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FOPO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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CANADA

Comité permanent des pêches et des océans


NUMÉRO 019 
l
3e SESSION 
l
40e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le vendredi 28 mai 2010

[Enregistrement électronique]

(0805)

[Traduction]

    Je déclare la séance ouverte.
    Mesdames et messieurs, merci de vous joindre à nous aujourd'hui ici, à Moncton. Comme vous le savez sans doute, le Comité permanent des pêches et des océans étudie le secteur de la pêche au crabe des neiges au Canada atlantique et au Québec et nous tenons aujourd'hui notre quatrième et dernière réunion. Nous avons voyagé dans la région de l'Atlantique et du Québec et nous avons certainement hâte d'entendre vos observations ce matin.
    Monsieur Bevan, je crois que vous allez nous faire une déclaration préliminaire.
    Oui, je vais le faire. Je voudrais vous présenter mes collègues. Joan Reid est chef de secteur, Conservation et protection pour l'est de la Nouvelle-Écosse. Mikio Moriyasu et Marc Lanteigne sont du Centre des pêcheries du golfe. Ils s'occupent de l'évaluation scientifique des stocks de crabe et devraient donc pouvoir vous aider à cet égard.
    Je vais faire quelques observations préliminaires en essayant d'être bref. Je suis sûr que vous en avez entendu beaucoup ces derniers jours.
    Au Canada, le crabe des neiges est pêché et transformé dans toutes les provinces de l'Atlantique. Comme vous le savez, la Nouvelle-Écosse, le Nouveau-Brunswick, Terre-Neuve-et-Labrador, le Québec et l'Île-du-Prince-Édouard participent à cette pêche très importante. Nous produisons environ 50 p. 100 de l'offre mondiale de crabe des neiges. Malgré le déclin très important des stocks dans la zone 12, cette année, notre production globale est restée à peu près stable. Elle est d'environ 70 000 tonnes et telle a été de nouveau la situation cette année.
    Comme je l'ai dit, nous produisons environ 50 p. 100 de l'offre mondial. Malgré cela, nous devons accepter les prix au lieu de les fixer. Nous ne sommes pas structurés de façon à pouvoir contrôler les marchés. Nous subissons l'influence d'un important groupe d'intermédiaires. Nous vendons la plupart de nos produits au Japon, mais notre principal marché est celui des États-Unis. Toutefois, ce sont des courtiers qui contrôlent les marchés et les prix et nous devons accepter les prix du marché. Pour le moment, nous obtenons entre 1,30 $ et 1,70 $ la livre pour ce produit qui est vendu sur le marché mondial à environ 4 $ la livre au détail.
    La pêche commerciale du crabe des neiges sur la côte Est a commencé vers le milieu des années 1960, à la suite de la découverte de stocks importants. Cette pêche s'est développée au cours des années 1980. Dans les années 1990, elle a connu une période de croissance rapide pendant laquelle nous avons vu les stocks se développer dans des proportions très importantes dans toute la région de l'Atlantique. En même temps, nous avons assisté à un déclin des stocks de poisson de fond. Étant donné le déclin du stock de poisson de fond et la croissance du stock de crustacés — et à ce moment-là les prix étaient très élevés — les ministres ont été incités à recycler les pêcheurs au poisson de fond dans la pêche au crabe.
    Cette pêche a culminé vers 2002 dans toute la région de l'Atlantique. Dans le golfe, elle a connu son apogée en 2005, mais cela faisait partie du cycle naturel. En 2009, la valeur des prises a atteint environ un demi-milliard de dollars. Cette pêche se classe au deuxième rang, dans la région de l'Atlantique, derrière le homard dont les prix ont rapporté environ 750 millions de dollars. Actuellement, on compte plus de 750 permis de pêche au crabe dans les Maritimes et au Québec et plus de 3 400 à Terre-Neuve-et-Labrador.
    La pêche au crabe des neiges est en difficulté sur deux fronts. Il y a d'abord des facteurs économiques. Le dollar a atteint la parité, le carburant et les appâts coûtent cher et nous sommes confrontés à une forte concurrence de l'Alaska et de la Russie. Deuxièmement, le crabe des neiges connaît des cycles d'abondance d'une durée d'environ 10 ans.
    Malheureusement, cette fois, le cycle est bas pendant que les coûts sont élevés et que les prix sont bas. Le fait d'avoir peu d'abondance et des bas prix en même temps a causé beaucoup de difficultés. Nous nous attendons à ce que ce creux dure encore l'année prochaine dans le golfe. Nous espérons qu'ensuite, s'il n'y a pas de changement dans la mortalité naturelle, les stocks commenceront à augmenter de nouveau en 2012.
(0810)
    Nous avons déjà connu ce genre de… vous savez, 7 700 tonnes, c'est très peu. Nous en étions à 8 000 tonnes il y a quelques années et nous avons atteint 30 000 tonnes à l'apogée de ce cycle. Nous espérons pouvoir gérer ce cycle grâce à une gestion prudente.
    Nous effectuons des relevés scientifiques, particulièrement dans le golfe, et ces grandes séries de données nous fournissent des renseignements précis sur l'abondance de la ressource, non seulement sur la biomasse exploitable, mais aussi sur le pronostic pour les années à venir. Ce sont là de précieuses données dont nous avons pu nous servir pour gérer la pêche ces dernières années.
    Pour le crabe des neiges, nous avons deux façons de protéger les stocks. Bien entendu, il y a d'abord le TAC et les quotas. Nous établissons le TAC en fonction de la biomasse exploitable et du taux d'exploitation de cette biomasse. De plus, nous nous servons de la nature dimorphique de cet animal. Le crabe mâle adulte est beaucoup plus gros que la femelle adulte et nous pouvons cibler les mâles adultes pour la commercialisation et éviter les femelles et les juvéniles. Nous devons utiliser des casiers dont les mailles permettent de retenir les gros mâles et de laisser les femelles plus petites et les juvéniles s'échapper.
    Nous gardons seulement les mâles de plus de 95 millimètres et ce sont les mâles qui en sont à leur dernière mue. Ils sont âgés d'environ huit ou neuf ans lorsqu'ils atteignent ce stade. Ils muent pour la dernière fois et peuvent alors être capturés. Après leur dernière mue, ils vivent encore pendant cinq ou six ans et ils sont donc disponibles pour la pêche pendant un certain nombre d'années.
    Nous gérons aussi la saison de pêche afin d'éviter les crabes à carapace molle, autrement dit, les crabes qui viennent de muer. Ils sont vulnérables à la manutention et pourraient être endommagés ou tués s'ils étaient pêchés à ce moment-là. Même s'ils étaient rejetés, le degré de mortalité serait élevé. Nous établissons les saisons de pêche de façon à éviter les populations de crabe en train de muer et, comme je l'ai dit, nous visons les mâles adultes.
    Dans le golfe du Saint-Laurent, en particulier, nous avons une population de crabe dans les zones 12B, 12F et 19. Au cours de l'année, elle se déplace de la zone 12 à la zone 19, et ainsi de suite. C'est une seule et même population et nous devons la gérer comme telle. Le CCRH nous a conseillé, il y a quelques années, de ne plus essayer de gérer chaque zone séparément et de gérer plutôt les zones qui abritent une même population. Une population doit donc être gérée comme une seule unité.
    Les débarquements ont atteint un sommet à 33 400 tonnes en 1982 et sont retombés à 8 900 tonnes en 1990. L'année dernière, 23 400 tonnes ont été débarquées. Cette année, bien sûr, il y a eu une importante réduction du TAC. Cela se répercutera sur les débarquements, mais cette réduction est nécessaire pour éviter de réduire la population en dessous d'un niveau qui pourrait compromettre la régénération du stock que nous attendons pour 2012.
    En établissant le TAC pour 2010, la ministre a accordé la priorité à la conservation de la ressource. C'était une forte réduction, mais elle était nécessaire pour assurer le rétablissement du stock. Nous sommes conscients des difficultés que cela cause. Nous avons certainement modifié nos politiques dans le sud du golfe pour permettre aux pêcheurs de réduire leurs coûts en groupant les quotas, en leur laissant plus de latitude pour s'associer à d'autres bateaux, etc. Nous reconnaissons que cela a amélioré leur situation, mais sans résoudre les difficultés dans le secteur de la transformation. C'est une chose dont les provinces vont devoir s'occuper.
(0815)
    La science guide nos décisions et, dans le sud du golfe, les évaluations scientifiques nous ont permis de comprendre ce que signifient les données, où se trouve la population de crabes, à quel stade de son cycle elle en est, etc. Nous sommes moins bien informés dans certaines autres régions. Par exemple, à Terre-Neuve et Labrador, nous n'avons pas les mêmes séries chronologiques de données, mais nous nous servons des captures par unité d'effort et d'autres indicateurs d'abondance.
    Nous travaillons à une approche de précaution pour le sud du golfe et nous avons donc pour cette zone une estimation des limites biologiques en dessous desquelles la biomasse ne devrait pas être exploitée ainsi que des niveaux de capture lorsque les stocks sont sains et abondants et lorsque les stocks sont plus faibles. Nous avons fait ces estimations en collaboration avec le secteur et nous en tenons compte. Cela aide également le secteur à obtenir une écocertification, s'il le désire pour avoir accès aux marchés qui exigent ce genre de garantie.
    Je pense que je vais m'arrêter là et vous laisser poser des questions. Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Bevan.
    Monsieur Byrne.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci, monsieur Bevan, de revenir au comité pour nous fournir de précieux renseignements.
    Je vais adresser mes premières questions à M. Lanteigne et à M. Moriyasu, en ce qui concerne l'évaluation scientifique. Selon les médias, vous auriez déclaré tous les deux, messieurs, qu'il y a eu un problème, pendant un certain temps, dans la zone 12 du sud du golfe. La réduction des quotas en est le résultat. En fait, vos propos que rapportent les médias correspondent parfaitement à ce que les rapports scientifiques du Secrétariat canadien de consultation scientifique du ministère des Pêches et des Océans pour 2007, 2008 et 2009 disaient au sujet du crabe du sud du golfe. En 2007, le rapport indiquait que la population de crabe était en déclin. Le rapport de 2008 disait que le recrutement à la pêche avait diminué de 39 p. 100. En 2009, le rapport concluait que le recrutement à la pêche avait baissé de 13 p. 100 de plus.
    Il me semble clair que les évaluations scientifiques ont joué leur rôle. Elles ont informé le ministère et le ministre que les stocks étaient fragiles, et cela pas seulement depuis la dernière saison, mais depuis un certain temps. Pourriez-vous parler au comité de certaines de ces conclusions scientifiques, non seulement de l'année dernière, mais de ces dernières années?
(0820)
    Je suis d'accord avec vous pour dire que chaque année, la science peut nous informer sur l'état du stock et la protection à assurer pour la saison suivante. Vous avez présenté un bon résumé de ce que les évaluations scientifiques nous apportent pour la gestion de la pêche.
    C'est, je pense, la confirmation dont le comité avait besoin, car la question est donc de savoir, monsieur Bevan, pourquoi le ministère n'a pas tenu compte de ces évaluations pour la gestion de la ressource? Les pêcheurs, les transformateurs, les travailleurs d'usine, le secteur et les collectivités ont fait valoir que personne ne conteste les données scientifiques, mais qu'ils s'inquiètent vivement de ce que la gestion n'en a pas tenu compte pour atténuer les effets d'une réduction de 63 p. 100 en une saison. C'est ce qui les préoccupe. Le secteur n'a pas la capacité de pouvoir s'acclimater, s'adapter à une réduction de plus de 14 000 tonnes, de 63 p. 100, en une saison.
    Monsieur Bevan, pourriez-vous dire au comité pourquoi le ministère n'a pas réagi plus rapidement alors qu'il possédait les données scientifiques voulues?
    Comme je l'ai mentionné dans ma déclaration préliminaire, il y a plus d'une façon de conserver ce stock. Nous avons un stock pour lequel nous profitons de la différence biologique entre mâles et femelles et nous pêchons seulement les mâles adultes. C'est donc une protection supplémentaire sur le plan de la conservation.
    Nous prenons les avis scientifiques très au sérieux, bien entendu, et ils ont toujours servi de base à nos décisions, mais d'autres facteurs tels que l'opinion des pêcheurs entrent également en ligne de compte sur le plan économique.
    L'année dernière, les pêcheurs sont venus présenter au ministère un mémoire très important indiquant qu'ils avaient des doutes et nous en avons également tenu compte. S'ils étaient prêts à subir les conséquences de ce qu'ils voulaient faire, c'était également un des facteurs à considérer. C'est un aspect que la ministre a examiné et qu'elle a pris en compte pour rendre sa décision l'année dernière.
    Cela dit, nous savons toujours qu'au creux du cycle d'abondance, nous devons prendre soin du stock en priorité et c'est ce qui s'est passé cette année. La décision de l'année dernière, de l'année d'avant, etc., ces décisions ont été prises en sachant parfaitement que nous nous dirigions vers le creux du cycle et qu'il allait falloir le gérer. Nous l'avons fait cette année en prenant la décision difficile de donner la priorité au poisson pour que le creux soit le plus court possible, pour ce qui est de la durée de ce TAC et pour reconstituer le stock le plus rapidement possible.
    Toutefois, d'après les renseignements que vous nous avez donnés, d'autres options restaient ouvertes pour cette année. Dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que la pêche visait les mâles. En ce qui concerne la conservation, ce n'est pas comme pour les espèces de poisson de fond ou les espèces pélagiques. La situation est différente. Les conséquences de la capture de cette espèce ne sont pas les mêmes que pour le poisson de fond ou les espèces pélagiques. C'est, je crois, l'essentiel de ce que vous avez expliqué en disant que la pêche vise les mâles adultes.
    Cela dit, vous nous avez également expliqué que vous aviez d'autres options cette année. Cette réduction de 63 p. 100 témoigne d'un fossé entre les pêcheurs qui sont sur le terrain et la décision que la ministre a rendue en 2010. La ministre a la responsabilité fiduciaire de protéger le stock, de protéger l'espèce et de protéger la pêche. D'après ce que je sais de ce secteur, surtout dans le sud du golfe, je ne me souviens pas d'avoir jamais vu le quota ou la biomasse exploitable augmenter de 63 p. 100 en un an. Cela semble être un pourcentage extrêmement élevé d'augmentation ou de diminution et voilà ce qui ne va pas.
    Pourriez-vous expliquer, pour la gouverne des pêcheurs, pourquoi vous n'aviez pas le choix? Pourriez-vous expliquer, pour la gouverne du secteur, que vous avez dû le faire faute d'avoir su prendre des décisions ces dernières années? Est-ce la bonne explication?
(0825)
    Non, je pense que nous avons pris cette décision cette année en fonction des évaluations que nous avons reçues cette année, mais aussi de notre expérience dans les autres zones. Par exemple, dans la zone 13, nous avons vu ce qui se passe si nous maintenons un taux de capture très élevé pendant une longue période. Nous nous sommes retrouvés avec un problème dans cette zone et nous avons dû fermer la pêche. Nous ne voulions pas que cette situation se répète dans la zone 12, car elle est trop importante.
    Dans ce genre de pêche, même si nous nous entourons de précautions en ne pêchant pas les femelles et les juvéniles, si nous capturons une trop grande partie de la biomasse exploitable, c'est-à-dire les mâles adultes, nous risquons d'endommager le stock à un point tel qu'il ne régénérera pas aussi rapidement qu'il le ferait autrement, ou il se reconstituera sur une période beaucoup plus longue. Ce risque est trop important.
    Du point de vue de la conservation, compte tenu des données scientifiques que nous avions et du travail qui a été fait pour adopter l'approche de précaution dans cette pêche en tenant compte des limites biologiques à ne pas dépasser pour éviter que le stock ne puisse pas se régénérer ou mette trop de temps à se reconstituer, d'après les renseignements disponibles cette année, il est devenu évident que nous devions prendre des mesures pour réduire le TAC afin de permettre à cette population de crabes de se reconstituer plus rapidement. Par le passé, nous avons réduit le TAC sur plusieurs années. Nous avons eu la règle des 50 p. 100 pour le poisson à nageoires, comme vous vous en souviendrez peut-être, en ce qui concerne la morue et voyez les résultats que cela a donnés. Nous avons donc pris conscience du risque et nous avons dû prendre une décision très importante, cette année, pour surmonter ce risque et permettre une régénération rapide du stock.
    Nous reconnaissons certainement les difficultés que cela cause. Les difficultés causées cette année et sans doute l'année prochaine seront compensées par la croissance future du stock. C'est ce que nous espérons. Nous ne voulions pas compromettre la croissance future en essayant de gérer les difficultés pendant deux ou trois ans pour finalement créer des problèmes à long terme dans la pêche au crabe des neiges du sud du golfe.
    Je comprends ce que vous dites.
    Étant donné que des risques ont été pris, comme vous l'avez reconnu, des risques qui, en fin de compte, causent des difficultés, le ministère des Pêches et Océans ou le gouvernement du Canada en général ont-ils prévu d'aider ceux qui ont été touchés par les coupes de cette année? A-t-on prévu un programme d'aide financière quelconque?
    Pour le court terme, je dirais que non, car cette pêche est cyclique. Il y a quelques années, en 2005, elle a atteint son point culminant et en 2004, elle a été très lucrative. Les gains ont été considérables, les revenus bruts étant de l'ordre de 800 000 $ par entreprise pour certains pêcheurs traditionnels.
    Oui, c'est difficile cette année et les revenus ont diminué d'environ 200 000 $, mais une aide immédiate n'est pas une priorité. Notre priorité est de reconstituer le stock et de rétablir le niveau des gains de notre mieux, en raison de la situation du marché mondial. Nous voulons les rétablir les revenus à leur niveau moyen du dernier cycle.
    Dans cette pêche, les gains moyens sont assez bons au cours d'un cycle. Par conséquent, en 2003, le gouvernement a dit que les allocations étant fixées, il n'allait pas les modifier, mais que les pêcheurs devaient gérer les hauts et les bas du cycle.
    Nous en sommes au creux du cycle et les gens ont des difficultés, surtout les travailleurs des usines, mais nous avons dit aux pêcheurs qu'ils avaient la possibilité de réduire leurs coûts pendant cette période de creux. Nous nous attendons à ce que l'abondance augmente de nouveau à compter de 2012. Nous ne pensons pas que c'est aux contribuables de subventionner la pêche pendant le creux du cycle alors qu'à l'avenir les profits seront importants et qu'ils l'ont également été par le passé.
(0830)
    Merci, monsieur Bevan.
    Monsieur Blais.

[Français]

    Bonjour. Je vais poursuivre et vous poser le même type de questions, mais j'espère que vous nous donnerez un autre type de réponses, car ce que vous nous dites est loin d'être satisfaisant.
    Tout d'abord, vous avez dit avoir reçu des avis scientifiques échelonnés sur plusieurs années indiquant que le taux de captures des années 2007, 2008 et 2009 représentait véritablement un danger. Malgré cela, vous avez quand même décidé de continuer à autoriser un taux de captures élevé en 2007, 2008 et 2009. Par contre, en 2010, on nous annonce une baisse de ce taux de l'ordre de 63 p. 100.
    Cela pose problème. D'un côté, vous dites que le principe de précaution devrait être priorisé et qu'il devrait primer, mais quand on considère les décisions prises, on n'a pas cette impression.
     On se demande quelles autres considérations il peut y avoir pour qu'on accepte un taux de captures élevé, qui met en danger l'espèce et qui, par le fait même, met en danger une industrie. Comment peut-on expliquer cela?

[Traduction]

    Nous établissons le TAC en consultant le secteur, les provinces, les premières nations et, bien entendu, en tenant compte des avis scientifiques. La différence entre les années précédentes et cette année est que les avis scientifiques étaient vraiment très clairs et que nous avions travaillé à l'établissement de l'approche de précaution jusqu'à cette année. Par conséquent, cette année nous dispositions de renseignements supplémentaires au sujet de ce qui constitue une biomasse exploitable acceptable et des risques à dépasser la limite. Il ressortait clairement de ces renseignements supplémentaires que nous en étions au creux du cycle d'abondance, que nous devions prendre des mesures pour réduire la période pendant laquelle nous resterions dans ce creux et pour augmenter la probabilité que nous allions en sortir. Voilà sur quoi s'est basée la décision de cette année.
    Par le passé, les risques étaient moins clairs ou moins importants et nous pouvions maintenir les prises à un niveau plus élevé. Cette année, il fallait prendre des mesures correctives importantes pour réduire la période pendant laquelle nous resterons au creux du cycle d'abondance.

[Français]

    C'est là que le bât blesse. Vous confirmez que le taux de captures était véritablement trop élevé en 2007, 2008 et 2009, ce qui représentait un haut degré de risque. C'est comme jouer avec le feu, on finit par se brûler. C'est comme si on avait attendu de se brûler pour réagir. Le principe de précaution ou le principe de saine gestion veut qu'à partir du moment où on constate qu'il y a un problème, ou un degré de risque assez important, on se rende compte que si on maintient ce degré de risque, ce sera beaucoup plus grave dans le futur. On doit alors penser à une diminution des quotas.
     Cette diminution des quotas aurait pu être échelonnée sur plusieurs années, ce qui nous aurait évité de nous trouver dans la situation actuelle. Des compressions de l'ordre de 63 p. 100 ont un impact majeur. Pour certaines personnes, c'est même une catastrophe. C'est ce qui est difficile à comprendre. J'en conviens, c'est facile de le dire après, mais c'est aussi une question de gros bon sens.
    Quand on constate un problème quelconque et quand on se rend compte qu'il y a un certain degré de risque, il faut réagir. C'est comme quand un toit coule. On n'attend pas qu'il coule beaucoup avant de le réparer. On le répare dès que possible, au moment où on constate qu'il commence à couler. C'est un peu ce qui s'est produit. C'est comme si on avait considéré qu'il y avait un degré de risque, mais pas encore assez élevé et qu'il fallait attendre que le degré de risque soit très élevé pour agir. Malheureusement, si on attend trop, les gestes que l'on va poser risquent d'avoir des répercussions beaucoup plus importantes.
    Il s'agit de répercussions sur des êtres humains. On parlait un peu plus tôt de l'atténuation relative à l'espèce, mais il y a une autre espèce, c'est-à-dire les gens qui travaillent dans les usines, les gens qui travaillent sur les bateaux de pêche et les aides-pêcheurs. Ces gens sont très mal pris, ils sont coincés. Ils ne peuvent pas changer de direction et décider d'agir autrement. Ils apprennent, quelques jours avant le début de la pêche, qu'ils ont perdu leur emploi. Ultimement, les pêcheurs n'ont pas le choix, ils doivent réduire leurs dépenses. Les travailleurs des usines attendent, attendent et attendent encore. On entend parler de compressions de l'ordre de 40 p. 100 ou de 50 p 100. Ça fait un petit bout de temps qu'on en entend parler. Tout à coup, ça tombe, des compressions de 63 p. 100 sont annoncées.
     Quelle est la logique là-dedans?
(0835)

[Traduction]

    Nous comprenons certainement les répercussions de cette décision sur les pêcheurs, les membres d'équipage et les travailleurs des usines. Ces répercussions sont sans aucun doute importantes cette année. Si nous n'avions pas agi, elles n'auraient pas seulement duré cette année et l'année prochaine, mais plus longtemps. Nous devions agir à ce stade du cycle, car nous sommes au creux du cycle d'abondance et nous devons prendre des mesures pour le raccourcir.

[Français]

    Mon problème n'est pas en 2010. Mon problème se situe plutôt en 2007, 2008 et 2009. C'est là que ça me pose problème. C'est là qu'il y a un problème.

[Traduction]

    Le cycle était à la baisse depuis 2005, sans aucun doute. À ce moment-là, le maintien des TAC était moins risqué qu'il ne l'est cette année. Nous pouvions tenir compte du désir des pêcheurs de maintenir les TAC au même niveau que les années précédentes parce que les risques étaient moindres. Cette année, en raison du travail qui a été fait au sujet de l'approche de précaution et des limites biologiques, mais surtout en fonction de l'état des stocks, nous avons dû agir pour que le creux du cycle d'abondance dure le moins longtemps possible et que le stock se régénère le plus vite possible. Par le passé, nous avons cherché à atténuer les répercussions sur les flottilles de pêche et les travailleurs des usines, mais cette année nous devions donner la priorité au poisson.
    Merci.
    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    Comme mes collègues, j'ai du mal à comprendre comment cette décision a été prise cette année et pourquoi une décision similaire n'a pas été prise l'année dernière ou plus tôt.
    Monsieur Bevan, vous avez parlé de la zone 13. C'était, je pense, en tant qu'exemple à ne pas suivre. Pourriez-vous expliquer un peu comment et pourquoi ces décisions ont été prises pour la zone 13? Étant donné ce que vous avez dit au sujet du principe de précaution et d'une gestion idéale tenant compte de ce principe, comment se fait-il que vous n'en ayez pas tenu compte dans le cas de la zone 13?
    Le problème de la zone 13 s'est passé il y a quelques années, avant que l'approche de précaution ne soit entièrement mise en place et que les limites de capture ne tiennent compte des limites biologiques. La zone 13 était une zone dans laquelle nous nous sommes fiés presque exclusivement, à l'époque, sur les différences biologiques entre mâles et femelles et où nous avons donc orienté très lourdement l'effort de pêche sur les mâles adultes. Cela a causé l'effondrement du stock. Il a fallu arrêter la pêche et celle-ci vient juste de reprendre, à un très faible niveau. Cette situation a eu d'importantes répercussions sur les pêcheurs de ce secteur, car nous n'avions pas autant de connaissances que maintenant et nous n'appliquions pas notre approche de précaution faute de comprendre comment établir les limites biologiques qui la guident.
    C'est la preuve que si vous placez les intérêts des pêcheurs et des travailleurs d'usine avant ceux de la population, cela cause plus de difficultés aux travailleurs d'usine et aux pêcheurs. C'est une leçon que nous avons apprise dans le cadre du processus de gestion du crabe. Il faut d'abord s'occuper du stock si l'on veut pouvoir protéger les intérêts des pêcheurs et des travailleurs d'usine.
    C'est une leçon que nous n'oublierons pas. Nous ne voulons pas que le problème se répète dans d'autres zones. Nous voulons que les taux de capture restent raisonnables. Nous ne voulons pas compter entièrement sur la différence de taille entre mâles et femelles et l'idée qu'on peut pêcher le plus de mâles possible du moment qu'on ne touche pas au reste de la population de crabes. Cela n'a pas fonctionné dans la zone 13. Nous ne voulons pas prendre ce risque pour la gestion des stocks de crabe dans toute la région de l'Atlantique. Par conséquent, nous prenons, cette année, les mesures nécessaires pour reconstituer le stock dans le sud du golfe et pour rester le moins longtemps possible au ceux du cycle d'abondance.
(0840)
    Compte tenu de cette leçon, si nous parlons maintenant de la zone 12, quel était le niveau de capture recommandé par les scientifiques pour 2009?
    Les scientifiques ne recommandent pas un chiffre précis, mais une fourchette de valeurs auxquelles correspond une évaluation du risque. Les scientifiques sont les évaluateurs du risque et il faut que les gestionnaires et le ministre tiennent compte de tous leurs avis pour gérer le risque. L'évaluation du risque est faite par les scientifiques.
    Je ne me souviens pas exactement de la fourchette qui a été fournie. Comme je l'ai dit, on ne nous donne pas un chiffre précis, mais une fourchette de valeurs avec les niveaux de risque correspondant.
    J'avoue toutefois que je ne me souviens pas des avis scientifiques dans tous les détails. Nous pouvons certainement vous indiquer… Les avis scientifiques se trouvent sur le web, de même que les rapports sur l'état du stock si bien que le comité peut certainement y avoir accès.
    J'aimerais beaucoup savoir quelle était l'évaluation du risque et la fourchette indiquée par les scientifiques pour l'année dernière et pourquoi le TAC a été établi à ce niveau l'année dernière par rapport à celui de cette année, pourquoi il y a eu un tel changement en un an alors qu'il s'agit d'un cycle de 10 ans, comme vous l'avez mentionné et comme on nous l'a dit dans d'autres audiences. C'est une chose que je n'arrive pas à comprendre. Cela ne semble pas correspondre.
    J'ai une dernière question, mais je vais sans doute devoir attendre. Merci.
    Merci.
    Monsieur Kamp.
    Merci, monsieur le président, et je vous remercie d'être venus, madame Reid et messieurs. Je vais commencer et s'il me reste du temps, je le céderai à mon collègue du Nouveau-Brunswick.
    Je voudrais faire suite aux questions que nous avons entendues jusqu'ici. Bien sûr, nous pouvons trouver ces renseignements nous-mêmes, mais il serait utile que vous nous fournissiez des renseignements de base, disons depuis le pic du cycle, depuis 2005. Si vous pouviez nous fournir ces données — vous avez dit que vous ne pouviez pas le faire aujourd'hui — je pense que cela aiderait le comité. Si vous pouviez nous fournir, pour chaque année, un tableau montrant la biomasse exploitable, les avis scientifiques — les fourchettes et un bref résumé de l'évaluation du risque, puis le TAC établi pour l'année en question, cela nous aiderait à comprendre un peu mieux le processus. Si vous pouviez le faire aujourd'hui, ce serait très bien, mais sinon, vous nous aideriez en nous fournissant ces renseignements.
    Nous devrions sans doute vous les fournir par écrit, mais je pense que nous pouvons vous en donner quelques-uns immédiatement.
    Pour la saison 1995, nous avions une biomasse de 154 000 tonnes.
(0845)
    De quelle année parlez-vous?
    C'était pour l'année 1995.
    Je ne pense pas que nous voulons remonter aussi loin.
    Très bien. En 2005, nous avions 85 000 tonnes.
    C'est la biomasse exploitable?
    Oui, c'est la biomasse exploitable.
    C'est le maximum, alors.
    Oui.
    Et quel était le…
    Le quota était de 36 000 tonnes.
    C'est donc le quota le plus élevé que nous ayons eu dans cette zone 12?
    Oui. C'est pour la totalité du sud du golfe, mais la zone 12 reçoit généralement 85 p. 100 du quota.
    Pouvez-vous nous renseigner au sujet des années suivantes?
    En 2006, l'année suivante, la biomasse exploitable était de 68 000 tonnes. Le quota correspondant était de 29 000 tonnes.
    En 2007, elle était de 66 000 tonnes et le quota de 27 000 tonnes.
    En 2008, la biomasse était de 57 000 tonnes et le quota de 25 000 tonnes.
    En 2009, elle était de 48 000 tonnes et le quota de 24 000 tonnes.
    Pour cette année, la biomasse disponible dans l'ensemble du sud du golfe est de 26 000 tonnes.
    Et le TAC est de 7 700 tonnes. Par conséquent, l'idée selon laquelle il y a eu un niveau élevé, un niveau injustifiable puis une baisse de 63 p. 100 n'est pas tout à fait exacte. La diminution a été progressive. Je pense que cela nous éclaire et si vous avez plus de précisions à nous fournir, ce serait très bien.
    La zone 12 est, bien entendu, une vaste zone. S'agit-il d'un stock ou d'une population unique ou y a-t-il des poches d'abondance dans toute cette zone? Autrement dit, je sais qu'aux fins de la gestion, nous gérons cela comme un stock unique, mais serait-il possible d'avoir des zones dans lesquelles le taux d'exploitation serait plus élevé que dans d'autres à l'intérieur de la zone 12 ou n'est-ce pas une possibilité?
    Je crois que je vais laisser répondre mes collègues scientifiques. C'est une même population et si le niveau d'exploitation était plus élevé dans une partie de cette zone, il faudrait que le taux d'exploitation total de cette population en tienne compte. Bien entendu, il y a des poches d'abondance. Dans les rapports sur l'état des stocks, il y a des cartes indiquant la répartition du crabe disponible et cela guide certainement l'effort de pêche les premiers jours de la pêche. Autrement dit, les pêcheurs vont là où ils savent que le poisson se trouvait au moment où le rapport sur l'état du stock a été établi. Mais il faut considérer que cela forme une seule et même population. Je ne sais pas si vous désirez ajouter quelque chose.
    Oui. Nous avons fait des études génétiques et du point de vue génétique, le crabe du sud du golfe est une seule et même espèce. Nous avons également fait un relevé du marquage et les crabes voyagent entre les différents lieux de pêche de la zone.
    J'ai seulement une dernière question à poser, après quoi je céderai la parole à M. Allen.
    C'est une question que nous nous sommes posée lorsque nous avons étudié la situation. Certains ont laissé entendre que le problème était exacerbé par l'arrivée de nouveaux pêcheurs. En fait, ils ne sont pas si nouveaux, car je crois qu'ils sont là depuis un certain nombre d'années et même plusieurs décennies. Comment gérez-vous un stock qui est cyclique, surtout sur le plan de l'accès, quand il augmente et diminue? Faites-vous entrer des nouveaux pêcheurs lorsqu'il augmente? Que faites-vous d'eux quand il diminue? Fixez-vous simplement un niveau qui permet à tout le monde de gagner sa vie lorsque l'abondance est forte et qui laisse tout le monde mourir de faim lorsque le stock est en baisse? Choisissez-vous un niveau intermédiaire? C'est peut-être plus une observation qu'une question, mais comment gérez-vous un stock aussi cyclique?
    Cela a été la source de nombreux problèmes ces dernières années, et même depuis des décennies, surtout quand le stock de poisson de fond dans le golfe a commencé à nettement diminuer et est devenu l'ombre de lui-même. Il y a eu des entrées et des sorties dans cette pêche et cela a fait l'objet de grandes discussions.
    En 2003, nous avons décidé que ce serait terminé, que nous n'allions pas laisser entrer plus de gens ou retirer des permis. Tout le monde serait dans le même bateau. Pendant les périodes de grande abondance, tous les pêcheurs allaient gagner de l'argent et pendant les périodes creuses, comme c'est le cas maintenant, les gens devraient simplement attendre que la situation se rétablisse. C'est ce que nous attendons et certainement, ce que nous espérons. Laissons les gens se débrouiller en leur laissant suffisamment de latitude afin que pendant la période de creux, ils puissent réduire leurs coûts en regroupant leurs quotas, en s'associant, etc. Voilà où nous en sommes pour le moment. La ministre a dit clairement que notre politique est de stabiliser l'accès à la ressource et les quotas. En fait, cette politique est en place depuis 2004. En même temps, nous essayons de mettre un terme aux querelles interminables au sujet de l'accès et de l'attribution des quotas et d'amener les gens à mettre l'accent sur la valeur et la gestion de leurs propres affaires afin qu'ils puissent augmenter au maximum leur revenu net. C'est ce que nous essayons de faire.
    Quant à savoir si un effort de pêche supplémentaire contribue ou non à la diminution du stock, je dirais que cela contribue aux défis économiques, mais non pas aux défis biologiques. Comme je l'ai mentionné, ce stock est géré au moyen d'un TAC et de quotas — le TAC étant l'objet du litige — ainsi qu'en visant les mâles adultes. Nous capturons un certain pourcentage de mâles adultes et nous le faisons de façon à minimiser les risques à long terme pour le stock. Cela ne contribue pas aux cycles biologiques. Cela soulève certainement des questions et des difficultés supplémentaires sur le plan économique, mais nous espérons qu'en changeant nos politiques et en laissant plus de latitude aux pêcheurs, nous pouvons permettre à ces derniers de faire des choix, de réduire leurs coûts et d'attendre que la situation s'améliore.
(0850)
    Merci, monsieur le président.
    Monsieur Moriyasu, vous avez dit que la biomasse exploitable était de 148 000 tonnes en 1995 et de 85 000 tonnes en 2005. Y a-t-il eu des changements dans la méthode d'évaluation de la biomasse exploitable? Quand cette évaluation est-elle faite?
    Mais surtout, je trouve toujours curieux que l'annonce du TAC soit faite quelques heures avant le début de la saison de pêche. N'est-il pas possible de signaler au secteur, pendant l'automne ou l'hiver, quel pourrait être le TAC afin qu'il puisse s'y préparer?
    Très brièvement, il s'agit clairement d'un processus très transparent. Un relevé est fait à l'automne. Il me semble assez transparent pour que les gens sachent quelles sont les tendances.
    Il y a ensuite le PCR, le processus d'évaluation et le processus scientifique. C'est fait de façon transparente en ce sens que nous avons un processus d'examen par les pairs avec les pêcheurs. Ils savent tous quelles sont les tendances. Ils savent où ils vont. Ce n'est pas un secret ou une grande surprise.
    Bien entendu, nous tenons compte des avis scientifiques pendant le processus de consultation pendant lequel les crabiers, les provinces, etc., disent ce qu'ils pensent de la façon des interpréter et de la décision à prendre. C'est ensuite soumis à la ministre.
    Je dirais que personne ne s'attendait au statu quo en 2010. Tout le monde savait quelles étaient les tendances à partir de l'automne. Le chiffre qui a été fixé était peut-être plus élevé que ce à quoi s'attendaient les pêcheurs. Ils s'attendaient à une réduction de 40 p. 100 ou 50 p. 100, mais pas de 60 p. 100.
    Ce chiffre tient compte du fait que nous ne voulons pas compromettre l'avenir en prenant maintenant des mesures à court terme. Nous ne pouvons pas essayer d'atténuer l'impact de cette décision sur les travailleurs d'usine et les pêcheurs cette année en risquant de compromettre l'avenir. C'est ce qu'une expérience amère nous a appris.
    Je ne sais pas si vous avez quelque chose à ajouter au sujet du processus. A-t-il changé depuis les années 1990?
    Pour ce qui est de la façon d'estimer la biomasse, il n'y a pas de changement. Nous faisons toujours un relevé au chalut de fond. Nous analysons les données et nous les montrons aux gestionnaires.
    Le changement le plus important a eu lieu cette année, l'hiver dernier, et c'est la mise en place de l'approche de précaution. C'est le principal changement pour ce qui est des résultats historiques de la recherche.
    Pour le crabe des neiges, c'est la première approche de précaution adoptée pour la pêche au Canada. Cela n'a sans doute été fait nulle part ailleurs dans le monde pour la pêche au crabe, sauf pour l'est de la mer de Béring. Une approche similaire a été adoptée. C'est le changement le plus important.
(0855)
    Merci beaucoup, mesdames et messieurs.
    Je vous remercie d'avoir pris la peine de venir ce matin rencontrer notre comité et d'avoir répondu à un grand nombre de nos questions. Nous apprécions vivement votre participation.
    Nous allons faire un courte pause pendant que nous nous préparons à recevoir le prochain groupe d'invités.
(0855)

(0905)
    C'est un plaisir de vous revoir.
    Messieurs, merci d'avoir pris la peine de rencontrer aujourd'hui le Comité permanent des pêches et des océans pour faire part de vos opinions et répondre à certaines questions des députés. Nous apprécions vraiment que vous ayez pris le temps de venir, alors que vous êtes très occupés.
    Le greffier vous a dit, je crois, que nous vous accordons environ quatre minutes pour vos déclarations préliminaires. C'est pour permettre aux membres du comité de vous poser le maximum de questions dans le délai imparti.
    Monsieur Basque, veuillez commencer votre déclaration préliminaire.
    Je m'appelle Jeff Basque et je suis un négociateur senior du gouvernement Mi'gmaq de Listuguj envoyé au Comité permanent des pêches et océans par la chef Allison Metallic pour parler du sujet à votre ordre du jour, à savoir le secteur de la pêche au crabe des neiges au Canada atlantique et au Québec.
    Un peu moins d'il y a deux mois, le 6 avril 2010, le ministère des Pêches et des Océans, le MPO, a annoncé une réduction de 63 p. 100 du total admissible des captures pour le plan de gestion du crabe des neiges de 2010 auquel participe le gouvernement Mi'gmaq de Listuguj avec un des quotas de crabe des neiges les plus importants accordés aux premières nations. La décision du gouvernement fédéral a des répercussions négatives directes sur le mode de vie des Mi'gmaq de Listuguj et les droits ancestraux et issus de traités de toutes les premières nations Mi'gmaq qui dépendent du crabe des neiges pour leur subsistance sociale et économique.
    Les droits de pêche des Mi'gmaq sont entièrement protégés en vertu de la chaîne d'alliance des traités de paix et d'amitié et la Constitution canadienne.
    L'impact économique et social de la décision unilatérale du MPO sur la communauté de Listuguj, qui compte plus de 3 400 membres et connaît une expansion rapide, sera grave. Un grand nombre d'emplois de pêcheurs seront perdus et les familles connaîtront des difficultés financières. La somme de 1,7 million de dollars que notre gouvernement utilise pour financer le logement, les services de santé, l'éducation et l'enseignement des langues entre autres programmes et services publics, sera perdue. Cette décision représente une réduction de plus de 5 p. 100 des paiements de transfert à la communauté de Listuguj.
    Comment une décision aux répercussions aussi dévastatrices a-t-elle pu être prise malgré un système aussi élaboré de freins et de contrepoids? Il semble impossible que les connaissances et l'expérience combinées et cumulatives de la Loi sur les pêches et du régime de réglementation du MPO dont on s'est servi pour prendre ces décisions aient pu causer une telle catastrophe. La Loi sur les pêches et le régime de réglementation du MPO du gouvernement canadien, y compris son cadre d'analyse scientifique et son processus décisionnel semblent s'être empêtrés dans des intérêts contradictoires, ce qui a donné de mauvaises conclusions scientifiques alliées à de mauvaises prises de décisions ou des avis scientifiques parfaitement valides associés à de mauvaises prises de décisions.
    La magistrature et les gouvernements canadiens peuvent considérer la participation des Mi'gmaq à la pêche commerciale comme une question relevant de la reconnaissance récente des droits des Mi'gmaq par les tribunaux. Toutefois, les Mi'gmaq ont été placés ici sur la terre par notre créateur et ont été investis du devoir sacré de gérer les ressources naturelles pour préserver ces ressources, y compris le crabe des neiges, car elles sont à la base de l'identité, de la culture et du mode de subsistance des Mi'gmaq.
    Ce n'est pas une responsabilité que le peuple Mi'gmaq a choisie ou acceptée. Nous en avons l'obligation. Par conséquent, ce droit reconnu par l'ordre constitutionnel canadien fait simplement partie du mode de vie des Mi'gmaq. Nous ne nous levons pas le matin en disant que nous allons pêcher parce que c'est notre droit. Nous pêchons parce que c'est simplement ce que nous faisons depuis des millénaires. Nous prenons ce dont nous avons besoin, sans plus, et nous régissons notre pêche de façon à assurer la subsistance de nos générations futures. Tout est relié. L'état de nos ressources représente l'état de notre existence en tant que Mi'gmaq.
    En ce qui concerne les droits ancestraux et les droits issus de traités des Mi'gmaq, et contrairement à la Constitution et à la jurisprudence canadienne, le gouvernement du Canada a agi, par l'entremise du ministère des Pêches et des Océans, d'une façon qui ternit gravement l'honneur de la Couronne à plusieurs égards: premièrement, parce que le gouvernement du Canada n'a même pas consulté les Mi'gmaq, en vertu d'une loi ou par simple considération, au niveau de la planification stratégique de son cadre décisionnel; deuxièmement, en prenant cette décision du 6 avril sans tenir compte du fait que l'intérêt des Mi'gmaq à l'égard du crabe des neiges a priorité sur les intérêts non autochtones dans la pêche aux crabe des neiges; troisièmement, pour ne pas avoir consulté les Mi'gmaq et les avoir considérés comme une priorité, le gouvernement du Canada n'a pas respecté ses obligations de fiduciaire envers les Mi'gmaq alors que la Couronne a le devoir d'assurer l'attribution prioritaire des quotas. Tout cela a eu lieu alors que le gouvernement du Canada sillonne le pays en déclarant qu'il a l'obligation de consulter les peuples autochtones du Canada.
(0910)
    En résumé, l'ordre constitutionnel canadien, la loi et la politique publique qui en découle ont causé du tort aux Mi'gmaq alors qu'ils auraient pu être utilisés pour conserver et protéger la ressource. Oui, les Mi'gmaq croient dans la réglementation visant à la conservation de la ressource, mais pas si c'est pour cacher le renard pendant qu'il garde le poulailler. La communauté Mi'gmaq de Listuguj des sept districts du Mi'gma'gi qui sont unies avec elle ne restera pas les bras croisés pendant que le gouvernement fédéral s'apprête à piétiner cavalièrement notre mode de vie et nos droits.
    Suite à la décision fatidique rendue par la ministre Shea, le 6 avril 2010, les Mi'gmaq sont maintenant à la croisée des chemins. Alors que nous faisions confiance à la ministre, à la Loi sur les pêches et au régime de réglementation du MPO, ils représentent maintenant une menace contre notre mode de vie parce que leur cadre décisionnel menace la ressource comme telle, le crabe des neiges. Par conséquent, comme c'est une question de temps, en ce qui concerne les ressources halieutiques si essentielles pour la subsistance des Mi'gmaq et leur mode de vie, le gouvernement Mi'gmaq de Listuguj va agir pour prendre son avenir en main au lieu de le laisser entre les mains du gouvernement du Canada.
    Listuguj, en accord avec un grand nombre d'autres gouvernements Mi'gmaq du Mi'gma'gi, est résolu à exercer son droit inhérent à l'autonomie gouvernementale, à poursuivre son mode de vie en respectant son devoir de gérance et à adopter ses propres lois sur la pêche maritime avec un plan de gestion et un régime de réglementation ainsi qu'un cadre décisionnel qui tiendra vraiment compte de la conservation et de la protection de la ressource en crabe des neiges à long terme. Nous donnerons aux autres gouvernements et parties prenantes l'occasion de dire ce qu'ils pensent de nos lois, règlements et plans de gestion pour leur donner un exemple de véritables consultations. La ressource sera utilisée à des fins alimentaires et sociales. Nous sommes également résolus à faire nos propres travaux scientifiques pour soutenir une pêche au crabe durable. Tout cela se fera en dehors de la pêche commerciale qui est actuellement mal gérée par le gouvernement du Canada.
    Je vous remercie de votre temps et je suis maintenant prêt à répondre à vos questions.
(0915)
    Merci.
    Monsieur Haché.

[Français]

    Merci de nous avoir invités à vous adresser la parole.
    Je suis d'abord consultant en pêcherie. Le nom de ma firme est Services-conseils STF Consulting Inc. Mes services sont retenus par l'Association des crabiers acadiens.
    Ce matin, je m'adresse à vous au nom de cette association et au nom de la très grande majorité des 150 crabiers traditionnels de la zone 12. Ils sont représentés par les associations suivantes: l'Association des crabiers acadiens, l'Association des crabiers gaspésiens, l'Association des crabiers de La Baie, les Crabiers du Nord-Est, l'Association des pêcheurs professionnels crabiers acadiens et la P.E.I Snow Crab Fishermen Association, dont l'un des représentants, M. Cameron, est ici ce matin.
    Les entreprises dont je parle ce matin dépendent exclusivement de la ressource du crabe des neiges. Elles n'ont accès à aucun autre permis de pêche dans le sud du golfe.
    Les graphiques que je vais vous présenter ce matin seront intégrés dans une demande qu'on est à veille de faire, dans les deux ou trois prochains jours. On soumettra cette demande au Bureau du vérificateur général du Canada pour qu'une enquête sur la gestion du stock et de la pêche du crabe des neiges du sud du golfe soit entreprise par ce bureau. Je profite de l'occasion pour demander au comité d'appuyer notre recommandation auprès du Bureau du vérificateur général du Canada. Ça aiderait beaucoup à clarifier toute la confusion et toute la problématique entourant le crabe des neiges du sud du golfe.
    Comme on dit toujours, une image vaut mille mots. Je vous ai fourni une série de graphiques. Je ne vais pas présenter les graphiques individuellement, parce que je vais essayer de vous parler dans les quatre minutes qui me sont allouées.
    D'abord, je vous dirai que les graphiques sont basés sur une chronologie historique. Toutes les données sont divisées entre l'avant-2003 et l'après-2003. Elles sont basées sur huit années: de 1995 à 2002 et de 2003 à 2009. Les moyennes qui sont dans ces graphiques sont basées sur ces deux séries d'années. Pourquoi a-t-on choisi ces deux séries d'années? Parce qu'elles coïncident avec les cycles d'abondance et de déclin de la ressource du crabe des neiges, dont vous avez entendu parler ce matin. Il y a des booms et des creux. Le premier cycle est de 1995 à 2002. Le deuxième cycle est de 2003 à 2009.
    En même temps, ça coïncide avec l'entrée du nouvel accès dans la pêche au crabe. La première fois qu'il y a eu de nouveaux arrivants dans la pêche au crabe, c'était en 1995. Ces gens sont restés dans la pêche au crabe sur une base temporaire, un peu comme vous le disiez ce matin. Le ministère a accordé des permis de crabe, pendant que la ressource était abondante, et ces permis n'ont pas été accordés quand la ressource n'était plus abondante. En 2003, Pêches et Océans Canada a décidé de ne plus suivre cette recommandation et d'intégrer ces gens de façon permanente, en ne tenant pas compte de la nécessité d'équilibrer la ressource avec la capacité de pêche.
    Par ailleurs, si vous regardez le tableau de la Figure 3, vous voyez les captures annuelles de crabe en stock dans le sud du golfe depuis 1995. Les scientifiques et le ministère vous ont dit qu'ils ont été obligés de réduire le total autorisé des captures, le TAC, de 63 p. 100, parce qu'il y a eu une pêche excessive pendant le dernier cycle de la biomasse. Si vous regardez de 2003 à 2009, vous pouvez très bien voir qu'il y a eu une pêche excessive.
    Cela dit, qui a profité de cette pêche excessive? Qui a profité de ce nouveau crabe? À la page suivante, on retrouve le tableau des débarquements des crabiers traditionnels — les gens qu'on représente —, ils sont là. Vous remarquez que, finalement, en comparant la période de 1995 à 2002 et celle de 2003 à 2009, les quantités ont été à peu près semblables.
    Je vais terminer sur ce point. Vous pourrez poser des questions sur les autres tableaux qui suivent, pour savoir où ce crabe a été pêché et par qui il l'a été. Qu'arrive-t-il quand on met une surcapacité dans les pêches: vous avez des chiffres et des données réelles.
    Les données qui sont ici sont de Pêches et Océans Canada. Elles ne sont pas de l'industrie. Ce sont des données officielles du ministère.
(0920)
    Regardons maintenant les flottilles de crabiers traditionnels desquels tout le monde dit qu'ils ne veulent pas partager. C'est faux: les crabiers veulent partager dans un contexte où un équilibre est maintenu entre l'abondance et la rareté de la ressource. C'est tout simplement ce qu'on demande.
    Si on regarde ce qui s'est passé depuis 1990, alors que les crabiers traditionnels dans le sud du golfe détenaient 85 p. 100 des prises, on remarque qu'entre 2003 et 2009, leur pourcentage a baissé à 56 p. 100. Il y a un seuil où ça ne devient plus rentable. La grosse crainte que l'on a maintenant, au début de cette période difficile, et aussi à long terme, c'est que l'industrie de la pêche des crabiers traditionnels ne soit plus rentable.
    Je vous remercie. J'attendrai vos questions.

[Traduction]

    Merci, monsieur Haché.
    Monsieur Hennessey.
    Je m'appelle Frank Hennessey. Je pêche depuis 1967. Au cours des années, j'ai participé activement à un grand nombre d'associations et de comités. J'étais dans le secteur de la pêche au poisson de fond quand le moratoire sur la morue a été imposé et je crois que je serai dans le secteur de la pêche au crabe quand le moratoire sur le crabe sera mis en place. J'ai été l'un des premiers membres du Conseil pour la conservation des ressources halieutiques et j'y ai siégé pendant neuf ans, à compter de 1993.
    Depuis 1995, je pêche dans la zone E. Dans son état actuel, la pêche au crabe en est à peu près au même point que la pêche à la morue en 1993. Nous savons tous qu'au cours des 17 dernières années, sa gestion a failli causer l'extinction de la ressource. Un grand nombre des indicateurs sont les mêmes. Le TAC est trop élevé, ce qui entraîne une surpêche. On ne tient pas compte de la prédation des phoques. Toutefois, on reconnaît maintenant que c'est un des principaux facteurs de l'épuisement du stock de morue dans la zone 4T. On ne reconnaît pas suffisamment la capacité des évaluations scientifiques. La politique du MPO à laquelle nous sommes assujettis en tant que parties prenantes, mais pas le ministère, manque de constance. La viabilité économique passe avant la conservation de la ressource.
    On a dit, il y a quatre ans, que le quota de crabe serait largement réduit sans quoi nous aurions à subir des réductions draconiennes quatre ans plus tard, c'est-à-dire maintenant. Étant donné les problèmes que les évaluateurs scientifiques ont mis en lumière dans leur PCR de 2010 sur le crabe des neiges, les restrictions de cette année ne vont pas remédier à la situation. Nous pourrions avoir à envisager un moratoire total pour l'ensemble de la zone 12 l'année prochaine.
    J'ai plusieurs choses à dire au sujet de la zone E dans laquelle je suis. Quand cette pêche a été ouverte en 1995, il y avait quatre joueurs. L'année suivante, il y avait quatre joueurs de plus. Les quatre premiers pêcheurs ont perdu 50 p. 100 de leur quota pour laisser de la place aux nouveaux arrivants, ce qui était normal. Néanmoins, par la suite, un certain nombre de ces joueurs ont obtenu des quotas de crevette pour être viables alors que certains des premiers pêcheurs n'y ont pas eu droit.
    Ce secteur est le plus éloigné de la zone où l'on pêche avec les quotas les plus petits. D'après l'étude de viabilité qui a été faite, c'est la zone la plus coûteuse où prendre du poisson. Avec les nouveaux arrivants et la réduction des quotas—nous avions un permis—nous pensions qu'au lieu de faire 35 heures de navigation aller et retour, la plupart d'entre nous pourraient faire ces prises à trois ou quatre heures de chez nous. C'est le même crabe du point de vue biologique, les mêmes données scientifiques, mais il n'y avait pas de place pour des pêcheurs supplémentaires dans la zone 12.
    Il y a quatre ou cinq ans, huit nouveaux permis ont été accordés, à partir de permis temporaires, au Nouveau-Brunswick pour faciliter la rationalisation. En 2008, 3 100 tonnes de quotas partagés temporairement ont été transformées en quotas partagés de façon permanente dans la zone 12. Il n'y avait toujours pas de place pour nous.
    Cette année, nous avons 18 000 livres à capturer dans un secteur où nous mettons 14 heures à nous rendre par beau temps et 18 ou 19 heures par mauvais temps. Il n'y avait pas de place pour nous dans la zone 12 à cause du ralentissement de la pêche. Mais cette année, la région du Québec a émis huit permis de plus aux pêcheurs de la province et des Îles de la Madeleine, transformant leur pêche temporaire en permis. Nous sommes toujours là et on nous refuse toujours l'accès.
    Par conséquent, lorsque je parle de politique, j'ai l'impression que le ministère a une politique pour certains d'entre nous, à laquelle nous sommes assujettis, mais qu'il peut la modifier à sa guise.
    C'est tout. Merci.
(0925)
    Merci, monsieur Hennessey.
    Monsieur Lanteigne, veuillez faire votre déclaration préliminaire.

[Français]

    Bonjour. Il sera difficile de respecter les quatre minutes, mais je serai le plus bref possible. Il est dommage que vous n'ayez pas choisi de vous rendre directement dans une communauté où se pratique la pêche. Les gens de Caraquet, de Lamèque, de Shippagan auraient partagé avec joie leur expérience, et vous auraient démontré l'importance de cette industrie directement chez nous.
    Il est important de rappeler que Basile Roussel, du petit village de Le Goulet, près de Shippagan, est celui qui a fondé, avec un groupe de pêcheurs, toute cette industrie qui génère aujourd'hui des milliards de dollars pour le pays tout entier. Sans toutefois entrer dans les détails de l'histoire de cette pêche que notre flottille pratique maintenant depuis 45 ans, il est important que je vous rappelle que nos pêcheurs en sont les véritables pionniers. Dans la grande majorité des cas, les pêcheurs actuels sont les fils de ces personnes qui ont développé l'industrie de cette pêche devenue tant convoitée. La FRAPP que je représente, avec ses 42 ans d'existence, est la plus vieille association de pêcheurs du Nouveau-Brunswick, et sans doute l'une des plus anciennes du pays.
    Avec tout ce bagage de vécu et d'expérience, nous sommes de plus en plus préoccupés par la survie de nos flottilles semi-hauturières. Les politiques, les règles administratives, les décisions politiques défavorisent, dans la majorité des cas, ce groupe de pêcheurs. Ce matin, nous discutons du crabe des neiges, mais il en va tout aussi mal, sinon plus, pour d'autres espèces, notamment la crevette dont l'industrie est aussi en péril.
    Je suis à la direction de la fédération depuis trois ans, et le premier constat que je fais concerne le poids du nombre. Dans le cas du crabe des neiges, notre flottille de crabiers traditionnels, avec moins de 80 bateaux regroupés dans la Péninsule acadienne et la Gaspésie, ne fait pas le poids en comparaison des milliers de pêcheurs des autres flottilles. Vous, les politiciens, avez donc un grand rôle à jouer.
    Il faudrait carrément changer la Loi sur les pêches, qui date des débuts de la Confédération. Nous savons tous que les deux dernières tentatives ont échoué. Il faudrait donc reprendre ce dossier le plus rapidement possible et assurer un meilleur encadrement. Ce mécanisme de prise de décision est véritablement dépassé, car le pouvoir est centralisé. Une seule personne, qui a sans doute les meilleures intentions du monde, et qui ne peut pourtant pas entrevoir tous les impacts possibles dans ce monde de plus en plus complexe, détient le pouvoir; il faut enlever ce pouvoir des mains du ministre. Il est urgent de redonner à chacun des pêcheurs concernés ce qui lui appartient, soit sa pêche et son métier. Il n'y a pas de place ici pour l'envie et la jalousie, qui sont alimentées par la croyance que la ressource appartient à tous les Canadiens. Nous sommes d'avis que tous ne peuvent pas aller sur l'eau pour pêcher, comme nous ne pouvons pas tous devenir bûcherons ou fermiers.
    Au cours des années, les différents ministres de Pêches et Océans Canada ont tous, chacun à leur façon, tenté de favoriser un ou des groupes de pêcheurs. Celui qui a le plus de pouvoir politique et qui adopte la meilleure stratégie de lobbying en sort gagnant, très souvent au détriment des autres groupes. Maintenant, nous avons tellement perdu que notre industrie ne nous appartient plus et se dirige rapidement vers un grand fiasco financier.
    Combien d'entre vous aimeraient se faire dire que votre revenu diminuera de 63 p. 100 et, qu'en plus, vous devrez continuer d'en partager 15 p. 100 supplémentaires avec d'autres? Et comme si cela ne suffisait pas, on a l'audace de vous dire que, grâce à cela, on stabilisera l'industrie. Il y a quelque chose ici qui ne fonctionne vraiment pas. Aucune entreprise, aucun commerce ne peut survivre dans un tel contexte et par suite de telles décisions arbitraires. Les impacts négatifs de ces décisions qui ont été prises ces années-ci continueront de se faire sentir au cours des prochaines semaines et des prochains mois. Il est facile de réfuter cet argument en disant qu'ainsi va l'industrie de la pêche, et qu'il revient aux pêcheurs de se préparer à de mauvaises années.
    Or, depuis 10 ans, nos pêcheurs n'ont pas eu la possibilité de se préparer. Nous avons plutôt travaillé à survivre d'année en année, alors que notre industrie était de plus en plus en péril. Que dites-vous, ce matin, à un jeune pêcheur qui a pris la relève de son père cette année, l'année dernière ou il y a cinq ans? A-t-il été en mesure de se préparer à cette situation? Qui va l'aider? Le grand public a la fausse perception que les crabiers sont tous des gens riches. Pourtant, les pertes importantes que nos entreprises doivent assumer cette année ne pourront pas, à moins d'un miracle, être récupérées l'an prochain. Avons-nous un plan? Le MPO a-t-il un plan? La réponse est non, il n'y pas un seul sou. Au cours d'une période de 15 ans, le MPO, qui prônait le partage et la viabilité, a conduit une flottille complète à une situation financière précaire. C'est à renverser n'importe quel comptable et analyste financier.
    Présentement, y a-t-il des façons de soutenir nos pêcheurs? La réponse est oui. Par exemple, nos crabiers versent des sommes importantes chaque année pour obtenir leur permis de pêche. On exige d'eux 137,50 $ la tonne. Cette année, la moyenne se situe à environ 5 500 $. Remettons-leur donc ces sommes. Nous n'allons pas ruiner le gouvernement canadien ainsi. Commençons donc par cela.
(0930)
    Ensuite, appuyez donc la demande faite par toutes les associations de crabiers auprès de la vérificatrice générale d'enquêter sur la gestion du ministère des Pêches et des Océans, qui, selon nous, va à l'encontre du concept de pêche durable.
     En terminant, nous apprécions votre effort de vous préoccuper de la situation difficile de la pêche au crabe dans la zone 12, cette année. Toutefois, vous serez tous d'accord pour dire que l'ensemble des pêches canadiennes ne sont pas à l'ordre du jour du gouvernement canadien. La présente crise économique confirme bien cet état de fait. L'attention a été centrée sur la crise dans le secteur de l'automobile, et on a immédiatement ouvert la bourse: on a donné des milliards de dollars à des multinationales. Nos collègues de la pêche au homard ont été plus chanceux que nous, car, après quelques semaines, ils ont obtenu un maigre montant de 65 millions de dollars pour tout l'Est du Canada. Tout le dossier des pêches dans son ensemble doit être revu. Il en va de la survie de centaines de communautés des côtes maritimes de tout le pays.
    Merci de m'avoir entendu, et je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Lanteigne.

[Traduction]

    Monsieur Cameron.
    Merci, président Rodney et membres du comité. Je vais me présenter. Je m'appelle Doug Cameron et depuis 14 ans, je suis le directeur exécutif des Pêcheurs de crabe de la province de l'Île-du-Prince-Édouard. J'ai seulement entendu parler de la réunion mardi, par un collègue, et après quelques appels téléphoniques, j'ai réussi à me glisser dans ce comité.
    J'ai été impressionné par les questions que vous avez posées aux témoins précédents et j'ai hâte de répondre à vos questions.
    J'ai aimé ces 14 années où j'ai travaillé avec les pêcheurs et même si ces relations ont été agréables, je crains de devoir dire que les relations avec le MPO, qui avaient commencé du bon pied, ont été décourageantes et même parfois exaspérantes depuis sept à dix ans.
    Je m'inquiète surtout de la viabilité financière de nos 28 membres. Je constate qu'elle ne cesse de décliner. Je m'inquiète de la durabilité de la ressource et de la façon dont les évaluations scientifiques ont fourni des renseignements. Je m'inquiète du processus de prise de décisions ministérielles, de la façon dont il se déroule et du fait que nous n'avons pas été consultés. Je pourrais en parler.
    Je voudrais également bien vous faire comprendre que même si le partage nous a été imposé, l'Île-du-Prince-Édouard ne s'y est pas opposée. En fait, notre objection est que lorsque les stocks diminuent, une pression est exercée sur la ressource. Mais comme je l'ai dit, nous ne nous opposons pas au partage.
    J'étais présent dans le bureau quand le ministre Thibault a annoncé qu'une part de 15 p. 100 serait accordée aux pêcheurs non traditionnels et que cela dépendrait… les associations qui allaient bénéficier de ces 15 p. 100 pendant une période de un ou deux ans allaient devoir présenter un plan afin qu'elles puissent abandonner le partage en faveur d'un système selon lequel des permis seraient accordé de façon permanente aux pêcheurs. Cela veut dire en fait qu'au lieu d'avoir 800 ou 1 000 pêcheurs au homard qui exercent des pressions sur le ministre, 15, 20 ou 30 pêcheurs seraient accueillis au sein de notre organisation de façon permanente. Nous n'essayons pas de récupérer le partage; nous voulons seulement qu'il soit mieux contrôlé.
    La pêche au homard s'est bien déroulée. Pourquoi? Parce que son accès est limité; les nombres sont limités.
    Comme je l'ai dit, je me ferai un plaisir de répondre à vos questions et j'espère que vous en poserez pour me permettre d'approfondir certains des sujets dont j'ai parlé.
    Merci.
(0935)
    Merci, monsieur Cameron.
    Monsieur Byrne.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie nos témoins de comparaître devant nous et de nous fournir des avis importants et un aperçu général du secteur en ce qui touche non seulement vous-mêmes, mais aussi les membres de vos associations et organisations.
    Je pourrais peut-être demander à M. Haché et à M. Lanteigne s'ils peuvent nous fournir… Les réductions ont causé énormément de difficultés et nous le reconnaissons. Cela pose un problème non seulement pour les pêcheurs, mais pour les transformateurs et tous ceux qui travaillent dans ce secteur. Pourriez-vous en parler au comité? Quand les nouveaux arrivants sont arrivés dans cette pêche, bien entendu — disons les choses telles qu'elles sont — cela a causé certaines inquiétudes au sein de vos organismes. Était-il entendu, de façon explicite ou implicite, que si les stocks diminuaient, ce déclin serait partagé également par tous ou que les nouveaux arrivants auraient à quitter cette pêche en premier? Est-ce bien ce que vous pensiez depuis un certain nombre d'années? Pendant que le stock augmentait, compreniez-vous quelle méthode serait suivie lorsqu'il diminuerait?
    C'est la formule qui avait notre préférence et qui existait entre 1995 et 2002. Il y avait un partage quand le stock et la viabilité du secteur le permettaient. Quand le stock diminuait, la viabilité diminuait. Le principe du dernier arrivé premier sorti était appliqué et les nouveaux arrivants n'y participaient pas.
    C'est ce qui était entendu depuis le début et cette formule a très bien fonctionné.
    Si vous prenez les figures 16 et 17 — cela vous éclairera. En ce qui concerne le déclin du stock au cours du premier cycle, à la figure 16, vous verrez les chiffres pour 1997, 1998 et 1999. En 1997, le TAC était de 15 400 tonnes. Il y a eu un certain partage et les crabiers ont obtenu 13 000 tonnes. Toutefois, en 1998 et 1999, on a jugé que pour assurer la viabilité de la flottille traditionnelle, il fallait près de 12 000 tonnes de crabe et il y a eu ni partage ni crise. Il n'y a pas eu de problème. Personne n'a adressé de reproches au MPO. Cela a bien fonctionné et l'ensemble du secteur a pu traverser cette phase de déclin.
    Si vous prenez la figure 17 et que vous voyez ce qui se passe quand il y a une surcapacité aussi importante… En 2008, pour que la flottille traditionnelle obtienne 13 000 tonnes, nous avons eu besoin d'un TAC de 20 000 à 21 000 tonnes. C'est le problème que pose la surcapacité.
    Les gens ont tendance à penser qu'il suffit d'établir le TAC. Ce n'est pas ainsi que les choses se passent en réalité. Il faut attribuer des quotas suffisants et viables pour assurer la rentabilité des pêcheurs. La durabilité a deux dimensions: le stock et la rentabilité. Le développement durable se compose de deux mots. Il y a le mot « développement » et vous ne pouvez pas avoir de développement sans une rentabilité économique indépendamment de l'argent des contribuables. C'est donc là un bon exemple.
    En 2008, nous avons appuyé un quota de 20 000 tonnes, car nous nous trouvions à ce niveau. Nous étions précisément là. Nous avions besoin de 13 000 tonnes. S'il n'y avait pas eu de surcapacité, nous aurions accepté beaucoup moins, comme nous l'avons fait en 1997, 1998 et en 2009. Puis, en 2010, nous tombons tout à coup à 5 000 tonnes. Voilà le problème. Je vous ai montré que les crabiers n'ont pas bénéficié de cette pêche excessive entre 2003 et 2009. Ce sont eux qui, dans les années 1990, ont investi des millions de dollars, 10 millions de dollars dans la science et la gestion de la pêche. Ils ont bâti cette belle pêche, ce beau stock. Puis, après 2003, alors que l'avenir se présentait bien, le ministère a dit que c'est pas nous qui allions en bénéficier, mais notre voisin. Ils ont donc donné le quota au voisin. Pire encore, maintenant que le stock est en déclin, que nous sommes dans le trou, nous sommes pénalisés. La flottille aurait normalement besoin de 13 000 tonnes et elle n'a plus que 5 000 tonnes.
    Nous ne sommes pas contre le partage. Nous l'avons dit à de nombreuses reprises. Nous sommes entièrement pour les principes et les politiques de développement durable. MPO ne respecte pas la politique de développement durable du gouvernement du Canada et ne respecte même pas sa propre politique de bonne gestion. Il faudrait que cela fasse l'objet d'une bonne analyse par une tierce partie. C'est pourquoi nous sommes pour l'intervention de la vérificatrice générale. Si la vérificatrice générale nous démontre que nous avons tort, nous l'accepterons. Mais nous avons besoin de cet avis.
(0940)
    Je veux seulement conclure. Notre problème se pose pour cette année. Le ministère vous a dit qu'il nous avait laissé une marge de manoeuvre. C'est un mensonge évident. Je regrette. Les crabiers du sud du golfe n'ont accès à rien d'autre: ni au homard, ni au hareng, ni aux pétoncles. Demandez à n'importe quel représentant du MPO dans le golfe. Si vous êtes un crabier, essayez d'obtenir un permis de pêche au homard.
    Le ministère dit qu'il nous a laissé la possibilité de nous associer. Nous avons des entreprises familiales qui existent depuis des générations et qui font travailler des employés dans leurs bateaux. Ces bateaux ont quatre à cinq membres d'équipage et sont réglementés par Transports Canada. Ce n'est pas de la pêche amateur. Le ministère dit qu'il va réduire nos prises, qu'il va donner le quota… « Laissez l'organisation de pêcheurs blanchir l'argent de ses crabes pour financer le reste et vous allez congédier vos membres d'équipage et vous associer à un autre pêcheur ». Ce genre d'association est peut-être une bonne chose pour une très petite pêche côtière… je regrette.
    Je voudrais m'adresser à M. Lanteigne. Vos points de vue sont très importants et très valides.
    Très bien. C'est à peu près tout. Désolé.

[Français]

    Mon collègue Robert Haché a bien illustré la situation. J'ajouterais qu'en 2005, un rapport de Gardner Pinfold Consulting sur la pêche au crabe et à la crevette, commandé par le ministère des Pêches et des Océans, disait très clairement au ministère, à ce moment-là, que la viabilité de la flottille du crabe était en danger. Cependant, on n'a pas changé les politiques administratives. On a continué à dépouiller petit à petit cette industrie, et aujourd'hui les entreprises de pêche sont en difficulté.
    Par ailleurs, monsieur Byrne, en réponse à votre question concernant le partage, M. Haché a très bien exprimé la situation. Nos pêcheurs ne sont pas contre le partage, en autant qu'ils aient la capacité financière de le faire. Cependant, sans cette capacité, c'est absolument impossible. Cette année, ces entreprises de pêche — vous allez parler avec les pêcheurs tout à l'heure — perdent de 50 000 $ à 200 000 $.
    Comment allez-vous récupérer de telles pertes au cours des prochaines années? Il n'y a pas de miracle. L'année prochaine, il n'y aura pas 25 000 tonnes de crabe à pêcher. Ils ne vont pas se « sortir du trou » avec cela.

[Traduction]

    Monsieur le président, je vais partager mon temps avec M. LeBlanc.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Il vous reste 30 secondes.

[Français]

    J'ai une question très précise pour M. Haché et M. Lanteigne. Vous avez parlé de partage. On ne sera peut-être jamais d'accord à cet égard, mais laissons de côté cette question.
    À part les formules de partage, en 2007, 2008, 2009, l'avis scientifique a identifié des problèmes majeurs. Le gouvernement a choisi de ne pas agir, de ne pas diminuer la pêche d'une façon responsable et, à présent, tout le monde, nonobstant les questions de partage, se trouve à devoir faire face à une diminution du taux de capture de 63 p. 100.
    Ma question est simple. Qu'auriez-vous souhaité que le gouvernement fasse au cours des trois années précédentes pour essayer d'éviter à tout le monde la débâcle qui se produit présentement?
(0945)
    Je répondrai à votre question de deux façons. D'abord, les scientifiques du ministère et nous n'avons pas le même reading ou les mêmes craintes par rapport au stock de crabe dans le sud du golfe. Cela fait plusieurs années qu'on dit au ministère ce qu'on constate, et c'est heureux parce qu'on a toujours dit que s'il y a suffisamment de crabe, c'est bien, car dans ce cas, toute l'industrie peut vivre.
    On a appuyé les propositions au sujet des stocks. Le ministère a même dit au début que c'était les crabiers traditionnels qui avaient voulu pratiquer la surpêche. Je vous ai expliqué pourquoi on a été forcés d'appuyer le quota de 20 900 tonnes. C'était pour avoir le minimum dont on a besoin, c'est-à-dire 13 000 tonnes, mais on n'a pas fait cela de façon irréfléchie, monsieur LeBlanc. On suit cette pêche depuis de nombreuses années. Jusqu'au milieu des années 1990, les prises des crabiers dans les casiers coïncidaient avec l'analyse qui était faite par le relevé au chalut du ministère. Ensuite, les scientifiques venaient nous voir pour nous dire que l'année suivante, la situation des stocks se présentait de telle ou telle manière. Ça correspondait à ce que nos pêcheurs avaient eux-mêmes prévu.
    Je ne sais pas ce qui s'est passé depuis quelques années, monsieur LeBlanc, mais il y a une contradiction complète entre l'évaluation des stocks par les scientifiques et ce qu'on constate dans le milieu de l'industrie de la pêche. Je vous donne l'exemple de cette année, c'en est aberrant. Cette année, les prises par unité d'effort des pêcheurs ont été absolument incroyables. Alors qu'on dit avoir utilisé l'approche de précaution pour réduire le quota, l'approche de précaution du ministère existe pour favoriser la capture du gros crabe — garder du gros crabe dans l'eau. Monsieur LeBlanc, on n'a jamais vu de pareils monstres dans l'eau avant cette année. Apparemment, tout ce qu'on a fait durant les années précédentes en matière de pêche était mauvais. Cependant, il y a un problème quelque part. En résumé, les faits ne coïncident pas avec le discours de Pêches et Océans Canada.
    Je demande au comité de nous aider conformément à cette autre recommandation: on voudrait que le comité demande au ministre de mettre en place un groupe de travail sérieux avec les pêcheurs traditionnels et les Premières nations pour régler le problème d'évaluation du stock de crabe dans le sud du golfe. Cet après-midi, des pêcheurs vous expliqueront des choses à ce sujet, on s'est divisé la tâche.
    Il y a deux choses: si le stock ne peut pas soutenir le volume de captures effectuées durant les dernières années, soit de 2003 à 2009, il faut absolument rationaliser nos efforts. C'est de là que vient le problème de surcapacité. Si le stock peut soutenir cela, le problème est moindre. Je souhaite que le stock soit suffisant. Cependant, on ne peut pas toujours dire que ce sont les crabiers traditionnels qui paieront la note, que si cela ne peut être soutenu, ils paieront la note. Ce n'est franchement pas correct.
    L'industrie du crabe des neiges fournit le meilleur exemple d'une flottille de pêcheurs qui se sont responsabilisés au cours des années. Maintenant, on est vraiment rendus

[Traduction]

au bord de l'abîme, étranglés par ces restrictions.

[Français]

    Il y a une surcapacité dans l'industrie du crabe des neiges, compte tenu des sous-zones et de tout cela. C'est ce qui est train de se passer.
    Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question.
    On accepte l'avis officiel du ministère, monsieur LeBlanc, mais en l'acceptant on doit vous demander de faire une enquête pour voir ce qui se passe parce que ça va mal. D'autre part, à notre avis, peut-être que le stock ne se porte pas si mal que ça.

[Traduction]

    Monsieur Lanteigne.

[Français]

    Je terminerais en disant qu'en effet, cette année, les observations des pêcheurs ont tous été excellentes, les captures, la qualité du crabe. En ce qui concerne cette histoire d'avis scientifique, j'ai eu une discussion avec des scientifiques à Moncton au cours de la saison, et je leur ai demandé s'ils s'étaient rendus sur les quais et s'ils montaient à bord des bateaux pour constater la réalité. Je leur ai dit d'aller parler avec un pêcheur pour connaître ses constatations. Ils nous ont répondu qu'ils n'avaient pas le temps. Alors, que fait-on? Le seul relevé scientifique serait-il cette pêche au chalut qui se fait une fois par année pour évaluer ce qu'il y a dans l'eau?
    Les pêcheurs qui sont sur l'eau sont d'excellents partenaires scientifiques, mais on ne se sert pas de leurs connaissances et on fait fi de leurs observations. Il faut permettre aux scientifiques de venir travailler en équipe, de se rendre sur les quais, de sortir en mer. On leur dit de venir voir ce qui se passe vraiment sur les quais, ce qu'est la réalité.
(0950)
    Merci, monsieur Lanteigne.

[Traduction]

    Vous avez fait une utilisation maximum de vos 30 secondes.
    Nous avons un président indulgent.
    Monsieur Blais.

[Français]

    Je vais essayer la même recette que celle de M. LeBlanc.
    De fait, ça va mal à la shoppe. En tenant pour acquis que ce que vous nous dites est vrai, quelqu'un quelque part ne fait pas bien son travail, ou quelque chose se produit qui fait en sorte que certaines évaluations sont complètement erronées.
    À la limite, j'aimerais entendre votre opinion sur les manières d'évaluer. Il existe différentes façons de le faire. Je comprends très bien qu'un pêcheur sur son bateau puisse facilement évaluer ce qui peut se produire en mer. C'est une forme d'évaluation. Il y en a d'autres. On connaît bien des choses sur d'autres endroits, mais, malheureusement, il semble que nos données sur le fond de la mer valent ce qu'elles valent. J'aimerais entendre votre opinion sur les évaluations possibles. Qu'est-ce qui fait qu'une évaluation de ce type puisse être fiable à 100 p. 100 et que d'autres ne le seraient pas?
    Pour ma part, j'ai l'impression que c'est une combinaison. J'ai l'impression qu'une bonne combinaison peut bien aider à faciliter les choses et à trouver la véritable orientation valable. Sinon, c'est comme manoeuvrer un navire: si on pense à un moment donné qu'il n'y a pas d'iceberg à gauche et que finalement il y en a un, on s'écrase dessus, c'est automatique. J'aime mieux qu'il y ait une espèce de principe de précaution.
    J'aimerais connaître votre opinion à ce sujet.
    C'est une question à laquelle ça me fait plaisir de répondre.
    Le meilleur exemple s'est produit l'an passé. Le stock de crabe des neiges se comporte de façon bizarre de temps à autre. C'est arrivé en 2001 et à nouveau l'année passée. Le stock de crabe était, comme on dit en anglais, scattered. Il était réparti par petits groupes partout dans le sud du golfe. Ça en faisait un stock très intéressant, mais extrêmement difficile à pêcher, monsieur Blais, parce que le sud du golfe, c'est grand. Quand on a juste des petits groupes, on peut les manquer.
    L'an passé, les pêcheurs ont remarqué que la capture était difficile. Les pêcheurs chez vous en Gaspésie, les pêcheurs chez nous ont eu de la difficulté à capturer le crabe. De la même façon, en 2001, on avait eu de la difficulté à capturer le crabe. En 2001, certains pêcheurs traditionnels ont laissé jusqu'à 50 000 livres de crabe à l'eau à cause du comportement.
    Nous avons un conseiller scientifique, le professeur Gérard Conan. Il nous a expliqué ça. Il nous a dit que nous pouvions avoir une très bonne biomasse commerciale, mais une très mauvaise biomasse pêchable. Ce serait à cause de la façon dont le crabe s'est distribué dans l'eau, à cause des courants d'eau froide et ainsi de suite.
    Par contre, monsieur Haché, il y a une donnée irréfutable: c'est la donnée du cycle.
    Oui. On n'a jamais dit que le cycle ne descendait pas. On ne prétend pas que le cycle ne descend pas; il descend.
    Je veux simplement terminer. L'an passé, quand ils ont fait le relevé, ils l'ont fait avec leur chalut dans la même biomasse qui était éparpillée. Ils ont donc trouvé moins de crabe, de la même façon que les crabiers en avaient trouvé moins. La situation...
    Mon problème est un problème de temps, vous l'avez très bien entendu. J'aurai l'occasion de poser d'autres questions aux pêcheurs qui vont être présents plus tard.
    J'aimerais en poser une à M. Basque.
    Monsieur Basque, vous avez dit que vous vouliez prendre des mesures, que la nation mi'kmaque éventuellement aurait à prendre des mesures, c'est-à-dire qu'elle devrait adopter ses propres loi, son propre système.
     Qu'est-ce que ça veut dire en langage de tous les jours? Avez-vous des exemples bien concrets?
(0955)

[Traduction]

    Je ne suis pas un technicien qui connaît grand-chose au travail scientifique qu'exige la gestion du crabe des neiges. Je vais devoir laisser à d'autres personnes qui ne sont pas ici aujourd'hui le soin de répondre à votre question. C'est une bonne question.

[Français]

    Monsieur Basque, peut-être que je me suis mal exprimé, peut-être que vous n'avez pas compris ma question. Elle ne porte pas sur l'avis des scientifiques, mais sur ce que vous avez dit plus tôt. Considérant tout ce qui se passe, vous dites que vous n'avez pas été consultés, que vous n'êtes jamais consultés, que tout ça n'a pas d'allure, et que vous allez donc prendre des mesures extrêmes.
    Je voudrais savoir ce que sont les mesures extrêmes ou spéciales dont vous parlez. Est-ce que la saison prochaine, vous déciderez de partir en mer à telle date et de pêcher telle quantité? Est-ce que ça s'arrêtera là? Comment allez-vous fonctionner?

[Traduction]

    Comme je l'ai déjà dit, nous allons consulter notre peuple. Nous faisons quelques recherches scientifiques dans nos propres communautés. Nous allons travailler avec d'autres nations Mi'gmaq et nous avons déjà commencé à le faire. Nous allons avoir un cadre stratégique qui sera très différent du cadre décisionnel que vous avez maintenant.
    Comme je l'ai dit, notre principe de base est que nous prenons ce dont nous avons besoin, sans plus. Les décisions doivent être prises en fonction des données scientifiques et non pas de considérations politiques comme cela semble être le cas. Nous avons vu la pêche à la morue s'effondrer en 1992. Aujourd'hui, il s'agit du crabe des neiges. Demain, ce sera le saumon.
    Les Mi'gmaq ont donc un peu d'espace à l'intérieur de l'ordre constitutionnel canadien et ils vont l'occuper. Comme je l'ai dit, nous serons ouverts aux opinions des autres parties prenantes, étant entendu que les Mi'gmaq ont un accès prioritaire à cette ressource, contrairement aux autres pêcheurs non autochtones représentés ici dans cette salle.
    La conservation est essentielle. Comme je l'ai dit, nous avons fait confiance au système, à la Loi sur les pêches et au régime de réglementation du MPO. Toutefois, soyons réalistes: cela ne fonctionne pas bien. Vous dépensez énormément d'argent et les gens qui tirent leur gagne-pain de la ressource paient pour les mauvaises décisions qui sont prises. C'est vraiment sidérant.
    Nous ne ferions pas taire un de nos principaux scientifiques qui a dit aux décideurs: « Vous devez réduire les prises. Je tire le signal d'alarme ». Nous ne le ferions pas taire parce qu'il nous donne des mauvaises nouvelles. Vous devez prendre des décisions difficiles maintenant, quand elles sont nécessaires, pour protéger l'avenir ou cela vous coûtera très cher plus tard, parce que vous aurez détruit la capacité de régénération de la ressource.
    Nous avons une loi qui sera modifiée. Nous avons notre propre réglementation. Nous allons en fait la présenter aujourd'hui. Je vais rencontrer les autres chefs de la région de l'Atlantique et c'est ce qu'ils ont accepté de faire. Quant à savoir si le MPO va nous écouter et nous prendre au sérieux, c'est à lui de décider. Nous pouvons travailler ensemble. Nous pouvons travailler les uns contre les autres. Personne n'aime la confrontation.
(1000)
    Nous sommes déjà passés par là. Listuguj est déjà passé par là. Notre ressource a été menacée. La ressource fait partie de ce que nous sommes et je parle surtout de notre pêche au saumon sauvage. La situation est donc la même pour les autres ressources halieutiques.
    Nous espérons travailler avec les parties prenantes, le ministère des Pêches et Océans et nous allons travailler avec notre peuple. Pour le moment, nous sommes presque entièrement d'accord, dirais-je, sur ce que nous voulons faire.
    Merci, monsieur Basque.
    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    Je voudrais vous remercier tous, messieurs, d'être venus témoigner devant le comité aujourd'hui.
    Je suis un nouveau député. Je viens de la côte Ouest. Je viens d'être élu en novembre et c'est donc quelque chose de nouveau pour moi, mais je m'intéresse passionnément à la pêche sur la côte Ouest et je désire vivement m'informer au sujet de la pêche sur la côte Est.
    Quand j'ai entendu la motion proposant d'étudier le secteur du crabe des neiges et de faire voyager notre comité dans l'Est pour vous rencontrer afin d'entendre vos opinions, j'étais tout à fait pour et je tenais à le faire. J'ai été un peu en retard sur notre itinéraire de voyage qui incluait Shippagan dans les endroits à visiter. Malheureusement, je ne suis pas arrivé à temps pour cette réunion. Au moins, nous sommes ici. Nous avons entendu ce que vous aviez à dire et ce sont certainement des observations intéressantes étant donné ce que le ministère nous a dit tout à l'heure.
    Je voudrais revenir sur la question de l'évaluation scientifique, mais je veux d'abord m'adresser à M. Basque.
    Tout à l'heure, le ministère nous a dit que les premières nations ont été consultées pour prendre la décision qui a été prise et je me demande ce qu'il en est. Monsieur Basque, pourriez-vous préciser si vous avez été consultés au sujet de cette décision?
    J'ai travaillé avec un coordonnateur qui est le directeur adjoint de notre ministère des Ressources naturelles. Comme vous le savez, en ce qui concerne cette notion de consultation, en tant qu'Autochtones, en tant que peuple Mi'gmaq, nous n'en avons pas la même conception que le gouvernement fédéral ou les gouvernements provinciaux. J'ai vu ce que la province du Nouveau-Brunswick considère comme des consultations et cela ne correspond en rien à la définition, à la norme qui a été établie par nous-mêmes et par la Cour suprême dans une série de décisions concernant les consultations. Par conséquent, lorsqu'on dit à un groupe de gens comme les Mi'gmaq, qui ont des droits prioritaires sur cette ressource par rapport aux autres utilisateurs et parties prenantes non autochtones, ce qu'ils vont devoir faire et quelles sont les intentions du gouvernement, il ne s'agit pas d'une consultation.
    Une consultation consiste à écouter nos préoccupations, à les prendre au sérieux et à en tenir compte au niveau de la planification stratégique et non pas une fois la décision prise, une fois qu'une politique a été élaborée. Mais c'est ce que le gouvernement fédéral a fait. Il n'a jamais envisagé des consultations sérieuses… De toute évidence, sa décision ne tient pas compte des intérêts des Mi'gmaq.
    J'ai souligné certaines choses à ce sujet. J'ai surtout parlé de l'honneur de la Couronne, qui n'a pas été respecté. Pour ce qui est des consultations, non, nous rejetons toute affirmation selon laquelle nous avons été consultés.
(1005)
    Merci, monsieur Basque.
    Pour retourner à la question de l'évaluation scientifique, en ce qui concerne les recommandations qui ont été faites, M. Cameron pourrait peut-être nous dire ce qu'il en pense.
    Je vais essayer d'être bref. De 1997 à 2001, quand nous suivions un plan quinquennal, le secteur a apporté au MPO une contribution de plus de 2 millions de dollars pour entreprendre une évaluation scientifique. Nous avons toutefois constaté qu'après quelques années, les scientifiques ont agi sur leur propre initiative et ont présenté des systèmes pour nous dire quels seraient les résultats. Ils ont suggéré des niveaux de capture et toutes sortes de choses de ce genre. Nous avons donc commencé à retirer notre financement; en fait, nous avons refusé de l'accorder.
    Depuis, presque chaque année, j'ai constaté que lorsque nous allons aux réunions scientifiques, il s'est passé quelque chose de nouveau sans que les pêcheurs ne soient consultés. Nous parlons maintenant de l'approche de précaution, mais à ma connaissance, les pêcheurs n'ont jamais participé au processus qui a permis d'établir les chiffres prudents qui ont été mentionnés.
    Je tiens à le préciser très clairement. Nous avons participé à l'établissement de l'approche de précaution, mais cette approche présentait deux aspects. Nous avons suggéré une approche prudente, mais en même temps, nous avons dit au ministère, et les scientifiques l'ont dit également, que pour que cette approche de précaution fonctionne, il fallait que les gestionnaires équilibrent la capacité des pêches et la disponibilité de la ressource. C'est un aspect que les gens du MPO ne vous ont pas mentionné ce matin. Toute l'approche de précaution peut fonctionner à la condition que vous ayez un secteur viable.
    Je tiens également à dire que lorsque nous avons décidé de mettre fin à notre partenariat avec le MPO, c'est quand les gens ont décidé d'établir cette surcapacité de façon permanente. Nous avons dit que nous ne voulions plus jouer ce jeu. C'est la raison pour laquelle nous avons cessé notre financement en 2003. Quand nous avons négocié avec le MPO à ce moment-là, nous fournissions chaque année un montant de 2,3 millions de dollars. C'est l'investissement que le secteur faisait pour améliorer la science et la gestion.
    Le problème que nous avons eu, ces dernières années, en ce qui concerne cet écart entre l'opinion du secteur et celle des scientifiques quant à l'état du stock, est que si ces investissements étaient faits, le problème n'existerait pas. Ils ne sont pas faits parce que, pour des raisons politiques, le MPO a décidé d'éparpiller les quotas au détriment de tout le monde à long terme.
    Ce genre de situation ne favorise pas une bonne gestion et une bonne performance du secteur. En voilà un exemple de plus. Voilà pourquoi nous disons que ce doit être soumis à la vérificatrice générale. Cette situation dure depuis trop longtemps. Tout le monde a de la difficulté tout simplement.
    Une dernière chose à propos de la science. Le problème est que ce qui se passe quand on pêche… Nous ne prétendons pas être mieux informés, mais ce que nous constatons en pêchant contredit les résultats que les scientifiques disent avoir obtenus dans leur relevé au chalut. Il faudrait que ce soit vérifié. Nos scientifiques doivent accompagner les pêcheurs pour vérifier ce qu'il en est.
    Je ne sais pas si cela répond à votre question.
(1010)
    Madame O'Neill-Gordon.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à tous nos invités de ce matin, surtout M. Cameron qui est venu de la province voisine. C'est un plaisir de vous recevoir ce matin.
    Comme vous le savez pour la plupart, je suis la députée de la région de Miramichi et même si Shippagan et Caraquet ne sont pas dans ma circonscription, elles sont suffisamment proches pour que j'y compte de nombreux amis et connaissances. Je me réjouis de voir que M. Haché s'est joint à nous pour défendre leurs intérêts ce matin, de même que vous tous.
    La semaine dernière, nous avons écouté un grand nombre de préoccupations et de recommandations quand nous avons voyagé dans les différentes régions. Maintenant que nous sommes ici, au Nouveau-Brunswick, je me demande quelles sont les recommandations et les préoccupations dont vous voulez que nous fassions part à notre gouvernement.
    Monsieur Haché, je sais que vous avez notamment recommandé un groupe de travail et je me demande si vous pourriez nous en dire plus à ce sujet.
    Quelqu'un a-t-il d'autres recommandations que nous pourrions transmettre également?
    Bien entendu, la première recommandation serait que le comité appuie notre demande de vérification de la gestion des pêches par la vérificatrice générale. Je pense que ce serait très utile. Une autre recommandation très utile et pratique est la création d'un groupe de travail, comme vous l'avez bien dit, madame O'Neill, au sujet du processus d'évaluation scientifique du crabe des neiges dans le sud du golfe avec une participation très active du secteur. Je pense que ce sont les deux principales mesures qui, selon nous, pourraient avoir un effet positif.
    Vous avez aussi mentionné les nouveaux arrivants. Nous savons que la pêche au crabe des neiges s'est développée au cours des 10 dernières années, mais pensez-vous qu'il y a maintenant trop de pêcheurs et comment pensez-vous qu'on pourrait y remédier s'il s'agit également d'un obstacle? Nous connaissons l'obstacle que représente la biomasse, mais il y a aussi celui-là.
    C'est un principe bien simple qui relève de la politique du ministère à l'égard de la pêche dans la région de l'Atlantique. Vous pouvez établir un processus selon lequel les derniers arrivés seront les bienvenus pour faire cette pêche lorsque la biomasse commerciale est suffisante, mais en dessous d'un certain seuil — cela pourrait être des facteurs économiques, la biomasse ou en conjonction avec l'approche de précaution — on leur demandera d'abandonner cette pêche. Vous devez veiller à ne pas détruire une pêche pour pouvoir en sauver une autre. Cela irait à l'encontre de vos objectifs. Si vous avez des problèmes dans une pêche, ne cherchez pas à les résoudre en en créant dans une autre. Vous devez être prudents.
    Nous suggérons le même processus que celui que nous avions entre 1995 et 2002. Pendant cette période, les nouveaux arrivants étaient les bienvenus et ils ont participé à la pêche, mais certaines années, ils n'étaient pas invités à y participer. C'est une façon de préserver la chèvre et le chou en permettant un plus grand partage, mais tout en protégeant la viabilité du secteur.
    Ce genre de chose peut être mise au point. Vous devez y réfléchir et le faire.
(1015)
    Madame O'Neill, je voudrais ajouter quelque chose. Nous devons envisager des solutions à court terme. Nous devons aussi envisager des solutions à plus long terme. J'ai mentionné tout à l'heure que certains de nos pêcheurs… et cela touche surtout les jeunes, ceux qui n'ont pas beaucoup d'argent. Ils ont toutes sortes de dettes et toutes sortes d'obligations financières.
    Cela répond également en partie aux questions de M. Donnelly ,et aussi celles de M. Byrne, à propos de l'aspect scientifique. Nous travaillons isolément les uns des autres. Les scientifiques ont leur opinion et les pêcheurs en ont une autre. Nous devons envisager un nouveau modèle. Il y a maintenant un manque de confiance et cela ne marche plus. Nous devons donc prendre le temps d'examiner la situation et si nous devons réinventer la roue, faisons-le. Essayons de trouver une solution qui marchera, car pour le moment… Nous venons d'entendre les gens de la première nation qui nous ont confirmé ce que nous disions à savoir que ce modèle ne fonctionne plus. Les pêcheurs ne croient tout simplement pas ce que disent les scientifiques.
    Quand nous regardons les choses à plus long terme… Pour le moment, il n'est pas possible d'obtenir du crédit. Il n'y a pas un seul jeune de 25 ou 30 ans qui peut aller à la banque ou dans une coopérative de crédit pour dire: « Je veux acheter le permis de mon père ou de mon voisin… pour me lancer dans la pêche au crabe. » Êtes-vous fou? Avez-vous perdu la tête? C'est insensé. Qui va pêcher? Qui va prendre la relève? La réponse du MPO est: « Nous ne nous occupons pas de cette partie du problème; cela regarde la province. » Comment la province peut-elle s'en occuper si le MPO joue toutes sortes de jeux politiques? Il vous est impossible de trouver un comptable pour signer un formulaire que vous pouvez apporter à la banque. Les chiffres ne concordent pas. Personne ne le fera, car le MPO joue un jeu politique et personne ne peut financer un permis.
    Par conséquent, quand vous demandez ce qu'il faut faire, nous devons voir comment remédier à la situation à long terme. Qui va pêcher? Qui va prendre le crabe, les crevettes ou les pétoncles ou ce qui se trouve dans l'eau?
    On nous demande encore ce que nous devrions faire. Nous avons déjà connu cela pour le moratoire sur la morue. Nous ne devions jamais répéter les erreurs du passé, mais cela semble être notre spécialité. Nous aimons critiquer la science. Non, les évaluations scientifiques ne correspondent pas à ce que disent les pêcheurs. Nous avons fait la même chose en 1992 ou 1993. Les données scientifiques ont abaissé le TAC pour la pêche à la morue. On a dit que c'était une erreur, que la taille de la morue et l'état du stock étaient excellents, que nos prises par unité d'effort n'avaient jamais été aussi importantes. Nous avons dit: « C'est ce que vous vouliez et nous en sommes là. » « Oui, mais nous ne voyons pas le stock se régénérer. Nous avons un sérieux problème. » Personne n'a écouté et nous avons continué.
    Aujourd'hui, les scientifiques disent la même chose au sujet du crabe. Je crois qu'il y a une importante perte de femelles. Le recrutement de juvéniles n'est pas aussi important qu'on le souhaiterait et les scientifiques s'inquiètent. Oui, il y a des bonnes prises cette année parce qu'il y a moins de pêcheurs dans l'eau. Comme il y a moins de crabe à pêcher, ils les prennent rapidement. Les crabes qui sont pêchés sont gros et pleins. Il y a des endroits où ils sont absents. Il y a d'autres endroits où la pêche est rapide. Je pense que nous devrions être très prudents.
    En tant que pêcheur, j'en ai assez d'entendre parler les politiciens qui réduisent mon salaire et les gens qui… Un bonne façon de gérer le ministère serait de baser une partie du salaire de ses fonctionnaires sur la biomasse qui se trouve dans l'eau. S'ils arrivent à la reconstituer, ils obtiendront une hausse de salaire; sinon, ils perdront de l'argent.
    La situation actuelle est ridicule. Dans les années 1970, nous avions un système de gestion pour la région de l'Atlantique qui fonctionnait assez bien. À peu près tout le système se basait sur les mêmes règles et règlements. Vous alliez à une réunion où généralement tout était passé en revue… Nous examinions les 53 stocks de poisson de fond en trois jours. Tout le monde était traité de la même façon.
    Puis, pour améliorer les choses, nous sommes passé à la gestion régionale. Ensuite, pour les améliorer encore plus, nous sommes passés à la gestion par zone. Nous avons ensuite fait de la microgestion. Puis il y a eu la gestion de crise. Nous en sommes maintenant à la cogestion, car les gestionnaires comptent sur le secteur pour les aider à gérer. Dans toute entreprise où vous faites venir des nouveaux gestionnaires… vous pouvez voir que les gestionnaires ne font pas leur travail; ils sèment la pagaille. C'est ce qui s'est passé.
    Pendant toutes ces années, la situation de la pêche a empiré, les pêcheurs ont fait moins de prises et le ministère a continué comme avant. En fait, c'est mieux. À une certaine époque, nous avions le ministère des Pêches et des Océans. Aujourd'hui, c'est plutôt le ministère des Fonctionnaires des Pêches, car ils sont les seuls à conserver et à reconstituer leur propre biomasse, c'est-à-dire leurs employés.
    C'est une honte. Après 40 années de pêche, j'en ai assez de voir ce gâchis. Nous nous contentons de faire des études.
    J'ai mentionné le cas de la morue en 1993. Je voudrais vous donner un exemple. Vous vous souviendrez peut-être que la première chose dont on a parlé c'est du poisson rejeté et des fausses déclarations, du fait que les pêcheurs étaient des menteurs, des escrocs et des canailles qui ruinaient la pêche. Cette rumeur s'est propagée dans tout le Canada. Elle existe encore aujourd'hui. Toutefois, trois ans après que les pêcheurs sont sortis de l'eau, quand on leur a dit que quelque chose n'allait pas, c'était le cas depuis 10 ans, mais ils avaient tenu compte de tout. Ils faisaient des études chaque année. Les stocks de poisson ont continué à diminuer extrêmement rapidement sans que personne ne pêche. Les scientifiques ont donc commencé à établir un modèle de mortalité naturelle. La mortalité naturelle correspondait à 20 p. 100 du stock, ce qui signifiait que quelque chose d'autre que les pêcheurs tuaient le poisson.
    Quand ils ont terminé leur modèle, tout à coup, le taux était de 0,4 p. 100 dans la zone 4T. C'était déjà le taux en 1986. C'est ce qui détruisait la pêche. Ce n'était pas seulement les pêcheurs. Nous avons tué des poissons, car c'est ce que nous sommes censés faire.
    La situation ne s'est jamais redressée. Les scientifiques disent maintenant que le taux de mortalité naturelle de la morue est de 0,8 p. 100. La morue n'est jamais revenue, mais nous avions 2 000 tonnes de poisson et pour gérer et régénérer cette pêche, le gouvernement a fait sortir les pêcheurs de l'eau.
    Ce ne sont que quelques exemples. Nos politiques et notre gestion ne fonctionnent pas bien dans l'état actuel de la pêche.
    L'assurance-chômage a commencé dans le secteur de la pêche dans les années 1950. C'était pour compléter le revenu de la pêche. Maintenant, la pêche complète seulement l'assurance-chômage. La pêche est en train de devenir un projet de création d'emplois pour les timbres d'assurance-chômage. C'est une honte de voir ce qu'on a fait de l'industrie de la pêche que nous avions dans la région de l'Atlantique. J'ai terriblement peur que nous soyons allés trop loin.
    Si nous ne voulons pas répéter les erreurs du passé, nous devrions revoir ce qui s'est passé.
    Merci.
(1020)
    Merci beaucoup, monsieur Hennessey.
    Messieurs, au nom du Comité permanent des pêches et océans, je tiens à vous remercier infiniment d'être venus ce matin et d'avoir le temps de nous rencontrer, de nous faire part de vos observations et opinions et de répondre à nos questions. Nous l'apprécions vivement.
    Nous allons faire une courte pause pendant que nous nous préparons à recevoir nos prochains invités.
(1020)

(1035)
    Nous reprenons la séance.
    Messieurs, merci d'être venus ce matin témoigner devant le Comité permanent des pêches et des océans. Nous apprécions vraiment que vous ayez pris le temps de venir malgré vos horaires très chargés.
    Vous savez tous, je crois, que nous vous accordons environ quatre minutes pour vos déclarations préliminaires ou vos exposés et que nous passerons ensuite aux questions des membres du comité. Si personne n'a de questions, nous allons entendre immédiatement vos déclarations préliminaires.
    Monsieur Blanchard, si vous voulez commencer…

[Français]

    Bonjour, je m'appelle Serge Blanchard, je suis pêcheur de crabe. J'ai débuté en 1987 à titre d'homme de pont. Je suis devenu capitaine en 1991 et, depuis 1995, capitaine-propriétaire du JPF.
    En 1995, si ma mémoire est bonne, j'ai eu une allocation de 240 000 livres et ça a été ma meilleure année, car nous avons eu 3,75 $ la livre. À partir de ce moment, nous avons été étiquetés comme millionnaires. À partir de l'année suivante, les ententes de cogestion ont commencé. Par la suite, ça a toujours varié. J'ai connu des années difficiles en 1998 et 1999, avec des quotas de 165 000 livres et 180 000 livres, mais dans ces années-là, il n'y avait pas de partage.
    Vingt ans plus tard, c'est pire qu'au début. Je dois payer toutes sortes de frais qui n'existaient pas auparavant: les coûts de permis, les observateurs en mer, les boîtes noires, les pesages à quai, des déplacements de toutes sortes pour des réunions avec le ministère. Nous avons jusqu'à des avions de surveillance qui nous volent au-dessus de la tête. En fin de compte, il y a moins de ressources, parce qu'il y a trop de pêcheurs.
    En fait, [Note de la rédaction: inaudible] pêcher, Pêches et Océans Canada ne nous permet pas d'acheter d'autres sortes de permis. J'ai une licence pour le poisson de fond, mais compte tenu du moratoire de 1992, je n'ai que le crabe pour subvenir à mes besoins.
    J'ai acheté mon bateau et le permis en 1995 avec une telle allocation, mais depuis ce temps Pêches et Océans Canada vient en prendre pour le donner gratuitement à d'autres pêcheurs, soi-disant pour se rationaliser. J'ai payé pour du crabe que je n'ai jamais pêché. Avec tout ça, même si je pouvais acheter d'autres permis pour redevenir rentable, je n'ai aucune garantie que Pêches et Océans Canada ne va pas encore recommencer et donner mes allocations à quelqu'un d'autre gratuitement.
    Cette année, je pense perdre à peu près 80 000 $. Si j'avais eu mon plein quota, mon déficit aurait été moins important. Je ne peux pas continuer à perdre de l'argent ainsi pendant longtemps. En plus de subir toute cette injustice selon une fausse idée que je serais millionnaire, j'ai de plus en plus de difficulté à payer mes hommes d'équipage de manière honorable. Ça n'a aucun bon sens.
    Cette année, c'est la pire des situations: des pêcheurs de nouvel accès ont eu plus de quotas que moi. Jusqu'à cette année, ils devaient choisir entre pêcher le crabe ou le homard. Cette année, ils font les deux en même temps, le crabe et le homard. Selon ce que Pêches et Océans Canada nous a raconté au départ, on devait réduire l'effort de pêche au homard. Ils ont tout simplement ajouté d'autres pêcheurs à notre pêche.
    Merci de vous être déplacés pour venir nous écouter. Pour vraiment connaître ma réalité, je vous invite à venir me voir sur mon bateau. Si vous avez des questions, je vais tenter de vous répondre au mieux de ma connaissance.
    Merci, monsieur Blanchard.
    Monsieur Duguay, vous avez la parole.
    Bonjour. Mon nom est Marius Duguay, je suis membre de l'ACA et propriétaire crabier. J'ai commencé à pêcher en 1988, au début des années de crise. Nous sommes maintenant en 2010 et en pleine situation de crise. C'est spécial. Quand j'ai commencé, il y avait une pêche compétitive et on utilisait des quotas individuels pour se protéger, pour ne pas avoir à subir la même situation que celle de l'industrie de la morue, du poisson rouge et d'autres espèces.
    On se retrouve dans une situation comme celle d'aujourd'hui, pourtant on se dit qu'on a tout fait, comme mon collègue M. Blanchard l'a dit, qu'on a suivi tous les processus de pêche, la surveillance du crabe blanc, la protection de femelles. Aujourd'hui, on se rend compte que cela a donné un gros zéro et que l'industrie est en piètre état. Comme on le disait tout à l'heure, la politique a créé la situation actuelle. On ne peut pas passer à côté, on est directement dedans. Ceux qui ne veulent pas le voir jouent à l'autruche et c'est désolant.
    Je vais vous parler des quotas recommandés en 2009. Selon la recommandation des fonctionnaires du MPO, les quotas de 2009 étaient de 19 200 tonnes métriques. L'industrie traditionnelle recommandait 20 900 tonnes métriques, comme vous pouvez le constater sur le premier graphique. Un porte-parole du ministère a dit à Radio-Canada que, parce que les pêcheurs traditionnels avaient demandé une trop forte hausse de quotas l'année dernière, cela entraînait cette année une diminution de 63 p. 100 des quotas en 2010. C'est vraiment désolant d'entendre cela. En fait, on blâme toujours le pêcheur, surtout le pêcheur traditionnel.
    Quand mon père a commencé à pêcher, il était un pêcheur de la première heure, vers 1968. Aujourd'hui, quand on entend de telles choses... Mon père n'est plus ici, mais je sais qu'il n'aurait pas aimé voir ce qui se passe aujourd'hui. Je suis heureux qu'il n'ait pas à vivre ce qu'on vit parce que mon père a « nègré » pendant les 15 premières années pour développer une pêche que les Acadiens du Nouveau-Brunswick et les Acadiens du Québec avaient commencé à pratiquer. De voir où on en est rendus aujourd'hui est vraiment désolant.
    Le ministère vient nous blâmer d'avoir demandé un quota de 20 900 tonnes, alors qu'il recommandait 19 200 tonnes, et il justifie une diminution de 63 p. 100 dans les médias en nous faisant porter le blâme. On a le dos large et ça fait longtemps. La situation dans la péninsule présentement est désolante. L'économie principale de la région est en train d'être dynamitée. Certains politiciens disent qu'ils sont d'accord avec nous, mais pas sur certains partages parce qu'ils doivent tenir compte de considérations électorales. C'est désolant que des gens se servent de l'industrie comme d'une bouée de sauvetage pour tout le monde dans le secteur des pêches, que ce soit les pêcheurs de homard ou de morue.
    En raison de cette situation, on souhaite que vous appuyiez nos demandes comme pêcheurs, comme nos représentants vous l'ont demandé. Nous sommes ici pour représenter la flottille traditionnelle, mais on représente aussi des membres d'équipage. Dans 90 p. 100 et plus des cas, il s'agit d'entreprises familiales. Des usines manquent d'approvisionnement à cause de certaines décisions. Nous n'en sommes pas arrivés là en une année, c'est le fruit d'un certain nombre d'années de décisions politiques. L'ascenseur peut monter, mais un jour ou l'autre, il redescend. On l'avait dit en 2003 au ministre Thibault.
(1040)
Aujourd'hui, on est rendus au sous-sol.
On a fait la même présentation à Ottawa devant vous. Aujourd'hui, on est encore ici en train de le faire. On avait prédit ce qui allait arriver. En 2010, on va encore le dire.
    Je vous remercie beaucoup de nous avoir écoutés aujourd'hui.
    Merci, monsieur Duguay.
    Monsieur Gionet.
    Mon nom est Joel Gionet. Je pêche le crabe depuis 1983. J'ai commencé comme homme d'équipage à bord du bateau familial et, en 1990, je suis devenu capitaine au sein de l'équipage. Je suis encore capitaine en 2010. Ainsi, j'ai vécu les trois derniers cycles. J'ai vécu les creux des trois cycles. Le premier — le pire — était en 1989-1990, le deuxième était en 1999-2000, et on est présentement dans le troisième, cette année, en 2009-2010.
    Lors de chacune des deux dernières fins de cycle, on n'a jamais crié, on n'a jamais rien dit. On savait qu'on allait profiter de chaque effort qu'on faisait pour cette ressource. Ce printemps, lorsque la ministre a annoncé les réductions de taux de capture de plus de 60 p. 100, je pense que tous les gars s'attendaient à des réductions. Dès le début des années 2000, tous les gens autour de la table savaient qu'on allait exploiter le stock un peu plus intensivement que lors du dernier cycle. Cependant, je pense que personne ne s'attendait à des réductions aussi draconiennes.
    Parallèlement à ça, pour mettre de l'huile sur le feu, la ministre a annoncé au début mars la « stabilisation du nouvel accès » jusqu'en 2014. Les scientifiques appuient sur le bouton d'alarme, et la ministre, elle, fait une belle annonce disant qu'elle stabilise le nouvel accès jusqu'en 2014. Deux ou trois semaines plus tard, elle annonce des réductions de 63 p. 100. C'est un énorme problème pour les crabiers traditionnels.
    Puis, le ministère se ressaisit trouve une solution, soit celle de mettre les membres de nos équipages à pied et de se regrouper deux ou trois sur le même bateau pour pêcher, afin qu'on puisse faire de la place pour les nouveaux arrivants. C'est la solution qu'on a trouvée. Pincez-moi, quelqu'un! À mon avis, il n'y a aucune logique dans de telles décisions.
    Merci beaucoup. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(1045)
    Merci, monsieur.
    Monsieur Haché.
    Bonjour. Je me présente: je m'appelle Donald Haché, je pêche depuis 1983 moi aussi.
    Tout ce qui se passe dans cette industrie et ce que le MPO fait, ça n'a aucun sens. Économiquement, je ne ferai pas long feu là-dedans, si ça continue. Je suis capitaine depuis 2001, et on est tous découragés. Ça n'a aucun sens.
    Merci.
    Merci, monsieur Haché.
    Monsieur Godin.
    Bonjour. Moi, ça fait 34 ans que je pêche, en tant qu'homme d'équipage et propriétaire. Je vais parler de l'aspect humain, étant donné que mes coéquipiers ont passablement dit ce qu'il y avait à dire sur le plan de la politique, des recherches, et ainsi de suite.
    J'ai quatre membres d'équipage à bord, et ils sont tous de ma famille. Quand je suis arrivé ce matin, je leur ai dit qu'ils allaient crever. C'est exactement les mots que j'ai employés. Je leur ai dit que je ne pouvais pas leur donner ce que je n'avais pas. Je suis propriétaire depuis cinq ou six ans seulement. Je leur ai dit que je pouvais uniquement leur donner 12 timbres d'assurance-emploi, 1 000 $ par semaine, ce qui fait exactement 12 000 $. Qui peut vivre ici avec un revenu annuel de 12 000 $? Pas beaucoup de gens, n'est-ce pas? C'est la réalité.
    Ça fait 25 ou 30 ans que ces hommes pêchent avec moi. Je parle en général, de tous les bateaux. En moyenne, les hommes de la flotte ont tous 20 ans d'expérience. Lorsqu'on leur dit qu'ils vont crever, que pensent ces hommes lorsqu'ils se couchent le soir, à votre avis? Je me mets à leur place. On parle de ça, et j'en ai mal au coeur. C'est irréaliste.
    Dans la vie, on fait un métier, et c'est pour gagner sa vie. Puis, on nous dit que demain matin, on va crever. Je ne sais pas, mais si vous avez un brin d'humanité, vous allez penser que ce qui s'est passé n'a aucun sens. C'est difficile de parler de ça. Je regarde tous les pêcheurs. Ça fait 34 ans que je pratique ce métier, et dans deux ou trois ans, on va tout mettre ça en cale. Il y en a déjà une dizaine ou une vingtaine qui sont montés. Le Nord-Est va devenir comme Terre-Neuve: un pays fantôme.
    J'espère que vous comprenez quelle est la situation de la pêche et des pêcheurs. Les gens ne savent plus quoi penser. Quand un père de famille nous dit qu'il ne pourra même pas payer l'inscription de sa fille à l'université, je vais dire comme l'autre, « ça rentre dans le collimateur ».
    Je vous remercie de m'avoir écouté. Si vous avez des questions, je vais pouvoir y répondre. Ça m'a fait plaisir de vous parler.
(1050)
    Merci, monsieur Godin.
    Monsieur Noël, vous avez la parole.
    Bonjour, mesdames et messieurs. Ça va bien?
     Je m'appelle Hubert Noël et je suis originaire de Lamèque, au Nouveau-Brunswick.
    Je fais partie d'une famille de pêcheurs de crabe des neiges. Je fais ce métier depuis 20 ans. Les annonces de ce printemps m'ont donné l'impression de retourner 20 ans en arrière. J'ai fait partie de la relève. À cause de décisions politiques telles que l'annonce du 8 mars dernier, selon laquelle la ministre des Pêches et des Océans maintenait l'effort de pêche à environ 400 bateaux, je ne sais plus quel genre d'avenir je dois envisager, en tant que père de famille.
    Lors du dernier effondrement, en 1989-1990, nous étions 130 bateaux à faire face au défi consistant à augmenter et à stabiliser cette ressource. Nous avons réussi en investissant des dizaines de millions de dollars, et ce, en collaboration avec le MPO. En 2003, le fédéral a remercié l'industrie traditionnelle du crabe d'avoir investi des millions de dollars et d'avoir su si bien gérer et protéger cette ressource, mais l'a avertie que les surplus engendrés ne lui reviendraient pas. Ils iraient à des pêcheurs ayant soi-disant des difficultés dans les autres industries de la pêche.
    Moi, j'osais croire que le Canada était un pays où une libre entreprise employant 5 ou 6 personnes avait le droit d'être viable et prospère. N'oubliez pas que le crabe et le homard ne sont pas inextricablement liés, dans notre cas. Si on est titulaire d'un permis pour la zone 12, on n'a pas le droit de détenir d'autres permis, par exemple pour le homard, le pétoncle et le hareng, qui sont la chasse gardée des flottilles côtières.
    J'aimerais maintenant vous faire part de mes craintes au sujet des pertes inexpliquées — selon les scientifiques du radeau chalut. C'est très important. À la première page des documents, on parle de la biomasse commerciale qui a été récoltée pour 2009, soit 44 700 tonnes. Ça ne compte ni les juvéniles, ni les femelles, ni les petits, ni les bébés. Ce sont tous des crabes de 95 mm et plus, qui ont de gros pouces. C'est le vrai crabe commercial.
    Dans l'autre colonne, on indique qu'on a pêché 20 900 tonnes. Selon l'enquête menée ultérieurement, il aurait dû rester environ 25 000 tonnes dans la mer, mais seulement 9 300 tonnes ont été trouvées. C'est donc dire que 14 500 tonnes ont été perdues. On ne sait pas où elles sont. Elles ont disparu. Est-ce que quelqu'un les a volées? On ne le sait pas.
    À la deuxième page, on traite des estimations annuelles des pertes de crabe dans la zone 12 depuis 1998. Comme vous pouvez le constater, ces pertes ont été importantes. Pour ce qui est du crabe, 2005 était une très bonne année. Le tonnage était élevé dans le golfe. On n'a pas trouvé 26 000 tonnes. Ça équivaut à la biomasse totale de cette année. En 2005, on a perdu cela.
    À la première colonne de la dernière page, on indique que le quota capturé par les crabiers traditionnels a été de 13 622 tonnes métriques, ce qui a permis de faire fonctionner la flotte traditionnelle complète et les usines, au Nouveau-Brunswick et au Québec. Toute l'industrie a fonctionné avec ça, l'an passé. Cette année, on nous dit avoir perdu 14 500 tonnes. Ça équivaut à la production de l'an dernier, et même plus. Ça signifie qu'il y a un problème du côté de l'enquête et des scientifiques. Il faut se poser des questions.
    Merci de m'avoir écouté. J'espère que la lumière sera faite sur tous les agissements du MPO. Si vous avez des questions, je pourrai y répondre.
(1055)
    Je vous remercie, monsieur Noël.
    Monsieur LeBlanc.
    Merci, monsieur le président.
     Merci, messieurs, de vos présentations.
    J'ai deux questions, et peut-être que mon collègue, M. Byrne, posera d'autres questions s'il nous reste du temps.
    Voici ma première question. En dehors des questions de partage et des nouveaux arrivants dans l'industrie de la pêche, que pensez-vous que l'industrie, ou plutôt le ministère, puisqu'il en est responsable, aurait pu faire de 2006 à 2009 pour éviter ou limiter la crise actuelle à laquelle vous devez faire face? En laissant de côté les questions de partage, y a-t-il d'autres choses qui auraient pu être faites pour éviter la diminution de 63 p. 100? C'est peut-être une chose sur laquelle on sera d'accord: 63 p. 100 de réduction pour une année n'a pas de sens.
    J'en arrive à ma deuxième question. M. Bevan, de même que M. Blanchard plus tôt ce matin, a essayé d'une certaine façon d'écarter l'argument de la rentabilité économique que vous défendez avec une certaine éloquence. Selon cet argument — c'est quelque chose qu'on entend souvent —, si vous avez un revenu brut de 800 000 $ pour une année et que vous ayez une perte de 80 000 $ ou de 100 000 $ cette année, sur une période de cinq ans ou de 10 ans, et non pas pour une seule année en particulier, le bilan est quand même positif. N'importe quelle autre entreprise a une certaine obligation de conserver ses bénéfices non répartis.
    Comment réagissez-vous à cet argument qu'a avancé M. Bevan ce matin, selon lequel beaucoup d'entreprises vivent des cycles au cours desquels les revenus peuvent être de 800 000 $ une année, diminuer d'autres années et augmenter à nouveau? Je ne vous cache pas que c'est un argument qu'on a souvent utilisé et qui est attrayant en quelque sorte pour le public. Vous avez la chance de nous expliquer pourquoi cet argument n'est pas valide.
    Je vais tenter de vous répondre.
    Je remercie le bon Dieu qu'on puisse toucher un revenu de 800 000 $ durant une année, parce que si on ne pouvait pas le faire, on ne serait pas ici devant vous. M. Bevan, ce matin, les seuls chiffres qu'il présentait... Le message au public et dans les médias est toujours le même: on dit que les crabiers ont touché un revenu de 800 000 $ brut. En 10 ans, c'est une chance que ce soit arrivé une fois.
    En 2006, on étaient payés 1,10 $ la livre, pour le crabe. En 2007, cela a remonté à près de 2 $. Cette année, c'était encore près de 2 $. Les prix de 3 $, 3,50 $ ou 4 $, qui étaient offerts dans les années 1994, 1995, 1996 n'existent plus. Il ne faut plus rêver en couleur. L'argent canadien a quasiment la même valeur que l'argent américain. La plus grande partie du crabe est envoyée aux États-Unis. Le « Klondike du crabe » n'existe plus. Je ne dis pas que cela n'a pas existé. Pendant quelques années, cela a été très bon, mais je pense que cette période est révolue et terminée, surtout compte tenu du nombre de pêcheurs actuellement.
    À l'intérieur du golfe, je calcule qu'il n'y a pas un mille carré où la pêche n'est pas pratiquée, même dans des endroits où, il y a 20 ans, on n'aurait jamais jeté un casier à l'eau, parce qu'il n'y avait pas suffisamment de crabes pour que la pêche soit viable. À présent, chaque coin et chaque petit kilomètre carré est rempli de casiers. Dans le temps, il y avait toujours de grands secteurs où la pêche ne se faisait pratiquement pas. Je crois que cela a permis aux stocks de se rétablir. Aujourd'hui, c'est plein de zones partout. Il n'y a pas un seul petit secteur où il n'y a pas de trappes.
     Si on peut faire de l'argent durant une année sur 10, je pense qu'on le mérite. Je ne comprends pas pourquoi les gens s'attaquent à des années financières en particulier. C'est toujours la même chose. Monsieur LeBlanc, en 1995, c'était pareil. Pour justifier l'entente sur le partage de 1997, on a encore invoqué le fait que les crabiers avaient eu des revenus de 800 000 $. Il y a eu une année où ça s'est produit entre 1990 et 2000, et une autre entre 2000 et 2010. Merci au bon Dieu, car on ne serait pas ici, comme j'ai dit tout à l'heure.
    Avec un revenu moyen d'à peu près 175 000 $, comme c'est le cas cette année, selon les quotas, il est impossible de gérer une entreprise de pêche comme la nôtre. Il faut des revenus de 300 000 $ ou 350 000 $ brut. Autrement, c'est impossible. Comment vais-je faire pour me faire construire un bateau neuf? Comme vais-je faire pour changer mon moteur qui coûte 150 000 $?
    Il est certain que la personne qui pratique cette pêche depuis les 30 dernières années s'est accumulé de l'argent, et tant mieux pour elle. C'est comme tous les gens ici autour de la table, vous travaillez, vous arriverez à votre retraite et vous aurez accumulé des fonds. Je pense qu'une entreprise de pêche doit aussi accumuler des fonds. Toutefois, c'est toujours la même chose avec Pêches et Océans Canada et avec la politique. On nous dit qu'on a fait 800 000 $ de revenus et on nous condamne pour cela.
(1100)
    Je ne veux pas vous interrompre, vous êtes assez éloquent, mais j'ai posé deux questions et le président va bientôt nous interrompre. Vous revenez toujours aux questions de partage et je comprends cela. On sera peut-être toujours en désaccord à ce sujet. Toutefois, à part le partage, y a-t-il d'autres choses que le ministère aurait pu faire au cours des années précédentes pour éviter la diminution dont tout le monde a souffert cette année?
    J'ai peut-être une réponse à vous donner. C'est à propos du partage. En 2005, je crois, on a soumis un plan au ministère des Pêches et des Océans. C'était un plan progressif. Tout le monde y trouvait son compte. Lorsque le nouvel arrivant avait 30 000 tonnes, il avait plus de quotas dès le départ qu'il n'en a en ce moment. À un certain seuil, on aurait laissé augmenter les quotas. En abaissant les quotas, on laisse la ressource respirer. Vous comprenez ce que je veux dire?
    Je me rappelle ce plan, qui avait certains mérites. Néanmoins, vous êtes revenu sur la question du partage.
     Quelqu'un peut-il offrir une option autre que celle de changer les formules de partage, qui aurait peut-être pu éviter la crise actuelle?
    À mon avis, une crise comme celle que l'on vit aujourd'hui est peut-être prévisible. Selon moi, on vivra une crise tous les 10 ans. En fait, ce ne seront pas tout le temps des crises, mais il y aura toujours une année où la biomasse sera extrêmement faible. Par exemple, M. Moriyasu disait ce matin qu'en 1995, la biomasse de crabe commercial à l'intérieur du golfe était évaluée à 150 000 tonnes. On avait un contingent de 20 000 ou 22 000 tonnes. Dans ces années-là, on accumulait du crabe sur les fonds: on le pêchait très peu. Toutefois, en 1999, soit à la fin du cycle, les crabes accumulés par centaines de milliers de tonnes étaient morts. On a accumulé tout cela pour rien. On n'a pas pu les pêcher, car ils étaient morts. C'est pour cette raison qu'à partir des années 2000, tout le monde s'était entendu pour dire que, lors du prochain cycle, on ferait une pêche un peu plus intensive. C'est bon pour l'économie, car ça fait travailler les gens. C'est une bonne affaire.
    À la fin du cycle, on s'est aperçu que les niveaux étaient semblables. Si vous comparez la biomasse totale de 1999 et celle de 2009, vous remarquerez certainement que celle de 2009 est un peu plus faible, mais les niveaux sont tout de même semblables. Il y a quelques milliers de tonnes de différence, mais c'est quand même semblable. Selon moi, pendant la période qui s'étend de 2009 à 2010, on a en effet pêché le crabe de façon un peu plus intensive — peut-être même trop. À mon avis, on a bien fait quand même. Si on avait accumulé cette ressource, cela ne veut pas dire que ces crabes seraient au fond de la mer aujourd'hui — peut-être qu'ils seraient tous morts.
    Je pense que cela répond à votre question.
(1105)
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Godin, vous vouliez faire une brève observation?

[Français]

    La deuxième question concernait la solution pour protéger la ressource. Je ne peux pas m'empêcher de rire. Je me demande pourquoi vous avez trouvé une solution pour les Autochtones, de façon à ce qu'ils aient du crabe. Vous avez débloqué 500 millions de dollars et acheté des permis aux Autochtones. Je n'ai rien contre cela. On a acheté des quotas qui ne touchaient pas au mien.
    Je vais répondre à votre question concernant la façon de régler le problème de la surpêche. J'ai parlé à trois homardiers. Ce n'est pas parce que les homardiers viennent dans ma zone de pêche qu'on se prend tous à la gorge. Ils m'ont dit la semaine dernière que la solution pour régler ce problème serait que le gouvernement débloque des fonds, comme il l'a fait pour les Autochtones, et achète les permis des pêcheurs qui veulent se retirer. On peut déchirer ces permis. Combien y en a-t-il? Cent dans une pêcherie et soixante-dix dans l'autre? Ils vont vivre avec ce qu'il y a dans l'eau et préserver chacun leur ressource. Selon moi, c'est la meilleure solution pour régler le problème. C'est mieux que de témoigner devant le comité, de se battre pour essayer de trouver des solutions et de dire qu'il faut interdire aux autres sa propre pêche. Vous avez tous entendu ce qu'ont dit mes coéquipiers sur la pêche. Il s'agit d'une solution envisageable.
    Quand le gouvernement a débloqué des fonds pour les Autochtones, on a approché mon père pour qu'il vende son permis, mais il a pensé à nous. Il a dit que s'il vendait son permis aux Autochtones, il ne savait pas ce qu'il adviendrait de ses enfants et de ses petits-enfants. J'en ai parlé plus tôt, à propos des pêcheurs. Je lui ai répondu que j'allais l'acheter, que j'allais me mettre la tête sur le billot. Je savais ce qui s'en venait, avec le partage. Je me suis mis la tête sur le billot. La moitié de ma tête a été coupée.
     On parle sans fin des solutions. Il en existe, mais il faut les trouver, c'est tout. Je crois que pour régler le problème de tout le monde, il s'agirait que le gouvernement pige encore dans le pot des citoyens, déchire des permis et fasse en sorte que nous nous limitions chacun à notre pêche et que nous en prenions soin. C'est ce que nous avons fait. Je ne me vante pas. On a déjà connu le déclin du crabe. Certaines années, nous n'avons pas pu atteindre nos quotas. Personne n'est venu nous aider; personne n'a débloqué de fonds pour nous soutenir. Comme un pêcheur l'a dit, il y a eu 50 000 livres de crabe à l'eau. On n'a pas pleuré, on s'est pris en main, on a décidé de se fixer des quotas par bateau, de payer des observateurs, de tout payer s'il le fallait et d'être rentables. Une fois que nous sommes rentables, le gouvernement nous fait crever. C'est illogique.
     À tout problème il y a une solution. Il faut en parler. La suggestion que je fais, à savoir que le gouvernement débloque des fonds pour les pêcheurs, est difficile à entendre. Il reste que s'il n'y a plus de ressource, ce n'est pas la faute des crabiers traditionnels. Même si vous me disiez que c'est nous qui avons détruit notre ressource, je vous répondrais que ce n'est pas vrai. Ce sont les crabiers qui l'ont constituée. Quand nous avons dit que nous allions nous fixer des quotas par bateau, il n'y en avait que pour 130 pêcheurs. Aujourd'hui, le gouvernement a autorisé 400 bateaux et 38 000 cages à l'eau. Joel Gionet a dit qu'il n'y a pas un mille carré où la pêche n'est pas pratiquée, c'est trop; pour ma part, je délimiterais le périmètre d'ici à la chaise. Il faut dire la vérité.
(1110)
    Merci, monsieur Godin.
     Monsieur Blais.
    Merci beaucoup, en passant, merci pour toutes sortes de raisons. Ce que vous nous dites est assez touchant. Je suis sûr que vous partagez aussi votre désarroi avec d'autres. On va entendre d'autres personnes, on en a entendu déjà, de vrais pêcheurs, des travailleurs d'usine. Quand je pense à eux, quand je les vois, je suis sensible à leur situation et je crois que vous l'êtes également. Ces gens sont un peu plus coincés — on va pouvoir le vérifier tantôt —, ils n'ont pas beaucoup de marge de manoeuvre.
    Finalement, vous nous dites qu'actuellement, vous en êtes à un point où changer de direction est un peu plus difficile. La solution était de réduire le nombre de navires, et cela a eu un effet néfaste sur les aides-pêcheurs. Cela a permis une stabilisation des revenus, mais cela a eu un effet néfaste, qui est très difficile à accepter.
    J'aimerais aussi vous entendre sur d'autres sujets, afin que ce soit retenu comme éléments d'information. J'aimerais que vous me parliez un peu du phoque, du loup marin. Vous le savez, c'est un dossier que je défends beaucoup, que notre comité va également continuer de défendre. J'aimerais vous entendre à ce sujet. Quelqu'un aura certainement quelque chose à dire à ce sujet.
    Je retiens de ce que vous nous dites — vous allez me dire si je suis dans le vrai ou pas, et probablement qu'on entendra la même chose cet après-midi — que la confiance a disparu. C'est grave, c'est plus que grave, et j'en suis là moi aussi. Je pose des questions aux gens qui prennent des décisions et, à un certain moment, je m'interroge au sujet de la confiance que je peux leur accorder. Une décision a été prise, les quotas sont réduits de 63 p. 100, mais on ne corrige pas les effets, on ne les assainit pas, on n'en parle plus, on parle de l'espèce mais on ne parle plus de l'impact humain que cela peut avoir et des sommes d'argent qu'on devrait y consacrer. L'impact humain a été constaté dans l'industrie automobile, l'industrie forestière ou dans d'autres domaines, et c'est deux poids et deux mesures, trois poids et trois mesures. Ça fait mal, ça ébranle la confiance.
    J'aimerais vous entendre un peu au sujet des phoques, mais davantage au sujet de cette question de confiance.
    En ce qui concerne le phoque, je suis cette situation constamment. Des gars qui gagnent leur vie à chasser le phoque. C'est un animal mais, que voulez-vous, il faut qu'ils le chassent pour le vendre et s'en nourrir. Ils en mangent, c'est de la nourriture.
    J'écoutais Le Téléjournal en provenance de Montréal et on disait qu'à l'île de Sable, il faut tuer des phoques. Pourquoi? Pour forer un puits de pétrole? On dit aux pêcheurs qu'ils n'ont pas le droit de tuer des phoques parce que du sang se répand sur la neige. Quelque chose ne marche pas. C'est aberrant d'entendre cela. Hier, dans le reportage, on disait qu'il fallait stériliser les phoques, qu'il y en a trop sur l'île de Sable, mais pourquoi? Il y a des chasseurs qui demandent à chasser le phoque, parce qu'il y en a 7 millions d'une espèce et 650 000 d'une autre, et on ne veut pas. Pourquoi?
    Le phoque mange le petit crabe traditionnel, le crabe des neiges?
    Oui. Supposons que demain matin, je vous enferme dans un placard et vous y laisse pendant un mois. Quand je vais vous laisser sortir et je vais vous donner un ver de terre, vous allez le manger, n'est-ce pas?
    Des voix: Ah, ah!
    M. Aurèle Godin: Faites-moi signe que oui, parce que j'ai un « retour de langue » et c'est moi qui vais manger tous les appâts.
    J'en mangerai même deux ou trois. Parfois, on en mange et on ne le sait pas.
    Un phoque qui a faim va aller dans le fond marin et manger n'importe quoi: homard, crabe, morue, il avale tout ce qu'il peut, s'il peut le digérer. C'est comme quelqu'un qui peut manger du steak gras, mais une bonne journée, il va faire une indigestion.
    Parlez-moi de l'élément de confiance, maintenant.
    On n'a plus de confiance, on ne sait plus qui croire. On est ici pourquoi: parce qu'il n'y a pas eu de confiance. Personne ne fait plus confiance à quiconque. Il faut mettre les pendules à l'heure. Si je te donne un verre d'eau, bois-le, mais n'y mets pas de vinaigre.
    Il faut se faire confiance pour que la ressource redevienne bonne. C'est comme j'ai dit à M. Dominic LeBlanc tout à l'heure: il y a des solutions, mais il ne faut pas se conter de mensonges. Il faut s'asseoir, trouver le problème et le régler.
    Je fais peut-être vous faire rire, mais c'est comme si je buvais cinq bières et que je disais à ma femme que j'en ai bu deux. Elle me dirait que je suis menteur, n'est-ce pas? C'est ce qui arrive. On se conte trop de mensonges et on ne s'écoute pas assez. Il faut écouter les pêcheurs et aussi les biologistes pour préserver la ressource. C'est plaisant quand tout le monde sourit.
    Demain matin, si je vois mon voisin, un travailleur d'usine dont vous avez parlé tout à l'heure... À l'époque, j'ai fait un « pain de sandwiches » et je suis allé le lui porter. Ne pensez-vous pas que ça m'a fait mal au coeur? L'homme avait un salaire de 4 000 $; que voulez-vous qu'il fasse? Ils sont sûrement de bons comptables, car je ne peux pas imaginer comment ils peuvent arriver à la fin de l'année. C'est ça, la réalité: le monde est en train de crever — je choisis le bon mot, c'est ça.
    La pêche est finie; les bateaux, c'est fini. Descendez dans la péninsule, rentrez dans les maisons et ouvrez le réfrigérateur d'un employé d'usine pour voir ce qui s'y trouve. Vous allez peut-être avoir le coeur gros comme je l'ai eu tout à l'heure.
(1115)
    J'aurais aimé émettre quelques commentaires sur vos deux questions, monsieur Blais.
    Premièrement, dans le golfe, depuis les 10 dernières années, on voit du phoque comme on n'en voyait pas avant. Des petites têtes hors de l'eau, en regardant autour du bateau, on en voit partout. Il y en a tellement que, depuis quelques années, plusieurs pêcheurs capturent de gros phoques entiers directement à l'intérieur du casier. Probablement que le phoque descend se nourrir dans le casier, puis il ne peut plus sortir et il se noie. Quand on le remonte, il est mort. Ça arrive de plus en plus.
    En ce qui a trait à votre deuxième question concernant la confiance, je pense qu'on a en le plus bel exemple ce matin. Quand les gens de Pêches et Océans Canada étaient assis ici, nous étions assis en arrière de la salle. Voyez-vous maintenant des gens de Pêches et Océans Canada nous écouter? Il est là le manque de confiance.
    Merci.
    Merci.

[Traduction]

    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à vous tous d'être venus aujourd'hui témoigner devant le comité. Nous l'apprécions.
    Je voudrais suivre une voie légèrement différente. J'ai deux questions à poser et n'importe lequel des membres du groupe peut répondre s'il le désire.
    Si nous acceptons comme une nouvelle réalité qu'il y a moins de crabes dans l'eau, et si c'est effectivement le cas, même si leur nombre peut croître de nouveau à l'avenir, que pensez-vous d'une commercialisation à valeur ajoutée ou d'une commercialisation de vos produits sous une forme ou d'une façon nouvelle? Avez-vous envisagé de fournir un produit différent ou d'exploiter des marchés différents?
    Deuxièmement, si le modèle de gestion actuel ne fonctionne pas bien — et on a mentionné l'époque où les choses allaient mieux — que faut-il faire pour remettre en place ce modèle de gestion ou un modèle qui fonctionnera?
    J'invite à répondre à l'une ou l'autre de ces questions quiconque souhaite le faire.

[Français]

    J'étais propriétaire d'une usine, mais vu les circonstances, j'ai dû la vendre. Toute l'industrie est malade. Aujourd'hui, on est tout simplement pêcheur et propriétaire. On parle beaucoup de valeur ajoutée. Dans la Péninsule acadienne, il y a le producteur japonais Ichiboshi qui fabrique des produits à valeur ajoutée. Il y a des niches, et certaines choses ont été essayées. Auparavant, c'était le « décalage », mais maintenant, c'est en sections. Il y a un marché pour le crabe brun cru et un autre pour le crabe cuit. Il y a aussi le crabe complet.
    Au cours des années 1990, à l'époque où l'on était propriétaires, on a essayé beaucoup de choses et on a investi beaucoup d'argent. Les Américains sont arrivés et ont dit qu'ils voulaient que les choses soient d'une telle façon. Ils voulaient des tunnels avec [Note de la rédaction: inaudible] automatique. Le Japonnais, pour sa part, considère que puisque c'est lui qui achète, c'est lui qui décide. S'il veut avoir telle ou telle section, que ce soit le M, le L, le 2L ou le 3L, il tient à ce que ça se fasse à sa façon. À Terre-Neuve, il veut du crabe pour le « décalage », qui est du crabe de mauvaise qualité visuelle. Il achète beaucoup en fonction de l'apparence visuelle. Beaucoup de travail a été fait, mais ce n'est pas évident. On ne dit pas que rien ne peut être amélioré. Il faut qu'il y ait des améliorations. Il y a toujours place à l'amélioration. Il faut essayer de trouver quelque chose de nouveau. Du travail a été fait et se fait encore présentement.
    Vous avez aussi demandé ce qui pouvait être fait pour éviter une situation comme celle qu'on vit présentement. C'est bien simple. M. LeBlanc dit que mis à part le partage, le problème majeur est une surcapacité de la pêche au crabe dans la zone 12. Le problème est bien simple. On a appliqué le système de partage quand c'était le temps, et quand ce n'est pas le temps... Il a été démontré que ça fonctionnait. À la fin des années 1990, on a connu ces cycles et on a réussi à y faire face. Il y a tout simplement trop de gens qui pratiquent ce type de pêche. Autrement, on n'en serait pas là aujourd'hui. Comment régler le problème? La solution est simple. Il est malheureux que pas un seul fonctionnaire du MPO ne soit ici pour nous entendre. C'est désolant de voir cela. C'est une occasion de comprendre la situation des pêches au Canada.
    Au Canada, les pêches sont malades pour une seule et unique raison: le monde n'est plus connecté à la réalité des pêches au Canada. Des journalistes sont présents pour nous écouter, mais le MPO n'est pas ici. C'est incroyable. C'est déboussolant pour l'industrie. Des gens ne croient peut-être pas que nous en sommes rendus là. Pourquoi est-ce le cas? Vous avez une preuve. Ce n'est pas nous qui avons inventé cette situation. On en vient à se demander si les gens ne veulent vraiment pas entendre ce qu'on a à dire. On est heureux de vous rencontrer aujourd'hui et de poser des questions. Comprenez-vous ce qu'on dit? Nous sommes des pêcheurs et non des fonctionnaires ou des politiciens. On vit de la pêche au crabe. On témoigne au nom de toute l'industrie, que ce soit les usines, les hommes de pont ou tout ce qui touche l'industrie. Il faut régler le problème.
    Le gouvernement doit arrêter de gérer nos pêches de façon politique. C'est clair. Le politicien dit qu'il n'est pas sur la même longueur d'ondes que nous en ce qui a trait au partage et qu'on va passer à autre chose. Que peut-on faire? On dit toujours qu'il faut mettre le partage de côté, mais ce n'est pas le vrai problème. Chez nous, le soleil se lève à l'est et se couche à l'ouest. Tous les matins, il se lève, et tous les soirs, il se couche. Les problèmes que l'on vit présentement sont aussi réels que le mouvement du soleil.
(1120)
    On en revient à l'ascenseur qui monte et qui descend. Des gens se bouchent encore les oreilles dans le moment et sont en train de vouloir faire croire que ce n'est pas le vrai problème. C'est le vrai problème. On fait une gestion politique, en ce moment, des pêches, à la grandeur du Canada. Où est le poisson ici? Présentement, le poisson rouge qui faisait vivre des résidants de la Péninsule acadienne, a disparu. Il n'y a plus de morue, ni de plie. On peut les nommer ainsi indéfiniment. L'industrie des pêches au Canada est malade parce qu'il y a eu des décisions politiques et que des politiciens disent que le partage ne pose pas de problème. Ils nous disent que leur position est différente.
    Une chose est claire. Ici, une roche est une roche et un verre d'eau est un verre d'eau. On constate que les gens de l'industrie n'ont pas été écoutés. Aujourd'hui, il y a un prix à payer pour cela et il est gros. L'industrie est en piètre état et vraiment en état de crise. Ça ne devrait pas être comme cela dans le cas d'une pêche aussi bien gérée en fait de pesage à quai, en fait d'observateurs en mer, en fait de quotas individuels et de gestion. C'était un modèle en son genre.
    Monsieur Moriyasu était assis ici ce matin. C'est malheureux que lui et les autres représentants de Pêches et Océans Canada ne soient pas restés. En 1994, après qu'on se soit pris en main quatre ans plus tôt, il a dit que notre industrie était un modèle mondial, qu'on avait travaillé conjointement avec eux pour qu'elle devienne un modèle mondial. Monsieur Moriyasu m'a dit que les scientifiques et les pêcheurs avaient développé un modèle mondial. Aujourd'hui, je me rends compte que ces personnes ne sont même pas dans la salle. Tout le monde est au fond du gouffre et se cache. Quant à nous, on ne se cache pas pour dire la vérité. La vérité est là et on va la dire. On espère que notre message va passer et se rendre à Ottawa et qu'il y aura des actions concrètes.
(1125)

[Traduction]

    Monsieur Allen.

[Français]

    Merci, monsieur le président. Merci tout le monde de votre présence et de vos commentaires. Ils étaient très intéressants.
    Ce matin, M. Bevan a dit que le ministère a tenu compte des commentaires des pêcheurs en ce qui concerne les quotas recommandés par l'industrie en 2009. Connaissez-vous les pêcheurs qui ont fait ces commentaires?

[Traduction]

    Connaissez-vous les pêcheurs qui ont dit que le quota était trop faible et que nous devrions le relever à 20 900 tonnes? Cela faisait-il partie du message que vos associations de pêcheurs ont transmis à Pêches et Océans?

[Français]

    Des participants vous ont distribué un tableau. Vous l'avez? D'accord.
    L'an passé, le ministère a évalué la biomasse à environ 45 000 tonnes ou quelque 44 000 tonnes. L'année précédente, la biomasse était évaluée à environ 48 000 tonnes. Il y avait donc une baisse de la biomasse d'environ 4 000 tonnes d'une année à l'autre. Les chiffres des scientifiques au sujet des pré-recrues, du recrutement — il ne faut pas simplement se contenter de vérifier la biomasse, il faut également vérifier ce qui va entrer dans la pêcherie, quel sera le nouveau recrutement pour l'année suivante — étaient d'environ 43 ou 47 millions de spécimens pour 2009. Avec toutes ces informations, les cinq ou six associations de crabiers de l'industrie ont suggéré au ministère — étant donné que celui-ci voulait diminuer les quotas à 19 200 tonnes et étant donné les évaluations scientifiques quant au recrutement, aux pré-recrues — on a dit que c'était aussi bien de les fixer à 20 900 tonnes. Il s'agissait seulement de 1 700 tonnes de différence. On s'était dit qu'on pourrait réévaluer la situation l'année suivante.
    Cette année, les scientifiques ont changé tous les chiffres. Les pré-recrues de l'an dernier ne représentaient plus 47 millions de spécimens, mais seulement 31 millions. C'est ce qui se passe du côté des scientifiques. Chaque mois ou tous les six mois, les chiffres changent, et ça change constamment. Ils soumettent des chiffres, on les étudie, on les fait analyser. Six mois après, on nous apprend qu'on s'était trompé, que c'est un cut-and-paste, que ce chiffre n'aurait pas dû se retrouver là. Cela change toutes les données. Tout cela pour vous dire que si le ministère, ou madame la ministre, avait suivi la recommandation de ses fonctionnaires, à savoir d'établir les quotas à 19 200 tonnes, cela n'aurait absolument rien changé à la situation actuelle. On en serait au même point.
(1130)

[Traduction]

    Vous m'amenez à ma question suivante.
    Si je comprends bien, chaque année, le quota se fonde sur trois principaux facteurs: vos prises par unité d'effort; les relevés au chalut de fond après la saison de pêche et le relevé au casier mené conjointement par le secteur et le MPO.
    J'essaie seulement de comprendre comment cela fonctionne avec le temps, car en principe, le MPO reçoit toutes ces données et les scientifiques s'en servent pour prendre une décision.
    Leur avez-vous fourni ces données? Quand le MPO vient-il vous voir pour la première fois en disant: « À partir de ces données, voici quelle est, à notre avis, la biomasse exploitable »? Le fait-il à l'automne ou connaissez-vous ce chiffre uniquement en mars ou en avril?

[Français]

    Voulez-vous parler de la saison de pêche qu'on vient de terminer ou de la précédente?
    De 2009.
     Habituellement, la pêche a lieu. Dans une année donnée, on commence la pêche. Il y a des observateurs, des gens engagés par une compagnie indépendante. Ils viennent à bord de nos bateaux évaluer les prises, c'est-à-dire la composition des prises dans les casiers. Il s'agit d'une personne indépendante qui fait son travail. Elle envoie les données à Pêches et Océans Canada. La pêche se poursuit.
    À la fin de la saison de pêche, à la mi-juillet environ, Pêches et Océans Canada commence son relevé au chalut. Quand le ministère commence le relevé au chalut, il a déjà l'information de la pêche du printemps. Il possède déjà des évaluations des observateurs en mer. Le ministère fait donc le relevé au chalut. Il le termine habituellement à la fin de septembre ou vers la mi-octobre.
    À partir de la fin de septembre, c'est motus et bouche cousue: on ne peut rien savoir. Le ministère nous dit que les chiffres ne sont pas compilés, le travail n'est pas terminé. Ça continue ainsi en octobre, novembre, décembre, janvier — on ne peut rien savoir. En février, le ministère publie un premier document préliminaire avec des chiffres. C'est seulement préliminaire. Ça continue jusqu'à la tenue du comité consultatif, qui se réunit habituellement au milieu ou à la fin de mars.
    Ensuite, le ministère arrive avec le document définitif. Entre le dépôt du document préparatoire et la réunion du comité consultatif, il y a une révision par les pairs. Le document est révisé par tous les scientifiques d'un peu partout dans le monde pour voir s'il n'y a pas eu d'erreur. Enfin, le document est soumis au comité consultatif.
    À ma connaissance, c'est comme ça que ça se passe au cours d'une l'année.

[Traduction]

    Très bien.
    Certains d'entre vous étaient là ce matin quand M. Moriyasu a fourni ses chiffres. Pendant les années de grande abondance, il a dit qu'en 1995, la biomasse exploitable était de 148 000 tonnes. L'année de grande abondance suivante était 2005 et la biomasse était de 85 000 tonnes. La biomasse exploitable pour 2010 est maintenant de 26 000 tonnes. Il semble y avoir une tendance.
    Qu'avez-vous pensé de ce qu'il a dit et de ces chiffres? Apparemment, nous sommes passés de 148 000 tonnes en 1995 à 85 000 tonnes, la dernière année de forte abondance. Cela représente une diminution de plus de 60 000 tonnes entre les deux pics du cycle.

[Français]

    D'abord, 150 000 tonnes ou 148 000 tonnes en 1995, ce ne sont pas des mesures réalistes, pour nous, les pêcheurs.
    Il y a une chose que M. Moriyasu ne vous a pas dite. En 1995, l'évaluation de la biomasse n'était pas de 150 000 tonnes. Je ne sais pas en quelle année, en 2003 ou en 2004, les scientifiques ont dû revoir tout leur système. Ils nous ont dit que toutes les mesures des biomasses évaluées dans le passé étaient erronées, et qu'ils devaient refaire les calculs. C'est à ce moment qu'ils ont présenté un nouveau calcul des biomasses pour les années subséquentes. Ainsi, les chiffres que vous a donnés M. Moriyasu, ce matin, résultent des nouveaux calculs de la biomasse de 1995.
    En 1995, le chiffre officiel était de 90 000 tonnes. Or, avec leurs nouveaux calculs, on est rendus à 154 000 tonnes. Il y a tout de même une grande différence. Il est clair et net que le stock suit un cycle, année après année. Il y a une tendance à la baisse, puis ça remonte, puis il y a une autre tendance à la baisse, ensuite ça remonte. C'est ainsi depuis les 30 dernières années.
(1135)
    Merci beaucoup.

[Traduction]

    Au nom du Comité permanent des pêches et des océans, je vous remercie infiniment d'être venus nous rencontrer, d'avoir partagé vos observations et vos réflexions avec nous et d'avoir répondu à nos questions. Nous apprécions vraiment que vous ayez pris le temps de venir malgré vos horaires très chargés.
    Merci beaucoup.
    Nous allons faire une courte pause pendant que nous nous préparons à recevoir nos prochains invités.
(1135)

(1145)
    Nous reprenons la séance.
    Messieurs, merci infiniment d'avoir pris le temps de venir nous rencontrer aujourd'hui. Nous sommes un peu en retard sur notre horaire. Nous vous demandons de nous en excuser. Comme vous pouvez le comprendre, quand on se lance dans un sujet, il est parfois difficile de respecter l'horaire prévu.
    Notre horaire prévoit quatre minutes pour les exposés ou les déclarations préliminaires. Je crois que vous en avez tous été informés avant aujourd'hui. Je vais donc vous demander si vous désirez faire une déclaration préliminaire.
    Nous allons commencer par vous, monsieur MacLean, si vous voulez bien faire votre déclaration préliminaire.
    Je m'appelle Basil MacLean. Je suis le président de l'Association des pêcheurs de crabe des neiges de la zone 19. Je voudrais vous remercier de m'avoir invité à parler au comité aujourd'hui.
    Nous sommes situés sur la côte ouest du Cap-Breton. C'est une très petite zone de pêche, d'environ 20 milles sur 60 milles. Notre zone jouxte la zone 12 de la pêche au crabe. C'est une zone côtière. Nous avons des bateaux de moins de 45 pieds. Nous fonctionnons selon un système de CIT très particulier, le seul de ce genre au Canada. Notre association est composée uniquement de propriétaires exploitants. Je suis moi-même propriétaire exploitant depuis 1992. Notre association est la seule qui représente la zone 19. Aucune autre association ne représente notre pêche.
    Je voudrais parler un peu du stock de crabe des neiges du sud du golfe et de son histoire. Je sais que vous le savez tous, mais selon la page 9 de l'évaluation du crabe des neiges de mars 2010 pour le sud du golfe, le cycle d'abondance a connu son apogée en 1994 avec au total 154 000 tonnes métriques de biomasse. Je sais que la façon dont ce chiffre a été établi suscite des doutes, mais c'est le chiffre qui figure dans le document.
    L'évaluation faite à l'automne 2009 indique une biomasse de seulement 26 000 tonnes métriques, ce qui représente une diminution de 83 p. 100. C'est incroyable. Si vous répartissez cette diminution entre les zones de pêche, elle n'est que de 3,5 p. 100 pour la zone 19.
    Je me demande comment cela a pu se produire. Comment les politiciens, la direction du MPO et les pêcheurs ont-ils permis que notre stock diminue à ce point? En 1994, la classe politique a poussé énormément pour qu'on augmente le nombre de participants dans la pêche au crabe. À ce moment-là, les pêcheurs de la zone 19 se sont vivement inquiétés et voulaient avoir un certain contrôle sur leur pêche. C'est alors que l'idée d'une cogestion nous est venue. Nos pêcheurs ont passé d'innombrables heures et dépensé des centaines de milliers de dollars à travailler avec le MPO, la collectivité et la classe politique pour élaborer un accord de cogestion. En 1996, le premier véritable accord de cogestion existant au Canada a été signé entre le MPO et la zone 19. Cet accord s'applique encore aujourd'hui et il doit être renouvelé en 2013. Le principal objectif de notre accord de cogestion était d'établir notre pêche sur la base de trois grands principes: premièrement, utiliser les meilleures données scientifiques possibles; deuxièmement, utiliser les meilleures pratiques de pêche possibles; et troisièmement, maximiser les avantages sociaux économiques pour nos collectivités.
    En vertu de cet accord de cogestion, nous aurions dû pouvoir éviter les pressions politiques, mais malheureusement, nous n'avons pas été à l'abri de ces pressions. Elles ont eu des répercussions négatives sur tout le stock de crabe des neiges du sud du golfe pour deux principales raisons.
    La première est le nombre de participants dans cette pêche. L'augmentation du nombre de crabiers a également entraîné un accroissement du nombre de casiers utilisés. Depuis 1994, dans la zone 12, le nombre de casiers est passé de 18 000 à plus de 38 000, ce qui représente une majoration de 106 p. 100. En même temps, nous avons aussi accru le nombre de nos pêcheurs dans la zone 19, mais nous avons essayé de limiter l'augmentation du nombre de casiers et nous en avons seulement 15 p. 100 de plus. Le grave problème que pose l'accroissement du nombre de casiers est que cela augmente la mortalité du stock non commercial, c'est-à-dire les crabes trop petits, les femelles et les crabes à carapace molle. Cela soumet le stock futur à un stress énorme.
    Quant au deuxième facteur qui nous a touchés, ce sont les décisions prises au sujet du total admissible de captures ou TAC. Elles ont été prises sans preuve scientifique et à l'encontre des recommandations des gestionnaires du MPO. Nous en avons eu un bon exemple en 2009. Les scientifiques du MPO ont fait une recommandation à la page 22 du document de travail du SCCS, en février. Ils ont déclaré qu'un TAC de 17 000 tonnes métriques dans la zone 12 coïnciderait avec la diminution de la biomasse dans cette zone. La classe politique a établi un TAC de 20 900 tonnes. C'est 24 p. 100 de plus que la recommandation des scientifiques.
    Il faut se demander qui est responsable de l'état actuel du stock de crabe des neiges du sud du golfe. Comment en sommes-nous arrivés là? La zone 19 n'en est certainement pas responsable. Nous avons géré notre pêche en suivant notre propre approche de précaution depuis de nombreuses années.
(1150)
    Quelle est notre approche de précaution? Ces dernières années, nous avons géré notre pêche en fonction d'un relevé au chalut de fond qui a lieu trois semaines avant l'ouverture de la pêche. Ce bref délai abaisse le pourcentage de mortalité naturelle de 25 p. 100 à presque zéro. Il abaisse aussi le risque de migration à l'extérieur de notre zone. Comme la biomasse a diminué dans la zone 19, nous avons également réduit notre TAC pour tenir compte de cette diminution. Nous avons diminué nos prises. Nous les avons réduites chaque année.
    Les pêcheurs de la zone 19 ont fourni des fonds au MPO pour des patrouilles maritimes et aériennes le long des limites de la zone. Nous l'avons fait pour nous assurer qu'il n'y aurait pas de braconnage. Nous avons fourni des fonds pour faire des relevés multiples, la même année, pour nous assurer que notre stock était bien là. Nous voulions le savoir. Nous avons fait faire ces relevés supplémentaires au chalut de fond pour nous en assurer.
    Nous avons fourni des fonds pour diverses expériences scientifiques. Récemment, nous avons fait une expérience pluriannuelle sur les larves avec le Service scientifique du MPO à Moncton et nous venons de terminer une étude conceptuelle pour des casiers qui nous éviteront de prendre les petits crabes, les crabes à carapace molle et les crabes top petits.
    Dans la zone 19, nous ne commençons la pêche qu'à compter du 9 juin. C'est à cause des deux saisons d'accouplement du crabe des neiges. La dernière saison se termine à la mi-mai, selon les scientifiques, et c'est pourquoi nous attendons jusqu'au 1er juin. Ainsi, chaque mâle adulte a la chance de s'accoupler. Pour le moment, la zone 19 a commencé une évaluation préalable en vue de la certification MSC, car nous pensons que c'est inévitable pour assurer la commercialisation future du crabe des neiges. Nos pratiques de pêche et notre gestion doivent avoir des effets positifs étant donné que notre relevé au chalut de fond de l'automne 2009 a révélé une augmentation du stock de près de 10 p. 100 par rapport à l'automne 2008.
    La nouvelle approche de précaution que les scientifiques du MPO ont adoptée pour le sud du golfe ont mis la zone 19 dans le même panier que les autres zones. Nous estimons que c'est injuste pour nos pêcheurs. Je suis ici aujourd'hui devant vous pour demander que le caractère particulier de la zone 19 soit reconnu. La zone 19 peut prouver qu'elle assure une bonne gestion de la pêche. Un relevé printanier, un protocole très strict à l'égard des carapaces blanches, une surveillance intégrale de la diminution du stock et la poursuite de notre accord de cogestion assureront l'avenir du stock et l'avenir des pêcheurs de la zone 19 pendant de nombreuses générations à venir.
    Je vous remercie de votre attention.
(1155)
    Merci beaucoup, monsieur MacLean.
    Monsieur Landry.

[Français]

    Bonjour. Je m'appelle Daniel Landry et je suis conseiller aux pêches à l'Association des pêcheurs professionnels membres d'équipages. Mes membres sont au travail présentement. Je vais donc les représenter.
    L'Association des pêcheurs professionnels membres d'équipages est un regroupement de pêcheurs semi-hauturiers de crevette, de petits pélagiques à la senne bourse, de poissons de fond et, en majorité, de crabe. Nos membres ont, pour la plupart, une longue expérience de la pêche, à savoir de 20 à 30 ans, et une excellente formation acquise à l'École des pêches du Nouveau-Brunswick. Au fil des ans, nos membres ont vu leurs revenus fondre comme neige au soleil, passant de 35 000 $ à 12 000 $ par an, en raison de nouveaux frais et de coupes par le MPO dans les historiques de pêche de leurs capitaines. Chaque fois que le MPO réduit notre part à pêcher, notre revenu suit cette tangente. C'est donc dire que toutes les décisions du ministère en matière de gestion de la pêche ont un impact direct sur les équipages.
    On a dit que la ressource halieutique appartenait à tous les Canadiens et Canadiennes, et nous sommes d'accord. Cependant, nous aimerions que quelqu'un rappelle au ministère que nous sommes aussi des Canadiens sur le pont des bateaux, que nous avons aussi le droit à un salaire décent pour faire vivre nos familles et espérer un jour envoyer nos enfants à l'université. Malheureusement, les revenus que nous nous partagions ne sont plus là en raison d'une gestion des pêches politisée « à mort » par Pêches et Océans Canada. Je dis « à mort » parce que cette gestion tue notre industrie traditionnelle et toute la communauté d'intérêt qui en dépend, à savoir les membres d'équipage, les travailleurs d'usine, les transformateurs et tous les employés connexes. L'acharnement du MPO envers la flottille traditionnelle de pêche au crabe de la zone 12 laisse présager les pires scénarios économiques. Ça fait fuir la main-d'oeuvre qualifiée sur les bateaux et ça anéantit tous nos efforts de relève, tant à bord des bateaux que sur le pont des navires.
    Depuis 40 ans, nous travaillons avec notre fédération à mettre en oeuvre des avantages sociaux pour nos membres. Nous en sommes rendus à ne plus pouvoir les utiliser. Nos membres peinent à payer leur cotisation de 300 $. Ils cherchent de petites assurances pour remplacer leur régime collectif d'assurance. Ils ne voient plus le jour où ils pourront participer au programme de REER collectif que nous avons créé.
    Nous ne sommes pas contre l'idée de partager la ressource avec les flottilles en difficulté, mais seulement quand notre viabilité n'est pas elle-même menacée. À l'heure actuelle, notre flottille est en difficulté, mais nous devons continuer à partager le contingent avec des organisations qui louent du quota à 35 ¢ la livre à leurs pêcheurs, qui n'ont pas vraiment les connaissances et l'équipement nécessaires pour faire la pêche sur l'ensemble du territoire de la zone 12 et, qui plus est, n'ont aucune imputabilité à l'égard de la ressource parce qu'ils ne seront probablement pas dans ce secteur de pêche l'année suivante ou qu'ils n'ont pas de permis permanent.
    Est-il normal de se retrouver dans ces conditions, avec 130 pêcheurs traditionnels et 300 pêcheurs occasionnels? Eh bien, c'est le scénario de 2009, avec les résultats qu'on a connus et qu'on connaît en 2010. Alors que Transports Canada est à renouveler la loi sur la marine et à augmenter les critères de qualification pour les gens de la mer, il va devenir impossible de faire les 12 mois de mer nécessaires en cinq ans pour devenir admissible aux examens de Capitaine de pêche, classe IV de Transports Canada. De plus, si nos capitaines crabiers continuent à ne pouvoir pêcher que le crabe et que cette pêche continue d'être partagée sans égard à sa rentabilité, il va devenir impossible de recruter de nouveaux pêcheurs intéressés à obtenir de la formation et à tenter de satisfaire aux exigences de Transports Canada.
    Nous souhaitons qu'une enquête sérieuse ait lieu sur la gestion du crabe des neiges de la zone 12, qu'un mode de gestion honnête et juste envers notre flottille soit mis en oeuvre, que la paix revienne dans nos communautés, lors des rencontres de gestion avec le MPO, et surtout, qu'une relation de confiance se rétablisse avec le Secteur des sciences de Pêches et Océans.
    Il n'est pas normal que des pêcheurs canadiens doivent avoir recours aux tribunaux pour se faire entendre. Cela devient trop fréquent, beaucoup trop fréquent, avec Pêches et Océans Canada.
    Je vous remercie de m'avoir écouté.
(1200)
    Je vous remercie, monsieur Landry.
    Monsieur Brun.
    Bonjour, monsieur le président, députés et membres du public. Je vous remercie de nous avoir invités. Je vais m'adresser à vous aujourd'hui au nom d'André Martin, notre président. Évidemment, il ne peut pas être ici, étant donné qu'il est en train de pêcher le homard.
    Je vais vous présenter un historique rapide de l'Union des pêcheurs des Maritimes pour permettre à ceux qui ne savent pas qui nous sommes de mieux nous connaître. L'organisation représente 1 500 pêcheurs côtiers au Nouveau-Brunswick et en Nouvelle-Écosse. Ceux-ci sont propriétaires et exploitants de leur entreprise de pêche. Ils emploient au-delà de 3 000 aides-pêcheurs. L'UPM favorise une pêche multi-espèces. On vise l'objectif consistant à combiner les permis pour le homard, le hareng, le poisson de fond, le pétoncle et d'autres encore. L'organisation tire sa légitimité de la législation provinciale et fait l'objet d'un processus de reconnaissance officielle tous les quatre ans — il est important de le mentionner — pour se faire accréditer au Nouveau-Brunswick.
    Au fil du temps, l'organisation a visé un équilibre entre les intérêts actuels de ses pêcheurs membres et ceux des générations futures. Il est très important de le souligner. Nous travaillons pour nos membres, aujourd'hui, mais aussi pour les générations futures de pêcheurs. Du côté du crabe des neiges, l'historique de l'UPM commence surtout en 1991, à la suite du moratoire sur la morue. L'UPM avait fait une demande de partage concernant la très lucrative pêche au crabe des neiges en se fondant sur les trois arguments essentiels suivants: d'abord, il existe du crabe des neiges à proximité des régions côtières où oeuvrent les pêcheurs côtiers; ensuite, la pêche côtière vise une stratégie de pêche multi-espèces, qui permet de diversifier le risque relatif à la gestion des ressources, étant donné qu'il y a plus d'un permis ou d'une pêche et que, quand les temps sont moins faciles du côté d'une pêche, on peut faire appel à une autre pêche; enfin, les pêcheurs côtiers demandaient une juste distribution des bénéfices des ressources de la mer parmi le plus grand nombre possible de participants de l'industrie des pêches et le plus grand nombre possible de communautés rurales, au Nouveau-Brunswick et ailleurs.
    À la suite de ces demandes, le ministre fédéral des Pêches Tobin, qui était en poste en 1995, a donné aux pêcheurs côtiers l'autorisation de pêcher le crabe des neiges. Dans ses documents, il disait vouloir assurer un partage équitable de cette ressource publique commune. Par la suite, en 2003, le ministre fédéral des Pêches de l'époque, M. Robert Thibault, a proposé à son tour de maintenir le partage du crabe des neiges, mais parlait plutôt d'un nouvel accès. Il disait vouloir permettre aux pêcheurs de planifier ces pêches à plus long terme.
    Le ministre Hearn a lui aussi opté pour cette continuité. Il a même dit vouloir donner une permanence et une stabilité aux ententes de partage, d'ici 2010. La ministre fédérale actuelle, Gail Shea, va cette année dans le sens de la stabilité et assure cette dernière jusqu'en 2014. En fait, en 2014, les pêcheurs côtiers de l'UPM et les autres auront participé à la pêche du crabe des neiges depuis 20 ans déjà.
    En ce qui concerne le déclin récent de la biomasse du crabe des neiges, soit la question qui semble la plus pressante aujourd'hui, compte tenu du comportement cyclique du crabe des neiges, les scientifiques ont commencé à présenter des preuves de déclin de la biomasse déjà en 2006, pour ce qui est du golfe du Saint-Laurent. En 2007, les scientifiques recommandaient aussi de diminuer le contingent global. Dans la foulée de ces recommandations, l'UPM a recommandé une diminution du contingent global du crabe des neiges. En 2008, l'UPM recommandait une diminution de 20 p. 100 du contingent alloué à la pêche.
(1205)
    En 2009, l'industrie en général a ignoré les conseils des scientifiques, et les pêcheurs traditionnels ont même intensifié le lobby politique à Ottawa pour conserver le statu quo. En 2010, la ministre a eu le courage d'accepter l'avis des scientifiques du ministère et elle a réduit le contingent de 63 p. 100. À notre avis, le rythme des débarquements de la saison 2010 à la baie des Chaleurs semble donner raison à la ministre.
    Je vais aussi parler brièvement des mythes et des réalités. Depuis quelques mois, on a suggéré que la chute de la biomasse du crabe des neiges aurait été causée par un nombre trop élevé de pêcheurs ou de casiers en mer. Selon l'UPM, ça semble assez illogique, pour les raisons suivantes. La flottille totale des pêcheurs de crabe des neiges compte environ 400 bateaux. Si on suppose que chaque bateau possède en moyenne 100 casiers, on arrive à un total de 40 000 casiers en mer. En comparaison, la flottille des pêcheurs de homard dans le sud du golfe, avec ses 4 000 bateaux, ou presque, qui ont en moyenne 275 casiers chacun, a un total de 1,1 million de casiers en mer. Si on compare les deux, la flottille des pêcheurs de homard a, en ce moment, 10 fois plus de pêcheurs en mer et 27,5 fois plus de casiers que la flottille des pêcheurs du crabe des neiges. Cette première flottille des pêcheurs de homard réussit à faire progresser graduellement sa biomasse depuis quelques années. Toutefois, la biomasse est encore insuffisante et l'économie est insuffisante pour les pêcheurs, qui dépendent de plusieurs espèces.
    J'arrive à ma conclusion. Il est bien évident que le nombre de pêcheurs ne semble pas être la source du problème dans le cas du crabe des neiges. Quel est donc le problème? On s'est posé la question. On en est arrivé à une conclusion. Ce matin, j'ai écouté l'intervention de M. Joel Gionet. On est en accord avec lui, la nature cyclique du stock semble être une explication beaucoup plus logique et semble être la principale raison de la chute de la biomasse du crabe des neiges. Il est donc important que les gestionnaires du MPO continuent à être très attentifs aux conseils des scientifiques de ce ministère, comme cela a été le cas cette année. Selon l'UPM, il existe aussi, depuis plusieurs années, une question de surveillance et de protection qui engendre des conséquences très négatives pour cette pêche. On aimerait le souligner.
    À notre avis, la section de protection et de conservation du MPO, qui doit patrouiller un énorme territoire de pêche dans le golfe — un espace très difficile à couvrir —, faute de ressources humaines et matérielles, se concentre trop souvent sur la surveillance des activités près des côtes ou des zones côtières et néglige trop souvent la fréquente pratique du crabe sélectionné sur la base de sa qualité. À notre avis, cette pratique nuit sérieusement à la biomasse du crabe, puisque le crabe sélectionné cause des volumes de rejets importants. De plus, il y a un fort pourcentage de mortalité. Il faudrait donc dorénavant porter une attention particulière à cette pratique.
    Puisque le temps s'écoule rapidement, je ne ferai pas de récapitulation. Je pense que nos points ont été abordés. Je vous remercie de votre attention.
    Merci, monsieur Brun.
    Monsieur LeBlanc, vous avez la parole.
(1210)
    Merci, monsieur le président.
    Messieurs, je vous remercie de vos présentations. J'aimerais poser une question à M. Brun ou à M. Comeau.
    J'aimerais revenir à ce dont vous avez parlé à la fin de votre présentation. Le mot « sélectionné » est un mot technique. J'aimerais que vous donniez plus d'explications à ce sujet. Par exemple, certaines personnes qui travaillent dans l'industrie de la transformation disent que le crabe apporté aux usines par les pêcheurs côtiers est de moins bonne qualité que le crabe apporté par les pêcheurs semi-hauturiers. J'aimerais que vous donniez plus d'explications à ce sujet. J'aimerais bien comprendre ce que vous avez dit à la fin de votre présentation, car on a manqué de temps.
    J'aimerais poser une autre question. Aussi, je vous prie de ne pas prendre mes 10 minutes pour répondre.
    On a souvent entendu dire que la qualité du crabe apporté par les pêcheurs côtiers était moindre. On s'est souvent demandé pourquoi. Les responsables d'usines prétendaient que la qualité était moindre. On a voulu vérifier pourquoi. Ce faisant, on s'est rendu compte que certains pêcheurs avaient pour pratique de choisir le crabe de meilleure qualité et de rejeter les crabes à qui il manquait une patte, par exemple.
    Monsieur Brun, que veux dire le mot « rejeter »? Le crabe est-il mort? « Rejeter » veut-il dire que c'est remis à la mer? Expliquez-moi ce que veut dire le mot « rejeter ».
    Ça veut dire qu'on les remet à la mer. Très souvent, un grand pourcentage de ce qu'on remet à la mer ne survivra pas.
    Merci beaucoup.
     J'ai une autre question, monsieur Brun. Ce matin, on a beaucoup parlé — et avec raison — des questions économiques et du seuil de viabilité. On veut qu'une entreprise de pêche soit rentable. En effet, je pense que tout le monde souhaite que les pêcheurs, leurs entreprises, leurs équipages et les usines de transformation puissent faire de l'argent. Les profits ne sont pas une chose négative quand on fait des affaires, au contraire.
    Cependant, il s'agit de la question du seuil de viabilité pour une entreprise de pêche. Nous avons entendu parler, plus tôt aujourd'hui, des difficultés à trouver ce seuil de viabilité compte tenu des diminutions récentes pour les crabiers traditionnels. Vous représentez 1 500 pêcheurs côtiers. Je connais un peu la zone 25, qui est une zone de homard, parce que c'est la région que je représente au Parlement.
    Parlez-moi un peu du seuil de viabilité pour vos membres. Il est question de la situation économique actuelle des pêcheurs de homard. On les appelle pêcheurs de homard parce que j'ai l'impression — vous me corrigerez si j'ai tort — que la grande majorité de leurs revenus provient de la pêche au homard. En matière de viabilité économique, je pense qu'il serait utile d'avoir un portrait des difficultés que vos membres vivent également.
    Des études ont été faites par le ministère des Pêches et des Océans sur la période de 2004 à 2007. Elles ont démontré quels étaient les revenus nets des pêcheurs côtiers de homard. D'ailleurs, vous avez raison, monsieur LeBlanc, la pêche au homard procure la plus grande part des revenus des pêcheurs. Il y a aussi de la pêche secondaire, comme celle du hareng et de certaines autres pêches. En moyenne, sur la côte est du Nouveau-Brunswick, les revenus nets après impôt, pour ces années, sont de 12 000 $ à 15 000 $ par année.
    Ce n'est vraiment pas un montant énorme si on doit faire vivre une famille, et tout le reste. Il est clair que l'objectif de notre organisme est d'améliorer le niveau de vie et d'avoir une meilleure viabilité. Les prix sont de 2,75 $ pour le plus petit homard et de 3 $ pour le marché, cette année. Il est clair que ça ne s'améliorera pas, les choses restent très mauvaises.
    Je vous remercie de votre réponse.
    Revenons à la question du partage. On a beaucoup tourné autour de cette question aujourd'hui. Si vos membres, en général, sont dans la situation économique que vous venez de décrire, pourquoi un accès raisonnable au crabe des neiges est-il si important pour assurer la viabilité de vos entreprises de pêche?
(1215)
    Comme on l'a mentionné au début, l'objectif des pêcheurs côtiers est de pouvoir pêcher plusieurs espèces. Les 1 200 pêcheurs du Nouveau-Brunswick veulent avoir plusieurs possibilités afin d'avoir un niveau de vie raisonnable. C'est clair, au fil des ans, la pêche au crabe des neiges s'est révélée cruciale pour atteindre ces objectifs. Il s'agit de faire les premiers pas pour réduire le nombre de pêcheurs dans la flottille de pêche du homard. En effet, il y a un nombre énorme de pêcheurs dans de très petits espaces de territoire. Cela permet de le faire graduellement en attendant l'aide du gouvernement. Il est clair qu'on a pu le faire graduellement jusqu'à présent, grâce au crabe des neiges, et d'autres choses. Cela permet de développer notre pêche, d'en assurer une meilleure viabilité ainsi qu'une meilleure conservation de nos pêches.
    Je vais poursuivre dans un autre ordre d'idées. Un peu plus tôt, il y avait d'autres invités, juste avant vous. Je suis entièrement d'avis qu'une solution importante aux problèmes de viabilité économiques auxquels nos membres font face viendra d'un programme gouvernemental financé. Il n'est pas utile de tordre le dernier bout de citron dans le cas du crabe des neiges ou d'autres espèces. Il s'agira d'accepter la responsabilité, comme on l'avait fait dans le cas de la décision Marshall.
    Évidemment, quand la Cour suprême donne un ordre au gouvernement, c'est plus facile d'aller devant le Conseil des ministres pour chercher de l'argent. En effet, la réponse n'est pas oui ou non; c'est: combien d'argent va-t-il falloir pour respecter la décision de la Cour suprême? La dynamique change dans le cas d'une telle décision.
     On n'a pas ce luxe, actuellement. En fait, il y a un besoin actuellement d'aller acheter des licences. On ne parle pas de permis de homard, parce que si on achète des permis de homard, on devrait acheter toutes les licences que possède l'entreprise de pêche, les annuler, les déchirer, comme un des participants a dit plus tôt. Ensuite, on donnerait à vos membres, c'est-à-dire les plus jeunes pêcheurs, une vraie chance d'améliorer leur situation économique, et d'investir dans l'équipement. Ça, c'est une tout autre question. Je suis entièrement d'accord avec les gens qui ont dit qu'il est presque impossible pour une entreprise de pêche d'emprunter de l'argent. Si on a la Société du crédit agricole pour aider les agriculteurs, pourquoi n'aurait-on pas une formule semblable pour aider les entreprises de pêche, une façon de financer sérieusement ces achats?
     Comment verriez-vous un plan de rachat de permis, dans le contexte d'assurer à long terme la conservation pour les générations futures, ce dont vous avez parlé? Il faut diminuer la pression sur les ressources, qu'il s'agisse du crabe des neiges ou du homard.
    Il y a eu plusieurs programmes de retrait de permis dans le passé. Normalement, on retire des permis et la ressource revient. Il faut donc faire très attention. Comme le démontrent plusieurs études, il faut s'assurer d'avoir des mesures de conservation en échange afin d'améliorer ce qu'on laisse à l'eau. Si on peut retirer des permis et avoir des mesures de conservation, on a de meilleures chances d'obtenir un effet à long terme. En ce qui a trait à l'économie des pêcheurs, on réduit le nombre de pêcheurs. On améliore ainsi la tarte économique pour ceux qui restent. Sur le plan de la conservation de l'espèce, on a fait certaines concessions. C'est notre perspective, et c'est ce qu'on encourage. Certains outils ont été mis sur la table récemment, mais on est loin d'avoir atteint les objectifs voulus. En fait, ce qui a été récemment mis sur la table pour nos pêches n'était qu'un pourcentage de ce qui est nécessaire pour obtenir un seuil de viabilité raisonnable pour les pêcheurs côtiers.
     Cette question est intéressante. Quel genre de changement ou d'options pourriez-vous proposer? Je suis d'accord avec vous, il faudrait combiner cela avec un plan de retrait de permis. Quel genre de mesures votre liste de souhaits contient-elle?
(1220)
    Ça va certainement dépendre des circonstances et du type de programme qu'on propose. Ainsi, en ce qui a trait au homard, par exemple, des mesures de conservation se sont révélées très efficaces. Il s'agit, par exemple, de la question des tailles minimums. Il s'agit de toutes les mesures de conservation qui arriveraient à laisser plus de homard dans l'eau et qui seraient combinées avec une amélioration économique. En réduisant le nombre de pêcheurs, on ferait en sorte que les pêcheurs ne subiraient pas de pertes économiques, en laissant un plus grand volume de l'espèce à l'eau. C'est donc un échange, en d'autres mots, pour améliorer l'avenir de la pêche ainsi que l'économie des pêcheurs qui pratiqueront cette pêche à long terme.
    Merci.
     Monsieur Blais, vous avez la parole.
    Je vous remercie, monsieur le président.
    Bonjour, messieurs.
    Monsieur Landry, vous avez parlé un peu plus tôt de la politisation à outrance à Pêches et Océans Canada. Vous avez un peu fait allusion à ce qui s'est produit dans les années passées. J'aimerais que vous nous expliquiez de quelle façon on pourrait réussir à sortir un peu la politique de tout ça. Nous sommes tous un peu politiciens. Certains le sont plus à temps plein, d'autres sont mieux payés et d'autres ne sont pas payés du tout, mais on fait de la politique de différentes façons. On fait toujours un peu de politique.
    Quand je parle de politique, c'est dans le sens où on veut ménager la chèvre et le chou, on veut prendre des décisions qui vont plaire à un peu tout le monde, on veut essayer de plaire à toute la communauté et, finalement, on déplaît à un peu tout le monde, soit à court, moyen ou long terme. De quelle façon pourrait-on réussir à sortir la politique de tout ça?
    Tout d'abord, il y a le pouvoir discrétionnaire du ministre. À notre avis, il est maintenant utilisé de toutes sortes de façons. Au départ, on visait la préservation de la ressource. On voit quelle est la situation actuelle, mais on savait que la biomasse serait très basse cette année. Les décisions qui ont été prises ont fait en sorte qu'il y a eu plus de pression, plus de pêche pour cette ressource. On peut donc se demander quelle est la logique de cette gestion.
    À une certaine époque, autour de 1996, il y a eu cogestion dans notre pêcherie. Cela a bien fonctionné pendant un certain temps. On s'est ensuite aperçu qu'il n'y avait pas d'arbitre. Celui qui avait le pouvoir pouvait donc respecter ou non l'entente, ce qui a amené beaucoup de frustration. Cela a aussi entraîné une perte de confiance dans les sciences, même si tous les efforts étaient déployés pour être honnêtes avec les pêcheurs.
    Je pense que plus d'implication est nécessaire de la part des pêcheurs eux-mêmes. Il devrait y avoir des comités neutres pour entendre les doléances des pêcheurs, des scientifiques et des gestionnaires. Il faudrait aussi avoir des arbitres sur le plan de la gestion en cours de route pour juger si les intérêts des uns et des autres sont respectés.
    Est-ce une façon de régler le problème? Le CCRH a-t-il, tout de même, ses limites?
    La gestion se fait sur une base annuelle. Le CCRH, c'est sporadique, mais il s'intéresse au crabe, à sa gestion et à sa pêche certaines années. D'autres années, on voit moins d'intérêt de sa part. Il se concentrera davantage sur d'autres pêches.
    Selon moi, il faudrait un autre mécanisme.
(1225)
    J'aimerais savoir une chose, par simple curiosité. Vous êtes pêcheur dans la zone 12, vous êtes un crabier traditionnel.
    Oui, je représente des pêcheurs traditionnels.
    Je suppose qu'il ne s'agit pas de l'organisation dont a parlé l'autre personne qui a témoigné un peu plus tôt, M. Robert Haché.
    Ils représentent des capitaines propriétaires et je représente des membres d'équipage. Ce sont les employés de ces capitaines.
    Vous vivez donc de plein fouet toutes les décisions. On parle de perte d'emplois.
    Oui, quand la pêche au crabe va, tout va. C'est le moteur économique de notre région, la Péninsule acadienne. Quand la biomasse est intéressante, que les gens sont intéressants et que le prix est intéressant, ça va mieux pour les membres d'équipage, c'est certain. Les salaires sont meilleurs.
    À un moment donné, il y a eu un partage. Cela a changé le mode de paiement. Traditionnellement, 40 p. 100 de la pêche allait aux membres d'équipage. Quand on descend sous un seuil, il y a tout de même beaucoup de dépenses sur les navires et beaucoup d'imprévus. Les modes de paiement ont changé, mais généralement, quand la pêche va bien, les hommes de pont sont mieux payés et rapportent un meilleur revenu à la maison.
    M. Brun ou M. Comeau auraient-ils des commentaires à faire sur ma question de départ sur la politisation?
    Je suis de ceux qui pensent que la politique est souvent nécessaire pour en arriver à des décisions différentes de celles qu'on a connues dans les cas de BP dans le golfe du Mexique ou de General Motors. Pour nous, la pêche dans le golfe du Saint-Laurent est aussi importante que l'industrie de l'automobile l'est pour l'Ontario. On a parfois besoin d'interventions politiques pour nous aider. Ce n'est pas sûr qu'on peut le faire nous-mêmes, à cause de notre appétit.
    Regardons ce qui s'est passé dans le golfe. Monsieur Blais vous êtes originaire des Îles-de-la-Madeleine. Depuis 30 ans, le poisson rouge ou le sébaste a disparu, mais je ne suis pas sûr que les politiciens ont fait disparaître la ressource. En ce qui concerne le poisson de fond du golfe et de l'Atlantique, je dirai comme M. John Crosbie, les politiciens n'ont pas pêché. Aux Îles-de-la-Madeleine, on a eu des problèmes et le hareng a disparu. Je ne suis pas certain que les pêcheurs côtiers ou les politiciens ont fait disparaître le hareng.
     Je crois qu'on est souvent victimes de notre désir de forcer les politiciens à gérer les choses. Les trois exemples que je vais donner sont des exemples de spécialisation.
     On pense qu'on peut exploiter une ressource au maximum et en vivre. Ce n'est pas nécessairement vrai. C'est pourquoi l'UPM a toujours suggéré une approche qui favorise la pêche de plusieurs espèces et fait pression sur les politiciens en ce sens. C'est la seule manière de continuer à vivre le long des côtes de manière raisonnable et nous permettre d'occuper notre territoire. Si vous enlevez les pêches des Îles-de-la-Madeleine, je ne suis pas sûr que l'on va occuper le territoire longtemps. Si vous enlevez les pêches de la Péninsule acadienne, je ne suis pas sûr qu'on va être là longtemps.
     Tout cela doit être pris en considération. Je crois que c'est ainsi que l'on doit faire intervenir nos politiciens. Il faut leur démontrer la justesse et la nécessité d'avoir des ressources naturelles bien partagées et bien gérées. Le ministère des Pêches et des Océans a peut-être un problème de gestion. Je ne crois pas que l'on ait un problème de politiciens, mais un problème de gestion. Il faut une gestion qui va prendre en considération la réalité du milieu, des espèces et la réalité écologique de ce milieu. Cela doit être pris en considération.
     Même si on modifie la Loi sur les pêches, je ne suis pas sûr que cela va changer nos mentalités demain matin. C'est pourquoi je pense que notre problème est plus qu'un problème de politicien. C'est un problème de mentalité, de gestion et de culture. On pense qu'on est obligé de pêcher du homard à 2,75 $ ou 3 $ la livre. Cela ne peut pas fonctionner longtemps ainsi. Pêcher du crabe il y a deux ans rapportait moins que cueillir du bleuet. Je crois que c'est notre gros problème. Jusqu'à maintenant, on n'arrive pas à vendre notre produit. On n'est pas des vendeurs; on est des pêcheurs. C'est un peu la faute de l'industrie en général. Des produits de luxe comme le crabe, la crevette et le homard ne devraient pas être donnés. Actuellement, on est en train de les donner. On a un problème à cet égard. Cela met beaucoup de pression sur la ressource et sur tout le monde.
(1230)
    Merci, monsieur Comeau.

[Traduction]

    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai deux questions à poser.
    Monsieur Brun, si j'ai bien compris — et si je me trompe, dites-le moi — vous estimez qu'il n'y a pas trop de pêcheurs pour le moment. Nous avons entendu dire que cela posait peut-être un sérieux problème, qu'il y avait tout simplement trop de bateaux qui essayaient de prendre trop de crabes. Peut-être pourriez-vous nous expliquer un peu plus ce que vous en pensez, si j'ai bien compris ce que vous avez dit.
    Cela se basait sur une comparaison avec d'autres pêches qui couvrent un territoire équivalent et où il y a 10 fois plus de pêcheurs et 27 fois plus de casiers et qui réussissent à avoir une pêche durable. Bien entendu, les cycles naturels ont également causé certaines difficultés pour ces autres pêches par le passé, mais grâce à certains concessions et des mesures progressistes pour assurer une meilleure conservation, le fait qu'il y ait 27 fois plus de casiers dans un territoire à peu près équivalent démontre que cette pêche se porte relativement bien… Le problème pour cette pêche — et je veux parler, bien sûr, de la pêche au homard — est qu'elle ne peut pas être rentable compte tenu des chiffres.
    Notre argument est que le problème de la diminution de la biomasse est en fait causé par le cycle naturel du crabe des neiges. En 1995, il y a 15 ans, le nombre de crabiers a augmenté. En fait, ce cycle a connu des hauts et des bas depuis cette période.
    Merci.
    Monsieur MacLean, à votre avis, que doit faire le ministère pour que les décisions concernant la zone 12 ne se répercutent pas sur la zone 19? Comment est-il possible de faire cette distinction alors que le ministère considère qu'il s'agit d'une même zone, peut-être parce que c'est dans une même unité de gestion?
    Je sais qu'on a eu tendance à considérer qu'il s'agit d'un seul et même stock biologique. Je ne suis pas un scientifique et je ne peux certainement pas contester les avis scientifiques, mais il y a aussi des preuves scientifiques selon lesquelles il ne s'agirait peut-être pas d'un même stock. Il y a certainement une migration de crabe de Scotia Fundy vers la zone 19. Les relevés au chalut qui ont été faits les deux derniers printemps l'ont démontré. Il y a aussi des différences dans l'état de la carapace, la taille moyenne de la carapace entre la zone 19 et la zone 12. Il y a des différences dans la taille des femelles, la quantité de femelles par ratio de mâles dans la zone 19. Il y a donc certainement des différences dans le stock de la zone 19 et celui de la zone 12.
    Pour ce qui est de croire qu'il s'agit d'un seul et même stock biologique, je suppose que c'est la même chose que pour la population humaine. Nous constituons aussi un seul et même stock biologique. L'endroit où vous vivez détermine peut-être combien de temps vous allez vivre. Si vous vivez à Moncton plutôt que dans la bande de Gaza, vous aurez peut-être de meilleures chances. Par conséquent, nous sommes certains que l'avenir du stock n'est pas le même dans la zone 19 et la zone 12, principalement en raison de nos pratiques et de nos méthodes de pêche.
    J'estime que la direction du MPO devrait tenir compte de la différence dans les pratiques, des différences géologiques de la zone 19, de la différence dans la profondeur des eaux. La zone 19 a des eaux beaucoup plus profondes que bien d'autres zones. À seulement trois milles au large de la côte, vous pouvez avoir une profondeur de 600 pieds, ce qui est assez unique dans le sud du golfe. Il y a certainement des choses que la direction du MPO doit faire pour traiter différemment la zone 19 et la zone 12 au lieu de nous placer tous dans la même catégorie.
(1235)
    Merci.
    Merci.
    Madame O'Neill-Gordon.
    Merci, monsieur le président.
    Je souhaite la bienvenue à nos invités d'aujourd'hui.
    Comme vous le savez, je suis la députée de Miramichi au Nouveau-Brunswick et j'ai donc un grand nombre de communautés de pêcheurs dans ma région. Shippagan et Caraquet sont certainement voisines de ma circonscription et les gens de la région me font part également d'un grand nombre d'inquiétudes.
    Monsieur MacLean, vous avez mentionné dans votre déclaration préliminaire qu'il faudrait reconnaître le caractère particulier de la zone 19. Je me demande si vous pourriez nous expliquer pourquoi. Est-ce à cause des différences au niveau du stock dont vous avez parlé ou y a-t-il d'autres raisons pour lesquelles cette zone est unique en son genre?
    Oui. C'est surtout à cause de ce que j'ai dit au sujet du stock et aussi parce que c'est une zone côtière où nous pêchons avec des petits bateaux. Nous faisons seulement des voyages de pêche d'une journée. Nous ne sommes pas une zone hauturière.
    Notre désir de collaborer avec le MPO pour apporter des changements à la pêche… Nous avons été les premiers à changer la conception de nos casiers. Nous avons été les premiers à adopter un casier conique plutôt que carré, car selon les données scientifiques, cela réduit la quantité de crabes à carapace molle ou blanche qui sont pris, ce qui protège le stock. Nous l'avons fait.
    Comme je l'ai dit au départ, nous avons conclu le premier véritable accord de cogestion au Canada, à tel point que nous avons payé pour son application, les patrouilles aériennes de même que pour les évaluations scientifiques et ce genre de choses. Nous nous distinguons des autres à cet égard.
    Comme je l'ai déjà dit, notre zone est unique en son genre en raison de la géologie du plancher océanique. C'est une petite zone. En fait, c'est la dernière zone de pêche côtière du sud du golfe, à ma connaissance, qui n'a pas été intégrée dans la zone 12 qui va des zones de l'Île-du-Prince-Édouard à l'ancienne zone 18. Tout cela fait maintenant partie d'une grand zone. Notre situation est très particulière et nous voudrions conserver notre statut.
    Nous faisons affaire avec la direction locale à Antigonish. La gestion de notre zone se fait à partir d'Antigonish, mais comme le stock du sud du golfe est maintenant considéré comme un même stock biologique, nous devons traiter avec de nouveaux joueurs. Nous sommes maintenant au Nouveau-Brunswick et nous sommes en rapport avec le bureau de Moncton.
    Nous avons effectué un relevé printanier trois semaines avant l'ouverture de notre pêche et pour nous c'est un outil scientifique extrêmement utile pour établir ce qui se trouve dans cette petite zone de 20 milles sur 60. Le crabe des neiges peut très facilement en sortir. Quand le relevé est fait en septembre, le stock a tout le temps, d'ici le mois de juillet, de mourir naturellement ou de quitter la zone. En fait, nous avons déjà eu ce problème en 2004. Nous étions allés pêcher sur la foi du relevé de l'automne, mais les crabes n'étaient plus là. Leur nombre avait énormément diminué. C'est pourquoi nous avons discuté avec les gestionnaires, avec les scientifiques du MPO pour leur dire qu'il fallait s'assurer que le stock était là, que les résultats soient bons ou mauvais. Et c'est ce que nous avons fait. Cela a eu pour nous des résultats positifs et nous espérons pouvoir continuer de cette façon.
    Nous travaillons toujours en vertu de l'accord de cogestion qui est valide jusqu'en 2013. Même si les procédures judiciaires et la perte de possibilités de revenu nous ont ralentis, nous poursuivons nos efforts et nous espérons continuer à le faire.
(1240)
    Avez-vous déjà proposé certaines de ces pratiques aux pêcheurs d'autres zones ou leur avez-vous suggéré d'appliquer vos bonnes idées?
    Nous avons recommandé nos pratiques aux pêcheurs des autres zones. Je pense que les gestionnaires de la pêche ont offert à d'autres zones certaines des choses que nous avons faites.
    Nous n'avons pas l'intention de changer ce que font les autres. Nous cherchons à continuer de faire ce que nous faisons. Et nous croyons que ce que nous faisons est pour le mieux.
    Combien de pêcheurs y a-t-il dans cette zone de pêche?
    Nous sommes dans une situation particulière parce que nous avons un CIT, comme je l'ai déjà dit. Nous sommes les seuls, mais nous avons des parts de casiers individuelles et le quota est fonction du nombre de parts que vous possédez. Vous pouvez posséder un maximum de 26 parts et un minimum de trois parts. Une part est basée sur le quota, qui est fonction du TAC et du taux d'exploitation. L'année dernière, une part équivalait à 3 100 livres; vous pouviez posséder au maximum 26 parts ou au minimum trois parts. Nous avons de nombreux pêcheurs qui n'ont que trois parts, ce qui signifie que certains ont pêché 9 300 livres l'année dernière, ce qui est assez peu. Si ces 9 300 livres se vendent à 1,80 $ la livre, ils n'ont pas gagné beaucoup d'argent.
    Nous avons au total 1 699 casiers dans notre zone et ils sont répartis, comme je l'ai dit, selon le nombre de parts qui est entre trois et 26. Nous étions 183 et ce nombre peut diminuer. Nous avons un plan intégré selon lequel un pêcheur peut racheter un autre pêcheur, ce qui fait disparaître un permis. C'est pour l'autorationalisation de notre flottille. Nous l'avons fait quand nous avons décidé qu'il n'y aurait pas de partage. Il n'y a pas de partage temporaire dans notre zone. Il n'y a pas de nouvel accès à notre zone. Nous avons intégré tous les pêcheurs temporaires. Par le passé, le partage temporaire se basait sur une formule financière et était très compliqué. Les pêcheurs ont décidé d'accepter dans la zone tous les détenteurs d'un permis temporaire et d'accorder le même permis à tout le monde. Nous avons éliminé l'incertitude. Maintenant, nous pêchons tous à des degrés différents, mais il n'y a pas d'accès temporaire. Cela a été remplacé par un accès permanent.
    En voyageant dans différentes régions, la semaine dernière, nous avons aussi entendu parler du ralentissement économique aux États-Unis qui a des effets négatifs sur le secteur de la pêche. Quelqu'un désire-t-il dire quelque chose à ce sujet?
    Excusez-moi. Pourriez-vous répéter cela, Tilly?
    Quand nous avons visité les différentes régions, cette semaine, nous avons entendu dire que le ralentissement économique aux États-Unis pose de sérieuses difficultés au secteur de la pêche. Je me demande si vous désirez nous en parler, de la nature de cette difficulté et de ce genre de choses.
    Bien entendu, les ventes des produits que nous pêchons au Nouveau-Brunswick et dans la région de l'Atlantique dépendent en grande partie des États-Unis. Ces dernières années, les Américains ont eu de la difficulté à aller avec leurs familles manger du crabe des neiges ou du homard dans un restaurant où ils avaient l'habitude d'aller, ou d'en acheter pour le manger à la maison. Il est donc normal que cela ait causé beaucoup de difficultés pour nos exportations. Nous comptons énormément, dans une proportion de 80 p. 100 à 90 p 100, sur les États-Unis pour commercialiser nos produits, surtout pour les volumes importants que nous pêchons.
    Dernièrement, nous avons cherché à diriger davantage l'attention vers la commercialisation, à travailler un peu partout dans le monde pour voir si nous pouvons trouver des nouveaux marchés ou développer les marchés actuels. Je pense que nous avons fait un bon travail sur ce plan-là ces dernières années, mais que nous devons faire des efforts supplémentaires pour que cela se poursuive.
(1245)
    Comme vous avez mentionné les marchés et ce qui se passe sur ce plan-là, je voudrais mentionner que, comme je l'ai dit dans ma déclaration préliminaire, la zone 19 est en train de faire l'objet d'une évaluation préalable pour la certification du Marine Stewardship Council. Je sais que d'autres groupes ou zones sont contre et je ne dis pas que ce soit une si bonne chose pour le secteur, mais je pense que c'est inévitable. Cela va venir. Wal-Mart, Loblaws, Superstore, Sobeys, le Empire Group et d'autres ont fait des annonces en ce sens. C'est la nouvelle tendance.
    En Nouvelle-Écosse, nous avons beaucoup de chance que notre province soit derrière nous et nous accorde une aide financière pour commencer l'évaluation préalable. C'est une évaluation compliquée, mais je tiens à dire qu'une aide quelconque du ministère fédéral ne nous ferait pas de tort non plus.
    Merci.
    Merci beaucoup.
    Messieurs, au nom du Comité permanent des pêches et des océans, je tiens à vous remercier d'être venus aujourd'hui nous rencontrer pour partager vos opinions et répondre aux questions des membres du comité. Nous apprécions certainement le temps que vous nous avez consacré. Nous savons que vous êtes très occupés.
    Merci encore une fois.
    Nous reprendrons la séance très exactement à 13 h 15. Le déjeuner est servi au fond du couloir.
(1245)

(1315)
    Nous reprenons la séance.
    Monsieur le ministre, merci beaucoup de vous joindre à nous aujourd'hui. Vous savez sans doute que nous étudions le secteur de la pêche au crabe des neiges au Canada atlantique et au Québec. Nous terminons notre voyage aujourd'hui. Nous l'avons commencé dans la région de Gaspé. Nous sommes allés à Terre-Neuve. Nous sommes allés à Sydney, au Cap-Breton, hier, et aujourd'hui nous sommes à Moncton, au Nouveau-Brunswick. Nous apprécions vraiment que vous preniez le temps, malgré votre horaire très chargé, de comparaître devant nous cet après-midi pour faire quelques observations et répondre aux questions des membres du comité.
    Je vais vous laisser faire votre déclaration préliminaire, monsieur le ministre, après quoi nous passerons aux questions.
    Je voudrais vous remercier de m'avoir invité à ces audiences. C'est certainement un plaisir d'être ici pour présenter le point de vue du gouvernement du Nouveau-Brunswick au sujet de la pêche au crabe des neiges. C'est intéressant et assez ironique. Vous avez mentionné la visite que vous faites d'une province à l'autre pour étudier la pêche au crabe des neiges. Aujourd'hui, nous sommes dans cette salle alors que les montagnes russes se trouvent à côté. C'est typique des pêches.
    Cet après-midi, je vais résumer notre position. Comme vous le savez, nous avons également soumis un mémoire écrit qui explique notre point de vue plus en détail. Plusieurs problèmes se posent pour la pêche au crabe des neiges et on a beaucoup parlé de la gestion ou de la mauvaise gestion qui nous a conduits là où nous sommes et c'est pourquoi je viens de mentionner les montagnes russes.
    Cet après-midi, je n'ai pas l'intention de poursuivre ce débat en ressassant ce qui est arrivé par le passé et je parlerai plutôt de ce qui se passe aujourd'hui. Je suis ici pour dire ce que nous croyons nécessaire de faire pour stabiliser ce secteur et lui assurer un avenir durable. Selon nous, deux grands problèmes se posent à l'égard du crabe des neiges. Le premier, un problème à court terme, concerne la situation causée par la baisse soudaine du quota. Le deuxième problème, à plus long terme, est le manque de stabilité de l'accès à la ressource et de sa répartition et nous croyons que c'est la raison à l'origine de la situation actuelle.
    Au cours des années, il y a eu de nombreux changements qui ont réduit la viabilité initiale de la pêche. Il s'agit notamment des nouvelles zones de pêche crées dans la région traditionnelle de la pêche du golfe; le fusionnement des zones; les transferts interprovinciaux des allocations et l'allocation d'une partie de la ressource de crabe des neiges à d'autres pêcheurs. Pour stabiliser l'avenir du secteur, les décisions du MPO doivent tenir compte de la viabilité de l'ensemble du secteur, y compris la transformation et la commercialisation qui sont des composantes essentielles.
    La stabilité du secteur commence par la stabilité de l'accès et des allocations. Nous croyons également nécessaire que le MPO respecte les parts historiques des flottilles et les parts provinciales en vertu desquelles la pêche a été restructurée à la fin des années 1980. Quand l'abondance de la ressource varie sur une base cyclique connue, particulièrement comme c'est le cas pour le crabe des neiges, la répartition de l'excédent en période de grande abondance devrait se fonder sur la part revenant à la province et les pêches qui en ont le plus besoin devraient y avoir accès. Le partage temporaire doit être organisé de façon à ne pas déstabiliser l'ensemble du secteur et à ne pas créer une nouvelle dépendance lorsque la ressource retombe à son niveau normal.
    Nous répétons aujourd'hui au MPO qu'il devrait diminuer graduellement le quota quand le cycle du stock est à la baisse de façon à réduire l'impact sur l'ensemble du secteur tout en protégeant le stock. Cette saison-ci, les répercussions de la réduction draconienne de 63 p. 100 du quota auraient pu être évitées et ces répercussions sont importantes pour toutes les parties prenantes. Nous devons partager la responsabilité en soutenant ceux qui sont touchés. Cette baisse soudaine du quota représente des pertes d'environ 170 millions de dollars rien que pour l'économie du Nouveau-Brunswick. Également, des milliers d'employés en subissent les conséquences. Au Nouveau-Brunswick, le secteur du crabe des neiges représente l'équivalent de 1 900 années-personnes de travail. L'importance de ces travailleurs doit être jugée prioritaire. Nous devons tenir compte des répercussions de cette réduction sur ces travailleurs.
    Je tiens à être clair. Nous sommes contre une surexploitation de la ressource. Nous comprenons l'importance de la conservation. Absolument. Nous sommes en faveur de quotas établis en fonction des données scientifiques. Ce qui se passe aujourd'hui est le résultat d'une mauvaise planification du cycle d'abondance du crabe des neiges, un cycle qui est connu. Il y a trop d'entreprises de pêche qui exploitent un quota trop petit pour que qui que ce soit puisse le faire de façon rentable.
    Alors que faire? Voici ce que nous proposons. Il faut modifier la Loi sur les pêches fédérale pour délimiter le pouvoir discrétionnaire que le ministre des Pêches et des Océans détient actuellement à l'égard des décisions concernant l'accès et les allocations. Une nouvelle loi sur les pêches doit établir les critères selon lesquels ces décisions seront prises au lieu que ce soit le ministre qui les prenne chaque année. Nous devons élaborer des principes directeurs et des objectifs pour une pêche durable et un secteur viable à long terme. Nous demandons également une aide financière pour la rationalisation du secteur de la pêche afin que la capacité soit établie à des niveaux durables à long terme.
(1320)
    Il y a une surcapacité de pêche dans les secteurs du poisson de fond, de la crevette et du homard du sud du golfe. À l'avenir, il sera nécessaire d'établir des seuils qui, pendant les années de grande abondance, entraîneront des changements dans l'attribution de la ressource à d'autres joueurs.
    Des décisions ont été prises par le passé. Je ne vais pas rabâcher les mêmes choses quant à leurs mérites, mais je dirais qu'elles ont eu des conséquences négatives énormes pour le Nouveau-Brunswick. Leurs répercussions ne se sont pas limitées aux détenteurs de permis. Nos transformateurs, nos industries de soutien, nos collectivités et nos provinces les ont ressenties. Aujourd'hui, je demande une nouvelle fois au gouvernement fédéral de reconnaître ces répercussions négatives et de s'associer à la province pour trouver des solutions concrètes pour aujourd'hui et pour demain.
    Nous devons continuer à collaborer et à assurer la stabilité et la prospérité de nos localités côtières et de notre main-d'oeuvre. Nous devons mettre en place une meilleure gestion de la pêche et tirer la leçon de nos erreurs passées. Encore une fois, je désire souligner le message que j'adresse au comité. Nous avons besoin de stabilité et d'un accès aux allocations. Il est temps de moderniser la loi fédérale.
    Je donne l'impression d'être un disque rayé. Je voudrais savoir à combien de réunions du CCMPA ou du CMPAA j'ai déclaré que nous voulions que la loi fédérale règle la situation, la nouvelle loi fédérale sur les pêches. Mes homologues de l'Atlantique et moi-même sommes totalement en faveur de cette solution et nous l'appuierons de nouveau lorsque le sujet sera abordé.
    Il est temps d'assumer la responsabilité des répercussions de vos décisions. Je voudrais insister sur mon message au comité. Premièrement, nous avons besoin de stabilité et d'un accès à la ressource. Il est temps de moderniser la législation fédérale. Deuxièmement, il est temps d'assumer la responsabilité des répercussions des décisions prises au MPO.
    Je vous remercie de m'avoir donné la parole aujourd'hui, monsieur Weston. Je suis prêt à recevoir vos questions ou observations.
(1325)
    Merci, monsieur le ministre.
    Monsieur Byrne.
    Merci à vous, monsieur le ministre, et à M. McKay.
    Pourriez-vous nous décrire les répercussions économiques de la récente réduction des quotas pour le stock de crabe du sud du golfe du Saint-Laurent?
    Elles sont importantes. J'ai parlé de 170 millions de dollars. Chaque fois que vous jetez une pierre dans l'eau, cela crée un premier rond, des ronds multiples et des vagues. Le premier rond est la collectivité, ce qui est touché dans cette collectivité et cela donne 170 millions de dollars. Il s'agit de voir ensuite ce qui se passe à l'extérieur. Quelles sont les retombées? Quelles sont les conséquences pour les marchés?
    Vous parlez des répercussions. Il s'agit du nombre d'employés des usines, des usines nécessaires pour stabiliser le secteur. De combien de travailleurs aurons-nous besoin demain ou après-demain? De quoi les usines auront-elles besoin? Quel sera le seuil nécessaire pour engager de la main d'oeuvre?
    Pensez simplement à l'emballage. Cela dépasse les frontières de l'économie locale. L'emballage se fait dans des endroits comme Moncton. De combien d'emballages aura-t-on besoin? Quelle quantité d'emballages les usines ont-elles dans leurs propres entrepôts?
    Il y a des commandes à exécuter. Nous parlons de la déstabilisation du marché. Vous perdez de la place chez votre épicier, vous perdez un comptoir, vous perdez de l'espace de réfrigération, vous perdez de l'espace dans les comptoirs réfrigérés. Je vais prendre l'exemple du crabe des neiges dans le marché japonais. Ce vide va être rempli avec un autre produit. Si les Japonais ne peuvent pas compter sur notre approvisionnement, ils vont trouver un autre fournisseur.
    L'impact dure longtemps. Ce n'est pas seulement aujourd'hui, c'est demain et tous les jours qui suivront. Comment allons-nous combler ce vide? L'impact est important et cela me ramène aux questions essentielles. Voulons-nous régler le problème de façon superficielle ou comme il faut? C'est un problème à long terme. Attaquons-le à sa source. Sa source est la stabilité et l'accès aux allocations. Les marchés vont réagir à l'instabilité et nous devons donc faire en sorte que ce vide soit constamment comblé.
    Vous avez émis des opinons claires et sans équivoque au sujet de la responsabilité fiduciaire du ministre fédéral. Nous reconnaissons tous que les gouvernements provinciaux n'ont pas le pouvoir de gérer eux-mêmes la ressource. Toutefois, depuis un certain temps, la cogestion est un principe fondamental d'une bonne gestion des pêches. Pouvez-vous décrire au comité le rôle que la province du Nouveau-Brunswick, plus particulièrement votre ministère, a joué ces dernières années dans la gestion de ce stock? Diriez-vous qu'il a été interactif, positif ou négatif?
    Cela répond-il à votre question?
    Très bien. Le ministre ne répond pas.
    Je vais répondre. Je voulais simplement marquer une petite pause.
    Absolument. Je comprends.
    Je vais vous dire une chose. Il n'y a pas eu d'activité sur le plan de la collaboration et je pense que, pendant des années, nous avons eu la table ronde des ministres. Nous avons travaillé avec toutes les parties prenantes du secteur, les pêcheurs, les transformateurs, le marché, le gouvernement et nous avions le MPO à la table comme partenaire. Malgré cela, nous sommes de retour à la case départ.
    Vous me dites que ces décisions ont eu de graves conséquences pour l'économie de votre province, le bien-être de vos collectivités qui vivent de la pêche. Qui va nettoyer ce gâchis?
    Quand ces décisions sont prises, c'est nous qui devons le faire. C'est la province qui subit les conséquences de ces décisions et il faut que cela s'arrête. C'est nous qui assumons les responsabilités après que le poisson est débarqué. Nous sommes chargés de surveiller la transformation des fruits de mer, de veiller à ce que nos usines respectent les normes sanitaires, de veiller à ce qu'elles appliquent les normes de l'ACIA. Nous devons aussi gérer le processus de commercialisation et nous travaillons très fort de ce côté-là. Par conséquent, chaque fois que l'on prend des décisions qui ont des répercussions négatives sur la ressource, c'est nous qui en faisons les frais. J'en ai assez. Depuis quatre ans… c'est de nouveau la même histoire, en plus grave.
    Oui, nous sommes responsables à partir du moment où les prises sont débarquées, mais quand on prend des décisions qui ont des répercussions négatives… nous demandons au gouvernement fédéral d'apporter son appui.
(1330)
    Décrivez-moi le dialogue, la conversation que vous avez eue avec le gouvernement fédéral en vue de faire bénéficier le secteur d'une aide à court terme ou à long terme émanant de la province du Nouveau-Brunswick et du gouvernement du Canada.
    Le sous-ministre adjoint, M. David Bevan, nous a déclaré directement ce matin qu'aucun programme d'aide fédérale n'était envisagé. En fait, nous avons entendu dire qu'il y a dans ce secteur des pêcheurs qui gagnent 800 000 $ pendant les années fastes. Ils ne gagneront que 200 000 $ cette année, une année mois faste. Alors pourquoi les aiderions-nous si les choses finissent par s'égaliser?
    Je suis content que vous le souligniez, car il y a un manque de consultation avec l'ensemble du secteur.
    Vous venez d'énoncer une réalité. Le MPO a dit certaines choses au sujet des pêcheurs. Le sous-ministre a-t-il parlé d'une promesse? A-t-il parlé de l'impact sur les travailleurs d'usine? A-t-il dit quelque chose au sujet de l'impact sur les matelots? A-t-il parlé des répercussions sur le marché? Non, car la responsabilité du MPO se limite à l'océan. Il n'y a pas de lien. Aucune consultation n'a lieu.
    En fait, nous créons un cloisonnement. Tout le monde doit travailler ensemble. Il faut que les pêcheurs, les transformateurs et le marché travaillent tous ensemble afin qu'il y ait une meilleure intégration, une meilleure intégration verticale de la mer à l'assiette. Si toutes les pièces du casse-tête ne sont pas en place, nous aurons le problème systémique dont vous venez de parler. Le MPO peut seulement parler des pêcheurs. En réalité, il y a pas mal plus de gens que les pêcheurs qui travaillent dans ce secteur.
    Pouvez-vous me parler de certaines de ces personnes? Quel serait le nombre de travailleurs d'usine et d'autres personnes que cela touche indirectement au Nouveau-Brunswick?
    Il s'agit d'environ 1 900 travailleurs d'usine.
    Et de combien d'usines?
    Le nombre d'usines de transformation du crabe… Environ trois ou quatre des usines fonctionnent et vous avez abrégé leur saison. On a donc complètement coupé l'herbe sous les pieds des travailleurs d'usine.
    Nous comprenons très bien la situation. Nous la comprenons tous. Nous savons que la biomasse a diminué, mais je ne peux pas m'empêcher de penser que si nous avions commencé, il y a trois ans, à réduire un peu les captures, en même temps que la biomasse diminuait, au lieu de maintenir leur rythme, la situation actuelle aurait quand même été très difficile, mais le secteur aurait pu être viable. Il aurait pu être plus viable que ce n'est actuellement le cas.
    Permettez-moi alors de vous poser une question précise.
    Nous avons vu des données selon lesquelles la direction scientifique du ministère des Pêches et des Océans a effectivement lancé des signaux d'avertissement. Le ministère du Nouveau-Brunswick a-t-il, par le passé, et surtout ces deux ou trois dernières années, conseillé de maintenir les quotas au même niveau ou avez-vous averti le ministère qu'il fallait appliquer le principe de prudence? Que répondez-vous à cela?
    Nous avons toujours appliqué le principe de prudence, car nous voulons assurer la viabilité à long terme du secteur. Depuis des années, la pêche au crabe des neiges a été cyclique; elle est de nature cyclique. Quand la biomasse diminue, nous devons exercer moins de pression sur la ressource et nous le comprenons, mais ce ne devrait pas être dans de telles proportions.
    Le secteur se préparait en vue d'une réduction d'environ 40 p. 100 et c'est à quoi nous nous attendions. D'après les conversations que nous avons eues avec le ministre fédéral des mois plus tôt, je m'attendais à une certaine diminution du quota, mais pas dans de telles proportions. Pour ce qui est des consultations, j'en été informé le jour même, en même temps que le secteur.
    Peut-on parler d'un travail en coordination avec le gouvernement provincial? Peut-on parler d'un travail en coordination avec le secteur? Non.
(1335)
    Parlons de la réduction de 63 p. 100 au lieu des 40 p. 100 auxquels certains s'attendaient dans le secteur. Cela vous étonne-t-il? Je sais que le ministère provincial des Pêches a une certaine capacité d'analyse scientifique, mais qu'il n'est pas la principale source d'avis scientifiques; c'est le gouvernement fédéral. Pourriez-vous nous dire ce que vous pensez d'une réduction de 63 p. 100 en une saison?
    Je vais vous dire une chose. Si j'avais su qu'il y aurait une réduction de 63 p. 100, nous aurions probablement préparé le secteur à y faire face. Nous ne nous y attendions pas. Nous nous attendions à 40 p. 100. Nous envisagions une réduction moyenne d'environ 40 p. 100 dans cette zone.
    Merci.
    Merci.
    Monsieur Blais.

[Français]

    Merci beaucoup, monsieur le président.
     Bonjour, monsieur le ministre.
    Un moment, s'il vous plaît.
    C'est bien.

[Traduction]

    Très bien.
    Je vais essayer en anglais.
    Excusez-moi. J'essayais de boire un peu d'eau. Je suis allé, ce matin, à Grand Manan où j'ai mangé de la dulse fraîche de Grand Manan. C'était un peu salé.
    Un instant. Je dois ouvrir cette créature. C'est comme une sorte de télécommande.
    Très bien.

[Français]

    Merci beaucoup.
    Ce que vous avez dit jusqu'à maintenant sur les responsabilités est comme de la musique à mes oreilles. Depuis un bon bout de temps, je dis qu'à partir du moment où l'on prend une responsabilité, soit celle de gérer la ressource, peu importe la ressource, vient un moment où il faut aussi assumer la responsabilité de l'impact de nos décisions.
    Comme vous le savez, et nous le savons aussi, les impacts sont forts nombreux. Si on devait les décortiquer, on s'apercevrait probablement qu'il s'agit d'histoires d'horreur qui ont un impact sur la santé et les services sociaux. Au Québec, des gens parlaient de l'incertitude vécue dans le domaine du crabe des neiges. Il est vrai qu'il y a un impact économique, mais il y en a aussi sur le plan psychique ou psychologique. Ça ne paraît pas. Malheureusement, une perte d'emploi, ça paraît et ça frappe, alors que les difficultés que les gens peuvent vivre sur le plan de la santé mentale ou autre paraissent moins. Toutefois, ça finit par nous rattraper.
    Mis à part les répercussions économiques, avez-vous constaté, vous et vos collègues, s'il y en a eu sur le plan de la santé ou des services sociaux?

[Traduction]

    Je remercie le député de sa question.
    Vous savez, pour le moment, nous avons notre ministère, nous sommes sur le terrain, nous avons l'enseignement postsecondaire et le programme de mobilité sur le terrain et donc pour le moment, la réponse est non. Nous nous soucions de l'impact socioéconomique. Pour ce qui est des répercussions comme certaines de celles dont nous avons parlé, nous ne les avons pas encore constaté sur le terrain. Cela pourrait venir plus tard, car d'autres pêches vont commencer. Nous avons la pêche au homard, nous avons le hareng et il y aura donc d'autres facteurs de transformation.
    J'espère avoir répondu un peu à votre question, mais pour ce qui est de l'impact socioéconomique, c'est oui. Nous allons le constater, à cause du nombre de semaines pendant lesquelles les gens cherchent à travailler pour pouvoir toucher l'assurance-emploi, pour pouvoir survivre. Si ces personnes ne peuvent pas obtenir les semaines requises, il est probable que certains programmes sociaux vont devoir intervenir. Néanmoins, il est trop tôt pour se prononcer. Nous sommes en train de terminer une saison de pêche, mais d'autres saisons ont commencé.
    En même temps, nous avons fait notre travail en ce qui concerne certains programmes de mobilité qui nous permettent de déplacer des travailleurs d'usine d'un bout à l'autre de la province. Je vais seulement vous en donner un bon exemple: le sud-ouest du Nouveau-Brunswick. Si nous avions de la place pour loger les travailleurs, nous pourrions les envoyer dans le sud-ouest de la province pour travailler dans le secteur du saumon. Nous pourrions les envoyer dans les usines de sardines, car elles sont toujours à la recherche de main-d'oeuvre. Elles sont toujours à la recherche de travailleurs étrangers ou d'autres travailleurs pour occuper les postes vacants. Ce sont là certains des défis à relever. Comment pouvons-nous déplacer ces personnes, les envoyer là où il y a du travail? Nous allons poursuivre dans cette voie.
(1340)

[Français]

    En ce qui a trait aux discussions que vous avez tenues avec la ministre ou des gens du fédéral, vous a-t-on laissé entrevoir une éventuelle possibilité de collaboration, pour ce qui est de la facture? Chaque fois que l'on pose la question directement à la ministre, on nous répond que des discussions sont en cours. Tout le monde sait qu'on peut discuter et ne rien entendre, tout comme on peut discuter et ne rien dire ou ne rien faire.
    J'aimerais que vous nous disiez quel genre de discussions ont cours, en réalité.

[Traduction]

    Merci pour cette question.
    C'est intéressant, car nous pouvons remonter deux mois en arrière. Au Boston Seafood Show, où j'ai eu l'occasion de discuter avec la ministre et le ministre régional pour le Nouveau-Brunswick, l'honorable Keith Ashfield, une des questions… Je vais vous dire une chose. Je crois les gens sur parole, pour être parfaitement honnête avec vous. Je suis prêt à travailler avec tout le monde, mais je fais confiance aux gens. On m'a dit qu'on s'inquiétait de la réduction du quota et nous nous attendions tous à 40 p. 100. Mais le fait est que la ministre m'a dit que son ministère effectuait une analyse de l'impact que la diminution du quota allait avoir sur nos industries. J'ai répondu: « C'est une bonne chose, je le comprends. Je m'en réjouis, car nous devons travailler ensemble. Nous devons trouver des solutions pour atténuer l'impact à court terme sur le secteur et préserver l'avenir à long terme ».
    Mais cette discussion a effectivement eu lieu… quand le Boston Seafood Show a-t-il eu lieu? C'était en mars et c'était donc longtemps à l'avance. Faisant confiance aux gens, comme je l'ai dit, j'ai compris qu'il y aurait une collaboration et que nous allions participer aux discussions. Nous allions en parler.

[Français]

    Sur le plan de la responsabilité, nous aurons éventuellement des recommandations à faire. J'en ai plein la tête. En effet, il y a plusieurs recommandations dont on va éventuellement discuter. J'ai lu et entendu que vous aviez des recommandations à nous soumettre. Sur le plan financier, il y a une facture qui est reliée à tout ça.
    Prévoyez-vous une recommandation en ce sens? Vous pourriez en faire une plus tard, lorsqu'on aura les chiffres réels. Par contre, si on devait le faire maintenant, je suppose que vous auriez déjà des chiffres en tête. Vous avez parlé de pertes financières de 170 millions de dollars.

[Traduction]

    Nous avons eu certaines discussions à ce sujet, mais c'était seulement pour qu'on ne nous ferme pas la porte. Après nos réunions à Ottawa, j'espérais que nous pourrions au moins établir un groupe de travail au niveau des hauts fonctionnaires du MPO pour faire bouger les choses. Comment les choses bougent-elles? Comment se déroulent ces discussions?
    On ne nous a pas tendu une branche d'olivier. C'est nous qui l'avons fait en disant que nous allons collaborer avec le MPO. Nous allons travailler avec lui sur ce dossier.
    Nous avons discuté de l'enseignement postsecondaire. Avec qui cette discussion a-t-elle eu lieu?
(1345)
    Oui, le nom a changé, mais c'était Développement des ressources humaines Canada, à propos du nombre de semaines de référence et des ajustements qui pouvaient être apportés pour que ces employés puissent traverser la crise.
    Vous ne pouvez pas nous mettre dans cette situation et ensuite nous laisser tomber. Nous avons tous des obligations. Si vous faites quelque chose qui aura des répercussions sur certaines collectivités, vous avez l'obligation morale de dire que ce sont les bonnes décisions, que vous allez aider ces collectivités à traverser leurs difficultés, que nous allons travailler ensemble au lieu de vous décharger de cette responsabilité sur le dos des provinces.
    Merci.
    Monsieur Donnelly.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie d'être venu, monsieur Doucet. Nous apprécions vos observations.
    Vous avez, en fait, répondu à la plupart des questions que je voulais poser.
    Je devrais mentionner que je suis de la côte Ouest. Nous avons actuellement un problème du côté du saumon, de la pêche au saumon sauvage et des exploitations piscicoles. Je désire vraiment aller là-bas, mais nous sommes ici pour le crabe des neiges. J'irai m'en occuper après cette réunion où je peux discuter avec vous.
    En ce qui concerne les consultations, David Bevan, du ministère, a mentionné tout à l'heure que les provinces ont été consultées, de même que les premières nations et le secteur en ce qui concerne le TAC et les annonces récentes. Vous avez dit que vous aviez eu des discussions avec le ministère, mais que le résultat n'avait pas été exactement celui que vous attendiez. Vous avez, je pense, répondu à cette question.
    Plus tôt aujourd'hui, nous avons reçu M. Basque, le représentant des Mi'gmaq. Il a dit que les Mi'gmaq n'avaient pas été consultés autant qu'ils l'auraient souhaité.
    Comme je dispose seulement de cinq minutes, je vais poser mes trois questions. Encore une fois, comme je l'ai dit, vous avez répondu à la plupart d'entre elles, mais vous pourriez peut-être nous en dire un peu plus.
    Pour ce qui est de la commercialisation et de l'importance de la certification MSC, comment envisagez-vous cela?
    En ce qui concerne les programmes d'investissement et de la valeur ajoutée ou tout programme qui augmenterait le prix du produit à la livre, vous pourriez peut-être également nous en parler.
    Quant aux programmes qui pourraient être mis en place, par le gouvernement fédéral ou les provinces en collaboration avec le gouvernement fédéral, ou que vous recommanderiez dans une situation comme celle-ci, quand certaines décisions se répercutent sur les travailleurs, quel genre de programmes voudriez-vous que le gouvernement fédéral offre? Toute précision serait utile.
    Enfin, pourriez-vous recommander des modèles de gestion de l'accès à long terme ou faire des suggestions à cet égard?
    C'est un buffet complet.
    Malheureusement, vous n'avez que trois minutes.
    Très bien. Vous avez mentionné la certification MSC. Vous avez parlé des programmes d'investissement et de valeur ajoutée, du rôle du gouvernement fédéral dans une crise comme celle-là et de la gestion de l'accès. Cela fait donc quatre sujets.
    Je vais vous dire une chose. Je suis pour la certification. Cela fait des années que nous travaillons sur le plan de la commercialisation, et ce n'est pas formidable, mais depuis que je m'en occupe, depuis quatre ans, une des choses que j'ai clairement constatée est que les marchés ont changé et que le monde a évolué. Votre marché ne se situe plus sur le quai, mais dans le monde. Nous devons réagir aux changements et à ce qui se passe dans le monde.
    La certification MSC est ce qui nous distingue, qui montre que nos pêches ont été certifiées. C'est bien géré, c'est durable et cela présente de nombreux aspects. Il y a beaucoup de paramètres à respecter pour acquérir la certification MSC.
    Est-ce que les modèles de certification MSC fonctionnent vraiment? Je pourrais en douter, car il y a tellement de modèles différents. Il y a tellement de marques de certification. Toutefois, la certification MSC ou toute autre certification est en train de devenir la norme et chaque chaîne de supermarchés commence à la réclamer. Il y a Loblaws; il y a Provigo. Ils commencent à la réclamer parce qu'ils veulent s'assurer que tous les produits de la pêche qui entrent dans leurs magasins de détail proviennent d'une ressource durable.
    Au Nouveau-Brunswick, la plupart de nos pêches exploitent une ressource durable. Je voudrais vraiment que nous trouvions une solution néo-brunswickoise pour les produits durables, car nous sommes en train de nous positionner comme un chef de file sur le marché mondial et nous sommes reconnus comme tel dans le monde entier.
    A ce propos, le fonds en fiducie que nous avons établi pour le homard vise à protéger le homard pour les générations à venir et on nous en reconnaît le mérite un peu partout dans le monde. La chaîne de restaurants Darden s'est associée avec nous pour ce projet il y a quelques années et nous avons fini par le réaliser.
    Mon objectif est d'avoir dans ce fonds entre 30 et 40 millions de dollars afin que lorsque nous commencerons la restauration de l'habitat du homard ou la mise en valeur des stocks de homard nous pourrons en assurer le financement.
    Très rapidement, à ce sujet, pour ce qui est d'assurer la durabilité grâce au fonds en fiducie, nous sommes reconnus dans le monde pour notre contribution à la durabilité de la ressource. Peut-on appliquer ce modèle en Nouvelle-Écosse, à l'Île-du-Prince-Édouard et peut-être à Terre-Neuve? J'en suis convaincu. Je pense qu'il est possible d'agir, et pas seulement pour le homard, en ce qui concerne cet aspect de la certification et que nous pouvons mettre en place notre propre programme de durabilité dans la région de l'Atlantique. Nous ne nous contentons pas de belles paroles; nous agissons.
    Je vais parler rapidement de l'investissement dans la valeur-ajoutée.
    J'entends le petit signal sonore. Je ne sais pas si c'est pour me faire signe de me taire. Je crois qu'au dernier comité vous m'avez dit que j'avais dépassé mon temps, alors je vais simplement…
    Vous avez parlé de l'investissement dans la valeur ajoutée. Cela fait des années que nous emballons et expédions nos produits. Nous les emballons et nous les expédions. Pourquoi ne pas y ajouter de la valeur ici au Canada afin de pouvoir offrir au marché un produit qui lui convient? Ce n'est pas compliqué. Il suffit d'aller dans ce marché pour découvrir quelles sont ses exigences, ce dont il a vraiment besoin et de transformer le produit ici.
    Par exemple, dans la péninsule acadienne, nous avons l'habitude d'emballer et d'expédier les oeufs de hareng. Je peux vous dire que les usines de transformation des fruits de mer du Nouveau-Brunswick sont extrêmement innovatrices. Elles sont allées voir les Japonais et leur ont demandé comment elles pouvaient leur fournir un produit prêt pour la mise en marché. Elles ont donc commencé à faire l'emballage des oeufs de hareng au Nouveau-Brunswick et à l'expédier exactement sous la forme désirée, conformément aux spécifications des clients, en respectant des normes très élevées.
    Alors oui, la valeur ajoutée est énorme, car si vous expédiez la marchandise à l'état brut, vous n'en tirez pas le prix maximum. Trouvons les moyens d'obtenir un meilleur prix pour le produit au lieu d'expédier simplement la matière première.
(1350)
    Avez-vous une autre question?
    Juste une brève observation au sujet des programmes pour les travailleurs et si vous pouviez envoyer vos observations au sujet de la gestion par écrit, cela nous serait utile.
    En ce qui concerne la gestion de l'accès… nous avons parlé de la gestion de la ressource. Nous avons un problème de capacité: il y a trop de pêcheurs à la poursuite de trop peu de poisson. La rationalisation de la flotte est un domaine dont nous devons vraiment commencer à parler sérieusement. Pourquoi y a-t-il une surpêche? Si nous continuons à exercer de telles pressions sur la ressource, elle ne va pas durer bien longtemps. Nous devons avoir des conversations très sérieuses au sujet de la rationalisation et de l'avenir.
    Dans le secteur du homard, il y a 10 000 pêcheurs dans les eaux de la région de l'Atlantique. Quel est le nombre de pêcheurs qui permettrait de rationaliser ce secteur? Sans doute 4 500 ou 5 000. Comment arriver à ce niveau?
    Je pourrais vous fournir des renseignements au sujet des programmes une autre fois.
    Vous pouvez les envoyer au greffier, monsieur Doucet.
    Certainement. D'accord.
    Nous allons veiller à ce que tous les membres du comité les reçoivent.
    Monsieur Allen.
    Merci, monsieur le président.
    Merci, monsieur le ministre, d'être venu ici aujourd'hui.
    Monsieur le ministre, je voudrais commencer par le rapport de Gilles Thériault, de GTA Fisheries Consultants, de novembre 2007, dont vous avez certainement entendu parler. Certaines des observations que vous avez faites dans votre déclaration préliminaire sont un peu étonnantes étant donné certaines affirmations qui sont dans ce rapport. Je voudrais en lire une ou deux.
    Au paragraphe 3.3.1, on peut lire:
On sait que le crabe des neiges entre dans une phase de déclin pour les prochaines années, pour atteindre possiblement le creux de la vague vers 2011. Cela nécessitera des ajustements importants de la part des flottilles. Encore une fois, il pourrait s’avérer difficile de s’entendre entre flottilles sur les changements à mettre en place. Cette conjoncture pourrait une fois de plus constituer une source de conflit.
    Plus loin, il est question d'une « incertitude totale d'une saison à l'autre ». Voici ce qu'on peut lire:
L’incertitude entourant les quantités de crabe que recevra une usine de transformation chaque saison et chaque année fait en sorte que les travailleurs ne savent jamais à quoi s’attendre d’une année à l’autre. On ne sait pas si telle ou telle usine embauchera 50, 100, ou plus de 200 travailleurs au printemps puisque cette décision dépend du nombre de pêcheurs qui auront accepté de vendre leur capture à l’usine cette année-là. De là l’incertitude perpétuelle…
    Il est question plus loin des importantes variations du TAC.
    Je voudrais vous poser une question. Il y a dans ce rapport plusieurs recommandations concernant la rationalisation de la transformation, sa mise à jour et ce genre de choses. Je voudrais savoir ce que fait la province pour donner suite aux recommandations de ce rapport.
(1355)
    Si je me souviens bien, lorsque j'ai travaillé à ce rapport avec Gilles Thériault, nous avons eu effectivement des discussions au sujet du déclin cyclique de la ressource. En même temps, le crabe était envoyé dans toutes les directions. On se demandait combien de travailleurs d'usine devaient être embauchés, où ils allaient aller.
    En même temps, une quantité abondante de crabe arrivait sur le quai et nous ne savions pas où ce crabe allait. Ce rapport devait établir comment nous pouvions collaborer non seulement avec les pêcheurs, mais également avec les usines de transformation d'augmenter au maximum la valeur du produit pour les usines du Nouveau-Brunswick. J'ai mentionné trois usines. En fait, il y en a 12. L'objectif était de réglementer la transformation du produit afin que chacune des usines puisse rester viable au lieu d'être entièrement déstabilisée faute de savoir combien de crabe elle recevrait à un moment donné. À certains moments, le crabe qui arrivait au quai partait en camion pour être transformé dans une province voisine. Cela créait de l'incertitude.
    Le but n'était pas tant de parler de la biomasse, mais de la façon dont nous pouvions accroître au maximum la valeur du crabe débarqué pour l'industrie du Nouveau-Brunswick. C'était de la plus grande importance à l'époque. Nous avions alors des excédents de crabe qui étaient débarqués sur nos quais. Il n'était pas possible de les transformer assez vite. Comme je l'ai dit, nous avons essayé d'accroître au maximum la valeur du crabe qui arrivait afin que toutes les usines puissent y avoir accès de façon stable, que le crabe ne soit pas gaspillé, que les travailleurs des usines obtiennent suffisamment d'heures de travail. Comment mettre en place des mécanismes pour que tout le crabe n'arrive pas en même temps et que les gens ne soient pas obligés de travailler 24 heures sur 24 dans une usine? Comment répartir la pêche sur l'ensemble de la saison?
    Comme vous le savez, il y a eu également une réduction importante du nombre de travailleurs à l'emploi de ces usines de crabe depuis 2000. Une des recommandations, compte tenu du fait qu'un grand nombre des usines de transformation des aliments du Nouveau-Brunswick sont dans une situation précaire, compte tenu de leur âge avancé et même de leur désuétude, était que le gouvernement du Nouveau-Brunswick élabore un programme de rationalisation de l'industrie. Y a-t-on réfléchi et quel progrès a-t-on fait depuis que le problème a été reconnu en 2007, y compris l'impact sur les employés?
    J'irai un peu plus loin. Ce que vous dites au sujet de l'absence de collaboration m'étonne étant donné que RHDCC a fourni une contribution financière importante à chaque province pour les deux années 2009-2010 et 2010-2011, en leur laissant une certaine latitude, comme vous le savez très bien, y compris pour le développement du marché du travail. Cela représente 120 millions de dollars pour cette année.
    Pouvez-vous nous dire ce qui est fait et si une partie de cette somme pourrait être réservée pour aider certains des employés et trouver des solutions imaginatives pour résoudre le problème des usines de transformation au Nouveau-Brunswick?
(1400)
    Vous parlez du nombre d'usines. Aucune nouvelle usine n'est autorisée à s'installer au Nouveau-Brunswick et il y a déjà une certaine autorationalisation. Une province n'a qu'une capacité limitée. Nous n'envisageons pas d'accorder des permis à des nouvelles usines. Les usines actuelles pourraient, à l'avenir, procéder à leur propre rationalisation.
    Aujourd'hui, nous examinons la viabilité de ce qui s'est passé et ce qui se passe cette année. Certaines usines ne seront pas viables parce qu'elles vont perdre leurs employés. Dans certains cas, certains de leurs employés vont vouloir aller trouver du travail ailleurs ou déménager ailleurs parce que nous leur avons enlevé la stabilité. Nous les avons empêchés de continuer à gagner leur vie dans ces usines.
    Quand je vais dans les usines et que j'ai l'occasion de parler avec leurs employés, tout ce qu'ils veulent, c'est travailler. Ils voudraient simplement que les choses soient organisées de façon à ce qu'ils puissent travailler le nombre de semaines requis. Nous comprenons bien que la biomasse va évoluer; nous le comprenons tous. Toutefois, si nous avions pu fixer les quotas en fonction de la biomasse il y a deux ans, nous n'en serions pas là aujourd'hui; nous aurions des industries viables.
    Je suis désolé, mais je ne peux pas me taire. Quand on travaille avec les usines et qu'on parle avec les employés des conséquences de la situation…
    Vous avez mentionné le chiffre de 120 millions de dollars. Nous ne savions pas qu'il faudrait utiliser cet argent pour le crabe; nous ne savions pas que la situation allait prendre cette tournure. Nous aurions probablement pu adapter certains des programmes ou nous aurions pu demander plus d'aide plus tôt. Toutefois, pour pouvoir répondre à cette question aujourd'hui, il faudrait que je m'informe davantage sur ce qui a été fait de cet argent et où exactement il a été dépensé. Nous ne savions pas que nous allions devoir en dépenser une si grande partie pour faire face à la situation dans le secteur du crabe. Si nous l'avions su, nous nous y serions mieux préparés et nous aurions pu travailler ensemble à une solution et nous demander quelles étaient les réponses, quelles étaient les solutions.
    Ce n'est peut-être pas à moi de poser une question, mais je dois vous demander si vous avez eu des conversations avec votre ministre fédérale avant que le TAC ne soit présenté au Nouveau-Brunswick? La ministre a-t-elle eu des conversations ou des consultations avec vous? Je vous le demande parce que je n'en ai pas entendu parler. En tant que ministre de la province, j'en ai seulement entendu parler à 11 h 35 le jour même de l'annonce. J'ai été pris par surprise.
    J'espère que vous avez été averti un peu plus tôt et que vous avez pu au moins avoir des discussions au sujet des répercussions, car c'est également votre province.
    Nous ne devrions sans doute pas être étonnés, compte tenu de la nature cyclique de ce secteur, si nous nous trouvons parfois dans un tel creux. Voilà pourquoi je soulève la question. Les employés de ces usines savaient que nous allions connaître une période de creux et nous savons que nos usines commencent à se faire vieilles. N'aurait-il pas été prudent de faire une planification en conséquence, même du côté de la transformation?
    Il y a eu une réduction du TAC chaque année depuis 2006. Nous pourrions émettre des doutes au sujet des quantités, mais il y a eu une réduction du TAC. Que peut faire la province du côté de la transformation pour se préparer à une modernisation en sachant que nous allons avoir une réduction du nombre d'employés? L'âge moyen est maintenant d'environ 51 ou 52 ans.
    Je pose simplement la question, car c'est important pour ces travailleurs et du point de vue de la province il faudrait peut-être avoir dans ces usines une main-d'oeuvre beaucoup plus qualifiée en raison des différents types d'équipement et d'efficiences…
    Nous pourrions en discuter éternellement.
    Nous étions prêts pour une réduction de 40 p. 100 et tout le secteur s'y préparait, aussi bien les pêcheurs que les usines de transformation. Ces 40 p. 100 représentaient déjà un coup dur, mais ils gardaient un peu d'espoir de pouvoir traverser cette mauvaise passe. Personne ne s'attendait à 63 p. 100. Personne dans le secteur, absolument personne ne savait que cette réduction de 63 p. 100 allait nous frapper.
    Comme je l'ai dit, j'en ai été informé le jour même, deux heures avant que la Chambre ne se réunisse à 13 heures. À 11 h 35, j'ai reçu un appel de courtoisie de la ministre des Pêches qui a d'ailleurs téléphoné à mon porte-parole pour les pêches ce matin-là pour l'informer. J'ai pensé que c'était une excellente collaboration. Comme je l'ai dit à Raynald il y a quelques minutes, je fais confiance aux gens.
    Je respecte les décisions qui ont été prises, mais en même temps, nous devons nous respecter mutuellement et savoir ce qui nous attend. On a eu toute l'occasion voulue de nous faire savoir ce qui allait se passer. Si vous demandez à n'importe qui dans le secteur du crabe, à n'importe quel pêcheur, à n'importe quel travailleur d'usine, à n'importe quel exploitant d'une usine de poisson à quoi il s'attendait, il vous répondra la même chose: personne ne le savait. Les gens savaient qu'ils devaient se préparer à des répercussions, mais ils n'avaient absolument aucune idée de leur gravité. C'est comme si ma mère préparait un souper de Noël pour 10 personnes et que 25 personnes se présentent.
    Nous devons travailler ensemble et, depuis quatre ans, j'ai fait valoir à tous les ministres que nous devions avoir cet esprit de coopération, travailler ensemble parce que quelles que soient les décisions que vous prenez, elles auront des répercussions sur les localités côtières. Nous devons travailler ensemble pour mesurer quelles seront les répercussions dans ces collectivités.
    Nous pourrions parler à n'en plus finir des erreurs commises, mais il faut en tirer la leçon. Que pouvons-nous faire? Compte tenu du travail que nous avons accompli dans les provinces, comment pouvons-nous rationaliser l'industrie? Nous avons travaillé main dans la main avec les transformateurs, les marchands, les pêcheurs. Que pouvons-nous faire pour les travailleurs âgés? Comment allons-nous moderniser nos usines pour préparer l'avenir?
    Un grand nombre d'usines ont relevé ce défi parce qu'elles se rendent compte que la main-d'oeuvre est vieillissante, que les choses évoluent, que les travailleurs d'usine ont complètement changé et qu'elles doivent se moderniser. Allez visiter Connors Bros. le mois prochain, par exemple. Si vous voulez voir une installation à la fine pointe de la technologie… C'est une usine de sardines qui existe depuis une centaine d'années et qui vient d'investir environ 18 millions de dollars pour se moderniser et se préparer pour une utilisation totale de ce poisson.
    Une des choses dont nous avons parlé depuis deux ans est la possibilité d'utiliser le poisson de la bouche à la queue. Comment utiliser chaque morceau de l'animal? Prenez ce que fait Connors. Cette entreprise a changé ses procédés; elle s'est mécanisée. Elle s'est mécanisée pour tirer plus d'argent du produit. Elle l'utilise entièrement. Elle fait un énorme travail.
    Le signal a-t-il retenti de nouveau?
(1405)
    J'ai une question à vous poser, monsieur le ministre, si vous le voulez bien. Nous avons beaucoup discuté ici aujourd'hui et nous avons beaucoup parlé des ententes de partage pour le crabe, de la flottille traditionnelle et de ceux que certains appellent les nouveaux arrivants, les nouveaux pêcheurs qui pêchent le crabe ici au Nouveau-Brunswick et dans le golfe.
    On reconnaît sans aucun doute le caractère cyclique du stock. Ma question porte sur le partage du stock ou du quota en tenant compte de son caractère cyclique. On a laissé entendre aujourd'hui que la flottille traditionnelle avait certains besoins, si vous voulez, et que ces besoins… on a présenté au comité des graphiques indiquant quels sont les besoins de la flottille traditionnelle pour assurer le maintien du secteur, pour ainsi dire.
    Le ministre de la province a pris position quand la ministre fédérale a décidé d'en faire un partage permanent… et je crois qu'on a laissé entendre aujourd'hui que lorsque le stock baisse en dessous d'un certain niveau, le TAC doit baisser au-dessous d'un certain niveau et qu'il faut appliquer le principe du dernier arrivé premier sorti.
    A l'époque, la province n'a pas hésité à prendre position à ce sujet. Quelle est votre position aujourd'hui?
(1410)
    Je me réjouis que vous en parliez. Nous ne sommes pas contre le partage. Si le quota était suffisant, cela ne poserait pas de problème. Nous n'aurions pas cette discussion. Le comité ne tiendrait pas cette réunion si nous avions un secteur viable, mais c'est quand il n'est pas viable qu'une crise se produit.
    Si vous parlez du partage, nous pouvons nous reporter à la Loi sur les pêches. Je répète la même chose depuis très longtemps. Il faut définir clairement les paramètres. Ils doivent être parfaitement clairs pour ce qui est des discussions à tenir et des mesures à prendre. La seule façon dont vous pouvez définir les paramètres concernant les ententes de partage, c'est en consultant directement le secteur, non seulement les pêcheurs, mais aussi les transformateurs. Quel sera l'impact pour eux? Qu'arrivera-t-il dans l'ensemble du secteur? En même temps, vous devez commencer à discuter de la viabilité. Comment préserver la viabilité des flottilles? Chaque flottille doit être viable pour continuer à prospérer. Il s'agit donc, encore une fois, d'envisager sérieusement une rationalisation.
    Par exemple, cela fait maintenant des années que nous travaillons avec la flotte du poisson de fond. Quand vous étiez ministre, sa viabilité était problématique. Nous sommes maintenant dans la même situation, mais nous devons songer sérieusement à la rationalisation de cette flottille.
    Je reviens constamment à la Loi sur les pêches. Chacun de vous autour de cette table a une responsabilité. Quand la Loi sur les pêches sera présentée à la Chambre des communes, il faudra que le comité permanent l'examine afin de la peaufiner, de travailler en collaboration avec les provinces. Comment améliorer cette loi pour qu'elle réponde le mieux à nos besoins dans l'ensemble du Canada? Nous avons eu une possibilité unique. Cette loi est aussi vieille que la Confédération. Elle est extrêmement lourde, car elle doit être écrite sur de l'ardoise.
    Nous devons mettre cette loi en place. Par conséquent, non seulement les députés ministériels, mais aussi ceux de l'opposition ont un rôle crucial à jouer, car chacun de mes collègues dans la région de l'Atlantique est pour. Nous sommes pour son adoption en première et deuxième lectures afin qu'elle puisse être renvoyée au comité pour qu'on puisse en discuter avec les provinces.
    Cela donnera-t-il des résultats parfaits pour tout le monde? Non, absolument pas, mais nous devons profiter de l'occasion pour faire de notre mieux et servir les intérêts de la région de l'Atlantique. Je pense non seulement à l'Atlantique, mais à l'ensemble du Canada et à ce que cette loi représente et signifie vraiment.
    Sur ce, Rodney, j'en reviens à la viabilité de la flottille. La flottille a le droit d'être viable et il va falloir discuter sérieusement des paramètres et de la façon de mettre en place les ententes de partage. Comme je l'ai dit, nous n'aurions pas cette discussion aujourd'hui si nous avions des quotas viables, si le secteur était viable.
    C'est l'argument qui était invoqué de mon temps — du moment que le quota est suffisant —, mais nous savons tous que c'est un stock cyclique. Du moment que le quota est suffisant, la question ne se pose pas. Je vous remercie de vos observations.
    Monsieur le ministre, au nom du Comité permanent des pêches et des océans, je tiens à vous remercier d'être venu aujourd'hui. Et je remercie également votre sous-ministre. C'est un plaisir de vous revoir, Jim. Merci d'être venus aujourd'hui comparaître devant notre comité et d'avoir pris le temps de répondre à toutes nos questions. Merci infiniment.
    La séance est levée.
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