1) attendu que la Chambre a débattu le 10 avril 2006 une motion visant à appuyer l’engagement significatif du Canada en Afghanistan;
2) attendu que l’engagement du Canada en Afghanistan est une importante contribution, avec celle de plus de 30 autres pays, aux efforts internationaux sous l’égide de l'Organisation des Nations Unies et de l’Organisation du Traité de l'Atlantique Nord (OTAN);
3) attendu que ces efforts internationaux diminuent la pauvreté, consolident les droits de la personne et l’égalité des sexes, renforcent la société civile et permettent de bâtir un État démocratique libre, sécuritaire et autonome pour les hommes, les femmes et les enfants afghans;
4) attendu que l’engagement du Canada en Afghanistan cadre avec les principes du Canada -- la liberté, la démocratie, la primauté du droit et les droits de la personne partout dans le monde;
la Chambre appuie la prolongation du déploiement, pour une période de deux ans, par le gouvernement du Canada en Afghanistan d’un personnel diplomatique, d'aide au développement, policier et militaire ainsi que l’affectation de fonds et de matériel à ce déploiement.
-- Monsieur le Président, comme les députés le savent, lors de la dernière campagne électorale, nous nous étions engagés à soumettre nos traités internationaux et nos engagements militaires à un vote à la Chambre.
[Français]
Si nous avons fait cette promesse, c'est qu'avant d'envoyer des diplomates, des travailleurs humanitaires ou des soldats dans les missions dangereuses à l'étranger, il est important de pouvoir leur dire que les parlementaires partagent leurs objectifs et appuient leurs travaux.
[Traduction]
Eh bien, le moment est venu de tenir un tel débat et un tel vote. La semaine dernière, le ministre des Affaires étrangères était en Afghanistan. Au cours de sa visite, le président Karzaï lui a demandé que le Canada prolonge ses opérations de sécurité et de maintien de la paix dans ce pays, au-delà de l'échéance originelle de février 2007. Cette mission du personnel de la Défense nationale est étroitement liée à nos autres efforts diplomatiques et humanitaires. Le président Karzaï et le peuple afghan attendent notre réponse.
[Français]
Ce soir, nous voterons pour un engagement renouvelé.
[Traduction]
Il y a déjà longtemps que nous aurions dû tenir ce vote, vote que tous les partis avaient réclamé d'un commun accord. Comme les députés le savent, nos diplomates, nos travailleurs de l'aide humanitaire et nos militaires sont en Afghanistan depuis près de cinq ans.
Bien que les députés de trois des quatre partis à la Chambre se soient toujours déclarés favorables à une mission en Afghanistan, les Canadiens sur le terrain -- à Kaboul, à Kandahar et dans les régions à reconstruire -- n'ont jamais reçu de mandat clair du Parlement. Ce n'est pas juste pour ces femmes et ces hommes courageux qui servent sous notre drapeau. Ils doivent avoir la certitude que leur Parlement les appuie.
La requête du président Karzaï arrive à point nommé; elle nous permet d'expliquer ce que nous allons faire à partir de maintenant et de réexaminer notre engagement. Nous allons en débattre aujourd'hui et nous tiendrons un vote ce soir.
Le président Karzaï n'est pas le seul à attendre que le Canada se décide. Nos alliés aussi attendent, notamment au sein de l'OTAN. Eux aussi veulent que nous renouvelions notre engagement. Comme les députés le savent, les Pays-Bas et le Royaume-Uni, nos deux principaux partenaires dans le Sud de l'Afghanistan, ont récemment renouvelé leur engagement pour le prolonger de deux ans et de trois ans respectivement. Les Néerlandais et les Britanniques ont donc pris leur décision.
Nous sommes en Afghanistan pour une simple et bonne raison: l'intérêt du Canada.
[Français]
Nous sommes là-bas aussi sur l'invitation du gouvernement afghan. Nous participons à une opération multinationale sanctionnée par les Nations Unies.
[Traduction]
Notre mission sur place n'obéit pas à un choix innocent fait à partir d'un certain nombre de possibilités. Ce n’est pas un projet spécifiquement conçu pour occuper nos militaires et nos diplomates. Et ce n'est certainement pas un effort unilatéral de la part du Canada.
Les événements du 11 septembre 2001 ont été un dur rappel de la réalité pas uniquement pour les Américains, mais pour tous les habitants des pays libres et démocratiques. Vingt-quatre Canadiens sont morts dans les attentats contre les tours jumelles. Il s’agissait de Canadiens ordinaires, ayant leur vie, leur famille et leurs rêves. Ces attaques à New York et à Washington ont été suivies d'attentats à Madrid, à Bali, à Londres, en Turquie, en Égypte et ailleurs.
[Français]
Nous devons être clairs. Le Canada n'est pas à l'abri de telles attaques. Nous ne serons jamais à l'abri tant que nous sommes une société qui défend la liberté, la démocratie et les droits de la personne.
[Traduction]
Depuis que nous formons une nation, nous savons que, tant que nous défendrons la liberté, la démocratie et les droits de la personne, nous ne serons pas à l’abri des attaques de ceux qui s’opposent à ces valeurs. Il n’est pas étonnant que Al-Qaïda ait ciblé le Canada ainsi que plusieurs autres pays. C’est aussi Al-Qaïda qui, avec les Talibans, a fait de l’Afghanistan, un pays en déroute et non démocratique, un refuge à partir duquel il a planifié des attaques terroristes dans le monde entier.
Nous ne pouvons pas rester les bras croisés pendant que les Talibans soutenus par Al-Qaïda ou d’autres éléments extrémistes semblables reprendront le pouvoir en Afghanistan. C’est inacceptable. Comme il y a encore des groupes de Talibans sur le terrain malgré la défaite de ce régime, notre mission en Afghanistan n’a jamais été une opération de maintien de la paix au sens traditionnel du terme.
Al-Qaïda et les Talibans ne veulent pas la paix. Ils visent les civils. Ils visent les femmes et les enfants pour imposer de nouveau leur volonté et leur vision sinistre et rétrograde de la vie au peuple afghan. Ils promettent à leurs disciples d’aller au ciel après leur mort, mais ce qu’ils apportent, c’est l’enfer sur terre.
[Français]
Le précédent gouvernement a reconnu cet état de chose.
[Traduction]
En fait, le chef de l’opposition officielle n’a jamais eu peur d’exprimer son appui à nos soldats canadiens en Afghanistan. Au cours du débat qui a eu lieu le mois dernier au sujet de notre mission en Afghanistan, il a déclaré: « Pour commencer, je tiens à me faire l'écho du ministre, qui a dit à quel point nous appuyons nos troupes. Nous sommes très fiers d'elles ». À de nombreuses reprises, il a corrigé certains malentendus quant à notre rôle en Afghanistan et je cite:
Nous sommes en Afghanistan parce que les Afghans veulent que nous y soyons. Ce n’est pas une invasion ou une occupation. Cela va aider les gens.
Le député de Vancouver-Sud a, lui aussi, appuyé cette mission le mois dernier à la Chambre en déclarant:
Notre gouvernement a accepté ce déploiement. Nous étions d’avis, et nous le sommes toujours, que la destruction totale des agents et de l’infrastructure d’approvisionnement et de formation qui font de l’Afghanistan un refuge pour le terrorisme international sert au mieux l’intérêt national du Canada.
Le Bloc québécois et même certains membres du Nouveau Parti démocratique ont aussi exprimé leur soutien à nos troupes. Je pourrais citer le député de Sackville—Eastern Shore à ce sujet.
[Français]
C'est une opinion que partage la députée de La Pointe-de-l'Île, qui a déclaré: « Pourquoi être en Afghanistan? Parce que c'est une question de solidarité internationale qui peut engager les Québécois à être là.»
Je peux vous dire, pour en avoir pris directement connaissance, que nos hommes et nos femmes en Afghanistan sont reconnaissants aux nombreux députés de partis si divers d'avoir appuyé leurs travaux.
[Traduction]
Des diplomates, des travailleurs et des soldats de 35 pays travaillent ensemble avec le gouvernement de l’Afghanistan à reconstruire ce pays. Nous apportons notre savoir-faire, une aide financière et la sécurité pour permettre au peuple afghan de se doter d’un système de justice, de développer son économie, de construire des écoles, des hôpitaux et des systèmes d’irrigation et évidemment pour protéger les droits du peuple afghan.
[Français]
Je pense au droit des femmes d'être traitées comme des êtres humains, au droit de regarder, de lire et de dire tout ce que l'on veut, au droit de choisir ses leaders par voie électorale.
[Traduction]
Il y a des risques bien réels à aider le peuple afghan à atteindre ces objectifs. C’est risqué pour les Afghans, pour nos alliés et, comme nous le savons tous, pour les Canadiens. Nous le savons parce qu’aujourd’hui encore un de nos soldats est mort au combat. Ces risques, aussi tragiques soient-ils, et ces pertes, aussi tragiques soient-elles, ne sont pas uniquement rattachés à ces circonstances et à ce pays. Ces risques existaient aussi lorsque le Canada est intervenu dans les Balkans, à Chypre ou pendant la crise de Suez et, bien entendu, en Corée et pendant les deux guerres mondiales.
Les Canadiens acceptent de courir des risques lorsque c’est pour une bonne cause. Nous rendons hommage à ceux qui prennent des risques et sacrifient leur vie en participant à cette mission.
[Français]
De l'avis du gouvernement, l'émergence d'un Afghanistan stable, sécuritaire, autosuffisant et démocratique qui ne servira plus jamais de refuge aux terroristes ou aux trafiquants en vaut la peine.
[Traduction]
Les Canadiens, et surtout les jeunes, me demandent souvent ce que j’ai vu en Afghanistan. Ils veulent savoir quel est le travail que nous accomplissons là-bas. Je leur dis que c’est un travail à la fois important et complexe.
[Français]
Nous oeuvrons de concert avec nos partenaires de l'Afghanistan, de l'ONU, de l'OTAN et des ONG dans une action internationale intégrée pour appuyer le rétablissement de ce pays.
[Traduction]
On compte 27 000 militaires venant de dizaines de pays, notamment du Canada, qui contribuent à stabiliser l'Afghanistan afin qu'on puisse y effectuer les missions humanitaires et le travail de développement qui sont essentiels.
Les défis sont énormes. Il n'y a pas de solution facile, et les interventions militaires ne peuvent régler le problème à elles seules.
En fait, le Canada et ses alliés sont tous d'accord pour dire que, si nous voulons parvenir à un rétablissement durable, nous devons appuyer à la fois le gouvernement afghan et le développement économique. C'est pourquoi nous avons amorcé une dangereuse mission à Kaboul en 2003 et y avons récemment doublé notre présence.
[Français]
Quotidiennement, les Canadiennes et les Canadiens de notre ambassade travaillent directement avec les Afghans, l'ONU, la Banque mondiale, l'OTAN et nos autres partenaires pour que la construction de cette nation soit une réussite. Cela suppose de faire en sorte que les ressources destinées au développement soient en place et qu'on les distribue équitablement à la population afghane.
[Traduction]
Notre travail donne des résultats. En un peu plus de trois ans, 12 millions d'Afghans, hommes et femmes, se sont inscrits pour pouvoir voter lors de deux élections historiques. Près de 5 millions d'enfants ont été inscrits à l'école, le tiers d'entre eux étant des filles. Près de 4 millions de réfugiés sont retournés chez eux et plus de la moitié des villages afghans ont reçu des subventions pour la reconstruction.
[Français]
Tout cela est arrivé dans un pays où, il y a quelques années à peine, il n'y avait pas d'élections, où l'éducation publique était presque inexistante, où les femmes n'avaient aucun droit et où l'avenir était sombre.
[Traduction]
J'ai vu ces progrès de mes yeux, et cela m'a rendu fier de savoir que le Canada avait contribué à ces réalisations.
Le Canada a réalisé de grandes choses en travaillant avec nos alliés et le peuple afghan, mais il reste encore beaucoup à faire.
[Français]
L'Afghanistan demeure le cinquième pays le plus pauvre au monde. Les talibans cherchent à revenir au pouvoir et trop de gens doivent s'en remettre au trafic de la drogue pour répondre aux besoins de leur famille.
[Traduction]
Nous devons prolonger notre mission afin de terminer le travail que l'ancien gouvernement a commencé. Nous devons accroître la sécurité dans le sud de l'Afghanistan pour la ramener au même niveau que dans le nord et l'ouest du pays. Nous devons faire en sorte que les enfants dans le sud de l'Afghanistan puissent aller à l'école sans craindre qu'il y ait des attentats. Nous devons faire en sorte que les Afghans puissent profiter des choses que nous tenons pour acquises, comme l'eau propre, des routes dépourvues de mines et des sources d'énergie fiables.
La stabilité dans le sud du pays permettra aussi au gouvernement afghan de concentrer ses efforts sur l'amélioration de l'infrastructure naissante de la démocratie.
[Français]
Soit une commission des droits de l'homme indépendante, une nouvelle banque centrale et une force policière professionnelle.
[Traduction]
Notre mission en Afghanistan est un exemple de plus de la tradition canadienne de leadership dans les affaires internationales, une tradition qui transcende les lignes de partis et dont nous sommes tous fiers, une tradition qui accorde plus d'importance aux actions qu'aux paroles, aux résultats qu'aux processus, aux principes qu'aux politiques.
Les gouvernements alliés qui ont envoyé des missions en Afghanistan sont très différents: ils sont conservateurs, libéraux, sociaux-démocrates, des partis qui, normalement et naturellement, ne s'entendent pas sur tant d'autres questions politiques, comme c'est le cas en cette enceinte, mais qui sont tous déterminés à renforcer la démocratie, à protéger les droits des femmes, à réduire la pauvreté et à protéger le monde libre contre la menace du terrorisme.
Pour atteindre ces objectifs, nos alliés s'entendent pour dire qu'il faut avant tout éliminer la menace que représentent Al-Qaïda et les Talibans, et former les forces de sécurité afghanes afin qu'elles soient capables d'assurer elles-mêmes la sécurité du pays.
Par conséquent, le gouvernement demande l'appui sans équivoque du Parlement pour renouveler la mission du Canada en Afghanistan. Les hommes et femmes qui servent dans nos forces armées doivent savoir que nous avons les mêmes objectifs qu'eux, que nous appuyons leurs efforts et que, indépendamment des sondages dont les résultats ont tendance à varier, nous sommes prêts à les appuyer pendant les prochaines années afin qu'ils puissent finir le travail qu'ils ont été chargés d'accomplir.
[Français]
Nous demandons au Parlement de prendre un engagement portant sur trois volets: la diplomatie, le développement et la défense.
[Traduction]
Les trois volets sont indissociables. Je vais vous expliquer à l'instant ce que nous demandons précisément au Parlement d'appuyer au cours des deux prochaines années.
Il convient que je précise également, compte tenu des événements des dernières 24 heures, quelles seraient les conséquences d'un vote négatif. Soyons clairs. Un tel vote étonnerait le gouvernement actuel. Les débats à la Chambre jusqu'au mois dernier et les discussions privées jusqu'à tout récemment nous donnaient toutes les raisons de croire que trois des quatre partis, qui ont constamment appuyé cette initiative, allaient continuer à le faire.
Si tel n'est pas le cas, le gouvernement actuel n'est pas en mesure de se retirer tout simplement ou de tourner le dos. Que fera donc le gouvernement si nous n'obtenons pas un mandat clair exprimant la volonté du Parlement de prolonger la mission de deux ans et au-delà? Il agira avec prudence en prolongeant d'un an la mission. Nous ne pouvons nous retirer à la hâte. Si nous prolongeons d'une autre année et s'il nous faut consentir des efforts supplémentaires ou obtenir un nouveau mandat de prolongation, nous allons faire cavalier seul et solliciter ce mandat de la population canadienne.
Nous demandons un mandat de deux ans qui prolonge la mission selon les modalités du déploiement actuel.
[Français]
Le premier élément est la construction d'une ambassade canadienne permanente et sécuritaire à Kaboul qui servira les intérêts du Canada et répondra aux besoins de l'Afghanistan pendant au moins 15 ans.
Le deuxième élément est l'approbation d'une dépense supplémentaire de 310 millions de dollars au titre de l'aide au développement entre l'an prochain et 2010-2011, ce qui fera passer la contribution totale du Canada à près de 1 milliard de dollars sur 10 ans.
[Traduction]
En troisième et dernier lieu, nous cherchons à prolonger de 24 mois tant la mission des Forces canadiennes à Kandahar que celle des diplomates militaires canadiens, des coopérants et des policiers de l'EPR, l'équipe provinciale de reconstruction. La prolongation de la mission, advenant l'adoption de la motion, couvrira la période allant de février 2007 à février 2009, date à laquelle nous prévoyons une transition du pouvoir en Afghanistan même.
Le fait de prolonger la mission des Forces canadiennes a des conséquences sur le plan opérationnel. Nous allons à nouveau assumer le commandement de novembre 2007 à mai 2008, pour la deuxième fois en rotation, ce qui est nouveau. Comme je l'ai dit plutôt aujourd'hui, nous serons disposés à assumer le commandement d'ensemble de l'ISAF pour un an à compter de février 2008.
À l'approche de la fin de chaque année civile, en 2006, 2007 et 2008, les ministres des Affaires étrangères, de la Coopération internationale et de la Défense nationale évalueront les résultats de notre participation, de concert avec nos alliés, selon les critères établis à la Conférence de Londres, et nous partagerons alors les résultats de cette évaluation avec les parlementaires de tous les partis.
Ainsi le Canada réaffirme-t-il l'intention qu'il a exprimée, au moyen d'un engagement clair et renouvelé, un engagement qui s'inspire des réalisations antérieures, un engagement qui respecte les valeurs du Canada, un engagement qui nous permet de mener à terme notre travail.
:
Monsieur le Président, Je crois que tous les députés conviendront avec moi qu'il s'agit certainement de l'un des débats les plus profonds et les plus importants que nous ayons tenus à la Chambre. Il est dommage qu'il se tienne dans des conditions qui rendent difficile l'obtention du résultat que nous souhaitons tous, soit le bien de notre pays, le bien de nos troupes et en définitive, le bien de la planète.
Comme l'a dit le premier ministre, moi-même et d'autres membres du caucus libéral avons fermement appuyé notre mission en Afghanistan lors des récents débats à la Chambre sur cette question. C'est nous qui sommes à l'origine de cette dernière. Nous étions fiers de notre décision et cela n'a pas changé. Cette mission est conforme à l'examen que nous avons fait de la défense et de notre politique étrangère. Nous avions alors prévu des missions difficiles dans des États en déroute comme l'Afghanistan, où l'armée ne mènerait pas que des opérations militaires. En fait, dans le cadre de l'examen de notre politique étrangère, nous avions déterminé avec précision la forme que cette mission devrait prendre pour réussir. Nous avions parlé d'une approche 3-D faisant appel à la diplomatie, à la défense et au développement, et il fallait que l'armée soit sur place pour rassembler les conditions nécessaires à cette réussite.
À l'occasion de ce débat, ne laissons personne se méprendre sur la nature du devoir parlementaire qui appartient à chacun de nous, celui de comprendre en quoi consiste la mission et quelles sont ses chances de succès. Je me suis moi-même rendu en Afghanistan, comme d'autres députés de notre caucus.
[Français]
J'ai vu les gestes extraordinaires que nos soldats font quotidiennement dans des situations difficiles, en terrain inhospitalier et en présence d'un danger quotidien et difficile.
[Traduction]
Je pense que nos soldats savent qu'ils sont en Afghanistan pour établir les conditions du succès et pour appuyer notre EPR, notre équipe provinciale de reconstruction. Nous sommes aussi là-bas pour aider. L'un de nos diplomates, le courageux Glyn Berry, est mort pour son pays, non pas en tant que militaire mais en tant que diplomate participant à une mission dont le but a toujours été non seulement d'assurer une présence militaire mais aussi de reconstruire l'Afghanistan afin qu'il puisse redevenir un membre pacifique de la famille des nations.
J'ai parlé à des Afghans. J'ai parlé à des femmes et à des enfants. Tout comme le premier ministre et d'autres, j'ai parlé au président Karzaï. Nous savons pourquoi ils appuient notre mission et nos troupes. Ils veulent que la reconstruction de leur pays soit un succès retentissant.
C'est bien sûr la question que nous nous posions pendant le dernier débat qui a été tenu à ce sujet. Aujourd'hui, la question est la suivante: pourquoi prolongeons-nous cette mission de deux ans étant donné la situation actuelle et l'information dont disposent les députés?
Nous n'attendons pas du premier ministre qu'il nous dise que la mission consiste à réprimer l'insurrection ou à éliminer la menace pour le Canada. Nous avons déjà débattu ces questions. Tous les députés de la Chambre ont participé à ce débat et ont convenu que c'était la nature de la mission et la raison pour laquelle nous sommes allés là-bas.
Je vais reprendre les propos du député de Markham. Ce dont je veux entendre parler ce soir et ce dont ceux d'entre nous qui ont appuyé ces missions veulent entendre parler, c'est des autres conditions. Quel est l'engagement du gouvernement en matière d'aide? Il est inutile de maintenir une présence militaire pendant deux ans de plus si le gouvernement n'affirme pas devant la Chambre qu'il s'engagera à fournir l'aide nécessaire pour reconstruire l'Afghanistan.
J'espère que le ministre des Affaires étrangères ou le ministre de la Défense nous parlera de la manière dont nous reconstruirons les structures de gouvernance et dont nous lutterons contre la corruption et d'autres questions de ce genre.
Si nous approuvons la prolongation de la mission pour une période de deux ans, je voudrais que le gouvernement me dise quel rôle jouera alors la Chambre. Le gouvernement demande-t-il un chèque en blanc?
Le Comité de la défense a tenté de faire adopter une résolution, l'autre jour, pour participer aux discussions, et on nous a dit que cette question ne serait pas débattue au comité. Si cette mission est prolongée, j'ai cru entendre le premier ministre dire plus tôt, en réponse à une question, que la Chambre serait informée régulièrement, mais je ne l'ai pas entendu dire cela ce soir.
Il y a d'autres choses dont on ne nous a pas parlé. Quels sont les repères nécessaires? On nous a dit, par exemple, qu'on a choisi l'année 2009 parce qu'elle correspondait à la fin du mandat de M. Karzaï. Qu'en est-il des problèmes de corruption, des insurgés en provenance du Pakistan? Qu'en est-il de la question difficile que représentent les autres missions? J'espère que le ministre de la Défense nous aidera, ce soir, en nous confirmant que le gouvernement reconnaît que nos activités militaires ne peuvent pas se limiter uniquement à l'Afghanistan.
S'il y a une crise en Haïti ou au Darfour, là où nous pouvons apporter une contribution, le gouvernement nous donnera-t-il l'assurance que nous pourrons intervenir comme il convient que le Canada le fasse? C'est la raison pour laquelle nous avons toujours participé à de courtes missions par le passé et que nous avons insisté pour avoir une marge de manoeuvre afin de participer à d'autres missions.
Avant de pouvoir prendre une décision ce soir, il me faut une réponse, et je supplie le ministre de la Défense de nous donner les faits, à savoir si le Canada, en tant que pays responsable, pourra participer à ces missions. Nous devons examiner ces questions.
Permettez-moi de commenter le processus, comme le député de Markham l'a fait. Nous avons déjà tenu un débat à ce sujet. Nous savons qu'il n'est pas nécessaire d'invoquer la Constitution pour tenir ce débat-ci. Compte tenu des circonstances, ce débat et le vote qui s'ensuivra visent-ils à marquer des points politiques ou à soutenir nos soldats qui participent à des missions?
[Français]
Par exemple, si j'ai bien compris, hier nos collègues du Bloc québécois étaient en faveur de la mission. Cependant ils la rejettent aujourd'hui parce qu'on a rejeté leur motion en comité.
Tout le monde essaie de participer, mais si nous sommes bafoués chaque fois que nous tentons de de le faire, c'est difficile.
Nous avons très peu de temps. On nous a informés que le Parlement hollandais disposait de dix semaines; or nous n'avons que six heures.
[Traduction]
Dans son discours, le premier ministre a parlé de beaucoup de choses pour la première fois.
Nous avons entendu parler de la demande de M. Karzaï.
Le premier ministre a déclaré qu'un mandat d'un an était possible. Si le gouvernement nous avait soumis un mandat d'un an, je crois honnêtement qu'il aurait obtenu davantage d'appuis de la part des députés. Cela aurait été beaucoup plus compréhensible qu'un chèque en blanc pour deux ans. Pourquoi parler maintenant d'un an au milieu du débat?
C'est Jane Taber qui a parlé pour la première fois du commandement de la Force internationale d'assistance à la sécurité dans le Globe and Mail.
[Français]
Rappelons que notre caucus n'a pu discuter que quelques heures de la motion que ce gouvernement présente ce soir devant la Chambre. Les discussions entre nous ont été bonnes. Plusieurs opinions différentes ont été exprimées et des points communs en sont ressortis. Notre caucus libéral soutient fermement nos troupes. Nous croyons fermement à l'actuelle mission et aux objectifs mondiaux. Nous croyons aussi fermement que le processus adopté par le gouvernement ne permet pas à beaucoup de parlementaires de prendre une décision éclairée au sujet de cet enjeu crucial. C'est injuste de mettre les parlementaires dans une telle position.
Cela dit, je peux parler au nom de mon caucus. Nous sommes ici et on nous donne la chance de voter pour ou contre cette motion ce soir, selon ce que nous dira le gouvernement. Nous allons participer à ce débat. Nous écouterons les arguments du gouvernement, et chacun de nos députés votera en fonction de l'information que nous recevrons du gouvernement.
[Traduction]
Tous nos députés exerceront leurs responsabilités parlementaires. Nos devoirs à l'égard de nos électeurs et de notre auguste Chambre n'exigent rien de moins.
J'ai écouté le premier ministre. J'écouterai le ministre de la Défense et d'autres députés. Je voterai en faveur de cette mission s'ils répondent à mes préoccupations, car je crois qu'en toute conscience, je ne peux me prononcer en faveur de cette mission que si nous obtenons les garanties voulues.
Cependant, il ne fait pas de doute que c'est le gouvernement qui est responsable de ce processus. Nous aurions pu renvoyer la question à un comité. Nous aurions pu disposer de plus de temps. Nous avons dû négocier le temps imparti au débat. Nos vis-à-vis voudraient sûrement, en toute bonne foi, avoir plus de temps pour discuter de cette question.
Chose certaine, aucun vote dans cette enceinte dans ces circonstances ne pourra jamais être interprété comme un manque d'appui à nos troupes. Ne sombrons pas dans le chauvinisme. Essayons de voir ce qui est le mieux pour notre pays et, en toute sincérité, ce qui est préférable pour nos troupes.
Je termine comme j'ai commencé. Nous avons rarement participé à un débat aussi important pour nos troupes et pour notre pays. Je sais que les députés de notre côté voteront selon leur conscience lorsqu'ils auront entendu les arguments du gouvernement.
Pour ma part, à l'instar de notre collègue de Markham, j'espère que le gouvernement présentera des arguments convaincants, car nous croyons dans cette mission, mais je sais que tous les députés chercheront à se laisser guider par l'inspiration divine qui leur est propre.
Je sais également qu'ils voteront d'une façon qui respectera notre pays et nos troupes engagées dans cette mission, d'une façon qui nous permettra, en tant qu'habitants de l'un des pays les plus privilégiés du monde, d'aider les gens moins chanceux que nous, qui sont peut-être à l'autre bout du monde, mais qui font également partie de notre famille humaine.
:
Monsieur le Président, j'aimerais d'abord offrir mes plus sincères condoléances à la famille de Nichola Goddard, décédée aujourd'hui en Afghanistan.
Cette fin tragique d'une femme qui oeuvrait pour construire un monde meilleur doit nous rappeler que le débat que nous entreprenons aujourd'hui porte sur une question grave. Il s'agit en effet de décider si nous devons prolonger la présence d'hommes et de femmes qui risquent leur vie en Afghanistan. La vraie question porte sur le renouvellement, pour deux ans, de l'engagement militaire du Canada en Afghanistan. Le Bloc québécois votera contre la prolongation de cette mission.
Envoyer des hommes et des femmes risquer leur vie est une décision très lourde de conséquences qui ne peut pas — et qui ne doit pas — être prise à la légère. Cette décision doit être prise en toute connaissance de cause. Nous devons donc être en mesure de répondre à certaines questions.
Une telle intervention est-elle justifiée, nécessaire et réaliste? Les gens qui risqueront leur vie disposent-ils des moyens nécessaires pour accomplir la mission que nous voulons leur confier? Quelle est la nature exacte de l'engagement militaire canadien? Existe-t-il un échéancier précis et un plan de retrait si la situation devenait incontrôlable?
En ce qui a trait à l'engagement actuel du Canada en Afghanistan, nous n'avons pas eu de réponses à toutes nos questions. Mais nous avons un niveau de connaissances et de certitudes suffisant pour l'appuyer. C'est ce que fait le Bloc québécois.
L'intervention est justifiée, ne serait-ce que pour assurer la sécurité des Afghans — eux qui vivent dans l'insécurité depuis si longtemps —, et pour reconstruire ce pays ravagé et reconstruire son État. L'intervention est réaliste puisque, à notre connaissance, elle reçoit l'appui de la population et du gouvernement afghan. Les soldats disposent des moyens nécessaires et les troupes sont suffisantes pour remplir ce mandat jusqu'en février 2007. Nous connaissons la nature de l'engagement du Canada, et il y a un échéancier précis, soit février 2007. Tout cela nous permet d'appuyer la mission actuelle.
Avons-nous suffisamment de réponses pour appuyer la prolongation de deux années supplémentaires? Certainement pas. Pour cette raison, le Bloc québécois a demandé au Comité permanent de la défense nationale d'étudier toutes ces questions. A-t-on une idée de ce que sera la durée réelle de la mission en Afghanistan? Sera-t-elle de 10 ans, comme le laisse entendre le chef d'état-major, ou de 20 ans, comme l'affirme un ancien major-général. De la même façon, peut-on avoir une estimation du coût de la mission? On parle de 2 milliards de dollars. Est-ce réaliste? Ce chiffre inclue-t-il tous les coûts: les primes versées aux soldats, l'entretien accru du matériel ou l'achat de nouveau matériel? Quels sont les critères qui servent à évaluer le succès de la mission?
Au-delà de l'image des visites du premier ministre et du ministre des Affaires étrangères, ce gouvernement doit être en mesure de dire aux citoyens si nous progressons ou non. Quelle est la stratégie pour atteindre les objectifs de pacification et de reconstruction du pays? Quelle est la place dévolue à l'aide au développement? Comment s'assurer que les activités liées à la reconstruction de l'Afghanistan ne seront pas marginalisées par les activités proprement militaires?
La réponse à cette crise ne peut et ne doit pas être seulement militaire. Qu'en est-il du traitement des civils, de l'efficacité de la convention sur le traitement des prisonniers signée avec le gouvernement afghan et de l'utilisation des mines antipersonnel?
Le 15 novembre dernier, le porte-parole de l'opposition officielle posait une série de questions qui sont demeurées sans réponse. L'une de ces question concernait un plan de retrait au cas où la mission tournerait mal. Le ministre a-t-il un tel plan? Dans quelles circonstances, le cas échéant, un retrait serait-il envisagé?
Quelle garantie avons-nous qu'il n'y aura pas de jusqu'au-boutisme dans cette affaire?
Le porte-parole en matière de défense nationale qui posait toutes ces questions, dont personne ne révoquait en doute la légitimité, est nul autre que l'actuel ministre de la Défense nationale. Or je crois en la légitimité, pour nous aussi, de poser les mêmes questions sans être considérés comme déloyaux envers les militaires présents en Afghanistan.
Ce ministre qui posait toutes ces questions, un militaire de carrière, ne répond pas aujourd'hui à ses propres questions. Tant que nous n'aurons pas de réponse à nos questions, le Bloc québécois n'appuiera pas un tel renouvellement d'engagement militaire du Canada en Afghanistan.
Dans son style coutumier, le premier ministre a décidé de provoquer un vote précipité sur la prolongation de l'engagement militaire du Canada. C'était: « il y a un vote ou je décide sans vote ». C'est pour cela qu'on a accepté qu'il y ait un vote. Cependant ce n'est pas parce qu'on a accepté qu'il y ait un vote qu'on doit voter absolument oui. Ce n'est pas cela, la démocratie; non, ce n'est pas cela.
En précipitant les choses, le premier ministre pose un geste irresponsable, à mon avis. C'est un manque de respect envers la Chambre des communes, les parlementaires et la population. Or c'est choquant.
Je ne crois pas, et je n'ai jamais cru, que les questions de guerre et de paix doivent être décidées sur des bases partisanes ou électoralistes. On n'envoie pas aussi légèrement des hommes et des femmes faire la guerre et risquer leur vie. Agir ainsi sur de telles questions, c'est faire de la petite politique, de la bien petite politique. Il s'agit en effet d'une question grave, qui mérite toute notre attention, des débats approfondis et une réflexion rigoureuse. Bien sûr, une fois la question tranchée et une décision prise, nous devons nous y tenir fermement et vivre avec elle. C'est ce que nous avons fait à propos de la présence actuelle du Canada en Afghanistan. Néanmoins le premier ministre a décidé de précipiter les choses. Il a placé sa politique électoraliste avant la politique d'État. Pour un premier ministre, c'est impardonnable.
Pire encore, le premier ministre tente de se servir du Parlement pour avaliser une décision envers laquelle la population a de très sérieuses réticences. On ne peut pas reprocher à la population de ne pas comprendre tous les enjeux et de s'opposer à la participation canadienne, quand on ne lui offre pas de réponses claires et suffisantes.
Avant de chercher le soutien du Parlement, il faut aller chercher le soutien de la population, car les parlementaires en sont l'émanation. Or c'est avant tout le rôle et le devoir du gouvernement. Pourtant, en précipitant le vote, le premier ministre refuse de s'expliquer et de convaincre la population.
Pour faire preuve de leadership, il ne suffit pas de prendre des décisions rapidement, comme aime le faire le premier ministre. Il faut aussi convaincre et expliquer. N'importe quel dirigeant autoritaire est en mesure d'imposer des décisions.
Le premier ministre dit souhaiter un appui sans faille des parlementaires à l'égard des hommes et des femmes déployés en Afghanistan. Je suis convaincu que tous les élus rassemblés ici appuient les militaires canadiens et québécois et qu'ils feront tout en leur pouvoir pour les aider dans leurs tâches. Toutefois ce n'est pas cela que le gouvernement nous demande de faire aujourd'hui. Il nous demande de lui signer aveuglément un chèque en blanc pour les prochaines années.
Le gouvernement veut nous faire jouer un rôle de complaisance. Il est hors de question, pour le Bloc québécois, d'être complaisant et de renoncer à faire son devoir comme il se doit, de façon responsable et rigoureuse.
Le Bloc québécois ne signera aucun chèque en blanc au premier ministre ou au gouvernement. Comme vous le savez, j'étais moi-même partisan d'une intervention en Afghanistan. Les exactions commises par les talibans envers les femmes, pour donner un exemple, m'ont profondément dégoûté. Le dynamitage des statues de bouddha, pour ceux qui s'en souviennent, indiquait une dérive fanatique très inquiétante. L'Afghanistan était devenu une zone de chaos et de terreur où l'aspect inhumain triomphait. Bien sûr, les attentats du 11 septembre ont été la goutte, en fait le torrent, qui a fait déborder le vase. Toutes les nations occidentales se sont alors ralliées aux États-Unis.
La communauté internationale s'est alors engagée à chasser le régime des talibans, à assurer la sécurité et à aider à reconstruire ce pays meurtri par des guerres successives.
Je suis fier de l'appui du Bloc québécois à cette intervention internationale, comme je le suis de l'appui que nous avons donné à l'intervention au Kosovo qui a contribué à mettre fin à la guerre des Balkans.
Plusieurs de mes collègues connaissent mes convictions sur ces questions. Je suis profondément convaincu que dans certaines situations, des interventions armées sont nécessaires. C'était le cas au Rwanda, en 1994, et nous avons failli à la tâche. C'était nécessaire au Kosovo, en 1998, et nous avons pris nos responsabilités.
Il est très difficile de prendre de telles décisions. C'est souvent impopulaire, mais, malheureusement, c'est parfois nécessaire. En tant que parlementaire et chef de parti, je n'ai pas hésité et je n'hésiterai pas dans l'avenir à prendre de telles décisions, même si cela devait s'avérer impopulaire. En cette Chambre, nous sommes des femmes et des hommes politiques. Nous sommes très conscients de l'opinion publique et il est sain qu'il en soit ainsi.
Cependant, comme je le disais un peu plus tôt, on ne peut prendre une décision semblable sur des bases partisanes. Bien sûr, nous représentons la population — dans le cas du Bloc, la population québécoise. En démocratie, nous devons en tenir compte. C'est même un impératif démocratique. Nous avons aussi la responsabilité de prendre des décisions qui peuvent s'avérer impopulaires. Il y a des questions fondamentales qui exigent cela de nous. Nous devons donc tenir compte de l'opinion de la population, mais ce n'est pas seulement cela qui doit dicter notre attitude. Car il arrive parfois que pour servir le bien commun, il nous faille aller à l'encontre de l'opinion publique.
Il ne faut pas non plus oublier dans quel contexte se déroule cette intervention en Afghanistan. Face au terrorisme, une réponse militaire n'est pas suffisante ni satisfaisante, bien qu'elle soit nécessaire. Détruire ben Laden et ses acolytes, c'est une chose. Détruire le terrorisme, c'en est une autre. Il faut s'attaquer aux causes que sont la pauvreté, l'absence de démocratie, la dictature et l'ignorance la plus crasse qui en découle. Ces causes ne justifient d'aucune façon le fanatisme dont nous avons été les témoins. Toutefois, nous devons nous rendre compte que ces causes sont des terreaux fertiles qui permettent au fanatisme et au terrorisme de s'épanouir.
Pour ce qui est de l'engagement militaire, il y avait nécessité d'intervenir et nécessité d'offrir un soutien logistique et avant tout une aide humanitaire. Il faut bien situer le rôle de l'armée canadienne avant de prendre des décisions qui nous engagent pour plusieurs années. L'aide humanitaire, le soutien logistique et l'intervention dans les missions de paix sont, me semble-t-il, les priorités qui permettraient à l'armée canadienne de jouer un rôle utile, ce qui n'écarte pas des interventions strictement militaires.
Ce qui doit guider notre décision, c'est le sort des Afghans. C'est aussi la nature du rôle que peut et que doit jouer le Canada. C'est aussi et surtout le sort qui attend les hommes et les femmes qui iront risquer leur vie en Afghanistan. Nous savons que certains y laisseront leur vie, que des cercueils reviendront au Canada et qu'il y aura des funérailles. C'est donc une décision grave que nous prendrons en votant. Il y aura des mères éplorées, des veufs et des veuves ainsi que des orphelins dans nos propres circonscriptions.
Nous devons et nous devrons répondre de nos décisions. Et comment pourrons-nous le faire si nous prenons une décision précipitée sans avoir de réponse à nos questions?
Heureusement, le Bloc québécois a demandé au Comité permanent de la défense nationale d'étudier attentivement toutes ces questions. Cependant, le premier ministre précipite les choses et exige que nous nous prononcions avant d'avoir obtenu ces réponses. Comment peut-on décemment envoyer des gens risquer leur vie si nous ne sommes même pas sûrs que ce sera pour les bonnes raisons? Qui peut nous assurer que d'ici deux ou trois ans, la situation en Afghanistan ne se transformera pas en cauchemar? Et si c'est le cas, qui nous garantit que ce gouvernement ne décidera pas de rester pour des motifs purement stratégiques et de faire la guerre en se justifiant par ce vote en Chambre? Comment décider d'envoyer des jeunes gens risquer leur vie quand on ignore s'ils seront envoyés dans de bonnes conditions?
Après une participation aussi massive du Canada, après trois autres années, qui peut nous assurer que les effectifs canadiens seront suffisants, qu'il ne seront pas à bout de souffle, usés jusqu'à la corde? Pour le moment, le gouvernement compte sur une hausse hypothétique des effectifs. Mais qui peut nous assurer qu'il atteindra ces objectifs, alors que pas plus tard qu'hier la vérificatrice générale soulignait l'incapacité chronique de l'armée à y parvenir?
Comment puis-je exiger, en tant que parlementaire, que quelqu'un risque sa vie, sans savoir s'il y a un plan pour sortir de là si les choses se gâtent sérieusement? Que fera ce gouvernement si la population afghane se retourne contre la présence internationale? Nous ne pouvons pas faire abstraction de l'histoire de l'Afghanistan. En toute conscience, je ne peux pas exiger de quelqu'un qu'il risque sa vie sans avoir une sérieuse conviction basée sur des réponses précises à des décisions claires.
On ne peut pas accepter d'envoyer des êtres humains risquer leur vie ainsi, parce qu'on nous tord le bras, alors que nous sommes plongés dans l'inconnu. Nous devons être responsables et refuser de donner aveuglément ce chèque en blanc qu'exige de nous le premier ministre. C'est pourquoi j'invite les élus de cette Chambre à voter contre la motion du premier ministre.
Lorsqu'il était chef de l'opposition officielle, le premier ministre affirmait qu'un gouvernement devait respecter les décisions prises par la Chambre des communes. Je l'invite donc à respecter ses propres principes, à respecter la décision que prendra la Chambre des communes sur la motion qu'il a lui-même présentée et je l'invite à participer activement au Comité permanent de la défense nationale afin que nous ayons les informations nécessaires à la prise d'une décision éclairée.
:
Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec la députée de New Westminster—Coquitlam.
Avant toute chose, je tiens, au nom du Nouveau parti démocratique, à dire la profonde tristesse qui nous a affligés quand nous avons appris aujourd'hui que la capitaine Nichola Goddard, qui était stationnée à Shilo, au Manitoba, a été tuée alors qu'elle servait notre pays en Afghanistan. Nos pensées et nos prières accompagnent sa famille, ses amis et tous les membres des forces armées qui servent notre pays, ici ou ailleurs dans le monde.
Les néo-démocrates s'opposent à l’intention du gouvernement, qui est d’enfermer notre pays dans un rôle offensif prolongé en Afghanistan, rôle qui ne reflète pas particulièrement ni les principes ni les idéaux des Canadiens.
Pendant près de 50 ans, le Canada a cherché à favoriser la paix dans le monde et à redonner espoir aux populations déchirées par la guerre. Du canal de Suez à la Yougoslavie, en passant par Chypre et le Sinaï, le Canada a acquis la réputation respectée de nation pacifique. Le Canada n'est pas une superpuissance, mais une puissance intermédiaire qui cherche pourtant, depuis longtemps, à jouer dans la cour des grands, notamment parce que nous estimons fondamental de mettre nos Casques bleus au service du monde dans le respect de la politique multilatéraliste que nous appliquons dans le cadre des Nations Unies.
Notre politique étrangère doit refléter notre réputation de pays pacifique. Nous sommes un pays de médiateurs et non d'occupants. Nous sommes un peuple qui a pour idéal de jeter des ponts et non de les brûler. Nous ne devons pas risquer, en nous plaçant dans l'ombre grandissante de l'opération Enduring Freedom de l'administration Bush, de porter atteinte à l'excellent travail que nous avons accompli dans le passé.
[Français]
Il est bien trop commode de prétendre que chaque nouvelle mission est simplement un prolongement de la mission précédente. Le gouvernement ne demande pas un prolongement, mais un engagement à une nouvelle mission qui durera jusqu'à la fin de la décennie.
Des personnes, des deux côtés de la Chambre, prétendront que tout sera perdu si le Canada réoriente son énergie après quatre ans en Afghanistan. Des personnes sont prêtes à voir le Canada pris en Afghanistan jusqu'à la fin de cette décennie et au-delà. D'après elles, faire moins que cela revient à se détourner du problème. En vérité, la contribution militaire du Canada a été considérable, étant donné nos capacités.
[Traduction]
L'Afghanistan est aujourd'hui le plus important bénéficiaire de l'aide canadienne au développement international. Le NPD apporte un appui sans équivoque au maintien de ce type de financement. Nous appuyons sans réserve l'instauration et le maintien d'un rôle diplomatique pour le Canada en Afghanistan, mais il se trouve que, dans sa motion, le gouvernement a amalgamé une mission guerrière et l'aide au développement, ce que nous ne pouvons pas accepter.
Les néo-démocrates et je dirais même tous les Canadiens apprécient la place que le Canada veut occuper par principe, celle de pays pacifique, non belliqueux. Il y a un rôle qui convient parfaitement au Canada en Afghanistan, mais ce n'est pas celui que le gouvernement a prévu de façon étroite dans sa motion.
Nous ne devons pas non plus oublier qu'à cause des décisions unilatérales du premier ministre et des libéraux avant lui, le Canada n'a plus les moyens d'apporter de contributions sérieuses dans le monde.
Malgré les débats que nous avons obtenus après d'âpres discussions et malgré des mois de questions posées à la Chambre, le gouvernement, comme le gouvernement libéral précédent, a refusé de répondre à nos questions. À quoi ressemblera effectivement la structure de commandement et de contrôle? Quels sont les objectifs de cette mission et en quoi recoupent-ils ceux de notre politique étrangère? Comment va-t-on définir le succès de cette mission? Quelle est notre stratégie de désengagement?
Quand les conservateurs étaient dans l'opposition, ils ont posé ces mêmes questions légitimes et les libéraux ne leur ont pas répondu. Il y a quelques semaines à peine, les néo-démocrates ont posé les mêmes questions à la Chambre, mais ils n’ont reçu aucune réponse. Or, les Canadiens ont droit à des réponses.
N'importe quel officier des Forces canadiennes nous le dira: le temps passé en reconnaissance n'est jamais perdu. Le gouvernement, comme son prédécesseur libéral, ne veut rien savoir de la diligence raisonnable. Tout ce qu'il veut, c'est donner l'impression que tout le monde est d'accord.
[Français]
Les néo-démocrates n'ont pas émis de chèque en blanc pour que ce gouvernement — ou n'importe quel gouvernement — entraîne le Canada encore plus loin dans la guerre, pour qu'il nous éloigne de notre rôle de Casques bleus à l'échelle internationale.
Le premier ministre et son gouvernement ont le droit de bander les yeux des députés de cette Chambre, de leur lier les mains et de procéder avec ce simulacre de débat. Toutefois, les Canadiens et les Canadiennes ne seront pas aveugles. Malgré votre intimidation, nous n'accepterons pas l'inacceptable.
[Traduction]
À maintes reprises, j'ai demandé au premier ministre directement de fournir toute l'information aux Canadiens sur notre rôle en Afghanistan. À chaque fois, malheureusement, le premier ministre a refusé de répondre. Il s'est plutôt contenté de proclamer, sans détour, que si nous remettons la mission en question, c'est que nous sommes contre nos troupes.
Soyons clairs. Les Canadiens ne se laisseront pas avoir par les slogans empruntés qu'utilise le premier ministre. Lorsque le gouvernement confond patriotisme et chauvinisme, ce que nous demandons à nos jeunes femmes et à nos jeunes hommes de défendre, au prix de leur vie, c'est une injustice pour la démocratie.
Nous n'avons aucune leçon à recevoir du gouvernement sur l'appui à donner à nos soldats. Rappelons-nous que, l'an dernier, ce sont les conservateurs qui ont voté contre un budget qui prévoyait un investissement de 13,5 milliards de dollars dans les Forces canadiennes. C'est 8,2 milliards de dollars de plus que ce que propose le budget des conservateurs. Ce sont les néo-démocrates, et non les conservateurs, qui ont voté en faveur de ce budget et qui ont veillé à ce qu'il soit adopté pour que nos troupes aient l'équipement et la formation nécessaires et un soutien financier à long terme. Voilà comment notre parti témoigne son soutien aux troupes.
Il y a quelques jours à peine, le député de Sackville—Eastern Shore a demandé ici à la Chambre pourquoi, après quatorze ans, le gouvernement refusait toujours de verser des prestations à la veuve d'un soldat mort en service et pourquoi le gouvernement laissait les avocats continuer de lutter pour empêcher cette famille de recevoir l'aide qu'elle mérite. C'est ainsi que le gouvernement prouve son appui à nos troupes.
[Français]
Si nous demandons à ce pays de continuer à faire la guerre, il faudra que chaque citoyen et citoyenne au Canada comprenne tous les faits. Nos troupes méritent de savoir ce qu'on leur demande de faire. Les familles méritent de savoir ce qu'on demande à leurs fils et à leurs filles. S'il y a un pan de notre discours public qui doit absolument être exempt de toute proclamation partisane, c'est notre politique étrangère. Cela s'applique aussi lorsque nous décidons des missions de nos troupes en leur demandant de défendre nos valeurs et peut-être même de donner leur vie.
C'est la responsabilité de chaque député de cette Chambre de poser des questions difficiles, et c'est la responsabilité du gouvernement d'y répondre.
[Traduction]
Il y a actuellement un grand débat dans les pays de l'OTAN, comme la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, sur l'avenir de la mission en Afghanistan. Au Canada, le gouvernement essaie de faire adopter une motion à toute vapeur, refusant toute possibilité d'amendement ou de précisions. Le gouvernement ne veut pas réellement discuter de la question. Il veut simplement que la Chambre approuve officiellement l'engagement des troupes canadiennes à l'égard d'une nouvelle mission très incertaine et mal définie. Il n'est pas dans l'intérêt des Canadiens de permettre aveuglément que notre pays soit prisonnier d'un engagement à long terme en Afghanistan.
Les néo-démocrates rejetteront la motion. Nous sommes d'avis que la nouvelle mission, mal définie par le gouvernement, ne correspond pas aux valeurs et aux principes qui sont chers aux Canadiens. Ce n'est pas un rôle qui nous permettra de poursuivre les objectifs de la politique étrangère du Canada.
Le néo-démocrates ont demandé la tenue du présent débat et d'un vote sur la question. Nous sommes heureux d'avoir l'occasion de défendre la place du Canada dans le monde. Je demande aux députés de se joindre à nous. Permettons à notre pays de fixer les normes. Permettons au Canada de prendre l'initiative au lieu de suivre dans ce domaine. Ouvrons notre propre chemin dans le monde, un chemin qui mise sur nos forces et qui reflète les valeurs et les principes globaux de la recherche de la paix qui nous définissent à l'échelle nationale.
:
Monsieur le Président, j'interviens aujourd'hui à titre de députée et de porte-parole du Nouveau Parti démocratique en matière de défense, et aussi à titre de citoyenne canadienne, mère et grand-mère qui s'intéresse à cette question.
Lorsque je suis devenue la porte-parole de mon parti en matière de défense il y a quatre mois, je connaissais à peine le domaine militaire, mais j'avais un principe directeur et j'ai toujours le même principe. Après quatre mois d'immersion dans la politique de défense du Canada, je suis plus que jamais convaincue que les forces militaires ne doivent être déployées qu'en tout dernier ressort.
Les forces sont un instrument percutant et dangereux, un instrument qui coûte cher. Cet instrument a des effets profonds, souvent négatifs, sur la vie d'êtres humains, qu'il s'agisse des militaires qui risquent leur vie, de leurs époux, de leurs épouses, de leurs fils, de leurs filles, sans oublier leurs mères et leurs pères ainsi que leurs grands-mères et leurs grands-pères.
N'oublions pas la lourde responsabilité que nous avons lorsque nous mettons la vie de jeunes Canadiens et Canadiennes en péril. Est-ce une mission qui peut réussir? Est-ce la bonne mission? Faisons-nous tout en notre pouvoir pour assurer la sécurité et le bien-être de nos militaires? Respectons-nous du mieux que nous le puissions les normes internationales visant la protection des civils, le choix et l'utilisation des armes, le traitement des détenus?
La décision de déployer une force militaire est très sérieuse. Nous ne sommes pas en train de jouer un jeu vidéo. Nous devons nous garder de nous laisser guider par l'agressivité et les montées de testostérone. Il n'est pas question de faire fi de toutes les règles de prudence, avec l'assurance que nous, les députés, ne nous trouverons jamais nous-mêmes exposés au danger.
Le NPD a de sérieuses objections à l'égard de la proposition visant à entreprendre une nouvelle mission de deux ans en Afghanistan après avoir terminé notre mission actuelle en 2007. À titre de députés, nous avons la responsabilité de faire entendre ces objections. Nous ne craignons pas de voter contre cette motion. Nos objections n'ont trouvé aucune réponse adéquate. C'est notre droit. C'est notre responsabilité. Le gouvernement n'a pas répondu à nos objections. Il n'a pas apporté de réponses à nos questions.
Pendant quatre ans, l'armée américaine, qui est la plus puissante du monde, a essayé de stabiliser la situation dans le Sud de l'Afghanistan en fonçant tête baissée avec baïonnette au canon et une approche anti-insurrectionnelle. L'armée américaine a failli à la tâche. Loin de s'améliorer, la situation est devenue encore plus dangereuse. Ousama ben Laden est toujours en liberté. La production d'héroïne a monté en flèche. Les insurgés sont devenus de plus en plus habiles dans la fabrication et l'utilisation de bombes artisanales sophistiquées.
Aujourd'hui, les États-Unis veulent retirer leurs forces d'Afghanistan et souhaitent que leurs alliés prennent la relève. La plupart de ces alliés, dont la majorité fait partie de l'OTAN, se traînent les pieds parce qu'ils craignent que l'approche anti-insurrectionnelle crée davantage de problèmes qu'elle n'en résout. Le Canada, lui, s'est empressé de répondre à l'appel et d'accepter la mission la plus dangereuse en Afghanistan dans le cadre de l'opération Enduring Freedom dirigée par les États-Unis dans la province de Kandahar.
Le NPD partage les inquiétudes de nombreux alliés du Canada, qui sont d'avis que l'approche anti-insurrectionnelle est vouée à l'échec et que, si tel est le cas, il y a tout lieu de se demander ce que nous faisons là. Est-ce simplement parce que les États-Unis nous ont demandé de les remplacer pour qu'ils puissent se retirer? Est-ce plutôt parce que nous n'avons ni l'imagination, ni les moyens pour trouver une meilleure approche? Ou encore, est-ce parce que nous ne voulons pas être ailleurs, en train d'accomplir une mission différente, moins macho et manifestement plus humanitaire, c'est-à-dire en train de sauver les gens du Darfour qui sont en proie à un véritable génocide.
L'Afghanistan est le plus grand bénéficiaire de l'aide canadienne au développement international. Le NPD appuie sans réserve la poursuite de cette aide, en particulier lorsqu'elle vise à soutenir le travail d'organisations non gouvernementales oeuvrant autant que possible indépendamment des forces militaires étrangères.
L’Afghanistan est un pays vaste et diversifié qui offre de nombreuses possibilités pour le déploiement d’équipes de reconstruction composées de personnel des Forces canadiennes, de l’ACDI, des Affaires étrangères et de la GRC. Le NPD soutient certainement le maintien d’une présence canadienne importante pour la reconstruction de l’Afghanistan. Toutefois, comme l’a expliqué le chef de notre parti, nous croyons que la prolongation de la mission contre-insurrectionnelle n’est pas le meilleur usage que l’on puisse faire de l’armée professionnelle du Canada qui est petite, mais hautement qualifiée.
Il y a un génocide au Darfour. Hier, le Conseil de sécurité de l’ONU a chargé Kofi Annan, le Secrétaire général des Nations Unies, de trouver des pays désireux et capables d’engager des troupes et de l’équipement dans cette mission humanitaire extrêmement importante. Le Canada peut répondre à cet appel avec les meilleurs soldats au monde et un équipement spécialement conçu pour des opérations de maintien de la paix énergiques, à moins que nous ne votions aujourd’hui pour prolonger la mission contre-insurrectionnelle en Afghanistan.
La décision de tourner le dos au génocide ne doit pas être prise à la légère ou à la hâte. Ce n’est pas une décision que l’on peut prendre à l’issue d’un vote hâtif, après seulement six heures de débat et sans examen en comité parlementaire. Cela va à l’encontre de la nature même de notre pays et de nos convictions.
Le NPD a d’autres inquiétudes à l’égard de la prolongation de la mission contre-insurrectionnelle dans le sud de l’Afghanistan. Nous trouvons inquiétant que les soldats canadiens remettent leurs prisonniers aux autorités afghanes ou aux Américains sans que les obligations que le Canada continue d’avoir envers ces détenus en vertu du droit international ne soient suffisamment préservées. Nous trouvons inquiétant que les soldats canadiens se servent de mines antipersonnel que des forces étrangères ont posées en violant l’esprit et l’intention de la Convention d’Ottawa sur les mines terrestres.
Nous sommes également très inquiets devant le coût de cette mission. Lorsque la mission actuelle sera terminée en février 2007, elle aura probablement coûté aux Canadiens plus de 5 milliards de dollars. L’Institut Polaris a estimé que sa prolongation de deux ans ou qu’une nouvelle mission coûterait 2 à 3 milliards de dollars supplémentaires.
Avec 7 milliards de dollars, nous pourrions contribuer énormément à la reconstruction et à l’aide humanitaire, pas seulement en Afghanistan, mais aussi ailleurs. Comme je l’ai mentionné au début de mon discours, la force militaire est un instrument brutal, dangereux et coûteux. Face à un coût de 7 milliards de dollars, en tant que gardiens des deniers publics, nous avons l’obligation de nous assurer qu’une mission contre-insurrectionnelle est la seule solution et qu’il s’agit bien de la bonne mission.
Enfin, le NPD s’inquiète de l’incertitude qui persiste au sujet de la date du transfert à l’OTAN du contrôle opérationnel que l’armée américaine exerce sur les soldats canadiens.
Dans la motion à l'étude, on dit que l’engagement du Canada en Afghanistan est une importante contribution, avec celle de plus de 30 autres pays, aux efforts internationaux sous l’égide de l'Organisation des Nations Unies et de l’OTAN. Mais où est l'OTAN? L'été dernier, lorsqu'il a été décidé que nous accepterions cette mission, les libéraux nous ont dit que les Forces canadiennes seraient placées sous le contrôle opérationnel de l'OTAN ce printemps, en février, en fait. Ce transfert a été reporté, pas une, mais plusieurs fois. Aujourd'hui, nous lisons dans les journaux qu'il se pourrait bien que le Canada finisse par diriger la mission de l'OTAN, probablement parce qu'aucun autre pays de cette organisation ne veut ce mandat.
La motion est trompeuse. Notre engagement actuel n'est placé ni sous les auspices des Nations Unies ni sous les auspices de l'OTAN. Cet engagement s'inscrit dans le cadre de l'opération Enduring Freedom. Dans la situation, et compte tenu de l'incertitude, le NPD ne pourrait pas, en toute conscience, voter en faveur de la motion.
Je me suis exprimée aujourd'hui en tant que députée, citoyenne, mère et grand-mère. La décision d'utiliser la force militaire est une des plus graves décisions qu'un gouvernement puisse prendre. Je répète que ce n'est pas un jeu vidéo. Nous parlons de la vie de millions de personnes, de la vie de Canadiens, d'Afghans et d'habitants du Darfour. Nous devons prendre la meilleure décision possible et opter pour la mission qui est la bonne afin que, dans un an, dans deux ans ou dans dix ans, nous puissions dire aux familles de nos soldats que, oui, cette mission valait la peine d'y laisser sa vie.
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Monsieur le Président, je suis fier et honoré de participer au débat ce soir. C'est un débat historique, de toute évidence. Je félicite tous les députés qui sont intervenus ou qui interviendront ce soir.
On peut situer ce débat dans le contexte des nombreuses réalisations du Canada dans le cadre de son engagement et de sa mission en Afghanistan. En trois ans, l'Afghanistan a fait des progrès remarquables surtout si on tient compte d'où le pays est parti. Le PIB de l'Afghanistan a doublé. Quelque 63 000 anciens combattants ont été désarmés, démobilisés et réintégrés. Environ 11 000 armes lourdes ont été retirées et sont sous bonne garde. Un service national de police voit peu à peu le jour. Les femmes fondent de petites entreprises. Des millions de réfugiés sont rentrés.
Ce ne sont là que des statistiques. Il faut regarder plus loin pour voir toutes les réalisations du Canada. Ces statistiques ne reflètent pas adéquatement toute la dimension humaine rattachée à des progrès aussi importants. Ces statistiques ne montrent pas les nombreux triomphes que des Afghans ont connus depuis 2001: la petite fille qui va à l'école pour la première fois, la veuve qui devient autonome, l'électeur qui a un choix et la famille de réfugiés qui rentre enfin au pays.
J'ai la chance de pouvoir dire que j'ai vu ces gens de mes propres yeux lorsque j'étais en Afghanistan, que j'ai regardé dans les yeux une petite fille dans une école afghane de Kaboul qui était parrainée par le Fonds canadien. Ce projet permettait à des jeunes de fréquenter l'école pour recevoir une formation professionnelle et acquérir des compétences de base. On leur donnait des leçons d'hygiène et on leur apprenait à parler, à lire et à écrire. Cette petite fille n'aurait jamais eu cette possibilité sans l'intervention des alliés, y compris le Canada. Je lui ai demandé ce qu'elle aimait le plus à l'école et elle m'a dit les mathématiques. Lorsque j'ai voulu savoir ce qu'elle ferait à la fin de ses études, elle m'a répondu qu'elle voulait enseigner à d'autres petites filles pour qu'elles profitent de la même chance qu'elle.
Ce sont là les répercussions humaines de la présence des Canadiens en Afghanistan de nos jours. Ces possibilités n'existeraient pas. Ce sont les valeurs mêmes auxquelles les Canadiens souscrivent. Y a-t-il quelque chose de plus conforme à nos valeurs que de vouloir s'assurer que de jeunes femmes ont la possibilité de fréquenter l'école, d'être instruites et de mener une vie productive?
Notre société est fondée notamment sur la nécessité de protéger les gens et de veiller à ce qu'ils puissent avoir un foyer sûr, la chance de s'instruire, sans être victimes d'une forme quelconque d'exploitation ou, pire, de violence et de mauvais traitements, et sur la volonté de renforcer la démocratie. Pourquoi ne voudrions-nous pas partager ces valeurs avec les Afghans?
Le Canada aide à libérer les gens de la peur, ce qui permettra aux Afghans ordinaires d'avoir une vie quotidienne sans crainte. J'ai constaté, durant cette visite à Kaboul et à Kandahar, un sentiment d'espoir très palpable qu'après tant de décennies où ce pays a été ravagé, il est maintenant en voie de se redresser et de vivre des temps nouveaux.
Mes collègues ont parlé de certains autres effets tangibles comme l'eau potable. Des milliers d'écoles sont ouvertes. Des millions d'enfants sont maintenant en mesure de fréquenter l'école. Les Afghans que j'ai rencontrés là, qu'il s'agisse de dirigeants, de hauts fonctionnaires ou de gens ordinaires, ont vraiment pris la peine de remercier les Canadiens qui étaient là, les représentants du Canada, de leur exprimer leur gratitude pour les contributions du Canada. Ils ont également pris le temps de nous adresser leurs condoléances pour nos sacrifices considérables, pour les pertes de vies de soldats et de diplomates canadiens qui ont tant donné.
Le président lui-même, M. Karzaï, a exprimé ces sentiments avec beaucoup de compassion. Il s'est fait l'écho des observations que j'ai entendues à de nombreuses réunions, qu'il s'agisse des réunions de l'OTAN, des réunions de l'Union européenne ou de réunions avec nos alliés en général. Les Afghans reconnaissent la contribution du Canada à la reconstruction de leur pays, ils l'apprécient et ils nous en remercient.
Ils ont exprimé à l'unanimité l'espoir que nous ne les abandonnerons pas à un moment si critique.
[Français]
Après deux décennies et demie de conflits, les Afghans sont eux-mêmes investis de leur avenir à un très haut degré. Les progrès réalisés ont été laborieux, mais les changements positifs sont évidents partout. Les Afghans jouissent de possibilités qui étaient impensables sous les talibans, y compris tout particulièrement pour les enfants et les femmes dont la dignité était systématiquement bafouée sous un régime répressif.
[Traduction]
Ce n'est pas le temps de baisser pavillon. C'est le temps de tirer profit de nos réalisations. Il est essentiel que nous n'abandonnions pas à un moment aussi critique les institutions qui ont été édifiées et la stabilité qui s'installe graduellement.
[Français]
Le fondement d'institutions de gestion afghanes responsables et efficaces a été mis en place: une Constitution a été rédigée, et un président, un Parlement et 34 conseils provinciaux ont été élus. Le pays est maintenant en position de capitaliser sur ces progrès démocratiques, et un bon nombre de citoyens afghans ont hâte aux prochaines élections de 2009. C'est une autre preuve que nos efforts initiaux seront durables.
Le Pacte de l'Afghanistan, convenu plus tôt cette année à la Conférence de Londres, servira de guide au rétablissement continu de l'Afghanistan pour les cinq prochaines années. Il établit les jalons de la sécurité, de la gestion et du développement, jalons que le gouvernement afghan et la communauté internationale ont convenu de poursuivre conjointement, par exemple la destruction de tous les stocks de mines antipersonnel, la mise en vigueur de lois contre la corruption d'ici à la fin de 2007 et une augmentation de 20 p. 100 de l'embauche des femmes d'ici à la fin de 2010.
[Traduction]
Ce sont les jalons que le gouvernement afghan a établis et adoptés comme étant la meilleure façon d'assurer la sécurité, la bonne gouvernance et la prospérité pour les Afghans.
Tant et aussi longtemps que les autorités afghanes s'affairent à établir un véritable gouvernement national, l'Afghanistan ne peut fonctionner seul. Le président Karzaï et le gouvernement afghan reconnaissent toutefois qu'ils auront besoin d'un appui soutenu pour atteindre ces objectifs vitaux. Ils ont beaucoup insisté là-dessus lorsque le premier ministre s'est rendu en Afghanistan dans le cadre de son premier voyage à l'étranger. C'était un geste noble et brave de la part du dirigeant de notre pays.
Le président Karzaï, un homme remarquable, vit une période critique et nous devons l'appuyer. C'est un visionnaire, un président qui fait preuve de leadership par l'exemple pendant ces moments difficiles. Il a demandé expressément que le Canada maintienne sa présence et fasse preuve de détermination. Il est conscient, comme nous devrions tous l'être, que nous avons la responsabilité d'appuyer les efforts d'édification d'un État Afghanistan.
La communauté internationale a entrepris d'aider l'Afghanistan à atteindre ces objectifs en envoyant plus de 60 délégations, dont celle du Canada, participer à une conférence sur l'Afghanistan, coprésidée par le président Karzaï, le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, et le premier ministre du Royaume-Uni, Tony Blair, qui a eu lieu le 31 janvier 2006, à Londres. Lors de cette conférence, tous nos alliés ont exprimé leur appui clair et indéfectible au Pacte pour l'Afghanistan et se sont engagés à hauteur de 10,5 milliards de dollars.
Je voudrais parler de l'engagement du Canada et j'aimerais répondre au chef de l'opposition, qui est un ancien ministre de la Défense et des Affaires étrangères. Il a posé des questions bien précises auxquelles j'espère pouvoir répondre maintenant.
L'engagement du Canada en Afghanistan est un élément important de l'effort international d'aide à l'Afghanistan, un pays qui fait des progrès véritables. Avec nos partenaires d'Afghanistan, des Nations Unies, de l'OTAN et de divers pays, nous nous employons à obtenir les résultats clairs et mesurables définis dans le Pacte pour l'Afghanistan. Notre objectif commun est de veiller à ce que la population de l'Afghanistan et le pays lui-même réalisent la vision énoncée dans le pacte.
Il s'agit d'une entreprise considérable, et c'est pourquoi il est si important que nous prenions au sérieux nos responsabilités sur la scène internationale. Le Canada s'est engagé envers les Nations Unies à demeurer en Afghanistan. Nous nous sommes également engagés envers nos alliés et envers l'OTAN, dans le cadre de l'une des missions les plus importantes de cette organisation, qui intervient pour la première fois hors de son secteur géographique habituel, ce qui constitue une épreuve cruciale pour mesurer sa capacité à réagir aux atteintes à la sécurité que pourrait nous réserver le XXIe siècle.
En tant que gardien de la sécurité, l'OTAN a joué un rôle vital dans les réussites à cet égard jusqu'à ce jour et demeurera indispensable à tout progrès futur en Afghanistan. La prolongation de notre engagement est la suite logique des engagements pris par le Royaume-Uni et les Pays-Bas, qui comptent parmi nos principaux partenaires dans le Sud de l'Afghanistan. Je vous signale, comme l'a indiqué le premier ministre aujourd'hui, que ces deux pays ont déjà prolongé leur engagement.
Je m'empresse également de signaler que les Pays-Bas se trouvent dans la région et ont pris leur engagement principalement à cause de l'engagement du Canada. Nous avons participé à la discussion qui a eu lieu au parlement néerlandais. Mais surtout, nous nous sommes engagés envers le peuple afghan lui-même à maintenir le cap. Nous agirions de manière gravement irresponsable et nous mettrions en péril la réussite de la mission, s'il fallait que nous abandonnions la partie comme l'ont suggéré certaines personnes à la Chambre ce soir.
En réduisant notre présence en Afghanistan ou en nous en retirant avant que le gouvernement de ce pays en ait pleinement pris les commandes, nous inviterions les talibans et Al-Qaïda à reprendre du service, ce qui aurait pour effet d'annuler ce que nous avons réussi à accomplir jusqu'à aujourd'hui. Ce serait non seulement la sécurité de l'Afghanistan qui serait menacée à long terme, mais également la sécurité du Canada lui-même. Il ne s'agirait de rien de moins qu'une décision irresponsable.
Nous ne pouvons pas nous permettre de succomber aux efforts de déstabilisation et de projeter l'image d'un pays qui ne respecte pas sa parole et qui n'est pas à la hauteur de sa réputation. Dans l'adversité, le Canada ne se défile pas. Dans les périodes troubles, aux endroits où la sécurité est menacée, le Canada est toujours là. Nous répondons à l'appel, nous intervenons, nous faisons notre juste part, nous ne perdons pas espoir et nous tenons parole.
Nous sommes à mettre en place les éléments intégrés d'un engagement canadien élargi visant la stabilisation, la gouvernance et le développement en Afghanistan. Voilà qui permettra au Canada de continuer à venir en aide au gouvernement de l'Afghanistan et à collaborer avec la communauté internationale pour réaliser l'objectif.
De plus, l'engagement accru du Canada dans les trois domaines annoncés par le premier ministre nous permettra d'être en bonne posture pour continuer à agir comme chef de file en Afghanistan et dans le cadre de la mission de l'OTAN qui se poursuivra.
Il ne s'agit pas d'une mission traditionnelle de maintien de la paix. Al-Qaïda et les Talibans refusent de reconnaître la volonté du peuple afghan, qui s'est exprimée à diverses reprises dans des élections reconnues. Nous ne pouvons permettre qu'ils réussissent dans leurs efforts visant à déstabiliser l'Afghanistan et à provoquer le départ des forces militaires internationales. En maintenant notre engagement, nous manifestons clairement notre détermination aux insurgés. Si nous nous montrions moins résolus, me semble-t-il, nous transmettrions le message contraire, et nous mettrions également en péril la vie et la sécurité des troupes canadiennes et de nos partenaires internationaux sur place en Afghanistan.
En prolongeant la présence de nos troupes, nous aiderons également les forces de sécurité de l'Afghanistan à atteindre leurs objectifs en matière de formation et de préparation énoncés dans le Pacte pour l'Afghanistan. La période de 24 mois coïncide également avec les engagements de nos alliés de l'OTAN et elle nous donnera le temps d'aider à établir l'environnement sécuritaire dont les Afghans ont besoin pour mettre sur pied des institutions et des infrastructures critiques.
Notre présence à Kandahar sera tout particulièrement utile au gouvernement afghan, lui permettant de faire bénéficier des efforts de reconstruction les régions du Sud du pays. De plus, cette présence correspond aux plans de l'OTAN d'élargir sa zone d'opération à cette région du pays pour soutenir le gouvernement de l'Afghanistan. Nous en sommes à un moment critique, je dois le rappeler, et il s'agit de la région du pays où les besoins sont les plus grands.
J'ai rencontré le gouverneur de Kandahar qui, lui aussi, a manifesté le désir de voir les Canadiens collaborer sur place avec les responsables de l'armée afghane et les alliés de l'OTAN pour mener à terme les initiatives déjà amorcées. Même avec l'amélioration de la situation sur le plan de la sécurité, une présence non militaire sera nécessaire, y compris la présence de responsables de l'aide au développement et la présence en permanence d'une ambassade du Canada à Kaboul. Voilà pourquoi nous prévoyons, comme élément important de l'ensemble des efforts du Canada en Afghanistan, une aide au développement accrue en fonction des résultats et une représentation diplomatique plus importante.
Comme je l'ai déjà dit, le chef de l'opposition a manifesté certaines inquiétudes auxquelles je voudrais réagir.
Le Canada va accroître son aide internationale au développement. Cette aide augmentera de 310 millions de dollars, ce qui portera notre participation totale à près d'un milliard de dollars sur 10 ans jusqu'à l'année 2011. Le Canada deviendra ainsi l'un des principaux donateurs étrangers à participer à l'effort de reconstruction de l'Afghanistan. Le chef de l'opposition peut s'enorgueillir du fait que c'est son gouvernement qui a amorcé cet effort et nous l'encourageons à appuyer les efforts du gouvernement actuel visant à renforcer les capacités de l'Afghanistan.
Deuxièmement, le député d'en face a posé une question au sujet de l'engagement du Canada. Vers la fin de l'année civile, en 2006, 2007 et 2008, les ministres des Affaires étrangères, de la Coopération internationale et de la Défense nationale évalueront les résultats obtenus avec nos alliés, conformément aux critères établis lors de la conférence de Londres, et ils présenteront leurs évaluations au Parlement. Voilà un engagement ferme d'informer régulièrement le Parlement des progrès et des données repères.
Je sais que, dans le cadre de son intervention, le ministre de la Défense nationale abordera la question des engagements du Canada dans d'autres pays. De toute évidence, les engagements du Canada à l'égard de l'Afghanistan auront une incidence sur notre capacité de faire des contributions ailleurs.
Toutefois, les demandes seront examinées attentivement en fonction de la mission elle-même, comme il convient de le faire. Toute demande éventuelle d'intervention des Forces canadiennes sera examinée en bonne et due forme. Toutefois, nos interventions sont indépendantes les unes des autres. À l'heure actuelle, nos engagements à certains endroits, notamment en Haïti, et la nécessité d'intervenir davantage au Soudan, ne sont pas limités par notre mission en Afghanistan. Les missions ne dépendent pas les unes des autres.
De plus, le Canada doit prendre un engagement à plus long terme pour la simple raison que c'est ce dont les Afghans ont besoin et c'est ce qu'ils méritent à l'heure actuelle.
[Français]
L'acquisition d'un terrain et la construction des installations permanentes d'une ambassade permettront au Canada de continuer à jouer un rôle de premier plan sur le plan national à Kaboul, aux côtés du gouvernement afghan.
Le gouvernement afghan a besoin de notre aide pour offrir des services de base et protéger ses citoyens. Nous lui avons dit que nous ferons notre part et encore davantage, comme nous l'avons fait si souvent auparavant en période de crise et de besoins internationaux.
[Traduction]
Le Canada défend et défendra toujours les grandes causes. Il défend la démocratie, les droits de la personne, la générosité et le courage, valeurs dont les Afghans ont réellement besoin et auxquelles ils souhaitent vraiment adhérer. Je m'empresse d'ajouter que l'élaboration de la démocratie est impossible aujourd'hui en Afghanistan sans mesures de défense et de sécurité et sans la présence de troupes sur le terrain. Voilà le lien important qu'il ne faut pas oublier.
Je n'arrive pas à croire la naïveté de certains députés qui suggèrent qu'il est possible de se passer de la défense et de la sécurité. Selon les Canadiens, la démocratie ne repose pas sur des interventions ponctuelles, ici et là. Elle ne peut prendre forme sans mesures de sécurité. Il est irresponsable de suggérer que le Canada peut retirer ses troupes de l'Afghanistan et s'attendre ensuite à ce que la démocratie et le développement y soient assurés.
Le Canada a décidé de changer les choses, de travailler à la mise en place d'un gouvernement élu démocratiquement, de créer des institutions de gouvernance responsables partout en Afghanistan et d'aider à protéger les Afghans au moment où ils tentent de rebâtir leur vie en éliminant la menace que représentent les talibans et Al-Qaïda, et c'est précisément ce qui se passe. Penchons-nous un moment là-dessus. Comment est-ce de vivre dans la peur, la peur que son école ou sa maison ne soit brûlée, sans qu'on n'ait absolument rien à y voir? De telles situations se produisent simplement parce que les gens se trouvent au mauvais endroit au mauvais moment. Or, grâce à la présence de troupes en Afghanistan, ces situations ont dans une large mesure été éliminées.
Nous devons appuyer les Nations Unies, l'OTAN, la Banque mondiale et nos autres partenaires internationaux dans leurs efforts pour soutenir la relance économique de l'Afghanistan, pour aider à former les forces de sécurité de ce pays afin qu'il puisse posséder sa propre armée, pour aider à améliorer la primauté du droit, pour aider les agriculteurs à cultiver d'autres produits que le pavot, pour aider les femmes à progresser et à améliorer leur qualité de vie et pour aider les enfants à s'instruire. Ce sont des pays comme le Canada qui opèrent un changement.
La motion que nous examinons ce soir permettra également d'opérer un changement. Elle permettra au Canada d'être en mesure de terminer le travail qu'il a commencé. Un engagement canadien prolongé et renforcé à l'égard de l'Afghanistan montrera clairement, sans équivoque et concrètement à la population afghane qu'elle a raison d'espérer de connaître des jours meilleurs.
Assurer l'avenir des Afghans est dans l'intérêt du Canada. C'est ce qu'il convient de faire. À mon retour d'Afghanistan, j'étais convaincu plus que jamais que nous étions là-bas pour les bonnes raisons.
Dans ce contexte, la Chambre devrait envoyer un message clair de soutien au gouvernement d'Afghanistan, à nos partenaires internationaux et aux soldats des Forces canadiennes qui arborent le drapeau de leur pays: cette mission sera couronnée de succès et nous leur accordons tout notre appui.
:
Monsieur le Président, je partagerai le temps de parole qui m'est imparti avec la députée d'Oakville.
Dans un premier temps, on me permettra d'offrir mes condoléances à la famille et aux proches de l'officier Nichola Goddard.
Malheureusement, la première chose que l'on doit dire ici, c'est qu'il y a eu un peu trop d'enflure verbale. Peu importe ce que nous allons voter, il est important d'envoyer à nos troupes en Afghanistan le message clair selon lequel nous les appuyons ainsi que la mission en Afghanistan. Chaque fois qu'on essaie de faire de la politique avec cette question, on démontre à quel point le Parti conservateur, ce gouvernement, a essayé dès le début de nous placer dans une trappe politique. On a bel et bien entendu les propos du premier ministre ce soir. Il a dit que même si la motion était rejetée, il y aurait un renouvellement d'un an, après quoi nous en ferions un enjeu lors des prochaines élections. Telle est la réalité d'aujourd'hui: peu importe que nous tenions ou non un débat et un vote, de toute évidence, ce gouvernement a déjà son jeu en main. C'est à se demander s'il n'a pas préparé une petite séance de communication, étant donné la visite du premier ministre d'Australie ici demain, visant à annoncer que nous avons fait cela nous aussi. Malheureusement, ce n'est pas ainsi qu'on doit fonctionner en politique.
Je trouve aussi regrettable que le ministre des Affaires étrangères ait traité un de nos collègues de Chamberlain du XXIe. On ne commencera pas ce genre d'injure. C'est extrêmement regrettable. Le député d'Etobicoke—Lakeshore lui a posé des questions extrêmement pertinentes, mais nous n'avons malheureusement pas eu de réponse.
En raison de ce manque de réponse, au nom des concitoyens du comté de Bourassa que je représente et à titre de Canadien et de Québécois, je ne suis pas en mesure de signer un chèque en blanc à ce gouvernement. On sait pertinemment que des pays comme les Pays-Bas ont tenu des discussions pendant des mois et ont fixé une date longtemps d'avance, ce qui leur a permis d'en arriver à une décision quant au renouvellement de cette mission.
Nous avons également présenté une occasion en or. Le Parti libéral, l'opposition officielle, a appuyé la motion du Bloc québécois au Comité permanent de la défense nationale. Ce n'est pas compliqué. Quand on connaît le moindrement la question militaire, on sait pertinemment que nous avons au moins jusqu'à l'automne prochain pour prendre une décision finale. Cela ne coûte pas plus cher. Nous ne voulons pas faire de la politique — et de la petite politique — au détriment des troupes que nous appuyons, de ces hommes et ces femmes qui travaillent pour des raisons humanitaires, des grands Canadiens qui épaulent et accompagnent le peuple afghan. Nous ne devons pas faire de la politique à leur détriment. Ce serait extrêmement regrettable. Nous devons les soutenir.
C'est notre gouvernement, à l'époque, qui a mis en avant cette mission. En premier lieu, on se rappellera que nous travaillions en collaboration avec l'OTAN, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord, à Kaboul. Pourquoi est-on si pressé aujourd'hui de donner une telle réponse? Pourquoi, après un préavis de 36 heures, tenir un débat de six heures à la fin duquel nous serons malheureusement obligés de prendre ce genre de décision? De toute façon, le premier ministre a dit très clairement aujourd'hui que si la motion était rejetée, il y aurait quand même un renouvellement d'un an, après quoi nous irions en élections.
À titre de ministre de la Couronne et à titre de conseiller spécial pour Haïti pour le premier ministre de l'époque, le député de LaSalle—Émard, j'ai été fier de voir à quel point il est important de lier sécurité et aide humanitaire. Le NPD fait totalement fausse route en essayant de dire que nous devons nous tourner strictement du côté de l'aide humanitaire sans prendre en considération la sécurité. La question de la sécurité est essentielle. Et quand on veut s'assurer que cela fonctionnera bel et bien, on doit aussi prévoir une stratégie de sortie. Nous devons tenir compte de critères très spécifiques quand nous déployons une mission dans un pays, dans notre désir d'épauler ce peuple qui a trop longtemps souffert. Nous devons éviter à tout prix de nous enliser dans ce genre de conflit. Ce n'est pas un manque de courage. Ce faisant, nous démontrons tout simplement un sens des responsabilités. Nous savons que si nous voulons être efficaces là-bas, nous devons travailler également avec les autres alliés.
Le ministre de la Défense nationale dit que si nous déployons des troupes en Afghanistan, nous n'aurons plus d'autres troupes à envoyer ailleurs. Or on sait pertinemment que les Nations Unies ont demandé qu'on commence dès aujourd'hui à mettre en branle le processus pour la question du Darfour.
Je suis aussi très heureux qu'Haïti ait un nouveau président, mais sa situation demeure extrêmement fragile. Le Canada tient un rôle et a une responsabilité essentiels dans les Amériques. Nous avons aussi un rôle à y jouer. Si nous allons là, nous ne pouvons pas aller ailleurs et nous mettons tous nos oeufs dans le même panier. Il est tout à fait normal qu'en tant que parlementaires, qu'en tant qu'élus du peuple dans ce berceau de la démocratie, nous ne venions pas bafouer ce processus législatif. Nous aussi, nous voulons poser certaines questions.
Cela ne coûte pas plus cher de s'accorder du temps quand on sait pertinemment que l'échéance est en février 2007 et que, de toute façon, même si nous disons non, la mission se continuera jusqu'en février 2008.
Je trouve cela extrêmement inquiétant. On peut bien citer des chiffres. Nous allons octroyer 310 millions de dollars supplémentaires à l'aide humanitaire, mais selon quels critères, selon quel plan d'attaque? Vous savez pertinemment que plus cela va chauffer, plus cela va prendre des effectifs. Cela signifie que cela va coûter davantage en ressources et en vies humaines. C'est important de le dire également. Est-ce irresponsable de poser ce genre de question? Cela ne se situe pas seulement sur le plan technique, cela se situe aussi sur le plan de la stratégie.
Churchill a déjà dit qu'on gagnait des batailles avec des tactiques. Or nous voulons gagner la guerre, et pour gagner la guerre, il nous faut une stratégie. Cela signifie qu'il faut être inclusif.
Tous et toutes, ici, sommes Canadiens et fiers de l'être. Nous sommes fiers de nos troupes et fiers de cette mission. Mais qu'on ne nous demande pas un chèque en blanc aujourd'hui, pas après un préavis si bref et un débat de six heures. Cela est totalement inacceptable. Nous avons été élus pour prendre nos responsabilités et pour jouer pleinement notre rôle.
[Traduction]
Je ne pense pas que demander un peu plus de temps soit trop demander. Une chose est sûre, c'est que la pression est intense. J'appuie sans réserve la mission et nos troupes. Je rends hommage aux hommes et aux femmes qui représentent si bien notre grand pays. Il est important de le mentionner. Cependant, je crois qu'avant de décider de prolonger la mission de deux ans, il faut respecter certains critères.
La seule chose que le gouvernement nous demande, c'est un chèque en blanc. Le premier ministre fait de la petite politique. Son attitude à la Chambre aujourd'hui l'a démontré. Il a déclaré qu'il importait peu que la Chambre rejette la motion. Ce que nous pensons n'a aucune importance pour lui. Le gouvernement renouvellerait automatiquement notre engagement pour un an, puis le premier ministre se présenterait devant les électeurs. Il est tout à fait honteux de faire de telles déclarations.
[Français]
Moi, je suis fier d'être le neveu de Charles Arbour, que je salue aujourd'hui. Il a été sergent dans la police militaire. Il a vécu la libération de la Hollande et celle de la Belgique. Il nous a permis de vivre dans cette démocratie et de connaître cette liberté. Toutefois, il sait aussi pertinemment que, quand on doit poser des gestes aussi importants, il faut bien se préparer. Il faut évidemment établir des paramètres et des balises.
On nous dit qu'on n'a pas nécessairement l'équipement nécessaire. Peut-on savoir comment nous les obtiendrons? Je suis très fier que nous soyons en Afghanistan, mais on nous dit qu'au cours des quatre dernières années, cela a déjà coûté 4,1 milliards de dollars. Je veux bien investir, je veux bien que l'on dise que le Canada accompagnera et travaillera en ce sens, mais c'est aussi normal de demander si nous avons les outils nécessaires pour réussir.
[Traduction]
Nous sommes devant une question universelle. Nous sommes là-bas pour accompagner et soutenir le peuple afghan. Pour l'amour de Dieu, j'espère que l'on arrêtera une fois pour toute de faire de la politicaillerie sur le dos de nos militaires et que nous ferons notre travail. Travaillons tous ensemble. Donnons-nous plus de temps. Nous serons là pour aider les Afghans.
:
Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi de participer à ce débat qui incite chacun d'entre nous à examiner les responsabilités que nous avons en tant que parlementaires. Je dirai que nous avons deux responsabilités de base: veiller à l'établissement et au maintien des conditions qui facilitent le bien-être de nos concitoyens au Canada et à l'étranger, et veiller à ce que les fonds du Trésor soient utilisés de façon prudente.
En tant que députée de la loyale opposition, j'ai une troisième responsabilité. En vertu des règles du Parlement, il m'incombe de demander des comptes au gouvernement en lui posant des questions et de lui adresser des critiques lorsque cela est approprié.
Ce soir, le gouvernement conservateur minoritaire nous demande d'appuyer une prolongation de deux ans de notre mission en Afghanistan, deux ans à compter de février 2007, ce qui nous mène à février 2009, soit dans 33 mois.
En quoi cette demande de prolongation touche-t-elle mes trois responsabilités de base? D'abord pour ce qui est du bien-être de nos concitoyens à l'étranger, je dois penser aux membres de nos forces armées et aux Canadiens qui travaillent en Afghanistan dans le milieu diplomatique, dans le développement communautaire et dans le service humanitaire auprès du peuple afghan.
Je dois aussi penser aux Canadiens qui sont ici, notamment aux familles de nos soldats, aux travailleurs de l'aide humanitaire et aux généreux Canadiens qui réunissent des fonds pour la reconstruction de l'Afghanistan. Par exemple, depuis 1998 le chapitre local de la Coalition nationale à l'appui des femmes afghanes a envoyé 280 000 $ directement à des écoles en Afghanistan.
Je dis clairement que j'ai appuyé la mission qui a commencé il y a trois mois seulement. J'appuie les trois composantes de cette mission, soit la défense, le développement et la diplomatie, mais je veux voir comment elles s'imbriquent de manière à améliorer vraiment la vie du peuple afghan.
Comme je l'ai dit lors du débat exploratoire que nous avons tenu il y a un mois, nous devons surveiller les activités que nous menons en Afghanistan, surveiller les résultats, prévus et imprévus, évaluer la situation à mesure qu'elle évolue et prendre les décisions qui s'imposent alors. Je me demande donc si les trois premiers mois de ce nouveau type d'opération nous fournissent suffisamment de données pour décider de notre plan d'action pour les 33 mois à venir?
Nous souscrivons tous aux buts visés. Ces buts sont louables, mais nos activités nous permettront-elles de les atteindre? Selon moi, il est trop tôt pour le dire. C'est pour cela que j'ai présenté à la Chambre, hier, un amendement à la motion du gouvernement.
Mon amendement proposait de renvoyer la question à un comité spécial mixte de la défense et des affaires étrangères. Il demandait que ce comité tienne des audiences publiques pour connaître l'opinion d'experts et de gens ordinaires, et qu'il fasse ensuite rapport au Parlement d'ici le 15 octobre. À ce moment-là, le gouvernement aurait eu neuf mois d'observations dans le cadre de la mission et des rapports qui nous auraient donné suffisamment de renseignements pour prendre une décision et élaborer un plan pour l'avenir.
Comme le député qui m'a précédée l'a déclaré, il a fallu aux Néerlandais dix mois pour discuter de leur rôle en Afghanistan. Ils se sont entendus sur un engagement de deux ans après dix mois de débat. On nous demande de prolonger notre engagement pour le porter à trois ans, après six heures de débat. Il y a quelque chose d'inapproprié dans cette demande du gouvernement.
Je sais pertinemment que cette mission est une question de vie ou de mort pour certains de nos soldats. Elle a une incidence sur la viabilité de certaines familles canadiennes qui pourraient perdre un mari, une épouse, un fils ou une fille. Elle représente l'espoir pour l'avenir des Afghans. C'est très important, et nous sommes les gens responsables.
Je me demande donc surtout ce qui presse tant. Le Parlement est-il responsable de notre politique étrangère et de défense ou est-ce l'OTAN ou l'opération Enduring Freedom qui nous la dicte? J'entends toujours dire qu'on nous demande de faire ceci ou cela, mais je pense que les Canadiens sont des gens prudents qui voudraient prendre leur temps et veiller à ce que les mesures prises soient viables et abordables et à ce qu'elles aient une chance de réussir.
Puisqu'on parle de choses abordables, en ce qui concerne l'utilisation prudente des ressources financières, nous savons que nous avons déjà dépensé plus de 4 milliards de dollars en Afghanistan dans le cadre de nos diverses missions. Durant la même période, nous n'avons consacré que 214 millions de dollars aux opérations des Nations Unies. Nous savons qu'il y a 2 300 militaires canadiens en Afghanistan et seulement 59 dans d'autres pays dans le cadre de missions des Nations Unies.
Est-ce l'équilibre que les Canadiens souhaitent? Nous l'ignorons. Combien 33 mois supplémentaires vont-ils nous coûter? Si le mandat change et si le contingent canadien n'est plus de 2 300 militaires, mais de 5 300 après la grande campagne de recrutement lancée par le gouvernement, cela va au moins doubler le coût. Nous ne connaissons pas les plans du gouvernement. Nous savons que les plans exposés dans le budget parlent de 23 000 militaires de plus et nous savons que le budget renferme d'énormes crédits à cette fin, mais ce que nous ignorons, c'est le lien entre l'embauche de tous ces militaires et la mission en Afghanistan.
Chose certaine, je ne suis pas contre le fait qu'on dépense de l'argent en Afghanistan. Les gens là-bas ont des besoins et les Canadiens sont généreux, mais je me demande si les Canadiens approuvent ces grandes dépenses. Après tout, comme le gouvernement ne cesse de nous le rappeler, c'est leur argent.
Il ne faut pas oublier ma responsabilité en tant que députée de l'opposition officielle. Aux dernières élections, les Canadiens ont choisi de donner aux conservateurs la possibilité de gouverner, mais en tant que gouvernement largement minoritaire. Ils ont élu une opposition forte afin de contenir les nouveaux dirigeants. Si je vote en faveur de cette motion, j'approuverais toutes les formes que le gouvernement voudra donner à cette mission car si je pose ensuite des questions, il me répondra que j'ai donné mon appui.
Les Canadiens ont toujours raison et ils s'attendent à ce que je demande des comptes au nouveau gouvernement. Je ne peux donc renoncer à mon droit de contester et de surveiller la façon dont il mènera une importante mission militaire à l'étranger.
Le premier ministre semble heureux de ce qu'il a accompli durant ses 100 premiers jours au pouvoir, et la population canadienne respecte son premier ministre et ses réalisations, mais elle sait aussi qu'il n'a derrière lui guère plus que 100 jours dans ses fonctions actuelles et qu'il n'a jamais été ministre.
J'admet que ses responsabilités sont très lourdes, mais je crois qu'il pourrait bénéficier de l'expérience plus vaste que certains députés de ce côté-ci de la Chambre ont du pouvoir, de la vie et des affaires géopolitiques mondiales. C'est pourquoi je souhaite que l'on puisse continuer de poser des questions à l'autre côté durant les prochains mois.
Pour toutes ces raisons et du fait qu'on se hâte trop et que les Canadiens n'aiment pas les décisions trop rapides, et du fait aussi que je ne suis pas certaine qu'on m'ait fourni toute l'information, soyez sûrs que je ne donnerai pas mon appui à la présente motion.
:
Monsieur le Président, pour commencer, j'aimerais offrir mes condoléances à la famille du capitaine Nichola Goddard. Nos pensées les accompagnent ce soir.
[Français]
Aujourd'hui, le Canada doit prendre une lourde décision: ou bien nous continuons nos efforts militaires, diplomatiques, policiers et de développement en Afghanistan pour deux autres années, ou bien nous les laissons se terminer en février 2007.
Le mois dernier, j'ai expliqué à cette Chambre les raisons pour lesquelles les Forces canadiennes sont présentes en Afghanistan. Six semaines plus tard, les motifs derrière cette mission n'ont pas changé. En fait, les motifs derrière notre mission en Afghanistan n'ont pas changé depuis que le précédent gouvernement a décidé de déployer les Forces canadiennes dans ce pays il y a quatre ans.
Aujourd'hui, je dis que notre travail en Afghanistan — travail que nous avons accompli avec succès jusqu'à maintenant — n'est pas terminé. La bonne décision à prendre est donc évidente.
[Traduction]
En fin de compte, la mission en Afghanistan est conforme à un objectif qui a toujours guidé la politique étrangère et la politique de défense du Canada, à savoir la protection de l'intérêt national. Nous devons nous engager à terminer notre mission. L'intérêt national est facile à résumer: nous devons garantir la sécurité et la prospérité de la population canadienne. Le gouvernement actuel résume cet impératif en deux mots: le Canada d'abord.
La première stratégie de défense du Canada vise à protéger les Canadiens des menaces présentes au pays, le long de nos côtes et à l'étranger. Actuellement, cela signifie que nous devons être en Afghanistan, autrefois un État défaillant qui abritait des terroristes qui ont attaqué nos plus proches amis et alliés, qui ont tué des Canadiens et qui menacent encore le Canada. Ces terroristes cherchent actuellement à miner l'autorité du gouvernement démocratiquement élu d'Afghanistan.
En 2002, le Canada a décidé de donner un coup de main pour veiller à ce que l'Afghanistan n'abrite plus de tels extrémistes. Nous ne sommes pas seuls en Afghanistan. Nous faisons partie d'un groupe déterminé de plus de 30 pays. La mission est prioritaire pour nos alliés de l'OTAN, du G8 et des Nations Unies. Pour agir en véritable allié et en membre responsable de la communauté internationale, le Canada doit continuer à participer à cette mission.
[Français]
Nous sommes aussi en Afghanistan à la demande des Afghans eux-mêmes. Nous avons répondu à leur appel parce que le Canada a une longue tradition en matière d'assistance aux peuples dans le besoin.
L'Afghanistan était un État en faillite et demeure un des pays les plus pauvres du monde. En travaillant au retour de la sécurité et de la stabilité en Afghanistan, les Forces canadiennes créent un environnement sécuritaire qui favorise la reconstruction. Je vous assure que les Afghans ne doutent pas des raisons derrière notre présence dans leur pays ou des impacts positifs que nous avons sur leurs vies.
[Traduction]
Parce que notre intérêt national est en jeu, parce que nos alliés ont besoin de notre aide et parce que les Afghans eux-mêmes réclament notre présence, plus de 7 000 soldats canadiens ont été déployés en Afghanistan depuis 2002. En tout, environ 16 000 soldats canadiens ont participé à la campagne internationale contre le terrorisme depuis le 11 septembre 2001.
Aujourd'hui, nous avons plus de 2 000 soldats en Afghanistan. Le 1er bataillon de la Princess Patricia's Canadian Light Infantry est en train d'aider les forces afghanes de sécurité à améliorer la sécurité dans la province de Kandahar. L'équipe provinciale de reconstruction stationnée à Kandahar est composée non seulement de membres des Forces canadiennes, mais également de spécialistes de l'ACDI, du ministère des Affaires étrangères et de la GRC. Ensemble, ils forment une équipe multidimensionnelle et intégrée qui s'efforce de stabiliser la situation dans la province de Kandahar ainsi d'y faciliter et d'y encourager les efforts de développement.
Notre équipe de conseillers stratégiques à Kaboul conseille le gouvernement du président Karzaï. Des membres des Forces canadiennes travaillent au centre de formation militaire de Kaboul, à l'hôpital de la coalition à l'aéroport de Kandahar ainsi qu'au quartier général de la Force internationale d'assistance à la sécurité. Nous sommes à la tête de la brigade multinationale qui relève du commandement régional du Sud, en attendant que l'OTAN prenne les rênes comme prévu cet été. Nos troupes en Afghanistan sont parmi les plus performantes au monde.
[Français]
Elles ont performé sous le feu ennemi. Elles ont capturé des insurgés talibans. Elles ont établi des liens solides avec des chefs locaux. Elles ont répondu aux besoins humanitaires urgents de la population locale. Elles ont participé aux efforts visant à diversifier l'économie afghane et à combattre la menace globale que posent les stupéfiants originaires de ce pays.
[Traduction]
En bref, le Canada dispose de troupes qui possèdent les compétences, la formation et l'équipement nécessaires pour répondre aux exigences de la mission en Afghanistan et pour faire face aux risques qu'elle comporte.
Soyez assuré que le gouvernement veillera à ce que nos troupes disposent de l'équipement approprié pour remplir leur mandat avec succès. Le ministère de la Défense nationale mène actuellement une étude pour établir dans quelle mesure on répond aux besoins des soldats canadiens pour la mission en Afghanistan et pour savoir ce qu'il est possible de faire pour mieux les appuyer.
En outre, le ministère de la Défense nationale a acheté pour 234 millions de dollars de nouvel équipement spécialement pour cette mission, notamment des véhicules de patrouille Nyala fortement blindés, que nos forces ont récemment reçus. Comme nous l'avons vu, lundi dernier, deux soldats canadiens ont eu la vie sauve lorsque l'un de ces véhicules a été frappé par une bombe placée en bordure de la route.
Nos troupes disposent également de règles d'engagement solides qui leur permettent de mener efficacement les opérations. En outre, elles relèvent d'un commandement fort et d'une structure de contrôle reposant sur une nouvelle génération de chefs formés dans le cadre d'opérations réelles et pertinentes.
Par surcroît, leur mission repose sur une solide assise juridique. Au lendemain des événements du 11 septembre 2001, le Canada a pris des mesures conformes aux dispositions de l'article 51 de la Charte des Nations Unies, qui maintient les droits de légitime défense, individuelle ou collective. Le Conseil de sécurité des Nations Unies a reconnu ce droit en adoptant la résolution 1368, le 12 septembre 2001. La mission actuelle du Canada en Afghanistan est fondée sur notre droit de légitime défense.
De plus, la Force internationale d'assistance à la sécurité dirigée par l'OTAN, qui doit être élargie cet été, tient son mandat des Nations Unies, en vertu de la résolution 1623 du Conseil de sécurité. Qui plus est, le gouvernement du Canada agit avec le consentement du gouvernement de l'Afghanistan.
[Français]
Nous savons tous que l'engagement du Canada est coûteux, un coût qui se mesure non seulement en dollars, mais aussi en vies humaines. Depuis le début de notre mission, nous avons perdu 17 braves Canadiens. D'autres ont aussi subi de graves blessures. Nous devons toutefois persévérer.
[Traduction]
Grâce aux efforts déployés par les Forces canadiennes, de véritables progrès ont été réalisés en Afghanistan. Lorsque la Force internationale d'assistance à la sécurité, dirigée par les Nations Unies, aura été élargie cet été, elle sera présente dans les trois quarts du pays. Elle devrait encore prendre de l'expansion peu de temps après.
Nous entrons dans des territoires où Al-Qaïda et les talibans étaient incontestés auparavant. Nous limitons leurs mouvements, nous minons leur appui local et nous les affrontons face à face. Nos formateurs canadiens travaillent au centre d'entraînement militaire de Kaboul et forment, aux deux semaines, jusqu'à 800 recrues afghanes.
Pas plus tard que la semaine dernière, des soldats canadiens ont capturé 10 combattants ou sympathisants talibans qui se cachaient près de la base d'opérations avancée de Gombad. Il s'agit, à ce jour, de la plus importante capture de présumés insurgés par les soldats canadiens.
Les détenus ont été remis aux autorités afghanes, conformément à l'entente que nous avons conclue à cet égard. Cette entente appuie le principe selon lequel il incombe aux autorités afghanes de s'occuper des détenus capturés sur leur territoire et aide à renforcer la capacité locale ainsi que la bonne gouvernance.
Notre équipe consultative stratégique, un groupe très influent composé de quinze personnes, collabore actuellement avec les leaders afghans à Kaboul pour établir les nouvelles institutions de l'État afghan. Cette équipe a été formée à la demande expresse du président Karzaï. Les militaires et les civils qui en font partie travaillent avec le principal conseiller économique du président dans le but de dresser la stratégie de développement national de l'Afghanistan. Ils aident la commission de la fonction publique à mettre en place une fonction publique légitime et responsable et ils sont disponibles pour appuyer le chef de cabinet du président Karzaï.
L'Équipe médicale mobile des Forces canadiennes, qui fait partie de notre équipe provinciale de reconstruction, ainsi que des membres de notre groupement tactique, visitent régulièrement les villages et offrent des services médicaux à la population qui souffre.
Ce sont là les efforts concrets des Forces canadiennes et leurs véritables réalisations effectuées en partenariat avec des représentants des Affaires étrangères, de l'ACDI et de la GRC.
[Français]
Nous avons des points de référence concrets pour évaluer le progrès et le succès de cette mission. Le Pacte pour l'Afghanistan, tout comme la stratégie du Canada pour ce pays, énumèrent les points de référence à moyen terme ainsi que les objectifs finaux que nous devons viser.
Le pacte qui a été signé à Londres plus tôt cette année, décrit la manière qui permettra au gouvernement de l'Afghanistan, aux Nations Unies, à la communauté internationale et au Canada d'accomplir les objectifs désirés au cours des cinq prochaines années. Nous avons beaucoup de travail devant nous, mais nous avons des balises claires et précises.
[Traduction]
En fin de compte, le succès en Afghanistan dépend de la stabilisation du pays et du gouvernement, de la défaite des terroristes et de leurs réseaux d'appui locaux et de l'assurance que les terroristes ne trouveront plus asile en Afghanistan. Il faut également que les forces de sécurité afghanes soient bien établies, sous la direction ferme et légitime du gouvernement de l'Afghanistan, et que ces forces puissent protéger la population et le pays.
L'atteinte de ces objectif suppose un engagement soutenu, à long terme, de la part de la communauté internationale et dépend de la participation future du Canada.
C'est pourquoi, parallèlement aux efforts de diplomatie et de développement, le gouvernement croit fermement que le mandat des contingents de Forces canadiennes, y compris ses forces opérationnelles, ses forces d'intervention et son équipe de reconstruction provinciale, doit être reconduit pour deux ans, soit de février 2007 à février 2009. Cette contribution est le minimum requis pour atteindre les objectifs de notre mission et pour faire preuve de leadership auprès de nos alliés.
Le Canada devrait également prévoir reprendre le commandement de la brigade multinationale de Kandahar en novembre 2007 pour six mois et demeurer ouvert aux autres possibilités de commandement qui pourraient se présenter.
[Français]
Un engagement de douze ans donnera aux forces de sécurité afghanes le temps supplémentaire dont elles ont besoin pour devenir vraiment efficaces.
Un engagement de deux ans permettra une transition politique fluide en 2009, lorsque le mandat actuel du président Karzaï se terminera.
Un engagement de deux ans est ce à quoi nos alliés s'attendent — et dont ils ont besoin — de notre part. Par exemple, les contributions prévues du Royaume-Uni et des Pays-Bas — qui se sont engagés à fournir des troupes pour les trois et les deux prochaines années respectivement — dépendent de la participation canadienne à cette mission. Si nous laissons notre mandat expirer au mois de février, nous risquons de compromettre l'appui de nos alliés pour la mission, voire la mission elle-même.
[Traduction]
Cet engagement de deux années supplémentaires est également conforme au calendrier prévu en vertu du Pacte pour l'Afghanistan. Cette prolongation va certes drainer d'importantes ressources militaires, mais les Forces canadiennes conserveront une certaine souplesse qui leur permettra de réagir en cas de priorités ou de crises imprévues. Cette question a été soulevée par le chef de l'opposition.
À son niveau actuel, nous pouvons maintenir indéfiniment notre engagement en Afghanistan. Nous disposerons en même temps d'une force opérationnelle navale prête à se déployer n'importe où dans le monde en cas de crise. Nous resterons également en mesure de déployer une force terrestre modeste prêtre à réagir à d'autres crises éventuelles, au Darfour ou en Haïti par exemple. Dans ces deux cas, nous croyons que nous pouvons répondre à toute exigence qui pourrait être définie par les Nations Unies ou d'autres forces.
À long terme, le gouvernement s'est engagé à accroître l'effectif des Forces canadiennes pour renforcer les capacités du Canada en tant que chef de file dans les affaires mondiales.
À court terme, cependant, l'accroissement de nos effectifs, restreindra notre capacité d'entreprendre une autre opération de grande envergure. Nous continuerons à jouer un rôle de soutien dans le cadre d'autres opérations ou crises.
[Français]
Les Forces canadiennes en Afghanistan défendent les intérêts nationaux du Canada.
Elles travaillent avec nos alliés et elles aident le peuple afghan, mais leur mission n'est pas encore terminée. Avec certains de nos alliés, nous avons développé un plan qui décrit ce qui nous reste à faire pour réaliser nos objectifs.
En tant que membre responsable de la communauté internationale, en tant qu'un des pays les plus prospères du monde, et puisque notre intérêt national est en jeu, le Canada se doit d'étendre et de prolonger notre engagement envers cette mission multinationale.
[Traduction]
Comme le disait Edmund Burke, « Tout ce qui est essentiel pour le triomphe du mal, c'est que les hommes de bonne volonté ne fassent rien ». L'Afghanistan a demandé notre aide et celle de la communauté internationale pour éliminer la menace que représentent Al-Qaïda et les talibans. Ces réseaux terroristes n'arrivent pas à prendre le dessus en Afghanistan parce que les Canadiens sont trop conscients des effets de la complaisance.
Grâce au bon travail des Canadiens, les institutions afghanes renaissent de leurs cendres. La liberté revient, après une longue éclipse. Les femmes ont maintenant un enjeu et une voix dans le pays. Le savoir est en effervescence dans un nombre incalculable d'écoles.
C'est simple. Les talibans et Al-Qaïda sont en train de perdre la bataille parce que de braves Canadiens veillent sur la ligne de front.
Nous devons cependant consolider nos réalisations. Il faut que la mission puisse continuer sa tâche, dans l'intérêt de la population afghane, de nos alliés et de tous les Canadiens. En fait, les Forces canadiennes ont pour première mission de défendre l'intérêt national et elles méritent par conséquent notre appui soutenu.
Par conséquent, je demande à tous les députés d'appuyer la motion qui prolonge l'engagement du Canada en Afghanistan jusqu'en février 2009.
:
Monsieur le Président, je veux d'abord rendre hommage et offrir mes sincères condoléances à la famille de la capitaine Nichola Goddard, morte au cours d'une importante opération militaire dans la région de Panjwai, à une vingtaine de kilomètres à l'ouest de Kandahar.
Le rappel de cet événement malheureux, qui s'est produit à l'ouest de la région de Kandahar, me permet de plonger directement au coeur du sujet, soit les soldats canadiens, hommes et femmes, qui sont dans la région de Kandahar depuis un moment, et dont on souhaite la présence pour au moins deux ans. Lorsque le ministre de la Défense a dit 12 ans au lieu de deux, il faisait peut-être des révélations qu'il n'avait pas pensé faire.
Il est important de savoir que la région de Kandahar est une assez grande région où vivent environ 1 million de personnes, et où seule une petite partie de la ville est sous la gouverne de l'État afghan. Je le souligne parce que les 13 districts de la province de Kandahar et de la ville de Kandahar sont plutôt sous la protection négociée par les divers conseils municipaux — ou les Choura —, donc sous la protection des talibans.
J'ai passé en revue la littérature qui nous renseigne sur l'état récent des choses, des études de mars et d'avril 2006. Ce que j'y vois, c'est que depuis 2005, la situation s'est rapidement détériorée et que les talibans, qui s'étaient plus ou moins fondus dans la population après que l'attaque de la coalition les ait chassés du pouvoir, reviennent peu à peu. Ils reprennent du poil de la bête, pour utiliser une expression malheureuse ou heureuse. Ils transforment ainsi la situation dans laquelle les soldats canadiens et les autres se battaient jusque là.
Parmi les études que j'ai vues, l'une était réalisée par le Council on Foreign Relations basé aux États-Unis. On y cite le président Bush venu féliciter le gouvernement afghan, citation que je lirai dans la langue de Shakespeare: « You are inspiring others and the inspiration will cause others to demand their freedom. »
Le principe de la démocratie serait-il donc contagieux? Pourtant, la veille même, les directeurs des services secrets afghans avaient rapporté que les actions des forces antigouvernementales augmentaient et présentaient une plus grande menace qu'à n'importe quel moment depuis la fin de 2001.
On y parlait aussi d'événements ou des révélations comme celles-ci:
Un mouvement d'insurgés toujours plus meurtriers avec refuges au Pakistan où sont les leaders d'Al-Qaida et des talibans.
Une administration corrompue et inefficace, sans ressources, et un Parlement facilement dysfonctionnel.
Des niveaux de pauvreté, de faim, de mauvaise santé, d'analphabétisme, d'inégalité entre les sexes qui mettent l'Afghanistan dans les derniers rangs des pays du monde.
Je communique quelques détails, inspirés cette fois du rapport publié par le PNUD avec l'ACDI. On y dit ce qui suit:
Malgré une reprise économique (on ne saurait parler de croissance dans ce cas) située, en 2003, entre 10 et 12 p. 100 du PIB — ne tenant pas compte des revenus générés par la drogue [parce qu'ils ne sont pas comptabilisés: ils s'envolent en fumée] — l'Afghanistan occupe le 173e rang sur les 178 pays figurant au classement de l'indicateur du développement humain 2004 du PNUD.
Avec un PIB par habitant frôlant les 200 $, une espérance de vie de 44,5 ans (20 ans de moins que dans les pays voisins et six de moins que la moyenne des pays les moins avancés) et un taux d'alphabétisation de 28,7 p. 100, l'Afghanistan se classe juste devant le Burundi, le Burkina Faso, le Niger et la Sierra Leone.
[...] ces indicateurs lugubres viennent réaffirmer que les conflits à long terme agissent comme les plus sûrs vecteurs du sous-développement chronique. Ils sont les conséquences indirectes du conflit et de la vacance des institutions en Afghanistan.
Ce rapport continue, et j'en cite un autre passage:
Le premier pas est de reconnaître [pour aider les Afghans] le vrai problème de « sécurité » auquel sont confrontés les Afghans. Le 19 octobre, à la veille des élections en Afghanistan, Zalmay Khalilzad, l'ambassadeur américain à Kaboul, a exposé les défis à venir pour le gouvernement nouvellement élu: élimination de la menace des talibans, démantèlement des dernières milices afghanes armées et lutte contre le trafic de stupéfiants.
Ce pourrait être ce qu'on voit ce soir, ou qu'on entend, à titre d'objectifs. Or le rapport conclut ainsi:
Nous ne nions pas les défis sécuritaires. Mais les priorités du gouvernement afghan devraient être l'emploi, la lutte contre la pauvreté écrasante et les niveaux de vie accablants ainsi que l'éradication des inégalités, de sorte que tous les Afghans puissent participer au processus de constitution des capacités de leur État. Lorsque la population est plus menacée par la pauvreté que par le terrorisme, les solutions ne devraient pas être recherchées uniquement du côté des militaires. Les intérêts sécuritaires des autres nations ne sont pas toujours dans l'intérêt propre des Afghans.
Ce constat a été récemment vérifié lorsque le gouvernement américain a envisagé d'éradiquer la drogue en Afghanistan par la pulvérisation aérienne des récoltes.
Or cette action a provoqué une révolte parce qu'il n'y a presque pas d'autres sources de revenus. De plus, la façon de procéder n'a pas toujours été délicate, de sorte qu'on pourra dire que désormais l'éradication de la drogue en Afghanistan, que nous favorisons, a fait en sorte de séparer des populations les soldats qui voudraient la concrétiser.
De leur côté, les talibans jouent là-dessus.
La citation suivante est intéressante car ce sont deux professeurs qui ont rédigé cette étude. Ils disent:
De même, le déploiement des troupes de l'OTAN hors de Kaboul peut être considéré comme une solution à court terme à la violence qui menace les troupes de la coalition. Mais ce n'est pas une réponse adéquate aux problèmes de sécurité des Afghans eux-mêmes. En définitive, c'est à l'État afghan que devrait revenir la prérogative de reprendre en main la sécurité du territoire.
Pourquoi ai-je souligné cela? C'est parce qu'il me semble qu'il faut inscrire ce projet de mission dans la recherche de l'aide aux Afghans et non pas seulement dans la solution du problème de sécurité qui pourrait, autrement, être ressenti ici.
Or, l'Afghanistan a reçu peu d'aide internationale. Il a une économie et une administration fortement influencées par les trafiquants de drogues. Je vais continuer ma liste: des stocks d'armes considérables malgré la démobilisation de plusieurs milices, le refus potentiel de la légitimité islamique du gouvernement afghan par un clergé qui se sent marginalisé, des tensions ethniques et autres. J'arrête là. Il y en avait une longue liste. Pourquoi cette longue énumération? Parce qu'on ne peut pas concevoir cette mission en Afghanistan seulement dans la perspective de l'intérêt de ce pays. Si on parle de solidarité internationale, il faut aussi considérer quel est l'intérêt des Afghans.
Vous savez, je suis professeur d'histoire et il ne faut pas que je me laisse aller. Je voudrais donc rappeler très brièvement que, depuis toujours, les Afghans ont eu une vie extrêmement misérable et troublée. Ils ont subi plusieurs violences. Ils ont eu des chefs qui, tour à tour, les ont aidés à se développer. Ils ont eu une période de développement de la démocratie, de libéralisation des lois pour les femmes, de la libéralisation des moeurs, mais ensuite, ils ont subi des révolutions nombreuses. Je ne parlerai pas longuement de l'épisode de l'invasion russe. Je veux toutefois souligner que cette invasion russe, à laquelle ont mis fin les moudjahidine, l'Arabie Saoudite aidée par les États-Unis, est à la source de ce que sont devenus ensuite les talibans. Je rappelle cela parce que, dans plusieurs discours, nous avons l'air de dire que faire la chasse aux talibans, les réprimer, les éliminer du décor sera quelque chose de facile.
Je voudrais souligner que ces talibans, cette mouvance de jeunes religieux — ils ne doivent plus être tous jeunes —, ce sont des Pashtouns. J'arrive à l'argument le plus important pour nos missions. Ces Pashtouns sont très majoritairement présents dans une région comme Kandahar. Comme je l'ai dit tout à l'heure, ils recommencent à être présents dans les différentes petites municipalités et ils offrent la sécurité.
Donc, quand les soldats canadiens — les soldats américains, il n'en reste plus —, britanniques qui s'en viennent et français vont rencontrer des femmes et des hommes, ceux-ci vont toujours avoir en tête que s'ils posent des gestes de proximité, de rapprochement, les talibans peuvent s'attaquer à eux.
Je veux souligner que pour venir à bout d'éradiquer l'opium ou seulement pour que les soldats puissent évoluer en Afghanistan comme des poissons dans l'eau, ceux-ci doivent bénéficier de la collaboration et de l'appui de la population. Or je viens de décrire une situation où ce sera infiniment difficile pour eux.
J'aimerais que cela fasse partie du questionnement. Cette mission sera-t-elle préparée et équipée pour savoir comment elle peut aider le peuple afghan et, ce faisant, comment elle peut être acceptée? C'est une des questions les plus importantes, ce qui m'amène à parler de la motion.
Je dois dire qu'à la lecture de cette motion, comme la moitié des députés de la Chambre, j'étais en colère. C'est surtout l'attendu no 3 qui m'a causé un problème sérieux. Il se lit comme suit:
3) attendu que ces efforts internationaux diminuent la pauvreté, consolident les droits de la personne et l'égalité des sexes, renforcent la société civile et permettent de bâtir un État démocratique libre, sécuritaire et autonome pour les hommes, les femmes et les enfants afghans;
Je trouvais ce paragraphe pour le moins abusif. Si au moins on y lisait « attendu que ces efforts internationaux visent à ».
Depuis quelques années, la communauté internationale déploie des efforts pour aider les États qu'on dit faillis. Ce faisant, on essaie d'élaborer des modèles d'exportation de la démocratie dans des pays où elle n'a jamais existé ou encore où elle n'a existé qu'à l'état minimal. Or il est extrêmement dangereux de se transformer en nouveau colonisateur moderne de la démocratie et du développement si l'on ne se réfère pas à la population de base en matière d'aide internationale ou d'intervention militaire.
Comment les soldats, hommes et femmes, sont-ils préparés à intervenir dans un pays précis, dans une région précise, autrement qu'en donnant un coup de pied dans une porte, leur fusil en joue? Il nous semble extrêmement important de mettre cette question sur la table et de pouvoir y répondre.
Kandahar est une région où les talibans sont revenus et où l'État n'est pas installé. Comment penser que les soldats canadiens et québécois — il semble que la prochaine fournée sera du Québec — pourront remplir la mission qu'on leur confie? Quand on demande quels sont les objectifs des missions, on répond qu'on sait ce que font les soldats. Mais quels sont véritablement les objectifs des missions? De notre côté, les envoie-t-on vers une mission impossible?
Je voudrais dire autre chose que ce que j'ai lu récemment. Je ne veux pas sous-estimer les progrès qui ont été réalisés en Afghanistan notamment dans le domaine de l'éducation, mais aussi en santé, secteur qui a connu une certaine amélioration.
Pour le reste, la situation telle que décrite est encore dramatique, et la sécurité est infiniment fragile.
Comme il me reste encore une minute, je nous invite à réfléchir aussi à cette question soulevée dans l'excellent discours de Gilles Duceppe, alors qu'il soulignait que les soldats doivent être capables d'être en contact avec la population. Ils ont besoin de cette population pour remplir la mission qu'on leur confie.
:
Monsieur le Président, je vais partager le temps dont je dispose avec mon collègue le député de Macleod.
Ce soir, je joins ma voix à celle de tous les Canadiens pour exprimer ma tristesse à la suite du décès de la capitaine Goddard.
Le 10 avril dernier, j'ai pris la parole en cette Chambre pour présenter quelques-unes des réalisations du Canada en Afghanistan. Aujourd'hui je réaffirme ma conviction à l'égard de l'importance, de la pertinence et de l'efficacité de notre aide au peuple afghan.
Ce n'est pas le temps d'abandonner les Afghans. Bien au contraire: le Canada doit faire preuve de leadership et de compassion, et non d'indifférence.
[Traduction]
Le rôle du Canada en Afghanistan est conforme au soutien que nous fournissons partout dans le monde sur le plan de la liberté, de la démocratie, de la primauté du droit et des droits humains. Le gouvernement du Canada croit que notre pays doit continuer de jouer un rôle de véritable chef de file en Afghanistan.
Nous comptons parmi les 36 pays qui ont fait des progrès en Afghanistan sous l'égide des Nations Unies et de l'OTAN, mais jeter les bases du développement économique et démocratique prend du temps et requiert un engagement constant.
[Français]
Plus d'une vingtaine d'années de conflits, de violations graves des droits de la personne, de pauvreté généralisée et d'années successives de sécheresse ont conduit à la destruction de presque tous les secteurs de la société.
La reconstruction et le développement d'un pays dévasté comme l'Afghanistan est loin d'être une mince tâche. Il est important de souligner que le Canada contribue à rendre l'Afghanistan sécuritaire. Il s'agit là d'une condition préalable et essentielle à la reconstruction.
Grâce à notre approche intégrée associant les diplomates, les Forces canadiennes, les experts en développement et les agents de police civile, nous aidons le peuple afghan à stabiliser le pays, à renforcer la gouvernance et à réduire la pauvreté.
L'engagement du Canada comporte trois volets complémentaires: l'appui à la sécurité, la diplomatie et l'aide au développement.
Il y a à peine quelques années, sous le régime sévère des talibans, les femmes afghanes étaient réduites à la pauvreté. De plus, on leur a retiré le droit fondamental à la liberté de mouvement. Leur confinement a eu d'innombrables répercussions négatives: leur santé physique et morale s'est détériorée et leur espérance de vie a chuté; les femmes n'avaient pas le droit de travailler et elles ont dû abandonner leurs rôles d'enseignantes, de professionnelles de la santé et de commerçantes; le tissu social s'est désintégré.
Sous le régime taliban, les femmes n'avaient pas le droit de pratiquer la médecine et n'avaient pas même accès aux soins médicaux. De plus, les fillettes ne pouvaient pas aller à l'école, parce que toutes les écoles pour filles ont fermé leurs portes.
Or depuis la chute des talibans, plus de 4 millions d'enfants, dont le tiers sont des filles, ont repris le chemin de l'école.
Grâce au soutien financier du Canada, des centres pour femmes ont vu le jour partout en Afghanistan. Ces centres aident les femmes en leur fournissant des services de base comme des cours d'alphabétisation, des services de santé, des services d'aide juridique, un refuge, et parfois tout simplement un lieu d'échanges où elles se sentent en sécurité et épaulées.
L'ACDI soutient aussi des programmes d'aide alimentaire et de formation dont ont profité plus de 10 000 veuves et leur famille.
De tels progrès sont importants parce que, en dépit du contexte actuel plus ouvert, il existe encore de l'opposition en ce qui concerne les droits des femmes et leur accès au marché du travail.
À l'instar de nos 35 alliés, notre objectif est de faire en sorte que le gouvernement afghan puisse mettre en oeuvre ses politiques et assurer la viabilité de son développement.
Pour assurer l'atteinte de résultats durables en Afghanistan, le Canada travaille en accord avec les priorités énoncées par le gouvernement afghan dans sa stratégie nationale de développement. Le gouvernement afghan a d'ailleurs félicité le Canada d'avoir choisi cette approche, par laquelle les Afghans eux-mêmes prennent la barre de leur développement.
Les programmes de l'ACDI en Afghanistan visent à aider les Afghans à relever les défis auxquels ils font face. Le Canada a démontré sa capacité d'aider la population afghane que nous devons épauler.
Vivant dans un pays où la guerre a fait rage pendant de nombreuses années, les Afghans — les femmes et les enfants en particulier — ont souffert sous le joug d'un régime parmi les plus répressifs au monde. Malgré des avancées notables, le pays demeure parmi les plus pauvres du monde.
Le Canada, par l'intermédiaire de l'ACDI, contribue au développement et au mieux-être des Afghans, mais notre engagement produit des effets beaucoup plus larges et durables.
Grâce à son aide au développement, le Canada a pu faire des contributions clés à la sécurité, à la gouvernance et à l'ordre public, ainsi qu'au développement social et rural. Le programme d'aide du Canada en Afghanistan est livré de façon responsable. Je tiens à assurer cette Chambre qu'il s'agit là de l'une de mes priorités.
L'ACDI travaille à faire en sorte que l'administration de l'aide canadienne aux programmes nationaux afghans repose sur des mécanismes efficaces. L'ACDI suit de près le rendement des programmes prioritaires portant notamment sur le microfinancement et le développement rural. Nous sommes en mesure de tirer le meilleur parti des contributions canadiennes grâce à des contrôles financiers efficaces et des structures de responsabilisation adéquates.
[Traduction]
Le Canada doit continuer d'influer favorablement sur le développement de l'Afghanistan et de faire fond sur les progrès obtenus jusqu'à maintenant.
[Français]
Par exemple, avec un engagement accru, le Canada continuera d'être un chef de file en ce qui a trait au secteur de la microfinance et des services financiers, notamment pour les femmes afghanes en milieu rural.
Le Canada continuera son importante contribution aux secteurs de la sécurité, notamment en ce qui a trait au déminage et à la destruction des munitions, de la gouvernance et de la promotion des intérêts socioéconomiques des femmes, y compris l'éducation de base.
De plus, le Canada pourra continuer de jouer un rôle de premier plan en appuyant le processus démocratique en Afghanistan, notamment en ce qui concerne le développement des institutions, en renforçant par exemple la capacité des institutions parlementaires afghanes.
Le Canada continuera également d'être à l'affût de nouvelles occasions de collaborer avec des organisations non gouvernementales et d'autres partenaires canadiens en Afghanistan. Nous continuerons à enraciner des principes qui reflètent les valeurs canadiennes qui font notre fierté, notamment le respect des droits de la personne, l'égalité entre les sexes, la liberté de parole et la démocratie, ces mêmes principes envers lesquels le peuple afghan a démontré son engagement, tout particulièrement par l'élection d'un nouveau Parlement composé de plus de 25 p. 100 de femmes.
Je suis convaincue que nos efforts améliorent concrètement la vie des Afghans. Je suis également persuadée que le Canada doit s'engager à maintenir son appui aux populations afghanes qui, aujourd'hui encore, en ont tant besoin.
Ce n'est pas le temps de laisser tomber le peuple afghan, ni d'abandonner la communauté internationale, ni de rompre avec le gouvernement afghan et nos partenaires.
[Traduction]
Le temps est venu pour nous tous de venir en aide au peuple afghan, aux femmes et aux enfants afghans. Il est temps de redonner espoir au peuple afghan et de contribuer à l'édification d'un monde plus sûr pour nos enfants.
[Français]
Aujourd'hui, le peuple afghan a besoin du Canada. Le peuple afghan compte sur nous pour leur donner espoir.
:
Monsieur le Président, à l'instar de nombreux députés qui ont pris la parole avant moi, je voudrais exprimer mes sincères condoléances à la famille de Nichola Goddard. C'est avec tristesse que nous avons appris la nouvelle de son décès aujourd'hui, et nous offrons nos condoléances à sa famille, à ses amis et à ses camarades.
Je suis heureux de participer au débat de ce soir. J'estime qu'en prolongeant la mission du Canada en Afghanistan, qui s'articule sur les trois axes que sont la diplomatie, le développement et la sécurité, nous contribuerons à assurer un avenir sûr et prospère au peuple afghan.
La situation en Afghanistan est importante pour tous les Canadiens. Je me réjouis d'avoir l'occasion d'exprimer mon point de vue et de dire clairement quelle est ma position sur cette question capitale.
Avec l'aide du Canada et de la communauté internationale, l'Afghanistan est en train de renaître après des années de guerre et de destruction. Il embrasse la démocratie et s'emploie à faire profiter à toutes les régions des bienfaits du développement.
Depuis la chute des talibans, l'Afghanistan a fait des pas de géant vers sa reconstruction. Le Canada a soutenu les progrès de ce pays au moyen d'une approche globale comprenant l'aide au développement, le soutien diplomatique et le maintien de la sécurité. Toutefois, s'il a fait des progrès, le peuple afghan a toujours besoin de notre appui.
L'Afghanistan et nos 35 alliés dans ce pays espèrent que le Canada prolongera sa mission. Il y aura une nouvelle structure de commandement, un nouvel engagement diplomatique et un nouvel engagement en faveur du développement, c'est pourquoi il est important que le Parlement du Canada donne son approbation en adoptant la motion.
Les Hollandais et les Britanniques, deux autres pays qui jouent un rôle de premier plan en Afghanistan, ont déjà renouvelé leur engagement. Nos alliés au sein de l'OTAN ont maintenant besoin de savoir ce que le Canada est prêt à faire.
En prolongeant notre mission en Afghanistan, nous montrerons que nous continuons de jouer un rôle de leadership. Nous donnerons à l'OTAN et au gouvernement afghan le signal qu'ils peuvent compter sur nous au moment où ils commencent à planifier la prochaine étape du programme visant à apporter la paix et la stabilité en Afghanistan afin que le peuple afghan puisse prospérer.
Les Canadiens et le peuple afghan peuvent être très fiers de ce qu'ils ont fait ensemble jusqu'à maintenant, mais nous devons continuer de travailler ensemble pour renforcer les acquis.
Le 9 mars, la ministre de la Coopération internationale a annoncé que l'ACDI maintiendrait son engagement financier en Afghanistan à 100 millions de dollars en 2006-2007. Cela amène le contribution totale du Canada à 656 millions de dollars depuis 2001. Grâce aux fonds de l'ACDI, l'Afghanistan a connu bien des changements.
Je voudrais en mentionner quelques-uns ainsi que quelques succès remportés dans ce pays. Il est crucial que les Canadiens, de même que mes collègues à la Chambre des communes comprennent l'importance de leur contribution et du travail qui a été fait.
L'Afghanistan a franchi une étape très importante en adoptant une nouvelle constitution. Ce pays a également tenu des élections présidentielles et parlementaires. Le programme de solidarité nationale a permis d'aider plus de la moitié des villages afghans et de donner à environ 150 000 familles un accès à des fonds pour payer des services de base comme des cliniques médicales, des routes et des puits. Plus de 4,5 millions d'enfants sont inscrits dans des écoles officielles. Plus de 150 000 Afghans, dont une forte majorité de femmes, ont accès au crédit et à des services financiers.
En tant qu'agriculteur, je suis personnellement heureux avec le travail que nous faisons pour aider les collectivités agricoles de l'Afghanistan. Nous reconnaissons qu'il y a beaucoup à faire pour que les agriculteurs produisent suffisamment pour vendre en gros et distribuer leurs produits. Pour cette raison, nos efforts incluent du financement et de l'infrastructure rurale comme des routes et des systèmes d'irrigation.
Les programmes nationaux offrent aussi aux agriculteurs une aide qui leur permet d'acheter des semences et des engrais. En les encourageant à se concentrer sur la culture des fruits, des noix, des légumes et des céréales, ils peuvent nourrir leurs familles.
Je pense que, avec notre aide, les agriculteurs de là-bas pourraient contribuer de manière appréciable au rétablissement de la stabilité en Afghanistan.
Ce n'est pas le moment d'abandonner la population afghane. Bien au contraire. Nous devons faire preuve de leadership et de compassion, pas d'indifférence. Nous devons aussi faire en sorte que les Afghans puissent s'occuper d'eux-mêmes lorsque le Canada ne sera plus là. Leur avenir repose sur le développement durable.
L'ACDI a prévu des ressources pouvant aller jusqu'à 10 millions de dollars pour un programme visant à établir la confiance dans la gouvernance. Ce programme, qui sera exécuté par les équipes provinciales de reconstruction, a pour but de créer un environnement propice aux programmes gouvernementaux au niveau du pays, des provinces et des villages. Dans le cadre du programme, des subventions sont offertes aux collectivités démunies afin qu'elles entreprennent les projets qu'elles-mêmes jugent prioritaires.
Grâce à son aide au développement, le Canada a été en mesure d'apporter des contributions essentielles en matière de gouvernance et de développement durable en Afghanistan. Il faut se rappeler qu'en aidant l'Afghanistan à devenir un État stable, démocratique et autonome, nous nous assurons que ce pays ne servira plus jamais de refuge pour les terroristes.
Les Afghans ont fait des progrès, mais ils ont encore besoin de notre soutien et il est crucial que nous prolongions notre mission. Les Canadiens devraient être fiers de tout ce que nous avons accompli en Afghanistan et être prêts à continuer d'offrir l'appui du Canada.
:
Monsieur le Président, je partagerai mon temps de parole avec mon bon ami et collègue, le député de Cape Breton—Canso.
Je joins ma voix à celle de tous les députés à la Chambre pour dire que nous sommes fiers des nombreux Canadiens qui font leur devoir en Afghanistan ou qui l'ont fait depuis quelques années — que nous nous préoccupons d’eux, et qu’ils ont tout notre soutien et notre respect. Je parle des militaires, mais aussi des travailleurs humanitaires, des policiers, des membres du Corps canadien qui surveillent les élections et des conseillers qui sont là-bas pour aider à la bonne gouvernance.
J’ai l’intention de voter contre cette motion ce soir. J’ai écouté attentivement les députés cet après-midi et ce soir. Je crois qu’il est trop tôt pour prendre une décision sur cette motion. Nous avons encore plusieurs mois devant nous avant d’avoir à décider. Précipiter ce débat à 36 heures d’avis, et avoir 6 heures de débat pour rendre une décision qui est une question de vie ou de mort, équivaut à nous demander de décider sans savoir. Le Comité de la défense nationale lui-même a voulu entendre des experts pour pouvoir nous dire comment vont les choses, quelles sont nos intentions, quels sont nos objectifs et quelle est notre stratégie de retrait, afin que nous puissions prendre une décision éclairée. On lui a refusé cette possibilité.
Nous devons entendre le point de vue de tous les comités pertinents, qui devraient pouvoir convoquer des témoins de l'administration publique et d'ailleurs, pour savoir où nous en sommes et où nous allons. C'est manquer de respect que de nous demander de prendre une décision sans cette information. C'est manquer de respect envers les députés et envers la population du Canada. Surtout, c'est manquer de respect envers les braves Canadiens qui sont ou qui seront en service en Afghanistan. Ce manque de respect est dangereux. Il met ces soldats en danger si nous ne pouvons pas prendre une décision éclairée et exiger le respect nécessaire pour le faire. Dans ce sens, il s'agit là d'un manque de principes.
La raison pour laquelle nos soldats sont actuellement en Afghanistan est fondée sur des principes. Elle est fondée sur les meilleurs principes d'intervention humanitaire, qui ont évolué au cours de la dernière décennie. Le Canada et les députés ont aidé à définir ces nouveaux principes d'intervention humanitaire. Cette cause est juste.
Avec ces principes à l'esprit, nous avons élaboré un nouvel énoncé de politique internationale. Les Canadiens qui sont actuellement en Afghanistan mettent en pratique, pour la première fois, l'énoncé de politique internationale élaborée par le gouvernement précédent. Cet énoncé combine les forces de sécurité aux travailleurs de l'aide humanitaire, aux conseillers en matière de saine gouvernance et aux agents de formation de la police civile, afin d'en assurer l'intégrité et l'efficacité.
Quelle approche fondée sur des principes doit-on adopter avant de prolonger cette mission? Il faut adopter une approche visant à obtenir l'information nécessaire pour prendre une décision éclairée. Il faut prendre le temps nécessaire.
Nous avons entendu parler de la décision des Pays-Bas de prolonger la présence de leurs troupes. Le Parlement des Pays-Bas n'a pas été avisé uniquement 36 heures à l'avance de la tenue d'un débat de six heures, sans la contribution de témoins et sans information adéquate. Au Pays-Bas, la question a été débattue pendant dix mois. Quelle est l'urgence ici? Normalement, une fois l'information en main, on en fait l'analyse. Il faut ensuite planifier la suite, la définition du rôle, les objectifs, les points de repère et la stratégie de retrait. On songe ensuite à la prochaine étape?
Nous avons le temps. Nous le devons aux militaires canadiens qui servent bravement en Afghanistan et à ceux qui leur succéderont. Nous le devons également au peuple afghan. Il nous incombe de faire en sorte que la protection devienne une norme internationale. Nous le devons à toutes les parties concernées.
Pour en arriver à cette décision que j'estime fondée sur des principes, j'ai consulté les électeurs de Vancouver Quadra comme je ne l'avais jamais fait auparavant dans ma courte carrière de cinq ans à la Chambre des communes. Au cours des 24 dernières heures, les électeurs de ma circonscription m'ont fait parvenir une quantité considérable de réponses immédiates et unanimes m'enjoignant de voter contre cette motion.
Une seule personne m'a suggéré, de façon très avisée, de donner un appui conditionnel à la motion. Je tiens compte de cet avis et je le prends très au sérieux, comme les électeurs de Vancouver Quadra, tout en maintenant le principe qu'il faut prendre le temps de s'informer, d'établir des principes, de faire preuve de respect et d'avoir une certaine sécurité avant d'aller de l'avant.
En votant contre cette motion ce soir, je ne dis pas «non jamais». Je dis plutôt «non, pas maintenant». Je ne prendrai pas cette décision; l'approche adoptée est irrespectueuse parce que non informée et, de ce fait, ne repose sur aucun principe.
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Monsieur le Président, d'emblée, j'offre mes condoléances à la famille de Nichola Goddard, la militaire qui est morte au combat aujourd'hui, ainsi qu'à ses amis et collègues. Je sais qu'une telle tragédie touche profondément tous les députés, de même que tous les Canadiens. Je pense que la tragédie d'aujourd'hui fait ressortir encore plus l'importance et la signification de notre débat de ce soir.
Pendant la soirée d'hier et aujourd'hui, toute la journée, les députés du caucus libéral ont eu l'occasion de discuter de l'importante motion dont la Chambre est saisie ce soir. Nous entendons toute une gamme d'interventions, d'opinions qui, en grande partie, sont partagées, partagées intellectuellement et brutalement, en toute sincérité et brutalement, mais je pense qu'elles sont aussi partagées avec respect.
Je comprends que certains députés de mon caucus expriment leur inquiétude face au processus que le gouvernement a amorcé en présentant cette motion avec tout l'opportunisme nécessaire pour qu'elle soit adoptée rapidement.
La décision des Néerlandais nous revient à l'esprit. De fait, elle a été mentionnée plusieurs fois au cours de la soirée. Ils ont discuté pendant dix mois de cette prolongation de deux ans. C'est pourquoi il y a un certain scepticisme de ce côté-ci. On se demande s'il ne s'agit pas d'un stratagème politique du gouvernement.
Cela étant dit, j'avais deux raisons de participer au débat de ce soir. Je devais m'assurer que nos soldats, nos hommes et nos femmes en uniforme, ainsi que leurs parents, comprennent que nous les appuyons, que notre parti appuie leurs efforts et que, bien entendu, nous appuyons leur mission.
J'ai écouté tout le débat attentivement, mais j'avoue que je suis venu également pour obtenir des garanties, car j'appuyais le déploiement initial parce que j'en connaissais la raison d'être. Je suis venu ici ce soir pour obtenir une réponse à plusieurs de mes questions.
Je voulais notamment savoir si l'essence de la mission serait modifiée. Je voulais savoir si l'effectif de la mission devrait être accru substantiellement. Je voulais savoir, dans l'éventualité où l'ONU nous demanderait d'intervenir au Darfour, en Haïti ou dans toute autre région névralgique du monde, si nous serions en mesure de répondre à ces demandes.
Je retiens de ce que nous ont dit ce soir le ministre de la Défense nationale et le ministre des Affaires étrangères l'assurance que l'essence de cette mission ne changera pas. Tous les députés savent que les circonstances sur le terrain, à Kandahar, ont changé. Nous savons que le danger s'est amplifié. La situation est devenue plus difficile, mais s'il s'agissait d'un travail facile, ce n'est pas au Canada qu'on aurait demandé d'intervenir. On aurait fait appel à un pays de moindre envergure.
Lorsque des obstacles se présentent, ce n'est pas le temps de flancher, et c'est pourquoi je vais appuyer la motion ce soir. Nous sommes tous aux prises avec les mêmes questions. Des gens viennent me voir constamment pour me demander ce que font au juste des jeunes hommes et des jeunes femmes de notre pays en Afghanistan. Pourquoi sommes-nous en Afghanistan? Je pense qu'au fil du temps, nous en sommes venus à comprendre les difficultés que doit surmonter ce pays.
Les gens sont capables de faire les liens nécessaires lorsqu'ils regardent les informations à la télé le soir et lorsqu'ils se rappellent les attentats du 11 septembre 2001. Ils savent que l'Afghanistan était un terreau fertile pour le terrorisme. Ils savent que des cellules terroristes étaient florissantes dans ce pays. Les images qu'ils voient à la télé leur montrent la misère, la pauvreté et la faim. Ils voient des femmes maltraitées et terrorisées. Il n'y avait pratiquement aucun système public d'éducation en Afghanistan il y a cinq ans. Les gens d'ici savent que le manque d'éducation est à l'origine de la misère.
Par conséquent, nous ne pouvons pas rester les bras croisés. C'est pourquoi j'ai appuyé cette intervention à l'origine. Nous n'avons pas décidé de nous rendre là-bas de notre propre chef. C'était une intervention unilatérale. Les Nations Unies nous ont demandé de nous joindre à une mission de l'OTAN. Nous avons répondu à l'appel, nous avons fait le maximum, et notre présence a eu un effet énorme.
Les Canadiens doivent savoir que nos efforts là-bas ne sont pas vains. Quiconque regarde le débat de ce soir peut constater qu'il s'y dit des choses sensées. On peut voir que la démocratie se renforce et que les systèmes de gouvernance s'améliorent. Nous avons pu faire des progrès en collaborant avec le système judiciaire. On parlait tout à l'heure de l'absence d'un système d'éducation public. Aujourd'hui, 3 millions d'enfants vont à l'école.
La Chambre a tenu un important débat exploratoire en avril. Tous les partis représentés à la Chambre ont alors manifesté leur appui total pour les troupes et pour la mission.
J'ai parlé plus tôt au député de Nipissing—Timiskaming. Il a eu l'occasion de se rendre en Afghanistan, y compris à Kaboul. Il a vu ce qui s'y passe actuellement. Les gens marchent dans les rues. Ils font du commerce dans les rues. La vie est loin d'être normale, mais elle s'est beaucoup améliorée par rapport à ce qu'elle était il y a quatre ans.
Kandahar se trouve dans la situation où se trouvait Kaboul il y a quatre ans. Ça n'a pas été facile. Il y a eu des sacrifices à faire, mais les Canadiens ont fait une différence. Nous avons établi des infrastructures. Nous avons investi, comme je l'ai dit, dans l'éducation et l'eau douce. Nous nous sommes attaqués à certains problèmes liés aux droits de la personne. Nous avons fait tout cela ces dernières années. Je crois que les Canadiens s'attendent à ce que nous restions jusqu'à ce que le travail soit terminé.
Je sympathise avec les troupes. Dans ma circonscription, Cape Breton—Canso, un grand nombre de jeunes hommes et de jeunes femmes se sont portés volontaires et ont joint les forces armées. D'après les conversations que j'ai avec eux, ils comprennent l'ampleur de leur tâche en Afghanistan, et ils sont à la hauteur.
J'aimerais lire un extrait d'une entrevue qui a eu lieu ce matin à la radio anglaise de Radio-Canada. La Chambre était très triste lorsque nous avons perdu le caporal Paul Davis, cet homme de 28 ans qui est mort lorsque son véhicule blindé est entré en collision avec un taxi et s'est renversé près de Kandahar. Il a laissé dans le deuil sa femme et deux petites filles. Ce fut un triste événement. Son père, Jim Davis, est très respecté. Beaucoup de députés de la Nouvelle-Écosse le connaissent bien. C'est un grand Canadien et évidemment un excellent père. Durant l'entrevue ce matin, Jim Davis a dit espérer que tous les partis politiques s'entendent pour prolonger la mission. Il a dit:
Je sais que nos troupes là-bas aiment savoir que les Canadiens les appuient. En clair, on veut qu'un effort uni soutienne la mission.
Je respecterai le vote de chaque député ce soir, mais je répète que j'appuierai la motion.
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Monsieur le Président, c'est un honneur pour moi que de prendre la parole aujourd'hui pour appuyer la prolongation de notre importante mission en Afghanistan. Comme nous en sommes tous devenus trop conscients ces dernières années, nous vivons dans un monde instable et imprévisible, où des terroristes ayant établi leur base d'opération dans des États faillis peuvent frapper n'importe où dans le monde, y compris ici en Amérique du Nord.
Le 11 septembre, notre vulnérabilité au terrorisme a été pleinement exposée. Au nombre des milliers de personnes qui ont perdu la vie ce jour-là, il y avait 24 Canadiens. Depuis cette date, les terroristes ont perpétré des attentats contre plusieurs de nos alliés de l'OTAN les plus proches, tuant des centaines d'innocents en Espagne, en Turquie et en Grande-Bretagne, ainsi que contre une foule d'autres pays dans le monde.
Nous devons nous rappeler aussi que le Canada a été désigné comme une cible par Al-Qaïda. La menace planant sur le Canada doit être prise au sérieux. Toutefois, le gouvernement doit prendre également prendre ses responsabilités pour défendre sérieusement le pays.
Soyons clairs. En matière de défense et de sécurité, le gouvernement placera toujours le Canada en premier. Nous n'allons pas laisser des étrangers décider du sort des Canadiens. C'est pourquoi le gouvernement est déterminé à renforcer notre capacité indépendante de défendre notre souveraineté et notre sécurité nationales.
En conséquence, le Canada est prêt à faire face aux menaces à sa sécurité où que ce soit dans le monde. C'est en partie pourquoi nous sommes en Afghanistan.
[Français]
Les troupes que nous avons déployées en Afghanistan, ainsi que nos diplomates et les travailleurs humanitaires, ont aidé le peuple afghan à élire un gouvernement responsable afin de succéder au régime agressif des talibans.
[Traduction]
Et n'oublions pas que les talibans fournissaient des installations d'entraînement et un refuge sûr aux terroristes responsables de l'attaque du 11 septembre.
Je partagerai mon temps de parole avec le député de Calgary-Est.
[Français]
Aujourd'hui, l'objectif du Canada en Afghanistan demeure d'empêcher le pays de servir à nouveau de refuge à des terroristes et à leur réseau destructeur. Nos soldats en Afghanistan protègent ainsi le Canada et la population canadienne. Nous sommes en Afghanistan pour offrir une aide humanitaire et pour jeter les bases du développement économique, social et démocratique de ce pays. Nous sommes là pour montrer le rôle de leadership que le Canada exerce dans le monde. Nous sommes là parce que c'est dans notre intérêt national.
[Traduction]
Le Canada a plus de 2 000 militaires en Afghanistan. La plupart d'entre eux se retrouvent dans la région de Kandahar, qui est un bastion taliban. Nos soldats présents sur le terrain croient vraiment en notre mission. Ils savent que leurs efforts sont couronnés de succès. Ces courageux soldats, marins et aviateurs sont de véritables héros, qui risquent leur vie pour protéger celles de leurs concitoyens au Canada.
Nous sommes fiers de nos combattants et nous les remercions des sacrifices qu'ils consentent pour nous défendre à l'autre bout du monde.
Notre mission en Afghanistan comprend des activités d'aide humanitaire pour construire des routes et des établissements. Notre mission serait impossible sans les Forces canadiennes.
Nos soldats aident à établir le climat de sécurité qui va permettre aux Afghans de ne plus vivre dans la peur et de reconstruire leurs collectivités. Ils travaillent pour rétablir la stabilité dans le pays. Ils empêchent également les rebelles de nuire à l'établissement de ce climat de sécurité.
Nous faisons aussi de grands progrès en matière de développement et de diplomatie. Par exemple, l'Afghanistan est le pays qui profite le plus de l'aide canadienne au développement, puisque le Canada s'est engagé à lui verser 656 millions de dollars depuis 2001. Notre gouvernement va débloquer 310 millions de plus pour porter la contribution totale du Canada à près de 1 milliard de dollars sur dix ans.
[Français]
Les diplomates canadiens en Afghanistan aident aussi le peuple afghan à reconstruire ses institutions politiques, et afin d'aider nos affaires diplomatiques, nous allons établir une ambassade permanente à Kaboul.
[Traduction]
Les simples citoyens, et les organisations privées qu'ils appuient, font également leur part pour aider les Afghans. Par exemple, CARE Canada a des représentants sur place qui s'occupent de la distribution de denrées, de la construction de routes, de la réparation des systèmes d'irrigation, de la lutte contre l'érosion des sols, de la remise en état des systèmes d'adduction d'eau et d'égouts, de l'enseignement à domicile et de la création des petites entreprises. On ne peut permettre que ces efforts s'arrêtent en février.
Avec l'aide du Canada et de la communauté internationale, les Afghans triomphent de la tyrannie et reprennent le contrôle de leur pays. Les signes de progrès sont clairs. On reconstruit des vies brisées et des collectivités détruites avec l'aide internationale et les efforts de reconstruction aident à réduire la pauvreté et la misère.
On reconstruit des écoles, des hôpitaux et des routes. Des millions de gens sont maintenant en mesure de voter. Les femmes jouissent de plus grands droits et de meilleures possibilités qu'on n'aurait jamais pu imaginer sous le régime taliban. Près de quatre millions de réfugiés sont retournés chez eux.
L'eau potable devient de plus en plus une réalité pour des milliers de villages. On collecte et on entrepose en sécurité des dizaines de milliers d'armes légères et lourdes. Des opérations de déminage sont en cours et plus de 4,5 millions d'enfants afghans, dont plus d'un tiers sont des filles, fréquentent maintenant l'école. Enfin, et c'est extrêmement important, l'armée nationale afghane et la police nationale afghane, des instruments essentiels à la sécurité nationale, sont en mesure d'accroître leurs capacités et d'être présentes dans toutes les régions de l'Afghanistan. Les Canadiens jouent un rôle clé dans leur formation.
Ces efforts entraînent des résultats positifs. Ils ont sans contredit accru la capacité des forces de sécurité afghanes à répondre aux menaces, qu'il s'agisse de menaces terroristes à l'endroit de la nouvelle assemblée nationale afghane, ou de menaces proférées par des barons de la drogue qui mènent leur commerce illicite. Nos efforts en vue d'aider à assurer la sécurité en Afghanistan, à renforcer la gouvernance et à réduire la pauvreté contribuent réellement à rendre la vie des Afghans plus facile.
C'est la raison pour laquelle la Chambre devrait appuyer la décision du gouvernement de prolonger la mission canadienne en Afghanistan jusqu'en février 2009 et d'en accroître la portée. En prenant une telle décision, nous démontrons à nos alliés et au reste du monde que le Canada est un pays sur lequel ils peuvent compter dans les moments difficiles.
Il y a de nombreux exemples qui prouvent que nous avons toujours assumé nos responsabilités, tant au pays qu'à l'étranger. Nous avons toujours voulu aider ceux qui avaient besoin de nous et nous avons toujours appuyé fermement la démocratie, les droits de la personne et la primauté du droit.
Nous savons que certains sont d'avis que nous devrions nous retirer de l'Afghanistan pour nous consacrer entièrement à nos affaires internes. Ils parlent de coûts monétaires et de pertes de vie. Je tiens à leur dire une chose. Il est vrai qu'il y a un coût rattaché à la protection du Canada, de notre liberté et de nos intérêts. Il en a toujours été ainsi, mais ces personnes se trompent si elles croient que nous pouvons nous dissocier du monde réel et des menaces réelles auxquelles les Canadiens sont confrontés.
D'autres laissent entendre qu'il est exagéré de prolonger cette mission de deux ans, jusqu'en 2009, pour un total de sept ans depuis le premier envoi de troupes sur les lieux. Je tiens à leur dire que nos troupes ont été à Chypre pendant 30 ans. Pendant 33 ans, des troupes canadiennes ont assuré la paix sur le plateau du Golan. Notre mission en Afghanistan ne durera jamais aussi longtemps, mais il est clair que nos engagements à l'égard de la poursuite d'une paix durable ne doivent pas être restreints de façon arbitraire.
Si nous voulons adopter une politique de défense qui donne la priorité au Canada, nous devons nous engager dans un monde souvent dangereux, loin de nos rives tranquilles, et nous devons reconnaître que nous avons des responsabilités au chapitre de la paix, de la sécurité et de la stabilité à l'échelle internationale.
L'engagement pris par le Canada en Afghanistan démontre clairement que l'on peut compter sur le Canada à cet égard. L'Afghanistan doit avoir la possibilité de devenir un pays plus stable, plus sûr et plus démocratique, afin de ne pas retomber aux mains des tyrans et des terroristes.
J'exhorte tous les députés à appuyer la présente motion. Que Dieu protège la terre de nos aïeux.
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Monsieur le Président, je me joins à tous les Canadiens pour dire que nous sommes profondément attristés par la mort d'une militaire canadienne en Afghanistan. Elle a sacrifié sa vie. Nous ne l'oublierons pas.
L'engagement du Canada en Afghanistan témoigne d'un engagement à soutenir la liberté, la démocratie, la primauté du droit et les droits de la personne aux quatre coins de la planète. Nous jouons un rôle de chef de file en Afghanistan. Sous l'égide d'une mission ONU-OTAN, 36 pays, dont le Canada, ont réalisé beaucoup de progrès jusqu'à maintenant. Toutefois, jeter les bases de la démocratie et du développement économique nécessite du temps et un appui soutenu.
Nos femmes et nos hommes courageux en Afghanistan contribuent à assurer la sécurité de ce pays et à préparer sa reconstruction. Grâce à notre approche intégrée faisant intervenir des diplomates, les Forces canadiennes, des spécialistes du développement et des policiers civils, le Canada aide les Afghans à instaurer la stabilité, à renforcer la gouvernance et à réduire la pauvreté dans leur pays. Nous sommes présents en Afghanistan à la demande du gouvernement afghan.
Nous avons déjà contribué de manière importante aux efforts de stabilisation et de reconstruction. Certes, la mission est complexe et dangereuse et elle ne ressemble en rien aux missions que nous avons menées dans le passé. Il est de plus en plus difficile de prévoir avec une certaine probabilité ce qui se passera sur la planète. La nature de la menace a changé, mais notre détermination ne doit pas fléchir.
Le 11 septembre 2001, nous avons pris douloureusement conscience que le Canada et les Canadiens étaient vulnérables d'une façon que nous n'aurions jamais crue possible auparavant. Nous devons assurer la sécurité et la défense du Canada ici même, mais nous devons aussi étouffer les menaces à l'étranger. Nous devons étouffer les menaces en Afghanistan.
Les auteurs des attentats du 11 septembre ont été entraînés dans des camps d'Al-Quaïda en Afghanistan. Le réseau terroriste Al-Quaïda, financé et inspiré par Oussama ben Laden, a bénéficié de la protection du gouvernement taliban de l'Afghanistan. Les talibans ont dirigé l'Afghanistan d'une poigne de fer: ils ont nié le droit des femmes de s'instruire ou de travailler, procédé à des exécutions publiques en bafouant toute notion d'application de la loi, terrorisé une population entière et plongé le pays dans le gouffre de la pauvreté.
À la fin 2001, les forces de la coalition, dont les Forces canadiennes, ont contribué à faire basculer le régime taliban, dont les membres se sont terrés dans les montagnes, et à écraser, sans toutefois réussir à l'éliminer, le réseau Al-Quaïda qui avait bénéficié de la protection de ce régime. On avait gagné une bataille, mais les efforts internationaux visant à stabiliser l'Afghanistan en étaient encore à leurs balbutiements.
Pour éviter d'être à nouveau utilisé comme un refuge pour les terroristes, l'Afghanistan devait se doter d'un gouvernement démocratiquement élu en mesure d'exercer son autorité. Il avait besoin de la capacité d'assurer la primauté du droit, la sécurité et le respect des droits de la personne dans tout le pays. Il lui fallait aussi édifier une économie capable de répondre aux besoins de base de la population et acquérir les moyens de réduire la production illicite d'opium. Il s'agit là d'un projet à long terme qui nécessite l'engagement de longue durée de la communauté internationale.
L'Afghanistan a réalisé énormément de choses en bien peu d'années. Il a une nouvelle constitution. Il a un président et un parlement démocratiquement élus. Son armée est en cours de reconstruction et ses forces de police reçoivent une nouvelle formation. Les femmes et les filles peuvent maintenant fréquenter l'école et des entreprises légitimes apparaissent. On reconstruit les hôpitaux, les écoles et les routes.
Avec l'aide du Canada et de la communauté internationale, le peuple afghan est en train de triompher de la tyrannie et de recouvrer son pays, mais l'Afghanistan demeure fragile. La poignée de talibans et de membres d'Al-Qaïda encore actifs continuent de s'employer à déstabiliser le pays. La culture de l'opium représente près de 60 p. 100 du PIB national. Nous devons maintenir le cap jusqu'à ce que l'Afghanistan soit à même de résister à ces pressions.
L'OTAN a fait une contribution cruciale aux réalisations obtenues à ce jour et elle continuera de jouer un rôle clé dans l'essor de l'Afghanistan.
Notre participation à l'OTAN garantit au Canada une voix égale à celle des autres États membres de la plus puissante alliance militaire du monde, une alliance qui se consacre à la défense des valeurs qui sont fondamentales pour les Nations Unies et pour les Canadiens, une alliance qui est résolue à contrer les nouvelles menaces qui pèsent contre nous de nos jours.
Aucun de nous ne peut faire cavalier seul.
Mon gouvernement est bien conscient du fait que notre engagement en Afghanistan entraîne des risques, mais nous savons aussi que ce que nous tentons de faire, à savoir créer un Afghanistan stable et sûr qui ne serve pas de refuge aux terroristes, vaut tous ces risques. Il en est ainsi parce que la sécurité à long terme du Canada et des Canadiens est en jeu.
En guise de conclusion, j'offre mes remerciements aux hommes et aux femmes des Forces canadiennes qui sont déployés en notre nom en Afghanistan. Nous pleurons la perte de ceux qui sont morts et nous appuyons fermement ceux qui s'évertuent à assurer la paix et la sécurité en Afghanistan.
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Monsieur le Président, je suis heureuse de partager ce soir mon temps de parole avec le député d'Ottawa-Centre, qui manifeste une grande ardeur au travail.
À pareille heure la semaine dernière, je me trouvais en Afghanistan comme porte-parole du Nouveau Parti démocratique, et ce à double titre: en matière d'affaires étrangères et en matière de coopération internationale. Je tiens tout d'abord à dire que je suis très reconnaissante d'avoir eu cette occasion. J'aimerais avoir plus de temps ce soir pour partager certaines des expériences que j'ai vécues là-bas, mais je sais que, à cause d'un calendrier escamoté et aussi, dois-je le dire à regret, d'un certain jeu politique de la part du gouvernement, nous devons participer au débat de ce soir selon des règles qui nous restreignent et sans avoir la possibilité d'amender la motion à l'étude.
Les ministériels ont beau s'indigner, ce sont les faits, et les Canadiens le savent bien.
Nous avons l'occasion ce soir de parler de l'avenir du rôle du Canada en Afghanistan. Je dois dire clairement, d'entrée de jeu, que rien ne m'a persuadée, durant mon bref passage en Afghanistan, que nous ne devrions pas avoir de rôle. En réalité, je suis plus convaincue que jamais de l'extrême importance pour le Canada de participer de façon constructive à un processus intégré de consolidation de la paix. Or, ce n'est pas ce que nous sommes en train de faire à Kandahar et mon parti s'en inquiète à tel point qu'il votera contre la motion ce soir.
Mes toutes premières pensées, en cette occasion, vont à la perte tragique du capitaine Nichola Goddard, dans l'exercice de ses fonctions en Afghanistan. Elle a fait l'ultime sacrifice: celui de sa vie. Je tiens à manifester mes condoléances à sa famille. Je n'ignore pas que sa famille s'élargit aux soldats avec qui elle servait, puisque nous savons tous à quel point le travail d'équipe les rapproche, d'autant plus qu'ils le font en risquant leur vie pour leur pays.
Mes pensées vont également aux familles et aux êtres chers de ceux qui servent en Afghanistan à l'heure actuelle. Dans cet esprit, j'aimerais citer brièvement une lettre touchante que j'ai reçue hier, à la veille du présent débat, de la mère d'un jeune homme qui sert à Kandahar en ce moment:
Chaque fois que j'entends parler d'une attaque ou d'un accident, je suis sur le qui-vive tant que je n'ai pas reçu un mot de mon fils. Je suis convaincue que tout parent d'un soldat affecté dans une région à haut risque partage les mêmes inquiétudes. On vérifie l'ordinateur 20 ou 30 fois par jour, on prie, et puis on porte attention aux nouvelles. J'appuierais davantage le maintien de l'affectation de nos troupes à l'étranger dans de telles circonstances, et comme gardiens de la paix, si j'avais l'impression d'être bien informée.
Malheureusement, lorsque le débat de ce soir aura pris fin, les réponses que nous aurons reçues ce soir comme parlementaires et comme Canadiens seront loin de suffire pour que nous puissions dire que nous sommes bien informés.
Elle écrit encore:
Si je n'avais pas l'impression que nos soldats sont trop sollicités, qu'ils travaillent des heures beaucoup trop longues et qu'ils risquent de devenir moins efficaces et moins capables de réagir à mesure que l'épuisement les gagne et qu'ils ploient sous la pression de la situation, je serais plus rassurée.
Peut-être que ce que j'écris servira à éclairer le débat de demain sur la prolongation proposée de la mission en Afghanistan. Je me demande encore une fois pourquoi, dans le journal d'aujourd'hui, la situation est dépeinte ainsi, c'est-à-dire que, si nous choisissons de ne pas prolonger la mission, cela veut dire que nous n'appuyons pas nos militaires.
Nous devons garder à l'esprit qu'il s'agit de la mère d'un jeune homme en mission aujourd'hui à Kandahar. Voici encore ce qu'elle écrit:
On tient pour acquis que les troupes auront l'impression que nous ne les appuyons pas.
L'idée que nous n'appuyons pas les troupes canadiennes est un argument illogique que l'on emploie pour faire taire ceux qui se posent des questions légitimes et pour obtenir ce que les chefs militaires et le gouvernement souhaitent avoir... mais est-ce bien dans l'intérêt des Canadiens?
Pour terminer, elle écrit ce qui suit:
J'appuie les militaires, mais je suis contre le sacrifice inutile et insensé des vies de Canadiens. Quel que soit le degré d'ordre que l'on veuille établir dans un village afghan, ce n'est pas un objectif qui mérite que mon fils y laisse sa vie ou sa santé selon moi, qui suis sa mère. J'appuie les militaires, j'appuie les opérations véritables de maintien de la paix, mais je regrette beaucoup l'insensibilité et l'indifférence à l'égard des vies de nos jeunes gens.
Je suis certaine que ces sentiments sont ceux qu'éprouvent de nombreuses personnes parmi les parents et les êtres chers des jeunes gens et des personnes de tous les âges qui font leur devoir aujourd'hui à Kandahar.
Quels que soient l'incroyable dévouement, les compétences et le courage des jeunes hommes et des jeunes femmes qui se trouvent aujourd'hui à Kandahar, je suis profondément troublé par la nature et le ton du débat de ce soir. Qu'il s'agisse d'aveuglement volontaire ou d'ignorance, les députés ministériels nous ont abreuvés de fausses informations et ont employé la tromperie au cours du débat de ce soir. C'est triste à dire, mais de temps à autre, on a pu voir le même comportement de la part des députés de l'opposition officielle également.
On a beaucoup prétendu que la mission actuelle avait permis d'améliorer la sécurité et la qualité de vie des Afghans. Il est très important de considérer la question sous cet angle lorsque nous envisageons nos engagements futurs. Comme je l'ai dit, nous devrons encore nous engager à l'avenir. Mais, nous devons comprendre que les gains et les améliorations réalisés à Kaboul ne sont pas le résultat de l'opération Enduring Freedom, qui donne lieu à Kandahar à des efforts guerriers tous azimuts de traque et d'anéantissement. Il faut absolument que nous nous en rendions compte.
Je suis profondément perturbée de constater que l'on n'a pas du tout reconnu qu'il y a effectivement une différence, que nous soyons là dans le cadre d'une mission dirigée par l'OTAN ou uniquement dans le cadre de l'opération Enduring Freedom. J'ai été renversée d'entendre le ministre de la Défense déclarer qu'une mission de l'OTAN et l'opération Enduring Freedom, c'était la même chose.
Je veux lire ici une déclaration adoptée par l'OTAN sur la différence entre les deux missions. Le rapport entre la Force internationale d'assistance à la sécurité, la FIAS, et l'opération Enduring Freedom est décrit en ces termes:
La FIAS et l'opération Enduring Freedom, l'opération militaire permanente dirigée par les États-Unis en Afghanistan, conserveront des mandats distincts et demeureront des missions distinctes. La FIAS mettra l'accent sur sa mission de stabilisation et de sécurité tandis que l'opération Enduring Freedom continuera de mener sa mission antiterroriste. Une entente de commandement claire servira à la coordination et, au besoin, aplanira les conflits entre les deux missions tel que convenu dans le plan opérationnel.
Comment le ministre de la Défense peut-il affirmer que cela n'a pas vraiment d'importance que nous parlions d'une mission ou de l'autre? D'ailleurs, le chef de l'opposition a plus ou moins fait le même commentaire. Il a déclaré que le fait qu'il ne s'agissait pas d'une mission dirigée par l'OTAN ne le préoccupait pas.
J'irai plus loin. Ce soir, le gouvernement a tenté de passer complètement sous silence le fait qu'un débat fait rage au sein de l'OTAN autour de la mission anti-insurrectionnelle qui a lieu à Kandahar. Il est clair, et cela a été reconnu par tout le monde, de Donald Rumsfeld jusqu'au Council on Foreign Relations, dans un récent rapport, que cette mission connaît de sérieux problèmes. En fait, le président Karzaï lui-même est allé aux États-Unis où il a déclaré qu'il était temps d'y mettre fin.
Je terminerai en disant qu'il y a une raison pour laquelle les gens affirment que la vérité est souvent la première victime de la guerre. Nous avons entendu trop peu de faits concrets auxquels les Canadiens pourraient se raccrocher pour dire que le gouvernement sait dans quoi il propose de nous embarquer. Il est clair que la chose responsable à faire c'est de voter contre la motion parce qu'elle porte sur une mission injustifiable et que nous ne disposons pas de suffisamment d'information.
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Monsieur le Président, je prends la parole à la Chambre en tant que député d'Ottawa-Centre, en tant que fils d'un ancien combattant de la Seconde Guerre mondiale et en tant que petit-fils de deux anciens combattants de la Première Guerre mondiale. Personnellement, j'ai été en danger. J'ai fait l'expérience du théâtre de la guerre.
Je parle de mon expérience aux députés parce que je crois que ce que nous faisons à la Chambre et que les effets des décisions que nous prenons concernent en définitive nos concitoyens et les gens vivant partout dans le monde.
On ne soulignera jamais assez que le NPD appuie pleinement les courageux membres des Forces armées ainsi que l'important travail qu'ils accomplissent dans le monde. Ne sombrons pas dans une querelle chauviniste quand il est question de la guerre. Cela n'est pas digne du Parlement, de la population, de nos gens qui ont servi et qui servent encore dans les forces.
Nous sommes ici ce soir pour débattre d'une motion portant sur la prolongation de notre mission en Afghanistan au-delà de 2007, et pour voter sur cette motion. Comme nombre de députés l'ont déjà dit, les échéanciers et le processus établis pour débattre de cette motion ne conviennent pas, si l'on tient compte des coûts et des vies qui en dépendent.
En janvier 2002, le Canada s'est engagé à contribuer à l'effort de reconstruction en Afghanistan. Nous étions en faveur d'un tel engagement. Entre août 2003 et décembre 2005, le gros de l'apport militaire du Canada était concentré dans la capitale, Kaboul, comme élément de la force internationale d'assistance responsable du renseignement et de la sécurité afin de rendre possible la reconstruction et le processus démocratique qui a mené à la tenue d'élections à l'automne de 2005.
Le Canada a mis fin à ce rôle vers la fin de 2005 et a affecté un groupement tactique d'environ 2 000 personnes à Kandahar, au début de 2006. C'est à ce moment que les choses ont changé. La nature de la mission est passée de mission ONU-OTAN à laquelle participait le Canada à une mission sous commandement américain, plus au sud, appelée opération Enduring Freedom. Il convient de noter que la stratégie employée dans le cadre de cette opération américaine a fait appel, au cours des quatre dernières années, à des opérations de ratissage, des bombardements aériens et des offensives en bonne et due forme contre de présumés insurgés terroristes et a donné des résultats absolument désastreux.
C'est ce que nous venons d'accepter: un rôle dans le Sud de l'Afghanistan. Il convient de noter que ce sont les politiciens, et non les militaires, qui ont défini le mandat.
Au moment où le gouvernement dirigé par le député de LaSalle--Émard a pris l'engagement d'envoyer des forces dans le Sud de l'Afghanistan, il l'a fait en présumant que l'OTAN se substituerait à la coalition dirigée par les États-Unis en février 2006. On est maintenant en mai 2006, et l'on n'est pas encore certain du moment où l'OTAN prendra la relève.
Il faut dire que, si les Néerlandais et les Britanniques tardent à se joindre à la mission, dans le Sud, c'est qu'ils ont des réserves. Pourquoi? Parce que les choses ne sont pas claires dans le Sud, ce qui rend la situation encore plus instable.
Il faut absolument nous rappeler que la mission, qui se déroule sous l'égide de l'OTAN et de l'ONU, ne devait pas à l'origine se tenir en situation de combat dans le Sud. Elle visait simplement à assurer la sécurité des Afghans ordinaires avec l'aide de la police et des forces armées afghanes. C'est ce que les Canadiens croyaient.
Le premier ministre a affirmé qu'il fallait une motion pour préciser notre rôle et notre mandat. Au cours du récent débat exploratoire, notre parti a posé quelques questions très précises sur notre rôle en Afghanistan. Quel est notre objectif sur le plan militaire? Quelle est la structure de commandement? Combien de temps faudra-t-il pour atteindre les objectifs? Ce sont quelques-unes des questions que nous avons posées.
Malheureusement, nous n'avons pas obtenu des réponses aussi claires que nous l'aurions espéré.
Prenons la question des objectifs militaires de nos troupes. Le gouvernement a fait part de bien des intentions, comme instaurer la démocratie, lutter contre le terrorisme, assurer la sécurité du Canada ou permettre aux fillettes d'aller à l'école. Ce sont tous des buts louables. On pourrait arriver à ces buts, et on devrait le faire éventuellement, mais pour le moment ce ne sont pas là les objectifs militaires. Ce n'est pas ce qui se produit à Kandahar.
Sur la question de la structure de commandement, comme je l'ai déjà mentionné, il n'existe pas d'entente avec l'OTAN sur ce que sera la nouvelle mission. Même les Britanniques ont affirmé qu'il était impensable d'effectuer des opérations « chercher et tuer » dans le cadre d'une opération de maintien de la paix.
Comment les parlementaires peuvent-ils se prononcer sur la prolongation de deux ans de la mission alors que la mission n'est pas claire? Plutôt que d'appuyer une prolongation de deux ans, nous devrions presser les Nations Unies et l'OTAN de se pencher sur un plan en vue de l'établissement d'une paix véritable dans le Sud, un plan qui renonce aux tactiques de « chercher et tuer ». Ces tactiques ont échoué.
Nous devrions appuyer la Commission de consolidation de la paix, qui a besoin d'un appui international et est défendue par un Canadien d'origine afghane. Il ne saurait y avoir de paix en Afghanistan que dans le cadre d'un processus de paix.
Enfin, nous devons aborder la question du coût d'option de la prolongation de cette mission. Au Darfour, le génocide se poursuit pendant que nous nous croisons les bras. Ce n'est pas suffisant. C'est inacceptable pour le Canada. Nous pouvons, nous devrions et nous devons faire mieux.
Plus de 30 pays sont présents en Afghanistan. Nous sommes fiers de contribuer à l'instauration de la paix et au développement dans ce pays. Si nous sommes déterminés à continuer de bâtir la paix et de raffermir le développement dans ce pays, nous pouvons assurément intervenir aussi au Darfour.
Nos concitoyens nous élisent pour que nous prenions des décisions responsables. La motion présente la prolongation de cette mission d'une façon irresponsable et c'est pour cela qu'elle ne mérite pas notre appui.
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Monsieur le Président, qu'on me permette de rappeler certains faits et de mettre les pendules à l'heure quant à la position libérale sur l'Afghanistan et quant à notre appui aux Forces armées canadiennes qui sont là-bas.
Pendant de nombreuses années, l'aide humanitaire et l'aide au développement ont constitué les principaux objectifs des efforts déployés par le Canada et par notre gouvernement en Afghanistan à la suite de la guerre civile.
Le Parti libéral a adopté une ligne d'action à l'égard des opérations internationales dite des « 3 D », c'est-à-dire: diplomatie, défense et développement. C'est une ligne d'action globale et intégrée pour l'atteinte de nos objectifs, que ce soit en matière de sécurité et de stabilisation, d'aide humanitaire, de renforcement des institutions ou de développement économique.
C'est pourquoi le gouvernement libéral avait participé à une coalition internationale en envoyant, en 2002, quelque 800 soldats dans la région de Kandahar afin d'aider à débusquer les derniers talibans et les membres d'Al-Qaïda. En août 2005, les Forces canadiennes sont retournées à Kandahar et y ont mis sur pied une équipe provinciale de restructuration, soit une EPA, formée de 250 membres des Forces canadiennes et de représentants de l'ACDI, de la GRC et du ministère des Affaires étrangères.
Le rôle de l'EPA est d'affermir l'autorité du gouvernement afghan à Kandahar et aux alentours, et de contribuer à stabiliser et à reconstruire la région. En outre, elle a contribué à superviser la sécurité, à faire connaître les politiques et les priorités du gouvernement national afghan aux autorités locales ainsi qu'à faciliter les réformes dans le domaine de la sécurité.
Tous ces faits témoignent de l'engagement des députés de ce côté-ci de la Chambre envers nos braves soldats canadiens que nous avons déployés là-bas. Cependant, nous nous sommes également engagés à aider l'Afghanistan à se reconstruire démocratiquement. Cet engagement tient toujours.
Voilà vraiment le fond de la question. Or la motion du gouvernement conservateur n'a rien à voir avec le fond de la question que je viens de décrire. Cette motion devant nous n'est qu'une stratégie politique qui ne fait pas honneur au gouvernement conservateur.
En fait, la première question que nous devons poser est la suivante: pourquoi le gouvernement a-t-il décidé de présenter cette motion aujourd'hui, alors que le mandat des Forces canadiennes n'a pas à être revu avant février 2007?
Nous devons poser une deuxième question: pourquoi le gouvernement ne donne-t-il pas toute l'information à ce sujet aux députés de l'opposition? D'autres députés avant moi en ont déjà parlé. Par exemple, j'ai appris aujourd'hui par les médias que l'OTAN a demandé au Canada de mener la mission militaire internationale en Afghanistan à partir de 2008. Pourquoi le premier ministre n'en a-t-il pas informé la Chambre des communes? Car voilà un fait dont doivent tenir compte les députés dans leur réflexion quant à la motion devant nous ce soir.
Le premier ministre a créé un gouvernement qui ne partage pas l'information qu'il détient, si importante soit-elle, ni avec les députés ni avec la population canadienne. La culture du secret est en plein essor sous ce gouvernement.
Les députés et, par leur intermédiaire les Canadiens et les Canadiennes, doivent se poser une troisième question: le gouvernement respectera-t-il le résultat du vote de ce soir? Il nous dit que le vote est pressant et qu'il doit se tenir. Aux Pays-Bas, par exemple, un débat en profondeur a eu lieu et a permis à tous les députés de s'exprimer. Ici, à la Chambre des communes canadienne, on nous donne un maximum de six heures. Encore là, nous constatons une culture du super-contrôle et du secret.
J'ai posé ces questions au premier ministre, cet après-midi, et à aucun moment n'ai-je obtenu de réponses.
Que ce soit clair: nous, les libéraux de ce côté-ci de la Chambre, sommes solidaires de nos braves soldats et du personnel humanitaire canadien qui oeuvrent en Afghanistan. À la suite du décès de la capitaine Goddard, nous voulons offrir nos condoléances à sa famille, à ses parents, à ses amis et à ses collègues. Cependant — je regrette de le dire —, cela ne doit pas nous détourner de la voie que nous avons choisie.
L'information que nous donnent le premier ministre et son parti n'est ni suffisante ni satisfaisante. Nous demandons des réponses. Les Canadiens attendent de leur gouvernement non pas des stratégies politiques, mais plutôt une approche réfléchie, sage et logique.
C'est la seule approche qui vaille.
Voilà ce qui va aider nos troupes et la population afghane.