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NDDN Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent de la défense nationale


NUMÉRO 004 
l
2e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 25 février 2009

[Enregistrement électronique]

(1535)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte. Aujourd'hui, nous allons examiner une question que nous avons étudiée pendant de nombreux mois à la législature précédente. Conformément au paragraphe 108(2) du Règlement et à la motion adoptée le lundi 23 février 2009, nous poursuivons notre étude sur les services de santé offerts au personnel des Forces canadiennes, en particulier dans le cas des troubles de stress post-traumatique.
    Nous tenons cette séance aujourd'hui pour nous rappeler où nous en étions et ce que nous avions appris.
    Notre séance d'aujourd'hui se déroulera en deux parties. La première heure sera consacrée à Mary McFadyen, avocate générale, probablement mieux connue comme l'ancienne ombudsman par intérim.
    Je vous demanderais donc de faire vos observations. Nous allons ensuite passer à une séance de questions.
    À vous la parole.

[Français]

    J'aimerais tout d'abord remercier le comité de m'avoir invitée à témoigner cet après-midi. Je suis heureuse et honorée d'être ici à titre d'avocate générale du Bureau de l'ombudsman du ministère de la Défense nationale et des Forces canadiennes, pour discuter de notre récent rapport sur les traumatismes liés au stress opérationnel.

[Traduction]

    Depuis 2002, le bureau de l'ombudsman aide à veiller au traitement équitable des membres des Forces canadiennes qui souffrent du syndrome du stress post-traumatique et d'autres traumatismes liés au stress opérationnel.
    À cette époque, notre bureau a formulé 31 recommandations visant à aider les Forces canadiennes à détecter et à traiter les traumatismes liés au stress opérationnel, tout en veillant au traitement équitable de tous les membres des Forces canadiennes.

[Français]

    Notre plus récent rapport a été rendu public en décembre 2008. Je vais profiter des prochaines minutes pour mettre en lumière certaines des conclusions du rapport et les domaines dans lesquels nous avons constaté des progrès de la part du ministère et des Forces canadiennes.
    Je vais également faire ressortir certains domaines dans lesquels nous jugeons qu'il reste du travail à faire.
    Enfin, je vais faire part de quelques problèmes qui évoluent au fil du temps. Nous avons relevé ces problèmes dans le cadre de notre plus récente enquête.

[Traduction]

    Selon notre plus récent examen, il est clair que les Forces canadiennes ont réalisé des progrès au cours des dernières années, en ce qui concerne la façon de traiter les personnes qui souffrent de traumatismes liés au stress opérationnel. Nous avons eu la preuve que les Forces canadiennes se sont améliorées dans leurs démarches visant à prévenir, à détecter et à traiter les traumatismes liés au stress opérationnel. Malheureusement, il est également clair que des soldats, des marins et des aviateurs, hommes et femmes, qui ont servi leur pays avec courage et dévouement, continuent de passer à travers les mailles du filet d'un système qui réagit de façon ponctuelle.
    Dans le cadre de notre enquête, nous avons découvert que plus de la moitié de nos 31 recommandations initiales n'ont pas été mises en oeuvre, dans la pratique ou dans les intentions. Je crois que cela a nui à l'uniformité des soins offerts aux militaires de partout au pays qui souffrent de problèmes de santé mentale.
    Nous avons également relevé un certain nombre de domaines dans lesquels les progrès sont lents à venir, particulièrement en ce qui concerne les directives de haut niveau et la coordination nationale, les efforts pour uniformiser les soins et traitements dans l'ensemble des Forces canadiennes ainsi que la cueillette de données et de statistiques à l'échelle nationale.
    L'accès à des soins de qualité continue de dépendre d'un certain nombre de facteurs arbitraires, comme le lieu où le militaire habite, la distance qui sépare sa base d'appartenance du grand centre urbain le plus près, la disponibilité de professionnels en soins de santé et l'attitude de ses supérieurs et de ses pairs.
    Nous avons aussi été déçus d'apprendre qu'une base de données nationale, qui reflète fidèlement le nombre de militaires des Forces canadiennes qui sont aux prises avec des problèmes liés au stress, n'a toujours pas été créée. Un tel outil est critique pour bien comprendre les chiffres ayant trait aux militaires des Forces canadiennes affectés par des troubles de santé mentale. Sans base de données nationale, les Forces canadiennes ne sont pas en mesure d'évaluer l'impact des diverses interventions cliniques et de concentrer les initiatives d'éducation et de formation là où on en a le plus besoin.

[Français]

    Peu importe où ils se trouvent, les tâches qu'ils effectuent ou avec qui ils travaillent, les militaires des Forces canadiennes qui se blessent ont tous le droit de recevoir rapidement les mêmes soins de qualité, que la blessure soit physique ou psychologique.
    Certains des problèmes relevés par notre bureau auraient pu être évités si nos 31 recommandations initiales avaient pleinement été mises en oeuvre.

[Traduction]

    Parallèlement, nous avons été à même de constater l'apparition de nouveaux domaines de préoccupation au cours des six années qui ont suivi la diffusion de notre rapport initial. L'environnement opérationnel de la force militaire du Canada s'est radicalement transformé au cours des dernières années, surtout en raison du niveau et de l'intensité des opérations de combat en Afghanistan. Et il est évident que les Forces canadiennes et leur personnel sont au bord de l'épuisement. Cet état d'épuisement augmente grandement le fardeau des familles, des fournisseurs de soins médicaux et en santé mentale.

[Français]

    En tenant compte des réalités d'aujourd'hui et des problèmes actuels, nous nous sommes penchés sur trois questions que nous jugeons critiques afin de garantir des soins rapides et de qualité aux militaires qui souffrent de traumatismes liés au stress opérationnel.

[Traduction]

    Premièrement, il est nécessaire de renforcer la gouvernance et le leadership à l'échelle nationale en ce qui concerne le dépistage, la prévention et le traitement du syndrome de stress post-traumatique et des autres traumatismes liés au stress opérationnel.
    Dans notre rapport initial en 2002, nous avons insisté sur la nécessité de nommer un officier haut gradé, qui relèverait directement du Chef d'état-major de la Défense. Cet officier aurait pour fonction principale d'agir à titre de coordonnateur national relativement à toutes les questions concernant les traumatismes liés au stress opérationnel, y compris la qualité et l'uniformité des soins, des diagnostics et des traitements ainsi que des programmes de formation et d'éducation dans l'ensemble des Forces canadiennes. Le titulaire de ce poste aurait un rôle important à jouer sur le plan pratique et du point de vue symbolique, afin d'aider à mettre un terme aux problèmes de la stigmatisation relatifs aux traumatismes liés au stress opérationnel.

[Français]

    Deuxièmement, il apparaît évident à l'heure actuelle que les difficultés et les défis associés aux traumatismes liés au stress opérationnel ne touchent pas uniquement le personnel militaire. Lorsqu'un membre des Forces canadiennes souffre du syndrome de stress post-traumatique ou d'un autre problème de santé mentale, c'est toute la famille qui peut souffrir. Il peut être également nécessaire de fournir du soutien et de l'aide à chacun des membres de la famille.
(1540)

[Traduction]

    Nos enquêteurs ont découvert un certain nombre de programmes de qualité offerts par des gouvernements provinciaux, des administrations municipales, les centres de ressources pour les familles des militaires locaux et des aumôniers sur les bases, afin de soutenir les familles des militaires. Malheureusement, nous n'avons trouvé aucun signe d'une approche coordonnée, à l'échelle nationale, pour garantir que les familles des militaires aient toujours accès à des services et à du soutien uniformes en santé mentale lorsqu'elles en ont besoin.
    Bien que le ministère et les Forces canadiennes n'aient aucune obligation juridique à cet égard, ils ont de bonnes raisons de veiller à ce que les familles des militaires aient accès rapidement à des services et à du soutien appropriés.

[Français]

    Premièrement, étant donné que les problèmes de santé mentale sont souvent le résultat du service militaire et une source directe de stress pour les familles, les Forces canadiennes ont la responsabilité morale de s'assurer que des soins et des traitements soient offerts aux familles.
    Deuxièmement, d'un point de vue plus pratique, on a intérêt à veiller à ce que les familles des militaires reçoivent des soins; on pourrait ainsi réduire le niveau de stress du militaire souffrant d'un traumatisme lié au stress opérationnel et l'aider à se rétablir plus rapidement.

[Traduction]

    Enfin, dans le cadre de notre enquête plus étendue, nous avons aussi constaté qu'il faut en faire beaucoup plus pour faire face aux problèmes de stress et d'épuisement professionnels des fournisseurs de soins des Forces canadiennes. Ce stress est causé par un manque de ressources et une charge de travail élevée. La majorité des fournisseurs de soins qui ont été interrogés par notre bureau ont indiqué que le stress et l'épuisement personnels étaient un problème urgent et que la situation forçait même certains militaires à quitter les forces armées.
    Le ministère et les Forces canadiennes nous ont informés, au cours de notre enquête, de leur intention d'embaucher 218 nouveaux professionnels de la santé mentale d'ici la fin de mars 2009. Je crois comprendre que la date limite a été reportée à 2010.
    L'embauche de travailleurs en santé mentale est certainement un pas dans la bonne direction afin de régler le problème, mais les Forces canadiennes sont un employeur parmi tant d'autres au pays qui cherchent à embaucher des professionnels en soins de santé; nous croyons donc qu'il pourrait être difficile pour l'organisation d'atteindre cet objectif, même avec le report de la date limite à 2010. Cette réalité renforce l'importance pour la force militaire de maintenir en poste les professionnels en santé mentale qui travaillent déjà pour la communauté de la Défense.
    Étant donné la nature dangereuse et exigeante de l'actuelle mission en Afghanistan, il est clair que le syndrome de stress post-traumatique et les autres traumatismes liés au stress opérationnel deviendront un enjeu encore plus important pour les Forces canadiennes pour de nombreuses années à venir. À de nombreux égards, il s'agira d'un problème générationnel pour le ministère, pour les Forces canadiennes et pour l'ensemble du gouvernement.
    Nous reconnaissons que, de manière générale, les Forces canadiennes ont réalisé certains progrès au cours des six dernières années afin de faire face aux problèmes et défis concernant le syndrome de stress post-traumatique et les autres traumatismes liés au stress opérationnel. Cependant, il reste encore beaucoup de travail à faire pour veiller à ce que les membres des Forces canadiennes qui souffrent de traumatismes liés au stress opérationnel soient diagnostiqués et reçoivent les soins et traitements dont ils ont besoin.
    Régler ces problèmes en suspens et mettre en oeuvre les recommandations formulées dans notre rapport aideront nos militaires pour de nombreuses années à venir, que ce soit au sein des Forces canadiennes, s'ils restent, ou comme civils.
    Je suis maintenant prête, monsieur le président, à répondre à vos questions. Merci.
    Merci beaucoup.
    J'avise les membres du Comité que la première ronde en est une de sept minutes. Nous allons commencer par M. Wilfert.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Je remercie l'avocate générale de sa présence ici aujourd'hui. J'aimerais vous féliciter, vous et vos collègues, pour votre rapport, qui, selon moi, est extrêmement important. Compte tenu du fait que 31 recommandations originales avaient été formulées, et on a entendu certains commentaires du gouvernement et des médias à cet égard, pouvez-vous nous dire si vous avez reçu une réponse officielle du gouvernement relativement à ces 31 recommandations, dont plus de la moitié n'ont pas été mises en oeuvre, et à vos trois nouveaux domaines de préoccupations?
    Pour être juste, ouvert et transparent, lorsque notre bureau termine un rapport systémique comme celui-ci, il fournit un exemplaire de l'ébauche aux Forces canadiennes afin qu'elles aient la chance de l'examiner et de faire des commentaires avant qu'on en donne un exemplaire au ministre.
    Dans le cadre de ce processus, nous avons reçu certains commentaires des Forces canadiennes et les avons examinés, et nous étions toujours d'avis que nos recommandations étaient nécessaires.
    Certains témoignages que nous avons entendus ne concordent pas. D'un côté, des militaires haut gradés reconnaissent que certaines personnes glissent entre les mailles du filet, mais que généralement le système fonctionne bien. D'un autre côté, des témoignages, surtout de l'Afghanistan, nous disent le contraire. Les avis semblent également diverger entre l'Est et l'Ouest du Canada. Qu'en pensez-vous?
(1545)
    Au cours de notre enquête, nous avons interviewé 360 personnes de partout au Canada, de diverses bases, des fournisseurs de soins de santé et des gens qui souffrent du syndrome du stress post-traumatique. Nous en avons conclu qu'il est vrai que les soins reçus dépendent souvent de l'endroit où vous habitez. Et selon nous, il est important que les Forces canadiennes règlent ce problème.
    Une question qui me préoccupe, et qui préoccupe certainement mes collègues également, est celle de la banque de données nationale, l'incapacité de cibler la formation et l'incapacité, comme vous le dites, de composer avec les interventions cliniques.
    Avez-vous reçu des commentaires à cet égard et pouvez-vous nous dire pourquoi ces mesures n'ont pas été mises en oeuvre?
    C'est une question que vous devriez probablement poser au Médecin-chef. Toutefois, ce que nous avons recommandé durant l'enquête et ce qui devrait se faire si nous avons bien compris, c'est l'informatisation des dossiers médicaux au ministère de la Défense nationale. Toutefois, malheureusement, si j'ai bien compris, il faudra attendre jusqu'en 2011 pour la mise en oeuvre. Cela devait se faire en 2008 — c'est ce qu'on nous avait dit —, mais si j'ai bien compris, le tout est maintenant reporté à 2011.
    C'était l'une de nos recommandations originales, et nous l'avons soulignée encore une fois dans le rapport de suivi, et nous savons qu'il est difficile de savoir comment régler un problème sans en connaître l'étendue. Une fois qu'on en connaît l'étendue, on peut déterminer où il faut cibler les ressources, l'éducation et la formation. Nous estimions qu'il s'agissait d'une recommandation très importante qui valait la peine d'être réitérée.
    Je suis du même avis que vous, et je crains que le ministre, qui était justement ici pour le Budget supplémentaire des dépenses, ne traite pas cette question comme une priorité et un besoin. Pourtant davantage de Canadiens sont au courant en raison du nombre de militaires touchés à leur retour de l'Afghanistan. J'espère que des pressions et un suivi seront exercés auprès du ministre et du sous-ministre, parce qu'évidemment, on ne peut attendre jusqu'en 2011, compte tenu du fait que, comme vous l'avez indiqué, et avec raison, cette recommandation a été formulée depuis un bon moment déjà.
    Monsieur le président, il est certain qu'il faut continuer à exercer des pressions à cet égard, parce que sans cette information, il est assez difficile pour nous de faire ce que notre comité a à faire; et je crois qu'on s'entend là-dessus. Il faut connaître la situation avant de prendre des mesures. Alors, encore une fois, je suis en faveur de cette recommandation et du suivi à effectuer.
    J'aimerais maintenant parler de la réserve et de la force régulière, les réservistes, semble-t-il, n'obtenant pas des soins adéquats puisqu'ils n'ont pas le même réseau que leurs collègues de la force régulière. Encore une fois, vous avez parlé de la nécessité de maintenir certaines normes. Pouvez-vous nous donner davantage de détails sur ces conclusions?
    Vous parlez des soins de santé offerts aux membres de la force régulière et aux réservistes?
    Oui, la comparaison entre les deux.
    D'accord. Dans notre rapport publié en avril 2008, nous abordons cette question. Nous avons découvert qu'il y avait de la confusion dans les systèmes et les règlements. Des travailleurs en soins de santé nous disaient qu'ils ne comprenaient pas vraiment qui avait droit à quoi. Et nous avons découvert que c'était vrai dans le cadre de notre enquête.
    Actuellement, les soins de santé dépendent du contrat, et non des tâches. Si vous êtes blessé dans le cadre de vos fonctions militaires, les Forces canadiennes devraient avoir la responsabilité de veiller à ce que vous obteniez les soins de santé et les traitements adéquats dont vous avez besoin. Nous avons demandé que ces règlements et ces politiques soient passés en revue et que tout le monde soit traité de façon équitable, peu importe. Si quelqu'un est blessé dans le cadre de ses fonctions militaires, les forces armées devraient être responsables des soins de santé.
    Je crois que vos commentaires sur les dispositions en matière de santé médicale et dentaire des réservistes étaient, en fait, très opportuns. Je crois qu'il est important, comme vous le dites dans votre rapport, d'avoir des modalités claires et conviviales, parce qu'encore une fois, certaines personnes ne savaient pas clairement à quoi elles avaient droit à leur retour. Voilà donc un autre domaine sur lequel il faut vraiment insister dans notre propre rapport.
    Il vous reste encore un peu de temps, monsieur Wilfert.
    Vous êtes très généreux aujourd'hui, monsieur le président.
    Ce n'est pas moi; c'est l'horloge.
    Vous êtes très aimable.
    De plus, par votre intermédiaire, monsieur le président, vous avez soulevé trois nouvelles préoccupations aujourd'hui. Nous sommes certainement inquiets du fait que la majorité des recommandations n'ont pas encore été mises en oeuvre; toutefois, vous avez trois nouvelles préoccupations très importantes, surtout dans le contexte de l'Afghanistan. Avez-vous pensé à un échéancier qui pourrait être élaboré pour composer avec ces trois domaines, en tenant compte de leur ordre de priorité et de celui des autres recommandations qui ont déjà été formulées?
(1550)
    Il revient, j'imagine, aux Forces canadiennes de déterminer l'échéancier. Nous avons certainement l'intention de les talonner, parce que nous estimons que ces préoccupations qui ont été soulevées durant notre examen de suivi des 31 recommandations originales sont très importantes.
    Estimez-vous obtenir la coopération dont vous avez besoin? Je comprends que dans certains cas, les choses n'ont pas avancé, mais que diriez-vous de façon générale?
    Les Forces canadiennes ont entrepris de nombreuses nouvelles initiatives. En ce moment, d'après ce que j'ai vu sur papier, ça ne fait que commencer. Il est important de noter que souvent, des politiques sont rédigées au 101, promenade Colonel By, mais qu'elles ne sont pas nécessairement mises en oeuvre sur le terrain. Je crois qu'il est très important de veiller à ce qu'on passe de la parole aux actes et qu'on donne suite aux engagements pris envers les familles et les fournisseurs de soins de santé; des mesures réelles doivent être prises.
    Merci.
    Passons au Bloc; M. Paillé a la parole.

[Français]

    D'abord, félicitations pour votre travail. Selon ce que j'ai pu comprendre, même si je suis un nouveau membre de ce comité, vous avez assuré la relève, du moins temporairement, ce qui a été apprécié.
    J'ai lu dans les rapports que la clinique de l'Hôpital Sainte-Anne offre la possibilité d'une dizaine de places pour huit semaines. Quel est l'état actuel de la clinique? Les travaux qui ont été effectués sont-ils terminés? Peut-on accueillir le maximum possible de patients à l'hôpital?
    Dans l'ensemble du pays, il y a plusieurs programmes hospitaliers qui sont menés par les Forces canadiennes et le ministère des Anciens combattants. Je crois qu'une nouvelle clinique a été inaugurée à Ottawa, hier, pour les personnes souffrant de traumatismes liés au stress opérationnel. Il y a encore beaucoup de travail à faire, mais nous sommes heureux de constater les progrès que les Forces canadiennes ont faits à cet égard.
    Il y a des informations à l'effet que le gouvernement, dans le budget de 2007, prévoyait l'ouverture d'un réseau d'une dizaine de cliniques. Y a-t-il eu des progrès à ce chapitre? Pourriez-vous nous détailler un peu plus l'avancement de la situation en ce qui a trait aux cliniques partout au Canada?
    C'est une bonne question, mais il faudrait peut-être la poser aux Forces canadiennes, et non à notre bureau.
    D'accord.
    Vous allez peut-être encore me référer aux Forces canadiennes, mais êtes-vous en mesure de me dire, aujourd'hui, combien il y a de places disponibles au Canada, par province, pour venir en aide à ces personnes? On parle de plusieurs centaines, voire de milliers de personnes qui auraient besoin de ces services. Or, force est de constater qu'il y a peu de places disponibles. Il y a sûrement un plus grand besoin.
    Premièrement, est-on en mesure de dire quel est le nombre de places disponibles par province?
    Deuxièmement, que fait-on dans le cas où il n'y a pas suffisamment de places? Y a-t-il un protocole mis en place en attendant?
    C'est encore une bonne question, mais cela relève des Forces canadiennes.
    Vous avez dit dans votre rapport — et je vais reprendre les termes exacts — qu'il y aurait un problème de directives venant des niveaux supérieurs. Selon votre dernière étude de décembre 2008 que vous avez présentée, pourriez-vous me dire combien de personnes dans votre bureau ont travaillé à ce rapport, qui est assez exhaustif? Je sais qu'il y a plusieurs employés à votre bureau, mais quel pourcentage de votre personnel a vraiment travaillé sur le fond de ce dossier?
    C'est un enjeu qui concerne notre bureau depuis 2002. Selon le dernier rapport de suivi, ce sont peut-être 5 enquêteurs qui ont travaillé à ce dossier. Moi aussi, comme avocate générale, j'ai travaillé à ce dossier.
    Pouvez-vous nous expliquer ce que vous et ces 5 enquêteurs avez fait comme recherche? Avez-vous parlé aux supérieurs hiérarchiques? Avez-vous parlé aux soldats qui reviennent de là et qui ne sont pas victimes du syndrome de stress post-traumatique? Avez-vous parlé aux soldats qui sont victimes du syndrome de stress post-traumatique? Avez-vous parlé à leurs familles? Quelle est l'étendue de l'échantillonnage dont vous avez tenu compte? Est-il comparable à ce que je viens de vous décrire ou dépasse-t-il ce que je viens de vous décrire?
(1555)
    Pendant la dernière enquête, nous avons interviewé plus de 360 individus: les membres des Forces canadiennes, les membres des familles, les membres de la chaîne de commandement, les intervenants et les aumôniers. Nous pensons que nous avons fait un bon travail dans la cueillette de renseignements partout dans les Forces canadiennes.
    Pourriez-vous m'expliquer ce que vous voulez signifier quand vous dites, à la page 3 de votre présentation:
Nous avons également relevé un certain nombre de domaines dans lesquels les progrès sont lents à venir, particulièrement en ce qui concerne: les directives de haut niveau et la coordination nationale [...]
    Faites-vous référence à l'état-major des Forces canadiennes? Ces gens sont-ils lents à réagir?
    Dans notre premier rapport, nous avons fait une recommandation. Il y a un manque de leadership global. On a besoin d'un conseiller spécial qui doit relever directement du chef d'état-major simplement pour s'assurer qu'il y a de bonnes directives partout au pays.
    Très bien.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Madame Black, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup monsieur le président.
    Merci d'avoir accepté notre invitation, madame McFadyen. Nous sommes heureux de vous accueillir à nouveau.
    Dans votre rapport de 2008, vous avez indiqué que parmi les 31 recommandations issues de l'étude de 2002, seules sept avaient été mises en oeuvre partiellement et 11 n'avaient pas du tout été suivies. Il s'agit d'un échec flagrant et d'un manque de progrès choquant au cours des six dernières années.
    Dans le quotidien The Ottawa Citizen d'aujourd'hui, il y a un article dans lequel on dit que les traditionalistes entêtés des forces militaires canadiennes n'avaient toujours pas accepté le fait que les soldats ayant souffert psychologiquement devaient être traités de toute urgence pour traumatismes liés au théâtre d'opération. Dans le même article, un expert du counselling de soutien ajoute que la culture militaire traditionnelle est toujours bien vivante et crée un obstacle de taille.
    D'après les résultats de votre enquête, diriez-vous que les recommandations n'ont pas été mises en oeuvre parce qu'on n'est pas prêt à reconnaître la gravité du problème ou est-ce plutôt par manque de capacité et de ressources, ou bien les deux?
    Dans le cadre de notre étude, les enquêteurs ont noté que dans presque toutes les bases où ils se sont rendus — il y en a plus de 19 — la stigmatisation était toujours un véritable problème. En effet, les militaires ont toujours peur de demander de l'aide. Ils ont peur d'être stéréotypés ou qu'on les prenne pour des malades imaginaires ou des menteurs.
    Des militaires nous en ont fait part à ce même comité.
    C'est ce qu'on a pu constater dans les bases militaires. Voilà pourquoi nous avons encore une fois recommandé que le leadership provienne des plus hauts échelons de la hiérarchie.
    Après notre premier rapport, CANFORGEN et d'autres documents de politique ont vu le jour soulignant l'importance du problème et indiquant que de ne pas résoudre le problème équivaudrait à manquer de leadership. Par contre, nous ne sommes pas convaincus, d'après ce que nous avons pu constater dans le cadre de notre enquête, que ces paroles se sont concrétisées puisqu'on nous a encore parlé de problèmes de stigmatisation. C'est pourquoi notre enquête nous a permis de déterminer qu'il est toujours opportun de désigner quelqu'un de haut gradé qui relèverait du Chef d'état-major de la Défense, juste pour montrer que c'est une question importante qui est prise au sérieux.
    Je suis d'accord avec vous. C'est déterminant si nous voulons vraiment changer les choses.
    Dans votre dernier rapport, vous avez repris les recommandations de 2002 et avez prôné la mise en place d'une base de données qui permettrait de savoir combien de membres des Forces canadiennes se trouvent dans le système. Vous demandez, d'autre part, qu'il y ait une autre enquête pour avoir une meilleure idée de la situation actuelle de la santé mentale, parce que les autres données datent de 2002.
(1600)
    Elle a eu lieu en 2002 et nous sommes maintenant en 2009.
    Pourriez-vous nous expliquer dans quelle mesure les informations recueillies dans le cadre d'une telle enquête et une base de données permettraient au ministère de mieux répondre aux besoins des membres des Forces canadiennes qui souffrent de stress post-traumatique ou opérationnel?
    La recommandation formulée en 2002 et reprise en 2009 vient du fait que nous estimons qu'une base de données nous permettrait de savoir combien de militaires sont touchés. Il ne faut pas oublier que l'on dépense beaucoup d'argent en matière de soins de santé dans les Forces canadiennes: environ 500 millions de dollars par année. Il est donc important que ces ressources financières soient dépensées aux bons endroits et que les programmes de formation et d'éducation soient bien ciblés.
    Je pense que la vérificatrice générale a indiqué dans son rapport de l'an dernier qu'il était important de s'assurer que le budget est dépensé de manière appropriée.
    Sans données, c'est difficile à déterminer.
    Nous avons estimé qu'il était très important de le répéter.
    Vous avez remis le rapport au ministre en septembre 2008. Est-ce exact?
    Oui.
    Mais il n'a pas été rendu public avant...
    En raison des élections, nous avons attendu le mois de décembre.
    Depuis décembre, ou septembre, puisque le ministre avait alors le rapport, y a-t-il des mesures concrètes qui ont été prises? Comment a-t-on réagi au rapport? Je voudrais vraiment savoir si la réaction à votre rapport a été adéquate ou si vous avez peur qu'il faudra attendre encore six années sans qu'un bon nombre de ces recommandations aient été appliquées.
    Une dernière chose. Vous avez précisé que le ministère avait indiqué qu'il avait l'intention d'embaucher 218 professionnels de la santé mentale supplémentaires avant la fin de mars 2009, mais que depuis la date butoir avait été reportée. Nous savons qu'il est difficile de recruter ce genre de personnel. De ces 218 professionnels, combien ont été embauchés?
    Je ne le sais pas. C'est une très bonne question que vous pourrez poser au Médecin-chef lorsqu'elle comparaîtra.
    Avant de rendre notre rapport public, afin d'être ouvert et transparent, nous en avons donné une ébauche au ministère avant de le transmettre au ministre. C'est alors qu'on nous a fait part de certaines initiatives qu'on voulait mettre en place afin de donner suite aux recommandations. J'ai remarqué le mois dernier et ce mois-ci sur le site Web de la Défense nationale qu'il y a des notes d'information faisant état des mesures qui ont été prises pour gérer le problème. C'est d'ailleurs sur ce site que j'ai vu que la date butoir avait été reportée à 2010.
    Nous sommes donc heureux que l'on fasse des efforts. Il faudra voir, par contre, si ces mesures suffisent et reflètent véritablement nos recommandations.
    Il me semble que l'une de vos recommandations les plus importantes porte sur le poste qui relève directement du Chef de l'état-major de la Défense. Mais je sais qu'il y en a beaucoup d'autres qui sont importantes.
    Permettez-moi de vous poser maintenant une question sur les forces régulières et les réservistes. On nous a dit l'an dernier, je pense, qu'un réserviste qui était blessé et qui perdait une jambe, par exemple, était moins indemnisé qu'un membre des forces régulières ayant subi le même traumatisme. Ces questions d'inégalité entre les forces armées régulières et les réservistes — et nous savons que nous avons un pourcentage plus élevé de réservistes en Afghanistan que c'était le cas dans n'importe quelle autre guerre — ont-elles été résolues?
    Pour ce qui est de votre question portant sur les assurances — le fait qu'une jambe n'ait pas la même valeur au sein des forces régulières qu'au sein des forces de réserve —, dans notre rapport, nous avons inclus une recommandation prônant un traitement égal des militaires. Je pense que le ministre a d'ailleurs formulé une proposition à l'intention du Conseil du Trésor. Mais je ne sais pas où en sont les choses. Je pense que vous devriez poser la question au personnel des Forces canadiennes.
    À votre connaissance, y a-t-il d'autres cas d'iniquité?
    Pour ce qui est des autres iniquités, je pense qu'on leur a donné un an dans le rapport pour apporter les changements nécessaires au règlement afin d'assurer un traitement équitable des militaires. Nous allons donc assurer un suivi dans un an pour voir ce qui a été fait.
    Merci beaucoup.
    Merci.
    Nous allons maintenant passer à M. Blaney.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Madame McFadyen, je vous souhaite à nouveau la bienvenue au Comité permanent de la défense nationale. C'est notre première séance sur la même étude qu'on avait entreprise le printemps dernier, en 2008. Parfois, il y a des avantages à ce que les choses s'étirent un peu, puisqu'on sera en mesure d'intégrer les recommandations de votre rapport de décembre 2008 dans notre étude. Cela va donner un nouvel élan à vos recommandations, et je suis sûr que notre recherchiste, M. Cox, en est très heureux.
    Depuis un an, il y a une nouvelle intéressante. Le nombre de cliniques de traitement des traumatismes liés au stress opérationnel mises sur pied par la Défense nationale et les Anciens combattants va passer, ce printemps, de cinq à dix. On voit donc, comme vous l'indiquez dans votre rapport, qu'il y a des améliorations.
    J'aimerais revenir à votre rapport. Vous mentionnez que 13 des 31 recommandations de votre rapport initial de 2002 ont été prises en compte par la Défense nationale. Vous avez aussi remarqué que le défi du stress post-traumatique est aussi relié à une utilisation intense de nos Forces canadiennes dans les différentes missions, notamment la mission afghane, au sujet de laquelle vous dites que l'utilisation de nos Forces est à la limite.
    Il y a un autre point que j'ai apprécié dans votre rapport. Vous mentionnez que ce n'est pas seulement le militaire qui est affecté, mais aussi sa famille. Vous avez soulevé le fait qu'il n'y a pas d'approche coordonnée pour encadrer les familles qui vivent avec un proche atteint du syndrome de stress post-traumatique. C'est, je pense, un élément que nous allons considérer dans notre étude, puisqu'il a été soulevé par des témoins qui ont comparu devant le comité.
    Toutefois, dans votre allocution, une chose m'a surpris, a attiré mon attention. Vous dites qu'à bien des égards, le gouvernement canadien, les Forces canadiennes et la Défense nationale sont confrontés à ce que vous appelez un défi générationnel. Pourriez-vous expliciter ce que vous entendez par generational challenge lorsque vous faites référence aux améliorations à apporter à la façon dont on encadre les victimes de syndrome de stress post-traumatique?
(1605)
    Notre intention, en faisant ce commentaire, était de signaler que les symptômes traumatiques liés au stress opérationnel ne sont pas nécessairement évidents après une mission en Afghanistan. Ils peuvent apparaître une ou deux années plus tard.

[Traduction]

    À l'heure actuelle, nous ne savons pas exactement quelle sera l'ampleur du problème, mais j'estime que nous devons nous y attarder pour être en mesure d'y faire face.

[Français]

    On dit normalement qu'environ 20 p. 100 des militaires qui reviennent de mission peuvent être affectés par des problèmes de santé mentale. Voulez-vous dire qu'à cause de l'envergure de la mission en Afghanistan, cela représente un défi beaucoup plus grand? Est-ce ce à quoi vous faites référence lorsque vous parlez de défi générationnel, ou y a-t-il d'autres aspects? Parfois, lorsqu'on parle de défi générationnel, ce n'est pas parce que des professionnels de la santé vont quitter en raison de leur âge ou parce qu'ils prennent leur retraite.

[Traduction]

    C'est la première fois que les Forces canadiennes participent activement au combat depuis la guerre de Corée, et plus de 8 500 personnes — par exemple de Petawawa — ont participé à cette mission. Je ne sais pas si nous savons encore quelle sera l'étendue de leurs maux. Il est important de pouvoir les aider, de s'assurer que le pays — qu'ils ont bien servi — leur offre des soins appropriés.

[Français]

    Chose certaine, on l'a vu, les séquelles peuvent durer un certain temps.
    On voit qu'il y a beaucoup de défis. Un militaire, M. Paul Franklin, a comparu devant notre comité. Il a dit qu'il y avait des améliorations à apporter à la manière dont les Forces canadiennes offraient du soutien aux victimes du syndrome de stress post-traumatique. Il avait eu l'occasion d'étudier ce qui se faisait dans d'autres pays, des programmes semblables. Selon lui, on était probablement en avance et on donnait des services supérieurs à ceux offerts ailleurs.
    Partagez-vous son opinion?
(1610)
    Oui, nous partageons l'opinion de Paul Franklin. Dans notre rapport, nous avons fait le commentaire suivant.

[Traduction]

    Le Canada est un leader mondial, mais cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas d'autres choses à faire pour s'assurer que les membres des Forces canadiennes ont un traitement équitable.

[Français]

    Absolument. Pour relever un défi, il faut qu'il y ait une volonté politique, des ressources matérielles et des ressources financières. Selon vous, lequel de ces trois éléments est le plus important pour qu'on puisse faire un pas de géant ou vraiment relever le défi par rapport à ce que vous avez mentionné au sujet d'une implication plus importante en Afghanistan? Lequel de ces critères, selon vous, est le plus critique? Vous avez vu l'état des choses. Diriez-vous que c'est la volonté politique, les ressources matérielles ou les ressources financières qui constituent l'élément le plus important? Lequel de ces éléments vous semble le plus critique à ce moment-ci?
    Toutes les recommandations que nous avons faites dans notre rapport sont très importantes, mais je pense que c'est le manque global de leadership.

[Traduction]

    Il faut qu'une personne haut placée détermine où l'argent est affecté, où les efforts de formation et d'éducation doivent être consacrés. Je crois qu'il y aurait un effet domino, ce qui réduirait la stigmatisation culturelle qui existe, et ferait en sorte que l'argent et les ressources soient utilisés à bon escient.

[Français]

    C'est donc vraiment le leadership.
    Oui.
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Voilà qui termine le premier tour. Nous allons maintenant commencer un tour de cinq minutes.
    Commençons par Mme Neville.
    Merci beaucoup, je vous remercie de votre exposé.
    Je suis nouvelle à ce comité. J'allais vous poser une autre question, mais j'aimerais revenir à une question posée par un collègue.
    Vous avez dit que la publication du rapport avait été reportée. Pourriez-vous nous donner des précisions? Quand l'avez-vous terminé?
    Nous l'avons fourni au ministère en juillet 2008. Nous lui donnons la chance d'examiner nos recommandations et de faire des commentaires avant de transmettre le rapport au ministre. Nous l'avons transmis au ministre en septembre; toutefois, des élections ont été déclenchées.
    Au bureau de l'ombudsman, notre rôle est de demeurer neutre et impartial. Nous faisons des observations, et nous avons déterminé qu'il était justifié d'attendre après les élections avant de publier le rapport.
    C'était votre décision.
    Oui, entièrement.
    D'accord, c'est ce que je voulais savoir. Merci.
    Je lis votre exposé et je suis surprise par l'une des questions que vous soulevez. Vous dites que l'accès aux soins de qualité dépend de nombreux facteurs arbitraires, dont l'attitude des supérieurs et des pairs. Je parcours le rapport, dans lequel vous dites: « ... on peut encore s’interroger devant le manque de leadership et de détermination, à l’échelle nationale,... », de toute évidence à un échelon inférieur. À quel point ce problème est-il grave? Que peut-on y faire? Le syndrome du stress post-traumatique donne souvent lieu à une stigmatisation, dans l'esprit de certains, et il est important de faire quelque chose à cet égard.
    Oui, vous avez entièrement raison.
    Durant notre enquête, nous avons découvert que la stigmatisation était un problème dans toutes les bases que nous avons visitées. Nous avons parlé à des fournisseurs de soins et à des parents. J'ai peut-être l'air de me répéter, mais c'est pourquoi nous croyons qu'il faut assurer un leadership de haut niveau pour faire comprendre dans toutes les bases du Canada que ce comportement est inacceptable.
    Selon vous, quelle est la première mesure à prendre en vue de la mise en oeuvre de cette recommandation? La formation?
    Il faudrait nommer quelqu'un, un officier haut gradé relevant directement du Chef d'état-major de la Défense. Cette personne serait responsable de toutes les questions liées au traitement des blessures liées au stress opérationnel — éducation, formation, traitement et diagnostic — ainsi, cette personne maîtriserait bien tous les enjeux et saurait où la formation doit être offerte. Nous croyons que c'est très important.
    On espérerait qu'avec le temps, ce genre d'attitude ou de stigmatisation s'estomperait. Avez-vous vu une différence lors de la rédaction de vos deux rapports?
(1615)
    C'était un problème important en 2002, mais il a encore été soulevé systématiquement dans toutes les bases que nous avons visitées au cours de notre deuxième enquête. On en parle encore aujourd'hui. J'ai rencontré les proches et ils me disent que le problème existe toujours. Les gens ont peur de se manifester.
    Merci.
    Madame Gallant. Non?
    Passons au gouvernement. Monsieur Boughen.
    Laissez-moi d'abord vous féliciter moi aussi, Mary, pour votre excellent rapport. Il est succinct et très bien rédigé.
    Il y a plusieurs questions qui me sont venues à l'esprit en lisant ce rapport. Voici la première. Quels sont les correctifs nécessaires, à votre avis, pour répondre aux problèmes que vous avez mis en évidence? Vous faites une recommandation principale, puis neuf autres recommandations. J'ai l'impression que certaines ont été entendues mais, pour une raison quelconque, nous ne savons pas pourquoi d'autres sont restées sans réponse. Quel est votre avis sur la question?
    Pourquoi les Forces canadiennes n'ont pas suivi toutes nos recommandations? C'est une bonne question à leur poser.
    Encore une fois, nous aimerions que le haut de la pyramide fasse preuve de leadership, afin que ces programmes fonctionnent sur le terrain.
    Que voyez-vous comme freins et contrepoids pour nous assurer que les recommandations du rapport sont appliquées?
    Pour tout type de rapport, il faut inclure une sorte d'échéancier. Ce que nous voulons savoir, cet après-midi, c'est ce qui va arriver avec ce rapport. S'il n'y a pas d'échéancier, le temps passe, certaines mesures sont adoptées et d'autres sont oubliées.
    Dans le passé, nous nous sommes engagés à faire un suivi de nos rapports, et c'est ce que nous avons fait. Ces recommandations restent très importantes et nous avons l'intention de continuer à les soulever auprès des Forces canadiennes jusqu'à ce qu'elles se soient saisies de cette question et qu'elles se soient assurées que tous les membres des Forces canadiennes sont traités de façon équitable.
    Avez-vous une personne contact au sein des Forces canadiennes?
    Lorsque nous faisons le suivi de nos recommandations, nous nous adressons généralement au Chef de l'état-major de la Défense, par exemple. C'est le chef des Forces canadiennes. Il peut déléguer cette responsabilité à quelqu'un d'autre, mais on s'attend à ce qu'il nous fournisse une réponse à ces questions.
    Merci.
    Il nous reste du temps.
    Monsieur Payne, allez-y.
    Merci, monsieur le président.
    J'aimerais avoir votre avis sur les réserves des Forces canadiennes. Il y a énormément de réservistes qui entrent dans les forces régulières pour prêter main forte aux soldats en Afghanistan.
    Voici ma question. Lorsque ces personnes rentrent au pays, ont-elles accès aux services de santé auxquels vous faites référence dans votre rapport? Le cas échéant, est-ce que vous recensez ces personnes? Où pourraient-elles accéder à ces services, au Canada?
    De mémoire, je ne peux pas vous dire combien il y a de réservistes en Afghanistan. Les Forces canadiennes devraient pouvoir vous donner un chiffre exact.
    Si un réserviste sert en Afghanistan, il devient un réserviste de classe C, ce qui le rend admissible aux mêmes soins de santé qu'un membre de la force régulière. S'il est blessé au front et qu'il revient au Canada, si son contrat se termine, il ne sera plus admissible aux soins de santé, selon les règles actuelles.
    Généralement, à leur retour, les FC renouvellent leur contrat s'ils ont toujours besoin de soins médicaux, mais grosso modo, cela dépend de la bonne volonté de leur commandant. C'est un des problèmes dont nous avons parlé dans notre rapport. L'échéance du contrat ne devrait pas avoir d'incidence sur l'admissibilité aux soins de santé. Cette admissibilité ne devrait pas dépendre de votre contrat, mais de la raison pour laquelle vous avez été blessé, et de ceux qui sont responsables de vous.
    Me reste-t-il un peu de temps?
    Oui, il vous reste une minute.
    J'ai une autre question à poser. La base des Forces canadiennes à Suffield se trouve dans ma circonscription, et des militaires y reviennent d'Afghanistan. S'ils sont blessés, où pourront-ils recevoir des services de santé mentale?
    Encore une fois, c'est une très bonne question. L'une des choses que nous avons soulevées est le fait que parfois, les militaires ne disposent pas de ces services là où ils vivent. Or, les Forces canadiennes sont censées les leur offrir, veiller à ce qu'il y en ait. Le lieu où l'on vit ou la base où l'on retourne ne devrait pas être un obstacle. Les militaires devraient avoir droit aux mêmes services de santé, peu importe où ils vivent au Canada. Or, notre enquête nous a justement révélé que tel n'était pas le cas.
(1620)
    Me reste-t-il un peu de temps?
    Il vous reste 21 secondes.
    J'ai une très brève question. Par souci de donner accès à des soins, les Forces canadiennes ne pourraient-elles pas sous-traiter ce travail à des fournisseurs locaux?
    Je crois savoir qu'elles passent effectivement des contrats avec des fournisseurs privés, oui.
    Je vous remercie.
    Très bien. Vous avez réussi à poser votre question.
    Très bien. Nous allons poursuivre notre tour de table en donnant la parole à M. Bachand, puis à un membre du parti ministériel et ce sera tout.

[Français]

    J'ai déjà lu quelque part que l'ombudsman était appuyé par un comité consultatif composé de plusieurs personnes. Est-ce exact?
    Oui, nous avons un comité consultatif qui se réunit deux fois par année pour discuter des grands sujets qui touchent le bureau. Cependant, le comité ne traite pas les plaintes individuelles.
    Combien de personnes siègent au comité consultatif, et qui sont-elles? S'agit-il d'anciens militaires, de fonctionnaires?
    Je pense que le comité compte huit personnes. Il y a un ou deux membres des Forces canadiennes, de niveau de chief warrant officer ou de capitaine. Il y a aussi un ancien ombudsman de l'Ontario. C'est un groupe de personnes issues de différents milieux qui se réunit pour discuter des grandes orientations du bureau.
    Ce comité consultatif sait-il, par exemple, que vous entreprenez une étude majeure comme celle que vous nous présentez aujourd'hui? Vous donne-il des avis sur la façon dont vous devriez mener l'étude, etc.?
    Oui.
    Oui?
    Il nous donne des conseils pendant la réunion. On a mis sur pied ce comité parce que lors de la création du bureau, personne n'avait d'expérience militaire. Le ministre a donc pensé que c'était une bonne chose et a inclus dans ses directives ministérielles la mise sur pied d'un comité consultatif.
    C'est une directive ministérielle.
    J'aimerais vous interroger sur votre passage comme ombudsman par intérim. Serait-il intéressant que le rôle de l'ombudsman soit inclus dans la Loi sur la Défense nationale afin de donner plus de mordant à l'ombudsman? Vous faites des recommandations au ministère, mais je suis déçu de voir sa réaction. Après sept ans, presque rien ne bouge. Dans la Loi sur la défense nationale, si l'ombudsman relevait du Parlement et non du ministre, ou si certaines dispositions stipulaient que les recommandations sont exécutoires, cela pourrait-il nous aider à parvenir à nos fins plus rapidement et efficacement?
    Les deux anciens ombudsmen, M. Côté et M. Marin,

[Traduction]

    ont tous les deux estimé qu'il nous fallait des mesures législatives, que nos fonctions devaient être inscrites dans la Loi sur la défense nationale.
    Pendant que j'ai occupé le poste d'ombudsman par intérim, nous avons pu exécuter nos fonctions et effectuer notre travail et nos enquêtes en étant régis par des directives ministérielles. À mon avis, nous avons fait du bon travail, alors on peut dire que cette forme d'encadrement est efficace.
    Même si on inscrivait nos fonctions dans un texte de loi, le rôle d'un ombudsman n'est que

[Français]

de faire des recommandations, et non d'émettre des directives.

[Traduction]

    Alors, nous aurions encore

[Français]

même rôle, même s'il y avait une disposition législative à cet effet.
    À moins qu'on change le titre d'ombudsman pour un titre qui soit plus directif. Ce serait possible de le faire si on décidait d'amender une législation ou d'y intégrer quelque chose. On essaie d'utiliser des termes qui vont atteindre les objectifs poursuivis. Si on se dirigeait dans cette direction, vous nous suggérez de ne pas utiliser le mot « ombudsman », parce que celui-ci ne fait que des recommandations. Il faudrait trouver un autre terme.
(1625)

[Traduction]

    Comme c'est le cas pour tous les ombudsmans, nous sommes chargés d'examiner les initiatives prises par l'administration et d'agir en exerçant publiquement des pressions, en témoignant devant des comités comme le vôtre, cela afin de forcer l'organisme visé à bien faire les choses.
    Je vous remercie beaucoup.
    Je vous remercie, Claude.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    La parole est maintenant à un membre du parti ministériel.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    J'ai trois brèves questions à poser à notre « ombudswoman ».
    J'aimerais revenir sur la question de mon collègue concernant le traitement des victimes du syndrome de stress post-traumatique. Avez-vous observé une différence dans la qualité des soins offerts au militaire et à sa famille, selon qu'il s'agisse d'un réserviste ou d'un membre des forces régulières?

[Traduction]

    Lors de notre enquête sur la Réserve, nous avons observé que, selon leur contrat, les réservistes blessés au cours de leur service avaient parfois de la difficulté à obtenir que les Forces canadiennes s'occupent d'eux. Ils nous ont d'ailleurs dit n'avoir eu d'autre choix que de se tourner vers leur fournisseur de soins provincial. Cela nous a paru injuste, car, à nos yeux, si quelqu'un est blessé pendant qu'il effectue son service militaire, les Forces canadiennes devraient veiller à ce que cette personne reçoive des soins appropriés.

[Français]

    J'aimerais revenir sur ce que vous avez dit au sujet de l'importance du défi du leadership.
    Dans votre rapport, initialement, vous recommandiez de créer un poste national de coordonnateur au syndrome de stress post-traumatique. L'armée a un chef du personnel militaire et a créé un poste de conseiller spécial. Est-ce suffisant, ou demandez-vous encore qu'une personne relève directement du chef de la Défense?

[Traduction]

    Le poste de conseiller spécial du Chef du personnel militaire est une initiative récente, remontant, je crois, à novembre 2008. Cependant, si je ne m'abuse, son titulaire doit s'occuper uniquement de questions non cliniques, comme l'éducation et la formation. Il y a déjà eu des initiatives de ce genre dans le passé. Après notre rapport de 2002, on a nommé deux conseillers spéciaux et cela n'a rien donné; personne n'était au courant de leur existence. Ils ont bien tenu une réunion du comité de direction au sujet des traumatismes liés au stress opérationnel, mais cela n'a rien donné; le comité a disparu. Je sais qu'on a aussi pris cette nouvelle initiative. Nous verrons si elle réussit à améliorer les choses. C'était là mes observations personnelles au sujet de ces deux initiatives, mais nous espérons tout de même que ces nouvelles mesures atteignent le but visé par nos recommandations.

[Français]

    Comment assurez-vous le suivi de vos recommandations contenues dans le rapport? Comment cela fonctionne-t-il, habituellement?

[Traduction]

    Nous voulons leur laisser suffisamment de temps pour qu'ils puissent mettre en oeuvre les recommandations, mais après un certain temps, nous communiquons avec eux pour les aviser que nous allons faire un suivi au cours duquel ils pourront nous dire ce qu'ils ont fait. Une fois qu'ils nous ont répondu, nous faisons une enquête pour vérifier si la réalité correspond à ce qu'ils ont dit et s'ils se conforment à l'esprit de la recommandation.

[Français]

    Dans un tel cas, selon votre estimation, en combien de temps le suivi pourrait-il s'effectuer?

[Traduction]

    C'est difficile à dire. Nous avons présenté notre rapport en 2002 et avons fait un premier suivi neuf mois plus tard. Des progrès avaient été réalisés, mais il était probablement encore un peu tôt. Nous avons attendu six ans avant de présenter ce rapport-ci; il nous fallait évaluer la situation avant de déterminer quand un nouveau rapport serait indiqué.

[Français]

    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Il nous reste une ou deux minutes. C'est au tour de l'opposition officielle.
    Monsieur Coderre, vous avez une ou deux minutes.
    J'ai une courte question qui fait suite à celle de mon collègue, Claude.
    Il y a une façon de protéger la qualité de vie et de s'assurer que personne ne passe à travers les mailles du filet: donner des pouvoirs à l'ombudsman.
    Dans certains pays, on confère à un inspecteur général des pouvoirs judiciaires particuliers; qu'en pensez-vous? On peut parler d'approvisionnement, mais il y a aussi la qualité de vie des troupes dont il est tenu compte aux États-Unis. Pour ma part, j'estime qu'on devrait nommer à ce poste un inspecteur général. On aura beau formuler toutes sortes de recommandations, si on ne dispose pas des données de base, les recommandations ne suffisent pas. Croyez-vous que la création d'un tel poste serait bénéfique au système dans son ensemble?
(1630)
    Je ne pense pas avoir évalué le modèle de l'inspecteur général en profondeur. Je sais qu'on l'a examiné en 1998, quand notre bureau a été créé et qu'il a alors été décidé qu'un ombudsman pourrait assurer la surveillance civile des Forces canadiennes.
    Même si on n'a donné suite qu'à la moitié des recommandations, je crois qu'en 10 ans, nous avons accompli beaucoup de choses. Nous avons exercé des pressions sur les Forces canadiennes pour qu'elles améliorent le traitement de leurs membres. Je suis convaincu que les progrès qui ont été réalisés au cours des six dernières années sont attribuables en partie aux pressions que nous avons exercées, même si les témoins suivants pourraient ne pas être d'accord avec moi.
    Merci.
    Nous vous remercions beaucoup d'être venue. Nous vous souhaitons bonne chance dans votre nouvelle vie.
    Merci de vos remarques et de vos réponses à nos questions.
    Nous faisons une pause de quelques minutes pour permettre aux témoins suivants de prendre place.
(1630)

(1635)
    Nous reprenons nos travaux.
    Je sais qu'on s'intéresse beaucoup à ce que nos témoins auront à nous dire et j'aimerais donc leur accorder le plus de temps possible.
    Nous accueillons la générale Jaeger. Soyez la bienvenue.
    La générale Jaeger est accompagnée du colonel Darch, du colonel Grenier et du colonel Ethell.
    Nous sommes heureux de vous accueillir.
    Sans plus tarder, je vous cède la parole. Vous savez comment nous fonctionnons: après vos remarques liminaires, il y aura une période de questions.
    Je ne me souviens peut-être pas de toutes les règles qui régissent le fonctionnement de votre comité, mais...
    Cela vous reviendra rapidement.
    ... vous me rafraîchirez la mémoire.

[Français]

    Monsieur le président, membres du comité, bon après-midi. Je suis enchantée d'avoir l'occasion de me présenter devant vous encore une fois et de vous donner des renseignements qui, je crois, vous seront utiles. J'ai présumé que l'accent est toujours mis avant tout sur les soins de santé mentale. La dernière fois que je me suis présentée devant le comité remonte à plusieurs mois et j'ai de nombreuses nouvelles informations à vous communiquer. En raison de l'absence inévitable du major-général Semianiw, je vais présenter l'information sur les mesures prises au sein du secteur des Services de santé, ainsi qu'à l'extérieur de celui-ci, afin de brosser le tableau le plus complet possible de la situation.

[Traduction]

    En premier lieu, il convient, je crois, de présenter les données les plus récentes sur l'ampleur du défi à relever par les FC en matière de santé mentale. Nous avons continué à recueillir les résultats du dépistage post-déploiement amélioré qui, comme vous le savez, est effectué trois à six mois après le retour au pays après le déploiement.
    Nous disposons maintenant des résultats de plus de 8 200 questionnaires de dépistage qui indiquent que 4 p. 100 des répondants souffrent de stress post-traumatique, 4,2 p. 100 souffrent de dépression et 5,8 p. 100 au total souffrent de l'un de ces états ou des deux et 13 p. 100 au total souffrent d'une forme ou d'une autre de maladie mentale.
    Nous remarquons une corrélation entre la gravité du stress opérationnel et le taux de dépistage positif de SPT. Si les résultats étaient répartis en groupes plus restreints, il se pourrait fort bien que certains pelotons et certaines compagnies présentent des taux plus élevés que d'autres unités. En outre, certaines personnes vont connaître des problèmes plus tard, même si elles semblent bien se porter au moment du dépistage. Il importe toutefois de souligner le fait que 87 p. 100 des personnes visées par le dépistage ont affirmé être en bonne santé.

[Français]

    Il ne faut pas non plus oublier que les problèmes de santé mentale au sein des Forces canadiennes ne se bornent pas seulement aux traumatismes liés au stress opérationnel. Nous disposons de certains renseignements récents sur le nombre total de patients qui reçoivent actuellement des soins de santé mentale. Les huit cliniques les plus importantes des Forces canadiennes ont fait un suivi de leurs nouveaux patients au cours de la période de cinq mois allant du mois d'août au mois de décembre 2008. Ces données révèlent un total mensuel moyen de 530 nouveaux patients, dont environ 250 sont pris en charge par les programmes psychosociaux qui portent sur des problèmes moins complexes et plus transitoires; environ 210 relèvent des programmes généraux de santé mentale et, en moyenne, 76 sont suivis dans les programmes des CSTSO. Si on présume que ces taux prévalent pendant toute l'année, on peut prévoir qu'environ 6 000 nouveaux patients se présenteront à ces huit cliniques au cours d'une année, et dans la plupart de ces cas, pour un trouble qui n'a aucun rapport avec le déploiement.
(1640)

[Traduction]

    Le deuxième type de nouvelle information que je souhaite vous présenter a trait à la mesure des résultats. Comment pouvons-nous déterminer si les soins que nous offrons sont de haute qualité?
    Nous n'avons pas encore atteint l'objectif fixé quant à la mesure du rendement et, ainsi, nous ne pouvons pas encore faire rapport sur les résultats cliniques directs. Toutefois, dans le but de donner une idée de la qualité, nous avons réalisé des sondages périodiques sur la satisfaction des patients.
    Les données les plus récentes ont été recueillies de manière anonyme par les cinq CSTSO du 12 au 23 janvier derniers. Ainsi, on a demandé à chaque patient consultant des cinq CSTSO de répondre à un sondage dont le questionnaire comportait 19 questions et une section servant à inscrire des commentaires. Au total, 117 réponses ont été reçues.
    En résumé, nous avons constaté que 96 p. 100 des répondants étaient d'accord ou fortement d'accord avec l'affirmation suivante: « Dans l'ensemble, je suis satisfait du soutien et des soins que je reçois ». Une seule personne a déclaré être en désaccord ou fortement en désaccord. En outre, 88 p. 100 des répondants étaient d'accord ou fortement d'accord que « Le soutien et les soins que je reçois répondent à mes besoins », tandis que 2 p. 100 étaient en désaccord ou fortement en désaccord.
    Dans le cadre d'une autre évaluation de la satisfaction des patients, le programme de santé mentale de Halifax a également recueilli des commentaires. À la question de savoir si leur état s'était amélioré, 88 p. 100 des 288 patients qui ont répondu ont affirmé avoir connu une certaine amélioration (27 p. 100), une amélioration modérée (23 p. 100) ou une amélioration considérable (38 p. 100), tandis que 12 ont mentionné que leur état s'était détérioré (3 p. 100) ou était demeuré inchangé (9 p. 100). Un pourcentage élevé (97 p. 100) estimaient que leur conseiller leur avait été quelque peu (18 p. 100), assez (34 p. 100) ou très (45 p. 100) utile.

[Français]

    Nous avons également des preuves que les efforts que nous déployons pour lutter contre les stigmates semblent porter fruit. En effet, la Table ronde des entreprises et de l’économie mondiale sur la toxicomanie et la santé mentale a récemment cité les Forces canadiennes en exemple à cet égard. Bien qu'il n'existe aucun test pour mesurer directement les stigmates, nous avons recueilli des données sur certaines croyances associées aux stigmates auprès de notre personnel qui revenait au pays. Ainsi, plus de 9 000 membres du personnel ont répondu à ces questions, et mes analystes ont été surpris des résultats ainsi compilés.

[Traduction]

    Au total, 24 p. 100 ont affirmé croire que les membres de leur unité auraient peut-être moins confiance en eux s'ils souffraient d'un trouble de santé mentale. Il s'agit du pourcentage le plus élevé parmi les 10 questions posées. En effet, seuls 14 p. 100 ont dit être inquiets du fait qu'ils seraient peut-être perçus comme faibles, 12 p. 100 étaient préoccupés de la possibilité d'entrave à leur carrière, 10 p. 100 ont manifesté un manque de confiance envers les spécialistes en santé mentale et seuls 6 p. 100 estimaient que les soins de santé mentale n'avaient aucun effet. Le résultat le plus intéressant a sans doute trait à la réponse à la question de savoir si le répondant serait moins compétent s'il devait se prévaloir d'une thérapie. Seuls 7 p. 100 ont admis que ce serait le cas.
    Dans les faits, la situation est peut-être moins réjouissante. Toutefois, cette réponse indique, et je tiens à préciser que ce sondage était entièrement anonyme, que la très grande majorité de notre personnel n'est pas disposé à faire preuve d'une telle impartialité. Il semble donc clair que la « norme » ambiante au sein des FC consiste à appuyer ceux et celles qui souffrent de problèmes de santé mentale.
    Le troisième point que je souhaite aborder a trait aux changements qu'on a apportés ou qu'on est en train d'apporter. Le programme de santé mentale RX 2000 a permis de réaliser des progrès considérables en matière de recrutement: nous disposons aujourd'hui au total de 361 prestataires de soins de santé mentale répartis partout au pays. Nous n'avons pas encore atteint notre objectif, qui est de 447 prestataires, mais il s'agit certes d'une amélioration digne de mention, si on songe aux 229 prestataires sur lesquels nous pouvions compter au début du programme. Je sais qu'on a manifesté un intérêt particulier à l'égard de Petawawa. Ainsi, je suis enchantée d'indiquer que des progrès importants ont été réalisés à cet endroit, et que ce n'est pas terminé.
    Un travailleur social supérieur des FC a été affecté au printemps 2008 comme gestionnaire des soins de santé mentale et chargé de faire preuve d'un leadership marqué. Un soutien clinique supplémentaire a été, et continue d'être offert par les cliniciens d'Ottawa se rendant à Petawawa à intervalles réguliers, et on est en train de mettre en place une liaison de télé-santé mentale qui sera sans doute en service au printemps prochain. L'été prochain, nous allons affecter à Petawawa trois autres travailleurs sociaux et un psychiatre des FC.

[Français]

    Grâce à la nomination du colonel Allan Darch — qui est parmi nous aujourd'hui — au poste de directeur des Services de santé mentale des Forces canadiennes, les efforts déployés par tous ces prestataires de services de santé mentale seront mieux coordonnés. Puisque le travail du colonel Darch sera entièrement consacré à ces services, ceux-ci jouiront d'une plus grande attention et d'une meilleure communication entre les intervenants. En sa qualité de conseiller spécial pour les victimes de stress opérationnel, le lieutenant-colonel Grenier, également assis à la table avec nous, continue de conseiller directement le chef du personnel militaire pour les aspects non cliniques des soins prodigués à notre personnel souffrant de troubles de santé mentale. Le lieutenant-colonel Grenier concentre ses efforts à l'éducation par l'entremise du Bureau des conférenciers interarmées, qui a rejoint 8 000 membres des Forces canadiennes en 2008 et qui compte en servir plus de 12 000 cette année. Son prochain projet porte sur les déterminants sociaux de la santé mentale. Ensemble, le colonel Darch et le lieutenant-colonel Grenier tentent activement de créer des liens avec leurs homologues américains, notamment avec le chef du Centre of Excellence on Mental Health du secrétaire à la Défense des États-Unis.
(1645)

[Traduction]

    Nous avons donné une nouvelle orientation au Comité consultatif du soutien social aux victimes de stress opérationnel (SSVSO) et nous avons élargi son mandat. Dorénavant, on parlera du Comité consultatif sur la santé mentale du MDN, d'ACC et de la GRC, qui a tenu sa première réunion la semaine dernière. Le président du Comité, le colonel Don Ethell (à la retraite) est présent, lui aussi, aujourd'hui. Vous êtes donc en mesure de constater que les canaux de communication sont ouverts et qu'il existe des moyens pour favoriser l'échange des divers points de vue. Du reste, je sais que le colonel Ethell est en contact direct avec le chef du personnel militaire et qu'ils travaillent ensemble depuis longtemps.
    Afin de mieux tenir compte de la diversité des personnes touchées par des tragédies, le programme d'aide aux membres des FC — le service confidentiel 1-800 qui donne accès jusqu'à huit séances de counselling — a été étendu aux parents ainsi qu'aux frères et soeurs des militaires tués ou blessés au cours de leur service. Il convient de préciser qu'aucune augmentation apparente de la demande pour ce service n'a été constatée au cours de la dernière décennie. Les membres de la force régulière en constituent la clientèle la plus importante, suivis de près par les membres des familles. Les problèmes conjugaux et les troubles psychologiques occupent, respectivement, le premier et le deuxième rangs pour ce qui est du recours à ce service.
    Dans l'ensemble, je crois que les FC jouissent maintenant d'une excellente capacité, attentive au chevauchement et aux approches proactives, pour ce qui est de venir en aide aux militaires dans le besoin. Je ne serai cependant pas surprise si on me disait que mes propos aujourd'hui diffèrent des témoignages que vous avez entendus d'autres personnes. Il serait tout naturel de conclure que quelqu'un a, à tout le moins, manqué de transparence. Je ne crois pas que ce soit le cas et, d'ici la fin de mon allocution, je vais tenter d'expliquer l'origine de cet écart évident, même si tout le monde expose la vérité telle qu'il la comprend et même si tout le monde a les meilleures intentions du monde.
    D'abord, j'attirerais votre attention sur le fait que, peu importe les soins prodigués à nos patients pour assurer leur bien-être, peu importe la qualité de notre organisation, le niveau de dotation et l'équipement mis à notre disposition pour les soigner, certains d'entre eux ne se rétabliront malheureusement pas. Ce n'est pas la faute du système ni celle du prestataire, non plus que celle des patients. C'est qu'ils souffrent de troubles difficiles à traiter. L'état d'avancement actuel d'essence médicale ne permet pas de traitement en santé mentale qui soit parfait.
    Lorsqu'un patient soigné pour une insuffisance coronaire a une crise cardiaque, on ne suppose pas que les soins qui lui ont été prodigués étaient inadéquats, ni que son cardiologue a été négligent. Certaines personnes sont plus mal en point que d'autres. Les soins en santé mentale et la maladie mentale devraient être considérés de la même façon.
    J'imagine que vous avez déjà parlé à des patients ou à des parents de patients qui, malheureusement, devaient continuer à se battre. N'oubliez pas: selon nos propres données, environ 12 p. 100 des patients d'une certaine clinique ont déclaré avoir l'impression de ne faire aucun progrès. Loin de moi l'idée de minimiser leurs difficultés, mais conclure qu'il existe un problème systémique en se fondant sur l'extrapolation de quelques cas — aussi probants soient-ils — est un raisonnement erroné qui pourrait, de surcroît, mettre en danger les services que l'on tente d'améliorer.
    Il existe un phénomène connu sous l'expression « disponibilité heuristique » qui génère un puissant facteur cognitif. En termes simples, cela veut dire que notre perception de l'ampleur d'un problème dépend grandement du degré d'accessibilité des exemples dont on prend conscience. Si tout le monde connaît un ou deux exemples de personnes qui estiment ne pas avoir été soignées comme elles souhaitaient l'être, on a tendance à conclure à l'existence d'un problème systémique.
    Compte tenu des nombreux reportages sur certains cas, il est évident que les observateurs intéressés sont tous au courant d'au moins un patient pour qui la situation ne s'est pas encore améliorée; pourtant, les données objectives dévoilent une toute autre histoire. Il faut traiter les problèmes particuliers au cas par cas, tout en prenant soin de protéger l'intégrité du système. Il est bien évident que les problèmes systémiques commandent des solutions systémiques.
    Je consacre beaucoup de temps à cette question, parce que je crois fermement que les FC sont dotées d'un excellent régime de soins de santé mentale. Ce dernier requiert toutefois deux éléments: d'abord, poursuivre ses activités, puis apporter les changements locaux ou cumulatifs nécessaires. Nous devons préserver la confiance des membres des FC de façon qu'ils se présentent d'eux-mêmes pour obtenir nos soins, et nous devons conserver la détermination de nos professionnels de la santé. En continuant de décrire le verre comme étant presque vide alors qu'en réalité, il est plein à 90 p. 100, on remet en question ces deux éléments essentiels.
    J'invite les membres du Comité à prendre en considération toutes les données objectives qui leur ont été présentées avant de tirer une conclusion.
    Je vous remercie de votre attention et répondrai avec plaisir à vos questions.
(1650)
    Merci beaucoup.
    Nous commençons une première série de questions de sept minutes chacune; ce sera tout d'abord M. Coderre.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Général, colonel, merci de votre présence.
    Il est important de s'occuper des 10 p. 100 et de s'assurer que ça ne devienne pas un chronicle gap.

[Traduction]

    Comme vous l'avez remarqué, nous avons parlé tout à l'heure à l'ombudsman et à ses collaborateurs, qui ont beaucoup parlé des problèmes qui passent par les mailles du filet. Évidemment, nous avons ici affaire non pas à des statistiques, mais à des êtres humains; on aurait tort de l'oublier.
    Il y a plusieurs questions dont j'aimerais parler. Je sais qu'on ne doit pas aborder des dossiers personnels, mais le premier cas concerne un incident qui s'est produit il y a quelques semaines à Valcartier. Comme il y a eu une rotation importante qui a débuté le 20 février, on a eu, entre cette date et le mois de mars, un premier cas, un deuxième puis un troisième. La première fois, c'est un incident. La deuxième, c'est peut-être une coïncidence. Mais au bout de trois fois, je ne prétends pas que ce soit une tendance, mais c'est assez inquiétant.
    Vous avez parlé non seulement du patient, mais également du sort de la famille, et vous avez eu raison de le faire. Il faut en tenir compte. Comment expliquez-vous les problèmes de la famille? Est-ce à cause du stress? Est-ce parce qu'on a peut-être oublié certains outils de prévention? On ne sait jamais quand le problème va apparaître. Nous en avons déjà parlé lorsque vous êtes venu pour la première fois. Il serait important, pour l'information de nos collègues, que vous nous parliez spécifiquement de cette question de rotation et des effets qu'elle a sur nos militaires.
    Je vais commencer, et ceux qui ont d'autres renseignements pourront compléter ma réponse.
    Je dois reconnaître que je suis informé de ces cas que par les articles des médias, et je prends tout ce que je vois dans les médias avec des réserves importantes. Je suis à peu près certaine que ces incidents avec la police se sont produits et que des militaires se sont barricadés dans leur foyer, mais je n'ai aucun détail sur ce qu'ils étaient en train de vivre à ce moment-là, sinon qu'ils étaient sur la liste de rotation. Il nous manque beaucoup d'information contextuelle.
    Par cette réponse, ne trouvez-vous pas que certains problèmes sont passés à travers les mailles du filet?
    Non, je ne pense pas, car si nous sommes organisés de cette façon, c'est parce que des ressources sont en place au niveau local. Évidemment, ce qui s'est produit est dramatique et tout le monde souhaite qu'on puisse prévenir ce genre d'incident, mais ce n'est pas toujours possible et il faut donc réagir à la situation quand elle se produit.
    Le premier niveau de réaction à ce genre d'incident est l'intervention de la police, mais en définitive, une fois que les individus sont placés en détention par la police, on passe à l'étape suivante, c'est-à-dire à l'évaluation de l'état de santé mentale. Selon les résultats de cette évaluation, on peut passer à l'étape suivante.
    Un expert en santé mentale vous dirait qu'un tel cas constitue une crise. C'est facile à dire, mais avant de parler de crise, il faut atteindre un certain seuil. Mais ce sont des cas d'hospitalisation...
    Nous reconnaissons tous les deux que c'est un problème grave.
    Oui, c'est un problème grave.
    Quelle est la chaîne de commandement? C'était des soldats. C'est un problème grave. Bien sûr, je l'ai moi aussi appris par les médias, mais des gens dans leur entourage en ont parlé également, et c'est très grave.
    Pour notre gouverne, quelles mesures avez-vous prises? Est-ce qu'elles s'appliquent à l'unité de Valcartier? Comment gérez-vous ce genre de problème? Puisque vous êtes au courant de la situation, vous savez sans doute ce qui s'est passé depuis, j'imagine.
    Ces personnes seraient examinées dans une institution civile qui dispose d'un service de santé mentale. Selon l'état du patient, il faudra peut-être une chambre sécurisée, et il n'y en a pas beaucoup. Le psychiatre civil de garde prescrira un traitement immédiat. Lorsque le patient se sera un peu calmé, il sera transféré à la clinique de santé mentale de Valcartier.
    Maintenant, en ce qui concerne le rôle de la chaîne de commandement, il y a évidemment un suivi qui se fait et nous évaluons les changements qu'il faudrait apporter au plan de formation au pré-déploiement immédiat. Ce n'est pas difficile de prendre la décision de ne pas envoyer cette personne en rotation. Ça, c'est la partie facile. Mais qu'arrive-t-il ensuite?
(1655)

[Français]

    Le problème général que je vois, c'est qu'on est sur le point d'effectuer une rotation, si ce n'est pas déjà commencé. Depuis le début, vous dites qu'un événement peut provoquer un certain stress. Ils s'en vont en Afghanistan pour une deuxième ou une troisième fois, et c'est à ce moment-là qu'ils peuvent atteindre un breaking point.
    Je ne veux pas parler de ces gens en particulier, mais je veux comprendre. Si on a de la difficulté à assurer le suivi d'un dossier, que la main gauche ne sait pas ce que fait la main droite... Il faut avoir un rapport adéquat pour améliorer le système et aider les gens. On parle d'individus.
    Colonel Grenier, a-t-on fait de la prévention? Si certains cas se produisent, c'est peut-être parce que des choses ne sont pas adéquates. Que faites-vous, lorsque de ce genre de situation survient?
    Ce genre de situation ne constitue pas un cas isolé. En fait, on a lancé en 2000-2001 un programme de soutien social par les pairs. Depuis la venue du colonel Darch et du lieutenant-colonel Jetly, psychiatre, des liens se sont bâtis. À mon niveau, il existe maintenant des liens très étroits entre le programme de soutien non clinique et les programmes cliniques de santé mentale. Ce serait vous mentir si je vous disais qu'au cours des dix dernières années, on a connu une harmonie totale entre la vision des expériences vécues par nous, soldats et pairs, et les solutions entrevues par les cliniciens.
    Par contre, je crois que les événements, notamment le fait d'avoir assigné les bonnes personnes aux bons endroits et au bon moment, ont permis de resserrer ces liens. Personnellement, j'entrevois un rapprochement des interventions non cliniques sous ma tutelle et des interventions cliniques. Peut-être s'agit-il d'une solution systémique.
    Pour ce qui est des patients, on dit depuis plusieurs années que les soldats ont une vie entre deux affectations. On ne veut pas que les médecins portent atteinte à la confidentialité de leurs patients. Par ailleurs, on préconise une approche qui englobe un peu plus la vie de l'individu. On a mis en place des balises et des mesures de soutien pour s'assurer que les patients, après qu'ils ont quitté la clinique, respectent les traitements et les thérapies.

[Traduction]

    Je crois que l'adhésion au traitement par le patient est un gros problème.

[Français]

    Je ne prétends pas que ce rapprochement soit la solution. Comme vous le savez, au cours des dernières années, j'entrevoyais cela comme un verre à moitié vide. Aujourd'hui, j'entrevois cela un peu plus comme un verre à moitié plein, en raison non seulement du meilleur fonctionnement de ma thérapie, mais aussi de ce rapprochement. On ne semble plus se maintenir dans des camps opposés, et j'en suis fier. Finalement, nos coordonnateurs sur le terrain jouissent d'une complicité un peu plus solide. Cela va réparer un grand maillon de ce filet somme toute un peu large. Je ne prétends pas que ce soit la solution, mais de mon point de vue, c'est un aspect positif.

[Traduction]

    Merci. C'est très bien.
    Passons à M. Bachand.

[Français]

    Merci, monsieur le président.
    Je veux souhaiter la bienvenue au général et à ses acolytes.
    Le 5 février 2002, l'ombudsman a dévoilé un rapport qui s'intitule Traitement systémique des membres des FC atteints du SSPT. Plusieurs mois plus tard, en décembre 2002, le ministère de la Défense nationale a réagi à chacune des 31 recommandations. J'ai ce document ici. Voici le portrait de la réaction à ces recommandations. On voulait suggérer des modifications à seulement trois de ces 31 recommandations. Quant aux 28 autres, on a déclaré qu'on les soutenait, voire qu'on les soutenait pleinement ou entièrement.
    Comment expliquez-vous que sept ans plus tard, seulement 13 de ces recommandations aient été mises en oeuvre? Du reste, 7 ont été mises en oeuvre partiellement alors que 11 n'ont pas été mises en oeuvre.
    Il m'apparaît important de dire immédiatement une chose, à la suite de votre présentation. Je ne pense pas que ce soit un problème superficiel. J'estime plutôt qu'il s'agit d'un problème fondamental. Je me demande à quoi c'est attribuable. Par exemple, pourrait-on penser qu'il s'agit d'un problème culturel où le stéréotype de la résilience serait omniprésent? J'ai fait des pieds et des mains pour trouver un dictionnaire ici. On y explique que « résilience » était à l'origine un terme servant à expliquer la résistance des matériaux au choc. Sa première publication dans le domaine psychologique date de 1939-1945, et c'est Boris Cyrulnik qui développe le concept de la résilience en psychologie à partir de l'observation des survivants des camps de concentration. La résilience serait donc le résultat de multiples processus qui viennent interrompre des trajectoires négatives.
    Dans l'état-major canadien, on veut tellement développer la résilience qu'on en vient à nier le véritable problème, qui demeure omniprésent. Nous avons entendu énormément de témoignages nous confirmant qu'il ne s'agit pas de petites exceptions. Ce qu'on a entendu est contraire à ce que vous dites. Il est faux de prétendre que 98 p. 100 des gens qui ont témoigné ont dit avoir reçu les traitements adéquats. C'est plutôt le contraire. Peut-être est-ce à titre préventif que vous avez vous-même déclaré que cela pouvait parfois paraître contraire à ce qu'on avait entendu.
    L'état-major canadien mise tellement sur la résilience pour ses forces armées qu'il essaie par le fait même d'atténuer le processus fondamental et la réalité du syndrome de stress post-traumatique. Êtes-vous d'accord avec moi?
(1700)
    Monsieur, je vous répondrai en anglais, car je juge important de choisir mes mots soigneusement.

[Traduction]

    Je ne crois pas que le personnel supérieur d'état-major des Forces canadiennes s'intéresse à la résilience, ou au concept que vous avez décrit, pour les raisons que vous lui attribuez. L'état-major des Forces canadiennes cherche en bout de ligne à avoir des membres prêts à participer à des opérations, dans tous les sens du mot, et cela veut dire qu'ils doivent avoir confiance en ce qu'ils font. Ils doivent avoir un certain esprit de corps. Ils doivent avoir confiance en leur formation, leur leadership et peut-être qu'en effet cela peut les mener à nier leurs propres émotions. Mais je ne crois pas que cela aille aussi loin que vous le laissez entendre et ce n'est certainement pas parce qu'ils veulent nier l'ampleur des problèmes qu'ils vivent.
    Vous avez parlé de la résilience. C'est un concept formidable. Nous aimerions tous prévenir le trouble de stress post-traumatique. Malheureusement, si vous lisez la littérature scientifique, il n'existe même pas de définition acceptée de la résilience, encore moins de façon de la mesurer dans une étude scientifique pour déterminer quelles interventions encouragent la résilience ou la découragent. D'après ce que l'on sait aujourd'hui, le mieux que l'on puisse faire, c'est d'offrir une formation dure et réaliste pour le groupe qui part, afin d'établir une confiance entre les membres de l'équipe.
    Je regrette que vous n'acceptiez pas la description optimiste que je vous ai faite des soins de santé dans nos cliniques. Vous serez heureux d'apprendre que Agrément Canada, l'institution nationale qui évalue la qualité des soins fournis par les hôpitaux et les cliniques canadiennes, a visité notre clinique d'Ottawa ces deux derniers jours. J'ai participé à leur séance d'information cet après-midi, à laquelle ils ont encensé notre clinique de santé mentale pour son travail extraordinaire — c'est une des meilleures cliniques de santé mentale qu'ils aient visitées.

[Français]

    Je continuerais en...

[Traduction]

    Tout le monde vise la perfection, et malheureusement, cela fait partie de mes responsabilités de vous annoncer qu'en 2009, la perfection en matière de détection, de prévention et de traitement de santé mentale, ça n'existe pas.

[Français]

    Il ne faudrait toutefois pas que cela serve d'excuse pour déformer la réalité. Un problème majeur demeure. Beaucoup de gens nous disent vivre avec le syndrome de stress post-traumatique.
    Il importe de s'attarder à la véritable intention du ministère. Je vous donne un autre exemple. En 2002, vous disiez qu'il était extrêmement important d'avoir un système d'information sur la santé et une banque de données. Comment se fait-il que sept ans après, on n'ait toujours pas cette banque de données? Pourtant, en 2002, le ministère avait dit soutenir entièrement cette recommandation. N'y a-t-il pas des tentatives non pas de cover-up mais d'atténuation de ce qui se passe dans les Forces armées canadiennes? En tant que députés et législateurs, on est en droit de s'interroger sur les véritables intentions du ministère.
    Je ne veux pas vous faire un procès d'intention. Toutefois, je ne peux faire autrement que de constater qu'il n'y a toujours pas de banque de données sept ans plus tard, en 2009, bien que le ministère ait affirmé en 2002 en vouloir une.
    Je vous laisse maintenant répondre.

[Traduction]

    Puis-je répondre, monsieur le président?
(1705)
    Rapidement, si vous le pouvez.
    Je demanderais à M. Bachand s'il a déjà participé à la gestion ou à la mise en place d'un grand projet de technologie de l'information. Le système d'information sur la santé des Forces canadiennes en est maintenant à la troisième et dernière phase de sa mise en oeuvre. Le projet prendra fin dans environ un an et un mois, et à ce moment-là nous aurons... C'est comme si on construisait un réseau d'égouts et qu'on allait ensuite mettre l'eau en marche dans l'année qui suit. Nous avons donc passé tout ce temps à creuser et à installer les tuyaux d'égouts, et la quantité d'information utile va tout simplement exploser, mais il nous reste encore une autre année avant de terminer.
    Merci beaucoup.
    Madame Black.
    Je vais continuer dans la même veine, car nous avons eu ici l'ex-ombudsman par intérim avant vous et elle nous a donné un autre rapport. Ce rapport a été remis au ministre en septembre 2008 et il a été publié en décembre. L'ombudsman militaire demande encore une fois la création d'une base de données pour déterminer le nombre d'employés qui sont touchés par le problème de stress. C'est ce qui avait été recommandé en 2002, mais cela n'a jamais été fait.
    J'ai ici une citation d'un article d'Helen Branswell de la Presse canadienne. Elle cite un haut fonctionnaire des Affaires publiques au ministère de la Défense nationale, le major André Berdais, qui lui a répondu au sujet de ce genre de données. Ça porte sur une étude qui a été faite aux États-Unis. Berdais a déclaré que ce genre de données n'étaient pas recueillies par le ministère de la Défense nationale et qu'elles « n'étaient pas essentielles à l'appui de notre responsabilité principale qui consiste à soigner les patients ».
    Contrairement à ce que nous avons entendu aujourd'hui, j'estime que cela indique qu'on hésite à mettre en oeuvre cette recommandation qui date déjà de sept ans. Je voudrais savoir si ce que le major Berdais a déclaré constitue toujours la position du ministère de la Défense nationale et comment on peut justifier une telle chose alors que l'ombudsman a déclaré clairement qu'il était absolument essentiel de recueillir ce genre de données pour faire face efficacement aux troubles post-traumatiques et aux problèmes de stress opérationnel?
    Je vais répondre en faisant deux commentaires, madame.
    Tout d'abord, André Berdais est mon officier des Affaires publiques. Il travaille pour moi et j'approuve toujours au préalable toute déclaration qu'il fait.
    La décision de ne pas établir et créer une mini-base de données distincte du projet des systèmes d'information sur la santé est une décision que j'ai prise dans le cadre de mon leadership, car pour ce faire j'aurais dû utiliser les membres du personnel alors que j'en avais besoin ailleurs. Le fait est que j'ai besoin de toute personne intelligente sur qui je peux mettre la main pour faire avancer ce grand projet. Il y a eu des défis à relever avec les échéanciers et... Je ne suis pas assez technophile pour faire le travail moi-même. Nous faisons tout ce que nous pouvons. On a donc décidé de ne pas détourner les efforts dont nous avons vraiment besoin pour mener à bien ce gros projet.
    Deuxièmement, nous ne suivons pas les patients avec la base de données nationale. Les patients sont suivis, surveillés au niveau clinique. Oui, j'aimerais beaucoup avoir d'excellentes données qui me permettaient de dire n'importe quel jour de la semaine combien de patients souffrent de dépression et qui a eu une consultation la semaine dernière pour cause de dépression. J'aimerais beaucoup avoir ces données. Cependant, je ne crois pas que cela ferait une très grande différence pour ce qui est des soins que reçoivent les patients individuellement.
(1710)
    Vous confirmez donc ce qu'a déclaré votre officier des Affaires publiques.
    Oui.
    Vous nous avez dit plus tôt que vous tenez à entretenir de bonnes relations avec vos homologues américains, pour ces questions. Un rapport a été produit par l'Institute of Medicine, un organisme américain, à la demande du U.S. Department of Veterans Affairs. Je pense qu'il a été publié il y a quelques mois, soit à la mi-décembre 2008. On y rapporte que les traumatismes cérébraux sont typiques des guerres en Afghanistan et en Irak, et que ceux qui en sont victimes sont susceptibles de subir aussi toute une gamme de répercussions médicales.
    Cet organisme, l'Institute of Medicine, affirme que les militaires qui subissent même de légers traumatismes cérébraux peuvent ensuite souffrir de la maladie d'Alzheimer, de démence, de symptômes rappelant la maladie de Parkinson, et qui sont plus à risque d'être atteints de troubles convulsifs et de psychoses. En outre, les personnes qui ont même de légers traumatismes cérébraux sont plus susceptibles d'avoir un trouble de stress post-traumatique.
    Dans l'étude de 2002, un sondage sur la santé mentale a été fait, comme suivi. D'après l'ombudsman, cette information est désuète puisqu'elle remonte à sept ans, avant les combats en Afghanistan.
    Le ministère effectuera-t-il sa propre étude? Les chiffres que vous nous avez fournis plus tôt tiennent compte de la participation de volontaires. Il ne s'agit pas d'une étude médicale et scientifique. Y aura-t-il, comme le recommande l'ombudsman, une nouvelle étude sur la santé mentale au sein des Forces canadiennes, à la lumière de ce qui fait maintenant huit ans de combat en Afghanistan?
    Votre question comprend de nombreuses questions implicites. En bref, oui, nous sommes à recueillir des données sur le système d'information sur la santé et les habitudes de vie dans les Forces canadiennes. J'ai des copies de l'étude en anglais et en français et je peux les remettre au greffier.
    C'est une période de collecte de données assez longue, et je crois que 50 des questions se rapportent à la santé mentale, ciblant particulièrement le TSPT et la dépression, puisque c'était les deux principaux problèmes constatés dans l'étude de 2002. Cette étude se fera tous les deux ans. Elle comprend aussi des questions relatives au vécu pendant les opérations et aux traumatismes cérébraux qui y sont associés.
    Au sujet des traumatismes cérébraux, pour commencer, si vous en êtes victime, qu'ils soient légers ou graves, croyez-moi, vous le saurez parce que vous serez hospitalisé. Les victimes sont inconscientes. Elles ont d'importants déficits neurologiques en raison de cette lésion et ne sont pas difficiles à trouver. Après un traumatisme cérébral, la convalescence peut-être très... Pensez simplement au capitaine Greene. Il a subi un traumatisme cérébral grave.
    Mais vous parlez ici de traumatismes légers...
    Oui. Nous avons eu une conférence pancanadienne sur la question, en avril 2008. Depuis, nous avons adopté pour l'Afghanistan des outils d'aide à la décision, des algorithmes qui permettent à nos responsables sur le terrain de déterminer s'il y a lieu de s'inquiéter.
    Vous avez raison. Je dis qu'il y a une association entre le traumatisme cérébral et le TSPT et c'est assez facile à comprendre: le traumatisme cérébral est souvent occasionné par une explosion dont on était à proximité. Il s'agit d'un stress grave qui peut aussi causer le TSPT. Il n'est donc pas étonnant qu'il y ait un lien...
    Avez-vous lu l'étude?
    Oui, je l'ai lue.
    Je suis désolé, vous aurez un autre tour.
    Nous passons au côté ministériel, Mme Gallant.
    Monsieur le président, je vais partager mon temps avec M. Hawn.
    Pour commencer, je tiens à féliciter le colonel Ethell de son travail dans le domaine du traumatisme lié au stress opérationnel ainsi que de ses fonctions accrues dans l'éventail complet des services de santé mentale offerts à nos soldats.
    Je félicite également le colonel Grenier. Pendant bon nombre d'années, vous avez prêché dans le désert au sujet du TSPT, mais grâce à votre ténacité à aider vos collègues soldats, vous avez pu amener ce dossier devant le Comité permanent de la défense de la Chambre des communes.
    Le 15 avril de l'an dernier, le Comité des anciens combattants s'est rendu à la base de Petawawa. Parmi les différents témoins que le Comité a entendus, il y avait des soldats qui ont été victimes de TSPT. Ils nous ont fait part de leurs expériences dans des audiences à huis clos. L'un de ces soldats avait été blessé il y avait plus d'un an. Il avait voyagé dans un avion de transport militaire, d'autres étaient décédés, lui avait survécu. Il réclamait de l'aide psychologique et psychiatrique depuis plus d'un an, et c'était la première fois ce jour-là, alors que comme par hasard le Comité des anciens combattants était sur place, qu'il avait eu son premier rendez-vous avec un spécialiste. Mais c'était trop tard pour lui, puisqu'il avait déjà présenté une demande de libération pour raison médicale.
    La semaine dernière, nous avons entendu le général Semianiw, qui a déclaré ce qui suit:
[Traduction] On a décidé, pas dans les quatre dernières années, mais auparavant, de ne pas établir de clinique pour les traumatismes liés au stress opérationnel à Petawawa. Avec le recul, c'était probablement une mauvaise décision. Nous constatons aujourd'hui que ç'aurait été une bonne chose d'avoir une clinique pour le traumatisme lié au stress opérationnel à Petawawa. Mais il n'y en a pas eue, et nous essayons de corriger le problème afin que nos hommes et nos femmes en uniforme puissent obtenir les soins dont ils ont besoin à Petawawa.
    Aujourd'hui, l'ombudsman militaire vient de nous dire que plus de 8 500 soldats de la base de Petawawa ont été déployés en Afghanistan. Que pouvez-vous dire à notre comité, mais surtout aux mères, aux pères, aux épouses et époux et aux enfants de nos soldats qui commencent à revenir pour les rassurer sur le fait que nos soldats recevront les soins médicaux dont ils ont besoin, tant sur le plan psychologique que physique?
(1715)
    Je vais prendre le risque de ne pas être d'accord avec le général Semianiw. Quand on décide de l'endroit où installer les grands centres de thérapie pour le traumatisme lié au stress opérationnel, il est très important de tenir compte de la proximité par rapport à la population à risque, mais il faut aussi être réaliste quant à l'endroit où se trouvent les ressources nécessaires.
    Je sais que Petawawa n'est situé qu'à deux heures de route d'Ottawa, mais nous avons essayé sans grand succès, malheureusement, d'embaucher des gens pour offrir ces soins, depuis trois ou quatre ans. Si nous affectons des travailleurs sociaux militaires et un psychiatre militaire à la base cet été, c'est que nous n'arrivons pas à attirer des civils pour fournir les services à Petawawa. C'est pourtant un très bel endroit, dans la vallée supérieure de l'Outaouais, mais nous n'avons pas réussi à attirer de civils.
    Si nous avions décidé d'ouvrir le CSTSO à Petawawa en 1999, le centre n'aurait eu que la moitié de l'effectif qu'il a maintenant à Ottawa. L'idéal serait de regrouper tous les fournisseurs de services là où on le veut, mais il vaut mieux les avoir à proximité que de ne pas en avoir du tout dans notre organisation. Il est exact que 8 500 personnes ont été affectées à partir de Petawawa, mais la population totale de la base compte moins d'âmes que cela. Ce chiffre tient compte des affectations et des rotations.
    Nous poursuivons nos efforts pour construire la clinique à Petawawa. Quand nous aurons achevé ce que nous prévoyons pour cet été, nous aurons un programme complet de santé mentale générale. Il y a bien sûr un programme complet d'aide psychosociale. La seule chose qui manquera, ce sera l'appellation de CSTSO, mais les services comprendront tous les éléments d'un CSTSO.
    Je vais maintenant laisser la parole au directeur, qui me corrigera peut-être à ce sujet. Pour ma part, je ne vois pas pourquoi nous ne pourrions pas mettre en place les protocoles d'évaluation à Petawawa même.
    L'un des problèmes, dans le cas de Petawawa, comme l'a dit le général Jaeger, c'est d'y attirer suffisamment de professionnels des soins de santé mentale. Le problème vient en partie de ce qu'un certain nombre de professionnels de santé mentale dont nous dépendons sont des civils. À Petawawa, nous devons tenir compte de ce qu'il y a une pénurie de professionnels de la santé mentale dans l'ensemble du pays. On s'arrache leurs services. Petawawa est un endroit relativement isolé, et les salaires que nous pouvons verser aux termes des lignes directrices du Conseil du Trésor sont inférieurs à ce que certaines organisations civiles peuvent payer. Nous avons donc beaucoup de difficulté à amener des professionnels civils de la santé mentale à travailler à Petawawa.
    Pour améliorer la situation, notre CSPSO d'Ottawa exploite des cliniques satellites à Petawawa, et les professionnels des soins de santé se rendent dans ces cliniques. L'un des principaux psychiatres des Forces canadiennes consacre au moins une journée par semaine à la base de Petawawa. Nous avons un projet pilote de consultation à distance qui permettra de faire le lien entre Ottawa et Petawawa. Grâce à des caméras médicales à haute définition, les soldats pourront consulter à distance des professionnels de la santé mentale à Ottawa. Nous reconnaissons que ce n'est pas l'idéal pour les évaluations initiales, mais cela peut s'avérer utile pour les soins courants.
    L'été dernier, nous avons affecté à la base de Petawawa un travailleur social principal qui est chargé de diriger les professionnels des soins de santé mentale et de diriger la clinique. En soi, cela a grandement amélioré les choses. Cet été, nous affecterons trois autres travailleurs sociaux et un psychiatre militaire, ce qui augmentera grandement les ressources. Par contre, nous n'avons pas été en mesure de combler tous les postes civils, et nous allons donc en transférer cinq à Ottawa: un poste de psychiatre, deux de psychologues et deux autres de travailleurs sociaux. Ces postes n'ont pas été comblés. Il nous sera possible de les combler à Ottawa. Ces travailleurs pourront par la suite travailler aux consultations à distance entre Ottawa et Petawawa. Ils pourront également travailler dans les cliniques satellites à Petawawa.
    En outre, la nouvelle direction générale des soins de santé mentale dispose d'un lieutenant-colonel qui peut passer un maximum de deux jours par semaine à Petawawa, pour offrir des services de psychiatrie.
    Il nous est également possible de transporter les patients à Ottawa pour qu'ils y reçoivent de l'aide. Les deux villes ne sont pas très éloignées l'une de l'autre. Lorsque c'est possible, nous pouvons nous occuper de ce transport.
(1720)
    Nous respectons bien notre horaire.
    Passons à M. Wilfert, puis nous reviendrons au parti ministériel.
    Merci, monsieur le président.
    Dans le rapport qu'elle a publié en décembre dernier, Le combat contre les traumatismes liés au stress opérationnel , l'ombudsman examine quels objectifs le ministère a atteints ou n'a pas atteints jusqu'à maintenant.
    Il est bien difficile d'établir un ordre de priorité pour ces 31 recommandations, et personne ne s'attend à ce qu'elles soient toutes appliquées instantanément. Toutefois, compte tenu de ce que nous sommes toujours présents en Afghanistan et qu'un nombre croissant de cas semblables reviennent au pays, cela laisse entendre dans l'ensemble que nous devons être mieux préparés pour traiter les militaires qui reviennent au Canada. Dans son rapport, elle exprime clairement ce besoin, afin que ces soldats puissent « demeurer des membres actifs de la société canadienne » que ce soit dans les Forces armées ou comme civils. Elle dit que c'est absolument essentiel et que nous n'avons encore qu'un système qui fonctionne au cas par cas.
    J'aimerais avoir de plus amples précisions sur le système de données, avant de passer à la recommandation 9. J'ai peut-être mal compris ce qui a été dit au sujet du système de données. J'estime que c'est l'élément le plus important si l'on veut comprendre l'information dont on dispose actuellement en ce qui concerne le personnel touché par ces traumatismes. Pouvez-vous nous dire quand ce système sera achevé? Cela me semble un élément essentiel, compte tenu de ce que le nombre des blessés augmente, surtout chez ceux qui reviennent de la mission en Afghanistan.
    En ce qui concerne le SISFC, son pouvoir de dépenser se termine en avril ou mai 2010. Alors il reste environ un an à ce projet. Ensuite, il nous faudra environ six mois afin de savoir comment très bien utiliser les données du système. C'est l'échéancier le plus précis que je peux vous donner.
    Nous avons d'autres sources de données. Notre compréhension de la charge de travail... On nous informe, comme je l'ai dit, du nombre de nouveaux patients qui arrivent des cliniques. Nous faisons un dépistage amélioré post-déploiement, ce n'est pas un outil de diagnostic, c'est une méthode de dépistage. Par nature, les méthodes de dépistage résultent plus de faux résultats positifs que de faux résultats négatifs. Il vaut mieux être prudent et dire qu'il y a un problème plutôt que de le nier. Alors nous avons une certaine idée de la taille du problème. Ce que nous ne pouvons pas faire, c'est d'interroger le système pour savoir combien de patients ont été traités cette semaine pour le TSPT.
    En ce qui concerne les enquêtes dont vous avez parlé, que se passe-t-il après six mois ou un an alors que ces personnes souffrent peut-être de symptômes latents, ou sont dans une situation de problèmes familiaux, qu'ils fassent encore partie des forces ou qu'ils soient retournés à la vie civile? Nous avons vu des exemples de telles situations.
    Nous y avons pensé parce que nous savons qu'il y aura des gens qui auront des problèmes après la complétion du dépistage de six mois. Nous nous sommes demandé si nous devions systématiquement faire un autre test de dépistage. Ce dépistage nécessite énormément d'effort. Je ne veux pas dire que cet effort ne serait pas utile parce que ce serait une chose terrible à dire.
    Mais je veux vous présenter des informations encourageantes. J'ai eu l'occasion de consulter tous les dossiers suite à l'incendie qui s'est déclaré sur le Chicoutimi, les dossiers de tous les marins qui étaient à bord du Chicoutimi. Avec le temps, suite à ce feu, un peu plus de 50 p. 100 des marins ont reçu un diagnostic de TSPT. Lors du dépistage amélioré post-déploiement, seulement environ la moitié de ces marins avait reçu un résultat positif. Une des conséquences de ce dépistage obligatoire, c'est que les gens ont beaucoup moins peur de demander des soins de santé mentale, alors peut-être que six mois après le dépistage, lorsqu'ils ont vu que les choses n'allaient pas bien et qu'ils avaient des flachbacks ou des cauchemars, ils ne craignaient pas de se rendre à une clinique ou de faire un appel pour obtenir de l'aide. Je pense que c'est un effet très important du dépistage amélioré post-déploiement, et qui, je l'espère, permet de trouver des solutions aux problèmes que vit l'armée.
(1725)
    Monsieur, je côtoie les forces depuis longtemps — et je ne travaille ni pour le MDN ni pour ACC; je suis bénévole. Je suis le président actuel du Comité consultatif sur la santé mentale. Ce comité avait par le passé deux composantes; il en a maintenant trois, parce que la GRC nous a rejoints la semaine dernière.
    Nous avons fait d'immenses progrès depuis 10 ans en matière de TSO en santé mentale — mais limitons-nous aux TSO pour l'instant — depuis que Grenier a comparu devant le Comité consultatif des Forces canadiennes et a expliqué ce qu'étaient les TSO et les SSBSO. Cela fût inclus dans le rapport Neary qui a mené à la Charte des anciens combattants, dont les Forces canadiennes profitent.
    Ce que je veux dire, et vous et le général Jaeger l'avez déjà souligné, c'est que les choses ne se font pas instantanément.
    Je ne suis pas clinicien. Il y a cinq ans, je me suis regardé dans le miroir et j'ai dit comme bien d'autres, « j'ai un problème ». J'avais vu des choses vraiment horribles. Les jeunes qui reviennent d'Afghanistan ou du Zaïre, ou d'ailleurs, dans six mois ou un an vont peut-être se regarder dans le miroir ou parler à des gens du SSBSO et se demander à qui ils pourraient s'adresser. Ensuite ils iront consulter des professionnels: cliniciens, psychiatres, psychologues ou autres.
    Il n'y a pas que les CSTSO, il y a aussi les cliniques de TSO d'Anciens Combattants Canada. C'est un processus double. En fait, c'est un mélange des deux, et Dieu merci, un soldat ou un ancien combattant peuvent aller à l'une ou l'autre des cliniques. Des anciens combattants, même de la guerre de Corée, surgissent d'on ne sait d'où et disent, « j'ai un problème ». Et ce, grâce à la publicité faite autour du SSPT et des TSO.
    Je ne fais pas ces observations parce que ces trois personnes portent l'uniforme, mais l'approche en santé mentale — les installations et tout le reste dont il a été question aujourd'hui — s'est considérablement améliorée comparativement à il y a huit ou dix ans. Il ne s'agit pas seulement d'un changement de culture, mais également d'un changement physique pour le bien-être des troupes et de leurs familles, et personne n'a encore mentionné les familles qui font partie du mandat du MDN et d'ACC, et elles sont prises en compte.
    Merci, monsieur.
    Nous allons maintenant passer aux députés du parti ministériel, et il semble qu'ensuite cela sera tout.
    Merci, monsieur le président, et merci à vous tous d'être présents.
    Je débuterai en disant que je ne peux laisser M. Bachand présenter des chiffres incorrects. Le rapport de l'ombudsman comprenait 31 recommandations, dont 20 qui ont été mises en oeuvre entièrement ou en partie et 11 qui n'ont pas été mises en oeuvre — voilà les chiffres. Vous pouvez maintenant vous faire une opinion. On a parlé de verre à moitié vide ou à moitié plein. À vous de décider s'il est à moitié plein ou à moitié vide.
    Vous avez parlé des deux intentions du MDN. Général Jaeger, le MDN a-t-il l'intention, idéalement, de remplir le verre?
    Le MDN a toujours pour objectif de répondre aux besoins de tous les patients.
    Pourrons-nous vraiment un jour remplir un tel verre?
    Peut-être d'un coup de baguette magique.
    Et voilà. Serait-ce naturel pour les médias et ceux qui sont dans cette partie du verre qui n'est pas plein, bien que leurs critiques soient justifiées — et elles le sont — et pour les autres personnes au gouvernement ou les médias de se concentrer sur ce chiffre, quel qu'il soit? Que ce soit les derniers 10 p. 100, 5 p. 100, serait-ce normal pour eux de se concentrer sur cette situation pour élaborer leurs critiques, obtenir de la publicité, ou d'autres choses?
    Ce sont des cas très touchants. Il est normal qu'on s'y intéresse. En fait, nous sommes ravis que des gens attirent de nouveau notre attention sur ces personnes, car alors nous pouvons tenter une nouvelle fois de les aider.
    Alors on se concentrera toujours sur la partie qui n'est pas remplie, c'est naturel.
    Le caporal chef Paul Franklin est l'un des témoins qui a comparu devant le Comité, et je pense que tout le monde connaît son cas. Il a beaucoup d'expérience, non seulement dans le système des FC, mais il connaît bien la façon dont les autres pays traitent les soldats handicapés ou blessés — gravement handicapé dans son cas. Il a dit entre autres qu'il était clair qu'il fallait en faire plus. Il faudra toujours en faire plus. Mais il a dit également que les FC traitent beaucoup mieux leurs soldats blessés que n'importe quel autre pays qu'il a visité. Êtes-vous d'accord?
(1730)
    Eh bien, ça fait très plaisir à entendre. Je ne me suis pas rendu sur le terrain afin de comparer les prestations et les soins. Nous avons eu la chance d'accueillir parmi nous un physiatre d'expérience et éminent pour diriger notre programme de réadaptation. Il s'agit du lieutenant-colonel Markus Besemann.
    Il a travaillé d'arrache-pied pour établir des liens avec tous les programmes de rééducation civile et a discuté avec les gens qui y travaillent des besoins de nos soldats revenus de missions afin de pouvoir mesurer leurs capacités et ce dont ils ont besoin pour guérir. Il est en train d'affecter des équipes spécialisées à sept endroits différents dans notre pays. Nous sommes très satisfaits de son travail. Il a une conception vraiment systémique des choses et nous avons vraiment de la chance de pouvoir compter sur lui.
    En tant que professionnel de la médecine, vous traitez de questions médicales. En tant que militaire professionnel, vous traitez de questions militaires. La réunion de ces deux secteurs d'activité sont rares ailleurs.
    En tant que professionnel à la fois de la médecine et des forces armées, à quoi vous heurtez-vous le plus pour améliorer la situation, pour remplir le verre?
    Monsieur Hawn, est-ce que les forces aériennes savent ce qu'est un centre de gravité?
    Tout à fait.
    Une voix: Nous savons tous ce que c'est.
    Oh, c'est bien. Il y a longtemps que nous sommes devant votre comité.
    Le mien est en train de glisser vers le bas.
    Mon centre de gravité à moi, c'est de disposer du personnel approprié ayant les compétences et l'expérience appropriées dans les lieux et au moment appropriés. Il s'agit ici bien sûr de ressources humaines.
    C'est le plus grand défi que je dois relever. Je peux compter sur des gens intelligents et dévoués. Si je pouvais seulement en avoir assez là où il le faut... Ils aiment beaucoup leur travail parce qu'il leur semble tout à fait juste de le faire. Ils aiment travailler dans notre système. Il ne nous en faut que quelques-uns de plus à certains endroits.
    Colonel Ethell, en tant que militaire professionnel, que répondez-vous à cela?
    Je réponds en soulignant le fait que le nouveau Comité consultatif sur la santé mentale se tourne vers l'extérieur, au-delà des trois ministères et en leur nom. Il se penche sur la recherche universitaire et sur ceux qui l'effectuent. Nous avons ainsi fait entrer chez nous des experts de l'extérieur, des titulaires de doctorats de l'Université de Toronto, de l'Université Simon Fraser — ainsi par exemple la doyenne Cheryl Regehr, M. Bill Wilkerson, M. Kates et d'autres encore — afin de leur demander leur avis et des recommandations sur la manière de progresser, non seulement par rapport au traumatisme lié au stress opérationnel, mais aussi à la santé mentale, à tout cet ensemble. Cela représente un apport non négligeable de la part de gens compétents et d'expérience, qui s'y connaissent en santé mentale, en aide sociale et qui sont au courant du fonctionnement des réseaux dans tout le pays et qui ont accès aux universités. Les traumatismes liés au stress opérationnel ne concernent pas que le militaire, mais aussi d'autres secteurs de la société. Je pense même que la moitié d'entre vous a peut-être déjà éprouvé un peu de ce qu'on appelle le TSPT — que ce soit à la suite d'une collision en voiture ou de quelque chose de similaire, d'un voyage à l'arrière de la soute d'un C-130 ou à bord d'un avion de chasse.
    Il y a encore bien d'autres circonstances de ce genre. C'est d'ailleurs le défi que nous ont lancé les champions de la santé mentale des ministères: le général Semianiw, l'amiral Brian Ferguson du ministère des Anciens Combattants et le sous-commissaire Peter Martin de la GRC. C'est la direction que nous allons prendre.
    Je vous remercie.
    Je vous remercie beaucoup ainsi que tous ceux qui vous ont accompagné aujourd'hui d'être venus et d'avoir bien voulu répondre à nos questions.
    Colonel Ethell, il nous fait toujours grand plaisir d'accueillir et d'entendre notre Casque bleu le plus décoré. Poursuivez votre bon travail.
    À tous les autres, merci beaucoup.
    La séance est levée.
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