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AFGH Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan


NUMÉRO 007 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 26 mai 2009

[Enregistrement électronique]

(0810)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Je vous souhaite la bienvenue à cette réunion du Comité spécial sur la mission canadienne en Afghanistan. Aujourd'hui, nous accueillons Dre Soraya Sobhrang, commissaire de la Commission indépendante des droits de la personne en Afghanistan. Elle s'occupe de questions touchant les femmes et les droits des femmes en Afghanistan.
    Nous vous souhaitons la bienvenue. Nous vous sommes reconnaissants de vous être donné tout ce mal pour venir témoigner.
    Souhaitez-vous commencer par faire quelques observations? Nous allons ensuite vous poser quelques questions.
    Je n'ai pas d'observations à formuler. Je suis prête à répondre à vos questions.
    Très bien. Nous allons donc passer directement aux questions.
    Je vais simplement vous expliquer que nous sommes un comité multipartite de la Chambre des communes ici, à Ottawa, au Canada. Quatre partis sont représentés, et chacun va disposer de sept minutes pour vous poser des questions. Comme le temps de parole des intervenants est minuté, ils voudront poser le plus de questions et obtenir le plus de réponses possible.
    Nous allons commencer par M. Bob Rae, de l'opposition officielle.
    Bonjour, docteure Sobhrang. Je suis heureux de vous voir. Vous êtes probablement plus connue que vous ne le pensez au Canada, parce que nos journaux citent fréquemment vos propos.
    Oui.
    J'aimerais que nous parlions tout de suite des changements au droit de la famille en vertu de la charia, qui ont été envisagés par le Parlement national.
    Vous avez dit estimer que l'Occident vous avait laissé tomber, parce que nous n'en avons pas fait assez pour freiner cette mesure législative. Le gouvernement dit qu'il a été mis au courant trop tard.
    Quand avez-vous su que cette loi était adoptée?
(0815)
    Je vous remercie beaucoup de cette question.
    D'abord, je tiens à vous dire que j'ai de la difficulté à m'exprimer en anglais, mais je vais essayer de vous l'expliquer.
    En mars, le Parlement a approuvé la loi sur le statut personnel chiite, et le président Karzaï l'a signée également. Lorsque nous l'avons appris, nous avons organisé des réunions avec toutes les commissions indépendantes des droits de la personne, la société civile et des membres du Parlement, et nous avons protesté contre cette loi. Nous avons aussi fait une manifestation. Nous voulions interrompre le processus.
    Or, M. Karzaï l'avait déjà signée. Nous avons voulu apporter des changements. Il y a peut-être deux ans, lorsque nous en avons entendu parler, la loi chiite était rédigée par l'ayatollah Mohseni. Nous avons obtenu le texte. La loi allait tout à fait à l'encontre des droits de la personne, des droits de la femme, de notre constitution et de toutes les conventions internationales des droits de la personne. Elle n'était pas acceptable pour nous. Nous voulions faire des observations et des suggestions et nous avons fait celle-ci. De plus, à l'Université de Khatib, beaucoup d'experts afghans et iraniens ont examiné cette loi et ont affirmé qu'elle portait atteinte aux droits des femmes et que nous devions empêcher ce processus, parce qu'à ce moment-là, le texte avait été présenté au Parlement.
    Nous avons également rencontré des membres du Parlement ainsi que son président, M. Qanouni. Nous avons réussi à interrompre le processus durant plus de neuf mois, mais soudainement, le Parlement a adopté et approuvé la loi. Depuis ce temps, nous sommes très inquiets parce que le ministère de la Justice n'a rien fait. Nous nous demandons pourquoi il ne s'est pas penché sur cette loi pour y apporter des changements. Jusqu'à maintenant, elle n'a suscité aucune réaction visant à mettre un terme à ce processus, alors nous sommes inquiets.
    Si je comprends bien, quand vous avez vu la version préliminaire, vous et bon nombre de groupes auxquels est associée la commission vous êtes objectés à ce que vous considériez comme un avant-projet de loi. Vous avez ensuite été très surpris quand le président a signé la loi, qui était beaucoup plus près de l'avant-projet de loi que des objections que vous et les groupes que vous représentiez aviez formulées. Cela correspond-il assez bien à ce qui s'est passé?
    D'après ce que j'ai compris, quand nous en avons entendu parler, c'était déjà inscrit au programme du Parlement. Nous avons aussi rencontré des membres de la MANUA en Afghanistan ainsi que de l'Union européenne. Nous leur avons demandé de faire quelque chose pour interrompre ce processus, parce que cette loi porte vraiment atteinte aux droits de la personne et des femmes en Afghanistan. Elle va aussi à l'encontre de notre constitution. Tous les défenseurs des droits des femmes et moi-même pensons que l'Union européenne et la MANUA ont réagi tardivement et de manière très passive et inefficace dans ce processus.
    Parlons maintenant de l'avenir plutôt que du passé. Nous comprenons tous qu'il y a de graves lacunes dans la loi. Comment réussira-t-on, désormais, à régler cette question? Qu'arrivera-t-il au cours des prochains mois?
(0820)
    Ce qui nous inquiète à propos de cette loi, c'est qu'elle ouvre la voie à l'approbation de lois semblables.
    Nous avons rédigé une loi familiale pour les Sunnites en Afghanistan, ainsi que la loi contre la violence faite aux femmes. Ces deux lois suivent le même processus, passent par le Parlement, mais nous sommes inquiets. Même si les textes sont très bons et très efficaces et même s'ils pourraient changer la situation des femmes en Afghanistan, ce qui serait bénéfique, nous sommes inquiets parce que le Parlement va peut-être modifier ces deux lois. C'est notre principale préoccupation.
    Nous craignons également que les femmes afghanes perdent ce qu'elles ont acquis depuis la conférence de Bonn et la chute des talibans. Peut-être que nous perdrons tous nos acquis et que nous allons reculer au lieu d'avancer, comme les talibans en Afghanistan.
    Merci, docteure Sobhrang.
    Nous allons maintenant donner la parole à Mme Lalonde, du Bloc québécois, pour sept minutes.
    Je vais m'exprimer en anglais pour que notre témoin puisse comprendre.
    Madame Sobhrang, je suis très heureuse de vous entendre aujourd'hui.
    J'essaie de comprendre quelle est exactement la situation des femmes à l'heure actuelle. Pour que je puisse mieux comprendre, vous pouvez peut-être me dire ce que vous espérez que le Canada et les autres pays fassent dans les semaines et les mois à venir pour que vous puissiez jouir de vos droits et aider les femmes qui en ont besoin.
    Merci.
    J'aimerais d'abord vous dire que cette année, les femmes ont réalisé des progrès considérables en Afghanistan. Par exemple, nous avons une nouvelle constitution. C'est une première en Afghanistan. Dans notre constitution, il n'y a pas de discrimination ni de violence, et les hommes et les femmes jouissent des mêmes droits.
    De plus, les femmes ont la possibilité de participer à la vie sociale, politique et économique. Vous savez, il y a beaucoup de femmes qui siègent au Parlement depuis les élections présidentielles et législatives. Elles participent activement au processus.
    Nous avons également un ministère de la condition féminine et une commission des droits de la personne. De plus, la société civile est très active. Nous en sommes très heureux.
    À mon avis, c'est aussi un pas de géant pour notre société dominée par les hommes, mais ce n'est pas encore suffisant. Les femmes sont très souvent victimes de violence. Par exemple, tous les mois, depuis janvier, nous voyons des cas d'auto-immolation, ainsi que beaucoup de harcèlement sexuel envers les femmes et de viols. Les femmes n'ont aucune sécurité et beaucoup d'entre elles vivent dans la pauvreté. Les femmes afghanes ont donc beaucoup de problèmes, et c'est la raison pour laquelle nous avons besoin de votre appui et de celui de la communauté internationale. Nous espérons que vous ne nous oublierez pas.
    Nous nous sommes engagés dans un processus de démocratie et de justice sociale en Afghanistan, mais nous avons besoin de votre soutien. Les choses progressent rapidement, mais nous devons aller beaucoup plus loin, et nos progrès sont à court terme. Il nous reste beaucoup de chemin à parcourir, et nous sommes confrontés à bien des problèmes et des défis. Nous avons vraiment besoin de votre soutien en Afghanistan.
    Quand la communauté internationale est arrivée dans notre pays, l'un de ses principaux objectifs était la défense des droits des femmes afghanes, mais vous savez dans quelle situation nous nous trouvons actuellement.
    Les femmes n'ont aucune sécurité et chaque jour, les ennemis de l'Afghanistan brûlent des écoles pour filles. Ils lancent des produits chimiques au visage des femmes à Kandahar. Il y a aussi ce qui s'est produit dans les écoles pour filles des provinces de Kapisa et de Parwan.
    Tout cela empêche les femmes de progresser. Les femmes et les jeunes filles vivent maintenant dans la peur, et toutes les familles s'inquiètent quand elles envoient leurs enfants à l'école. Elles s'inquiètent de ce qui pourrait arriver à leurs enfants et à leurs filles à cause des enlèvements et de tout ce qui se passe. Rien ne garantit que cela n'arrivera pas ni que leurs filles vont rentrer à la maison. Nous sommes toutes des mères. Nous sommes inquiètes quand nous envoyons nos filles à l'école. Nous ignorons ce qui va arriver. Même quand elles fréquentent la maternelle, nous ne savons pas si elles vont revenir ou non.
    La situation est très grave. Nous avons besoin de votre appui, et je parle au nom de toutes les femmes afghanes. S'il vous plaît, ne nous oubliez pas. Nous avons vraiment besoin de votre appui.
(0825)
    Je vous remercie beaucoup de toutes ces informations. Je comprends que vous avez besoin de soutien et je pense que beaucoup de personnes ici veulent vous aider, mais pourriez-vous nous parler un peu plus en détail de l'aide que nous pouvons vous fournir?
    Premièrement, le peuple afghan a besoin de sécurité. Sans la sécurité, nous ne pouvons pas progresser dans d'autres domaines — par exemple, sur le plan économique, politique et social. La sécurité est la priorité. Jusqu'ici, notre gouvernement ainsi que les services de police et l'armée n'ont pas eu la possibilité ou le pouvoir d'assurer la sécurité de l'Afghanistan. C'est très important.
    Deuxièmement, l'article 7 de notre constitution porte sur la responsabilité du gouvernement à l'égard de toutes les conventions internationales, les conventions sur les droits de la personne. Notre gouvernement doit donc modifier toutes les lois afghanes, en droit civil comme pénal, les questions concernant l'égalité des sexes, etc. Nous avons besoin d'un grand nombre d'experts. Vous pourriez en envoyer dans différentes régions de l'Afghanistan. Ils pourraient nous aider sur le plan du renforcement des capacités. C'est très important. Je crois que vous pouvez le faire; nous avons besoin de vos experts.
    Vous pouvez également inviter nos jeunes dans votre pays. Ils pourront apprendre de nouvelles choses et revenir travailler en Afghanistan. Au cours de ces 30 années de lutte, nos jeunes ont appris comment utiliser des armes, mais ils n'ont rien appris sur la culture et ils n'ont pas acquis de compétences.
    Il y a beaucoup de pertes d'emplois en Afghanistan. Nous n'avons pas de structure solide. Nous n'avons pas de projets pour créer des emplois. Notre nouvelle génération et nos jeunes garçons ont vraiment besoin d'aide. Nos enfants jouent dans les rues sales. Ils n'ont pas de parcs, pas de passe-temps.
    C'est très difficile de l'expliquer en anglais.
(0830)
    Merci beaucoup.
    Il faut vraiment que vous nous aidiez.
    Absolument. Je vous remercie beaucoup.
    Nous allons maintenant laisser la parole à Deepak Obhrai, du parti ministériel, qui va vous poser quelques questions.
    Merci beaucoup, madame Sobhrang. Je vous souhaite la bienvenue.
    Je dois dire que c'est très courageux de votre part de lutter pour les droits des femmes en Afghanistan, compte tenu de tous les problèmes que vous devez affronter.
    J'aimerais que vous nous parliez, en tant que commissaire des droits de la personne, de ce qui se passe à Kandahar, là où se trouvent nos soldats canadiens. Comme vous le savez, la province de Kandahar est très instable. Il y a beaucoup de talibans là où les Canadiens assurent la sécurité. Pourriez-vous nous dire dans quelle mesure votre commission collabore avec les Canadiens pour aborder les questions des droits de la personne à Kandahar, étant donné que les talibans sont encore présents dans cette région?
    Merci.
    Notre commission y est présente elle aussi. Nos locaux originaux sont à Kandahar, et nous avons aussi ouvert un nouveau bureau à Helmand, dans la province d'Oruzgan.
    Il y a deux ou trois semaines, je me suis rendue à notre bureau de Kandahar. Là-bas, les femmes subissent beaucoup de pression et elles se trouvent tous les jours devant des ultimatums. Elles font face à de nombreux défis. Il y a des femmes qui me disent qu'elles n'ont pas l'autorisation de sortir de leur maison ni d'aller travailler. Je suis allée très souvent les visiter là-bas, ainsi qu'à Andarab. Une fois, deux jours après mon arrivée à Kandahar, une femme du nom de Sitara Achakzai a été tuée. Elle militait activement en faveur des droits des femmes.
    La situation est très grave là-bas, surtout pour les femmes. Nous avons réellement besoin d'une collaboration entre les organismes canadiens et les autres organismes qui oeuvrent à Kandahar. Il nous faut une très bonne collaboration là-bas, parce qu'il n'y a vraiment aucune sécurité à Kandahar à l'heure actuelle. J'ai aussi fait des visites dans la société civile, et ça ne va pas bien du tout.
    J'ai discuté avec des femmes et des hommes, et ils m'ont dit qu'ils ont perdu confiance en l'avenir. Ils disent qu'ils sont vivants aujourd'hui, mais qu'ils ignorent ce qui va leur arriver demain. Leur avenir semble très sombre. Je pense que c'est très mauvais pour un pays ou une population de perdre espoir en l'avenir. C'est très dangereux.
(0835)
    Merci beaucoup, docteure Soraya. Vous avez soulevé un point très important en ce qui concerne la situation actuelle à Kandahar, à savoir le manque de sécurité. Il faut que ce soit sécuritaire pour que vous puissiez poursuivre la lutte pour les droits de la personne.
    Qu'en pensez-vous? Êtes-vous satisfaite de la formation que la police et l'armée nationales reçoivent des Canadiens? Pensez-vous être suffisamment en sécurité là-bas, grâce à ces forces, pour faire votre travail?
    Oui, je pense que notre police et notre armée ont besoin de renforcer leurs capacités. Travailler avec les Canadiens est pour elles une excellente occasion d'acquérir de l'expérience et d'apprendre à assurer la sécurité de la population dans cette situation. C'est très important. Elles peuvent profiter de l'expérience internationale, parce que ce qui se passe actuellement en Afghanistan, c'est une situation nouvelle. L'ennemi utilise des tactiques différentes tous les jours en Afghanistan, des attentats-suicides, par exemple.
    Quand les communautés internationale et canadienne partagent leur expérience avec nous, cela renforce la capacité de nos policiers. C'est un excellent point.
    Docteure Soraya, je vous remercie beaucoup.
    Vous avez également demandé aux Canadiens d'appuyer votre organisation. Comme vous le savez, nous pensons qu'il est très important de vous aider parce que nous vous considérons comme l'une des organisations de première ligne dans la lutte pour les droits des femmes, l'un des grands principes du Canada.
    Pourriez-vous nous en dire un peu plus sur la nécessité pour le Canada de vous aider à renforcer votre organisation sur le terrain, en particulier à Kandahar, là où nous sommes?
    Merci.
    Je ne veux pas parler uniquement de mon organisation. Tous les groupes de la société civile et tous les militants pour les droits des femmes sont à Kandahar, subissent des pressions et reçoivent chaque jour des ultimatums. Ils ont besoin d'appui, ils ont besoin d'aide. Nous sommes une organisation de défense des droits de la personne et nous avons certaines possibilités, mais si vous pouvez nous aider sur le plan des droits des femmes à Kandahar et faire en sorte qu'il y ait des changements dans leur vie et surtout, qu'elles soient plus en sécurité, j'en serais très heureuse.
    Merci.
    Nous allons maintenant donner la parole à M. Paul Dewar, du Nouveau Parti démocratique, qui va disposer de sept minutes pour vous poser des questions.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à nos témoins. Docteure, je suis heureux de pouvoir vous parler. Je tiens à vous remercier du travail que vous accomplissez et de nous faire connaître la situation des femmes en Afghanistan. C'est très important.
    Pour ma première question, j'aimerais revenir sur l'historique de l'examen de la loi chiite. Vous avez mentionné que cela se préparait depuis un certain temps, mais que vous avez été surprise lorsque le projet de loi a été déposé au Parlement, puis qu'il a été signé par le président. Vous avez dit que vous étiez en contact avec des membres de la communauté internationale et, selon la presse, que la communauté internationale n'avait pas su appuyer les femmes dans ce processus législatif. Au moment de l'examen et de l'adoption du projet de loi, avez-vous communiqué avec des Canadiens sur le terrain pour qu'ils sachent que l'on préparait cette loi? Dans l'affirmative, comment les Canadiens ont-ils réagi?
(0840)
    Je suis désolée que nous n'ayons pas profité de cette occasion pour rencontrer les Canadiens; nous n'étions en contact qu'avec la MANUA et l'Union européenne.
    Je vous remercie de cette précision.
    J'ai remarqué que vous aviez rédigé un rapport. En fait, vous en avez rédigé plus d'un. Celui dont je parle est intitulé « La situation des femmes en Afghanistan en 2008 ». Dans ce rapport, votre organisation affirme que même si l'on a amélioré la loi électorale de façon à ce qu'il y ait un plus grand nombre de femmes au Parlement, les femmes afghanes jouent en fait un rôle symbolique et elles ont peu d'influence sur les décisions importantes prises au pays.
    Y a-t-il des femmes qui ont participé à la rédaction de cette loi? Quel rôle ont-elles joué dans la rédaction et la révision de la loi sur le statut personnel chiite?
    Seuls des hommes ont rédigé la version préliminaire, dont l'ayatollah Mussini, un étudiant de Mashhad, en Iran. Par la suite, il l'a apportée en Afghanistan, et elle a été déposée au Parlement par le ministère de la Justice. Aucune femme n'a participé au processus.
    Au Parlement, la première femme à s'y opposer a été Shinkai Karokhail, puis il y a eu Sabrina Saqib. Ce sont les deux seules personnes. Shinkai Karokhail a été la première à déployer autant d'efforts dans ce processus, mais elle n'est parvenue à modifier que trois articles.
    Les femmes en Afghanistan ainsi qu'au Parlement ne sont pas indépendantes. Au Parlement, il y a des chefs de guerre et différents partis, alors ces femmes subissent des pressions. Elles ont peur, parce qu'on leur donne aussi des ultimatums à l'intérieur du Parlement. La seule femme qui ne craignait pas les ultimatums était Shinkai Karokhail.
    Savez-vous si les forces militaires et surtout policières reçoivent de la formation sur les droits des femmes et les droits de la personne, en particulier à Kandahar? Autrement dit, la police afghane reçoit-elle de la formation sur les droits des femmes et les droits des Afghans?
    Oui, cela fait partie de notre plan d'action dans tous nos bureaux régionaux et provinciaux. Une ou deux fois par mois, nous organisons des ateliers et des séminaires sur les droits de la personne. Il y a une coordination efficace entre la commission des droits de la personne, la police, l'armée et divers groupes concernés. Nous entretenons de très bonnes relations. La participation aux séminaires et aux ateliers est excellente.
    Combien de personnes se consacrent à cela?
    Vous donnez de la formation aux policiers. Vous faites la coordination avec eux.
(0845)
    Oui.
    Avez-vous suffisamment d'effectif pour le faire?
    Oui.
    Vous n'avez pas besoin de plus de ressources?
    Vous savez, je pense que toutes les organisations en ont besoin, parce qu'elles doivent accomplir beaucoup de choses. Chaque jour, nous avons de nouvelles responsabilités. Il n'y a pas assez de 24 heures dans une journée. Nous avons donc toujours besoin de ressources. De plus, nous avons besoin de nouveau personnel qualifié. Il nous faut des conseillers. Ils nous apportent de nouvelles connaissances sur le plan de l'acquisition de compétences et du renforcement des capacités. Nous en avons besoin partout en Afghanistan ainsi que dans notre organisation.
    Je pense qu'il serait très utile pour notre comité que vous nous transmettiez un document écrit, un courrier électronique, à propos des ressources dont vous avez le plus besoin, parce que nous nous penchons sur la façon dont nous pouvons aider l'Afghanistan.
    Je vais conclure en vous remerciant. Si vous voulez assurer un suivi auprès du comité en nous soumettant des suggestions, nous pourrons vous aider davantage dans votre travail.
    Encore une fois, je vous remercie de votre participation aujourd'hui.
    Très bien. Merci.
    Il nous reste assez de temps pour entamer une deuxième série de questions — en tout cas, pour quelques questions — avant de conclure.
    Nous allons commencer par M. Hawn, du parti ministériel, pour cinq minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci d'être avec nous, docteure Sobhrang. Nous vous sommes reconnaissants de vos efforts aujourd'hui et de ce que vous accomplissez.
    La religion occupe une place très importante dans la société afghane. Des relations harmonieuses et une bonne compréhension entre les chefs religieux amélioreraient probablement la situation. Quels efforts déployez-vous pour améliorer la compréhension parmi les chefs religieux des différentes sectes, entre autres? Quelles stratégies utilisez-vous? Comment pouvons-nous vous aider à ce chapitre?
    Vous savez, en Afghanistan, avant ces 30 ans de guerre, les gens vivaient ensemble sans problème; il y avait une très bonne coordination. Ils vivaient ensemble librement. Même pendant la guerre, la population n'avait pas de problème, comme maintenant, d'ailleurs. Qui a un problème? Ce sont les gens qui occupent des postes de haut niveau au gouvernement, dans certains partis, les gens qui sont au pouvoir. Dans la société et la population, les gens vivent ensemble sans problème.
    Par exemple, dans les villages, les hommes et les femmes entretiennent de très bonnes relations entre eux. Ils ne connaissent pas ces problèmes. C'est la même chose entre les chiites et les sunnites, entre autres. Le problème vient des dirigeants, de ceux qui sont au pouvoir, de certains commandants et de ceux qui occupent des postes de très haut niveau au gouvernement. C'est de là que vient le problème.
    Merci.
    J'en déduis qu'il y a un certain niveau de compréhension des droits de la personne et des droits des femmes en Afghanistan parmi les Afghans ordinaires, et que si on les laissait régler le problème, ils pourraient le faire eux-mêmes et ils progresseraient. Est-ce bien cela?
    Oui. Il faut de la sensibilisation et un renforcement des capacités. On doit parler davantage de l'unité nationale. Je pense que les femmes ont un rôle central. Par exemple, durant la guerre en Afghanistan, elles ont joué un rôle essentiel dans l'instauration et la consolidation de la paix.
    En ce qui concerne la résolution 1325 des Nations Unies, le gouvernement de l'Afghanistan a promis qu'après cette guerre, il parlerait du rôle des deux sexes dans le processus de paix et de sécurité en Afghanistan, mais ensuite, il a oublié les femmes afghanes. Dans les jirga ou les conférences régionales, on n'a pas du tout tenu compte de la participation des femmes dans ce processus, alors c'est aussi un problème de taille.
    La communauté internationale peut également, par l'entremise de notre gouvernement, véhiculer cette idée. Sans la participation des femmes, sans la participation des deux sexes, aucun processus de paix et de sécurité ne sera couronné de succès en Afghanistan.
(0850)
    Merci.
    Je pense que nous avons entendu très clairement le message. Toutes les femmes dans la pièce ont le sourire aux lèvres.
    Quelle est l'importance de l'alphabétisation et de l'éducation dans ce processus? Quelles en sont les perspectives à court et à long termes, en particulier pour les jeunes femmes?
    Je vous en ai parlé tout à l'heure. Selon la constitution, les hommes et les femmes ont les mêmes droits; il existe une discrimination positive envers les femmes en éducation, mais on leur pose quotidiennement des ultimatums, et l'ennemi brûle leurs écoles. De plus, comme elles ne sont pas suffisamment en sécurité, elles doivent rester à la maison et cesser de fréquenter l'école. Il y a beaucoup de gardes à l'intérieur des écoles, mais s'il n'y a pas de sécurité à l'extérieur, comment peuvent-elles s'y rendre? Cette situation nous inquiète beaucoup.
    L'année prochaine, il n'y aura peut-être pas de femmes qui vont terminer leur 12e année, et nous en sommes très préoccupés. Jusqu'ici, dans certaines provinces, nous n'avions pas de gardes dans les écoles secondaires. Nous avions seulement des gardes jusqu'en 6e année, mais étudier jusqu'en 6e ou en 9e année, ce n'est pas suffisant comme éducation.
    Si nous voulons que les femmes participent à la vie politique et économique, occupent des postes de haut niveau et prennent des décisions, il faut qu'elles aient accès à une éducation supérieure. Elles doivent aller à l'université. Or, elles n'ont aucune sécurité. En plus, elles ont des problèmes sur le plan économique. Comment peuvent-elles aller à l'école, aller à l'université?
    Aujourd'hui, j'ai reçu une nouvelle, mais je m'interroge à ce sujet. Elle provenait de la province de Herat. Dans une faculté de la charia, on a divisé l'éducation des femmes en deux volets — l'un pour l'enseignement, l'autre pour l'interprétation de la charia, ou fiqh. Or, les femmes n'ont pas l'autorisation d'interpréter la loi. C'est de la discrimination à l'égard des femmes. Nous devons faire quelque chose au sujet de cette décision.
    Merci beaucoup.
    Durant les quelques minutes qu'il nous reste, nous allons donner la parole à l'opposition officielle. M. Wilfert va vous poser quelques questions.
(0855)
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être avec nous, docteure.
    L'une des six priorités du Canada en Afghanistan est l'avancement du régime démocratique, en particulier en ce qui concerne les institutions publiques comme la justice, et la formation des juges. L'un des mandats des Canadiens est de travailler en étroite collaboration avec les femmes afghanes afin qu'elles soient représentées de façon équitable dans ces institutions, dans leurs propres communautés et dans l'ensemble de la société.
    Pouvez-vous nous parler de ce qui est important, selon vous, dans le processus de renforcement des capacités pour faire avancer les choses? Quand on nous dit, par exemple, que la loi sur le statut personnel chiite a été rédigée par des hommes, cela ne nous donne pas vraiment l'espoir de réussir à atteindre les objectifs que nous trouvons importants, tout comme votre organisation.
    Quels sont les outils que nous devrions fournir? Quelle est votre évaluation actuelle des possibilités de renforcement des capacités en ce qui a trait à la justice et à un traitement équitable pour toutes les femmes en Afghanistan?
    C'est une très bonne idée, que nous devons vraiment adopter. Dans notre système de justice, il y a peut-être beaucoup de personnes qui ne croient pas aux droits des femmes et qui ne connaissent pas la signification de l'égalité des sexes. Parfois, il y a aussi de la discrimination et de la violence envers les femmes. Par exemple, si une femme se présente devant un tribunal et déclare qu'elle veut divorcer, on va lui demander pourquoi. Si elle dit que c'est parce que son mari la bat tous les jours et qu'elle subit de la violence psychologique, le juge va lui dire que c'est normal parce qu'elle est une femme et qu'elle doit retourner chez elle. Nous entendons souvent dire cela.
    Je pense que c'est très important. Par exemple, à la cour suprême, il n'y a que des hommes actuellement. Nous avons des femmes juges, mais ce n'est pas suffisant. Le renforcement des capacités et la sensibilisation des juges sont essentiels, en particulier pour le système judiciaire en Afghanistan. À mon avis, sans femmes juges et sans militantes pour les droits des femmes au sein du système judiciaire... La justice, la démocratie, l'égalité des droits des hommes et des femmes et la mise en oeuvre de notre constitution ne peuvent plus attendre. Il est primordial que les femmes soient présentes dans toutes les sphères de la société.
    Je vous remercie beaucoup. Nous vous sommes reconnaissants d'avoir pris le temps de répondre franchement et clairement à nos questions aujourd'hui. Cela va nous aider dans nos délibérations.
    Nous vous souhaitons tout le succès possible dans votre lutte pour les droits des femmes en Afghanistan. Nous pensons qu'il sera intéressant de suivre vos progrès et nous espérons qu'ils seront considérables au fil des ans. Merci beaucoup et soyez prudente.
    Merci infiniment. Je suis très heureuse que vous m'ayez donné l'occasion de m'adresser à vous.
    Merci.
    Je suis désolée de ne pas m'exprimer aussi bien que je le voudrais en anglais. Avez-vous réussi à me comprendre?
    Vous parlez mieux anglais que moi, et je vous en félicite.
    Merci.
    La séance est levée.
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