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FINA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des finances


NUMÉRO 014 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 5 décembre 2007

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    La séance est ouverte.
    Je remercie les membres de leur présence cet après-midi. Nous accueillons un invité spécial, soit M. Mark Carney. Merci infiniment d'être parmi nous cet après-midi.
    Je signale que les caméramen doivent maintenant quitter la salle. Comme la réunion est télévisée, ils auront une source s'ils veulent obtenir des images. J'invite donc tous les caméramen à quitter la salle tout de suite.
    Très bien. Voilà que la salle s'est vidée à moitié.
    Nous vous souhaitons la bienvenue au comité. Nous espérons qu'aujourd'hui marquera le début d'une longue relation avec le comité et avec la Banque du Canada dans votre futur rôle. Nous avons hâte d'entendre vos propos et de pouvoir discuter avec vous de vos projets.
    Nous allons donc aborder directement la question en vous invitant à faire vos remarques liminaires.
    Tout d'abord, M. Dykstra voudrait poser une question.
    Merci, monsieur le président.
    M. Carney est déjà là, et je sais qu'il a hâte de faire sa déclaration liminaire. Pour ma part, je suis ravi de l'accueillir au comité, mais nous sommes là pour examiner sa nomination et, comme c'est le cas pour toute nomination faite par décret du conseil, le comité a le droit et le privilège de convoquer la personne nommée afin de lui poser des questions.
    Je pensais donc que ce serait peut-être utile que vous ou la greffière nous rappelle les règles d'engagement en ce qui concerne le Règlement ou les paramètres régissant à la fois son exposé et les questions qui suivront.
    Nous allons faire cela très rapidement. Je n'ai pas l'intention d'examiner la question en détail. Le principe qu'on applique aujourd'hui est le même que pour une entrevue qu'on mènerait auprès d'une personne qui a présenté une demande d'emploi. C'est ce principe-là que je compte appliquer en comité, et il convient donc de démontrer le même respect et de s'en tenir à ces mêmes règles.
    Les questions seront donc limitées en fonction de ces seules considérations, à moins que la greffière n'ait autre chose à ajouter à ce sujet. Ce sont les instructions qu'on m'a données, et qui se trouvent au paragraphe 110(1) du Règlement.
    Pourriez-vous nous donner quelques éclaircissements à ce sujet? Qu'est-ce que cela veut dire? Quelles questions ne seront pas admises?
    Je vais demander à la greffière de vous lire le texte du Règlement, ce qui permettra de tirer la situation au clair — très rapidement, cependant, parce que nous sommes en train de perdre du temps.
    Le paragraphe 110(1) du Règlement se lit ainsi:
Au plus tard cinq jours de séance après la publication dans la Gazette du Canada d'un décret annonçant la nomination d'une personne à un poste non judiciaire particulier, un ministre de la Couronne en dépose sur le Bureau une copie certifiée. Ledit décret est réputé avoir été déféré à un comité permanent particulier désigné au moment du dépôt, conformément à l'article 32(6) du Règlement, qui le prend en considération durant au plus trente jours de séance.
    Excusez-moi, monsieur le président, mais je n'ai rien entendu dans ce texte qui laisse supposer que les questions qu'on peut poser en vertu du Règlement sont sujette à certaines restrictions. Est-ce cela que vous nous dites?
    Attendez une seconde; je vais consulter la greffière.
    La greffière me fait savoir — et je suis d'accord avec elle — qu'en tant que président, il m'appartient de déterminer la portée générale des questions qui sont posées c'est-à-dire, en l'occurrence, la mesure dans laquelle les questions qui sont posées conviennent dans le contexte d'une entrevue d'emploi. Voilà le critère que je compte appliquer.
    Nous allons continuer. Monsieur Crête, à moins que ce ne soit un rappel au Règlement, je voudrais que nous poursuivions nos travaux.
    Vous avez la parole.

[Français]

    Monsieur le président, je pense qu'il n'y a pas de débat. Lorsqu'on lit la présentation de M. Carney, on se rend compte qu'elle porte sur le fond de la question. C'est un faux débat qu'on propose présentement. On a un mémoire qui contient beaucoup de détails sur les choses importantes. En autant qu'on pose des questions sur ce que M. Carney va nous présenter, je pense qu'on ne sera certainement pas à l'extérieur de la ligne.

[Traduction]

    Attaquons-nous donc à nos travaux.
    Monsieur Carney, vous avez la parole. Nous avons hâte d'entendre votre exposé liminaire.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Je suis effectivement très heureux de pouvoir discuter des questions de fond avec vous.
    Permettez-moi, tout d'abord, de vous dire combien j'apprécie la possibilité qui m'est donnée de rencontrer les membres du comité et de m'exprimer sur les enjeux stratégiques auxquels la Banque du Canada sera confrontée à moyen terme. Je me réjouis à la perspective des nombreux témoignages que j'aurai l'occasion de faire devant ce comité et le Comité sénatorial des banques et du commerce, puisque le gouverneur est appelé à se présenter périodiquement devant les parlementaires afin d'expliquer le point de vue de la Banque sur l'économie, la politique monétaire et le système financier.
    Je tiens, toutefois, à préciser, d'entrée de jeu, que je ne suis pas encore le gouverneur de la Banque du Canada. Aux termes de la Loi sur la Banque du Canada, le gouverneur actuel, David Dodge, demeure responsable de la politique monétaire mise en oeuvre au pays jusqu'à la fin de janvier. Depuis quelques années, les décisions relatives à la politique monétaire de la Banque sont prises par voie de consensus par le conseil de direction de la Banque. Je ne fais pas encore partie du conseil. C'est pourquoi, en répondant à vos questions aujourd'hui, je m'appliquerai à ne commenter ni la politique monétaire actuelle, ni les perspectives économiques, de façon à éviter de porter préjudice aux décisions à venir du conseil de direction. J'espère que l'ensemble de l'auditoire comprendra cette importante réserve.
    Compte tenu du poste que j'occupe actuellement, j'aimerais axer mes propos sur les principaux défis stratégiques auxquels la Banque devra faire face à moyen terme. Comme il est énoncé dans le préambule de la Loi sur la Banque du Canada, l'objectif de l'institution consiste « de façon générale, à favoriser la prospérité économique et financière du Canada ». Pour atteindre cet objectif, la Banque, premièrement, mène la politique monétaire de façon à maintenir l'inflation à un niveau bas, stable et prévisible; deuxièmement, veille à la fiabilité et à la solidité du système financier canadien; troisièmement, fait office d'agent financier du gouvernement du Canada afin de fournir des services de gestion financière efficients et efficaces; et, quatrièmement, émet des billets de banque de qualité aisément acceptés et dotés de caractéristiques anticontrefaçon. Sur ce dernier point, je me permets d'ajouter que la Banque accorde une très grande importance à cette activité et que nous collaborons étroitement avec nos partenaires des différentes organisations policières — notamment la GRC — et le secteur de la vente au détail pour faire échec au faux monnayage, grâce à une stratégie d'information et de communication sur les billets et d'observation de la loi. Ces efforts ont donné, et continueront de donner, de très bons résultats.
    Ayant brossé cette toile de fond, je vais maintenant aborder la question du travail que fait la Banque dans les domaines de la politique monétaire et du système financier.
(1540)

[Français]

    En ce qui concerne la politique monétaire, j'ai la chance d'hériter d'un cadre de conduite de la politique exceptionnellement fiable et solide. Au fil des ans, il est devenu évident que la meilleure contribution que la politique monétaire puisse apporter au bien-être économique et financier du pays consiste à garder l'inflation à un niveau bas, stable et prévisible. Autrement dit, la maîtrise de l'inflation n'est pas une fin en soi; c'est plutôt le moyen par lequel la politique monétaire peut le mieux contribuer au dynamisme de l'économie. Plus précisément, la Banque du Canada vise le maintien du taux d'accroissement annuel des prix à la consommation à 2 p. 100, soit le point médian d'une fourchette de maîtrise de l'inflation qui va de 1 à 3 p. 100. Ce faisant, la politique monétaire aide à faire en sorte que l'économie tourne à son plein potentiel et favorise une croissance économique soutenue.
    Le Canada a été extrêmement bien servi par son régime de cibles d'inflation, qui a été imité par de nombreux pays. Les résultats exemplaires obtenus par la Banque au chapitre de la maîtrise de l'inflation nous ont évité les effets destructeurs d'une inflation élevée observés dans les décennies antérieures. Ces effets ont touché particulièrement les Canadiens les plus pauvres et ont fait baisser notre production et augmenté notre chômage. Depuis l'adoption des cibles d'inflation, malgré tous les chocs que le Canada a subis, la production réelle au pays a crû à un taux moyen de 3 p. 100 par année et le taux de chômage est tombé à des niveaux qu'on n'avait pas vus depuis plus de trois décennies. Comme cela a été le cas dans les pays qui se sont dotés d'un régime de cibles d'inflation, le taux d'inflation et les taux d'intérêt ont généralement été plus bas et moins volatiles.
    L'adoption d'une cible explicite en matière d'inflation a été officialisée pour la première fois dans une entente conjointe conclue entre la Banque du Canada et le gouvernement du Canada en 1991. Étant donné le succès qu'elle a remporté au départ, l'entente a été reconduite à quatre reprises, moyennant de légères modifications, plus récemment jusqu'à la fin de 2011. Cette entente établit un objectif clair — la cible d'inflation — et fournit un cadre de responsabilité transparent pour la Banque du Canada. Cette dernière appuie ce cadre en communiquant de façon ouverte et fréquente avec les Canadiens et les Canadiennes. Si le taux d'inflation s'écarte de la cible, la Banque en expliquera les raisons et les mesures qu'elle prendra pour le ramener et précisera la durée prévue du processus. Il importe de souligner que la Banque suit une approche symétrique pour maîtriser l'inflation.

[Traduction]

    L'un des éléments clés de notre cadre de mise en oeuvre de la politique monétaire est le taux de change flottant. Grâce à lui, le Canada peut mener une politique monétaire indépendante, adaptée à sa conjoncture propre. Bien qu'il n'existe pas de cible en ce qui concerne le taux de change du dollar canadien, la Banque se préoccupe tout de même des facteurs à l'origine des variations de ce dernier et des effets qu'elles risquent d'avoir sur la production et l'inflation.
    Le taux de change est un prix relatif important au sein de notre économie. Ses mouvements influent sur le niveau des importations et des exportations, ce qui aide à équilibrer l'offre et la demande globales. Qui plus est, ces variations du taux de change sont un signal qu'il convient de déplacer des ressources vers des secteurs où la demande est plus élevée. Un taux de change flottant facilite ce processus et contribue à réduire au minimum les ajustements dans d'autres secteurs de l'économie.
    Le défi qui se pose pour la Banque est de comprendre les facteurs qui expliquent les variations de la monnaie, d'en tenir compte dans les évaluations qu'elle fait d'autres données, et d'orienter la politique monétaire de telle sorte qu'elle aide à maintenir la demande et l'offre globales en équilibre, et l'inflation au taux cible. Cela signifie que la Banque doit porter un jugement sur les causes et la persistance probable des mouvements du taux de change, la vitesse et le degré de transmission de ces mouvements aux prix intérieurs et leur incidence possible sur la confiance et, sous l'influence de celle-ci, sur la consommation et l'investissement.
    Il est vrai que les mouvements du taux de change peuvent être, et ont été, passablement volatiles. Dans ces conditions, il n'est pas surprenant que certaines personnes demandent au Canada d'arrimer sa monnaie au dollar américain. À mon avis, ce serait une erreur. Cela supposerait que le Canada adopterait de fait la politique monétaire américaine, même si les structures de nos économies sont très différentes et que, par conséquent, elles nécessitent souvent différents types d'ajustements en réponse à des changements sur la scène internationale.
    Les ajustements étant inévitables, la question est simplement de savoir comment s'adapter aux forces économiques mondiales. Avec un taux de change fixe, les ajustements devraient être opérés par des variations de la production globale et de l'ensemble des salaires et des prix. L'expérience passée montre que ces ajustements sont plus longs et plus difficiles que les ajustements de taux de change. Mais, là encore, je tiens à souligner que ce point de vue ne signifie pas que la Banque ne se soucie pas des mouvements du taux de change.
    Un autre aspect important de notre cadre de conduite de la politique monétaire est la nécessité d'avoir une vision prospective, en raison des décalages entre les mesures prises et leurs effets sur l'économie. Une telle perspective est en effet essentielle au succès du régime de cibles d'inflation. L'entente conjointe entre le gouvernement du Canada et la Banque à l'égard de la cible d'inflation a aidé à arrimer les attentes d'inflation près de 2 p. 100.
    Plus fondamentalement, la gestion efficace de la politique monétaire par mes prédécesseurs a mené un processus qui a la capacité de se renforcer lui-même: une crédibilité accrue en matière de politique ancre davantage les attentes d'inflation, ce qui contribue à une plus grande stabilité de l'environnement macroéconomique, laquelle améliore à son tour la crédibilité de la politique. Nous ne devrions pas sous-estimer la valeur de ces gains durement acquis, et je n'ai aucunement l'intention d'y renoncer.
    Des attentes d'inflation bien arrimées aident à atténuer les variations des taux d'intérêt, à abaisser le coût des emprunts pour les Canadiens, à rendre le coût du capital plus stable et plus concurrentiel pour nos entreprises et, au bout du compte, à favoriser une croissance plus durable de la production et de l'emploi.
    Malgré les succès qu'elle a remportés, la Banque a l'obligation envers les Canadiens d'évaluer continuellement les possibilités d'amélioration du cadre de conduite de la politique. Elle a donc lancé un programme de recherche concerté ayant pour but de déterminer si ce cadre pouvait être amélioré et de quelle façon. Le programme porte essentiellement sur les avantages et les inconvénients que pourrait présenter l'adoption d'une cible d'inflation inférieure, la poursuite d'une cible basée sur le niveau des prix plutôt que sur l'inflation et les défis que présente la communication de ces changements éventuels à la population.
    La Banque mènera cette recherche et en publiera les résultats de manière transparente, afin d'encourager le débat et la formulation de suggestions. Je dirais également que des résultats favorables à un changement devraient être très convaincants pour que nous voulions modifier un régime qui connaît manifestement beaucoup de succès depuis 15 ans.
    Au cours des prochaines années, quatre tendances fondamentales mettront à l'épreuve la conduite de la politique monétaire. Il est difficile de prévoir avec précision la rapidité de leur évolution, mais il est impossible de ne pas tenir compte de leur influence. Ces tendances sont:
    Premièrement, la mondialisation des marchés des biens et des capitaux et, de plus en plus — du fait de l'impartition et des technologies — de ceux du travail.
    Deuxièmement, la correction des déséquilibres mondiaux, qui nécessitent un raffermissement de la demande intérieure dans les pays qui ont de gros excédents courants et le passage à un régime de change flottant dans les pays ayant une importance systématique qui gèrent activement leur taux de change en ce moment. Comme la Banque l'a dit à maintes reprises, ce processus risque de se dérouler de manière désordonnée.
    Troisièmement, le rythme et l'orientation de l'innovation et de l'intégration financières, qui ont d'importantes implications pour le degré d'intermédiation financière, le niveau des taux d'intérêt nominaux et réels ainsi que les mécanismes de transmission de la politique monétaire.
(1545)
    Et, quatrièmement, la trajectoire de la croissance de la production potentielle au Canada, qui reflète l'équilibre entre de profonds changements démographiques et l'évolution de la productivité au Canada.
    Ces tendances économiques et financières sous-jacentes rendent la poursuite de notre cible d'inflation plus ardue, non seulement parce qu'il est probable qu'aucune ne progressera à un rythme constant et prévisible, mais aussi parce qu'elles sont toutes liées les unes aux autres. Par exemple, les déséquilibres mondiaux, l'intégration financière et des taux d'intérêt nominaux historiquement faibles peuvent tous s'expliquer en partie par le phénomène bien connu de l'intégration mondiale qui se produit actuellement à une échelle sans précédent.
    La Banque doit mieux comprendre ces forces afin de s'acquitter efficacement de ses responsabilités. Elle doit aussi continuer de communiquer son point de vue sur ces grandes tendances pour que les particuliers, les entreprises et les administrations publiques du Canada disposent de toute l'information qu'il leur faut quand vient le temps de prendre des décisions en matière d'épargne et d'investissement.
(1550)

[Français]

    La vigueur de notre système financier aidera à déterminer l'incidence finale de ces tendances, puisque chacune peut en soi influer sur la volatilité des prix des actifs et la stabilité de la croissance et de l'emploi. Les systèmes financiers robustes et résilients absorbent les chocs, permettent d'affecter les ressources avec efficience et contribuent à améliorer l'efficacité de la politique monétaire. Par contre, ceux qui sont faibles risquent d'amplifier les répercussions des chocs sur l'activité macroéconomique et de diminuer l'efficacité de la politique monétaire. Par conséquent, la Banque du Canada doit jouer un rôle fondamental de promotion de la fiabilité et de la stabilité du système financier canadien.
    Le rôle joué par la Banque à l'égard de la stabilité financière est au coeur du mandat qui lui est conféré par la loi, à savoir favoriser la prospérité économique et financière du Canada. Avant de terminer, j'aimerais vous faire part de cinq brèves observations à ce sujet.
    Premièrement, en tant que banque centrale du pays, nous sommes chargés par la loi de la surveillance générale des systèmes de compensation et de règlement d'importance systémique en vue d'en assurer la fiabilité et la solidité.
    Deuxièmement, nous remplissons un rôle de premier plan dans la fourniture de liquidités pour faciliter le règlement des transactions financières. Traditionnellement, la Banque procédait à des opérations de prise en pension sur le marché pour les titres de dette du gouvernement canadien seulement, et accordait des liquidités en vertu de son mécanisme permanent d'octroi des liquidités en contrepartie de garanties de grande qualité, afin de maintenir le taux de financement à un jour près de la cible visée. Toutefois, compte tenu des événements récents, il y a lieu de se questionner sur le rôle approprié des banques centrales dans l'injection de liquidités sur les marchés monétaires. Comme l'a fait remarquer mon collègue Pierre Duguay le mois passé, la Banque se demande en ce moment s'il ne conviendrait pas mieux, pour réagir à certaines défaillances du marché, que la banque centrale instaure un mécanisme d'octroi de liquidités à une échéance de plus d'un jour, contre des garanties pouvant appartenir à une gamme élargie de titres.

[Traduction]

    Troisièmement, la réaction à la turbulence récente sur les marchés financiers devrait confirmer que les acteurs du marché sont foncièrement responsables de leurs actes. Par exemple, il faut que les investisseurs comprennent la dynamique des prix et les risques de liquidité liés aux produits qu'ils achètent, plutôt que de se fier uniquement aux agences de notation. Le marché entreprend de mettre en oeuvre bon nombre des changements qui s'imposent: les institutions améliorent leur gestion de la liquidité et pratiquent une meilleure discipline en matière de crédit; et les initiateurs de prêts ainsi que les distributeurs de créances commencent à modifier leurs produits afin d'en uniformiser les modalités et d'harmoniser les incitations. Parallèlement, le marché doit absolument disposer d'informations exactes en temps opportun sur les risques sous-jacents pour pouvoir différencier les risques et les évaluer correctement. C'est pourquoi, comme le soulignait le gouverneur Dodge en septembre, il est crucial d'accroître la divulgation et la transparence.
    Quatrièmement, l'évolution mondiale récente a fait ressortir l'importance, pour les autorités canadiennes, de maintenir une étroite collaboration. La Banque travaillera encore de concert avec ses partenaires, dont le ministère des Finances, le Bureau du surintendant des institutions financières, la Société d'assurance-dépôts du Canada et les commissions provinciales des valeurs mobilières à promouvoir le fonctionnement sûr et efficace des composantes clés de notre système financier.
    Enfin, la Banque continuera de tirer parti de son appartenance à des organismes internationaux ainsi que de ses importantes capacités de recherche pour concourir à la sûreté, à la fiabilité et à l'efficience du système financier à l'échelle du globe. Par exemple, la Banque et le gouvernement du Canada se sont employés activement à promouvoir la réforme du Fonds monétaire international, notamment le renforcement de sa fonction de surveillance, ce qui peut contribuer de façon importante à la résolution des déséquilibres mondiaux et au développement d'un système financier international plus robuste. Dans le cadre des mesures prises à l'échelle internationale en réaction à la turbulence récente sur les marchés, la Banque participe aussi aux travaux du Forum sur la stabilité financière qui visent à examiner les propositions de modification des normes comptables et des dispositions réglementaires, et à déterminer dans quelle mesure une surveillance accrue pourrait améliorer la gestion des risques de crédit et de liquidités dans les institutions financières mondiales.
    Pour conclure, je tiens à vous dire que c'est un honneur et un privilège d'avoir été choisi pour servir les Canadiens et les Canadiennes en tant que huitième gouverneur de la Banque du Canada. Je me réjouis tout particulièrement à la perspective de diriger les employés talentueux et dévoués qui travaillent à la Banque pour relever les défis des années à venir. Je ferai de mon mieux pour être à la hauteur des normes très élevées établies par mes prédécesseurs. Je suis en outre persuadé que, grâce à mon expérience au sein des secteurs public et privé, je pourrai apporter une contribution utile au travail important qu'accomplit la Banque au nom de tous les Canadiens.
    Je vous remercie du temps que vous m'accordez aujourd'hui et je suis à votre entière disposition pour répondre à vos questions.
(1555)
    Merci beaucoup de votre présence. C'est un honneur et un privilège de vous accueillir parmi nous aujourd'hui.
    Nous ouvrons maintenant la période des questions, et M. McCallum est notre premier intervenant. Vous disposez de sept minutes.
    Monsieur Carney, bienvenue et félicitations.
    Mes collègues libéraux voudront vous poser des questions au sujet de la crise actuelle dans le secteur des prêts hypothécaires à risque, l'accord de Montréal et les fiducies de revenu mais, pour ma part, je voudrais me concentrer sur la politique monétaire, en commençant par les taux de change, c'est-à-dire à la fois le niveau et la volatilité de ces derniers.
    Comme vous le savez, pour les entreprises manufacturières, le taux de change très élevé à l'heure actuelle cause de très graves problèmes, mais je voudrais surtout parler de la volatilité des taux actuels parce que, quand le dollar augmente de 10 p. 100 et baisse de 10 p. 100 en l'espace de deux ou trois mois, on peut dire qu'il s'agit d'une volatilité assez extrême, voire même sans précédent. Je sais, pour avoir parlé aux responsables des différentes compagnies, que la volatilité des taux de change leur complique beaucoup les choses pour ce qui est de la planification, ce qui a pour résultat d'accroître le nombre d'entreprises qui réclament un système quelconque de taux de change fixe.
    Étant donné votre engagement fondamental vis-à-vis des cibles d'inflation — que j'accepte volontiers — la volatilité vous préoccupe-t-elle? Et, la Banque peut-elle ou devrait-elle prendre des mesures qui auraient pour effet de limiter ou de réduire cette volatilité, comparativement à ce que nous avons observé au cours des derniers mois?
    Merci beaucoup pour cette question. Elle est extrêmement importante, et il va sans dire qu'elle est tout à fait d'actualité.
    Il ne fait aucun doute que nous avons observé dernièrement une importante volatilité sur les marchés des changes, y compris en ce qui concerne le dollar canadien. Mais, il convient de se rappeler, comme vous le savez, que les marchés des changes, comme tous les marchés d'actifs, peuvent être volatiles et finir par aller trop loin, et il ne fait aucun doute que l'évolution des facteurs économiques fondamentaux ne suffit pas pour expliquer la volatilité du dollar canadien que nous avons récemment observée.
    Nous pouvons toujours discuter des causes potentielles de cette volatilité, si vous voulez — même si vous ne voudrez peut-être pas y consacrer le temps nécessaire — mais, au lieu de m'y attarder, je vais m'attaquer au fond de votre question, à savoir les mesures que la Banque peut prendre dans ce domaine.
    Premièrement, je vous dirais — et on ne le répétera jamais assez — l'expérience de la Banque et l'historique de la politique monétaire canadienne nous amènent à conclure que la meilleure contribution que la Banque puisse apporter au bien-être économique et financier du pays consiste à continuer à viser l'objectif principal, voire même unique, qu'elle s'est fixé, qui est d'en arriver à un taux d'inflation qui soit faible, stable et prévisible.
    Dans ce contexte, comme je l'ai indiqué dans mon exposé liminaire, le taux de change joue nécessairement un rôle important, et des mouvements du taux de change qui sont manifestement détachés ou différents des mouvements fondamentaux doivent être pris en compte dans le contexte de la conduite de la politique monétaire.
    Mais, comment en tenir compte? Eh bien, il faut examiner les raisons pour lesquelles le taux de change a pu évoluer; il nous faut réfléchir à ce qui explique la persistance des changements du taux de change. Il est évident que nous avons observé la montée en flèche et la chute très rapide de notre taux de change. Il convient donc de réfléchir aux conséquences de ces changements pour l'économie, et ce toujours dans le contexte de l'atteinte de notre objectif relatif au taux de change.
    Quelles mesures précises la Banque peut-elle prendre? Personnellement, je ne suis pas en faveur de l'arrimage du taux de change. Je ne suis pas favorable à l'idée d'une union monétaire. On peut toujours en discuter en détail par la suite, si les membres le souhaitent. Mais je pense que la Banque a grand avantage à communiquer ouvertement avec les Canadiens et avec le marché au sujet de l'incidence éventuelle de ces changements sur la production et, finalement, sur l'inflation, afin de leur donner le sentiment que la Banque assure une certaine stabilité, qui correspond, objectivement parlant, à sa fonction principale.
    Si vous voulez injecter plus de volatilité dans les marchés d'actifs — qu'on parle de taux d'intérêt, de taux de change ou d'actions — il suffit de faire croire que vous changez d'avis au sujet de vos objectifs. À mon avis, la Banque doit continuer à mettre l'accent sur la cible d'inflation, à expliquer ce qu'elle fait, à expliquer les conséquences potentielles du mouvement des taux de change et à différencier les raisons qui peuvent avoir causé ce mouvement car, à ce moment-là, le marché s'ajustera en conséquence.
    Je suis tout à fait d'accord avec vous en ce qui concerne les cibles d'inflation. Étant donné ces cibles, il me semble qu'un degré excessif de volatilité peut avoir des incidences négatives, surtout en ce qui concerne la planification des activités commerciales, etc. Donc, êtes-vous disposé à recourir à des instruments comme l'intervention proprement dite, à faire monter ou baisser le dollar en donnant certaines indications de votre orientation ou à prendre d'autres moyens qui permettraient d'améliorer la stabilité de notre monnaie, sans pour autant compromettre votre philosophie fondamentale, qui s'appuie sur le ciblage de l'inflation?
(1600)
    À la Banque du Canada — et je tiens à ce que ce soit clair — vous ne nous entendrez jamais parler d'intervention verbale ou de la possibilité de faire monter ou baisser la valeur de notre monnaie en nous exprimant sur notre orientation — encore une fois, nous tenons à respecter le cadre que nous avons établi.
    Vous avez parlé d'intervention. Comme vous le savez, et d'autres membres le savent certainement, la Banque n'intervient pas sur le marché des taux de change — et, plus précisément, sur le marché du taux de change du dollar canadien — depuis 1998, soit à l'époque de la crise en Asie. Cela ne veut pas dire que la Banque n'interviendra jamais sur les marchés des changes.
    Nous avons une politique claire, qui se trouve sur notre site Web, indiquant dans quels contextes le gouvernement — et la Banque, agissant au nom du gouvernement — pourrait décider d'intervenir sur les marchés des changes. Il s'agit de deux situations précises: premièrement, l'effondrement du marché lui-même — c'est-à-dire une mesure provisoire en cas de « gap », ou un manque de liquidités sur les marchés des changes… Ce qui est intéressant, c'est que nous en avons vu un exemple pendant l'été avec le dollar australien. Cela ne s'est pas produit dans le cas du dollar canadien. L'autre situation peut surgir si, de l'avis du gouverneur — ou plutôt, de l'avis de la Banque — un mouvement trop important a le potentiel de compromettre gravement les perspectives économiques du pays.
    Je voudrais faire une autre observation à ce sujet. La décision d'intervenir sur un marché est une décision prise conjointement. Une intervention suppose le recours au Compte du fonds des changes du gouvernement, qui appartient à la population canadienne, si bien que cette décision serait prise conjointement avec le ministre des Finances.
    Merci.
    Je dirais qu'il existe au Canada une sorte de mouvement cyclique, puisqu'à certains moments, on entend parler d'union monétaire, d'un taux de change fixe ou d'une monnaie commune pour toute l'Amérique du Nord. Ce genre de discussion tend à s'intensifier lorsque la valeur du dollar est extrêmement élevé ou extrêmement faible, ou encore lorsque notre monnaie devient très volatile.
    Je pense qu'il est juste de dire que les séparatistes au Québec ont toujours souhaité la formation d'une union monétaire, car il devient plus facile à ce moment-là de se séparer du reste du Canada. Mais, il y a également d'autres personnes très respectées qui recommandent la formation d'une union monétaire.
    Voilà donc la question que je voudrais vous poser très rapidement. Il me semble que l'Europe, ce n'est pas l'Amérique du Nord et la notion selon laquelle il pourrait exister une monnaie commune dans toute l'Amérique du Nord, qu'on appellerait l'« améro », me semble totalement ridicule. Je me demande si vous êtes d'accord à ce sujet ou non.
    C'est une question d'envergure, et je vous remercie de la reposer.
    Très rapidement, je suis d'accord avec vous, et j'aimerais bien pouvoir vous expliquer les raisons pour lesquelles je suis d'accord, mais pour gagner du temps, je vais céder la parole au président.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Crête. Vous disposez de sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Carney.
    Je vous remercie pour votre présentation substantielle. Je pense que certains ministres auraient intérêt à imiter la façon dont vous avez fait votre présentation. Cela ne veut toutefois pas dire qu'on soit d'accord sur tout ce que vous avez dit.
    Dans votre texte, par exemple, vous dites que: 
Le rôle joué par la Banque à l'égard de la stabilité financière est au coeur du mandat qui lui est conféré par la loi, à savoir favoriser la prospérité économique et financière du Canada.
    Dans la réalité actuelle du Canada, avec la poussée des prix de l'énergie, il y a en quelque sorte — vous ne le diriez peut-être pas comme cela — deux économies au Canada: celle de l'Ouest, qui a des poussées inflationnistes importantes, et une autre au centre, soit le Québec et l'Ontario, qui se trouve dans une situation complètement différente.
    Y a-t-il d'autres mécanismes qui doivent être développés pour pouvoir tenir compte de ces deux éléments qui peuvent sembler contradictoires?
    Merci pour votre question.
    Si j'ai bien compris, vous parlez d'une économie à deux vitesses, soit une économie manufacturière et une économie énergétique, en quelque sorte. Il est absolument fondamental ou primordial que la Banque du Canada gère la politique monétaire pour l'ensemble de l'économie canadienne. Pour ce faire, elle suit de très près les différents secteurs de notre économie. Je connais bien les problèmes du secteur manufacturier, surtout ceux du secteur forestier du Canada. Je connais des PDG et des ouvriers de certaines sociétés. Je viens, d'ailleurs, de rencontrer des représentants d'ouvriers de sociétés forestières.
    Nous visons les détails, mais nous gérons globalement, si je puis dire, les deux économies.
(1605)
    C'est bien. J'aimerais revenir à la question de la volatilité, parce que les entreprises nous disent qu'il est très difficile de prévoir quelle sera la valeur du dollar, lorsqu'on a des contrats à signer. J'ai déjà demandé à votre prédécesseur, lorsque le dollar valait 85 ¢, à partir de quand il devient plus coûteux de gérer la volatilité, quand on a une devise canadienne indépendante.
    J'aimerais plutôt que vous me disiez quels sont pour vous les éléments de la volatilité qu'il faut considérer de façon particulière pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'effets négatifs sur l'économie.
    Je voudrais répéter une chose importante. La récente volatilité du dollar canadien ne peut s'expliquer uniquement par des facteurs fondamentaux. C'est évident, comme je l'ai dit dans ma réponse à M. McCallum. La meilleure chose que la Banque du Canada puisse faire est de gérer le taux d'inflation et tâcher de faire en sorte qu'il soit bas, stable et prévisible. Tâcher d'atteindre cet objectif est la chose la plus utile que la Banque du Canada puisse faire pour réduire cette volatilité. Comme je viens de le dire lors de ma réponse à la dernière question, il est important que la Banque du Canada continue à bien communiquer et à faire comprendre cet aspect et son objectif de stabilité.
    C'est bien, mais de quelle façon cela pourrait-il se faire? Si plus de gens au Canada comprenaient toutes les nuances, peut-être qu'on obtiendrait, en effet, des résultats plus intéressants, pour que tous les facteurs s'ajustent de façon plus nuancée. Comment peut-on y arriver?
    C'est une excellente question. Tout d'abord, il faut participer à des réunions comme celle-ci, avoir des discussions avec des députés et des citoyens canadiens. C'est une des responsabilités du gouverneur de la Banque du Canada. Il lui incombe d'expliquer, dans un sens, aux Canadiens notre cadre de maîtrise de l'inflation. C'est très important.
    Selon moi, il est important de savoir qu'il est difficile pour les gens de comprendre une politique trop complexe. Les personnes pensent à l'inflation un jour, mais n'y pensent pas le lendemain. Ils y pensent au cours d'une année, mais pas lors de la suivante. Notre politique est simple: nous visons un taux d'inflation bas, stable et prévisible de 2 p. 100 année après année. Je parle de l'indice global des prix à la consommation. Il est important d'avoir une politique simple, claire, efficace. Tout indique que depuis 15 ans, notre politique atteint ces objectifs.
    J'ai une dernière question. Dans votre mandat, pensez-vous devoir vous préoccuper de la possibilité que le Canada ait à faire face à quelque chose qui ressemblerait au syndrome hollandais? Vous savez ce qu'est le syndrome hollandais: c'est lorsqu'une industrie qui est survoltée par le secteur énergétique a des effets négatifs. Selon vous, lors de votre mandat, cette question sera-t-elle un élément important, crucial ou non, pour les prochaines années au Canada?
    Il y a plusieurs choses. Tout d'abord, la Banque du Canada doit toujours penser à de telles questions ou possibilités. Il n'en demeure pas moins un élément fondamental: notre économie est très diversifiée. Ce n'est pas suffisant de dire qu'il y a un secteur énergétique, un secteur forestier, et c'est tout. Notre économie est très diversifiée, le secteur des services est fort important. Nous y avons connu de grands succès au cours des dernières années. On y trouve aussi beaucoup d'emplois dont les salaires sont plus élevés que la moyenne. Selon moi, c'est un des aspects de la conduite de la politique monétaire, mais en même temps, notre économie est très diversifiée, et ce fait est plus important.
(1610)

[Traduction]

    Merci beaucoup. La parole est maintenant à M. Menzies et à M. Dykstra, qui disposent de sept minutes.
    Je crois savoir que vous allez partager votre temps de parole, monsieur Menzies. Vous avez la parole.
    En effet.
    Merci, monsieur le président et merci, monsieur Carney, de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Je suis très encouragé de vous entendre dire que le comité a effectivement un rôle à jouer, que ce rôle consiste simplement à donner des conseils ou encore à soulever des questions. C'est bon à savoir.
    Premièrement, je tiens à vous féliciter pour votre nomination. Nous vous souhaitons bonne chance en tant que décideur futur qui devra établir la politique monétaire du Canada et, à cet égard, je vous demande de transmettre les remerciements du comité à la personne que vous allez remplacer, David Dodge. C'est un travail exigeant, et nous tenons à le remercier pour le leadership dont il a fait preuve dans l'exercice de ses fonctions.
    Une voix: Bravo, bravo!
    M. Ted Menzies: Nous sommes tous parfaitement au courant — en fait, le comité a passé pas mal de temps ces dernières semaines à parler aux représentants de différents organismes de toutes les régions du Canada — de l'incidence de la valeur du dollar canadien par rapport à celle du dollar américain. De nombreux pays connaissent un phénomène de turbulence sur leurs marchés financiers. Nous avons été témoins du resserrement du crédit aux États-Unis en raison des problèmes liés aux prêts hypothécaires à risque.
    J'aimerais connaître votre opinion, en tant que titulaire de votre poste actuel — et je comprends que vous nous parlez aujourd'hui en tant que conseiller auprès du gouverneur — sur ce que sera le rôle de la Banque du Canada à l'avenir dans ce domaine, si vous êtes en mesure de nous l'expliquer. Nous nous rendons compte que la proposition de Montréal est utile, mais que faut-il faire maintenant? Vous parlez d'une plus vaste gamme de valeurs mobilières qui peuvent être utiles dans ce contexte; pourriez-vous donc nous en parler un peu plus?
    Merci pour cette question. C'est, d'ailleurs, l'un des messages que je tiens à transmettre au comité aujourd'hui, car ce sont des questions d'actualité très importantes, et je pense que cela continuera d'être le cas au cours de la première année de mon mandat, et sans doute après la fin de mon mandat à la Banque du Canada. Donc, ce n'est pas uniquement une question d'actualité; ce sont des questions de plus grande envergure.
    Je me permets, donc, de répéter que la Banque joue un rôle tout à fait fondamental dans le domaine de la stabilité financière. La stabilité financière et la politique monétaire sont étroitement liés l'une à l'autre.
    Premièrement, nous devons nous assurer de fournir les liquidités nécessaires. Nous établissons un taux cible du financement à un jour. Comme vous le savez tous, il a été changé hier, et nous voulons que le taux réel sur les marchés de fonds à un jour soit le taux du financement à un jour. Donc, nous assurons par moments — ce qui semble logique — les liquidités nécessaires sur le marché du financement à un jour, si besoin est, afin de nous assurer que, en moyenne, le taux du financement à un jour atteindra le taux cible. Nous avons fait cela récemment, et je dirais que nous l'avons même fait fréquemment depuis le mois d'août. C'est une pratique courante chez d'autres banques centrales du monde à cette période de stress sur les marchés financiers.
    Mais, la question est de savoir ce qui arrive entre le taux du financement à un jour et les taux trois mois plus tard. Au Canada, il y a généralement une courbe de rendement assez raide entre le taux du financement à un jour et le taux trois mois plus tard, étant donné que les taux de trois mois sont importants pour les institutions financières.
    Les courbes aux États-Unis, en Europe et au Royaume-Uni sont beaucoup plus raides qu'elles ne le sont au Canada. Donc, si nous rencontrons une difficulté, c'est parce qu'il existe une difficulté ailleurs. Et la question est de savoir — c'est pour cette raison que j'ai parlé tout à l'heure d'instruments — ce que la Banque peut faire ou ce que la Banque devrait faire éventuellement afin de s'assurer de liquidités suffisantes par la suite, afin que les changements du taux du financement à un jour soient transmis sur toute la courbe.
    Je voudrais faire un commentaire en parallèle, si vous me permettez — et c'est une simple observation — à savoir que le changement du taux de financement à un jour hier a donné lieu à une baisse de la courbe. Donc, même si la courbe est encore assez raide, au moins elle évolue de pair avec le taux du financement à un jour.
    Voilà donc certains des éléments dont nous tenons compte pour ce qui est d'assurer des liquidités suffisantes à court terme. Cette question est tout à fait d'actualité. On en discute à l'heure actuelle, et vous pouvez vous-même vous rendre compte que c'est un sujet de discussion permanent aux États-Unis et en Europe, qui disposent d'une plus grande marge de manoeuvre, en ce qui concerne l'écart entre le taux du financement à un jour et le taux de trois mois, que nous, à la Banque du Canada.
    Très rapidement, les autres mesures que nous devons prendre… Selon moi, il nous faut surveiller en permanence la situation, non seulement dans une optique macroéconomique, mais pour en faire profiter également les institutions individuelles, et c'est là qu'intervient notre collaboration avec le BSIF, le ministère des Finances et la SADC, afin de nous assurer que tout le monde est tout à fait au courant de la situation. Je répète, pour la gouverne des membres du comité, que la Banque doit constituer un prêteur de dernier recours auprès des institutions sous réglementation fédérale, et que nous travaillions activement, à l'échelle internationale, pour influencer davantage les réformes plus générales qui sont envisagées par l'entremise du Forum sur la stabilité financière.
    J'insiste aussi sur un dernier point — et je ne voudrais pas qu'il persiste le moindre doute à ce sujet — à savoir qu'il existe un principe fondamental dans ce contexte: pour notre part, nous essayons de nous assurer que les problèmes actuels du système financier ne se propagent pas au sein de l'économie générale. Mais, comme il existe aussi un principe selon lequel les participants aux marchés doivent supporter les conséquences de leurs actes, il convient d'établir le bon équilibre entre ces deux principes très importants.
(1615)
    Mon temps de parole est-il presque écoulé?
    Il vous reste le temps de poser une dernière petite question, si vous le voulez.
    Je sais que le ministre Flaherty a récemment participé à une réunion du FMI. Pourriez-vous nous décrire les liens qui existent entre la Banque et le FMI?
    Oui, très rapidement, nous avons essayé — c'est-à-dire, la Banque, le gouverneur Dodge et le gouvernement du Canada — d'insuffler une nouvelle vitalité au FMI. Il y a deux façons d'y parvenir. Je vous ai parlé de surveillance. Sans vous imposer une longue explication de tous les détails de la surveillance, je précise que, ce qui compte, c'est que le FMI, en évaluant les économies, soit beaucoup plus franc et direct dans son évaluation de ces économies, des politiques qu'appliquent ces dernières et de l'incidence de ces mêmes politiques sur d'autres économies. On peut songer aux économies asiatiques qui ciblent leur taux de change et qui exécutent éventuellement une politique économique axée sur les exportations, laquelle politique a des conséquences pour le monde entier en ce qui concerne la répartition des changements concernant les taux de change et les taux d'intérêt. Le FMI doit donc être plus franc et plus direct et servir de tribune aux décideurs qui pourront ainsi parler plus franchement autour d'une table des mesures qui s'imposent pour en arriver à une solution coordonnée.
    Merci beaucoup.
    La parole est maintenant à M. Mulcair. Vous avez sept minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
     Je tiens d'abord à souhaiter la bienvenue à M. Carney et à le remercier d'avoir acquiescé à notre invitation, même si on aurait souhaité être suffisamment intéressants pour l'attirer lorsqu'il était à Londres. Mais on est contents de le voir aujourd'hui.
    Je tiens aussi à lui dire que j'ai lu, dans un des premiers articles qui ont été écrits à son sujet, qu'il était en train de suivre des cours de français.
     Alors, c'est chose faite. Bravo! Les réponses que vous avez fournies à mes collègues du Bloc québécois reflètent votre feuille de route en matière d'études: vous apprenez très vite et vos réponses étaient très bonnes.
    Ceci ne relève pas du tout de vous, mais il est regrettable que, dans toute l'histoire du Canada, il n'y ait jamais eu un gouverneur de la Banque du Canada qui soit francophone. Toutefois, vous parlez français, ce qui fait que, par définition, vous êtes francophone. Je vous félicite très sincèrement de la qualité du français que vous avez réussi à parler devant ce comité aujourd'hui.
    Je suis un peu comme mes collègues du Bloc québécois. Je suis un peu préoccupé par la déstabilisation de notre économie en ce moment, avec la surchauffe dans le domaine du pétrole. Je vais quand même commencer parce que j'ai l'impression, à voir le déroulement de la réunion, qu'on va avoir deux tours.

[Traduction]

    Je ne peux pas vous garantir que vous aurez un autre tour, mais je sais que nous aurons en tout quatre tours de questions.

[Français]

    Je vais quand même commencer en vous posant une question sur les fiducies de revenu.
    De votre poste antérieur, en tant qu'expert, vous avez participé à l'économie, et cela a eu une influence très importante. Notre formation politique, comme vous le savez, n'avait pas un préjugé favorable aux fiducies de revenu. Par contre, on n'aurait pas menti aux gens comme le gouvernement l'a fait.
    Voici ce que j'aimerais savoir. Selon vous, à la lumière de ce qu'on a vécu avec les fiducies de revenu, les théories de base qui ont sous-tendu votre recommandation se sont-elles avérées? Je vais prendre l'exemple concret de la Abu Dhabi National Energy Company, qui a acheté certaines fiducies de revenu, en l'occurence PrimeWest Energy Trust.
    Selon vous, ces nouvelles sociétés, qui sont maintenant gérées à l'extérieur du pays, contribuent-elles autant, en termes de fiscalité, à l'économie canadienne? C'était l'une des prémisses de base dans la décision à laquelle vous avez présidé.
(1620)
    D'abord, je vous remercie de m'avoir félicité pour mon français. C'est probablement trop tôt et je m'en excuse. Je vais continuer à travailler fort.
    Mais revenons à votre question. Quand la décision sur les fiducies de revenu a été prise par le gouvernement, j'étais, comme vous le savez, un haut fonctionnaire du ministère des Finances. Le rôle d'un haut fonctionnaire est de donner des conseils et de mettre en oeuvre les décisions. J'ai donc donné des conseils, bien sûr, et le gouvernement a pris une décision. Le Parlement a ensuite approuvé la décision du gouvernement. Pour moi, c'est assez simple. C'est le rôle d'un haut fonctionnaire.
    Je voudrais que ça reste ainsi parce que je serai le prochain gouverneur de la Banque du Canada, et ce n'est pas le rôle du gouverneur de la Banque du Canada de faire des commentaires sur chaque initiative approuvée.
    Je veux rassurer M. Carney. Je ne suis pas en train de lui demander de faire un commentaire sur le bien-fondé ou l'opportunité. Il est ici pour nous parler comme personne ayant une certaine vision basée sur sa formation et sur son expérience, et on veut lui confier un des outils les plus importants de notre économie pour les sept prochaines années.
    Je prends un cas concret: les fiducies de revenu. Il a soutenu une thèse voulant que les fiducies de revenu provoquent une fuite fiscale et qu'il faille colmater la brèche.
    À la lumière de l'expérience vécue depuis, cette théorie s'est-elle avérée juste, ou si on s'est rendu compte qu'avec les sociétés étrangères qui sont en train de prendre le contrôle de ces fiducies de revenu, le portrait fiscal ne s'est guère amélioré? C'est une question objective que je lui pose, et non une question subjective visant à connaître son opinion.
    Il y a plusieurs raisons pour lesquelles le gouvernement a pris cette décision, notamment les tax leakages, les questions relatives à la productivité et le principe d'un système d'impôt neutre entre les secteurs, les sociétés et les régions. C'est une question générale que je peux commenter en tant que prochain gouverneur.
    D'après nous, à cause de la concurrence internationale et du niveau de notre devise, il est très important que notre économie puisse s'ajuster. Il est donc utile que les marchés de main-d'oeuvre soient souples, que le libre-échange existe entre les provinces et que notre système d'impôt soit aussi neutre que possible.
    Mon temps est-il écoulé?

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. McKay. Vous disposez de cinq minutes pour ce tour de questions.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Carney, merci infiniment de votre présence. Je tiens à vous féliciter, personnellement, pour votre nomination.
    M. Menzies m'a déjà devancé jusqu'à un certain point en posant un certain nombre de questions concernant le papier commercial adossé à des actifs, et je sais que vous avez participé à toutes ces discussions qui se sont déroulées à Montréal. À la page 5, vous faites allusion à votre collègue, Pierre Duguay, en évoquant la possibilité d'un mécanisme d'octroi de liquidités à une échéance de plus d'un jour, et sur ce point, vous avez déjà répondu en partie, en réponse à la question de M. Menzies. S'il s'agit effectivement d'un changement, est-ce un changement d'ordre stratégique, réglementaire ou législatif? Voilà donc ma première question.
    Ma deuxième question est celle-ci: si vous optez pour cette solution, en réalité, s'agit-il pour la Banque du Canada de venir en aide à une institution qui a pris de mauvaises décisions financières, étant donné que vous modifierez votre politique monétaire en réponse à la turbulence observée sur le marché?
    Pour ce qui est de ma troisième question, je voudrais que vous me disiez si la turbulence observée sur le marché a suscité en partie la réduction des taux d'intérêt, et êtes-vous d'accord avec la déclaration faite par Doug Pottier de Nesbitt Burns? Il a dit ceci: « Je pense que cela a été provoqué par la turbulence qu'on observe depuis un moment sur les marchés financiers et le risque très réel que cette turbulence se transforme en événement macroéconomique. » Êtes-vous d'accord avec cette déclaration?
    Et ma quatrième question…
(1625)
    Vous en étiez déjà à votre quatrième question.
    Vous savez, quand on ne dispose que de cinq minutes, on est bien obligé de poser un maximum de questions en peu de temps.
    Ma quatrième question porte sur les autres organismes de réglementation qui participent à ce genre de décisions. À votre avis, notre système de réglementation est-il suffisamment solide pour relever le défi que présentent les risques liés au papier commercial adossé à des actifs?
    Merci pour ces questions.
    La question que vous soulevez — c'est-à-dire le nouveau mécanisme ou un éventuel changement de politique ou de réglementation — en est une que nous examinons à l'heure actuelle. Dans le cadre de cet examen, nous devrons nous faire une idée de la nécessité ou non de modifier la Loi afin d'y donner suite.
    Pour la gouverne des membres — et certains d'entre vous le savent peut-être déjà — la Banque du Canada détient de très larges pouvoirs en vertu du paragraphe 18g) de la Loi sur la Banque du Canada, et il est prévu que ces pouvoirs s'exercent dans une situation de grave perturbation financière, et cela suppose une déclaration dans ce sens. On peut faire la déclaration après coup, mais il faut bien une déclaration officielle qui est publiée dans la Gazette du Canada par le gouverneur.
    Donc, la Banque détient des pouvoirs assez larges, et ce que nous envisageons ne tomberait pas dans cette catégorie-là, puisqu'il s'agirait… disons que ce serait un véhicule employé, non pas quotidiennement, mais de façon plus régulière. On peut dire qu'il s'agirait d'un mécanisme potentiellement semblable à l'escompte officiel de la Federal Reserve, qui a récemment été employé.
    Ensuite, il s'agit de se dire: des modifications législatives sont-elles nécessaires? Si elles le sont — il va sans dire que notre position à ce sujet sera conservatrice — il nous faudrait revenir afin d'expliquer cela au comité et à la Chambre.
    Il y a quatre autres questions…
    Avant que vous ne passiez à autre chose — de toute façon, il est improbable que vous puissiez répondre à toutes ces questions — je voudrais soulever la question de ce qu'est une grave crise financière… j'ai oublié la formulation exacte. Est-il nécessaire que la Banque fasse une déclaration en ce sens pour activer les garanties qui accompagnent le papier commercial adossé à des actifs? Dans ce contexte, une série progressive de garanties s'applique.
    Non. Vous abordez une question très technique concernant la perturbation du marché général, qui est un terme employé par les avocats qui se spécialisent dans la conclusion d'accords de liquidités pour le papier commercial adossé à des actifs, et là, la gamme est très large. Mais, ce dont nous parlons n'a rien à voir avec cela.
    Sur votre question concernant la possibilité que la Banque vienne en aide aux institutions financières, je tiens à répéter ce que j'ai dit tout à l'heure. Il est critique que les participants aux marchés financiers subissent les conséquences de leurs décisions et, par rapport à cet aspect-là, un équilibre s'impose. Nous devons nous assurer, en cherchant à donner une dure leçon à ces participants, que les conséquences des difficultés rencontrées sur les marchés financiers ne doivent pas être subies par l'ensemble de la population canadienne.
    Le système de réglementation actuel est-il à la hauteur de la situation? C'est un point très important. Comme je l'ai dit dans mon exposé liminaire — et cela me semble fondamental — l'un des avantages du régime canadien est le degré de collaboration qui existe entre les institutions centrales, soit le BSIF, la Banque du Canada, le ministère des Finances, la SADC et, surtout, les commissions provinciales des valeurs immobilières.
    Certains de ces éléments sont régis par la loi, mais cela concerne surtout la pratique voulant que les gens se rassemblent pour parler des enjeux, se réunissent régulièrement et travaillent de manière coopérative. Nous avons besoin de cela, ou du moins, nous en aurons peut-être besoin dans les mois qui viennent.
(1630)
    Merci beaucoup.
    Monsieur St-Cyr, vous avez cinq minutes.

[Français]

    Merci, monsieur le président et monsieur Carney.
    Je voulais poursuivre sur la question de la volatilité du taux de change, la hausse du dollar canadien dans son ensemble, parce que cela a des répercussions importantes — tout le monde en convient — sur l'industrie manufacturière, mais également sur l'industrie agricole et plusieurs autres. Cela a également des impacts importants sur l'industrie touristique.
    Si j'ai bien compris, pour vous, l'essentiel de l'action de la Banque du Canada devrait être de continuer de maintenir le cap sur la lutte contre l'inflation. Donc, j'en conclus que le problème devrait se régler de lui-même. Pourtant, d'autres banques dans le monde réussissent assez bien. Elles interviennent sur les taux de change en utilisant les taux d'intérêt et leurs réserves monétaires en achetant ou en vendant des devises. Je me demandais si la banque pourrait à tout le moins étudier ce genre d'interventions.
     Il me semble qu'on devrait aussi étudier sérieusement la question de l'union monétaire qu'on a évoquée, en dehors de considérations souvent plus émotives que purement rationnelles. On l'a vu avec le commentaire de M. McCallum tout à l'heure, qui a associé cette question aux souverainistes, alors que M. Jarislowsky, pourtant pas connu pour être un souverainiste notoire, est venu nous parler de l'union monétaire. L'union monétaire existe en Europe.
    M. Jarislowsky nous a également parlé d'une autre solution, qui consisterait en l'établissement d'une fourchette cible, un peu comme on le fait dans le cas de la lutte contre l'inflation. On dit 2 p. 100, entre 1 p. 100 et 3 p. 100. La Banque pourrait-elle étudier la possibilité d'avoir une fourchette cible en disant qu'elle veut un dollar à 80 ¢, plus ou moins 10 ¢, et qu'elle interviendrait à ce moment-là? Est-ce quelque chose que vous pourriez étudier et dont on pourrait débattre en dehors de considérations souvent plus sentimentales ou émotives que rationnelles?
    Merci pour vos questions.
    Premièrement, la politique d'intervention de la Banque du Canada reste une option au Canada. Même si elle est rare — selon moi, c'est correct —, elle reste néanmoins une option. Nous pouvons intervenir en cas de défaillance dans le marché ou lorsque le niveau de notre devise peut avoir un impact sérieux sur notre perspective économique à moyen terme.
    Deuxièmement, l'histoire nous enseigne que si l'intervention n'est pas assortie d'autres mesures, elle ne fonctionne pas. Si elle ne porte que sur un jour ou une semaine, elle ne fonctionne pas. Cela ne fait que donner de l'argent aux spéculateurs, selon moi.
    Une autre question très importante est celle de l'union monétaire, qui comporte beaucoup d'inconvénients. Elle présente l'avantage de réduire les coûts de transaction, mais son désavantage est d'entraîner la perte de notre souveraineté monétaire. La souveraineté monétaire est importante pour des économies qui sont très différentes, comme celles du Canada et des États-Unis. Il y a une plus grande différence entre le Canada et les États-Unis que par rapport à la France ou l'Allemagne, par exemple. Un autre désavantage de l'union monétaire est que la Banque perdrait son accountability. La stabilité financière soulève certaines questions, notamment celle de savoir qui sera le prêteur de dernier ressort dans cette situation.
    J'ai vécu en Europe à l'époque de la création de l'euro et je connais plusieurs dirigeants qui ont pris part à ce processus. Le pooling of sovereignty était un grand aspect politique. C'était une façon de réaliser l'union politique entre les pays. Le choix de l'euro est plus un choix politique qu'un choix économique.
(1635)
    C'est la souveraineté-association.

[Traduction]

    Je suis désolé, mais votre temps est écoulé. Nous passons maintenant à M. Dykstra.
    Monsieur Dykstra, vous avez cinq minutes.
    Par votre entremise, monsieur le président, je voudrais dire à M. Carney que je regrette de lui enlever du temps, comme cela semblait être une bonne discussion.
    J'ai une ou deux questions à vous poser. Bien entendu, nous reconnaissons que la Banque du Canada est responsable de la politique monétaire et que cette dernière dispose de certains instruments pour faire moduler la valeur du dollar. Quand vous deviendrez gouverneur de la Banque, il vous appartiendra de voir s'il convient ou non d'y avoir recours. Nous reconnaissons également — même si certains membres d'en face ne seront peut-être pas d'accord — que la politique monétaire est manifestement complexe et qu'il est préférable de s'en remettre au gouverneur pour toute décision dans ce domaine.
    En tant que gouvernement, nous avons mis l'accent sur quelques principes, à savoir la transparence, la responsabilisation et la création d'une nouvelle culture de transparence au sein du gouvernement. Je voudrais donc vous inviter à commenter cette question et à nous dire si vous êtes prêt à vous engager auprès du comité à continuer de suivre de tels principes à la Banque.
    Merci beaucoup pour cette question.
    Votre observation au sujet de la transparence et des communications ouvertes est très importante. Dans mes remarques liminaires, j'ai justement insisté sur l'importance des attentes dans l'orientation de la politique monétaire.
    Tout à l'heure, nous disions que les attentes se situent autour de 2 p. 100. Je pense que l'expérience a démontré que l'atteinte d'une cible d'inflation de 2 p. 100 n'est pas le seul facteur qui compte. Ce n'est pas juste la conduite de la politique monétaire qui compte; c'est aussi les moyens que vous prenez pour la concrétiser et la mesure dans laquelle les gens comprennent comment vous en êtes arrivé là. Et il faut miser sur le dialogue, comme celui que nous avons entamé aujourd'hui, et d'autres activités liées aux relations externes pour encourager cette interaction. Donc, la transparence, qui a toujours été l'une des caractéristiques fondamentales de la Banque du Canada, revêt une importance critique dans ce contexte.
    Il nous faut continuer à trouver divers moyens de l'élargir et d'améliorer encore nos communications. Il nous faut également améliorer la qualité de nos publications régulières — que nous examinons en permanence — y compris peut-être notre Rapport sur la politique monétaire. Je vais vous donner des exemples d'éléments que nous pourrions réexaminer — par exemple, les décisions antérieures, les attentes et, plus explicitement, les attentes de la Banque, les résultats et les raisons pour lesquelles les résultats ont été différents. Cela comporte donc un élément de responsabilisation.
    L'autre question que certaines banques ont examinée — et il est plus difficile de faire cela dans un organisme oeuvrant sous l'impulsion du consensus, même si c'est encore possible — concerne la publication de procès-verbaux suivant les décisions. Donc, avec un certain retard, la publication des procès-verbaux permet de se faire une meilleure idée de la gamme de résultats possibles et des considérations qui ont été prises en compte dans le processus décisionnel. Par exemple, la Reserve Bank of Australia a annoncé la semaine dernière qu'elle compte justement faire cela.
    Une version extrême de cette formule consisterait à publier une prévision des taux d'intérêt. En ce qui me concerne, cette solution n'est pas tout à fait sensée, mais c'est une possibilité qu'il faut examiner dans le contexte de l'examen exhaustif du cadre de ciblage de l'inflation.
    Et, si vous me permettez, je voudrais soulever un dernier point: je voudrais faire une petite publicité pour un site Web en particulier, soit www.inflationtargeting.ca. Je sais que vous avez déjà cela dans votre liste de signets. Il s'agit du site Web du programme de recherche dont je vous ai parlé au début. Nous voulons nous en servir comme tribune de discussion libre pour des discussions libres de type wiki ou pour la réalisation de recherche sérieuse, mais aussi, de façon plus pratique, comme lieu de discussion du prochain cadre que nous examinerons dans quatre ans.
    Merci.
    Eh bien, on peut dire que la Banque du Canada a vraiment évolué si son prochain gouverneur fait de la publicité pour son site Web, afin d'encourager le genre d'activité que vous avez décrit.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Rick Dykstra: C'est très bien.
    Dans votre exposé liminaire — et je sais que vous n'avez pas eu beaucoup de temps pour le faire — vous avez abordé toute la question de la dissuasion de la contrefaçon par l'entremise de programmes d'éducation, de communication et de répression de la fraude liée aux billets de banque. C'est quelque chose qui pose évidemment problème, non seulement au Canada, mais en ce qui concerne nos relations externes avec d'autres pays, puisqu'il s'agit de s'assurer de décourager la contrefaçon et les activités qui ont de lourdes conséquences pour les divers pays depuis plusieurs années.
    Peut-être pourriez-vous nous parler un peu de votre engagement vis-à-vis de ce projet et sur votre collaboration avec la GRC.
(1640)
    Merci beaucoup.
    C'est très important. C'est le fondement de la confiance qu'ont les citoyens dans l'argent, en tant que réserve de valeur et unité de compte. Je suis sûr que la plupart d'entre vous savez déjà que nous n'avons pas suffisamment investi dans les billets de banque au cours des décennies précédentes et, en conséquence, la contrefaçon a atteint au Canada des niveaux très élevés qui sont inacceptables.
    C'est un peu comme l'inflation. Une fois que vous perdez le contrôle, vous devez travailler très, très fort pour la réduire. Mais, le gouverneur actuel et la Banque ont établi, il y a trois ans, une stratégie en trois points qui s'appuie sur l'éducation, la collaboration avec les procureurs du ministère public en vue de s'assurer que des poursuites sont intentées contre les auteurs de ces actes, et la collaboration avec les organismes policiers. Je vous ai dit qu'il s'agissait d'une stratégie en trois points, mais je voulais plutôt dire en quatre points, puisque l'autre élément est la qualité supérieure des billets de banque que la Banque a déjà mis en circulation, et que vous avez sans doute déjà vus.
    En conséquence, les activités de contrefaçon ont chuté, même si le niveau d'activité est encore trop élevé. Nous allons dans la bonne direction, et nous allons réussir à le ramener à zéro, et nous allons ensuite continuer à faire la même chose.
    La GRC s'est révélée très efficace dans ce domaine. Je peux vous dire que le gouverneur actuel et moi-même avons rencontré le commissaire et les sous-commissaires de la GRC la semaine dernière pour parler des prochaines étapes de cette démarche.
    Ce travail est important, et j'insiste sur le fait que nous réalisons de réels progrès dans ce dossier. Enfin, s'agissant de responsabilisation, vous pourriez consulter vous-mêmes les chiffres pertinents sur notre site Web, ce qui vous permettra de voir où nous avons accompli des progrès.
    Merci beaucoup.
    C'est maintenant à M. Turner, pour cinq minutes.
    Monsieur Carney, on dit que vous êtes l'architecte de la stratégie des fiducies de revenu du gouvernement conservateur, et je me demande si cette caractérisation est juste ou non.
    Comme vous le savez, j'étais haut fonctionnaire au ministère des Finances. Je précise, cependant, que j'ai été haut fonctionnaire à la fois sous le gouvernement libéral précédent et sous l'actuel gouvernement conservateur. J'ai été responsable des cinq derniers budgets et de toutes les décisions fiscales annoncées par les deux gouvernements. Donc, il me semble tout à fait juste de dire que j'ai participé à cette activité.
    S'agissant des fiducies de revenu, vous avez donné essentiellement les mêmes conseils à M. Goodale, lorsqu'il était ministre des Finances, qu'à M. Flaherty, qui est l'actuel ministre des Finances.
    J'ai donné les meilleurs conseils possibles aux deux ministres des Finances.
    S'agissait-il des mêmes conseils?
    Les conseils donnés aux ministres par les fonctionnaires sont considérés comme des renseignements confidentiels. C'est ainsi que fonctionne le système, et j'ai donc donné les meilleurs conseils possibles aux deux ministres.
    Très bien. Un an après la décision, des fiducies de revenu canadiennes d'une valeur de plus de 40 milliards de dollars ont été vendues, et il semble que le Trésor a à présent un manque à gagner de presque 1 milliard de dollars, étant donné que le gouvernement ne touche plus les recettes fiscales qui en découlaient.
    Vu cette réalité, j'ai deux questions à vous poser. Premièrement, avez-vous prévu les conséquences des conseils que vous avez dispensés au ministre? Deuxièmement, comment pouvez-vous y voir autre chose qu'un échec?
    Je répète ma réponse précédente, à savoir que je n'ai pas l'intention de vous fournir des détails au sujet des conseils que j'ai pu donner à un ministre des Finances ou à n'importe quel autre ministre en tant que fonctionnaire.
    Je vous signale, néanmoins, qu'au cours de la dernière année et demie, comme vous le savez certainement, la Bourse de Toronto, qui correspond au marché le plus important, a enregistré une hausse très importante. La Bourse de Toronto a une capitalisation boursière de 1,6 billion de dollars. Il est important de se rappeler le contexte…
    Oui, je le sais, mais je ne m'intéresse pas à la Bourse de Toronto…
    Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Turner, mais vous devez permettre à M. Carney de finir sa réponse.
    Non, parce que ce n'est pas ce que je lui ai demandé. Il peut toujours répondre à une question que je ne lui ai pas posée s'il le désire…
    Avez-vous une autre question, monsieur Turner?
(1645)
    Oui.
    Posez-la donc rapidement.
    Si vous cessez de m'interrompre, je vais le faire.
    Selon les estimations, monsieur Carney…
    Monsieur Turner, je vous demande de faire preuve d'un peu plus de respect à l'égard du président, car sinon, vous n'aurez plus de temps de parole.
    Est-ce que cette petite discussion est comptée dans mon temps de parole?
    Maintenant, oui.
    Dans ce cas, veuillez donc vous taire, si vous n'y voyez pas d'inconvénient.
    Monsieur Carney, je voudrais…
    J'invoque le Règlement…
    Ou alors j'ai mon temps de parole, ou alors je ne l'ai pas.
    Je demande à M. Turner de retirer les remarques qu'il vient de faire. Il a tenu des propos qui sont indignes d'un parlementaire.
    Je les retire.
    Monsieur Turner.
    Je viens de dire que je les retire.
    Très bien. Posez donc votre question, car sinon, c'est la dernière fois que vous prendrez la parole au comité.
    Ne me faites pas de menaces, monsieur le président.
    J'ai simplement énoncé un fait. Posez donc votre question, ou alors vous n'aurez plus de temps de parole.
    Monsieur Carney, j'ai une question à vous poser. À votre avis, les fiducies de revenu ont-elles leur place sur les marchés financiers?
    À mon avis, les participants aux marchés financiers prendront les décisions appropriées en ce qui concerne la structure qui convient pour organiser leur activité commerciale et quelles valeurs mobilières il convient d'acheter ou de vendre. Cette décision appartient aux participants au marché financier. Un cadre existe qui assure la neutralité fiscale par rapport à différentes structures organisationnelles, et les participants au marché financier prennent une décision au sujet de la structure qu'ils préfèrent et quelles entités il convient d'acheter.
    Vous attendiez-vous à une chute de la capitalisation des fiducies de revenu sur les marchés financiers à la suite de la décision du 31 octobre? Aviez-vous prévu une chute de cette ampleur?
    Je vous renvoie à ma réponse précédente sur les conseils donnés aux ministres.
    Merci beaucoup. Vous avez fini.
    Monsieur Del Mastro, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais rapidement vous poser une question dans ce même ordre d'idées.
    Monsieur Carney, de façon générale, est-ce une bonne idée d'examiner les marchés isolément sans tenir compte de ce qui se passe généralement à la Bourse de Toronto, de la croissance enregistrée à la Bourse de Toronto et du fait que les investissements qui ont disparu dans un secteur se sont sans doute déplacés vers un autre secteur?
    Du point de vue de la conduite de la politique monétaire et éventuellement de la croissance et de la production, de l'incidence sur l'emploi et, en fin de compte, en ce qui nous concerne, l'impact sur l'inflation, il nous semble plus approprié de tenir compte de la richesse globale. La richesse se situe surtout au niveau de la capitalisation globale des marchés boursiers, de la performance des titres à revenu fixe et, surtout, du logement.
    Je vous remercie.
    Je comprends maintenant. M. Turner avait une idée derrière la tête. Le fait est qu'il était favorable à la décision du gouvernement l'an dernier en ce qui concerne les fiducies de revenu, mais il semble avoir la mémoire courte.
    Monsieur Carney, beaucoup d'acteurs…
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    À mon avis, ce n'est pas un rappel au Règlement.
    Si, c'est un rappel au Règlement parce que M. Del Mastro…
    Ce n'est pas un rappel au Règlement: c'est un point de débat.
    Je vous demande de poursuivre.
    Merci, monsieur le président. Le compte rendu pourra, me semble-t-il, que mon affirmation reflète bien la réalité.
    Monsieur Carney, beaucoup d'acteurs économiques, et notamment les manufacturiers qui s'efforcent tant bien que mal à rester concurrentiels, estiment que la valeur du dollar est trop élevée et qu'au lieu de mettre l'accent sur l'inflation, la Banque du Canada devrait plutôt adopter une politique monétaire qui aurait pour résultat de faire baisser la valeur du dollar.
    Pourriez-vous expliquer au comité pourquoi il est si important que la politique monétaire de notre banque centrale vise à maintenir un taux d'inflation à la fois faible et stable?
    Merci pour cette question.
    L'un des problèmes qu'on rencontre quand ses efforts sont couronnés de succès, c'est qu'on oublie les raisons pour lesquelles on a voulu créer le cadre au départ.
    Comme je l'ai indiqué dans mon exposé liminaire, notre taux d'inflation est faible, stable et prévisible depuis 15 ans. Nous devons cela à mes prédécesseurs, ainsi qu'à l'excellence et au dévouement du personnel de la Banque, mais voilà 15 ans qu'il en est ainsi, et les gens ont tendance à oublier ce que peut coûter l'inflation. Le coût de l'inflation — et j'insiste sur ce point — est tout ce que nous mettons en péril si nous cessons de poursuivre cet objectif avec persévérance, et je vous assure que cela ne va pas m'arriver.
    L'inflation finit par faire baisser la valeur de l'argent. Et, si je peux me permettre de citer un aphorisme de Yogi Berra: une pièce de cinq cents ne vaut plus une pièce de dix cents. C'est ça la réalité. D'ailleurs, nous sommes témoins de toutes les discussions actuelles sur ce qu'il faut faire de la pièce d'un sou; en fin de compte, tout cela est la conséquence d'années cumulatives d'inflation.
    Deuxièmement, l'inflation crée de l'incertitude. Elle crée de l'incertitude et elle a des incidences importantes sur les investissements et la consommation — surtout les investissements — de même que sur la production et les emplois.
    Troisièmement — et même si j'en ai parlé dans mon exposé liminaire, il convient vraiment de le répéter — l'inflation influe sur les personnes les plus vulnérables. Ce sont les membres les plus pauvres de la société qui sont les moins bien placés pour se protéger contre l'inflation et les moins bien placés pour se servir de produits ou de contrats financiers sophistiqués pour échapper à ces effets.
    Le cinquième point, et le plus important, dans le contexte de l'inflation — en fait, je ne devrais pas dire que c'est le point le plus important, mais c'est effectivement le cinquième point — et un point sur lequel il convient d'insister, est que les booms inflationnistes finissent toujours mal et que, bien souvent, ce phénomène se manifeste lorsque le taux d'inflation commence à augmenter. Ces booms inflationnistes se terminent toujours mal, et il faut ensuite faire des efforts herculéens pour se remettre sur la bonne voie.
    À l'heure actuelle, nous avons un taux d'inflation faible, stable et prévisible. Nous avons des attentes bien ancrées. C'est extrêmement précieux. À ceux qui pensent qu'il y aurait lieu de modifier la cible ou d'ajouter d'autres cibles, alors que nous ne possédons qu'un seul instrument, je dirais qu'ils feraient bien de tenir compte des dangers que cela présente du point de vue des conséquences pour tous ces coûts différents.
(1650)
    Bref, si nous voulons maintenir un faible niveau d'inflation, c'est en somme pour éviter la possibilité d'une récession.
    Ce n'est pas garanti, mais c'est une mesure qui va dans ce sens.
    Comme je l'ai dit dans mes remarques liminaires, les efforts déployés pour cibler l'inflation ont coïncidé avec la plus longue période d'expansion économique que nous ayons jamais connue dans toute l'histoire du Canada et des taux de production et d'intérêt très peu volatiles.
    Pour la gouverne de tous les Canadiens, pourriez-vous nous expliquer en quoi consiste l'inflation de base et quels facteurs sont écartés lorsque vous mesurez l'inflation de base?
    Je vous remercie.
    Comme vous le savez — et il convient de le répéter — la Banque cible l'inflation totale. Voilà notre objectif, parce que voilà le panier de consommation que les Canadiens reconnaissent. Par rapport à ce panier de 31 éléments, huit d'entre eux sont volatils, surtout ceux qui sont liés à l'alimentation et à l'énergie et, par conséquent, nous les écartons en structurant nos cibles quotidiennes. Nous en sommes conscients, mais nous examinons l'inflation de base, qui est très fortement corrélée.
    Ce faisant — et c'est important; rappelez-vous que je vous ai parlé de ces quatre grandes tendances — nous devons être sensibles à la possibilité de mouvement à la hausse en ce qui concerne ces éléments-là, et nous avons effectivement observé une forte hausse du prix de l'énergie. Sur le plan mondial, nous commençons aussi à observer un fort mouvement haussier dans le secteur agricole. Même par rapport à l'inflation de base, étant donné que la Chine a une économie bien intégrée, il y a un fort mouvement à la baisse dans le secteur des produits manufacturés, et il faut en être conscient.
    Donc, c'est une méthode efficace, mais ce n'est pas la seule méthode.
    Merci beaucoup.
    Monsieur Pacetti, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Encore une fois, félicitations, Mark.
    Je suppose que cela s'intègre dans ce processus d'entrevue, et je préfère donc m'attaquer tout de suite aux questions épineuses. Voici la question que les conservateurs aimaient toujours poser lorsque le comité avait à examiner la nomination à divers postes de candidats qui étaient prétendument libéraux.
    Mark, avez-vous été membre d'un parti politique fédéral au cours des cinq dernières années? J'essaie de vous faciliter la tâche.
    On peut remonter encore plus loin dans le temps. Je n'ai jamais été membre d'un parti politique.
    Très bien.
    Parlez-moi maintenant du processus en tant que tel. Qu'est-ce qui s'est produit au juste? Avez-vous posé votre candidature à ce poste? Est-ce que quelqu'un vous a demandé si le poste vous intéressait? Comment tout cela s'est-il passé?
    J'ai posé ma candidature à ce poste. Il y a eu une annonce publique, que vous avez dû voir dans les plus importants journaux canadiens ainsi qu'à l'étranger, et j'ai posé ma candidature. C'était le même processus que pour n'importe quel autre type d'emploi.
    Ensuite, on vous a fait passer une entrevue. Et comment cela s'est-il déroulé…?
    Il y a eu un processus d'entrevue. Il y a un conseil d'administration à la Banque — non pas le conseil qui prend les décisions d'ordre stratégique, mais plutôt un conseil d'administration auquel sont représentées les diverses provinces du Canada. Il existe également un comité de direction qui fait partie du conseil. Ce comité de direction…
    Le ministre des Finances a-t-il participé à la décision de quelque façon que ce soit?
    Le ministre des Finances n'est pas membre du conseil.
    Il n'est pas membre du conseil.
    Expliquez-moi donc — et d'autres membres ont déjà abordé cette question — votre participation à la décision qui a été prise sur les fiducies de revenu. Qu'en est-il de l'accord de Montréal? Quelle a été la nature de votre participation à la conclusion de l'accord de Montréal, et quelles étaient vos responsabilités dans ce contexte?
    Selon les exigences du poste que j'occupais au ministère des Finances, j'étais responsable du contrôle des opérations internationales du secteur financier, en plus de mes tâches budgétaires, si bien que j'étais membre remplaçant du CSF, soit le Comité de stabilité financière. C'est donc dans ce contexte que j'ai participé, et que j'ai continué à participer, à l'élaboration de l'accord de Montréal, c'est-à-dire jusqu'au moment d'être nommé au poste en question.
    Mon rôle et celui du gouvernement consistaient, selon moi, à jouer un rôle de coordination — étant donné que la situation évoluait extrêmement vite — et à nous assurer que toutes les parties concernées étaient au courant des conséquences potentielles de leurs décisions et de l'opportunité éventuelle de négocier, de prendre du temps pour réfléchir et pour voir s'il y aurait une solution plus intéressante que celle consistant à faire faillite. Mais, il appartenait aux parties concernées de prendre cette décision.
(1655)
    Je m'excuse d'avance de vous interrompre, mais notre temps de parole est limité et j'essaie d'établir quelque chose de bien particulier.
    Un représentant de la Banque du Canada a-t-il assisté à cette réunion?
    Je vous parle de discussions individuelles. Nous n'avons pas convoqué une réunion de tous les participants. Les participants ont fait cela eux-mêmes, de leur propre chef. C'est eux qui ont pris la décision de le faire.
    Suivant la conclusion de l'accord, il y a eu une réunion à laquelle ont participé le gouverneur de la Banque du Canada, moi-même, d'autres représentants de la Banque du Canada et certains des principaux investisseurs.
    Oui, mais à l'époque, vous représentiez le ministère des Finances.
    C'est exact.
    Très bien.
    Maintenant, qu'arrivera-t-il à l'avenir, puisque nous ne savons pas quelle va être l'évolution de la situation en ce qui concerne le papier commercial adossé à des actifs…? Nous n'en savons rien. Nous ne savons toujours pas, ni l'ampleur du problème, ni l'envergure de la crise qui pourrait surgir en ce qui concerne le montant exact de la moins-value que demanderont les banques, par rapport aux chiffres que nous avons vus jusqu'ici.
    Qu'arrivera-t-il si nous faisons face ici à une situation comme celle de Northern Rock, par exemple? Est-ce que vous seriez responsable? Est-ce qu'ils vont nous dire que vous leur avez donné certains conseils, que vous les avez aidés à conclure une entente et que, maintenant que vous êtes le gouverneur de la Banque du Canada, c'est à vous de les aider à s'en sortir? Avez-vous une quelconque responsabilité dans ce domaine?
    Pour moi, il n'y a pas de rapport. Par contre, il convient de répéter que, dans ce type de situation, qui est fort peu probable — nous parlons donc d'une situation purement hypothétique — la Banque du Canada agit à titre de prêteur de dernier recours sur les conseils du BSIF, si l'institution en question est encore solvable mais manque de liquidités.
    Merci beaucoup.
    Nous passons maintenant à M. Wallace, et vous aurez le temps de parole qui reste.
    Merci. Je n'ai pas beaucoup de questions à poser, mais j'en ai une qui, me semble-t-il, n'a pas encore été abordée aujourd'hui.
    Premièrement, félicitations pour votre nomination; j'attends avec plaisir l'occasion de travailler avec vous à l'avenir.
    Si j'ai bien compris, vous avez pas mal travaillé à l'étranger, ce qui vous a permis d'acquérir une bonne expérience, dans différentes régions du monde, des marchés financiers et des finances en général. Je ne sais pas si vous êtes en mesure de nous le dire ou non, mais j'aimerais bien connaître vos vues sur ce qui suit: nous avons ici au Canada un marché financier fragmenté. Avez-vous entendu parler de cela dans le contexte de votre travail à l'étranger? Cela vous a-t-il causé certaines difficultés ou auriez-vous des observations à nous faire à ce sujet-là? Voilà la première partie de ma question.
    Deuxièmement, à votre avis, qu'est-ce qui nous permettrait d'améliorer notre compétitivité comme marché financier, comparativement à ce que vous avez observé ailleurs dans le monde?
    Pour répondre à la première partie de votre question, quand j'étais à l'étranger, je travaillais pour une maison bancaire d'investissement et mon travail consistait surtout à traiter avec des gouvernements souverains, notamment ceux des marchés émergents, à mesure que ces derniers s'affirmaient de plus en plus. Par exemple, il y a eu le cas de l'Afrique du Sud, quand l'ANC est arrivée au pouvoir et négocié ses premières transactions financières, la Corée, et d'autres pays du même genre. Je ne suis pas vraiment intéressé à la situation canadienne avant mon retour au Canada. Donc, la réponse à votre question est non, je n'ai jamais entendu parler de cet élément en particulier.
    Votre question générale, toutefois — et c'est un enjeu important qui tient à coeur à la Banque du Canada — concerne les mesures à prendre afin d'améliorer la compétitivité et l'efficacité de nos marchés financiers.
    Il ne fait aucun doute qu'il y a certaines mesures qu'on peut prendre, et je vais commencer par vous dire ce que la Banque peut faire. Dans un premier temps, il faut s'assurer d'avoir un marché des instruments à taux fixe efficace, surtout en ce qui concerne les marchés monétaires.
    Nous avons un peu parlé tout à l'heure du mécanisme qu'il serait possible d'établir et quel en serait son rôle, mais nous devons absolument nous assurer d'assumer nos responsabilités fondamentales en ce qui concerne la surveillance du système de paiements. C'est important pour les marchés monétaires. Nous agissons à titre d'agent du gouvernement relativement à la dette du gouvernement fédéral. Les efforts de consolidation de la dette du gouvernement et de celles de certaines sociétés d'État ont été couronnés de succès. Mais il nous faut en arriver au bon niveau de liquidités.
    À mon avis — et cela ne relève pas notre responsabilité; c'est au marché de le faire — la titrisation doit continuer d'être une caractéristique de ce marché. La titrisation fait l'objet de pressions intenses en ce moment, à juste titre, parce que certains produits sont devenus trop complexes; il s'agit donc d'en éliminer pour en arriver à un noyau de produits plus normalisés, ce qui permettrait d'améliorer grandement l'efficacité des marchés.
    Il faut également renforcer l'intégrité du marché. La gouvernance est un aspect de la question, mais des mesures plus efficaces de répression sont tout à fait critiques. D'ailleurs, je vous recommande de lire le rapport préparé par Nick Le Pan sur les EIPMS et le rôle de la GRC. Mais il convient de préciser qu'il s'agit d'une responsabilité partagée. Donc, ce n'est pas juste le travail de la GRC; c'est le travail des provinces, des procureurs du ministère public et des commissions provinciales de valeurs mobilières. Pour notre part, nous essaierons d'apporter une contribution à ce travail collectif.
    En conclusion, je voudrais aborder trois points.
     Premièrement, la question de la valeur, de la transparence et de la concurrence. La règle touchant la propriété étrangère a été éliminée en 2005. Voilà qui a permis aux investisseurs canadiens d'avoir accès à toutes sortes de marchés intéressants à l'étranger. C'est important pour les retraités. En même temps, cela a permis de créer des marchés, comme celui des obligations dites « Feuille d'érable ». L'idée de demander à la Bourse de Toronto de promouvoir le libre-échange et les valeurs mobilières est, encore une fois, le genre de mesures qui peut permettre de favoriser la concurrence au Canada. Nous obtiendrons de meilleurs résultats si la concurrence était plus vive. Voilà l'élément essentiel.
    S'agissant de réglementation, j'estime, personnellement, qu'il serait peut-être intéressant de retenir la notion de réglementation proportionnelle, qui tiendrait compte de la taille des compagnies, en prévoyant des exigences différentes pour des compagnies de taille différente et de réglementation axée sur les principes. Et l'enseignement que je tire de l'expérience de cet été est que les gens vont toujours mettre au point de nouveaux produits financiers très sophistiqués. Ils seront très complexes. La prochaine période de turbulence — pour reprendre le terme qui décrit officiellement ce qui est arrivé — ne ressemblera pas à la dernière. Les produits seront différents. Mais, si vous adoptez certains principes, vous pouvez toujours contrôler les activités entourant ces produits; par contre, si vous avez des règles, les gens réussiront toujours à les contourner. Voilà ce que le marché nous a appris.
    Mon dernier point concerne la sensibilisation des investisseurs, mais comme il est déjà 5 heures, je ne pourrai pas vous en parler aujourd'hui.
(1700)
    Au nom du comité, je voudrais vous remercier de votre présence et des renseignements que vous avez fournis, non seulement aux membres du comité, mais à l'ensemble des Canadiens, par extension. Nous vous souhaitons beaucoup de sagesse pour vous acquitter de vos responsabilités de gouverneur et nous vous félicitons pour votre réussite. Donc, je vous remercie d'avoir été des nôtres, et je remercie également les membres du comité.
    La séance est levée.