ENVI Réunion de comité
Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.
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Comité permanent de l'environnement et du développement durable
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TÉMOIGNAGES
Le jeudi 27 octobre 2011
[Enregistrement électronique]
[Traduction]
Je déclare la séance ouverte.
Je suis désolé pour ce retard. Il y a eu un vote à la Chambre. On semble en avoir fait une habitude, alors toutes nos excuses.
L'un des représentants de l'agence aimerait nous dire quelques mots, après quoi nous enchaînerons avec la période de questions. Qui va prendre la parole?
Monsieur le président, nous vous avons remis plus tôt cette semaine des résumés de quelques évaluations qui ont été menées depuis l'adoption de la loi en 1995, auxquels nous avons joint un tableau récapitulatif. En raison de certaines irrégularités dans la façon de communiquer l'information dans notre rapport ministériel sur le rendement, nous avons relevé certaines incohérences dans le tableau en ce qui concerne les études approfondies et les commissions d'examen. Nous tentons actuellement de corriger l'information, et nous la transmettrons à la greffière et au comité dès que possible.
Merci beaucoup.
Nous allons amorcer la première série de questions. Comme nous disposons d'à peine 16 ou 17 minutes, chacun se verra accorder quatre minutes, plutôt que sept, afin que tous aient la possibilité de poser une question.
C'est M. Woodworth qui ouvre le bal.
Juste comme je pensais que la période de questions ne pouvait être plus courte.
Merci beaucoup, monsieur le président.
Je vous remercie, messieurs, de vous joindre de nouveau à nous aujourd'hui.
Je m'intéresse particulièrement à un rapport qui a été publié en 2009 par le Conseil canadien des ministres de l'environnement. L'un des problèmes soulevés dans le rapport concerne la participation de multiples autorités fédérales à l'évaluation environnementale de mêmes projets.
Tout d'abord, savez-vous de quel rapport il est question?
Dans ce cas, vous devez très bien savoir de quoi je parle.
Pouvez-vous alors me confirmer que certains projets sont évalués par de multiples autorités fédérales?
Tout à fait. Cependant, il ne faut pas oublier que ce rapport est paru en 2009, comme vous l'avez dit, et que les changements législatifs, apportés l'an dernier, qui ont fait en sorte de désigner l'agence comme autorité responsable de la réalisation d'études approfondies de grands projets n'étaient pas encore en place à l'époque.
Dans son rapport, le CCME a reconnu que pour améliorer la coordination fédérale-provinciale dans le processus d'évaluation environnementale, il ne suffit pas d'avoir des outils pour s'harmoniser avec les provinces; il faut commencer par mettre de l'ordre dans la famille fédérale et le processus fédéral lui-même.
Si je comprends bien, lorsque c'est l'agence qui rédige le rapport d'étude approfondie, on remédie à ce problème. Cependant, il y a d'autres agences qui produisent également ce type de rapports, n'est-ce pas?
Ce n'est plus le cas, depuis l'an dernier, à l'exception des projets qui sont réglementés par l'Office national de l'énergie et la Commission canadienne de sûreté nucléaire.
C'est ce que je voulais dire. Il peut aussi y avoir d'autres projets d'assez grande envergure, mais qui ne requièrent pas une étude approfondie, auquel cas on serait encore confronté au problème des multiples autorités fédérales. Est-ce que c'est juste?
J'imagine que vous avez appris, par des témoignages ou des rapports, tout le mécontentement que cela suscite chez les promoteurs de projet.
Oui, mais les projets désormais soumis à une étude approfondie suscitent beaucoup moins de préoccupations. Comme nous l'avons expliqué la semaine dernière, tous les projets qui ont été entrepris après l'entrée en vigueur des modifications sont très bien harmonisés avec le processus provincial.
Je parle des autres projets, ceux qui font toujours l'objet d'un examen par de multiples autorités fédérales.
Le fait que l'ACEE est maintenant responsable de la réalisation des études approfondies a sûrement contribué à régler ce problème, n'est-ce pas?
Pour les fins du compte rendu, vous devez répondre par oui ou non.
Merci.
Et nous pourrions peut-être envisager d'en faire autant avec les autres projets de grande envergure, même s'ils ne requièrent pas une étude approfondie. Serait-ce une bonne idée...?
C'est assurément quelque chose que le comité pourrait envisager. Comme vous l'on dit les deux témoins il y a deux jours, on se demande s'il devrait y avoir une seule agence responsable de toutes les évaluations ou si nous devrions continuer avec notre mécanisme de reddition de comptes diffus.
Malheureusement, votre temps de parole est écoulé. Merci, monsieur Woodworth.
C'est maintenant au tour de Mme Liu. Vous disposez de quatre minutes.
[Français]
Merci, monsieur le président.
J'aimerais revenir sur le sujet des consultations qui ont été faites auprès des Autochtones.
La semaine dernière, lors de la comparution des représentants de l'Agence canadienne d'évaluation environnementale, vous avez confirmé que si les budgets qui arrivent à échéance ne sont pas renouvelés, les consultations avec les Autochtones pourraient être affectées. Est-ce vrai?
On indiquait la semaine dernière que la question du renouvellement du budget est présentement considérée de la part du gouvernement. C'est vraiment lors du budget de 2012 qu'une décision sera prise. Si les fonds ne sont pas renouvelés, cela aura évidemment des répercussions sur nos opérations relativement aux évaluations environnementales et aux consultations auprès des Autochtones.
Concrètement, à quoi ont servi les budgets destinés à la consultation des Autochtones au cours des dernières années? Ont-il servi à financer les groupes qui y ont participé? Pouvez-vous nous dire à quoi exactement ont servi les budgets?
Ils ont servi principalement à deux fins.
D'abord, une enveloppe d'argent a été remise sous forme de contribution pour donner des fonds aux communautés autochtones consultées dans le cadre des évaluations environnementales. Il y a donc des fonds qui leur sont disponibles, tant pour les études approfondies que pour les projets évalués par une commission d'examen. C'est le premier volet.
Il y a aussi les ressources supplémentaires qui ont été fournies à notre agence, comme l'obtention d'employés affectés aux consultations autochtones et pour couvrir les dépenses liées aux consultations autochtones. C'est à la fois un budget d'opérations et de contributions aux groupes autochtones.
Si le budget n'est pas renouvelé, cela pourrait nuire à la participation des autochtones dans le processus de consultation.
Si les budgets sont modifiés, on devra réévaluer la façon dont on rencontre nos obligations en vertu de la loi.
Vous dites aussi que la Commission canadienne de sûreté nucléaire et l'Office national de l'énergie ont la responsabilité de consulter les Autochtones. Or, ces organismes font eux aussi face à des pressions financières importantes. La Loi canadienne sur l'évaluation environnementale dit clairement que vous êtes des chefs de file du gouvernement en matière d'environnement. Comment pouvez-vous donc prétendre vous acquitter de vos responsabilités alors que vous recevez moins d'argent pour consulter les Premières nations?
En ce qui a trait aux projets assujettis à la Commission canadienne de sûreté nucléaire ou à l'Office national de l'énergie, notre rôle est semblable à celui qu'on joue à l'égard de l'ensemble des autorités responsables qui mènent des examens préalables.
[Traduction]
Monsieur le président, je crois que la députée d'en face parle de l'Office national de l'énergie, alors que nous examinons aujourd'hui la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Y a-t-il d'autres commentaires concernant ce rappel au Règlement?
Madame Liu, je vous demanderais de ne pas vous écarter du sujet. Merci.
J'estime que mes observations sont pertinentes puisqu'il est ici question des consultations dans le cadre des évaluations environnementales. Cependant, je vais tâcher de faire attention à l'avenir.
[Français]
En 2009, le commissaire à l'environnement a évalué l'application de La loi canadienne sur l'évaluation environnementale par le gouvernement. Le commissaire a dit que lors de l'étape de l'établissement de la portée du projet à évaluer, les autres autorités fédérales ne s'entendaient pas entre elles. Cela nuit souvent au processus d'évaluation, cause des retards et entraîne même parfois la réalisation de multiples évaluations. Qu'est-ce qui a été fait depuis le rapport du commissaire pour corriger les problèmes reliés à la coordination fédérale, notamment au sujet de l'établissement de la portée des projets?
Deux choses ont principalement été faites. Les deux sont liées aux amendements apportés à la loi l'an dernier.
En ce qui a trait aux problèmes identifiés par le commissaire à propos des multiples autorités impliquées dans les évaluations, c'est précisément pour ces raisons que les évaluations des projets majeurs assujettis à des études approfondies ont été confiés à l'Agence canadienne d'évaluation environnementale. C'est pour éviter d'avoir plusieurs autorités légalement responsables de mener des évaluations relativement aux mêmes projets.
Le problème perdure pour certains examens préalables qui impliqueraient plusieurs autorités responsables à ce stade-ci, mais quant aux projets d'envergure assujettis aux études approfondies, les amendements ont essentiellement été réglés l'an dernier. L'autre changement qui a eu lieu depuis le rapport du commissaire résulte de la décision de la Cour suprême l'an dernier dans l'affaire MiningWatch en termes de la portée du projet. La cour a clairement indiqué que la portée du projet doit être telle que celle proposée par le promoteur.
[Traduction]
Merci, monsieur le président.
On a abordé à quelques reprises la question des modifications qui ont été apportées en juillet 2010. J'aimerais examiner ces modifications plus en profondeur.
Tout d'abord, compte tenu des contraintes de temps, pourriez-vous nous décrire brièvement ces modifications?
Les modifications apportées en juillet 2010 visaient plusieurs aspects principalement liés au processus d'étude approfondie. Tout d'abord, on a éliminé l'étape du processus où le ministre décidait si le projet devait faire l'objet d'une étude approfondie ou d'un examen par une commission. Les analyses menées dans le cadre de notre programme d'assurance de la qualité ont révélé que cette étape retardait considérablement la réalisation des évaluations environnementales.
Ensuite, on a désigné l'agence comme autorité responsable de la réalisation des études approfondies. Cette fonction lui revient maintenant entièrement, tandis que par le passé, cette fonction était répartie entre plusieurs autorités.
Enfin, on a conféré au ministre de l'Environnement le pouvoir d'établir ou de limiter la portée du projet faisant l'objet d'une évaluation. Le ministre ne s'est pas prévalu de ce pouvoir jusqu'à présent puisqu'il n'a pas encore fixé ni rendu publiques les conditions connexes.
La dernière modification importante visait la réglementation sur les projets d'infrastructure, qui excluait certains projets d'infrastructure, par exemple les projets d'infrastructure municipaux financés par l'entremise de différents fonds ou mentionnés dans une annexe de la loi.
Comme nous l'avons indiqué la semaine dernière, pour toutes les études approfondies qui ont débuté après l'entrée en vigueur des modifications, nous travaillons de concert avec les provinces.
Comme nous l'avons également mentionné la semaine dernière, notre principal client, sur le plan des ressources, à ce stade-ci, pour ces projets de grande envergure, est le secteur minier. Je vais donc laisser les représentants de l'Association des sociétés minières, que vous inviterez sûrement à comparaître devant le comité, vous donner leur opinion à ce chapitre. Toutefois, selon les discussions que nous avons eues avec eux, ils semblent d'accord avec nous pour dire que les modifications ont débouché sur d'importantes améliorations au processus.
J'aimerais également parler de la loi et la comparer avec des lois semblables en vigueur dans d'autres pays.
Y a-t-il d'autres pays qui utilisent un processus d'évaluation environnementale semblable à celui du Canada?
Il y en a quelques-uns. L'Australie a un régime semblable. La plupart des pays ont une loi sur l'évaluation environnementale.
Dans le cas de l'Australie, on a un peu la même dynamique qu'ici au Canada. On y trouve un gouvernement fédéral et des États, qui seraient l'équivalent de nos provinces. Les États d'Australie ont la responsabilité première du développement des ressources, et chacun a son propre processus d'évaluation environnementale.
En Australie, le gouvernement fédéral a adopté une loi visant les projets susceptibles d'avoir des conséquences pour les éléments environnementaux de portée nationale. Il y a huit domaines d'intérêt fédéral, notamment le Parc marin de la Grande Barrière de corail, les zones maritimes, les sites appartenant au patrimoine mondial, les espèces et les communautés biologiques menacées et les activités nucléaires. Ce sont des domaines qui relèvent habituellement du gouvernement fédéral.
Monsieur Toet, votre temps de parole est écoulé. Merci beaucoup.
La dernière intervenante est Mme Murray. Vous disposez de quatre minutes.
Merci. Je suis heureuse d'avoir la possibilité de poser des questions.
Pourriez-vous me dire qui, dans une commission conjointe d'examen, est responsable de l'évaluation des impacts environnementaux?
Lorsqu'un projet est confié à une commission d'examen — et cela comprend les circonstances dans lesquelles une commission est établie conjointement avec une autre province —, il lui incombe d'évaluer les effets environnementaux et de transmettre ses conclusions et ses recommandations au ministre de l'Environnement.
Et dans le cas d'une commission conjointe d'examen avec l'Office national de l'énergie, sans la participation d'une province, qui est chargé de recueillir les données scientifiques?
Est-ce l'ACEE qui finance la commission conjointe d'examen? D'où les fonds viennent-ils? Quel est le budget de la commission?
Pour ce qui est des coûts de la commission d'examen, ils sont partagés entre l'Office national de l'énergie et l'agence. Nous avons un système de recouvrement des coûts en place qui nous permet de récupérer notre part des coûts auprès des promoteurs de projet, et des ressources sont également à la disposition des participants au processus. Comme je l'ai expliqué plus tôt, autant le public en général que les peuples autochtones participent à l'examen.
Vous avez donc un budget pour l'ACEE, et dans le cas d'une commission conjointe d'examen avec l'Office national de l'énergie, par exemple, vous récupérez auprès du promoteur les coûts que vous avez dû défrayer.
C'est exact. Dans notre cas, les coûts directs engagés par l'agence seront assumés par le promoteur.
Qu'arrive-t-il si, par exemple, dans le cas d'un projet de pipeline transportant du bitume plutôt que du pétrole brut, on ne dispose pas de suffisamment de renseignements sur les impacts d'un déversement potentiel de bitume dans un estuaire ou une rivière? Qui réalise des études scientifiques sur les impacts potentiels et la durée de vie des matériaux?
Au début du processus — et la plupart des commissions procèdent de la même façon —, la commission ou le ministre, dépendamment des provinces avec lesquelles nous travaillons, étant donné qu'il y a des différences d'une province à l'autre, établira des directives pour la préparation de l'étude d'impact à l'intention du promoteur de projet. Ainsi, il incombe principalement au promoteur de fournir à la commission l'information demandée par le ministre, et cela constituera les renseignements de base dans le cadre de l'examen. Tous les participants à l'examen peuvent fournir leurs propres analyses qui seront également prises en considération, et les commissions ont habituellement le pouvoir discrétionnaire d'exiger des études additionnelles si elles jugent que c'est nécessaire.
Par conséquent, dans certains cas, il peut y avoir à la fois des contraintes de temps et des limites budgétaires. Qu'advient-il si votre budget est réduit, mais que les questions scientifiques dans un nouveau domaine sont complexes ou si l'échéancier de votre commission est jugé trop serré par les scientifiques, de sorte qu'il nuit à la capacité de recueillir les données? Essayez-vous de respecter le délai fixé ou demandez-vous plutôt une prolongation du délai?
Les tribunaux ont statué que les commissions étaient tenues par la loi de satisfaire à toutes les exigences de la LCEE, et ce sont elles qui doivent s'assurer, dans chaque cas, d'avoir toute l'information nécessaire pour en faire rapport au ministre.
Votre temps est écoulé depuis quatre minutes.
J'aimerais de nouveau remercier les témoins d'être venus aujourd'hui. Nous sommes vraiment désolés pour cette brève séance.
Monsieur Hyer.
Merci, monsieur le président.
Étant donné que nous avons été interrompus et que nous avons passé très peu de temps avec les témoins, pourrions-nous envisager de convoquer de nouveau ces témoins à une date ultérieure?
Merci.
Encore une fois, merci beaucoup de votre présence.
Nous allons faire une pause de cinq minutes pour permettre au prochain groupe de témoins de se préparer, après quoi nous poursuivrons nos travaux.
Nous reprenons la séance.
Nous accueillons aujourd'hui Brenda Kenny, de l'Association canadienne de pipelines d'énergie, et M. Richard Lindgren, de l'Association canadienne du droit de l'environnement.
Madame Kenny, vous serez la première, et vous disposez de 10 minutes.
Je vous remercie de me donner l'occasion de comparaître devant vous aujourd'hui. Je sais que vous avez eu une matinée très chargée, et nous espérons que cette séance sera des plus intéressantes.
Tout d'abord, sachez qu'au cours de ma carrière, j'ai été membre d'un organisme de réglementation, puis universitaire, et maintenant, je suis représentante d'une industrie. Pendant tout ce temps, j'ai constaté que le Canada était un chef de file mondial en matière de réglementation et d'évaluation environnementale, avec un solide cadre réglementaire axé sur les résultats. Je suis très heureuse de pouvoir témoigner aujourd'hui afin de vous donner notre point de vue sur l'examen de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale.
Permettez-moi de vous mettre en contexte. L'Association canadienne de pipelines d'énergie représente les sociétés qui assurent le transport de 97 p. 100 du pétrole et du gaz naturel produits et utilisés au Canada. Nos membres exploitent près de 100 000 kilomètres de pipelines. Le transport par pipeline est de loin le moyen le plus sécuritaire — et le seul réellement possible — d'acheminer d'importants volumes de gaz naturel par voie terrestre. Nos sociétés créent énormément d'emplois et font d'importants investissements dans des projets d'envergure à l'échelle nationale. Ces autoroutes de l'énergie sont essentielles pour chauffer nos maisons, fabriquer des biens, produire des récoltes et commercialiser nos produits. Nous prenons donc notre rôle très au sérieux.
Maintenant, en ce qui concerne la question à l'étude, la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale, sachez que l'ACPE et ses membres appuient le processus d'étude approfondie pour les grands projets. Nous sommes d'avis que ces évaluations devraient être menées par un organisme de réglementation compétent et que les décisions devraient être prises par ce même organisme.
Dans le cas des pipelines réglementés par le gouvernement fédéral, c'est l'Office national de l'énergie qui est l'organisme de réglementation le mieux placé pour ce genre d'évaluation, compte tenu de son mandat en vertu de la Loi sur l'Office national de l'énergie. Pour ce qui est des pipelines réglementés par les gouvernements provinciaux, on devrait accepter un processus d'évaluation provincial équivalent au processus fédéral énoncé dans la LCEE, qui se limite spécifiquement aux aspects du projet nécessitant une prise de décisions au niveau fédéral.
Il y a déjà des précédents à cet égard, au nord du 60e parallèle. Le gouvernement fédéral a reconnu que la LCEE n'était pas la seule loi fédérale à pouvoir permettre la réalisation d'évaluations environnementales exhaustives au Canada. En fait, au Yukon, il y a une loi qui a pris la place de la LCEE, en grande mesure, et nous pensons que ce modèle, qui comprend diverses plateformes législatives, pourrait s'appliquer au sud du 60e parallèle.
Si je m'en remets à l'Office national de l'énergie dans ce contexte, c'est qu'en vertu de son mandat d'intérêt public, il a cette responsabilité, et en fait, il est tenu de mener des évaluations dont la portée va au-delà de celle prévue dans la LCEE. Plus précisément, l'ONE examine un projet dans une perspective plus large et tient compte non seulement des impacts environnementaux d'un projet, mais aussi des questions sociales et environnementales en cause. Il peut compter sur l'aide de son personnel technique qui est en mesure de comprendre le rôle des pipelines ainsi que leur incidence et d'examiner ce qui se passe sur le terrain tout au long du cycle de vie du projet, de la planification jusqu'au rétablissement des sites. Tout le processus est supervisé par un tribunal quasi judiciaire dont les décisions reposent sur des données probantes. L'ONE veille à ce que le processus soit pleinement transparent et finance, au besoin, la participation d'intervenants.
Le mandat de l'ONE est tout à fait conforme aux objectifs que l'on veut atteindre. L'ONE peut faciliter la réalisation des évaluations environnementales des projets compatibles avec la protection de l’environnement et est capable de prendre des décisions importantes. Autrement dit, en adoptant une approche holistique qui sert l'intérêt du public, l'ONE est l'autorité fédérale la mieux placée pour rendre des décisions conformes aux engagements du Canada en matière de développement durable et aux principes de longue date concernant le développement durable, y compris ceux qui ont été établis à Rio il y a presque 20 ans.
J'aimerais dire quelques mots au sujet de l'auto-évaluation, puisqu'il s'agit d'un principe fondamental de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale dans sa forme actuelle. L'auto-évaluation requiert tout simplement des décisions sur des projets qui ont une incidence sur tous les décideurs fédéraux. Habituellement, dans le cas d'un pipeline fédéral, il faut prendre des décisions consécutives aux évaluations en tenant compte non seulement de la LCEE, mais aussi des pêches, du transport, de l'ONE, des oiseaux migrateurs et de la Loi sur les espèces en péril. Il existe divers mécanismes au niveau politique et administratif pour essayer d'éviter les chevauchements dans la préparation des évaluations. Honnêtement, les mesures de coordination qui ont été prises à cet égard se sont plutôt révélées inefficaces. Nous sommes toujours confrontés à un niveau élevé de redondance, ce qui nous détourne des questions environnementales réellement importantes et gaspille les ressources précieuses du gouvernement et des sociétés.
Pourquoi le gouvernement continuerait-il de travailler au sein d'un système fondé intentionnellement sur la redondance plutôt qu'un système efficace qui donne de bons résultats sur le plan environnemental et dans l'intérêt national? L'ACPE recommande fortement qu'il y ait un seul processus et un seul décideur, un organisme de réglementation, qui assumera la responsabilité du processus tout au long du cycle de vie du projet et qui comprendra les impacts aux étapes de la planification, de la construction, de l'exploitation et de la remise en état du site.
Comme association représentant les sociétés qui construisent et exploitent les infrastructures essentielles de transport de l'énergie au Canada, nous sommes favorables à une réforme de la réglementation qui donnera lieu à des décisions opportunes, améliorera le climat d'investissement et stimulera l'économie, mais qui accordera toujours au gouvernement fédéral le pouvoir d'établir des exigences en matière de permis afin de veiller à la protection de l'environnement. Vous pouvez y arriver en confiant l'exécution des évaluations à l'organisme de réglementation le mieux placé.
Je vous remercie de m'avoir donné la possibilité de discuter avec vous et c'est avec plaisir que je répondrai à vos questions.
Merci, madame Kenny.
C'est maintenant au tour de M. Lindgren de faire sa déclaration. Vous disposez de dix minutes.
Merci, monsieur le président.
Bonsoir, mesdames et messieurs membres du comité.
Au nom de l’Association canadienne du droit de l’environnement ou ACDE, j’aimerais remercier le comité de nous avoir invités à participer à l’examen de la Loi canadienne sur l’évaluation environnementale. Nous croyons que cet examen effectué par le comité est une excellente occasion d'assurer le renforcement de la LCEE et l'amélioration de sa mise en oeuvre à l’échelle du Canada.
Comme vous le savez, l'ACDE est un groupe de défense de l'intérêt public en matière de droit qui a été fondé en 1970. Notre mandat consiste à utiliser et améliorer la loi afin de protéger l’environnement et la santé et la sécurité humaines. Nous représentons des citoyens soucieux de l’environnement, des communautés à faible revenu devant les cours de justice et les tribunaux à l’égard de diverses questions environnementales.
L’ACDE fait depuis longtemps valoir la nécessité d’établir des mesures législatives fédérales efficaces, efficientes et équitables en matière d’évaluation environnementale.
Je me souviens avoir comparu devant un comité parlementaire au sujet de la LCEE, il y a environ 20 ans, au moment de l’étude initiale de la loi. Je ne portais pas de lunettes à cette époque et mes cheveux étaient plus longs, mais certaines choses ne changent jamais.
Nous avons aussi participé au premier examen parlementaire de la LCEE, entre 2000 et 2003. L’année dernière, j’ai comparu devant divers comités parlementaires pour parler des modifications à la LCEE contenues dans le projet de loi C-9.
Au fil des ans, l’ACDE a représenté ses clients dans des délibérations sur des évaluations environnementales dans le cadre de la LCEE. Nous avons participé à des activités de filtrage, à des études exhaustives et à des commissions d’examen. Nous sommes aussi intervenus auprès de la Cour suprême du Canada dans des causes liées au Programme d'évaluation environnementale. Par exemple, j’ai agi à titre de conseiller juridique pour les groupes environnementaux qui sont intervenus dans l’affaire Mines Alerte, qui a fait l’objet d’une décision de la Cour suprême l’année dernière. Nous avons en outre pris part à d’autres litiges devant la Cour fédérale, au sujet de l’interprétation et de l’application de la LCEE.
Monsieur le président, en se fondant sur son expérience et sa conception de l’intérêt public, l’ACDE aimerait aborder deux sujets d’ordre général en comité aujourd’hui.
Le premier sujet est la portée de l’examen et les principes qui devraient l’orienter. Dans notre exposé, le comité devrait considérer attentivement les conclusions et les recommandations présentées dans le rapport sur la LCEE publié par le comité en 2003, dans lequel on tentait de préparer la voie à l’examen actuel de la LCEE. Ainsi, dans notre exposé, l’examen actuel devrait être exhaustif et comprendre la LCEE, les règlements pertinents et d'autres questions administratives, comme par exemple des politiques et des lignes directrices. Deux principes fondamentaux devraient en outre orienter l’examen: premièrement, toutes les modifications proposées à la LCEE ou aux règlements connexes doivent être élaborées de façon ouverte et transparente, de manière à ce que les députés, les fonctionnaires, les parties intéressées et le grand public puissent suffisamment les examiner et les commenter.
En bref, nous ne voulons pas que les amendements à la LCEE soient enterrés dans d'autres lois budgétaires. Ce n'est pas la bonne marche à suivre; deuxièmement, toutes les modifications proposées à la LCEE ou aux règlements connexes doivent être manifestement conformes à l’objet et à la mission définis à l’article 4 de la LCEE et doivent renforcer, et non pas affaiblir ou réduire, les droits relatifs à la participation du public en vertu de la LCEE.
Le deuxième sujet d’ordre général que j’aimerais aborder aujourd’hui est le contenu fondamental de l’examen de la LCEE. Bien que de nombreuses questions liées à la LCEE méritent l’attention du comité, notre exposé mettra l’accent sur les cinq enjeux prioritaires suivants, qui devraient faire l’objet d’un examen attentif et d’un rapport du comité. Voici, en résumé, ces cinq enjeux: premièrement, la nécessité que les évaluations environnementales, en vertu de la LCEE, déterminent si, ou dans quelle mesure, un projet donné apportera une contribution nette positive à la durabilité écologique et socioéconomique; deuxièmement, la nécessité de réexaminer le modèle d’autoévaluation dans la LCEE et d’assurer une plus grande rigueur dans la détermination et l’analyse des effets environnementaux cumulatifs à l’échelle locale et régionale; troisièmement, la nécessité d’établir un cadre législatif rigoureux pour une évaluation environnementale stratégique des plans, des politiques et des programmes gouvernementaux; quatrièmement, la nécessité d’assurer une participation publique significative à toutes les étapes de la planification de projet, particulièrement à l’étape de la détermination préliminaire de l’objectif du projet et de l’examen des solutions de rechange; et finalement, cinquièmement, la nécessité d’établir et de faire respecter un système de permis d’évaluation environnementale, qui comporterait des modalités obligatoires, en vertu de la LCEE.
Monsieur le président, afin d’aider le comité dans l'évaluation de ces enjeux et d’autres questions connexes, nous présenterons au comité dans les prochaines semaines un mémoire plus détaillé qui étoffera certaines de ces questions et offrira peut-être une approche ou une terminologie législative qui pourraient aider à aborder ces enjeux.
En conclusion, monsieur le président, nous remercions encore le comité de nous avoir donné l’occasion de présenter nos recommandations initiales au sujet de la réforme et de l’examen de la LCEE et nous lui assurons que nous serons à son entière disposition pour la suite de ce processus.
Nous serons heureux de répondre aux questions du comité.
Merci, monsieur Lindgren.
Avant de procéder à la liste des intervenants qui commence par Mme Rempel, pour la première série de questions de sept minutes, je rappelle que pour invoquer le Règlement, les membres du comité doivent dire de vive voix « j’invoque le Règlement » au lieu de lever la main. Si pendant que l’un d’entre vous est en train de poser des questions, un autre membre du comité lève la main pour intervenir, je ne lui donnerai pas la parole car quelqu’un d’autre a la parole et pose des questions. Donc, si vous voulez invoquer le Règlement, il faudra le signaler de vive voix, j’interromprai alors les délibérations pour que vous puissiez présenter votre rappel au Règlement. D’accord?
Il ne faut avoir recours rappel au Règlement que pour de rares occasions, par exemple, si vous jugez que la procédure n’est pas respectée.
Sur ce, nous commençons par Mme Rempel la série de questions de sept minutes.
Je remercie les deux témoins pour les exposés qu'ils ont présentés aujourd’hui.
Je pose ma question à Mme Kenny. Vous avez mentionné la nécessité d’avoir des évaluations environnementales appropriées et le fait que vos membres tiennent beaucoup, tout comme nous, à ce qu’elles le soient, mais vous avez aussi parlé un peu des effets des retards et des inefficacités sur le déroulement des opérations, etc. J’aimerais que vous parliez brièvement de quelques points essentiels portant sur ce que vous — et peut-être certaines de vos sociétés membres que vous représentez — pourriez faire pour que l’ACEE soit plus efficace et plus prévisible, et ce, sans porter atteinte à la protection de l’environnement.
Premièrement, je voudrais souligner que l’évaluation environnement est vraiment un outil essentiel de planification précoce et qu’il ne reproduit nullement les plans d’exécution qui viendront ultérieurement. Je pense qu’il faut s’attacher tout d’abord à ce que les décisions relatives au lancement de projets soient prises rapidement en prenant en considération les renseignements stratégiques, la possibilité de répercussions importantes et les conditions appropriées qui détermineront les futurs plans d’exécution. Donc, voilà un point qui est important. La décision doit être prise rapidement et le processus de détermination de l’intérêt public doit être initié de manière efficace, et ce, sans passer rapidement sur ce qui est important.
Deuxièmement, à notre avis, il faut ajouter à cela d’autres considérations de l’intérêt public, non pas pour reléguer l’environnement au second plan, mais pour pouvoir s’assurer que les questions environnementales sont traitées en fonction de la façon dont vous allez exécuter les travaux de construction — les détails de vos plans. Il nous semble que ce volet de planification précoce fait déjà partie du mandat de l’Office national de l’énergie et qu’il est énoncé dans l’article 52 de cet organisme. En fait, son mandat dans le domaine de l’environnement est plus vaste et plus approfondi que celui de l’ACEE.
Voici les deux points essentiels: transférer les responsabilités de l’ACEE à l’Office national de l’énergie et s’assurer qu’il y ait un bon suivi après que l’on a pris connaissance de la détermination de l’intérêt public.
Selon vous, serait-il juste de dire que des considérations environnementales sont intégrées dans toutes les étapes du processus de planification des sociétés membres de votre organisation?
Absolument. En fait, aucun promoteur d’un projet de plusieurs milliards de dollars se risquerait à ne pas le faire. Ce qui est essentiel, c’est l’engagement. Nous avons mené dans notre propre association des études de vrais projets auxquels participaient des promoteurs, des organismes gouvernementaux et des ONG et nous avons découvert que l’approche moderne d’un projet d’envergure reflète très bien l’objectif de l’évaluation environnementale, elle l’intègre, et elle peut déboucher, si elle est bien menée, sur une audience publique qui prendra très peu de temps puisque les plus importantes questions ont été réglées et que les gens sont satisfaits. Je pense donc qu’il s’agit d’un élément essentiel à prendre très au sérieux.
Serait-il également juste de dire que le processus de planification, le processus d’examen environnemental, qui est appliqué au Canada est peut-être l’une des normes mondiales les plus avancées dans ce domaine?
En ce qui concerne l’élaboration de projet, je le crois bien, oui.
Il s’agit de processus très pointus dans lesquels on utilise des sciences très avancées, des procédures bien connues qui ont été améliorées au fil des ans et qui ont prouvé leur efficacité.
Vous avez aussi parlé de l’incidence de votre association sur le développement économique. Encore une fois, en accordant la priorité à la protection de l’environnement et aussi en reconnaissant que votre association — par l’entremise de ses sociétés membres — est à l'origine d'une forte incidence économique sur cette compagnie, pouvez-vous nous citer des exemples précis d’évaluations environnementales imprévisibles ou inefficaces qui ont freiné l'apport d'investissements dans des projets?
Chaque retard important aggrave le risque économique, le coût du capital augmente et il y a un effet immédiat qui peut-être pour le moins considérable. En plus les retards dans la phase de construction, les équipes en attente parce qu'un permis tarde à être délivré, même s’il est établi que c’est dans l’intérêt public, peuvent coûter des centaines de milliers de dollars par jour sans qu’il n’y ait de répercussions sur les effets environnementaux.
Il y aussi des projets de grande envergure comme celui de la vallée du Mackenzie, par exemple, à cause duquel, non seulement le Canada a perdu une opportunité économique mais toute une génération de résidants du Nord qui souhaitaient la poursuite de ce projet et bénéficier des recettes tirées de leurs propres ressources ont été abandonnés.
Nous devons souligner très clairement l’importance de l’opportunité, des fenêtres d’opportunité pour le Canada et souligner également que les coûts augmentent considérablement à cause de retards injustifiés.
Il ne faut pas pour cela que nous nous précipitions alors que des choses doivent être examinées, mais il faut que nous concentrons nos efforts sur les résultats qui comptent et que nous adoptions une approche très stratégique pour comprendre pourquoi nous suivons des processus laborieux qui n’aboutissent pas à de meilleurs résultats environnementaux.
Les modifications apportées au mois de juillet à la Loi sur l’emploi et la croissance économique ont codifié partiellement l’autorité en matière d’évaluation environnementale en donnant à l’ACEE la responsabilité des études les plus approfondies.
Y a-t-il une rétroaction indiquant que les membres de votre association comprennent mieux les évaluations environnementales grâce aux modifications?
Toute codification est utile car elle permet de mieux se focaliser. Comme je l’ai dit dans ma déclaration préliminaire, la plupart de nos membres préféreraient qu’il y ait une codification, c’est-à-dire demander à l’Office national de l’énergie d'assurer le leadership. C’est une approche courante et les résultats ont été très positifs en ce qui concerne les pipelines. Nous croyons que c’est un excellent moyen d’assurer que la protection de l’environnement devienne partie intégrante de toutes les conceptions de projet.
Il est possible d'accentuer la codification en donnant plus de responsabilités à l’agence pour effectuer les examens préalables, qui sont plus importants aujourd'hui, et en conférant au ministre plus de pouvoirs relativement aux projets de grande envergure. Ces mesures élimineraient le processus décisionnel à deux étapes qui survient après une étude approfondie au sujet de laquelle le ministre rend une décision d’évaluation environnementale qui est suivie par d'autres décisions du même type prises par les autorités responsables.
Est-ce que cette codification plus poussée permettra à vos membres d’avoir des évaluations environnementales plus prévisibles et plus explicites?
Oui. L'élimination des processus à plusieurs étapes offre certainement des avantages.
Mais si la protection de l’environnement est prioritaire, il faut se demander si ces étapes supplémentaires donnent un meilleur résultat? Notre expérience nous montre que c'est généralement pas du tout le cas.
J’ai beaucoup de questions à vous poser, je vais donc essayer d’être bref. Si, de votre côté, vous essayez d’y répondre le plus rapidement possible, j’arriverai peut-être à vous les poser toutes.
Premièrement, vous avez souligné que la participation du public est essentielle. Il semble que vous laissez entendre qu’elle n’est pas adéquate, alors qui devrions-nous…? Il y a la question de l’ACEE, puis le comité. Avez-vous des suggestions concernant les invités que le comité pourrait convoquer pour témoigner, en plus de vous?
Est-il nécessaire que le comité fasse des déplacements, si oui, où devrait-il se rendre et comment? Devrions-nous soulever cette question dans nos déplacements?
Et plus particulièrement, avez-vous des recommandations à nous proposer ou à l’ACEE au sujet des Premières nations?
Pouvez-vous répondre brièvement à toutes ces questions?
Oui, je recommanderais certainement que le processus soit ouvert et le plus inclusif et accessible possible. Si cela veut dire que le comité doive prendre la route pour entendre directement les témoignages de Premières nations, de groupes écologiques et d’autres parties concernées qui souhaitent voir un processus d’évaluation environnemental rigoureux ou qui pourraient relater des faits intéressants ou faire des recommandations, il serait alors préférable, me semble-t-il, que le comité entende directement les témoignages de toutes les parties intéressées au lieu de seulement ceux du petit nombre de personnes qui, comme nous, peuvent venir à Ottawa de temps en temps.
L’un des cinq points que vous avez soulevés portait sur le modèle d’auto-évaluation à l’ACEE. Le commissaire et vous-même avez parlé à maintes reprises de la question des effets cumulatifs, de ce qu'il faut faire pour la régler ainsi que de l’incapacité de l’agence à trouver jusqu'à présent une solution efficace.
Comment l’agence peut-elle s’assurer que les autorités responsables effectuent des évaluations environnementales de qualité, notamment celles comportant des effets cumulatifs, qui semblent si difficiles à aborder?
Je peux penser à différentes façons d'étoffer l’analyse de l’évaluation des effets environnementaux cumulatifs. Tout d’abord, les lignes directrices et les politiques proposées pour guider les praticiens peuvent être revues et probablement améliorées en fonction des objectifs.
En plus, un certain nombre d’observateurs et de praticiens d’EE ont recommandé que la meilleure façon d’examiner les effets environnementaux cumulatifs, du moins pour les petits projets, serait d’effectuer des évaluations à l’échelon régional de différents types de programmes pour essayer de trouver une solution plutôt que d'exiger des promoteurs de projets individuels ou des autorités responsables de tenter d’en trouver une en procédant au cas par cas.
Vous me menez précisément à ma prochaine question. Vous mentionnez une évaluation environnementale stratégique pour les plans, les politiques et les programmes gouvernementaux, que ce soit à l’échelon régional ou national. Pouvez-vous nous en dire un peu plus à ce sujet?
J’estime que le comité a fait un très bon départ à propos de toute cette question dans son rapport de 2003. Ce rapport présentait une série de recommandations générales sur la marche à suivre, les paramètres et l'incorporation de la responsabilité et de la prévisibilité dans une évaluation environnementale stratégique. Ce sont, à mon avis, d’excellentes idées qui doivent être mises en oeuvre.
Je songeais, en venant ici, à ce qui pourrait servir de bon exemple pour illustrer cette situation. Je participe à l'examen préalable d’une usine de production d’éthanol proposée dans le port de la ville d’Oshawa. Le promoteur a demandé l’examen car il veut recevoir des fonds du gouvernement fédéral pour commencer les travaux. Un programme fédéral pour construire et exploiter des raffineries est disponible pour les promoteurs d’usines de production d’éthanol. Nous avons des discussions serrées avec le promoteur et les experts-conseils pour déterminer si la production d’éthanol est vraiment une bonne idée.
Mais, nous faisons ces examens pour des sites et des projets donnés. Il aurait été bon, avant que le gouvernement fédéral ait mis en place le programme qui accorde un financement à de tels projets, de faire une étude plus vaste, plus stratégique ou à l’échelon national afin de déterminer si nous voulons ou non produire de l’éthanol. Je pense que cela aurait permis aux promoteurs de projets de s’engager plus facilement dans le processus car les réponses à certaines questions majeures visant à savoir si cette idée est bonne ou non ou s’il avait de meilleures façons de la réaliser auraient été données dans le cadre d'un autre processus.
C’est un bon exemple concret de domaines dans lesquels nous pourrions probablement effectuer une évaluation environnementale de plus haut niveau pour régler ces questions majeures et fondamentales.
Et cela m'amène encore à ma prochaine question.
Le commissaire estimait qu'on n'effectuait pas correctement les examens préalables. Êtes-vous d'accord? Y a-t-il un problème dans la loi? Devons-nous changer quelque chose dans la loi pour la rendre plus efficace, ou s'agit-il simplement d'un manque de coordination de l'agence sur le plan de l'application de la loi actuellement, ou une combinaison des deux?
Je crois que la loi fonctionne bien sur le plan des exigences relatives au contenu des examens préalables. Mais parfois, il y a un fossé entre ce qu'exige la loi et ce que font les autorités responsables à ce chapitre. L'agence pourrait assurer une meilleure communication et un meilleur développement éducatif et professionnel, afin que les autorités responsables, les promoteurs et d'autres intervenants sachent exactement ce qu'on attend d'eux lorsqu'ils effectuent un examen préalable.
Je dirais également, en toute justice, que la qualité des examens préalables est variable. Je suis d'accord avec le commissaire pour dire qu'il y a des examens préalables dont la qualité est douteuse, si l'on peut dire. Mais il y a aussi de bons examens préalables. Cela démontre qu'il est peut-être nécessaire d'améliorer la communication et l'éducation pour les personnes qui effectuent les examens préalables, afin qu'ils comprennent pleinement leurs obligations légales en matière de contenu environnemental.
Le commissaire a également recommandé que la LCEE prévoie l'amélioration de la coordination entre les divers organismes concernant notamment l'établissement de la portée de l'évaluation. Vous ne pourrez pas le faire dans les minutes qui viennent, mais vous avez indiqué dans votre mémoire que vous alliez probablement nous envoyer un autre document plus tard. Vous voudrez peut-être intervenir maintenant, mais j'espère que vous nous donnerez des conseils sur la façon dont nous pourrions améliorer la discrétion ministérielle relativement à l'établissement de la portée de l'évaluation lorsqu'il y a plus d'une autorité.
Comment améliorer la coordination? Quelle est la meilleure façon de régler les conflits de compétences dans certains cas, ou les lacunes dans d'autres secteurs?
Je vais certainement tenter de répondre à ces questions et rédiger un rapport. Je ne peux pas le faire en 20 secondes.
Je tiens à remercier nos deux témoins de leur présence aujourd'hui. Notre discussion est importante. J'ai remarqué que Mme Kenny a commencé son exposé en mentionnant qu'elle a été chargée de la réglementation sur ces questions durant la majeure partie de sa carrière.
Monsieur Lindgren, vous avez indiqué que vous participez à ces discussions depuis un certain temps déjà, et que vous aviez un peu plus de cheveux quand vous avez commencé. Je vous comprends tout à fait. Cela fait un certain temps également que je suis ici, mais je pense que vous avez su conserver vos cheveux mieux que moi.
Cela dit, ma question s'adresse en fait à la représentante de l'ACPE.
L'ACPE est l'un des neuf organismes signataires d'un lettre datée du 30 juin 2011 adressée au ministre des Ressources naturelles. Cette lettre faisait état des améliorations apportées à la coordination de l'évaluation environnementale fédérale découlant de la Loi sur l'emploi et la croissance économique adoptée par le gouvernement. L'ACEE a maintenant la responsabilité de la plupart des évaluations environnementales du niveau d'une étude approfondie.
Pourriez-vous nous parler de la position qu'a prise l'ACPE à ce moment-là à l'appui des améliorations découlant de la Loi sur l'emploi et la croissance économique?
Nous avons estimé qu'il était important d'atteindre toute la clarté possible à ce chapitre; la coordination était donc essentielle. Il nous faut pouvoir simplifier les évaluations environnementales et concentrer nos efforts sur les choses les plus importantes.
Nous croyons qu'on doit mettre l'accent sur les résultats plutôt que sur le processus. Le processus est important, mais les résultats le sont encore plus. La codification permet de mieux concentrer ses efforts et de tirer des leçons des expériences. Nous avons entendu tout à l'heure que parfois, par exemple, la qualité des examens préalables peut être variable. La codification peut servir dans ce cas.
Nous continuons de penser que les organismes de réglementation compétents sont la solution. Il y a assurément beaucoup de fonctions importantes auxquelles l'agence doit prêter attention lorsqu'il n'y a pas d'organismes de réglementation compétents, mais lorsqu'il y en a, il faut en tirer parti, car ils seront bien au fait tous les jours de la situation relativement aux projets et ils seront capables d'obtenir les meilleurs résultats possibles.
Je vous remercie.
La LCEE est déclenchée lorsque le fédéral prend une décision concernant un projet.
Mais il y a des projets qui ont des effets environnementaux dans des secteurs qui relèvent du fédéral, mais qui ne requièrent pas d'évaluation environnementale parce qu'il n'y a pas de décision fédérale qui y est associée.
Devrait-il y avoir une autorité qui exige une évaluation environnementale fondée sur des effets environnementaux possibles pour des questions qui relèvent du fédéral?
En général, s'il y a des intérêts de compétence fédérale, il y a actuellement un chevauchement dû à l'octroi de permis. Mais pour qu'il y ait une perspective d'intérêt national et une modernisation au Canada, il nous faut absolument avoir de bonnes évaluations environnementales en général et diriger notre attention vers l'organisme de réglementation le mieux placé et le principe d'équivalence, afin d'obtenir les meilleurs résultats partout au pays.
Je vais vous raconter une petite anecdote. Nous avons actuellement, au Bureau de gestion des grands projets, une file d'attente de grands projets sur les ressources naturelles qui représente environ 120 milliards de dollars. Ce que je m'apprête à vous dire provient d'observations empiriques, pas d'un sondage détaillé, mais des promoteurs m'ont dit qu'en général, ils dépensent entre 3 et 5 p. 100 de leur capital pour un projet d'évaluation environnementale. Cela veut dire que pour un montant de 120 milliards de dollars, nous dépenserons 6 milliards pour ce processus au Canada. Quand je demande à mes amis qui travaillent dans une ONG ou une entreprise ou qui sont bureaucrates comment ils dépenseraient 6 milliards de dollars pour protéger l'environnement, ils me disent qu'une partie doit servir à de bons processus de planification précoce et à des évaluations environnementales appropriées, mais n'allons pas penser que cela constituera la solution la plus rentable.
Pour ce qui est de la question concernant les intérêts fédéraux quand il s'agit d'un projet provincial, je pense que nous avons fait beaucoup de progrès sur le plan des pratiques exemplaires, aux organismes de réglementation les mieux placés, aux données scientifiques fiables et à la surveillance; nous savons où nous en sommes sur le plan environnemental et nous nous améliorons constamment, de façon transparente.
Je vous remercie.
La LCEE se fonde sur les pouvoirs de contrainte d'autres lois; ma question porte là-dessus. Les contraintes juridiques et les problèmes de responsabilité et de compétences signifient que les mesures d'atténuation dans les secteurs qui relèvent du fédéral ne sont pas nécessairement appliquées à un projet. La lacune dans l'application de la loi devrait-elle être comblée par l'ajout de dispositions d'exécution à la LCEE?
Je dirais encore une fois que nous devons être clairs. L'objectif principal de l'évaluation environnementale est la planification précoce. On doit indiquer clairement s'il y a un sujet d'inquiétude et, si tel est le cas, comment nous allons régler le problème. Selon moi, c'est le principe fondamental des évaluations environnementales et la chose la plus importante. Je ne crois pas que des mécanismes élaborés d'application de la loi nous permettront nécessairement d'atteindre notre but. Il nous faut vraiment des conditions qui nous permettront de savoir comment concevoir et faire avancer le projet et il nous faut un suivi, afin de connaître les résultats.
D'accord. Voici une question liée à celle que je n'ai pas pu poser au dernier groupe de témoins, et je suis curieux de connaître votre point de vue là-dessus.
Bon nombre des projets qui sont visés par la LCEE ont été mis en oeuvre à maintes reprises dans d'autres régions du pays — la construction d'autoroutes, par exemple, ou de ponts enjambant un cours d'eau, de pipelines traversant des cours d'eau — et ce, depuis longtemps. Nous possédons une longue expérience à ce chapitre. Devrait-on pouvoir traiter cela au moyen de la réglementation, afin qu'il y ait une certaine observation et application de la réglementation, pour veiller à ce que tout soit fait selon les attentes?
Serait-il utile d'élaborer des règlements pour les ponts de passage, par exemple, au lieu de déclencher la LCEE chaque fois que nous entreprenons un simple projet?
Je pense qu'il vaudrait la peine d'envisager cette possibilité, en particulier là où c'est courant. Si l'objectif est la planification précoce et qu'on l'a fait en appliquant des pratiques exemplaires, c'est un bon outil. Nous devrions en tirer parti de façon beaucoup plus directe.
Nous ne pouvons pas compter sur le processus pour protéger l'environnement. Nous devons compter sur de bonnes pratiques d'ingénierie et de bonnes initiatives et sur une amélioration constante. Si c'est ce que vous voulez dire, s'il devait y avoir une réglementation, concentrons-nous sur la façon d'obtenir les meilleurs résultats et le meilleur suivi. L'enjeu ne se limite pas aux évaluations environnementales, et c'est pourquoi nous penchons vraiment vers les organismes de réglementation les mieux placés. Encore une fois, l'exemple que nous utilisons pour les grands projets fédéraux est l'Office national de l'énergie; il a vérifié des dizaines de milliers de passages de cours d'eau au cours des 40 dernières années. Il sait ce qui fonctionne, ce qui ne fonctionne pas. Nous savons ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas. Nous utilisons la meilleure technologie disponible, nous surveillons et nous nous améliorons sans cesse.
Merci. Votre temps est écoulé.
Notre dernier intervenant pour cette série de questions est Mme Murray. Vous disposez de sept minutes.
Merci.
La majorité de mes questions s'adresseront à Mme Kenny.
Vous avez fait remarquer tout à l'heure que ces processus doivent être efficaces et opportuns. Je suis tout à fait d'accord. Je sais que la plupart des promoteurs préféreraient savoir tout de suite que leur projet est refusé plutôt que d'être obligé d'attendre la fin d'un processus interminable qui risque d'aboutir à un résultat négatif. Je sais qu'au cours de la dernière décennie, on a effectué un changement au processus d'évaluation environnementale en Colombie-Britannique en ajoutant une voie de sortie précoce, car auparavant, si un promoteur s'engageait dans le processus, il devait le suivre au complet, même si la réponse était claire dès le début. Le processus de voie de sortie est-il approprié en fonction de la structure de la LCEE? Est-ce là où l'on obtiendrait un non très tôt dans le processus, afin qu'on ne soit pas bloqué et que les organismes de réglementation ne soient pas bloqués inutilement?
Je pense qu'il est important de décider sans tarder si un projet est dans l'intérêt public; cela suppose, à l'étape de la planification préliminaire, de la concentration, de la rigueur et de la discipline sur les enjeux stratégiques de grande importance. Si on aboutit à un non, c'est non. Si c'est oui, on procède en se fondant sur la prémisse que le projet est dans l'intérêt public et tout est alors orienté sur les meilleurs résultats possibles et non sur des mesures susceptibles de freiner l'avancement du projet.
Un examen stratégique rapide pour en arriver sans tarder à une décision par rapport à l'intérêt public.
J'ai une question à propos des commentaires que vous avez faits sur la façon dont les évaluations globales ont été consolidées en vertu de la LCEE. Or vous proposez, je suppose, qu'elles ne soient plus consolidées, mais confiées aux responsables de la réglementation dans une industrie donnée. Seraient éventuellement concernés les pêches, les mines, le pétrole et le gaz, ainsi que les industries éoliennes, hydrauliques et thermales. Ne serait-ce pas alors le contraire de la consolidation que de confier l'évaluation environnementale de votre industrie des pipelines à l'Office national de l'énergie?
Avec tout le respect que je vous dois, dès le début de la LCEE, on avait envisagé des solutions de rechange raisonnables. Voilà pourquoi on a une clause de substitution à laquelle on n'a eu que très rarement recours et qui est entrée en vigueur avec le changement apporté à la Loi sur l'Office national de l'énergie et autorisant le financement des participants, que notre secteur a totalement appuyé. Nous pensons que la participation du public en est un élément important. Ainsi, la consolidation ne doit pas tout simplement se faire dans le cadre de la LCEE. Et non, nous ne plaidons pas du tout en faveur de la déconsolidation. N'oublions pas non plus un autre élément important, à savoir que pour ce qui est de l'auto-évaluation en vertu de la législation actuelle, à peu près les trois quarts concernent des projets du gouvernement fédéral et non des projets du secteur privé. Il y a donc une énorme différence dans la façon de structurer l'approche à adopter à ces deux égards. Et lorsque l'industrie privée a un responsable de la réglementation, c'est lui qui est à notre avis le mieux placé pour procéder à cette évaluation.
Je consultais rapidement… Je trouve le terme « mieux placé » intéressant lorsque le responsable de la réglementation se décrit lui-même sur le site Web… Et excusez-moi si cela me prend quelques minutes pour...
Le site Web indique et je cite:
L'Office national de l'énergie... est un organisme fédéral indépendant créé en 1959 par une loi du Parlement du Canada pour réglementer les aspects internationaux et interprovinciaux des secteurs du pétrole, du gaz et de l'électricité. La raison d'être de l'ONE est de réglementer, dans l'intérêt public canadien, les pipelines, la mise en valeur des ressources énergétiques et le commerce de l'énergie. Ces principes aident le personnel de l'ONE à assumer...
Le terme environnement n'est jamais mentionné. Voilà donc une organisation qui n'a pas vu que l'un de ses mandats clés est la protection de l'environnement…
Je pense que si vous lisez l'article 52 de la Loi sur l'Office national de l'énergie, vous verrez que son mandat trouve essentiellement sa source dans l'intérêt public…
Désolée, mais je n'avais pas fini ma phrase lorsque vous m'avez interrompue.
Mme Brenda Kenny: Pardonnez-moi.
Mme Joyce Murray: Ainsi, lorsque l'essentiel d'une évaluation environnementale consiste à donner du poids au processus, le fait d'avoir une organisation dont le mandat essentiel est tout autre serait, je crois, une solution tout à fait spectaculaire.
Je viens de passer une journée avec les principales entreprises de construction et leurs promoteurs. Il y a beaucoup de développement qui se fait en Colombie-Britannique, et du bon développement. Or, pas une seule fois le processus d'évaluation environnementale n'a été cité comme obstacle. Le plus grand obstacle dont on a entendu parler était la pénurie de gens de métier et d'apprentis, et l'on disait qu'on allait avoir énormément de mal à trouver le personnel compétent pour mener à bien le projet.
J'aimerais comprendre comment un changement aussi spectaculaire dans l'examen de la LCEE permettrait de régler le problème réel que présentent ces grands projets de développement.
Premièrement, ces fournisseurs vous auraient sans doute affirmé que la main-d'oeuvre est un grave sujet de préoccupation, ce qui est certain. Je ne sais pas quel était le thème de la conférence, mais j'ai moi-même assisté à beaucoup de conférences qui s'intéressaient à ce sujet.
Pour en revenir toutefois à un processus décisionnel qui soit stratégique et opportun, cela ne veut pas dire qu'il faille l'accélérer ni le retarder indûment. Il s'agit simplement de savoir, comme vous l'avez dit, s'il est ou non dans l'intérêt du public, et s'il ne l'est pas, nous investirons ailleurs.
Le point central est que pour un groupe comme l'Office national de l'énergie, il ne s'agit pas du tout d'un écart par rapport à une pratique que l'on aurait couramment utilisée pendant des décennies. Les examens préalables de la LCEE sont couramment faits par l'ONE. Nombre d'entre eux peuvent avoir une très vaste portée et être assortis d'audiences publiques complètes. Un bon exemple en sont les 147 km qui traversent le parc national du Canada Jasper. Ils devaient faire l'objet d'un examen préalable aux termes de la LCEE, mais représentaient à tous égards un projet d'une importance critique.
D'accord, merci.
S'il reste du temps, j'aimerais avoir un commentaire de M. Lindgren.
Pensez-vous que les résultats attendus et les mesures d'atténuation proposées seraient différents si l'évaluation était confiée au seul responsable de la réglementation dans le secteur?
Je trouve cela un peu inquiétant, ce projet de confier les responsabilités de l'évaluation environnementale aux seuls organismes réglementaires. Ce n'est pas du tout en cela que consiste la LCEE. Je ne peux pas parler de l'Office national de l'énergie, car je n'ai pas eu affaire à son tribunal. Mais j'interviens dans des dossiers dont est saisie la Commission canadienne de sûreté nucléaire et je dirai simplement que la législation qui la concerne est bien pâle en comparaison des exigences de la LCEE. Je trouverais donc très inquiétant un projet qui confierait à la seule commission les obligations en matière d'évaluation environnementale.
Merci, monsieur le président.
Monsieur Lindgren, au cours de votre exposé, vous avez parlé d'une participation publique significative tant dans la perspective des principes que des questions prioritaires. Cela semble être selon vous un point important.
Évidemment, quand on fait des consultations et des évaluations, la participation du public est importante dans la mesure où elle contribue en quelque sorte à améliorer l'approbation publique du projet en tant que tel. Quel lien faites-vous entre l'approbation publique et une participation publique significative?
Dans ce contexte, pourriez-vous me dire quels sont les endroits où il y a les meilleures pratiques à cet égard? Que devrait étudier le comité pour améliorer ces pratiques?
[Traduction]
Merci de votre question.
Songez à ce qui est arrivé en Ontario à la fin des années 1980 et également en 1996. Nous avions la Loi sur le projet d'aide financière aux intervenants, qui forçait les promoteurs à offrir une aide financière convenable aux parties intéressées. Je vous dirais que c'est pour des raisons politiques que l'on a mis fin à ce programme extrêmement efficace et bien considéré. Il y a en effet de bonnes leçons à tirer de ce processus qui permettait au public de disposer de l'expertise technique et scientifique nécessaire pour participer pleinement à ces processus d'évaluation environnementale quelquefois complexes.
D'aucuns diront que nous avons une aide financière aux participants pour des études globales et des commissions mixtes d'évaluation, etc., en vertu de la LCEE... C'est vrai. Mais je m'interroge sur la quantité de l'aide fournie à des groupes d'intérêts publics et autres, aux termes du processus de la LCEE.
Je vais vous en donner un bon exemple. Mes collègues et moi-même participons actuellement aux travaux de la commission mixte d'évaluation qui se penchera l'an prochain sur le projet de dépôt en formations géologiques profondes de déchets radioactifs de faible et de moyenne activité dans la péninsule de Bruce. CELA, mon groupe, a obtenu la somme faramineuse de 37 000 $ pour évaluer un projet d'une valeur probable de plusieurs milliards de dollars et qui, depuis littéralement des années, en est toujours à l'étape de la planification. Le promoteur du projet, Ontario Power Generation, a probablement dépensé des millions de dollars pour assembler la documentation technique et scientifique nécessaire à la préparation du mémoire de 10 000 pages qui a été remis concernant la portée environnementale du projet.
Certes, nous avons une aide financière aux participants au niveau fédéral, mais cette aide n'est qu'une goutte d'eau dans l'océan comparativement à ce que les promoteurs dépensent. Si l'on prend au sérieux la participation du public, il faut songer à élargir le programme d'aide financière aux participants.
[Français]
Quand vous avez parlé des questions prioritaires, vous avez mentionné la viabilité écologique et socio-économique. Lorsqu'on présente un projet, il est évidemment important qu'il ait une certaine rentabilité, mais qu'il soit aussi d'intérêt public et qu'il puisse aider la société.
J'aimerais que vous élaboriez davantage sur l'interrelation qui existe entre la viabilité économique et écologique?
[Traduction]
L'un des principaux objectifs de la Loi canadienne sur l'évaluation environnementale est de s'assurer que les considérations d'ordre écologique, social et économique soient pleinement intégrées et en même temps dûment étudiées. Voilà l'objectif déclaré de la LCEE. Cela est inscrit dans son mandat. Cela est inscrit dans son préambule. Or, je ne suis pas entièrement sûr qu'au cours de la dernière ou des deux dernières décennies, son bilan reflète ces intentions.
Dans ces évaluations environnementales, on est malheureusement obnubilé par l'atténuation de l'impact. Quels sont les impacts environnementaux? Y en aura-t-il? Sont-ils importants? Peuvent-ils être atténués? En fait, tout l'exercice consiste à se demander comment rendre moins lourd de conséquences ou moins dangereux un projet qui l'est probablement. Ce sont là des considérations importantes, mais qui laissent de côté certaines questions tout aussi importantes. Par exemple, de quelle façon ce projet va-t-il réellement contribuer à l'intégrité écologique globale de nos ressources naturelles, dont nous dépendons au jour le jour?
Je vois que le président me fait signe. Je vais donc m'arrêter là. Nous devons prendre au sérieux la viabilité écologique, ce que nous n'avons pas fait jusqu'à maintenant aux termes de la LCEE.
[Français]
Merci, monsieur Blanchette.
[Traduction]
Nous allons passer maintenant à M. Sopuck, qui a cinq minutes.
Comme je n'ai pas beaucoup de temps, je vais essayer d'être bref.
À votre avis, monsieur Lindgren, est-ce que le processus fédéral d'évaluation environnementale, avec le temps, s'est amélioré, a empiré, ou n'a pas bougé?
Il n'y a pas de bonne réponse à cela.
Il y a eu des succès. Le président de l'agence déclarait la semaine dernière que l'un des plus grands succès de la loi était son registre. Je suis d'accord avec lui. C'est une réussite. Mais quand je pense aux examens préalables, je ne trouve pas qu'ils soient très efficaces pour trouver des mesures d'atténuation. Et les commissions mixtes d'évaluation passent quelquefois à côté d'enjeux importants. Je dirais donc que le bilan a été mitigé.
Lorsque nous faisons le compte, les choses n'ont pas bougé à votre avis.
Sur la question des résultats environnementaux, par rapport aux processus, je note que votre exposé était entièrement consacré à ces derniers. Je suis moi-même un tenant des résultats. À votre avis, monsieur Lindgren, la qualité environnementale globale du Canada s'est-elle améliorée, a-t-elle empiré ou est-elle restée la même?
Là encore, cela dépend des paramètres. Cela diffère par ailleurs en fonction du niveau, qu'il soit national, régional ou local. La qualité de l'air s'est améliorée dans certaines régions, mais s'est empirée dans d'autres. Idem pour la qualité de l'eau. C'est difficile de faire des généralisations. J'ose espérer cependant que le processus d'évaluation environnementale utilisé aux termes d'autres régimes réglementaires a permis d'améliorer la situation par rapport au début des années 1990, mais il serait difficile d'en trouver des preuves dans tous les domaines.
Selon un rapport récent de l'OMS, les villes du Canada et celles de l'Australie ont la meilleure qualité d'air de tous les pays industrialisés — en fait la meilleure qualité d'air au monde. Je suppose que l'organisation a enquêté dans toutes les villes du Canada. Je pense donc que l'on peut dire — et le biologiste que je suis le confirmera — que dans de très, très nombreux cas, les indicateurs environnementaux du Canada se sont améliorés.
Madame Kenny, il y a toute une gamme de mesures législatives en vigueur. Je pense évidemment à la Loi sur les espèces en péril, à la Loi sur les pêches, à la Loi canadienne sur la protection de l'environnement, à la Loi sur la Convention concernant les oiseaux migrateurs, à la Loi sur la protection des eaux navigables, ainsi qu'à d’autres lois provinciales sur la protection de l’environnement. Dans la planification de leurs projets, les promoteurs ont tenu compte de toutes ces lois et de tous ces règlements aux niveaux fédéral et provincial, et ils ont fait leur possible pour s'y conformer, n'est-ce pas?
Je pose la question parce que je m'intéresse davantage à l'environnement lui-même qu'aux processus appliqués à son sujet. Quelle valeur ajoutée réelle apporte donc, à votre avis, le processus de la LCEE?
Dans notre secteur, nous défendons les mesures de bonne qualité et la planification précoce par rapport à la protection de l'environnement. Ces étapes sont intégrées dans les modes d'exécution d'un projet et on peut les contester dans le cadre d'un processus ouvert et transparent. Le point central d'une bonne évaluation environnementale est de s'assurer que celle-ci est au coeur du projet et que tous les éléments — qu'il s'agisse d'espèces en péril, d'oiseaux migrateurs, d'habitat des poissons, etc. — sont pris en considération sans tarder et communiqués aux intervenants avant même que ces derniers ne présentent des demandes.
Oui, on en tient pleinement compte tant par rapport au contenu du projet qu'aux risques que l'on pourrait faire courir aux investissements. Vous ne voudriez franchement pas avoir laissé de côté un élément, dont l'oubli pourrait ralentir l'exécution d'un projet de 10 milliards de dollars. Vous devez donc en premier lieu vous assurer que vous n'avez rien oublié. Savez-vous quels sont les risques? Est-ce que les intervenants vous ont donné une information utile à l'exécution du projet?
Êtes-vous sûre, madame Keeney, que dans les projets de grande envergure, les promoteurs n'oublient rien?
Je suis sûre qu'entre le bilan, particulièrement dans le cas des pipelines… Je veux dire, ce n'est pas compliqué. Ces projets relèvent plus ou moins de la routine. Nous savons à quoi nous avons affaire. Nous y associons les intervenants concernés et appliquons les meilleurs outils scientifiques à notre disposition. Et nos conclusions sont publiquement mises à l'épreuve, surtout lorsqu'on a affaire à un responsable de la réglementation tel que l'Office national de l'énergie. Même pour les plus petits projets, nous sommes soumis à l'équivalent d'une commission mixte d'évaluation.
Madame Keeney, j'ai réellement aimé vos commentaires sur le pipeline de la vallée du Mackenzie. Y ayant été moi-même associé au début des années 1970 en tant que biologiste, j'ai été abasourdi de prendre connaissance du dernier processus le concernant. Je pense que vous avez parfaitement raison de parler d'un processus qui dure depuis environ 34 ans et qui n'aboutit à rien, sinon à laisser dans la pauvreté les collectivités du Nord, alors que l'on sait pertinemment comment construire des pipelines dans le respect de l'environnement.
Est-ce là une juste description de ce qui est arrivé?
Que penseriez-vous alors, madame Kenny, de légiférer des délais précis aux termes de la LCEE et d'autres processus d'évaluation environnementale?
Je pense que des délais prévus par la loi peuvent avoir leur utilité. Il faut toutefois faire attention. L'examen doit faire l'objet d'un laps de temps approprié. Des délais prévus par la loi pour l'octroi de permis après qu'on en ait déterminé l'utilité publique, absolument. Dès lors que c'est dans l'intérêt public, agissons. C'est sur cet élément que je mettrais l'accent.
Merci beaucoup.
Je tiens à nouveau à remercier les deux témoins d'être venus ici aujourd'hui.
Chers collègues, nous avons déjà des témoins prévus pour mardi et nous voulons que la documentation soit distribuée à temps pour que vous puissiez en prendre connaissance. Dès que nous les aurons, la greffière vous les communiquera.
Madame Rempel.
J'aurais peut-être un autre commentaire, monsieur le président.
M. Lindgren a dit qu'il soumettrait un autre projet. C'est merveilleux.
Madame Kenny, si cela vous intéresse, nous vous faisons la même invitation.
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