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Monsieur le Président, cela fait du bien lorsque le calme revient en cette enceinte. Il est dommage que parfois, lors de la période des questions, les gens s'enflamment.
Revenons à nos travaux qui m'apparaissent pas mal plus intéressants que la période des questions, c'est-à-dire le projet de loi qui concerne les communautés autochtones cries et du Grand Nord du Québec.
Comme il me reste huit minutes, et maintenant une de moins, je veux souligner que ce projet de loi est en négociation. Cette entente est en négociation depuis 1984. Après l'entente sur la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, il a fallu neuf ans avant qu'on ait des discussions pour en arriver à cette entente signée par les représentants des neuf communautés cries et par le gouvernement canadien.
Cette entente permettra une plus grande autonomie pour les Cris et les Naskapis, en fait, plus pour les Cris que les Naskapis parce qu'il y aura toujours place à une entente avec les Naskapis. On sait que les territoires de ces deux communautés se chevauchent et qu'il faudra donc en venir également à une entente avec les Naskapis.
Le territoire mentionné dans cette entente chevauche une partie du territoire des Inuits du Québec, mais dans l'ensemble, cela devrait permettre aux Cris de la Baie-James d'en venir à une autonomie presque complète à l'égard du gouvernement canadien. Cela permettra à l'administration régionale crie de prendre en charge les responsabilités du fédéral aux termes de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois.
En effet, il fallait absolument que les Cris s'entendent avec le gouvernement fédéral, mais également avec le gouvernement du Québec, suite à l'entente sur la Convention de la Baie-James et du Nord québécois. Il semble donc que ces ententes sont maintenant complètes et concrètes. Nous pourrons, dans un avenir très rapproché, permettre aux Cris de se diriger vers une pleine autonomie sur leur territoire ancestral. C'est l'objectif du projet de loi .
C'est un projet de loi que nous appuierons parce qu'il nous apparaît très important que l'on soutienne l'autonomie et les peuples autochtones. Le Bloc québécois a toujours reconnu que les peuples autochtones sont des peuples distincts ayant droit à leur culture, leur langue, leurs coutumes et traditions ainsi qu'à leur droit d'orienter eux-mêmes le développement de cette identité propre. C'est exactement ce qui se passe avec ce projet de loi.
Je sais qu'il ne me reste pas beaucoup de temps, mais j'aimerais souligner en cette Chambre que lorsque le gouvernement peut et que le gouvernement veut, il y a des possibilités d'ententes avec les peuples autochtones. Je crois que cette entente avec les Cris pave la voie à d'autres ententes. Ce que nous souhaitons le plus est qu'il y ait des ententes avec les Innus, les Algonquins, les Attikameks et les Naskapis pour faire en sorte que les communautés autochtones aient non seulement des droits et des responsabilités, mais qu'on leur permette aussi de se développer selon leurs coutumes ancestrales sur leur territoire ancestral. C'est ce que permettra ce projet de loi.
Rappelons-nous qu'il y a eu la Commission crie-naskapie qui a soumis plusieurs recommandations.
Elle en a fait 20, et je voudrais en souligner quelques-unes: la reconnaissance entière et explicite du droit inhérent à l'autonomie gouvernementale eeyoue — c'est ce que va donner le présent projet de loi; la reconnaissance de l'existence et de l'application de la loi, des coutumes et des pratiques traditionnelles eeyoues dans l'exercice et la pratique de l'autonomie gouvernementale eeyoue; l'élimination des dispositions en conflit avec la loi, les coutumes et les pratiques traditionnelles eeyoues.
Tout cela se fera donc sur leur territoire. Je n'ai lu que 3 des 20 recommandations. L'important est que, dorénavant, il y aura un gouvernement autonome, et que celui-ci aura juridiction sur des terres ancestrales qui permettront aux Cris de se développer. La communauté eeyoue pourra aussi se développer selon ses us et coutumes.
Pour cette raison, nous pensons qu'il s'agit d'un excellent projet de loi. Quand le gouvernement veut, il peut s'asseoir. Il devra faire la même chose dans le cas du projet de loi , relatif aux droits matrimoniaux dans les communautés autochtones. Ce projet de loi est décrié par toutes les organisations féminines, communautés et associations autochtones. Nous croyons que le gouvernement devra refaire ses devoirs avant de présenter à nouveau le projet de loi C-8 devant la Chambre.
En terminant, nous souhaitons que le projet de loi soit adopté rapidement pour que se mette en place le gouvernement autonome des communautés cries. Nous souhaitons que ce gouvernement autonome des communautés cries puisse se développer selon les coutumes ancestrales des Cris. Je ne peux que souhaiter une seule chose, c'est que l'entente cordiale actuelle entre les Cris et le gouvernement fédéral se perpétue et fasse en sorte que l'on puisse développer ces communautés, qui vivent dans un coin de pays où il n'est pas facile de vivre.
Je leur souhaite donc bonne chance. J'espère que les voeux et les désirs des communautés cries qui ont signé l'entente ayant donné lieu au projet de loi se réaliseront. Le plus grand souhait du Bloc québécois est que les communautés cries, regroupées au sein du Grand Conseil des Cris, deviennent autonomes, vivent enfin selon les coutumes ancestrales sur leur territoire, se développent et gèrent ce qui leur revient de droit, à savoir leurs terres ancestrales.
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Monsieur le Président, je prends aussi la parole pour appuyer le projet de loi . Les néo-démocrates appuient fermement cette importante mesure législative.
J'aimerais mettre un peu les choses en contexte, car on parle de ces modifications depuis des années. Les Cris et les Naskapis ont une longue histoire au Québec. La Convention de la Baie James et du Nord québécois a été signée en 1975. Il s'agissait du premier accord des temps modernes sur des revendications territoriales au Canada. Cet accord touchait toutefois une revendication en suspens remontant aux années 1800 des Cris et des Inuits sur des droits et des titres autochtones. Cet accord aurait dû être signé il y a au moins un siècle, mais il a fallu attendre jusqu'en 1975 pour que ce soit enfin fait.
Je suis originaire de la Colombie-Britannique. Même si des accords sur des revendications territoriales ont été signés dans cette province, de nombreuses nations sont toujours privées de ce genre d'ententes. Un mécanisme appelé « table commune » a été mis en place en Colombie-Britannique, et une soixantaine de nations ont signé le protocole d'unité. En Colombie-Britannique, nous serions fort heureux de pouvoir obtenir des progrès en matière de traités et de revendications territoriales comme ceux qu'entraîneront les modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.
En ce qui concerne l'historique de cet accord, en 1975, lorsque le gouvernement du Québec a annoncé son intention d'exploiter le potentiel hydroélectrique de la baie James, les gouvernements fédéral et provincial n'avaient pas encore respecté leur engagement à reconnaître les droits des Cris et des Inuits. Des injonctions judiciaires ont été émises pour souligner le fait que les Cris et les Inuits n'avaient pas été consultés. A finalement découlé de tout ce processus la Convention de la Baie James et du Nord québécois. Toutefois, cet accord a été négocié sans que l'on prévoie de plan de mise en oeuvre. Tout cela s'est poursuivi pendant encore de nombreuses années.
J'aimerais vous citer des extraits du témoignage présenté par le Grand conseil des Cris devant le comité. Ce conseil a souligné certains des événements qui se sont produits au fil des années. Il a déclaré ceci:
La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec a été adoptée par le Parlement en 1984, après plusieurs années de pourparlers entre les parties et de consultations avec les communautés cries et la Bande naskapie. Après bien des difficultés, le Canada mit finalement en place un nouveau régime de financement qui tenait compte de la prise en charge par les communautés cries de nouvelles responsabilités concernant les priorités en matière de planification de leur développement et de leur administration.
Après l'adoption de cette loi et jusqu'à ce jour, le Grand conseil des Cris/Administration régionale crie a joué le rôle de forum pour la mise en oeuvre concertée de cette loi et continue également d'être le garant et le protecteur des droits des Cris. Bien que la loi ait ouvert la porte à la prise en charge, par les communautés cries, de nouvelles responsabilités concernant leur développement, plusieurs aspects de la Convention de la Baie James et du Nord québécois n'avaient pas été adéquatement mis en oeuvre par le Québec et le Canada.
L'annonce par le Québec de son intention de construire d'autres projets de centrales hydroélectriques dans le territoire, et plus particulièrement le projet hydroélectrique à Grande-Baleine, a incité les Cris à instituer, en 1989, une poursuite judiciaire de grande portée visant à la fois à faire cesser le développement proposé et à faire appliquer les nombreux points de la Convention de la Baie James et du Nord québécois qui n'avaient pas encore été mis en oeuvre par le Canada et le Québec.
On peut donc voir que le processus avait été long, complexe et litigieux.
Je poursuis la citation:
Lorsque le Canada et les Cris ont entamé des pourparlers hors cours de 2005 à 2008, il a été constaté que ce modèle visant à transférer aux Cris la planification et l'établissement des priorités relatives à certaines des obligations du Canada qui suscitaient les différends pouvait être adapté aux problèmes à régler entre les parties.
Je vais revenir un peu en arrière. En février 2002, le Québec et les Cris ont signé une entente sur une nouvelle relation entre le gouvernement provincial et les Cris du Québec, la Paix des Braves. Les Cris ont accepté de retirer leurs poursuites contre le Québec et de suspendre celles qui concernaient des compétences partagées avec le gouvernement.
Cette entente a éventuellement débouché sur cette entente concernant une nouvelle relation. Bien que cela ne fasse pas partie du projet de loi à l'étude, il s'agissait d'une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris d'Eeyou Istchee. Ce document était important, car le chapitre 3 de l'entente concernant une nouvelle relation décrivait un processus à deux étapes de mise en oeuvre d'une partie de l'entente précédente.
Cette entente concernant une nouvelle relation prévoit un plan de développement de la Baie James et du Nord du Québec pour les 20 prochaines années accepté par toutes les parties, le règlement des griefs antérieurs au litige et autres griefs, ainsi qu'une modernisation par étapes de la gouvernance des Cris.
Ce projet de loi ne représente donc qu'une partie de ce qu'il faut faire. Il n'est que la première étape. L'entente concernant une nouvelle relation stipulait que dans un délai de 18 mois environ ce projet de loi modifiant la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec serait présenté en tant que première étape.
Le projet de loi devait accomplir deux grands objectifs. Le premier était de donner à l'administration régionale crie des responsabilités et pouvoirs supplémentaires, notamment le pouvoir d'édicter des règlements, pour que cette administration soit mieux en mesure de reprendre à son compte certaines responsabilités assumées par le gouvernement fédéral en vertu de la convention de la Baie James et du Nord Québécois, et de reconnaître les Cris d'Oujé-Bougoumou comme bande distincte et administration locale en vertu de la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.
Tout le monde affirme que les nations visées et les autres nations concernées par les autres aspects de cette entente s'accordent pour dire que c'est ce qu'il faut faire. Tout le monde appuie les modifications à la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec.
L'étape suivante, dont toutes les parties reconnaissent qu'elle a déjà démarré, consiste à présenter d'ici trois à cinq ans un autre train de modifications portant sur la structure de gestion autonome que les Cris sont pleinement habilités à mettre en place.
Avant la colonisation, les nations cries étaient autonomes. Elles assumaient totalement le contrôle de leurs enjeux sociaux, économiques et, si je puis dire, environnementaux, puisqu'elles étaient les intendantes de cette terre. C'était une structure gouvernementale pleinement opérationnelle. Cette entente prévoit en partie les modifications à mettre en place pour la partie deux.
Le gouvernement nous a affirmé, et nous sommes assez rassurés de constater que les nations cries en sont convaincues, que ce processus va être lancé pour que les modifications de la partie deux puissent être présentées d'ici trois à cinq ans. Je suis certain que tous les députés s'en réjouiraient. Malheureusement, on a dû attendre 19 ans pour avoir cette première série de modifications, mais au moins elles sont là maintenant et nous les appuyons entièrement.
C'est en partie grâce à la consultation que ce processus a été un succès.
Je vais revenir en arrière un instant et mentionner la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones. Bien que le Canada n'ait pas signé ce document ambitieux, je crois que celui-ci prévoit un cadre auquel il est important que nous pensions lorsque nous parlons des Autochtones, des Premières nations, des premiers peuples de notre pays. La déclaration comprend de nombreux articles, mais je vais citer l'article 18, qui dit ceci:
Les peuples autochtones ont le droit de participer à la prise de décisions sur des questions qui peuvent concerner leurs droits, par l’intermédiaire de représentants qu’ils ont eux-mêmes choisis conformément à leurs propres procédures, ainsi que le droit de conserver et de développer leurs propres institutions décisionnelles.
En ce qui concerne le processus de consultation, le document d'information qui a été fourni aux députés traite du genre de consultation qu'on a fait. Le consensus est général à l'égard du projet de loi
Au comité, des témoins ont mentionné que le ministère de la Justice avait collaboré avec le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien dès le début. En examinant d'autres accords sur des revendications territoriales, la vérificatrice générale a dit que, souvent, le ministère de la Justice n'intervenait qu'à la toute fin. Le processus dure peut-être depuis un certain nombre d'années et, au moment de mettre au point les derniers détails, le ministère de la Justice intervient soudainement et dit: « Attendez un instant. Cet aspect nous pose un problème. »
À mon avis, le gouvernement devrait se servir du projet de loi comme modèle à imiter dans d'autres négociations, qu'il s'agisse de revendications territoriales, de traités ou d'autonomie gouvernementale, et faire participer les ministères compétents dès le début afin d'éviter les embûches plus tard dans le processus.
La vérificatrice générale a témoigné devant le comité au sujet des ajouts aux réserves et des droits fonciers issus des traités, et ce que nous avons découvert, évidemment, c'est le manque de concertation à l'égard de ces accords.
Pour ce qui est du processus de consultation, il est reconnu dans les documents d'information que, en vertu de la nouvelle entente, le gouvernement du Canada est tenu de consulter le Grand conseil des Cris. En soi, il s'agit d'un progrès. Le gouvernement reconnaît la nécessité de consulter.
Les documents d'information donnent entre autres un aperçu des consultations avec les Cris. Des réunions ont été tenues avec les Cris, notamment ceux d'Oujé-Bougoumou. Les représentants juridiques des Cris étaient présents pendant tout le processus de rédaction du projet de loi qui a commencé en 2007. Il y a eu des rencontres officielles, des appels conférences et de nombreux échanges de lettres et de courriels. Les Cris ont examiné les versions anglaise et française du projet de loi. Le gouvernement du Canada s'est penché sur toutes les suggestions des Cris et le projet de loi tient compte des opinions qu'ils ont exprimées.
L'approche semble fort raisonnable. Il s'agit d'une mesure législative qui a une incidence directe sur la vie des collectivités cries. Avant la colonisation, les Cris constituaient une nation autonome. La nation crie possède la capacité, l'infrastructure et le leadership nécessaires pour s'attaquer directement aux problèmes auxquels ses collectivités sont confrontées. Il semble raisonnable que lorsque le gouvernement élabore un projet de loi qui aura une incidence directe sur leurs collectivités, les Cris soient appelés à participer dès le début du processus.
Nous avons été témoins du succès de ce genre d'approche. Le projet de loi , grâce à cette approche fort raisonnable, a rapidement été adopté à la Chambre et au comité. Il va sans dire que le comité a entendu des témoins et qu'il a fait preuve de la diligence voulue. Nous avons entendu des témoins sur lesquels le projet de loi a une incidence. On nous a constamment répété que les Cris pouvaient accepter cette mesure législative parce que le processus est raisonnable.
Les nations cries ont pu présenter ce projet de loi à leurs collectivités parce qu'il a été rédigé en collaboration avec elles, qu'elles ont donné leur rétroaction et leur point de vue et qu'elles ont suggéré des modifications. La Chambre est saisie d'un projet de loi qui a aisément traversé le processus législatif justement à cause de ce processus collaboratif.
Malheureusement, on ne peut pas en dire autant d'autres mesures législatives. Un député bloquiste a mentionné le projet de loi sur les biens immobiliers matrimoniaux, dont je veux moi aussi parler parce que son parcours législatif a été plutôt ardu.
Ce que le gouvernement considère comme des consultations n'étaient pas des consultations aux yeux des nations visées parce que le processus n'avait pas été élaboré en collaboration avec elles.
Le rapport de la représentante ministérielle nommée par le gouvernement contient quelques recommandations au sujet de la consultation.
Certains éléments de la consultation effectuée au sujet du projet de loi correspondent exactement à ce dont la représentante ministérielle parle. Elle dit que le ministère devrait élaborer dès que possible des politiques et des règles ayant pour but de veiller à ce qu'on s'acquitte à l'avenir de toute obligation légale de consulter, tout en atteignant les objectifs de bonne gouvernance et de mise en oeuvre de bonnes politiques publiques.
Elle poursuit ses recommandations en écrivant ceci:
[S'assurer] que les Premières nations reçoivent toute l'information pertinente à la question en jeu, pour prendre une décision en temps opportun.
Dans le cas du projet de loi , il semble que les Cris ont reçu l'information dont ils avaient besoin pour prendre leurs décisions. Des échanges d'information ont continuellement eu lieu. Quelques suggestions ont été retenues, et le projet de loi a été modifié en conséquence. Les gens ont fait preuve de bonne volonté relativement à l'étape suivante de la démarche, alors ce fut une réussite.
La représentante ministérielle écrit également ceci:
[Offrir] aux Premières nations la possibilité d'exprimer leurs préoccupations et leurs points de vue sur les conséquences possibles d'une proposition législative et sur les questions liées à l'existence d'une obligation de consulter.
Je viens d'indiquer qu'ils ont eu la possibilité de s'exprimer. La représentante poursuit avec les recommandations suivantes:
[Écouter, analyser et examiner] sérieusement les commentaires et les préoccupations des Premières nations à propos des principes juridiques et politiques pertinents, y compris leurs relations avec d'autres principes constitutionnels et liés aux droits de la personne.
Dans ce cas particulier, les Cris d'Oujé-Bougoumou et d'ailleurs ont eu la possibilité de faire l'analyse en question, et d'exprimer leur point de vue, dont on a tenu compte dans le projet de loi. La représentante dit encore:
[Veiller] à ce que le ministère de la Justice réalise des analyses approfondies sur les questions liées à l'article 35 touchant toute initiative législative proposée avant, durant et après la tenue de consultations.
Même s'il ne s'agissait pas là d'une question liée à l'article 35, le ministère de la Justice a siégé à la table pendant tout le processus. Par conséquent, il n'est pas devenu un obstacle ultérieurement. En vertu de l'ancien processus de règlement des revendications particulières, ces dernières ne pouvaient moisir au ministère de la Justice pendant des années avant qu'une décision ne soit prise. Je le répète. C'est un modèle que je prie instamment le gouvernement de considérer en faisant participer d'emblée le ministère de la Justice et d'autres ministères. Dans certains cas, le ministère des Pêches et des Océans et le ministère de l'Environnement ont des intérêts dans l'objet des négociations. Il serait important de les réunir autour de la table dès le début.
La représentante ministérielle fait également la recommandation suivante:
[Accorder] une attention particulière aux propositions visant à mitiger les conséquences négatives possibles sur les droits ancestraux et issus des traités ainsi que sur d'autres droits et intérêts des Premières nations, et en prenant des mesures pour modifier la proposition du gouvernement.
Dans ce cas, les documents d'information du gouvernement indiquent qu'il a tenu compte des suggestions et qu'il a effectué certains changements en cours de route. Elle ajoute également ceci:
[Établir], en consultation avec les Premières nations, un protocole pour l'élaboration des propositions législatives.
Comme une autre série de modifications sera présentée, nous nous attendons à ce que le cadre utilisé dans le projet de loi soit utilisé pour la prochaine série de modifications. La représentante ministérielle a clairement mis l'accent sur le processus, qui semble correspondre à ce qui s'est fait dans le cas présent.
Par exemple, nous savons que le gouvernement a lancé un processus qui est actuellement en cours sur la consultation et les accommodements des groupes autochtones. Ce processus a pour titre « Lignes directrices provisoires à l'intention des fonctionnaires fédéraux afin de remplir l'obligation légale de consulter ». Le ministère pourrait souhaiter envisager certaines autres recommandations qui ont été faites, car il semble que les Premières nations n'ont pas participé à l'élaboration de ces lignes directrices provisoires.
On dirait un exercice interne de gestion des risques pour le gouvernement fédéral plutôt qu'une description du contexte général de ce que devraient représenter les consultations. À un moment donné, il est dit, dans le document, qu'il faut s'assurer que le gouvernement a essentiellement couvert sa partie des consultations, sans mentionner si les Premières nations ont eu l'occasion de se faire entendre et ont reçu les ressources nécessaires. Nous savons également qu'un grand nombre de collectivités des Premières nations n'ont simplement pas les fonds nécessaires pour faire le genre de travail qui leur permettrait de fournir un point de vue et des idées dans le cadre d'un processus consultatif complet.
Le projet de loi est incontestablement une réussite à cet égard. Les preuves de cette réussite et ce texte législatif qui semble répondre aux besoins du gouvernement et des nations cries en cause fourniraient un bon modèle pour avancer.
Il est très important que nous appuyions le projet de loi et qu'il soit adopté pour que l'autre endroit puisse procéder à l'examen qu'il doit faire de cette mesure législative. C'est une réussite pour les nations cries et un pas en avant pour qu'elles puissent jouir de l'autonomie gouvernementale dont elles devraient bénéficier et qu'elles puissent assumer toutes les responsabilités et obligations qui découlent de l'adoption par les peuples cris de leur structure de gouvernance et de leurs règlements.
Je me réjouis de l'appui accordé par le NPD à cette importante mesure législative. J'ai hâte de voir les modifications qu'on présentera au cours des trois à cinq prochaines années en respectant le même processus. J'espère que les leçons tirées du projet de loi pourront être appliquées à d'autres accords partout au pays.
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Monsieur le Président, je félicite la collègue du NPD, qui est aussi ma voisine au Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord. Je la félicite aussi de son apprentissage du français. En effet, contrairement à ce que je pouvais faire au début, maintenant, je ne peux plus dire n'importe quoi en français en ce qui la concerne. Elle a beaucoup appris des Cris de la Baie James. Si on regarde ce qui se passe à Vancouver, depuis qu'elle a pris connaissance du dossier des Cris, les dossiers des Premières nations se règlent beaucoup plus facilement maintenant. Elle peut se servir de l'expérience québécoise auprès des Premières nations pour la faire valoir en Colombie-Britannique. Le secrétaire parlementaire a pris connaissance de cela, avec satisfaction d'ailleurs, vu la façon dont il réagit quand notre collègue prend la parole en Chambre.
Je suis très fier de la volonté, de la fierté des Cris du Québec. Je ne peux pas parler pour les Cris de l'Ontario ou des autres provinces, car mis à part les témoins qui viennent nous rencontrer en comité, je n'ai pas eu l'occasion de les côtoyer plus que cela. Toutefois, généralement, ces personnes comptent beaucoup sur la compréhension des membres du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord quand ils viennent nous rencontrer pour essayer de nous faire comprendre leurs problèmes et leur vision des choses, qui n'est pas nécessairement la nôtre.
Par exemple, dans le cas qui nous concerne, soit le projet de loi , il ne faut pas oublier que l'entente de la Baie-James et du Nord québécois se négocie depuis 1973. Cette négociation a commencé aussi loin que sous René Lévesque, en 1973, dans le cadre du développement du projet hydroélectrique de la Baie-James. Suite au développement qui se faisait sur leur territoire, les Cris ont alors décidé de réclamer un droit sur les retombées d'une partie de ce développement. On se rappellera la bataille qu'ils ont dû livrer, en se rendant même jusqu'à New York, si je me souviens bien, pour y faire valoir leurs droits.
C'est suite à la mise en oeuvre des engagements du Canada contenus dans les ententes suivantes que le projet de loi C-28 est intervenu. Ce projet de loi vise à mettre en oeuvre ces engagements: la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, signée en 1975; l'entente d'Ouje-Bougoumou— Canada de 1992, par laquelle le Canada s'était engagé à remédier à la non-inclusion des Cris d'Ouje-Bougoumou dans la Convention de la Baie-James et du Nord québécois; la législation des Cris et Naskapis, ainsi que l'entente concernant une nouvelle relation entre le gouvernement du Canada et les Cris Eeyou Istchee, de 2008, qui a réaffirmé cet engagement à accroître les pouvoirs de gouvernance de l'administration régionale crie pour le développement des Cris de la Baie-James. J'en suis très heureux pour la chef d'Ouje-Bougoumou pour laquelle j'ai beaucoup de considération. C'est une très gentille dame qui devient, de par ce fait, une très grande dame.
Comme je viens de le dire, la Convention de la Baie-James se négocie depuis 1973. Cela part des Cris de Eeyou Istchee, qui se traduit par « Terre des Cris de la Baie-James du Québec ». L'Association des Inuits du Nouveau-Québec est entrée en négociation avec le gouvernement du Québec, le gouvernement fédéral, Hydro-Québec et la Société d'énergie de la Baie James. À ce moment-là, leur objectif visait la région et les populations respectives en assurant la reconnaissance et la protection de certains droits et avantages. Les négociations ont abouti à la signature, en 1975, de la Convention de la Baie-James, le premier accord de revendications territoriales global au Canada, qui est aujourd'hui protégé par la Constitution en tant que traité moderne, conformément à l'article 35 de la Loi constitutionnelle de 1982. Dans cet accord, les Cris ont cédé, remis et abandonné toutes leurs revendications, droits, titres et intérêts autochtones aux terres et dans les terres du territoire et du Québec en échange de droits et avantages clairement définis.
La Convention de la Baie-James et du Nord québécois reconnaissait huit bandes. Ce régime des terres définissait trois catégories de terres. Je n'en ferai pas l'énumération. Dans l'entente de 1975, Oujé-Bougoumou n'étant pas encore une réserve ou même une bande reconnue, cette dernière a dû batailler jusqu'en 1992 afin de se faire reconnaître et obtenir un village qui lui soit propre.
L'entente actuelle se situe sous le titre d'administration locale. La Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec (LCNQ) constitue en tant que personnes morales les huit bandes cries reconnues par la Convention de la Baie-James et du Nord québécois et établit leurs pouvoirs dans les domaines suivants: la réglementation des terre de catégorie IA en vertu de l'article 45; la réglementation des bâtiments en vue de la protection de la sécurité publique; la santé et l'hygiène; l'ordre et la sécurité publique; la protection de l'environnement; la prévention de la pollution; l'imposition à des fins locales d'une vaste gamme de services locaux; la voirie, la circulation et le transport; l'exercice d'activités commerciales et professionnelles; et les parcs et loisirs.
D'autres articles portent sur l'administration financière des bandes, les droits de résidence sur les terres de catégorie IA, l'accès à celles-ci ainsi que d'autres droits relatifs à ces terres, l'octroi d'intérêts sur ces terres et le service de police.
Le projet de loi prévoit des modifications pour chacune de ces parties, ce qui donne beaucoup d'autonomie. Malheureusement, elle n'est pas encore complète, mais il s'agit de l'autonomie la plus avancée au Canada dans le moment. Je prends l'exemple d'une entente signée il n'y a pas si longtemps avec une bande des Premières nations provenant du territoire de ma collègue et dont on avait aussi reconnu l'autonomie. Celle-ci a été obtenue à la suite de négociations, de consultations et d'ententes.
J'écoutais le secrétaire parlementaire nous rappeler le projet de loi . Le gouvernement a consulté certaines personnes, dont des femmes, de l'Assemblée des Premières Nations. Lors du dépôt de ce projet de loi, nous avons compris que l'Assemblée des Premières Nations reconnaissait avoir été consultée. L'Association des femmes autochtones du Canada, l'Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, et Femmes autochtones du Québec le reconnaissaient aussi. Cependant, là s'arrête l'entente existante entre le ministère et ces associations représentant les Premières nations. Consulter et ne rien retenir de ces consultations n'apporte rien.
Cette raison amène les Premières nations, tant du Canada que du Québec, à s'élever contre le projet de loi , comme elles l'avaient fait contre les projets de loi C-44 et C-21, et comme elles continueront de le faire tant et aussi longtemps que nous ne reconnaîtrons pas la façon de voir et de vivre, la culture et les besoins de l'ensemble des Premières nations. Lorsqu'elles nous demandent quelque chose lors des consultations, il ne suffit pas d'écouter et de ne rien faire. Il faudra inclure les besoins de ces personnes. Ce sont des personnes au même titre que nous le sommes. Ainsi, beaucoup plus d'ententes pourront se faire, et j'en suis très fier pour les Cris de la Baie-James.
Au comité, à la suite des discussions que nous avons eues, il y a eu unanimité sur ce projet de loi à l'exception d'un changement mineur proposé par le gouvernement. Il s'agissait d'adapter la version anglaise à la version française dans un certain article car la définition française était plus juste que l'anglaise.
Le projet de loi a reçu un appui unanime, et je souhaite sérieusement que la Chambre l'appuie également lors du vote sur ce projet de loi. Pour sa part, le Bloc appuie les Première nations, comme il l'a toujours fait, d'ailleurs.
Le Bloc québécois s'est fait un devoir d'appuyer les Première nations à l'échelle du Canada, et pas seulement à l'échelle du Québec. On sait que les Première nations du Canada en général ont connu à peu près les mêmes difficultés, et le Bloc québécois reconnaît les peuples autochtones comme des peuples distincts ayant droit à leur culture, à leur langue, à leurs coutumes et traditions, ainsi qu'à leur droit d'orienter eux-mêmes le développement de cette identité propre.
Il respecte ainsi l'orientation tracée par René Lévesque, un ardent défenseur des peuples autochtones qui a fait du Québec le premier État en Amérique à reconnaître en son sein les nations autochtones.
Le projet de loi est en fait le prolongement de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois, et de la Paix des Braves qui a été signée sous Bernard Landry du Parti québécois. Le projet de loi permet au gouvernement fédéral de remplir ses obligations auprès des Cris-Naskapis.
Le chef du Bloc québécois disait, en 2004:
La Paix des Braves ratifiée par le gouvernement du Québec et les représentants de la nation crie a pavé la voie à ce type de négociations en démontrant que les grands projets de développement doivent être négociés dans le respect des intérêts mutuels. Le Bloc Québécois est solidaire des Premières Nations dans leur lutte pour l’émancipation et c’est pourquoi il demande qu’Ottawa s’inspire de cet exemple pour négocier à son tour une entente semblable avec les représentants de la nation crie.
La Commission Crie-Naskapie affirmait dans son rapport de 2008, sur les effets néfastes du non-respect du fédéral de la Convention de la Baie-James et du Nord québécois:
En conséquence, les Premières nations cries et naskapies n’ont pas réalisé leur plein potentiel dans le cadre de l’administration locale, avec sa nature changeante et dynamique, à cause d’une contrainte principale, soit, après vingt-quatre (24) ans, le fait que la Loi sur les Cris et les Naskapis du Québec, demeure un instrument inflexible et rigide qui n’a pas encore été révisé par le Canada, les Cris et les Naskapis dans le but de déterminer les amendements adéquats pour améliorer le gouvernement local cri et naskapi.
La commission relevait une série de recommandations dont je vous ferai grâce maintenant parce que la plupart des revendications ont été reconnues dans ce projet de loi. C'est là la grande différence entre ce projet de loi et le projet de loi dont nous devrons débattre très bientôt.
J'écoutais la députée de tout à l'heure, et elle disait que le gouvernement avait fait des consultations de façon intensive. C'est vrai, mais l'intensité des négociations a peu à voir avec la compréhension des revendications mentionnées lors de ces consultations. J'aimerais que le gouvernement en place comprenne cela. On pourrait éviter un tas de discussions et de débats futiles et inutiles si, dès le départ, on prenait en considération l'interlocuteur.
Je vais terminer là-dessus. Je souhaite grandement que tous les partis en cette Chambre appuient ce projet de loi et qu'il soit rapidement envoyé au Sénat.
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Monsieur le Président, je suis honoré de prendre la parole à propos de ce projet de loi qui reconnaît les droits des Cris de la baie James au Québec, et qui ouvre la voie sur l’avenir. Il marque l’une des rares occasions où tous les députés travaillent ensemble pour parvenir à un résultat à la fois nécessaire et utile pour fixer un cadre d’avenir.
Je commencerai par placer cet accord dans son contexte afin que nous comprenions bien ce dont il est question. Si nous appuyons effectivement ce projet de loi et que nous en reconnaissons l’importance, nous devons cependant ne pas oublier que le gouvernement fédéral a lamentablement échoué dans la mise en place d’autres accords semblables. Remontons aux années 1970, à l’époque où le Québec lançait ses premiers projets dans la baie James. Mes collègues québécois conviendront avec moi qu’à l’époque, on envisageait les relations avec les Premières nations d’une tout autre façon.
Je me rappelle, quand je travaillais dans la région de l’Abitibi, avoir entendu des gens dire que, pendant bien des années, on avait considéré que les Autochtones squattaient leurs propres terres. On ne consultait jamais les communautés de Premières nations concernées par les projets hydroélectriques, forestiers ou miniers qu’on envisageait de mener à proximité. Cela n’avait rien d’exceptionnel et la situation était la même partout au Canada. Pas plus tard que l’année dernière, le gouvernement McGuinty en Ontario a fait emprisonner des chefs de Premières nations parce qu’ils voulaient jeter les bases de la consultation.
La Convention de la Baie James est le résultat de la lutte menée par les Cris de cette région pour faire reconnaître leur territoire et pour se faire inviter à la table des négociations chaque fois qu’il serait question d’exploiter les ressources naturelles. S’il devait y avoir des retombées, ils voulaient que leurs populations en profitent parce que c’étaient elles qui devraient subir les effets à long terme des énormes centrales hydroélectriques que le gouvernement Bourassa se proposait de construire.
La Convention de la Baie James a été possible parce qu’à un moment donné, le gouvernement du Québec s’est rendu compte qu’il ne pourrait pas mener à bien ses projets de développement sans conclure un accord-cadre avec les Cris de la baie James. Il subissait beaucoup trop de pressions internationales. Les Cris, Billy Diamond, Matthew Coon Comb et tous les chefs autochtones à l’époque ont mené une telle lutte sur la scène internationale que le Québec a été contraint de s’asseoir à la table des négociations. Comme le Québec était là, on s’est dit qu’il fallait inviter le gouvernement fédéral.
On ne voit pas le gouvernement fédéral se démener pour régler les revendications territoriales. Ce n’est pas son affaire. Il fuit ses obligations à répétition. Il a refusé de rencontrer les communautés de Premières nations à propos des enjeux les plus fondamentaux. Quant au premier accord de la baie James, celui-ci a été possible parce que le Québec s’est rendu compte que, pour faire décoller ses projets hydroélectriques, il lui faudrait conclure un tel accord et que, pour y parvenir, il fallait jouer la carte de la détente fédérale-provinciale.
La convention initiale de la Baie James a établi le cadre qui a permis aux Cris de la Baie James du Québec de véritablement participer à l'économie du XXe et du XXIe siècle et a mis en place une norme que tous les peuples des Premières nations du pays ont pris comme référence. Dans le passé, on considérait que les ententes de partage des recettes étaient une idée révolutionnaire, mais maintenant les Premières nations reconnaissent que ces dernières sont nécessaires si elles veulent aller de l'avant.
J'aimerais comparer le contexte de l'entente initiale signée avec les Cris de la Baie James, de la Paix des Braves et du projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui — c'est-à-dire l'élaboration d'ententes sur le terrain et le succès des Cris de la Baie James — et le contexte d'autres collectivités des Premières nations, c'est-à-dire les difficultés auxquelles elles sont confrontées lorsqu'elles tentent également de conclure des ententes.
Je représente la région de la Baie James de l'Ontario et il n'y a pas de contraste plus frappant qu'entre les collectivités de la Baie James du Québec et celles de la Baie James de l'Ontario, où le gouvernement fédéral et le gouvernement de l'Ontario ont invariablement manqué à leurs obligations de base en matière d'infrastructure, d'éducation et de services de santé. Par conséquent, les collectivités de la région de la Baie James de l'Ontario connaissent des niveaux de pauvreté dont la plupart des Canadiens ignorent même l'existence; or, dans cette région, il s'agit beaucoup trop souvent d'une réalité quotidienne.
Dans le passé, j'ai eu l'immense plaisir de parcourir la côte de la Baie James du Québec, où j'ai vu des routes adéquates, des maisons adéquates et les habitants participer à l'économie. Je ne dis pas cela pour minimiser les problèmes avec lesquels les gens de cette région peuvent être aux prises, mais pour souligner que la situation est très différente en Ontario.
Comme député, j'ai participé au centenaire du traité numéro 9 dans le grand territoire de la nation Nishnawbe Aski, qui fait partie de la région que je représente. Il y a 100 ans que ce traité a été signé.
Dans des localités comme Martin River, Fort Albany, Kashechewan et Moose Factory, j'ai constaté que ces traités étaient bien différents de ce qu'en pensaient les politiciens qui venaient prétendument fêter ce centenaire. Dans bien des localités, les gens m'ont dit qu'il n'y avait pas vraiment de raison de fêter le fait qu'ils avaient cédé leurs terres de bonne foi pour travailler en partenariat et donner à leur peuple une chance de se développer. Les commissaires blancs de l'époque, eux, considéraient simplement les traités comme un moyen de s'emparer des terres en parquant les communautés dans des réserves lamentables.
Les gens n'ont pas la même vision des traités. Il est clair qu'aussitôt que le gouvernement fédéral a eu signé le traité numéro 9, qui a d'ailleurs été signé aussi par l'Ontario, il s'est estimé libéré de ses obligations. Il a tourné le dos à ces communautés. Dans les communautés des Premières nations, on parle encore de ce que signifiaient ces traités.
Revenons sur l'histoire des communautés visées par le traité numéro 9 comme les Cris Mushkego de la Baie James en Ontario. S'ils l'ont signé, c'était notamment parce qu'ils se rendaient compte qu'avec toutes les pressions sur leur mode de vie, avec l'emprise des agents de la compagnie de la Baie d'Hudson depuis des années sur leur territoire, les choses étaient en train de changer. Ils s'inquiétaient pour l'avenir de leurs enfants.
Ce qu'ils ont dit notamment quand ils ont accepté de signer ce traité, c'est qu'ils voulaient que leurs enfants aient une éducation. Ils acceptaient de partager leurs terres, mais à condition que leurs enfants aient de bonnes écoles. On sait que le gouvernement fédéral n'a jamais respecté cet engagement. Au lieu de cela, il a établi, non seulement sur la côte de la Baie James, mais dans tout le territoire, un régime de pensionnats qui a profondément déchiré des générations de ces communautés.
Aujourd'hui encore, dans ma région, Timmins—Baie James, il y a deux localités sans écoles. Le gouvernement ne semble pas avoir de plan pour en construire. Il n'a pas l'air de se rendre compte qu'il faut en construire. On constate que les traités qui ont été signés ont été bafoués.
Ayant été négociateur de terrains auprès de la nation algonquine, j'ai très vite compris que la parole du gouvernement fédéral ne signifiait souvent pas grand-chose quand il signait un accord. Il était là tant que les médias étaient présents et que l'encre n'était pas encore sèche sur la page, mais une fois parti, ce qu'il disait aux communautés, quelle qu'ait été l'entente signée, c'était: « Attaquez-nous en cour ». Évidemment, ces communautés sont trop pauvres pour saisir les tribunaux.
J'ai travaillé dans la communauté de Barriere Lake après qu'elle ait signé une entente de reconstruction avec le gouvernement fédéral en 1998. J'y suis retourné cinq ou six ans plus tard et on n'avait pas construit un seul nouveau logement, alors qu'il y avait une entente sur papier, signée par le gouvernement fédéral, pour aider la communauté de Barriere Lake à se sortir de sa pauvreté abjecte.
Au mois de novembre 2005, j'ai participé à une réunion en compagnie du ministre des Affaires indiennes et de tous les hauts fonctionnaires du ministère au cours de laquelle un accord a été conclu visant la construction d'une nouvelle collectivité pour la communauté de Kashechewan. Je me souviens que cet accord était vague, que les promesses du ministre et des principaux fonctionnaires du ministère ne s'y trouvaient pas. Ils avaient promis de rebâtir la collectivité, mais aucune des promesses concernant le déménagement de la collectivité sur des terres plus élevées, les échéances ou le nombre de maisons qui allaient être construites afin d'aider cette collectivité en crise à quitter une plaine inondable ne figuraient dans le texte de l'accord.
La haute direction du ministère des Affaires indiennes nous a dit que ce serait perçu comme un signe de bonne foi et de confiance si l'on acceptait de signer cet accord. La collectivité avait été évacuée trois fois en un an à cause des problèmes d'infrastructures et de la mauvaise gestion du gouvernement fédéral concernant les terres et les infrastructures de la collectivité.
La collectivité se trouvait dans une situation désespérée et elle a signé l'accord, comme l'ont fait de nombreuses autres collectivités des Premières nations, en toute bonne foi, au fil des ans. La collectivité croyait que les gens assis de l'autre côté de la table, les représentants de la Couronne, du gouvernement fédéral, étaient sincères lorsqu'ils disaient qu'ils tiendraient parole. Le fait que l'accord ne contenait aucun détail ne constituait pas un problème, car ils ont dit à la collectivité que l'accord serait respecté.
Le résultat est clair. Moins d'un an après, le gouvernement prétendait qu'il n'y avait jamais eu d'entente et qu'il n'y avait pas d'argent pour la communauté de Kashechewan, qu'il n'y avait pas de plan, que tout cela avait germé dans l'imagination de certaines personnes, et qu'on avait mal interprété ce qui avait été dit lors de la rencontre alors que nous étions pourtant bien là avec les hauts représentants, les hauts fonctionnaires nationaux des Affaires indiennes et le ministre accompagné de ses principaux cadres politiques.
On comprend la frustration des communautés qui croient à la parole du gouvernement fédéral quand il négocie des ententes. La communauté de Kashechewan est un exemple de l'incapacité du gouvernement à respecter les normes les plus élémentaires.
Il y a tout juste un an et demi, deux jeunes gens, Jamie Goodwin et Ricardo Wesley, ont brûlé vifs dans une cabane qui servait de poste de police parce qu'il n'y avait pas de locaux adéquats pour la police de Kashechewan; il n'y avait pas non plus de service d'incendie. Depuis des années, la police Nishnawbe Aski disait que si l'on ne finançait pas les services de police de la Première nation conformément à l'entente conclue, quelqu'un allait être blessé ou tué, peut-être un citoyen dans une communauté où il n'y avait pas de services de police, ou peut-être un policier dans une communauté isolée où il n'y avait aucun renfort.
Malheureusement, à Kashechewan, il s'agissait simplement de deux jeunes gens qui n'étaient pas des criminels. C'étaient simplement deux jeunes excités qui ont été enfermés dans ce qui n'aurait jamais été utilisé comme cellule dans tout le reste du monde occidental, et ils ont brûlé vifs.
J'ai vu cette prison avant que ces hommes y meurent. J'y suis allé avec le ministre de la Sécurité publique de l'Ontario auquel nous avons montré cette baraque qui avait l'air d'un taudis sordide dans une zone de guerre. Nous lui avons dit que c'était tout ce que les policiers avaient et qu'il fallait faire quelque chose.
Nous avons dit à la Chambre des communes qu'il fallait conclure des ententes. On en vient toujours à la question de la signature des ententes. Pour ce qui est des services de police, ce sont les gouvernements fédéral et provincial qui signent ces ententes avec, par exemple, les services de police Nishnawbe Aski ou les services de santé. Et ensuite, les deux gouvernements, fédéral et provincial, tournent le dos à ces engagements et laissent les communautés à leur triste sort.
L'enquête sur cet incendie vient de se terminer en Ontario, avec des recommandations accablantes. C'est le genre de recommandations qu'on faisait dans les communautés non autochtones il y a 40 ou 50 ans pour établir des normes élémentaires. On disait par exemple qu'il fallait du matériel pour éteindre les incendies, des gicleurs dans tous les édifices, des installations et un financement corrects pour les services de police de ces communautés. Le problème, c'est qu'on signe des ententes mais que le gouvernement fédéral est très rarement de bonne foi quand il les signe.
Je dirai que, dans le cas du projet de loi , nous avons un accord qui fonctionne. Je crois que nous avons un accord parce que le Grand conseil des Cris, qui s'est battu pendant si longtemps, a finalement déclaré: « C'est notre territoire. Lorsqu'il y a des projets de développement sur notre territoire, cela doit se faire avec notre consentement et, sans notre consentement, rien ne se fera. » C'était une position de départ clairement intransigeante. Toutes les collectivités ont maintenu cette position. Cela a amené le Québec à la table des négociations, puis ce fut le tour du gouvernement fédéral.
J'aimerais croire qu'il n'est pas nécessaire d'attendre une position intransigeante pour conclure de nouveaux accords. Il y a cependant des jours où je m'interroge. Je m'interroge lorsque je vois le récent rapport du directeur parlementaire du budget et le déplorable manque de normes pour les écoles des Premières nations. Nous parlons une fois de plus d'accords conclus et d'accords rompus, car ils sont couramment rompus.
La collectivité d'Attawapiskat, celle qui a amené M. Page à examiner le financement, a été empoisonnée pendant 30 ans. Les enfants y ont été exposés à des risques et ils commencent à avoir des symptômes de leucémie parce qu'ils ont fréquenté une école située sur le plus grand site contaminé au diesel de l'histoire de l'Amérique du Nord. Leur cour d'école se trouve sur ce site. Ils ont été exposés chaque jour à de faibles niveaux de benzène et de méthyléthylène dont les particules étaient soulevées avec la poussière de la cour d'école. C'est une collectivité qui avait négocié.
Encore une fois, nous parlons d'une collectivité qui a négocié de bonne foi, qui a fait toutes les études réclamées, qui a produit tous les rapports demandés, qui a obtenu des engagements par écrit des bureaucrates des Affaires indiennes à Thunder Bay, à Toronto et jusqu'au bureau du ministre, Robert Nault. M. Nault est allé à Attawapiskat en juillet 2000 et s'est engagé à y construire une école. En novembre 2005, le ministre Andy Scott a dit aux hauts fonctionnaires de faire construire cette école. L'ancien ministre des Affaires indiennes, aujourd'hui à la tête d'un autre ministère, a envoyé une lettre à la collectivité pour dire qu'il appuierait le plan au Conseil du Trésor.
Nous traînerions devant les tribunaux toute personne avec qui nous aurions des relations d'affaires et qui signerait ce genre d'accord pour ensuite le violer. Nous aurions gain de cause. Toute personne qui s'engage verbalement et par écrit, qui chemine avec un partenaire pour tout à coup se retirer des négociations à la onzième heure et prétendre qu'il n'y avait jamais eu d'entente s'expose à un procès. Pourtant, les Premières nations sont laissées en plan de la sorte.
En fin de compte, il est nécessaire de prendre à l'égard des collectivités des engagements qui ne soient pas arbitraires, changeants ou fondés tout simplement sur la décision d'un ministre de dépenser l'argent là où bon lui semble. Il se peut que l'argent soit restitué au Conseil du Trésor, qu'il soit retiré d'une enveloppe destinée aux écoles et dépensé ailleurs. À cet égard, le directeur parlementaire du budget nous a montré très clairement que les normes des Affaires indiennes sont changeantes, aléatoires et impossibles à mesurer.
À titre d'ancien commissaire d'écoles, j'ai toujours été indigné du résultat lorsque j'ai tenté d'obtenir une réponse claire du ministère des Affaires indiennes concernant ses méthodes de planification. Il les inventait à mesure. Au lieu d'avoir devant moi des fonctionnaires qui pouvaient fournir des réponses, j'avais affaire à des doreurs d'image.
La fonction publique est là pour protéger l'intérêt public et veiller à ce que les sommes prélevées auprès des contribuables du Canada par le gouvernement soient sagement dépensées. Le rôle des fonctionnaires n'est pas de couvrir les ministres ou leurs décisions politiques arbitraires. Pourtant, c'est ce que nous constatons constamment aux Affaires indiennes. Il y a donc lieu d'espérer que le gouvernement fédéral se sentira obligé d'entreprendre sérieusement, partout au Canada, des négociations fondées sur la bonne foi et de dire aux collectivités des Premières nations qu'il ne formulera pas de plans autrement que dans la transparence.
C'est avec un certain cynisme que les gens qui travaillent auprès des collectivités des Premières nations entendent le gouvernement fédéral dire constamment aux Premières nations qu'elles doivent rendre des comptes, faire preuve de transparence, montrer leurs états de comptes, éviter de jouer avec les chiffres et être en mesure de montrer comment l'argent est dépensé. Or, c'est ce que font les collectivités des Premières nations. Dans le cas contraire, les finances sont immédiatement mises en tutelle.
Pourtant, les fonctionnaires des Affaires indiennes ne se soumettent pas aux mêmes critères clairs; par exemple, ils ne s'assurent pas que l'argent des enveloppes budgétaires ne puisse pas être détourné et dépensé ailleurs. Ce sont des obligations claires. Les Premières nations ne peuvent pas réaffecter ces sommes. Un conseil scolaire ne peut pas réaffecter ces enveloppes budgétaires. Une municipalité ne peut pas aller voir les membres du conseil scolaire local et leur dire qu'elle ne construira pas d'école cette année et qu'elle utilisera l'argent pour construire des routes et accorder une réduction d'impôt aux électeurs parce que c'est une année électorale. Cela ne peut pas se produire. Cela serait illégal au niveau provincial, comme il se doit. Pourtant, c'est de cette façon que le gouvernement fédéral agit avec les Premières nations.
Nous parlons d'un accord qui devrait servir de modèle. C'est un accord qui a été conclu avec un certain nombre de collectivités de la région de la Baie James au Québec. Ces collectivités ont demandé qu'on établisse des normes en matière de collaboration, de consultation et de développement du territoire. Elles voulaient participer à l'élaboration de ces normes.
Je suis très fier de collaborer avec tous les partis de la Chambre pour assurer l'adoption de ce projet de loi et l'entrée en vigueur de cet accord. Toutefois, le gouvernement fédéral doit respecter les normes de confiance et de respect afin de favoriser le développement de toutes nos collectivités des Premières nations parce que les ressources les plus précieuses que nous possédons sur nos terres et sur le territoire au nord du 50e parallèle ne sont ni les ressources forestières ou hydrauliques, ni l'or et les diamants. Ce sont les jeunes et les enfants qui vivent dans les réserves et qui sont souvent complètement laissés pour compte. L'incapacité du gouvernement de travailler avec les collectivités pour mettre en valeur le potentiel de ces enfants, de ces jeunes et de ces collectivités grandissantes est une grande perte pour nous, pour notre avenir et pour celui de notre pays.
J'espère que l'esprit du projet de loi nous aidera, et aidera toutes les collectivités, à aller de l'avant.
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Monsieur le Président, compte tenu de l'esprit de coopération qui entoure l'étude de ce projet de loi, je ne vais pas me prévaloir de tout le temps qui m'est alloué. Je vais profiter de l'occasion pour parler de certains points déjà soulevés par le député qui m'a précédé et pour faire certaines remarques sur la suite à donner aux revendications territoriales et sur l'amélioration ou la modification des revendications territoriales.
Il y a deux types de revendications territoriales. Il y a les revendications globales, qui incluent absolument tout. Il s'agit alors d'un traité complet qui porte sur l'ensemble du territoire, des ressources et qui comprend parfois des accords d'autonomie gouvernementale. C'est ce qu'on appelle une revendication globale.
Il y a aussi les revendications particulières. Lorsqu'il y a un traité en vigueur mais que celui-ci n'a pas été respecté, on fait valoir qu'une disposition du traité n'a pas été respectée, et un grief est déposé.
En ce qui concerne les revendications particulières, dont je traiterai d'abord parce qu'elles sont les plus simples, le gouvernement a mis en oeuvre une excellente initiative dont toutes les parties sont convenues, visant à saisir les tribunaux de certaines revendications en les soustrayant à l'ancien système dans lequel, essentiellement, deux adversaires présentaient une revendication, faisant valoir que quelque chose avait été fait ou ne l'avait pas été. Le problème, c'était que le juge était l'une des parties, ce qui n'a aucun sens.
Le nouveau système de traitement des revendications particulières est excellent. Dans ce système, un arbitre indépendant recueille les arguments des deux parties avant de rendre une décision. C'est une excellente amélioration et un énorme progrès. Ce système permet de régler des milliers de différends mineurs. Beaucoup de ces revendications sont simples, mais certaines sont en attente depuis des années. Toutes les parties s'entendent sur le fait que cela devrait accélérer les choses et régler le problème.
Quant aux revendications globales, dont le règlement prend bien des années, certaines sont en cours de négociation. Encore une fois, nous devons veiller à ce qu'il y ait un système équitable pour les traiter, à ce qu'elles ne soient pas noyées dans les autres affaires du ministère, à ce qu'il y ait suffisamment de ressources de sorte que les gens n'attendent pas encore jusqu'à la prochaine génération pour obtenir des réponses sur leurs revendications territoriales et l'autonomie gouvernementale, à ce que les choses se fassent d'une manière équitable et à ce qu'il y ait une sorte d'arbitre indépendant qui prenne la décision finale. J'espère que nous pourrons faire des progrès à cet égard.
Le dernier point concerne les cas où il y a un traité, plus particulièrement un traité moderne, et la façon dont nous envisageons les dispositions de mise en oeuvre. Le fait d'avoir un accord d'autonomie gouvernementale et un règlement territorial ne marque pas la fin du parcours, contrairement à ce que certains peuvent penser. C'est en fait le début d'un formidable parcours qu'entreprennent plusieurs gouvernements: le gouvernement canadien, les gouvernements des Premières nations, tous les gouvernements autochtones, inuits et métis. C'est le point de départ d'une nouvelle relation entre gouvernements. C'est une relation vivante; elle n'a rien d'immuable. Elle doit évoluer et s'épanouir en toute bonne foi et dans l'esprit dans lequel les accords ont été signés pour qu'ils puissent fonctionner et évoluer.
Peu importe le jargon juridique que les accords contiennent, la relation ne fonctionnera pas sans la volonté qu'elle fonctionne. Pour qu'elle fonctionne, il faut apporter des changements et prévoir les ressources nécessaires.
Certains des traités modernes qui ont été signés posent un certain nombre de problèmes, comme l'a souligné la vérificatrice générale. Les Premières nations qui font l'objet de traités modernes, dont bon nombre sont au nord du 60e, ont formé la Coalition pour les ententes sur les revendications territoriales, car leurs demandes ne sont pas entendues. Les gens pensent que la signature d'un traité règle tout. Les organisations et les gouvernements ont d'autres chats à fouetter et oublient que le processus de mise en oeuvre de ces traités modernes n'est pas simple, n'est pas financé et n'est pas terminé. Il y a encore énormément de pain sur la planche en ce qui concerne la mise en oeuvre des traités.
Triste de voir qu'un si grand nombre de membres des Premières nations ont besoin d'une organisation et de conférences pour que nous entendions leurs doléances. Nous devons traiter leurs demandes de bonne foi.
On ne connaît pas nécessairement le montant associé à chaque revendication dès le lendemain de la signature du traité. Par exemple, les négociateurs des revendications territoriales au Yukon ont prescrit, avec sagesse, une période d'examen de neuf ans. Après neuf ans, ils examineront la situation pour voir si les montants versés en vertu des ententes sur le transfert des programmes et des services à chaque gouvernement des Premières nations pour faire fonctionner un programme dont s'occupait auparavant le gouvernement fédéral sont suffisants.
L'ajout de cette période d'examen était très sage. Malheureusement, nous en sommes maintenant à la treizième année de la période d'examen de neuf ans. Cela ne devrait pas être aussi long. Les études, auxquelles ont participé des représentants des deux gouvernements, ont été menées pour déterminer les dépenses brutes et les coûts exacts de ces programmes. Il est temps de s'asseoir et de faire les calculs. Comme le député l'a dit, le gouvernement fédéral doit nommer un négociateur qui négociera de bonne foi.
Ce qu'on nous a dit pendant toutes ces années, plus d'années en fait que n'a duré la Première Guerre mondiale, c'est que les négociateurs fédéraux n'ont cessé de changer et qu'ils n'avaient même pas de mandat du conseil des ministres. Cela n'aide pas à faire progresser les choses.
Il reste à espérer que les représentants du gouvernement ont, ces dernières semaines, saisi le message provenant de la coalition et des audiences de notre comité, où le sujet a été abordé. Je félicite d'ailleurs les membres du comité à cet égard. Je ne me souviens plus quel membre a abordé ce sujet, mais je le félicite de l'avoir porté à l'attention des autres membres.
Prenons aussi l'exemple de ces ententes modernes qui accordent certains pouvoirs au gouvernement d'une Première nation. Cela tombe sous le sens. Il existe des cas très probants de Premières nations qui ont géré avec succès leurs propres programmes. Elles semblent malheureusement rencontrer d'innombrables obstacles qui les empêchent d'assumer les pouvoirs qui leur ont été conférés par voie législative.
Une de nos Premières nations s'évertue à obtenir un pouvoir en particulier, et je n'accuse personne, depuis maintenant neuf ans. C'est essentiellement le temps qu'ont duré ensemble les deux Grandes Guerres. Elle tente simplement d'obtenir un pouvoir qui lui revient selon la loi. Rien ne devrait prendre autant de temps. Peut-être que certaines personnes ont des réserves au sujet des ententes, mais il aurait fallu y penser au moment de leur signature.
Les ententes ont force de loi. Elles ont en fait plus de poids, car elles sont protégées par la Constitution. Les revendications territoriales et, dans certains cas, les ententes sur l'autonomie gouvernementale sont protégées par la Constitution, mais pas les ententes du Yukon.
Nous avons signé ces ententes en toute bonne foi et au nom de la Couronne. Nous devrions les mettre en oeuvre en toute bonne foi. Nous devrions nous asseoir, fournir des négociateurs qui ne changent pas constamment et qui disposent d'un mandat et de ressources leur permettant d'en arriver à une entente accordant aux Premières nations le pouvoir de mettre en oeuvre ces programmes. Je crois que nous serions agréablement surpris et que nous bénéficierions des réussites qui en découleraient.
Certaines des expériences du passé n'ont pas été très fructueuses. Ces nouveaux modèles ne peuvent vraisemblablement pas être pires, et ils pourraient même devenir de grandes réussites pour le Canada. On pourrait même réaliser des économies au niveau des ressources, pour plusieurs raisons que je n'aborderai pas. Nous pourrions évidemment éviter ainsi bon nombre d'erreurs humaines et combler les lacunes en ce qui concerne les réussites. Nous aurions de nouveaux modèles qui pourraient s'avérer efficaces dans ces collectivités si nous consentions tout simplement à consacrer un peu de réflexion, d'efforts et de ressources à la mise en oeuvre de ces ententes sur les revendications.
Un de mes électeurs a suggéré que nous mettions sur pied une commission indépendante, sur le modèle de la Commission des revendications particulières, pour étudier certains des problèmes reliés à la mise en oeuvre, au lieu de faire traîner les négociations en longueur. D'ailleurs, il est plutôt ironique que nous devions négocier des droits qui sont conférés par la loi. Pourquoi ne pas obtenir un avis indépendant à cet égard et poursuivre les travaux pour que ces ententes puissent aller de l'avant?
Le projet de loi dont nous sommes saisis aujourd'hui est un bon exemple de corrections apportées, mais il faut reconnaître qu'elles ont été trop longues à venir. Je sais qu'il y a d'autres griefs. Il est arrivé à bon nombre de reprises en comité que des corrections administratives soient exigées. Je félicite le gouvernement fédéral qui semble s'être engagé à ce que les autres détails soient réglés d'ici un an. Nous ne voulions pas poursuivre nos travaux avant d'obtenir l'assurance du ministère que ces corrections administratives nécessaires seraient apportées.
Le dernier point que j'aimerais soulever porte sur le fait qu'il arrive parfois que certains ministères du gouvernement fédéral ne semblent pas savoir que, lorsqu'il existe des liens avec un autre gouvernement ayant un statut égal dans certains secteurs, le ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien n'est pas le seul en cause. Ces ententes sont signées à la fois par le Canada et par une Première nation. Toutes les entités au sein de la Première nation doivent respecter ces ententes, mais tous les ministères fédéraux doivent les respecter aussi.
L'obligation de consulter dont le dernier intervenant a parlé si éloquemment ne vaut pas seulement pour le ministère des Affaires indiennes, si obligation il y a. Elle vaut pour le gouvernement du Canada et pour l'ensemble des ministères. Le gouvernement du Canada regroupe 50 ou 60 ministères et organismes. Il n'y a pas que le ministère des Affaires indiennes dont les activités peuvent porter atteinte aux droits des Premières nations, des Autochtones, des Inuits et des Métis.
Soit dit en passant, j'espère que le ministre accordera son attention à l'association des Métis du Yukon qui s'est réunie en fin de semaine dernière et qui est à la recherche de financement.
Le ministère des Affaires indiennes n'est pas le seul à devoir respecter l'obligation de consulter, car de nombreux autres ministères et organismes pourraient poser des gestes qui empiètent sur les droits des Autochtones. Tous doivent être bien au courant des traités modernes, lesquels prévoient des relations de gouvernement à gouvernement et l'obligation de consulter, et savoir qu'ils s'appliquent à tous les ministère et organismes fédéraux.
J'espère que les fonctionnaires des autres ministères qui sont à l'écoute s'en souviendront et se mettront à jour. Leur tâche est loin d'être facile, car toutes sortes d'ententes sont conclues d'un bout à l'autre du pays, et elles sont toutes différentes. C'est tant mieux parce que cela tient compte de l'individualité des personnes et des collectivités, mais cela complique également la tâche des administrateurs qui doivent savoir quelles sont les responsabilités du gouvernement fédéral afin de respecter la notion d'honneur de la Couronne dans leurs rapports avec chacun des gouvernements et chacune des collectivités.
Ce n'est pas une mince tâche, mais les progrès réalisés grâce à ce projet de loi prouvent bien ce que l'on peut accomplir quand chacun y met du sien. J'appuierai donc cette mesure et j'espérerai des progrès. Espérons que le travail se poursuivra afin de régler les revendications particulières dans les domaines qui n'ont pas encore été abordés ainsi que les revendications globales et de mettre en oeuvre les traités modernes.