l'on peut mieux faire. L'une d'entre elles est d'intensifier nos efforts en conservation et de diminuer notre consommation d'énergie de façon plus systématique, de nous servir de l'excellent travail qui a déjà été fait au cours de la dernière décennie pour aller encore plus loin.
    Ainsi, dans le cadre de nos efforts de conservation et d'amélioration du rendement énergétique, il faut remplacer nos combustibles. Pour vous en donner une idée, si l'on utilise le gaz naturel plutôt que l'électricité pour une utilisation à combustion directe, le rendement est 50 p. 100 supérieur à la production d'électricité la plus efficiente. Quels que soient ces retombées et débouchés, nombre de programmes de rendement énergétique canadiens, y compris les programmes fédéraux, ne considèrent pas le remplacement de combustible comme un mécanisme légitime. Nous pensons que c'est une erreur.
    Enfin, il y a le développement de la technologie. Nous exhortons les responsables à s'assurer que les programmes existent pour soutenir les nouvelles technologies en amont et en aval. Les technologies en aval comprennent les piles à combustible à petite échelle, les ressources énergétiques renouvelables sur site, la combinaison chaleur puissance, et une utilisation optimale des réseaux de distribution de gaz et d'électricité telles qu'ils existent dans nos collectivités à l'heure actuelle. Nous pouvons réaliser beaucoup de progrès dans les cinq prochaines années si l'on utilise ce type de technologies.
    Monsieur le président, j'ai dépassé mon temps, je vais donc m'arrêter là et vous céder la parole.
(0910)
    Je vous remercie. Vous aviez 30 secondes de plus, donc tout va bien.
    Nous allons maintenant passer à l'Institut Pembina, et à Matthew Bramley, directeur, Changements climatiques. Vous avez dix minutes.

[Français]

    Merci beaucoup de m'avoir invité ici aujourd'hui.

[Traduction]

    Aujourd'hui je représente à la fois l'Institut Pembina et le Réseau action climat du Canada. Aujourd'hui, j'aimerais m'arrêter à l'une des recommandations formulées dans la liasse d'amendements proposés au projet de loi C-30, qui a été présenté par environ 23 organisations environnementales canadiennes.
    Il s'agit de la recommandation selon laquelle le projet de loi exige que les règlements prévoient, d'une part, un plafond déterminé des émissions absolues qui imposerait à l'industrie lourde l'objectif prévu par le Protocole de Kyoto pour la période de 2008 à 2012; et d'autre part, un système d'échanges des quotas de carbone qui faciliterait l'attribution efficace des réductions d'émissions. Nous considérons qu'il s'agit d'une recommandation extrêmement importante parce que l'industrie lourde est responsable de près de la moitié des émissions de gaz à effet de serre du Canada et parce que ces émissions ont augmenté plus rapidement que le total des émissions à l'échelle nationale.
    J'ai préparé un document technique de sept pages qui décrit la façon dont on pourrait mettre en oeuvre cette recommandation. Il s'intitule « Faire sa part pour un monde plus vert ». Il s'agit d'une proposition visant à réglementer les gaz à effet de serre pour l'industrie canadienne. Malheureusement, nous n'avons pas été en mesure d'en préparer une version française à temps pour ce matin, mais elle devrait être prête dans les prochains jours. Entre-temps, la version anglaise se trouve maintenant sur le site Web de l'Institut Pembina et peut être fournie sur demande.
    Il existe au Canada un consensus solide en faveur de la réglementation des émissions de gaz à effet de serre provenant d'installations industrielles, mais une question essentielle demeure : dans quelle mesure les objectifs réglementaires doivent-ils être rigoureux et avec quelle rapidité doivent-ils être appliqués. Le gouvernement a indiqué que les objectifs ne devraient pas en fait réduire les émissions en dessous des niveaux actuels jusqu'à la période de 2020-2025, et que les objectifs ne devraient pas s'appliquer avant la fin de 2010. Nous considérons que de tels objectifs sont nettement insuffisants.
    J'aimerais mettre l'accent sur quatre éléments primordiaux du contexte pour répondre à la question de la rigueur des objectifs et de la rapidité avec laquelle ils devraient être appliqués. Premièrement, non seulement l'industrie lourde représente-t-elle près de la moitié des émissions du Canada, mais les deux plus importantes sources d'émissions — la production d'électricité et les activités pétrolières et gazières en amont — ont augmenté leurs émissions de 35 p. 100 et 58 p. 100 respectivement entre 1990 et 2004, pourcentages nettement supérieurs à l'augmentation des émissions de la part des Canadiens. De toute évidence, la situation est inacceptable.
    Deuxièmement, le Canada est obligé en vertu de la loi de respecter l'objectif fixé par le Protocole de Kyoto. Cette obligation fait partie du droit international depuis deux ans, et nous considérons que ce n'est plus le moment de débattre de l'opportunité d'accepter ou non cet objectif. Le gouvernement doit mettre l'accent sur le respect de nos obligations légales, et ne pas les remettre en question. Les Canadiens veulent que leur pays respecte la loi.
    Troisièmement, une très grande majorité de climatologues considèrent qu'il est non seulement essentiel mais urgent de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour contribuer adéquatement à prévenir les dangers que représente le changement climatique, le Canada doit réduire ses émissions pour qu'elles soient inférieures de 80 p. 100 au niveau de 1990 d'ici 2050, comme d'autres pays ce sont désormais engagés à le faire. Pour atteindre cet objectif, les émissions du Canada doivent diminuer d'environ 25 p. 100 en dessous du niveau de 1990 d'ici 2020.
    Quatrièmement, le Protocole de Kyoto prévoit des mécanismes pour que nous assumions la responsabilité immédiate de nos émissions en investissant dans la réduction d'émissions dans des pays pauvres tout en commençant à réduire de façon importante les émissions chez nous. Je tiens à préciser que cela n'a absolument rien à voir avec les crédits d'émissions de la Russie. Je parle plutôt du mécanisme de développement propre prévu par le Protocole de Kyoto dans le cadre duquel des milliards de dollars sont investis à l'heure actuelle dans les projets particuliers de réductions des émissions qui doivent faire l'objet d'un processus rigoureux et transparent permettant d'établir qu'il s'agit de véritables réductions.
    Comme les gaz à effet de serre sont répandus dans le monde entier, les réductions d'émissions contribuent également à prévenir des changements climatiques dangereux au Canada là où ces réductions sont apportées ailleurs dans le monde. Par conséquent, nous proposons d'établir pour la période de conformité au Protocole de Kyoto de 2008 à 2012, des objectifs d'émissions absolues dans le cadre de Kyoto inférieurs de 6 p. 100 au niveau d'émissions de 1990 pour chacun des secteurs de production d'électricité, de production pétrolière et gazière et des secteurs énergivores. Il serait possible d'atteindre ces objectifs en utilisant conjointement les réductions d'émissions sur place et les crédits nationaux ou internationaux de réductions d'émissions conformément au Protocole de Kyoto, provenant de projets qui entraînent des réductions évidentes au-delà du statu quo.
    Nous proposons également une option de conformité sous forme de paiements de 30 $ la tonne d'équivalent de dioxyde de carbone, versé à une fiducie de réduction de gaz à effet de serre administrée de façon indépendante dont le mandat serait de réinvestir l'ensemble des recettes provenant de crédits de compensation nationaux découlant de projets de façon à ce que de telles recettes soient conservées par leur province d'origine.
(0915)
    Pour l'après-2012, nous souhaiterions que le gouvernement annonce son intention de resserrer graduellement les cibles afin que, d'ici à 2020, les émissions soient réduites d'environ 25 p. 100 par rapport au niveau de 1990; de limiter l'achat de crédits étrangers en fonction des besoins, afin que le prix des crédits sur le marché canadien soit d'au moins 30 $ la tonne en équivalent de CO2, prix qui passerait à au moins 50 $ la tonne d'ici à 2020; et de vendre aux enchères une proportion sans cesse croissante des allocations.
    Cette proposition a été conçue pour assurer la réalisation de six objectifs clés. Le plus important est celui de l'équité environnementale. La proposition permet de répondre à cet objectif en obligeant l'industrie lourde dans son ensemble à contribuer au respect des obligations du Canada aux termes du Protocole de Kyoto dans une mesure qui serait proportionnelle à sa part d'émissions. L'industrie lourde est à l'origine de près de la moitié des émissions au Canada, et elle contribuerait donc à près de la moitié des réductions nécessaires pour atteindre la cible.
    La proposition permet d'assurer l'équité environnementale en exigeant que la plus grande partie des réductions d'émissions par rapport aux niveaux habituels viennent des secteurs qui ont le plus contribué à la croissance des émissions depuis 1990, soit l'année de référence internationalement reconnue pour ce qui est des engagements relatifs à la réduction des émissions.
    La proposition permet également de satisfaire à l'objectif essentiel de la faisabilité économique, puisqu'elle fait des distinctions entre les secteurs en fonction de leur capacité à payer. Je voudrais prendre quelques instants pour justifier cette affirmation.
    Les cibles proposées représentent des réductions, par rapport à ce que seraient les émissions sans effort particulier de réduction, de quelque 11 p. 100 pour les secteurs énergivores, de 36 p. 100 pour la production d'électricité et de 46 p. 10 pour le secteur pétrolier et gazier en amont. Je vais aborder chacun de ces secteurs à tour de rôle.
    La cible pour les secteurs énergivores est, bien sûr, modeste. La réduction de 11 p. 100 qui est proposée par rapport à ce que seraient les émissions sans effort particulier de réduction, est proche de la réduction de 12 p. 100 proposée par le précédent gouvernement qui avait été généralement acceptée par les secteurs en question. Ces secteurs pourraient avoir du mal à atteindre une cible plus rigoureuse puisqu'ils sont relativement mobiles et sen sensibles à la concurrence internationale.
    Le secteur de la production d'électricité pourrait s'accommoder d'une cible plus rigoureuse puisque, toutes proportions gardées, il exerce son activité plus près du consommateur, si bien qu'il est moins vulnérable à la concurrence internationale et puisque les prix de l'électricité sont souvent réglementés au Canada. Il serait possible de réduire les coûts si le gouvernement accordait une aide généralisée à la conservation d'électricité, aux énergies renouvelables à faible incidence et à la coproduction, ce qui contribuerait à réduire la quantité des réductions d'émissions que les producteurs d'électricité auraient eux-mêmes à payer.
    En supposant que cette aide gouvernementale était accordée et que le processus d'élimination graduelle des centrales au charbon avançait rapidement en Ontario, le coût pour les centrales au charbon qui resteraient se situerait entre 0,6 cent et 1,3 cent le kilowatt heure environ. En comparaison, le prix résidentiel moyen pour l'électricité au Canada était de près de 9 cents le kilowatt heure en 2004.
    Le secteur pétrolier et gazier en amont est aussi peu vulnérable à la concurrence internationale parce que ses marges bénéficiaires sont importantes et qu'il est impossible de déplacer une richesse naturelle comme les sables bitumineux dans un autre pays. Même si la réduction proposée de 46 p. 100, par rapport à ce que seraient les émissions sans effort de réduction particulier, semble considérable, elle est semblable à la réduction de 50 p. 100 que Shell Canada s'est engagé à atteindre d'ici à 2010 pour sa première installation d'exploitation des sables bitumineux.
    D'après nos calculs, le coût pour les producteurs des sables bitumineux ne serait que de 58 cents à 1,16 $US le baril environ. Le montant est minime quand on le compare aux variations récentes des cours du pétrole brut.
    Les calculs que je viens de vous présenter relativement aux coûts sont très simples, et je les expliquerai volontiers pendant la période de questions.
    J'aimerais préciser que notre proposition respecte également quatre autres objectifs importants. Elle assure l'intégrité environnementale en fixant les cibles en fonction des émissions effectives plutôt que de l'intensité des émissions et en veillant à ce que toutes les options en matière de conformité représentent des réductions réelles à court terme.
    Elle prévoit que des mesures soient prises de façon urgente à l'échelle nationale en indiquant un prix de 30 $ la tonne pour les émissions, et ce, afin de stimuler la mise au point à grande échelle de technologies peu polluantes comme le captage et la séquestration du carbone.
    Elle assure un équilibre géographique en garantissant un prix de 30 $ la tonne pour les émissions et en offrant ainsi une solution de rechange en matière de conformité à l'investissement dans des projets internationaux.
    Enfin, mais non par ordre d'importance, elle assure la certitude au regard du prix qu'aurait à payer le secteur, en limitant initialement le coût des réductions à 30 $ la tonne; au regard de la quantité, en fixant un objectif clair relativement aux niveaux d'émissions actuels; et au regard de la réglementation dans son ensemble, en incluant des informations à titre indicatif au sujet des cibles et des prix jusqu'en 2020 et en adoptant un modèle qui tiendra la route à long terme.
    Je tiens également à faire remarquer que, même si la proposition prévoit une application sectorielle, il n'y aurait pas une différence énorme si l'application était faite en fonction du territoire, à cause de la répartition régionale des trois secteurs clés.
(0920)
    En conclusion, exigez de l'industrie qu'elle assume sa juste part de responsabilité pour ce qui est de réduire les gaz à effet de serre nous permettra, non pas seulement de faire près de la moitié du chemin pour atteindre la cible que le Canada s'est fixé dans le cadre du Protocole de Kyoto, mais aussi de mettre le Canada sur la bonne voie pour en arriver à avoir la production de pétrole et de gaz la moins polluante du monde, un système d'électricité pour le XXIe siècle et un secteur manufacturier écoefficient. C'est là la vision qui devrait nous guider à notre avis.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Bramley.
    Nous passons maintenant à notre troisième témoin, monsieur Gordon Lambert, vice-président au développement durable, Suncor Energy Inc.
    Avant que nous ne commencions, je tiens à préciser que les mémoires de Suncor et de l'Association canadienne du gaz ont été envoyés par Internet et que tout le monde devrait donc en avoir reçu copie.
    Monsieur Lambert, vous avez dix minutes.
(0925)
    Je vous remercie, monsieur le président, et je remercie aussi les membres du comité de me donner l'occasion de présenter certaines des observations de Suncor Energy sur le changement climatique, la qualité de l'air et notre avenir énergétique.
    Je voudrais tout d'abord commencer par dire qu'il nous faut recentrer le dialogue sur le changement climatique. Si au cours des dix dernières années nous n'avons pas pu réaliser les progrès nécessaires pour relever ce défi de taille, c'est notamment parce que la discussion a été centrée sur la répartition équitable des sacrifices à faire, de la part des provinces, des secteurs industriels et de la société canadienne. Bien entendu, nous savons tous que ce qui est équitable pour l'un ne l'est pas nécessairement pour l'autre, et toute négociation en ce sens nous paraît vouée à l'échec.
    À notre avis, il serait possible d'accomplir beaucoup plus si nous nous concentrions sur les possibilités, celles qui s'offrent à nous pour trouver de nouveaux types d'énergie renouvelable, pour ce qui est des biocarburants, des nouvelles technologies comme le captage et la séquestration du carbone et pour ce qui est aussi des améliorations écoénergétiques dans tous les secteurs de notre économie. Par ailleurs, quand on met l'accent sur les possibilités, on peut fixer des objectifs à moyen et à long terme en matière de réduction des émissions ainsi que des objectifs qui tiennent compte du rôle clé que peuvent jouer les progrès technologiques pour atteindre la durabilité énergétique et environnementale.
    Je tiens à souligner à cet égard le travail qu'a fait récemment la Table ronde nationale sur l'environnement et l'économie. La Table ronde s'est penchée sur la question de savoir à quoi pourrait ressembler l'avenir énergétique du Canada en 2050. Elle a produit un rapport convainquant qui mérite d'être étudié attentivement puisqu'il pourrait servir de plateforme de lancement de notre future politique sur le changement climatique. Cependant, si nous voulons nous donner un avenir énergétique qui soit plus écologique et qui contribue aussi à améliorer la qualité de l'air, il faudra que les marchés des capitaux fassent leur part. Les capitaux privés sont le seul instrument qui permettra d'obtenir les changements en profondeur qui seront nécessaires.
    Nous estimons par ailleurs que c'est dans le contexte du développement durable qu'il convient d'aborder ces questions difficiles. C'est toujours l'interdépendance entre une économie prospère, un environnement sain et le bien-être collectif qui, à notre avis, doit servir de base à la recherche de solutions novatrices pour s'attaquer à ces questions difficiles. Ces trois objectifs interdépendants nous amènent à réfléchir de façon plus générale et avec plus d'imagination aux solutions que nous pourrions envisager.
    Je voudrais aussi articuler mon propos autour de postulats généraux essentiels à l'atteinte de solutions durables. Il faut savoir d'abord et avant tout que le Canada a hérité d'abondantes ressources énergétiques à bon marché. C'est ce qui explique la différence entre la réalité canadienne et la réalité européenne en ce qui concerne notre parc de véhicules, la densité urbaine, la taille de nos maisons et le transport en commun. Nous acceptons le fait que, comme Canadiens et comme collectivité mondiale, nous ne pouvons plus continuer à produire et à utiliser l'énergie comme nous l'avons fait dans le passé. Cela est au coeur même de nos problèmes de qualité de l'air en région urbaine, du changement climatique, et même de nos inquiétudes concernant notre qualité de vie, alors que nous poursuivons notre étalement urbain.
    Il faut reconnaître par ailleurs que nous participons tous au problème et que nous devons tous contribuer à la solution. S'agissant des problèmes de changement climatique et de qualité de l'air urbain, ce ne sont pas les méchants d'un côté et les bons de l'autre. Ce n'est pas l'industrie à elle seule qui est à l'origine du problème, alors que les consommateurs n'y seraient pour rien. On ne peut pas dissocier l'offre énergétique de la demande des consommateurs, que nous sommes tous. L'industrie, y compris le secteur pétrolier et gazier, devrait être perçu comme ayant un rôle essentiel à jouer dans la recherche d'une solution. Après tout, c'est là où se trouve l'expertise technique, industrielle et commerciale et, ce qui est encore plus important, les sources d'investissement. Nous sommes prêts à participer de façon constructive à la recherche de solutions.
    Pour pouvoir réaliser les progrès qu'il nous faut accomplir, nous devons faire participer les marchés des capitaux et les investisseurs du secteur privé. Peu importe l'argent qu'il peut y consacrer, le gouvernement ne pourra jamais financer le changement en profondeur qui est nécessaire pour en arriver à de véritables solutions durables à long terme. Dans le contexte des discussions de votre comité sur la fixation de cibles, nous sommes très préoccupés par l'idée que les cibles pourraient éroder la confiance des investisseurs et avoir ainsi des conséquences imprévues. Il me semble que ce serait inacceptable pour nous tous.
(0930)
    Je voudrais maintenant vous donner un exemple de ce que pourrait être l'effet bénéfique de l'engagement des marchés des capitaux. Je prendrai pour exemple l'énergie éolienne.
    En 2000, le Canada était le pays de l'OCDE qui avait la capacité installée la moins élevée en fait d'énergie éolienne. Ensemble, les gouvernements ont déclaré leur intention d'incorporer l'énergie éolienne dans l'approvisionnement énergétique du Canada. Une analyse approfondie a été réalisée par les ONG, les secteurs industriels et les gouvernements tous ensemble afin d'expliquer le retard qu'avait le Canada sur le plan des investissements dans l'énergie éolienne. Le programme d'incitation à la production d'énergie éolienne et le tout nouveau programme écoénergie d'incitation pour les énergies renouvelables ont été mis sur pied, et ils ont beaucoup contribué à la croissance importante dans ce secteur. Au lieu que les provinces cherchent à éviter de payer leur juste part, elles se font concurrence pour investir dans l'énergie éolienne.
    Suncor, avec ses partenaires, a investi jusqu'à maintenant 306 millions de dollars dans 147 mégawatts de nouvelle capacité. Il ne l'a pas fait par obligation, mais parce que les signaux étaient en place et que ces signaux ont attiré des capitaux dans ce volet du secteur énergétique.
    Permettez-moi de citer cet autre exemple d'engagement positif qu'est le récent dialogue sur les biocarburants. Le gouvernement fédéral et les provinces se sont entendus pour faire du développement de l'éthanol un objectif commun. Les investisseurs ont été consultés sur les politiques et les mesures qui seraient nécessaires. Diverses mesures d'incitation et de dissuasion ont été mises en place, notamment des incitatifs financiers, des mesures liées à la taxe d'accise et des normes sur le carburant renouvelable.
    C'est ce qui a amené Suncor a investir jusqu'à maintenant 120 millions de dollars dans une usine d'éthanol de classe mondiale à Sarnia, en Ontario. Nous prévoyons doubler la capacité de cette usine dans un avenir assez proche. Nous allons également tester le biodiésel dans 1 400 autobus de la Commission des transports en commun de Toronto.
    Nous prévoyons également d'autres projets et dépenses en immobilisations dans tout le Canada. Je crois que les autres segments de l'industrie se tournent également vers les biocarburants, qu'ils considèrent comme une occasion de croissance fort intéressante.
    Tout en poursuivant nos efforts pour changer les choses par cette loi, j'estime qu'il est aussi important de ne pas oublier l'objectif ultime. L'étude de la Table ronde nationale sur l'économie et l'environnement nous montre quels sont les moyens les plus susceptibles de contribuer à réduire les gaz à effet de serre : le captage du carbone, l'amélioration de l'intensité énergétique dans l'industrie, les biocarburants et les carburants de rechange, l'électricité renouvelable ainsi que de nombreuses formes de conservation énergétique.
    Pour favoriser les progrès à cet égard, il nous faut engager l'expertise de chacun de ces volets afin d'évaluer les politiques et les mesures qui pourraient être mises en place pour attirer les capitaux nécessaires à la réalisation des changements.
    En outre, nous estimons que les cibles devraient être fixées en tenant compte des résultats souhaités pour chacun des volets proposés. Comme dans le cas de l'énergie éolienne, quand on parle de mégawatts de capacité installée d'ici à une telle date, nous estimons qu'il devrait en être de même pour la fixation de cibles dans d'autres domaines. La réduction des émissions de CO2 qui en résulterait serait alors incluse dans le calcul de nos progrès vers la réalisation des objectifs de Kyoto.
    Que faudrait-il faire maintenant? En résumé, nous pensons qu'il faudrait se servir de la Loi sur la qualité de l'air comme instrument pour réglementer des résultats bien définis et bien ciblés en matière d'efficience et de rendement du secteur énergétique. Nous comprenons la nécessité de réglementer les cibles internes en matière d'efficience énergétique, mais ces cibles devraient viser un changement graduel pour commencer plutôt qu'un changement complet de cap. Nous estimons qu'il faudrait créer des comités d'experts sur les autres volets qui offrent des possibilités d'action intéressantes comme le propose la Table ronde nationale dans son étude. Ces comités pourraient notamment se pencher sur le captage et la séquestration du CO2 et sur la mobilisation de capitaux d'investissement qui permettraient de saisir les possibilités.
    Il faudrait explorer l'éventail complet des possibilités d'action gouvernementale : incitatifs, régime fiscal, réglementation.
(0935)
    Travaillons ensemble à définir une vision de l'avenir énergétique du Canada qui assure aux générations futures un environnement sain, une économie prospère et une excellente qualité de vie.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Lambert.
    Nous allons débuter le tour de sept minutes.
    Monsieur Godfrey, vous avez la parole pour sept minutes.
    Merci beaucoup à tous nos témoins.
    J'aimerais d'abord entendre la réaction de M. Lambert à certains des points soulevés par M. Bramley. Dans son exposé, M. Bramley a parlé, dans le contexte des sables bitumineux, de ce qu'il en coûterait effectivement par baril pour respecter les cibles de Kyoto. Il disait que le coût se situerait entre 58 ¢ et 1,16 $ le baril.
    Pourriez-vous nous dire ce que vous en pensez?
    Comme dans n'importe quelle analyse, la pierre d'achoppement se trouve souvent dans les détails. Je ne me hasarderai pas à répondre avant d'avoir mieux compris les hypothèse sur lesquelles repose cette affirmation.
    Je poserais également comme principe que l'accès aux mécanismes de Kyoto et l'achat de crédits étrangers serait un élément absolument essentiel de tout plan d'action en ce sens, mais bien sûr le coût de ces crédits pour la réduction des émissions grâce au MDP est très difficile à prévoir, et je le répète, les hypothèses sous-jacentes auraient une importance capitale.
    Vous opposez-vous à l'achat de crédits étrangers par l'entremise de mécanismes comme le MDP?
    Nous estimons que plus nous avons d'outils à notre disposition, mieux c'est. Nous aurons d'ailleurs besoin de tous les outils à un moment ou à un autre. Par contre, nous considérons qu'il faut d'abord et avant tout faire progresser les possibilités de développement de nouvelles technologies au Canada et c'est pour cette raison notamment que le captage et le stockage géologique du CO2 nous apparaissent comme absolument prioritaires. À notre avis, le Canada pourrait être un chef de file mondial pour montrer de façon tangible l'utilité de ce procédé. Nous avons l'expertise géologique notamment pour ce qui est de mettre en tandem les émissions de CO2 provenant des sables bitumineux et celles provenant des réservoirs pétroliers et gaziers classiques de l'Alberta, d'offrir au monde une technologie hardie et enthousiasmante.
    Monsieur Lambert, certains disent qu'étant donné le rythme d'expansion rapide des sables bitumineux, nous devrions perfectionner les techniques de captage et de séquestration du carbone avant d'en permettre une plus ample exploitation. Autrement dit, l'existence de cette technologie serait une condition préalable à la croissance future des sables bitumineux afin de réduire les émissions de carbone qui en résultent.
    Qu'en pensez-vous?
    La période de mise en place du réseau collecteur de gaz nécessaire sera assez importante. Il s'agit de systèmes de réseaux collecteurs de gaz à grande échelle et nous allons devoir mettre sur pied des installations dans nos usines pour traiter le CO2 afin d'obtenir la qualité de CO2 voulue pour procéder à l'injection. C'est un peu le problème de la poule et de l'oeuf. Nous installerons ces installations de traitement et de captage du CO2 dans nos usines uniquement dans le cadre de l'expansion de cette ressources.
    Je ne vous ai pas entendu nier la possibilité que le système de captage et de stockage du carbone accompagne — en fait précède ou du moins accompagne de façon parallèle — l'expansion des sables bitumineux, au lieu d'exploiter d'abord les sables bitumineux et d'essayer ensuite de déterminer comment capter le carbone par la suite.
    L'idéal, à mon avis, serait d'adopter une approche parallèle qui nous permettrait à la fois d'établir l'infrastructure nécessaire au captage du carbone et de mettre en valeur la ressource.
    M. Bramley a indiqué que Shell Canada, en ce qui concerne l'une de ses usines, a établi un objectif volontaire de 50 p. 100 de réduction des gaz à effet de serre d'ici 2010. Dans quelle mesure un tel objectif est-il applicable à d'autres entreprises ou à d'autres installations? Autrement dit, si Shell peut réduire ses émissions de 50 p. 100, pourquoi d'autres entreprises ne pourraient-elles pas les réduire de 46 p. 100?
    Nous tenons beaucoup à comprendre ce que Shell prévoit faire pour atteindre cet objectif. Je sais que cette organisation consacre énormément d'effort à atteindre cet objectif. Cela comportera des achats importants de réduction sur le marché international. Comme je l'ai déjà dit, nous ne savons pas précisément quel en sera le coût. Quant à nous, nous avons préféré — et vous le constaterez pour ce qui est des entreprises, d'investir au Canada dans le secteur des énergies renouvelables — dans le développement de l'énergie éolienne, le développement des biocarburants, et la nouvelle technologie — et c'est la voie à suivre que nous privilégions. Bien qu'il ne s'agisse pas d'une solution rapide ni facile — il s'agit plutôt d'une approche à long terme — nous considérons que cette utilisation du capital est plus avantageuse pour le pays à long terme.
(0940)
    À quel stade, si l'on applique les meilleures méthodes — si l'on tient compte de l'urgence de la situation, que l'on offre des incitatifs réels et que l'on adopte une véritable réglementation — envisagez-vous que les sables bitumineux en particulier pourraient passer de cibles d'intensité à des plafonds déterminés? Je pars du principe que ces plafonds déterminés pourraient être atteints grâce à un ensemble d'échanges de crédits internationaux par le biais de certaines des initiatives que vous avez décrites, comme l'éthanol, l'énergie éolienne et ainsi de suite, à quel stade pensez-vous que nous pourrons mettre fin à l'augmentation absolue d'émissions dans le secteur des sables bitumineux, compte tenu des nouvelles technologies?
    Je ne pourrais pas vous donner une année précise. Cela dépend en partie du rythme de l'innovation et du déploiement de la technologie au cours de cette période. Je peux vous dire que le rythme de l'innovation va s'intensifier énormément pour de nombreuses raisons.
    Mais l'industrie considère qu'il est important de réduire l'intensité de la ressource en ce qui concerne l'exploitation des sables bitumineux. L'objectif à long terme de 2050 nous paraît atteignable. La trajectoire établie par le gouvernement nous semble un bon modèle à adopter.
    Nous devons passer au prochain intervenant. Je vous remercie.
    Monsieur Bigras, vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président. Tout d'abord, je souhaite la bienvenue à nos témoins.
     Il y a un an, j'ai entendu une nouvelle qui m'a beaucoup frappé. Elle portait sur la situation financière de Suncor Energy Inc. Pour le trimestre se terminant le 31 mars 2006, on annonçait une augmentation de son chiffre d'affaires, qui passait de 294 millions de dollars à 1,3 milliard de dollars par an. D'autre part, son bénéfice était passé de 67 millions de dollars à 713 millions de dollars. Sur le plan économique et financier, ça va bien pour Suncor Energy Inc.
    Cependant, on aurait souhaité que sur le plan de la réduction des émissions de gaz à effet de serre, votre bilan soit aussi éloquent que vos résultats financiers.
    Puisque vos bénéfices sont élevés, que votre chiffe d'affaires augmente et que les coûts reliés à la réduction des émissions de gaz à effet de serre sont peu élevés, pourquoi craindre une cible de réduction d'émissions de gaz à effet de serre très ambitieuse? Votre situation financière est bien meilleure que celle d'autres secteurs industriels.

[Traduction]

    Cela ne se limite pas à une simple question de capacité financière. Si vous examinez les opérations de notre installation, nous exploitons différents types d'installations. Ces installations qui ont été construites par le passé ne sont tout simplement pas aussi efficaces que les nouvelles installations qui vont être mises sur pied. Nous ne pouvons pas transformer l'équipement plus ancien du jour au lendemain. Ce n'est pas ainsi que ce font les choses.
    Mais il est important de signaler que si nous avions la même intensité énergétique aujourd'hui que celle qui existait en 1990, nous émettrions plus de 40 mégatonnes de gaz à effet de serre qu'aujourd'hui. Nous avons donc réduit notre taux d'émissions de façon considérable grâce à des améliorations continues.
    La prochaine génération d'installations d'exploitation des sables bitumineux sera nettement plus efficace que les installations de la génération actuelle, et les nouvelles technologies qui pourront être utilisées bientôt et à moyen terme permettront d'apporter d'importantes améliorations. Donc nous avons l'intention d'investir dans la réduction de notre intensité énergétique.
(0945)

[Français]

    L'Alberta Chamber of Resources prévoit une augmentation des émissions de gaz à effet de serre relative à la production des sables bitumineux de l'ordre de 285 p. 100.
    Pouvez-vous confirmer qu'il y aura une augmentation de l'ordre de plus de 200 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre provenant des sables bitumineux, au cours des prochaines années? 
    J'ai lu votre mémoire. À la page 2 et à la page 5, vous vous vantez du fait que l'intensité des gaz à effet de serre émis par Suncor Energy Inc. est inférieure de 25 p. 100 à ce qu'elle était en 1990. Si on prévoit une augmentation de 285 p. 100 de la valeur absolue des émissions de gaz à effet de serre liés à la production des sables bitumineux, n'induisez-vous pas la population en erreur en présentant de tels chiffres, qui ne constituent pas le vrai portrait de la réalité?

[Traduction]

    Tout d'abord, nous publions chaque année un rapport sur les émissions de gaz à effet de serre, et ce depuis plus d'une dizaine d'années. Tout récemment, nous venons de publier notre quinzième rapport annuel sur les gaz à effet de serre, donc nous ne cachons rien à personne. Tout le monde peut consulter notre rapport pour voir ce que nous faisons à cet égard.
    Mais il est vrai qu'au fur et à mesure que les volumes de production provenant de l'exploitation des sables bitumineux augmentent, nous sommes assujettis aux lois de la physique. Les émissions de gaz à effet de serre augmentent. Elles augmentent moins qu'elles augmenteraient autrement, et c'est un choix de société.
    La ressource que représentent les sables bitumineux ne nous appartient pas. Elle appartient à la population de l'Alberta et aux Canadiens. Nous voulons la mettre en valeur de la meilleure façon possible et améliorer notre façon de faire avec le temps également. Mais la mise en valeur des sables bitumineux est un choix que font les Canadiens, et il comporte des conséquences environnementales.
    D'un autre côté, notre industrie est extrêmement réglementée et est l'une des industries au monde les plus réglementées.

[Français]

    Parlons du marché du carbone. On pouvait lire dans Le Devoir de ce matin, et je cite :
De plus, la Bourse de Toronto estime que des cibles basées sur la réduction de l'intensité des GES plutôt que sur une réduction absolue, comme le stipule le protocole de Kyoto, n'est pas la meilleure voie à suivre si l'on veut un marché efficace.
    C'est ce que des représentants de la Bourse de Toronto affirmaient hier. En proposant des règles liées à l'intensité plutôt que des règles absolues de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ne compromettez-vous pas la mise en place d'un marché du carbone au Canada?
    Cette question s'adresse à tous les témoins.

[Traduction]

    Je vous demanderais de répondre brièvement.
    Tout d'abord, je pense que cette question illustre bien ce que je soulignais dans mon exposé, à savoir la différence entre une orientation négative et une orientation positive.
    Nous considérons que les nouvelles technologies comme le captage du CO2 sont les outils qui nous permettront d'apporter de réelles réductions à long terme. Et entamons un dialogue sur les éléments nécessaires pour attirer le capital pour concrétiser ce genre de mesures, plutôt que des cibles punitives qui ébranlent la confiance des investisseurs et nuisent à notre capacité à financer les améliorations environnementales dont nous parlons aujourd'hui.
    J'ai deux commentaires à faire à ce sujet. Tout d'abord, il y aura énormément d'obstacles à l'établissement d'un marché du carbone au Canada. Le Canada est un pays beaucoup trop petit pour avoir son propre marché du carbone, donc à moins que nous n'établissions des liens avec le reste du monde, cela ne fonctionnera pas. Il existera un certain nombre d'autres obstacles.
    Parallèlement, assurons-nous que l'accessoire ne régit pas l'essentiel. L'objectif n'est pas d'avoir un marché du carbone. L'objectif, c'est de réduire l'intensité des gaz à effet de serre et au bout du compte les gaz à effet de serre dans l'économie.
    Le marché du carbone peut faciliter les choses. L'important, c'est de mettre des mécanismes en place qui inciteront les investisseurs à faire les choix qui s'imposent. Avec le temps, il est probable que cela donnera lieu à l'établissement d'un marché du carbone.
(0950)
    J'ajouterais qu'il est utile de pouvoir établir des liens avec d'autres marchés du carbone. À l'heure actuelle, c'est l'Union européenne qui possède le plus important marché du carbone au monde, et la Commission européenne a indiqué clairement qu'il ne serait pas possible au Canada d'avoir des liens avec ce marché européen si nous avons des cibles d'intensité.
    Mais je pense que le plus grand problème que posent les cibles d'intensité, c'est que les gouvernements en ont abusé. Nous avons vu les cibles d'intensité pour les gaz à effet de serre établies par l'administration Bush et par le gouvernement de l'Alberta, qui ont été présentées comme un important pas en avant, comme un important moyen de réduction des émissions, alors qu'en réalité elles permettent aux émissions de continuer d'augmenter.
    Nous avons besoin de cibles que tout le monde peut facilement comprendre; qui sont liées à l'objectif environnemental, qui portent sur les émissions en tant que telles et non sur l'intensité des émissions; et cela accroît l'obligation de rendre des comptes.
    Si le gouvernement veut que les émissions du Canada continuent d'augmenter, il peut continuer à établir des cibles d'émissions absolues, mais au moins tout le monde saura précisément quelle était l'intention visée.
    Je vous remercie.
    Nous allons maintenant passer à M. Cullen. Vous avez sept minutes.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je tiens à remercier les témoins.
    J'encourage les témoins à prendre connaissance des témoignages que nous avons reçus hier soir de trois des membres du groupe qui ont présenté un exposé sur les rapports du GIEC. Je pense qu'il s'agit en fait de la plus récente condamnation du modèle économique que nous encourageons depuis un siècle. Il s'agit d'estimations très prudentes de la part de ces 2 300 climatologues, mais ces études concluent qu'il faut agir et de toute urgence.
    Pourtant, lorsque j'entends certains des témoignages qui ont été présentés ici aujourd'hui, j'ai l'impression que nous disposons de tout le temps voulu. Nous pouvons développer graduellement des systèmes de stockage du carbone. Certains membres de l'industrie citent des chiffres de 60 $ la tonne et certaines personnes à l'extérieur de l'industrie citent des chiffres de 30 $ la tonne.
    Monsieur Bramley, vous en avez parlé récemment.
    J'ai récemment eu une altercation avec le premier ministre de l'Alberta parce qu'il a dit que l'Alberta avait été la province qui avait pris les mesures les plus énergiques pour capter et contrôler les émissions de CO2. Il prétendait par ailleurs avoir amélioré l'efficacité énergétique de 19 p. 100 par rapport au niveau de 1990. Or, les émissions de CO2 en l'Alberta ont augmenté de près de 40 p. 100 pendant que ces améliorations étaient apportées.
    Est-ce faire preuve de bonne foi lorsqu'on laisse entendre que l'on prend des mesures énergiques pour réduire des émissions alors que les émissions ont augmenté de près de 40 p. 100?
    Nous devons toujours être prudents lorsque nous utilisons le terme « réduction » parce que c'est toujours une réduction par rapport à quelque chose. Le genre de réduction dont on parle souvent ne sont que des réductions très relatives par rapport à des prévisions quelconques d'émissions qui augmentent rapidement. Je dirais que très souvent il ne s'agit pas de réduction au sens propre.
    L'objectif fixé pour l'Alberta vaut la peine qu'on s'y arrête un instant. Il s'agit d'un objectif de réduction de l'intensité des émissions de l'économie de l'Alberta de 50 p. 100 sur 30 ans, de 1990 à 2020. Nous avons calculé que si l'économie de l'Alberta continuait de croître au cours de la décennie actuelle et au cours de la décennie prochaine au même rythme qu'elle a connu au cours des années 90, l'Alberta atteindrait la cible de réduction de l'intensité de 50 p. 100, tandis que l'augmentation des émissions réelles se situerait entre 65 et 85 p. 100. Je pense que cela illustre assez clairement que cette approche ne produit pas le genre de résultats que les scientifiques considèrent nécessaires.
    Lorsque l'objectif de l'Alberta a été annoncé, le gouvernement a laissé entendre lors de la couverture médiatique qui a suivi l'annonce, qu'il s'agissait simplement d'un report des cibles de Kyoto et que cet objectif allait en fait être nettement préférable à celui de Kyoto mais simplement reporté de 10 ans. De toute évidence, la réalité est toute autre.
    C'est un exemple de l'abus que l'on peut faire des cibles d'intensité. Par souci d'honnêteté et de transparence, je pense que nous devons avoir des cibles en fonction d'émissions véritables que chacun peut comprendre.
    J'ai une question pour M. Lambert.
    En réponse à une question qui a été posée précédemment, vous avez fait allusion je pense à un moment donné au respect de Kyoto. Est-ce que votre entreprise est d'avis que le Canada devrait respecter ses obligations en ce qui a trait au Protocole de Kyoto?
    Franchement, nous tentons de mettre l'accent sur les choses que nous pouvons contrôler, c'est-à-dire la technologie, l'énergie renouvelable et les biocombustibles pour aider à créer l'avenir énergétique qui, à notre avis, sera nécessaire.
    Oui, nous tenons compte du Protocole de Kyoto et de ses mécanismes. Cependant, étant donné l'absence de progrès en général au Canada en ce qui concerne le développement de la politique, nous n'avons pas trouvé qu'il était très productif de se tourner vers les gouvernements pour obtenir des conseils.
    Vous avez sans doute eu bien raison de faire cela jusqu'à présent.
    Je voudrais vous poser une question au sujet de la pyramide sociale, environnementale et économique dont vous avez parlé, sur laquelle vous vous fiez presque.
    J'ai parlé au maire et au conseil du district régional de Wood Buffalo à Fort McMurray et ils ont demandé un moratoire sur l'expansion future. Combien d'argent prévoyez-vous investir à l'heure actuelle dans les sables bitumineux?
(0955)
    Je n'ai pas ce chiffre sous les yeux.
    Est-ce qu'on parle de dizaines, de centaines de millions de dollars ou de milliards?
    C'est certainement dans les dizaines de milliards de dollars.
    Cependant, je pense qu'il est important de nous demander qu'est-ce qui motive cette croissance. C'est la demande de carburant de transport pour les avions, les trains et les automobiles. À l'heure actuelle, il n'y a aucune substitut pour les carburants de transport à base d'hydroélectricité. Jusqu'à ce que nous commencions à nous attaquer à la demande de ce type de carburant également, la demande de pétrole va continuer d'exister dans le monde.
    Croyez-vous au principe du pollueur payeur, en ce sens que nous avons maintenant déterminer que les émissions de CO2 sont une forme de pollution qui causent du tort?
    Je suis originaire du nord-ouest de la Colombie-Britannique. Nous avons eu la coccinelle du pin, et elle se trouve maintenant dans vos forêts. Nous avons pu constater les ramifications sociales et économiques de cette pollution. À votre avis, ce coût devrait-il être payé par l'entreprise?
    Le principe du pollueur payeur peut faire l'objet d'un très bon débat. Je pense qu'il est important de définir comment établir cette limite. Si nous l'établissons uniquement du côté de la production sans tenir compte des pollueurs qui sont du côté de la demande, nous n'obtiendrons jamais le niveau d'engagement dans notre société qui sera nécessaire pour apporter les changements dont nous parlons. En d'autres termes, je dirais que chacun d'entre nous doit être conscient du fait que lorsque nous conduisons nos automobiles, nous contribuons aux émissions de gaz à effet de serre tant avec les émissions provenant du tuyau d'échappement de nos voitures par la production en amont, sinon nous allons nous retrouver avec un grave problème.
    Je vais conclure en faisant un petit rappel. 20 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre provenant d'un baril de pétrole sont liées à sa production tandis que 80 p. 100 sont liées à son utilisation finale.
    Monsieur Bramley, il y a quelque chose qui n'est pas très clair pour moi. Vous avez dit que les coûts d'investissement seraient d'environ 58 cents à 1,16 $ le baril. Je suis certain que l'industrie ne sera pas d'accord avec cela, même si le coût était deux fois ou même jusqu'à cinq fois plus élevé que votre estimation, pourquoi l'industrie ne ferait-elle pas ces investissements? Si le prix du baril de pétrole est de 50 $ ou 60 $ ou même jusqu'à 80 $, comme c'est le cas depuis les quelques dernières années, pourquoi ne pas faire cet investissement s'il ne représente qu'un pourcentage marginal du coût total?
    Une réponse courte, s'il vous plaît.
    La réponse courte, c'est que l'industrie n'a pas à se soumettre à des exigences de réduction des émissions réglementées et au prix des émissions qui en découlerait et qui les inciteraient à apporter de tels changements.
    Par ailleurs, il n'y a absolument aucun mystère en ce qui concerne les montants que j'ai cités. Une production typique de sable bitumineux émet 100 kilogrammes de dioxyde de carbone le baril. Il suffit de multiplier cela par une réduction de 46 p. 100 et de multiplier le résultat par quelque chose comme 15 $ la tonne pour les crédits internationaux jusqu'à 30 $ la tonne pour le captage et l'entreposage du carbone, et on arrive très facilement aux chiffres que j'ai cités. Je ne pense pas qu'il y ait quoi que ce soit de mystérieux au sujet de ces chiffres.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Warawa, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins d'être ici aujourd'hui.
    Je vous remercie pour votre témoignage. Ce que nous avons fait avec le projet de loi C-30, c'est que nous l'avons divisé en différents sujets et le sujet d'aujourd'hui est l'importante industrie pétrolière et gazière. Mes questions porteront donc sur ce sujet.
    Je trouve intéressant que nous mettions l'accent sur 50 p. 100 de cette grande industrie — le pétrole et le gaz — tandis qu'il y a eu des observations qui ont été faites au sujet de l'autre moitié, c'est-à-dire nous, en tant que consommateurs. En tant que consommateurs au Canada, dans le monde, nous alimentons cet appétit, cette soif pour cette source d'énergie. C'est ce qui alimente l'expansion. La Chine a un appétit énorme pour toute cette énergie.
    Nous sommes un bon pays où investir. Nous avons un pays pacifique. C'est un bon endroit où investir. Je pense que c'est pour cela que les investissements sont faits au Canada, c'est pour cette raison que les États-Unis se tournent vers le Canada, que le monde se tourne vers le Canada. Je pense que nous sommes le deuxième pays au monde, après l'Arabie saoudite, pour ce qui est des ressources naturelles en ce qui a trait à cette source d'énergie propre.
    Les deux sont cependant liés. Et je pense, monsieur Lambert, que vous y avez fait allusion. Vous avez dit que nous devions faire notre part. Donc, en tant que consommateur, je tente de réduire la quantité d'énergie que j'utilise. Chacun d'entre nous, j'en suis certain, a la responsabilité de tenter de réduire la quantité d'énergie qu'on utilise.
    Nous examinons cependant aujourd'hui les réductions que peut faire en fait l'importante industrie du pétrole et du gaz. Je pense que ce que M. Bramley dit, c'est qu'il faut faire en sorte que l'industrie réduise maintenant. Il ne faut pas la laisser réduire graduellement mais il faut qu'elle réduise maintenant. Je ne veux pas lui faire dire ce qu'il n'a pas dit. Il pourra préciser dans un moment.
    Il y a urgence. On nous l'a dit. Le changement climatique est un fait, alors nous devons changer. Nous avons vu les graphiques qui montrent que les émissions ont augmenté, que le changement climatique se produit et que nous devons atteindre cet objectif de réduction.
    Nous espérons, je pense, que votre industrie fera le captage, le stockage. Vous avez fait des observations à ce sujet, vous avez dit que vous vouliez une mesure incitative. Vous voulez une carotte et un bâton. Par le passé, nous avons utilisé les mesures volontaires; nous avons utilisé les protocoles d'entente; nous avons dit que tous les secteurs de l'industrie devaient participer à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Vous avez cependant fait une mise en garde en disant que nous devons faire bien attention de ne pas seulement utiliser un bâton, mais aussi une carotte.
    Vous avez dit par ailleurs qu'il faudra un certain temps pour construire l'infrastructure. Vous avez étudié la question. Je suis allé à Fort McMurray. J'ai vu les sables bitumineux. J'ai lu la documentation de Pembina. Nous avons examiné ce dossier de très près.
    Nous avons l'intention de présenter des règlements. Nous avons donné un avis d'intention de mettre en place une réglementation. À court terme, il sera question d'intensité tandis qu'à moyen et à long terme, il y aura des limites réelles. C'est le plan. Ces objectifs à court terme seront annoncés sous peu. Craignez-vous qu'il s'agisse là d'un trop gros bâton? J'espère que non.
    Monsieur Bramley, vous pouvez peut-être répondre également. Sommes-nous sur la bonne voie avec le projet de loi C-30, ou est-ce qu'à votre avis, il met en place une trop grande réglementation?
(1000)
    Non, je dirais à première vue qu'il est sur la bonne voie pour ce qui est d'imposer des obligations de rendement réglementé aux entreprises qui nous feraient fléchir la courbe vers un objectif de stabilisation à moyen terme.
    Je dirais cependant que, parallèlement à cet objectif d'efficacité réglementée, il serait urgent de faire des progrès sur le plan de la technologie et que les gouvernements fédéral et provinciaux travaillent avec l'industrie pour faire en sorte qu'il y ait captage et stockage géologique du CO2, une sorte de partenariat privé et public. Cette approche a caractérisé la mise en valeur des sables bitumineux du Canada au départ. C'était certes avant que l'on parle du changement climatique, mais c'était un effort collectif entre les secteurs public et privé pour développer la technologie afin de mettre en valeur les sables bitumineux. Faisons donc la même chose maintenant pour ce qui est du captage et du stockage géologique du CO2.
    Tout d'abord, j'ai un problème avec la trajectoire des émissions contenues dans l'avis d'intention qui accompagnait l'annonce de la Loi canadienne sur la qualité de l'air, car elle contient un objectif pour 2050, ce qui représente d'importantes réductions des émissions — je dirais même des réductions qui ne seraient pas suffisantes du point de vue scientifique, mais quoi qu'il en soit d'importantes réductions des émissions d'ici 2050.Par ailleurs, l'avis d'intention prévoit que les émissions de l'industrie lourde resteront au niveau actuel ou au-dessus du niveau actuel jusqu'en 2025. Je ne vois vraiment pas comment on peut croire que l'objectif de 2050 puisse être atteint si nous retardons... ou s'il faudra prendre toutes les mesures au cours de la deuxième partie de cette période.
    Deuxièmement, j'aimerais revenir au calcul très simple que j'ai présenté aujourd'hui. Les producteurs de sables bitumineux peuvent immédiatement assumer la responsabilité d'un objectif au niveau du Protocole de Kyoto pour les émissions —
    Monsieur Bramley, pouvez-vous répondre à ma question?
    À votre avis, quel serait un échéancier réaliste pour mettre en place le captage et le stockage? C'est la question que je pose.
    À l'heure actuelle il y a déjà 18 mégatonnes de dioxyde de carbone captées et stockées en un seul site au Texas. Il y a plus de 3 000 milles de réseaux de pipeline de dioxyde de carbone qui existent déjà aux États-Unis. Ce n'est pas une technologie qui sera mise au point dans 15 ans; c'est une technologie qui existe et qui est déjà déployée à grande échelle. Si c'est ce que l'industrie veut utiliser pour réduire ses émissions, cela ne sera possible que si l'industrie fait face à un prix des émissions pouvant atteindre 30 $ la tonne. C'est l'objectif que devra viser le système de réglementation.
(1005)
    Dans combien de temps à votre avis cette infrastructure pourrait-elle être en place et fonctionner?
    Veuillez donner une réponse courte.
    Le travail pour mettre l'infrastructure en place pourrait commencer immédiatement, dès que l'on pourra s'attendre à ce qu'il y ait un prix suffisamment élevé pour le carbone.
    Merci, monsieur Bramley.
    M. Holland est le suivant.
    Merci, monsieur le président, et merci aux témoins.
    Ma première question s'adresse à M. Bramley.
    On a posé une question au sujet de l'efficacité du projet de loi C-30, mais vous n'avez pas eu la chance d'y répondre. Est-il juste de dire à ce moment-ci que le projet de loi C-30 ne représente en réalité qu'une série de modifications mineures à la LCPE et que, à votre avis, notre comité devrait peut-être apporter des modifications de fond si nous voulons réellement présenter un plan d'action en ce qui a trait au changement climatique?
    Je suis certainement troublé par le fait que le gouvernement fédéral n'a pas à l'heure actuelle un plan global en ce qui a trait au changement climatique. Il a fait une série d'annonces isolées qui ne visent pas toutes les sources clés d'émissions au Canada. Dans sa forme actuelle, le projet de loi C-30 est essentiellement une série de modifications assez techniques qui sont apportées à la loi en vigueur. Il ne s'agit certainement pas d'un plan en ce qui a trait au changement climatique.
    En fait, un plan de lutte contre le changement climatique devrait être beaucoup plus qu'un simple projet de loi. En fait, nous savons que le gouvernement pourrait agir immédiatement en invoquant la loi actuelle, la LCPE, s'il voulait mettre en place immédiatement des objectifs pour la réglementation des gaz à effet de serre. Étant donné que nous avons l'occasion de modifier le projet de loi C-30 et de le renforcer, c'est à mon avis l'occasion de transformer un projet de loi qui dit à l'heure actuelle « le gouvernement peut » par un projet de loi disant « le gouvernement doit » — en d'autres termes, d'imposer des exigences pour donner davantage confiance aux Canadiens dans le fait que le gouvernement fédéral sera obligé de mettre en place certains des éléments qu'on s'attendrait de trouver dans le cadre d'un plan crédible de lutte contre le changement climatique.
    Vous avez parlé de la capacité de l'industrie des sables bitumineux d'atteindre les objectifs de Kyoto dans le délai prévu — c'est-à-dire d'ici 2012. On a certainement dit, et je sais que votre organisation a dit, que plus de 50 p. 100 de la croissance des émissions de gaz à effet de serre proviendraient des sables bitumineux en respectant le statu quo. Le type de croissance envisagée par le gouvernement est jusqu'à cinq fois la production actuelle des sables bitumineux d'ici 2015. Si ce genre de croissance se réalise, les émissions seraient de toute évidence beaucoup plus élevées, pourtant l'Institut Pembina recommande la neutralité en ce qui a trait au carbone d'ici 2020. Je me demande si vous pourriez nous dire comment cela serait possible.
    Lorsque nous avons analysé comment ce secteur pourrait atteindre la neutralité en ce qui a trait au carbone d'ici 2020, nous avons tenu compte d'un certain nombre de scénarios qui combinaient des compensations d'achat — en d'autres termes, financer les réductions d'émissions ailleurs pour compenser les émissions de l'industrie — au déploiement du captage et du stockage du carbone à différents niveaux. Je n'ai pas la gamme exacte des résultats devant moi, mais pour atteindre l'objectif, le coût serait de moins de cinq dollars le baril de pétrole.
    En ce qui concerne les mécanismes de mise en valeur écologique et les échanges de crédits internationaux — tous les témoins pourront peut-être nous en parler — je crois comprendre que la préférence serait de réduire les émissions au Canada, mais que toutes les options doivent être utilisées.
    Pourriez-vous nous parler également de la possibilité d'utiliser le mécanisme de mise en valeur écologique ou d'autres méthodes d'échange de crédits internationaux pour promouvoir la technologie canadienne et son utilisation et pour aider peut-être à atteindre certains de nos objectifs en matière d'aide étrangère au développement.
    Tout d'abord, investir dans des réductions réelles d'émissions dans les pays en développement grâce aux mécanismes de développement propre est une façon tout à fait légitime de prendre la responsabilité des réductions d'émissions qui ne sont pas réalisables, dans un délai immédiat, au Canada. Cela a un impact positif pour ce qui est de protéger le Canada contre le changement climatique car nous croyons comprendre que les réductions d'émissions protègent le Canada du changement climatique peu importe où il a lieu.
    Il ne fait aucun doute que c'est une occasion également pour nous d'exporter les technologies canadiennes. Malheureusement, à l'heure actuelle seulement environ douze projets, parmi les 500 projets enregistrés dans le cadre du mécanisme de développement propre, ont un contenu canadien et ce, en raison de l'insuffisance des progrès accomplis pour mettre en place des objectifs réglementés pour les émetteurs industriels au Canada.
    Je serais cependant d'accord avec vous pour dire qu'il faudrait également considérer les mécanismes de développement propre comme une sorte de forme spécialement ciblée d'aide étrangère, visant les investissements qui aident l'environnement au Canada mais qui aident également les pays en développement à avoir accès à des ressources dont ils ont bien besoin pour s'engager dans la voie d'un développement plus durable.
(1010)
    J'aimerais demander aux autres témoins d'être très brefs.
    Je conviens que le mécanisme de développement propre est une bonne idée et que c'est une partie importante du cadre de Kyoto, mais ce n'est qu'une partie. Les coûts de transaction des projets NDP sont élevés et il faut tenir compte des longues heures de travail des dirigeants principaux pour mettre ces projets en marche. J'espère que ces coûts diminueront avec le temps.
    Une autre chose, c'est qu'à moins que l'investissement ne soit proche de leurs activités essentielles, il est difficile pour bien des entreprises de dire où il devrait être fait. L'activité essentielle est le processus de production, le processus de commercialisation. Pour certaines entreprises c'est tout naturel tandis que pour d'autres ce ne l'est pas du tout.
    Le dilemme qui se pose à notre entreprise, c'est que les mécanismes de développement propre sont un instrument important, qui font partie de la boîte à outils, mais c'est une solution facile, par rapport au dur labeur qu'implique le développement des nouvelles technologies dont nous avons parlé aujourd'hui. Il faut trouver la meilleure solution à long terme. Nous croyons que la meilleure solution est de concevoir et d'appliquer les nouvelles technologies, plutôt que d'utiliser les mécanismes de développement propre comme solution de remplacement.
    Passons à M. Jean, mais avant, je vous rappelle que le sujet du jour, c'est l'industrie de grande taille: pétrole et gaz. Ce ne sont pas les outils. D'aucuns diront que les mécanismes de développement propre sont un outil, et j'essaie simplement de vous ramener à notre sujet.
    Monsieur Jean, vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.
    Si vous me le permettez, j'ai un rappel au Règlement à ce sujet.
    Dans ce cas, les MDP seraient un outil dont pourrait se prévaloir le secteur pétrolier et gazier. Les témoins de ce secteur expliquaient comment ils pourraient se servir de cet outil pour atteindre leurs objectifs de réduction d'émissions, je crois que c'est extrêmement pertinent et j'étais heureux d'avoir leur avis au sujet de —
    Je comprends. Je veux juste m'assurer que la discussion a un lien de près ou de loin, avec les grosses industries, pétrolière et gazière.
    Est-ce que ça n'est pas lié?
    Je ne vais pas me lancer dans cette discussion avec vous, monsieur Holland. Comme dans le passé, j'essaie de faire en sorte que nos discussions portent sur le sujet du jour, en sachant qu'il y aura des digressions. Nous avons été très indulgents et nous continuerons à l'être. Je ne faisais que rappeler que le sujet principal d'aujourd'hui est le secteur pétrolier et gazier. Les MDP peuvent faire partie de cette discussion, mais ce n'est pas le sujet principal.
    Monsieur Jean, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Est-ce que l'intervention de M. Holland a été défalquée de mon temps?
    Vous avez cinq minutes.
    Excellent.
    J'ai deux questions pour M. Lambert.
    Monsieur Lambert, votre entreprise, Suncor, a été fondée dans le nord de l'Alberta en 1965. Est-ce exact? Est-ce à peu près cela?
    Oui.
    Nous avons entendu M. Bramley dire que les sables bitumineux ne pouvaient être délocalisés vers un autre pays, que nous contrôlons cette ressource et que sa production ne peut être délocalisée vers un autre pays. Pourtant, le pétrole est acheté et vendu à l'échelle internationale, et les prix sont fondés sur le marché mondial, n'est-ce pas?
    Oui.
    Pouvez-vous nous donner une idée du coût de production par baril des sables bitumineux? Combien cela coûte-t-il pour produire un baril de pétrole aujourd'hui?
    M. Gordon Lambert: Entre $20 et $30 le baril.
    M. Brian Jean: L'Arabie saoudite est le premier producteur mondial de pétrole ; elle dispose de la plus grande réserve. Nous arrivons en deuxième place. Combien cela coûte-t-il à l'Arabie saoudite pour produire un baril de pétrole?
    Deux ou trois dollars.
    Cela coûte donc beaucoup plus cher de produire un baril de pétrole au Canada.
    Oui.
    Je vis en Alberta depuis près de 40 ans maintenant. Je me souviens d'une chose dont je n'ai pas le droit de parler en Alberta, le programme énergétique national, qui a été proposé par le gouvernement libéral il y a quelque temps. Ses conséquences sur notre communauté et sur l'économie de l'Alberta de façon générale — je veux évoquer cette question très rapidement. À l'époque, je crois qu'il y avait 25 000 personnes dans cette communauté. Mes parents avaient une entreprise. Toutes les entreprises privées de la région ont fermé en quatre ou cinq ans, beaucoup de gens ont perdu leur emploi ou ont fait faillite. Tout cela est arrivé à cause d'une chose dont vous avez parlé, la perte de confiance des investisseurs.
    À votre avis, quelle est la chose la plus importante que nous pouvons faire en tant que gouvernement en matière de politiques, dans le cadre de notre travail sur le projet de loi C-30? Pouvons-nous faire quelque chose en ce qui a trait à la confiance des investisseurs?
(1015)
    C'est absolument fondamental. Si l'on impose une cible punitive ou un prix pour le carbone qui finit par être dissuasif, les actionnaires ne sont pas prisonniers, ils vont tout simplement quitter notre secteur, ce qui nuit à notre capacité à changer comme on le souhaite. Miner la confiance des investisseurs serait certainement une conséquence non prévue au projet de loi qui entraverait nos progrès en matière d'environnement.
    Une dernière question à ce sujet. En 1986-1987, Dee Parkinson était, je crois, votre PDG. À l'époque, Suncor a même envisagé de fermer ses portes, car elle n'était plus rentable. Est-ce exact?
    C'était en 1987, en effet.
    Combien la Suncor emploie-t-elle de personnes actuellement dans le Nord de l'Alberta?
    Cela dépend si vous comptez les travailleurs à temp plein et les travailleurs à contrat. Sur notre site, il y a presque toujours au moins 10 000 travailleurs.
    Connaissez-vous le lieu d'origine de chaque travailleur, en Alberta ou ailleurs au Canada?
    Ils viennent de partout du Canada, de toutes les régions. Il y a même des travailleurs spécialisés qui viennent de l'étranger.
    Est-ce que la séquestration présente d'autres avantages à part la possibilité de retenir les gaz à effet de serre? Par exemple, je crois savoir que les opérations de séquestration vont être plus efficaces que le pompage d'autres substances, comme l'eau, pour récupérer le gaz. Est-ce exact?
    Oui, on a beaucoup recours à des opérations d'inondation des réservoirs conventionnels de pétrole pour améliorer l'efficacité de l'extraction. On peut se servir du CO2 en remplacement de l'eau qui sert à inonder, et on améliore ainsi la récupération du pétrole conventionnel.
    Est-ce que l'on considère que c'est là la perspective la plus prometteuse dans l'immédiat pour les sociétés énergétiques du Nord de l'Alberta?
    Comme l'injection de CO2 dans les réservoirs de ce type génère des revenus, elle suscite beaucoup d'intérêt. Mais si l'on veut tirer le meilleur parti de la récupération du CO2 tout en évitant la libération dans l'atmosphère de gaz à effet de serre, on va devoir également injecter du CO2 dans des réservoirs de stockage, qui seront essentiellement d'anciens réservoirs de gaz, une fois ce gaz récupéré. Mais naturellement, si l'on stock du CO2, il ne génère aucun revenu supplémentaire.
    Donc pour l'essentiel, à mesure que l'on extrait du gaz en Alberta ou même en Saskatchewan, le cas échéant, plus la technologie de la séquestration va progresser, plus elle va être avantageuse, aussi bien pour l'industrie que pour l'ensemble de la planète.
    Oui, et nous pensons qu'il y a possibilité d'innover grâce à de nouvelles utilisations du CO2 qui n'ont pas encore été découvertes, mais qui devraient apparaître une fois que les sources d'approvisionnement en CO2 seront disponibles.
    Merci.
    Merci, monsieur Lambert.
    Nous allons passer à M. Lussier. Vous avez cinq minutes, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Monsieur Cleland, on peut lire dans votre document que le gaz naturel représente 26 p. 100 de l'énergie consommée au Canada et que ce pourcentage est en croissance.
    Selon vous, dans quel domaine cette croissance se fera-t-elle sentir dans les années à venir? La voiture au gaz naturel pourrait-elle être un facteur de cette croissance?

[Traduction]

    Le principal domaine de perspective de croissance est la production d'électricité et, à plus longue échéance, la distribution, le chauffage mixte et les applications électriques. Le gaz est en croissance dans d'autres parties de l'économie, y compris dans les utilisations résidentielles et commerciales, et sa croissance pourrait être encore plus forte, au point qu'il supplante l'électricité.
    On note une certaine croissance de son utilisation dans des véhicules, en particulier des véhicules lourds à usage urbain, qui présente de remarquables avantages quant à la qualité de l'air en milieu urbain, mais c'est encore très modeste.

[Français]

    Qu'en est-il de l'auto?

[Traduction]

    C'est beaucoup plus difficile. On a déjà essayé de doter les services de police de flottes de voitures fonctionnant au gaz, mais les fabricants de matériel d'origine ont tendance à s'en méfier. Le domaine le plus prometteur pour l'avenir est celui des gros véhicules, comme les autobus.

[Français]

    Merci.
     Monsieur Bramley, vous dites que vous êtes en faveur d'un marché du carbone et que l'administration des crédits de carbone devrait se faire territorialement.
    Voulez-vous développer un peu cette notion de l'administration des crédits de carbone, sur le plan territorial?
    Nous voulions proposer une solution de rechange permettant d'atteindre des objectifs réglementés pour ceux qui ne sont pas à l'aise avec le financement de projets à l'étranger, l'acquisition de crédits prévus par le Protocole de Kyoto. L'idée est de proposer cette possibilité de faire des versements au taux de 30 dollars la tonne dans un fonds qui serait indépendant du gouvernement. Cet argent serait réinvesti dans des projets qui généreraient des réductions d'émissions localement, à l'intérieur de la province d'origine des versements. Au cas où on ne trouverait pas suffisamment de possibilités de réduction dans la province en question, il y aurait une subvention pour permettre quand même aux pollueurs de rester à l'intérieur de ce plafond de 30 dollars la tonne. Cela permettrait d'atteindre un certain équilibre géographique pour ceux qui se préoccupent de cette question, tout en rassurant l'industrie quant au prix de la tonne.
(1020)
    Vous n'envisagez aucune possibilité d'échange interprovincial?
    Au contraire, cette option provinciale n'en est qu'une parmi plusieurs.
    Elle n'élimine pas la possibilité —
    Pas du tout, on aurait toujours la possibilité de le faire ailleurs au pays ou ailleurs dans le monde.
    Monsieur Lambert, il est question, dans votre document, de répartition équitable des efforts. Le principe du pollueur-payeur ou celui de la répartition territoriale font-ils partie de votre philosophie? Que pensez-vous de la fameuse taxe que le gouvernement du Québec vient d'imposer aux pétrolières, qui est de quelques cents le litre d'essence, taxe qui a été refilée au consommateur par les industries pétrolières?

[Traduction]

    Eh bien je pense que tout signal exprimé par l'intermédiaire du prix doit se rendre jusqu'à l'utilisateur final du produit. Si l'on essaie de faire évoluer les comportements des consommateurs, il faut généralement en donner le signal par l'intermédiaire du prix.

[Français]

    Quelle est votre définition de la répartition équitable des efforts?

[Traduction]

    C'est le défi ultime, n'est-ce pas? Comme je l'ai dit précédemment, c'est à chacun qu'il appartient de juger si les efforts sont équitablement répartis. Je pense qu'il faut aborder la production et l'utilisation d'énergie de façon globale. Pour moi, le travail de la table ronde nationale sur énergie 2050 représente une vaste gamme d'intérêts et de possibilités.
    Nous passons maintenant à M. Manning, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je voudrais souhaiter la bienvenue à nos invités et les remercier de leur témoignage.
    Un récent sondage a montré que les Canadiens veulent prioritairement un environnement propre et sain, mais qu'ensuite, ils veulent également une économie forte. Le rôle du législateur et le rôle de l'entreprise consiste à trouver un juste milieu permettant d'obtenir les deux.
    Il est certain que les sables bitumineux suscitent une vive attention depuis quelques temps, car ils offrent d'énormes possibilités d'emploi, mais dans certaines parties du monde, ils suscitent également des préoccupations d'ordre environnemental. Des députés de l'opposition officielle ont même menacé d'en ordonner la fermeture. En revanche, en janvier dernier, nous avons vu que le précédent gouvernement s'était secrètement entretenu avec les autorités américaines pour envisager de multiplier la production par quatre ou cinq.
    Je voudrais tout d'abord interroger M. Lambert. Nous essayons de trouver un terrain d'entente qui nous garantisse un environnement sain tout en nous offrant l'économie forte dont nous avons besoin pour... Je vois mal comment on va pouvoir apaiser les préoccupations d'ordre environnemental à moins de pouvoir s'appuyer sur une économie forte. Ma question est donc la suivante : À votre avis, quels sont les éléments clés pour créer au Canada une économie durable et respectueuse de l'environnement?
    J'ai même envie de renchérir: Je pense que nous sommes confrontés à un dilemme. D'un côté, tout le monde veut disposer d'une énergie abondante à bon marché. Nous poussons tous les hauts cris chaque fois que le prix de l'essence augmente. Mais par ailleurs, nous exigeons aussi un environnement propre.
    En toute franchise, la seule façon de résoudre cette quadrature du cercle est de miser sur la technologie et l'innovation. Autrement dit, nous ne pouvons pas continuer à produire et à utiliser l'énergie comme nous l'avons fait jusqu'à maintenant. On commence à voir apparaître des signes d'innovation sur le marché. Il y a dix ans, les véhicules hybrides relevaient de l'imagination, alors qu'aujourd'hui, ils pénètrent véritablement le marché des moyens de transport.
    En matière de sables bitumineux, j'ai parlé de la séquestration du CO2, sur laquelle nous travaillons activement. Nous participons également à un consortium qui se consacre à l'énergie géothermique présente dans de la roche sèche, dont la récupération n'occasionne aucune émission et qui pourrait servir également à autre chose qu'à l'exploitation des sables bitumineux; imaginons qu'on puisse l'utiliser pour le chauffage urbain et pour produire de l'électricité. Il s'agit de forer jusqu'à des profondeurs considérables, de l'ordre de 5 000 à 7 000 mètres. Encore une fois, c'est une perspective tout à fait enthousiasmante, et nous nous y intéressons de très près.
    Nous sommes à la recherche de politiques et de partenariats avec les milieux gouvernementaux qui vont devoir nous aider à susciter les investissements nécessaires pour concrétiser les projets. On ne va pas faire évoluer la situation en ayant recours à des réglementations punitives ni à des mesures qui vont encore nous pénaliser davantage. Cette façon d'agir n'est pas motivante. Il faut miser sur un effort de collaboration conjointe, où chacun se relève les manches pour s'atteler à la tâche.
(1025)
    Je voudrais maintenant interroger M. Cleland.
    Permettez-moi de compléter la réponse. Vous avez mentionné deux choses que les Canadiens attendent de leur système énergétique. Tout d'abord, ils veulent de l'énergie abordable, voire à bon marché. Ils veulent également une production durable et respectueuse de l'environnement. Par ailleurs, la production d'énergie doit être fiable. Les Canadiens veulent que leurs besoins soient satisfaits en tout temps, notamment au plus froid de l'hiver.
    La condition pour que ces exigences soient satisfaites, c'est une politique qui garde le bon cap. Les brusques inflexions, les mesures brutales et tout ce qui peut perturber le monde de l'investissement, de même que tout ce qui peut faire progresser les technologies plus vite qu'on ne peut les utiliser, tout cela est néfaste.
    Il faut agir dès maintenant. M. Cullen a parlé de l'urgence d'agir. C'est bien entendu. Il faut aller de l'avant et donner un signal au niveau des prix à l'intention des investisseurs et des consommateurs.
    Voulez-vous également interroger M. Bramley?
    À mon avis, il n'est guère crédible de dire qu'un coût supplémentaire de l'ordre d'un dollar le baril qui serait imposé aux exploitants des sables bitumineux aurait l'effet d'une mesure punitive ou perturberait l'équilibre entre l'environnement et l'économie. Gordon Lambert a dit que le coût de production est de 20 $ à 30 $ le baril. Je ne sais pas exactement quel est le prix actuel du baril, mais je crois qu'il était récemment de 50 $ à 60 $. L'industrie bénéficie donc d'une marge bénéficiaire considérable et on voit mal comment un coût d'un dollar le baril pourrait provoquer une telle onde de choc.
    Bien.
    Nous passons à M. McGuinty, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. J'adresse également mes remerciements à nos témoins.
    J'aimerais passer à une question que se posent sans doute la plupart de ceux qui travaillent dans les secteurs du pétrole, du gaz et de l'énergie au Canada : combien va coûter la mise en conformité?
    J'aimerais revenir sur les deux questions que j'ai posées à notre ministre de l'Environnement devant ce même comité il y a une dizaine de jours. Je lui ai demandé directement s'il avait une idée de la dimension du futur marché international du carbone et il n'a pas pu ou n'a pas voulu me répondre. Je lui ai ensuite demandé si le Canada allait participer à ce marché international du carbone. Il a répondu que le Canada n'en avait pas l'intention. Je lui ai demandé de répéter pour que les choses soient bien claires, et il a dit que nous ne sommes pas intéressés à participer aux marchés du carbone à l'étranger.
    Nous avons appris aujourd'hui que le 21 décembre, le président de la Bourse de Toronto a envoyé une lettre au ministre et au premier ministre pour leur signifier que le coût de mise en conformité serait excessivement élevé pour les sociétés canadiennes si elles ne peuvent recourir qu'au marché intérieur. L'auteur de ce document affirme ensuite que les sociétés canadiennes seront désavantagées si elles doivent se limiter au marché intérieur, parce que le coût de chaque tonne de gaz à effet de serre sera extrêmement élevé, en particulier à cause des dimensions modestes du marché canadien.
    Des propos semblables ont été tenus par Clive Matter, le président et directeur général de Shell Canada, qui demande au Canada de demeurer signataire et partie prenante du Protocole de Kyoto, et de participer au marché international du carbone créé par ce protocole.
    Aujourd'hui, nous avons entendu les trois témoins parler des difficultés qu'éprouveront les sociétés canadiennes de pétrole, de gaz et d'énergie si elles ne peuvent pas participer au très dynamique marché européen ni aux marchés actuellement en formation dans une vingtaine d'États américains. Pensez-vous qu'il soit intelligent, pour notre pays, de se priver d'une éventuelle participation aux marchés internationaux du carbone, alors que nous savons que les coûts de mise en conformité du secteur énergétique vont être plus élevés, et alors que dans les pays signataires et participants — y compris, éventuellement, les États-Unis —, la mise en conformité des sociétés va pouvoir se faire à moindre coût? Est-ce une décision intelligente de notre part dans le contexte actuel, étant donné ce que nous savons de l'effervescence des marchés internationaux du carbone?
(1030)
    J'aimerais rappeler ce que j'ai dit précédemment quant à la nécessité de tous les outils dont nous pouvons disposer. Nous allons devoir étudier très soigneusement la façon dont nous pouvons nous en servir; nous estimons donc qu'il ne faut fermer aucune porte.
    Mais nous sommes favorables — et je tiens à insister sur ce point, dans le contexte du thème technologique que j'ai évoqué ce matin — nous sommes donc favorables à la création d'un fonds technologique qui offrira aux sociétés canadiennes un mécanisme supplémentaire de mise en conformité, dans le cadre de notre démarche réglementaire. L'Association canadienne des producteurs de pétrole préconise la création de ce fonds en tant que mécanisme de mise en conformité. Les sociétés y contribueront et pourront s'en servir pour développer et mettre en oeuvre à l'interne des technologies nouvelles.
    Monsieur McGuinty, j'ai plusieurs choses à vous dire à ce sujet. Je ne me prononcerai pas sur les propos de M. Baird ni sur leur importance.
    Ce que je peux vous dire, c'est que toutes choses égales, nous devons tout d'abord envisager de réduire nos propres émissions. Nous devons modifier la structure des capitaux qui sous-tend notre économie. Toutes choses égales, c'est vers cet objectif qu'il faut tendre.
    Il nous faut également d'autres possibilités de mise en conformité. Comme l'a dit précisément M. Lambert, il nous faut une trousse d'outils de mise en conformité aussi complète que possible.
    Monsieur Cleland, je dois vous interrompre, car il ne me reste guère de temps. J'aimerais connaître le point de vue de votre secteur en ce qui concerne la possibilité qu'on s'en remette exclusivement à un marché intérieur canadien d'échange d'émissions, qui n'aurait aucun débouché sur les marchés internationaux. Un système international d'échange ne serait-il pas susceptible d'aider le secteur du pétrole, du gaz et de l'énergie à réduire ses coûts de mise en conformité en diminuant ses émissions de gaz à effet de serre?
    Nous souhaitons disposer du plus grand nombre de possibilités, y compris un mécanisme de développement propre et de l'accès aux autres marchés à mesure qu'ils se mettent en place.
    Il serait donc avantageux, pour l'industrie canadienne, de participer au marché international du carbone. Est-ce bien ce qu'il faut comprendre de vos propos?
    Il est avantageux, pour l'industrie canadienne, de disposer des moyens les plus rentables pour réduire ses émissions, et l'accès éventuel au marché international du carbone en fait partie.
    C'est terminé. Nous en sommes à des segments de cinq minutes.
    Nous allons passer à M. Paradis —
    Est-ce que nous avons entendu le point de vue de M. Bramley, monsieur le président?
    Monsieur Bramley, vous avez 15 secondes.
    Je dirais donc très brièvement que l'intérêt d'un système d'échange d'émissions, c'est avant tout une diminution des coûts. Je crains qu'en nous privant du recours au marché international du carbone, le gouvernement ne nous complique considérablement la tâche pour honorer nos obligations internationales.
    Vos cinq minutes sont écoulées.
    Monsieur Warawa invoque le Règlement.
    Je n'ai pas voulu interrompre M. McGuinty pendant sa déclaration, mais je crois qu'elle était trompeuse. Voici maintenant que dans sa réponse, M. Bramley reprend une affirmation qui, à mon avis, est inexacte. Le ministre n'a pas dit que nous interdirons l'accès au marché international du carbone. Ce qu'il a dit précisément, c'est que le Canada ne va pas dépenser des milliards de dollars à l'étranger. Il ne veut pas que l'argent du contribuable serve à cela. On peut donc, à juste titre, se demander s'il serait utile, pour l'industrie, d'intervenir sur un marché international, mais il est inexact d'affirmer que le gouvernement va s'y opposer, monsieur le président. Je tenais à apporter ce rectificatif.
    C'est une question dont on peu débattre, mais je ne voudrais pas qu'on s'y enlise.
    Nous allons maintenant passer à M. Paradis, pour cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Cette question a été soulevée plus tôt. On sait qu'au Canada jusqu'à aujourd'hui, compte tenu entre autres des prix abordables de l'énergie, la façon d'utiliser celle-ci n'a pas toujours été des plus intelligentes ou des plus efficaces. On peut penser, par exemple, à l'usage du carburant diesel pour chauffer les maisons ou à l'utilisation de quantités industrielles de gaz naturel dans le cas des sables bitumineux.
    Ma première question s'adresse à M. Cleland.
    Quelles mesures le gouvernement pourrait-il prendre pour s'assurer que le bon carburant est utilisé au bon endroit? Selon vous, ce qui est proposé dans le projet de loi C-30 pourrait-il encourager une utilisation efficace de l'énergie? Pourriez-vous expliquer la politique du CGA's clean energy in Canadian communities proposal? À quel genre de projets ce plan pourrait-il donner lieu?
(1035)

[Traduction]

    Je vais répondre à cette question en deux temps. Tout d'abord, si le projet de loi C-30, Loi sur la qualité de l'air, est adopté et que ces règlements d'application donnent aux investisseurs le signal qu'il faut investir dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre... à condition que cette réglementation soit d'application uniforme, elle devrait avoir tendance à amener chacun à faire les bons choix. Voilà pour le premier point.
    Ensuite, comme je l'ai dit précédemment — et je vous remercie de cette question — l'autre moitié de l'équation correspond à quelque chose qui ne se prête pas à une réglementation directe. Nous avons formulé diverses idées qui, pour l'essentiel, invitent le gouvernement fédéral à coopérer avec les provinces et le secteur privé pour favoriser l'investissement dans les technologies énergétiques locales comme le chauffage mixte, la production d'électricité et les systèmes hybrides faisant appel aux énergies renouvelables présentes sur place ainsi qu'à l'efficacité énergétique pour résoudre la deuxième moitié de l'équation. L'essentiel est de mettre toutes les sources d'énergie sur un pied d'égalité de façon qu'on se sert de celles qui conviennent le mieux à l'endroit.
    Monsieur Paradis.

[Français]

    J'ai une autre question pour M. Lambert. Cela a été soulevé un peu plus tôt.
    Selon vous, comment peut-on faire pour s'assurer que l'exercice que fait présentement le gouvernement puisse contribuer de façon positive à transformer l'économie, et pas seulement forcer l'atteinte de cibles à court terme? Vous avez dit un peu plus tôt qu'établir des cibles que l'on ne peut pas atteindre pourrait miner la confiance du public. D'autre part, il y a quand même urgence, il faut faire en sorte que l'économie soit transformée.
    J'aimerais connaître le point de vue de l'industrie sur cette question.

[Traduction]

    C'est à ce niveau que les travaux de la Table ronde nationale sur le modèle de coin seraient utiles. On pourrait inviter des experts des différents domaines pour qu'ils étudient en détail les obstacles présents dans chacun d'entre eux. L'énergie éolienne pourrait servir de modèle transposable dans d'autres secteurs. Cette table ronde a permis un dialogue entre les autorités gouvernementale, le secteur privé et les ONG sur les mesures à prendre pour accélérer l'exploitation de l'énergie éolienne au Canada. Les bons signaux ont été envoyés, la situation a évolué et on a commencé à progresser. Prenons donc ce modèle pour l'appliquer dans chacun des secteurs dont nous parlons aujourd'hui.

[Français]

    D'autres témoins veulent-ils faire des commentaires sur cette question?

[Traduction]

    J'aimerais revenir sur ce que disait tout à l'heure Gordon Lambert, à savoir que pour réduire sensiblement les émissions, il faut mobiliser des capitaux privés pour parvenir à une transformation de l'économie. À cette fin, il faut que les exigences réglementaires en matière de réduction des émissions soient suffisamment contraignantes pour que le prix des émissions ait un effet de motivation appréciable sur les décisions en matière d'investissement. Ces considérations devraient avoir valeur de test pour tout ce qui sera inclus dans la Loi sur la qualité de l'air ou dans le plan gouvernemental plus général concernant les changements climatiques.
    Monsieur Cleland.
    J'aimerais revenir sur la question fondamentale. Que faut-il faire pour parvenir à cette transformation de l'économie?
    J'insiste sur le fait qu'au moins 50 p. 100 de l'énergie que nous consommons est utilisée dans les villes canadiennes, dans nos maisons, dans nos immeubles et dans les infrastructures. Les changements dont nous parlons pour 2050, qu'il s'agisse d'une réduction de 50, de 60 ou de 80 p. 100 des émissions de gaz à effet de serre en termes absolus, n'aboutiront pas s'ils ne concernent que l'industrie. Il faut entièrement restructurer nos collectivités canadiennes au cours des 50 prochaines années, et cette restructuration fait partie intégrante du casse-tête.
    Nous passons à M. Scarpaleggia pour cinq minutes.
    Ce que je retiens des propos des gens d'affaires qui témoignent devant nous, c'est qu'il faut maintenir le dialogue avec le gouvernement et les autres intervenants. Ils ne disent jamais: « Voici ce dont nous pouvons nous accommoder », « Voici notre exigence ultime », ou même « Voici notre proposition de départ, et nous sommes disposés à négocier ». Il me semble que le gouvernement précédent a tenu des consultations auprès de l'industrie et auprès de vos deux secteurs. J'ai l'impression que vous évitez de le reconnaître.
    J'ai une question pour vous, monsieur Lambert. Les prévisions initiales concernant l'exploitation des sables bitumineux ont été dépassées, n'est-ce pas, et de façon considérable. Par exemple, quelles étaient les prévisions de production annuelle à partir des sables bitumineux vers 1998 ou vers l'an 2000? Combien prévoyait-on de barils par jour?
(1040)
    Les prévisions de qui?
    Cela n'a pas d'importance. Donnez-moi une moyenne qui vous semble acceptable. Cela n'a pas vraiment d'importance.
    On pourrait utiliser les chiffres du Groupe de travail national sur les stratégies des sables bitumineux qui, au milieu des années 1990, estimait la production à un million de barils par jour en l'an 2020.
    Et que prévoit-on actuellement pour l'an 2020?
    Nous en étions à un million de barils par jour en 2005.
    Vers quoi se dirige-t-on pour l'an 2020?
    Qui a la bonne boule de cristal?
    Est-ce que ce sera le double?
    Oui, à peu près, d'après les plans annoncés.
    Lorsque le gouvernement a ratifié le Protocole de Kyoto, il a tenu compte d'une certaine prévision concernant la production de pétrole à partir des sables bitumineux. Il me semble que le volume prévu a été largement dépassé.
    Oui, la ratification est intervenue en —
    En 2002.
    Ma prochaine question est la suivante. Selon vous, dans l'avenir, le prix du pétrole va-t-il augmenter de façon considérable ou croyez-vous qu'il diminuera? Selon vous, faudra-t-il ralentir l'exploitation des sables bitumineux en raison de la diminution des prix du pétrole?
    Je peux prédire avec certitude que je ne peux pas prédire le prix du pétrole.
    Nous entendons chaque jour dire que la demande mondiale grimpe en flèche, et comme vous l'avez dit au début de votre témoignage, il n'y a pas vraiment d'autres solutions à l'heure actuelle — nous devons nous en tenir au pétrole — et la présence de la Chine et de l'Inde commence à se faire sentir; compte tenu de tous ces facteurs, croyez-vous que le prix pourra diminuer?
    Nous ne prévoyons certainement aucune diminution de la demande mondiale. Nous n'avons pas une idée claire de l'aspect « offre » de l'équation. Du point de vue stratégique, je dirais que les sables bitumineux sont une ressource essentielle dans le monde.
    Une ressource essentielle dans un marché ne laissant aucune latitude. Quel est votre profit marginal pour un baril de pétrole provenant des sables bitumineux?
    Comme je l'ai dit plus tôt, les coûts effectifs par baril se situent entre 20 $ et 30 $.
    Et combien le vendez-vous?
    Je dois également dire que les coûts en capital font actuellement l'objet d'une importante poussée vers le haut, ce qui constitue une autre limite sur l'agressivité avec laquelle cette ressource peut être exploitée.
    J'entends souvent dire que tout va bien, que le marché est en santé, que nos profits sont bons, mais laissez-nous tranquilles. C'est le message que j'entends de nombreux secteurs de l'industrie, et particulièrement de l'industrie du pétrole. C'est comme si nous ne pouvons rien faire, à moins de vous donner de l'argent pour élaborer de nouvelles technologies.
    Nous venons tout juste de terminer les plus grandes installations de production d'éthanol au Canada, dont la commande avait été passée en juin dernier. À l'heure actuelle, nous construisons notre quatrième parc d'éoliennes. Suncor Energy, l'entreprise que je représente ici aujourd'hui, crée l'avenir du Canada dans le domaine de l'énergie, et non seulement dans le domaine des hydrocarbures. Elle investit de l'argent réel en créant des emplois et des opportunités pour les Canadiens de partout au Canada.
(1045)
    Shell a indiqué pouvoir réduire ces émissions de 50 p. 100 d'ici 2010, et être préparé à acquérir des droits d'émissions. Pourquoi l'entreprise Suncor ne peut-elle pas le faire?
    Le plan de changement climatique. Nous nous concentrons d'abord et avant tout sur notre propre efficacité énergétique à long terme. Ensuite, viennent les investissements dans le domaine de l'énergie renouvelable, que nous réalisons au Canada au lieu d'acquérir des droits d'émissions. En troisième lieu, nous trouvons les nouvelles technologies, y compris la capture et le stockage du CO2. Nous travaillons avec un consortium, et nous travaillons dur. La conception technique de ces projets, ou de ces opportunités, sont extrêmement complexes. J'ai également parlé du géothermique profond. Nous ne demeurons pas passifs et ne jouons pas défensifs pour ce qui est de cette question.
    Merci.
    Nous allons poursuivre avec M. Watson pour cinq minutes, s'il vous plaît.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Lambert, vous avez dit que les nouvelles technologies sont une partie importante des réductions considérables à l'échelle nationale. Certaines personnes ont mentionné, pendant les audiences, que les cibles et les délais du Protocole de Kyoto devraient être enchâssés dans le projet de loi C-30, à titre de cible à court terme. Je veux vous parler de ce scénario à court terme. Le stockage du carbone peut-il être appliqué de façon générale et immédiate dans votre secteur afin de réduire de façon considérable les émissions, et ainsi atteindre ce type de cibles à court terme?
    Je veux vous citer l'étude de la table ronde nationale, qui indique que la capture et le stockage du carbone sont l'une des meilleures solutions pour que le Canada obtienne des réductions considérables.
    Ainsi, pendant les quatre prochaines années, cela pourrait être appliqué de façon générale en vue d'obtenir des réductions significatives.
    La question des délais a déjà été soulevée. Il faudrait probablement environ dix ans pour que le tout soit mis en place et fonctionnel, et que différentes sources soient liées, avec le temps.
    Nous parlons donc d'environ une décennie. Très bien.
    Vous avez dit que le mécanisme de développement propre constitue la façon simple de se conformer. S'agirait-il d'une option à moindre coût que le stockage du carbone, par exemple, à court terme?
    Oui, et lorsqu'on parle des marchés des émissions, il est important de comprendre ce qu'ils ne sont pas. Ils ne peuvent pas remplacer la prévoyance. Ils constituent un instrument facile à utiliser. Mais ces technologies demandent des délais plus longs, et on ne peut pas faire ces investissements en fonction du prix à court terme du CO2 sur un marché. Ils doivent être considérés comme un impératif public-privé, et il faut réellement les envisager de ce point de vue.
    Si les cibles de Kyoto ont un délai de quatre ans et que le stockage du carbone demande dix ans, l'industrie serait-elle plus susceptible d'adopter le stockage du carbone ou les droits d'émissions?
    Monsieur Cleland, vous pouvez répondre si vous le souhaitez.
    Si nous adoptons une approche de dissuasion, nous nous retrouverons coincés dans une situation où la conformité au moindre coût représentera le succès, et cette conformité à moindre coût ne sera pas l'état d'esprit requis pour mettre en oeuvre les solutions à long terme dont nous parlons aujourd'hui.
    Les délais sont essentiels; dans le court délai de quatre ou cinq ans, la plupart des industries auront comme seule option un type quelconque de compensation de droit externe, parce qu'on ne peut procéder aux réductions physiques...
    Dans ce scénario, seriez-vous préoccupé par les sorties de capitaux à court terme, lorsque le Canada devra investir dans des réductions à long terme?
    Si elles sont modérées et envoient un message hâtif selon lequel il faut commencer à prendre des mesures, c'est probablement une bonne chose et nous devrions le faire. S'il s'agit d'une mesure permanente, nous devons veiller à investir dans les réductions au niveau national. C'est une question de proportion.
    J'ai une question pour tous les témoins. Les cibles à moyen et à court terme devraient-elles être négociées avec l'industrie ou attribuées à l'industrie?
    Monsieur Bramley, voulez-vous commencer?
    Comme on l'a mentionné plus tôt, il y a eu des années de consultation avec l'industrie au sujet des cibles de gaz à effet de serre. Très bien. De nombreuses études ont été réalisées quant au coût des différents niveaux des cibles, ce qui fait qu'il est maintenant temps de rassembler les renseignements et d'établir des cibles. Comme Mike Cleland l'a dit, allons-y.
    Il y a deux étapes. Il doit y avoir une discussion avec l'industrie pour veiller à ce que nous comprenions les chiffres et ce qui est pratique et réaliste. La négociation, c'est la négociation. Au bout du compte, c'est le gouvernement qui établit les règlements. Le gouvernement doit prendre une décision et dire allons-y.
(1050)
    Avez-vous quelques chose à dire, monsieur Lambert?
    Le dialogue devrait être suffisant pour veiller à ce que les cibles établissent des tensions créatrices sans éroder la confiance des investisseurs. Cela dit, je crois aussi que nous devrions passer à autre chose et établir des cibles quant à l'efficacité énergétique au pays qui vont garantir des améliorations.
    C'est tout, monsieur le président. Merci.
    Merci beaucoup.
    Je veux remercier les témoins. Monsieur Bramley, monsieur Cleland, monsieur Lambert. C'était une bonne discussion, de bonnes idées ont été exprimées par tous. Merci beaucoup d'être venus et de les avoir partagées avec nous.
    Chers membres du comité, nous devons discuter des représentants des produits forestiers qui avaient commencé par dire qu'ils ne pouvaient pas venir une certaine journée parce qu'ils voulaient envoyer le PDG seulement. Nous les avons maintenant. Je demanderai au greffier d'en parler, parce qu'il dispose de meilleurs renseignements.
    Merci, monsieur le président.
    Le greffier va nous mettre au courant des derniers développements en ce qui concerne les représentants des produits forestiers, qui, je crois, peuvent maintenant comparaître.
    Merci, monsieur le président.
    À l'origine, j'ai eu des conversations avec des représentants de l'Association des produits forestiers du Canada. Nous les avons invités à comparaître le jeudi 22. Ils m'ont informé à ce moment-là qu'ils voulaient que leur PDG, Avrim Lazar, soit ici, et personne d'autre. C'est essentiellement ce qu'ils m'ont dit.
    Le sous-comité a discuté de cette question, et a décidé que nous allions entendre les quatre témoins qui avaient déjà confirmé leur présence.
    Hier, ils m'ont téléphoné pour me dire qu'ils seraient disponibles le 22, et qu'ils enverraient quelqu'un d'autre que le PDG. Mais si le comité souhaitait les inviter un autre jour, par exemple le 27, qui est une séance réservée au captage du carbone, le PDG serait disponible cette journée-là.
    Voilà la situation.
    Ainsi, la question est de savoir si nous voulons les recevoir le 22, représenté par quelqu'un d'autre que le PDG, ou le matin du 27, avec le PDG?
    Monsieur Cullen.
    Je ne me soucis pas particulièrement de savoir si le PDG ou quelqu'un d'autre discute avec nous. Les deux jours fonctionneront, ça n'a pas d'importance.
    Quelqu'un a-t-il une autre opinion?
    Monsieur Godfrey.
    J'aimerais recevoir le PDG, si nous pouvons le recevoir lorsque cela lui conviendra.
    Le matin du 27. À l'heure actuelle nous avons trois témoins, il serait donc le quatrième. Avons-nous des problèmes avec cela du côté du gouvernement?
    C'est très bien.
    Très bien, nous inviterons M. Lazar le matin du 27.
    Merci.
    La séance est levée.