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AANO Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord


NUMÉRO 006 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 18 octobre 2011

[Enregistrement électronique]

(1100)

[Traduction]

    La sixième séance du Comité permanent des affaires autochtones et du développement du Grand Nord est ouverte.
    Chers collègues, nous accueillons aujourd'hui des invités spéciaux, les représentants du Ralliement national des Métis, soit Clément Chartier, John Weinstein et Marc LeClair. Nous vous remercions tous les trois, mais je sais que vous avez aussi amené du renfort. Merci de prendre le temps de comparaître.
    Nous espérons recueillir le témoignage de différentes Premières nations et organisations autochtones au moment de nous attaquer au mandat du comité, qui est d'étudier les questions importantes pour les membres des diverses collectivités et de faire ce qu'il peut pour inciter le gouvernement à évoluer dans un certain sens. Le comité espère avoir quatre ans pour accomplir son travail, mais il ne faut pas perdre une seule journée. Nous vous remercions donc d'être parmi nous aujourd'hui.
    Monsieur Chartier, vous et moi avons pu nous rendre à Grande Prairie l'été dernier, et je tiens à vous remercier de comparaître officiellement et d'avoir décidé de tenir une assemblée à Grande Prairie. C'est un lieu qui m'est particulièrement cher, car c'est l'un des plus grands centres de ma circonscription. Il a été magnifique que votre organisation y passe un certain temps. Ce fut une expérience vraiment précieuse pour les habitants de Grande Prairie et des environs. Merci beaucoup.
    Nous allons vous céder la parole. Prenez tout le temps que vous voulez. Nous vous avons invités pour entendre votre point de vue. Dans les limites du temps disponible aujourd'hui, c'est-à-dire une heure, nous tenons à ce que vous preniez tout le temps dont vous avez besoin pour votre déclaration d'ouverture.
    Bonjour aux membres du comité. Merci de cette occasion de comparaître aujourd'hui.
    Pendant l'été, comme vous venez de l'entendre, j'ai eu le plaisir de rencontrer M. Warkentin à la 83e assemblée générale annuelle de la nation métisse de l'Alberta à Grande Prairie, en Alberta.
    À ce moment-là, Chris, si je peux me permettre cette familiarité, a dit aux délégués que le changement de nom du ministère n’était pas superficiel et qu’il était l’expression de l’intention du gouvernement de s’attaquer aux problèmes et de défendre les intérêts des Métis et des Inuits aussi bien que des Premières nations. Nous nous en sommes réjouis.
    J’ai été invité à comparaître devant le comité et à proposer des sujets qu'il pourrait étudier plus en profondeur dans les mois à venir. Dans cet esprit d’ouverture et de coopération, je suis ici aujourd’hui pour présenter certaines des priorités de la nation métisse que, à mon avis, il y aurait avantage à examiner.
    D’abord, permettez-moi de présenter brièvement le Ralliement national des Métis pour ceux qui ne le connaîtraient pas. Nous sommes les représentants des Métis dans la partie de nos terres ancestrales qui embrasse les provinces des Prairies et s’étend au Nord-Ouest de l’Ontario et au nord-est de la Colombie-Britannique. Nous représentons quelque 400 000 personnes, soit environ le tiers de la population autochtone du Canada. Je précise que c'est là une approximation. Nous n'avons pas un recensement exact même si, depuis 2004, nous essayons avec l'aide du gouvernement fédéral de faire inscrire nos gens.
    Nos cinq organisations provinciales affiliées ou organes dirigeants ont tous recours à des élections au scrutin secret dans toute la province pour choisir les chefs et adhèrent au même code de citoyenneté de la nation métisse pour inscrire leurs membres. Ils administrent et fournissent une variété de programmes et de services des gouvernements provincial et fédéral, généralement par l’entremise d’institutions affiliées indépendantes, dans des domaines comme le développement du marché de l’emploi, le financement d’entreprises et le développement économique, le logement, les services à l’enfance et à la famille, l’éducation et la culture.
    La première de nos priorités que nous vous demandons d’examiner est la question des droits fonciers des Métis découlant des dispositions non appliquées de deux lois fédérales qui ont reconnu ces droits: la Loi de 1870 sur le Manitoba et l’Acte des Terres fédérales, 1879.
(1105)
    Par suite de la vente de la Terre de Rupert au Canada par la Compagnie de la baie d’Hudson, en 1869, le premier gouvernement provisoire des Métis dirigé par Louis Riel a pris le contrôle de la colonie de la Rivière-Rouge et négocié l’admission du Manitoba comme province dans la Confédération aux termes de la Loi sur le Manitoba. Les Métis formaient près de 90 p. 100 des 11 000 habitants de la nouvelle province.
    L’article 31 de la Loi sur le Manitoba prévoyait la cession de 1,4 million d'acres de terres aux enfants des chefs des familles métisses en échange de l’extinction du titre ancestral sur les terres de la province. Un délai de 10 ans dans la répartition de ces terres et l’arrivée rapide d’un grand nombre de colons venant de l’Ontario ont entraîné l’exode de la majorité des Métis.
    La poursuite de l’action politique des Métis à l’extérieur de la nouvelle province a forcé le gouvernement du Canada à reconnaître les droits fonciers des Métis dans l’Acte des Terres fédérales de 1879. La non-application de cette loi par le gouvernement fédéral a mené à la formation du second gouvernement provisoire des Métis dans la vallée de la Saskatchewan, encore sous la direction de Riel.
    La réaction fédérale a été une invasion armée, menant à la rébellion du Nord-Ouest de 1885, à la défaite des Métis à la bataille de Batoche et à l’exécution de notre chef, Louis Riel, le 16 novembre 1885. Quant à la cause de la rébellion, soit le fait qu’Ottawa n’avait pas rempli ses promesses relatives aux terres, le gouvernement fédéral a établi une série de commissions de sang-mêlé chargée d’émettre des certificats de concession à la place de terres aux Métis du reste des Prairies, du Nord-Est de la Colombie-Britannique et du district de Mackenzie des Territoires du Nord-Ouest, à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle. Le processus a été si frauduleux que la Cour suprême du Canada a écrit en 2003 que « la spéculation et la dévaluation associées aux certificats de concession représentent un malheureux chapitre de l’histoire de notre pays ».
    Lorsque le gouvernement fédéral a cédé sa responsabilité des terres publiques et des ressources naturelles aux provinces des Prairies, en 1930, sa position était que les droits fonciers des Métis avaient été éteints par la loi et que les Métis eux-mêmes étaient une responsabilité provinciale. Des associations provinciales des Métis ont été créées dans les Prairies durant la crise des années 1930 pour continuer la lutte visant à faire reconnaître leurs droits fonciers. Leur action a poussé l’Alberta à réserver un territoire de 1,3 million d’acres aux Métis au début des années 1940 dans le Nord de l’Alberta. À ce jour, c’est le seul territoire appartenant en propre aux Métis au Canada.
    En 1982, les Métis ont été reconnus dans la Constitution comme l’un des trois peuples autochtones du Canada, mais le gouvernement fédéral a continué d’affirmer que leurs droits fonciers avaient été éteints par la loi.
    Le Ralliement national des Métis a revendiqué un territoire et l’autonomie gouvernementale aux quatre conférences des premiers ministres provinciaux sur les droits des peuples autochtones tenues dans les années 1980, mais ces conférences ont abouti à une impasse.
    Peu de temps après, nous sommes venus bien près de briser l’impasse lorsque, en octobre 1991, le premier ministre Mulroney a reconnu la nation métisse et nous a invités à participer à la « ronde Canada » des consultations constitutionnelles.
    Le 10 mars 1992, le Parlement a adopté à l’unanimité une résolution reconnaissant le rôle spécial et historique joué par Louis Riel à titre de fondateur du Manitoba et défendant les droits constitutionnels des Métis.
    L’Accord de Charlottetown et un document l’accompagnant, l’Accord relatif à la nation métisse, ont semblé constituer une importante percée. L’Accord de Charlottetown prévoyait la modification du paragraphe 91(24) de la Loi constitutionnelle de 1867, rendant explicite la compétence fédérale en ce qui concerne tous les peuples autochtones. L’Accord relatif à la nation métisse prévoyait que le gouvernement fédéral et les cinq provinces le plus à l’ouest devaient négocier, avec le Ralliement national des Métis et leurs organes dirigeants, la cession d’un territoire et l’octroi de l’autonomie gouvernementale aux Métis.
    Le rejet de l’Accord de Charlottetown au référendum national d’octobre 1992 a tué nos espoirs d’un règlement négocié sur nos droits et nous a forcés à recourir aux tribunaux. Nous avons livré une série de batailles judiciaires qui ont eu pour point culminant l’arrêt Powley de la Cour suprême du Canada en 2003, dans lequel la cour reconnaît les Métis comme un peuple titulaire de droits à part entière possédant des droits de récolte protégés par la Constitution, c'est-à-dire des droits de chasse et de pêche.
(1110)
    La cour a également établi que, pour déterminer l’appartenance à un groupe métis titulaire de droits, il est nécessaire que l’identité puisse se vérifier objectivement. Ce critère coïncide avec notre propre critère de citoyenneté métisse. L’auto-identification, les liens ancestraux et l’acceptation par la communauté métisse sont les facteurs qui établissent l’identité métisse.
    Le contexte que je viens d’exposer sur les droits historiques et constitutionnels du peuple métis incitera bientôt le gouvernement fédéral à se pencher sur la question. Une bataille menée depuis 30 ans devant les tribunaux par un de nos organes dirigeants, la Fédération des Métis du Manitoba, sur la question non réglée de la cession de terres aux Métis promise dans la Loi sur le Manitoba se rendra en Cour suprême en décembre. Le Ralliement national des Métis est un intervenant dans cette affaire, qui modifiera vraisemblablement la façon dont le gouvernement fédéral considère les droits des Métis, la Cour d’appel du Manitoba ayant déjà soutenu certains principes qui devraient avoir d’importantes conséquences.
    Je tiens également à signaler que le Ralliement national des Métis et notre organe dirigeant en Saskatchewan, Métis Nation-Saskatchewan, ont présenté une demande introductive dans le Nord-Ouest de la Saskatchewan en 1994 au sujet de la promesse de concession de terres faite dans l’Acte des Terres fédérales. Cette affaire ouvrira la porte à des revendications et à des litiges semblables dans notre patrie ancestrale de l’Ouest du Canada où ont été délivrés des certificats de concession.
    Un certain nombre de questions importantes sur lesquelles le comité pourrait se pencher découlent du litige. En premier lieu, mentionnons le maintien de l’exclusion des Métis du processus de revendications territoriales fédéral et du financement accordé pour la présentation des revendications. Signalons ensuite l’effet néfaste de la position du gouvernement fédéral concernant les droits fonciers des Métis sur l’obligation de consultation et d’accommodement envers les communautés métisses.
    De façon générale, l’industrie ne tient guère compte ou ne tient pas compte du tout de nos intérêts dans la planification de grands projets sur nos terres ancestrales. Je compte donc que le comité examinera ces questions et, au surplus, qu’il le fera d’une manière non partisane. La réalité, c’est que, depuis la conclusion de la Convention sur le transfert des ressources naturelles de 1930, la position du gouvernement fédéral a toujours été la même, quel que soit le parti au pouvoir.
    Une deuxième priorité sur laquelle le comité pourrait se pencher concerne le maintien du rejet de la notion voulant que le gouvernement fédéral ait compétence sur les questions intéressant les Métis, une position également adoptée par les gouvernements fédéraux successifs, quelle que soit leur affiliation politique. Cette position se traduit par l’exclusion des Métis des prestations fédérales en matière d’éducation et de santé pour les Autochtones. Elle se répercute aussi sur le refus du gouvernement fédéral, jusqu’à maintenant, d’assumer la responsabilité de l’indemnisation de tous les Métis qui ont été victimes du réseau des pensionnats indiens, et pas seulement du petit nombre de Métis qui ont fréquenté les pensionnats indiens, et sur le refus, jusqu'à aujourd'hui, de s'occuper des anciens combattants métis de la Seconde Guerre mondiale.
    Ayant moi-même fréquenté le pensionnat indien métis de triste mémoire de l’Île-à-la-Crosse, en Saskatchewan, je puis témoigner des horreurs de ce système ainsi que de l’angoisse des centaines de survivants, de ceux qui sont déjà décédés et de ceux dont la santé est souvent mauvaise, qui n’ont toujours pas été indemnisés parce que les excuses du premier ministre et la Commission de vérité et de réconciliation ne s’appliquent qu’aux écoles faisant partie du réseau de pensionnats indiens.
     Par mon insistance sur les questions juridiques et morales qui sont depuis longtemps en attente de règlement, je ne veux pas donner l’impression que nos relations avec le gouvernement actuel sont toujours conflictuelles. Ce n’est certainement pas le cas.
(1115)
    En fait, le Ralliement national des Métis et le gouvernement du Canada se sont entendus sur le Protocole de la nation métisse en 2008, dont j'ai ici des exemplaires. Malheureusement, il n'a pas encore été traduit en français, mais cela se fera bientôt. Le texte est disponible, si vous voulez l'étudier.
    Jusqu’à maintenant, ce protocole a fortement mis l’accent sur le développement économique. Notre travail sur le développement économique, d’abord avec le ministre Strahl et, maintenant, avec le ministre Duncan, a eu des résultats pratiques notables et a profité du succès de nos institutions financières et du marché du travail des Métis durant les dernières décennies.
     Les ministres fédéraux et moi avons en outre pu amener les ministres des cinq provinces le plus à l’ouest et leurs collaborateurs à prendre part à l’élaboration d’une stratégie de promotion d’une participation toujours plus grande et efficace des Métis au développement économique. Cette collaboration s’est traduite par une série d’investissements fédéraux et provinciaux dans les institutions financières des Métis, qui avancent des fonds aux entrepreneurs métis et achètent des actions de leurs sociétés.
    Nous avons également tiré un grand profit du vif intérêt que le premier ministre a porté à nos enjeux, le développement économique notamment, durant les trois réunions qu’il a eues avec moi et d’autres dirigeants autochtones nationaux ces trois dernières années.
    Une troisième priorité de la nation métisse que le comité pourrait examiner concerne notre initiative actuelle auprès du gouvernement fédéral visant à élargir les relations entre le Canada et la nation métisse. Peu de temps après les dernières élections fédérales, j’ai proposé au premier ministre que nous nous servions du Protocole de la nation métisse pour conclure des accords sur la gouvernance et le développement économique de manière à accélérer les progrès déjà réalisés. La proposition se fonde sur l’intérêt mutuel du gouvernement fédéral et du Ralliement national des Métis d'alléger les lourdeurs administratives en ce qui a trait aux affaires des Métis et de renforcer la capacité de gouvernance de la nation métisse en matière de gestion et de prestation de services importants soutenant le développement économique.
    La proposition repose aussi sur les efforts de la nation métisse visant à renforcer notre gouvernance au niveau national à l’aide d’une nouvelle constitution des Métis, un processus auquel le gouvernement fédéral a souscrit. Nous espérons que les discussions qui s’amorceront bientôt avec le ministre Duncan sur nos propositions se traduiront par l’octroi de nouveaux pouvoirs et des arrangements financiers plus fermes. De plus, nous espérons que ces nouveaux pouvoirs, conjugués à notre reddition de comptes démocratique et à nos institutions de citoyenneté existantes, serviront de fondements à une nouvelle constitution de la nation métisse qui pourrait être reconnue par une loi fédérale comme la source de l’autonomie gouvernementale de la nation métisse. Le comité pourra peut-être nous faire part d’un point de vue intéressant sur la façon dont cette loi sur les relations entre le Canada et la nation métisse pourrait être rédigée.
    Monsieur le président, nous attendons vos questions et vos observations. Merci.
(1120)
    Merci, président Chartier. Nous vous sommes reconnaissants de votre témoignage.
    Mesdames et messieurs les membres du comité, nous n'aurons probablement le temps que pour un premier tour de questions. Je vais faire preuve de souplesse pour la durée des temps de parole, car nous voulons que toutes les questions reçoivent une réponse, mais nous ne pourrons probablement pas aller bien au-delà des sept minutes.
    Madame Duncan, vous avez sept minutes.
    Merci beaucoup de votre exposé et de votre présence. Il est très important d'obtenir votre opinion et vos recommandations sur les questions que le comité devrait examiner.
    Je crois comprendre que la Métis Nation-Saskatchewan et la nation métisse du Manitoba se sont adressées aux tribunaux, et que les deux parties cherchent à avoir des résultats semblables à ceux obtenus en Alberta. Je voudrais un mot d'explication à ce sujet.
    À propos de l'accord que vous avez négocié en 1992 dans le cadre de l'Accord de Charlottetown, je voudrais savoir si vous présumez que le protocole prime. L'accord précisait à l'article 11 que le Métis Settlements General Council de l'Alberta avait le droit exclusif de négocier, de conclure et de mettre en oeuvre des accords intergouvernementaux. Je me demande si vous vous exprimez ici au nom du conseil général de l'Alberta également. Devrions-nous lui demander aussi son avis, par exemple sur la façon dont les choses se sont passées dans le cadre de son règlement?
    Est-ce que, dans les instances des nations métisses de la Saskatchewan et du Manitoba, on suit à peu près la même démarche qui a permis d'arriver à un règlement en Alberta? Pourriez-vous nous donner une idée? Sauf erreur, il y a maintenant des relations avec le gouvernement provincial, dont les lois s'appliquent aux terres visées par le règlement, bien qu'il reste des questions en litige.
    J'essaie simplement d'avoir une idée générale. Vous avez dit très clairement dans votre mémoire que vous réclamez un accès égal aux processus de revendication territoriale et d'autonomie gouvernementale, et l'accès aux services d'éducation, aux services médicaux, etc. Comment cela cadre-t-il avec l'accord conclu en Alberta? Que demande-t-on dans ces instances judiciaires?
    Merci.
    Disons d'abord, mais c'est peut-être juste une question de mots, qu'il existe une seule nation métisse. Certains parlent de la nation métisse de l'Ontario ou de l'Alberta, mais il y a une seule nation métisse.
    Quant aux résultats obtenus en Alberta dans les années 1930, après que le gouvernement fédéral eut déclaré les droits des Métis éteints, des Métis ont intenté des poursuites pour fraude à propos de leur droit particulier. Le gouvernement albertain a fini par créer une commission, qui a recommandé essentiellement que des terres soient réservées aux Métis pour qu'ils conservent leur mode de vie dans les forêts et au bord des lacs. Cela a été fait non sur la base de droits juridiques, mais au nom d'intérêts socioéconomiques. C'est le gouvernement provincial qui a pris cette initiative.
    Pour ce qui est des deux causes en instance, celle du Manitoba repose strictement sur les articles 31 et 32 de la Loi sur le Manitoba, qui prévoyait des terres pour les Métis. C'est la question juridique qui se pose: cette obligation a-t-elle été respectée? Quant à la Saskatchewan, nous disons que les certificats de concession ne pouvaient éteindre les droits ancestraux des Métis et que, même si cela avait été possible, ils ne l'ont pas fait à cause des fraudes commises. Voilà la thèse juridique.
    Depuis 1983, nous, et particulièrement le Ralliement national des Métis, essayons de régler le problème au plan politique. Nous avons demandé la reconnaissance du droit à l'autodétermination et à l'autonomie gouvernementale. C'est ce que nous avons fait tout du long. Devant l'échec de 1992, nous avons décidé qu'il fallait recourir aux tribunaux parce qu'il n'y avait aucune autre possibilité.
    Le paragraphe 91(24) dispose que le gouvernement fédéral a compétence à l'égard des Indiens et des terres qui leur sont réservées. En 1939, la Cour suprême, se prononçant sur un renvoi, a dit que les Inuits étaient également visés. Nous essayons d'obtenir un renvoi depuis 40 ans, nous aussi. Nous espérons que la question se réglera sous peu. Une cause du Congrès des peuples autochtones sur ce même sujet est en instance. La question sera peut-être réglée.
    En raison de la position du gouvernement fédéral voulant que nos droits aient été éteints — il prétend n'avoir aucune responsabilité ni compétence à l'égard des Métis, puisque le terme « Indiens » veut dire Indiens aux termes de la Loi sur les Indiens et également Inuits, à cause de la Cour suprême du Canada —, la question reste en suspens.
    Dans l'accord de 1992, nous avons négocié un accommodement avec Joe Clark, alors ministre, le premier ministre et d'autres pour qu'une modification explicite dise que le paragraphe 91(24) s'applique à tous les peuples autochtones et pas seulement aux Métis, car les Inuits voulaient aussi des précisions. Tel était l'accord. Mais à cause du partage des compétences fédérales et provinciales et du droit constitutionnel, par exemple, pour calmer les craintes du gouvernement albertain et des membres des territoires métis, nous avons prévu dans la Constitution que cela ne toucherait pas la compétence provinciale permettant de mettre des terres de côté. Cette disposition a donc été ajoutée à cette fin.
    En fait, la grande question que vous voudrez peut-être étudier et dont vous voudrez parler aux Métis qui ont des territoires, c'est que le gouvernement albertain et ces Métis, avec l'appui du Ralliement national des Métis, sont d'accord pour modifier la Constitution afin de constitutionnaliser ces territoires en Alberta. Il suffit de l'accord du gouvernement fédéral et de l'Alberta, puisque la modification ne touche que cette province. Le mode de révision est là, mais, pour quelque raison, le Canada n'a pas encore donné son accord. Le comité pourrait étudier la question.
    Nous estimons que les gouvernements provinciaux ont un rôle à jouer, mais nous estimons que le gouvernement fédéral a compétence pour traiter avec tous les peuples autochtones. Nous soutenons que, dans la Constitution de 1867, le terme « Indien » désigne les peuples autochtones: Premières nations, Métis et Inuits. Mais nous ne cherchons pas à être considérés comme des « Indiens » au sens de la Loi sur les Indiens, pas plus que les Inuits ne le souhaitent. Il existe des distinctions entre les définitions législatives et la définition constitutionnelle du terme « Indien ».
(1125)
    S'il me reste du temps, je vais donner à mes collègues la possibilité...
    Ça va, mais je vous ai donné un supplément de temps, comme je l'ai promis.
    Monsieur Wilks, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie M. Chartier et ceux qui l'accompagnent d'être parmi nous aujourd'hui.
    J'ai quelques questions à poser, monsieur le président, mais si vous n'avez pas d'objections, je vais les poser séparément.
    Vous avez dit combien de personnes le Ralliement national des Métis regroupe. Cela englobe-t-il les Métis au nord du 60e parallèle qui habitent au Québec et dans l'Est du Canada?
    Voulez-vous que je pose d'abord mes cinq questions, monsieur Chartier?
(1130)
    Oui.
    D'accord.
    Deuxièmement, parmi ceux que vous représentez, combien sont des membres enregistrés des cinq organisations provinciales affiliées?
    Troisièmement, pourriez-vous préciser ce que vous envisagez pour les provinces et les relations que cela peut supposer?
    Quatrièmement, vous avez dit que vous souhaitez que la constitution proposée pour la nation métisse soit reconnue dans la loi fédérale. Qu'est-ce que cette loi comprendrait d'autre?
    Enfin, monsieur le président, quel impact la loi fédérale proposée aurait-elle sur votre structure actuelle de gouvernance avec les organisations provinciales affiliées?
    Merci, monsieur le président.
    D'abord, il s'agit de la nation métisse historique, un peuple distinct qui a affirmé sa présence surtout dans l'Ouest du Canada, mais aussi en Ontario, avec une histoire et une langue communes, le michif, et un drapeau, avec tous les éléments de ce qui fait un peuple. Il ne s'agit donc pas de gens aux origines mixtes, mais d'un peuple.
    Nous sommes également présents dans les Territoires du Nord-Ouest. Pour le moment, les Métis de cette région ne sont pas rattachés au Ralliement national des Métis. C'est le choix qu'ils ont fait.
    Il y a des critères à respecter pour adhérer au Ralliement national des Métis. Les élections se font par scrutin, c'est une voix par personne, et le scrutin est réservé aux Métis. En 1994, la nation métisse des Territoires du Nord-Ouest a décidé de conserver ses modalités électorales et dit que ses membres resteraient des Indiens non inscrits ou des membres au sens du projet de loi C-31. Je ne sais pas trop où ils en sont pour l'instant. Ils font partie de notre nation, mais non de nos mécanismes de gouvernance, ni de notre infrastructure.
    Vous parlez des Métis de l'Est du Canada. Je ne connais pas de Métis dans cette région. Il y a bien des gens aux origines mixtes, et je sais qu'ils se qualifient de métis, mais ils ne font pas partie de la patrie historique de la nation métisse. Ils ne seraient donc pas membres de cette nation. Nous n'allons pourtant pas prétendre qu'ils ne peuvent pas s'identifier ou se décrire comme ils le veulent. Simplement, ils ne font pas partie de notre nation. Comme les Pieds-Noirs ne sont pas des Cris ni des Haudenosaunis. Nous sommes un peuple distinct.
    Combien de nos gens sont inscrits? Je n'ai pas les chiffres, mais nous avons entrepris une démarche. En 2002, nous avons adopté des critères d'appartenance à notre nation. En 2003, la Cour suprême du Canada a pour l'essentiel avalisé notre position. Depuis 2004, le gouvernement fédéral nous a accordé des fonds pour établir le registre de notre peuple, mais ce travail n'est pas encore terminé.
    Par exemple, nous avions quelque 40 000 personnes qui s'étaient inscrites auparavant. Maintenant, elles suivent tout le processus. Tous doivent refaire leur demande parce que certains ne satisfont peut-être pas aux critères. Ils ont peut-être des origines mixtes sans être les descendants de la nation métisse historique.
    La Cour suprême du Canada a été très claire à ce sujet. Cette année, dans l'arrêt Cunningham qui porte sur les établissements métis, elle a statué que des terres ont été mises de côté pour les Métis afin de... Les terres sont importantes pour l'identité et la culture des Métis. Elle a affirmé la légitimité de l'exclusion de ceux qui ont pris le statut d'Indien inscrit aux termes du projet de loi C-31. En somme, nous avons obtenu confirmation du plus haut tribunal, et la reconnaissance de notre existence comme peuple distinct.
    Le processus est en marche, et il nous faudra plusieurs années et peut-être plus pour connaître le nombre exact de ceux que nous représentons. L'adhésion donne le droit de voter et de participer à nos processus démocratiques, mais elle n'apporte aucun avantage concret comme le fait d'être un Indien inscrit qui donne droit aux services de santé non assurés, par exemple. Je suis sûr que si nous avions ces avantages, un plus grand nombre de personnes s'inscriraient probablement, mais nous espérons qu'elles s'inscrivent parce qu'elles veulent cette affiliation. Mais ce n'est pas une exigence. Ceux qui ne le font pas demeurent des Métis et nous les représentons. Nous ne pouvons vous donner un chiffre exact. Nous pourrions toujours vous dire où nous en sommes dans la réinscription de nos membres, mais je ne pourrais pas vous donner de chiffres aujourd'hui.
    Quant aux relations avec les provinces, nous avons un protocole. Aux réunions du Conseil de la fédération, j'ai demandé aux cinq premiers ministres, de l'Ontario jusqu'à la côte Ouest, si, à supposer que le gouvernement fédéral les invite, ils accepteraient cette invitation. Ils ont répondu oui: pour discuter des problèmes. À partir de là, en septembre, un ou deux mois plus tard, le ministre Strahl et moi avons conclu ce protocole de relations bilatérales. Mais il y a aussi des relations multilatérales qui sont permises: nous inviterions les provinces à discuter avec nous d'un certain nombre de questions, comme la santé, l'éducation et le développement économique.
(1135)
    Jusqu'à maintenant, les cinq gouvernements provinciaux ont discuté avec nous de développement économique. Nous avons eu deux symposiums sur le développement économique des Métis. Lors du dernier, le ministre des Affaires autochtones et du Développement du Nord canadien, qui est également l'interlocuteur fédéral pour les Métis, a discuté avec les cinq ministres chargés des affaires autochtones et avec nos dirigeants. Cela s'est passé en décembre, et nous sommes convenus que nos hauts fonctionnaires continueraient de se rencontrer. Et en 2013, nous reviendrons aux principes avec une stratégie nationale de développement économique pour les Métis. Cette démarche est donc engagée.
    J'ai écrit à la ministre Aglukkaq et dit au premier ministre, en février, je crois, que nous souhaitions entamer semblable démarche pour la santé. Nous avons demandé à la ministre fédérale d'inviter ses homologues des provinces à discuter avec nous. Nous estimons que les provinces ont un grand rôle à jouer à cet égard. Nous ne disons pas que le gouvernement fédéral doit se charger de tout.
    Quant à la législation et à l'adoption de notre constitution, le financement de notre dispositif de gouvernance est un gros problème. Nous voulons évoluer vers un financement global. Pour l'heure, nous avons de 30 à 40 accords à des moments différents portant sur de faibles montants et nous passons le plus clair de notre temps à préparer des rapports et à examiner ces choses-là. Les lignes directrices du Conseil du Trésor permettent le financement global depuis environ quatre ans. Nous avons donc des échanges avec l'interlocuteur fédéral pour examiner ces questions.
    Quel impact la constitution aurait-elle sur nos affiliés provinciaux? Essentiellement, le Ralliement national des Métis comprend les cinq organisations provinciales affiliées, que nous appelons les organes dirigeants. Dans nos discussions sur notre propre constitution, nous examinons les leurs pour voir comment elles peuvent s'harmoniser. Au bout du compte, nous devrions avoir au moins un partage des pouvoirs et les compétences seraient clairement définies, comme dans la Loi constitutionnelle de 1867, qui prévoit un partage des pouvoirs.
    Les organisations provinciales sont d'un grand soutien. Nous sommes engagés dans un processus de deux ans et demi, et nous espérons adopter une constitution à l'interne au plus tard en décembre 2013 et passer à l'étape suivante. Le gouvernement fédéral finance ce processus.
    Merci.
    Madame Bennett, vous avez sept minutes ou plus.
    Merci d'avoir accepté de comparaître.
    Vous espérez désormais des approches nouvelles non seulement en matière de développement économique, mais aussi dans les domaines de la santé et de l'éducation. Pourriez-vous me dire où en est votre peuple, en ce moment, sur les plans de la santé et de l'éducation?
    Je ne peux pas aller au-delà des généralités. Pour ce qui est de la santé, la Fédération des Métis du Manitoba a terminé l'an dernier une étude sur le diabète. Elle a été remise au Cabinet du Premier ministre et à la ministre Aglukkaq. L'étude porte sur le Manitoba, et elle a utilisé le système du gouvernement pour suivre les visites chez le médecin par les patients qui souhaitent participer à l'étude. Celle-ci a conclu que la population métisse était celle qui était la plus touchée par le diabète dans la province.
    Le Ralliement national des Métis n'a pas la capacité de s'occuper de la santé. Nous avons maintenant quelqu'un qui travaille dans ce dossier, mais nous n'avons pas vraiment la capacité de nous en occuper. Nous savons que beaucoup d'aînés à revenu fixe doivent choisir entre acheter de quoi manger ou payer leurs médicaments d'ordonnance ou encore tenter de concilier les deux. Il est également difficile, surtout dans les régions éloignées, d'aller à l'hôpital. Je suis de Buffalo Narrows. Les gens de cette localité qui veulent aller chez le dentiste ou le médecin, notamment ophtalmologiste, ou qui doivent passer un bilan de santé doivent faire cinq heures de route pour se rendre à Saskatoon. Et si quelqu'un de la famille ne peut pas les emmener, il leur est impossible d'y aller. Les frais sont pris en charge par les services sociaux dans le cas des assistés sociaux de moins de 65 ans, mais, à 65 ans, on perd les prestations des services sociaux provinciaux. C'est donc très difficile.
    En éducation, nous avons des actifs. Auparavant, il y avait RHDCC, et il y a eu les ententes sur le développement des ressources humaines métisses, et nous avons pu parvenir avec le gouvernement fédéral à une entente nous permettant de traiter avec les universités pour constituer des fonds de dotation. Il est possible de donner des bourses modestes à des Métis. Elles ne sont pas importantes, mais elles sont utiles. Nos étudiants doivent compter surtout sur des prêts et quelques bourses modestes.
    Nous commençons à avoir des contacts avec le CMEC. Nous chercherons les meilleurs moyens de faire valoir nos positions.
    Je ne peux rien dire de plus.
    Marc a étudié certaines de ces questions.
(1140)
    En général, et je ne veux pas être négatif, la population métisse est plus instruite, a des revenus plus élevés et a de meilleurs taux de participation à la population active, si on la compare aux Premières nations, principalement grâce à la géographie. Mais elle est loin d'atteindre les normes canadiennes. Elle se situe entre les deux.
    Nous essayons d'avoir l'attitude la plus constructive possible. Au lieu de déplorer notre situation, nous tentons de faire voir les avantages qu'il y a à investir dans notre population. Nous avons maintenant environ 50 millions de dollars pour la formation et il nous en faudrait probablement encore autant. David Chartrand aime à dire que nous sommes essentiellement les travailleurs pauvres du Canada, pour la plupart. Cela nous laisse juste au-dessus du seuil de faible revenu, etc. Il y a donc des conséquences graves pour la possibilité de faire des études postsecondaires. Dans ce domaine, nous avons dû trouver un moyen de consacrer à l'éducation une partie de l'argent prévu pour la formation.
    Nous aimons aussi rappeler que nous sommes des contribuables. D'après la dernière estimation de notre population, nous représentons le tiers de toute la population active autochtone. Un tiers de ceux qui travaillent sont des Métis. Cela représente environ un milliard de dollars. Nous payons le transport, le concierge, les salaires. Pendant le trajet, je disais à Clément que nous venions ici depuis 30 ans. Nous avons eu six premiers ministres et je ne sais plus combien de ministres des Affaires indiennes. Nous avons comparu devant une foule de comités. À un moment donné, nous voudrions avoir des échanges plus longs sur une grande question, celle du territoire.
    Nous nous sommes adressés à la Cour suprême pour faire reconnaître le droit au français au Manitoba. Nous avons négocié ce droit. Nous avons fait reconnaître le droit aux écoles confessionnelles. Maintenant, pour la première fois, le 13 décembre, nous allons faire valoir nos droits fonciers. Cela aura des conséquences. Nous voudrions que vous examiniez non seulement cette question, mais aussi l'Acte des terres fédérales. Le même processus a été utilisé. Cela vaut pour tout le Nord-Ouest.
    Nous estimons que cela vaut l'effort. Nous serons heureux de discuter avec vous de la question des terres. C'est pour cela que nous sommes ici.
    Il existe un lien entre l'état de santé et une identité culturelle personnelle bien assurée. Nous avons de très solides preuves: lorsque les revendications territoriales et les questions de gouvernance se règlent, la santé s'améliore. Même au sujet de l'étude manitobaine sur le diabète, comment le gouvernement du Canada peut-il apporter son aide? Existe-t-il une stratégie distincte de lutte contre le diabète chez les Métis? Quelle pourrait être la solution, maintenant qu'il est acquis que le diabète est un problème beaucoup plus grave chez les Métis que dans toute autre population canadienne?
    Le gouvernement fédéral ne suffira pas. Il nous faut mobiliser les gouvernements provinciaux également. Ce que nous avons proposé au premier ministre et à la ministre Aglukkaq serait un pas dans la bonne direction pour que les sept administrations se réunissent pour discuter de la question et des mesures à prendre.
    Chaque année, les provinces reçoivent d'importants paiements de transfert pour assurer des soins de santé et d'autres services à leurs administrés. Si nous étions plus astucieux et trouvions le moyen de transférer une partie de cet argent directement pour les soins offerts aux Métis, ce serait très utile. Mais il faudrait faire beaucoup de recherche pour en arriver à une solution comme celle-là.
    Chose certaine, les fonds sont suffisants. Nous devons seulement en réorienter une partie; mais il faut que les responsables fédéraux, provinciaux et métis collaborent pour trouver les meilleures modalités.
(1145)
    Merci beaucoup.
    Ce sera maintenant M. Rickford, qui aura sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci aux témoins.
    Clément, merci d'avoir dit que le Nord-Ouest de l'Ontario était une partie importante de la nation métisse.
    Merci à vous, John, de m'avoir fait parvenir ce livre. J'ai essayé de commencer à le lire il y a quelques jours, le soir, et je me suis aperçu que c'était un livre qui se dévore et que ce n'était pas une lecture à faire tard le soir. J'ai essayé d'en lire un peu avant notre rencontre, mais je ne l'ai reçu qu'il y a quelques jours. Merci.
    Marc, vous avez soulevé un point intéressant, tout comme Clément, dans votre intervention au sujet des terres. Je veux simplement signaler ici qu'une des questions que le comité s'apprête à étudier est celle de la modernisation de l'utilisation des terres et du développement économique durable.
    Hélas, je ne peux pas, vous le comprendrez, parler d'une affaire en instance, mais je tiens à vous dire clairement et surtout à vous, Marc, à propos de ce que vous avez dit... Je crois que la question des terres est à l'étude et le sera jusqu'à ce que vienne une solution. Cette étude prendra un certain temps. J'espère que nous remettrons la question sur le tapis et pourrons l'étudier quelque peu. Le moment n'est probablement pas bien choisi maintenant. Je remarque que vous avez une assise foncière de 1,3 million d'acres en Alberta. Peut-être verrons-nous cette question au même moment.
    Nous songions à cette constellation d'instruments juridiques et, dans le cas de la nation métisse, politiques qui s'appuient sur le développement économique durable.
    Ce que vous nous avez dit aujourd'hui nous incitera à examiner plus sérieusement une composante qui comprend les instruments politiques. Je vais aborder brièvement la question ici.
    Clément, pour en revenir au protocole de la nation métisse de 2008, je remarque que vous avez eu des échanges avec le premier ministre sur des choses comme le financement du Fonds de développement Clarence Campeau, qui est venu du gouvernement fédéral, et de l'organisme métis de développement économique. Je présume que cela est indissociable de l'important travail que vous avez accompli, comme vous l'avez dit, avec le ministre Strahl lorsqu'il était chargé des Affaires indiennes, puisque c'est le vocable qu'on employait alors. Et puis, bien sûr, il y a eu le ministre Duncan.
    Je m'arrête là pour vous permettre d'expliquer ces deux organisations ou fonds. Dites un mot des importantes dimensions du développement économique et expliquez notamment comment vous avez réussi très bien sur le plan de la participation à la population active dans les institutions financières.
    À vous, Clément.
    Je vais répondre brièvement, après quoi John ou Marc parleront des fonds.
    Je tiens à préciser, à propos des terres, que nous sommes exclus de tous les processus du gouvernement fédéral et donc...
    Je sais. Je ne peux pas en parler. À la différence de mes collègues, je fais partie du gouvernement. Ce n'est pas un sujet qui...
    Non, je sais. Je veux simplement faire savoir aux autres que c'est une question à laquelle nous voulons travailler.
    Quant aux fonds, je crois que c'est le résultat du processus de développement économique et des symposiums des Métis, ainsi que de l'engagement du gouvernement fédéral et de la relation que nous avons établie avec lui.
    Diriez-vous que c'est largement positif? Il semble que cela ait donné lieu à de bonnes initiatives.
    Je crois que le protocole est bon, et le premier ministre l'a expressément appuyé. Je pense que...
    Marc, pourriez-vous donner plus d'explications?
    Le protocole nous a donné un cadre. Dans le domaine du développement économique, lorsque nous avons des communications avec les provinces, nous essayons toujours de les encourager à faire quelque chose. Grâce au leadership fédéral, qu'il s'agisse des projets d'exploitation des ressources et de développement énergétique, d'un programme de mise en valeur des ressources ou du fonds de prêts consortiaux, nous avons pu mettre en place des institutions dont nous avions grand besoin. Parallèlement, en réunissant tout le monde, nous avons amené l'Ontario à consacrer 30 millions de dollars au développement économique des Métis de l'Ontario. Nous voudrions faire la même chose en Colombie-Britannique.
    Nous sommes des joueurs. Nous aimons mobiliser, nous aimons faire participer les provinces. Nous y allons carrément. Nous les réunissons et nous essayons d'aiguiller vers nos institutions les ressources que nous donnons par nos impôts, tout comme vous contrôlez le tiroir-caisse du gouvernement fédéral, n'est-ce pas? Vous réaménagez les choses. Nous aimons venir ici et nous présenter comme une possibilité d'investissement que le Canada doit saisir.
    Comme Clément l'a dit, nous sommes 400 000. Nous sommes la plus grande nation autochtone en Amérique du Nord. Il n'y a pas de nation indigène plus grande que la nôtre.
(1150)
    Je me permets de vous interrompre. Il semble qu'il y ait un excellent leadership du côté de votre organisation et du gouvernement actuel pour ces initiatives clés, mais on dirait que, du côté des provinces, il y a des discordances. Tout à l'heure, mon collègue essayait d'en arriver à quelque chose de plus étoffé à propos de certaines de ces questions. J'en prends note.
    Clément, dans votre intervention, vous avez dit qu'il y avait eu « des résultats pratiques notables » et qu'on avait « profité du succès de nos institutions financières et du marché du travail des Métis durant les dernières décennies. » Pourriez-vous décrire très brièvement certains de ces résultats pratiques? J'aimerais connaître la taille de la nation, par exemple. Essayons de creuser un peu plus.
    Des précisions? Il y a le fonds pour l'entrepreneuriat métis, une idée que nous avons soumise au gouvernement fédéral en mobilisant nos trois sociétés métisses de financement au Manitoba, en Saskatchewan et en Alberta. Il n'y en a pas encore en Colombie-Britannique ni en Ontario. Mais en Ontario, comme Mark l'a dit, le gouvernement a mis de côté un fonds pour le développement économique. Nous évoluons donc dans cette direction.
    Le fonds pour l'entrepreneuriat métis consent à des petites entreprises des prêts consortiaux de plus de 250 000 $, ce qui était le plafond précédent.
    Le capital de risque.
    Oui. Nous pouvons maintenant aller jusqu'à 1 million de dollars, ce qui est très appréciable. Ce fonds appartient à nos sociétés de financement métisses, qui l'exploitent. Au départ, le gouvernement fédéral a injecté 3 millions de dollars et nous envisageons un potentiel de 14 millions de dollars sur cinq ans, selon la demande et le rendement, bien entendu. C'est important et c'est quelque chose de neuf pour nous.
    Les projets d'exploitation des ressources et de développement énergétique dont Marc a parlé...
    Les organisations réalisent-elles elles-mêmes les évaluations du rendement?
    Non. Nous avons mené le processus, et nos trois sociétés de financement en sont le moteur. Elles sont parvenues à un accord sur les modalités d'administration. Il n'y a aucune augmentation des frais d'administration. En somme, tout se fera à l'extérieur. J'estime que ce sera un grand succès.
    Quant aux projets d'exploitation des ressources et de développement énergétique, le principal fonds d'exploitation des ressources et de l'énergie, le gouvernement fédéral et la Saskatchewan ont injecté 6 millions de dollars de capital de risque dans un fonds qui appartenait en totalité à une institution métisse, le Fonds de développement Clarence Campeau, et qui était exploité par elle. Au Manitoba, les gouvernements fédéral et provincial ont injecté 4 millions de dollars dans un fonds de capital de risque appartenant à la Metis Economic Development Organization, rattachée à la Fédération des Métis du Manitoba, et exploité par elle. Comme Marc l'a signalé et comme je viens de le dire, le gouvernement ontarien, de concert avec la nation métis de l'Ontario, a constitué un fonds de 30 millions de dollars sur 10 ans pour le développement des entreprises métisses. Là encore, c'est une conséquence du dialogue qui a eu lieu à l'occasion des symposiums. Au Manitoba, le gouvernement provincial a mis de côté 10 millions de dollars pour le développement économique des Métis de la province.
    Nous invitons aussi le secteur privé à ces symposiums. Nous nouons avec lui de bonnes relations non pas parce que nous insistons, mais parce que l'industrie le fait. Prenons l'exemple de Synovis et de la collectivité métisse de Conklin, en Alberta, qui sont parvenues à un accord de partage des revenus issus de l'exploitation des ressources. Sauf erreur, on estime qu'il y aura de 40 à 60 millions de dollars en 40 ans, selon le rythme de croissance.
    Voilà des cas où les contacts entre la nation métisse, le gouvernement et l'industrie permettent d'accomplir des progrès appréciables.
    Merci.
    Les témoins ne sont avec nous que pendant une heure, et nous tenons à profiter de toute cette heure. Il y aura donc un deuxième tour de questions.
    Je ne vais donner à M. Bevington que trois minutes, car je crois savoir qu'il a une courte question à poser. S'il est très bref, il y aussi M. Rafferty qui a une question. Si c'est possible, nous donnerons aussi trois minutes à chacun des deux côtés.
(1155)
    Merci. Je fais vite, monsieur le président.
    Ma question porte sur ceux qui ne sont pas présents ici, les membres de la nation métisse des Territoires du Nord-Ouest. Vous avez dit que personne n'était engagé dans des négociations territoriales, mais cette nation l'est, n'est-ce pas?
    Il y a donc un groupe métis au Canada qui a été reconnu de façon nette dans le cadre des négociations territoriales, puisqu'il a participé à la revendication globale originale dans les Territoires du Nord-Ouest. Est-ce que ce serait une bonne idée de faire comparaître ces gens-là pour que le comité prenne connaissance de leur position? Si je pose la question, c'est que la réussite de leurs négociations foncières dans les Territoires du Nord-Ouest pourrait vous aider dans la lutte de votre peuple dans l'ensemble du Canada.
    Oui, tout à fait d'accord. C'est peut-être en partie pour cette raison, mais il faudra le leur demander, qu'ils ne s'associent pas de trop près à nous. Mais ils constituent une exception.
    Même si les certificats de concession ont été distribués dans les Territoires du Nord-Ouest, le gouvernement fédéral, dans sa sagesse, a décidé de renégocier ou de négocier pour la première fois cette question. On peut espérer que cela créera un précédent applicable au sud du 60e parallèle.
    Monsieur Rafferty, vous avez une question à poser?
    Oui, merci, monsieur le président.
    Clément ou peut-être même John peuvent répondre à ma question, qui porte sur l'éducation.
    Vous comptez de nombreux membres dans ma circonscription, celle de Thunder Bay—Rainy River. Le problème qui surgit le plus souvent pour vos membres dans ma circonscription, c'est l'éducation postsecondaire, ce sont les moyens de s'offrir une éducation postsecondaire. Les Métis se soumettent au processus ordinaire prévu pour tous les autres Canadiens.
    Que souhaitez-vous pour vos membres, du point de vue de la compétence ou de l'aide fédérale, en ce qui concerne l'éducation postsecondaire des enfants de familles métisses dans votre secteur?
    C'est une aide extraordinaire pour les Métis, les membres des Premières nations ou de la collectivité indienne que d'obtenir des ressources pour les études sans se retrouver avec une lourde dette à la fin. Des gens de ma collectivité veulent que leurs enfants aillent à l'université, mais ils ne savent pas où trouver les ressources pour leur permettre d'y aller.
    Je donne mon propre cas en exemple. Je suis allé en faculté de droit au début des années 1970. À l'époque, le gouvernement de la Saskatchewan avait le programme NRIM, pour les Indiens non inscrits et les Métis. Nous recevions la même aide que les Indiens inscrits pour les livres, la subsistance, les frais de scolarité.
    J'ai eu de la chance de faire trois ans d'études en droit sans accumuler une lourde dette. Je n'aurais probablement pas pu y arriver sans cette aide.
    L'objectif serait-il donc d'obtenir l'égalité avec les étudiants des Premières nations, par exemple?
    Ce serait l'idéal, mais, chose certaine, toute aide que nous pouvons obtenir sera également utile, et il faudrait beaucoup plus que ce qui est offert aujourd'hui. Toute évolution en ce sens serait utile.
    Sur le plan de la santé, un programme prévu dans l'accord de 2004 prévoyait des fonds pour que les Métis s'inscrivent dans le domaine médical, dans divers secteurs des services de santé. Ces fonds existent toujours. Bien des gens en ont profité. C'est un programme utile. Il y a eu une forte augmentation du nombre d'infirmières métisses et de Métis qui s'orientent vers d'autres professions du domaine médical
    Cela peut servir d'exemple.
    Merci beaucoup.
    Le dernier à poser des questions sera M. Seeback, qui a trois minutes.
    Clément et tous les autres, merci de comparaître aujourd'hui. J'ai trouvé la séance très instructive, moi qui n'avais qu'une information limitée sur certaines de ces questions. Donc, merci de ce que vous m'avez appris. Vos interventions ont été très instructives et utiles.
    Je voudrais revenir un instant à la page 8 de votre déclaration d'ouverture. Vous parliez de « renforcer la capacité de gouvernance de la nation métisse en matière de gestion et de prestation de services importants soutenant le développement économique ».
    Pourriez-vous me brosser un tableau et m'expliquer comment vous pensez que cela se concrétisera?
    Essentiellement, comme je l'ai dit tout à l'heure, nous recevons des fonds du gouvernement fédéral. Une bonne partie est affectée à des projets, ce qui nous occasionne des difficultés en raison des cycles de financement.
    Actuellement, pour notre financement de base, qui devrait être simplement nous être remis sans complications, nous ne signons pas d'accord avant le mois d'août. Mais nous devons mener nos activités entre le 1er avril et août.
    En matière d'environnement, nous venons d'apprendre il y a plusieurs semaines que nous n'obtiendrons pas de fonds pour des projets pour lesquels nous en recevions par le passé. Nous avions retenu les services d'une personne pour faire ce travail et assister à des réunions. Au bout du compte, nous sommes pris au dépourvu, sans ressources financières.
    Nous souhaitons obtenir un financement global pour savoir à quoi nous en tenir en début d'année, pour savoir ce que nous pouvons faire et pour que nous puissions nous adapter aux budgets qui nous semblent importants. Et au bout du compte, nous produirions un seul rapport au lieu de 40.
    C'est un objectif que nous poursuivons. Nous en discutons avec l'interlocuteur fédéral. Quand atteindrons-nous l'objectif, je l'ignore. Cela nous aiderait d'avoir des fonds déterminés, réservés pour mener nos activités sans nous inquiéter, sans devoir nous adresser aux banques pour avoir des prêts à des taux d'intérêt exorbitants, par exemple.
    Voilà pour l'essentiel ce que nous souhaitons.
(1200)
    Voici un exemple. Les registres sont très importants: maintenant que la Cour suprême a reconnu les Métis comme des personnes titulaires de droits, il faut savoir qui a le droit de chasser et qui n'a pas ce droit, n'est-ce pas? La question est très importante.
    Nous avons maintenant un système de financement annuel. La première année du programme, tous ont dû mettre à pied leur personnel des registres parce que le financement n'était pas sûr. Il reposait sur des propositions. Ces registres sont, croyons-nous, un service de gouvernance essentiel et il faut les constituer. Il faut que cela se fasse au moyen d'un programme. Ce que nous voulons faire, c'est au donc mettre en oeuvre ce que le Parti libéral a proposé avec la politique de droit inhérent à l'autonomie gouvernementale. Il ne l'a jamais appliquée à nous; nous n'avons jamais participé aux négociations.
    Nous avons entamé des négociations tripartites sur l'autonomie gouvernementale en 1985 après nos vains efforts en vue d'obtenir une modification constitutionnelle. On nous a dit: « Il faut une définition avant de signer. » Nous avons acquiescé. Nous avons amorcé la démarche tripartite dans chaque province. Il devait s'agir de gouvernance, mais ce ne fut pas le cas. Quant à la politique sur le droit inhérent, elle s'applique aux Autochtones, pas aux Métis.
    Ce que nous souhaitons, en matière de gouvernance, c'est établir une relation de gouvernement à gouvernement. Comme Clément l'a dit, nous ne voulons pas être obligés de composer avec le système de financement et l'absence de reconnaissance. Nous voulons adopter une approche mûre, responsable en politique d'intérêt public. Si vous pouviez nous aider, ce serait magnifique.
    Merci beaucoup.
    Là-dessus, je dirai qu'il y a probablement encore des questions à poser, mais dans l'exercice de nos responsabilités, je suis sûr que nous nous reverrons.
    Chers collègues, je vais lever la séance. Nous ferons ensuite une pause de quelques minutes pour que les membres du comité puissent accueillir les témoins. Je demande cependant aux membres du sous-comité de rester, car nous commencerons à siéger à huis clos le plus rapidement possible.
    La séance est levée.
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