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Merci de nous rencontrer. Les veuves sont sur le sentier de la guerre, aujourd'hui. Je suis certaine que vous êtes ici parce que vous vous intéressez vraiment à nos difficultés dans nos relations avec la bureaucratie à propos de l'agent Orange. Je suis persuadée que vous ferez tout ce qui est en votre pouvoir pour régler cette affaire à la satisfaction de toutes les personnes concernées. Je vous demande d'examiner soigneusement tout ce que nous avons à dire de manière équitable et impartiale.
Je veux d'abord vous présenter la famille Bartlett, en commençant par mon défunt mari, James F. Bartlett. Voici sa photo. Il a l'air en santé, car c'est la dernière photo qu'on ait prise de lui avant son diagnostic de cancer. Il est né le 2 mai 1946 et est mort le 15 juin 1984. Il s'est enrôlé dans les forces armées le 30 novembre 1957. Jim a passé une bonne partie de sa carrière militaire à Gagetown. Il a eu deux mandats à Chypre, a passé un peu de temps en Allemagne et à Ottawa, et son dernier poste était à Halifax.
On lui a diagnostiqué un cancer du colon en mars 1983. En avril 1983, il a subi une opération majeure pour retirer une tumeur au colon. Après l'opération, Jim a subi une radiothérapie, qui a provoqué une entérite due aux radiations. En mars 1984, le cancer s'était propagé à ses poumons. Il a commencé une chimiothérapie. Au moment de sa mort, il avait des tumeurs — et je mets le mot tumeurs au pluriel parce qu'il en avait plusieurs — d'une dimension de 15 centimètres. Ces tumeurs allaient de 9 à 15 centimètres.
Pendant qu'il était à Gagetown, Jim a été exposé à l'agent Orange. D'après l'information que je possède, il a été non seulement exposé à l'agent Orange durant des exercices militaires sur nos terrains, mais il a été aussi directement aspergé d'agent Orange durant un exercice, dans une Jeep. Est-ce que l'agent Orange et d'autres produits chimiques ont provoqué son cancer? Je pense que oui.
Il y a ensuite ma fille, Tracy Ann Bartlett. Voici la photo de Tracy — une belle femme. Elle a maintenant 37 ans. Tracy a de multiples handicaps congénitaux. On lui a diagnostiqué une maladie très rare. Il s'agit du syndrome de dysplasie oculo-dento-digitale. C'est une maladie extrêmement rare. Je ne crois pas qu'il y ait d'autres cas en Amérique du Nord. En ce moment, elle vit avec une famille dans une maison privée et elle relève des services communautaires. Cela a été une véritable bénédiction pour nous qu'elle puisse aller dans cette famille, qui a accepté de la prendre pour des soins de répit. On lui donnait de quatre à six mois à vivre. C'était il y a 13 ans. Cela montre bien ce que l'amour et les soins peuvent accomplir.
Les handicaps congénitaux sont causés par des produits chimiques comme l'agent Orange, Pourpre, Blanc, etc. Les services de santé ne comprennent toujours pas le cas de Tracy, et la plupart du temps, ils ne savent pas comment la traiter. Il y a deux ans environ, l'hôpital l'a renvoyée à la maison, et on nous a dit que tout ce que nous pouvions faire, c'était d'être près d'elle et de lui tenir la main, car on s'attendait à ce qu'elle meure. Est-ce que l'ADN de son père a été altéré en raison d'un contact avec des produits chimiques comme l'agent Orange, provoquant chez elle des handicaps congénitaux? Je pense que oui.
Passons maintenant à mon fils. Voici une photo de James. Elle a été prise il y a deux ans environ.
James est né le 10 novembre à Halifax. Il souffre d'asthme chronique, qui l'a obligé à passer une bonne partie de sa jeunesse à l'hôpital. Quand il était en 3e année, on lui a diagnostiqué un déficit de l'attention avec hyperactivité. Ces deux problèmes ont eu de graves répercussions sur sa qualité de vie.
À l'âge de 27 ans, on lui a diagnostiqué un cancer du colon. Il a subi une importante intervention chirurgicale et il a eu des traitements de chimiothérapie. On lui a diagnostiqué un cancer du foie il y a trois ans environ, et on nous a dit que ses chances de survie étaient nulles sans opération et de 30 p. 100 avec une opération. Pendant l'opération, le médecin n'a trouvé aucune trace de cancer, Dieu merci. Il a été révélé après l'intervention qu'après un deuxième test, d'autres tests avaient été recommandés. Le chirurgien ne nous a pas communiqué cette information et a réalisé l'opération de toute façon.
Aujourd'hui, James ne semble pas avoir le cancer, mais il subira d'autres tests en février. Tous les jours de sa vie, il doit se demander si le cancer reviendra et, si oui, quand et où.
Est-ce que le cancer de James a été provoqué par le fait qu'on a vaporisé sur son père de l'agent Orange et d'autres produits chimiques? J'en ai la ferme conviction.
La mort de Jim a encore des conséquences pour moi et ma famille aujourd'hui. La collecte d'information, la rédaction de lettres et le fait de me préparer à cette réunion m'a fait revivre les tragédies de ma vie. Il m'a fallu ouvrir des blessures que je croyais avoir refermées et j'ai vécu ma perte à nouveau.
Me concentrer sur des souvenirs agréables du passé m'a donné la force et la détermination de poursuivre ma quête de justice. Depuis la mort de mon mari, la mort de ce qui aurait pu être une fille normale et en bonne santé et la quasi-mort de mon fils, j'ai senti que quelque chose n'allait pas. Je ne savais pas vraiment ce que c'était jusqu'à ce que j'apprenne qu'on avait vaporisé sur Jim de l'agent Orange et d'autres produits chimiques. Tout s'expliquait et cela me paraissait vraisemblable. La vaporisation de produits chimiques semblait expliquer tous les problèmes de santé d'une famille, surtout quand on pense qu'il n'y a pas d'antécédents de la plupart de ces maladies dans la famille.
Je cherche actuellement le don de la vérité. J'ai le sentiment que les actions d'autres personnes ont orienté ma vie et la vie de mes enfants.
Vous avez la possibilité ici aujourd'hui de changer la situation pour toutes les veuves, leurs familles et les générations futures. Nous devons regarder vers l'avenir pour nos enfants et leurs enfants. Nous avons besoin d'excuses. Nous avons besoin de justice. Nous avons besoin d'être traitées équitablement.
Merci.
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Bonjour. Veuillez me pardonner, je suis nerveuse.
Je m'appelle Carletta Matheson, une veuve sur le sentier de la guerre. Ce matin, je vais vous raconter mon expérience avec Anciens Combattants et l'accès à l'information.
En mars 2009, j'ai entrepris une enquête sur le programme de paiements à titre gracieux. Je voulais savoir combien de personnes par comté aux environs de la base de Gagetown avaient reçu le montant à titre gracieux. Plus précisément, je voulais savoir combien d'argent avait été distribué dans chaque district de la circonscription de Greg Thompson. Par le truchement de l'accès à l'information, j'ai demandé la liste des personnes qui avaient reçu des paiements à titre gracieux dans ces districts.
Le 16 avril 2009, j'ai reçu une liste de 2 193 noms, mais pas l'information que je demandais. Les veuves vous diront que c'est un problème fréquent. Le programme de paiements à titre gracieux a pris fin le 1er avril 2009. Mais même si le programme était terminé, je savais que des gens continuaient de recevoir des chèques. J'ai donc demandé une seconde liste.
Mon nom figurait à cette liste, même si je n'avais reçu aucune indemnité. Je n'ai pas reçu d'argent, mais mon nom était inscrit sur la liste des personnes indemnisées. J'ai donc pensé que je recevrais une indemnité. Le lendemain, j'ai téléphoné au ministère de la Défense nationale pour signaler que je n'avais pas reçu de chèque. On m'a dit que mon nom n'aurait pas dû figurer à cette liste. J'aurais déjà dû recevoir le chèque.
C'est là que le cauchemar a commencé. J'ai reçu une lettre dans laquelle le ministère disait que mon nom figurait à cette liste en raison d'une erreur informatique. Je me suis demandé combien d'autres erreurs de ce genre il y avait eues. On m'a demandé d'envoyer de nouveau ma copie originale. J'ai refusé. En juillet, j'ai reçu une troisième liste de noms du ministère des Anciens Combattants. Mon nom n'y était pas inscrit. Par contre, certains noms y figuraient, non pas une, pas deux, mais plusieurs fois. La liste portait au bas la mention suivante, et je cite: « Les clients peuvent aussi être des aidants naturels et vont ou peuvent apparaître sur le rapport plusieurs fois ».
Qu'est-ce que cela signifie? Comment une même personne peut-elle recevoir plus d'un paiement à titre gracieux? Pourquoi certains ont-ils reçu plusieurs chèques alors que tant d'autres victimes n'ont rien reçu? Pourquoi refuse-t-on de nous indemniser alors qu'il reste de l'argent? Combien d'argent a-t-on vraiment versé, compte tenu des redites et des erreurs que l'on trouve sur cette liste?
Et le fait que mon nom figure à cette liste constitue-t-il une violation de ma vie privée, surtout étant donné que je n'ai pas reçu de chèques? Est-ce une infraction à une loi fédérale?
Le ministère de la Défense nationale et Anciens Combattants m'en ont fait voir de toutes les couleurs. Cela a été un véritable enfer. Mon mari a travaillé 36 ans dans les forces armées, et je suis persuadée que ce sont les produits chimiques à la base de Gagetown qui l'ont tué. Malgré les sacrifices faits par mon mari, le ministère des Anciens Combattants n'a fait preuve à mon égard d'aucune gentillesse et d'aucune considération. Je suis dégoûtée, blessée, mais surtout fâchée.
Merci.
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Je remercie le Comité permanent des anciens combattants de m'avoir invitée à prendre la parole aujourd'hui.
Je commencerai par les présentations d'usage. Je m'appelle Margie Hogan, je suis membre de la population civile et je vis à Fredericton Junction, une localité très proche de la BFC Gagetown. Je suis la fille de Herbert et de Doris Hogan, la plus jeune de quatre frères et soeurs. Je représente le côté civil de ce simulacre de justice.
Les pesticides, herbicides, produits chimiques et dioxines contenus dans les produits épandus dans le cadre du programme d'épandage à la BFC Gagetown entre 1956 et aujourd'hui rendent la population malade et la déciment à cause de diverses maladies et affections. Je mentionnerai le 2.4.D et le 2.4.5.T, le piclorame, avec un supplément de dioxines. Les dioxines et les furanes sont considérées comme des produits toxiques aux termes de la Loi canadienne sur la protection de l'environnement. Ils rendent les gens malades. Les dioxines sont liposolubles et peuvent être transmises le long de la chaîne alimentaire de l'animal à l'être humain. Plusieurs membres de ma famille sont décédés et je suis certaine que j'en perdrai d'autres. J'en ressens les effets également.
La date limite du 1er avril pour les paiements à titre gracieux a été prolongée pour tous les demandeurs. Toutefois, la date du 6 février 2006 demeure immuable. Pour être équitable envers tous les demandeurs, vous n'avez pas le droit d'ouvrir une porte et de verrouiller l'autre. Je sais que des chèques sont toujours émis dans mon secteur, le dernier datant de la première semaine de novembre 2009.
Les soignants qui ont été rémunérés entièrement ou partiellement par la province et qui, conformément aux directives du ministère de la Santé, ont pu présenter une demande, ont reçu le paiement à titre gracieux de 20 000 $ aux dépens des clients qui ont été confiés à leurs soins. Toutefois, un conjoint n'avait pas le droit de présenter une demande d'indemnisation.
Les communautés civiles autour de la BFC Gagetown ont été éliminées du processus en raison de la soi-disant limite du rayon de cinq kilomètres. Toutefois, à la foire de Gagetown en 2009, le ministre d'ACC, au cours d'une rencontre avec notre groupe, a fait allusion à un rayon de 20 kilomètres. S'il s'agit effectivement d'un rayon de 20 kilomètres, comment se fait-il que l'on ait indiqué uniquement un rayon de cinq kilomètres sur le formulaire de réclamation?
Les formulaires étaient conçus de manière à dissuader les gens, à provoquer leur colère et à amorcer un dédale de processus ultra-complexes dans les rapports avec ACC.
Un certain nombre de médecins ont refusé de remplir un certificat médical en arguant que le patient ne souffrait pas de l'une des affections mentionnées, mais après avoir consulté un autre médecin... la corrélation a été établie. Les médecins ont carrément refusé de remplir le certificat médical car ils étaient en conflit avec la province du Nouveau-Brunswick sur des questions de salaire et ils ont profité de ce refus pour entamer une grève du zèle, obligeant les patients à prendre d'autres rendez-vous pour pouvoir facturer de plus gros montants à la province alors qu'un seul rendez-vous aurait permis de régler la question. Ils voulaient prouver un point au gouvernement.
Le ministre des Anciens Combattants s'est levé à la Chambre des communes en juin 2009 pour déclarer: « Tout le monde peut réclamer le paiement à titre gracieux lié à l'agent Orange ». Pourtant, la première semaine qui a suivi cette annonce, quelques civils seulement ont reçu le formulaire de réclamation et se sont vu répondre par le ministère des Anciens Combattants que « les civils ne peuvent pas réclamer le paiement à titre gracieux lié à l'agent Orange, celui-ci était exclusivement réservé aux militaires et aux membres des Forces armées ». Le ministre n'a certainement jamais mentionné cette restriction au cours de l'annonce qu'il a faite devant la Chambre des communes. Quelques civils ont reçu les formulaires de réclamation. Parmi les rares personnes qui ont reçu un formulaire de réclamation, la plupart se sont fait dire que le formulaire leur avait été envoyé par erreur.
En 2009, à Gagetown, le ministre des Anciens Combattants, Greg Thompson, a indiqué qu'aucun civil n'avait reçu le formulaire de réclamation du paiement à titre gracieux lié à l'agent Orange. Je peux vous regarder dans le blanc des yeux et vous confirmer aujourd'hui que j'en ai reçu un. Je suis une civile. Pour autant que je me souvienne, depuis cette date, aucun paiement n'a été versé à un civil.
Il y a eu des problèmes avec un membre indépendant d'Anciens Combattants Canada. Un homme devait aider les gens à remplir le formulaire pour obtenir le paiement à titre gracieux, afin que personne ne soit laissée pour compte. Cet homme n'avait aucune carte de visite, car il n'avait pas encore reçu les cartes professionnelles de l'imprimeur, mais il a produit un permis de conduire comme pièce d'identité. L'homme a été désigné comme membre indépendant d'Anciens Combattants Canada. Il téléphonait aux veuves à 21 h 30 le samedi soir pour connaître le statut de leur réclamation, afin de savoir si elles avaient reçu les 20 000 $ et ce qu'il en était de l'état de leur demande.
Nous avons posé des questions afin de connaître les rôles et responsabilités et les pouvoirs de cet homme pour savoir de qui il relevait et qui payait son salaire. Personne n'a pu répondre à nos questions. Nous avons dû attendre le 5 novembre, lorsque nous sommes allés au Centre civique de Woodstock, afin d'en parler avec un ombudsman qui a enquêté sur l'affaire. Nous avons alors appris qu'il n'y avait aucune description de travail pour un membre indépendant puisqu'un tel titre n'existait pas.
Cet homme était en fait un défenseur autoproclamé qui s'était associé au ministre au début du processus. Il n'avait aucune cote de sécurité qui lui permettait de poser des questions aux veuves. Puisque ce titre n'existait pas, il n'y avait pas de description de travail afférente. Puis on nous a dit que cet homme était connu d'Anciens Combattants Canada et qu'il essayait d'aider les gens qui avaient du mal à remplir leur demande. En revanche, puisqu'il s'était identifié comme un membre indépendant d'Anciens combattants Canada relevant du bureau du ministre même, les veuves croyaient qu'elles étaient obligées de lui dire l'état de leurs revendications, si elles avaient reçu ou non les 20 000 $ et s'il allait y avoir un appel. Dans les faits, elles n'étaient pas obligées de le faire.
Laissez-moi vous parler un peu de ma famille.
Mon père travaillait sur la base. Il transportait du gravier par camion pour bâtir la base. Il a dû déménager de Petersville avant même qu'elle soit construite. Il est décédé en 2001 à la suite de complications liées au diabète — AIT — et de petits AVC. Il a dû prendre sa retraite en 1984 parce que sa santé empirait.
Voilà le portrait de notre famille en 1966. Nous étions une famille typique de civils qui habitait dans une collectivité avoisinante. La photo a été prise le 3 septembre 1966. Dix ans plus tard, nous avons pris une autre photo. Mon frère est décédé le 25 mars. Je vous en parle crûment, car c'est ce qui s'est passé et c'est ce qui se passe au Nouveau-Brunswick. Il est mort du cancer. Il a travaillé sur la base en 1967 et en 1968. Il était chargé de débroussailler la base et d'entasser les broussailles qui avaient déjà été contaminées par l'agent Orange, un agent chimique mortel.
Ma mère a des problèmes avec sa glande thyroïde. On a diagnostiqué chez moi une MPOC et j'ai le diabète. Mon père est mort. Ma soeur a fait des fausses couches. Ma nièce est tombée malade. Il faut que cela cesse. Mon fiancé travaillait sur la base en 1984. Il traversait la clôture et montrait sa carte d'identité pour pouvoir abattre le bois. Un avion a survolé la région et l'a pulvérisé, de même que tous ceux qui étaient à l'extérieur. Le député est arrivé sur les lieux une demi-heure plus tard et voulait savoir pourquoi il se trouvait dans la zone fermée. Il avait montré sa pièce d'identité en franchissant la barrière. Ils l'ont laissé passer, comme à tous les jours. Les employés à la barrière ne savaient pas qu'ils allaient procéder à un épandage. S'ils le savaient, ils ne lui ont pas dit ou ils ne l'auraient pas laisser passer la barrière. Il a maintenant des cellules anormales dans son organisme. On ne peut pas encore déterminer ce qu'ils sont. Il a des enzymes hépatiques élevés. Son foie est hypertrophié. Nous continuons d'aller voir des médecins et le problème n'est pas prêt de se résoudre.
J'ai deux fils. Mon fils cadet, Nicholas, est né avec des problèmes à l'estomac et des infections. On lui a diagnostiqué la maladie de Crohn et une inflammation du côlon. Il a toujours des problèmes avec son estomac. Mon fils aîné, Christopher, a dû subir une intervention chirurgicale à deux ans afin d'enlever un de ses testicules qui était mal formé.
Voici notre portrait de famille. Il s'agit d'un exemple typique d'une famille de civils. Nous sommes malades et nous sommes en train de mourir. Nous n'avons jamais demandé de nous faire empoisonner. Nous n'avons jamais demandé cela.
Le gouvernement du Canada fait fi de sa propre loi sur l'environnement dans ce dossier. Et, pourtant, si une pétrolière déverse du mazout sur le sol, Environnement Canada est immédiatement sur les lieux pour exiger que le sol contaminé soit nettoyé. Selon l'ampleur du déversement, les maisons sont détruites et les habitants sont contraints de quitter leurs foyers. Personne ne songe même à nettoyer ce qui est arrivé au Nouveau-Brunswick. Le problème persiste. Il est encore actif. Il se trouve encore dans la terre. Il nous rend encore malades.
Je vous demande aujourd'hui de regarder dans vos coeurs et de vous rappeler que vous êtes avant tout des êtres humains. Quand va-t-on cesser ce simulacre de justice résultant de l'épandage qui s'est fait à la BFC Gagetown et faire ce qui est juste sur le plan moral et humain? Dédommagez tous ceux et celles qui sont et qui ont été touchés et assainissez le sol contaminé de la base et des localités voisines. Il faut faire quelque chose pour les civils. Nous ne pouvons nous tourner nulle part pour que l'on s'occupe de nos problèmes. Ni Anciens Combattants Canada, ni les prestations pour les gens touchés par l'agent Orange ne peuvent nous aider. Nous avons nulle part où nous tourner.
Anciens Combattants Canada dit que les prestations sont réservées aux militaires et aux membres des Forces armées. Personne ne veille aux intérêts des civils.
Je suggère fermement que pour reconnaître... les civils qui à l'origine possédaient la terre, qui ont aidé à bâtir la base, qui ont travaillé sur la base comme employés du MDN ou pour des entrepreneurs privés, qui ont travaillé comme des bûcherons. Sans ces civils, il aurait fallu beaucoup plus de temps pour créer la base. C'est pourquoi ces civils sont tout aussi précieux et importants pour Anciens Combattants Canada que les militaires, et ils devraient être dédommagés en ayant des avantages sociaux, des retraites et une reconnaissance de leurs sacrifices. Il est nécessaire que les civils bénéficient eux aussi de protection. En ce moment, nous n'en avons pas. Nous sommes en train de perdre nos êtres les plus chers. Nous n'avons nulle part où nous tourner. Il faut que cela cesse.
Nous avons besoin d'être protégés. Si cette protection n'est pas assurée par Anciens Combattants Canada, je conseille alors vivement que l'on crée immédiatement un ministère responsable des civils touchés par le MDN et Anciens Combattants. Il faut le faire pour les civils.
Merci de m'avoir permis de prendre la parole aujourd'hui.
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Mesdames et messieurs, bonjour et merci de nous avoir invitées.
Je m'appelle Bette Hudson, une veuve sur le sentier de la guerre.
Avant de poursuivre, j'aimerais vous présenter trois de nos membres qui ont fait le déplacement avec nous. Ce sont Abbie Magee, veuve civile, ainsi que Judith Wright et Gwen Knox, veuves militaires.
De plus, nous sommes accompagnées de Daniel Feighery. Daniel réalise un documentaire sur le dossier de l'agent Orange et la base de Gagetown.
Je ne suis pas venue ici pour jeter des blâmes. Je suis venue exprimer des préoccupations à propos du traitement des veuves par le ministères des Anciens Combattants et le gouvernement du Canada.
Je représente un groupe de 100 veuves qui ont de profondes préoccupations. Sans trop entrer dans les détails, nous avons toutes perdu notre conjoint prématurément en raison de la gaffe colossale qu'a été la vaporisation de l'agent Orange et d'autres produits chimiques à l'intérieur et à proximité de la base de Gagetown dans les années 1950, 1960, 1970, 1980 et au-delà. Nous avons besoin de réponses et nous avons besoin de tourner la page. Nous sommes tributaires de votre comité pour qu'il nous fournisse ces réponses et pour qu'il rende justice. La correction des torts du passé peut et doit se faire ici aujourd'hui.
D'abord, nous avons reçu une indemnisation inéquitable, le montant à titre gracieux de 20 000 $. À compter de l'annonce de ce paiement à titre gracieux, le 12 septembre 2007, on a éliminé des demandes en fonction d'une date, le 6 février 2006. Il fallait que nos époux soient morts ce jour-là ou après cette date.
Mesdames et messieurs, est-ce que l'idée vous viendrait, ne serait-ce qu'un instant, qu'ils voulaient mourir? Pis encore, ils auraient dû mourir à une date choisie par le gouvernement? Il est affreux qu'on ait choisi une date à saveur politique, la date de l'assermentation du gouvernement actuel.
Nous constatons que l'autre date de clôture, le 1er avril 2009, a été reportée; une porte s'est ouverte et l'autre nous a été claquée à la figure. Nous n'avions aucune chance de recevoir ce paiement en raison d'une date. Si vous présentiez une demande pour vous-même, vous deviez souffrir d'une des maladies approuvées. Comme aidantes naturelles, ce que nous étions toutes, il fallait que nous soyons malades. Si vous êtes relativement en bonne santé, n'y pensez même pas. Est-ce équitable? Je crois que non.
Pour ajouter l'insulte à l'injure, il a été annoncé que les montants résiduels seraient reversés au Trésor public. En d'autres termes, les veuves et leurs familles ne sont pas dignes de considération. On avait promis une indemnisation pour toutes les victimes de cette tragédie. Il s'agit d'une promesse violée.
Nous voudrions qu'on corrige la situation. Hier, nous avons présenté nos demandes. J'espère que vous en avez tous reçu des exemplaires. Sinon, nous pourrons vous en fournir à la fin de la réunion.
Très rapidement, voici quelques-uns des problèmes — il y en a beaucoup d'autres — qui se posent aux veuves qui font une demande de pension liée à l'agent Orange. Premièrement, la preuve est impossible à faire et l'exigence est irréaliste. Par exemple, il fallait que les conjoints aient été trempés dans l'agent Orange. Deuxièmement, le ministère des Anciens Combattants a dit à une veuve que pour recevoir les documents de son mari, elle devait payer des frais d'archivage de 260 $. Troisièmement, l'obtention d'information des médecins et des hôpitaux demande beaucoup de temps et coûte cher. Quatrièmement, il faut répéter votre histoire à une foule de gens parce que personne ne connaît vraiment votre dossier. Cinquièmement, quand on ne croit pas le témoin, il faut un autre témoin. Sixièmement, le ministère des Anciens Combattants envoie beaucoup de lettres et chacune d'elles est signée par une personne différente. Septièmement, nous éprouvons un sentiment général de désespoir et d'impuissance. Huitièmement, des veuves ont reçu des lettres destinées à leurs maris décédés; il y en a une qui est arrivée le jour du 11e anniversaire de la mort de l'époux d'une femme, et elle était adressée au nom de celui-ci.
Et il y a beaucoup, beaucoup d'autres problèmes.
Nous ne sommes plus toutes jeunes, mais nous luttons pour une juste cause. Nous allons continuer jusqu'à ce que justice nous soit rendue pour eux. Nous parlons en leurs noms, car ils ne peuvent pas le faire. Quand nous ne serons plus là, nos enfants reprendront le flambeau. Cette tragédie ne doit pas être oubliée. Des gens souffrent, des gens meurent. Malheureusement, ce sera aussi le sort des générations à venir. Aidez-nous à résoudre le problème.
Merci.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Bienvenue à toutes. Je sais que c'est la deuxième fois que vous comparaissez devant le comité, mais il faut parfois revenir souvent avant d'obtenir justice. Je vous félicite de votre persévérance et de votre dévouement. C'est admirable.
Avant de poser mes questions, permettez-moi de prendre un instant pour souligner votre courage et votre détermination, pas seulement les vôtres, mais ceux de milliers de personnes qui luttent et qui souffrent, mais qui n'ont pas votre force et votre éloquence. Je suis contente que vous livriez ce combat. Bon nombre de personnes ont perdu un partenaire ou un ami, et les enfants ont été privés de leur père. C'est un fait que l'agent Orange et des produits chimiques ont contaminé notre eau et notre air, et qu'ils ont provoqué des problèmes graves, pas seulement au Nouveau-Brunswick, mais aussi dans les régions environnantes.
Nous ne vous accueillons pas ici aujourd'hui pour dénoncer des coupables. Il ne s'agit pas de montrer du doigt qui travaillait pour le gouvernement. Il s'agit de corriger un problème et de mettre en place des mesures qui vous montreront, à votre satisfaction, que le gouvernement prend maintenant les mesures qui s'imposent après avoir examiné le problème. La base de Gagetown et tous ceux qui y travaillaient ont servi de cobayes. Le gouvernement de l'époque a permis que l'on y fasse des essais de l'agent Orange, un produit chimique dont on connaît maintenant l'incroyable toxicité. Il est temps que toutes les victimes soient équitablement indemnisées et que l'on présente des excuses à tous ceux qui vivaient à Gagetown à cette époque et continuent d'y vivre.
J'espère que vous serez écoutées aujourd'hui, que vous partirez d'ici en ayant le sentiment de vous avoir bien fait entendre; ce pourrait être le début d'une démarche qui nous aidera tous à mieux comprendre le problème et à faire tout ce qui est nécessaire pour qu'il ne puisse plus jamais se reproduire.
J'ai déposé une motion auprès du comité, une motion qui sera traitée au moment opportun, pour réclamer une enquête publique. Je crois savoir que c'est une enquête que vous avez vous aussi réclamée et qui vous tient fort à coeur. J'aimerais que vous m'en disiez davantage sur les raisons pour lesquelles vous êtes persuadées qu'il faudrait tenir une enquête judiciaire sur tout le dossier de l'agent Orange.
Je pose la question à la cantonade. Voulez-vous commencer, madame Hudson?
Je suis très sensible à votre démarche. Dans un premier temps, j'aimerais vous féliciter. Je trouve que vous faites un travail qui n'est pas facile, dans un contexte où vous avez été victime d'une grande injustice de la part du gouvernement fédéral par rapport au phénomène de l'agent orange.
En 2006, je crois, avant l'arrivée au pouvoir du Parti conservateur, le ministre actuel, M. Thompson, avait fait plusieurs démarches à la Chambre pour revendiquer un dédommagement pour les victimes de l'agent orange. J'aimerais vous entendre au sujet des recommandations que le ministre faisait à l'époque pour les victimes de l'agent orange.
D'autre part, je veux parler aussi des expertises médicales. Les médecins sont-ils en mesure, actuellement, de déterminer de façon spécifique et exacte qui, parmi les gens qui ont été touchés, dont vos conjoints mais aussi vos enfants, ont été victimes de l'agent orange? Il y a eu un impact assez global sur les familles.
Troisièmement, la compensation de 20 000 $ est-elle suffisante?
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J'aimerais parler de mon expérience personnelle lorsque ma fille est née. Il a fallu presque trois ans pour que les médecins sachent ce qu'elle a, et ils n'étaient pas encore certains, parce qu'elle avait le pire cas de cette maladie très rare. Au début, nous avons rencontré je ne sais plus combien de généticiens. Comme Margie l'a mentionné, la première chose qu'ils disent, c'est que c'est dans votre famille. Nous sommes passés par tous les examens, et parce qu'il n'y avait pas de réponse, ils ont dit que c'était héréditaire. C'était horrible.
Nous devions premièrement nous occuper des problèmes de santé. Elle était gravement malade. Nous nous sentions responsables de ce qui arrivait à Tracy parce que nous ne savions pas ce qui s'était produit. Étais-je une buveuse? Est-ce que je prenais de la drogue? Est-ce Jimmy et moi avions un lien de parenté? Nous avons envisagé tous ces scénarios, et je ne peux pas vous décrire l'enfer que nous avons vécu pendant ces premières années.
Même aujourd'hui, comme je l'ai dit dans mon exposé, les médecins ne savent pas quoi faire. Ils ne savent pas ce qu'elle a. Au cours des dernières années, elle a commencé à faire des crises d'épilepsie, mais ce ne sont pas vraiment des crises d'épilepsie. Les médecins les nomment ainsi parce qu'ils ne savent pas quel autre terme utiliser. Ses signes vitaux s'arrêtent. Elle est simplement inerte, respirant à peine. Nous ne savons pas ce qui cause cet état ou pendant combien de temps elle y restera. Une fois, elle y est restée pendant cinq heures. Ils ont fait tout ce qu'ils pouvaient, mais ils ne savaient pas quoi faire.
Il y a un an et demi, elle a eu une de ces crises, et les médecins l'ont hospitalisée tout simplement pour voir si ça se reproduirait. Mais bien sûr, Tracy les a déjoués, comme elle le fait toujours. Il ne s'est rien produit, alors ils l'ont renvoyée à la maison. Le médecin a été très gentil avec moi et m'a dit, « Je ne veux pas vous dire de ne pas amener votre fille à l'hôpital. Mais si elle vient ici, il faudra faire des examens avec des sondes ». Une fois, ils ont dû s'y reprendre de 15 à 20 fois pour lui mettre une intraveineuse, parce que ses veines sont si petites et ils n'y arrivaient pas. C'était très douloureux pour elle. Le médecin a dit, « Peut-être pourriez-vous simplement la garder à la maison si cela se reproduit et lui tenir la main. Si vous l'amenez ici, nous allons la traiter et ce sera douloureux pour elle. Mais il n'y a absolument rien que nous puissions faire pour la sortir de cet état. Elle en sort seule, pour une quelconque raison ».
Les médecins n'examinent pas les facteurs environnementaux. Est-ce à cause des produits chimiques? Est-ce que sa maladie est le résultat de la pulvérisation de l'agent Orange?
J'ai oublié de mentionner que j'avais trois histoires comme celle-là: celle de mon mari, celle de mon fils et celle de ma fille. J'en ai donné des copies au greffier, et il pourra vous les distribuer. Elles vous donneront plus de détails sur ce qu'ont été nos vies à cause de tout cela.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie toutes de nous avoir fait part de vos expériences. Revivre ces épreuves chaque journée de votre vie est un exemple du dicton qui dit que pour ceux qui ont servi, chaque jour est le jour du Souvenir, et que pour les familles des victimes, c'est chaque minute de chaque jour.
Je vais tout d'abord vous donner un peu de contexte historique. Comme vous le savez, le ministre du gouvernement précédent — et il a été très honnête — a annoncé qu'il n'indemniserait que pour les années 1966 et 1967, et ce pour l'agent Orange seulement. Je me souviens de l'avoir critiqué, et le ministre actuel, qui était alors dans l'opposition, M. Thompson, l'a fait également. Il a dit que ce n'était pas suffisant. Je me rappelle très bien une rencontre à Gagetown où il a déclaré que toutes les victimes de 1956 à 1984 seront indemnisées et qu'il y aura une enquête publique. Je me souviens très clairement de ces paroles. Mais cela n'a jamais eu lieu.
En fait, il a offert exactement la même chose que le gouvernement précédent, soit une indemnisation pour les années 1966 et 1967 seulement. Je ne crois absolument pas que c'est ce que M. Thompson lui-même souhaitait, mais il y a quelqu'un au gouvernement qui a dit, « Voici ce que nous allons faire, fin de la discussion », et voilà ce que nous avons obtenu. Mais je ne peux tout simplement pas croire les erreurs qui ont été faites. On vous a dit que vous étiez sur la liste d'indemnisation, mais vous ne l'avez jamais reçue, et un civil a touché 20 000 $ pour le syndrome du tunnel carpien? C'est incroyable, et nous aurons des questions à poser aux fonctionnaires du MAC à l'avenir.
Voici ma question. Très récemment, le gouvernement du Canada a annoncé une enquête sur le saumon du fleuve Fraser, que l'on avait demandée et que l'on a reçue. De nombreuses personnes de l'Agent Orange Association partout au pays m'ont appelé et m'ont demandé: « S'il peut mettre sur pied une enquête sur les stocks de poisson, ce qui est important, ne pourrait-il pas mettre sur pied une enquête sur la vie des gens qui ont servi leur pays depuis 1956 »? Voilà la première question que je vous pose.
Ma deuxième est la suivante: Avez-vous eu l'occasion de parler personnellement au premier ministre du Canada? Je vous recommanderais fortement que si vous en avez l'occasion, parlez-lui directement, comme d'autres l'ont fait lorsqu'ils sont venus à Ottawa, et faites-lui part directement de vos problèmes. Je ne peux que supposer que si le premier ministre lui-même discute cinq ou dix minutes avec vous, je pense qu'il aura peut-être suffisamment de sympathie pour vous pour faire tourner la machine gouvernementale en votre faveur.
Je suis sincèrement désolé de ce que vos familles et vous vivez. Une des préoccupations que nous avons, bien sûr, c'est que lorsque nous parlons de l'agent Orange, il faut aussi tenir compte de tous les autres produits chimiques qui ont été pulvérisés avant. De nombreuses personnes n'ont pas servi en 1966-1967, mais elles ont servi avant ou après, et elles sont décédées à cause de la pulvérisation de produits chimiques. Pourriez-vous nous parler un peu plus de cet aspect, s'il vous plaît?
Encore une fois, je veux vous remercier toutes d'être venues.
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Je m'appelle Daniel Feighery. J'accompagne les Widows on a Warpath depuis juin 2008. Je connais très bien tous les détails de leur histoire.
Depuis deux ans, je fais un documentaire sur Gagetown et tout le programme de pulvérisation. Ma famille a été directement touchée. Mon grand-père a servi sur cette base. Ma mère y a grandi. Et ma soeur est née avec le spina bifida, une déficience congénitale associée à l'agent Orange. C'est ce qui m'a motivé à faire ce film. Ma soeur a reçu 20 000 $ du gouvernement canadien, et je ne savais pas pourquoi, alors j'ai creusé la question. Voilà comment j'ai débuté ce processus.
J'ai rencontré les veuves. J'ai commencé à interviewer des dizaines de personnes, y compris le ministre lui-même, Elizabeth May, Judy Sgro, et de nombreuses personnes dans cette salle.
En ce qui a trait aux produits chimiques, l'agent Orange et l'agent Pourpre ont été utilisés sur la base de 1956 à 1967. On ne les appelait pas ainsi à cette époque, parce que ce sont des noms de codes militaires américains. Ces produits chimiques étaient disponibles sur le marché. Ils étaient utilisés partout au Canada.
Après 1967 et à la suite d'un accident d'avion de pulvérisation qui a forcé le gouvernement du Canada à indemniser un certain nombre d'agriculteurs à hauteur de 250 000 $, ce qui représentait beaucoup d'argent dans les années 1960, l'armée canadienne est passée au tordon 101. Les Américains le nomment l'agent Blanc, et il est contaminé par le produit chimique appelé picloram. On en trouve dans l'hexachlorobenzène.
Ces produits chimiques causent toutes sortes de maladies qui ne font pas partie des listes de maladies reconnues pour pouvoir obtenir cette indemnisation. Je pourrais vous parler longuement des produits chimiques, mais je pense que c'est suffisant.
Il est important de souligner que l'agent Blanc a été utilisé sur la base jusqu'en 2001. Ensuite, on est passé aux herbicides à base de glyphosate.
Le programme chimique continue toujours. Le gouvernement a fait des tests sur la base et a trouvé du 2, 4, 5-T, pulvérisé pour la dernière fois en 1967. Il devait avoir une demi-vie de moins d'un an. Comment peut-il dire que cette base est sûre alors qu'il trouve des produits chimiques 40 ans plus tard? Il y a des troupes qui s'entraînent là-bas aujourd'hui pour l'Afghanistan. Cette base est toujours contaminée.
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Merci, monsieur le président.
Merci à tous d'être venus aujourd'hui. Nous comprenons complètement combien cela peut être difficile pour vous. Évidemment, le temps et la souffrance sont réels. Personne n'en doute. Je pense que tous les membres du comité, en étudiant la question, essaient d'être ouverts et justes. Je n'approuve pas totalement certains commentaires, et je vais vous expliquer pourquoi, puis je vous laisserai répondre.
Je veux souligner que, depuis les années 1960, les gouvernements n'ont pas su régler le problème. Car lorsqu'on le ferait, il y aurait des problèmes. Je pense que Mme Sgro serait d'accord. Je pense que tout le monde le reconnaît. À mesure que le temps passait, il devenait plus difficile de bien faire le travail et de résoudre les problèmes. Comme vos expériences le démontrent, la complexité et les défis sont énormes. C'est incontestable.
Je veux également dire que l'on continue de parler d'indemnisation. C'est une reconnaissance du temps qui s'est écoulé, et de nombreux dossiers sont si vieux qu'on ne peut pas les traiter. Le paiement de 20 000 $ n'est pas versé pour les blessures ou la souffrance des personnes. Il est offert en reconnaissance que ces personnes ont été touchées par le problème. Conséquemment, cette reconnaissance, le montant d'argent, n'équivaut pas nécessairement à la souffrance vécue par une personne. L'indemnisation a été versée. Près de 2 700 personnes l'ont reçue.
Je ne sais pas si c'est bon ou mauvais. Je veux souligner que l'étude de l'ancien gouvernement libéral a constitué la base pour aller de l'avant. Il est maintenant clair qu'il n'y aura pas de bilan complètement juste. On a mentionné le nom du ministre Thompson à plusieurs reprises. Il est le premier ministre d'un gouvernement du Canada à avoir reconnu la souffrance et à avoir offert un paiement. Je crois qu'il est important de le dire. Quelle qu'ait été la solution choisie, il allait y avoir des défis, des questions et des difficultés. Comme nous le voyons, cette histoire n'est pas encore terminée.
Si on prenait du recul et qu'on examinait la situation objectivement, on serait forcé de constater que le gouvernement fédéral actuel est le seul gouvernement de l'histoire du Canada qui a offert une indemnisation pour un problème qui est trop horrible pour se régler seulement par voie financière. Il est facile de faire des attaques personnelles et de souligner ce qui a été dit ou pas. Habituellement, une indemnisation de la part du gouvernement débute lors de l'assermentation du gouvernement, ce qui est le cas ici. Cela ne signifie pas que c'est le moment de l'histoire qui corrige tout, mais c'est ce que font normalement les gouvernements, dès leur entrée en fonction.
Nous sommes ici pour en savoir plus. Les questions et les réponses d'aujourd'hui seront inscrites au compte rendu et seront examinées attentivement. Lorsque Mme Sgro a parlé d'une enquête, elle faisait référence à une enquête sur toute la situation. J'ai l'impression que l'enquête que vous voulez concerne seulement les paiements. Si l'on va plus loin, il faut examiner l'ensemble pour voir à quel point il est difficile de trouver une réponse juste.
Il est important que nous continuions à parler de la situation; elle ne disparaîtra pas. Nous devons nous rappeler que d'autres pays l'examinent également. En passant, aux États-Unis, on offre une indemnisation. Ce n'est pas un paiement à titre gracieux; c'est un programme d'indemnisation. Cela signifie qu'il y a des critères différents. Cela touche alors vos pensions et à toutes sortes d'autres choses.
J'aimerais entendre vos observations sur le déroulement du processus. Il ne fait aucun doute que cela s'imposait depuis longtemps.
Je pars du principe que, oui, des erreurs ont été commises, et je ne crois pas qu'il y ait des gens qui soient en désaccord avec cela. Je pars du principe que, oui, quelque chose a été fait. Si nous n'avions pas agi en 2006, alors rien n'aurait été fait et nous serions dans le pétrin, car personne n'aurait rien reçu. Je crois qu'il est important d'y penser. Je sais que vous vous demandez comment nous pouvons aller de l'avant et aller plus loin.
Cela dit, je vous cède la parole si vous voulez ajouter quelque chose ou faire des suggestions. Je l'apprécierais certainement. Je n'ai pas de question précise à poser présentement.
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Merci, monsieur le président.
Je veux remercier tous nos invités et nos témoins d'avoir répondu à l'appel. Je pense que nous allons nous confondre en remerciements, alors je ne perdrai pas de temps là-dessus.
Il se peut fort bien que je m'attire des ennuis auprès de mes chefs politiques pour ce que je vais dire, mais j'estime que le gouvernement conservateur a bien fait d'accorder cette indemnisation. Je pense qu'il faut reconnaître que c'est du bon travail. Je pense que cela fait partie du récit. Mais ce que vous nous présentez maintenant, c'est le reste du récit.
Je me suis familiarisé avec ce dossier — et comme j'ai peu d'expérience dans ce domaine, je continue de recueillir de l'information sur ce sujet — et la question de l'agent Orange comporte de nombreux enjeux. Et nous nous penchons sur une question bien particulière qui porte, de toute évidence, sur celle dont l'époux est décédé avant 2006, qui est une date arbitraire.
Je pourrais mettre mes collègues conservateurs au défi de trouver une autre date, une autre occasion où un programme quelconque a été mis en oeuvre à partir de la date arbitraire de l'assermentation d'un gouvernement. Je n'ai jamais entendu parler de cela auparavant. Je pense que c'est assez inusité et plutôt politique et, en fait, pas très utile.
Mais, j'aimerais qu'on mette l'accent sur votre relation avec Anciens Combattants Canada et peut-être même avec le ministère de la Défense nationale et sur les problèmes de bureaucratie que vous avez éprouvés, et qu'on obtienne davantage d'information à cet égard. Vous nous avez présentés certains de ces problèmes lorsque vous avez raconté votre expérience en essayant de suivre le système. Vous avez soulevé certaines questions dont je n'avais jamais entendu parler auparavant, surtout relativement à la demande d'accès à l'information de Mme Matheson. Pouvez-vous nous donner davantage d'explication sur les problèmes que vous avez eus entre-temps avec les fonctionnaires du ministère, et peut-être qu'on pourrait vous aider sur ce plan?
La bureaucratie pose de nombreux problèmes. On a l'impression qu'il n'y a aucun intérêt réel à l'égard de notre dossier. On appelle les gens du ministère des Anciens Combattants, on leur donne notre nom et lorsqu'on téléphone la fois suivante, c'est quelqu'un d'autre qui répond et il faut de nouveau lui raconter toute notre histoire. Ils passent leur temps à perdre les formulaires et les lettres: « On l'a perdu. On n'arrive pas à le trouver, alors vous allez devoir retransmettre le document ». Alors, on doit obtenir la signature du médecin, on débourse 50 $, on se dépêche pour obtenir les formulaires, et soit on appelle, soit on les poste.
En plus, il y a quelque chose d'étrange. J'ai fait une demande pour le formulaire d'indemnisation lié à l'agent Orange. J'ai obtenu le formulaire. Habituellement, lorsque je fais affaire avec Anciens Combattants Canada, c'est soit avec Charlottetown, soit avec Saint John, au Nouveau-Brunswick. Mais, lorsque j'ai obtenu les formulaires, on m'a indiqué que je devais les retourner à Campbellton.
Je les ai acheminés à Campbellton, mais cela m'a semblé bizarre, parce que j'ai toujours fait affaire avec les bureaux de Charlottetown ou de Saint John. Pourquoi est-ce que je devais envoyer mes formulaires à cet endroit? Il s'agissait d'un nouveau bureau, ou peu importe. Eh bien, j'ai expédié le formulaire à cet endroit. Et je n'ai rien reçu... ah oui, j'ai reçu quelque chose. J'ai reçu une lettre me disant qu'il me faudra attendre 24 semaines avant d'avoir des nouvelles sur cette pension. Eh bien, à ce jour, je n'ai toujours pas de nouvelles.
Il me semble que, lorsqu'on fait affaire avec Anciens Combattants Canada, s'il vous plaît, faites au moins en sorte qu'une personne s'occupe d'un certain nombre de clients, plutôt que de nous obliger de traiter avec quelqu'un de différent chaque fois et de devoir nous répéter maintes et maintes fois. On perd nos lettres, on perd nos formulaires. Par exemple, on a dit à une des veuves: « Vous ne pouvez pas faire de demande pour ces pensions; vous devez être malade ». Ce sont des choses comme cela qui se produisent.
Ou bien imaginez-vous recevoir une lettre adressée à votre époux qui est décédé. Cela ravive les blessures. C'est vraiment désolant. Il est arrivé à deux ou trois veuves de recevoir des lettres adressées à leurs époux qui sont décédés. C'est tout à fait horrible!
Un autre exemple, une veuve s'est fait dire: « Attention à ce que vous me dites. Ne me parlez pas sur ce ton ». Eh bien, cette femme est octogénaire. Il ne faut pas s'adresser à elle de cette manière. Il faut traiter les gens avec respect. Nous sommes respectueux envers les gens d'Anciens Combattants Canada et ils doivent être respectueux envers nous. Ce n'est pas bien d'être traité de cette façon.
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Merci beaucoup, monsieur le président.
J'aimerais remercier les témoins pour ce qu'ils nous ont dit aujourd'hui. Et je voudrais particulièrement vous remercier pour l'abnégation et le dévouement dont ont fait preuve vos époux, vous-mêmes, ainsi que les membres de votre famille, à l'égard de votre pays. Comme il y a des membres de ma famille qui ont servi à Gagetown, je connais les sacrifices que doivent faire non seulement les militaires, hommes et femmes, mais également les membres de leur famille qui les soutiennent.
C'est troublant, parce que ayant eu des membres de ma famille qui ont servi à cet endroit, j'ai entendu bien des histoires à ce sujet, je suis bien au courant de ce qui s'est produit et je connais bien des gens qui vivent encore à Gagetown. Mais, quand on examine la situation et qu'on en discute autour de la table dans la cuisine, ce que les membres de ma famille m'ont dit bien souvent, c'est que ce qui importe le plus, ce n'est pas tellement le montant de l'indemnisation, mais la reconnaissance des torts qui ont été commis, la reconnaissance des problèmes qui ont été mis au jour et, en fait, la nature généralement épouvantable de ce qui s'est produit.
Est-ce que c'est le principal élément moteur que vous voulez faire ressortir?
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Jusqu'à 300 000? C'est beaucoup, et je pense que nous sommes tous d'accord sur ce point.
Toutefois, avant que mon temps ne soit écoulé, j'aimerais me pencher sur cette question. Je veux dire que je comprends combien la bureaucratie fédérale peut être lourde à certains moments. C'est souvent comme si on heurtait un mur de briques. Selon mon expérience, on est mieux servi lorsqu'on fait affaire avec le ministère des Anciens Combattants qu'avec d'autres éléments de la bureaucratie, mais évidemment à cette table et les gens à la maison également comprennent bien ce qui se passe et combien il est difficile de faire affaire avec une bureaucratie aussi importante que celle du gouvernement du Canada.
Alors, s'il s'agit potentiellement de 300 000 personnes, lorsque viendra le temps d'établir un programme, il faudra évidemment déterminer certaines dates. À moins qu'il n'y ait pas de date limite et que le début du programme coïncide avec le début des événements...? Quelle serait la date de fin?
Évidemment, il y aurait des problèmes de mise en œuvre; ce n'est pas nouveau, il y en a dans tout ce qu'on entreprend. Les excuses liées au pensionnat, un des événements les plus importants à se produire au pays depuis les cinq dernières années, c'était merveilleux. La reconnaissance de la part du gouvernement du Canada était au rendez-vous, et les membres de premières nations dans ma collectivité qui étaient visés ont été touchés par ces excuses. Mais certaines personnes ont quand même été ignorées au moment de la mise en œuvre de cette initiative.
Quelle date proposeriez-vous pour la mise en oeuvre?
Au Comité des anciens combattants, habituellement, il n'y a pas de partisanerie, mais on dirait que votre maladie ne touche pas l'opinion publique, car dès que l'opinion publique atteint un gouvernement... Si on prend comme exemple ce qui s'est passé dans le cas de Maher Arar, on constate qu'il a eu des excuses, qu'il a reçu des millions de dollars. L'opinion publique s'en est mêlé. Vous avez parlé des Autochtones, tout à l'heure. Les Japonais ont, eux aussi, reçu des excuses, avec compensation, pour ce qui s'est passé lors de la dernière guerre. On dirait que l'opinion publique ne vous appuie pas. Cela me fait penser à Shannon, au Québec, et à son cas d'eau contaminée. On dirait que l'opinion publique est absente, qu'on passe dans le beurre, que les gouvernements ne s'intéressent pas à vous.
Tout à l'heure mon collègue le secrétaire parlementaire a dit que vous vous attendiez juste à 20 000 $. Ce n'est rien comparé à ce que je vois. Madame Hudson, vous avez dit avoir eu beaucoup de problèmes. Vous en avez énuméré huit dans votre lettre, mais je crois que c'est à cet égard que vous tentez d'obtenir des solutions, bien plus que d'obtenir 20 000 $.
Une voix: Des excuses publiques.
M. Roger Gaudet: Je suis d'accord pour qu'on demande des excuses publiques, mais dans votre allocution, vous nous avez dit que seule une partie des recommandations que vous faisiez au ministère visait la responsabilité de vos problèmes. Parlez-moi donc des autres? Vous en avez huit ici, mais vous dites en avoir envoyé plusieurs. Serait-il possible que le comité les reçoive, que chaque membre du comité les reçoive aussi?
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Ce qui importe le plus pour moi, ce sont les excuses, parce que comme vous le savez, 20 000 $, ce n'est rien. Aucune somme d'argent ne pourrait compenser la perte de mon époux et, par conséquent, des excuses, c'est extrêmement important pour moi.
Mais voici nos demandes:
Un, compenser toutes les veuves équitablement pour la mort prématuré de leurs époux, qui sont décédés des suites de maladies liées à l'agent Orange.
Deux, convoquer immédiatement la tenue d'une enquête judiciaire publique sur la tragédie liée à l'utilisation de l'agent Orange à la BFC de Gagetown.
Trois, démettre M. Thompson de ses fonctions en tant que ministre des Anciens Combattants, étant donné qu'il n'a pas respecté l'énoncé de mission du ministère des Anciens Combattants, qui se lit comme suit:
Fournir des services et des avantages axés sur le client qui soient exemplaires et adaptés aux besoins des anciens combattants, de nos autres clients et des familles de ceux-ci, de manière à reconnaître les services qu'ils ont rendus au Canada et à graver dans la mémoire de tous les Canadiens le souvenir de leurs réalisations et de leurs sacrifices.
Quatre, offrir des excuses à chacune des veuves, dont les pertes ne peuvent pas être mesurées, et admettre que le gouvernement canadien a causé de grands torts à toutes les victimes du programme de pulvérisation.
Cinq, procéder immédiatement à une enquête sur l'attribution de paiements à titre gracieux — c'est-à-dire, comment a-t-on déterminé qui recevrait des chèques, qui n'en recevrait pas et pour quelles raisons? Comment en est-on venu à choisir les années 1966 et 1967, lorsque nous savons qu'il y a eu pulvérisation entre les années 1956 et 1984?
Six, mener une enquête sur le ministère des Anciens Combattants lui-même, puisqu'il a démontré que sa bureaucratie est constituée de personnes qui nous considèrent indignes de leur attention et qui nous traitent de façon lamentable.
Sept, faire en sorte que les maladies prouvées servent d'éléments d'admissibilité, et non pas seulement ceux dont la liste figure sur le formulaire de demande de paiement à titre gracieux de l'agent Orange.
Huit, reconnaître le problème et faire preuve de respect pour tous les époux — militaires et civils — qui sont décédés, ainsi que ceux qui sont décédés avant l'assermentation du gouvernement Harper.
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Neuf, offrir une indemnisation du gouvernement pour sa part de responsabilité — en ce qui a trait aux années antérieures et postérieures à 1966 et 1967 — dans l'utilisation de produits chimiques à la BFC de Gagetown.
Dix, envoyer une lettre d'excuses de la part du partenaire affilié indépendant aux veuves qui ont été offensées par ses commentaires grossiers et son ton argumentatif au cours de leurs conversations téléphoniques tard en soirée.
Onze — et c'est très important et c'est la clé de tout —, observer une minute de silence à la Chambre pour que tous les députés témoignent respect, dignité et compassion à l'égard des souffrances qu'ont vécues nos défunts époux en raison de l'utilisation de ces produits chimiques. Une minute de silence.
Douze, effectuer des tests pour détecter la présence de dioxine sur les propriétés et dans les sources d'approvisionnement en eau de la BFC de Gagetown et dans les régions avoisinantes, publier un véritable rapport public et faire en sorte que les coûts de ces tests soient assumés par le gouvernement du Canada.
Treize, divulguer pleinement les sources des paiements à titre gracieux liées à l'agent Orange. Cet argent provient-il du gouvernement du Canada, des Américains ou bien de l'entreprise de produits chimiques? D'où exactement provient cet argent?
Quatorze, rédiger un rapport statistique détaillé sur les troubles médicaux et les maladies et déterminer lesquels ont été jugés admissibles et lesquels ont été rejetés.
Quinze, produire un rapport statistique sur le nombre d'appels qui ont été fructueux par rapport à ceux qui ne l'ont pas été, un rapport ventilé selon le sexe et l'âge.
Les demandes précitées ne sont pas déraisonnables. Il est temps que le gouvernement fasse preuve d'ouverture et d'honnêteté et qu'il rende des comptes à nous les veuves, ainsi qu'à tous ceux et celles qui ont connu et qui ont aimé nos époux, nos pères, nos fils, nos frères, nos tantes, nos mères et les familles dont la vie a été détruite. Des gens ont été empoisonnés à leur insu, et nos familles ont été en proie à des maladies, à des troubles médicaux et à des décès, ce qui a touché plus d'une génération.
Le gouvernement du Canada doit rendre des comptes pour la part qu'il a jouée dans le dossier du programme de pulvérisation de l'agent Orange et d'autres produits chimiques à la BFC de Gagetown. Nous sommes ici pour nos époux. Nous sommes ici pour nos êtres chers. Nous sommes ici pour défendre les droits de nos époux et de nos êtres chers, parce qu'ils ne sont plus en mesure de le faire. Nous, les veuves, sommes sur un pied de guerre et nous défendons une cause juste, et il est temps que le gouvernement du Canada fasse de même.
N'oubliez pas que vous étiez des êtres humains avant d'entrer en politique.
Merci.
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Merci, monsieur le président.
Merci, mesdames, d'être ici aujourd'hui.
En 2006, lorsque j'ai été élu pour la première fois, on m'a inscrit au comité des anciens combattants, et je pense qu'il ne reste que quatre membres qui faisaient partie de ce nouveau comité à l'origine — c'est-à-dire M. Stoffer, M. Gaudet, M. Sweet et moi-même. En tant que nouveau membre du comité, j'étais très enthousiaste par le fait que notre ministre et notre gouvernement allaient de l'avant avec l'établissement d'une charte pour les anciens combattants afin de mieux répondre aux besoins de ces derniers. Nous avons également commencé à mettre en place le Bureau de l'ombudsman des anciens combattants pour aider ces derniers à entamer des démarches pour l'obtention de prestations. Ensuite, notre gouvernement a également soutenu la prolongation du programme d'indépendance des anciens combattants, et il y a ajouté 350 millions. Toutes ces réalisations ont été faites sous le leadership du présent comité et de notre ministre, et je pense que notre ministre a à coeur les anciens combattants et ceux qui sont au service des Canadiens.
Un des éléments qui caractérisent le leadership, c'est de pouvoir prendre ces responsabilités, même celles pour avoir mis en place de mauvaises politiques publiques. Les gouvernements ont adopté de mauvaises politiques publiques. Mais je peux vous dire que dans les deux ans depuis son entrée au pouvoir, le gouvernement a établi la Convention de règlement relative aux pensionnats indiens, la convention de règlement relative à la taxe imposée aux Chinois et la convention de règlement relative au sang contaminé. Ce sont des réalisations extraordinaires. Il y avait également le dossier de l'agent Orange. Mais ces conventions ne sont pas des mesures d'indemnisation; il s'agit de règlements pour dire qu'il y a eu de mauvaises politiques publiques. Mais retourner dans le passé et essayer de déterminer les répercussions individuelles sur chacune des personnes, c'est un exercice très difficile parce que certains éléments ne peuvent pas être mesurés. C'est vraiment catastrophique pour les gens.
J'ai parlé à un chef d'une première nation, et il m'a dit qu'il ne savait pas comment être un père. Il a été élevé dans un pensionnat indien, et il n'a jamais été encadré par son père parce qu'il vivait au pensionnat et qu'il avait été éloigné de sa famille. Comment peut-on compenser ce genre de choses?
Il en va de même pour le dossier qui nous intéresse. Ceux qui ont fixé le montant à 20 000 $ ne sont pas mesquins ni de mauvaises personnes. Ils ont examiné la situation et ils ont fait de leur mieux pour prendre ces décisions difficiles. Et il faut établir des dates. Ma belle-mère a été internée dans un camp d'internement japonais, et certaines des histoires qu'elle raconte sur la perte de vies de certains membres de la famille dans ce camp... Ils ont été indemnisés. Est-ce que c'était suffisant? Non, il ne s'agissait pas d'indemnisation. C'était simplement la reconnaissance qu'il y avait eu une mauvaise politique gouvernementale. Il s'agit de reconnaissance, lorsqu'on fait ce genre de déclaration, lorsqu'on présente des excuses. C'était une mauvaise politique. Aujourd'hui, nous savons que c'était inapproprié, mais c’est tellement difficile de retourner en arrière et de vraiment guérir les blessures dont vous souffrez. Est-ce que c'était suffisant? Dans l'avenir, jusqu'où faudrait-il aller pour offrir des indemnisations ou pour reconnaître l'événement? On ne peut pas, c'est impossible.
C'est malheureux que les dates ne correspondent pas à certains problèmes individuels de chacune des personnes qui ont été touchées par Gagetown, mais il faut établir des dates. J'ai entendu dire qu'il y avait des problèmes même en ce qui concerne les personnes visées par la convention de règlement relative au sang contaminé. Mais, au bout du compte, il faut prendre ces décisions.
Comme mon collègue l'a dit, quelle date proposeriez-vous? En fait, vous n'avez pas proposé de date, parce que vous vous rendez compte combien il est difficile de prendre ce genre de décisions.
J'aimerais savoir si l'une d'entre vous reçoit des prestations d'Anciens Combattants Canada à part celles dont nous parlons à l'heure actuelle, en termes d'indemnisation? Lorsque votre époux était vivant, avez-vous eu la possibilité de faire des demandes pour ces prestations comme, par exemple, pour le programme d'indépendance des anciens combattants, qui pourraient vous aider à rester dans votre maison plus longtemps, ou d'autres prestations de ce genre?
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Merci, monsieur le président.
J'aimerais répéter ce que les autres membres du comité ont dit et exprimer notre appréciation sincère pour le courage que vous manifestez en venant ici et pour le service que vos maris ont rendu à notre pays.
J'ai du mal à saisir et j'ai beaucoup d'émotions mixtes, parce que vos témoignages sont très émotifs.
Madame Bartlett, je comprends très bien votre situation, étant donné que votre fille est née avec des handicaps. J'ai passé environ la moitié de ma vie à travailler avec des gens handicapés. Mon fils est aussi né handicapé et a souffert du cancer; il a également d'autres problèmes qui n'ont pas été diagnostiqués parce que personne ne peut lui dire exactement pourquoi il est ainsi. Les médecins continuent leurs recherches. Vous avez tout à fait raison.
À Brantford, en Ontario, il y a une organisation appelée Lansdowne Children's Centre qui fournit les services à plus de 3 000 familles ayant des enfants handicapés, peu importe s'ils souffrent d'un autisme léger ou d'handicaps multiples. Chaque parent, sans exception, veut savoir pourquoi ces choses sont arrivées à leur enfant. La plupart du temps, il n'y a pas de réponse, de sorte que je peux comprendre votre frustration. Je m'identifie très bien avec votre situation, de même qu'avec ceux d'entre vous qui avez perdu des êtres chers, parce que cela fait partie des réalités de la vie qui m'intéressent depuis longtemps.
Je vous en parle pour mettre mes commentaires en contexte et j'aimerais que vous me répondiez, parce que je ne pense pas que je vais vous poser des questions précises.
Un commentaire a été formulé et j'aimerais savoir exactement ce qu'il signifie. Je suis nouvellement arrivé au Parlement. J'ai été élu il y a un peu plus d'un an, et avant cela, je n'ai pas beaucoup participé à la vie politique, en passant. Le commentaire est le suivant: « Vous étiez avant tout des êtres humains, avant d'entrer en politique ». J'aimerais savoir ce que cela signifie.
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Très rapidement, je vais poursuivre cet échange.
Rien ne peut excuser un manque de respect, à quelque niveau que ce soit, absolument pas. Aujourd'hui, vous avez dit à plusieurs reprises que vous aviez l'impression d'avoir été traités de façon irrespectueuse, et il n'y a aucune excuse. Je ne peux pas excuser un fonctionnariat créé de façon aussi compliquée, faisant preuve d'un tel manque de respect, et ainsi de suite.
Nous espérons entreprendre des changements, et je pense que tous les partis pensent de même. Je ne pense pas m'exprimer seulement au nom de notre parti. Je pense que tous les partis ont la même opinion. Je pense que notre ministre, en créant un programme qui n'avait jamais été créé par quelque gouvernement que ce soit auparavant, a tenté de s'attaquer au problème, a fait un pas dans cette direction. J'aimerais donc souligner que pendant toutes les années passées au sein de groupes qui défendent les gens qui ont toutes sortes de problèmes, il y a différentes approches que l'on peut choisir, en groupe. Il faut essayer différentes approches, et vous avez choisi la vôtre, ce que je respecte. Je respecte votre approche totalement. Ce que je dis, c'est que ce rôle de défense d'intérêts est extrêmement important, et il est important que nous comprenions ce rôle et que nous comprenions exactement quel est votre objectif final.
Aujourd'hui, nous avons pu recueillir de l'information à ce sujet.