Passer au contenu

LANG Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

Pour faire une recherche avancée, utilisez l’outil Rechercher dans les publications.

Si vous avez des questions ou commentaires concernant l'accessibilité à cette publication, veuillez communiquer avec nous à accessible@parl.gc.ca.

Publication du jour précédent Publication du jour prochain







CANADA

Comité permanent des langues officielles


NUMÉRO 026 
l
2e SESSION 
l
39e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 avril 2008

[Enregistrement électronique]

(0905)

[Français]

    J'inviterais les membres du comité à prendre place afin que nous puissions débuter.
    Bonjour à tous et bienvenue à la 26e séance du Comité permanent des langues officielles. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement, nous allons procéder à l'étude de la télédiffusion par la Société Radio-Canada du gala annuel du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens.
    J'aimerais d'abord dire aux membres du comité que j'ai reçu une lettre de la présidente de la Fédération culturelle canadienne-française, Mme Raymonde Boulay LeBlanc, qui aimerait que je vous transmette le message suivant, et je cite:
La FCCF regrette d'apprendre que les termes de sa déclaration, lors de l'annonce du départ de l'honorable Mauril Bélanger de son poste de Critique en matière de Patrimoine canadien, de Langues officielles et de Francophonie aient pu provoquer un malaise au sein des membres du Comité permanent des Langues officielles, car ceci n'était nullement son intention. En rendant hommage au travail politique du Député libéral fédéral d'Ottawa-Vanier, en tant que Critique, la FCCF reste pleinement consciente de l'engagement sans faille et du travail politique accompli par chacun des membres du Comité permanent des langues officielles pour la défense des secteurs artistiques et culturels de la francophonie canadienne, et ce dans la perspective de la prochaine stratégie du gouvernement fédéral en matière de Langues officielles. La FCCF les remercie sincèrement. Il reste primordial que tous ensemble, nous continuions de collaborer pour aménager l'espace culturel et artistique canadien et pour favoriser une action culturelle holistique en milieu minoritaire francophone au Canada pour nous permettre de relever les défis du XXlème siècle, et ce, dans une perspective de mondialisation.
    Nous allons immédiatement procéder à l'audition de notre témoin, M. Richard Stursberg.
    Je vous souhaite la bienvenue au Comité permanent des langues officielles. Comme vous le savez, le mandat de notre comité est de promouvoir la dualité linguistique, et c'est dans ce contexte que nous vous invitons à faire une présentation d'environ 10 minutes, qui sera suivie d'un tour de questions par les membres du comité.
    Monsieur Stursberg, vous avez la parole.

[Traduction]

    Je m'appelle Richard Stursberg et je dirige les Services anglais de la SRC, y compris la télévision, la radio, les sites Web, etc.
     Monsieur le président, messieurs les membres du comité, je vous remercie de me donner cette occasion de vous rencontrer aujourd'hui. Je crois comprendre que vous m'avez invité, en ma qualité de responsable des Services anglais de Radio-Canada, à venir discuter avec vous de la diffusion sur nos ondes, en mars dernier, du gala du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens.
    Pour pouvoir faire cela, je crois qu'il est important de vous expliquer un peu comment nous, aux Services anglais, nous contribuons à l'identité nationale commune du Canada.
    Premièrement, comme vous le savez, Radio-Canada est une société d'État autonome. Son mandat, ainsi que l'indépendance dont elle jouit en matière de programmation, sont énoncés dans la Loi sur la radiodiffusion.

[Français]

    Je crois qu'à titre de radiodiffuseur public du Canada, nous sommes investis d'une mission particulière, celle de donner aux Canadiens d'expression française et d'expression anglaise une tribune pour faire connaître aux autres leur culture, leurs points de vue et leur vécu. Nul autre radiodiffuseur au pays ne jette, comme nous, des ponts entre les deux communautés. À CBC, c'est une préoccupation quotidienne.
(0910)

[Traduction]

     Il ne s'agit pas de gestes symboliques pour mettre une culture à l'avant-scène, mais plutôt d'initiatives tangibles pour mettre en commun les deux cultures. Par exemple, adapter l'esprit créatif d'une culture à l'autre, en maintenant l'intérêt de l'auditoire, dans le respect des deux cultures et du moyen de diffusion.

[Français]

    Voici pourquoi CBC et Radio-Canada s'associent pour réaliser des projets qui éveillent de profondes résonances dans les deux communautés, tels les documentaires Hockey: la fierté d'un peuple, la minisérie sur Trudeau ou même la minisérie sur René Lévesque. Ces séries sont à des années-lumière des versions traduites bon marché et sont, de la première ligne à la dernière image, une oeuvre de création conjointe.
    Lorsque nous avons produit la comédie de situation Ciao Bella!, un regard léger et chaleureux sur les expressions d'une Italo-Canadienne à Montréal, nous avons tourné chaque épisode deux fois: une fois en anglais et une fois en français. La série a été diffusée sur les ondes de CBC Television et à la télévision de Radio-Canada.
    Chaque jour, nos correspondants à l'étranger présentent les événements internationaux d'un point de vue canadien dans leurs reportages en anglais et en français. Notre démarche est unique à cet égard. À l'occasion de la soirée des élections et d'événements rassembleurs importants au pays, les équipes de CBC et de Radio-Canada unissent leurs efforts pour donner aux Canadiens une information qui reflète le mieux les tendances nationales. Au cours des deux dernières années seulement, nous avons produit conjointement plus de 200 émissions spéciales.

[Traduction]

    Au sein des Services anglais, nous sommes constamment à l'affût de nouvelles façons d'exposer les Anglo-Canadiens à la culture française en touchant notre auditoire. Nous avons lancé en 2004 l'émission hebdomadaire Au Courant, animée par Mitsou Gélinas. Pendant 30 minutes, l'animatrice présentait aux téléspectateurs anglophones les sujets de conversation favoris des Canadiens francophones cette semaine-là.

[Français]

    En fait, j'ai eu le plaisir de présider à Téléfilm Canada, et quand nous avons financé le grand film de Denis Arcand Les invasions barbares, Mitsou faisait partie de la distribution de ce film. C'est ainsi que j'ai eu le plaisir de la connaître. C'était donc mon idée d'inviter Mitsou à agir comme animatrice de cet événement.

[Traduction]

    Nous avons choisi Mitsou, parce qu'ayant été une chanteuse populaire à une certaine époque, elle est au moins un peu connue des Canadiens anglais.

[Français]

    Si l'on considère les trois dernières années seulement, CBC Television a inscrit à sa grille-horaire des séries et des films qui ont remporté un vif succès au réseau français, comme Les Boys, Grande Ourse, et La grande séduction, ainsi que 36 autres émissions de langue française totalisant près de 70 heures à l'écran.
    Depuis 2002, CBC Newsworld a, dans le cadre de l'émission The Lens, commandé et diffusé plus de 30 documentaires en association avec nos collègues de RDI ou d'autres réalisateurs de langue française. Nous avons coproduit l'émission primée Culture-choc/Culture Shock, dans laquelle des journalistes de la relève anglophone et francophone parcourent le pays et font part de leurs impressions sur la vie de compatriotes.

[Traduction]

    Nous proposons sur notre site Internet de radio de langue anglaise et à la radio par satellite de Sirius un segment appelé The French Connection, dans lequel l'animateur Craig Norris tient, avec nos collègues de Bande à part, de Radio-Canada, un dialogue musical destiné à faire découvrir à l'autre, et à nos auditoires respectifs, une musique différente.
     Radio 3 et Bande à part font équipe chaque année pour présenter plusieurs concerts en direct réunissant des musiciens qui s'exécutent en français et en anglais. Notre dernière collaboration remonte au mois dernier, pendant la Semaine canadienne de la musique.
(0915)

[Français]

    Sur CBC Radio, la populaire émission C'est la vie ouvre une fenêtre sur le vécu des Canadiens francophones de tous les coins du pays. On y aborde des sujets tels que la carrière de la diva Diane Dufresne, les expériences d'une nouvelle génération de cinéastes engagés québécois, l'origine de la poutine et les chansons d'amour en français. Dans l'une des parties de l'émission les plus écoutées, Word of the week, on initie les anglophones à des mots et à des expressions propres aux francophones du Canada. L'émission de CBC Radio À propos est consacrée exclusivement à la musique et aux artistes de la Francophonie canadienne et internationale.
    L'automne dernier, CBC Regina et Radio-Canada ont coproduit Mon pays, My country, une soirée bilingue de musique country à laquelle ont participé Brad Johner, Donny Parenteau, Véronique L'Abbé et Louis Bérubé.

[Traduction]

     Nous avons en outre diffusé la prestation de Marco Calliari au Festival du Bois, en Colombie-Britannique; la première au Canada de l'oeuvre Le souvenir de l'oubli du compositeur montréalais François Rose, exécutée par Brigitte Poulin et Silvia Mandolini, deux nouvelles venues fort acclamées sur la scène musicale montréalaise, et le spectacle donné en français et en anglais par la chanteuse Terez Montcalm, au Centre culturel franco-manitobain. Je pourrais vous donner bien d'autres exemples.
    Canada Live met à l'honneur chaque région du pays en présentant des concerts en direct dont le tiers met en vedette des artistes francophones. C'est en fait dans le cadre de cette émission que CBC a diffusé au complet le gala du Panthéon des artistes et des compositeurs canadiens.

[Français]

    Permettez-moi de faire quelques commentaires au sujet de ce gala. CBC en est le diffuseur depuis trois années. Au total, l'émission dure plus de trois heures. Depuis le début, nous avons chaque année présenté au complet l'émission de trois heures. C'est faisable à la radio, sur CBC Radio 2 ainsi que sur CBC Radio One. Nous avons aussi chaque année adapté l'émission pour CBC Television dans un format de 44 minutes, au lieu de trois heures et demie, pour y mettre en vedette les artistes appréciés de notre auditoire. C'est également ce que nous avons fait cette année.
    Je crois savoir que le chanteur Claude Dubois, honoré pendant le gala, s'est offusqué d'avoir été exclu au montage de l'émission présentée sur le réseau anglais de CBC. Je suis désolé qu'il se sente offensé. Je suis aussi désolé que les médias québécois aient eu l'impression que les services anglais de CBC/Radio-Canada insultaient les artistes francophones. Telle n'était pas notre intention, je suis vraiment peiné de tout cela.
    Mais franchement, on dépasse les bornes lorsqu'on nous qualifie de racistes et d'anti-francophones. Je suis étonné que les députés, qui ont manifesté très rapidement le désir de mener une enquête sur cette affaire, ne se soient pas élevés contre une attaque semblable. Cette attitude est indigne de nous, en tant que pays. Elle est insultante pour les gens du service anglais de CBC/Radio-Canada, qui multiplient les efforts, comme je viens de vous le montrer, pour faire connaître la culture du Québec à notre auditoire anglophone de manière à capter son intérêt. Ce n'est pas une tâche facile. Les qualifier de racistes est faux et injuste.

[Traduction]

    N'oubliez pas que nous, qui travaillons aux Services anglais, produisons des émissions qui, par définition, sont destinées à un public de langue anglaise. Si nos auditeurs ou nos téléspectateurs ne comprennent pas nos émissions, ou ne s'y retrouvent pas, ils iront ailleurs. C'est aussi simple que cela.
    C'est pour cela que nous tentons de transposer la culture française dans un environnement qui captivera notre auditoire. Songez par exemple aux émissions comme Rumours, notre version de Rumeurs, la comédie à succès de langue française, ou encore à l'émission fort populaire en ce moment, Sophie, dont l'action se déroule à Toronto plutôt qu'à Montréal comme dans Les hauts et les bas de Sophie Paquin.
    Nous continuerons de chercher des histoires de ce genre, des façons de mettre en valeur les artistes francophones, des moyens d'informer les Anglo-Canadiens de ce qui se passe dans les communautés francophones, des collaborations entre CBC et Radio-Canada pour servir le mieux possible les Canadiens.
    Nous le faisons, parce que nous y croyons. Je suis maintenant à votre disposition pour répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Stursberg.
    Nous commençons maintenant la période de questions. Je cède d'abord la parole à l'opposition officielle. Monsieur Coderre, vous avez la parole.

[Français]

    Monsieur Stursberg, merci d'être ici aujourd'hui.
    Je travaille depuis 25 ans pour l'unité du pays. Depuis 25 ans, modestement et humblement, j'essaie de bâtir des ponts entre les communautés. Votre rôle n'est pas de dire que c'est la faute des députés parce qu'ils ont demandé une enquête trop rapidement. Ce n'est certainement pas notre faute si, quand on tient un événement célébrant les auteurs-compositeurs-interprètes... Votre travail ne consiste pas simplement à faire plaisir à l'auditoire anglais. Il est de démontrer — et vous allez encore me parler de Mitsou et de la poutine — qu'à cet événement, on célébrait ce que représente le pays: deux langues, plusieurs cultures, notamment la culture francophone et la culture anglophone, les peuples fondateurs de ce pays.
    Ma citoyenneté est inclusive en ce sens. Vous pouvez me parler de tous les événements que vous tenez, et on vous en félicite. Cependant, un événement précis est une tache. Quand on demande une enquête, c'est parce qu'on veut savoir ce qui se passe et voir l'autre côté de la médaille.
    Je suis un adepte de Claude Dubois. J'ai été insulté, je dois vous l'avouer. Il y avait aussi Raymond Lévesque. Je ne suis pas un séparatiste, ma culture est non partisane. C'est comme si je prenais une photo avec vous et que je vous disais de vous placer dans le fond. Ainsi, je pourrais la couper et prendre ce qui fait mon affaire.
    Je ne veux pas faire le procès de CBC aujourd'hui; je veux comprendre ce qui s'est passé. Mettez-vous à notre place. Si on disait aux auteurs-compositeurs anglophones que, comme on ne dispose que de 44 minutes, on va couper tout ce qui est anglophone, car nous, les francophones, n'écoutons que de la musique en français et n'avons pas besoin de ça, que penseriez-vous? C'est un peu insultant, monsieur Stursberg.
    Vous pouvez faire une émission qui inclut tout le monde. On peut, en 40 minutes, représenter également le fait français parce que les auteurs ont fait un travail exceptionnel. Le but n'est pas de dire que vous n'avez pas fait votre travail dans d'autres dossiers. On ne parlera pas du syndrome Don Cherry aujourd'hui. On va parler de cet événement, car on veut comprendre ce qui s'est passé.
    Cela a pris deux jours de levée de boucliers pour que vous puissiez dire que vous regrettez. Je n'étais pas membre du comité, mais je comprends que c'est à cause de cela qu'on a demandé une enquête. Je veux savoir simplement si l'an prochain vous ferez la même « job de bras ». S'il y a des auteurs-compositeurs-interprètes et qu'on célèbre le panthéon, vous serez en mesure de nous dire... Il ne s'agit pas de faire plaisir à l'auditoire. C'est le mandat de Radio-Canada/CBC de montrer ce qui se passe dans notre pays.
    L'an prochain, s'il y a des francophones, serons-nous encore des citoyens de seconde classe, ou si vous allez vous assurer, conformément à votre mandat, qu'on mette sur un même pied les francophones et les anglophones?
(0920)

[Traduction]

    Vous savez, c'est très intéressant; simplement pour mettre les choses en contexte, comme je l'ai dit d'entrée de jeu, on a diffusé le gala au complet à la radio. Quand nous l'avons réduit à 44 minutes pour la télévision, ce que nous...
    Évidemment, lorsqu'on réduit trois heures et demie à 44 minutes, il faut laisser aller beaucoup de choses — beaucoup de choses, de bonnes choses. Ce qui nous a rendu la tâche beaucoup plus difficile cette année, c'est le fait que le grand pianiste Oscar Peterson venait tout juste de mourir, et il s'agissait du premier grand hommage qui lui était rendu.
    Nous l'avons donc réduit. Mais j'estime que ce serait une erreur de croire que nous avons coupé uniquement les chanteurs francophones. Ce n'est pas le cas. Nous avons également coupé des chanteurs anglophones. Parmi ceux qui ont été honorés au gala, qui ont été intronisés au panthéon, il y avait Les Emmerson, Alex Kramer, Dean Taylor, et aucun d'entre eux n'a été...
    Monsieur Stursberg, je comprends cela. Là n'est pas la question. Le problème, c'est que vous aviez des représentants de la culture francophone, et que rien — zéro, que dalle, personne — n'a été diffusé.
    Ma question est simple. Si vous êtes censés représenter... Et si vous voulez parler du ratio, parlons-en. Mais si vous avez des représentants et si vous voulez mettre les deux cultures sur un pied d'égalité, ne croyez-vous pas, comme moi, que...?
    Bien entendu, il fallait en couper, et quelques anglophones ont été coupés, mais si je vous comprends bien, vous dites qu'il fallait couper de manière à plaire à vos téléspectateurs, qui sont anglophones.
    Claude Dubois...
(0925)

[Français]

    C'est précisément ça. Notre auditoire est anglophone. Comme je l'ai dit dans mes remarques ce matin, si je mets à l'écran quelqu'un que personne ne connaît, les gens vont changer de poste. Il faut le dire parce que c'est très important.
    Excusez-moi de vous interrompre, monsieur Stursberg.
    Pour le bien de la traduction, j'aimerais qu'une seule personne parle à la fois. Monsieur Coderre, laissez M. Stursberg terminer avant d'enchaîner avec vos questions.
    Monsieur Stursberg, je connais très bien le monde des communications et des médias et je sais comment la boîte fonctionne.
    À vous entendre, on dirait que vous êtes le sauveur des deux solitudes. Vous avez une occasion en or de faire le pont, d'envoyer le message au reste du pays, comme aux Québécois, que vous avez des gens de cultures différentes. Comment pensez-vous qu'on apprendra à connaître les gens si on ne les entend pas?
    Nous avons essayé de faire le pont en faisant des documentaires avec nos collègues de RDI et de Radio-Canada, en faisant des émissions musicales, des émissions pour enfants et une foule de choses.
    Monsieur Coderre, votre temps est écoulé. Je vais permettre à M. Stursberg de répondre brièvement à votre question, et on passera ensuite à l'autre député.
    La meilleure façon de faire le pont est de respecter les goûts, les coutumes et la langue de nos deux auditoires.
    Merci beaucoup, monsieur Stursberg.
    On va maintenant passer à M. Richard Nadeau.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Stursberg, d'être là.
     Je tiens aussi à remercier mon collègue Daniel Petit, qui a effectivement mis ce sujet à l'ordre du jour de nos travaux. C'est très justifié.
    Monsieur Stursberg, je vais tenter d'analyser la chose avec le plus d'objectivité possible. Sur un plan identitaire et culturel, je trouve très néfaste ce que j'ai entendu de votre part. Je m'explique.
    D'abord, vous dites que l'auditoire était composé d'anglophones et qu'il fallait respecter leur culture et ne pas trop les offenser sur ce plan. C'était l'enjeu. Lorsque je regarde cela par l'autre bout de la lorgnette, le Québec paye 25 p. 100 des impôts versés à la CBC, tout comme les francophones vivant à l'extérieur du Québec payent aussi leur part des fonds alloués à la CBC. Ce n'est pas une question d'auditoire, c'est une question de respect de la part d'un gala qui veut justement faire l'apologie de la musique, de la chanson, de la composition musicale et des interprètes qui sont les porte-étendards de cette musique.
    Vous me dites que vous faites des documentaires, soit, mais cette émission n'était pas un documentaire. Elle présentait de la culture, les cultures québécoise, franco-canadienne, acadienne, canadienne-anglaise mêlées dans un tout pour démontrer à l'ensemble des contribuables canadiens, peu importe leur lieu de résidence, qu'il y a une variété d'artistes extraordinaires.
    M. Dubois s'est levé et a mis son poing sur la table. Je pense qu'il ne le faisait pas seulement pour lui, mais qu'il le faisait aussi pour le principe. Vous êtes surpris que les médias aient rapporté cela. Écoutez, ce n'est pas une question de médias. Ça frappe! Lorsqu'on a su ça, on s'est sentis exclus.
    Je vais vous donner une exemple qui fait que je vois la CBC comme je la vois. C'est dommage, et il faudrait que ça change. En vue de la Série du siècle de 1972, Foster Hewitt a passé un certain temps à l'ambassade de l'Union Soviétique pour apprendre à bien prononcer les noms des joueurs soviétiques. C'était un très bel exercice. Pourtant, de toute sa carrière, il n'a jamais appris à prononcer les noms de Jean-Guy Talbot, Yvan Cournoyer ou Jean Béliveau. La Soirée du hockey est arrivée en 1976 dans l'Ouest canadien. Avant cela, on écoutait donc la CBC. On ne se retrouvait pas dans les « Djang-Gaille Tâllboat » et les « Djînn Ballâvô ». C'est encore ça, la CBC. On ne retrouve pas, dans cette machine, notre culture et nos champs de référence. Lorsqu'il était question de la station de Radio-Canada à Saskatoon, on disait tout le temps « CBC French ». Je n'ai jamais vu nulle part au Québec « SRC anglaise » pour parler de la CBC.
    Vous voulez répondre aux besoins de votre public. D'accord, mais reflétez la réalité des choses. Pourquoi le mot « raciste » a-t-il été utilisé? Parce que nous sommes exclus. Exclure des gens, c'est prendre un groupe et ne pas prendre l'autre. Dans ce cas-ci, ce sont les francophones qui se sentent exclus, et on vous le signale. Ne me dites que vous faites des émissions ailleurs; je le sais, et c'est très bien. Mais dans ce spectacle qui faisait l'apologie de la musique, vous deviez vous efforcer de faire en sorte qu'au moins le quart de la programmation de vos 45 minutes reflète le quart des contribuables du Canada, qui sont francophones et qui ont le droit de se retrouver dans des émissions de ce genre.
    J'ai lu les articles de journaux. Ça remonte déjà au mois de mars, il n'y a pas si longtemps. Avez-vous commencé à penser sérieusement à mieux répartir la représentation des cultures du territoire pancanadien lors de l'émission du prochain gala?
(0930)
    En ce moment, nous sommes en train de penser à ce qu'on fera lors du gala.
    Mais je dois revenir au fait que, comme je l'ai dit à M. Coderre, nous avons fait un effort majeur à la CBC pour refléter la réalité de notre pays et faire le pont entre les deux cultures. Pensez à toutes les émissions que j'ai mentionnées et à toutes les activités au petit écran et même à la radio. En ce sens, isoler une seule émission et insister pour qu'on fasse telle et telle choses dans cette émission, je trouve cela un peu limité. Je dois même revenir...
    Je comprends votre propos, mais je veux quand même que vous soyez très conscient que si on tient cette rencontre ce matin, c'est justement pour discuter de ce gala, qui a une portée pancanadienne. C'est un spectacle d'une soirée qui met en valeur des musiciens et des chanteurs de grande qualité.
    Les règles du jeu étaient claires pour tout le monde. Nous avons fait la même émission il y a trois ans. Chaque fois, nous avons mis l'accent sur les musiciens et les chanteurs qui sont connus au Canada anglais. Ce n'est pas un changement de politique. Quand nous avons signé notre contrat avec M. Dubois, nous avons indiqué clairement les conditions de la diffusion. Je cite le contrat:
Le Gala sera diffusé en entier sur CBC Radio Two le dimanche de mars 2008 et les meilleurs moments seront diffusés sur CBC Radio One le lundi 3 mars. La Télévision de la CBC diffusera les meilleurs moments des intronisations de Paul Anka et Oscar Peterson, le lundi 3 mars [...]
    J'ai compris le contrat.
    Monsieur Stursberg, je veux simplement souligner quelque chose. Je suis enseignant de formation. Lorsque je demandais à mes élèves de me nommer des artistes, des comédiens, des chanteurs et des compositeurs du Canada, autant du Canada anglais que du Canada français ou du Québec, ils avaient énormément de difficulté à le faire. Toutefois, ils n'avaient pas de difficulté à nommer des gens de la culture américaine.
    Si on ne met pas en évidence tant la culture québécoise que la culture canadienne anglaise, si on ne fait pas l'effort de faire connaître tant les Québécois que les Canadiens anglais, la référence de notre jeunesse et des auditeurs demeurera toujours la grosse machine américaine, qui va mener nos adolescents.
    Merci.
(0935)
    Si on veut donner l'occasion à tous les membres du comité de prendre la parole, il faudrait respecter le temps imparti à chacun.
    Monsieur Godin.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais vous souhaiter la bienvenue au Comité des langues officielles, malgré que vous trouvez que ce n'est pas ici que vous devriez être ce matin. Ces propos me surprennent.
    D'après l'information dont je dispose, ce n'est pas la première fois que CBC exclut des francophones et montre des artistes anglophones lors de la diffusion d'un gala. Est-ce vrai?
    Ce n'est pas la première fois que nous diffusons ce gala. Nous le diffusons seulement à la télévision; il n'est pas diffusé à la radio. Les musiciens que l'auditoire anglophone connaît bien sont anglophones.
    Si on adoptait votre attitude, un bon chanteur d'Acadie, Jean-François Breau, n'aurait jamais été connu, même pas au Québec. La Société Radio-Canada pourrait dire que Jean-François Breau vient de Tracadie-Sheila et qu'elle ne le diffuse pas parce qu'il n'est pas connu au Québec.
    Le Québec a une population de 7 millions, et celle de l'Acadie est de 250 000. La Péninsule acadienne, pour sa part, compte 60 000 habitants. Tous ces gens n'auraient pas connu ce chanteur. Ils n'auraient jamais entendu parler non plus Johnny Cash ou Hank Williams, puisqu'ils ne chantaient pas en français.
    J'ai de la difficulté à concevoir cela, monsieur Stursberg. Ce n'est pas comme si c'était une émission où quelqu'un venait faire des commentaires que l'auditoire ne pourrait pas comprendre. Seigneur de la vie, c'est un gala, ce sont des chansons, de la musique. C'est différent.
    On m'a invité à des spectacles où chantaient des autochtones. En tout respect, je dois dire que je n'ai compris aucune des paroles de la chanson, mais j'ai adoré le son et la musique. Il y a trois cultures. En fait, il y a plus que trois cultures au Canada, mais je vais mentionner les premières nations, qui ont été les premiers habitants, et les deux peuples, les Anglais et les Français, qui sont arrivés d'Europe. Je taperais autant sur les doigts de Radio-Canada si elle commençait à exclure des chanteurs. S'ils ne connaissent pas Claude Dubois, il est peut-être temps de le faire connaître. C'était une occasion de le faire.
    C'est une question?
    En voulez-vous d'autres?

[Traduction]

    Vous savez, nous pouvons en reparler trois ou quatre fois, et je suis désolé si vous n'aimez pas ma réponse à votre question, mais je crois qu'il faut reconnaître une prémisse simple — enfin, deux. Premièrement, c'est que nous savons comment programmer des réseaux de radio et de télévision de la façon qui fonctionne le mieux pour notre public, et deuxièmement, c'est que dans un contexte de tentative de faire le pont entre le Canada français et le Canada anglais, nous voulons procéder de la façon qui sera la plus efficace.
    Je ne vois pas l'utilité d'une émission que les gens n'écouteront pas. Les gens n'apprennent rien de cette manière. Donc, comme je l'ai dit au départ, nous avons fait d'énormes efforts — d'énormes efforts — pour ce faire, que ce soit par le biais de dramatiques, documentaires, événements musicaux, peu importe.
    Qu'on pointe du doigt cette émission en particulier, franchement, je ne comprends pas.

[Français]

    Et si on dit que tout le reste est à part, je suis alors totalement confus. J'ai l'impression que les membres du comité croient que la CBC et moi-même sommes anti-francophones.
(0940)
    J'invoque le Règlement, monsieur le président.
    Monsieur Coderre.
    Monsieur le président, même si on tient des débats politiques, je ne vais accepter en aucun cas ce genre de chose. Il n'y a pas d'anti-francophones ici. Je demande donc au témoin de retirer ses paroles. Il comparaît devant nous parce qu'il fait partie d'une institution publique et qu'il est imputable face aux contribuables. Je n'accepte pas, monsieur Stursberg, que vous disiez qu'on vous a traité d'anti-francophones. Nous voulons la vérité. L'autosuffisance dont vous faites preuve aujourd'hui nous prouve qu'on avait raison de vous convoquer.
    Merci, monsieur Coderre.
    Je crois que c'est une question délicate et qu'il s'agit davantage d'un sujet à débat ou à interprétation. Il est maintenant clair, selon moi, que tous les membres du comité ont à coeur l'intérêt de la dualité linguistique et l'avancement des deux communautés. Je demanderais à M. Stursberg de poursuivre. Ça aura peut-être permis, à tout le moins, de corriger certaines perceptions qui, j'en suis convaincu, sont erronées.
    Oui, mais monsieur le président, je ne veux pas que ce soit retranché de mon temps.
    D'accord, monsieur Godin, on va être généreux.
    Que dois-je faire maintenant: continuer avec M. Godin ou répondre à M. Coderre?
    Vous pouvez continuer avec M. Godin, monsieur Stursberg.
    C'est ma réponse, en effet.
    C'est votre réponse, mais elle me cause un problème. On parle de cas particulier, mais dans ce cas-ci, il s'agit de chanson. Est-ce à dire que si un chanteur anglophone apparaît à une émission de Radio-Canada ou de n'importe quel autre poste de télévision, nous allons changer de station? Quelle sorte d'attitude a la CBC?
    Je dois vous dire que...
    C'est ce que vous avez dit, monsieur.
    Mes collègues de Radio-Canada suivent exactement la même politique, c'est-à-dire qu'aucun musicien ou chanteur anglophone n'est présenté au petit écran en français. C'est la vérité. Mes collègues de Radio-Canada ont décidé de ne pas diffuser ce spectacle, et je respecte leur décision.
    Vous avez dit que Radio-Canada n'était pas présent parce qu'il s'agissait d'une émission de grande envergure en anglais à Toronto à laquelle des francophones avaient été invités. Je suis persuadé que dans le cadre d'émissions de ce genre à Radio-Canada — et ce n'est pas que je tienne à prendre la part de cet organisme; ce n'est pas dans mes habitudes —, si quelqu'un chante en anglais, on ne va pas supprimer sa prestation du fait qu'il chante en anglais.
    En effet, et nous avons aussi des émissions avec des musiciens francophones, comme je l'ai mentionné un peu plus tôt. En ce qui a trait à cette émission, il s'agissait du gala et du Panthéon. C'est mon raisonnement.
    Vous pensez que les anglophones n'aimeraient pas entendre une chanson en français s'ils ne connaissaient pas le chanteur. On ferme la télévision ou on change de poste.
    En effet, c'est ce que nous pensons. Le danger, si on a quelqu'un qui n'est pas connu du tout au Canada anglais...
    Qui va les faire connaître?
    Nous avons beaucoup de responsabilités. Nous avons pris une décision. Vous pouvez être d'accord ou non, mais c'était notre point de vue.
    Êtes-vous toujours d'accord sur cette position aujourd'hui?
    Oui.
    Après tout ce qui s'est passé?
    Oui.
    Nous allons passer à un autre député.
    Monsieur Chong.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur Stursberg, d'être venu aujourd'hui. Je tenais à ce que vous comparaissez aujourd'hui, à ce que Radio-Canada vienne témoigner aujourd'hui, mais pas pour ressasser les événements qui se sont produits au gala ou les remarques du chanteur Claude Dubois, mais plutôt pour vous permettre de nous décrire comment vous remplissez deux importants éléments du mandat que vous confère la Loi sur la radiodiffusion de 1991.
    Mais tout d'abord, j'aimerais vous faire remarquer une chose, à savoir que vous ne pouvez avoir le beurre et l'argent du beurre. Vous ne pouvez, d'une part, établir votre programmation de façon indépendante et, d'autre part, exiger des députés qu'ils réagissent aux critiques formulées par certains à l'endroit de ces décisions sur la programmation.
    Vous avez affirmé prendre vos décisions en matière de programmation de façon indépendante, mais vous vous êtes aussi dit étonné que nous ne nous soyons pas élevés contre les remarques de M. Claude Dubois. Si vous prenez vos décisions sur la programmation de façon indépendante, nous ne sommes pas responsables des réactions que ces décisions peuvent susciter, surtout de la part non pas de parlementaires mais de simples citoyens.
    Cela dit, je voulais vous voir aujourd'hui pour aborder deux éléments particuliers de votre mandat prévu à la Loi sur la radiodiffusion de 1991. Il s'agit du sous-alinéa 3(1)m)(iv) qui dispose que votre programmation doit « refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue » et du sous-alinéa (vi) qui stipule que votre programmation doit « contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales ».
    Vous avez décrit quelques-unes des initiatives lancées par la Société pour remplir cette partie de son mandat — l'émission de télévision Sophie, d'autres initiatives entreprises ces dernières années — mais je crois qu'il y a quand même beaucoup de gens qui se demandent si vous ne pourriez faire plus.
    Je pense plus précisément à la collecte de l'information. J'ignore combien de fois j'ai regardé le téléjournal au grand réseau de CBC et ensuite le bulletin de nouvelles de Radio-Canada pour constater que, même si on présente les mêmes informations, ces bulletins de nouvelles pourraient venir de deux pays différents; les sujets et l'angle sous lequel on les aborde sont tout à fait différents. Je sais que vous avez déployé des efforts pour que la collecte de l'information se fasse en commun, mais il semble que ce ne soit pas le cas souvent. À cet égard, j'estime que votre Société pourrait mieux remplir son mandat.
    Par ailleurs, les services radio sont assez efficaces et assez économiques — ils ne sont pas terriblement coûteux — mais dans bien des régions de l'Ontario, par exemple, on ne capte pas la Première Chaîne de Radio-Canada en langue française, sauf, peut-être, sur la bande AM où la réception est horrible. Or, la radio est un autre exemple d'une façon efficace et peu coûteuse d'offrir des services en langue française qu'on néglige. Dans ma région du Sud-Ouest de l'Ontario, il est presque impossible d'avoir accès aux services de langue française de la radio de Radio-Canada.
    Ce sont là deux aspects de votre mandat prévus aux sous-alinéas 3(1)m)(iv) et (vi) de la Loi sur la radiodiffusion de 1991 que vous pourriez mieux remplir.
    J'aimerais savoir ce que vous en pensez.
(0945)
    Il est certain que nous aimerions que nos services radio en français et en anglais diffusent sur une plus grande échelle. On nous a d'ailleurs demandé de présenter une proposition en ce sens dans un rapport, si je ne m'abuse, du comité du patrimoine de la Chambre des communes. Et c'est ce que nous avons fait; il y a deux ans, nous avons déposé un rapport proposant des façons de faire précisément cela. Je suis donc tout à fait d'accord avec vous.
    J'abonde aussi dans le même sens que vous — et que tous les membres du comité, ce qui m'a d'ailleurs frappé — et j'estime que CBC/Radio-Canada a le devoir fondamental de refléter et d'interpréter les deux grandes cultures l'une à l'autre. Je suis entièrement d'accord avec vous là-dessus. Je suis d'accord avec la prémisse qui sous-tend toutes vos questions. Voilà pourquoi, comme je l'ai indiqué, nous avons déployé tant d'efforts à déterminer comment réaliser cela, comment présenter deux cultures l'une à l'autre d'une façon qui réponde aux attentes différentes de nos cultures et de nos auditoires.
    Pour ma part, je voulais une émission comme Au courant et je voulais que Mitsou l'anime, car je voulais une émission qui serait une fenêtre sur la culture française et qui serait diffusée chaque semaine. J'ai aussi eu l'idée de reprendre l'émission Rumeurs ainsi que Les hauts et les bas de Sophie Paquin.
    Pour ce qui est du travail en commun des journalistes, vous avez raison. Bon nombre de nos journalistes à l'étranger présentent maintenant le reportage dans les deux langues. Toutefois, il n'est pas facile de trouver des journalistes qui puissent travailler en anglais et en français, car cela implique une aisance dans les deux langues qui est rare. Mais je crois que vous avez tout à fait raison. J'ai d'ailleurs souligné dans mon allocution d'ouverture que Radio-Canada et CBC ont réalisé ensemble plus de 200 reportages récemment.
    Mon collègue Sylvain Lafrance et moi dirigeons ensemble, au sein de l'organisation, un fonds servant à cette fin précise, à faire en sorte que plus de projets soient réalisés en anglais et en français. Encore une fois, je suis tout à fait d'accord avec vous.
    J'ajouterai cependant une chose qui, je crois, est importante: nous ne devons pas oublier de présenter des émissions qui plaisent à nos auditoires. Si nos auditoires n'aiment pas nos émissions ou ne les comprennent pas, nous ne progresserons pas. Ils se désintéresseront tout simplement de Radio-Canada et de CBC.
    J'ignore dans quelle mesure ces projets communs améliorent la situation. Ce qui permet d'améliorer la situation, c'est la présentation d'une programmation que les gens trouvent intéressante, divertissante et stimulante, une programmation qu'ils souhaitent regarder...
(0950)

[Français]

     Merci, monsieur Chong et monsieur Stursberg.
     On va maintenant commencer notre deuxième tour. Cette fois, les parlementaires disposeront de cinq minutes, et M. Pablo Rodriguez ouvrira le bal.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Stursberg, le gala du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens inclut l'ensemble des auteurs et compositeurs. Il inclut aussi les francophones et l'ensemble du pays. Il n'y a donc pas d'équivalent de cette émission en français. C'est l'émission pour l'ensemble du pays, et elle doit refléter la réalité canadienne, anglophone et francophone.
    Oui.
    Pouvez-vous me dire pourquoi le secrétaire général du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens, M. Martin Duchesne, a démissionné en janvier?
    Je n'en ai aucune idée.
    Vous n'en avez aucune idée. On a cru comprendre que c'était justement lié au fait que...
     Parlez-vous de M. Frank Davies?
    Non, je parle de M. Martin Duchesne.
    Non, je ne sais pas.
    On a cru comprendre qu'il était contre l'idée de retirer les francophones de la vitrine médiatique.
     Les autres années, quand vous avez organisé le même événement, y a-t-il eu des francophones au cours de ces 44 minutes?
    Non.
    À aucun moment?
    Non.
    Ceux qui étaient là cette année le savaient-ils?
    Je présume que oui, c'était la politique que nous suivions.
    L'avez-vous communiquée? Claude Dubois était-il au courant?
    Oui, j'ai même cité le contrat de Claude Dubois.
    Je comprends le contrat, mais on ne peut pas...
    Je n'étais pas là lors des conversations entre Claude Dubois et le Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens. À ce que je sache, son contrat indiquait clairement ce que nous comptions faire à la télévision.
    Si je suis votre logique, ça fait trois ans qu'on procède au même exercice, qu'on réduit le spectacle à 44 minutes et qu'il n'y a pas de francophones. On connaît donc le format. On le sait.
    On connaît très bien le format.
    Selon vos propos, on ne diffusera pas de musique que les gens ne peuvent pas comprendre. Donc, on sait à l'avance qu'il n'y aura pas de francophones.
    Il faut noter que ça dépend de la plateforme. Nous avons diffusé sur Radio 2 trois heures et demie du spectacle, y compris tous les francophones.
    Et sur Radio One?
    Si je me souviens bien, une heure était consacrée aux francophones. C'est autre chose à la télévision, parce que nous avions seulement 44 minutes. Le décès d'Oscar Peterson est survenu, et nous avons décidé de mettre l'accent sur Paul Anka et Oscar Peterson. Nous avons aussi décidé de ne pas inclure d'autres anglophones, dont j'ai déjà cité le nom.
    Ce n'est même plus un pattern, c'est un fait. Chaque année, on invite des francophones et on les coupe à chaque fois. Je présume que vous ferez la même chose l'an prochain, puisque vous avez dit à M. Godin que vous étiez encore d'accord sur ce raisonnement.
    Oui.
    Vous ferez donc la même chose l'an prochain.
    Nous sommes en train...
    Pourriez-vous, par respect pour les francophones, leur dire à l'avance qu'ils seront coupés?
    La chose qui m'a frappée est le fait que nous avons une conversation assez intéressante. J'ai été très impressionné par la réaction de tout le pays à notre décision. En ce sens, nous sommes en train de considérer ce que nous ferons à l'avenir. Nous n'avons pas encore décidé ce que nous ferons concernant cet événement, mais...
(0955)
    Si vous gardez le même pattern, monsieur Stursberg, si vous condensez une émission de trois heures en 44 minutes... D'après votre philosophie, il faut diffuser des choses que les anglophones comprennent et apprécient. Vous dites que vous êtes encore d'accord sur la décision passée. Je ne vois pas de changement de cap; vous allez faire exactement la même chose l'an prochain.
    Par respect pour les artistes francophones du Québec ou hors Québec, je vous demande de leur dire qu'ils ne seront pas diffusés.
    Je rejette l'idée que nous n'avons pas de respect pour les artistes québécois. Ce n'est pas vrai. Nous avons même fait un effort considérable pour refléter la réalité, pour faire le pont entre les deux cultures. C'est un objectif primordial pour la CBC. J'ai l'impression que nous avons fait un très bon travail. Franchement, je trouve que citer uniquement cette émission...
    C'est parce que c'est le gala canadien. Je vous ai demandé d'entrée de jeu s'il y avait un gala francophone équivalent, un panthéon de la musique francophone. Il n'y en a pas. Il y a un seul gala pour toute la musique canadienne, lequel inclut la musique francophone. La musique canadienne inclut les artistes québécois et francophones hors Québec. C'est ça, mon pays, ma culture et la musique que j'écoute. Cela comprend tout le monde.
    Merci, monsieur Rodriguez.
    Voulez-vous faire un bref commentaire, monsieur Stursberg?
    Je crains de me répéter. Oui, c'est très important, mais nous avons pris des décisions. Nos collègues de Radio-Canada ont décidé de ne pas diffuser le spectacle.
    Merci, monsieur Stursberg.
    Ils ont pris cette décision.
    On se tourne maintenant du côté du gouvernement.
    Monsieur Petit.
    Bonjour, monsieur Stursberg.
    On vous a demandé de comparaître aujourd'hui pour tenter de déterminer ce qui s'était passé lors du gala du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens. Naturellement, vous avez constaté qu'il y avait eu tout un tollé, que bien des gens s'étaient plaints par l'entremise des journaux du Québec et du pays. Bref, on s'est posé des questions sur cette émission.
    Je pense que vous avez compris notre questionnement. C'est que le gala est en effet le panthéon, le summum de la culture canadienne, et que vous avez l'obligation, en tant qu'institution, de respecter la dualité linguistique, le multiculturalisme. Vous y êtes obligé; ça fait partie de votre mandat. Pour ma part, je pense que vous n'avez pas respecté ce mandat dans le cadre de cette émission. Quand vous avez invité tous les artistes à participer à ces 44 minutes, vous auriez pu avoir la décence de présenter les artistes francophones.
     Vous dites que votre auditoire ne voulait pas voir d'artistes francophones à la télévision, mais je ne suis pas d'accord avec vous. Pour ma part, je suis capable d'écouter la télévision en anglais. Comment les Américains nous transmettent-ils leur culture? Par leur musique, donc par leur culture, qui est diffusée continuellement. Comment pouvons-nous influencer les anglophones? Par notre culture. Et ça va dans les deux sens. Vous dites qu'à Toronto, les gens voulaient voir uniquement des artistes anglophones, mais ce n'est pas vrai. Vous n'êtes pas dans la tête de tous les Canadiens. Certains Canadiens anglais veulent écouter nos artistes. Vous divisez les deux côtés. Ceux qui avaient la charge du gala ont décidé de ne pas nous accorder une seule des 44 minutes. C'est vraiment insultant. C'est pour cette raison uniquement que vous comparaissez aujourd'hui.
    Vous dites aussi avoir diffusé les trois heures du gala sur Radio 2 et une heure ou deux de celui-ci sur Radio One. Si vous venez dans la région de Québec, vous allez constater que la radio de Radio-Canada, même en français, n'est pas écoutée. Alors ne venez pas me dire que c'était le bon médium. Celui que je veux, c'est la télévision. Il est le plus important parce qu'il est moderne. Je ne veux pas dire que la radio ne l'est pas, mais la télévision, c'est important. Je veux voir mes artistes danser, chanter, s'exprimer, et je veux que l'autre culture soit représentée elle aussi.
    Ma question est simple. En réponse à une question d'un collègue, vous avez semblé dire plus tôt que vous alliez répéter la même formule lors du prochain gala du panthéon. Allez-vous encore couper la prestation de nos artistes ou allez-vous prévoir des rencontres en vue de changer cette attitude? Je vous fais un reproche, mais ce n'est pas vous que je vise en particulier, c'est votre société. Je veux savoir si, à l'intérieur des 44 minutes, vous allez nous consacrer au moins une minute. C'est un minimum auquel on a droit, compte tenu qu'on finance 33 p. 100 de votre budget.
    Merci.
(1000)
    Une minute, c'est justement ce qu'il vous reste, monsieur Stursberg.
    Je peux me répéter encore une fois. Nous en sommes à considérer ce que nous allons faire à l'avenir concernant le gala du panthéon. Je suis ici pour vous écouter et tenir cette conversation. J'ai essayé de vous expliquer mon raisonnement concernant cette émission, mais je comprends très bien que vous le rejetiez. Je vous écoute.
    Merci.
    Nous allons continuer notre deuxième tour de table avec M. Gravel.
    Je ne ferai pas de long préambule. J'aimerais savoir si Claude Dubois aurait fait partie de l'émission s'il avait chanté en anglais.
    Probablement pas, compte tenu qu'il n'est pas très connu chez les anglophones. Il y a eu aussi le problème de la mort d'Oscar Peterson. Le temps était incroyablement limité. Vous pouvez rejeter ce raisonnement, mais nous avons décidé de ne pas inclure la prestation de Claude Dubois à l'émission parce qu'il n'est pas très connu au Canada anglais et que nous craignions que les gens changent de poste.
    Que suggérez-vous pour faire connaître les chanteurs québécois ou francophones du Québec ou d'ailleurs au Canada? Comment les fait-on connaître aux anglophones, si on ne les fait jamais chanter parce que l'auditoire anglophone ne veut pas les entendre? Donnez-moi une recette.
    Nous avons fait beaucoup d'échanges, mais à la radio. Nous avons fait des programmes qui sont ...
    Je parle de la télé, monsieur.
    Oui, je comprends. Le meilleur médium pour la musique est la radio et non la télévision. Nous avons créé plusieurs programmes de radio qui diffusent des francophones. Cela ne pose pas de problème.
    S'il est vrai que des chanteurs francophones sont diffusés à la radio anglophone, pourquoi, maintenant qu'ils sont connus de l'auditoire anglophone, ne peuvent-ils pas être intégrés à une émission de télévision anglophone?
    Je crois que j'ai expliqué à plusieurs reprises mon raisonnement. La meilleur médium pour la musique demeure la radio.
    Dans ce cas, pour le prochain panthéon ou gala, n'invitez pas des francophones. Pourquoi les francophones iraient-ils à cette émission s'ils sont coupés au montage? C'est même offensant pour eux. Arrêtez de les inviter, dites-leur que vous ne les invitez pas. Faites un gala uniquement anglophone.
(1005)
    On a quelques émissions du gala. On peut avoir au gala des francophones et des anglophones, sans problème. On a diffusé les trois heures et demie du gala sur Radio 2.
    Ça fait trois fois que vous le dites.
    Je comprends, mais nous avons décidé, compte tenu des 44 minutes disponibles pour la télévision...
    Monsieur, soit dit en passant, ce n'est pas vrai qu'il n'y a pas de chanteurs anglophones à Radio-Canada.
    Non. J'ai dit que Radio-Canada avait décidé de ne pas diffuser le gala à la télévision. C'est tout ce que j'ai dit. Je respecte la décision de mes collègues de Radio-Canada.
    S'ils avaient présenté le gala et coupé tous les anglophones pour garder seulement les francophones, je ne suis pas sûr que ça aurait passé.
    Ça ne m'aurait posé aucun problème. Je respecte le fait qu'ils connaissent mieux que moi l'auditoire francophone.
    Monsieur, ça fait partie des raisons pour lesquelles il y a un mouvement souverainiste au Québec. Pour ma part, si je suis souverainiste, c'est à cause de comportements comme le vôtre de la part d'anglophones. Vous n'aidez pas à rapprocher les deux cultures.
    Je suis parfaitement d'accord sur la prémisse de vos questions. Faire le pont entre les deux cultures est un objectif primordial pour la CBC. Je vous ai donné beaucoup d'exemples de ce que nous avons fait dans le passé et de ce que nous faisons présentement. Tout ce que je vous dis, c'est que nous avons pris certaines décisions en ce qui concerne ces 44 minutes. Pour ce qui est de faire le pont, je suis absolument d'accord là-dessus.
    Vous avez parlé plus tôt de Mitsou, qui a été populaire comme chanteuse québécoise. À titre d'information, ce n'est pas par sa voix qu'elle est devenue populaire au Québec.
    On continue avec M. Yvon Godin.
    Merci, monsieur le président.
    L'auditoire qui assistait au gala était-il anglophone et francophone?
    Dans le théâtre?
    Directement au gala.
    Je ne le sais pas, je n'ai pas assisté au gala.
    Puisque vous avez un...
    Je présume que des francophones assistaient au gala parce qu'on honorait aussi des francophones.
    C'est ce que je ne peux pas comprendre. Pourquoi inviter un artiste qui n'est pas connu à un gala qui reconnaît des artistes anglophones? N'avez-vous pas peur que l'audience aille fumer une cigarette pendant qu'il chante?
    Ce n'est pas moi qui ai effectivement décidé de la politique du panthéon.
    On parle de chanteurs.
    Ne saviez-vous pas que partout au Canada, plusieurs personnes qui forment des couples exogames, où l'homme est francophone et la femme est anglophone ou vice versa, écoutent CBC?
    Oui, et?
    Par exemple, dans le nord de l'Ontario, à White River, un de mes frères est marié à une anglophone, et ils écoutent CBC. S'ils écoutent une émission sur les ondes de CBC et qu'un artiste chante en français, je ne pense pas qu'ils changent de poste.
     On se fait dire que, puisque l'auditoire est anglophone, on a peur qu'il change de poste. Tout ce que vous vous êtes vanté de faire va à l'encontre de ce que vous nous dites: une chanson de trois minutes peut décider tout un auditoire à changer de poste; par contre, on semble prêt à utiliser 45 minutes de la programmation pour faire la promotion de la culture.
     N'avez-vous pas peur de perdre tout votre auditoire à tout jamais?
    Je peux répéter mon...
    Non, je ne veux pas que vous vous répétiez.
    Vous vous êtes excusé. Pourquoi vous êtes-vous excusé ainsi? Vous avez présenté des excuses. Pourquoi l'avez-vous fait?
    Dans la lettre que j'ai écrite?
(1010)
    Oui.
    Je vais chercher la lettre, parce que je dois la citer. C'est bien important de citer exactement ce qu'on a dit.
    Accordez-moi une minute, s'il vous plaît.
    Vous avez admis que vous auriez pu faire mieux pour refléter toute la diversité des participants.
    Attendez, s'il vous plaît. J'ai ici une copie de la lettre.

[Traduction]

    Je vous la relis, si vous ne voyez pas d'objection:
Au nom de la télévision de CBC, je tiens à exprimer nos regrets et nos inquiétudes devant la réaction qu'a suscitée la retransmission du Gala du panthéon des auteurs et compositeurs canadiens. L'émission, qui se voulait un effort pour refléter un gala de trois heures en 44 minutes, n'incluait pas les prestations de tous les intronisés, plus précisément aucun artiste francophone. Le spectacle musical dans son intégralité a toutefois été diffusé à CBC Radio 2 dimanche soir.

Étant donné que l'émission était diffusée sur le réseau anglais de la SRC et qu'elle s'adressait à un auditoire de langue anglaise, nous avons estimé préférable de mettre l'accent sur la musique et les musiciens mieux connus de l'auditoire.
    C'est justement ce que nous avons évoqué ce matin. Je sais que vous n'êtes pas d'accord, mais c'était notre avis.
Après mûre réflexion et devant la réaction négative qu'a suscitée l'émission télévisée, nous reconnaissons que nous aurions pu mieux refléter la diversité des prestations.
    Comment avez-vous pu agir ainsi, alors? Si vous n'êtes pas d'accord avec nous ce matin, comment avez-vous pu agir ainsi? Pouvez-vous nous expliquer ce que vous ferez à l'avenir? Vous avez reconnu que vous auriez pu prendre une meilleure décision.
    Comme je l'ai dit, nous réfléchissons à ce que nous pourrons faire selon les circonstances. Aucune décision n'a encore été prise. Je le répète, nous sommes venus ce matin pour en discuter, pour vous écouter, pour mieux connaître vos préoccupations. Après avoir réfléchi à tout ce qui aura été dit sur la question, nous prendrons une décision.
    Puis-je citer le dernier paragraphe de la lettre?
    Oui.
    Cela me paraît très important :

    Nous n'avions certainement pas l'intention d'offusquer quelque artiste que ce soit en l'excluant du spectacle diffusé, mais nous sommes conscients que cela ait pu être perçu ainsi. Nous en sommes désolés.
    C'est ce à quoi je reviens toujours: ni les membres de votre comité, ni la haute direction de CBC sont en désaccord quant à notre responsabilité à ce chapitre.
    Vous avez parlé de la mort de l'une des personnes...

[Français]

    Merci, monsieur Godin.
     On continue maintenant avec M. D'Amours.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, monsieur Stursberg, de comparaître devant nous ce matin. C'est extrêmement important. Je représente une circonscription du nord du Nouveau-Brunswick qui comprend une bonne proportion d'anglophones et de familles exogames composées d'anglophones et de francophones vivant sous le même toit.
    Je voudrais prendre deux secondes pour parler de votre lettre d'excuses. Vous nous l'avez lue en anglais. J'espère que vous l'aviez en français aussi.
     En réalité, monsieur Stursberg, si un anglophone ne savait pas que des francophones s'étaient produits au panthéon, cela ne le touchait pas. Ce sont les francophones que vous avez extrêmement vexés.
    Or, j'espère que la lettre d'excuses a initialement été écrite en français, de même qu'en anglais pour que les anglophones puissent comprendre que CBC avait pris une très mauvaise décision en éliminant complètement tout artiste francophone du panthéon.
    Est-ce le cas? La lettre d'excuses a-t-elle aussi été rédigée en français pour les francophones, d'abord?
    Malheureusement, je n'ai pas de copie en français avec moi, mais il y a certainement eu deux versions de la lettre: l'une en français et l'autre en anglais.
    J'aimerais que vos lettres soient déposées au comité, s'il vous plaît, afin que les membres du comité puissent en avoir une copie.
    Avec plaisir. Je vais poser la question à Shaun.
    Avons-nous une copie de la version française avec nous?

[Traduction]

    Une voix: Elle sera déposée.
    M. Richard Stursberg: Bien.

[Français]

     Merci, monsieur Stursberg, je prends note que vous allez remettre les versions française et anglaise de la lettre. Vous pourrez les remettre à notre greffier. Merci beaucoup.
    Monsieur D'Amours.
    Vous me laisserez un petit peu plus de temps, monsieur le président, pour compenser celui que vous avez utilisé.
    Monsieur Stursberg, est-ce la CBC qui a filmé le gala?
    Non, c'était une production indépendante.
     La CBC avait-il commandé l'enregistrement de l'émission?
    Oui.
    Pouvez-vous m'expliquer alors pourquoi vous n'avez pas demandé à ces gens de couper au départ les sections en français? Vous saviez que vous ne vouliez pas que les sections en français apparaissent dans votre émission à la télévision de la CBC.
    Pourquoi n'avez-vous pas simplement épargné des coûts, puisque vous n'étiez pas intéressé à présenter les francophones dans votre émission? Avez-vous fait cela simplement pour sauver les apparences et pour donner l'impression aux gens qu'ils auraient peut-être la chance de montrer leur talent aux anglophones du reste du pays? Avez-vous seulement voulu tout filmer pour sauver les apparences?
    Au moins, les francophones qui se sont fait filmer auraient su clairement qu'ils n'auraient pas la chance de tenter une percée dans le monde anglophone. C'est ce qu'on peut voir.
     C'est la réalité de nombreuses familles de ma circonscription dont un parent est francophone et l'autre, anglophone. Si un des membres de la famille regarde une émission en français, l'autre la regardera aussi. À un autre moment, ils écoutent tous les deux une émission en anglais. Dire que votre auditoire risque de changer de poste n'est-il pas un peu exagéré? Votre auditoire est aussi constitué de familles dont un membre est francophone et l'autre est anglophone. De plus, dans certains cas, des anglophones voudront en apprendre davantage.
    Comment voulez-vous que la diversité culturelle de ce pays soit reflétée si vous avez pour prémisse que les anglophones vont changer de poste? Les anglophones sont peut-être intéressés à écouter des artistes qui se démarquent. Ce ne sont pas de nouveaux artistes qui arrivent au hasard. On parle du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens.
    Ne pensez-vous pas que cela intéresserait des anglophones, tout comme des francophones sont intéressés à connaître les artistes anglophones? Ne pensez-vous pas que les Canadiens, qu'il soient anglophones ou francophones, sont intéressés à apprendre et à connaître autre chose, même si la CBC et vous êtes peut-être moins ouverts?
(1015)
    Je suis d'accord et cela ne me pose aucun problème.
    Quand on parle du Nouveau-Brunswick, on parle de la région de notre pays qui est probablement la plus bilingue et la plus biculturelle qu'on puisse imaginer. Je peux vous assurer que ce n'est pas la même chose à Toronto ou même dans l'Ouest canadien, et...
    Monsieur Stursberg, je vais vous donner un exemple. J'ai de la famille proche qui vit au Manitoba. Un membre de la famille est francophone, l'autre membre de la famille est anglophone. Les enfants regardent la télévision dans les deux langues. Ne pensez-vous pas que ça aurait apporté une culture additionnelle à ces gens-là et que ça leur aurait montré que les francophones font aussi du bon travail partout au pays?
    Là n'est pas la question. Nous offrons deux services: un service en anglais et un service en français. Nous n'offrons pas de service bilingue. Je comprends très bien que des gens soient parfaitement à l'aise en français et en anglais, au Nouveau-Brunswick, au Québec et à l'est de l'Ontario, mais malheureusement, la réalité de notre pays, c'est que beaucoup de gens ne comprennent pas un mot de français. Si on passe par Toronto, c'est triste, mais c'est la réalité. Moi, je suis de Toronto, je....
    Merci, monsieur Stursberg. Vous pourrez développer cette idée davantage si...
    Les parlementaires ont maintenant pu s'exprimer. M. Lebel souhaite parler. D'autres députés souhaitent-ils prendre la parole?
    Nous allons poursuivre. Monsieur Nadeau, avez-vous quelque chose à ajouter? Et vous, monsieur Godin?
    Continuons du côté de M. Denis Lebel.
    Merci beaucoup, monsieur Stursberg, pour votre présence et votre présentation. Vous savez très bien que je suis, comme les autres, en désaccord sur l'approche que vous préconisez dans ce dossier.
    En tant que parlementaires, notre devoir est de faire la promotion des deux langues officielles de notre pays, et c'est ce que nous faisons avec plaisir. Ce n'est pas souvent ce que nous faisons qui est important. Bravo pour le travail et les nombreux efforts que vous faites. Cependant, c'est dans les petits détails qu'est le diable, comme on le dit au Québec. On a commis une erreur dans le traitement d'un événement aussi important que celui d'un gala national pour la reconnaissance de la musique canadienne. Le gala a lieu depuis quatre ans et on fait la même erreur chaque année.
    S'il y a un ratio de présence francophone au gala, il doit aussi être télédiffusé, comme le reste. Lorsqu'on se nomme Claude Dubois, qu'on est l'un des meilleurs chanteurs francophones au monde et qu'on se fait dire dans un contrat que les meilleurs moments d'un gala auquel on participe seront diffusés, on pense certainement que sa prestation risque d'être diffusée, peu importe la langue dans laquelle on s'exprime.
    Je comprends que c'est une question d'offre et de demande. On demande de l'anglais, donc on n'offre pas de contenu francophone. C'est une décision d'affaires. Est-ce le cas, monsieur Stursberg?
(1020)
    Effectivement, nous avons pris une décision en fonction de la nature de notre auditoire, de ce qui va l'intéresser. En ce sens, oui, c'est vrai.
    Je suivrai avec intérêt les résultats financiers de la société. Je ne pense pas que votre mandat soit nécessairement de nature financière. Je comprends que vous ayez des obligations budgétaires, mais amputer une partie du contenu culturel d'une émission diffusée à la grandeur du Canada qui touche les francophones est, selon moi, une erreur stratégique.
    Ce n'était pas pour des raisons financières.
    Non?
    Comme je l'ai dit, nous avons pris une décision...
    Mais, monsieur Stursberg...
    Le temps était limité et on devait prendre une décision. Nous avons décidé de mettre l'accent sur Paul Anka et Oscar Peterson. Je comprends très bien que vous croyiez que nous avons fait une erreur.
    Comme je vais manquer de temps, je pose une autre question.
    Est-il vrai que les membres du panthéon ont insisté pour que la prestation de M. Dubois soit diffusée lors de l'émission?
    Le président du panthéon nous a écrit pour nous demander d'inclure Claude Dubois. Nous l'avons fait à la radio, mais pas à la télévision.
    Monsieur Stursberg, quand je vous entends dire aujourd'hui que vous consultez le panthéon pour ce qui s'en vient et qu'on sait que le président vous a demandé d'inclure Claude Dubois, est-on est en droit de penser que cela risque de se reproduire dans le futur?
    Oui. Comme je vous l'ai dit, nous sommes en train de considérer...
    Vous avez dit avoir consulté le panthéon. Le président du panthéon vous a demandé d'inclure Claude Dubois l'an passé, et vous ne l'avez pas fait. Vous me répondez que vous consultez le panthéon dans le cadre de votre réflexion actuelle. Si c'est votre référence, les choses ne changeront pas.
    J'ai déjà parlé longuement avec les membres du panthéon. J'ai parlé à Peter Steinmetz à plusieurs reprises concernant ce que nous avons fait.
    Avant de passer à la prochaine question, monsieur Stursberg, je peux vous dire que je suis très fier qu'une ville de mon comté, Roberval, ait gagné le concours Kraft Hockeyville de CBC cette année. J'espère bien que vous viendrez à Roberval avec M. Don Cherry. Vous y serez très bien accueillis et on parlera dans une langue permettant de bien communiquer avec les gens qui viendront nous visiter. On se fera aussi un devoir de continuer à faire la promotion des deux langues officielles dans notre beau pays et dans mon comté de Roberval—Lac-Saint-Jean.
    Je terminerai en vous disant que la SRC a aussi un mandat. Je comprends qu'on puisse faire des affaires en français et en anglais, mais lorsqu'on tient un gala annuel qui est l'apothéose de la musique canadienne, il faut vraiment permettre à l'ensemble de l'auditoire canadien de la télévision, et non celui de la radio, d'être en contact avec la culture francophone, qu'elle soit québécoise ou d'ailleurs au pays.
    Merci, monsieur Lebel.
    Je reviens à M. Nadeau. M. Godin complétera ensuite le troisième tour.
    Merci, monsieur le président.
     Monsieur Stursberg, voici mes observations. D'abord, vous travaillez pour une société publique. Il y a 25 p. 100 de francophones au Canada. Le Québec représente une masse critique, mais il y en a aussi ailleurs sur le territoire pancanadien. Ils doivent donc se retrouver dans un panthéon de la musique qui reflète l'ensemble du pays, le Canada, dont 25 p. 100 de la population possède une langue et une culture différentes de celles du Canada anglais. Ils doivent être inclus dans un gala qui se veut pancanadien.
    Il ne peut en être autrement. C'est comme si l'on décidait de montrer certains buts au hockey parce qu'ils sont comptés par un tel, et de ne pas montrer les buts comptés par ceux possédant une autre langue, une autre culture. Quelque chose ne fonctionnerait pas dans cette joute.
    Ici, il est question de chansons; il ne s'agit pas d'une émission anglaise où tous les textes sont en français. Il est question de chansons, et une chanson, ça peut être fait dans n'importe quelle langue. Lorsque le groupe Kashtin ou les Naskapis de la Côte-Nord chantaient, ils le faisaient dans leur langue, le Montagnais. Je les ai vus chanter sur les ondes de la CBC et de la SRC. On ne les a pas coupés au montage parce qu'ils ne parlaient pas la langue de la chaîne publique proprement dite.
    Le message que vous nous transmettez — je suis souverainiste —, c'est le refus par les Canadiens anglais de la culture québécoise francophone, franco-canadienne, acadienne, etc., lors d'un gala, d'un panthéon de la musique. Ce message, il est faux. J'ai des amis de langue anglaise qui sont aussi intéressés par ce qui se passe dans le domaine de la musique d'expression française, qu'elle soit québécoise ou acadienne, que par ce qui se passe dans ce domaine ailleurs dans le monde ou au Canada.
    Par conséquent, s'il vous plaît, cette barrière ne doit pas exister. Les contribuables québécois francophones autant que les anglophones doivent se reconnaître, à la télévision comme à la radio, dans une émission portant sur le gala du Panthéon des auteurs et compositeurs canadiens, qui doit refléter les deux communautés de langue officielle au Canada: la nation québécoise et la nation canadienne.
     Arrêtez de dire que les gens ne veulent pas voir cela. Ce n'est pas vrai. C'est une télévision publique. S'ils veulent écouter de la télévision privée canadienne, québécoise, américaine ou autre, ils en ont le droit. Mais s'ils arrêtent pour voir le panthéon de la musique, ils ont le droit d'entendre autant les Eva Avila de ce monde, qui parlent et chantent en espagnol, en français et en anglais, que les Claude Dubois, même s'ils sont moins connus, selon vous. Vous avez tout intérêt à faire connaître l'ensemble des artistes.
     Ce n'est pas une question, c'est un commentaire. J'espère que vous allez en prendre bonne note pour le prochain gala. De toute façon, il y a un procès-verbal de cette rencontre.
(1025)
    Merci, monsieur Nadeau.
    MM. Godin, Coderre et Chong ont manifesté le souhait de s'exprimer.
    Monsieur Godin.
    Vous avez parlé plus tôt des communautés francophones du Québec et de l'Acadie. Étiez-vous au courant qu'à cause de tous les emplois créés dans l'industrie du pétrole en Alberta, cette province comptait maintenant beaucoup de francophones? Ils y sont en très grand nombre, possiblement dans des endroits où la télévision francophone n'est pas accessible. Ils écoutent peut-être la CBC. Il faut considérer ce qui se passe présentement dans notre pays. Notre comité discute des deux langues officielles de notre pays. Ne le prenez pas mal: je ne veux pas dire que la CBC devrait devenir une télévision francophone. Ce n'est pas notre intention. Nous avons notre télévision francophone, c'est-à-dire Radio-Canada.
    Nous acceptons difficilement qu'une chanson puisse faire en sorte que le public change de poste. On parle ici de chanteurs et de chansons. Si Claude Dubois n'est pas connu, je me demande pourquoi il a été invité au gala du panthéon. Ce n'est pas le genre d'événement où l'on invite des artistes inconnus. Quelqu'un a choisi de l'inviter et a même demandé s'il était possible qu'il passe sur les ondes.
    Vous avez ensuite utilisé comme argument le décès d'Oscar Peterson et le fait qu'il fallait lui réserver beaucoup de temps. Il reste que ça dure depuis quatre ans. Il n'y a quand même pas eu un décès chaque année pendant cette période. Il faut mettre les cartes sur la table. L'attitude de la CBC est la même que celle de la Société Radio-Canada. Selon cette dernière, si ça ne vient pas de Montréal, ce n'est rien du tout, et ce, même s'il y a 7 millions de personnes au Québec. Les artistes acadiens n'ont pas leur place à la télévision de Radio-Canada. On a le même problème: les cotes d'écoute.
    Mais il faut se rappeler que la CBC et la Société Radio-Canada sont financées par les contribuables. Cette télévision publique est en mesure de diffuser la culture partout au pays. C'est ce qu'on veut. Je ne parle pas d'un reportage d'une demi-heure qui serait présenté en français, mais dont l'auditoire ne comprendrait pas un traître mot. Je peux comprendre la position de la CBC à ce sujet. Dans ce cas-ci, la goutte qui a fait déborder le vase était le fait qu'il s'agisse de la chanson.
(1030)
    Merci pour vos commentaires. Un aspect du financement de la CBC est peut-être un peu surprenant. Comme je l'ai dit à M. Lebel, nous n'avons pas pris cette décision pour des raisons financières, mais il reste que nous devons relever des défis financiers incroyablement difficiles. Il est vrai que la télévision anglaise est un diffuseur public, mais au cours de cette année financière, 55 p. 100 de notre budget va provenir du secteur privé. Nous sommes, d'une certaine façon, un diffuseur autant privé que public. Ça met de la pression sur nous. Je ne dis pas cela seulement pour défendre nos décisions concernant cette émission: c'est la réalité.
    Merci.
    C'est une télévision publique, et le gouvernement devrait y investir plus d'argent, de façon à ce qu'elle reflète la réalité. Je suis d'accord là-dessus.
    Nous sommes mal financés. On peut constater, si on compare le financement de la CBC et de Radio-Canada à celui d'autres diffuseurs publics dans le monde, qu'on est au dernier rang, mis à part le PBS. On sait très bien que les Américains n'ont pas les mêmes problèmes culturels que nous. Pour eux, la question des francophones et des anglophones ne se pose pas. Si on compare le financement de la CBC à celui de la BBC, on s'aperçoit qu'au prorata de la population, la BBC reçoit trois fois plus d'argent que nous, et ce, pour diffuser dans une seule langue.
    On a déjà avancé que le gouvernement avait une responsabilité à l'égard de la télévision publique. On l'a déjà dit. Mais dans le cas présent, il s'agit d'un autre sujet. On parle uniquement d'un chanteur.
    Je comprends, mais un meilleur financement rendrait certaines décisions plus faciles. C'est clair.
    Merci, messieurs Godin et Stursberg.
    Nous allons maintenant passer à M. Coderre.
    Monsieur Stursberg, en voyant votre attitude de ce matin, je peux comprendre que des gens soient insultés. Radio-Canada n'est pas un organisme privé, mais public. C'est une loi. C'est une société qui a le mandat bien précis de représenter ce qu'est le Canada. Depuis le début, chaque fois que je vous ai entendu — et j'essaie de me retenir —, j'ai entendu la musique de Titanic parce que vous vous enfoncez vraiment. J'espère que le président de CBC/Radio-Canada voit aujourd'hui votre attitude. Si j'étais à sa place, je vous convoquerais et on aurait une petite conversation tous les deux, c'est certain.
     Qui a décidé, en dernier lieu, du montage de cette émission de télévision?
    C'est nous.
    Ultimement, vous êtes donc la personne responsable.
    Oui.
    Connaissez-vous Pascale Picard?
    Non.
    Vous devriez, parce qu'elle chante en anglais. C'est une belle québécoise qui a gagné un prix Juno la fin de semaine dernière. Les anglophones l'aiment beaucoup. Savez-vous pourquoi on l'aime de plus en plus? Parce qu'on l'a vue à la CBC. C'est comme ça que ça fonctionne.
    Y a-t-il des études de marketing qui disent que les anglophones changent de poste s'il voient un artiste francophone? Sur quoi vous basez-vous pour dire cela? Est-ce parce qu'ils ne viennent pas de Toronto? Vous entendez-vous parler?
    Avez-vous des études de marketing, que vous pourriez nous remettre aujourd'hui, qui disent que c'est ainsi que fonctionne la segmentation du marché? Quand un francophone paraît à la télévision anglaise, on change de poste, sauf si c'est de la poutine ou Mitsou. Avez-vous ces études? Sur quoi vous basez-vous?
    Je sais que vous étiez à Téléfilm Canada. Vous connaissez la sensibilité culturelle du pays. Vous avez contribué à financer des films, et vous savez combien, sur le plan culturel, le cinéma a des répercussions majeures dans le reste du Canada et dans le monde. Sur quoi vous basez-vous pour dire que les anglophones vont changer de poste s'il y a un francophone?
    Je me base sur mon expérience. Comme vous le savez, j'ai financé beaucoup de films en français quand j'étais chez Téléfilm Canada, et nous avons eu des succès énormes. Quelques-uns des films que je vous ai nommés ce matin...
    Vous ne les avez pas financés, c'était l'argent des contribuables.
(1035)
    Il y a quelque chose d'important ici. Il y a eu La Grande Séduction, Les Invasions barbares et une foule d'autres. Ce qui m'a frappé, c'est qu'on a eu un succès majeur. On a pris 25 p. 100 du marché francophone avec ces films quand j'étais chez Téléfilm Canada et...
    Vous bifurquez. Vous êtes le témoin et vous devez répondre à mes questions.
    Sur quoi vous êtes-vous basé? Avez-vous des études qui expliquent présentement que lorsqu'il y a des francophones à la CBC, on change de poste?
    Quand nous avons sorti les films sous-titrés en anglais, y compris le grand film de Denys Arcand qui a gagné l'Oscar du meilleur film étranger, la réponse du public anglophone a été de ne pas aller au cinéma. C'est un problème...
    Excusez-moi, monsieur Stursberg. Donc, si je comprends bien, au bout du compte, vous faites des coupes parce que vous pensez que les anglophones ne regarderont pas.
    Vous m'avez demandé sur quoi était basé notre raisonnement, s'il était basé sur des études de marketing...
    La réponse est non.
    ... ou sur notre jugement.
    C'est donc basé sur votre jugement.
    Je dois dire que c'est basé sur notre jugement et notre expérience.
    Il se trouve que je suis le porte-parole de l'opposition officielle en matière de patrimoine canadien, de langues officielles et de francophonie.
    Vous n'avez pas réussi votre examen aujourd'hui. Le Comité permanent du patrimoine canadien convoquera CBC/Radio-Canada et son président. Mes collègues devraient s'assurer d'aller un peu plus loin. En effet, si le vice-président considère les francophones de cette façon, j'aimerais savoir ce que le président de CBC/Radio-Canada lui-même pense de cette attitude.
    C'est un premier point.
    Ce n'est pas une...
    C'est mon tour.
    Monsieur le président, je pense qu'aujourd'hui, CBC/Radio-Canada n'a pas aidé ce qui se passe au Canada, et je peux comprendre... Je n'irai pas jusqu'à utiliser certains termes extrêmes comme Claude Dubois l'a fait. Je n'accepte pas le mot « raciste ».
    Chose certaine, monsieur, lorsque je vois cette attitude condescendante et autosuffisante et la façon dont on veut diviser ce pays, je me dis que vous encouragez les deux solitudes dans notre pays.
    Merci beaucoup.
    Poursuivons avec M. Chong.
    Monsieur Stursberg?
    Je rejette totalement les remarques de M. Coderre. Je ne suis évidemment pas anti-francophone ou contre la culture française au Canada. Ce n'est pas vrai.
    Comme je l'ai dit, j'ai fait des efforts majeurs pour créer un pont entre les deux cultures. Pour moi, je l'ai dit et je le répète, c'est un objectif primordial de la corporation, y compris de la CBC.
    Merci.
    Monsieur Chong, c'est votre tour.

[Traduction]

    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Stursberg, votre Société assume deux grandes responsabilités dans le cadre de son mandat. Il est vrai que vous avez été sous-financés ces dernières années, mais ce n'est pas de ça qu'il s'agit aujourd'hui. Aujourd'hui, nous traitons de votre mandat et de la façon dont vous le remplissez.
    De façon générale, votre mandat est de refléter la diversité du pays, ainsi que le prévoit le sous-alinéa 3(1)m)(viii) de la Loi sur la radiodiffusion, « refléter le caractère multiculturel et multiracial du Canada » — mais vous avez aussi la responsabilité de refléter la dualité linguistique du pays et de façonner une identité et une conscience nationales communes.
    Selon moi, vous vous acquittez bien de certains éléments de votre mandat, mais pas de tous. Moi, je suis un député de la région de Toronto. J'écoute Radio One constamment et je regarde le grand réseau de télévision de CBC régulièrement. Il y a quatre ou cinq ans, Radio One et le grand réseau de télévision de CBC ont commencé à mieux refléter la diversité du Grand Toronto. Vous avez fait de l'excellent travail à ce chapitre. Mais en ce qui concerne l'autre volet de votre mandat, celui de contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales, ce qui est un élément central de la dualité linguistique du pays, plus particulièrement dans la région du Grand Toronto, vous avez failli à la tâche, à mon avis.
    Sauf pour une émission de temps à autre, on ne croirait jamais que le Canada est un pays officiellement bilingue, et que ses institutions fédérales sont officiellement bilingues. On ne le croirait pas en écoutant Radio One ou en regardant le réseau de CBC dans la grande région de Toronto. Les bulletins de nouvelles diffusés chaque heure à Radio One n'ont aucun lien avec le bulletin de nouvelles de La Première Chaîne, et The National, diffusé sur le grand réseau de télévision chaque soir, n'a pas vraiment rapport avec le Le Téléjournal à Radio-Canada.
    Comme je viens de le dire, j'estime que vous faites du bon travail à certains égards, mais pas dans la représentation de la dualité linguistique du pays.
    À Radio-Canada, au Québec, c'est le contraire. Radio-Canada remplit bien son mandat de présenter une programmation de langue française, bien sûr. Votre société connaît plus de succès au Québec qu'au Canada anglais, peut-être parce que nous vivons sur un continent anglophone, mais pour ce qui est de refléter la diversité croissante de notre pays, j'ai l'impression que la programmation de langue anglaise est supérieure à la programmation de langue française.
    Il y a donc place à l'amélioration, et c'est une des raisons qui expliquent votre présence devant nous aujourd'hui. Quand on se concentre sur certaines questions, on devient trop sensible à la critique. Or, j'estime important pour votre Société de se pencher sur ces enjeux à long terme, car c'est l'un des grands défis que devra relever notre pays et j'espère que CBC/Radio-Canada pourra apporter une importante contribution dans l'établissement de ponts entre les deux solitudes, toujours dans le cadre de l'exécution de son mandat.
(1040)
    Comme j'ai dit tout depuis le début de ma comparution ce matin, je ne suis pas du tout en désaccord avec vous. Je suis absolument d'accord avec vous, et je suis absolument d'accord avec tous les députés ici aujourd'hui quant à la nature de nos responsabilités. Mais je suis un peu surpris de vous entendre dire cela, parce que si jamais au cours des deux dernières années vous aviez écouté la télévision anglaise de CBC, vous auriez vu la nouvelle version de Rumeurs. Vous auriez vu aussi la nouvelle version de Sophie Paquin, vous auriez vu...
    Non, je comprends cela. Mais, par exemple, les services de nouvelles nationales...? Pourquoi y a-t-il si peu de chevauchement entre deux organismes pour la diffusion des nouvelles? Les nouvelles que l'on voit à The National et celles au Téléjournal sont complètement différentes lorsqu'il s'agit de nouvelles nationales.
    Voici un autre exemple. Il y a 60 000 francophones qui habitent la région de Toronto — plus que dans beaucoup de provinces. Il s'agit de la région entourant une seule ville. Cependant, nous n'avons pas vraiment accès à la Première Chaîne. On ne reçoit pas vraiment une diffusion de qualité de la Première Chaîne de Radio-Canada, le service en français, dans la région de Toronto, même si plus de 60 000 citoyens francophones habitent cette région — plus que dans plusieurs provinces, y compris le Manitoba ou la Colombie-Britannique.
    Ce que j'essaie de dire, c'est qu'il y a de la place pour l'amélioration. Lorsqu'on rejette si facilement le fait qu'il y a de la place pour l'amélioration, je crois que c'est la raison pour laquelle plusieurs membres de notre comité sont si sensibles aujourd'hui.
    Personne est en désaccord sur le fait qu'il y a de la place pour l'amélioration. C'est pour cela que j'ai dit que nous avons travaillé très fort avec les bureaux à l'étranger pour nous assurer qu'ils diffusent leurs émissions en français et en anglais. Nous travaillons très fort pour assurer que les bureaux nationaux sont plus bilingues.
    Nous travaillons très fort sur toutes sortes de choses, mais la vérité est que si vous demandez aux gens de faire leur diffusion dans les deux langues, il faut qu'ils aient un niveau de bilinguisme qui est rare. C'est tout ce que je dis. C'est très difficile à faire.
    Bien sûr nous aimerions faire plus. Nous sommes absolument d'accord avec vous sur ce point.
    Merci, monsieur Stursberg.
    Monsieur Gravel.

[Français]

    Monsieur Stursberg, vous avez dit ne pas être anti-francophone — je veux bien — et être en faveur de la création de ponts entre la culture francophone et anglophone. Il me semble que le gala du panthéon était une belle occasion de le faire. Pourquoi n'avez-vous pas fait ce pont à ce moment-là?
    Je peux répéter exactement ce que j'ai dit à plusieurs reprises ce matin. Nous avons décidé de diffuser en entier le gala du panthéon à Radio One, mais de faire une émission télévisuelle de 44 minutes seulement. C'est la décision que nous avons prise. À part ça, je ne sais pas quoi dire exactement.
(1045)
    Regrettez-vous votre décision?
    Je comprends que vous croyiez que c'était une erreur de notre part.
    Regrettez-vous votre décision, monsieur?
    Nous sommes en train d'examiner ce que nous ferons à l'avenir. Ce n'est pas encore décidé. Je suis ici ce matin pour vous écouter et même pour avoir cette conversation.
    Je pense que...
    Ça va alimenter notre réflexion sur ce qu'il faut faire pour l'avenir.
    Si vous prenez la même décision au prochain gala, n'invitez pas les francophones, s'il vous plaît, par pur respect. On n'invite pas des gens pour leur dire ensuite qu'ils ne participeront pas à l'émission. Ne les invitez pas. Faites un gala anglophone seulement et continuez à maintenir ces deux solitudes, comme on le disait plus tôt. N'invitez pas les francophones si ceux-ci ne peuvent pas faire partie de l'émission au montage. C'est le gros bon sens qui le dit.
    Ce n'est pas nous qui invitons les gens au panthéon. Le panthéon n'est pas contrôlé par la CBC. C'est une organisation indépendante de la CBC.
    Si le panthéon invite encore des francophones, il faudrait que ceux-ci apparaissent au montage. Il faut respecter les deux cultures, monsieur, sinon ça ne fonctionne pas.
    Merci, monsieur Gravel.
    C'est ce qui complète la période des questions.
    Je pourrais accorder quelques minutes à M. Rodriguez et à M. Petit, puisque c'est ce dernier qui a convoqué le témoin. Par la suite, j'aimerais dire quelques mots pour conclure.
    Monsieur Rodriguez.
    Monsieur Stursberg, vous avez entendu mes collègues du Bloc québécois dire que c'est l'une des raisons pour lesquelles ils sont souverainistes. Vous réalisez qu'en posant un tel geste, vous n'avez pas aidé le Canada mais le mouvement souverainiste. Vous contribuez à maintenir perpétuellement les deux solitudes. Vous êtes conscient de cela. On ne diffusera pas de francophones chez nous. Si les francophones font la même chose, on va maintenir à perpétuité les deux solitudes.
    Si la CBC ne met pas en contact les francophones et les anglophones, qui peut le faire, monsieur Stursberg?
    Je dis encore une fois que je suis parfaitement d'accord. On comprend très bien notre responsabilité de refléter les deux grandes cultures de notre pays. Toutefois, il faut mettre cette décision, en ce qui concerne le panthéon, dans le contexte de toutes les autres activités de la société.
    Non, parce qu'il y une activité pour la musique, et c'est celle-ci. Vous avez raté votre coup.
    J'ai une dernière question. Je serai bref. À l'un de mes collègues qui vous a demandé si Claude Dubois serait passé sur vos ondes s'il avait chanté en anglais, vous avez répondu que non, parce qu'il n'est pas connu.
    Si Céline Dion avait chanté en français, serait-elle passée sur vos ondes?
    Elle est très bien connue au Canada.
    Donc, elle serait passée.
    Merci, monsieur Rodriguez.
    Monsieur Petit.
    Si vous le permettez, je vais partager mon temps de parole avec M. Chong.

[Traduction]

    Il s'agit d'un renseignement. Le mandat de Radio-Canada n'est pas de refléter la dualité culturelle du pays; c'est de refléter la nature multiculturelle du pays mais aussi la dualité linguistique du pays. Il y a une différence. Je crois qu'il est très important que tous les membres du comité le sachent. Nous ne sommes pas un pays biculturel, nous sommes un pays multiculturel avec deux langues officielles; il y a une différence entre les deux.
    Donc, le mandat de Radio-Canada est de refléter notre nature multiculturelle et multiraciale mais en même temps de promouvoir notre dualité linguistique quant à nos deux langues officielles.

[Français]

    Merci, monsieur Chong.
    Rapidement, monsieur Petit, s'il vous plaît.
    J'aimerais aussi attirer l'attention du témoin. Vous n'êtes pas nécessairement la bonne personne qu'on aurait dû inviter, mais peut-être que votre président l'aurait été.
    Quelque chose m'intrigue dans la réponse que vous avez donnée à une question de mon collègue M. Lebel. Vous dites que ce n'est pas une décision d'affaires, que vous avez décidé que les francos passaient mal à Toronto, etc., et que si vous aviez plus d'argent — parce que vous dites être financé à 55 p. 100 seulement —, on serait passés sur les ondes.
    Sauf erreur, nous, les francophones, si nous vous donnons du fric, vous allez nous passer sur les ondes, mais si nous ne vous en donnons pas, vous ne nous passerez pas sur les ondes. Ça, ce n'est pas correct. C'est vous qui avez donné cette réponse. Vous avez dit être obligé de travailler comme une entreprise privée, ce pourquoi vous avez dû faire attention à vos cotes d'écoute, etc. Votre mandat ne tient pas compte de l'argent. Même si vous n'avez pas tous les fonds, vous devez respecter votre mandat, ce qui n'a pas été fait.
(1050)
    Un commentaire, monsieur Stursberg? Non, d'accord.
    Merci, monsieur Petit.
    Monsieur Stursberg, je voudrais vous remercier d'être venu rencontrer les membres du comité ce matin. Vous nous avez rappelé que les objectifs de la CBC, le radiodiffuseur public, sont investis d'une mission particulière, soit donner aux Canadiens d'expression française et d'expression anglaise une tribune pour faire connaître aux autres leur culture, leurs points de vue et leur vécu.
    Comme je vous le mentionnais d'entrée de jeu, le but de notre comité est aussi de promouvoir la dualité linguistique. Vous nous avez dit que M. Dubois, entre autres, avait pris soin de parler de la possibilité d'un rapprochement entre les artistes francophones et anglophones lors du gala. Vous nous avez aussi informé que vous auriez pu mieux refléter toute la diversité des participants.
    Je crois que les membres du comité ont exprimé clairement qu'ils souhaitaient que la couverture médiatique d'un événement culturel national reflète la diversité culturelle linguistique canadienne.
    Je vous remercie de votre présence. Nous allons vous tenir informer des travaux du comité à ce sujet. Merci.
    Merci aux membres du comité
    Monsieur le président, j'ai consulté mes collègues, et à la lumière du témoignage entendu aujourd'hui, étant donné qu'on en est à discuter des travaux du comité, je propose respectueusement à mes collègues que le Comité permanent des langues officielles convoque le président de Radio-Canada/CBC pour qu'il nous explique si les attitudes qu'on a entendues aujourd'hui relèvent strictement du jugement personnel ou si elles reflètent ce qui se passe à Radio-Canada/CBC.
    On pourra alors poser ensemble toutes les questions nécessaires sur ce qui s'est passé lors de l'événement, mais peut-être sur l'ensemble de l'œuvre. Ça pourrait être intéressant.
    D'accord. Après vérification auprès du greffier, cette motion est recevable étant donné qu'elle se rapporte au sujet de l'étude, qui porte aujourd'hui sur la CBC...
    Que cela se fasse dans les plus brefs délais.
     Vous proposez que le comité convoque le président de CBC/Radio-Canada dans les meilleurs délais afin de discuter de ce sujet.
    Y a-t-il des questions et des commentaires au sujet de la proposition de M. Coderre?
    Monsieur Chong.

[Traduction]

    Oui, j'appuierais la motion mais j'entends par là que nous invitons le président de Radio-Canada à venir nous dire comment Radio-Canada remplit son mandat en vertu de la Loi sur la radiodiffusion de 1991, et que nous nous penchons sur cette question plutôt que sur les personnes en question, car je crois, bien franchement, qu'il s'agit d'un sujet plus important.

[Français]

    Monsieur Coderre.
    De toute façon, monsieur le président, c'est ma motion et j'ai le dernier mot.
     On peut poser toutes les questions qui vont dans le sens du bon déroulement des travaux. Pour ma part, je veux aller un peu plus loin. J'ai 11 ans d'expérience à titre de parlementaire et je ne fais pas de cas personnels, mais je pense qu'aujourd'hui, une communauté francophone se sent un peu délaissée. Il serait peut-être intéressant et important de savoir ce qu'en pense le grand patron.
    S'il n'y pas d'autres commentaires, nous allons passer au vote.
    Vous voulez faire un commentaire, monsieur Godin?
    Je veux aller plus loin que ça. Je ne veux pas prendre davantage la part de l'un ou de l'autre, mais si on fait venir le président de CBC/Radio-Canada, je veux savoir si c'est la cote d'écoute qui mène cet organisme ou si c'est son mandat de diffuseur public, en vertu de la loi. Si on prend la peine de faire comparaître le président de CBC/Radio-Canada, je vais en profiter pour parler de la situation des communautés francophones à l'extérieur de Montréal. Je ne peux plus parler que de Québec puisque les gens de la Gaspésie disent la même chose que nous: c'est Montréal, toujours Montréal. C'est donc une télévision de Montréal et non Radio-Canada.
    Si les membres du comité souhaitent qu'on adopte la motion aujourd'hui, il faudrait peut-être limiter les interventions, puisqu'on va devoir quitter la salle.
    Monsieur Lebel.
    J'aimerais simplement rappeler qu'aujourd'hui, le sujet de la réunion était précisément l'émission du gala du panthéon. M. Stursberg a répondu à nos questions à ce sujet. On veut maintenant élargir le débat. Or, j'aimerais que nous ne mêlions pas les choses, par égard pour notre témoin, qui nous a fait le plaisir d'être ici aujourd'hui.
(1055)
    D'accord. Nous allons procéder au vote.
    (La motion est adoptée à l'unanimité.)
    Merci beaucoup. Nous allons nous revoir jeudi prochain.
    La séance est levée.