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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 028 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 16 juin 2009

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Bienvenue à la 28e réunion du Comité permanent de la défense nationale. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée par le comité le lundi 23 février 2009, nous poursuivons notre étude sur la souveraineté dans l'Arctique.
    Nous avons le plaisir d'entendre par vidéoconférence du Danemark le contre-amiral Nils Wang de la Marine royale danoise.
    Nous sommes prêts à vous écouter, monsieur Wang. Merci de comparaître devant nous depuis votre pays. Vous disposez de sept à huit minutes. Par la suite, les membres du comité vous poseront des questions.
    Peut-être pouvez-vous commencer.
    Merci d'être ici.
    Merci, monsieur le président.
    C'est un grand privilège et un grand honneur pour moi d'avoir été appelé à comparaître comme témoin devant votre comité. Comme on me l'a demandé, j'ai préparé une petite introduction de cinq à sept minutes. Par la suite, je serai heureux de répondre à toutes vos questions.
    J'espère que vous pouvez m'entendre clairement et qu'il y a une bonne connexion entre nous.
    Vous avez sans doute constaté avec effroi que la calotte glaciaire dans l'Arctique fond à vue d'oeil. Les opinions diffèrent quant à savoir à quel rythme, mais on commence déjà à en percevoir les premiers effets, du moins de mon point de vue opérationnel.
    En août dernier, un premier navire marchand danois a emprunté le mythique passage du Nord-Ouest pour se rendre du Japon à St. John's, Terre-Neuve, au Canada. Il a mis 15 jours de moins pour se rendre à sa destination qu'il lui en aurait fallu s'il avait suivi le trajet habituel, par le canal de Suez.
    Une des principales lignes maritimes danoises a annoncé l'année dernière qu'elle avait entrepris la construction d'une série de navires pourvus d'une capacité de déglaçage. C'est donc dire qu'elle croit sérieusement pouvoir exploiter ses navires pour le transport dans l'Arctique dans le cours de leur vie utile, qui est de 10 à 15 ans.
    Je peux vous assurer qu'une réduction de 40 p. 100 de la distance entre l'Europe et l'Asie et de 25 p. 100 entre les États-Unis et l'Extrême-Orient représentera une économie extrêmement intéressante pour l'industrie du transport maritime en général. Et lorsqu'on comparera les économies réalisées aux investissements nécessaires, c'est toute l'industrie qui embarquera.
    Mais comme dans tout autre aspect de la vie, le changement apporte son lot de difficultés. Une redéfinition complète des voies de transport maritime aura certainement de vastes et profondes implications sur le plan de la sécurité, et je pense que tous ont la même opinion.
    Quand on pense à toutes les activités commerciales liées aux lignes de communication maritime, comme les infrastructures maritimes et les raccourcis créés de main d'homme, tels le canal de Suez et celui de Panama, il y a tout lieu de penser qu'un chambardement important des voies maritimes aura de grosses répercussions sur le plan économique et sur le plan de la sécurité à l'échelle mondiale.
    Mais le changement comporte aussi des avantages. Ainsi, une réduction de 40 p. 100 du trajet entre l'Europe et l'Asie signifie une réduction de 40 p. 100 de la consommation de combustibles et aussi des émissions de gaz carbonique des navires marchands. Il est assez ironique de constater que la fonte de la calotte glaciaire pourrait être un des facteurs qui contribuent le plus à la réduction des émissions de CO2 dans le monde.
    Le recul des glaces permettra également une exploitation sérieuse des ressources pétrolières et gazières de l'Arctique. Selon les estimations, l'Arctique constituerait le dernier grenier d'hydrocarbures de la terre et pourrait même contenir jusqu'à 25 p. 100 de la réserve mondiale de cette ressource. Voilà qui risque d'accroître les activités maritimes dans l'Arctique, mais aussi d'entraîner une course pour s'accaparer ces ressources, avec toutes les conséquences que cela peut avoir sur la sécurité et l'environnement. On pourrait voir poindre les revendications territoriales ou des conflits d'intérêts, même que cela a déjà commencé.
    D'un strict point de vue opérationnel, il y a une façon, et une seule, de surmonter les problèmes causés par l'augmentation de l'activité maritime dans l'Arctique, et c'est la coopération. Il est dans l'intérêt de tous de gérer et de régler les revendications territoriales, les différends relatifs à l'accès aux ressources et les autres conflits d'intérêts selon le cadre juridique international. Il faut éviter les conflits ou les différends à propos des ressources ou du territoire terrestre ou marin, et on ne doit pas laisser les intérêts divergents entraver l'étroite coopération nécessaire pour venir à bout des nombreux défis qu'aucun d'entre nous ne peut surmonter seul.
(1105)
    Au mois de mai 2008, les cinq nations bordant l'océan Arctique, c'est-à-dire le Canada, le Danemark, la Norvège, la Russie et les États-Unis, se sont rencontrées à Ilulissat, au Groenland. Je pense que cette rencontre constituera un événement marquant dans l'histoire moderne de l'Arctique. Les cinq nations se sont entendues sur ce qu'il est maintenant convenu d'appeler la « déclaration d'Ilulissat ». En gros, elles ont accepté de mettre de l'eau dans leur vin et de chercher ensemble à aplanir les difficultés et à exploiter de nouvelles possibilités. Elles ont aussi convenu de régler les revendications territoriales en accord avec le cadre juridique international et de s'acquitter de leurs obligations communes en ce qui a trait à la protection de l'Arctique et à la coopération dans les domaines comme la recherche et le sauvetage ainsi que la protection de l'environnement.
    Je pense que le futur est déjà à nos portes et que, outre les implications qu'aura la fonte de la calotte glaciaire sur la sécurité dans le monde, nous allons probablement assister, d'ici dix ans, à une augmentation considérable du trafic maritime dans l'Arctique. L'activité humaine et économique dans la région risque elle aussi d'augmenter et, si les choses ne sont pas bien faites, il pourrait y avoir une véritable course pour mettre la main sur les ressources de l'Arctique qui, s'ajoutant au détournement des routes maritimes, pourrait engendrer de graves problèmes sur le plan de la sécurité et de l'environnement.
    Dans ces nouvelles conditions, la région polaire présente un potentiel qui risque de changer le contexte géostratégique et de modifier les plans militaires non seulement des cinq états en bordure des eaux polaires, mais aussi des autres pays. Sur le plan opérationnel, je pense qu'il faudra que notre marine et notre garde côtière soient présentes dans la région, que l'on dresse des cartes maritimes fiables de tout le secteur, que l'on se dote d'un système de gestion de la circulation maritime pour garantir la sécurité de la navigation, que l'on acquière des capacités de recherche et de sauvetage efficaces, que l'on contrôle les ressources halieutiques et en hydrocarbures et que l'on se dote de moyens d'intervention en environnement pour assurer la protection et la préservation du fragile milieu marin de l'océan Arctique. Mais par dessus tout, je vais conclure ainsi mon bref exposé, il faudra agir en coopération avec les autres.
    Sur ce, je mets un terme à mon exposé. Merci.
    Merci beaucoup monsieur Wang.
    Je cède maintenant la parole à M. Wilfert.
    Merci monsieur le président. Je partagerai mon temps de parole avec M. Bagnell.
    Amiral, je suis heureux de vous revoir. Vous avez fait une présentation à Tokyo en juin dernier.
    Je vous promets de ne pas vous parler de l'île de Hans, mais je veux revenir sur ce que vous avez dit au sujet de la coopération. Selon vous, quels seraient les meilleurs outils dont nous disposons pour améliorer la coopération internationale, tout particulièrement parce que le Canada et le Danemark divergent d'opinion par rapport aux Russes au sujet du plateau.
    Selon vous, quels seront les effets des instruments internationaux, que ce soit la coopération militaire ou la diplomatie, en vue d'accroître les avantages dont vous avez parlé au sujet de l'Arctique?
(1110)
    Merci beaucoup.
    Je suis heureux de vous revoir. Je vais tenter de répondre à votre excellente question. Comme je l'ai également mentionné lors de ma présentation à Tokyo, la dernière fois où nous nous sommes rencontrés, je pense que vous, politiciens et législateurs, avez l'énorme responsabilité de créer un environnement et une stabilité propices au travail que nous, professionnels, accomplissons.
    Si, par exemple, je dois collaborer avec les gardes côtières du Canada, des États-Unis, de la Russie et de la Norvège — pour ne mentionner que quelques organisations nécessaires du point de vue opérationnel — les politiciens de chacun des pays doivent discuter entre eux de façon civilisée, si vous voyez ce que je veux dire. Je pense que pour établir la collaboration opérationnelle nécessaire entre les cinq États là-bas, il faut tout d'abord que les politiciens agissent les uns envers les autres comme ils en ont convenu dans la déclaration d'Ilulissat, parce qu'il est ainsi beaucoup plus facile pour nous de nous rencontrer et de nous mettre d'accord sur la façon de surmonter les défis opérationnels et pratiques auxquels nous faisons face.
    Ce que je veux dire, c'est qu'il est beaucoup plus difficile pour nous de collaborer si les politiciens ne parlent que de planter des drapeaux, que ce soit sur le plancher océanique ou sur les différentes îles. Je vais maintenant parler de l'île de Hans. Je pense que l'île de Hans est un bon exemple de divergence d'opinion entre deux pays au sujet d'un conflit touchant les frontières; par la suite, ces deux pays ont laissé les outils politiques et les cadres de travail mettre à profit les connaissances scientifiques pour découvrir qui a raison et qui a tort. Pendant ce temps, le Canada et le Danemark peuvent commencer à discuter de la création d'une organisation de sauvetage conjointe ou de la mise en commun de leurs ressources pour collaborer là-bas.
    Il y a deux ou trois ans, une nouvelle organisation, le North Atlantic Coast Huard Forum, a été créée; cette organisation compte 20 pays situés autour de l'Atlantique Nord, comme son nom l'indique. Je pense qu'il s'agit du seul réseau professionnel auquel participent les cinq nations polaires. Nous avons ainsi l'occasion d'utiliser ce cadre de travail pour entreprendre des discussions sur la façon de régler les problèmes qui surviendront à l'avenir. Il s'agit du moins d'un bon point de départ. En résumé, ce que je veux dire, c'est qu'il faut une rhétorique politique décente pour que les fonctionnaires comme moi collaborent.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
    Je vous remercie de votre réponse. Je le répète, je suis très heureux que vous ayez pu vous joindre à nous.
    Monsieur le président, je vais partager mon temps avec M. Bagnell.
    Amiral Gang, ce sera un plaisir pour moi de vous revoir.
    Je n'aurai probablement qu'une seule question. En 2006, je pense, notre ministre des Affaires étrangères et moi avons rencontré votre ministre des Affaires étrangères et le premier ministre du Groenland aux Nations Unies. Au sujet de l'île de Hans, nous nous sommes mis d'accord pour demander aux fonctionnaires de réaliser une étude approfondie de l'histoire et des données scientifiques afin de résoudre ce différend. Je me demandais si vous pourriez nous donner un aperçu de la situation actuelle, quatre ou cinq ans plus tard, de ce processus d'étude.
(1115)
    Je ne crois pas avoir les derniers renseignements à ce sujet. La dernière chose que j'ai entendue au sujet de l'île de Hans, c'est que nous nous sommes mis d'accord; nous ne sommes pas du même avis et c'est une question qui doit être réglée par les sous-groupes, ou peu importe comment on les appelle, aux Nations Unies.
    En même temps, je sais que des recherches scientifiques conjointes sont en cours sur l'île de Hans, et sont réalisées par des scientifiques canadiens et danois. Je pense que ces efforts sont en voie de donner des résultats en me fondant principalement sur ce que vous venez de mentionner, et que les données scientifiques finiront par suggérer une façon de régler ce différend. Pendant ce temps, du point de vue de la marine danoise, du moins, le département des Affaires étrangères nous a dit de ne plus nous rendre là-bas pour placer des drapeaux sur l'île. C'est peut-être un indice que le processus semble en voie d'aboutir, comme vous l'avez dit.
    Pour compléter la question de Bryon Wilfert, du moins en partie, pouvez-vous nous parler davantage de la coopération dont nous faisons preuve pour la cartographie complète du plancher océanique dans le cadre de l'UNCLOS, des détails techniques de ce qui se passe?
    Je ne peux pas vous donner beaucoup de détails à ce sujet, mais je sais que de nombreux travaux scientifiques ont lieu à l'heure actuelle, afin de cartographier le plateau continental du Nord du Groenland et, je présume, des autres nations polaires. D'après ce que je sais, ces résultats scientifiques doivent être remis à différents moments, parce qu'il faut donner les résultats moins de 10 ans après avoir ratifié la Convention.
    Donc, pour les données danoises, ce sera en 2014, je pense, et je pense que la Norvège a donné ses résultats en 2006. Il faudra voir si les États-Unis ratifieront la Convention; le cas échéant, ils auront par la suite 10 ans pour recueillir leurs données. Je ne me souviens pas de l'année à laquelle le Canada doit remettre ses résultats, mais je pense que le processus a été entrepris. Je sais au moins que nos soldats dans le Nord du Groenland apportent leur soutien à différentes expéditions scientifiques ou aux mesures visant à préciser les données au sujet du fond marin.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Bachand.

[Français]

    Merci, amiral, de vous joindre à nous. Pour votre information, je pense que le Canada doit déposer son étude pour 2013.
    J'ai une première question pour vous. Vous avez évoqué, dans votre présentation, le passage du Nord-Ouest. Quelle est la position du Danemark sur le passage du Nord-Ouest?
     Comme vous le savez, le Canada considère que ce sont des eaux intérieures, donc qu'il a pleine juridiction sur ces eaux, alors que nos amis américains considèrent que c'est un passage international. Le Danemark a-t-il une position sur le passage du Nord-Ouest?

[Traduction]

    Je ne suis pas certain si quelqu'un au Danemark a une opinion officielle à ce sujet, mais ce n'est assurément pas mon cas. Je pense qu'il serait très sage de ne pas se mêler de ce conflit et de laisser au Canada et aux États-Unis le soin de régler cette question eux-mêmes, parce que le passage du Nord-Ouest en tant que tel est, bien entendu, un détroit qui ne concerne pas de près le Groenland, sur le plan des revendications pour le territoire ou le plancher océanique.
    Je pense que le navire marchand danois qui est passé par le passage du Nord-Ouest, dont j'ai parlé dans mon introduction, suivait les règles du pilote, parce que je crois me souvenir que le navire avait été affrété par une entreprise canadienne pour placer des câbles sur le plancher océanique en arrivant près de St. John's. Je pense donc que le navire marchand est passé par cette zone en raison des règles canadiennes au sujet de ces eaux.
    Je pense que le Danemark n'a pas de point de vue officiel sur la façon dont ce différend sera réglé, de sorte que je n'oserai même pas m'aventurer dans ces eaux.
(1120)

[Français]

    Maintenant, j'aurais une question à vous poser au sujet de votre voisin la Russie. J'aimerais savoir si le Danemark a des ententes de coopération avec la Russie. J'aimerais aussi savoir comment vous jugez son comportement actuel. Comme vous le savez, c'est le seul pays circumpolaire à ne pas faire pas partie de l'OTAN. Les quatre autres pays en font partie.
    Pouvez-vous nous dire si les Russes ont un comportement correct ou un peu plus agressif? Par exemple, respectent-ils votre espace spatial et les 200 milles marins de votre pays? Comment jugez-vous leur comportement actuel?

[Traduction]

    Étant donné que je suis un militaire, je vais tenter de répondre à votre question de façon non politique. Ce n'est pas à moi de juger si le comportement des Russes à l'égard du Royaume du Danemark est acceptable ou non.
    J'ai constaté, étant donné que j'ai un intérêt personnel dans ce qui se passe dans l'Arctique, que les Russes formulent différentes affirmations. Peut-être savent-ils très bien qu'ils sont le seul pays polaire ne faisant pas partie de l'OTAN et se sentent-ils donc l'objet de certaines pressions. Je ne sais pas. J'ai également constaté hier à peine que l'ambassadeur russe à Copenhague a envoyé une lettre à l'un des journaux nationaux en disant que la Russie se conformerait aux règles internationales au sujet de l'Arctique et respecterait la décision prise dans le cadre de la Déclaration d'Ilulissat. La lettre de l'ambassadeur disait essentiellement que la Russie se conformerait aux règles internationales au sujet de toutes les discussions en cours sur l'Arctique.
    Pour ce qui est de l'espace aérien et des eaux dans la zone de 200 milles nautiques, je ne crois pas que la Russie ait violé notre espace aérien au Groenland, du moins depuis de nombreuses années. Je suis également assez certain que chaque fois que les Russes entrent dans les eaux danoises, ils se conforment aux règles et annoncent leur présence. S'ils entrent dans nos eaux nationales et qu'ils mènent des enquêtes scientifiques sur la zone économique, ils suivent également la procédure adéquate. Disons que nous n'avons pas d'exemples concrets, pas à ma connaissance du moins, d'épisodes où la Russie aurait violé notre souveraineté au Groenland. Bien entendu, nous avons depuis longtemps une relation de voisinage avec la Russie dans la partie la plus au sud du royaume, dans la mer Baltique. Actuellement, nous entretenons une belle relation de coopération avec la Russie.
    Je dois donc répondre à votre question en disant qu'il n'y a rien à signaler à ce sujet.

[Français]

     Je vous pose ma dernière question, amiral. Pensez-vous qu'à l'avenir, l'OTAN aura un rôle à jouer dans l'Arctique? On vient de mentionner que quatre pays font partie de l'OTAN, mais pas la Russie. Des discussions débutent actuellement à l'OTAN sur l'ouverture du passage du Nord-Ouest et l'importance de l'Arctique.
     Vous, en tant que militaire et amiral, pensez-vous que l'OTAN pourrait éventuellement jouer un rôle dans l'Arctique?

[Traduction]

    Tout dépend de la période à laquelle vous songez.
    Si le développement dont j'ai parlé dans mon introduction se déroule comme j'ai prévu, dans un certain nombre d'années — ce peut être 10 ou 20 ans —, le trafic commercial dans la région de l'Arctique s'intensifiera. Il sera donc possible d'aller dans la région soit à bord de navires commerciaux normaux, soit à bord de navires de guerre normaux. Si l'Arctique devient une région préoccupante du point de vue de la sécurité en raison de l'intérêt que suscitent ses ressources, je crois que l'OTAN, si elle existe toujours dans 20 ans, jouera le même rôle qu'elle joue dans d'autres points chauds du globe. Si l'OTAN existe toujours, je crois qu'elle continuera de jouer un rôle dans les points chauds du monde, et par conséquent dans l'Arctique également. Si les navires commerciaux peuvent se rendre dans l'Arctique, je crois que les navires normaux de la marine pourront également le faire, du moins de façon saisonnière ou peut-être seulement dans certaines parties de la région.
    Je crois que l'OTAN comme l'Union européenne et les Nations Unies joueront un rôle dans ce point chaud comme dans tous les autres points chauds du monde. On peut même imaginer un apaisement des tensions dans certains points chauds actuels et une intensification des tensions dans de nouveaux endroits.
(1125)
    Je vous remercie, monsieur Wang.
    J'accorde maintenant la parole à M. Harris.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Je vous remercie, amiral Wang, de vous joindre à nous aujourd'hui.
    J'ai deux ou trois questions à vous poser. Vous avez dit deux fois dans votre introduction que si de nouvelles routes maritimes s'ouvrent dans le Nord, cela posera pour nous tous de nouveaux défis de sécurité. Pourriez-vous nous expliquer quels sont ces défis et ce que fait votre pays, le Danemark, pour se préparer à les relever.
    Mes préoccupations en matière de sécurité concernent avant tout la question des ressources. Je crois que la question du transport maritime est davantage une question économique. Une nouvelle infrastructure commerciale sera créée dans le domaine du transport maritime.
    Si d'importantes routes maritimes passent par des détroits étroits, l'histoire montre qu'il se crée souvent à ces endroits des points de tension puisqu'il s'agit d'importants goulots d'étranglement stratégiques. Si les lignes de transport maritime changent, on pourrait s'attendre à ce que de nouveaux goulots d'étranglement apparaissent et cela ne sera pas nécessairement négatif.
    Je ne sais pas si l'on peut vraiment dire que la sécurité du monde est en évolution constante et que lorsqu'on élimine un point chaud, un autre point chaud apparaît ailleurs, mais c'est certainement une façon très simple de voir les choses. À titre d'exemple, si le canal de Suez et le canal de Panama perdent leur importance parce que la majorité des navires empruntent une autre route, ils cesseront d'être aussi névralgiques.
    Cette question est-elle également préoccupante pour le Danemark ou est-ce surtout le Canada qui doit s'inquiéter d'une présence militaire accrue en raison de l'existence du passage du Nord-Ouest?
    Il est effectivement permis de conclure de ma déclaration qu'un détroit comme le passage du Nord-Ouest deviendra un nouveau goulot d'étranglement si la région se développe comme je l'anticipe.
    D'autres parties de l'Arctique et les régions adjacentes revêtiront une nouvelle importance en raison de leur proximité par rapport aux nouvelles routes maritimes, bien que ce ne soit pas nécessairement pour des raisons de sécurité. Prenons l'exemple d'un pays comme l'Islande qui pourrait devenir une nouvelle grande plaque tournante pour le trafic maritime et où pourrait avoir lieu le transbordement de conteneurs dans des brise-glace. Les routes maritimes créent toute une infrastructure. Quand on songe à l'infrastructure qui est liée aux grandes lignes de communications maritimes actuelles, on voit qu'il s'agit d'énormes investissements. Si le besoin en infrastructure se manifeste dans une région où aucune infrastructure n'existe à l'heure actuelle, cela donnera lieu à une situation nouvelle pouvant comporter des incidences en matière de sécurité.
(1130)
    J'ai une autre question à poser. Le Danemark apporte-t-il des modifications à ses navires pour leur permettre de naviguer dans les glaces, ou envisage-t-il de le faire?
    Le Danemark possède quatre frégates de patrouille depuis 15 ou 17 ans. Nous avons aussi trois très petits garde-côtes que nous sommes actuellement en train de remplacer par un patrouilleur océanique moderne. Il fallait absolument remplacer ces navires qui étaient très vieux. Voilà donc ce que nous faisons actuellement. Nous remplaçons trois vieux navires par trois nouveaux navires qui pourront porter des hélicoptères et qui répondront ainsi à nos besoins.
    Il est cependant impossible d'investir dans des navires pouvant couvrir une région aussi vaste. Il s'agit de 200 milles nautiques, et pour ce qui est des ressources, la région autour du Groenland s'étend sur 300 milles. La région est tellement vaste qu'il n'est pas possible d'investir dans des navires qui la couvriront entièrement. Il faut pouvoir exercer une surveillance par d'autres moyens afin de déterminer où placer ces navires.
    La classe politique danoise se penche actuellement sur un accord de défense quinquennal, et il est fort possible que le pays se dote d'un troisième patrouilleur océanique, et les trois vieux navires seront alors remplacés.
    Je vous remercie.
    Je n'ai qu'une autre question à poser et c'est la même question que posait mon collègue M. Bachand au sujet du trafic aérien russe.
    Le Canada participe évidemment avec les États-Unis au système de détection lointaine du NORAD. Quelle surveillance le Danemark exerce-t-il sur l'espace aérien, particulièrement en ce qui touche l'Arctique et le Nord?
    Pas grand-chose. Nous n'avons pas grand-chose dans ce domaine. Nous comptons, je crois, sur le renseignement qui nous est fourni par nos partenaires; nous n'avons pas nos propres gros systèmes de radar au Groenland. Nous n'avons pas cela.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je laisse maintenant la parole à M. Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Bonjour, amiral. Merci de vous joindre à nous aujourd'hui.
    Je voudrais revenir sur les questions relatives à l'équipement qui vous ont été posées. Si je ne m'abuse, la Marine royale danoise a mis fin dernièrement à son programme de sous-marins et s'est concentrée davantage sur les patrouilleurs océaniques dans l'Arctique.
    Pourriez-vous nous expliquer la raison de ce changement dans l'équipement?
    Le programme de sous-marins n'a rien à voir avec l'Arctique. C'est une décision politique qui a été prise parce que nous avions trop d'équipement et pas suffisamment de ressources. Pour équilibrer les choses, il fallait se débarrasser des sous-marins et c'est ce que les politiciens ont décidé de faire. Aucune véritable analyse opérationnelle n'a soutenu cette décision. C'était une question d'ordre politique et elle a été réglée.
    Je ne vous demanderai pas quelle est votre réaction de marin à cette décision.
    Vous avez parlé de vos capacités en matière de recherche et de sauvetage dans l'Arctique. Pourriez-vous nous décrire quelles sont les capacités du Danemark en matière de recherche et de sauvetage dans l'Arctique, qu'il s'agisse de capacités aériennes ou de capacités maritimes, et comment pourriez-vous coopérer — ou avez-vous déjà coopéré — avec les Forces canadiennes dans ce domaine?
    Nous avons normalement dans l'Arctique une frégate de patrouille et deux ou trois patrouilleurs pouvant participer aux opérations de recherche et de sauvetage 24 heures par jour et 7 jours par semaine, et ces navires sont basés au Groenland. La frégate de patrouille est dotée d'un hélicoptère. Les hélicoptères commerciaux faisant partie de l'infrastructure commerciale du Groenland sont également équipés de treuils et peuvent donc participer à des missions de recherche et de sauvetage. Nous comptons aussi notamment sur les navires marchands.
    Compte tenu de la taille de la région en question, c'est vraiment très peu. Voilà pourquoi j'insiste sur la coopération. Je crois que tous les pays polaires se trouvent dans la même situation, dans la mesure où la région est trop vaste pour que les capacités en matière de recherche et de sauvetage suffisent, surtout si elle devient de plus en plus accessible et que l'activité augmente. À titre d'exemple, le trafic des bateaux de croisière a augmenté de façon phénoménale. Ma hantise, c'est de voir un bateau de croisière transportant 3 000 passagers chavirer dans les chenaux intérieurs du Groenland. On ne peut presque rien faire, sauf si un bateau de croisière semblable se trouve à proximité pour prendre les passagers.
    Notre commandement opérationnel au Groenland est donc en communication avec l'industrie du transport maritime et avec l'OMI. Je sais aussi que le gouvernement du Danemark réclame l'établissement de règles internationales de bonne conduite pour l'industrie des croisières et voudrait notamment qu'on jumelle les bateaux de croisière, car c'est un dilemme presque impossible à résoudre. Si les cinq pays polaires s'entendent pour mettre en commun leurs ressources et font des manoeuvres de temps à autre pour que tous comprennent bien les procédures... Il est évidemment plus facile aux membres de l'OTAN de participer à des manoeuvres qu'aux pays qui n'appartiennent pas à cet organisme.
    Nous avons eu des manoeuvres en commun avec le Canada. C'est à l'extérieur d'Ilulissat qu'a eu lieu le dernier exercice de recherche et de sauvetage, et c'est là aussi que la déclaration a été signée, lors du Forum des gardes côtières de l'Atlantique Nord que j'ai présidé en septembre dernier.
(1135)
    Vous avez parlé de la Déclaration d'Ilulissat. À votre avis, respectons-nous l'esprit de cette déclaration?
    Pourriez-vous répéter la question, monsieur? Je ne l'ai pas comprise.
    Respectons-nous l'esprit de la Déclaration d'Ilulissat? Êtes-vous satisfait de ce qui s'est passé depuis lors?
    Je crois que tous les signataires de la Déclaration d'Ilulissat en observent les principes. Bien qu'il ne s'agisse que d'un morceau de papier et que l'observation de la déclaration soit volontaire, je crois que lorsqu'un document semblable est signé par des ministres des affaires étrangères, les signataires ont tendance à s'y conformer. J'ai l'impression que tous les signataires se conforment à la déclaration.
    J'ai trouvé encourageant d'entendre l'ambassadeur de Russie à Copenhague dire que la Russie comptait observer la déclaration. Je ne pense pas que l'ambassadeur de Russie à Copenhague dirait quoi que ce soit qui n'ait pas l'aval des autorités russes.
    Le passage du Nord-Ouest présente-t-il une valeur commerciale directe pour les entreprises danoises ou pour des intérêts commerciaux mondiaux?
    Je crois que si, puisque l'industrie danoise contrôle 10 p. 100 de tout le commerce mondial. Les navires appartenant à des intérêts danois constituent 10 p. 100 de la flotte mondiale. Si l'on en juge par les statistiques, un navire sur 10 qui empruntera dans l'avenir ce passage appartiendra à des intérêts danois.
    Je ne le savais pas.
    Nous avons évoqué l'approche des cinq nations, entre le Canada, la Russie, le Danemark, la Norvège et les États-Unis. Il est possible que d'autres nations aient des intérêts dans la zone ou souhaitent y établir des intérêts. Si quelqu'un cherchait à établir ses intérêts de façon trop agressive, quelqu'un peut-être qui n'aurait pas signé nos ententes, quelle serait selon vous la bonne façon d'aborder la question? Quelles sont nos limites?
(1140)
    Je peux seulement exprimer une opinion personnelle.
    La réponse à votre question, c'est qu'il est d'autant plus nécessaire pour nous tous de faire intervenir l'ONU sur ce plan, vu qu'il y va de l'intérêt de l'humanité, pour ainsi dire... étant donné que la région est si vaste. La question est très vaste aussi. Entrent en jeu toutes sortes d'intérêts qui ne sont pas limités à ceux des cinq nations polaires. L'intervention de l'ONU dans le processus de division de la région est un premier pas dans la bonne direction. Si un pays fait preuve de trop d'agressivité dans cette région, il conviendra d'aborder le problème comme à l'accoutumée, avec une protestation devant le Conseil de sécurité, n'est-ce pas?
    Merci beaucoup.
    Monsieur Wilfert, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Amiral, vous dites que d'ici 15 à 20 ans la calotte polaire de l'Arctique pourrait avoir disparu. Que l'on pourrait voyager de Yokohama, au Japon, à Rotterdam, et que la traversée serait de 40 p. 100 moins longue. Pourriez-vous nous dire quelle est la motivation principale du Danemark à s'engager activement dans la question du changement climatique et des intérêts stratégiques en matière de sécurité? Nous constatons que le Royaume-Uni et les États-Unis sont déjà bien avancés dans cette voie. Pourriez-vous nous expliquer certains des impératifs auxquels obéit le Danemark, et certains éléments clés de votre stratégie en ce qui concerne le changement climatique et l'Arctique?
    Pour commencer par l'Arctique, c'est pour ainsi dire chez nous. Nous nous préoccupons activement de l'Arctique à cause du Groenland, qui fait partie du royaume danois. Je suppose que le gouvernement danois et le ministère des Affaires étrangères ont donc un rôle naturel à jouer pour cette question en particulier.
    Le souci de mon pays pour la question du changement climatique est, je crois, avant tout le résultat d'idéaux. S'y ajoutent, bien sûr, des intérêts économiques bien concrets, dans la mesure où nous avons certaines des industries d'avant-garde comme l'énergie éolienne, avec les turbines, etc., et recourons à des sources d'énergie alternatives, généralement parlant. À l'heure actuelle, je crois que 25 p. 100 de la consommation du Danemark est couverte par l'énergie solaire ou éolienne, domaines où nous sommes à l'avant-garde à bien des égards. C'est sans doute pourquoi nous aimerions beaucoup en faire la promotion dans le reste du monde. Mais c'est au ministre du Climat du Danemark qu'il conviendrait de poser la question.
    En matière d'infrastructure, nous savons que les Russes développent 12 sous-marins qu'ils pourront utiliser dans l'Arctique. On voit la Russie et d'autres déployer des efforts énergiques pour s'approprier les ressources. Croyez-vous que l'OTAN soit en mesure de relever ce type de défis? Quelle serait l'infrastructure nécessaire à la fois pour surveiller la zone et pour y affirmer notre souveraineté, que ce soit le Danemark ou le Canada, en ce qui concerne nos revendications dans le Nord?
    Là encore, c'est une question hautement politique. Je peux vous donner une liste d'équipement qu'il faudrait acquérir, si vous voulez assurer une surveillance adéquate, en tant que politiciens, mais je doute que vous vouliez voir cette liste.
(1145)
    Cela m'intéresserait.
    Je pense qu'il y a deux façons d'aborder la question. Il y a la coopération et la recherche de dialogue, une manière de chercher à convaincre les autres que c'est la seule façon de procéder si l'on veut faire cela intelligemment et à peu de frais. Puis il y a l'autre piste, qui consiste à lancer une course aux armements, avec tout ce que cela implique. Il n'est pas nécessaire d'aller plus loin en arrière qu'à l'époque de la guerre froide pour avoir une idée de tous les moyens que cela a coûté. C'est à vous, les maîtres politiques des divers pays, de décider de la piste à suivre.
    Merci beaucoup.
    Je donne maintenant la parole à M. Payne.
    Merci, monsieur le président. Je vais partager mon temps avec M. Blaney.
    C'est un plaisir de vous rencontrer, amiral, même si ce n'est pas en personne. Je crois comprendre que vous êtes un formidable spécialiste du Grand Nord et nous sommes ravis de pouvoir vous entendre.
    J'ai quelques questions à vous poser.
    Vous avez parlé de la coopération pacifique dans le Nord et il est évident que c'est la meilleure façon de procéder, surtout dans l'Arctique. Toutefois, nous avons entendu que la Russie et, dans une certaine mesure, la Norvège ont publié des politiques vigoureuses concernant l'Arctique, et je me demande, puisque les deux sont en phase de réarmement, comment vous et le Danemark proposez de faire face à cela?
    Comme je l'ai dit, à l'heure actuelle, notre classe politique discute du prochain accord quinquennal de défense et il n'y a rien sur la table actuellement qui indique que le Danemark commencera à s'armer en vue d'avoir une présence plus importante dans l'Arctique. Essentiellement, la position de mon pays sur ce point sera d'emprunter la voie du dialogue.
    Je ne sais pas ce que vous voulez dire à propos de la Norvège parce que, à ma connaissance, la Norvège n'a rien dans son inventaire militaire, et n'y ajoutera rien d'autre qui la placera en situation plus combative dans l'Arctique que par le passé. Elle a une marine avec des frégates, comme c'est le cas pour vous et pour nous. Évidemment, si vous vous mettez à vous servir de vos frégates dans l'Arctique — et pour cela il faut qu'il n'y ait pas de glace s'il s'agit de frégates traditionnelles — on pourrait dire qu'il s'agit d'une posture plus combative.
    Toutefois, à ma connaissance, la Norvège n'est pas en train de se doter de moyens qui pourraient faire croire qu'elle adopte une posture plus agressive dans l'Arctique. Je ne me souviens pas avoir vu de déclarations venant de la Norvège, à l'exception du fait qu'elle s'inquiète toujours de sa situation comme voisine de la Russie. Je ne pense pas qu'elle ait dit quoi que ce soit concernant un armement accru dans l'Arctique.
    C'est tout ce que je peux dire.
    Merci.
    D'autres témoins nous ont dit qu'il y a certainement des difficultés en matière de sécurité dans l'Arctique. À quelles difficultés ferons-nous face d'après vous? Proviendront-elles d'autres États ou non?
    Je pense qu'il s'agira en majorité de problèmes liés à des États, parce que lorsqu'il s'agit de détroits et de points d'étranglement et de conquête de richesses naturelles, si c'est le scénario qui nous attend, ce sont les États qui en seront à l'origine. Je pense donc pouvoir répartir la question de la sécurité en deux catégories.
    La première est celle des richesses naturelles. Si les sources d'énergie sont rares et que la quête pour se les approprier est vive, cela va créer des tensions sur le plan de la sécurité.
    L'autre, comme je l'ai dit, concerne l'infrastructure maritime, les détroits et les points d'étranglement. Il y a aussi une autre catégorie qui ne concerne peut-être pas les cinq États polaires, mais si la fonte des glaces devait élever le niveau de l'eau dans le monde entier, de nouveaux points chauds pourraient apparaître dans le monde, ce qui pourrait avoir des conséquences pour la planète entière. Si au Bangladesh, par exemple, l'eau devait monter de moins d'un mètre, les basses terres seraient dévastées, ce qui créerait des millions de migrants et quantité de problèmes connexes de sécurité. Cela provoquerait également la désertification et d'autres phénomènes de ce genre.
    Mais en matière de sécurité, les problèmes directs pour les cinq États polaires sont ceux que j'ai évoqués.
(1150)
    Merci beaucoup.
    C'est à vous, monsieur Paillé, s'il vous plaît.

[Français]

    Merci de votre présence.
    Dans le même ordre d'idées, je crois comprendre qu'il y a beaucoup de discussions. Même ici, nous rencontrons plusieurs personnes pour discuter sur le sujet, et c'est aussi la même chose de votre côté.
    Au-delà des discussions et des pourparlers actuels, ne croyez-vous pas que les actions ne sont pas assez concrètes et que nous nous dirigeons peut-être vers une possible impasse? Au-delà des discussions, ne croyez-vous pas qu'il devrait y avoir plus d'actions entreprises par chacun des pays pour faire en sorte que les dommages collatéraux — si je peux les nommer ainsi — soient aussi minimaux que possible?

[Traduction]

    Enfin, je pense que le dialogue entre les cinq États polaires est dans la bonne voie, comme je l'ai dit. Je pense que tous les pays souscrivent à la Déclaration d'Ilulissat. Il en va de même pour les paramètres de l'UNCLOS quant au moment où il faut communiquer ses données scientifiques pour que ses besoins soient pris en compte.
    Je suis peut-être en train de penser tout haut, mais peut-être que ce qu'il faut, c'est dire à tous les autres pays que les États polaires sont sur la bonne voie et que la question sera réglée dans le cadre de l'ONU, ce qui rendra la chose aussi légitime qu'elle puisse être.
    Je crois aussi que les problèmes, on peut les exacerber ou les minimiser. Cela dépend du discours que l'on tient. Les communications quotidiennes au sein de la classe politique dans ce dossier ont une très grande importance.

[Français]

    Passons à un tout autre sujet. Vous comprenez que l'Arctique étant une région quand même assez éloignée, il y a plus de risques liés à la fonte des glaces, et il peut donc y avoir plus d'icebergs.
    Cela n'a peut-être pas vraiment de lien avec la question de la souveraineté dans l'Arctique. Néanmoins, appréhendez-vous un transport accru des matières dangereuses? Avez-vous déjà entretenu des discussions ou des réflexions quant à la normalisation du transport des marchandises dangereuses, comme le pétrole, duquel une fuite pourrait avoir des conséquences catastrophiques, ou quant à l'inclusion de lois concernant le transport de marchandises dangereuses dans de futures ententes internationales? On sait que les conséquences d'un tel événement sont toujours catastrophiques. Toutefois, comprenez que ce serait pire encore, selon moi, si ce genre de catastrophe arrivait en Arctique.

[Traduction]

    Oui, je comprends parfaitement votre question et je partage vos inquiétudes. C'est aussi l'une des choses que j'ai mentionnées dans mon introduction. Une chose aussi simple que cartographier la zone pour disposer de cartes maritimes fiables garantissant la sécurité de la navigation est quelque chose de très difficile parce que la plus grande partie des eaux sous la banquise n'ont pas été mesurées. Pour naviguer en sécurité, il faudra faire un gros effort d'hydrographie.
    Voilà une autre chose dont les législateurs des cinq pays pourraient commencer à discuter. Comment veut-on réglementer le trafic là-haut? J'ai parlé de l'industrie des croisières et du fait qu'il faut veiller à la bonne conduite de ce secteur pour éviter les catastrophes. On peut faire de même avec le transport du pétrole et d'autres types de marchandises, pour assurer la qualité des transports maritimes dans cette zone. Il pourrait y avoir des règles communes de l'OMI applicables à toute cette industrie à l'échelle du monde entier de manière à ce qu'il y ait des normes communes sur la qualité des transports maritimes dans les régions arctiques. Les règles pourraient aussi limiter la période de l'année où la navigation est autorisée et dans quels secteurs en fonction du mouvement des glaces et des choses de ce genre. Il y a donc assurément du travail pour les législateurs sur cet aspect des cadres internationaux.
(1155)
    Merci.
    Monsieur Blaney.
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Wang, je tiens à féliciter votre pays et vous-même pour votre attitude coopérative en ce qui concerne l'enjeu circumpolaire. Je pense que vous pouvez compter sur nous dans ce genre de démarche.
    Vous avez dit plus tôt que, pour des raisons politiques, vous avez décidé de ne pas aller plus loin avec les sous-marins. J'imagine que la décision est associée aux coûts. Comment allez-vous garantir votre souveraineté dans vos eaux arctiques? Comment allez-vous les surveiller? Avez-vous des systèmes de surveillance en place, ou prévoyez-vous en avoir d'ici la fin de l'année prochaine?
    Non, je pense que nous ne saurons pas s'il y a du trafic sous-marin dans nos eaux arctiques. La situation était la même pendant la guerre froide, quand nous avions des sous-marins, parce qu'ils patrouillaient plutôt la mer Baltique. À cette époque, nous comptions sur quelqu'un d'autre pour nous aider à nous occuper de cette partie du problème.
    Mais, non, nous n'avons pas de systèmes de surveillance sous-marine dans cette zone.
    Disposez-vous de systèmes satellites pour la détection en surface? Avez-vous recours aux systèmes internationaux? Comment procédez-vous pour le repérage en surface?
    Nous comptons sur nos aéronefs patrouilleurs et nos navires, de même que sur un système de surveillance par satellite plus ou moins commercial. Nous participons activement au IRLDN — le système d'identification et de repérage à longue distance des navires — qui fait son entrée un peu partout dans le monde. Nous couvrons également les zones groenlandaises, puisque c'est là qu'il faut d'abord faire du repérage si on veut pouvoir passer à l'action.
    Pouvez-vous me dire combien de navires vous comptez construire au cours de la prochaine décennie? Où seront-ils construits, et à combien s'élève l'investissement prévu?
    Je suis chanceux d'être à la tête d'une marine qui vient d'acquérir toute une série de nouveaux navires. Toute notre flotte est nouvelle: ce qui n'a pas été renouvelé au cours des cinq dernières années le sera au cours des cinq prochaines. Du côté de la marine, les investissements ont déjà été effectués. Par conséquent, je ne prévois pas de nouvelles acquisitions, mises à part celles qui sont déjà prévues pour les 10 prochaines années. Au bout du compte, la marine danoise comptera trois frégates, deux plates-formes de commandement, quatre frégates de patrouille de l'Arctique, trois patrouilleurs de l'Arctique, huit petites unités de combat composées de quatre chasseurs de mines et de quatre petites corvettes côtières, et environ une douzaine de navires qui assureront la souveraineté des eaux danoises. Il s'agit d'une flotte relativement restreinte, mais extrêmement moderne.
(1200)
    Combien avez-vous investi dans ces navires, et où ont-ils été construits?
    En ce qui concerne les patrouilleurs de l'Arctique, il faudrait probablement compter 100 000 $ canadiens par navire de patrouille océanique que nous mettons en service en ce moment. Je pense que le dollar canadien vaut un peu moins que l'américain, n'est-ce pas?
    Il s'agirait probablement de 100 millions de dollars.
    Oui, je suis désolé, 100 millions de dollars canadiens par navire de patrouille océanique. Nous avons également investit 1,2 milliard de couronnes danoises dans des frégates. En dollars canadiens...
    Ces navires ont-ils été construits dans votre pays, monsieur?
    Les navires de patrouille océaniques ont été construits dans un chantier naval polonais et équipés dans un chantier naval danois. Nos frégates et nos plates-formes de commandement ont quant à elles été construites dans le chantier Maersk, au Danemark.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Merci beaucoup.

[Français]

    Je tiens à vous remercier, monsieur Wang, d'avoir témoigné par vidéoconférence. Ce fut très apprécié par tous les membres et cela nous aidera grandement dans notre étude sur la souveraineté canadienne dans l'Arctique. Je vous souhaite une bonne soirée.

[Traduction]

    Merci, ce fut un honneur, monsieur.
    Merci.

[Français]

    Nous allons maintenant ajourner pour quatre minutes, le temps de préparer la salle pour les nouveaux témoins. Merci.

(1205)
    Bonjour à tous. Nous poursuivons la séance no 28 du Comité permanent de la défense nationale.
    Nous recevons deux témoins: M. Marc St-Onge, chercheur scientifique sénior, Géologie régionale du ministère des Ressources naturelles; et M. David Boerner, directeur général de la Direction du Centre et du Nord du Canada, Commission géologique du Canada. Merci et bienvenue à vous deux.
    Monsieur St-Onge, nous allons débuter avec vous. Vous avez neuf minutes pour faire votre présentation. Je remarque qu'elle est détaillée et sûrement très intéressante pour les membres du comité. Vous avez la parole.
    Pour commencer, j'aimerais remercier tous les membres du comité de m'avoir invité cet après-midi pour leur présenter un précis de la conférence qui fut donnée dans le cadre de la série intitulée « Petit-déjeuner avec des têtes à Papineau » au début du mois de mai. Je suis heureux d'être ici.

[Traduction]

    Étant donné que le temps nous est compté cet après-midi, je ne voudrais pas vous présenter l'exposé complet que j'ai donné dans le cadre du petit déjeuner avec les têtes à Papineau, au début du mois de mai dans l'édifice de l'Ouest. Je vais plutôt mettre l'accent sur certains éléments clés qui, je l'espère, illustreront l'importance et la valeur de la nouvelle carte géologique de l'Arctique pour le Canada et les Canadiens.
    Tout d'abord, la nouvelle carte géologique de l'Arctique, dont nous avons des exemplaires à l'arrière si cela vous intéresse, a été publiée par la Commission géologique du Canada, qui fait partie du secteur des sciences de la terre de Ressources naturelles Canada. On peut acheter une copie papier de la carte, ou s'en procurer un exemplaire gratuitement en format électronique sur le site de Ressources naturelles Canada.
    C'est une équipe de chercheurs canadiens basée à Ottawa et à Calgary qui a élaboré la nouvelle carte géologique de l'Arctique, grâce à la participation active et enthousiaste de scientifiques et de techniciens des commissions géologiques de Russie, des États-Unis, de la Norvège, du Danemark, de la Suède et de la Finlande. Les travaux ont été entamés en février 2006 et la carte a été publiée en novembre 2008.
    Je vous demanderais de vous rendre à la page 30 du document. Vous verrez que la raison pour laquelle la nouvelle carte géologique de l'Arctique et la base de données sous-jacente sont si remarquables, c'est que les deux, ensemble, fournissent pour la toute première fois des renseignements numériques complets, uniformes et cohérents, ainsi qu'une interprétation de la géologie circumpolaire. La carte et la base de données fournissent la distribution, l'âge, la composition, l'association, les circonstances de formation et l'état de préservation de pas moins de 1 222 grandes unités cartographiques ou lithologiques de l'Arctique circumpolaire. Autrement dit, en combinant divers motifs, couleurs et codes alphanumériques, la carte fournit des renseignements sur différentes unités cartographiques ou lithologiques tout autour du pôle, sur terre et en mer, sans exception. En outre, la carte fournit également l'emplacement de caractéristiques linéaires et ponctuelles, comme les failles actives ou anciennes, les volcans en activité ou en sommeil, et d'autres éléments énumérés à la page 30.
    Que nous apprend cette carte et cette base de données, outre l'emplacement de tous les éléments géologiques de l'Arctique circumpolaire? À la page 31, on voit que la carte et la base de données nous fournissent surtout le contexte mondial des ressources connues en minéraux. Autrement dit, l'utilisateur peut consulter la carte et la base de données pour obtenir le contexte géologique d'une ressource minérale connue à l'extérieur du Canada et s'en servir pour déterminer si des gisements minéraux semblables ne pourraient pas être trouvés dans un contexte géologique similaire au Canada.
    Prenons un exemple. À la page 31, toujours, on voit des gisements de zinc-plomb dans le centre de la Norvège septentrionale. Il s'agit de gisements bien connus dont les caractéristiques sont énumérées à la page 31. On pourrait se demander si des gisements semblables ne pourraient pas exister dans le Nord du Canada. Si on passe à la page 32, on constate que la réponse à cette question est positive, puisqu'un contexte géologique semblable — et pourtant encore inexploré — pour ce genre de gisement se trouve sur l'île Bathurst, une île au centre de l'archipel Arctique canadien. Il ne s'agit que d'un exemple, que d'un minerai, mais cela montre bien comment des renseignements concernant les gisements à l'étranger peuvent guider l'exploration au Canada.
(1210)
    Le document fournit un exemple semblable du côté énergétique, ou plus précisément en ce qui concerne le gaz naturel, étant donné que la nouvelle carte géologique de l'Arctique et sa base de données fournissent également un contexte mondial pour les ressources énergétiques dans l'Arctique circumpolaire. Je vous laisse toutefois le soin d'en faire la lecture, puisque je tiens à attirer votre attention sur un dernier élément, soit que la nouvelle carte géologique de l'Arctique et sa base de données peuvent aider à délimiter l'origine géologique d'éléments terrestres ou marins. Pour les besoins de mon exposé de cet après-midi, j'avais pensé utiliser l'exemple de la dorsale Lomonosov, puisque j'ai cru que cela pourrait intéresser certains d'entre vous.
    Passons donc à la page 36 du document, où l'on peut voir la géométrie ou la configuration actuelle des plaques tectoniques dans la région polaire. On compte trois grandes plaques tectoniques: la plaque eurasienne, qui correspond au Nord de l'Europe et aux régions centrale et occidentale de la Russie; la plaque nord-américaine, qui correspond au Nord du Canada, à l'Alaska et à l'extrémité est de la Russie; et la plaque du Groenland, qui correspond au Groenland lui-même.
    Ce qui nous intéresse, la dorsale Lomonosov, est représentée par la ligne bleu foncé. Elle est séparée du continent eurasien au nord-est par le bassin eurasien, de la même façon que le Groenland est séparé de la Norvège et de l'Europe du Nord par l'Atlantique Nord. Le mouvement actuel des plaques tectoniques est représenté par les flèches rouges. La plaque nord-américaine et la plaque du Groenland s'éloignent de la plaque eurasienne à raison de 1,4 à 2 centimètres par année. Et on se demande pourquoi les voyages transatlantiques coûtent de plus en plus chers.
    Pour déterminer l'origine géologique de la dorsale Lomonosov, il suffit de simuler sur un modèle numérique le mouvement à rebours des plaques tectoniques et de remonter graduellement dans le temps. À la page 37, on a fait un bond de 23 millions d'années en arrière. Vous constaterez que l'Atlantique Nord est beaucoup plus étroit, que l'Islande a disparu et que le bassin eurasien est également plus étroit. Par conséquent, la dorsale Lomonosov s'est déplacée légèrement vers le continent eurasien.
    Si on passe à la page 38, on se ramène 34 millions d'années en arrière, alors que l'Atlantique Nord était encore une fois beaucoup plus étroit, de même que le bassin eurasien. On voit que la dorsale Lomonosov s'est également rapprochée du continent eurasien.
    À la page 39, l'image représente la géologie il y a 56 millions d'années. L'Atlantique Nord et le bassin eurasien sont tous deux beaucoup plus étroits, et cette fois, le détroit de Davis, le plan d'eau qui sépare le Groenland du Nord-Est du Canada, commence à se refermer, et le Groenland se rapproche du Canada.
    Si on recule une dernière fois dans le temps, soit il y a 61 millions d'années, à la page 40, l'Atlantique Nord, le bassin eurasien et le détroit de Davis sont complètement fermés, et les trois plaques tectoniques — la plaque eurasienne, la plaque nord-américaine et la plaque du Groenland — forment une énorme plaque polaire. La dorsale Lomonosov est reculée, tout contre l'extrémité ouest de la plate-forme continentale de la mer de Barents ou de la plate-forme continentale européenne, d'où elle vient.
    En d'autres mots, la dorsale Lomonosov tire son origine géologique de l'extrémité de la plate-forme continentale européenne, qui s'est détachée il y a 61 millions d'années.
    Depuis lors, depuis bien avant la création de l'Himalaya dans l'Asie du Sud-Est, la dorsale Lomonosov fait partie de la plaque nord-américaine et s'éloigne de l'Europe du Nord et de la Russie occidentale, en même temps que la masse terrestre du Canada, à raison de 1,4 à 2 centimètres par année. Elle s'est finalement retrouvée à 900 kilomètres à l'ouest de son point de départ, dans son emplacement actuel sous le pôle Nord.
    Les avantages pour le Canada de la publication de la carte géologique de l'Arctique et de sa base de données sont énumérés aux pages 41 et 42. Je pourrais passer ces points en revue, ou vous laissez les lire. Je pense que je n'ai plus de temps. Je vais donc en rester là.
(1215)

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.

[Traduction]

    Merci énormément de votre attention.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur St-Onge.
    Je vais maintenant donner la parole à M. Boerner.

[Traduction]

    Je ne crois pas avoir autre chose à ajouter pour l'instant, donc nous pouvons probablement passer directement aux questions.
    D'accord. Dans ce cas, vous pouvez prendre cinq minutes de plus pour poursuivre vos explications, ensuite nous passerons aux questions. Je pensais que vous partagiez votre temps de parole.
    Excellent. Je vais donc vous parler des avantages, ce qui vous montrera son aspect pratique.
    La production de cette nouvelle carte géologique de l'Arctique a été très avantageuse à de nombreux égards pour le Canada et les nations polaires. Tout d'abord, cette carte fournit une couverture géologique uniforme — sans brèches, sans lacunes — pour l'ensemble de la région polaire, côtière et extra-côtière, au nord du 60e parallèle. Cela représente environ 8 p. 100 de la surface du globe.
    Comme je l'ai indiqué, la nouvelle carte offre un outil de corrélation pour 1 222 unités cartographiques du Groenland à l'Europe, de la Russie à l'Alaska, et dans le Nord du Canada. Ainsi, elle fournit le contexte mondial des ressources minérales et énergétiques connues à l'étranger. Elle nous permet ainsi d'appliquer cette information au Canada, ce qui contribue à localiser d'autres ressources à explorer au Canada.
    Comme je l'ai expliqué en prenant l'exemple de la dorsale Lomonosov, la carte peut servir à déterminer et documenter l'origine géologique des caractéristiques de l'ensemble de la région polaire, côtière et extracôtière. Finalement, du côté de la recherche et de la gestion du développement, la nouvelle carte permet de cerner les régions nécessitant plus de travaux, de données ou de connaissances au Canada. La carte et la base de données numériques sous-jacente peuvent être très utiles à cette fin aussi.
(1220)
    Parfait. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant laisser la parole aux députés.
    Monsieur Bagnell, vous avez sept minutes.
    Merci d'être ici. C'est votre exposé à l'édifice de l'Ouest qui m'a convaincu de vous faire venir.
    Je ne tiens pas à simplifier à outrance la question, mais étant donné ce que vous nous avez dit, à qui appartient la dorsale Lomonosov?
    Eh bien, c'est une bonne question. J'imagine qu'il faut établir une distinction entre les renseignements fournis par cette carte et, au bout du compte, ce que la Commission des limites du plateau continental voudra bien croire.
    La carte explique, comme je l'ai dit, la géologie côtière et extracôtière de l'ensemble de la région, ce qui comprend la dorsale Lomonosov, grâce aux renseignements que nous avons obtenus en février 2006, date à laquelle nous avons entamé la compilation.
    En ce qui concerne les nouvelles données recueillies par le Canada et les autres nations polaires pour appuyer leurs soumissions à l'UNCLOS... Je pense que le Canada a commencé à étayer sa soumission en 2006, date à laquelle nous travaillions à la compilation des données pour l'élaboration de la carte, ce qui signifie que nous n'avions pas accès à ces nouveaux renseignements. Ce qu'il importe de noter, c'est que la résolution, le niveau de détail des nouvelles données dépasse largement ce que l'on peut montrer à cette échelle, mais c'est le niveau de détail que l'UNCLOS et la Commission exigeront pour rendre une décision.
    J'hésite donc à déclarer un propriétaire de la dorsale Lomonosov, puisqu'il est question ici de deux différents ensembles de données.
    C'est ce qui m'inquiétait.
    Quel genre de renseignements précis doit-on fournir à l'UNCLOS pour appuyer une revendication?
    Il faut principalement deux types de données: des renseignements détaillés sur la bathymétrie, c'est-à-dire la profondeur du plancher océanique, et des levés sismiques détaillés. J'illustre les deux dans mon document, parce que nous avons eu recours à tous les renseignements qui étaient disponibles au début de 2006 pour compiler cette carte, y compris la bathymétrie et les données sismiques. Plus précisément, l'UNCLOS exige des transects de bathymétrie et de données sismiques à intervalles de 60 milles marins. Je pense que le Canada effectue des relevés tous les 50 milles marins, par précaution. C'est bien. Il s'agit de renseignements détaillés qui seront un jour rendus publics, mais ils n'étaient pas disponibles lors de la compilation des données de cette carte.
    S'il y avait un point sur la dorsale qui était équidistant du Canada et de la Russie ou du Groenland et de la Russie, sur la base de quel renseignement déciderait-on à quel pays appartient cette partie de la dorsale?
    Dans toute présentation pour une prolongation du plateau continental, et la dorsale de Lomonosov en serait un exemple, on fait la démonstration de la prolongation avec les données bathymétriques et sismiques détaillées; dans ce cas, que la dorsale se rattache à un des plateaux. Si l'un des pays peut le prouver, alors je crois que la limite de la prolongation est de 350 milles nautiques — puisqu'il y a une limite. Mais avant, il faut démontrer que la dorsale, dans cet exemple, se rattache soit au côté canado-groenlandais ou au côté russe.
    Est-ce que ce lien doit être fonction de la profondeur ou des caractéristiques géologiques?
    Les deux. Voilà l'aspect pratique de l'UNCLOS: elle est fondée sur la géologie; il faut qu'il y ait un lien géologique. En d'autres mots, les rochers qui composent la dorsale de Lomonosov, devraient former, nous l'espérons, un lien vers la partie continentale du Canada. De même, d'un point de vue bathymétrique, on espère voir un pont, un tablier, entre le Canada continental ou le plateau continental canadien et la dorsale de Lomonosov.
(1225)
    Les sédiments jouent-ils un rôle dans cette décision ou pour quelque aspect lié à l'UNCLOS?
    Oui, absolument, parce que l'épaisseur des sédiments sur le sous-sol rocheux, ou le coeur de la dorsale, nous aide à établir le lien bathymétrique entre la dorsale et la partie continentale, par exemple.
    Pourriez-vous nous parler du volume et de l'emplacement du méthanol, du méthane gelé dans l'Arctique?
    Oui. Le Canada est assurément riche en hydrates de gaz, surtout du méthane gelé dans des cristaux de glace, pour deux raisons. Premièrement, la vaste étendue de pergélisol typique du Nord du Canada — et le gros de cette région est au nord du 60e parallèle — renferme des hydrates de gaz. Deuxièmement, si l'eau est suffisamment profonde, la pression et la température feront en sorte que des hydrates de gaz existent également sous de profondes colonnes d'eau froide. Encore une fois, de ce côté-là, le Canada a été bien servi par mère nature.
    Certaines personnes avancent que la quantité de ces gaz dépasse celle de tous les hydrocarbures dans le monde. Est-ce que c'est...?
    Je ne sais pas.
    David, le savez-vous?
    Oui, c'est une des estimations. Elle est basée sur des données assez limitées; il est très difficile de connaître l'étendue exacte de ces choses. Mais sur la base de projections faites à partir des connaissances que nous avons, c'est un des résultats que certaines personnes ont obtenus.
    Lors de la séance précédente, nous avons reçu des témoins du Nord qui disaient vouloir poursuivre le programme des sciences de la terre dans les années à venir, parce qu'une grande partie du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest en particulier n'a pas été cartographiée dans le cadre de ce programme. Comment pouvez-vous avoir une carte complète avec tous les détails, alors que ces gens disent que beaucoup reste à faire.
    Ces deux situations peuvent coexister. Nous sommes d'accord avec l'analyse de nos collègues et j'en reviens au commentaire que j'ai fait à propos de l'utilité de la nouvelle compilation et de la base de données sous-jacente pour que les gestionnaires décident quelles seront les prochaines régions auxquelles travailler. Bien que la carte soit toute en couleur, il n'y a pas le même niveau de détail dans toutes les parties de la carte, et certainement lorsque l'on examine la base de données, elle n'est pas aussi complète dans toutes les régions.
    Nous avons utilisé les données et les renseignements disponibles pour produire une image et une interprétation qui sont cohérentes, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas de régions — et il y en a beaucoup dans le Nord du Canada — auxquelles nous devons travailler davantage pour être à la hauteur des normes internationales.

[Français]

    Merci, monsieur St-Onge.
    Je donne maintenant la parole à M. Bachand.
     Merci, monsieur le président.
    Bienvenue. Je commencerais par vous féliciter. Vous êtes à la hauteur de votre réputation quand vient le temps d'avoir des cartes claires, nettes et précises. Je suis très impressionné par le travail que vous avez fait. Je ne pensais pas que c'était rendu si loin.
    Ce que vous avez présenté m'apparaît extrêmement intéressant et j'aimerais en savoir plus. Ici, on est limité à une période de questions de cinq ou six minutes et je ne pourrai pas approfondir mes connaissances. À un moment donné, j'aimerais vous appeler afin qu'on organise avec mon bureau, celui de M. Paillé ou d'autres un breffage plus en profondeur.
    J'ai cru avoir lu dernièrement que la prétention canadienne sur le plateau continental est assez grande et s'étend au-delà de l'archipel. On a même lu quelque part qu'on pourrait pousser les études au-delà du pôle Nord.
    Est-ce bien ce que j'ai lu ou est-ce parce que j'ai l'impression que le plateau continental canadien se prolonge à l'infini?
(1230)
    Ce qu'on a écrit dans les médias était un peu exagéré. On aurait dû mettre cette carte au milieu, mais enfin. L'information géologique et bathymétrique de la carte permet de voir clairement l'emplacement de la limite du plateau continental canadien contigu. Dans son ensemble, ce plateau se situe à l'intérieur des 200 milles nautiques de la zone d'utilisation exclusive. Ce sont les prolongations de ce plateau qui font l'objet d'un débat. La crête océanique Lomonosov et la crête Alpha sont des prolongations, mais le plateau contigu est bien défini et ne se prolonge pas jusqu'au pôle Nord.
    Y a-t-il des espaces sous-marins qui n'appartiennent à personne? Par exemple, le Canada, la Russie et les États-Unis peuvent démontrer où se termine leur plateau continental. Cependant, y a-t-il une zone grise où il n'y a plus de prolongation et qui fera l'objet d'une négociation, afin de déterminer ce qu'on en fait?
    C'est une autre bonne question. Vous avez raison. Toutes les zones avec croûte océanique — je ne parle pas de la croûte continentale sur laquelle nous habitons — qu'on retrouve dans les fonds marins sont internationales, par exemple, l'Atlantique Nord. Le bassin eurasien auquel je faisais référence est la croûte océanique réelle. Il se situe au-delà du plateau continental ainsi que perçu par n'importe quel pays. Il resterait international.
    Dans d'autres régions où la croûte n'est ni continentale ni océanique, mais hybride, d'après ce que je comprends des spécifications de l'UNCLOS, il y a une limite à ce qu'un pays peut revendiquer. Si tout le monde revendiquait le plus de territoire possible, même 350 milles nautiques le long des crêtes et tout le reste, il resterait quand même de grandes régions au centre de l'océan Arctique qui ne seraient pas revendiquées et qui resteraient internationales.
    Cela ouvre-t-il la porte à la possibilité d'une négociation internationale en vue du partage des ressources naturelles qui pourraient s'y trouver?
    J'imagine que c'est ce qui devrait arriver.
    Notre étude doit être produite pour 2013. La Commission des limites du plateau continental vient de reconnaître 230 000 kilomètres carrés de plus à la Norvège. Faut-il attendre que la commission établisse les limites du plateau avant d'examiner la zone grise qui reste?
     J'ai l'impression qu'il faut attendre la décision de la commission. On ne peut pas commencer à négocier sur les ressources naturelles tant qu'elle n'aura pas statué sur les limites du plateau continental d'un pays ou de l'autre. Est-ce exact?
    Vous avez raison. Comme vous le savez, le Canada doit présenter son cas en 2013. Le Danemark fera de même en 2014, je crois. Nous ne savons pas combien de temps il faudra à la commission après cela. J'ai vu des évaluations allant de cinq à dix ans pour légiférer sur les différentes demandes. Donc, j'ai l'impression que ça prendra pas mal de temps.
    Par contre, ce qui est encourageant, c'est qu'il y a beaucoup de publicité sur l'ampleur des ressources naturelles — minerais et énergie — dans l'océan Arctique. La commission géologique des États-Unis a publié une étude l'année dernière qui identifiait les ressources énergétiques dans l'océan Arctique. Selon ma lecture de ce document, on est optimiste.
     Par exemple, pour calculer leurs estimations en matière de réserves pétrolières et de gaz naturel, ils ont entre autres considéré tout le détroit de Davis comme étant d'une géologie de type marge continentale, mais ce n'est pas le cas. Il y a une bonne partie du détroit de Davis où on trouve de la croûte océanique. Or ce n'est pas dans la croûte océanique qu'on va trouver du pétrole ou du gaz naturel. Alors, les estimations de la commission géologique des États-Unis sont optimistes.
    L'autre aspect est que le gros des réserves énergétiques vont être trouvées près de la côte, tout simplement parce que c'est là que les roches sédimentaires plus épaisses se trouvent. Ce sont elles qui forment le plateau continental. C'est là, de façon traditionnelle, que les compagnies de pétrole et de gaz naturel font leurs recherches, la raison étant que c'est là qu'on trouve la plus grande partie de ces réserves. Il est possible qu'il y en ait un peu plus dans le talus, mais plus on s'éloignera, moins bonnes seront les chances de trouver quelque chose.
(1235)
    Merci, monsieur St-Onge.
    Je donne maintenant la parole à M. Harris.

[Traduction]

    Merci pour votre exposé.
    J'ai deux questions sur l'importance du travail que vous faites.
    Ce travail se poursuit, évidemment. Est-ce que les données que vous récolterez d'ici 2013 serviront à la revendication?
    Ce n'est pas moi, personnellement...
    Pas vous, mais la Commission géologique du Canada.
    Oui, et je vais demander à mon collègue Dave de vous fournir plus de détails.
    Nous avons en fait deux programmes ayant trait au nord. L'un deux a été conçu spécifiquement pour fournir les données qui seront utilisées dans la présentation à l'UNCLOS. Nous allons récolter les meilleures données possibles afin de rédiger la meilleure présentation possible pour le Canada. Voilà le but de ce programme. Et il se terminera en 2013, avec le dépôt de la revendication.
    Nous avons un autre programme de géocartographie pour l'énergie et les minerais qui est conçu pour aider à déterminer le potentiel dans le nord en matière d'énergie et de minerais. Ce programme se fonde partiellement sur les corrélations découlant du travail de M. St-Onge partout dans le monde.
    Les phénomènes géologiques créent parfois une concentration de minerais. Les mouvements des plaques tectoniques dont nous parlons, les mouvements dans les deux sens, créent des endroits où l'on peut trouver une concentration de minerais. Nous essayons d'utiliser des exemples de différents endroits dans le monde afin de retrouver de tels endroits dans le profil géologique du Canada.
    Alors il y a deux objectifs et deux programmes distincts. L'un d'eux sert expressément à la soumission à l'UNCLOS.
    J'ai une autre question. J'aimerais obtenir une réponse simple concernant le rôle que joueront ces renseignements.
    Comment utilise-t-on les renseignements géologiques, par exemple, à savoir si cette dorsale ou cette caractéristique géologique se rattache au Canada ou à l'autre côté — et j'imagine que l'on parle de la Russie? Est-ce qu'on applique d'abord un principe de distance égale, et ces renseignements peuvent constituer la base d'une exception? Ou essayons-nous de prouver que ces caractéristiques océaniques forment une prolongation ou une partie de notre masse continentale?
    Pourriez-vous nous l'expliquer simplement?
    Oui, et j'admets que l'on utilise à cette fin un ensemble compliqué de formules. La première formule sert à déterminer la profondeur de la plate-forme continentale sous l'eau. Voilà une partie de la réponse, parce que l'on considère qu'au delà d'une certaine profondeur, c'est trop profond pour faire partie de la plate-forme. La deuxième partie de l'équation prend en compte l'épaisseur des sédiments. Alors c'est la combinaison de la profondeur de l'eau et de l'épaisseur des sédiments qui détermine jusqu'à quelle distance nous pouvons aller après l'escarpement net du plateau continental pour revendiquer des territoires. Voilà la formule simplifiée.
    Ce qui est compliqué, et c'est de cela que vous parliez, c'est qu'il est possible que la masse terrestre se prolonge après ce que l'on considérerait comme l'escarpement abrupt à la fin du plateau continental. C'est la question qui se pose pour des choses comme la dorsale de Lomonosov, à savoir si elle est liée physiquement à la masse terrestre du Canada. Si c'est le cas, alors on peut utiliser la formule de distance et de profondeur et d'épaisseur des sédiments. Les renseignements géologiques servent de contexte à cette discussion, mais ils ne répondent pas nécessairement à la question elle-même. Il faut prendre d'autres mesures pour prouver qu'il y a un lien avec la masse terrestre.
    Merci.
    J'aime bien votre carte. Je ne suis pas géologue, mais l'information est fascinante.
    Peut-être pourriez-vous commenter les cartes récentes de l'Arctique du National Geographic. Je les ai vues, et elles sont un peu plus faciles à comprendre pour les profanes. Elles contiennent de très bons renseignements sur la profondeur. Elles montrent les revendications, etc., et aussi le recul des glaces. Qu'en pensez-vous? Elles sont assez récentes, peut-être mars ou février — c'étaient des cartes à volets du National Geographic. Elles semblaient faciles à comprendre. Qu'avez-vous à dire à leur sujet? Valent-elles la peine que nous les examinions?
(1240)
    Je crois qu'elles sont extrêmement utiles pour expliquer les principes et les idées. Mais elles sont trop grossières. Elles ne contiennent pas suffisamment de détails pour que la Commission des Nations Unies puisse les utiliser afin de rendre sa décision, mais elles transmettent une compréhension générale de ce qui existe et des revendications mises de l'avant.
    J'ai une dernière question, s'il me reste assez de temps.
    Dans le cadre de votre recherche, pouvez-vous nous dire s'il y a eu ou s'il y aura un accord sur les données et la méthodologie que vous utilisez? Je sais que le gouvernement canadien y a investi une somme d'argent assez importante, et vous pouvez aussi commenter à ce sujet. Par exemple, vous avez fait beaucoup de travail. Vous couvrez tout le pôle au nord du 60e parallèle. Est-ce que les scientifiques des autres pays acceptent votre méthodologie? En d'autres mots, est-ce que quelqu'un dira : « Eh bien, nous ne sommes pas d'accord avec votre méthodologie. Nous refusons vos données. Nous ne sommes pas d'accord avec vos données sismiques. Nous ne sommes pas d'accord parce que nous avons notre propre façon de faire les choses. » Et l'on se disputera à ce sujet plutôt que de débattre des questions légitimes déjà posées?
    Voilà une excellente question, et le but de cette carte est d'avoir une base de données scientifique, solide et cohérente qui pourra servir de fondement aux décisions politiques. Nous essayons absolument d'éviter que différentes personnes utilisent différents protocoles et différentes idées. Cette collaboration avait pour but d'obtenir un accord entre toutes les nations circumpolaires sur la façon de dresser une carte géologique, et c'est ce que nous avons fait.
    Alors ça a déjà été fait.
    Oui, nous en avons déjà discuté. Une partie de notre travail en application de l'UNCLOS se fait en collaboration avec les Danois, ou les Américains, ou d'autres, et nous essayons de recueillir un ensemble de données final selon les normes des deux pays.
    Avez-vous également obtenu la coopération des Russes?
    Je ne suis pas certain que nous l'ayons obtenue pour la collecte des données, mais il y a certainement eu coopération quant aux normes utilisées pour ces cartes.
    Marc.
    En ce qui concerne la carte, j'ajouterai simplement que les études géologiques de toutes les nations polaires ont été utilisées, et elles sont toutes coauteures de la carte. Chaque pays — la Russie, les États-Unis, les autres pays — nous ont fourni leurs ensembles de données nationales en bathymétrie et en géologie, et leurs données sismiques. Ils ont été très ouverts. Les données ont été compilées par les Canadiens, mais examinées par tous les autres. De ce point de vue, oui, il y a eu accord complet sur la façon de procéder, et sur ce que l'on a décidé de montrer ou pas.
    Là où il y a peut-être eu un peu de friction, ce n'était pas sur la façon de compiler ou de montrer les données géologiques, mais sur l'orientation de la carte. C'est ce qui préoccupait le plus les gens, parce que la plupart veulent que leur pays, lorsque l'on regarde la carte, soit à l'endroit. Alors, les Russes voulaient que la Russie soit ici, les Américains voulaient que l'Alaska soit ici, etc. Pour régler ce différend, nous avons décidé d'utiliser Greenwich comme cadre de référence. Mais c'était un petit différend. Sinon, je crois qu'il y a un accord complet sur les techniques et les méthodologies.
    Eh bien, félicitations pour ce projet magnifique. Il n'est évidemment pas achevé, alors je vous souhaite bonne chance pour l'avenir.
    Merci beaucoup.
    Je vais maintenant céder la parole à M. Hawn.
    Merci, monsieur le président.
    Et merci à vous deux d'être ici.
    Premièrement, je dois dire que je suis extrêmement impressionné que vous ayez pu colorier à l'intérieur des lignes.
    Des voix: Oh, oh!
    M. Laurie Hawn: Pour un profane et quelqu'un qui n'a pas l'esprit scientifique, lorsque l'on regarde la carte, il semble que la position de la dorsale de Lomonosov soit restée la même par rapport au Groenland. Je ne vous pose pas une question facétieuse, mais l'interprétation russe se base sur la situation d'il y a combien de millions d'années? Plus on retourne en arrière, plus la Russie est près de la dorsale. Quel cadre de référence utilisent-ils?
    Et bien, je me plaisais à dire que les revendications des Russes sur la dorsale de Lomonosov avaient été présentées 61 millions d'années trop tard, ou 599 millions d'années trop tard, etc. Il est clair que la dorsale provient du plateau continental européen, mais comme je vous l'expliquais, elle s'est déplacée à 900 kilomètres de la Russie occidentale et du Nord de l'Europe. Il reste une extrémité de la dorsale qui est contiguë au plateau continental russe actuel, et c'est évidemment ce qu'ils diront pour appuyer leur revendication.
(1245)
    Ce point n'a pas bougé? Il est resté au même endroit, ou il s'est aussi déplacé de 900 kilomètres?
    Relativement aux plaques, ce point s'est également déplacé de 900 kilomètres. Au bout du compte, il faudra déterminer si, lors du mouvement de ces plaques, la dorsale du côté russe ou du côté canado-groenlandais... Il faudra déterminer s'il y a eu des variations, vous savez, alors que les choses se déplaçaient de 900 kilomètres .
    Encore une fois du point de vue d'un profane, la dorsale de Lomonosov semble être dans la même position par rapport au Canada qu'il y a 61 millions d'années.
    Absolument.
    Mais la Russie s'en est éloignée. Donc, ces données sont assez importantes pour déterminer la propriété.
    Je suis complètement d'accord avec vous. En tenant compte de la question de l'échelle et des preuves admissibles à l'UNCLOS, lorsque l'on examine cette carte conçue par toutes les nations participantes, du côté canadien, il n'y a pas de séparation entre la dorsale Lomonosov et le Canada continental. Du côté russe, on peut voir de nombreuses failles, qui nous ont été fournies par la Russie.
    Oui. Il semble que les connaissances ne nous soient pas exclusives, évidemment, et que tout le monde les possède. Comment sont nos connaissances par rapport à celles d'autres pays? Ou y a-t-il vraiment un ensemble de connaissances mondiales que tout le monde partage librement?
    Il s'agit vraiment d'un ensemble mondial de connaissances. Chaque nation participante a fourni ses bases de données nationales — ou plutôt ses ensembles de données. Je crois que les Canadiens excellent à l'interprétation des données à l'échelle mondiale, peut-être à cause de la taille de notre pays. Je crois que c'est pour faire ce type d'interprétation que l'on nous a demandé de diriger le projet.
    Bien sûr, la Russie est également un grand pays, et les Russes sont très bons à ce type d'interprétation, bien que les connaissances scientifiques en Amérique du Nord et en Russie ne soient pas les mêmes. La façon de concevoir la géologie est un peu différente en Russie qu'en Amérique du Nord. Je pense que le Canada possède les compétences nécessaires pour penser sur une vaste échelle. Les Européens aiment ce que nous faisons à ce sujet.
    On penserait que les Américains le feraient également, et ils le font — je ne veux pas dénigrer leur travail —, mais nous avons une masse terrestre beaucoup plus grande dont il faut nous occuper, qu'il faut intégrer, et dont nous essayons de comprendre l'évolution géologique. Je crois que nous sommes tout simplement devenus très bons à ce type de tâche.
    Ma question trahit évidemment un chauvinisme canadien, mais comment évaluez-vous notre capacité d'interpréter et ensuite de vendre cette interprétation, quand il s'agit de vendre aux Russes une interprétation divergente? Êtes-vous confiant que nous avons les outils voulus pour ce faire?
    Je dirais qu'il n'y a absolument aucun doute dans l'esprit de la plupart des gens que la meilleure commission géologique au monde est la Commission géologique du Canada, simplement en raison de notre expérience et de notre histoire. La Commission géologique du Canada a été établie selon le modèle de la Commission géologique britannique, et c'est donc la deuxième plus ancienne, mais des gens ont fait valoir qu'il serait temps de faire de la modélisation inverse. Donc, oui, je dirais que la commission canadienne est au premier rang.
    Vous parlez de modélisation inverse. Que voulez-vous dire par là?
    Certains de mes collègues en Grande-Bretagne ont laissé entendre que la Commission géologique britannique doit être repensée et réorganisée selon le modèle de la commission canadienne.
    Bien, c'est ce que je pensais.
    Qui d'autre utilise ces données, à part les gouvernements? Y a-t-il des entreprises commerciales, des entreprises du secteur des ressources et autres qui ont accès à tout cela? À votre connaissance, combien de gens les utilisent?
    C'est une très bonne question. La carte a été publiée en novembre 2008, il y a donc quelques mois. La première présentation publique de la carte a eu lieu en novembre, dans des foires industrielles tenues à Yellowknife et à Whitehorse. On avait placé la carte sur un mur, et il y a eu des présentations. Il n'y a absolument aucun doute que les entreprises canadiennes du secteur des minéraux, du pétrole et du gaz ont compris immédiatement ce principe et le fait que la carte fournit un contexte planétaire fondé sur des renseignements recueillis tout autour du pôle pour expliquer la situation au Canada.
    Je pense que, d'après les dernières statistiques , depuis novembre... Est-ce 1 200 ou 1 300?
(1250)
    C'est à peu près 1 200.
    Depuis novembre, environ 1 200 exemplaires de cette carte ont été téléchargés du site Web de RNCan, ce qui est un chiffre phénoménal en aussi peu de temps. Ce ne sont pas les gouvernements, mais...
    Leur avez-vous fourni de l'aide pour l'interprétation, ou vous a-t-on demandé de l'aide pour interpréter les données?
    Les deux. Quand nous avons présenté la carte à ces foires industrielles, nous avons évidemment donné des explications pour mettre en lumière ses diverses utilisations. Je dois dire qu'elle est accompagnée de quatre fiches explicatives qui en constituent l'essentiel, en fait. Nous faisons cela pour les aider à comprendre le produit et ses utilisations, bien qu'ils comprennent assez vite. Ensuite, nous recevons beaucoup de demandes sur des détails précis, au sujet de telle ou telle interprétation.
    Au ministère, vous êtes ouverts aux demandes d'aide liées à des applications commerciales canadiennes.
    Absolument.
    Merci, monsieur Hawn.
    Nous passons maintenant à M. Bagnell, qui a cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Rapidement, pourquoi mesure-t-on les sédiments? Suppose-t-on que les sédiments proviennent des terres les plus proches, et c'est ce qui expliquerait pourquoi il importe d'en connaître la profondeur? Pourquoi les sédiments sont-ils l'une des mesures prises en compte pour l'UNCLOS?
    Oui, les sédiments sont des matériaux érodés qui se sont détachés de la masse terrestre, et l'épaisseur des sédiments diminue à mesure qu'on s'éloigne de la masse terrestre. On a établi une définition, fondée sur le consensus scientifique quant à l'épaisseur, qui délimite la zone que l'on peut réclamer.
    Quand M. Bachand s'interrogeait sur la zone neutre au milieu de l'Arctique, c'est un peu comme le territoire situé au milieu de l'océan Pacifique ou de l'océan Atlantique. Cela relève simplement de l'UNCLOS et n'importe qui dans le monde peut l'exploiter.
    Dans l'UNCLOS, il est question d'une limite de 350 milles, mais c'est un peu mêlant. N'y a-t-il pas d'autres interprétations de cette limite de 350 milles, qui pourrait même être repoussée encore plus loin?
    Marc, voulez-vous répondre à cette question?
    Bien sûr. C'est une très bonne question. Je suppose qu'il s'agit de la dorsale Lomonosov.
    Dans l'UNCLOS, on semble distinguer entre ce qu'on appelle une dorsale, et ce qu'on appelle une élévation. Si c'est une dorsale, alors la limite de 350 s'applique comme maximum qu'on peut revendiquer. Si c'est une élévation, il n'y a pas de limite. Donc, oui, je m'attends à ce qu'il y ait une certaine confusion à l'avenir sur ce point. Les Russes ont laissé entendre que la dorsale Lomonosov, en dépit de son nom, doit plutôt être considérée comme une élévation. Normalement, la définition d'élévation s'applique plutôt ailleurs aux plateaux sous-marins, aux formations non linéaires.
    Pourquoi a-t-on dit à l'UNCLOS que les données russes n'étaient pas suffisantes la première fois qu'ils ont soumis leur revendication?
    Je ne saurais le dire. La revendication a été examinée par un groupe d'experts scientifiques et je suppose qu'ils estimaient que la preuve n'était pas suffisamment solide en regard des formules de l'UNCLOS. Il vous faudrait poser la question à ceux qui ont participé à cette analyse.
    Pourriez-vous nous expliquer un peu plus en quoi consiste une élévation? C'est une autre manière de revendiquer le plateau continental, à part la partie non délimitée...
    C'est exact.
    Qu'est-ce qu'une élévation?
    Ce n'est pas défini dans l'UNCLOS, mais on y mentionne les dorsales et les élévations. Les dorsales sont des formations sous-marines linéaires qui forment un relief. Les élévations sont des formations sous-marines qui forment aussi un relief, mais qui ne sont pas nécessairement linéaires. Par exemple, un plateau, un secteur uniformément élevé, serait considéré comme une élévation, par opposition à une dorsale, qui serait longue et étroite.
    Si l'interprétation qu'on en donne est qu'il y a chevauchement et que les deux cadrent avec la définition de l'UNCLOS, je crois comprendre que les règles de l'UNCLOS établissent que la détermination doit être faite bilatéralement entre les deux pays en cause. Prévoyez-vous que c'est ce qui va arriver pour les éléments scientifiques cartographiés jusqu'à maintenant?
(1255)
    Je n'en suis pas encore certain. Nous n'avons pas toutes les données. Je ne crois pas qu'il y ait chevauchement important en termes de période ou d'espace. Je pense que vous avez raison. Quand il y a chevauchement, c'est traité de la même manière qu'on le fait actuellement. Dans bien des endroits du monde, le même territoire est revendiqué par deux nations et il y a alors discussion bilatérale. Je ne peux pas vraiment me prononcer sur la question de savoir s'il y aurait un chevauchement important.
    Nous devrons essayer de vous obtenir cette réponse. Mais vous devez comprendre que les données ne sont pas complètes. Nous continuons d'examiner ce qui se passe.
    Y a-t-il des volcans actifs au nord du 60e?
    Oui, au large de la côte occidentale de l'Alaska.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Je vais donner la parole à M. Boughen, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, messieurs, de partager une partie de votre journée avec nous.
    Je n'ai qu'une question au sujet de la carte. Donne-t-elle une idée de la concentration de minéraux aux divers niveaux, par exemple en surface ou en profondeur? Ou bien y a-t-il des indications des réserves de gaz et de tout le reste et permet-elle de déterminer s'il est économiquement faisable de les exploiter, compte tenu de leur profondeur?
    Cela ne fait pas partie de la base de données pour cette carte. La carte documente assurément l'aspect énergétique, par exemple ce qui pourrait être considéré comme la roche mère, la roche magasin ou la roche couverture et autres caractéristiques semblables. Mais elle ne documente pas la profondeur de la ressource.
    Nous avons un nouveau projet de compilation amorcé cette année et qui cible précisément les trois territoires septentrionaux du Canada. C'est donc, pour les trois territoires, une compilation sur une échelle beaucoup plus détaillée, encore une fois pour les projets côtiers et extracôtiers, pour laquelle nous prévoyons étendre la portée de la base de données numériques et y inclure davantage de variables et d'attributs, et ce qui fait l'objet de votre question en ferait partie. C'est donc un travail évolutif.
    J'ajouterais que nous ne cherchons pas vraiment des ressources, mais nous évaluons où les ressources pourraient se trouver. Le secteur privé prendrait cette information et irait beaucoup plus dans les détails et mettrait beaucoup plus d'efforts pour essayer de circonscrire les ressources. Je ferais l'analogie suivante: nous essayons de dire où se trouve la meule de foin, et c'est ensuite le secteur privé qui cherche l'aiguille.
    Merci beaucoup.
    Notre dernier député qui aura la parole pendant quatre ou cinq minutes est M. Paillé.

[Français]

    Merci. De toutes façons, mes quelques questions seront brèves.
    Êtes-vous en mesure, dans le cadre de cette recherche, d'identifier avec assez de précision sur votre carte tous les fonds marins? Vous allez même plus bas que les fonds marins.
    Un peu plus tôt, j'ai parlé de mon inquiétude par rapport au transport maritime de matières dangereuses. On nous a expliqué que les fonds marins devraient être assez bien définis pour assurer une augmentation du transport maritime.
    Êtes-vous en mesure, dès aujourd'hui, de nous fournir une carte détaillée, comme celle-ci, des fonds marins dans l'ensemble de l'Arctique?
    Il y a un programme de Ressources naturelles Canada, qui s'appelle Seabed Mapping, pour justement fournir l'information que vous demandez. C'est vrai qu'au Canada, les fonds marins sont maintenant connus à cette échelle-ci, mais en termes de connaissances pour des capitaines de navire, il y certains endroits qui sont connus, comme le fleuve Saint-Laurent, mais beaucoup de régions sont uncharted.
    On a donc un programme, au ministère, permettant de se pencher sur la question et de produire des cartes détaillées, qui seront requises si on envisage une augmentation du trafic.
    Donc, le travail est déjà en cours.
    C'est ça.
    D'accord.
    Vous parlez d'une recherche en cours sur les fonds marins. L'évolution de la recherche est-elle rapide? On disait plus tôt qu'on allait déposer notre rapport en 2013. Les choses vont-elles vite au point où on pourra dire, en 2013, que cette carte qui vient de sortir est déjà désuète?
(1300)
    On gardera la carte à jour; c'est facile à faire, maintenant, puisque tout est numérique. Quand une information plus récente sera disponible, on l'ajoutera à la carte, évidemment, y compris ce qui sera préparé pour la soumission relative à l'UNCLOS.
    Pour la cartographie des fonds marins, c'est limité parce qu'elle peut être faite chaque été. Je ne sais pas à quelle vitesse le terrain est couvert.
    C'est une responsabilité de Pêches et Océans.
    La fonte des glaces vous facilite-t-elle le travail? Je suppose que oui, évidemment.
    Absolument. Elle facilite le travail terrestre et les recherches maritimes. Concernant la géologie, si on regarde les données qu'on a recueillies, on peut voir que le travail est beaucoup facile. Avec des étés plus longs et des hivers plus courts, avec moins de glace et de neige, on est en mesure de voir plus que ce que les générations avant nous ont pu faire et donc d'approfondir nos connaissances et sur la terre et sur les fonds marins.
    J'ai une dernière petite question. En ce qui concerne les ressources, on a dit plus tôt que plusieurs personnes ont téléchargé la carte. Vous avez quand même une certaine étude.
    Sentez-vous de la pression de la part de certaines compagnies? Recevez-vous des appels de lobbyistes? Finalement, sentez-vous que l'intérêt a augmenté, depuis les dernières années, pour votre recherche, pour les informations que vous pourriez trouver? Sentez-vous que certains sont intéressés à détenir des informations avant d'autres?
    Il n'y a aucun doute que le travail que nous faisons a toujours été d'intérêt pour les compagnies d'exploration de minerais ou de ressources énergétiques. Toutefois, il faut dire qu'on a porté une plus grande attention au Nord canadien, ces dernières années, ce qui explique le fait que nous, comme organisation, ayons reçu un peu plus d'argent pour faire notre travail. Cet intérêt est donc opportun. On peut en faire plus si les gens sont plus intéressés. Il semble donc que nous soyons au bon endroit, au bon moment.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Merci, monsieur St-Onge et monsieur Boerner.

[Traduction]

Merci beaucoup d'avoir été avec nous ce matin. L'étude que vous faites est très importante pour notre comité. Je crois comprendre que vous serez à la disposition des députés qui veulent vous poser d'autres questions en privé.

[Français]

    Cela termine donc nos travaux de la séance numéro 28 du Comité permanent de la défense nationale.
    Avant de terminer, j'aimerais rappeler aux membres que c'est notre dernière séance avant la pause de l'été. Il n'y aura donc pas de séance demain. On se reverra à l'automne, si Dieu le veut.
    Merci, et bonjour.
    Je voudrais ajouter quelque chose. Encore une fois, si quelqu'un veut avoir une copie de la carte, on en a apporté plusieurs. On aimerait mieux ne pas les rapporter au bureau.

[Traduction]

    Si quelqu'un en veut une copie, il y en a ici.

[Français]

    D'accord. Pour les membres et le greffier, il serait bien de garder une carte.
    Merci bien.
    Thank you very much.
    La séance est levée.
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