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INDU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie


NUMÉRO 003 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 22 juin 2011

[Enregistrement électronique]

(1530)

[Traduction]

    Bonjour, mesdames et messieurs. Bienvenue à la troisième réunion du Comité permanent de l'industrie, des sciences et de la technologie.
    Nous avons plusieurs témoins avec nous aujourd'hui, et je vais les nommer et parler des organismes qu'ils représentent. Je veux simplement rappeler aux témoins que chaque organisme dispose de 10 minutes pour faire une déclaration préliminaire. Je vois que certaines personnes sont accompagnées de plusieurs représentants de leur organisme. Si vous avez prévu que plus d'une personne aura la parole, vous devez savoir que vous devrez vous partager les 10 minutes qui vous sont accordées.
    De la Canadian Independent Petroleum Marketers Association, nous accueillons Tricia Anderson, présidente et première dirigeante; Allan MacEwen, président du conseil d'administration et président de MacEwen Petroleum Inc.; et David Collins, vice-président directeur de Wilson Fuels.
    Pourriez-vous me dire qui fera la déclaration préliminaire au nom de cet organisme?
    Mme Anderson.
    Ensuite, du ministère des Ressources naturelles, nous avons Mark Corey, sous-ministre adjoint, Secteur énergétique; Jeff Labonté, directeur général, Direction des ressources pétrolières; et John Foran, directeur, Division de l'analyse des politiques et des affaires réglementaires du pétrole et du gaz.
    Qui s'occupera de la déclaration préliminaire? Ce sera M. Corey. C'est formidable.
    De l'Institut canadien des produits pétroliers, nous entendrons Peter Boag.
    À titre personnel, nous accueillons Michael J. Ervin, vice-président et directeur, MJ Ervin and Associates.
    Nous allons commencer avec la Canadian Independent Petroleum Marketers Association, pour 10 minutes.
    Avant de mettre le chronomètre en marche, mesdames et messieurs les députés, nous entendrons notre premier groupe d'experts de 15 h 30 à 17 heures, suivi du deuxième groupe d'experts, de 17 heures à 18 h 30. À la fin, nous prendrons deux ou trois minutes pour tenir un vote sur une question budgétaire liée aux frais des témoins.
    Allez-y, madame Anderson; vous avez 10 minutes.
    Merci.
    Merci beaucoup de nous donner l'occasion de participer à cette étude des fluctuations des prix de l'essence. Comme il a été mentionné, je m'appelle Tricia Anderson et je suis présidente et première dirigeante de la CIPMA, la Canadian Independent Petroleum Marketers Association.
    Aujourd'hui, je suis accompagnée de deux membres du conseil d'administration de la CIPMA. Allan MacEwen est le président du conseil d'administration. Il est président de MacEwen Petroleum Inc., une société qui appartient à des Canadiens, qui en assurent l'exploitation depuis plus de 30 ans. Il s'agit d'un des premiers marchands à offrir du carburant à l'éthanol en Ontario. Je suis aussi accompagnée de David Collins, qui est vice-président directeur de Wilson Fuels, une entreprise qui a son siège social à Halifax. Wilson Fuels oeuvre depuis longtemps dans le secteur pétrolier et possède un réseau de distribution d'essence dans les quatre provinces du Canada atlantique.
    Les prix élevés et les importantes fluctuations du prix de l'essence sont des questions qui préoccupent beaucoup les Canadiens et nos membres qui, essentiellement, sont les plus grands consommateurs d'essence au Canada. La CIPMA représente les marchands indépendants en carburant. Il s'agit d'entreprises indépendantes qui s'approvisionnent en carburant, au prix de gros, surtout auprès de raffineurs canadiens. Ensuite, ils mettent leurs produits en marché et offrent des services aux Canadiens dans les stations-service. Les marchands indépendants sont généralement des petites et moyennes entreprises familiales exploitées depuis plusieurs générations qui se sont fait un nom parce que ce sont des entreprises locales solides qui réinvestissent leurs profits dans la collectivité et dans l'économie locales.
    Les ventes des membres de la CIPMA représentent environ 22 p. 100 des ventes annuelles au détail d'essence au Canada. Parmi les marques que vous connaissez peut-être, il y a Mr. Gas; UFA, dans les provinces de l'Ouest; Canadian Tire; Parkland Fuel; Pioneer; Can-Op et McDougall Fuels.
    Nos membres jouent un rôle clé sur le marché canadien du carburant. Les marchands indépendants en carburant permettent la création d'une saine concurrence dans un marché de vente au détail d'essence qui, autrement, serait unidimensionnel. Depuis longtemps, grâce à une saine gestion des opérations, à des stratégies adaptées et à l'offre de produits innovateurs, les marchands indépendants ont eu un effet modérateur sur le prix que les Canadiens paient à la pompe.
    Nos membres ne fabriquent pas ou ne raffinent pas les produits qu'ils vendent. Les membres de la CIPMA s'approvisionnent en essence auprès d'un nombre limité de raffineurs au Canada. Certains de nos membres plus importants achètent des produits pétroliers plusieurs fois par jour de divers endroits dans la province ou, dans certains cas, de partout au pays.
    Bien que nous reconnaissions que le comité se concentre sur la fluctuation des prix de l'essence, il importe aussi, en ce moment, d'étudier les conséquences des prix plus élevés que nous avons pu observer depuis plusieurs mois. Ils ont eu un effet néfaste sur nos membres et sur leurs commerces.
    Il serait peut-être utile d'y aller d'un exemple. J'ai préparé un graphique que je serai heureuse de vous distribuer plus tard. On y étudie les divers éléments qui entrent en jeu dans le prix d'un litre d'essence. Aux fins de la discussion d'aujourd'hui, j'ai utilisé l'exemple du marché de Toronto et le prix mensuel moyen à ce jour pour le mois de juin.
    Selon les données de Kent Marketing Services, le prix mensuel moyen s'établit à 1,28 $ le litre. De ce montant, le prix du brut compte pour 63,8 ¢ et la marge de profit du raffinage, 17,9 ¢, soit un total de 81,7 ¢. Donc, cela représente 64 p. 100 du prix total, qui revient au raffineur. Ces composantes du prix de détail échappent complètement au contrôle du marchand indépendant.
    La taxe d'accise fédérale, la TPS/TVH — qui comprend une taxe cumulée — et les taxes provinciales représentent 39,4 ¢ additionnels, ou 31 p. 100 du prix total. Bien entendu, ces éléments augmentent proportionnellement au prix et échappent aussi au contrôle du marchand indépendant.
    Jusqu'à maintenant, nous savons à qui est versé 95 p. 100 du prix de 1,28 $ le litre. Le montant restant de 7,1 ¢ le litre, qui représente environ 5 p. 100 du prix global, est la marge d'exploitation du marchand indépendant. Notez que dans le marché torontois, ce chiffre — qu'on appelle la marge de détail — s'est maintenu aux alentours de 7 ¢ le litre en 2011. Au Canada, au cours des six dernières années, il s'est situé, en moyenne, entre 4,5 et 7,4 ¢ le litre. C'est une situation qui a très peu bougé.
    Il est important de souligner qu'il s'agit d'une marge brute. Avec 7 ¢ le litre, les détaillants indépendants doivent financer l'achat de terrains; construire les installations; payer l'impôt foncier; payer les frais de transport pour la livraison du carburant; payer les frais liés à l'embauche, au congédiement, au salaire et à la formation du personnel des stations-service et du personnel de soutien; payer les services publics; payer les coûts liés à la perception et au versement de la taxe d'accise fédérale et de la taxe routière provinciale et payer toutes les autres charges d'exploitation, y compris les frais de cartes de crédit.
(1535)
    La question des frais de cartes de crédit préoccupe particulièrement nos membres. Environ 40 p. 100 de leurs clients choisissent de payer par carte de crédit. Les frais de traitement des transactions par carte de crédit, qui sont d'environ 2 p. 100, augmentent avec chaque hausse du prix de vente au détail de l'essence. Des frais de carte de crédit élevés, qui se situent actuellement aux environs de 2,5 ¢ le litre — environ 30 p. 100 de la marge brute de nos membres — diminuent considérablement la marge d'exploitation et les profits des marchés indépendants pendant les périodes où les prix sont plus élevés.
    D'autres coûts d'exploitation augmentent aussi lorsque le prix du carburant est plus élevé, comme le supplément carburant, qui fait augmenter les coûts de livraison. Les ventes dans les dépanneurs, qui ont souvent une incidence sur le résultat net des marchands indépendants en carburant, baissent aussi quand les consommateurs voient leur revenu disponible diminuer.
    Pour revenir à la question de la fluctuation des prix de l'essence, il est important de noter que les fluctuations marquées du prix de l'essence nuisent beaucoup aux marchands indépendants en carburant. Comme je l'ai dit plus tôt, nos membres sont, essentiellement, les plus grands consommateurs d'essence au Canada. Tous les jours, entre 15 heures et 15 h 30, les fournisseurs les informent du prix à la rampe des divers carburants pour le lendemain. C'est ce qu'on appelle « le prix de gros à la rampe », qui renvoie au prix payé à la rampe d'approvisionnement.
    Nos membres ont habituellement des contrats d'approvisionnement avec une raffinerie importante afin de s'assurer un approvisionnement fiable en produits pétroliers pour répondre à leurs besoins commerciaux. Lorsqu'ils sont avisés du prix de l'essence pour le lendemain, les marchands indépendants établissent leurs stratégies d'achat.
    Étant donné que leur capacité d'entreposage et de transport est limitée, nos membres n'ont pas la marge de manoeuvre nécessaire pour acheter et entreposer du carburant lorsque le prix est bas. Cela dit, les membres plus importants utiliseront certaines stratégies spécifiquement conçues pour limiter les effets des grandes augmentations du prix. Avant une augmentation du prix, ces entreprises supportent des coûts supplémentaires en main-d'oeuvre et en transport afin d'acheter des produits, ou maintiennent les inventaires à un niveau extrêmement bas et mettent les camionneurs en disponibilité pour profiter d'une diminution annoncée du prix à la rampe.
    Les importantes fluctuations du prix peuvent avoir une grande incidence sur la viabilité des commerces de nos membres. En conséquence, ils consacrent énormément de temps et de ressources pour réagir aux importantes fluctuations du prix, pour lesquelles ils n'ont qu'un très court préavis.
    Les fluctuations soudaines du prix ont aussi un effet sur nos relations avec les clients. Bien que nous soyons des preneurs de prix, que nous ne contrôlions que 5 p. 100 du prix et que nous réagissions aux prix qui peuvent varier considérablement d'une journée à l'autre, ce sont nos membres et leur personnel sur le terrain qui subissent les foudres des consommateurs. Nos membres doivent composer avec une augmentation des incidents avec la clientèle, une réduction des importantes ventes en magasin et à une augmentation des vols d'essence à la pompe.
    Nous invitons le comité à examiner attentivement, pendant son étude, la situation difficile dans laquelle se trouvent les marchands indépendants en carburant. Comme je l'ai indiqué plus tôt, les membres de la CIPMA jouent un rôle clé dans la création d'une saine concurrence sur le marché de la vente au détail d'essence au Canada.
    Nos membres croient à un marché ouvert et concurrentiel. Nous croyons que si nous procédons à un examen plus approfondi du marché de gros et à un examen de la politique fiscale sur l'essence, si nous adoptons une réglementation sur les frais de cartes de crédit et les frais d'interchange et si nous renseignons davantage le public sur le prix de l'essence, cela pourrait favoriser la création d'un marché plus sain pour les consommateurs et nos membres, les petites et moyennes entreprises indépendantes canadiennes en carburant qui jouent un rôle clé au Canada et dans leurs collectivités locales.
    Merci.
(1540)
    Merci beaucoup, madame Anderson.
    Nous poursuivons avec M. Corey, pour 10 minutes.
    Nous avons un diaporama que je voulais vous montrer. Nous vous avons aussi envoyé d'avance un mémoire, un document d'information de trois ou quatre pages. Je vais maintenant vous présenter le diaporama.
    La diapositive numéro 2 indique que l'objectif d'aujourd'hui est de fournir un aperçu des facteurs qui influent sur le prix de l'essence au Canada. Il s'agit de l'analyse faite par le ministère, et elle est principalement axée sur les deux ou trois dernières années.
    La diapositive numéro 3 souligne qu'à l'échelon fédéral, pour ce qui est du prix de l'essence, l'approche du Canada est axée sur les marchés. Les ressources sont la propriété des provinces. En conséquence, les responsabilités du fédéral sont surtout liées à la réglementation provinciale et internationale en matière de commerce et de pipelines.
    En 1985, le gouvernement du Canada a adopté une politique selon laquelle, par rapport au prix de l'essence, on favoriserait une approche axée sur les marchés, ce qui se traduit par l'acceptation de l'utilisation du prix du pétrole brut à l'échelle mondiale pour fixer le prix du mazout et des produits pétroliers au Canada. C'est la politique que nous avons depuis 1985.
    En conséquence, les prix sont fixés sur des marchés concurrentiels dans le but de donner des signaux aux producteurs et aux consommateurs en ce qui a trait à la production, à l'investissement et aux décisions relatives à la consommation. Je dois souligner que le ministère des Ressources naturelles n'exerce aucun contrôle sur les prix du pétrole, sauf en cas d'urgence nationale. Dans un tel cas, nous aurions des pouvoirs d'urgence.
    Cependant, certaines provinces réglementent le prix de l'essence: l'Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve-et-Labrador, la Nouvelle-Écosse et le Québec. Je devrais aussi ajouter le Nouveau-Brunswick sur cette diapositive; c'est dans le document d'information, mais pas sur la diapositive. Le Nouveau-Brunswick réglemente également le prix.
    Pour ce qui est de l'effet de ces contrôles, l'objectif est généralement de réduire la volatilité des prix. Fait intéressant, dans son étude de la réglementation faite en janvier 2001, le Conference Board du Canada a conclu que cela n'entraîne pas nécessairement une diminution des prix.

[Français]

    Le prochain transparent montre que notre ministère joue, en général, un rôle dans l'analyse et l'information. En tant que centre d'expertise, nous touchons les marchés des produits pétroliers et, d'autre part, l'analyse des données portant sur les marchés et les prix de l'essence ainsi que du pétrole brut. Ça implique: reconnaître qu'il est important de faire preuve de transparence et de favoriser la compréhension des marchés de l'essence; produire des études analytiques sur la sécurité des produits énergétiques et pétrolier; et enfin, fournir aux Canadiens des renseignements par l'entremise du rapport bi-mensuel Info-Carburant. De plus, nous offrons des programmes et de l'information portant sur les efforts déployés en matière d'efficacité énergétique et de conservation.

[Traduction]

    Notre rôle consiste principalement à analyser les marchés et à nous assurer que nous en comprenons le fonctionnement. Beaucoup de personnes utilisent les renseignements fournis par Ressources naturelles Canada, notamment les députés, le Bureau de la concurrence, les entreprises qui font l'achat de carburant sur le marché et le public.
    Nous avons le site Web info-carburant qui est mis à jour chaque semaine et Info-carburant, un rapport bimensuel. Donc, nous suivons la situation de près.
     Info-carburant fournit des informations sur les prix et les marchés de l'essence afin que les producteurs et les consommateurs canadiens fassent des choix éclairés en matière de production et d'utilisation de l'énergie.
    Aussi, comme je l'ai mentionné, l'Office de l'efficacité énergétique offre de nombreux programmes, sites Web et publications afin d'aider les consommateurs à diminuer leurs coûts de transport par la réduction de leur consommation de carburant.
    J'aimerais maintenant céder la parole à Jeff Labonté, le directeur général de la Direction des ressources pétrolières, et le laisser nous guider dans l'analyse des récentes fluctuations du prix de l'essence et de certains facteurs qui entrent en jeu.
    Jeff.
(1545)
    Si on regarde les différences de prix et les fluctuations du prix, nous pouvons voir que le prix moyen de l'essence au Canada a affiché une croissance régulière en 2011, passant d'environ 1,10 $ le litre en janvier à 1,35 $ le litre en mai. En juin, il a chuté à 1,27 $ le litre. Alors, cela illustre l'augmentation et la variation des prix.
    Le record pour les prix moyens au détail à la pompe au pays, si quelqu'un cherchait ce chiffre, a été enregistré en 2008, en juillet, où le prix a atteint 1,39 $ le litre, pour une période de temps, selon une moyenne hebdomadaire.
    Lorsque nous regardons la diapositive 7 de la présentation et le matériel que nous avons des différentes villes, nous pouvons voir que des variations de prix se manifestent dans de nombreux centres urbains au Canada. Nous suivons les prix dans les grands centres urbains uniquement pour connaître et examiner les variations et examiner la structure des prix. Le graphique que nous présentons ici contient les données d'avril à juin de cette année, pour les villes de Calgary, Montréal, Ottawa, Toronto et Vancouver. On peut voir une assez grande variation entre ces villes.
    Si on regarde la diapositive 8, concernant les composantes, nous voyons que la variation des prix de l'essence au Canada est principalement le fait de trois facteurs principaux et, dans le contexte canadien, cela comprend la moitié provenant du pétrole brut produit dans l'Ouest canadien et en mer dans la région de Terre-Neuve et Labrador, ainsi que le pétrole brut importé qui vient surtout de la mer du Nord ainsi que de l'Afrique du Nord, d'où la partie est du Canada jusqu'à Toronto importe généralement son pétrole brut.
    Le deuxième facteur principal qui influe sur la structure des coûts de l'essence, c'est les coûts et les marges de raffinage et de marketing liés aux raffineries, ainsi qu'aux distributeurs au détail et les différentes modalités entre les modèles d'affaires que différents points de vente au détail utilisent pour amener leurs produits sur le marché au Canada. Je pense que l'intervenant précédent a parlé d'un certain nombre de ces points dans la perspective des indépendants.
    Un troisième point que nous voulons examiner, c'est l'autre facteur principal de variation entre les différentes structures de coût de l'essence, à savoir les taxes provinciales, fédérales et municipales. Ces taxes prennent diverses formes et diffèrent grandement d'une région à l'autre. Il y a d'autres données que je peux présenter sur cette question dans les diapositives qui suivent.
    La diapositive 9 montre l'évolution de 2007 à 2011. La ligne verte représente le prix du pétrole brut. La ligne rouge représente les coûts et les marges de raffinage et de marketing, une fois ajoutés. La ligne violette représente le prix une fois les taxes ajoutées. On peut voir que le prix de l'essence suit fidèlement le prix du pétrole brut et que la variation est attribuable simplement à la différence liée aux deux autres facteurs. Si le prix du pétrole brut augmente sur le marché mondial, il en est de même pour le prix de l'essence que paient les consommateurs à la pompe.
    Passant maintenant à la diapositive 10 qui traite des coûts et des marges de raffinage et de marketing, je veux attirer l'attention sur deux choses. La première, c'est la ligne bleue ou violette. La ligne droite représente la moyenne. Si votre graphique est en noir et blanc, c'est la ligne supérieure du graphique, qui donne la marge de raffinage, qui, en ce moment, est légèrement plus élevée que la moyenne pour l'ensemble du Canada, et les niveaux. Mais on constate, lorsqu'on regarde la tendance, qu'il s'agit d'un graphique cyclique et que, certainement, cela se situe à l'intérieur des étendues que l'on observe normalement.
    Je veux attirer l'attention sur un autre aspect derrière le modèle utilisé dans ce graphique particulier. Le modèle examine, dans le temps, le prix de référence du pétrole brut sur les marchés nord-américains. Si je voulais attirer votre attention sur le mois de novembre 2010, à partir de novembre 2010, le prix de référence du pétrole brut en Amérique du Nord, qui, traditionnellement, suit de très près le prix du brut mondial, s'est écarté, de sorte que le prix du pétrole brut nord-américain est, en fait, plus bas que le prix de référence du pétrole brut mondial. Alors, étant donné que le Canada est à la fois un exportateur et un importateur de pétrole brut, le modèle n'a pas capturé la variation qui existe effectivement entre le prix du brut mondial et le prix du brut nord-américain.
    La variation entre ces prix aujourd'hui est d'environ 20 $ le baril, mais au cours des sept derniers mois, elle a fluctué entre 3 $ et 20 $ le baril. Alors, lorsqu'on tient compte de la consommation de pétrole brut importé à un coût plus élevé dans le modèle, le modèle réduit, en fait, la marge des raffineurs d'environ 6 ¢ le litre, ce qui signifie qu'elle est très proche de la moyenne réelle qui existe ces dernières années au Canada. Alors, un des facteurs est la variation du prix du pétrole brut et quel type de pétrole brut les raffineurs utilisent pour produire l'essence.
    La deuxième partie, concerne la distribution en termes de marge de détail, c'est-à-dire la ligne inférieure. Si on regarde cette ligne, on peut constater que la marge de détail actuelle est presque identique à la moyenne au cours des dernières années, alors, la variation en ce qui a trait à cette marge n'est pas significative du point de vue statistique.
(1550)
    Pour ce qui est de la troisième composante dont il est question à la diapositive 11, à savoir les taxes provinciales, municipales et fédérales, il faut dire que les taxes d'accise fédérales sur l'essence et le diesel sont de 10 et 4 ¢ le litre, respectivement. Au Canada, la moyenne des taxes provinciales et territoriales sur l'essence étaient plus élevées de 5,5 ¢ par litre en 2011, comparativement à 2008. Ces variations sont dues à différents facteurs dont assurément les écarts entre les taxes provinciales touchant notamment le transport et le carbone.
    À la diapositive 12, nous donnons des exemples des différentes variations enregistrées au pays pour ce qui est de la taxe fédérale, des taxes provinciales, de la taxe de vente harmonisée, des taxes municipales et de celles sur le carbone. Ainsi, il y a en Colombie-Britannique une taxe sur le carbone en plus d'une taxe municipale. À Montréal, il y a également une taxe municipale. Le coût de l'essence à la pompe pour le consommateur s'en trouve donc majoré dans ces régions du pays.
    En résumé, les prix de l'essence ont tendance à suivre ceux du pétrole brut, alors que les coûts et les marges de raffinage et de marketing sont cycliques. Dans certains cas, ces marges sont maintenant un peu plus élevées qu'à d'autres périodes, mais elles demeurent à l'intérieur des échelles historiques. Elles font certes partie de l'équation. Les principales variations entre les prix de l'essence d'une ville à l'autre sont attribuables aux différences entre les taxes provinciales, territoriales et municipales.
    Merci beaucoup.
    Merci beaucoup.
    Un grand merci pour ces dix minutes d'une analyse fort intéressante, monsieur Labonté.
    Nous passons maintenant à M. Boag qui dispose également de dix minutes.
    Un grand merci à vous, monsieur le président, ainsi qu'aux membres du comité de me donner l'occasion de présenter le point de vue des raffineurs et des négociants concernant les fluctuations des prix du carburant et la transparence en la matière. L'Institut canadien des produits pétroliers (ICPP) représente les entreprises qui produisent et mettent en marché de l'essence, du diesel, du carburant pour l'aviation, du mazout et toute une gamme d'autres produits pétroliers.
    Voici d'abord quelques données intéressantes au sujet de notre industrie. Les membres de l'ICPP exploitent 16 raffineries qui emploient 17 500 travailleurs au Canada. Nous fournissons du carburant à 12 000 détaillants. Comme Mme Anderson l'a déjà souligné, les détaillants canadiens offrent en outre de l'emploi à quelque 82 000 personnes additionnelles. Les membres de notre industrie investissent en moyenne 2,8 milliards de dollars par année et contribuent annuellement à hauteur de 2,5 milliards de dollars au PIB canadien. Au cours des dix dernières années, notre industrie a dépensé 8 milliards de dollars pour l'assainissement environnemental de ses raffineries — un investissement, ajouterais-je, qui n'a pas permis de produire une seule goutte supplémentaire de carburant pour les Canadiens.
    Notre industrie comprend la frustration des Canadiens à l'égard de l'instabilité des prix de l'essence, car ceux-ci sont un facteur à considérer parmi les nombreuses décisions à prendre pour équilibrer le budget familial. Bien que certains consommateurs soient portés à croire qu'il y a un manque de transparence dans l'établissement des prix de l'essence, je dirais que c'est tout à fait le contraire.
    Je vais d'abord vous expliquer les quatre facteurs qui contribuent à déterminer le prix à la pompe. Comme M. Labonté vient de vous parler de ces aspects, certains de mes commentaires vous paraîtront un peu répétitifs. Quoi qu'il en soit, ces facteurs se manifestent en toute transparence et sont soumis à des influences uniques qui, indépendamment les unes des autres, peuvent engendrer des changements du prix à la pompe. Le premier facteur est le prix du pétrole brut; le deuxième est le prix de gros des produits raffinés; le troisième est la marge de détail; et les taxes sont le quatrième facteur.
    Le pétrole brut est une marchandise qui se négocie sur les marchés mondiaux. Le prix du marché du pétrole brut dépend en tout temps des évaluations des négociateurs boursiers quant aux conditions de l'offre et de la demande, tant actuelles que futures. Ces évaluations prennent en compte une variété de facteurs comme les conditions économiques, les catastrophes naturelles et les situations géopolitiques ou militaires, surtout dans les principales régions productrices de pétrole.
    Le cours de transaction quotidien et futur de divers types de pétrole brut, tel que le West Texas Intermediate (WTI) et le Brent, sont établis et affichés aux bourses de marchandises, comme le New York Mercantile Exchange (NYMEX). Ces cours sont publiés dans les journaux et peuvent être consultés sur Internet à n'importe quelle heure de la journée.
    Les prix les plus souvent mentionnés dans les médias sont les cours futurs, et non le prix au comptant du jour; une source majeure de confusion entourant le lien entre le prix du pétrole brut et celui du produit à la pompe. Les cours futurs, comme l'appellation le suggère, représentent une estimation du prix du pétrole brut à une date ultérieure donnée.
    Il importe aussi de savoir que l'essence se transige également sur les bourses de marchandises comme le NYMEX. Cependant, contrairement au prix du pétrole brut, ces prix de gros qui sont déterminés par l'activité boursière sont rarement rapportés dans les médias. Étant donné que les détaillants achètent de l'essence, et non du pétrole brut, ce prix de gros constitue un facteur plus pertinent que celui du pétrole brut pour influer sur le prix à la pompe.
    Même si le prix du pétrole brut est un facteur influant sur les prix de gros de l'essence, les conditions sous-jacentes de l'offre et de la demande, actuelles et anticipées, se révèlent souvent bien plus importantes pour influencer les décisions boursières et, par le fait même, le prix de gros de l'essence. D'autres facteurs comme l'entretien courant des raffineries, les incidents imprévus, les conditions météorologiques défavorables, les hausses ou les chutes temporaires de la demande et les niveaux des stocks en essence ont tous le potentiel d'influer sur l'équilibre entre l'offre et la demande et d'entraîner des fluctuations du prix de gros qui sont indépendantes du prix du pétrole brut.
    Ainsi, les prix de gros, et par conséquent de détail, de l'essence peuvent augmenter même si les cours du brut descendent, et inversement. Vous trouverez dans notre mémoire un graphique illustrant les liens entre le prix du pétrole brut, le prix de gros de l'essence et son prix de détail au cours des quatre dernières années.
    Dans l'ensemble, le Canada ne représente qu'un petit segment d'un vaste marché nord-américain intégré des carburants. Comme il n'existe pas de marché distinct pour le Canada, les prix de gros canadiens correspondent aux prix des marchés adjacents aux États-Unis.
    Lorsque les transactions boursières font grimper les cours de gros aux États-Unis, les prix de gros canadiens suivent pour que le produit demeure au Canada. Sinon, les acheteurs des États-Unis se procureraient du carburant canadien à prix inférieur et le Canada se retrouverait en rupture de stock.
(1555)
    À l'inverse, lorsque les prix de gros aux États-Unis baissent, les prix canadiens en font autant. Autrement, les détaillants canadiens achèteraient le carburant aux États-Unis à un prix de gros inférieur.
    Les prix de gros sont fixés localement en fonction notamment des coûts de transport du point d'approvisionnement jusqu'au détaillant, ce qui explique les écarts entre les prix de gros d'une collectivité à l'autre au pays.
    Les prix de détail fluctuent habituellement, à la hausse ou à la baisse, à la suite de changements des prix de gros, et bien que ces derniers suivent généralement de près les prix du pétrole brut, ce n'est pas toujours le cas en raison de la dynamique particulière de l'offre et de la demande en matière d'essence. Lorsque les conditions et les prix de gros changent rapidement, les prix à la pompe deviennent instables. Le résultat peut être un changement subit des prix à la pompe alors que les détaillants réagissent pour maintenir une marge de vente viable ou tenter d'acquérir un avantage de prix concurrentiel par rapport aux compétiteurs. Ces fluctuations et cette instabilité des prix locaux témoignent d'un marché fortement concurrentiel, même si bon nombre de consommateurs perçoivent le contraire.
    Les marges de détail et les taxes sont aussi des facteurs qui influent sur les prix à la pompe. Comme l'indiquait Mme Anderson, les marges de détail incluent tous les coûts d'exploitation d'un commerce de détail, et pas seulement le profit. Comme elle le soulignait également, la majorité des détaillants sont des gens d'affaires indépendants qui prennent eux-mêmes leurs décisions quant à leurs prix de détail, même s'ils font des affaires sous l'une des grandes bannières commerciales. Seulement 16 p. 100 des stations d'essence sont assujetties au contrôle des prix par l'une des trois grandes sociétés pétrolières canadiennes. Dans 74 p. 100 des cas, les prix sont contrôlés par des fournisseurs ou des négociants qui ne sont pas des raffineurs. Les détaillants offrent aussi parfois un éventail de services comme un dépanneur, un lave-auto ou un centre de réparation automobile.
    Les prix de gros n'incluent pas les taxes, ce qui brouille souvent les comparaisons que les gens souhaitent établir entre le prix de gros et le prix de détail. Ce dernier comprend les taxes fédérales et provinciales de même qu'une taxe locale additionnelle dans certaines villes, comme Vancouver. Dans notre exposé, vous verrez un graphique à barres illustrant les différentes composantes des prix de l'essence dans les grandes villes canadiennes.
    Les taxes sont l'une des raisons principales des écarts entre les prix à la pompe dans les différentes régions du Canada et représentent aussi la raison majeure pour laquelle les prix à la pompe sont généralement inférieurs aux États-Unis. En moyenne, les Canadiens paient plus de 35 ¢ le litre en taxes sur le carburant, alors que la moyenne est de seulement 12 ¢ le litre aux États-Unis. Il y a donc un écart moyen de 23 ¢ le litre.
    En terminant, il ne faut pas sous-estimer l'influence que les consommateurs exercent sur les prix. Le comportement des consommateurs a un effet direct sur les prix à la pompe, car les détaillants se livrent concurrence pour obtenir leur clientèle. Les consommateurs comparent les prix au volant de leur voiture et prennent leur décision d'achat en fonction de prix clairement visibles qui sont affichés sur les plus grands panneaux de l'industrie de détail.
    La transparence caractérise la détermination des prix de l'essence. À chacune des étapes de la chaîne de valeur, les composants des prix sont disponibles et accessibles à la considération du public. Ils sont essentiels pour comprendre la valeur ajoutée par ceux qui participent au raffinage, à la distribution et à la vente des produits pétroliers.
    Je vous remercie à nouveau de nous avoir donné l'occasion de vous fournir ces indications sur les facteurs influant sur les prix de l'essence. J'ose espérer que ces renseignements vous seront utiles. Je vous encourage en outre à consulter notre site web ou à communiquer avec nous si vous souhaitez obtenir des informations plus détaillées.
    Je me ferai un plaisir de répondre à vos questions.
(1600)
    Merci beaucoup, monsieur Boag.
    La parole est maintenant à M. Ervin. Vous avez dix minutes.
    Bonjour à tous. Je vous remercie de votre invitation à comparaître aujourd'hui devant votre comité pour parler des prix de l'essence. C'est la réputation de notre firme comme spécialiste impartiale en matière de raffinage et de vente du pétrole qui nous vaut cette invitation du comité. Notre notoriété s'est affirmée auprès d'une vaste gamme d'entreprises faisant partie de notre clientèle, y compris les ministères des gouvernements fédéral et provinciaux — ainsi la majeure partie des données publiées sur le site web de Ressources naturelles Canada viennent de nous —, les grands consommateurs institutionnels de produits pétroliers, les milieux universitaires et, bien sûr, les compagnies pétrolières de toutes tailles, des grandes multinationales aux petites entreprises indépendantes régionales.
    Au fil de nos quelque 30 années et plus de vie professionnelle au sein de cette industrie, la majeure partie à titre de consultant dans ce secteur, ma firme et moi-même avons réalisé une multitude d'études sur la nature de la compétition et du marketing en ce qui a trait aux ventes de produits pétroliers, ainsi que des travaux d'analyse et de surveillance continues des prix du carburant, notamment les prix de l'essence au détail et leurs éléments constitutifs.
    On peut décrire la raison de la préoccupation de ce comité à l'égard des prix du carburant par le mot « transparence ». Quel est le degré de transparence des prix à la pompe et comment peut-on les rendre plus transparents? Je désire aujourd'hui répondre à ces deux questions et présenter quelques recommandations.
    Je vous prie de m'excuser à l'avance si certaines de mes observations peuvent sembler similaires à celles des témoins qui m'ont précédé, mais j'estime que cela illustre bien les principes communs qui sont en jeu.
    Pour évaluer la transparence de l'industrie pétrolière en ce qui a trait aux prix à la pompe, il faut se pencher sur la transparence non pas d'un seul marché, mais bien de trois marchés distincts: celui du pétrole brut, celui du gros et, enfin, celui du détail.
    Le pétrole brut est la matière première à partir de laquelle l'essence est fabriquée et son marché constitue sans doute l'un des plus transparents de tous sur le plan du prix. En fait, de quel autre produit une personne raisonnablement bien informée peut-elle vous donner le prix de la matière première? En effet, plusieurs médias font état quotidiennement du prix du brut; la transparence qui en résulte mène inéluctablement à la question: « Si le prix du brut a chuté hier, pourquoi donc le prix à la pompe n'en a-t-il pas fait autant aujourd'hui? »
    Cette question courante illustre parfaitement l'une des conséquences de la transparence: dans leurs efforts pour transmettre cette transparence au grand public, les médias négligent d'autres faits, pourtant tout aussi disponibles, et d'une importance primordiale. J'estime que l'on essaie de simplifier les choses pour les gens, et non pas de les induire en erreur.
    Par exemple, lorsque l'on se fait dire que le prix du pétrole brut de la journée est de 93 $ le baril, comme c'était le cas il y a quelques jours, il est rare d'entendre la précision qu'il s'agit du prix à la livraison à Cushing, en Oklahoma, et non à une raffinerie de Toronto, par exemple. Personne ne précise non plus que ce prix s'applique à une qualité particulière de pétrole brut ni que d'autres qualités sont moins chères à l'achat, mais plus coûteuses à transformer en essence. On ne tient pas non plus compte des écarts dans le prix du pétrole brut découlant de l'offre et de la demande, plutôt que des simples différences de qualité. Les pétroles bruts WTI et Brent, qui viennent respectivement des États-Unis et des côtes du Royaume-Uni, sont de qualité semblable, mais peuvent présenter une différence de prix atteignant 10 $ le baril en raison de l'influence de facteurs liés à l'offre et à la demande. Plus important encore, il est rarement dit que le prix énoncé repose sur de futures négoces et non pas sur le prix que les raffineurs risquent de payer le jour même ou le lendemain, comme l'indiquait également M. Boag.
    Voilà les faits qu'il faut connaître si l'on veut mieux comprendre le lien entre le prix du pétrole brut et celui de l'essence à la pompe, et même alors, l'explication ne serait pas exhaustive. La raison en est qu'il existe un critère nettement plus important à prendre en compte que le prix du pétrole brut lorsqu'on veut comprendre la nature des prix de l'essence et ce critère, c'est le prix de gros de l'essence. Comme les négociants en carburant et les grossistes achètent non pas du pétrole brut, mais de l'essence en gros, c'est le prix de gros de l'essence qui influence le plus directement le prix à la pompe, et non le prix du brut.
    Le prix de gros ne suit pas simplement le prix du brut dans ses mouvements à la hausse ou à la baisse. Bien que l'on puisse constater à long terme une relation au quotidien, il y a des écarts qui sont parfois considérables, car l'essence est soumise à ses propres variables d'offre et de demande, ce qui amène le prix de gros à grimper en temps de resserrement de l'offre même si les prix de brut alors en vigueur sont à la baisse, ou inversement.
(1605)
    Les prix de gros de l'essence sont également transparents. Plusieurs raffineurs affichent leurs prix de gros sur Internet au profit de tous, et d'autres entreprises, comme la nôtre et le Kent Group, colligent ces données pour dresser des rapports unifiés qu'elles publient ensuite.
    Malheureusement, les médias grand public ne publient pas systématiquement les prix de gros, de sorte que plusieurs continuent à se fonder sur le prix du brut pour tenter de comprendre les prix de l'essence. Celui-ci est pourtant un bien piètre, voire inutile, indice dans la prédiction des mouvements des prix à la pompe au quotidien.
    Ce qui m'amène à parler de la transparence des prix à la pompe. L'essence est l'un des rares produits que l'on peut magasiner par comparaison en roulant à 60 kilomètres à l'heure. On peut même de plus en plus en comparer les prix par Internet ou à partir de son téléphone intelligent avant même de quitter la maison. C'est pourquoi je dirais que l'essence figure parmi les produits de consommation dont le prix de détail est le plus transparent au Canada, à cause de la transparence de prix qui existe à l'échelle du pétrole brut, du prix de gros et des marchés de détail.
    Même si l'on convient de la transparence des prix, la question demeure: « Ces prix sont-ils équitables? » Pour répondre correctement à cette question, il faut examiner chacun des composants du prix à la pompe, notamment le coût du pétrole brut, la marge de profit du raffineur du produit fini en gros par rapport au produit brut, la marge de profit du détaillant/négociant du prix de détail par rapport au prix de gros et, enfin, les taxes sur le prix de l'essence.
    On peut faire valoir que les prix du pétrole brut sont trop élevés, à l'instigation des spéculateurs ou des cartels pétroliers. Quelles qu'en soient les raisons, les producteurs canadiens vendent le pétrole brut aux prix du marché international et les raffineurs canadiens achètent le brut à ces mêmes prix. Bref, le prix du brut échappe au contrôle de l'industrie pétrolière canadienne.
    De la même façon, la marge de profit par le raffineur, ce que l'industrie appelle la « marge de craquage », ne peut être fixée arbitrairement par les raffineurs canadiens. Les prix de gros doivent être concurrentiels avec ceux des États-Unis. S'ils sont trop élevés, les négociants canadiens vont traverser la frontière pour s'approvisionner; s'ils sont trop bas, les négociants américains vont vider les stocks canadiens, et les consommateurs se réjouiraient peut-être des bas prix à la pompe, mais ne pourraient en profiter, faute d'essence.
    La marge de profit du détaillant est-elle équitable? Voilà un concept subjectif, mais il existe tout de même des données objectives qui permettent d'avancer une réponse à cette question. La chute du nombre de postes de détail, de 20 000 à moins de 13 000 au cours des 15 dernières années, laisse croire qu'il ne s'agit pas là d'un commerce si profitable. Le fait que certains protagonistes traditionnels du commerce de détail de l'essence se sont départis, en tout ou en partie, de la propriété ou de l'exploitation au quotidien de leurs réseaux de marque pourrait ainsi inciter à penser que la vente au détail d'essence n'a pas contribué fortement aux revenus des grandes compagnies pétrolières. Ajoutons enfin que depuis 20 ans, la marge de profit à la vente de détail du brut au Canada est demeurée pratiquement la même en termes de valeurs nominales et a même diminué en valeurs constantes. Voilà qui en dit long sur l'équité du prix de détail.
    J'affirme donc qu'un certain nombre de mécanismes commerciaux au niveau des marchés du pétrole brut, de gros et de détail, participent à l'équité du prix des produits pétroliers. Ceci dit, un prix équitable n'est pas nécessairement un bas prix selon les normes des consommateurs. Toutefois, si les prix du carburant sont équitables, pourquoi donc éprouve-t-on un tel doute par rapport à l'équité des prix à la pompe?
    D'abord, il faut comprendre que l'essence occupe une place unique dans les biens de consommation: Elle constitue ce que les spécialistes de marketing appellent un achat relativement imposé. En effet, contrairement à la plupart des autres biens, personne ne se soucie de sa couleur, de son odeur, de son goût, de l'image transmise, du sentiment de sécurité ou de bien-être qu'elle procure. En conséquence, on s'intéresse généralement uniquement à son prix.
    Ensuite, la visibilité et l'instabilité du prix à la pompe, l'élément même de son caractère concurrentiel, créent en réalité l'impression inverse dans l'esprit de nombreux consommateurs. C'est un paradoxe énorme. La forte transparence de l'industrie pétrolière est la raison même de son caractère hautement concurrentiel depuis des années et pourtant, c'est cette même transparence qui, de diverses façons, crée l'impression contraire auprès des médias, du public et, souvent, des organismes de régulation qui reçoivent leurs consignes des représentants élus.
(1610)
    Je vais conclure en faisant une recommandation. Cette industrie est déjà très transparente, mais nous aimerions qu'elle le soit davantage en fournissant des données plus complètes sur les prix de l'essence partout au Canada. À l'heure actuelle, par exemple, notre compagnie recueille des données, de façon hebdomadaire, sur les prix à la pompe. Grâce au transfert électronique des données, rien ne peut justifier qu'on ne traite pas l'information tous les jours, 24 heures sur 24, et ce, partout au pays. Pour arriver à ce degré d'information et de visibilité, on a besoin d'une assurance de l'industrie, et particulièrement du Bureau de la concurrence, qui confirme que la communication des données sur les prix n'enfreint pas la Loi sur la concurrence du Canada.
    Encore une fois, ces recommandations visent à accroître la transparence de l'industrie, mais par sa nature même, cette industrie sera toujours exposée au regard scrutateur des consommateurs, surtout lorsque les prix sont à la hausse.
    Merci.
    Merci, monsieur Ervin.
    Merci également à tous nos témoins pour leurs déclarations.
    Nous allons maintenant enchaîner avec la période de questions.
    Monsieur Lake, vous disposez de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je tiens à remercier nos témoins pour leurs excellents exposés. Quelle bonne façon d'amorcer les travaux du Comité de l'industrie.
    Tout d'abord, j'aimerais vous adresser une question que mes concitoyens se posent régulièrement. Je n'y irai pas par quatre chemins. Comment se fait-il que lorsqu'une station-service augmente ses prix, en moins de 15 minutes, les autres stations à proximité affichent eux aussi des prix plus élevés? Aussi scientifique que l'établissement des prix de l'essence puisse être, ce n'est pas le cas ici. C'est ce que diraient la plupart des consommateurs en voyant cela. Pourriez-vous nous expliquer alors pourquoi les prix semblent monter en flèche partout au même moment, particulièrement le jeudi avant un long week-end?
    Tout d'abord, sachez que les détaillants d'essence se livrent une très forte concurrence. Souvent, lorsqu'un détaillant augmente ses prix, et que les autres aux alentours l'imitent — ce qui ne se fait pas toujours aussi rapidement que vous le dites —, c'est parce qu'on vend l'essence au prix coûtant ou à un prix moindre, et qu'on a hâte de générer une marge positive. C'est possible, mais cela se reflète à la pompe. Les exploitants, c'est-à-dire les gens à la tête de nos stations, nous tiennent au courant des prix du marché. Si l'exploitant voit qu'un compétiteur augmente ses prix, il nous en informera immédiatement. Nous décidons ensuite d'augmenter nos prix en fonction de lui ou non. Nous pouvons refuser si ce n'est pas réaliste, mais, habituellement, la hausse des prix à la pompe est liée aux prix de gros, aux prix du brut, etc.
    Pour ce qui est de la hausse des prix avant un long week-end, je dirais que c'est une pure coïncidence. Si vous consultez les données fournies par les diverses organisations, vous constaterez que cette hausse correspond à l'augmentation des prix de gros et du brut. Autrement, pourquoi l'industrie agirait-elle ainsi? Je considère que ce serait un moyen très primitif d'arnaquer les consommateurs au motif qu'ils vont se déplacer davantage au cours du week-end. C'est un pur hasard. C'est mon avis.
(1615)
    Monsieur Boag, avez-vous quelque chose à ajouter?
    En fait, je pense que M. MacEwen, qui est propriétaire de stations-service, a très bien répondu. Je vais donc m'en remettre à lui, car j'estime que c'est le type d'expérience concrète qui peut probablement mieux illustrer la situation que je pourrais l'expliquer.
    Je m'adresse maintenant aux représentants du ministère des Ressources naturelles. Je regarde la 10e diapositive, et il me semble que la marge de détail se situe très près de la ligne. Vous avez parlé de la nature cyclique de la marge de raffinage, mais je ne suis pas certain qu'on m'ait donné une explication à ce sujet. J'ai l'impression que les prix varient constamment et je ne connais pas la cause de ces fluctuations importantes.
    Pour ce qui est des marges de raffinage et des structures de coûts, il ne faut pas oublier que chaque année, les raffineries doivent souvent interrompre leurs activités à des fins d'entretien et investir dans les immobilisations afin de maintenir leurs installations de production à un niveau optimal.
    Comme il y a de nombreuses variétés de pétrole brut, les raffineries sont souvent appelées, d'une manière cyclique, à modifier leurs méthodes de production. Les raffineries sont à la fine pointe de la technologie, du point de vue des opérations, et elles s'efforcent de tirer le maximum de chaque once de pétrole ou de brut. Il y a donc des variations liées à ces aspects.
    L'autre aspect est la provenance et le prix du brut. J'ai indiqué plus tôt qu'il y avait une différence entre le pétrole produit en mer et celui produit en Amérique du Nord. On peut donc voir une fluctuation — de la ligne par rapport à la moyenne —, dont notre modèle n'a pas tenu compte en raison de l'écart entre les prix nord-américains et mondiaux. Pendant longtemps, il n'y avait pas une énorme différence. Aujourd'hui, l'écart est assez substantiel et il se creuse de plus en plus avec le temps.
    Nous voulons ajuster notre modèle. Nous avons dégagé d'autres aspects juste avant d'arriver ici pour vous démontrer que la nature cyclique est en fait moins marquée lorsqu'on se penche sur l'établissement des prix du brut sur les marchés mondiaux et nord-américains.
    C'est donc un des facteurs qu'il faut prendre en considération.
    On a parlé plus tôt de spéculation dans le marché à terme et de son incidence sur le prix de l'essence. Pourriez-vous nous en dire davantage à ce sujet?
    Nous pouvons certainement essayer de vous éclairer là-dessus, mais il y a d'autres personnes autour de cette table qui ont des opinions tout aussi subtiles.
    Comme plusieurs témoins l'ont déclaré, les cours du pétrole dans le futur ne sont qu'une question de spéculation, c'est-à-dire qu'ils correspondent à ce que les gens croient qu'ils seront à l'avenir. C'est ce que nous verrons dans les médias. Il se peut que ce prix ne concorde pas avec celui qu'on a payé pour acheter ou expédier le pétrole; c'est un prix quelque part dans le monde.
    En Amérique du Nord, il y a le West Texas Intermediate, à Cushing, en Oklahoma. Au Canada, il y a l'Edmonton Par, qui est expédié à Edmonton. Toutefois, d'Edmonton à Sarnia, cela fait beaucoup de pipelines, de droits de transport, etc. Il y a aussi le pétrole Brent, qui est expédié au Royaume-Uni.
    Cela dépend des variations liées au transport du brut et au type de brut dont il est question. On a beaucoup simplifié les choses pour aider les gens à comprendre, mais cela ne nous aide pas à comprendre, en tant que consommateurs, l'écart entre la spéculation et la réalité, c'est-à-dire jusqu'à l'acheminement aux points de vente au détail.
    Quelqu'un d'autre souhaite-t-il intervenir? Monsieur Ervin? Monsieur Boag?
    Je n'ai que quelques remarques à faire.
    Dans ces graphiques, on peut voir des variations selon les saisons. Par exemple, la demande d'essence est plus élevée pendant l'été, la saison des vacances et des déplacements en voiture. Chose certaine, l'arrivée du printemps influe sur l'offre et la demande, étant donné que les raffineurs essaient de se constituer des réserves. Cela a une incidence sur la marge de raffinage. L'inverse se produit à l'automne, où on assiste à une baisse de la demande, ce qui a un impact sur l'utilisation de la capacité.
    Il y a aussi la saisonnalité des autres produits. Il ne faut pas oublier que l'essence n'est qu'un produit du pétrole parmi d'autres. Un baril de pétrole n'équivaut pas à un baril d'essence. Il y a plusieurs autres sous-produits, mais l'essence est celui dont la valeur est la plus élevée.
    Il y a donc des fluctuations saisonnières relativement à la demande selon la composante du baril de pétrole qui est nécessaire pour l'essence.
(1620)
    C'était la dernière question de ce tour.
    Monsieur Masse, la parole est à vous pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vais partager mon temps avec M. Thibeault.
    Une chose qui n'a pas été dite et qui est très importante, c'est le fait que cette industrie est le produit du public canadien. C'est une industrie gérée par des multinationales étrangères qui enregistrent des profits, des bonus et des paiements records.
    À mon plus grand étonnement, on n'a pas parlé de l'octroi de subventions à cette industrie. Cette industrie reçoit des milliards de dollars chaque année dans le cadre de diverses mesures. Je vais vous en énumérer quelques-unes qui sont dignes de mention.
    Il y a tout d'abord les réductions de l'impôt des sociétés auxquelles on assiste depuis quelques années. Il n'y a pas de doute là-dessus. Je tiens à rappeler à tout le monde que nous empruntons cet argent et que nous payons des intérêts, et ce, jusqu'à ce que nous réalisions un excédent. Il y a également les actions accréditives de même que les dispositions visant les frais d'exploration au Canada, les frais d'aménagement au Canada, les frais à l'égard de biens canadiens relatifs au pétrole et au gaz, ainsi que la déduction pour amortissement.
    Les plus récentes données indiquent qu'en 2008, cette industrie n'a payé, en moyenne, que 10,5 p. 100 d'impôt fédéral, alors que le secteur manufacturier ou les petites entreprises en ont payé 16,5 p. 100.
    Je demanderais donc à MM. Boag et Labonté de répondre à ma question: pourquoi les contribuables canadiens doivent-ils subventionner cette industrie, compte tenu de la marge de profit des multinationales?
    Je vais vous répondre en premier, monsieur Masse.
    Tout d'abord, je suis ici pour représenter l'industrie en aval. Ce secteur correspond au raffinage et à l'approvisionnement, et dans certains cas, à la vente au détail. C'est donc en grande partie une industrie manufacturière, et il n'y a pas de doute que ce secteur bénéficie du même niveau d'imposition et des mêmes crédits d'impôt à l'investissement, etc., que tout autre secteur manufacturier.
    Certains de nos membres ne sont pas des compagnies membres intégrées. En fait, deux des plus importants raffineurs au Canada ne sont que des raffineurs. Ils n'ont pas de modèle d'entreprise intégré. Ils n'ont pas d'actifs en amont.
    L'industrie du raffinage reçoit le même traitement, sur le plan de l'imposition et des subventions, que les autres secteurs manufacturiers.
    Monsieur le président, je tiens à dire que toutes les mesures qui ont été mentionnées relèvent du ministère des Finances. Nous devrions faire comparaître des représentants de ce ministère afin d'avoir plus de détails là-dessus.
    Tout d'abord, sachez que les compagnies ne sont pas admissibles à toutes ces mesures en même temps. Elles ont droit à l'une ou l'autre. Je dois aussi préciser que le dernier budget prévoyait une réforme, ce qui a fait en sorte qu'on a apporté des changements qui ont eu une incidence sur les quelques-unes de ces mesures.
    Ces mesures existent encore. Si ces subventions étaient éliminées progressivement, croyez-vous que cela nuirait à l'industrie? Même si cela relève du ministère des Finances, à votre avis, une réduction massive de ces subventions gouvernementales aurait-elle une incidence sur l'industrie, compte tenu de ses revenus nets?
    Encore une fois, monsieur le président, vous devrez interroger des représentants du ministère des Finances pour obtenir des explications plus détaillées.
    Je tiens cependant à préciser que la plupart des mesures que vous avez énumérées sont en fait des déductions auxquelles sont admissibles divers secteurs d'activité. Des représentants du ministère des Finances seraient mieux placés que moi pour répondre à votre question.
    J'aurais une autre question — qui s'adresse davantage à vous, selon moi, mais j'invite tout de même les autres témoins à intervenir — concernant la réduction de la TPS au cours des dernières années. À qui cette réduction a-t-elle profité? Nous avons vu les profits augmenter, de même que le prix de l'essence. Qu'est-il advenu de ces 2 ¢? Qui en a bénéficié?
    Compte tenu de tous les facteurs dont nous avons parlé qui entrent dans l'établissement du prix de l'essence, vous comprendrez qu'il m'est impossible de vous dire précisément ce qui est advenu de ces 2 ¢ de réduction. Toutefois, si à ce moment-là, le prix de l'essence au détail avait augmenté ou si le prix du brut avait baissé, les facteurs en cause auraient entraîné une volatilité des prix de l'essence. Dans d'autres cas, il y a harmonisation entre les différents taux d'imposition. Il y a donc plusieurs facteurs qui entrent en ligne de compte.
    Je ne peux pas me prononcer sur la corrélation qui existe entre la réduction de la TPS et la croissance des profits des compagnies pétrolières, par exemple.
(1625)
    Un changement au niveau de la TPS, par exemple une augmentation, se répercuterait à la pompe dès le lendemain. Selon notre analyse, si la diminution des taxes n'avait pas eu d'effet sur le consommateur, nous aurions assisté à une augmentation soutenue de l'écart entre la marge de raffinage et du prix au détail. Ce n'est pas ce qui s'est produit. Il est évident que ces changements ont une incidence sur le consommateur. Lorsque les prix au détail sont à la baisse, comme c'est souvent le cas, on ne voit pas les détaillants se garder une marge supplémentaire. En raison de la concurrence, cette marge diminue à un niveau soutenu, à un niveau historique quelque soit le marché. Les négociants ne voient pas leurs coûts sous-jacents diminuer pour autant.
    Cependant, l'industrie en général a réalisé de plus gros profits, et je ne crois pas que le consommateur a pu bénéficier de cette réduction.
    Je vais maintenant céder le temps qu'il me reste à M. Thibeault. Merci beaucoup d'avoir répondu à mes questions.
    Merci beaucoup.
    Je sais que nous sommes ici pour discuter des fluctuations des prix de l'essence et que nous blâmons tous les grandes compagnies pétrolières.
    Madame Anderson, vous avez parlé des frais d'utilisation des cartes de crédit et de l'incidence de ces frais d'interchange sur les petits détaillants. J'aimerais que vous nous en disiez davantage sur ces coûts et leurs répercussions sur les prix de l'essence.
    De toute évidence, comme je l'ai dit plus tôt, les frais d'utilisation des cartes de crédit constituent un pourcentage des ventes au détail, peu importe les produits qu'on achète. Ce qu'on voit souvent dans le secteur de la vente d'essence au détail, c'est le grand nombre de consommateurs qui choisissent de payer par carte de crédit, pour différentes raisons — que ce soit pour comptabiliser leurs achats ou pour effectuer des dépenses d'entreprise, etc. Quarante pour cent des consommateurs paient par carte de crédit. Lorsque les prix augmentent, comme je l'ai indiqué, il y a un lien direct avec les frais de 2 ou 2,5 p. 100 qui sont imputés au détaillant pour le traitement des cartes de crédit. Évidemment, cela va de pair avec l'augmentation du prix de l'essence.
    Comme je l'ai déjà dit, à l'heure actuelle, les coûts liés au traitement des cartes de crédit représentent environ 30 p. 100 de la marge d'exploitation des détaillants. Ils doivent assumer tous les autres coûts d'exploitation avec le 70 p. 100 restant.
    Les détaillants indépendants subissent les contrecoups de la hausse des prix et de l'utilisation des cartes de crédit, surtout lorsqu'il leur est difficile d'avoir des liquidités. Cela affecte réellement leur capacité de poursuivre leurs activités. Comme je l'ai indiqué plus tôt, ce sont les petites et moyennes entreprises qui, dans bien des cas, offrent des services essentiels dans des collectivités rurales et dans des petites collectivités qui sont les plus durement touchées.
    Merci, madame Anderson. C'est tout le temps dont nous disposons.
    Nous passons maintenant à M. McColeman, qui dispose de sept minutes.
    Merci à tous d'être présents et de nous aider à comprendre.
    Monsieur MacEwen, à une question de M. Lake, je crois, vous avez répondu que, parfois, vous vendez à perte, autrement dit, sous votre prix coûtant — si je me rappelle bien —, ce qui voudrait dire que, en d'autres occasions, votre marge est supérieure à la moyenne. Est-ce le cas?
    J'ai des antécédents dans le secteur de l'habitation, qui ressemble au vôtre. Il y a indéniablement des hauts et des bas. Est-ce de cette façon que les détaillants obtiennent leur moyenne?
    Non. Le fait de vendre de temps à autre notre produit à perte ne signifie pas que, en d'autres temps et lieux, nous majorons le prix du litre d'un certain montant. La concurrence entre les détaillants est féroce.
    Je comprends, en ce qui concerne la concurrence. Mais j'essaie de comprendre les fluctuations de prix qu'on observe de temps à autre. Ayant été propriétaire-exploitant d'une entreprise pendant toute ma vie active, je comprends, que, à la fin de l'année, il faut une marge minimale de profit à l'entreprise, sinon pourquoi lancer une affaire. Ma marge fluctuait et je dégageais une moyenne. Donc, si vous vendez à perte, cela signifie que vous devez avoir une marge très supérieure à la moyenne à d'autres moments.
    Est-ce que cela a du sens?
(1630)
    Oui, absolument. Je dirais que les détaillants contribuent à l'instabilité des prix. Vous avez raison. Mais, Allan essaie de dire que la férocité de la concurrence finit par faire chuter les prix. Dans certaines régions où on observe de fortes augmentations de prix, du jour au lendemain, les détaillants essaient de revenir à la marge recherchée. Si sa valeur moyenne est de 7 ¢ et si, pendant une journée ou deux, la marge est nulle, ils essaieront de la fixer à 8 ¢. Le cas échéant, l'écart sera de 8 ¢ du jour au lendemain.
    En fin de compte, et je reconnais notre entière responsabilité, les détaillants fixent le prix. Quel est leur impact réel? Contribuent-ils à l'instabilité? Agissent-ils comme des volants d'inertie? Accentuent-ils les variations de prix? Oui, mais cela ne leur profite pas. La hausse des prix les amène à constater que leur marge est malmenée, pour décrire la chose simplement. À 1,28 $, les banques s'enrichissent beaucoup plus que les détaillants d'essence.
    J'apprécie votre franchise, parce que, maintenant je comprends. Au bout du compte, quand vous examinez vos états financiers, vous voyez bien quelle est votre marge, ce qui est une incitation pour être en affaires. On comprend maintenant que, à certains moments, vos marges sont importantes et, à d'autres, réduites.
    Exact.
    Je pense cependant que cette vérité n'est pas si bien connue ou n'a pas été si bien divulguée, aujourd'hui. Elle explique une partie des fluctuations et leurs causes, du moins au niveau de la vente de détail. Je vous suis donc reconnaissant de votre franchise à ce sujet.
    J'ai une question pour M. Labonté. J'ai observé, dans votre dernier rapport intitulé Info-Carburant, que le prix du baril se répercute presque instantanément sur celui du litre d'essence, principalement parce que les détaillants utilisent la méthode de comptabilité dernier arrivé, premier sorti. Pouvez-vous expliquer, pour le profane canadien, ce qu'est cette méthode et comment elle peut, en principe, conduire à des fluctuations de prix?
    Je peux en donner la définition fondamentale pour le profane, mais d'autres spécialistes de l'industrie pourraient probablement parler de la raison d'être et de la mécanique de cette méthode.
    À mesure que le prix du brut augmente, les détaillants et les autres distributeurs sont en mesure de prévoir à peu près le coût futur du remplacement de leurs stocks. Si l'augmentation est rapide, il en ira de même pour le coût d'achat de l'essence, parce que les raffineurs vont également se procurer leur matière première à un coût supérieur. Ils pensent au coût de remplacement des stocks qu'ils possèdent. D'autres pourraient probablement vous parler d'autres aspects importants touchant l'essence et le commerce de gros, mais la méthode premier arrivé, premier sorti, pour déterminer le coût de remplacement des stocks, est la partie la plus simple de ce concept.
    Je voudrais alors questionner M. Ervin.
    Votre analyse indépendante de l'industrie et vos propos d'aujourd'hui portent plus précisément, je pense, sur le prix de gros de l'essence comme indicateur du futur prix de détail par rapport au prix du brut. Mais, d'après de ce que nous venons tout juste d'entendre, je pense — et corrigez-moi si je me trompe — qu'on porte un jugement spéculatif sur le prix éventuel de l'essence à partir du prix du brut.
    Je dirais que beaucoup de détaillants ignorent ce qu'est la méthode du premier arrivé, premier sorti. Quand un détaillant décide du prix du jour de l'essence, il s'arrête à deux choses. À combien d'abord coûtera l'achat du chargement de carburant qui se trouve actuellement dans ses réservoirs. Aux prix pratiqués par ses concurrents, ensuite. Il doit prendre une décision. Si le chargement coûte plus cher que le précédent, à moins de modifier le prix de détail, il diminuera sa marge, la différence entre les prix de gros et de détail, dans une mesure qui fera peut-être mal. D'autres détaillants pourraient trouver tout à fait supportable ce prix de détail parce que, faut-il préciser, en ville, ils écoulent divers produits qui leur permettent de jouer sur la marge. Parce qu'ils vendent plus de produits de consommation courante, ils peuvent en sacrifier une partie.
    Le niveau de confort varie donc d'un détaillant à l'autre, même dans le même marché.
    Revenons à notre premier détaillant. Il doit décider s'il maintiendra son prix au même niveau — parce que, s'il l'augmente, ses concurrents pourraient ne pas le suivre — ou s'il prendra le taureau par les cornes et élèvera le prix, dans l'espoir que les concurrents suivront, s'ils en ont autant besoin que lui. Cela a très peu à voir avec la comptabilité, et je dois vraiment me dissocier de M. Labonté sur ce point.
(1635)
    C'est ici qu'on s'arrête, monsieur McColeman.
    Passons maintenant à M. Regan, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Monsieur le président, nous avons entendu le gouvernement nous répéter presque à satiété, dernièrement, que l'économie se trouvait dans un état fragile. Peut-être devrions-nous parler de la fragilité du consommateur canadien, particulièrement à l'effet, que nous constatons actuellement, de la montée des prix des aliments et du carburant. Le phénomène a des effets particuliers sur les gagne-petit qui y consacrent une proportion élevée de leurs revenus.
    Selon un article publié aujourd'hui par la Presse canadienne, le secteur de la consommation a ralenti l'économie au cours du premier trimestre de l'année. En fait, d'après les données d'avril, les consommateurs canadiens ne sont pas prêts ou ne sont pas capables de revigorer l'économie au cours du deuxième trimestre. Nous devrions donc continuer de nous inquiéter de leur impact sur l'économie.
    Nous savons aussi que l'essence, dont les prix ont augmenté, vient chercher une proportion plus grande du revenu disponible. Compte tenu de tout cela, ma question est la suivante: si l'économie est la priorité des priorités du gouvernement, pourquoi la seule mesure qu'il prend à cet égard est de tenir une journée d'audiences? Je pense que c'est simplement de la poudre aux yeux et que nous devons nous attaquer à cela, pour commencer.
    Permettez-moi d'interroger M. Corey.
    Au cours d'audiences antérieures que le comité a consacrées au sujet, on nous a parlé d'une mesure qui pourrait être utile, un système de surveillance des stocks à la grandeur du pays. Le gouvernement libéral antérieur avait en fait mis sur pied un tel système, mais le gouvernement conservateur l'a abandonné. J'ignore pourquoi. Mais j'aimerais savoir s'il prévoit le remplacer. S'il était sérieux au sujet du problème, il le ferait. Que pouvez-vous me dire à ce sujet, s'il vous plaît?
    Pardonnez-moi, une seconde, pendant que je marque...
    Pardonnez-moi, je regardais M. Labonté tout en disant « monsieur Corey ». Cela me va si l'un des deux répond à la question.
    Je répondrai en traçant un bref historique.
    Au début des années 1990, Ressources naturelles Canada recueillait directement les données sur le pétrole et a acquis des compétences sur les marchés. À un certain moment, cependant, le ministère a mis fin à cette activité parce qu'il était en mesure d'accéder à ces données via le secteur privé, qui faisait le même travail. Il a donc commencé en établissant les divers types de renseignements auxquels il s'intéressait. Nous n'avons pas poursuivi le travail du Bureau d'information sur le prix des produits pétroliers (ou BIPPP), mais nous avons continué de produire Info-Carburant et nous avons actualisé hebdomadairement l'information publiée sur le site Web. Nous utilisons en fait les données qui proviennent en partie de la société de Michael, en partie d'autres sociétés, qui nous renseignent et des renseignements fournis par l'industrie, en confidence, ce qui nous permet d'examiner les divers cycles et tendances.
    Sans bureau qui possède un titre précis comme en 2005, le ministère continue cependant de s'occuper d'un certain nombre de fonctions et d'activités qui contribuent à nos analyses ainsi qu'à la surveillance et au suivi de nos activités.
    Je devine que le problème est que ce genre de renseignement n'est pas accessible au public.
    Cela m'amène à M. Ervin qui a dit que l'essence est assujettie à des variables de l'offre et de la demande qui lui sont propres, ce qui, à n'en pas douter, est un sujet important de la discussion que nous tenons aujourd'hui. Vous avez également parlé de la nécessité de données plus complètes, particulièrement à l'égard du prix du carburant, mais nous avons sûrement besoin des données sous-jacentes. Est-ce qu'un système de surveillance des stocks n'est pas un fournisseur important des données qui devraient être accessibles au public pour qu'il se fasse une idée de ce qui se passe?
    Ce serait un moyen utile de mesure; toutefois, on peut accéder, aux États-Unis, à une masse de données qui permettent de brosser un tableau de la fluctuation des stocks en Amérique du Nord, auquel il manque les données canadiennes. Ces données viendraient enrichir une mine déjà riche d'informations provenant des États-Unis. J'aimerais qu'un tel système voie le jour, pour avoir le plaisir de contempler un tableau complet des stocks nord-américains, plutôt que le tableau actuel qui se limite aux États-Unis.
(1640)
    D'accord.
    Passons à M. MacEwen, pour le peu de temps qui reste, malheureusement. Sept minutes, c'est très peu pour poser des questions.
    On vous a questionné au sujet des fins de semaine prolongées de l'été. Nous, les profanes, avons souvent l'impression que les hausses surviennent à toutes celles de juillet. Avons-nous tort? Diriez-vous que nous nous gourons, que nous imaginons des choses? Cela n'arrive-t-il pas?
    M. Ervin a envie de répondre à votre place et peut-être de vous tirer d'affaire, ce qui est bien.
    Allez-y, répondez, puis ce sera ensuite à M. MacEwen.
    Nous sommes par hasard au milieu d'une étude sur le sujet et, bien que je n'aie pas de données officielles à présenter, nos constatations préliminaires sont que, après examen des prix avant et après les fins de semaine prolongées des cinq dernières années, de l'évolution des prix dans les semaines précédant et suivant immédiatement ces congés, l'écart est négligeable. Il est presque nul. Autrement dit, aucune donnée objective n'appuie le mythe de l'augmentation des prix à la pompe avant les fins de semaine prolongées.
    Donc nous ne devrions pas nous inquiéter d'une nouvelle montée des prix à la pompe dans une semaine.
    Si nous devions parier l'un contre l'autre, sur cette éventualité, je pense que nous gagnerions tous les deux la moitié du temps.
    Ce que j'ai à dire est que les détaillants suivent les prix du gros. Nous ne faisons pas de profit supplémentaire pendant les fins de semaine prolongées.
    Très bien. D'accord.
    Le 1er janvier, le gouvernement conservateur a abaissé le taux d'imposition des grandes sociétés du pays de 1,5 p. 100 et, l'année prochaine, il récidivera. Pendant ce temps, le consommateur moyen paie davantage à la pompe. Chaque plein rapporte davantage de taxes fédérales. On soulage les gros, tandis qu'on pressure chaque fois de plus en plus les petits. Est-ce bon pour les consommateurs? Est-ce bon pour l'économie?
    Quelqu'un veut-il répondre à cela?
    Dans notre compagnie et dans notre entourage, nous le constatons, mais par personnes interposées. Les bas-salariés canadiens sont vraiment aux prises avec des prix élevés de l'essence. Les gagne-petit, la tranche de 20 p. 100 qui gagne le moins, finissent par dépenser... Aux États-Unis, une étude publiée dans le Wall Street Journal a montré que 8,8 p. 100 de leur revenu après imposition étaient consacrés au carburant. C'est excessif. Particulièrement dans un contexte de forte inflation des prix des aliments et du carburant, ils sont rudement touchés.
    Nous le constatons. Par chance, dans les Maritimes, nous sommes une petite société, et nous nous entraidons davantage, mais des personnes empruntent pour faire le plein afin d'aller à l'hôpital ou vaquer à des choses comme ça. D'autres, aux revenus fixes, viennent acheter 20 litres de mazout à la fois, comptant et sans livraison. Les ventes ont explosé de 50 p. 100 au cours de l'année.
    C'est troublant. Je ne pense pas que les prestations de soutien accordées aux économiquement faibles suffisent quotidiennement contre l'inflation des aliments et du carburant. Je ne sais pas; je ne suis que revendeur d'essence. Mais si vous pouviez faire quelque chose pour aider ces gens, ce serait formidable.
    Merci, monsieur Collins. C'est tout le temps dont nous disposons.
    Nous passons à une deuxième série d'interventions d'une durée de cinq minutes chacune.
    Monsieur Braid.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être ici cet après-midi.
    J'aimerais commencer par une question qui s'adresse à tout le groupe et j'aimerais l'éclairage du plus grand nombre. C'est la question que me posent le plus souvent mes électeurs, quand j'aborde le sujet avec eux.
    Beaucoup d'entre vous ont parlé des divers facteurs de fluctuation des prix de l'essence. Pourquoi l'effet de ces facteurs est-il instantané pour faire s'envoler les prix à la pompe, tandis que, dans le cas contraire, il semble terriblement lent?
(1645)
    Je pense que votre question illustre quelque chose dont j'ai parlé, c'est-à-dire qu'on base les comparaisons sur le prix du pétrole brut et non sur le prix de gros à la rampe. Si on comparait la fluctuation du prix à la pompe à celle du prix de gros et non à celle du prix du pétrole brut, on constaterait un lien beaucoup plus clair.
    Cependant, il est vrai que quand les prix à la pompe augmentent, ils ont tendance à augmenter de beaucoup, alors que quand ils diminuent, ils diminuent de peu. Bien que cela puise paraître anticoncurrentiel aux yeux des consommateurs, le mécanisme sous-jacent qui explique une telle fluctuation illustre le fait que le marché est très compétitif. Je vais vous expliquer comment le plus rapidement possible.
    Quand le prix de gros augmente, les détaillants hésitent à hausser leurs prix jusqu'à ce qu'ils en arrivent au point, comme l'a dit M. MacEwen, où ils sont obligés de vendre à perte. Dès qu'un d'entre eux cède, les prix augmentent, et de beaucoup, afin qu'ils puissent rétablir leur marge.
    Soit dit en passant, nos analyses indiquent que ces augmentations ne dépassent jamais le taux nécessaire pour recouvrer les pertes. Elles ne font que rétablir la marge à laquelle le marché est habitué. Lorsque le prix de gros diminue, les détaillants réagissent plus rapidement et réduisent leurs prix instantanément, plus rapidement, et plus progressivement afin de suivre la diminution du prix de gros.
    Je répète donc que ce qui peut sembler anticoncurrentiel si l'on se base sur le prix du pétrole brut est en fait très compétitif lorsqu'on comprend le mécanisme sous-jacent et qu'on se base sur le prix de gros, en fonction duquel les détaillants prennent leurs décisions.
    Je ne pense pas pouvoir l'expliquer mieux que ça.
    Pour revenir à l'une des premières choses que j'ai dites, le marché est hyperconcurrentiel. Il y a une chose que j'aimerais expliquer. Pour revenir à la question de M. Lake, imaginons un carrefour qui compte quatre stations service qui vendent toutes leur essence à 1 $. Si l'une d'entre elles baisse le prix à 99,9 ¢, les autres baisseront leur prix dans les minutes qui suivent. Le prix fluctue d'un dixième de cent à la fois, et nous suivons cette fluctuation. On aimerait pouvoir vendre l'essence à 1 $, mais le gars d'en face le vend à 99,9 ¢, alors les prix baissent lentement. Dans certains marchés, la chose suivante se passe. Disons que l'essence coûte 1 $. Ce prix est basé sur le prix de gros. À minuit ce soir, le coût de l'essence va changer. Je sais qu'il va augmenter. Demain matin, lorsque mes stations service ouvriront, idéalement, je pense que les prix devraient être supérieurs de 2 ¢ plus taxe à ce qu'ils sont aujourd'hui. Voilà, pour moi, la situation idéale. Mais si l'un des gars augmente seulement ses prix d'un sou et demi plus taxe au lieu de 2 ¢ plus taxe, je n'obtiendrai pas ce que je veux.
    Est-ce que quelqu'un d'autre a autre chose à ajouter?
    J'ai une dernière question à poser, si possible.
    Le temps de parole est écoulé, de loin. Les cinq minutes complètes sont écoulées.
    Étant donné le temps dont nous disposons, vous allez devoir attendre le prochain tour.
    Passons maintenant à M. Julian, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    J'ai deux questions à poser, ma collègue, Mme LeBlanc, en a une; ensuite, nous laisserons le temps à nos invités de répondre.
    Je dois dire, monsieur le président, que je suis plutôt déçu des réponses que nous avons eues jusqu'à présent. Dans l'ensemble du pays, de la vallée du Bas-Fraser jusqu'aux provinces atlantiques, de Montréal à Toronto, les familles canadiennes ont été très, très durement touchées par le prix élevé de l'essence. Elles en ont besoin pour aller au travail, mais elles ont aucune alternative. Je ne pense pas qu'on leur ait adéquatement expliqué pourquoi le prix de l'essence est si élevé. Elles se soucient de l'augmentation soudaine du prix entraîné par l'augmentation du prix du pétrole brut, mais l'essence dans le réservoir, c'est du vieux stock. Elles se soucient également du fait que, lorsque les prix baissent à l'échelle internationale, le prix de détail ne baisse pas lui aussi. Elles se soucient du fait que les prix augmentent bien au-delà de ce que justifieraient les fluctuations à l'échelle internationale.
    J'aimerais citer un extrait d'une étude réalisée le mois dernier:
Compte tenu du prix d'un dollar et trente-quatre sous le litre que rapportent les médias à Toronto aujourd'hui, ainsi que des coûts de production normaux, du prix du pétrole brut en date d'aujourd'hui, du taux de change actuel et de toutes les taxes, l'industrie réalise un profit excédentaire de 25 sous le litre.
    Personne n'a encore expliqué cet écart, écart qui coûte cher aux familles canadiennes ordinaires qui ont du mal à joindre les deux bouts.
    La question que j'aimerais poser est la suivante. J'aimerais demander à M. Corey et à M. Labonté pourquoi le gouvernement n'a toujours pas donné suite aux recommandations formulées par le comité. Elles remontent à 2003. Elles réclament clairement la mise en place d'un office de surveillance de l'industrie pétrolière.
    Je cède maintenant à la parole à Mme Leblanc, qui posera la troisième question.
(1650)

[Français]

    Ma question porte un peu sur les préoccupations exprimées par mon collègue, M. Julian. Au bas de l'échelle, on trouve le consommateur, qui est grandement touché par les fluctuations du prix de l'essence. De plus, tout cela a un impact sur les déplacements, les transports, les coûts du transport en commun et les coûts de production en agriculture, car cela a également une influence sur les coûts de l'alimentation. Cela touche les besoins de base des consommateurs et des citoyens canadiens, notamment le besoin de se déplacer pour aller travailler et le besoin de s'alimenter. Tous les coûts liés au transport augmentent. C'est un peu cela.
    Par suite des présentations, je me rends compte de l'impuissance du Canada, parce qu'il y a beaucoup de facteurs extérieurs. Par conséquent, comment peut-on expliquer aux Canadiens les fluctuations et la volatilité des prix de l'essence? De plus, comment le gouvernement peut-il atténuer ces fluctuations? Quels sont les moyens dont on dispose?
    Monsieur le président, je peux peut-être commencer à répondre.
    Comme je l'ai dit, pour notre part, la responsabilité de notre ministère est de faire l'analyse du marché. Cela comprend des facteurs importants dans l'établissement du prix du pétrole. Notre analyse est basée, par exemple, sur le travail de gens comme Michael Ervin et les autres. Pour notre part, il faut s'assurer que le marché est vraiment compétitif et fonctionne.

[Traduction]

    Je répète que notre rôle principal touche à l'information; il consiste à mettre de l'information à la disposition du public afin qu'il puisse voir ce qui se passe dans le marché.
    Je crois comprendre, monsieur le président, que vous avez également invité un représentant du Bureau de la concurrence.
    C'est exact.
    Le Bureau de la concurrence a la responsabilité de veiller à la concurrence sur le marché et à ce qu'il n'y ait pas de fixation des prix. Je pense qu'il a réalisé six études à ce sujet, je pense donc que ses représentants seraient mieux placés pour répondre à la question.
    La grande question de la politique fiscale ne relève elle non plus de notre mandat. Elle relève de celui du ministère des Finances, du ministre des Finances, qui serait mieux placé pour répondre aux questions touchant à la fiscalité. Nous ne touchons pas à ces choses-là au ministère.
    Monsieur MacEwen, monsieur Collins, avez-vous quelque chose à dire?
    J'ai entendu parler de vieux stock. Je ne pense pas que la plupart des Canadiens comprennent à quelle vitesse tourne la vente au détail de produits pétroliers, combien nous sommes des détaillants efficaces.
    Supposons que Walmart est la référence ultime dans la vente au détail; l'entreprise réalise des profits bruts de 16 p. 100 sur les ventes, et elle écoule son stock en environ un mois, parfois moins. Allan et moi prenons 5 p. 100, et nous écoulons notre stock toutes les 48 heures. Par conséquent, nous n'avons pas une grande marge de manoeuvre. Nous allons à la rampe, nous achetons le produit et nous obtenons ce que nous pouvons au détail. Essentiellement, voilà ce qui se passe. Nous nous retrouvons avec une marge de profit de 5 p. 100, ce qui est suffisamment concurrentiel.
    Depuis 1991, le nombre de stations-service dans ma province est passé de 940 à 380. Si c'était si facile et nous faisions tellement d'argent, il y aurait plus de stations service, pas moins. Comment expliquez-vous cela? La plupart des consommateurs ont du mal à comprendre que si le stock s'épuise si vite et les prix augmentent, il faut augmenter le prix pour maintenir une certaine marge de profit. La vitesse à laquelle le stock est écoulé et la faible marge de profit font que la concurrence est élevée.
    Ce n'est pas pour rien que Walmart ne vend pas d'essence au Canada; ce n'est pas rentable.
(1655)
    Veuillez m'excuser, monsieur Collins, mais le temps est écoulé. Je voulais tirer le plus possible de cette réponse.
    Passons maintenant à Mme Gallant, qui dispose de cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je m'adresse à tous les témoins. Je sais que le nombre d'appels à mon bureau a augmenté plus ou moins en même temps que le nombre d'appels à l'Institut canadien des produits pétroliers en mai. Puisque cela ne remonte pas à très longtemps, il serait très utile de prendre cette période comme exemple, de tenter d'expliquer pourquoi les prix ont augmenté en mai. Compte tenu de tous les facteurs géopolitiques, de l'offre et de la demande, de ce que l'OPEP faisait à l'époque et des marchés à terme, pouvez-vous nous dire pourquoi les prix ont augmenté de la sorte?
    N'importe qui peut répondre.
    Je pense qu'on reviendrait à tous les facteurs dont il a été question aujourd'hui et aux facteurs sous-jacents liés au prix du pétrole brut. Bien évidemment, le prix du pétrole brut a augmenté à cause de tous les événements géopolitiques dans les régions productrices de pétrole du Moyen-Orient. C'est également le début de l'été, où beaucoup de gens se retrouvent sur les routes. La demande augmente, les raffineries commencent à constituer leurs stocks en prévision de la saison estivale.
    Toutes sortes de facteurs entrent en jeu, mais ils touchent tous aux principes sous-jacents du prix du pétrole brut, des dynamiques en matière d'offre et de demande dans le marché de la vente de l'essence au détail et de l'augmentation d'impôts dans certains territoires. Tous ces facteurs expliquent pourquoi les prix ont augmenté, historiquement parlant. J'analyse l'information historique pour tenter d'expliquer ce qui s'est passé, mais il ne fait aucun doute que ces facteurs, entre autres, expliquent l'augmentation des prix de l'essence que nous avons constatée plus tôt dans l'année.
    Michael, je pense que vous avez quelque chose à ajouter.
    Je pense que beaucoup des préoccupations découlent du fait que les consommateurs ont vu les prix à la pompe atteindre un niveau quasi-record. Mais le prix du pétrole brut n'est pas aussi élevé qu'il l'était en 2008. En 2008, alors que le prix du pétrole brut était élevé, la demande a diminué nettement aux États-Unis. Cela a entraîné un stock d'essence tellement excédentaire que la marge de craquage, la marge brute des raffineries, était de zéro à l'époque, même un peu inférieure à zéro. Nous n'avons pas eu la marge de craquage saisonnière qui arrive normalement au printemps aux États-Unis, et par extension au Canada.
    La marge de craquage saisonnière est un phénomène qui remonte à des décennies, mais on ne l'a pas vraiment vu en 2008. Par conséquent, bien que les prix à la pompe étaient élevés, ils étaient supérieurs d'environ 15 ¢ le litre à ce qu'ils auraient dû être dans des conditions normales.
    Cette année, le prix du pétrole brut a augmenté et la marge de craquage est à son niveau habituel, c'est pourquoi les prix à la pompe étaient beaucoup plus élevés que ce qu'auraient pu croire les consommateurs, comparé au taux de 2008.
    Monsieur Ervin, vous avez parlé de marchés à terme et de leur incidence sur le prix du baril de pétrole. Pouvez-vous nous parler un peu plus des marchés à terme, et aussi de la spéculation?
    Voilà un des aspects discutables de la question. La spéculation pousse-t-elle vraiment le prix du pétrole brut au-delà ce qu'il aurait été? On peut voir la situation autrement. La spéculation a entraîné une chute abrupte du prix du pétrole brut en 2008, quand l'économie mondiale s'effondrait, et les mêmes spéculateurs misaient vers le bas. Il ne fait aucun doute que cela contribue à la volatilité du prix du pétrole brut. Mais cela se traduit-il nécessairement en des prix de gros plus élevés? Oui, si les cours à terme se maintiennent pendant un certain temps. Les prix à la pompe ne fluctuent pas au quotidien comme les spéculations, parce que les raffineries n'achètent pas au taux NYMEX d'aujourd'hui. Elles achètent au prix au comptant, finalement. Un lien existe, mais il n'est pas aussi déterminant qu'on pourrait le croire.
    Monsieur Ervin, quel est le lien entre les spéculateurs et les compagnies pétrolières? Y a-t-il même un lien entre eux, et si oui, est-il étroit?
(1700)
    Évidemment, les compagnies pétrolières gèrent les risques associés à l'achat de pétrole brut au cours à terme et à la vente et à l'achat d'essence au cours à terme. C'est ce qu'on appelle un baril mouillé. Autrement dit, certains grands acheteurs comme les municipalités font affaires sur ces marchés afin de normaliser leurs prix. Cependant, certains spéculateurs achètent et revendent avant même d'avoir reçu le produit, et cela contribue sans aucun doute à la volatilité. Mais c'est tout autant une stratégie de réduction des risques que c'est de la spéculation. Je réserve le mot « spéculation » à ceux qui font le commerce de baril-papier, qui ne font donc aucune livraison matérielle.
    Merci beaucoup, monsieur Ervin et madame Gallant.
    Oui, monsieur Regan.
    Je pense que tous les membres conviendraient pour dire qu'il serait utile de demander aux représentants du ministère des Ressources naturelles de nous fournir, plus tard, des documents illustrant la nature des renseignements qu'il fournit sur les prix de l'essence et les renseignements qu'il a cessé de fournir sur le prix de l'essence comparé à il y a dix ans.
    Oui, tout à fait, absolument.
    Parfait.
    Nous allons prendre une pause dans quelques instants, mais avant cela, j'aimerais qu'un des membres présente une motion. Nous avons des dépenses à autoriser pour les deux groupes de témoins qui ont comparu aujourd'hui. La somme de 9 100 $ fera amplement l'affaire. Il n'y a aucune garantie que ce sera la totalité des dépenses, mais c'est ce qu'il nous faudra si tout le monde fait une réclamation.
    Un membre aurait-il l'obligeance de présenter une motion pour accepter le montant afin que nous puissions dresser le budget de l'audience?
    Merci, monsieur Carmichael.
    (La motion est adoptée.)
    Le président: Prenons une pause de cinq minutes; nous inviterons le prochain groupe de témoins à notre retour.
(1700)

(1705)
    Nous essayerons de vous donner le plus de temps possible; permettez-mois de présenter nos invités.
    Merci d'être venus.
    Du Bureau de la concurrence, nous avons Mollie Johnson, sous-commissaire de la concurrence, Direction générale des affaires législatives et internationales, et Richard Bilodeau, sous-commissaire adjoint intérimaire, Direction générale des affaires civiles, division B.
    De l'Association canadienne des producteurs pétroliers, nous avons Tom Huffaker, vice-président, Politiques et environnement.
    Et un visage que nous connaissons bien, Dan McTeague, directeur de tomorrowsgaspricetoday.com.
    Pourquoi est-ce qu'on dirait une annonce publicitaire quand je vous présente?
    Accueillons également Michael Greenberger, professeur à la School of Law de l'University of Maryland, qui se joint à nous par vidéoconférence.
    Commençons par Mme Johnson. Nous commencerons par un discours d'introduction de dix minutes, suivi du roulement des questions. Chaque organisation dispose de dix minutes.
    Madame Johnson, vous avez dix minutes.
    Merci, monsieur le président et membres du comité. Au nom du Bureau de la concurrence, je suis très heureuse d'être ici aujourd'hui pour participer à votre étude sur la fluctuation des prix de l'essence.
    Comme l'a mentionné le président, je m’appelle Mollie Johnson et je suis sous-commissaire à la Direction générale des affaires législatives et internationales du Bureau de la concurrence. Je suis accompagnée de mon collègue, M. Richard Bilodeau, sous-commissaire adjoint intérimaire à la Direction générale des affaires civiles. Il a déjà comparu devant votre comité dans le cadre d'une étude semblable. Nous sommes tous deux très heureux d'être ici aujourd'hui pour répondre à vos questions.
    Nous comprenons, comme vous, l’importance de l’essence dans la vie quotidienne des Canadiens ainsi que pour l’économie en général. Personne ne veut payer des prix plus élevés. En tant que consommateurs, nous sommes tous sensibles à cela.
    Au fil des ans, le Bureau a accompli un travail considérable portant sur le secteur pétrolier, et j’espère que notre expérience sera utile au comité.
    Comme de nouveaux membres siègent à ce comité, j’ai cru qu'il serait utile de prendre un moment dès le début de mon allocution pour expliquer les attributions du Bureau avant d’aborder la question à l’étude aujourd’hui.

[Français]

    Le Bureau de la concurrence est un organisme d’application de la loi indépendant qui est dirigé par la commissaire de la concurrence qui applique la Loi sur la concurrence. Notre objectif consiste à nous assurer que les entreprises et les consommateurs canadiens prospèrent dans un marché concurrentiel et innovateur.
     À quelques rares exceptions près, la loi s’applique à tous les secteurs de l’économie canadienne, y compris le secteur pétrolier, et elle prévoit des sanctions criminelles et civiles à l’égard de diverses pratiques anticoncurrentielles précises. Parmi celles-ci figurent, par exemple: les ententes entre concurrents visant à fixer les prix, l'allocation des marchés ou la limitation de la production; l’abus de position dominante sur un marché; et la participation à des activités liées à de la fausse publicité et à du marketing trompeur.
     Nous sommes également chargés d’examiner les projets de fusion afin de déterminer s’ils sont susceptibles de causer un effet important sur la concurrence.
(1710)

[Traduction]

    Les deux dernières années ont été particulièrement mouvementées pour le droit de la concurrence au Canada. Comme vous vous en souvenez peut-être, en 2009, le Parlement a adopté les modifications les plus importantes à la Loi sur la concurrence en 25 ans. Certains d’entre vous ici aujourd’hui ont pris part à ce processus, et nous vous remercions de vos efforts.
    Entre autres, ces modifications ont mis en place un nouveau mécanisme d'examen des fusions à deux étapes, qui permet un examen plus efficace et plus efficient des fusions. Elles ont également créé un mécanisme plus efficace de poursuite criminelle à l'égard des ententes injustifiables, tout en instaurant une nouvelle disposition civile sur les ententes permettant un examen des effets que les autres formes de collaboration entre concurrents peuvent avoir sur la concurrence. Elles ont enfin permis au Tribunal de la concurrence du Canada d'imposer des sanctions administratives pécuniaires aux entreprises qui abusent de leur position dominante sur un marché.
    Grâce à ces modifications, le Bureau est maintenant encore mieux placé pour protéger les consommateurs et les entreprises du Canada contre le tort causé par les activités anticoncurrentielles.
    Quant au secteur pétrolier, comme pour les autres secteurs de l’économie canadienne, notre rôle est de constater les comportements anticoncurrentiels qui vont à l’encontre des dispositions de la Loi sur la concurrence et de prendre des mesures fondées sur des principes à cet égard. Comme vous le savez, le Bureau examine depuis longtemps le secteur pétrolier. Nous avons comparu devant ce comité à plusieurs reprises, et nous avons effectué des examens de l’industrie dans son ensemble ainsi que dans des marchés précis. Grâce à cette expérience, le Bureau s’est familiarisé avec le fonctionnement de cette industrie.
    En ce qui concerne nos examens portant sur des augmentations de prix, nos enquêtes n’ont pas permis de conclure que ces hausses étaient attribuables à un comportement anticoncurrentiel contrevenant à la loi. Le Bureau a plutôt conclu que, dans ces cas précis de flambées des prix, les prix de l’essence au détail plus élevés résultaient des augmentations du prix du pétrole brut et d’autres facteurs influant sur l’équilibre entre l’offre et la demande. Parmi ces autres facteurs figuraient par exemple de faibles stocks d’essence en Amérique du Nord et, dans le cas des prix plus élevés suite à l’ouragan Katrina en 2005, d’importants dommages à la capacité nord-américaine de raffinage. Ces facteurs ne posent pas problème en ce qui concerne la loi, à moins bien entendu qu’ils ne soient le fruit d’activités anticoncurrentielles.
    Cela m’amène à la question de notre mandat. Il n’est pas surprenant de constater que bon nombre des plaintes que nous recevons dans ce secteur nous parviennent lorsqu’il y a des flambées des prix de l’essence. Je crois qu’il est important d’indiquer ici que nous ne déterminons pas ce qui est, ou n’est pas, un prix équitable pour tout produit ou service donné. Le Bureau n’est pas un organisme de réglementation des prix, et les prix élevés, en soi, ne sont pas visés par la loi sauf s’ils découlent d’un comportement anticoncurrentiel. Si, toutefois, les prix élevés découlent d’un cartel ou d’un abus de position dominante, alors nous n’hésitons pas à faire enquête et à prendre les mesures appropriées.
    Par exemple, les enquêtes du Bureau sur cette industrie ont mené à des accusations au criminel pour fixation des prix, comme celles qui ont été portées au Québec au début 2008. Les enquêtes que nous avons menées dans cette affaire ont abouti à un certain nombre de plaidoyers de culpabilité, à des amendes de plus de 2,8 millions de dollars et à des peines d’emprisonnement s’élevant, au total, à 54 mois.
     Le Bureau a également obtenu des mesures correctives afin de préserver la concurrence sur les marchés où les fusions proposées auraient vraisemblablement eu pour effet d’empêcher ou de diminuer sensiblement la concurrence, comme dans la fusion récente de Suncor et de Petro-Canada, en 2009, où nous avons exigé que les sociétés vendent 104 stations d’essence au détail dans le Sud de l’Ontario et partagent leur capacité d’entreposage et leur réseau de distribution dans la région du Grand Toronto pour 10 ans.
    En conclusion, le Parlement a confié un rôle très précis au Bureau, soit d’engager des mesures d’application raisonnées à l’égard de personnes et d’entreprises qui se livrent à un comportement anticoncurrentiel. L’application responsable de la loi constitue la façon la plus efficace pour le Bureau d’avoir un impact positif dans l’économie canadienne pour les consommateurs et les entreprises. Nous croyons, notamment depuis que l’ensemble des modifications de 2009 à la loi sont entrées en vigueur, disposer d’outils efficaces pour prendre les mesures qui s’imposent contre les comportements anticoncurrentiels dans ce secteur, et tout autre secteur de l’économie canadienne.
    M. Bilodeau et moi-même avons hâte de répondre à vos questions.
    Merci de votre attention.
(1715)
    Merci, madame Johnson.
    Passons maintenant à M. Huffaker, qui dispose de dix minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président et chers membres du comité. Nous sommes très heureux d'être présents aujourd'hui. Je me nomme Tom Huffaker et je suis l'un des vice-présidents de l'Association canadienne des producteurs pétroliers.
    L'Association canadienne des producteurs pétroliers représente la partie la plus en amont du secteur du pétrole et du gaz au Canada. Nous comptons plus de cent membres, qui vont des très petites aux très grandes entreprises, y compris les plus grandes entreprises canadiennes et les mégaentreprises d'envergure mondiale. Nos membres produisent plus de 90 p. 100 du pétrole et du gaz au Canada.
    En tant que représentant de l'industrie en amont, je compte limiter mon propos aux questions qui la concernent et au pétrole brut. Je ne parlerai ni des prix de l'essence, ni des questions de vente au détail, car je ne suis vraiment pas qualifié pour aborder ce sujet. M. Boag, de l'Institut canadien des produits pétroliers, que vous venez d'entendre, et d'autres personnes parmi le groupe de témoins actuel et le groupe précédent sont mieux placés que nous pour vous parler des questions relatives à l'industrie en aval et des problèmes de la vente au détail.
    Comme vous le savez, le pétrole brut est un produit commercialisé à l'échelle mondiale. Le prix est fixé sur les marchés mondiaux pour diverses raisons. Le prix du pétrole est relativement élevé à l'heure actuelle. Cependant, les fluctuations du prix ont toujours fait partie de notre réalité, comme c'est le cas pour d'autres matières premières et d'autres industries, et nous nous attendons à ce que ces fluctuations se poursuivent à l'avenir. Notre association ne fait pas de prévisions quant à l'évolution future des prix.
    Je n'ai pas l'intention de vous parler des prix relativement élevés de l'essence, à l'heure actuelle, qui s'expliquent évidemment en bonne partie par les prix du brut. Je voudrais prendre une minute pour vous parler des bienfaits qu'apporte au Canada l'industrie pétrolière et gazière en amont. J'aimerais en particulier vous faire remarquer que le Canada tire très bien son épingle du jeu même lorsque les prix de l'essence et les autres prix sont relativement élevés.
    Un certain nombre de données que j'ai l'intention de vous citer viennent d'un rapport produit récemment par Peter Tertzakian, l'économiste de renom spécialisé dans le secteur de l'énergie qui travaille pour ARC Financial Corporation. Il s'agit d'un rapport qui a été commandé par l'Association canadienne des producteurs pétroliers et qui s'intitule « Turmoil and Renewal ». Je vous recommande ce rapport, qui est une excellente source d'information sur la structure financière et les perspectives d'avenir de l'industrie. M. Tertzakian prévoit qu'au cours des cinq prochaines années, l'industrie pétrolière et gazière en amont continuera de générer environ 100 milliards de dollars par année en revenus. L'investissement total de l'industrie en amont, sur les cinq prochaines années, devrait être de plus de 50 milliards de dollars par année, ce qui fait qu'il s'agit d'une industrie de très grande taille. Depuis 2009 seulement, nous avons attiré presque 20 milliards de dollars en investissements étrangers.
    Pour ce qui est des recettes fiscales engendrées par ces activités, elles ont été de l'ordre de 15 à 20 milliards de dollars au cours des dernières années, et devraient être du même ordre à l'avenir. Environ un tiers de ces recettes proviennent des impôts et les deux tiers proviennent des redevances. En 2010, les exportations canadiennes de l'industrie pétrolière et gazière en amont se sont chiffrées à environ 65 milliards de dollars, dont environ 50 milliards de dollars en exportations de pétrole.
    Ces valeurs dépendent en partie du prix. Elles ont tendance à être plus élevées lorsque le prix du pétrole est relativement élevé. C'est le cas particulièrement de la valeur des investissements, des recettes fiscales de l'État, des exportations et, bien entendu, des besoins en main-d'oeuvre, donc du nombre d'emplois créés par l'industrie. Je vous signale simplement qu'un demi-million d'emplois au Canada sont attribuables directement et indirectement à l'industrie en amont.
    Je termine ici mon allocution liminaire. Je serai heureux d'entendre ce qu'auront à dire les autres témoins et de répondre à vos questions.
    Merci, monsieur Huffaker.
    Je cède la parole à M. McTeague.
    Monsieur le président, chers collègues et anciens collègues, et peut-être même futurs collègues, c'est pour moi une belle occasion et un grand honneur d'être ici. Je vous remercie de m'avoir invité à comparaître et je remercie en particulier mon collègue qui m'a remplacé, M. Chisu, un homme très bien. Je m'attends à de grandes choses de sa part.
    Monsieur le président, il est clair qu'aucune question ne suscite plus d'intérêt que le prix de l'essence et le prix que nous payons à la pompe, sauf le temps qu'il fait. Il y a eu une myriade d'enquêtes, comme on l'a déjà dit, et bien entendu, leurs résultats peu concluants ont fait couler beaucoup d'encre, mais le public n'est toujours pas convaincu que le prix qu'il paie est justifié et il se montre toujours cynique quant à une nouvelle série d'enquêtes. Vous avez donc beaucoup de travail à faire. Permettez-moi de vous aider.
    La préoccupation du public à l'égard des prix se résume en un seul mot: instabilité. Je crois que le comité a le pouvoir de s'attaquer de front à cette préoccupation au lieu de tenter timidement et vainement de souscrire sans conviction réelle à une frustration commune grandissante. Comme vous le savez presque tous, j'ai essayé, en tant que parlementaire, d'attirer l'attention sur l'état anémique de la concurrence dans divers secteurs de notre économie, notamment l'épicerie, la téléphonie, les télécommunications, les produits pharmaceutiques et l'industrie pétrolière en aval, et de modifier et d'améliorer la Loi sur la concurrence qui, comme vous le savez, a été réécrite en 1986 pour permettre des niveaux de concentration qui seraient inacceptables pour d'autres territoires comme l'Union européenne ou les États-Unis.
    La concentration actuelle dans la vente en gros d'essence et de distillat, soit le diesel, signifie des prix identiques dans la plupart des grands centres urbains de notre pays et, ironiquement pour moi à tomorrowsgaspricetoday.com, la capacité de prédire avec exactitude le prix qui sera affiché à la pompe demain. À ma connaissance, cela ne se fait ou ne peut se faire nulle part ailleurs parce que c'est tout simplement impossible. Le libellé restrictif de la Loi sur la concurrence a forcé les détaillants indépendants à quitter massivement le marché. Je crois que l'un des témoins précédents, qui représentait Wilson Fuels, a souligné à juste titre la triple baisse du nombre d'acteurs dans son entreprise uniquement. Les fusions et les prises de contrôle ont réduit le nombre d'acteurs et mené à la rationalisation de l'exploitation des raffineries et des terminaux qui fournissaient auparavant l'infrastructure concurrentielle assurant la surveillance des prix. Au lieu de répondre aux nouvelles normes en matière d'environnement établies par le gouvernement fédéral et parfois par les gouvernements provinciaux au fil des ans, certaines raffineries comme la dernière en exploitation à Bronte ou à Oakville, si l'on veut, dans la région de Toronto, ont été fermées provisoirement et transformées en terminal d'entreposage alimenté par pipeline ou chemin de fer.
    La fermeture de la raffinerie Shell dans l'est de Montréal, l'an dernier, a également eu une incidence sur le prix, principalement dans l'est du Canada, et a contribué largement à l'instabilité des prix puisqu'en agissant ainsi, on mettait fin aux contrats d'approvisionnement des stations-services indépendantes, on remplaçait la production par l'achat de produits pétroliers auprès d'autres raffineries comme Ultramar ou on décidait simplement d'importer de l'Europe ou des États-Unis des produits pétroliers répondant aux normes canadiennes particulières et supérieures, et dans ce cas, qui sont plus chers — et qui contiennent 30 parties par million de soufre. Les Canadiens de l'est du Canada sont donc devenus des importateurs nets de produits pétroliers et sont, contrairement à la génération précédente, alors que l'autosuffisance énergétique était de rigueur, très vulnérables aux fluctuations internationales ou à l'instabilité des prix créées par des spéculations excessives sur les marchés à terme des produits.
    Dans le domaine du raffinage des produits pétroliers, l'ampleur de la concurrence demeure hypothétique. Malgré une réduction considérable du nombre de concurrents énergiques et efficaces ayant quitté le marché ou ayant fusionné au cours des 24 dernières années, et si l'on tient compte du fait qu'il n'y a eu aucune augmentation importante du rendement des raffineries restantes, l'éventualité d'une pénurie qui ferait augmenter le prix du pétrole ne peut être exclue. Les prix avant taxe et la marge de détail, dont on a discuté également, les prix de gros à la rampe dans la majeure partie de notre pays, ont tendance à dépasser largement les prix de gros à la rampe américains, et non à être égal ou plus bas, et sont identiques d'une raffinerie à l'autre contrairement à ce qui se passe aux États-Unis, où un tel parallélisme lancerait presque assurément un mouvement antitrust dans le pays.
(1720)

[Français]

    Puisque le Canada ne produit plus de rapport, comme le Weekly Petroleum Status Report que produisent les Américains et qui fournit les données hebdomadaires de l'industrie pétrolière sur ses produits, on laisse à d'autres le soin d'évaluer l'effet réel de la vague de consolidation sur les consommateurs canadiens, et les automobilistes font les frais de l'absence d'une véritable surveillance.

[Traduction]

    Chers collègues, on ne saurait discuter sérieusement des prix du carburant sans d'abord comprendre les changements radicaux apportés aux moyens auxquels on recourt traditionnellement pour connaître les prix de marchandises essentielles comme les aliments ou l'énergie, c'est-à-dire les valeurs de l'offre et de la demande et la couverture des risques de pertes subies entre les producteurs et les consommateurs.
    En 2000, Wall Street a convaincu le Congrès de permettre le commerce de produits sans qu'il ne soit assujetti à la Commodities Futures Trade Commission. Cette exemption de surveillance, connue sous le nom d'échappatoire d'Enron à qui l'exemption a été accordée, a eu des conséquences prévisibles.
    Comme vous vous en souviendrez, des raisons fallacieuses sur l'état du marché des produits électriques et de l'électricité aux États-Unis ont été invoquées; il y a eu des échanges sans besoins de capital, et bien sûr, de nouvelles plateformes d'échanges non réglementées pour lesquelles il n'y avait apparemment aucune contrainte quant à leur emplacement et aucune question quant à l'adversité au risque. Tout cela a mené les marchés de l'électricité et du gaz naturel à des prix qui vont au-delà de la durabilité économique et a entraîné, comme vous le savez, de graves perturbations. Cela nous amène à la situation actuelle. Il est incroyable que cette échappatoire n'ait jamais été retirée et, depuis, les plateformes d'échanges non assujetties ont proliféré, tout comme leurs effets retors sur les prix.
    Lorsque les gens — vos consommateurs et électeurs — s'arrêtent à une station-service, ils ont habituellement le choix entre trois qualités d'essence: ordinaire, intermédiaire et super, dans certains cas. Peu importe la qualité, toutefois, tout le monde paie maintenant une prime — de type Wall Street, négociée hors cote, de produits dérivés cotés en bourse.
     Le Canada doit se joindre aux efforts internationaux à la demande des États-Unis et de l'Europe, dans le cadre de l'engagement que nous avons pris lors de la réunion du G20 tenue à Pittsburgh d'assurer la surveillance, la concurrence et la transparence pour le commerce de produits. Devant l'augmentation de 35 p. 100 des coûts de l'énergie que subissent les Canadiens cette année seulement, et de 25 p. 100 des aliments maintenant, est-ce trop demander que le prix que nous payons reflète la vraie situation de l'offre et de la demande plutôt que de permettre que certains profitent d'échappatoires pour compromettre notre bien-être économique collectif?
    Si le Parlement pense sérieusement à s'attaquer à l'épineux problème de l'instabilité des prix, il doit moderniser sa réflexion sur l'état de la concurrence, dans bien des régions au pays, surtout à l'échelle des raffineries. Il doit également avoir recours à un rapport hebdomadaire sur les stocks, similaire au modèle américain et s'informer des ravages causés par la spéculation excessive dans les marchés non réglementés de produits d'échanges dérivés.
    En terminant — car peu importe que je parle de telle ou telle chose, chacun de nous a essayé cela à diverses reprises —, je dirais que nous devons tenir compte de l'incidence de la taxation. La taxation, surtout la taxe sur la valeur, comme la TVH ou la TPS, tend à aggraver la situation. Les gouvernements et le Parlement, dans leur travail de tous les jours, doivent être conscients que lorsque les prix augmentent, les répercussions des taxes et les recettes imprévues augmentent. Cela doit être pris en considération maintenant de façon à ce qu'il n'y ait pas de répercussions pour les Canadiens.
    Je veux également souligner quelque chose de très intéressant concernant mes dernières remarques au sujet de la question des contrats standardisés, des produits et de la spéculation excessive. Aujourd'hui, les États-Unis ont publié leur rapport hebdomadaire sur les stocks pétroliers. Comme vous le savez, ce pays est le plus grand consommateur de carburant utilisé pour le transport au monde. Comme il semble contrôler l'offre et la demande, il est important que le Canada y participe. Toutefois, ce matin, on a annoncé que les raffineries là-bas ont fonctionné à 89,2 p. 100 de leur capacité la semaine dernière. La production de l'essence a augmenté la semaine dernière; elle était à 9,5 millions de barils par jour en moyenne.
    Si vous voulez un exemple du disfonctionnement qui existe entre les principes de l'offre et la demande et ce qui se passe sur les marchés, vous n'avez qu'à songer au fait que ce soir, la plupart des collectivités de l'est du Canada verront le prix de l'essence augmenter de 2,2 à 2,6 ¢ le litre — l'augmentation de l'approvisionnement entraîne une augmentation du prix. Si nous ne comprenons pas à quel point le marché ne fonctionne plus comme il devrait, nous continuerons à tenir des réunions comme celle-ci; et encore plus important, elles seront sans doute inutiles et non pertinentes.
    Cela dit, j'espère vous en dire davantage en répondant à vos questions et pouvoir répondre à certaines des questions que vous avez ces derniers temps.
    Je vous remercie.
(1725)
    Merci, monsieur McTeague.
    Monsieur Greenberger, vous disposez d'au plus 10 minutes pour faire votre déclaration préliminaire.
    C'est un honneur pour moi qu'on m'ait demandé de témoigner devant vous aujourd'hui. Nous, les Américains, regardons le Canada avec énormément d'admiration, car ses contrôles réglementaires ont atténué les effets de la dernière grande récession. Les États-Unis ont beaucoup à apprendre du système de réglementation canadien.
    Il y a deux fins de semaine, j'ai eu le plaisir de participer au Congrès de l'Association canadienne d'économique qui avait lieu à Ottawa, au cours duquel j'ai fait une présentation. J'ai appris beaucoup de choses, et les États-Unis en ont beaucoup à apprendre.
    Le contenu de mon exposé s'inscrit vraiment en grande partie dans les propos que M. Teague vient de tenir, et je veux en dire davantage à ce sujet.
    À l'heure actuelle, aux États-Unis, nous sommes en plein débat sur les causes des hausses de prix du pétrole brut et de son important dérivé, l'essence: est-ce le reflet de l'offre et de la demande ou de ce nous appelons techniquement aux États-Unis, en raison de nos lois, de la spéculation excessive.
    Il ne fait aucun doute que lorsque le Congrès a adopté le projet de loi Dodd-Frank sur la réglementation financière et que le président a signé la loi le 21 juin 2010, le Congrès américain a vivement insisté sur le fait que la grande inquiétude que suscite la spéculation excessive — ce qui n’a rien à voir avec des investissements dans la production — n’est pas l’unique problème, mais une cause importante du problème.
    Lors d’audiences devant le Comité des finances du Sénat américain qui ont eu lieu il y a trois semaines, on a demandé au PDG d’ExxonMobil ce que devrait être le prix du pétrole brut si les principes de l’offre et de la demande étaient à l'oeuvre, et il a répondu entre 60 et 70 $. Comme vous le savez, si l’on regarde du côté du WTI, il frise les 100 $. Si l’on regarde du côté du Brent, il est nettement plus élevé.
    À la mi-avril, dans un rapport d’analyse, Goldman Sachs a dit que le prix actuel du pétrole brut était le reflet de la spéculation excessive, à hauteur de 25 à 30 $, et non de l’offre et de la demande. De même, lors d’une conférence de presse, le président Obama a dit que le problème n’était pas l’offre et la demande, mais bien la spéculation.
    Permettez-moi de parler de la façon dont la spéculation nuit aux marchés en revenant un peu en arrière. L’une des premières mesures législatives que Frankin Delano Roosevelt a envoyée au New Deal Congress en 1934, c’est ce qui est devenu la Commodity Exchange Act de 1936. À l’époque, les seuls marchés à terme étaient les marchés agricoles. Depuis 10 à 15 ans, avant la grande dépression, les agriculteurs se plaignaient que des spéculateurs arrivaient sur les marchés conçus pour couvrir soit le producteur ou le consommateur — couvrir les instruments dans les marchés à terme. La spéculation excessive a causé la distorsion des marchés et fait en sorte qu'ils ne respectent plus les principes fondamentaux du prix et de la demande.
    Le président Roosevelt a jeté les bases de la Commodity Exchange Act. Lorsqu’elle a été adoptée en 1936, l’un des objectifs de la réglementation était de freiner la spéculation excessive — et j’insiste sur le mot « excessive » — dans les marchés. Pour ce faire, il fallait recourir aux limites de position. De quoi s’agissait-il? Les limites de position étaient des limites établies par des organes de réglementation des produits en tenant compte du marché visé qui traçait la frontière entre les liquidités ou la spéculation dont avait besoin le marché pour créer les liquidités appropriées pour le producteur et le consommateur du produit, et une interdiction ou une limite pour éviter que le marché ne respecte plus les principes fondamentaux du prix et de la demande.
    Les marchés à terme sont des marchés de détermination du prix. On sait combien on doit exiger ou payer pour un baril de pétrole en examinant les marchés à terme. Si les marchés à terme ne respectent plus les principes fondamentaux du prix et de la demande, le prix que tout le monde paie est lui aussi faussé.
    De 1936 à 1991, avec la réglementation des marchés, même s’il y a eu de l’instabilité, l'instabilité s’expliquait toujours par les principes de l’offre et de la demande, comme lors du boycottage de 1973, lorsque les pays arabes ont cessé d’exporter du pétrole dans les pays occidentaux.
(1730)
    En 1991, Goldman Sachs a obtenu la première de toute une série de décisions — pas de la part de la Commodity Futures Trading Commission, qui est l’organisme de réglementation désigné, mais de son personnel — selon laquelle si des banques d’investissement ouvraient des paris sur la direction que prennent les prix de produits… C’est-à-dire qu’un consommateur s’adresse à la banque et lui dit, « je veux parier sur le prix d’un produit », sans qu’il ne lui appartienne. Ce n’est qu’un simple pari comparable à lorsqu’on parie sur le résultat d’une partie de soccer. On n’est pas propriétaire de l’équipe de soccer, mais on parie sur le résultat de la partie. Goldman, par l’intermédiaire de sa filiale, J. Aron, a convaincu le personnel de la CFTC qu’en protégeant le pari, elle agissait, dans ce cas, comme un producteur ou un consommateur de pétrole. Elle avait un besoin d’affaires de protéger les paris, et elle a donc obtenu des exemptions quant aux limites de position.
    Ainsi, de 1991 à l'été de 2008, bien des gens dans ces marchés qui étaient considérés comme des acteurs commerciaux ne faisaient rien de plus que de couvrir les paris. Les paris sont passés d'environ 13 milliards de dollars en 2004 à environ 450 milliards de dollars aujourd'hui. Le principal instrument, bien qu'il y en ait beaucoup pour ce genre de paris, est le suivant: Goldman et Morgan Stanley offre à ses clients nantis — fonds de pension, fonds de capital-investissement, d'autres banques, investisseurs nantis — la possibilité de faire leur pari à la banque d'investissement. On peut seulement parier sur une hausse du prix du produit.
    L'instrument, c'est un swap d'indice des produits, une entité non réglementée précédant l'adoption de la loi Dodd-Frank, qui est un panier de 25 biens regroupés par les banques d'investissement, permettant aux consommateurs de parier que les prix des biens augmenteront. Le panier privilégie nettement le WTI, qui est le standard aux États-Unis pour le brut, et le Brent. Le panier privilégie de plus en plus le Brent récemment, et c'est une raison qui a été a fournie pour expliquer la différence entre le WTI et le Brent; le Brent est une source de carburant plus dispendieuse, mais moins fiable.
    En ayant recours à ces exemptions, les banques d'investissement sont entrées sur les marchés à terme et se sont départies du risque qui provient de leurs paris avec leurs clients pour acheter des positions longues qui correspondent aux biens du panier. C'est pourquoi nous vivons une hausse des prix aujourd'hui, non seulement dans le brut, mais également dans le cuivre, le riz, le coton, le blé, etc.
    Lorsque le Congrès américain a adopté la loi Dodd-Frank, il a adopté une disposition selon laquelle pour les marchés qui étaient réglementés auparavant et pour ceux qui ne l'étaient pas, la Commodity Futures Trading Commission doit imposer des limites de position globales pour contenir cette sorte de spéculation afin que les marchés reviennent aux principes de l'offre et la demande.
    Le 26 janvier 2011, la Commodity Futures Trading Commission, dans un vote de quatre contre un, a proposé une règle qui, pour l'essentiel, a codifié le statu quo. En d'autres termes, elle a reconnu que la couverture de la spéculation devait continuer. Deux commissaires ont appuyé fermement la règle et deux autres ont dit qu'ils ne l'appuieraient probablement pas lorsqu'il s'agira de la forme finale. Ce jour-là, on a envoyé un signal à ces marchés selon lequel la loi Dodd-Frank ne serait pas mise en oeuvre. Pas même trois personnes sur cinq ont voté en faveur d'une faible réglementation de la spéculation.
    Comme vous le savez, si l'on regarde ce qui se passe depuis le 26 janvier, le prix du pétrole a augmenté de 35 à 40 p. 100 environ, car c'est cette journée-là qu'on a envoyé un signal.
    Le Congrès tente encore de reproduire ce qu'il a fait dans le cas de la loi Dodd-Frank. Malgré l'énorme résistance à la réglementation, le Congrès contrôlé par les républicains vient de voter en faveur d'une diminution de 15 p. 100 de l'effectif de la CFTC, ce qui fait que la commission, avec 300 mille milliards de compétences et de nouvelles mesures législatives, serait ramenée à 500 employés.
(1735)
    Cependant, des efforts sont faits pour, encore une fois, limiter la spéculation dans ces marchés pour que la CFTC adopte des limites strictes. On peut se demander ce que le Canada peut faire. Je propose que le Canada imite ce que vient de faire la France. En prévision de la rencontre des ministres de l’Agriculture du G20, le président Sarkozy a annoncé que la France plaide pour l’adoption de limites de position strictes. La Commission européenne s’engage dans cette voie. Si je devais nommer les gouvernements qui sont coupables, je suspecterais beaucoup les gouvernements canadien, américain et britannique...
    Monsieur Greenberger, ce sera tout. Je vous ai accordé un peu de latitude au sujet du temps, mais...
    Je vous en remercie.
    Merci beaucoup.
    Passons maintenant au premier tour avec des temps de parole de sept minutes.
    Monsieur Carmichael.
    Merci, monsieur le président.
    J’aimerais tout d’abord m’adresser à M. Huffaker.
    Je comprends la consolidation, et nos précédents témoins ont discuté de la consolidation dans le commerce de détail et de nombreux enjeux entourant la production, ou la façon de générer le volume avec de minces marges. Je crois que les détaillants ont utilisé une marge de 5 p. 100, et j’imagine que c’est une marge brute. Il faut donc en déduire tous les frais essentiels, y compris les coûts du crédit et certains des éléments qui ont été mentionnés plus tôt.
    Monsieur Huffaker, pour ceux qui sont nouveaux au comité, pourriez-vous expliquer brièvement comment on détermine le prix du baril de pétrole? Comment la production influe-t-elle sur les détaillants? Je ne sais pas si vous avez cette expérience, mais je vous laisse me le dire. Pendant que j’y réfléchissais, l’un des détaillants a dit qu’il écoulait son inventaire en 48 heures, et cela fait évidemment partie de la production — il faut produire davantage, et plus on le fait vite, et mieux c’est évidemment, et plus rapidement on est en mesure de récupérer sa marge.
    J’aimerais vous entendre sur les éléments qui entrent en ligne de compte lorsqu’on détermine le coût d’un baril. Je vous saurais gré si vous pouviez aussi commenter le point de vue canadien relativement à la spéculation. Nous en avons entendu brièvement parler plus tôt, et M. Greenberger vient tout juste d’y faire allusion aussi.
(1740)
    Monsieur Carmichael, merci. J’ai bien peur que certaines de ces questions concernent les gens du commerce de détail. Je m’excuse à l’avance. Je serai peut-être un témoin frustrant. Honnêtement, je me tournerais vers les spécialistes du commerce de détail et les gens comme M. Boag, qui témoignait devant le comité plus tôt. Personnellement, je n’ai aucune expérience sur ce qui se passe en aval ou dans le commerce de détail. Je ne suis donc vraiment pas qualifié pour commenter le sujet.
    J’aimerais discuter de la féroce concurrence dans les industries pétrolière et gazière en amont au Canada. J’ai mentionné que nous comptions plus de 100 membres. Si on inclut les petits joueurs, qui font de la concurrence très agressive... Des centaines de producteurs pétroliers et gaziers en amont ont des exploitations au Canada et se trouvent dans un cadre extrêmement concurrentiel.
    Évidemment, les coûts relativement à la prospection, à la mise en valeur et à l’extraction influent sur le coût du baril de pétrole, mais on fixe le prix du brut sur les marchés internationaux. Nous avons eu beaucoup de discussions pour déterminer à quel point les prix fluctuent strictement en fonction de l’offre et de la demande, et à quel point la spéculation peut avoir un effet sur cela. En plus de ce que nous avons entendu, j’ajouterai qu’il y a évidemment des situations dans lesquelles le risque politique y joue aussi un rôle important. Je dirais que tous ces éléments entrent en ligne de compte.
    Encore une fois, je m’excuse si je n’ai pas beaucoup répondu à votre question, mais je ne crois pas être qualifié pour le faire.
    M. Greenberger a affirmé que les raffineries américaines ont fonctionné à 89,2 p. 100 de leur capacité au cours des deux ou trois dernières semaines. J’aimerais savoir si vous êtes en mesure de nous dire la capacité à laquelle les raffineries canadiennes fonctionnent actuellement.
    J’ai bien peur d’être encore une fois un témoin frustrant. Je me sens vraiment mal. Encore une fois, en ce qui concerne le raffinage, c’est vraiment l’ICPP. C’est M. Boag et les autres qui représentent les raffineurs; ce n’est pas nous. Je ne peux même pas essayer d’estimer, parce que je ne suis pas au quotidien la capacité de raffinage en utilisation au Canada.
    Je n’essaye pas d’être difficile...
    Oh, non. Je sais que ce n’est pas le cas.
    Je croyais simplement qu’en ce qui concerne le raffinage vous auriez peut-être des réponses.
    Quelle influence vos membres ont-ils sur le prix du baril de pétrole? En ont-ils seulement?
    Selon moi, ils n’ont aucune influence sur le prix du baril de pétrole. Ils sont en concurrence dans l’économie mondiale pour un produit de base d’intérêt mondial, et ils font de leur mieux pour le produire à un prix qui leur permet d’être rentables lorsqu’ils le vendent sur le marché mondial.
    Évidemment, en tant que politiciens, des électeurs nous appellent. Nous sommes donc en lien direct avec la population. Nous entendons la frustration des gens qui font le plein. Ils ne comprennent pas pourquoi les quatre stations-services d’un même carrefour haussent leur prix à quelques minutes d’intervalle. Notre travail est d’essayer de trouver des réponses pour pouvoir, avec un peu de chance, stabiliser un peu la situation au lieu qu’elle soit continuellement instable.
    En venant témoigner devant le comité aujourd’hui, vous saviez ce dont nous parlerions.
    Oui.
    Selon votre expérience, avez-vous une idée de ce qui devrait être fait pour stabiliser les prix et ainsi réduire les fluctuations et fournir de meilleures réponses aux consommateurs et à nos électeurs de partout au Canada?
(1745)
    Je n’ai vraiment pas de réponse à cette question. Nous croyons aux marchés concurrentiels. Nos membres sont en concurrence dans des marchés très concurrentiels. Nous acceptons qu’il y ait une certaine fluctuation des prix; cela fait partie de la réalité. Évidemment, du point de vue de l’industrie, il arrive que ce soit très rentable, et il arrive que nous ayons des marges extrêmement minces. Nous croyons qu’il faut laisser le marché s’en occuper.
    Si nous créons un cadre réglementaire et un cadre fiscal qui encouragent la production et que cela se fait à l’échelle mondiale de manière à ce qu’il y ait davantage de produits sur le marché, je pense que nous pourrions dire que cela aura un effet modérateur sur les prix. Prenons l’exemple du gaz naturel, qui n’est pas le sujet de la séance. L’incroyable robustesse de l’approvisionnement a manifestement un effet extrêmement important sur les prix.
    Je vais peut-être poser une dernière question, puis je vais essayer de toucher à un domaine qui est peut-être un peu plus dans vos cordes.
    J’aimerais savoir si vous êtes en mesure de nous donner une idée de ce que votre industrie apporte aux Canadiens. Vous avez donné certains chiffres, mais en ce qui concerne la contribution directe de votre secteur à l’économie — les emplois, les régimes de pensions et les autres fonds de placement —, vous avez parlé de 500 000 emplois et de 65 milliards de dollars d’exportations et de 50 milliards pour le pétrole. Je me demande s’il vous est possible de nous donner un peu plus d’information à cet égard pour nous aider à mieux saisir l’importance de votre industrie.
    Oui, je pourrais le faire brièvement.
    Monsieur Huffaker, je suis désolé; le temps est écoulé. Gardez la question de M. Carmichael en tête, puis essayez de glisser ces statistiques en répondant à la question d’un autre député. Ce serait parfait. Je m’excuse. Les députés m’ont déjà entendu dire que le temps joue toujours contre nous dans les comités.
    Monsieur Masse, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci d’être ici.
    Monsieur McTeague, vous avez soulevé d’importants enjeux: la volatilité, le fait que le Canada devient un pays importateur net — ce dont beaucoup de Canadiens ou d’Ontariens ne se rendraient même pas compte — et aussi la question américaine. On a proposé de créer un bureau de l’ombudsman. Pourriez-vous élaborer sur la volatilité et nous dire si vous croyez qu’un ombudsman avec des ressources réservées à cette fin qui aurait directement accès au ministre pourrait assurer une certaine responsabilisation, une certaine surveillance et même créer un environnement plus équitable? Nous avons vu beaucoup d’intégration verticale dans l’industrie. J’aimerais savoir si c’est possible d’y arriver par la création d’un bureau de l’ombudsman.
    Monsieur Masse, cela ne nuirait certainement pas. Il y a beaucoup d’intérêts. Dans les 19 ans que j’ai passé à examiner la question, beaucoup de gens se sont penchés sur le problème et, selon certains points de vue, ils se sont servis des données de l’industrie pour résumer ce que je viens de faire. Je suis heureux de constater que M. Greenberger est d’accord avec certains de mes commentaires, dont l’ironie du fait que le prix de l’essence est en hausse au Canada comme aux États-Unis, alors qu'on augmente l’approvisionnement aujourd’hui.
    La proposition d’un ombudsman qui serait en fait un arbitre indépendant est quelque chose qui pourrait être fortement considérée, étant donné les changements pas vraiment subtils, mais spectaculaires qui sont survenus et qui ont des répercussions sur la capacité financière des Canadiens d’acheter des biens élémentaires.
    L’essence n’est qu’un produit parmi tant d’autres à avoir connu des hausses importantes. M. Greenberger et moi-même serions probablement d’accord sur ce point. Je vous assure que nous ne nous sommes jamais croisés, ni parlé auparavant. Seulement l’année dernière, le blé a augmenté de 78 p. 100, le maïs de 52 p. 100, l’essence de 37 p. 100 et le brut de 30 p. 100.
    Ce qu'il est important de comprendre, M. Huffaker sera peut-être d’accord avec moi sur ce point, est que l’industrie ne retire aucun avantage de prix qui fluctuent, comme nous en avons été témoins, sans rime ni raison ou qui ne suivent pas les principes de base du concept de l’offre et de la demande, passant de 147 $ le baril à 31 $ en l’espace de trois mois. Je peux vous dire que cela a eu des effets perturbateurs, notamment, sur l’industrie pétrolière, et cela n’a rien fait pour assurer que les Canadiens pourraient compter sur une plus grande capacité de raffinage à long terme.
    Avec Sunoco qui a fermé des raffineries aux États-Unis, je présume que certaines décisions qui ont été prises au sujet de la raffinerie de Montréal-Est l’année dernière sont étroitement en lien avec cette imprévisibilité. La volatilité peut être contrôlée, et cela doit être le rôle des gouvernements de s’assurer, comme ils le peuvent, de la présence d’une surveillance mondiale sur les marchés des produits dérivés. Si nous ne le faisons pas, vous pouvez faire toutes les études sur la concurrence que vous voulez, vous ne réussirez jamais à répondre aux préoccupations fondamentales des Canadiens au sujet de la volatilité. Un ombudsman indépendant serait un important pas dans la bonne direction et pourrait rectifier le fait que Ressources naturelles Canada fournit aux Américains de l’information sur le pétrole sur une base hebdomadaire.
    À la page 29, vous verrez que nous fournissons aux Américains des données sur leur propre industrie et sur notre approvisionnement, mais nous refusons de donner ces renseignements aux Canadiens.
    Nous nous sommes assuré que le Bureau de la concurrence est mis au niveau sur certaines des meilleures pratiques; les responsables s’y intéressent beaucoup en raison de ce que l’Europe et les États-Unis font en lien avec leur loi antitrust.
    Nous pourrions en même temps régler le problème des intérêts économiques des économistes qui pourraient pencher vers des marchés efficients et des autres qui ont évidemment avantage à protéger leur territoire.
    En fin de compte, un arbitre serait là pour servir à titre d’agent du Parlement. Il pourrait faire sortir la vérité et faire des vérifications tous les mois, toutes les deux semaines ou peu importe votre choix. C’est le temps de concrétiser cette idée.
(1750)
    Merci.
    Je vais céder le reste de mon temps à M. Thibeault, mais je tenais simplement à remercier chaleureusement M. Greenberger de sa participation. Votre témoignage est très important, et nous aimerions faire un suivi pour en savoir davantage.
    Aux fins du compte rendu, j’aimerais rectifier un point; les banques canadiennes ont essayé de s’américaniser, mais certains députés les en ont empêchées. On en a la preuve noir sur blanc. J’ai les dossiers de présentation du lobbying que les banques ont fait à mon bureau et dans lesquels elles affirment qu’elles doivent s’américaniser pour protéger notre économie.
    Monsieur Thibeault.
    Merci.
    Combien de temps me reste-t-il, monsieur le président?
    Il vous reste trois minutes.
    C’est merveilleux.
    Mes premières questions s’adressent à Mme Johnson ou à M. Bilodeau. J’aimerais vous entendre sur le fait que les prix de l’essence semblent varier d’une région à l’autre, mais que les prix des différents détaillants semblent, par contre, toujours être identiques dans une même région.
    Comme nous l’avons entendu dans le premier groupe, les prix dans les marchés régionaux ou même locaux fluctuent en fonction de divers facteurs. En laissant de côté le prix du brut et le prix de gros, il peut y avoir divers facteurs qui entrent en ligne de compte, comme le type de station-service dans le marché, s’il s’agit d’une station-service à faible ou à grand volume, la production, le nombre de concurrents dans un marché donné, et leur agressivité. Il y a probablement des marchés — et je ne parle même pas des marchés régionaux... Dans certains marchés locaux, un concurrent peut être un détaillant rebelle, si vous voulez le croire, qui se plaît à afficher le plus bas prix possible. Divers facteurs influent sur les prix de détail d’un marché à l’autre.
    En ce qui concerne votre question, à savoir pourquoi les prix montent au même diapason, ce que nous avons entendu plus tôt est vrai. Le marché est assez transparent. Dans une ville, les commis des stations-services peuvent très facilement regarder de l’autre côté de la rue ou se promener un peu pour surveiller la fluctuation et ainsi décider de monter ou de baisser les prix, ou de les laisser tels quels.
    Je vais vous donner un exemple. Je suis certain que M. McTeague peut aussi faire un commentaire à ce sujet.
    Si vous partez de Toronto et que vous allez vers le nord, jusqu'à ma collectivité, Sudbury, vous faites le plein à Toronto — je vais choisir un chiffre au hasard — à 1,28 $. Quand vous arrivez à Parry Sound, le prix est de 1,30 $. Rendu à Sudbury, il est de 1,39 $. Roulez vers l'ouest pendant une demi-heure et vous constaterez que le prix est de 1,26 $.
    Ce qui nous dérange, particulièrement dans les régions rurales et du Nord, c'est qu'il semble y avoir une sorte de... Je ne veux pas utiliser le mot « collusion », mais c'est ce dont on parle dans les collectivités. C'est de cela que les gens parlent, n'est-ce pas? Ils se demandent pourquoi il leur est possible, quand ils se rendent à 20 minutes à l'extérieur de la collectivité, d'acheter de l'essence de 15 à 20 ¢ de moins le litre. Donc, si on se penche sur la concurrence, il semble y avoir quelque chose de louche.
    Encore une fois, pour en revenir aux différents facteurs, si vous arrivez de Toronto et que vous vous dirigez à l'extérieur de la ville, différentes choses peuvent avoir une incidence sur le prix, comme l'éloignement d'une certaine municipalité locale par rapport à la raffinerie... Cela augmente les coûts de transport. Manifestement, il s'agit là d'un des...
    Dans ce cas, ma question serait, et je vais peut-être l'adresser à M. McTeague, simplement pour que tout le monde ait l'occasion de répondre à cette question. Comment se fait-il qu'à Sturgeon Falls, le prix de l'essence est moins élevé qu'à Sudbury même si elle est plus éloignée de la raffinerie que Sudbury?
    Je suis désolé, monsieur McTeague; votre réponse devra aussi attendre.
    Des voix: Oh, oh!
    Le président: Vous constaterez cependant que je traite tous les députés de la même façon, et...
    Et les anciens députés.
    C'est cela.
    Les sept minutes sont écoulées.
    Nous allons maintenant passer à M. Chisu, pour sept minutes.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Mes questions s'adressent à Mme Mollie Johnson et à M. Richard Bilodeau, du Bureau de la concurrence.
    Je crois comprendre que la Loi sur la concurrence et le régime de la concurrence du Canada ont beaucoup changé à la suite des amendements qui ont été adoptés par le Parlement en mars 2009. Ces modifications, qui sont les plus importantes à avoir été apportées à la loi en plus de 20 ans, visaient à moderniser la loi et à l'harmoniser davantage avec les lois sur la concurrence des principaux partenaires commerciaux du Canada. Cela signifie que, pour protéger les consommateurs, vous avez à votre disposition l'outil le plus moderne.
    Étant donné mon expérience en ingénierie et à titre de chargé de la réglementation au sein de la plus importante association d'ingénieurs — les ingénieurs de l'Ontario —, je connais plutôt bien le processus de traitement des plaintes. Donc, je dois vous poser quatre questions.
    D'abord, dans votre déclaration préliminaire, vous avez dit que le bureau reçoit beaucoup de plaintes lorsqu'il y a une augmentation soudaine du prix de l'essence. Habituellement, quelle est la nature de ces plaintes? Pourriez-vous, je vous prie, expliquer au comité quelles sont les étapes du traitement des plaintes par le bureau?
    Voilà ma première question. Aimeriez-vous que je pose les trois autres, monsieur le président? Puis-je?
(1755)
    Certainement. Allez-y, monsieur Chisu. Quant à savoir s'il y aura assez de temps pour qu'on y réponde, c'est une autre question, mais allez-y.
    La commissaire doit-elle recevoir une plainte avant d'entreprendre une enquête?
    En quoi les récentes modifications à la Loi sur la concurrence vous aident-t-elles à lutter contre les pratiques anticoncurrentielles de l'industrie du pétrole dans les différentes régions?
    Quels sont vos pouvoir en matière d'enquête et de sanction par rapport aux pratiques anticoncurrentielles de l'industrie de l'essence?
    Enfin, en quoi consiste une enquête typique? Si vous recevez une plainte fondée, quelles sont les étapes du processus, et combien de temps vous faut-il pour la traiter?
    Nous allons peut-être chacun répondre à une partie de ces questions.
    Je pense qu'aux fins de la discussion d'aujourd'hui, je devrais vous parler de deux aspects des modifications. En 2009, on a modifié la Loi sur la concurrence. À mon avis, il y a deux dispositions qui sont particulièrement pertinentes par rapport à la discussion d'aujourd'hui. La première est que le Parlement a modifié le mécanisme d'examen des fusions. Cela a permis de mettre en place un processus à deux volets afin d'uniformiser le processus, mais aussi de faire en sorte que nous serons mieux placés pour recevoir des renseignements et obtenir ceux dont nous avons besoin de la part des parties qui souhaitent fusionner. Ainsi, nous pourrons évaluer de façon appropriée et efficace l'incidence d'une transaction sur la concurrence, puis apporter les correctifs nécessaires. Je pense avoir parlé de la transaction entre Suncor et Petro-Canada pendant ma déclaration préliminaire. C'est la première transaction qui a été évaluée selon les nouveaux critères, en 2009. Je crois qu'il s'agit de la première série de modifications qui revêt une certaine pertinence aujourd'hui.
    La deuxième disposition concerne les dispositions relatives aux complots. Elles sont entrées en vigueur en mars 2010, donc une année après l'adoption du projet de loi. Elles ont retiré l'exigence de prouver le préjudice économique qui résulte de ce complot. Auparavant, il fallait faire la preuve de l'existence du préjudice économique de même que celle du cartel. Maintenant, la seule exigence est de prouver l'existence du cartel. Il s'agit, par exemple, de prouver qu'il y a eu un accord sur la fixation des prix ou une allocation des marchés. De plus, on a aussi augmenté les amendes, qui sont passées de 10 à 25 millions de dollars, je crois, et les peines d'emprisonnement sont passées de cinq à quatorze ans.
    Grâce à ces nouvelles dispositions, nous croyons que nous sommes beaucoup mieux placés, d'abord pour obtenir les renseignements dont nous avons besoin lorsque nous examinons les fusions, puis lorsque nous sommes en mesure de prouver l'existence d'un cartel, pour pouvoir traiter ces dossiers de façon plus efficace.
    Je pense que ce sont les dispositions les plus pertinentes des modifications qui ont été apportées en 2009.
    Je cède la parole à Richard.
    Je vais répondre aux questions dans l'ordre.
    Dans la première question, vous cherchiez à savoir quel genre de plaintes nous recevons lorsque les prix augmentent et qu'il y a une hausse soudaine du prix. Dans de tels cas, je pense que la plainte habituelle que nous entendons est que le prix a augmenté et que les gens pensent qu'il se passe des choses sur le marché. Il s'agit de la plainte la plus fondamentale: les prix sont élevés et les consommateurs ne savent pas pourquoi. Dans une telle situation, ce que nous faisons, c'est d'étudier le marché et essayer de savoir ce qui s'y passe qui pourrait expliquer la hausse soudaine du prix. Pour ce qui est de l'essence et du genre de plaintes que nous recevons, voilà ce que nous examinons dans un premier temps.
    Vous vouliez aussi savoir s'il faut que nous recevions une plainte avant d'entreprendre une enquête. Plusieurs facteurs permettent à la commissaire de mener une enquête. Habituellement, dans la grande majorité des cas, elle le fait en raison d'une plainte. Elle a aussi le pouvoir de lancer une enquête de son propre chef si elle constate qu'il y a un problème dans le marché ou si elle lit un reportage dans les journaux ou sur Internet. Elle a le pouvoir de commencer à poser des questions et d'enquêter. Le ministre peut aussi inviter la commissaire à entreprendre une enquête.
    Sur la façon dont l'enquête se déroule... Vous avez posé une question sur les pouvoirs du bureau et sur la façon dont les enquêtes sont menées. À vrai dire, il y a quatre aspects. Pour ce qui est de la plainte initiale, la préoccupation initiale qui a été soulevée soit par nous, soit par un plaignant, nous nous penchons sur la situation, nous étudions la plainte et, dans un premier temps, nous essayons de déterminer si le problème qui a été soulevé relève de la Loi sur la concurrence. Les actes allégués sont-ils assujettis à une mesure législative ou des articles de la loi?
    Si la réponse à cette question est oui, nous étudions la question plus en profondeur. Nous commencerons alors à poser des questions aux plaignants, à essayer de comprendre ce qui se passe dans le marché, à faire des recherches sur Internet et vraisemblablement à parler à d'autres intervenants du marché afin de mieux comprendre la dynamique et la situation.
    Après cette étape, si nous croyons qu'il y a des problèmes graves ou des raisons de croire qu'on a peut-être enfreint la loi, nous pouvons faire une recommandation à la commissaire, qui peut accepter notre recommandation et lancer une enquête officielle afin d'étudier la question plus en profondeur et connaître tous les aspects de la situation.
    Le fait d'entreprendre une enquête permet alors à la commissaire d'avoir accès à un ensemble de ce qu'on appelle des outils d'enquête prévus par la loi. Elle a le pouvoir d'exiger, par assignation, la production de documents, des déclarations de témoins et les réponses écrites, si vous préférez. Dans le cas des enquêtes criminelles, elle est autorisée à demander au tribunal criminel — et, encore une fois, pour exiger la production de documents par assignation, nous avons besoin de l'autorisation du tribunal — pour pouvoir faire des perquisitions dans les commerces, ce que nous appelons des mandats de perquisition.
    La dernière étape de cette enquête, c'est que si nous avons la conviction qu'il y a une pratique qu'on doit faire cesser, dans la plupart des cas, nous entamerons des discussions avec la partie concernée et nous chercherons des solutions. Et dans les cas où nous sommes incapables de trouver la solution que nous jugeons nécessaire, nous porterons l'affaire devant le tribunal — dans le cas des questions qui relèvent du droit civil — ou devant le tribunal criminel.
(1800)
    Merci, monsieur Bilodeau. C'est incroyable que vous ayez pu répondre à toutes les questions en si peu de temps.
    Je veux simplement informer les députés que nous allons respecter le Règlement de la Chambre des communes. Nous donnerons la parole au plus grand nombre d'intervenants possible; quand la cloche retentira, nous suspendrons la séance.
    Je voudrais dire une dernière chose. Au nom du comité, j'aimerais remercier les témoins, parce que nous allons rapidement suspendre la séance pour nous diriger ensuite vers la Chambre pour aller voter. Donc, veuillez accepter nos remerciements dès maintenant.
    M. Hsu est le premier sur la liste, pour sept minutes.
    Je vais utiliser une partie du temps qui m'est accordé et je céderai ensuite la parole à M. Regan.
    Ma première question s'adresse au Bureau de la concurrence. Le Bureau de la concurrence étudie-t-il les marchés locaux? La raison pour laquelle je pose la question, c'est qu'un de mes électeurs m'a contacté pour me laisser savoir qu'à Kingston, sa ville natale, pour une journée donnée, le prix est établi à un certain montant, mais à Gananoque, qui n'est qu'à 15 à 20 minutes de là, le prix est tout autre. Cette personne comprend que les prix fluctuent et que le marché de l'essence est très concurrentiel, mais elle ne pouvait pas s'expliquer cet écart dans les prix.
    Vous penchez-vous sur la concurrence à l'échelle locale? Si quelqu'un dépose une plainte, feriez-vous enquête?
    Pour pousser le raisonnement encore plus loin, si quelqu'un porte plainte pour un cas semblable à celui que vous venez tout juste de décrire, nous poserons des questions, nous chercherons à savoir ce qui se passe et à connaître les prix observés sur le marché. À ce moment-là, pour cette région, nous examinerions aussi les conditions du marché du pétrole brut et de l'essence au prix de gros.
    Je pense qu'il est important de noter que, comme je l'ai dit plus tôt, un ensemble de facteurs font en sorte que le prix varie d'un marché à l'autre. Si nous parlons d'une augmentation du prix — souvent, les gens se plaignent des prix élevés —, il faut savoir qu'à moins qu'il ne soit le résultat d'une pratique anticoncurrentielle et que nous ayons des renseignements qui nous portent à croire que l'écart du prix ou que le prix plus élevé est attribuable à une pratique anticoncurrentielle ou même à quelque chose qui s'en rapproche, rien ne nous permet d'entreprendre une enquête en vertu de la Loi sur la concurrence.
    En général, avez-vous l'impression d'avoir assez de renseignements, ou y a-t-il certains renseignements précis que vous aimeriez avoir et que vous n'avez pas?
    De toute évidence, lorsque nous menons une enquête, plus nous avons de renseignements, mieux c'est. Cela dit, je pense qu'au fil du temps cette question a été étudiée. Ces 20 dernières années, nous avons fait beaucoup d'enquêtes et avons acquis une bonne connaissance du marché de l'essence au Canada, à l'échelle locale, régionale, nationale et même internationale. Ces connaissances et cette expérience nous permettent d'étudier ces situations, de comprendre la dynamique du marché et d'essayer de déterminer si, à ce moment-là, la loi pourrait s'appliquer à cette situation, ou s'il s'agit simplement d'un cas où les conditions dans le marché local ont une incidence sur le prix à la pompe.
    Cela m'amène à la question que je veux poser à M. McTeague. Je suis surpris que le Canada n'ait pas de rapport sur les stocks, parce que dans beaucoup de marchés, on utilise ce genre de choses pour s'assurer que les marchés sont bien réglementés. Dans le marché des actions, si vous détenez plus qu'un certain pourcentage des actions, vous devez en faire rapport. Dans le marché des produits de base, je pense qu'il y a des rapports quotidiens sur les avoirs des spéculateurs et des opérateurs en couverture.
    Donc, la question que je veux poser à M. McTeague — parce que c'est ce que font les États-Unis — est la suivante: est-ce une chose qu'il serait facile de faire et, si oui, qui devrait ou aurait dû être le chef de file à cet égard?
(1805)
    Merci d'avoir posé cette question, monsieur Hsu.
    Kingston est un des marchés les plus étranges. Mais quand on est un raffineur et qu'on reçoit 23 ¢ le litre pour transformer du pétrole brut en essence alors que cela ne coûte que 4 ¢ ou 5 ¢ le litre, et qu'on en retire un profit net d'environ 17 ¢ ou 18 ¢ le litre, on ne se préoccupe pas trop de la marge de détail. On peut réduire le profit à 5, 6 ou 7 ¢ le litre et acculer des entreprises à la faillite — comme cela a été fait dans les grands centres urbains — et ainsi mettre la main sur les parts de marché.
    Pour ce qui est de la question sur le marché des produits de base, je pense qu'il nous sera difficile aujourd'hui de démêler la situation qui prévaut à l'échelle mondiale depuis les 12, 14 ou 16 dernières années. Cependant, une chose est très claire. Nous pouvons y arriver par la mise en oeuvre d'une collaboration internationale élargie, et il me semble que le Canada est un des pays qui s'y opposent. J'ai entendu certains commentaires de la part du gouverneur de la banque et de son adjoint, le sous-gouverneur de la Banque du Canada... Quant à savoir si le Canada devrait faire quelque chose ou non, ils semblent être plutôt neutres. Ils pensent peut-être que c'est une bonne chose si le prix des produits de base explose, parce qu'une région du pays pourrait en profiter tandis qu'une autre en subirait les conséquences. Je pense, par exemple, au secteur manufacturier de notre partie du monde, en Ontario.
    Donc, il y a des choses sur lesquelles je pense que nous pouvons être d'accord, notamment les limites de position et les rapports des importants opérateurs de marché. Nous devons savoir qui est sur le marché afin d'éviter de revivre ce qui s'est passé en juin 2009, lorsque Vitol a acheté, sans liquidités, du pétrole brut d'une valeur de 11 milliards de dollars, ce qui a causé une grave désorganisation du marché. En arrière-plan, je vois M. Greenberger hocher de la tête; donc, je dois être sur la bonne voie. Il y a aussi les garanties contre le risque avant ouverture du marché. Il y a plusieurs solutions que nous devrions envisager, mais s'il n'y a aucune volonté, voire un intérêt, à chercher à savoir ce qui cause la volatilité du marché, cela devient un exercice futile.
    Cela dit, je prends bonne note des commentaires de M. Chisu par rapport aux modifications de 2009 à la Loi sur la concurrence. Je pense qu'il devrait parler à certains de ses collègues, notamment M. Menzies et d'autres, qui sauront que beaucoup de ces modifications sont fondées sur le travail que j'ai accompli de 2000 à 2005.
    Permettez-moi de poser une question aux représentants du Bureau de la concurrence. M. McTeague a parlé de la question des prix de gros à la rampe de l'essence et à quel point ils sont beaucoup plus élevés au Canada qu'aux États-Unis. Vous penchez-vous sur la question?
    Suivre ces cours ne fait pas partie de nos tâches habituelles. Il se peut que nous le fassions de temps en temps, lorsque nous recevons des plaintes au sujet des prix élevés, qu'il s'agisse du prix de gros à la rampe ou du prix à la consommation. Parfois, nous recevons des plaintes au sujet de la pratique de prix d'éviction, c'est-à-dire que certains acteurs du marché fixent leur prix en dessous d'une certaine mesure du coût pendant un certain temps. Nous allons nous pencher sur ces cas qui influent sur le prix de gros.
    Nous examinons la différence entre des villes jumelées, comme le fait Ressources naturelles Canada avec Info-Carburant, par exemple, lorsque nous suivons les prix de gros de Toronto et de Buffalo. Habituellement, nous constatons, en comparant ces deux marchés, que les prix varient de manière synchronisée. De plus, l'écart entre les prix est généralement assez faible.
    Comme nous l'avons entendu, je pense que cela dépend de la dynamique de marché: s'il en coûte moins cher à une raffinerie ou à un marchand d'acheter l'essence à Buffalo, alors c'est là qu'il l'achètera, et si ce n'est pas le cas, il se la procurera à Toronto.
    Mais il ne s'agit pas de quelque chose que nous suivons automatiquement.
    Monsieur le président, j'aimerais préciser, à ce sujet, qu'un marchand de l'Ontario ne peut pas acheter le produit aux États-Unis, car les spécifications sont différentes. Cet exemple illustre que le Bureau de la concurrence n'a probablement pas compris que les choses avaient changé.
    La différence dans les spécifications, surtout en ce qui a trait au soufre, est l'une des principales raisons qui font qu'on ne peut pas conduire un camion à… et ce n'est pas comme s'il y avait une raffinerie à Buffalo où vous pourriez vous la procurer. Comme vous pouvez maintenant le constater, le mythe selon lequel le marché pertinent se trouve aux États-Unis n'est rien d'autre que cela: un mythe. Ce n'est pas vrai.
    Mes deux minutes sont-elles écoulées, monsieur le président?
    Pratiquement, monsieur. Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer aux interventions de cinq minutes.
    Monsieur Braid, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Merci à tous les témoins d'être ici aujourd'hui.
    Monsieur McTeague, je vous souhaite un bon retour parmi nous. Je suis heureux de vous revoir.
    Merci, monsieur Braid.
    Je vais vous poser ma première question.
    Dans votre exposé, et pendant le tour de questions, vous avez parlé de vos préoccupations au sujet du rôle que joue le marché du côté des « spéculations excessives ». M. Greenberger en a aussi parlé. Que peut faire le gouvernement du Canada, d'un point de vue réaliste et pratique, au sujet des spéculations excessives auxquelles se livre Wall Street?
    Je vous remercie d'avoir posé la question, monsieur Braid. Je suis au courant du bon travail que vous avez accompli au comité. Cette époque me manque, et j'espère la revivre, surtout en ce qui a trait à cette question.
    Je pense que le point de départ était ce sur quoi nous nous sommes mis d'accord au G20 à Pittsburgh et ce à quoi j'ai fait allusion dans mon exposé. Voici ce que nous avons convenu: que tous les dérivés gré à gré normalisés « devraient, d'ici la fin de 2012 au plus tard, se transiger sur des plateformes boursières ou commerciales électroniques, au besoin, et être approuvés par les contreparties centrales. »
    En fait, nous disons qu'une surveillance devrait être exercée à l'échelle mondiale. En effet, nous voulons savoir qui s'adonne au commerce, car nous voulons savoir s'ils devraient le faire.
    Nous cherchons à reconnaître quelque chose qui est beaucoup plus important, et je pense que M. Greenberger y a aussi fait allusion. Depuis 1936 et avant la déréglementation, il y a toujours eu un opérateur en couverture qui réduisait au minimum le risque entre un producteur qui vendait des produits de base — et il y en a plusieurs — et un acheteur, qu'on appellera un consommateur. L'opération de couverture est effectuée dans le but de réduire le risque, de sorte que lorsque vous prenez possession du produit, sa valeur est celle sur laquelle vous vous étiez mis d'accord.
    Malheureusement, en raison de l'augmentation de l'investisseur d'indice — c'est-à-dire la financiarisation de ce processus —, l'opérateur en couverture traditionnel a été écarté et le coût des opérations de couverture est monté en flèche. Au lieu de simplement acheter et d'ensuite vendre et recevoir votre pétrole, votre blé ou votre maïs, les investisseurs d'indice reviennent sur ces contrats et créent un plancher permanent qui fait monter les prix.
    Devraient-ils pouvoir agir ainsi? On reconnaît que l'on devrait s'inquiéter jusqu'à un certain point d'une telle hausse des prix dans un bon nombre de régions du monde, car elle génère le genre de pauvreté et de bouleversements auxquels nous assistons.
    Monsieur Braid, j'ai fait remarquer plus tôt que ce climat instable n'apporte rien à l'industrie pétrolière du Canada ou à celle du reste du monde. On a aussi besoin de prévisibilité, et c'est pourquoi je pense que l'on devrait se concentrer là-dessus; le Canada s'est tenu très tranquille à ce sujet.
(1810)
    Merci.
    Monsieur Huffaker, nous avons entendu, de la part du premier groupe d'experts — et ce fait est généralement connu et compris —, que l'Ouest canadien exporte du pétrole brut, alors que le centre du Canada l'importe. Quels sont les facteurs commerciaux qui empêchent le centre du Canada d'importer moins de pétrole brut?
    À notre avis, c'est en grande partie parce que le marché nord-américain du pétrole brut est extrêmement bien intégré et efficace. Il n'est évidemment pas parfait, mais selon les normes mondiales, il est exceptionnellement bien intégré. La plupart du temps, ces transactions sont effectuées de façon relativement efficace.
    Des questions liées à la distance du marché et à sa taille poussent la plus grande partie de ces exportations vers les États-Unis. Le centre du Canada achète une bonne partie du pétrole brut canadien. Une très grande partie est aussi exportée vers le nord du Midwest américain, qui est relativement proche, et dans l'ouest des États-Unis. Je pense que les coûts liés au transport sont en grande partie responsables.
    Merci.
    J'ai une question pour les représentants du Bureau de la concurrence. Dans votre exposé, vous nous avez expliqué comment vous êtes intervenus dans une situation concernant la fixation des prix au Québec. Quels étaient les facteurs précis relatifs à la situation qui vous ont poussé à intervenir?
    On nous a fait part d'allégations concernant des municipalités dans lesquelles des détaillants locaux fixaient les prix et se consultaient à ce sujet; nous avons donc ouvert une enquête. Nous avons employé les outils d'investigation dont nous disposions, y compris la mise sur écoute et la perquisition des entreprises. Nous avons été en mesure de monter un dossier et, en fin de compte, de porter des accusations contre les individus qui ont participé à la fixation des prix dans ces quatre municipalités.
    Comme l'a dit Mme Johnson dans son exposé, nous avons pu obtenir plusieurs plaidoyers de culpabilité qui ont conduit à des amendes importantes et à des peines d'emprisonnement.
    Merci.
    Merci beaucoup, monsieur Braid.
    Monsieur Julian, vous avez cinq minutes.
    Merci aux témoins.
    Je vais partager mon temps avec Mme LeBlanc.
    J'ai une question à poser à M. McTeague et à M. Greenberger.
    Vous avez peut-être entendu que pour le groupe d'experts précédent, j'ai cité une étude qui révèle que le 12 mai, l'industrie pétrolière réalisait un profit excédentaire déterminé par le prix au litre. Ce jour-là, à Toronto, il était de 0,25 $ le litre, en fonction du prix du pétrole brut ce jour-là, des taux de change et des taxes.
    D'après les estimations, chaque cent de ces prix excessifs génère un profit excédentaire d'environ 1 million de dollars par jour, ce qui signifie 25 millions de dollars en profits excédentaires au pays pour ce jour-là. Cet argent provient des poches des familles ordinaires qui ont déjà de la difficulté à joindre les deux bouts.
    J'aimerais donc vous demander si vous pensez qu'il s'agit d'une estimation juste des prix excessifs et des profits excédentaires qui pèsent actuellement sur les consommateurs au Canada?
    Je laisse maintenant la parole à Mme LeBlanc.
(1815)
    Ma question s'adresse à M. Greenberger.
    Merci de votre exposé; il était très informatif.
    Des experts ont conclu que bien que la récession de 2008 n'était pas uniquement imputable à la hausse des prix de l'essence, elle a, en fin de compte, été alimentée par la forte augmentation du prix à la pompe. À votre avis, la récente hausse des prix de l'essence pourrait-elle provoquer une deuxième récession, ou retarder une éventuelle reprise économique?
    Nous allons commencer avec M. Greenberger, et nous allons ensuite entendre M. McTeague.
    Les gens aux États-Unis et, selon moi, bon nombre des dirigeants des pays d’Europe sont d’avis que, si le prix de l’essence demeure à son niveau actuel ou — comme nous le craignons — augmente, cela aura un effet très dissuasif sur les consommateurs et pourrait porter le coup de grâce à une économie qui semble déjà chancelante.
     En ce qui concerne l’établissement de prix abusifs, au cours de la bulle de 2008, les organismes de réglementation des États-Unis ont abandonné l’idée de prouver que cette tendance influait sur la situation. Comme votre Bureau de la concurrence le laisse entendre, lorsqu’on examine ces écarts de prix — aux États-Unis, on peut parcourir 20 pâtés de maisons et observer des écarts de 70 ¢ — ils ont tous tendance à être justifiés par l’offre et la demande.
     Si nous voulons vraiment couper court à cette montée des prix, nous devons prendre deux mesures. Premièrement, nous devons mettre en place des limites de position. Grâce à son influence au sein du G20 et ailleurs, le Canada a un rôle à jouer à cet égard — tout comme la France, tel que M. Sarkozy vient de le déclarer clairement.
     Deuxièmement — je ne connais pas suffisamment les rouages du gouvernement canadien pour savoir qui est responsable de cette question —, nous n’avons pas parlé du fait que le président Obama avait demandé à notre ministère de la Justice ainsi qu’à tous les organismes de réglementation de chercher à découvrir si ces marchés faisaient l’objet de manipulations. Il n’est pas question ici de spéculation excessive, car c’est un fait: les spéculateurs sont beaucoup trop nombreux, mais ils peuvent être animés par les meilleures intentions. En revanche, il y a manipulation lorsque des gens conspirent pour faire grimper les prix.
     Au cours des deux dernières semaines, la Commodity Futures Trading Commission a exposé une importante affaire de manipulation. Il convient de le souligner, car la partie de la loi Dodd-Frank qui permet de prouver plus aisément la manipulation entrera probablement en vigueur en juillet ou en août. Toutefois, les organismes de réglementation ont jugé que le cas de manipulation était tellement grave qu’ils ont intenté un procès en vertu de l’ancienne loi, ce qui accroît le fardeau de la preuve.
     Cela veut dire que, dans ce marché, il y a collusion entre les opérateurs. Je ne peux pas m’étendre longtemps là-dessus, mais je dirais que l’organisation chargée de détecter la manipulation devrait étudier le marché canadien. Je ne serais nullement étonné d’apprendre que certains acteurs manipulent le marché canadien.
     Finalement, on peut dire que l’Ouest canadien est florissant en raison du prix très élevé du pétrole. Comme M. McTeague l’a mentionné, celui-ci est passé de 147 à 31 $ en six mois. Il s’agit d’une bulle, qui éclatera tôt ou tard. Si l’on examine la situation sous un angle très étroit, on peut dire que l’Ouest canadien en souffrira et que l’Est du pays en bénéficiera.
     Du point de vue de la certitude et de la production, ce genre de volatilité… Aux États-Unis, le prix du pétrole s’élevait à 65 $ en 2007, à 147 $ en 2008, à 31 $ en 2009 et maintenant, en 2011, il se chiffre à 100 $. Ce marché n’est pas sain. Il n’est certainement pas le produit de l’offre et de la demande.
    Merci beaucoup, monsieur Greenberger.
     Nous allons maintenant passer à M. Lake, qui dispose de cinq minutes
    Merci, monsieur le président…
    Oh, je suis désolé, M. McTeague a une observation à formuler, bien que le temps de parole du député soit écoulé.
    Je ne vois aucune objection à le laisser terminer avant que mon temps de parole commence.
    D’accord.
     Monsieur McTeague, pouvez-vous faire une remarque concernant la dernière question en à peu près 30 secondes?
    Fort bien.
     En un mot, monsieur Julian, la réponse est oui. Les pétrolières font effectivement preuve d’excès. Bien entendu, les raffineries et les autres en profitent. Si ce soir ils peuvent obtenir 23,2 ¢ le litre, à titre d’écart entre le prix du brut et le prix du gros occasionnel, ils seront ravis puisque le pétrole leur coûte seulement 4 ou 5 ¢ le litre.
     Cela a effectivement un effet perturbant qui ne se limite pas à ceux qui vendent le produit. Imaginez ceux qui doivent l’acheter, qu’il s’agisse de fabricants de café ou de lignes aériennes qui, maintenant, vont devoir soit refiler les coûts supplémentaires aux consommateurs, soit réduire leur personnel.
     La vérité, c’est que cela nuira à la vitalité économique de notre pays et, si nous ne nous réveillons pas, nous allons finir par nous faire du tort.
     C’est tout ce que je peux dire en 30 secondes, monsieur le président.
(1820)
    C’était formidable, monsieur Teague, et cela vous a pris moins de 30 secondes. Je vous avais donné une plus grande marge de jeu.
    Oh, est-ce vrai? Il n’y a pas de quoi, monsieur le président.
    Monsieur Lake.
    Nous connaissons M. McTeague assez bien pour savoir que 30 secondes ne lui suffisent jamais.
     Monsieur Huffaker, vous avez parlé de l’incidence très vaste que vos sociétés membres ont sur l’économie canadienne. L’un des courants sous-jacents de la conversation — et vous l’avez probablement ressenti, car vous étiez présent dans la salle aujourd’hui — découle des attaques constantes du NPD contre les banques et les pétrolières. En fait, on ne les entend jamais mettre beaucoup l’accent sur les actionnaires.
     Peut-être pourriez-vous clarifier une question pour moi. L’un des points que vos organisations membres — Talisman, CNRL, Suncor, Cenovus, Nexen et l’ensemble de vos organisations — ont en commun, c’est qu’elles font toutes partie des 25 principaux avoirs du régime de retraite de Postes Canada, par exemple, de la caisse de retraite syndicale des travailleurs des postes, ce qui est intéressant. En fait, les actions de Talisman comptent pour 94 millions de dollars dans leur fonds de pension, celles de CNRL, pour 117 millions, celles de Suncor, pour 54 millions, celles de Cenovus, pour 64 millions, et celles de Nexen, pour 56 millions.
     En ce qui concerne le régime de retraite de l’Ontario, il est intéressant de constater que les actions de Talisman comptent pour 88 millions de dollars dans son fonds de pension, celles de CNRL, pour 84 millions, celles de Suncor, pour 65 millions, et celles de Cenovus, pour 57 millions. Vous voyez où je veux en venir. Ces sommes sont substantielles.
    En passant, les trois principaux avoirs du régime de retraite de Postes Canada, de la caisse de retraite des travailleurs des postes, sont liés aux banques, lesquelles surpassent Suncor et CNRL pour ce qui est de l’argent investi.
    Peut-être pourriez-vous parler de l’incidence que vos membres ont partout au pays, en particulier sur certains des importants régimes de retraite du pays.
    Je suis entièrement d’accord avec vous. Ce que vous avez énoncé est exact. Nos membres jouent un rôle important dans les avoirs des fonds de pension et des fonds communs de placement offerts partout au Canada. Les activités de notre industrie sont probablement dans l’intérêt de la plupart des Canadiens, qui en tirent parti d’une manière ou d’une autre.
     Si ma mémoire est bonne, nos membres comptent pour environ un quart de la valeur de la Bourse de Toronto. Manifestement, il s’agit d’une énorme industrie qui, comme nous l’avons mentionné plus tôt, emploie 500 000 personnes, et certainement pas exclusivement dans l’Ouest canadien. Une portion de ces emplois est-elle concentrée là-bas? Assurément, mais, dans le secteur manufacturier, des dizaines de milliers de citoyens du Centre et de l’Est du Canada occupent des postes liés à l’industrie pétrolière et gazière.
     J’aimerais formuler de brèves observations concernant un fait que deux ou trois autres personnes ont mentionné, à savoir l’accroissement du prix du baril de pétrole jusqu’à 147 $ et son recul jusqu’à 31 $. Oui, nous convenons que ces fluctuations ont frappé durement l’industrie. Et ce n’est pas uniquement le prix de 31 $ qui a causé des problèmes. En fait, lorsque le baril de pétrole a atteint 147 $, certaines facettes de l’industrie, comme le développement des sables bitumineux, ont été grandement perturbées en raison de l’effet que cela a eu sur le coût des intrants.
     Cependant, je ne suis pas ici pour expliquer la raison pour laquelle le prix a fluctué ainsi — il y a des experts ici pour en parler —, mais j’admets que ce genre de prix était presque aussi difficile à gérer que le prix très bas.
     J’aimerais également ajouter ceci: je ne crois pas qu’il soit question de faire fructifier l’Ouest canadien au détriment du reste du pays. À mon avis, lorsque la chance sourit à l’Ouest canadien, le reste du Canada en bénéficie énormément. J’aimerais aussi signaler qu’à l’heure actuelle, l’industrie pétrolière et l’industrie gazière représentent en réalité deux économies canadiennes. L’industrie pétrolière est florissante, alors que l’industrie gazière éprouve vraiment des difficultés.
    Monsieur McTeague, il est clair que vous avez longtemps été député à la Chambre des communes. Vous étiez membre du comité de l’industrie à l’époque où il a étudié cette question à plusieurs reprises. Je pense qu’il n’a émis des recommandations qu’une seule fois, soit en 2003, au moment où vous étiez vice-président du comité. Fait intéressant, il n’a formulé à l’époque qu’une seule recommandation qui n’avait rien à voir avec les questions que vous avez abordées aujourd’hui. Je pense qu’à ce moment-là, le pays était dirigé par un gouvernement libéral majoritaire.
     Pourquoi n’avez-vous pas été en mesure de convaincre vos collègues de faire certaines de ces recommandations?
    C’est une excellente question, monsieur Lake.
     Vous vous rendrez compte que j’étais également le secrétaire parlementaire du ministre des Affaires étrangères et que j’étais responsable des Canadiens à l’étranger.
     Bon nombre de recommandations ont été faites au fil des ans, la plupart d’entre elles ayant trait à des modifications à apporter à la Loi sur la concurrence. Comme je l’ai indiqué plus tôt, ces changements ont entraîné une série de projets de loi portant sur les deux volets de la fixation des prix, sur la collusion, sur la conspiration, sur les modifications à apporter aux dispositions sur les prix d’éviction et sur les stratégies de vente à perte. Certains d’entre eux ont finalement été mis en oeuvre par votre gouvernement. Par conséquent, je m’attribue une partie du mérite de ces adoptions.
     En même temps, vous devez reconnaître, monsieur Lake, qu’au fil des ans, parce qu’il s’agit d’une loi d’application générale, une multitude de gens ont indiqué qu’ils ne souhaitaient certainement pas qu’une loi prévue pour une industrie soit appliquée à d’autres. Donc, pour des raisons évidentes, au cours des années où j’étais député, j’ai probablement permis à un plus grand nombre de lobbyistes de s’enrichir que peut-être tout autre député dans l’histoire. Mais cela étant dit, il faut reconnaître que les changements que vous avez finalement apportés en 2009 découlaient en grande partie de mes initiatives…
(1825)
    Quelqu’un vous a finalement écouté.
    ...sous toute réserve, monsieur Lake — et vous allez apprécier ce qui suit —, je n’ai pas réussi à faire adopter les changements à apporter pour éliminer la faille qui existe dans la Loi sur la concurrence et qui permet d’invoquer une défense fondée sur les gains en efficience. Pour mettre cette faille en contexte, c’est celle qui a permis à Superior Propane d’obtenir un quasi-monopole dans le secteur du propane.
    Merci, monsieur McTeague.
     Vous êtes tellement efficace qu’il m’est difficile de trouver un moment où vous reprenez votre souffle et où je peux en fait…
    Cela fait-il cinq minutes? Désolé.
    Nous vous avons, en fait, accordé…
    Monsieur Lake, je vous remercie de votre question.
    ...plus de temps que prévu.
    Chassez le naturel, et il revient au galop.
    Nous passons maintenant à M. Julian. Vous pouvez intervenir pendant cinq minutes ou jusqu’à ce que la cloche sonne.
     Merci beaucoup, monsieur le président.
     Je vais partager mon temps avec M. Thibeault.
     J’aimerais revenir à M. McTeague. Le comité de l’industrie a déjà examiné la question du prix de l’essence et a produit un rapport dans lequel il est clairement recommandé de créer une agence de surveillance du secteur pétrolier, et vous connaissez les détails de cette proposition. C’est une initiative dont le NPD fait la promotion depuis un certain temps au nom de tous les gens qui sont préoccupés par ces hausses excessives des prix de vente au détail de l’essence et de leurs répercussions sur les familles ordinaires.
     Avant que je cède la parole à M. Thibeault, j’aimerais demander à M. McTeague la raison pour laquelle le gouvernement précédent a refusé de mettre en oeuvre une initiative qui, comme le comité l’a déjà laissé entendre, constituerait un moyen d’aider les familles qui ont des difficultés financières, et la raison pour laquelle le gouvernement actuel refuse également de le faire.
     Je vais céder la parole à M. Thibeault, car je crois qu’il a également quelques questions à poser.
    J’aimerais donner à M. McTeague l’occasion de répondre à la question que j’ai posée plus tôt.
     J’ai également une question à poser à M. Huffaker. Vous avez mentionné dans votre déclaration liminaire que ce secteur enregistrait des recettes de 100 milliards de dollars, ou de 50 milliards de dollars. Le gouvernement conservateur continue de verser une subvention de deux milliards de dollars aux pétrolières. Si l’on mettait un terme à cette subvention, cela aurait-il une incidence quelconque sur la fluctuation des prix de l’essence?
     Voilà mes deux questions. Merci.
    Monsieur Julian, le concept d'une agence de surveillance des prix du pétrole, qui devait essentiellement fournir un rapport hebdomadaire sur ces prix, émanait en fait de moi et de mon parti, et nous l'avons mis en oeuvre fin 2005. Comme vous le savez, le gouvernement est malheureusement tombé quelques mois plus tard, avant sa mise en oeuvre. Le nouveau gouvernement n'en a pas accepté l'idée et l'agence n'a pas vu le jour.
    La raison pour laquelle cela a été créé et j'ai lutté en 2002, bien avant que la question des dérivés ne surgisse et ne crée le type de volatilité qui a bien été documenté par d'autres, était simplement qu'il n'y a jamais eu d'entente sur la nature du problème. J'ai donc pensé qu'il fallait laisser parler les faits, comme les Américains le font chaque semaine. Ce n'est pas parfait, mais au moins chaque goutte de pétrole est comptabilisée dans ce pays. On procède à une répartition; les Américains traitent l'énergie de façon très différente de la nôtre. Elle est répartie en districts, les Petroleum Administration for Defense Districts, car ils la considèrent comme un produit stratégique.
    Je propose donc une modernisation. Si Ressources naturelles Canada dépense l'argent des contribuables pour fournir aux Américains de l'information sur notre pays, ne devrions-nous pas détourner un peu de cet argent pour que les Canadiens puissent se faire une idée de l'offre et la demande dans leur pays?
    Cela fait neuf ans que j'ai la même position et je n'ai pas l'intention d'en changer.
    Merci de votre question, monsieur Thibeault.
    Comme je l'ai dit, le chiffre d'affaires, les recettes de l'industrie, se situe à environ 100 milliards de dollars par an. Le taux d'investissement est quant à lui de l'ordre de 50 milliards de dollars par an. Évidemment, cela fluctue en fonction d'éléments comme les prix.
    Vous avez posé la question des subventions. Je pense qu'il y a probablement un désaccord assez fondamental à ce sujet. Nous ne pensons pas que l'industrie soit subventionnée. Jack Mintz, qui est probablement l'une des plus grandes autorités universitaires indépendantes en matière de régimes fiscaux, a étudié la question très attentivement. Pour lui, le fardeau fiscal qui pèse sur l'industrie pétrolière et gazière est probablement un peu plus lourd que pour la moyenne de l'industrie au Canada.
    Nous pensons que chaque industrie a son propre régime fiscal, qui varie en fonction de sa nature. Le nôtre ressemble à l'occasion à un régime de subventions. Je le répète, nous pensons qu'il s'agit d'un régime fiscal. Nous avons des taux de déduction, au-delà desquels nous récupérons les coûts, comme d'autres industries le font. À notre avis, cela ne constitue pas une subvention.
(1830)
    Je poursuis dans la même veine.
    Avec tout le respect que je vous dois, les contribuables vous donnent en fait des crédits d'impôt. Comment donc pouvez-vous ne pas voir qu'il s'agit d'une subvention? À l'heure actuelle, votre industrie reçoit des subventions bien plus lucratives que les autres qui n'ont pas les régimes fiscaux qui sont les vôtres. En fait, selon des données de 2008, vous êtes taxé à un taux global de 10,5 p. 100 par rapport, par exemple, à 16,5 p. 100 pour la petite entreprise.
    C'est dur pour les contribuables de s'en faire une idée, parce qu'en réalité, les subventions sont là. Le gouvernement a lui-même déclaré qu'à un certain moment, il y mettrait fin. Pourquoi donc l'argent que vous empochez des contribuables ne serait-il pas une subvention?
    Comme je l'ai dit, chaque industrie a un régime en vertu duquel elle déduit et récupère des coûts. Dans le secteur des sables bitumineux, on a, comme vous le savez, retiré du dernier budget l'une des dispositions que d'aucuns qualifiaient de subventions. Je le répète, il ne semble pas que le fardeau global de notre industrie soit particulièrement plus léger que pour d'autres. Il ne faut pas oublier en outre que le taux de réinvestissement est énorme et que de très nombreuses entreprises ne font pas encore de profit, particulièrement dans les secteurs plus modestes de l'industrie.
    Merci beaucoup, monsieur Huffaker. Vos cinq minutes sont écoulées.
    Nous passons maintenant et jusqu'à ce que la sonnerie retentisse, du côté des conservateurs.
    Madame Gallant.
    Merci, monsieur le président.
    Nous avons au pays une organisation appelée la Fondation Tides Canada. Son financement provient des États-Unis et elle subventionne des groupes d'intérêts spéciaux qui font campagne contre les sables bitumineux. Si elle devait réussir à fermer l'exploitation et la production dans les sables bitumineux, quelles conséquences cela aurait-il sur le prix de l'essence à la pompe?
    il y a certainement une corrélation entre l'offre et la demande, mais comme nous en avons tous discuté précédemment, cela se détermine sur les marchés mondiaux, où transitent plus de 80 millions de barils par jour. Il faut donc qu'il y ait un certain flux pour que les conséquences se fassent sentir.
    Votre question se rapporte aux activités de Tides, ou à celles de la communauté des ONGE. Dans nos sociétés libres d'Amérique du Nord, on a le droit de faire valoir ses positions. Ce sont nos systèmes politiques et réglementaires qui détermineront l'issue du dossier. Évidemment, nous aimerions voir d'autres développements.
    Dans la mesure où votre question concerne les pipelines, nous appuyons un élargissement des marchés pour les produits canadiens.
    Merci.
    Merci, monsieur Juffaker.
    Nous avions convenu d'arrêter au moment du retour à la Chambre. Encore une fois, merci.
    La séance est levée.
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