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ACVA Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des anciens combattants


NUMÉRO 015 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 25 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Il s'agit de la 15e séance du Comité permanent des anciens combattants.
    Nous recevrons deux témoins séparément, dont un à huis clos. L'autre, Mme Francine Matteau, comparaîtra la première.
    Madame Sgro, vous vouliez faire une remarque?
    Oui. J'ai manqué quelques séances. Où en sommes-nous en ce qui concerne l'agent Orange?
    Eh bien, j'allais justement en parler.
    En raison d'une motion adoptée à la Chambre, notre séance de ce jeudi est annulée. Le président Calderon prendra la parole à la Chambre à ce moment-là. Tous les travaux seront donc retardés.
    À ce stade-ci, nous avons au programme l'étude et, bien sûr, l'approbation de notre projet de rapport, puis nous étudierons le projet de loi C-473 et recevrons évidemment des témoins à ce sujet. Ensuite, nous nous pencherons sur la question du recours aux banques alimentaires par les ancien combattants, ce qui accaparera le reste de notre calendrier.
    Donc, cette question demeure inscrite sur la liste de nos travaux futurs; nous ne nous en occuperons pas maintenant, avant le mois de juin, mais nous le ferons à l'automne.
    Ce sujet figure parmi d'autres sur la liste générale, en effet. À n'en pas douter, nous allons devoir tenir une séance pour discuter de nos travaux, probablement à la première réunion suivant le congé, et nous débattrons de ce que seront les priorités.
    D'accord. Ça va, merci.
    Parfait.
    Nous allons demander à Mme Matteau de faire sa déclaration préliminaire.
    Je présume que vous avez des remarques préliminaires à faire, madame Matteau. Est-ce exact?

[Français]

[Traduction]

    Ensuite, nous effectuerons une rotation. Nous procéderons à un premier tour de table, puis nous essayerons d'effectuer un deuxième tour de table le plus complet possible, alors veuillez partager votre temps en conséquence. Après cela, nous passerons au témoignage de M. Leduc pendant la deuxième heure.
    Madame Matteau, je vous prie de commencer. Après que vous aurez terminé vos remarques d'ouverture, les membres vous poseront leurs questions tour à tour.
(1105)

[Français]

    Bonjour à tous.
    Mon nom est Francine Matteau, mère du caporal-chef Nicolas Magnan blessé au combat à Kandahar le 22 août 2007. Par suite de l'accident de mon fils, j'ai été sensibilisée au sort réservé à ce que j'appelle la nouvelle génération d'anciens combattants. J'ai donc décidé d'entreprendre cette croisade par souci de justice pour tous. Je témoignerai selon ce que je sais.
    Tout n'est pas mauvais dans cette nouvelle charte. Cependant, le retrait de la pension mensuelle est une grave erreur. La pension était et restera la seule manière de leur assurer une sécurité financière et une paix d'esprit très bien méritée. Après maintes discussions avec la direction d'Anciens Combattants Canada, les faits nous confirment que cette nouvelle charte a été adoptée trop rapidement sans en évaluer toutes les conséquences. Entre autres, elle contribue à se débarrasser des anciens combattants à plus ou moins brève échéance. Est-ce par souci d'économie? Plusieurs éléments me laissent croire que oui. Une fois libérés des Forces canadiennes, ils n'ont plus beaucoup d'aide d'Anciens Combattants Canada.
     Notre pays a décidé d'envoyer nos soldats à la guerre. Bien sûr, on pouvait prévoir qu'il y aurait davantage de blessés. Le Canada doit prendre ses responsabilités et s'occuper des combattants lorsqu'ils reviennent handicapés physiquement et psychologiquement, et cela, jusqu'à la fin de leurs jours.
    Le Canada, pour écrire sa nouvelle charte, s'est inspiré de ce qui se fait dans deux pays, la Grande-Bretagne et l'Australie. Ces deux pays sont revenus sur leur décision par suite de la pression des militaires, des familles et des médias. La Grande-Bretagne donne maintenant jusqu'à 855 000 $ en guise de montant forfaitaire, plus une pension mensuelle. Pour l'Australie, je ne connais pas les chiffres.
    Je n'en demande pas tant. Je suis consciente qu'il y a aussi une question de budget. Cependant, le retour de la pension mensuelle est une priorité. C'est aussi une question de justice, de parole et de respect pour ceux qui ont choisi une carrière militaire. Lors de leur engagement, ils étaient convaincus que si, par malheur, il leur arrivait quelque chose, leur pays serait là pour eux. Ce n'est plus le cas. Ils se sentent humiliés, trahis, rejetés par ceux en qui ils avaient mis toute leur confiance, ce qui n'aide pas à retrouver une santé physique et psychologique. Ils se sentent abandonnés par le système.
    Passons maintenant au montant forfaitaire. C'est très simple, on ne donne pas un gros montant d'argent à quelqu'un qui est instable psychologiquement. Ils pensent à s'évader, ils s'isolent, abusent d'alcool et de drogue, ils s'endettent, et lorsqu'ils reçoivent leur montant forfaitaire, ils paient leurs dettes et n'ont plus un sou. À la fin, les familles en font les frais. Ils sont découragés. Ces hommes et ces femmes sont détruits. Durant une mission, ils sont exposés à un stress intense, 24 heures sur 24, dormant très peu, vivant et voyant des horreurs au quotidien. Personne ne peut sortir indemne d'un tel vécu. De plus, pour recevoir leur montant forfaitaire, ils doivent se battre et se battre alors qu'ils n'en ont plus la force, aller d'appel en appel, revivre ces événements douloureux et pénibles, et cela dure généralement trois ans, et parfois plus.
    Tout ce processus ne fait qu'augmenter le degré d'agressivité, de frustration et d'angoisse. Ils veulent passer à autre chose, mais dans ces conditions, c'est impossible. Le montant forfaitaire maximum est de 269 000 $ pour une indemnité maximum, c'est-à-dire 100 p. 100. Plusieurs d'entre eux, d'après les barèmes établis par le ministère, arrivent à des taux de 200 p. 100 et de 300 p. 100. Les 269 000 $ semblent donc carrément insuffisants. Dans le cas de mon fils, son avocate arrive à une indemnité de 104 p. 100, sans compter son syndrome de stress post-traumatique pour lequel il a déjà reçu 25 p. 100. Mon fils Nicolas attend la date de son deuxième appel. C'est un délai de près de trois ans.
    Pour toutes ces raisons, j'insiste sur le retour de la pension mensuelle. Ils ont de lourdes séquelles, et cela, pour toute leur vie. Quelques exemples supplémentaires suivront.
(1110)
    Bien sûr, avec un bon suivi, ils arriveront à fonctionner à peu près normalement, mais la moindre difficulté ou déception les ramèneront souvent à la case départ.
    J'ose espérer que vous avez entendu et que vous entendrez un spécialiste parler du syndrome de stress post-traumatique. Il en aurait sûrement beaucoup à vous apprendre sur ce très grave problème. Il faut aussi tenir compte du fait que plus ils vieilliront, plus ces blessures psychiques et physiques leur causeront différents problèmes de santé. À ce moment-là, ils auront le fardeau de la preuve.
    Parlons de l'impact sur la famille. Ce n'est pas facile de soutenir un conjoint qui souffre du syndrome de stress post-traumatique. Pensons à toutes ces difficultés auxquelles ils ont à faire face. Plusieurs d'entre eux ont aussi des enfants, en plus d'avoir des difficultés financières. Combien de drames à venir, divorces, suicides. Vous savez que la troisième cause de mortalité chez les militaires est le suicide.
    J'ai assisté à une réunion organisée par l'ombudsman, M. Pat Strogan, à la base militaire de Valcartier. J'ai entendu, ce soir-là, des histoires qui m'ont complètement bouleversée. Un ancien combattant de 40 ans pleurait au micro en racontant qu'il n'avait plus un sou. C'est une histoire tragique parmi tant d'autres.
    Parlons maintenant du programme de retour à la vie civile. Oui, ils peuvent retourner aux études, période durant laquelle on leur assure 75 p. 100 de leur salaire, et même obtenir un diplôme d'études collégiales. Ce n'est quand même pas si mal si on tient compte des déductions en moins, ça peut aller. Le problème est que plusieurs d'entre eux n'ont pas les préalables pour obtenir un diplôme d'études collégiales. Seront-ils capables de se concentrer pour parvenir à étudier, d'autant plus qu'ils ont quitté les études depuis fort longtemps?
    Je connais une personne à qui on a payé un cours de gardien de sécurité. Pour cet emploi, il gagne 15 $ l'heure, soit 27 000 $ par année, comparativement à 50 000 $ quand il était dans les Forces canadiennes.
    Ceux qui arriveront à terminer un diplôme d'études collégiales auront un salaire de 32 000 $ à 35 000 $ par année, alors que plusieurs d'entre eux gagnaient entre 60 000 $ et 70 000 $ par année pendant leur vie de militaire. Comment pourront-ils conserver leur maison, payer pour l'éducation des enfants et les activités parascolaires? Il s'agit d'une perte de revenus substantielle. Comme l'a confirmé l'ombudsman, plusieurs d'entre eux vivront carrément sous le seuil de la pauvreté. Vous conviendrez que cette situation est totalement inacceptable. Qui en est responsable?
    Une autre chose m'inquiète. Quel genre d'employés feront-ils? Combien de directeurs seront prêts à tolérer leurs sautes d'humeur, leurs absences répétées, parce que certains jours, ça ne va pas? S'ils perdent leur emploi, ils devront se justifier, mais ce système ne sera pas éternel. Je ne fais que vous faire part de la réalité telle qu'elle a été décrite par les militaires rencontrés. Ils deviennent asociaux, recherchent la paix, n'acceptent plus les contrariétés. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle plusieurs d'entre eux se retirent et s'isolent de la société.
    Ce système n'est nullement adapté à leurs besoins. Combien d'entre eux décrocheront? Combien d'entre eux feront taire la vie? On trouvera sûrement encore des anciens combattants devenus des sans-abri. N'oublions pas qu'ils restent des êtres très fragiles. Tous ces systèmes coûtent très cher à administrer, sans compter qu'ils génèrent beaucoup de frustrations
    Il s'agit d'une urgence, redonnons-leur la pension mensuelle et laissons-les vivre leur vie comme ils l'entendent. Vous en conviendrez, ils en ont assez bavé.
     J'espère avoir apporté quelques informations — que vous connaissiez déjà sans doute — qui, je l'espère, vous aideront à comprendre que le rétablissement de la pension mensuelle est d'une importance capitale.
    Avec tout le respect que nous leur devons, ils ne méritent pas d'être traités de cette façon. Ils ont servi votre pays, leur pays. Il est donc de notre devoir d'être là pour eux. Ne croyez pas que nous pouvons accepter qu'ils soient tassés sur la voie de service parce qu'ils ne peuvent plus donner leur 100 p. 100. Ce ne sont pas des accidentés de travail ou des accidentés de la route qui roulaient à 150 km/h en état d'ébriété, mais plutôt des individus soucieux de la sécurité de leur pays.
(1115)
    Le système actuel démontre qu'ils sont pénalisés pour avoir choisi une carrière militaire.
     Voilà. Vous avez certainement des questions, et j'y répondrai en fonction de ce que je sais.
    Merci.

[Traduction]

    Merci, madame Matteau.
    Nous allons maintenant passer à la série de questions.
    Commençons par le Parti libéral, avec M. Oliphant, pour une durée de sept minutes.
    Je voudrais simplement vérifier: croyez-vous que nous effectuerons deux tours de table?
    Nous pourrions être en mesure d'avoir deux tours, si nous arrivons à être brefs dans nos questions.
    Si vous vouliez bien me faire signe au bout de quatre ou cinq minutes, je demanderais à Mme Sgro si elle souhaite ajouter quoi que ce soit afin que nous puissions intervenir tous les deux.

[Français]

    Merci encore, madame Matteau, de votre présentation. Elle était très bonne.

[Traduction]

    Je vais parler en anglais parce qu'est plus facile pour moi; maintenant, vous pourrez m'entendre en français.
    Nous avons parlé à plusieurs reprises de ces cas au ministre des Anciens Combattants; chaque fois, il se plaît à répondre — il l'a déjà répété trois fois à la Chambre — que lorsqu'on accorde un paiement forfaitaire, on verse aussi un revenu mensuel. Il affirme cela régulièrement, en ajoutant qu'on n'a pas mis fin au versement d'un soutien du revenu mensuel. Il ne semble pas comprendre que le fonds de transition prévoit un soutien mensuel très limité. Alors quand...
    [Note de la rédaction: Difficultés techniques.]
    Veuillez m'excuser pour un moment. Nous avons un problème technique.
    D'accord, ça devrait aller, maintenant. Veuillez me pardonner, monsieur Oliphant. Nous repartirons le chronomètre dès que vous pourrez reprendre le fil de votre intervention.
    La meilleure solution me paraît être le versement d'un paiement forfaitaire pour l'adaptation, la rénovation des maisons et les dépenses qui sont ponctuelles de par leur nature même, suivi d'une pension d'invalidité continue, qui n'est pas assujettie à un retour au travail, bien franchement, mais qui est liée à l'invalidité, laquelle dure toute une vie.
    Êtes-vous d'accord avec moi pour dire qu'il devrait toujours y avoir un paiement forfaitaire pour rénover une maison, ou pour ces autres choses qu'il faut faire, suivi d'une pension mensuelle permanente?

[Français]

    Il existe déjà un programme pour l'adaptation des maisons, par exemple. On parle ici de la fabrication d'une rampe, de l'élargissement des portes pour permettre le passage d'un fauteuil roulant et ainsi de suite. Il y a aussi des programmes par l'entremise desquels les gens qui ont subi des blessures peuvent obtenir des prothèses pour leurs chaussures. Il est possible de faire faire des prothèses, toujours aux frais du ministère.
    En ce qui a trait au montant forfaitaire actuel, il est octroyé parce que ces gens doivent vivre avec leurs blessures. Je suis d'accord avec vous pour dire que ce montant n'est pas très élevé. Toutefois, c'est complexe. Si on leur donne le double de ce montant, ils vont faire des folies. Je ne sais pas comment on peut gérer ça. Présentement, ils reçoivent un montant de 269 000 $ qui est indexé au coût de la vie d'année en année. Je ne sais pas si ce montant pourrait être versé différemment, mais si on leur donne le montant global alors qu'ils sont encore fragiles, je me demande ce qu'ils en feront. Ils vont rester fragiles toute leur vie, mais ils vont tout de même reprendre du poil de la bête au fil des années. En Angleterre, le montant accordé est très élevé. Je ne sais pas si ces vétérans agissent comme les nôtres. Quoi qu'il en soit, des membres du personnel médical de Valcartier m'ont confirmé qu'ils n'avaient plus un sou. Ils pleurent sur leur sort parce que plus personne n'a d'argent, ou très peu.
    Mon fils a fait de bons placements. Bien sûr, il avait 32 ans, et non 23 ou 24 ans, au moment où c'est arrivé. Si vous leur donnez un montant de 200 000 $ alors qu'ils ont 23 ou 24 ans, ils ont l'impression d'avoir gagné à la loterie et perdent le contrôle. Étant donné la grande fragilité de leur état psychologique, ils s'isolent, boivent ou, dans certains cas, dépensent leur argent au casino. Ils ont chacun leur façon de se défouler, mais en fin de compte, il ne leur reste plus d'argent.
    Je ne sais pas comment vous pourriez gérer le montant forfaitaire, mais l'idée de leur donner un montant global me fait un peu peur. Il y a peut-être une autre façon de procéder, par exemple en versant un montant tous les cinq ans. Je ne sais pas. Quoi qu'il en soit, un gros montant global va donner lieu aux mêmes problèmes.
    Il ne faut pas oublier la pension mensuelle. Pour ma part, c'est ce à quoi je tiens vraiment. Le montant forfaitaire ne règle aucun problème. Certains jeunes pleurent même chez leur psychologue. Ils ne connaissent pas exactement mon nom, mais ils savent que je suis la mère de Nicolas Magnan et que j'ai fait des demandes. Ils ne savent pas ce que ça va donner. Ils s'accrochent à tout pour s'en sortir. Ils sont découragés. Ils n'ont plus d'argent. C'est l'enfer pour eux. C'est vraiment triste.
(1120)

[Traduction]

    Vous avez moins de deux minutes.
    J'ajouterais que si le versement forfaitaire est censé être investi pour assurer un revenu garanti pendant un an, cela ne fonctionne pas. Je pense à mon propre portefeuille de REER, qui a été durement touché. Et ce n'est pas parce que je n'avais pas d'argent. Donc, si je comptais là-dessus pour vivre en espérant obtenir un taux d'intérêt de 4 ou 5 p. 100 par année, cela ne tiendrait pas. Alors cela n'équivaut pas à un remplacement du revenu. C'est un paiement qui n'est ni chair, ni poisson.
    Si nous avons d'autres processus d'adaptation, c'est bien; et il nous faut un revenu mensuel dont nous assumerons la responsabilité en tant que pays.
    Merci beaucoup de votre venue, et merci d'attacher de l'importance à cette question.
    De toute évidence, nous réalisons des progrès en effectuant cette étude, comme cela a toujours été notre objectif depuis l'adoption de cette charte. Nous savions que ce n'était pas un document parfait. On a toujours pensé qu'il faudrait procéder à un examen pour déterminer des façons de l'améliorer. La question du paiement forfaitaire revient souvent.
    En ce qui concerne le réemploi, comment cela s'est-il passé pour votre fils sur le plan des possibilités d'occuper un autre emploi au sein des forces armées? Avait-il des possibilités de recyclage professionnel?

[Français]

    Actuellement, le processus a été un peu retardé parce que Nicolas était en congé parental. Il est retourné au travail lundi dernier, le 17 mai. Son épouse est thaïlandaise et elle veut retourner vivre en Thaïlande. On leur offre le retour aux études. Nicolas a demandé de pouvoir apprendre le thaï pour démarrer son commerce là-bas, apprendre à le lire, l'écrire et le parler. Il n'a pas encore eu de réponse à ce sujet.
    Peu de gens ont entrepris leur retour aux études, je crois. Nicolas faisait partie des premiers blessés. Évidemment, je suis surtout au courant de ce qui se passe dans la région de Québec, mais je suis très peu au courant de ce qui se passe ailleurs. Je sais que des blessés d'ailleurs, d'autres provinces, sont revenus. Je ne pourrais pas vous dire comment ils ont été suivis.
     Comme je le disais un peu plus tôt, tant mieux s'ils peuvent retourner aux études, mais un diplôme d'études collégiales n'assure qu'un faible revenu. S'ils ont une famille, ça ne se compare pas. Comme tout le monde, ils ont déjà des obligations. Ils ont une maison dont la valeur correspond à leur ancien revenu. La voiture, c'est la même chose. Bien sûr, on peut la changer, on n'est pas obligé de se promener en Mercedes, on peut se promener en Volkswagen, ça va quand même, mais seront-ils obligés de vendre la maison à laquelle ils tenaient? Ce sont des choses comme cela qui m'inquiètent relativement au retour aux études. D'autre part, je ne suis pas certaine qu'ils puissent faire de bons employés avec leur syndrome de stress post-traumatique. Cela m'inquiète. Ils ont tellement de sautes d'humeur, ils cherchent toujours à s'isoler. Comment faire pour les intégrer dans un groupe?
    La semaine dernière, j'ai vu une émission, comme certains d'entre vous, peut-être, car je sais que vous avez de longues heures de travail. Elle était diffusée par HiSToRiA TV. C'était une émission sur le syndrome de stress post-traumatique. On voyait des hommes qui étaient sortis des Forces canadiennes depuis plusieurs années. Ils avaient encore de graves séquelles. Un de ces hommes se promenait toujours avec un couteau dans les poches, c'est assez spécial. Il allait au cinéma, il fallait qu'il s'assît en arrière. Un autre ne pouvait même plus aller à la boucherie et passer devant un comptoir de viande. Il disait qu'il avait assez vu de chair. Cela donne des frissons.
(1125)
    Merci, madame Matteau.
     Monsieur André, vous disposez de sept minutes.
    Bonjour, madame Matteau. J'aimerais vous féliciter et vous remercier d'être ici aujourd'hui avec nous. En effet, je trouvais qu'il était important que vous soyez ici. Nous avons rencontré plusieurs fonctionnaires, et il est important de recevoir quelqu'un qui a vécu une situation particulière, celle d'un jeune qui est revenu d'Afghanistan.
    Aujourd'hui, vous faites une recommandation très forte relativement à la question du montant forfaitaire et de l'indemnité. Nous sommes d'accord avec vous, comme plusieurs personnes qui ont témoigné ici, au comité. Ils ont dit que lorsqu'une somme importante d'argent nous est attribuée à 22 ou 23 ans, parfois, on peut le dépenser de façon exagérée, ce qui fait en sorte que, pour le reste de la vie, il manque un montant, et c'est la famille qui doit soutenir ce jeune.
    Si j'ai bien compris, votre garçon a reçu une offre de 100 000 $.
    Oui, Nicolas est rendu à environ 165 000 $. Il devrait connaître d'une journée à l'autre la date de son appel. En principe, il devrait avoir le maximum compte tenu des handicaps qu'il a. Ils sont assez sérieux. Ses jambes sont sérieusement handicapées, il ne peut pas marcher. Dans une maison, ça va, mais ses chevilles ne s'adaptent plus au sol parce qu'elles sont presque fixes. Il a eu neuf opérations chirurgicales aux jambes et au talon, il a des douleurs constantes. C'est difficile pour lui. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, il fait du vélo. Heureusement, parce que mes deux fils sont d'anciens coureurs de vélo, ce sont même des champions. Son poids ne repose pas sur ses jambes et les pieds sont pris dans une pédale. C'est d'ailleurs ce qu'il voudrait faire en Thaïlande. Il voudrait organiser un commerce de cyclotourisme. Il avait aussi l'intention d'avoir des terres pour faire la culture de la canne à sucre.
    Il se bat donc actuellement pour avoir le montant maximal.
    Oui, forcément. Cela fera bientôt trois ans; il se bat depuis août 2007. On ne respecte jamais les délais. Vous savez, on dit toujours que les délais sont de 6 à 12 semaines pour une première approche, mais dans le cas de Nicolas, il a fallu 26 semaines avant qu'il ne puisse avoir une première rencontre.
    J'imagine que vous connaissez un peu les critères visant à déterminer les montants qui doivent être distribués et le montant forfaitaire. Je présume qu'il y a des discussions et qu'on ne s'entend pas actuellement sur ces...
    On ne s'entend pas. Dans le cas de Nicolas, il a été blessé aux deux jambes. Au niveau du calcanéum, je pense qu'il a 23 ou 24 vis dans le talon. Enfin, il est miraculé: on a sauvé ses jambes et il est en vie. Effectivement, on ne s'entend pas parce qu'on traite ses deux jambes globalement, ce qui est totalement inacceptable, à mon avis. On refuse de considérer ses blessures de façon distincte, pour chacune de ses jambes, c'est-à-dire d'accorder tel montant pour telles blessures à une jambe et tel autre montant pour les blessures à son autre jambe. Il a eu une greffe osseuse, il a une tige en acier, enfin, il a vraiment des séquelles aux deux jambes et une perte d'équilibre.
(1130)
    Vous avez dit qu'il vivait un stress post-traumatique.
    Oui.
    Quand vous êtes-vous aperçue qu'il vivait un stress post-traumatique?
    Évidemment, je m'en suis rendue compte, car Nicolas a fait sa convalescence chez moi. Je ne voulais pas qu'il aille en institution, j'ai préféré qu'il reste avec moi. En même temps, je pouvais être plus près pour discuter avec lui quand il en avait besoin. Je m'en rendais compte notamment par ses sautes d'humeur et son agressivité, par exemple quand il disait qu'il ne voulait pas parler de telle chose aujourd'hui et qu'il ne voulait rien savoir, puis venait me voir une demi-heure plus tard pour en discuter.
    Vous savez, ces gens sont vraiment instables. Cela fait presque trois ans. Il a été très bien suivi par un psychologue, mais ses sautes d'humeur se manifestent toujours. Juste le fait de chercher un trousseau de clés, ce n'est pas grand-chose, mais c'est un drame.
    Je dirais qu'ils sont instables, mais imprévisibles aussi.
    Mme Francine Matteau: Tout à fait imprévisibles.
    M. Guy André: On lui a donc offert un montant forfaitaire...
    Oui.
    ... sans nécessairement tenir compte de son état d'âme proprement dit.
    Pas vraiment jusqu'à maintenant.
    Qu'importe l'état d'âme de la personne, on lui donne un montant forfaitaire. Comme vous le disiez, l'état de stress post-traumatique ne se manifeste pas tout de suite chez la personne qui revient, mais cela se développe par la suite. À son retour, on lui donne un montant, mais on ne sait pas comment cette personne réagira avec ce montant.
    Exactement. Le choc post-traumatique n'est pas nécessairement immédiat. Il peut apparaître après plusieurs années, lors d'une situation particulière. Par exemple, un autre homme parlait de son trousseau de clés comme élément déclencheur: il voyait son trousseau de clés comme celui du blindé. Il pourrait aussi s'agir de bruits ou d'odeurs. Effectivement, cela peut surgir plusieurs années après.
    On parle tout le temps d'un montant forfaitaire important, mais ces montants forfaitaires de 269 000 $ sont accordés dans des cas uniques. Il faut se rendre à l'évidence: on n'accorde pas à tout le monde un taux d'invalidité de 100 p. 100. Dès lors, une personne dont le taux d'invalidité a été établi à 10 p. 100 ou 12 p. 100 ou 20 p. 100 peut recevoir un montant forfaitaire de 50 000 $. Si cette personne ne peut pas être recyclée ou obtenir un diplôme d'études collégiales, alors, on la laisse à elle-même et il ne se passe rien, elle n'a pas d'autre salaire. Le montant correspondant à 75 p. 100 du salaire brut qu'elle est censée retirer en permanence, peut-elle quand même le retirer, comme d'autres personnes? Je pense que votre fils le retire parce qu'on a évalué son taux d'invalidité à 100 p. 100 ou presque.
    Ce taux de 100 p. 100 ne lui a pas encore été reconnu, mais croisons-nous les doigts.
    Ça fera bientôt trois ans et on n'est pas encore rendu là. D'après les témoignages qu'on a entendus des gens du ministère, cela se fait facilement. Sans même que la personne passe en cour, on l'évalue et on lui donne un montant, l'équivalent de 75 p. 100 de son salaire, puis on l'envoie en réadaptation. Selon les schémas qu'ils nous ont donnés, tout se fait dans la même année. En l'espace de huit ou neuf mois ou un an, tout est réglé et tout va bien. Or la réalité de la vie n'est pas tout à fait cela.
    Je voudrais vous entendre à ce sujet.
    Ça ne correspond pas à la réalité. Parmi tous les amis et connaissances de mon fils, il n'y personne qui soit satisfait du traitement reçu. Ils sont tous allés d'appel en appel. C'est frustrant, et c'est difficile pour eux de toujours revivre ces événements. Je peux dire qu'au mois d'août, mon fils aura été dans cette situation depuis trois ans, et ce n'est pas encore réglé. Il y en a d'autres pour qui c'est encore pire. Je n'en connais pas un seul pour qui les choses ont été réglées rapidement, pas un seul. C'est donc bien beau ce qui est écrit dans le grand livre de la théorie, mais en pratique, ce n'est pas du tout la même chose.
    J'aimerais ajouter autre chose. Comme mon fils compte plus de 10 années de service — il en comptera 12 ou 13 quand il sera complètement libéré —, il aura droit à une certaine pension mensuelle qui lui sera accordée par les Forces canadiennes. Ce n'est pas grand-chose, soit autour de 1 100 $ par mois, puisque c'est une partie... Je ne connais pas le montant précis.
    Par contre, celui qui compte moins de 10 années de service recevra une pension qui correspondra à une partie d'un montant global. Imaginez-vous s'il ne lui reste plus rien de ses 200 000 $, ou de ses 150 000 $ — c'est selon ses blessures, et comme je vous l'ai dit, il faut se battre longtemps pour se voir accorder le maximum d'indemnités, et il faut en fournir, des preuves. Il n'aura plus aucun revenu de base.
    Par exemple, s'il se retrouve à faire comme la personne que je mentionnais plus tôt et qui a suivi un cours de gardien de sécurité, il va gagner 25 000 $ par année. Nicolas me disait que maintenant, il semble que même les débutants, les fantassins, gagnent autour de 40 000 $ par année tout au début de leur carrière.
(1135)

[Traduction]

    Merci, madame Matteau.

[Français]

    Quand ils retombent à 25 000 $, il subissent une perte de revenu énorme.

[Traduction]

    Merci, madame.
    La parole est maintenant à M. Stoffer, pour cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Madame Matteau, merci d'être venue ici aujourd'hui et d'appuyer votre fils et d'autres anciens combattants de son âge.
    Aujourd'hui, vous avez soulevé un excellent point dont on n'a pas discuté très souvent dans ce comité, à savoir les types d'emplois qu'obtiennent les anciens combattants, même après avoir reçu une formation, lorsqu'ils ne font plus partie des forces armées. Comme vous le disiez, dans bien des cas, les avantages et les salaires pourraient être bien loin de ceux qu'ils avaient dans l'armée. Si vous regardez, par exemple...
    Monsieur Stoffer, puis-je vous demander de parler lentement, s'il vous plaît? Merci.
    Vous soulevez un excellent point en ce qui concerne ce que peuvent gagner les anciens combattants dans le secteur privé comparativement à ce qu'ils gagnaient quand ils étaient militaires, en plus de tous les avantages. Si je prends le cas du salaire d'un capitaine, par exemple, il peut atteindre de 70 000 à 90 000 $, je crois. Si cette personne, comme votre fils, se recyclait et allait dans le secteur privé, elle pourrait gagner environ 40 000 $ par année; c'est toute une baisse de revenu. Cela aurait également pour effet d'aggraver les problèmes personnels qu'ils connaissent déjà, parce qu'auparavant, ils avaient un salaire décent, mais maintenant, ce n'est plus le cas. J'aimerais simplement connaître votre avis là-dessus.
    Nous avons déjà un certain nombre de personnes dans l'armée qui ont droit à un plein salaire, auquel s'ajoute une forme quelconque de rente d'ancien combattant, peut-être pour une légère invalidité, mais ils continuent de servir leur pays. Bon nombre de ces personnes, comme votre fils, ont été libérées de l'armée pour des raisons médicales. J'aimerais donc connaître votre avis. Y a-t-il des possibilités d'emploi que nous pourrions créer, au sein des forces armées, pour permettre à votre fils de recevoir une formation et d'être en mesure de réintégrer l'armée? Votre fils et d'autres personnes pourraient-ils continuer à servir leur pays en portant l'uniforme, sans nécessairement jouer un rôle de combattant? Quelque chose du genre serait-il intéressant pour votre fils? En avez-vous discuté avec lui?

[Français]

    Ce pourrait être attrayant, en général, bien que ce ne le soit peut-être pas pour mon fils puisqu'il va quitter pour aller en Thaïlande.
    Les propos à ce sujet sont contradictoires en quelque sorte. J'ai lu certains articles dans les journaux — je suis de très près ce qui se passe relativement à ce dossier. Je ne me souviens plus des noms, mais j'ai lu qu'on pouvait garder nos blessés dans l'armée et leur confier d'autres travaux. On sait qu'ils peuvent accomplir bien d'autres tâches de bureau sans être obligés d'aller au combat. Par contre, dans un autre article, on disait qu'on ne pouvait pas garder les vétérans dans l'armée, car cela nous amènerait éventuellement à accepter des handicapés comme militaires, ce qui entrerait en conflit avec les normes établies.
    Il est évident que ces militaires ne possèdent plus les caractéristiques requises. Vous connaissez les normes établies. Par exemple, ils doivent être capables de courir tant de kilomètres avec tant de livres sur le dos, ils doivent pouvoir ramper, etc. Il est certain que ces vétérans n'entrent plus dans la norme.
    J'en ai justement parlé avec mon fils. Il m'a dit que les gars faisaient semblant de rien, qu'ils s'accrochaient, évidemment. Avant de prendre son congé parental, Nicolas travaillait au mess des officiers à la Citadelle, et il aurait peut-être pu continuer à travailler ainsi pendant un certain temps.
    Or, considérant les règles de base des Forces canadiennes et les exigences à satisfaire pour être accepté comme militaire, tranquillement, on les guide vers la porte de sortie, parce qu'ils ne peuvent plus se soumettre aux exigences. On ne peut pas les mettre dehors sans raison, ce ne sont pas des sauvages. Toutefois, on ne peut pas accepter l'embauche de militaires blessés au sein même des Forces canadiennes.
    Ils peuvent occuper certains postes au sein du gouvernement fédéral, par exemple. S'ils ont les préalables, ils seraient censément les premiers à obtenir un poste. Par contre, ils ne peuvent pas faire partie des Forces canadiennes puisqu'ils n'entrent pas dans les normes. Comme je vous le disais plus tôt, une personne handicapée pourrait utiliser le fait que les Forces canadiennes acceptent les personnes handicapées pour avancer qu'il peut très bien travailler à l'ordinateur, faire telle et telle chose. C'est ce qui poserait problème. On disait qu'ils ne le pouvaient pas. Enfin, c'est ce que j'ai lu dans le journal.
(1140)

[Traduction]

    Merci, madame Matteau et monsieur Stoffer.
    La parole est maintenant à M. Kerr et à M. Lobb, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, madame Matteau, de vous être jointe à nous aujourd'hui.
    Nous allons partager notre temps. Celui-ci file rapidement, alors je ne poserai qu'une seule question.
    Beaucoup de préoccupations nous ont été exprimées au sujet du paiement forfaitaire, mais je suis légèrement perplexe. Votre fils fait toujours partie des Forces canadiennes, n'est-ce pas?

[Français]

    Oui.

[Traduction]

    Donc, il reçoit actuellement un salaire des forces armées.

[Français]

    Exactement.

[Traduction]

    Et par conséquent, les Forces canadiennes lui accordent un certain nombre d'avantages. Et tant qu'il fera partie de l'armée canadienne, il bénéficiera d'une assurance médicale et autres choses du genre.
    Dans votre dernier commentaire, si j'ai bien compris, vous avez laissé entendre qu'on ne pouvait rester dans l'armée que pour une période limitée. A-t-on dit à votre fils qu'il devait quitter les forces armées?

[Français]

    On ne le lui a pas dit. D'ailleurs, il est un des premiers cas de combattant blessé. Il faut rappeler que les premiers cas qui ont été traités ne datent pas d'il y a 20 ans, mais de 2006 seulement. Nos premiers militaires blessés l'ont été en 2007. Ça ne fait pas très longtemps.
    Nicolas a demandé sa libération la semaine dernière. Comme je le disais tout à l'heure, il veut aller vivre en Thaïlande. D'abord, vivre au Canada est pour lui une expérience à risque élevé, dès qu'il commence à neiger. Il n'a pas d'équilibre et ses jambes sont gravement handicapées. Aller faire le marché tout seul et faire le tour du Metro, c'est impossible pour lui. Par conséquent, il a décidé d'aller vivre en Thaïlande. C'est son choix, évidemment.
    Il aimerait ouvrir une entreprise de vélo-tourisme là-bas. Dans le Nord, il y a de magnifiques montagnes et des cols extraordinaires où les cyclistes peuvent faire des excursions. Ainsi, il a demandé s'il pouvait aller suivre son cours de thaï là-bas, apprendre à le lire, à l'écrire et à le parler. Son épouse parle tout de même l'anglais. Cependant, il n'a pas eu de réponse à ce sujet, et je ne suis pas en mesure de vous répondre.
    Nicolas aurait quand même un revenu de base, puisqu'il compte plus de 10 années de service. C'est pourquoi je m'inquiète beaucoup pour ceux qui comptent moins de 10 années de service et à qui on a donné leur montant total. Ils en ont fait la même chose qu'avec leur montant forfaitaire.

[Traduction]

    Je le conçois, et particulièrement en ce qui concerne les plus jeunes, mais là où je veux en venir, c'est qu'il y a un réel effort pour garder les militaires handicapés au sein des Forces canadiennes. Je voudrais simplement préciser qu'on a ce choix, et qu'avec le temps, cela devrait être de plus en plus le cas. Donc, le choix de quitter l'armée était certainement le sien; ce ne sont pas les Forces canadiennes qui lui ont dit qu'il devait partir.
    Je sais que M. Lobb voulait vous poser une question, alors je vous remercie.
    Merci, madame Matteau, et encore une fois, merci à votre fils Nicolas pour son service militaire.
    Dans le cadre de cette étude sur la Charte des anciens combattants, l'une des idées fausses que nous avons entendu exprimer à ce comité est que nos anciens combattants reçoivent un paiement forfaitaire, et rien de plus, mais en réalité, ce n'est pas le cas. Nous avons entendu de nombreuses discussions portant sur une pension. J'aimerais savoir si vous connaissez l'allocation pour perte de revenus et le revenu que touchent nos anciens combattants; ils reçoivent le paiement forfaitaire, et une allocation pour perte de revenus qui équivaut à 75 p. 100 de leur revenu. Êtes-vous au courant?

[Français]

    Tous les programmes ne sont pas si clairs que ça à comprendre pour nous, les individus qui essaient de trouver des choses sur le Web, parce que beaucoup de pages sont noircies — il y a comme une force de censure. De plus, les militaires ne sont pas toujours très ouverts parce qu'ils ont toujours peur du système; la loi de l'omerta est là et ils ont toujours très peur.
    Les 75 p. 100, je sais qu'ils existent durant leur formation, c'est-à-dire durant la période où ils retournent aux études. Oui, les 75 p. 100 existent. Je le disais tout à l'heure: c'est acceptable parce que finalement ils auront beaucoup moins de déduction, par conséquent il n'y aura pas une si grande marge de différence de revenu.
    Le supplément, comme vous le dites, si par exemple pour une blessure — encore là je ne sais pas comment vous l'établissez exactement... Je connais aussi une personne qui reçoit 780 $ par mois parce qu'il a un fort choc post-traumatique. C'est 780 $ par mois, et c'est le même bonhomme qui travaille comme gardien de sécurité. Il va vivre avec beaucoup moins.
    C'est la perte de revenu qui leur est imposée que je n'accepte pas. Ils sont allés se battre pour notre pays, pour votre pays, pour le leur et, dans les faits c'est comme s'ils étaient pénalisés d'avoir choisi une carrière militaire.
    Tous ces programmes sont tellement compliqués, même plusieurs militaires ne les comprennent pas tous. C'est très compliqué. Ils sont toujours obligés de retourner, de se justifier encore et encore. Y a-t-il quelque chose de plus humiliant pour eux que ça?
(1145)

[Traduction]

    Si vous me le permettez, j'aimerais poser une question complémentaire.
    Vous serez peut-être étonnée d'apprendre que l'allocation pour perte de revenus pourra être versée jusqu'à l'âge de 65 ans. Et même si l'on est incapable de trouver un emploi après avoir suivi une formation, on est admissible jusqu'à l'âge de 65 ans. Je pense qu'il importe de le noter. L'autre point, c'est que le pourcentage demeure de 75 p. 100, peu importe le revenu qu'on peut avoir. Il est ainsi fixé. S'il totalise 700 $, je suppose que cela équivaut à 75 p. 100.
    Par ailleurs, l'ensemble des programmes instaurés par Anciens Combattants Canada en vertu de la Charte des anciens combattants traitent des aspects psychologiques, du recyclage professionnel et du placement...
    Mme Francine Matteau: Pardon?
    M. Ben Lobb: Je suis navré. Mon père est encanteur, alors j'ai appris à parler vite dès mon plus jeune âge.
    Des voix: Oh, oh!
    Mme Francine Matteau: Ça va.
    M. Ben Lobb: Je pense que j'aimerais savoir si vous êtes prête à reconnaître que ces mesures ont de la valeur également, et que tous les anciens combattants y sont admissibles. Tous les membres des familles des anciens combattants — les membres de la famille immédiate — y sont admissibles à vie. Admettez-vous que ces programmes ont une certaine valeur pour faire en sorte que les militaires soient constamment sur la voie du bien-être?

[Français]

    On peut prendre la voie de la guérison, je veux bien. Quant à reprendre une vie tout à fait normale, je doute qu'on puisse le faire. Car un choc post-traumatique dure une vie.
    Quand vous avez des handicaps qui vous empêchent, par exemple... Vous m'excuserez de reprendre l'exemple de mon fils, car je ne connais pas 50 militaires et leurs séquelles. Pour ce qui est de mon fils, ça va bien lorsqu'il lui faut marcher sur un tapis, mais dès qu'il sort à l'extérieur, il est incapable de faire trois pas sans grimacer.
    Et vous me parlez des 75 p. 100 du revenu? Je vous demande ce que ça prendra pour avoir ces fameux 75 p. 100 du revenu. Car pour avoir leurs 269 000 $, je vous dis qu'ils ont besoin de se lever de bonne heure et de fournir de bons arguments. Ils ont d'excellents avocats, mais ils doivent travailler très fort pour réussir à avoir leurs montants forfaitaires maximums.
    Vous me dites qu'ils peuvent avoir 75 p. 100 de leur revenu, leur vie durant? Qu'est-ce que ça va leur prendre pour avoir ces 75 p. 100 de revenu leur vie durant?

[Traduction]

    Merci, madame Matteau. Le temps de M. Lobb est écoulé, et nous n'accordons aucune latitude aux membres pour qu'ils puissent répondre aux témoins.
    Il nous reste seulement 11 minutes, alors la parole sera au Parti libéral, puis au Parti conservateur et au Bloc québécois, pour quatre minutes chacun. Ainsi, nous ne grugerons pas trop le temps alloué à M. Leduc.
    Madame Sgro, pour quatre minutes.
(1150)
    Merci.
    Je vais vous donner l'occasion d'élaborer un peu plus, mais je dois d'abord vous dire que vous faites une excellente défenseure, non seulement pour la cause de votre fils, mais pour celle de bien d'autres hommes et femmes qui ont comparu devant le comité et qui sont préoccupés.
    Je suis d'accord avec vous. Je pense que le problème est de savoir comment vivre avec 75 p. 100 de son revenu, si celui-ci est de 700 $ par mois. Si on a de la chance, on obtiendra un montant global de 260 000 $, et on aura bien d'autres programmes de soutien, et ainsi de suite. Mais la réalité est qu'on devra par la suite vivre avec 700 $ par mois, ce qui correspond à 75 p. 100 du revenu qu'aurait gagné un jeune homme. Cela entraînera un tas d'autres problèmes.
    Je partage assurément une partie des préoccupations qu'on a — et je pense que c'est le cas pour nous tous —, et nous tentons d'apporter des changements. Quels types de changements préconiseriez-vous, dans ce cas?
    Nous parlons d'un jeune homme qui a perdu beaucoup d'années de sa vie, et c'est pourquoi on lui accorde en partie un paiement forfaitaire. Quels changements devrions-nous apporter, à votre avis? Si ce n'est pas 75 p. 100, quel devrait être ce pourcentage?

[Français]

    Il a en effet perdu une partie de sa vie, il a aussi perdu une partie de son intégrité. Plusieurs ont perdu leurs jambes, d'autres un bras, d'autres sont complètement défigurés. Quel avenir leur est réservé? Je me pose de sérieuses questions, car vous imaginez bien que ce n'est pas toujours facile. Ils ont une vie devant eux. On peut, par exemple, penser qu'ils voudront peut-être fonder une famille — ils ont 22 ans —, bien qu'ils n'aient peut-être pas de conjointe actuellement. Il faut penser que ce ne sera peut-être pas facile de trouver une conjointe, quand on n'a plus de jambes ou qu'il nous manque un bras. La sympathie, c'est bien beau, mais on n'est pas toutes des mères Teresa.
    Dans ce programme, on ne tient pas compte non plus du fait qu'ils sont célibataires ou qu'ils ont une famille. Je voudrais finalement le retour à ce qui existait auparavant. Je pense qu'ils étaient assez bien servis avec les pensions qu'ils avaient autrefois. Cela tenait compte du fait qu'ils étaient célibataires, qu'ils avaient une femme, un, deux ou trois enfants.
    On ne peut pas demander la lune, j'en suis consciente. Néanmoins, tout ce que je veux, c'est une sécurité financière. J'ai même entendu parler de femmes de militaires qui se sont suicidées parce que c'est très lourd à porter. On ne peut pas laisser ça ainsi, c'est absolument inconcevable. Ils ne méritent pas d'être traités de la sorte.
    C'est bien beau de dire qu'on leur offre une foule de programmes, mais ils ont l'impression d'aller quémander. Je m'excuse, mais j'appellerais ça un « régime d'assistance sociale ». C'est comme ça que je le vois. C'est humiliant pour eux. Ça n'a aucun sens. C'est justement tellement humiliant et tellement compliqué que plusieurs vont décrocher.
    On est actuellement à la recherche de sans-abri à Montréal, à Calgary: on y retournera parce que certains vont carrément décrocher. Il faut penser qu'on ne traite pas avec des gens comme vous et moi; on traite avec des gens qui sont extrêmement fragiles sur le plan émotif.

[Traduction]

    Vous avez 30 secondes.
    Non, ça va.
    D'accord; la parole est maintenant au Bloc québécois.
    Monsieur Vincent, vous avez quatre minutes.

[Français]

    Merci.
    Je veux revenir à ceci. Lorsqu'on dit qu'on a une pension, c'est toujours relatif. Auparavant, je travaillais à défendre les accidentés du travail au Québec, et le système est similaire à celui des pensions pour les accidentés ou les blessés des Forces canadiennes. C'est toujours difficile de faire reconnaître leurs lésions ou d'adhérer à un programme ou à quelque chose de semblable.
    On parle toujours des 75 p. 100, mais ce n'est pas pour la vie. Si quelqu'un a une incapacité dans une proportion de 10 p. 100 ou de 15 p. 100, on va lui trouver un programme de réadaptation, comme vous le dites, et on va lui donner une formation d'agent de sécurité. Or je dois vous dire qu'au Québec, dans 90 p. 100 des cas, c'est ce que l'on fait de ces gens. On fait de tous des agents de sécurité, car c'est le cours le plus simple à suivre, le travail le plus facile à accomplir et, ainsi, on se débarrasse de la personne.
    Néanmoins, une fois que cette personne sera sur le marché du travail, qu'elle gagnera dorénavant 20 000 $ alors qu'elle en gagnait 40 000, pensez-vous qu'il sera possible et faisable pour les Forces canadiennes de compenser la différence entre le revenu gagné auparavant dans les Forces canadiennes et le nouveau revenu? Les Forces canadiennes combleraient ainsi l'écart entre les deux salaires. Qu'en pensez-vous?
(1155)
    Je crois que ce sera très compliqué, au départ, sur le plan de l'administration. Là encore, il faudra toujours qu'ils aillent se justifier — encore et encore. C'est humiliant. Imaginez: administrer un tel programme, ça va coûter une fortune! Ça va être extrêmement onéreux.
    Ça revient à dire que chaque fois qu'ils vont perdre leur emploi... Ce sont des gens instables. Je vis avec mon fils depuis qu'il est de retour et, quelquefois, je me dis qu'il faut être un ange pour l'endurer. Pourtant, c'est un super bon gars qui a normalement un caractère extraordinaire. Compte tenu de ses sautes d'humeur et de son agressivité, qui va l'endurer au travail?
    Je me dis: redonnons-leur leur pension. Les militaires ne sont pas des paresseux au départ. Oui, peut-être prendront-ils deux, trois ou même quatre ans pour récupérer et s'apercevoir que ça n'a plus de bon sens et qu'ils doivent trouver quelque chose à faire. Ils vont s'ennuyer à ne rien faire, ils vont alors se dire qu'ils vont trouver un petit quelque chose à faire. S'ils gagnent ainsi quelque 20 000 $ de plus par année, ce sera tant mieux, ils l'auront bien mérité.
    Le partage, comme vous le dites, pourrait être une belle solution, mais que je vois difficilement applicable.
    Merci, madame Matteau pour l'ensemble de votre témoignage.
     Une dernière recommandation a été faite par un membre du comité, j'aimerais vous entendre à ce sujet. Je ne me suis pas encore fait une opinion à ce propos. Cette recommandation veut que 30 p. 100 du personnel qui travaillerait dans la fonction publique au ministère des Anciens Combattants serait composé d'anciens combattants. Que pensez-vous de cette recommandation?
    Vous dites qu'ils seraient dans la fonction publique ou qu'ils travailleraient pour les Forces canadiennes?
    Ils travailleraient pour le ministère des Anciens Combattants.
    C'est non. Pourquoi? J'ai lu dans un journal — malheureusement, je n'ai pas apporté l'article — qu'on ne peut pas accepter de personnes handicapées au sein des Forces canadiennes ou au ministère des Anciens Combattants. Or ils sont des êtres handicapés. Je me pose la question, mais je sais que dans les Forces canadiennes, on ne peut pas les accepter.
    Au ministère des Anciens Combattants, il s'agirait davantage d'un travail de bureau.
    Ce sont des gars qui... J'ai connu quelques-uns des amis de mon fils: asseyez-les derrière un bureau et au bout de six mois ils vont se tirer une balle dans la tête, car ce sont des gens actifs. Ne leur parlez surtout pas de bureaucratie. C'est difficile.
    D'autres seront en revanche très heureux. Oui, cela peut être une ouverture.
    Ça ouvre des portes, ce sont des possibilités.
    Vous savez, je ne suis pas là uniquement pour critiquer. Je veux apporter des solutions.
    Si, par exemple, le ministère des Anciens Combattants accepte qu'ils fassent un travail de bureau — il y en a qui aiment cela, en fin de compte —, ils seront très heureux de le faire à salaire égal cependant, au même salaire qu'ils gagnaient dans les Forces canadiennes, bien sûr. Pour moi, ça va.
    Cependant, ceux qui n'accepteront pas cela, seront-ils obligés... Après ce qu'ils ont donné au pays, on les obligera encore? Autrement dit, ils seront soumis, comme s'ils étaient encore dans les forces: ils devront prendre ceci ou cela sans dire un mot, et « À vos ordres, mon commandant! », c'est la loi de l'omerta.

[Traduction]

    Merci, madame Matteau.
    M. Storseth est le suivant, pour quatre minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Madame Matteau, je tiens à remercier votre fils pour son dévouement et pour son sacrifice envers notre pays. Je voudrais également vous remercier, vous et votre famille, pour le dévouement dont vous avez fait preuve pour le Canada.
    J'approuve certaines choses que vous avez dites. Ici, nous ne parlons pas de personnes qui doivent simplement se recycler parce que leurs emplois ne correspondent plus aux besoins de la société. Ces individus avaient des attentes, des aspirations professionnelles. Quelqu'un comme votre fils se serait attendu à continuer à gravir les échelons jusqu'à un certain point, et à ce qu'un certain niveau de vie soit maintenu s'il demeurait dans les forces armées. Il ne fait aucun doute que certains changements doivent être apportés. Il s'agit d'une charte évolutive; c'est pourquoi nous nous penchons sur les changements possibles.
    J'hésite à dire qu'il ne devrait pas y avoir de montant forfaitaire. À mon avis, il faudrait qu'il y ait un mélange. Certains programmes doivent être mis en place, et nous devons examiner tout cela sérieusement pour trouver la solution qui convient. Dans ma région, il y a beaucoup d'anciens combattants qui sont revenus blessés d'Afghanistan, et un paiement forfaitaire initial, à tout le moins, est très utile pour les aider à prendre un nouveau départ. Il faut revoir cela, assurément — qu'il s'agisse de paiements mensuels ou de n'importe quoi d'autre.
    Mais il y a un sujet dont j'aimerais discuter avec vous, car il est fort préoccupant. Vous avez dit que les anciens combattants étaient rejetés par ceux à qui ils faisaient confiance, abandonnés par le système et contraints de lutter encore et encore pour obtenir leur paiement forfaitaire. Il est très troublant que des hommes et des femmes puissent revenir des théâtres de guerre après avoir risqué leur vie pour notre pays et se sentir tout simplement rejetés par la bureaucratie — car c'est bien ce dont nous parlons, ici — d'une organisation au sein de laquelle ils combattaient, dans certains cas.
    J'ai deux questions pour vous. Premièrement, avez-vous des solutions ou des idées à proposer en ce qui concerne des façons de mieux servir nos militaires de retour de la guerre, du point de vue de la bureaucratie? Lorsque vous avez eu affaire au système, avez-vous relevé certains moyens qui pourraient nous permettre de simplifier ce dernier?
    Ma seconde question est d'ordre personnel, et concerne le trouble de stress post-traumatique. Votre fils est très chanceux d'avoir reçu un diagnostic alors qu'il était encore au MDN. Les militaires qui ne reçoivent aucun diagnostic de ce trouble pendant cinq, six ou sept ans ont vraiment un dur combat à mener pour tenter d'accéder ne serait-ce qu'à certains services essentiels du gouvernement du Canada auxquels ils ont droit. Avez-vous des propositions ou des idées à nous soumettre en ce qui concerne la manière dont nous pourrions mieux servir nos anciens combattants qui rentrent au pays?
(1200)

[Français]

    D'abord, si je me souviens bien, Nicolas était obligé d'aller consulter le psychologue en arrivant de sa mission. Il n'avait pas le choix. Je pense qu'ils étaient obligés d'y aller, mais je vous dis cela sous toute réserve.
    Nicolas a toujours refusé la médication parce qu'on est anti-médication. Finalement, quand il est revenu, il m'a dit qu'il n'avait jamais voulu prendre de médication, qu'il avait en effet été très bien suivi par le psychologue. Il n'avait pas un mot à dire contre cela, car il avait un excellent psychologue. Cependant, il m'a avoué qu'il sentait que ça le rattrapait. Je le savais parce que je le voyais faire et que je connais mon fils. Je savais que non seulement cela le rattrapait, mais que ça l'avait rattrapé avant qu'il ne parte en Thaïlande.
    En ce qui concerne le montant forfaitaire, on en revient toujours au même problème. On en revient toujours au fait que si vous leur donnez plus d'argent ou encore le fameux montant forfaitaire, ils le gaspillent. Je n'oserais pas donner de pourcentage, mais je me demande si 10 p. 100 ou 5 p. 100 de ceux qui ont reçu un montant forfaitaire ont encore de l'argent. On entend dire qu'il n'y en a plus, qu'il n'y a plus personne. Il faut nuancer, quand on entend des choses comme ça. J'ai quand même une certaine expérience de vie, il faut un peu nuancer. Je n'irais pas dire qu'il y en a 99,9 p. 100 qui n'ont plus un sou, mais la majorité n'a plus un sou. Et d'après le personnel médical de Valcartier, en effet, il n'y en a plus un seul qui a encore de l'argent. Peut-être que, dans d'autres bases, il y en a eu de plus sages, je ne le sais pas, mais à Valcartier c'est ainsi. On ne peut cependant pas dire qu'il n'y en a plus un, puisque mon fils en a encore. Donc, c'est difficile de répondre.
    Quelle était l'autre question? Je m'excuse.

[Traduction]

    Ma question concernait simplement le système en soi; je voulais savoir si vous aviez des idées sur la façon de simplifier le système pour mieux servir nos anciens combattants lorsqu'ils rentrent chez eux. Y a-t-il une idée qui vous a frappée alors que votre fils franchissait les étapes de ce processus, et qui faciliterait et améliorerait les choses pour nos anciens combattants?

[Français]

    À mon avis, il n'y en a qu'une seule. C'est le retour à la pension mensuelle. C'est la priorité. Ce n'est pas compliqué, c'est la seule manière de leur assurer une sécurité. J'en reviens toujours à dire que ce sont des êtres fragiles, des personnes blessées physiquement, psychologiquement. Physiquement, comment seront-ils dans 10 ans?
    À 60 ans, on a souvent mal ici et là en se levant un matin et on a mal à un genou le lendemain matin. Eux, qui ont eu de graves blessures aux jambes, qui ont subi intervention chirurgicale après intervention chirurgicale — et il y en a plusieurs —, seront-ils encore capables de marcher à 60 ans ou seront-ils assis dans un fauteuil roulant?
    C'est pourquoi je dis que c'est bien beau, tous ces programmes... D'abord, avez-vous pensé à l'administration de tout ça? Ça va être compliqué. Je ne suis pas comptable, mais je sais compter. Je me dis que ça va être d'une complexité incroyable. Mais, surtout, le militaire va toujours être obligé d'aller se justifier. Mérite-il ça? D'après vous, méritent-ils d'être toujours obligés d'aller se justifier après ce qu'ils ont vécu? Ils sont à plat. Ils sont détruits, ces gens.
    C'est horrible de les obliger à retourner se justifier chaque fois qu'un petit bobo sort, de recommencer le même processus encore et encore pour s'expliquer. C'est une horreur de leur faire vivre ça. À mon avis, ils ne méritent pas ça, après ce qu'ils ont vécu et ce qu'ils ont donné. Et nous ne pouvons pas accepter ça, ni vous tous ni tous les citoyens, à commencer par moi-même.
(1205)

[Traduction]

    Merci, madame Matteau.
    Vous avez déjà entendu les remerciements des membres du comité pour le sacrifice commun réalisé par votre famille. Au nom de l'ensemble du comité, veuillez transmettre nos meilleurs voeux à votre fils, ainsi que notre gratitude pour les services qu'il a rendus au Canada.
    Nous allons interrompre la séance pour quelques instants avant de la reprendre à huis clos.
     [La séance se poursuit à huis clos.]
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