:
Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre la parole relativement au projet de loi , que le Bloc québécois souhaite étudier en comité. Le comité est vraiment l'endroit où les députés donnent leur pleine mesure et où on peut faire un travail de minutie et d'approfondissement. Le Bloc québécois souhaite donc que ce projet de loi soit déféré.
Avant de parler du projet de loi , je vais prendre quelques minutes pour vous dire que le gouvernement, en matière de justice, a un bilan pour le moins controversé. On sait que ce gouvernement s'est beaucoup activé, puisqu'il a déposé près d'une dizaine de projets de loi. J'ajoute que l'ensemble des projets de loi ne nous est pas tellement sympathique.
Il y avait l'ancien projet de loi modifiant l'article 742 sur l'emprisonnement avec sursis. Le gouvernement voulait enlever sa discrétion judiciaire à la magistrature. D'ailleurs, l'une caractéristique du gouvernement est de ne pas croire que notre magistrature soit sérieuse et compétente. Il veut toujours encadrer, il veut toujours restreindre la capacité qu'ont les juges de se sentir liés lorsqu'ils prononcent une sentence, lorsqu'ils rendent des jugements.
Le projet de loi , qui modifiait l'article 742, voulait que l'emprisonnement avec sursis ne puisse pas être une option pour le juge de procès, pour toutes les infractions punissables de plus de 10 ans d'emprisonnement, même si c'était ramené à un ou deux ans d'emprisonnement.
Malheureusement, nous avons dû fondamentalement modifier ce projet de loi que en comité. Je crois que nous avons fait notre travail de parlementaires. Le projet de loi qui est devant nous est un projet de loi un peu plus intéressant parce qu'il veut harmoniser l'article 253 à tout ce qui concerne la conduite avec facultés affaiblies. Il s'agit d'un problème social important, et il existe une jurisprudence. J'aurai l'occasion d'en reparler. On veut donc harmoniser les lois et recourir à des tests de sobriété standardisés. Notre défi, en comité, sera de voir l'acuité, la performance et le caractère opérationnel de ces tests.
Il y avait également le projet de loi concernant le salaire des juges. Le salaire des juges constitue un débat important, parce que nous sommes tous des enfants de Montesquieu. Je sais que nous sommes tous animés par cette philosophie qui veut qu'il y ait une séparation étanche entre le législatif, le judiciaire et l'exécutif.
Il est important que les trois pouvoirs cohabitent avec un saine souveraineté. C'est pour cette raison que lorsqu'il est question du salaire des juges, le Parlement souhaite qu'il y ait une commission indépendante. Il est malaisé pour le Parlement d'établir à combien doit s'élever le salaire des juges, puisque les juges sont un bras important, non seulement de l'administration de la justice, mais ultimement, de l'interprétation des lois. Or, en tant que parlementaires, nous faisons les lois. Le gouvernement a le pouvoir de les mettre en oeuvre et nous souhaitons que les juges puissent les interpréter.
Très longtemps, il y a eu un équilibre. On disait que la juge en chef de la Cour suprême aurait le même salaire que le , et tout découlait de ce barème. Or voilà que le gouvernement a choisi de briser cet équilibre relatif et de proposer une rémunération qui s'écartait des propositions de la commission indépendante. Voilà un autre projet de loi que nous n'avons malheureusement pas pu appuyer.
Je le répète et je vais y arriver, nous souhaitons que le projet de loi soit déféré en comité, puisque la conduite avec facultés affaiblies est une réalité extrêmement importante. Il est évident que les gens qui prennent le volant, qui sont sur les routes publiques, ne doivent pas constituer des dangers pour nos concitoyens.
Le gouvernement a donc légiféré sur l'emprisonnement avec sursis et sur la rémunération des juges.
Le gouvernement a aussi proposé un projet de loi sur les délinquants dangereux. Le gouvernement espère même la mise sur pied d'un comité législatif. Tout le monde en cette Chambre comprend la différence entre un comité législatif et un comité permanent. Le comité législatif est un comité qui existe pour la durée de vie d'un projet de loi comme, par exemple, pour le projet de loi sur la qualité de l'air, le Canada's Clean Air Act, qui a été déposé par le gouvernement. D'ailleurs, mon collègue de , qui est une lumière pour le Bloc québécois en matière d'environnement, devrait également être une lumière pour le gouvernement conservateur tant ses propos sont justes et son expertise élevée.
C'est le Président de la Chambre qui nomme le président du comité pour la durée des travaux du comité législatif. Ce ne sont donc pas les pairs, les membres assignés au comité qui élisent le président.
Le projet de loi sur les délinquants dangereux est un très mauvais projet de loi. En effet, il est animé par un automatisme qui mène aux Three Strikes, comme cela existe aux États-Unis. Ce n'est pas un projet de loi que le Bloc québécois entend appuyer.
Le gouvernement a déposé un projet de loi sur l'âge de consentement, qu'on appelle l'âge de protection, avec une disposition de distinction de cinq ans. Je crois que le chef du Bloc québécois s'est dit favorable à ce projet de loi lorsqu'il a été interrogé. Nous aurons évidemment des amendements à apporter pour nous assurer du respect de la réalité nouvelle. C'est vrai que le rapport à la sexualité n'est probablement pas celui que vous avez eu, monsieur le Président, dans votre prime enfance ou votre prime adolescence. Aujourd'hui, les adolescents ont des relations plus précoces, lorsqu'ils sont plus jeunes. Dans mon temps, on restait Joseph tard. On faisait cela plus tardivement. Tout cela a changé et il faut prendre la mesure de ces changements.
Le gouvernement a également déposé un projet de loi contenant des modifications aux poursuites par voie sommaire. C'est un projet de loi plutôt technique et je dois dire que nous sommes relativement bien intentionnés face à ce projet de loi.
Le gouvernement a également déposé le projet de loi concernant les peines minimales pour les infractions commises avec des armes à feu.
On se rappellera d'Allan Rock. Je ne sais pas si j'évoque un bon ou un mauvais souvenir aux parlementaires de cette Chambre. Lorsqu'Allan Rock était ministre de la Justice, il avait déposé un projet de loi. Je pense que pour mon collègue l'ancien chef de l'opposition officielle, c'est un excellent souvenir. Je sais qu'il était près du député Allan Rock que le député de , l'ancien premier ministre, a nommé représentant du Canada aux Nations Unies. J'ai beaucoup de respect pour Allan Rock. Je considère que c'est un homme brillant qui a bien servi cette Chambre, sauf en matière de jeunes contrevenants. En effet, l'ancien gouvernement s'est complètement égaré sur la pente du désarroi.
Tout cela pour dire que le gouvernement actuel a déposé le projet de loi , qui veut augmenter les peines minimales obligatoires pour les infractions commises avec des armes à feu. Malheureusement, nous n'avons pas d'études probantes sur le caractère dissuasif des peines minimales obligatoires.
D'ailleurs, ce matin en comité, nous en étions à l'étude article par article du projet de loi . On sait combien de sagesse est réunie quand tous les partis d'opposition font bloc ensemble pour demander au gouvernement de faire un certain nombre de choses. Tous les partis d'opposition — les libéraux, les bloquistes et les néo-bolcheviques — ont demandé au gouvernement de faire une étude longitudinale sur l'importance, sur le caractère dissuasif ou non, des peines minimales obligatoires.
En effet, ce n'est pas tout d'augmenter les peines minimales obligatoires, il faut savoir si cela va vraiment amener la paix dans nos collectivités. Le Bloc québécois, avec une totale ouverture d'esprit et une rigueur scientifique dont il ne s'est jamais départi, va regarder si le gouvernement agrée à la demande d'une étude longitudinale sur l'impact des peines minimales obligatoires pour la commission d'infractions commises avec des armes à feu, puisque cela fait 10 ans cette année que nous avons des peines minimales obligatoires.
Avant de revenir au projet de loi , je ne peux m'empêcher de souligner l'incohérence profonde du gouvernement. D'un côté, le gouvernement demande d'augmenter les peines minimales obligatoires pour les infractions commises avec une arme à feu, mais de l'autre, il veut abolir le registre public d'inscription des armes à feu. Ce registre est consulté par les corps policiers du Canada et du Québec plusieurs centaines de fois par jour, voire plusieurs milliers de fois par jour. Avant de procéder à une intervention dans un domicile, il est important que le policier sache s'il y a ou non des armes à feu dans ledit domicile. Je ne comprends pas au nom de quelle logique le gouvernement souhaite abolir ce registre et priver les policiers d'un outil dont ils ont besoin.
Je considérais qu'il était un peu de mon devoir de faire le point sur le bilan des actions du gouvernement. Le gouvernement a aussi déposé un projet de loi concernant les empreintes génétiques que l'on retrouve dans une banque nationale administrée par la GRC. Le comité aura la chance d'étudier ce projet de loi.
Historiquement, le Bloc québécois a toujours été préoccupé par les gangs de rue et par le crime organisé. Ma collègue, la députée d', avec qui il est toujours agréable de faire équipe, et moi avons convenu d'un certain nombre de mesures et de propositions que j'aurai la chance de proposer au Comité permanent de la justice et des droits de la personne pour que nous puissions nous doter de moyens plus efficaces pour lutter contre les gangs de rue et le crime organisé.
Le Bloc québécois est beaucoup plus engagé dans la logique voulant qu'on permette aux policiers d'avoir des enquêtes couronnées de succès que dans celle voulant qu'on augmente les peines minimales obligatoires.
Ce tour d'horizon étant terminé, je considère qu'il est de mon devoir d'enclencher la discussion à propos du projet de loi . Ce projet de loi permettra aux policiers d'exiger qu'une personne, soupçonnée de conduite avec facultés affaiblies par l'alcool ou la drogue, subisse un test de sobriété.
Présentement, le Code criminel possède déjà des dispositions concernant la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool. Maintenant, il y aura des mesures plus spécifiques à propos de la drogue. On pourra demander que la personne soupçonnée subisse un test de sobriété. Toutefois, la jurisprudence n'est pas claire à ce sujet. L'interprétation que le ministère de la Justice en fait en vertu du projet de loi est de dire que le Code criminel n'accorde pas présentement aux policiers le pouvoir d'exiger qu'une personne se soumette à des tests de sobriété ou de prélever un échantillon de substances corporelles dans le cadre des enquêtes sur des infractions liées à la conduite avec facultés affaiblies.
Advenant l'adoption du projet de loi , les policiers seront en mesure d'exiger d'une personne soupçonnée de conduite avec facultés affaiblies par une drogue de participer à des tests de détection et à des tests de prélèvement d'échantillon de substances corporelles.
Il faut faire un certain nombre de nuances. Le travail du comité sera de s'assurer que les technologies de détection disponibles — je crois qu'on s'inspire de ce qui existe aux États-Unis — ne seront pas indûment intrusives. Il y a une Charte et des garanties judiciaires. On veut que les policiers aient des outils, mais c'est une question d'équilibre.
Il est important de parler de la différence entre les drogues et l'alcool. En tant que député, je consomme très peu d'alcool — je n'ai pas de mérite puisque je n'ai jamais aimé l'alcool — et je ne consomme aucune drogue. En somme, je suis une personne assez « straight » et ma vie est assez linéaire. Ce n'est pas par l'alcool ou la drogue que je tire mes plus grandes sensations. Toutefois, certains de nos concitoyens consomment de la drogue et de l'alcool.
Nous ne voulons pas que les gens qui ont un permis de conduire et qui sont sur les voies publiques puissent constituer des menaces pour nos concitoyens. Nous croyons effectivement que les policiers ont un pouvoir, en vertu de la common law et du Code criminel, d'intercepter des individus qu'ils voient dans des situations pouvant présenter des risques.
D'ailleurs, en 1985, si je ne me trompe pas — je ne voudrais pas induire la Chambre en erreur —, dans la cause Dedman c. La Reine, la Cour suprême évaluait la légalité de l'opération R.I.D.E. en Ontario. Cela consiste à faire des barrages routiers, et cela se fait aussi au Québec. On procède à des contrôles dans des endroits achalandés. Il y a des policiers, des agents de la paix en devoir, qui interceptent des individus pour vérifier leur sobriété. Évidemment, quand ces pratiques ont commencé à la fin des années 1980, on s'est posé la question sur la légalité de ces gestes.
En effet, normalement, en vertu de la common law ou du Code criminel, quand on intercepte quelqu'un à bord d'un véhicule automobile, il faut avoir des soupçons raisonnables, penser que cette personne est en état d'ébriété ou en situation d'infraction à la loi. Or l'opération R.I.D.E., telle qu'elle se vivait en Ontario et telle qu'elle se vit maintenant au Québec, était simplement à titre préventif. On voulait vérifier la sobriété de tous les gens que l'on interceptait, même si ce n'était pas sur la base de soupçons raisonnables. Or, je le répète, en vertu de la common law et du Code criminel, c'est sur la base de soupçons raisonnables que l'on a le pouvoir d'intercepter et d'arrêter les gens.
La Cour suprême a dit qu'on pouvait intercepter des gens et vérifier leur sobriété, mais que cela devait s'arrêter là. Par exemple, si une personne est interceptée lors d'un barrage routier pour que l'on vérifie sa sobriété, on ne peut pas commencer à fouiller sa voiture et chercher de l'héroïne. Toutefois, la Cour suprême a autorisé les pratiques en disant que c'était un objectif public suffisamment important pour permettre aux policiers de se prêter à un tel exercice.
Aujourd'hui, le projet de loi veut aller un peu plus loin. On veut non seulement permettre de vérifier la sobriété relative à l'alcool, mais on veut également la vérifier concernant la drogue. Cependant, une différence importante doit être faite. En effet, la présence d'alcool dans le sang est plus facilement détectable que la présence de drogue. Selon ce qu'on nous a dit, si une personne a consommé de la marijuana, les traces de cette consommation peuvent être décelées dans le sang de cet individu jusqu'à sept, huit, neuf ou dix jours après ladite consommation, et cela ne veut pas dire que la personne était intoxiquée au moment de l'arrestation.
C'est pour cette raison que le comité devra faire tout un travail afin de reconnaître qu'effectivement l'objectif public important est de s'assurer que les gens qui sont à bord d'un véhicule et qui sont sur les voies publiques conduisent en toute sobriété, qu'ils ne sont pas intoxiqués par l'alcool ou la drogue.
Cependant, en même temps, on n'est pas dans la même logique que ce qui concerne l'alcootest. Avec l'alcootest, on peut vérifier si le taux d'alcoolémie dans le sang est supérieur à 0,08 p. 100 ou 0,8 gramme par litre. On vérifie ces faits, et des accusations peuvent être portées. Cependant, dans le cas des technologies de détection de la drogue, il faudra évidemment s'assurer que les technologies sont assez sophistiquées pour ne pas amener les agents de la paix à porter des accusations alors que les gens ne sont pas véritablement dans une situation d'intoxication.
Puisqu'il me reste une minute, je termine en ajoutant également qu'un des mérites du projet de loi est qu'il va harmoniser les choses. Car l'article 253 permet des pénalités différentes, selon que l'on porte des accusations en fonction de l'alinéa a), celui en vertu duquel l'individu a les facultés affaiblies par l'effet de l'alcool ou de la drogue, ou en fonction de l'alinéa b), celui en vertu duquel on fait la preuve que l'individu a consommé une quantité précise d'alcool ou de drogue.
Les pénalités ne sont pas les mêmes, ce qui n'a pas beaucoup de bon sens. C'est la conséquence des gestes posés, et non seulement la preuve faite selon les alinéas a) ou b), qui devrait déterminer les sentences.
En conclusion, le Bloc québécois souhaite que le projet de loi fasse l'objet d'un examen sérieux en comité. Je suis certain qu'on pourra compter sur tous les parlementaires pour faire un travail sérieux et rigoureux.
:
Monsieur le Président, je suis heureux d'intervenir aujourd'hui en Chambre, au sujet du projet de loi .
[Traduction]
Malheureusement, il est fort à propos que je parle aujourd'hui de la conduite avec facultés affaiblies. Il y a quelques jours à peine, le juge Sylvio Savoie, de la cour provinciale du Nouveau-Brunswick, a imposé une peine maximale de cinq ans d'emprisonnement à un dangereux conducteur qui, en se mettant au volant avec des facultés affaiblies, représentait une menace pour notre collectivité depuis un certain temps. Le juge Savoie a imposé la peine maximale à ce dangereux individu même si le procureur de la Couronne avait demandé une peine de quatre ans, ce qui, pour nous, montre clairement que le fait de laisser la discrétion aux juges, comme nous le préconisons, est souvent bénéfique pour la collectivité.
Le juge Savoie a très bien expliqué sa décision lorsqu'il a dit qu'il avait l'obligation de veiller à ce que les gens sur nos routes soient protégés. C'est exactement de cette façon que nous, de ce côté-ci de la Chambre, percevons le rôle de notre système de justice pénale.
Cet individu pourrait servir d'exemple parfait dans notre débat sur le projet de loi aujourd'hui et dans nos débats sur la législation criminelle en général pour justifier la nécessité d'imposer des peines plus sévères afin de mettre définitivement un terme à toute forme de conduite avec facultés affaiblies.
En fait, ce récidiviste a fait 21 jours de prison en 1990 pour avoir refusé de souffler dans l'ivressomètre; 14 jours en 1995 pour le même refus; 30 jours en 1999 pour la même chose et 18 mois en 2002 pour avoir conduit avec un taux d'alcoolémie dépassant la limite permise. Comme si ça ne suffisait pas, il a été condamné à 22 mois d'emprisonnement pour conduite avec facultés affaiblies et pour conduite alors qu'il était frappé d'une suspension de permis. Lors d'une nouvelle comparution en cour, une semaine plus tard, pour faire face à des accusations en instance de conduite avec facultés affaiblies, il a écopé de trois ans.
La semaine dernière, cette peine de cinq années d'emprisonnement est venue s'ajouter à la liste des sanctions dont il a déjà été frappé, pour le plus grand bien des citoyens respectueux de la loi pour qui il représentait un grave danger.
Il convient de signaler que cette peine lui a été imposée en vertu de dispositions existantes du Code criminel dont la plupart avaient été adoptées sous les gouvernements libéraux précédents. Une chose est sûre, la conduite avec facultés affaiblies est inacceptable. Il s'agit là d'un comportement criminel dangereux qui, malheureusement, tue chaque année beaucoup trop de Canadiens dans des accidents qui n'ont rien d'inéluctable.
J'espère, très sincèrement, que ce phénomène de conduite avec facultés affaiblies sera un jour chose du passé et que nous n'aurons plus à nous pencher sur une mesure comme le projet de loi parce que tous les Canadiens comprendront qu'il est inacceptable de mélanger alcool et conduite.
Pour parvenir à ce résultat, il nous reste cependant encore beaucoup à faire dans notre société, notamment en ce qui concerne les législateurs que nous sommes. Le projet de loi , qui se veut une contribution à l’atténuation du problème que constitue la conduite avec facultés affaiblies, est un début.
Ce n'est toutefois pas la première fois que la Chambre est saisie d'un projet de loi sur ce thème. Ces dernières années, elle a même été plutôt active sur ce front. En 1999, le Comité permanent de la justice et des droits de la personne a publié un rapport intitulé « Vers l'élimination de la conduite avec facultés affaiblies », qui prend acte de la nécessité de se doter de moyens plus appropriés pour détecter ce genre de problème, surtout dans le cas des drogues.
Un comité sénatorial spécial sur les drogues illicites a, par ailleurs, publié à un rapport intitulé « Le cannabis: Positions pour un régime de politique publique pour le Canada ». Lui aussi a fait remarquer qu'il n'existe aucune méthode fiable non invasive de dépistage des drogues le long de la route.
En 2003, le ministère de la Justice a publié un rapport intitulé « Conduite avec facultés affaiblies par les drogues: Document de consultation ». Celui-ci aussi précise que les conducteurs ne sont habituellement pas soumis à des tests de dépistage des drogues et que les policiers n'ont que peu de moyens à leur disposition pour tester ceux qu’ils soupçonnent de conduire sous l'influence de drogues.
C'est pour cela qu'en 2004, le gouvernement libéral précédent a déposé un projet de loi prévoyant l'adoption d'une nouvelle stratégie nationale en matière de conduite avec facultés affaiblies. Malheureusement, celui-ci est mort au Feuilleton lors du déclenchement des élections. Dès le début de la législature qui a suivi l'élection de 2004, le gouvernement libéral réélu a présenté de nouveau cette mesure législative, qui est devenue le projet de loi . Il est malheureux que celui-ci aussi soit mort au Feuilleton quand les élections de 2006 ont été déclenchées.
Nous voilà donc saisis aujourd'hui du projet de loi qui, selon moi, est fortement inspiré du programme de justice très progressiste des gouvernements libéraux précédents.
Jetons un coup d'oeil à l'essence du projet de loi. Le projet de loi fait un certain nombre de choses. Il prévoit des moyens de repérer les conducteurs aux facultés affaiblies par l'effet d'une drogue et il érige en infraction la conduite automobile lorsqu'on est en possession de drogues illicites. Un tel élément de droit est bien connu de ceux d'entre nous qui ont tâté du droit et qui ont observé que, dans le cas des infractions liées à l'alcool, il est également illégal, en vertu des lois de nombreuses provinces, d'être en possession d'alcool dans un véhicule à moteur, ce qui aide à prévenir la consommation d'alcool au volant et la conduite en état d'ébriété. On applique tout simplement le même principe aux drogues.
Le projet de loi restreindrait le recours à la règle de la preuve contraire; j'aborderai ce point plus en détail dans un moment. Il érigerait également en infraction le fait de causer des lésions corporelles à une personne ou sa mort en conduisant lorsqu'on a une alcoolémie supérieure à 0,08, disposition faisant pendant à celle relative aux drogues. Il relèverait les peines prévues pour la conduite avec facultés affaiblies et pour la conduite sous le coup d'une interdiction de conduire en vertu de lois provinciales, entre autres. Enfin, il faciliterait la tâche des policiers chargés de faire enquête sur des accidents de voiture liés à l'alcool.
[Français]
Le projet de loi prévoit plusieurs mesures pour repérer les conducteurs avec facultés affaiblies par les drogues. Cela inclut des tests de sobriété normalisés, la formation d'experts en reconnaissance de drogues, le prélèvement d'échantillons de substances corporelles et la création d'une infraction pour refus d'obtempérer.
De plus, le projet de loi créera une nouvelle infraction mixte punissable par un maximum de cinq ans de prison et d'une interdiction de conduire.
Le projet de loi limitera aussi le recours à la preuve contraire, mieux connu comme « la défense des deux bières », bien qu'il maintienne quand même des moyens de défense valables.
[Traduction]
L'élimination de la défense dite des deux bières est un aspect intéressant de cette mesure législative. Il y a 40 ans, les éthylomètres et autres appareils utilisés pour mesurer le taux d'alcoolémie étaient sujets aux erreurs, suivant l'expérience du technicien ainsi que les circonstances et des facteurs extérieurs. Disons-le, la technologie a beaucoup évolué.
Il se peut que, dans le passé, des conducteurs aient été inculpés, voire condamnés, injustement à la suite de tests effectués sur le bord de la route ou au poste de police. Ces personnes ont été injustement inculpées et condamnées pour des infractions relatives à la limite de 0,08.
Des progrès technologiques garantissant une précision de plus en plus grande ont cependant fait en sorte que, de nos jours, il est à peu près impossible que les appareils de détection aient pareilles défaillances. Chaque appareil produit un relevé d'autocontrôle imprimé avant chaque test, et les techniciens sont mieux formés. Bref, on a maintenant le matériel et les connaissances scientifiques nécessaires.
Il est très rare que l'étalonnage de l'appareil fasse défaut ou que le technicien ne sache pas précisément comment faire subir le test. Je peux donc affirmer sans crainte de me tromper qu'il est très rare qu'un accusé soit injustement inculpé ou condamné pour conduite avec une alcoolémie supérieure à la limite légale de 0,08.
Nous avons fait des progrès. Comme il y a très peu, voire aucune accusation injustifiée, je dois également dire qu'il y a davantage de condamnations, ce qui rend nos routes plus sûres. Je crois qu'il convient de dire que la conduite avec facultés affaiblies par les drogues ne fait pas l'objet de la même surveillance que la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool.
Permettez-moi de comparer les aspects techniques du rassemblement de preuves au criminel. Mon objectif est de montrer que nous sommes loin de la précision relativement à la conduite avec facultés affaiblies par les drogues. Nous avons fait beaucoup de progrès dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies par l'alcool et dans d'autres aspects de la justice pénale grâce à la science.
Je vais comparer la situation relative à la conduite avec facultés affaiblies avec la façon de traiter les preuves génétiques dans l'ensemble du système de justice pénale. Compte tenu de toute la technologie dont disposent les services de police et les responsables de l'application de la loi, serait-il envisageable de mettre en doute la validité d'une preuve génétique devant les tribunaux en faisant comparaître quelques amis de l'accusé qui pourraient témoigner en sa faveur? Je doute fort qu'un seul juge au Canada accepterait leurs témoignages comme raison valide de rejeter des preuves génétiques exactes et scientifiques.
Étrangement, en ce qui a trait à la conduite avec facultés affaiblies, si quelques compagnons de taverne sont prêts à venir témoigner que l'accusé n'a pris qu'une bière ou deux, le tribunal peut rejeter les résultats obtenus par des instruments fiables et très sophistiqués, résultats qui, par le passé, n'auraient jamais pu être obtenus.
Voilà comment cet amendement, ancré dans les traditions libérales, suit le rythme des percées technologiques. Il est important d'appuyer nos agents de police, ceux qui prélèvent les échantillons en première ligne, et qu'ils puissent s'appuyer en toute confiance sur les lois pour faire leur travail et obtenir des condamnations.
En décembre 2005, la Cour suprême du Canada a étudié la preuve contraire, la défense dite des deux bières, et a jugé que les résultats d'un alcootest pouvaient être rejetés sans preuve d'une défectuosité de l'appareil si l'accusé réussit à semer le doute et à présenter des preuves contraires.
[Français]
Le projet de loi créera de nouvelles infractions, notamment pour conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles, punissables par un maximum de dix ans d'emprisonnement, ou causant la mort, punissable par une peine de prison à perpétuité. Une nouvelle infraction de refus de fournir un échantillon d'haleine, sachant qu'il y a eu des lésions corporelles ou la mort, sera aussi punissable des mêmes peines.
De plus, les peines pour conduite avec facultés affaiblies seront plus sévères, passant de 600 $ à 1000 $ pour une première infraction; de 14 jours à 30 jours de prison pour une deuxième infraction; de 90 jours à 120 jours pour une troisième infraction et à une peine maximale de 18 mois par voie sommaire. Bien sûr, les individus coupables de conduite en état d'ébriété perdront aussi leur permis de conduire.
[Traduction]
Le projet de loi prévoit également des outils pour aider la police à soumettre les conducteurs à des tests dans un délai de trois heures après une collision. Il permet aussi au policier de réduire à trois minutes le délai entre les alcootests et d'appliquer la présomption de conduite dans les cas de refus de se soumettre à un test.
Soyons clairs. À titre de parlementaires représentant toutes les régions du Canada, à titre de législateurs, nous avons une tâche spéciale, mais en plus, nous sommes également tous le fils, le mari ou l'épouse, le père ou la mère, le grand-père ou la grand-mère de quelqu'un, et nous sommes témoins, en tant que citoyens respectueux de la loi des ravages que cause à la société la conduite avec facultés affaiblies. Nous réagissons non seulement en tant que parlementaires, mais également en tant que parent, enfant ou ami de gens qui ont été blessés dans des accidents attribuables à la conduite avec facultés affaiblies, soit par l'alcool soit par la drogue. En bref, les conducteurs en état d'ébriété représentent un danger non seulement pour eux-mêmes, mais aussi pour l'ensemble de la société.
Voilà pourquoi le projet de loi , qui repose sur de bonnes intentions, doit également être une bonne loi. Il doit être efficace. Or, dans sa forme actuelle, il fait abstraction de nombreux points soulevés dans une multitude de rapports de comité et par le ministère de la Justice et dont j'ai parlé dans la première partie de mon intervention.
Il est crucial de donner une assise très solide à cette mesure législative. Pour ce faire, il faut tenir compte, d'une part, des conclusions énoncées dans les rapports et dans les études indépendantes et, d'autre part, des opinions émises par le ministère de la Justice, notamment sur les progrès technologiques en matière de mesure de l'alcoolémie. Ainsi, lorsqu'elle sera mise en application, cette loi donnera lieu à des condamnations, aura un effet dissuasif et évitera des accusations ou des condamnations non fondées. Cependant, cette loi doit avant tout se tenir.
Le projet de loi soulève de nombreuses questions. À titre de membre du Comité de la justice, je suis fort intéressé à examiner ces questions en vue de présenter à la Chambre une mesure législative plus efficace. Ces questions, qui doivent être soulevées, concernent la façon de soumettre les conducteurs à des tests, lorsqu'ils sont arrêtés sur la route, pour vérifier s'ils ont consommé de la drogue.
Les modifications qui concernent l'alcool sont très bonnes. Elles s'ajouteront aux autres mesures dissuasives et aideront à mieux déceler les cas de conduite avec facultés affaiblies par l'alcool. Pour ce qui est de la conduite avec facultés affaiblies par les drogues, il n'existe pas de tests fiables actuellement. Je citerai le qui a déclaré à la Chambre la semaine dernière que « nous n'avons pas l'équipement qui permet de faire un simple contrôle routier pour toutes les drogues comme nous le faisons pour l'alcool avec l'ivressomètre ».
Jamais un membre du Parti conservateur, de surcroît un député faisant partie du Cabinet à titre de secrétaire parlementaire, n'a si bien dit. Des félicitations s'imposent. Je n'ai aucun mal à féliciter mes collègues conservateurs quand ils disent la vérité et qu'ils ont absolument raison. Nous, députés, visons d'ailleurs la précision absolue en ce qui concerne le projet de loi , et ce n'est pas le cas du projet de loi sous sa forme actuelle pour ce qui est des facultés affaiblies par les drogues.
Le projet de loi soulève une autre question. Je serai heureux d'examiner et de faire progresser cette question au comité. Quelles drogues seront visées par les tests que les policiers administreront? Toutes les drogues? Certaines drogues? Cela soulève de nombreuses questions. Il a été démontré scientifiquement que le cannabis peut laisser des traces dans l'organisme pendant des semaines après que l'état physique et mental de facultés affaiblies a disparu. Comment réagira le nouveau groupe d'experts en reconnaissance de drogues devant cette réalité?
Comment composerons-nous avec la multitude de drogues, qui ne sont pas nécessairement énumérées dans le Code criminel, si elles occasionnent un état de facultés affaiblies? Qu'en est-il des médicaments d'ordonnance? Beaucoup de médicaments, même s'ils sont achetés légalement avec une ordonnance médicale, viennent avec des avertissements. Bien des gens agissent de façon irresponsable et prennent un ou plusieurs médicaments sans lire les avertissements. Ils pourraient ainsi causer des blessures à autrui. Leurs facultés sont affaiblies et ils ne peuvent conduire en toute sécurité. Que prévoit le projet de loi à cet égard? Comment les nouveaux experts en reconnaissance de drogues composeront-ils avec cela?
Nous vivons dans un pays où les hivers sont très rigoureux -- il fait certes très froid, depuis quelque temps du moins. La saison du rhume et de la grippe qui accompagne nos hivers peut durer jusqu'à cinq ou six mois. Qu'en est-il des millions de Canadiens qui prennent des médicaments contre le rhume et la grippe? Dans beaucoup de cas, il faut éviter de conduire un véhicule ou d'opérer de la machinerie lourde après les avoir consommés. Le projet de loi ne traite pas de cet aspect de façon précise. Nous ne pouvons pas nous fier uniquement au règlement. Il faudra absolument recueillir l'avis des meilleurs experts, et cela doit se faire en comité.
Les tests de sobriété normalisés et le recours à des experts constituent une excellente idée, mais il reste à savoir qui aurait accès à ces experts. Seraient-ils présents dans toutes les régions du Canada, y compris dans les zones rurales, comme la circonscription de ? La grande ville de Moncton, pour sa part, n'aurait certainement pas de mal à obtenir des experts.
Par ailleurs, le seul test fiable pour dépister l'usage de la drogue au volant consiste à prélever un échantillon de sang, d'urine ou de salive. Or, malheureusement, beaucoup de ces tests ne résisteraient pas à une contestation judiciaire.
En somme, les libéraux appuient ce projet de loi. Nous voulons qu'il soit renvoyé à un comité. Nous appuyons l'action des Mères contre l'alcool au volant et des organismes locaux, comme Opération Nez rouge. Nous voulons des routes où nous pourrons circuler en toute sécurité. Nous sommes donc en faveur du projet de loi. Il reste de nombreuses questions auxquelles nous espérons trouver réponse en comité. Nous espérons que la Chambre collaborera en fournissant au comité suffisamment de ressources et de temps pour qu'il puisse aboutir à des conclusions probantes et nous revenir avec un projet de loi qui protégera les Canadiens.
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Monsieur le Président, nous faisons ce qui doit être fait et nous allons de l'avant.
Je suis content de prendre la parole au sujet du projet de loi . Le projet de loi aurait pour effet de moderniser les lois du Canada en matière de conduite avec facultés affaiblies et serait d'une grande utilité pour les policiers dans leurs enquêtes concernant des incidents de conduite avec facultés affaiblies et à la Couronne dans ses poursuites à l'égard de délinquants présumés.
La conduite avec facultés affaiblies, tous les députés le savent, continue d'être l'infraction criminelle la plus susceptible de causer la mort ou des blessures aux Canadiens. Si la mesure législative à l'étude est adoptée, elle améliorera grandement la sécurité de tous les Canadiens. Par conséquent, j'ai bon espoir que tous les partis vont appuyer le projet de loi et que nous pourrons collaborer pour que les changements nécessaires qu'il propose soient étudiés par le comité permanent. Je puis donner l'assurance à tous les députés que le gouvernement est disposé à étudier toutes les améliorations que le comité voudra proposer, après avoir entendu le témoignage des parties intéressées, de manière à ce que le projet de loi puisse atteindre ses objectifs d'une manière encore plus efficace.
Le projet de loi comporte trois grands volets. Tout d'abord, il fournirait aux services policiers les instruments nécessaires pour faire enquête en matière de conduite avec facultés affaiblies par la consommation de drogues. Deuxièmement, il introduirait des modifications reflétant les grands progrès de la technologie de l'ivressomètre depuis l'adoption par le Parlement de l'analyse de l'haleine, il y a presque 40 ans. Troisièmement, la mesure créerait de nouvelles infractions et augmenterait les peines visant les infractions existantes.
Bon nombre de députés sont bien au fait des dispositions du projet de loi concernant la conduite avec facultés affaiblies par la consommation de drogues. Elles sont pratiquement identiques à celles du projet de loi , qui avait été présenté durant la législature précédente, étudié et amendé par le comité, et avait fait l'objet d'un rapport unanime du comité, avec amendements. Cependant, il est mort au Feuilleton.
Il va sans dire que les policiers et les poursuivants attendent avec impatience l'adoption de ces changements.
Je vais m'en tenir dans mes observations aux nouvelles dispositions du projet de loi , de manière à ce que les députés comprennent bien ce qui a motivé le gouvernement à proposer ces modifications.
Il est probable que la plus importante modification que propose le projet de loi est celle qui vise à assurer que seuls les moyens de défense fondés sur des facteurs valides du point de vue scientifiques pourront être utilisés dans le cas d'une personne accusée de conduite avec un taux d'alcoolémie supérieur à 80 milligrammes par 100 millilitres de sang. C'est ce qu'on appelle conduire avec une alcoolémie supérieure à 0,08.
C'est en 1921 que le Parlement a promulgué la première loi faisant de la conduite avec facultés affaiblies une infraction. L'alinéa 253a) du Code criminel actuellement en vigueur, qui prévoit l'infraction de conduite avec facultés affaiblies, a été adopté en 1951. On sait depuis plus de 50 ans qu'une personne qui conduit avec une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes d’alcool constitue un danger pour elle-même et pour les autres usagers de la route. Selon le département des Transports américain, un conducteur avec une alcoolémie supérieure à 90 milligrammes d’alcool est 11 fois plus susceptible d'être impliqué dans un accident mortel qu'une personne n'ayant pas consommé d'alcool. Une alcoolémie supérieure augmente la probabilité de façon exponentielle. Par exemple, la probabilité qu'une personne ayant une alcoolémie supérieure à 125 milligrammes d’alcool soit impliquée dans une collision mortelle est au moins 29 fois plus grande.
On sait que la probabilité d'accident mortel augmente selon la concentration d'alcool dans le sang, mais la difficulté consiste à prouver cette concentration. L'analyse sanguine permet de mesurer l'alcoolémie. Toutefois, on considère souvent que le prélèvement d'un échantillon de sang est un acte intrusif. Par ailleurs, il faut parfois beaucoup de temps pour obtenir les résultats d'une analyse sanguine, si bien que le contrevenant doit attendre pour savoir si des accusations seront portées contre lui.
L'invention de l'ivressomètre par Borkenstein dans les années 1950 a permis de surmonter les difficultés causées par l'analyse sanguine. C'est un appareil qui traduit le taux d'alcool dans l'haleine en taux d'alcool dans le sang selon un processus fiable et valide du point de vue scientifique.
En 1969, le Parlement a reconnu le risque posé par une alcoolémie supérieure à 80 milligrammes en adoptant une loi faisant une infraction de la conduite d’un véhicule avec une telle alcoolémie. La loi comporte une bizarrerie, à savoir que pour prouver l'alcoolémie il est nécessaire de demander à la personne de fournir une preuve qui peut être utilisée contre elle devant un tribunal. Par conséquent, le Parlement a fait du refus de donner un échantillon d'haleine dans un dispositif amélioré une infraction.
Les progrès technologiques permettant de mesurer le taux d'alcoolémie sur la route, le Parlement a autorisé le recours à l'alcootest routier à partir de 1979. Les appareils utilisés sur la route peuvent indiquer qu'une personne a probablement trop d'alcool dans le sang, mais ne sont pas assez précis pour fournir une preuve admissible dans une procédure judiciaire. Toutefois, ils donnent au policier un motif valable d'exiger une analyse avec un appareil approuvé. Le résultat de cette deuxième analyse est, lui, admissible comme preuve. Il est interdit par la loi de refuser de se soumettre à l'alcootest routier ou à l'alcootest avec un appareil approuvé.
Les tribunaux ont admis la nature unique de cette loi et l'ont jugée conforme à la Constitution, estimant qu'elle constituait une limite raisonnable de la protection prévue dans la Charte contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives. C'est une limite qui se justifie en raison des tragédies causées par la conduite avec facultés affaiblies.
En 1979, le Parlement avait établi une démarche en deux temps pour déterminer si un conducteur dépassait 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang. La méthode paraissait simple. En présence d'un doute raisonnable, la police pouvait soumettre un conducteur qu'elle soupçonnait de conduire sous l'effet de l'alcool à un alcootest routier au moyen d'un appareil approuvé à cette fin. Si le conducteur échouait ce test, il devait subir un autre test au moyen d'un appareil pouvant fournir une preuve admissible que le taux d'alcoolémie dépassait 80, c'est-à-dire un certificat fourni par un technicien qualifié.
Cependant, la conduite avec facultés affaiblies, en particulier la conduite avec une alcoolémie supérieure à 80, figure maintenant parmi les infractions prévues au Code criminel les plus difficiles à prouver. Chaque mot et chaque virgule des articles visés semblent avoir fait l'objet de contestations.
Ceux qui ne sont pas convaincus de la complexité de la loi n'ont qu'à consulter le recueil annuel Martin sur le Code criminel. L'édition de 2007 comprend 12 pages de texte législatif et d'annotations sur les 13 articles concernant le meurtre, l'homicide involontaire coupable et l'infanticide. Par comparaison, cette édition comprend 62 pages de texte législatif et d'annotations sur les neuf articles concernant la conduite avec facultés affaiblies.
Les poursuites en vertu du paragraphe 253(b), dans les cas d'alcoolémie dépassant 80, occupent une proportion beaucoup trop grande du temps dans les tribunaux provinciaux. Souvent, il s'agit de la seule accusation portée. On ne peut pas prouver qu'il y a eu conduite mal assurée du véhicule. Il y a peu de signes de détérioration des facultés. Si la défense peut soulever un doute raisonnable sur la concordance du résultat de l'alcootest et de l'alcoolémie au moment où l'accusé était au volant, la poursuite n'aura pratiquement aucune autre preuve que l'alcoolémie dépassait la limite de 80 lorsque l'accusé conduisait.
À l'époque où le Parlement a adopté la première loi sur les analyses de l'haleine en 1969, l'opérateur devait effectuer une série d'essais pour s'assurer que l'appareil approuvé était bien calibré. Il devait observer la position de l'aiguille et la consigner manuellement. Manifestement, l'opérateur risquait de faire une erreur et le taux d'alcoolémie pouvait être mal noté. Le Parlement a donc établi que, en l'absence de toute preuve contraire, les résultats des tests sur le taux d'alcoolémie correspondent au taux d'alcoolémie au moment de la conduite.
Malheureusement, même pour une nouvelle génération d'instruments approuvés qui donnent des lectures numériques, qui renferment des vérifications internes automatisées et une version papier des processus internes, les tribunaux ont interprété le principe de la « preuve contraire » comme incluant le témoignage de l'accusé qui affirme n'avoir consommé qu'une petite quantité d'alcool, ce qu'on appelle habituellement la défense dite des deux bières. L'avocat de la défense demande ensuite à un toxicologue d'évaluer le taux d'alcoolémie du défendeur en se basant sur le témoignage de l'accusé quant à sa consommation d'alcool, au temps écoulé, à sa consommation d'aliments et autres.
En somme, l'accusé affirme que, quel que soit le taux d'alcoolémie qu'il avait au moment où le test a été fait, il ne pouvait être supérieur à 80 mg au moment où il conduisait le véhicule, compte tenu de la petite quantité d'alcool qu'il avait consommée. L'accusé n'a aucun compte à rendre sur le résultat du test effectué à l'aide de l'instrument approuvé au poste de police. À moins de rejeter toute la preuve présentée par l'accusé, les tribunaux estiment que la présomption voulant que le taux d'alcoolémie corresponde au taux d'alcoolémie au moment de la conduite ne tient pas. Sans cette présomption, la poursuite ne peut prouver que le conducteur avait plus de 80 milligrammes d'alcool par 100 millilitres de sang au moment où il conduisait.
La Cour suprême a tenu compte de la preuve contraire dans l'affaire Regina c. Boucher en décembre 2005, alors qu'un accusé dont le taux d'alcoolémie avait été calculé à .092 avait témoigné qu'il n'avait consommé que deux grosses bières. Le verdict de culpabilité a été rétabli à cinq contre quatre, mais la décision était fondée uniquement sur la crédibilité de l'accusé après qu'on eut évalué si la juge avait bien considéré l'ensemble de la preuve.
Les juges majoritaires ont conclu au paragraphe 43: « La juge fait aussi erreur lorsqu'elle précise que la crédibilité de l'accusé et de ses témoins peut être appréciée au regard des résultats des alcootests avant l'application de la présomption. »
En conséquence, la Cour suprême a établi qu'un juge de première instance peut faire abstraction des résultats de l'alcootest et juger l'accusé non coupable sans devoir prouver un mauvais fonctionnement de l'appareil, à tout le moins en ce qui a trait à la présomption d'exactitude à l'égard du certificat d'un technicien qualifié.
Même si le tribunal doute de la preuve présentée par l'accusé, la présomption ne peut pas être retenue parce qu'il suffit à l'accusé de présenter une preuve contraire. Honnêtement, je crois que les tribunaux ont mal interprété le sens de « preuve contraire ».
Le Parlement a adopté la loi sur l'ivressomètre en 1969 afin que l'on puisse calculer le taux d'alcoolémie à l'aide de l'instrument approuvé, qui élimine tout élément de doute sous réserve qu'il fonctionne comme il se doit, que l'utilisateur s'en serve convenablement et que les résultats soient correctement enregistrés.
L'interprétation du tribunal était peut-être justifiée lorsque la technologie n'était pas au point et qu'une erreur de l'utilisateur, impossible à prouver par ailleurs, pouvait faire une différence. Cette défense reflète donc la faiblesse de la technologie utilisée il y a 40 ans. Je ne crois pas que le Parlement ait eu l'intention de définir la preuve contraire comme étant une pure spéculation relativement au taux d'alcoolémie d'un accusé.
Compte tenu de la technologie moderne, la preuve contraire doit être une preuve directe établissant que l'instrument n'a pas fonctionné ou n'a pas été utilisé comme il se doit. À défaut d'une telle preuve, il faut accepter le taux d'alcoolémie indiqué par l'instrument. L'accusé peut cependant être acquitté s'il peut prouver que son taux d'alcoolémie était inférieur à 80 au moment où il conduisait, sans contester les résultats indiqués par l'instrument approuvé utilisé au poste de police. Une telle éventualité est possible si une personne a bu rapidement plusieurs consommations et a été arrêtée avant que l'alcool ne soit absorbé dans son système. Il est également possible que, après avoir conduit mais avant l'alcootest, la personne ait consommé de l'alcool et que celui-ci ait été absorbé au moment où on a mesuré son taux d'alcoolémie à l'aide de l'instrument approuvé.
La question de base que doit se poser le Parlement est de savoir s'il est possible de se fier aux taux d'alcoolémie obtenus au moyen d'instruments approuvés. Heureusement, grâce aux progrès technologiques, l'accusé peut prendre connaissance des résultats des tests effectués à l'aide de l'instrument approuvé sur la version papier présentant la transcription des processus de l'instrument.
En mars dernier, le ministère de la Justice a chargé M. Brian Hodgson, toxicologue judiciaire et président du Comité des analyses d'alcool, à la Société canadienne des sciences judiciaires, de préparer un rapport sur la validité de l'éthyloscopie. Je me ferai un plaisir de fournir un exemplaire de ce rapport à tout député désireux de l'obtenir. J'imagine que le comité permanent convoquera M. Hodgson comme témoin si nous renvoyons le projet de loi au comité à l'étape de la deuxième lecture.
Permettez-moi de résumer le rapport comme suit. M. Hodgson soutient que, comme l'ivressomètre est un appareil à commande manuelle, il peut y avoir place à l'erreur humaine lors de son utilisation. Les résultats des tests sont transcrits à la main par l'utilisateur et peuvent faire l'objet d'erreurs de transcription. Les instruments perfectionnés possèdent des fonctions préprogrammées qui réduisent les risques d'erreur humaine. M. Hodgson ajoute également que, par exemple, quand on allume l'instrument, tous ses éléments doivent atteindre une température de fonctionnement précise et que ce n'est qu'ensuite que l'utilisateur peut faire subir un test. Avec l'ivressomètre, cette fonction incombe à l'utilisateur. Les instruments plus perfectionnés ne fonctionneront pas tant que la température voulue n'aura pas été atteinte et des contrôles de sécurité préprogrammés signaleront les problèmes au moyen de messages d'erreur et provoqueront l'interruption du test.
Ces alcootests approuvés sont très perfectionnés et doivent être évalués rigoureusement avant que le comité sur l'alcootest ne recommande leur approbation comme instruments pouvant servir dans les tribunaux aux termes du Code criminel. Ce ne sont pas des instruments que l'on peut se procurer au Wal-Mart. Le comité permanent pourrait peut-être organiser une démonstration qui permettrait de mieux comparer les anciens alcootests et ceux les plus récents.
Compte tenu de l'évolution de la science et de la mise au point d'alcootests approuvés, il est malheureux que les tribunaux n'aient pas tenu compte dans leur jurisprudence de l'évolution de la technologie. Pour les policiers et les procureurs, qui s'évertuent à respecter les instructions du Parlement, il est très décourageant de constater que l'on évalue l'alcoolémie à partir du témoignage de l'accusé au lieu de tenir compte de l'alcoolémie calculée selon une mesure exacte fondée sur l'analyse scientifique du contenu d'alcool dans l'haleine par un alcootest moderne approuvé.
Dès 1968, le comité sur l'alcootest s'est montré préoccupé du fait que les tribunaux acceptaient des témoignages qui, dans les faits, contredisaient les résultats de l'alcootest approuvé. En 1999, on a discuté de la preuve contraire durant les audiences spéciales du comité permanent, concernant la conduite avec facultés affaiblies. Le comité a écrit ce qui suit:
Le Comité comprend la frustration des intervenants du système judiciaire face à ces défenses qui perdurent et qui, en apparence du moins, peuvent sembler non fondées. Cependant, comme l'accusé ne disposerait d'aucun moyen efficace de vérifier l'exactitude de l'alcootest, le Comité reconnaît que le fait de limiter l'interprétation de la « preuve contraire » de la façon recommandée pourrait en fait équivaloir à créer une infraction criminelle de responsabilité absolue, ce qui risque d'empiéter sur les droits que la Charte canadienne des droits et libertés confère à tout accusé. C'est pourquoi, dans les circonstances, le Comité n'appuie pas les modifications du Code criminel qui restreindraient l'interprétation de la « preuve contraire ».
Les circonstances ont changé. Nous disposons aujourd'hui d'une technologie moderne conçue non seulement pour supprimer toute erreur de manipulation, mais également pour imprimer les résultats de vérification interne du diagnostic garantissant le bon fonctionnement de l'appareil. L'accusé reçoit une copie de l'imprimé et peut s'en servir à son gré pour sa défense.
Il est aussi inacceptable de rejeter le taux d'alcoolémie mesuré avec un instrument approuvé en faveur du témoignage du défendeur et de ses amis que de rejeter en cour des empreintes génétiques trouvées sur une victime, quand les analyses révèlent qu'elles proviennent de l'accusé, parce que ce dernier et certains de ses amis déclarent qu'il n'était pas sur la scène du crime, sans expliquer pour autant comment ses empreintes génétiques ont pu se retrouver là.
Comme l'a déclaré Andrew Murie, chef de la direction de MADD Canada, dans un communiqué préconisant l'adoption rapide du projet de loi:
Le Canada semble être le seul pays qui permet le rejet des analyses d’haleine et de sang déposées en preuve en fonction du témoignage non corroboré et intéressé d’une personne accusée de conduite avec facultés affaiblies. Nous sommes très heureux de voir que le gouvernement entend restreindre la portée de ce genre de contestation.
Je crois que les députés conviendront qu’il est peu probable qu’une personne qui a bu se souvienne exactement de la quantité d’alcool qu’elle a consommée et qu’il serait indiqué que l’alcoolémie du conducteur soit mesurée à l’aide d’un instrument scientifiquement éprouvé qui permet de donner une lecture exacte plutôt qu’au moyen d’un calcul fondé sur des données douteuses.
Les modifications que nous proposons suppriment le concept vague et non défini de « preuve contraire » et énumèrent les justifications scientifiquement valables qu’un accusé peut invoquer pour sa défense.
Nous tenons également compte, dans le projet de loi , des progrès technologiques en faisant passer de 15 à 3 minutes le délai prescrit entre les deux alcootests exigés. Les anciens ivressomètres nécessitaient un délai d’au moins 10 minutes entre les tests. Les nouveaux instruments sont prêts en quelques minutes et indiquent à l’utilisateur qu’il peut s’en servir de nouveau.
Même si le projet de loi propose d’autres modifications de nature technique, j’aimerais, pour conclure, aborder la question des modifications aux infractions et des nouvelles peines.
Le Code criminel prévoit actuellement l’imposition de peines maximales plus sévères aux personnes coupables de conduite avec facultés affaiblies causant la mort et occasionnant des lésions corporelles. Ces peines plus sévères ne s’appliquent pas dans les cas où il y a eu refus de fournir un échantillon et conduite avec une alcoolémie supérieure à 0,08, de sorte que, à moins que la personne soit en outre reconnue coupable d’avoir causé, par suite de l’accident, des lésions corporelles ou un décès, une peine maximale moins sévère s’applique.
Bien que la preuve de la présence d’alcool dans le sang ne soit pas une condition préalable pour pouvoir prouver qu’il y a eu conduite avec facultés affaiblies causant la mort ou des lésions corporelles, elle est admissible en cour. Cela peut donc inciter l'accusé à refuser de fournir un échantillon dans le cas où l’accident a causé des blessures ou la mort, étant donné que la peine maximale pour un tel refus est de cinq ans d’emprisonnement.
Même si elle est admise en cour, la mesure du taux d’alcool dans le sang n’est pas nécessairement suffisante pour prouver que le prévenu conduisait avec facultés affaiblies. Le ministère public doit faire intervenir un toxicologue pour établir ce que l’on sait depuis plus de 50 ans, à savoir que la personne qui conduit avec une alcoolémie supérieure à 0,08 a des facultés affaiblies. Pratiquement tous les toxicologues conviennent qu’à un taux de 100 milligrammes, la capacité d’une personne de conduire un véhicule est amoindrie.
Nous proposons d’éliminer cette incitation à refuser de se soumettre à un test en rendant une personne dont l’alcoolémie est supérieure à 0,08 et qui cause une collision entraînant la mort ou des lésions corporelles, ou encore qui refuse de fournir un échantillon d’haleine sachant qu’il y a eu décès ou lésions corporelles, passible des mêmes peines que celles imposées à un conducteur dont les facultés sont affaiblies par l’alcool ou la drogue et qui cause une collision occasionnant la mort ou des lésions corporelles.
En ce qui a trait aux peines pour conduite avec facultés affaiblies sans qu’il y ait décès ou lésions corporelles, le gouvernement est d'avis que ces peines ne reflètent pas adéquatement la gravité de cette infraction. Nous proposons de porter à 1 000 $ l’amende minimale pour une première infraction. Conjugué à l’interdiction de conduire, à la suspension du permis de conduire et à l’augmentation des primes d’assurance, cela devrait suffire à convaincre les gens de ne pas récidiver.
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Monsieur le Président, je prends la parole aujourd'hui sur le projet de loi , qui comporte deux éléments essentiels. D'abord, il prévoit pour la première fois une procédure que le système de justice pénale pourrait employer lorsqu'une personne conduit une automobile ou un avion avec les facultés affaiblies par une drogue plutôt que par l'alcool.
La deuxième partie du projet de loi, qui a probablement plus d'importance sur le plan de son efficacité, modifie la loi actuelle concernant la conduite en état d'ébriété. Il existe une défense qui est présentée tellement souvent, au Canada, face à ce type d'accusation, que c'en est presque scandaleux, surtout si l'on pense à la faiblesse de la jurisprudence qui autorise cette défense.
Ces deux aspects du projet de loi sont importants. Nous devons les examiner en tant que corps législatif pour déterminer si, de fait, nous pouvons traiter le problème de la conduite avec facultés affaiblies plus efficacement ainsi, qu'on parle de facultés affaiblies en raison de l'alcool, comme auparavant, ou d'une combinaison d'alcool et de drogues ou de la simple consommation de drogues.
La première partie du projet de loi est la reprise du projet de loi qui avait été présenté lors de la dernière législature et qui portait exclusivement sur les facultés affaiblies par les drogues. Des articles de ce projet de loi ont simplement été repris. Fondamentalement, l'on essaie de faire avec le nouveau projet de loi, et c'est ce qui me préoccupe, la même chose que ce que l'on fait pour la conduite avec les facultés affaiblies par l'alcool depuis maintenant une trentaine d'années, et recourir à la technologie, comme nous l'avons fait avec les alcootests, afin de dépister les gens qui conduisent avec les facultés affaiblies par la drogue et de leur imposer des sanctions pénales.
Ce qui m'inquiète, c'est le fait que la technologie permettant de dépister les individus qui ont les facultés affaiblies par la drogue n'existe tout simplement pas. La situation est loin de se rapprocher de ce qui existe avec l'alcool. Grâce à la technologie mise au point et raffinée avec le temps, le dépistage des conducteurs qui ont consommé de l'alcool se fait facilement et repose sur des bases scientifiques.
En termes généraux, le dépistage est fiable à pratiquement 100 p. 100. À moins que le matériel fonctionne mal, que le technicien ne soit pas qualifié ou qu'il n'utilise pas correctement l'appareil, il est possible d'évaluer efficacement le taux d'alcoolémie.
Je crois que l'on peut dire sans risque de se tromper qu'il y a deux exceptions, la plus importante étant au moment de l'administration du test. Si l'individu consomme de l'alcool entre le moment de son arrestation et le moment où le test est administré, il est possible que le taux d'alcoolémie dépasse le taux prescrit même si l'individu avait un taux inférieur à ce taux lorsqu'il conduisait son véhicule. C'est là un moyen de défense qui demeure.
La deuxième exception, c'est lorsqu'il y a eu une forte consommation d'alcool immédiatement avant de prendre le volant. Lorsque le test est administré, le taux d'alcoolémie dépasse la limite permise, mais, puisqu'il faut un certain temps avant que l'alcool fasse effet sur l'organisme, il se peut que l'individu n'ait pas eu les facultés affaiblies lorsqu'il était au volant.
Ce projet de loi, tout comme le projet de loi , maintient ces moyens de défense, de sorte que si une preuve peut être établie en ce sens, l'accusé pourrait se défendre de l'accusation puisque ses facultés n'auraient pas été affaiblies au moment où il conduisait le véhicule.
Pour ce qui est de la conduite avec facultés affaiblies par des drogues, que tente d'englober le projet de loi à l'étude, tout comme l'avait fait le projet de loi , la difficulté réside dans le fait qu'il nous manque deux éléments. Nous n'avons aucune technologie permettant d'effectuer une évaluation rapide sur place ou au poste de police mais, ce qui importe encore davantage, nous n'avons pas de normes concernant les effets de tel ou tel type de drogue sur l'affaiblissement des facultés et sur la capacité de l'être humain de conduire un véhicule.
Les travaux que nous avons effectués au sujet du projet de loi durant la dernière législature nous ont permis de réunir un grand nombre de renseignements. Nous avons appris que l'Union européenne et plusieurs pays d'Europe cherchent à mettre au point une norme d'incapacité liée à la consommation de marijuana ou de dérivés chimiques de cette drogue. Tout en estimant faire certains progrès, ces pays n'y sont pas encore arrivés.
Pour ce qui est de la marijuana en particulier, l'un des problèmes a trait au fait que la substance chimique dérivée de cette plante persiste dans l'organisme durant une période assez longue. C'est justement sur ce moyen de défense que l'un de nos athlètes olympiques avait fondé son argumentation à l'époque. C'est d'ailleurs ce qui l'a sauvé. Selon les faits scientifiques, cette substance chimique demeure dans le système durant une période assez longue, de sorte qu'il nous sera très difficile, selon les résultats des travaux à ce jour, surtout ceux effectués en Europe, d'établir une norme minimum.
Si la question est si importante et m'intéresse tant pour ce qui est de la marijuana, c'est qu'il est indubitable, selon ce que nous disent les agents de police partout au pays, les poursuivants et les personnes qui sont au fait du dossier de la conduite avec facultés affaiblies, que, après l'alcool, la marijuana est nettement la deuxième substance en importance qui pose problème. Les gens consomment de la marijuana et conduisent ensuite un véhicule avec facultés affaiblies. Cependant, ni la technologie, ni la science ne nous permettent à l'heure actuelle d'établir une norme minimum.
Nous n'avons pas non plus d'équipement pouvant être utilisé pour évaluer rapidement la condition des conducteurs en situation de conduite ou au poste de police. Nous n'avons d'autre choix que de prélever des échantillons de sang ou d'urine. Le projet de loi reconnaît que seul un médecin ou un technicien qualifié peut effectuer ces tests, qui devraient généralement se dérouler dans une clinique médicale ou dans un hôpital.
Comme le , ce projet de loi propose d'instaurer au Canada un système calqué sur ce qui se fait aux États-Unis et en Angleterre, je crois. Ce système en trois étapes prévoit le recours à des agents de police spécialement formés. Tout d'abord, l'agent de police qui intercepte un véhicule parce qu'il a des motifs raisonnables de croire que son conducteur a les facultés affaiblies par une substance chimique ou une drogue effectuerait les tests habituels qui étaient utilisés avant l'invention de l'ivressomètre. Par exemple, il pourrait demander au conducteur de marcher sur la ligne blanche, de toucher son nez, de se tenir en équilibre sur une jambe, de le regarder dans les yeux, ou encore le faire parler.
L'agent qui conclut que le conducteur a les facultés trop affaiblies pour conduire un véhicule emmènerait ce dernier au poste de police afin de le faire examiner par un agent spécialement formé, ou « agent évaluateur », selon le terme employé dans le projet de loi. Il s'agirait d'un simple agent de police ayant reçu une formation additionnelle. Voilà justement l'une des choses qui me préoccupent.
Sans rien enlever à cet agent, si je me fie à ce qu'on utilise pour le former, j'entretiens de sérieux doutes quant à sa capacité de procéder à l'évaluation. La loi exigerait non seulement d'évaluer si les capacités de la personne sont affaiblies, mais aussi de déterminer la drogue consommée. Était-ce de la marijuana, de l'héroïne, de la cocaïne ou encore un médicament sur ordonnance, légal ou non? La liste est longue. Nous avons appris qu'il pouvait y avoir des centaines de drogues. À mon avis, cette méthode d'évaluation présente de sérieuses lacunes.
Si l'agent évaluateur détermine la présence de drogue, le projet de loi exige que l'accusé voie un membre du personnel médical compétent, dans une clinique ou un hôpital, et se fasse prélever un échantillon de sang. Aux termes du projet de loi, l'échantillon pourrait ensuite être présenté devant un tribunal pour établir que l'agent évaluateur avait raison, c'est-à-dire que l'accusé avait consommé de la drogue, peu importe laquelle.
La plupart des avocats vont se demander à quoi cet échantillon peut bien servir lorsqu'ils plaident devant un juge et ont à prouver, au-delà de tout doute raisonnable, que l'accusé avait les facultés affaiblies.
Si je me mets dans la peau d'un procureur et que je présente cet élément de preuve, je m'attendrais à ce que le juge me pose la question suivante: « Pourquoi indiquer que le sang de la personne contenait x parties par million d'une drogue? » Est-ce que cette information dirait au juge quoi que ce soit à propos de la capacité de la personne à conduire une voiture? Si je me fie à ce que j'ai dit tout à l'heure concernant les travaux de recherche sur l'affaiblissement des capacités par l'effet de la marijuana, la réponse que je donnerais comme procureur serait non. Je ne pourrais pas dire au juge que cette information montre que la personne avait ou non les facultés affaiblies. Manifestement, le juge devrait décider avant.
Maintenant, si je me mets dans la peau de l'avocat de la défense, je dirais au juge que la preuve est très préjudiciable pour mon client, car elle montre qu'il a consommé de la drogue alors que ce n'est pas de cela qu'il est accusé. Il est accusé de conduite avec les facultés affaiblies. L'élément de preuve n'a aucune valeur pour établir s'il avait les facultés affaiblies. C'est l'argument que je ferais valoir si j'étais l'avocat de la défense.
Dans la plupart des cas, le juge indiquerait que la preuve était fortement préjudiciable parce qu'elle révélait que l'individu était un toxicomane, mais qu'elle n'avait pas de valeur probante pour l'accusation dont il était saisi. Je crains que l'affaire risquerait d'être rejetée pour cette raison. Ce n'est même pas un argument fondé sur la Charte. Nos tribunaux se fondent sur des règles de preuve. Par conséquent, le projet de loi comporte une lacune fondamentale.
Il y a également une possibilité de contestation en vertu de la Charte. Compte tenu des qualifications limitées de l'agent évaluateur, le tribunal peut fort bien statuer que la sécurité personnelle d'un individu a été menacée, ce qui constitue une violation d'un droit fondamental au Canada. Le tribunal pourrait conclure en vertu de cet article de la Charte qu'il serait déraisonnable d'exiger qu'une personne fournisse un échantillon de sang ou, dans certains cas, un échantillon d'urine, à cause du motif de la demande. L'agent évaluateur à l'origine de la demande n'est absolument pas un expert en médecine et il ne possède que des compétences limitées pour déterminer si l'accusé a consommé de la marijuana, de l'héroïne ou un médicament sur ordonnance parfaitement légal.
Lorsque les libéraux étaient au pouvoir, le Nouveau Parti démocratique a appuyé le projet de loi. Celui-ci a été renvoyé au comité qui a fait les recherches nécessaires. Cependant, au bout du compte, nous avions de sérieuses préoccupations quant à savoir si cette partie du projet de loi pourrait soutenir une telle contestation judiciaire. Le risque que cette partie ne survive pas à de telles contestations judiciaires nous amène également à nous demander s'il vaut la peine de dépenser tant d'argent pour préparer les agents de police à l'utilisation de cette méthode.
Voilà ce qui nous préoccupe. Nous allons appuyer le renvoi du projet de loi au comité, en dépit de cette partie. Nous espérons trouver de nouveaux éléments probants. Le travail qui se fait en Europe est peut-être plus avancé. Cela fait environ un an et demi que nous nous sommes penchés sur la question pour la dernière fois.
Je passe à la deuxième partie du projet de loi qui est la plus importante quant à l'utilité de ce texte pour notre système et dans nos tribunaux. Après plus de 10 ans, presque 20 ans en fait, voilà qu'on a fini par concocter une défense, et mes collègues criminalistes m'en voudront sans doute d'avoir dit cela. Malheureusement, tous nos tribunaux, jusqu'à la Cour suprême, ont accepté cette défense sans doute parce que nous avions mal rédigé cette disposition du code à l'époque, et je leur reconnais d'ailleurs cette excuse. Ce qui est très important ici, c'est qu'en fournissant la preuve contraire, on peut établir l'absence de facultés affaiblies chez la personne concernée.
Quand j'ai commencé à pratiquer le droit, les ivressomètres venaient tout juste de faire leur apparition. À cette époque, si on était en mesure d'établir que le matériel n'avait pas correctement fonctionné — puisqu'il fallait le tester d'une certaine façon avant de s'en servir — ou que l'opérateur n'était pas qualifié ou encore qu'il n'avait pas correctement utilisé la machine, on estimait en général que ces défenses étaient suffisantes pour déclarer l’inadmissibilité des résultats de l'alcootest et faire tomber les accusations.
Il est évident que ces défenses doivent demeurer. Dans tous les systèmes où l'on trouve l'Homme, on trouve des « hommeries », et nous devons donc permettre ces défenses.
En fait, ce ne sont pas ces deux défenses ni celle de l'heure de la consommation d'alcool qui ont été invoquées. On a plutôt vu naître une véritable industrie s'articulant autour d'avocats et de toxicologues qui ont imaginé la défense des « deux bières ».
C'est de là que vient la défense des « deux bières ». Pour la plupart des gens, la consommation de deux bières — si le test est administré dans des délais raisonnables — n'entraîne pas un dépassement de la limite permise de 0,08. L'accusé est appelé à la barre où il déclare n'avoir consommé que deux bières ou un verre de vin, ou encore une consommation forte. Puis, un ami ou une connaissance avec qui il a passé la soirée est appelé à témoigner pour confirmer les faits. On fait même venir un toxicologue, à grands frais. Ce genre de défense coûte entre 5 000 et 10 000 $. En fin de compte, le juge est malheureusement contraint de déclarer qu'à la façon dont il interprète le Code, on vient de lui présenter une « preuve contraire » et qu'il y a lieu d'acquitter l'individu. Ce truc a été employé tellement de fois que c'en est presque scandaleux.
Je pense que les modifications qu'il est proposé d'apporter aux articles du code permettront de corriger ce problème et que nous obtiendrons enfin les condamnations qui nous échappent actuellement. Ceux et celles qui conduisent avec facultés affaiblies, parfois à répétition, seront condamnés et pénalisés et il y a lieu d'espérer que cela nous permettra de réduire le nombre d'infractions du genre au Canada.
Nous allons appuyer ce projet de loi, du moins en deuxième lecture, parce que nous espérons qu'il permettra de régler une partie des problèmes dont je viens de parler.
:
Monsieur le Président, c'est un plaisir pour moi de me prononcer sur ce sujet de discussion.
[Traduction]
J'appuie le projet de loi, de façon générale. Ce que l'on cherche à faire avec cette mesure est très important. Nous nous préoccupons vivement de ce que, tous les jours, surviennent dans notre pays des accidents terribles et tragiques où est en cause la conduite avec les facultés affaiblies par l'alcool.
La consommation de drogues, de substances désignées, avant de conduire un véhicule motorisé, qu'il s'agisse de médicaments délivrés sur ordonnance ou de drogues illicites, est très dangereuse. Parfois, des médicaments délivrés sur ordonnance mal utilisés, pris en quantité insuffisante ou utilisés à des fins récréatives peuvent avoir pour effet de nuire à la capacité de l'intéressé de maîtriser son véhicule, mettant sa vie en danger ainsi que celle d'autrui.
Nous devons applaudir à toute tentative raisonnable d'accroître la sécurité routière. Je pense que ce projet de loi y contribue beaucoup, mais j'ai quand même quelques réserves à formuler. Je me préoccupe par exemple de la pratique du gouvernement d'inonder la Chambre d'une foule de projets de loi portant sur la criminalité, sachant qu'il est impossible pour le comité d'étudier correctement tous ces projets de loi et d'y apporter les améliorations nécessaires, car ces projets de loi requièrent nombre d'améliorations. Le gouvernement se permet ensuite de dire que la Chambre ou le comité retarde leur adoption.
Nous sommes tous d'accord sur l'objet du projet de loi, mais celui-ci souffre de graves problèmes. Je ne doute pas que le Comité de la justice s'emploiera sérieusement à améliorer le projet de loi et à s'assurer qu'il remplisse son objet, qu'il soit opérationnel, qu'il soit adapté au contexte canadien et qu'il nous aide à protéger les Canadiens.
Tout ce que nous avons fait jusqu'à maintenant n'est pas mauvais, mais je pense que le député qui a parlé avant moi a très bien expliqué la défense « des deux bières ». Le projet de loi renferme des dispositions qui visent à réduire le recours à ce motif de défense dans les causes de conduite avec facultés affaiblies. C'est une approche constructive, mais nous devons veiller à ce qu'elle soit efficace, et nous devons également examiner d'autres éléments du projet de loi et faire en sorte qu'ils répondent aux exigences et qu'ils soient applicables.
Je me souviens d'avoir entendu un de mes amis me dire que, lorsqu'il faisait ses études de droit, il avait assisté à une conférence donnée par un ancien juge. Les étudiants avaient demandé au juge s'il était en faveur de la peine de mort. Il avait dit qu'il n'était pas en faveur de la peine de mort de façon générale, mais qu'il pourrait l'être dans certains cas, probablement pas dans les cas de meurtre parce que la majorité des affaires de meurtre qu'il avait entendues étaient liées à des crimes de passion, des infractions uniques dont l'auteur était peu susceptible de récidiver. Il avait cependant ajouté qu'il pourrait envisager la peine de mort dans les cas de conduite avec facultés affaiblies ou de vente de drogue à des mineurs parce que les gens qui s'adonnent à ces activités savent au départ qu'ils mettent la vie des gens en danger.
Dans le cas de la conduite avec facultés affaiblies, lorsque les gens boivent ce deuxième ou ce troisième verre d'alcool avant de se mettre au volant, ils savent qu'ils mettent la vie d'autres personnes en danger. Ils savent que c'est un acte illégal, qu'ils affaiblissent leurs facultés et qu'ils se mettent ainsi dans une situation où ils risquent de tuer, de mutiler ou de blesser gravement d'autres personnes. Nous devons prendre cela au sérieux.
Cependant, ce projet de loi va un peu plus loin, et j'ai certaines préoccupations à cet égard. L'une d'elles concerne le fait qu'il érige en infraction le fait pour une personne de conduire un véhicule à moteur alors qu’elle est en possession « d’une substance désignée au sens du paragraphe 2(1) de la Loi réglementant certaines drogues et autres substances ». Nous ne sommes peut-être pas contre cela, mais lorsque nous y pensons bien, par exemple, quelles sont les peines prévues? Une peine de cinq ans d'emprisonnement est possible. Si un jeune de 17 ans a une cigarette de marijuana et une arme à feu, il serait passible d'une peine moins sévère pour l'arme que pour la cigarette de marijuana, qu'il l'ait fumé ou non. Je ne crois pas que ce soit raisonnable. Je ne crois pas qu'on ait réfléchi sérieusement à cela.
Si quelqu'un transporte une grande quantité d'héroïne, il existe déjà des infractions pour le transport ou la possession de substances désignées. Pourquoi l'infraction serait-elle différente si on a une substance désignée en sa possession lorsqu'on est au volant par rapport à lorsqu'on n'est pas au volant? Si nous n'avons pas ingéré, fumé, injecté ou absorbé d'une autre façon quelconque cette substance désignée, si nous n'avons pas affaibli nos facultés, est-ce que le simple fait d'être en possession de cette substance fait de nous des conducteurs plus dangereux? Mettons-nous la vie des gens en danger? Je crois que c'est là un facteur à considérer sérieusement.
Il faut également tenir compte du rapport risque-avantages. La personne qui circule en voiture avec une substance désignée à bord est passible d'une inculpation de possession d'une substance désignée assortie d'une peine d'emprisonnement de cinq ans, comparativement à une période de probation de six mois pour simple possession. Dans pareilles circonstances, le contrevenant aura-t-il plus tendance à conduire dangereusement pour essayer d'échapper à la police? J'ai hâte d'entendre ce que les témoins auront à répondre à ces questions et de savoir s'ils pensent que cela constitue une façon raisonnable de procéder.
Une autre question à poser est la suivante. Pourquoi avoir un chef d'accusation et un test différents selon que le contrevenant conduisait alors qu'il était en possession d'une substance désignée ou en possession d'alcool? La personne qui a consommé de l'alcool fera face à une accusation de conduite avec facultés affaiblies, au criminel. Qu'en est-il de la personne qui n'a pas bu, mais qui transporte tout simplement une bouteille d'alcool, ouverte ou non, dans son véhicule? En Nouvelle-Écosse, si cette personne est âgée de 19 ans, elle ne fera face à aucun chef d'accusation si la bouteille n'est pas ouverte; autrement, des accusations pourraient être portées contre elle. Je crois me souvenir que l'amende est de 300 $ environ.
On traite différemment la possession d'une substance désignée dans le projet de loi. On la criminalise. C'est du sérieux, avec une peine maximale d'emprisonnement de cinq ans, même en cas de possession d'une des formes moins dangereuses de substance désignée. Il pourrait s'agir de médicaments prescrits à une personne autre que le conducteur qui les apporte peut-être à quelqu'un. Les médicaments seraient alors assimilés à une substance désignée. Je ne pense pas que l'on ait bien réfléchi à tout cela. Il y aurait lieu d'en discuter.
Il y a aussi la question de l'expert en reconnaissance de drogues que j'ai mentionnée tout à l'heure en parlant de l'applicabilité. Le député néo-démocrate qui est intervenu avant moi possède une vaste expérience du droit et il a exprimé certaines réserves au sujet du test, de sa validité juridique et de sa pertinence. Je me concentrerai sur l'application, car je ne suis pas un expert du système de justice.
Nous habitons un très vaste pays. Dans nos régions rurales, la GRC est la principale force de l'ordre.
Je devrais préciser, avant d'aller plus loin, que je partagerai mon temps de parole avec le député de .
La GRC est responsable de la surveillance policière. Imaginons qu’à 1 heure du matin, des agents de la GRC interceptent un véhicule automobile, croyant que le conducteur du véhicule pourrait avoir absorbé une substance contrôlée. S’il s’agit d’un cas d’alcool au volant, les agents n’ont pas à se poser trop de questions pour la suite des choses. Les structures existent déjà pour de tels cas. Toutefois, ils peuvent penser qu’ils se trouvent en présence d’une personne ayant fumé de la marijuana. Ou bien les agents ont reçu une formation à cette fin, ou bien ils n’en ont pas reçu. Dans ce dernier cas, ils doivent mettre cette personne en contact avec quelqu’un qui a reçu la formation voulue, un expert en reconnaissance de drogues, comme le dit le projet de loi.
Nombre de postes de police ont trois ou quatre agents de la GRC. D’autres en ont moins. Ces postes peuvent être à 500 ou 600 milles ou à 200 ou 300 milles de distance entre eux. Généralement, ils ne sont pas ouverts ou n’ont pas d’agents 24 heures sur 24, de sorte que l’expert en reconnaissance de drogues le plus près dans une région comme l’Ouest de la Nouvelle-Écosse, qui compte 130 000 habitants, pourrait se trouver à trois ou quatre heures de route, à supposer qu’il y en ait un de service à ces heures. On doit d’abord joindre un expert en reconnaissance de drogues, puis mettre le conducteur en présence de celui-ci dans un délai raisonnable pour qu’il puisse évaluer l’effet ou la présence de drogue.
Dans cet exemple, si l’expert en reconnaissance de drogues administre le test et a des raisons de croire que la personne a fait usage de marijuana, cette personne doit ensuite être amenée devant un autre expert qui prélèvera un échantillon de substances corporelles, de salive, de sang ou autre. Là encore, cette personne doit avoir reçu la formation voulue. Elle pourra être accessible, peut-être pas.
Dans certaines régions du pays, le système de santé peut être ou ne pas être en mesure de s’occuper de ces choses, mais les distances à parcourir peuvent être longues. Il pourrait s’agir d’une personne tout à fait innocente, mais qui, en raison d’erreurs de jugement, serait détenue pendant deux, quatre ou huit heures, empêchée de poursuivre l’activité qu’elle avait entreprise, qu’il s’agisse d’un travail ou d’une autre activité, et placée dans des circonstances très pénibles. Voilà pour le point de vue du citoyen.
Si nous nous plaçons du point de vue de la GRC, le fardeau administratif serait très lourd. Cela voudrait dire que la GRC aurait besoin d’une multitude de ces experts pour en affecter à tous ses postes, ou raisonnablement à proximité, sur une base fonctionnelle, 24 heures sur 24. Même en ajoutant 1 000 agents de la GRC pour l’ensemble du Canada, on n’y arrivera pas. Ça ne sera pas suffisant. Il nous en faudra beaucoup plus. Et que dire du coût pour les provinces, qui sera forcément très élevé.
Je tiens néanmoins à répéter que j’appuie le principe de ce projet de loi. Je pense qu’il nous faut trouver une façon de faire ce qu’il propose. Nous nous devons de trouver la technologie et d’effectuer les recherches voulues pour nous permettre, comme nous le faisons avec l’ivressomètre, d’évaluer ces individus d’une façon qui serait admissible dans une cour de justice.
Je constate que mon temps de parole est écoulé. Je n’ai abordé que deux de mes dix points, mais je sais que mes collègues se chargeront des autres.
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Monsieur le Président, je vais partager mon temps de parole avec le député de .
C'est avec plaisir que je vais parler du projet de loi . Il s'agit d'un texte important qui éliminera certaines échappatoires notables dans notre législation sur la conduite avec facultés affaiblies.
En 2003, la conduite avec facultés affaiblies a coûté à notre société 10,5 milliards de dollars, mais ce chiffre ne tient pas compte d'autres coûts considérables. La même année, l'alcool au volant a causé la mort de 1 200 Canadiens et plus de 47 000 Canadiens ont été blessés, dont bon nombre grièvement. Cela correspond à plus de 3 morts et plus de 125 blessés tous les jours. Comment chiffrer une telle hécatombe? J'ai la conviction que nous pouvons prévenir beaucoup de ces tragédies à l'avenir et nous avons certainement le devoir d'essayer d'y parvenir. Le projet de loi présenté aujourd'hui donnera aux policiers et aux procureurs les outils dont ils ont besoin pour débarrasser nos routes et nos rues des conducteurs aux facultés affaiblies par l'alcool ou la drogue. Dans un premier temps, je vais traiter des conducteurs ayant consommé de la drogue.
Dans mes recherches sur cette question, j'ai été terrifié par les statistiques concernant la consommation de drogue chez les conducteurs adolescents. Selon un rapport de 2005 sur la toxicomanie chez les étudiants de l'Ontario, près de 20 p. 100 des apprentis conducteurs ont dit avoir déjà conduit un véhicule après avoir fumé de la marijuana. En douzième année, cette proportion atteint 25 p. 100 et ils ne se déplacent pas seuls; 22 p. 100 des élèves du secondaire, de la neuvième à la douzième année, ont indiqué qu'au cours de la dernière année, ils avaient été passagers dans une voiture conduite par un chauffeur ayant consommé de la drogue.
Bien sûr, le problème ne se limite pas aux adolescents. Selon un rapport publié par le Sénat en 2002, de 5 à 12 p. 100 des conducteurs sont au volant tout en étant sous l'effet d'une drogue. La conduite avec facultés affaiblies par la drogue est à l'évidence un problème très grave et, en ce moment, les services de police sont pratiquement impuissants à y mettre fin. Les policiers ont les mains presque entièrement liées en matière de collecte d'éléments de preuve. Le sergent Brian Bowman de Toronto a fait la déclaration suivante à l'antenne de la CBC:
Si nous voyons quelqu'un qui conduit de façon erratique, il nous est très difficile de prouver que cela est dû à la consommation de drogue. Il nous faut presque espérer que la fumée sorte en volutes de la voiture ou que les comprimés tombent sur la chaussée.
Les policiers ne peuvent même pas exiger un test physique de sobriété. Ce projet de loi fermera cette échappatoire. Avec ce projet de loi, les policiers pourront désormais demander que soit effectué un test de sobriété normalisé le long de la route, s'ils ont des motifs raisonnables de soupçonner la présence de drogue dans l'organisme du conducteur.
Ils pourront également exiger qu'une évaluation par un expert en reconnaissance de drogues soit faite au poste de police. Le système d'évaluation par un ERD fonctionne bien à l'étranger et il fonctionnera bien au Canada également. Le non-respect de ces exigences sera considéré comme une infraction au Code criminel, tout comme le refus de subir un alcootest. On ajoutera un dernier moyen de dissuasion contre la conduite avec facultés affaiblies par l'effet de la drogue en érigeant en infraction le fait pour une personne de conduire un véhicule à moteur pendant qu'elle est en possession d'une substance désignée.
Permettez-moi de passer maintenant à la conduite en état d'ébriété. Autrefois, on était indulgent envers les conducteurs en état d'ébriété, mais plus maintenant. Aujourd'hui, tout le monde reconnaît que ce grave problème peut entraîner la mort. Le commissaire de la Police provinciale de l'Ontario, Julian Fantino, a fait remarquer que la principale cause de décès criminel dans ma province, l'Ontario, ce n'est pas le meurtre, mais la conduite en état d'ébriété.
Dans ma collectivité, j'ai eu l'occasion de m'entretenir avec des membres du Service de police régional de Niagara, de travailler avec des groupes locaux affiliés à MADD et de rencontrer à plusieurs occasions leur représentant des communications et des relations publiques, Chris George. En 2003, le Service de police régional de Niagara a arrêté 28 personnes dans le cadre de son programme RIDE, pour réduction de la conduite en état d'ébriété, durant une campagne d'un mois, pendant les vacances. En 2006 seulement, la Police provinciale de Niagara a déposé 99 accusations de conduite en état d'ébriété. Dans ma circonscription, le nombre d'accusations continue d'augmenter.
La conduite avec facultés affaiblies par l'effet de la drogue ou de l'alcool est un des trois principaux sujets de préoccupation des habitants de ma collectivité en ce qui concerne la justice. Ce projet de loi répond à cette préoccupation. Le projet de loi resserre les peines infligées aux conducteurs en état d'ébriété et aide les avocats de la poursuite à obtenir les condamnations qui s'imposent afin que les conducteurs responsables puissent circuler sur des routes sûres.
Nous avons renforcé les peines minimales obligatoires pour la première, la deuxième et la troisième infraction. La peine maximale pour conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles sera désormais de 10 ans alors qu'il s'agira de l'emprisonnement à perpétuité si une telle conduite a causé la mort. C'est tout simplement la chose à faire.
Notre projet de loi aidera les avocats à obtenir des déclarations de culpabilité. Dans les cas de poursuites contre des conducteurs aux facultés affaiblies, la Couronne détient des preuves scientifiques objectives: les résultats des tests d'alcoolémie effectués à l'aide des instruments approuvés.
En 2005, dans l'affaire R. c. Boucher, la Cour suprême a statué que les résultats de l’alcootest ne peuvent être utilisés pour évaluer la crédibilité d’un témoin, même si celui-ci a eu un taux d'alcoolémie deux fois plus élevé que la limite permise.
La défense dite des deux bières est une plaisanterie. Le témoignage de personnes qui ont consommé de l'alcool ne devrait pas pouvoir contredire les résultats de tests scientifiques.
L'adoption de cette mesure ne devrait pas être le fait d'une bataille partisane. En 1999, un Comité de la justice à prédominance libérale a publié un rapport sur la question et formulé des recommandations, dont les suivantes: permettre l'imposition d'une peine d'emprisonnement à perpétuité à la suite d'une condamnation pour conduite avec facultés affaiblies causant la mort; permettre l'imposition d'une peine maximale d'emprisonnement de 10 ans lorsque l'accident cause des lésions corporelles; permettre le prélèvement d'un échantillon de sang pour vérifier la présence d'alcool ou de drogues, si l'on a des motifs raisonnables et probables de croire qu'une infraction de conduite avec facultés affaiblies a été commise par suite de la consommation d'alcool ou de drogues. Voilà autant de bonnes idées sur lesquelles les députés libéraux se sont entendus. Je reconnais que ce sont là de bonnes idées.
En 2003, le ministère de la Justice a publié un document de consultation sur la question. Selon ce rapport, les programmes d'experts en reconnaissance de drogues ont donné de bons résultats dans nombre d'États américains. Ce fut un bon point.
Le projet de loi protégera les Canadiens des conducteurs aux facultés affaiblies. J'invite tous les députés à appuyer cette mesure. L'occasion nous est offerte de faire fi de toutes les lignes de parti et d'adopter une mesure sévère, équitable, légitime et comparable à des mesures adoptées dans d'autres pays du monde.
:
Monsieur le Président, je suis heureux de participer au débat et d'exprimer mon appui au projet de loi , qui modifie le Code criminel relativement à la conduite avec facultés affaiblies.
On a déjà beaucoup parlé des dispositions de cette mesure. Je n'ai pas l'intention de traiter des mêmes points. Je veux plutôt souligner certaines des objections qui ont été formulées dans les médias relativement au projet de loi.
Pour commencer, certains se demandent si les dispositions du projet de loi qui portent sur la conduite avec facultés affaiblies respectent la Constitution. Je rappelle à la Chambre que ce point a été longuement examiné lors de l'étude du projet de loi .
Il va sans dire qu'aucun gouvernement ne présente à la Chambre des mesures législatives qui, à son avis, violent la Charte des droits et libertés, à moins d'être convaincu qu'on jugera que le projet de loi impose une limite raisonnable à l'égard de l'exercice de ces droits. De toute évidence, le gouvernement précédent a jugé que le projet de loi respectait la Charte, sinon il n'aurait pas présenté le projet de loi .
Lorsque le projet de loi a été étudié en comité, le ministre de la Justice de l'époque, qui est un militant bien connu en matière de droits de la personne, avait abordé la question du respect de la Charte dans sa déclaration préliminaire. Il avait dit:
Permettez-moi de parler un instant de la Charte. Nous savons que l'ordre de subir sur-le-champ un alcootest avec un appareil de détection approuvé, sans que la personne puisse invoquer son droit à un avocat, a été jugé justifiable par les tribunaux à la lumière de la Charte canadienne des droits et libertés, en application de l'article 1 qui prévoit qu'un droit peut être limité dans la mesure où la justification de ces limites peut se démontrer.
Le droit à un avocat doit être accordé après que le conducteur reçoit l'ordre de se soumettre à un alcootest sur un appareil approuvé au poste de police et avant que le test ne soit fait.
Je m'attends à ce que la même pratique soit adoptée pour les évaluations par un ERD proposées dans le projet de loi C-16. Dans ce texte, nous avons tenté de reprendre essentiellement les conditions menant à l'ordre de subir un alcootest. Je crois que le projet de loi C-16 offre de bonnes solutions qui seront jugées justifiables en vertu de la Charte.
Par la suite, il a ajouté ce qui suit, en réponse à une question:
Non, je crois que le tribunal adopterait l'approche générale qui consiste à déterminer si un droit a été restreint dans une limite qui est justifiable dans les circonstances, et se pencherait ensuite sur les critères de proportionnalité comportant quatre volets.
Le tribunal se demanderait s'il y a un objectif urgent et réel. À mon avis, il conclurait qu'il y a effectivement un objectif urgent et réel, celui, évidemment, de sauver des vies.
Il chercherait ensuite à savoir si les moyens utilisés étaient appropriés pour atteindre l'objectif poursuivi, ce qui constitue l'autre volet du critère de proportionnalité. Je crois que le tribunal conclurait qu'il s'agit d'une solution proportionnelle pour l'objectif poursuivi.
Je crois que l'on peut assurer la Chambre que l'exigence voulant qu'un conducteur soit tenu de se soumettre sur place aux tests habituels de dépistage routier, qui sont relativement brefs, sera maintenue tout comme a été maintenue l'exigence concernant l'alcootest routier.
De la même manière, les tests effectués au poste de police par un agent formé à cet effet sont semblables à l'alcootest approuvé.
Je sais que bon nombre, sinon la plupart, des députés, souhaiteraient disposer d'un instrument permettant de mesurer rapidement la concentration de diverses drogues tout comme l'alcootest approuvé permet de mesurer la concentration d'alcool dans le sang.
Or, cette technologie n'existe tout simplement pas et, tant qu'il en sera ainsi, nous devrons nous fier à divers tests comme la réaction de l'oeil à la lumière, la tension artérielle, le pouls et le tonus musculaire, à partir desquels l'agent d'expérience fonde son opinion concernant la drogue ou la combinaison de drogue et d'alcool ayant causé l'affaiblissement des facultés. Cette opinion doit être validée par la présence de drogue chez la personne, constatée au moment de l'échantillonnage des fluides corporels.
Le président de la Ottawa Defence Lawyers Association a fait valoir une autre raison de contester la constitutionnalité de la mesure législative proposée, selon un reportage du Globe and Mail. Il a contesté l'infraction proposée, celle de refuser de fournir un échantillon d'haleine lorsqu'on est impliqué dans une collision, qui serait punie de la même manière que la conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles à une personne ou sa mort, en déclarant ce qui suit:
Il n'y a aucun lien entre le fait de refuser de fournir des substances corporelles et l'accident en tant que tel. La personne qui refuse n'a aucun moyen de défense.
Lorsqu'une personne est accusée de conduite avec facultés affaiblies causant des lésions corporelles ou la mort, la Couronne doit établir que cette personne conduisait avec facultés affaiblies et que sa conduite a causé l'accident.
La nouvelle infraction exigera de la Couronne qu'elle prouve le refus et prouve ensuite que le conducteur savait ou devait savoir qu'il avait causé un accident entraînant pour une personne des lésions corporelles ou la mort.
Cette infraction est calquée sur l'infraction consistant à ne pas s'arrêter sur la scène d'un accident. L'élément moral de l'infraction a trait à l'intention de contrecarrer l'enquête policière.
En cas de fuite, la personne tente simplement d'éviter la police. En cas de refus, la personne refuse de fournir un échantillon d'haleine — l'échantillon nécessaire pour déterminer si son taux d'alcoolémie dépassait 0,08 — ou, dans un cas de consommation de drogue, la personne refuse de subir le test ou de fournir l'échantillon de fluides corporels nécessaire pour déterminer si la drogue est véritablement présente dans son organisme.
Évidemment, dans la plupart des situations d'accident, la personne est parfaitement consciente qu'il y a eu un accident. La police devra tout de même avoir des raisons de soupçonner que la personne a consommé de l'alcool ou de la drogue avant de faire la demande.
Enfin, je remarque que certains utilisateurs de marijuana à des fins thérapeutiques prétendent que ce projet de loi les vise particulièrement et les empêchera de conduire leur voiture.
Russell Barth, cité dans le Sun d'Edmonton et dans d'autres journaux et décrit comme étant un utilisateur de marijuana à des fins thérapeutiques et membre des National Capital Reformers, a déclaré que cette discrimination fondée sur l'utilisation de médicaments est semblable à celle fondée sur la couleur de la peau.
En fait, les utilisateurs de marijuana à des fins thérapeutiques seront traités comme toutes les autres personnes qui consomment des médicaments sur ordonnance et en vente libre. Les gens prennent toutes sortes de médicaments pour des raisons médicales valables. La question est de savoir si ces médicaments affaiblissent leurs facultés. S'ils peuvent prendre leur médicament et tout de même réussir le test de sobriété, ils ont le droit de conduire. S'ils ne peuvent pas réussir le test, ils ont intérêt à se trouver un chauffeur.
L'infraction qui consiste à conduire en ayant en sa possession une drogue interdite prévoit expressément que la personne doit avoir agi ainsi sans raison valable. Évidemment, les gens qui ont le droit de consommer de la marijuana à des fins thérapeutiques ont une raison valable d'avoir avec eux une certaine réserve de marijuana. Ils ne seront donc pas visés par cette nouvelle infraction.
Je crois que le projet de loi est une solution équilibré à un problème très grave et qu'il aurait dû être présenté depuis longtemps. Dans son exposé, le ministre a dit très clairement que le gouvernement était prêt à étudier les propositions d'amendements renforçant le projet de loi que le comité pourrait proposer après avoir entendu des témoins.
J'exhorte les députés à adopter le projet de loi à l'étape de la deuxième lecture. J'exhorte également le comité permanent, dont l'horaire est très chargé, à accorder la priorité à ce projet de loi. Cette mesure législative évitera à des milliers de Canadiens d'être blessés ou tués par des conducteurs dont les facultés sont affaiblies.
:
Monsieur le Président, j'ai le plaisir de prendre part aujourd'hui au débat sur le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel (conduite avec facultés affaiblies), dont la Chambre est actuellement saisie. Ce projet de loi nous donne l'occasion de nous pencher sur un grave problème de société qui défraie souvent les manchettes. En effet, nous savons tous que conduire en état d'ébriété est un geste irresponsable. Beaucoup de prévention est d'ailleurs faite pour réduire l'occurrence de cette situation. Malheureusement, il arrive encore des incidents où un individu conduisant avec des facultés affaiblies fauche la vie de personnes sur nos routes, dont, à grand regret, de jeunes enfants.
Le projet de loi veut donc répondre à cette situation en fournissant des outils aux policiers afin de faciliter leur tâche dans l'accumulation de preuves permettant une accusation envers le conducteur fautif. Précisément, il s'attaque aux conducteurs sous l'effet de drogues, comme par exemple, la marijuana.
Le problème de la conduite avec des facultés affaiblies remonte à plusieurs années, voire des décennies. Plusieurs études ont analysé le sujet et ont apporté des pistes de solutions à ce problème. Je souligne qu'en 1999, le Comité permanent de la justice avait déposé le rapport intitulé « Vers l'élimination de la conduite avec facultés affaiblies », dans lequel on reconnaissait que les drogues pouvaient être une cause d'accidents et qu'il fallait trouver de meilleures méthodes pour les dépister. De plus, on y mentionnait que l'on devait améliorer le processus de recueillement de preuves afin de faciliter l'inculpation des conducteurs sous l'influence de drogues.
Le comité avait alors identifié deux grands obstacles: premièrement, une définition peu claire de ce qu'est un « motif raisonnable », moyen utilisé par le policier afin d'administrer un test de dépistage au conducteur; deuxièmement, l'apparente inexistence d'un test unique et non évasif pour dépister les drogues. Étant donné la relative difficulté des tests à effectuer, le comité suggérait de tenir compte des conséquences du dépistage par rapport à la Charte. Parmi les recommandations suggérées, le rapport proposait des prélèvements d'échantillons de sang si le policier avait un « motif raisonnable » de le faire.
Les obstacles identifiés par le comité étaient aussi partagés par le comité du Sénat, lequel proposait alors de pousser davantage les études comportementales des conducteurs sous l'effet de drogues, le développement d'un test de dépistage fiable et rapide ainsi que l'abaissement du taux d'alcoolémie dans le sang.
Quatre ans plus tard, le ministre de la Justice publiait un rapport de recherche découlant des recommandations du Comité permanent de la justice. L'étude — laquelle fut intitulée « Conduite avec facultés affaiblies par les drogues: Document de consultation » — proposait de trouver une voie législative afin d'obliger les conducteurs à se plier aux tests de dépistage effectués par les policiers.
Pour y arriver, le document suggérait une limite de drogues dans l'organisme et de légiférer afin que les policiers puissent exécuter un test de dépistage. Un expert présent sur les lieux pourrait, sous un « motif raisonnable », faire un test de dépistage sur le conducteur fautif, puis, s'il s'avérait positif, pousser l'investigation à l'aide d'un échantillon de substances corporelles. Les résultats auraient été donnés par un autre expert au poste de police le plus près. Les analyses et les témoignages des policiers constitueraient alors des preuves afin d'accuser le conducteur.
Cependant, le document souligne l'importance de légiférer sur les dispositions du Code criminel dans le contexte de la Charte en ce qui a trait à la demande d'échantillons corporels, tout comme les droits du conducteur fautif à consulter son avocat. Ainsi, le projet de loi C-32 du 26 avril 2004, déposé par les libéraux, légiférait en ce sens, mais mourut au Feuilleton en mai 2004 à cause du déclenchement des élections.
Repris par la suite avec le projet de loi C-16, en novembre 2004, il connaît le même sort en mourant au Feuilleton un an plus tard. Pour une troisième fois, en dehors du hasard relié à son nom, le nouveau projet de loi , proposé par le gouvernement conservateur, reprend l'essentiel du travail accompli jusqu'à maintenant, mais, par idéologie, ajoute un alourdissement aux peines encourues si le conducteur est trouvé coupable de conduite avec facultés affaiblies.
Je sais que tous les députés de cette Chambre reconnaissent que la conduite avec facultés affaiblies demeure l'une des infractions criminelles les plus susceptibles de causer la mort ou d'infliger des blessures à autrui. En effet, comme je l'expliquais plus tôt, nous en sommes à la troisième reprise de ce projet de loi afin de lutter contre les conducteurs ayant des facultés affaiblies.
Le projet de loi conservateur propose des dispositions ressemblant à celles du défunt projet de loi C-16 présenté au cours de législature précédente. Brièvement, il nous suggère les trois choses suivantes. Tout d'abord, il suggère l'obligation pour le conducteur soupçonné de facultés affaiblies de subir un test de dépistage d'alcool ou de drogues, ordonné par les policiers sur les lieux de l'arrestation, précisément sur le bord de la route. Deuxièmement, il demande l'obtention d'un échantillon de substances corporelles par des experts, acte non prévu dans le Code criminel actuel. De plus, un refus d'obtempérer constituerait une infraction criminelle, au même titre que refuser de passer l'ivressomètre. Troisièmement, il propose la limitation en cour des témoignages de contestation pour discréditer l'usage d'ivressomètre ou les résultats du test d'alcoolémie.
Elle est d'ailleurs souvent appelée la « défense des deux bières », où la personne a déclaré qu'elle avait consommé seulement un ou un certain nombre de verres pendant une période donnée et qu'il était donc impossible que son alcoolémie ait été aussi élevée que le prétendait l'alcootest.
L'alourdissement des peines, c'est-à-dire l'emprisonnement à perpétuité au lieu de cinq ans d'emprisonnement si l'infraction cause la mort d'une autre personne, est une autre mesure proposée par le présent gouvernement. Il faut ajouter à cela des amendes ajustées en fonction du nombre de récidives du conducteurs fautif: 1000 $ pour une première offense, au lieu de 600 $; 30 jours de détention pour la seconde offense au lieu de 14 jours et 120 jours de détention pour la troisième infraction, au lieu de 90 jours.
En tant que porte-parole adjointe en matière de justice et à l'instar de mon parti, j'accorde une grande importance à ce projet de loi puisqu'il veut donner les outils nécessaires pour que les policiers puissent lutter efficacement contre le problème de la conduite avec facultés affaiblies. Cependant, je crois qu'il est primordial de revenir sur certains points de l'actuel projet de loi puisque les ajouts proposés méritent qu'on les analyse afin de vérifier leur efficacité réelle.
Parmi ces préoccupations dont je souhaite faire part à cette Chambre, j'espère bien rencontrer, dans le cadre des travaux Comité permanent de la justice et des droits de la personne, des experts et des groupes qui pourront faire la lumière sur les points suivants...