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Monsieur le Président, hier il y a eu un excellent débat sur ce projet de loi. Cette mesure a pour objet d’inscrire dans la loi cinq nouvelles infractions ayant trait aux courses de rue.
S’il y a des députés qui n’ont pu suivre une grande partie du débat à cause d’autres responsabilités, je les renvoie au discours prononcé par la députée de qui a accompli un travail extraordinaire pour faire ressortir, à l’intention de tous les députés, certains aspects préoccupants sur lesquels il faudrait s’arrêter. J’ai vraiment trouvé ses observations très utiles.
C’est sûr, les courses de rue représentent un problème extrêmement grave. C’est un problème important pour les Canadiens, que la Chambre doit étudier attentivement.
À l’heure actuelle, le Code criminel prévoit quatre infractions ayant trait à la conduite dangereuse d’un véhicule à moteur. Il y a notamment la conduite dangereuse causant des lésions corporelles, la conduite dangereuse causant la mort, la négligence criminelle causant des lésions corporelles et la négligence criminelle causant la mort.
Ce projet de loi ajouterait une autre dimension à prendre en compte au moment de porter une accusation, et qui consiste à se demander si l’infraction prévue au Code criminel a également été exacerbée par l’incidence d’une course de rue.
Les députés qui ont suivi le débat sauront que, même en ce qui concerne la définition du terme course de rue, tout n’est pas toujours clair. Au fond, il faut pour cela deux automobiles. Comme l’ont fait remarquer les députés de et de , la définition pourrait, par inadvertance, inclure même les rallyes. On peut trouver une couple d’autres exemples. Prenons ainsi deux personnes qui ne se connaissent pas et qui sont arrêtées à un feu de circulation, mais qui, sans avoir rien préparé à l’avance, se regardent et commencent soudainement à jouer de l’accélérateur; si elles démarrent en trombe en même temps au feu vert, on peut se demander s’il s’agit d’une course de rue ou d’une simple accélération. C’est une affaire de jugement, je suppose.
C’est qu’un certain nombre de députés ont dit craindre que la définition ne soit pas assez claire et exhaustive pour que les événements sportifs légitimes, par exemple, soient exclus ou exemptés aux termes des dispositions du projet de loi.
Le député de a également soulevé la question de savoir s’il ne pouvait pas y avoir des cas où il s’agit d’une course contre la montre où deux voitures se font la course, non pas simultanément, mais consécutivement pour se rendre du point A au point B. En fait, elles sont chronométrées. C’est une course contre la montre et je suppose qu’il y a là des possibilités intéressantes. Par conséquent, il faut que la définition soit claire.
Probablement l’un des points les plus intéressants que la députée de a soulevé au cours du débat est le fait que les tribunaux ont maintenant un certain nombre de choses à examiner pour déterminer la peine dans une situation donnée. Si nous ajoutons maintenant les circonstances dans lesquelles ont lieu les courses de rue, au lieu d’être bidimensionnel, le problème pourrait être tridimensionnel. Nous devons examiner l’expérience des tribunaux pour voir si la législation actuelle leur pose déjà un problème et quelle est la latitude laissée aux juges pour l’imposition des peines.
Le projet de loi augmente les peines prévues et, dans certains cas, accroît la peine maximale et progressive en ce qui concerne l’incarcération et l’interdiction de conduire. Néanmoins, on ajoutant ces cinq nouvelles infractions, il semble que le projet de loi ajoute peut-être un autre élément qui risque d’avoir des répercussions sur la latitude dont les juges disposent pour déterminer la peine appropriée.
Quand j’ai examiné certains débats qui ont eu lieu antérieurement sur la question, j’ai remarqué un passage intéressant dans le discours du . Il a dit:
Le droit pénal peut être, et devrait être dans ce cas, un outil permettant de faire changer la perception du public.
Je ne sais pas si l’on peut simplement dissocier cela de tout ce que l’on attend du droit pénal. Si nous disons qu’il y a des courses de rue et que nous avons fait notre travail en imposant des peines plus sévères, il faut également se demander si des peines plus sévères et plus longues ne devraient pas être imposées pour d’autres choses, et la Chambre s’est penchée souvent sur la question de la dissuasion.
Lorsqu’on s’attaque aux activités criminelles, est-ce seulement une question de dissuasion? Dans au moins une demi-douzaine de discours qui ont été prononcés hier, les gens ont plaidé de façon extrêmement convaincante en faveur d’une approche plus globale du problème des courses de rue. Je crois qu’au cours du premier semestre de 2006, il y a eu dix décès attribuables à ce phénomène. Il ne fait aucun doute qu’une mort c’est déjà trop, surtout quand ont lieu des actes aussi irresponsables que les courses de rue, mais les études démographiques ont montré qui y participait.
C’est intéressant et cela vient du résumé législatif de la Bibliothèque du Parlement. En ce qui concerne les données démographiques, il est dit que les participants peuvent être généralement classés dans une des trois catégories suivantes: il y a d’abord les jeunes âgés de 18 à 24 ans qui vivent généralement chez leurs parents et qui, pour la plupart, ont un faible revenu. Je ne sais pas si ce sont les parents ou les jeunes de 18 à 24 ans qui ont un faible revenu, mais je suppose qu’on parle sans doute des personnes qui ont commis l’infraction.
La deuxième catégorie est celle des 25 à 40 ans qui, en général, modifient leur véhicule et utilise de puissantes automobiles comme des Camaro, des Corvette et des Mustang. La troisième catégorie est constituée de gens d’âge divers qui conduisent des voitures importées comme le dernier modèle d’Acura, de Honda, de Mitsubishi ou de Nissan.
J’ai un autre élément à ajouter. L’étude révèle aussi que certains participants se servent de véhicules volés, ce qui représente un aspect complètement différent pour ce qui est des activités criminelles dans notre société. Il y a cependant des caractéristiques démographiques qui ressortent dans certaines circonstances. Pour ce qui est de modifier le Code criminel et de nous acquitter, comme parlementaires, de notre devoir -- comme nous le disons chaque matin dans notre prière -- de faire de bonnes lois et de prendre de bonnes décisions, devons-nous dire que c’est une bonne loi et qu’elle réglera tous les problèmes quand nous ne se faisons qu’alourdir les peines et jeter plus de gens en prison?
Cela nous amène à la question de la dissuasion. Nous en avons discuté à la Chambre à plusieurs reprises pour déterminer si des peines plus sévères dissuadent les délinquants. Je n’ai pas l’impression que nous arriverons à dissuader des jeunes de 18 à 24 ans, qui agissent sous l’influence de leurs hormones, des amis qui les entourent et, dans certains cas, de l’alcool. Ces jeunes font des courses tout simplement parce que c’est cool de le faire.
Il y a ensuite le groupe des 25 à 40 ans dont les membres ont probablement un peu d’argent à dilapider et qui peuvent se permettre d’acheter des voitures et d’en gonfler le moteur, en installant par exemple des brûleurs spéciaux à oxyde d’azote. Dans ce cas, il s’agit souvent de fantaisies de jeunes cadres aisés qui veulent s’offrir un peu d’aventure.
Par ailleurs, on ne peut pas modifier une voiture sans se procurer du matériel très spécialisé. Nous devons nous demander s’il y a un moyen de communiquer avec ceux qui produisent et vendent ces pièces aux amateurs de courses de rue. Cela ferait partie d’une approche globale équilibrée de ce problème. J’ai souvent pensé que, dans tout problème social que nous essayons de régler ici, la sensibilisation du public et la prévention constituent d’importantes parties de la solution.
Lorsque j’ai été élu à la Chambre en 1993, la toute première réunion à laquelle j’ai assisté était une séance du Comité de la santé. Des fonctionnaires nous avaient alors dit que 75 p. 100 des crédits vont aux soins thérapeutiques pour remédier après coup aux problèmes de santé et que 25 p. 100 seulement servaient à la prévention. La conclusion était qu’un système de santé qui utilise 75 p. 100 de son budget pour guérir et seulement 25 p. 100 pour prévenir n’est pas viable.
Au cours de la dernière décennie, nous avons constaté d’une façon très claire qu’on ne peut pas faire abstraction de la valeur de la prévention. Dans le cas du modèle de la santé, il s’est avéré que pour chaque dollar consacré à la prévention, nous pouvons économiser des centaines de dollars à long terme. C’est une conclusion très sensée. Toutefois, nous n’appliquons pas des principes de ce genre dans le domaine judiciaire.
Si nous établissons des conditions très rigoureuses, qu’il s’agisse de minimums obligatoires ou de maximums accrus, et les intégrons dans le Code criminel, nous finirons par avoir un système complètement dépourvu de flexibilité.
Je sais qu’on a étudié un peu la question des circonstances atténuantes. La question est liée au syndrome d’alcoolisation fœtale ou à ce qu’on appelle maintenant les troubles causés par l'alcoolisation fœtale. Le Manitoba, la Saskatchewan et l’Alberta ont réalisé des études. Il y a un ou deux ans, ces provinces ont annoncé que la moitié des personnes incarcérées dans les établissements provinciaux souffraient d’anomalies congénitales attribuables à l’alcool. Si ces personnes enfreignent la loi, quelle latitude laisse-t-on aux tribunaux pour envisager des peines adaptées à ces circonstances particulières? Connaissons-nous suffisamment les facteurs qu’il faudrait prendre en considération pour déterminer la peine? Faut-il incarcérer des personnes qui ont des problèmes mentaux dans des prisons où on s’efforcera de les réadapter alors que c’est impossible pour elles? Voilà des questions intéressantes.
Je me demande si les personnes qui ont ce syndrome et qui, pour une raison ou une autre, participent à des courses de rue risquent d’avoir la même peine que quelqu’un qui a agi en pleine connaissance de cause ou avec une intention criminelle. Je suis persuadé que le conviendra que, dans certains cas, ces gens n’ont aucune intention criminelle. Quelle latitude laisse-t-on aux tribunaux? Cela m’inquiète. Je suis sûr qu’il y a d’autres cas semblables.
Je crains que les juges et le système de justice n’aient encore moins de latitude. Je me demande également si ce n’est pas s’engager dans une voie dangereuse que de laisser entendre que, peut-être, les juges ne font pas leur travail correctement. Il est terrible que non seulement certaines gens n’aient aucun respect pour les lois, mais aussi que les législateurs perdent le respect du système judiciaire également. Je me demande dans quelle mesure le problème que nous avons avec les tribunaux parce qu’ils n’imposent pas des peines assez sévères et n’envoient pas assez de gens derrière les barreaux ne tient pas au fait suivant: le gouvernement du Canada apporte des modifications au Code criminel en imposant certaines choses alors que ce sont d’autres administrations, c’est-à-dire les provinces et les territoires, qui doivent se charger de l’application. Elles ont besoin de prisons. Où peuvent-elles trouver les ressources nécessaires? Si elles n’ont pas assez de tribunaux, si les tribunaux sont engorgés...
De quoi parlez-vous? Il s’agit du projet de loi .
M. Paul Szabo: Je comprends bien. C’est un dialogue intéressant avec le . Je le remercie d’être ici et de suivre le débat. C’est un débat important, et je sais que le ministre y attache aussi de l’importance.
Lorsque nous modifions le Code criminel, que nous ajoutons de nouveaux éléments, que nous éliminons une certaine latitude ou imposons aux juges des contraintes peut-être encore plus grandes, au point qu’ils ne peuvent faire autre chose que d’envoyer de plus en plus de monde en prison, cela veut dire qu’il faut bâtir de nouvelles prisons. J’ignore qui va payer, lorsque ce n’est pas de ressort fédéral.
Comment régler le problème d’engorgement des tribunaux? Même au niveau fédéral, de très nombreuses nominations de juges n’ont pas été faites. Le système judiciaire a du mal parce qu’il manque de juges. J’ignore pourquoi le gouvernement traîne les pieds. Ce sont là autant d’éléments dont il faut tenir compte.
Où voulons-nous en venir en fin de compte? Disons-nous que la magistrature importe peu, que nous allons faire adopter cela envers et contre tout? Disons-nous simplement que c'est l'accusation à porter, qu'il faut régler l'affaire rapidement et que les juges n'ont aucun choix? Dans ce cas, tout à coup, nous n'abordons pas de façon globale le problème des courses de rue.
Où est l'argent pour la sensibilisation? Comment se fait-il qu'il n'en soit pas question dans le projet de loi? Où est l'argent pour d'autres mesures préventives, comme des ressources affectées aux autorités policières à tous les niveaux pour qu'elles puissent mieux s'intégrer dans les collectivités afin d'aider les législateurs à transmettre le message à ceux qui sont visés? Ce phénomène ne se retrouve pas dans tout le pays. Des études intéressantes montrent où certains problèmes se posent.
J'ai posé des questions semblables au sujet d'autres projets de loi. Il semble que la solution du gouvernement à tous les problèmes consiste à construire davantage de prisons et à emprisonner plus de gens. Je suppose que le programme de logement du Canada se résume à construire plus de prisons.
Il faut imposer aux gens qui commettent des crimes graves des peines appropriées et proportionnées. Cependant, lorsqu'on crée cinq infractions différentes avec des peines graduelles ou progressives, il devient tout à coup très difficile de respecter le critère de proportionnalité. J'ignore comment les juges seront en mesure de le faire.
Un de nos collègues conservateurs a dit que le système du Centre d'information de la police canadienne ne renferme pas de données permettant de déterminer si un incident était relié à une course de rue. On ne fait qu'enregistrer l'infraction au Code criminel. J'ai dû réfléchir à cela.
Je ne suis pas certain, mais il me semble que si le nom d'une personne apparaissait parce qu'elle a violé une loi et si on avait la preuve que cette infraction était reliée à une course de rue, cette information devrait être connue relativement à l'accusation portée maintenant. Si cette personne a été reconnue coupable d'excès de vitesse ou de négligence causant des lésions corporelles ou la mort, ou autre chose du genre, on pourrait également s'interroger sur les circonstances et le dossier du tribunal devrait le préciser. Ainsi, même le problème relié au Centre d'information de la police canadienne n'est pas assez important pour affirmer que c'est une lacune qui justifie de prendre cette mesure. Je ne pense pas que ce soit une raison suffisante.
J'ai d'autres questions. La députée de a soulevé des points très importants. Si le projet de loi est adopté à l'étape de la deuxième lecture et renvoyé au comité, comme je le crois nécessaire, bon nombre de ces questions devraient être examinées sérieusement par le comité avant qu'on aille plus loin.
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Monsieur le Président, je suis heureux de pouvoir prendre la parole sur le projet de loi , Loi modifiant le Code criminel (courses de rue) et la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition en conséquence.
Nous discutons d'une mesure législative très importante. C'est une question d'importance dans beaucoup de localités, aux quatre coins du pays. C'est important pour beaucoup de gens de ma circonscription, , qui ont connu personnellement les conséquences des courses de rue. Certains ont perdu des parents ou des proches à cause de telles courses.
Des décès survenus dans ma circonscription, sur le chemin Barnett et sur la rue Hastings, étaient directement attribuables aux courses de rue. En parcourant ma circonscription, il m'arrive trop souvent de voir, en bordure de la route, de ces petits monuments qui sont érigés après ce genre d'incident. Des hommages de ce genre se trouvent encore en bordure de ces deux routes pour nous rappeler les tragédies survenues et le décès de personnes aimées au sein de la collectivité. Ces décès ont affligé des familles, des amis et des collègues de travail.
Ces incidents ont aussi été la cause de beaucoup de blessures graves. Il arrive que les victimes innocentes de telles courses soient des passants, ou encore les chauffeurs ou les passagers d'autres véhicules. L'activité irresponsable qu'est la course de rue engendre tragédie sur tragédie.
Les courses de rue n'ont pas leur place dans nos collectivités. Elles constituent un danger pour ceux qui y participent et pour le public. Il faut examiner tous les aspects de ce problème. C'est une question importante à traiter pour accroître la sécurité dans les collectivités et pour améliorer la compréhension de la responsabilité publique, des engagements et des relations que nous avons les uns avec les autres et qui font de nos collectivités des endroits prospères et où il est possible de vivre en sécurité. Les courses de rue transgressent les ententes qui lient mutuellement les citoyens quant à leur mode de vie dans une collectivité.
Il faut se pencher sur tous les aspects des courses de rue. Au cours du débat des deux derniers jours à la Chambre, c'est un point à l'égard duquel le projet de loi a été critiqué. Certains se demandent si le projet de loi porte sur tous les aspects connus des courses de rue. Je vais lire la définition qu'en donne le projet de loi . La voici, telle qu'elle figure dans le projet de loi:
« course de rue » Épreuve de vitesse entre des véhicules à moteur dans une rue, un chemin ou une grande route ou tout autre lieu public.
Les députés s'interrogent sur les activités que comprend cette définition. Doit-il nécessairement s'agir d'une course où deux voitures ou plus sont côte à côte? Qu'en est-il des autres genres de courses de rue qui ont lieu dans les collectivités? J'aimerais connaître les expressions populaires appropriées pour décrire ces activités parce que je suis certain qu'il y a d'autres façons plus usuelles de le faire.
Dans certains cas, les gens font des courses chronométrées pour savoir combien de temps il faut pour se rendre à un endroit précis. Dans d'autres cas, les gens s'envoient un message par téléphone cellulaire ou un courriel pour se donner rendez-vous quelque part et le premier arrivé est déclaré gagnant. Il y a également d'autres variantes. La course de rue ne se limite pas uniquement, comme nous pourrions le croire, à une course entre deux ou plusieurs véhicules côte à côte.
La définition qui figure dans le projet de loi s'applique-t-elle à toutes les situations, qui sont tout aussi dangereuses et qui causent tout autant de problèmes dans les collectivités que la course plus traditionnelle? Quelle est la portée de ce projet de loi? Compliquera-t-il, par exemple, la vie des organisateurs de rallyes automobiles? Pénalise-t-il les départs en trombe à un arrêt obligatoire quand une autre voiture se trouve juste à côté?
Quelle est exactement la portée de la définition et de quelle manière va-t-elle influer sur notre compréhension de cette activité criminelle? Il convient de régler certains problèmes associés à la définition et de préciser celle-ci pour que je puisse appuyer totalement le projet de loi.
Il n'y a pas que les jeunes qui s'adonnent à des courses de rue. Au cours de la dernière journée et demie, nous avons débattu de ce sujet et avons peut-être été prompts à accuser les jeunes d'être la source principale du problème.
Comme l'a mentionné l'intervenant précédent, les données démographiques englobent une vaste gamme de personnes qui s'adonnent à diverses formes de courses de rue et qui peuvent prendre part à cette activité dangereuse. Il s'agit de gens qui peuvent modifier leur voiture pour en augmenter la puissance au-delà de ce qui convient au poids du véhicule. Il existe des personnes qui gonflent le moteur de leur véhicule et se bricolent une voiture haute performance.
Certains conduisent des véhicules à très grande puissance pour affirmer leur statut social. Les voitures à grande puissance très coûteuses sont souvent perçues comme une indication du haut statut d'une personne dans la collectivité. La vitesse est parfois associée à ce statut aussi.
Je ne crois pas les jeunes soient les seuls à blâmer. Manifestement, ce ne sont pas eux qui achètent les voitures les plus chères et les plus rapides offertes sur le marché. Ils sont souvent ceux qui ne peuvent pas se le permettre. Ce n'est donc pas un problème de jeunes. C'est un problème qui touche tous les segments de la société.
Malheureusement, ce n'est pas non plus seulement une affaire d'hommes, comme l'ont prouvé certains des plus récents incidents. Il faut éviter d'imputer le problème à une montée d'hormones chez les jeunes hommes. C'est un argument qui a été utilisé à maintes reprises durant le débat. Le problème touche tous les groupes démographiques de la société.
J'aimerais aussi parler de l'argument selon lequel les courses de rue ne sont pas prévues dans le Code criminel. Je pense qu'elles le sont, très clairement. D'ailleurs, dans le discours qu'il a prononcé hier à l'ouverture du débat sur le projet de loi, le ministre a très clairement dit que le Code criminel offre des options et prévoit déjà des peines très graves pour les activités comme les courses de rue.
Je vais répéter les chefs d'accusation que le ministre a mentionnés dans son discours. Les infractions contenues dans le Code criminel sont la négligence criminelle causant la mort qui, comme l'a indiqué le ministre, est passible d'une peine maximale d'emprisonnement à perpétuité. Ce n'est pas une infraction mineure, c'est une infraction grave passible d'une peine très lourde.
Il y a aussi la conduite dangereuse causant la mort, qui est actuellement passible d'une peine maximale de 14 ans d'emprisonnement. C'est aussi une grave infraction passible d'une lourde peine. Ensuite, il y a la négligence criminelle causant des lésions corporelles, qui est passible d'une très lourde peine d'un maximum de 10 ans en prison. Il y a aussi la conduite dangereuse causant des lésions corporelles, qui est aussi passible d'une peine maximale de 10 ans d'emprisonnement. Et enfin, il y a l'infraction de conduite dangereuse, qui est passible d'une peine maximale de 5 ans d'emprisonnement et qui peut s'appliquer quand personne n'a été tué ou blessé.
Ce sont tous des chefs d'accusation très graves en réponse à des crimes très graves. Ils sont dans le Code criminel pour qu'on s'en serve. Si l'application de la loi est problématique, nous devons nous pencher sur les raisons pour lesquelles ces options ne sont pas utilisées. Pourquoi la police ne se sert-elle jamais de ces chefs d'accusation?
Parallèlement, si elle porte ces accusations contre des suspects et ces derniers ne sont pas condamnés, pourquoi ne le sont-ils pas? Cependant, je ne pense pas qu'il y ait des preuves en ce sens. En tout cas, je n'ai connaissance d'aucune preuve selon laquelle ces chefs d'accusation n'ont pas mené à des condamnations dans les cas très graves.
Il y a aussi toute la série d’interdictions de conduire que prescrit actuellement le Code criminel et qui font partie des options offertes aux tribunaux. Aux termes du Code criminel actuel, dans le cas d’une personne reconnue coupable d’une des cinq infractions que j’ai mentionnées tout à l’heure, le tribunal peut ordonner une période d’interdiction de conduire pouvant aller jusqu’à trois ans pour conduite dangereuse d’un véhicule à moteur, jusqu’à dix ans pour conduite dangereuse causant des lésions corporelles ou la mort et pour négligence criminelle causant des lésions corporelles. Dans le cas de négligence criminelle causant la mort, le tribunal peut ordonner une interdiction permanente de conduire. Voilà ce qu’a dit le dans son discours hier sur les dispositions actuelles du Code criminel.
En ce qui concerne les interdictions de conduire, le tribunal dispose d’options très sévères. Une interdiction d’une durée de trois ans ou de dix ans ou une interdiction à vie, ce n’est pas une peine légère pour celui qui est reconnu coupable d’une des cinq infractions.
Je ne pense pas qu’il y a un problème actuellement avec le Code criminel. De toute évidence, le Code criminel traite la conduite dangereuse d’un véhicule et la conduite dangereuse causant la mort ou des blessures comme une affaire grave qui mérite un châtiment très sévère. Je pense qu’à l’heure actuelle, il y a de bonnes possibilités dans la loi.
Je me demande donc pourquoi nous envisageons d’apporter ces modifications à la loi. Je pense que c'est relié à l’intérêt du Parti conservateur pour les peines minimales obligatoires et à sa volonté de lier les mains des tribunaux dans le cas de crimes particuliers. Je sais que les peines minimales obligatoires ne fonctionnent pas. Elles n’empêchent pas les crimes. Elles ne les préviennent pas. On pense rarement aux conséquences d’un acte criminel avant de le commettre. Cela ne fait pas partie du plan.
Tout cela ne sert qu’à mettre plus de gens en prison au Canada. Je m’inquiète des intentions du gouvernement à cet égard. On a déjà vu que le gouvernement entend augmenter le nombre des places derrière les barreaux. J’ignore l’effet que cela aura sur notre société, à long terme.
Nous savons bien qu’au bout du compte, emprisonner des gens ne règle pas les problèmes de criminalité auxquels fait face notre société. Cela ne les aide pas à se réinsérer dans la société et à apprendre à se comporter de façon positive dans nos collectivités. Je ne suis pas certain que ce soit une solution et que ce projet de loi règle le problème en proposant des peines plus sévères pour le crime en cause.
J'aimerais mentionner que les membres de la communauté religieuse d'Ottawa, entre autres, se réunissent ce soir, à l'Université St. Paul, pour discuter des condamnations avec sursis et des peines obligatoires. L'assemblée se tiendra à 19 heures. J'aimerais pouvoir y assister, mais je serai ici pour participer au débat sur le Darfour. Je crois que ces personnes soulèvent des questions très importantes que nous devrions également aborder dans le cadre de notre étude du projet de loi.
J'ajouterai que je ne crois pas que les juges prennent les infractions de conduite dangereuse à la légère. Au contraire, ils les prennent très au sérieux. Je ne crois pas qu'il y ait un seul juge dans tout le pays qui soit clément à l'égard de ce type de crimes, surtout lorsqu'il y a des morts ou des blessés. J'en suis même convaincu.
Bien entendu, les juges font des erreurs et, bien entendu, le système n'est pas parfait. Cependant, ceux qui affirment que le système est défaillant et qu'on fait preuve de clémence envers les criminels ont complètement tort. Les juges du Canada font de l'excellent travail, compte tenu de l'ampleur de la tâche et des moyens dont ils disposent.
Nous devons tenir compte des faits et des circonstances de chaque affaire et imposer des peines qui soient justes et proportionnelles. Les juges doivent être en mesure de prendre ce type de décisions et d'apprécier avec discernement les circonscontances de l'espèce. C'est justement ce qu'ils font.
Je ne veux rien faire qui puisse saper le pouvoir des juges dans notre système. Ils font un travail difficile, et ils le font bien. J'estime que, à l'heure actuelle, ils ont les ressources dont ils ont besoin pour faire le travail qu'on leur demande.
Par ailleurs, il existe d'autres moyens d'empêcher les courses de rue. Nous devrions prendre des mesures préventives. Je crois que le sujet a été abordé hier et plus tôt aujourd'hui.
On nous a dit que les corps policiers ont besoin de plus de ressources et de plus d'effectifs, qu'ils ont besoin de plus d'équipement afin de pouvoir se consacrer autant qu'ils le souhaitent à la lutte contre ce crime en particulier. Nous avons, bien sûr, entendu parler du service de la GRC à Richmond, qui a trouvé le moyen de couper des ressources ailleurs pour les réaffecter à la lutte contre les crimes de rue, lesquels constituent un gros problème dans cette collectivité. La police a donc trouvé le moyen de lutter contre la criminalité. Cela a exigé des compromis. La police a dû prendre des décisions difficiles lorsqu'il fallait choisir où couper des ressources, mais elle a néanmoins trouvé le moyen de le faire.
Nous devons faire en sorte que ce genre de décision soit plus facile à prendre et que nos corps policiers disposent des ressources nécessaires. Malheureusement, le projet de loi est muet à ce sujet.
Des exemples, on en trouve également à l'étranger. L'État de Victoria, en Australie, a adopté des mesures pour combattre le taux de mortalité élevé sur les autoroutes, mesures qui ont permis de le réduire de près du tiers sur une période de 15 à 20 ans. Cela représente une réduction importante du taux de mortalité sur les autoroutes australiennes dans l'État de Victoria.
L'une de ces mesures est une marge de tolérance de trois kilomètres-heure au-dessus de la limite de vitesse relativement à la délivrance de contraventions. Au Canada, nous présumons tous pouvoir dépasser de dix kilomètres-heure environ la limite de vitesse avant de risquer de se faire coller une contravention. Dans l'État de Victoria, en Australie, il est bien connu que la marge de tolérance n'est que de trois kilomètres-heure. J'ai pu constater que cette mesure a un effet sur la vitesse à laquelle les gens roulent sur les autoroutes là-bas. C'est un autre type de mesures qu'on devrait peut-être envisager, du moins à l'échelon provincial.
Selon mon expérience en Colombie-Britannique, les gens avaient ralenti sur les routes quand nous utilisions le radar photo. J'emprunte souvent la route Sea to Sky en Colombie-Britannique, qui est reconnue comme l'une des routes les plus dangereuses au Canada. Les gens ne conduisaient pas aussi vite sur cette route quand il y avait un radar photo, un point c'est tout. Quand on a cessé d'utiliser les radars photo, les gens ont recommencé à faire de la vitesse. Le radar photo joue un rôle important et je crois que c'est une mesure qu'il nous faudrait envisager.
L'éducation des conducteurs est une autre mesure. Il faudrait peut-être envisager des cours de conduite obligatoires dans toutes les administrations de manière à ce que les conducteurs soient sensibilisés aux courses de rue, entre autres, dans le cadre de leur formation de base.
Je crois aussi qu'il nous faut prévoir des limites applicables aux véhicules modifiés pour les courses. Nous devons nous assurer que les véhicules modifiés pour tout genre de course ne sont pas conduits sur les routes de nos collectivités.
Selon moi, nous devons aborder de façon générale toute la question de la culture de la vitesse dans notre société. Je crois que certaines de ces idées nous permettraient de nous attaquer sérieusement à la vitesse sur nos routes. Nous pouvons tous jouer un rôle.
J'estime toutefois qu'il faut s'arrêter sur d'autres questions en ce qui concerne la culture de la vitesse. Nous avons entendu parler à plusieurs reprises des annonceurs et des constructeurs automobiles qui vendent des voitures en mettant en valeur leur vitesse.
Nous connaissons tous le message publicitaire dans lequel un jeune garçon dit « vroum, vroum, vroum » pendant qu'une voiture file sur une route. Voilà comment on s'y prend, entre autres, pour donner l'impression que les véhicules sont conçus pour être conduits rapidement et qu'ils doivent être conduits ainsi et pour attirer les jeunes. Je crois que c'est dangereux. Des pressions devraient être exercées sur les annonceurs en ce qui concerne ce genre d'attrait dans les publicités.
Nous avons aussi vu les préoccupations des annonceurs en matière de responsabilité juridique. Quand des voitures sont conduites à grande vitesse dans les messages publicitaires à la télévision, on voit apparaître à l'écran un message indiquant qu'il s'agit d'un circuit fermé et qu'il peut y avoir des conséquences. À mon avis, on a identifié des questions de responsabilité dans ce cas. Les annonceurs tentent de dire que c'est quelque chose à faire dans un circuit fermé, alors que l'impression générale est tout autre.
J'estime également que nous devons exercer des pressions sur les fabricants de véhicules et d'automobiles. Comment se fait-il que les voitures peuvent se déplacer à des vitesses de 180 à 200 kilomètres à l'heure ou plus? Avons-nous l'occasion de conduire à une telle vitesse? C'est peut-être le cas pour les véhicules d'urgence mais, en général, ceux d'entre nous qui utilisent leur véhicule pour faire des courses, pour conduire les enfants à l'école ou pour aller à un rendez-vous n'ont pas du tout besoin d'un véhicule capable de se déplacer si vite. En modifiant les véhicules que nous conduisons, ce que les fabricants devraient être tout à fait capables de faire, nous pourrions peut-être améliorer la situation dans son ensemble.
Il faut également tenir compte de la culture populaire. Au cinéma, les poursuites en voiture sont omniprésentes. Également, certains jeux vidéo nous montrent des poursuites et des courses de rue très inquiétantes où, par exemple, le but consiste à obliger quelqu'un à céder la route et à prendre le fossé, ou pire encore. Il y a aussi, à mon avis, toute une culture du sport extrême, qui valorise le fait de prendre de grands risques.
Il nous faut nous pencher sur divers aspects de cette culture.
On peut avoir l'impression que ce projet de loi aidera à sensibiliser le public, mais je pense qu'il a également certains effets moins constructifs. Je n'ai pas à faire semblant que la mesure va régler le problème si j'estime que tel n'est pas le cas à certains égards. Le projet de loi me semble avoir une portée fort limitée et j'ai de la difficulté à voir comment il va vraiment avoir une incidence et un effet préventif sur les courses de rue au Canada.
Selon moi, notre objectif devrait être d'empêcher les courses de rue avant qu'elles n'aient lieu. Je crois qu'il existe déjà des peines graves pour les personnes condamnées pour conduite dangereuse et la course de rue fait partie de ce genre d'infraction. Les dispositions du Code criminel existent. Je doute cependant que la mesure législative ait des vertus éducatives. Également, il me semble que nous passons tout à fait à côté pour ce qui est de la prévention.
Ce débat m'intéresse. Je suis heureux de pouvoir y participer. J'ai écouté attentivement les interventions des autres députés et je compte bien participer aux prochaines étapes de l'étude de cette mesure législative.