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RNNR Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent des ressources naturelles


NUMÉRO 040 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mardi 15 mai 2012

[Enregistrement électronique]

(0845)

[Traduction]

    Bonjour. Je suis Peter Julian, vice-président du comité. Je remplace temporairement notre président, qui arrivera bientôt.
    Je voudrais remercier nos témoins de leur présence au comité.
    Nous accueillons aujourd'hui, du Fonds mondial pour la nature (Canada), Martin von Mirbach, directeur du Programme de l'Arctique canadien; de la société Babcock and Wilcox Ltd., Christofer Mowry et Christopher Deir, respectivement président et directeur; et de la Commission canadienne de sûreté nucléaire, Michael Binder, président et premier dirigeant, Barclay Howden, directeur général, Direction de l'amélioration de la réglementation et de la gestion des projets majeurs, et Patsy Thompson, directrice générale, Direction de l'évaluation et de la protection environnementales et radiologiques.
    Merci beaucoup à tous nos témoins d'avoir accepté de comparaître devant le comité aujourd'hui.
    Nous commencerons par la Commission canadienne de sûreté nucléaire.
     Monsieur Binder, vous avez 10 minutes. Merci beaucoup.
    Bonjour, monsieur le président et membres du comité.

[Français]

    Je m'appelle Michael Binder. Je suis président de la Commission canadienne de sûreté nucléaire. C'est vraiment avec plaisir que j'ai accepté votre invitation à venir vous préciser aujourd'hui les activités auxquelles la CCSN prend part et la contribution qu'elle peut apporter à l'étude du comité sur la mise en valeur des ressources dans le Nord canadien.

[Traduction]

    La CCSN est l'organisme de réglementation nucléaire du Canada. Elle est chargée de préserver la sûreté, la santé et la sécurité des personnes, de protéger l'environnement et de mettre en oeuvre les engagements internationaux du Canada en ce qui concerne l'utilisation pacifique de l'énergie nucléaire. Son mandat comprend aussi la diffusion de renseignements scientifiques objectifs. La CCSN s'acquitte de son mandat en vertu de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires.
    La CCSN est une commission quasi judiciaire indépendante qui réglemente tous les aspects de l'énergie nucléaire au Canada, y compris l'extraction de l'uranium, la fabrication du combustible nucléaire, les réacteurs et les centrales nucléaires, la production et l'utilisation d'isotopes médicaux ainsi que le déclassement et la restauration des sites nucléaires.
    Comme vous pouvez le constater, la CCSN s'occupe de plusieurs domaines liés aux activités de mise en valeur des ressources. Mais avant d'aborder cette question, je voudrais faire brièvement le point sur notre réaction à l'accident nucléaire survenu à Fukushima, au Japon.
    Vous êtes évidemment au courant du tremblement de terre et du tsunami qui ont dévasté le Japon en mars 2011 ainsi que de leurs répercussions sur la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi. La CCSN a immédiatement formé un groupe de travail interne chargé de déterminer s'il y a des enseignements à tirer de ces événements pour renforcer la sûreté des installations nucléaires canadiennes. Le groupe a présenté ses recommandations au tribunal de la commission le 3 mai. Même s'il était d'avis que, dans l'ensemble, les centrales nucléaires canadiennes sont sûres, il a présenté à la commission des recommandations visant à renforcer la sûreté des installations.
    Mais je suis venu aujourd'hui pour vous donner un bref aperçu du point de vue de la CCSN sur la protection de l'environnement, l'extraction de l'uranium, la consultation des Autochtones et les petits réacteurs nucléaires.
(0850)

[Français]

    Comme je l'ai mentionné, la CCSN est un organisme de réglementation de la sûreté. Son mandat, aux termes de la Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires, comprend la protection de l'environnement, ce qui signifie que nous étudions toujours les impacts sur l'environnement pour toute demande de permis.

[Traduction]

    Nous sommes des experts quand il s'agit d'évaluations environnementales. Depuis 2003, nous avons réalisé ou sommes en train de réaliser 66 évaluations environnementales. Nous venons de terminer, dans le cadre d'une commission d'examen conjoint, l'étude du projet de la nouvelle centrale nucléaire de Darlington. De plus, une commission d'examen conjoint procède actuellement à l'étude du projet d'enfouissement de déchets dans des formations géologiques profondes.
    Le processus d'évaluation environnementale dans les trois territoires canadiens diffère un peu de celui du reste du Canada. Dans les territoires, les évaluations sont effectuées en vertu de lois particulières ou d'ententes relatives à des revendications territoriales, comme l'Accord sur les revendications territoriales du Nunavut. Au Nunavut, la Commission territoriale chargée de l'examen des répercussions s'occupe du processus d'évaluation environnementale avec le soutien technique du personnel de la CCSN. Lorsque les résultats d'un examen environnemental permettent de donner le feu vert à un projet, la CCSN tient compte des recommandations de l'évaluation environnementale pour autoriser le projet.
    La CCSN réglemente l'extraction de l'uranium au Canada depuis le milieu des années 1980. Le secteur canadien de l'exploitation minière a longtemps eu l'habitude d'abandonner les sites après l'épuisement des gisements. La CCSN s'est employée à réglementer les mines d'uranium abandonnées et à les assainir pour éviter qu'elles ne constituent un risque permanent pour la sûreté ou l'environnement.
    Au Canada, la plupart des activités d'exploitation minière de l'uranium se déroulent dans le nord de la Saskatchewan, mais des propositions concernant le projet Matoush dans le nord du Québec et le projet Michelin au Labrador sont actuellement à l'étude.

[Français]

    Ces dernières années, on constate un intérêt croissant pour les réserves d'uranium dans le Nord du Canada et les retombées économiques possibles associées à cette activité où 50 p. 100 des travailleurs proviennent habituellement de la région.

[Traduction]

    Quoique d'autres projets soient envisagés, seul celui de Kiggavik a reçu le feu vert et fait actuellement l'objet d'une évaluation environnementale de la Commission du Nunavut chargée de l'examen des répercussions.
    J'aimerais à nouveau souligner que la CCSN ne délivrera aucun permis à moins que ces projets ne soient jugés sûrs. La CCSN est un organisme de réglementation qui intervient directement pour s'assurer que les titulaires de permis exploitent leurs installations en toute sécurité et respectent les conditions de leur permis pendant toute la durée de leurs activités. Notre régime comprend des inspections annuelles qui font l'objet d'un rapport de conformité. Les titulaires de permis doivent présenter au préalable des garanties financières établissant qu'ils disposent des ressources nécessaires pour nettoyer adéquatement les sites au terme des travaux d'exploitation minière.
    Au chapitre de la consultation des Autochtones, la CCSN, à titre de mandataire de la Couronne, est déterminée à s'acquitter de l'obligation de consulter les peuples autochtones du Canada. Nous sommes fiers d'avoir une politique proactive et transparente de consultation des Autochtones. De plus, nous avons lancé en mars 2011 notre Programme de financement des participants pour faciliter la participation du public, y compris les groupes autochtones, aux délibérations publiques de la commission.
(0855)

[Français]

    La mise en valeur des mines dans le Nord nécessitera un approvisionnement électrique fiable, et une des solutions envisagées est le recours aux petits réacteurs nucléaires. La CCSN est prête à examiner une conception si un promoteur lui présente une demande à cet effet et à lui délivrer un permis si elle est d'avis que son produit est sûr.

[Traduction]

    Jusqu'ici, deux fournisseurs, Babcock and Wilcox mPower et NuScale, nous ont présenté des modèles pour examen. Nous avons également eu des discussions très préliminaires avec d'autres fournisseurs. Toutefois, nous croyons qu'aucun des modèles proposés ne sera prêt à faire l'objet d'une demande de permis de construction avant trois à cinq ans.
    De nombreux travaux sont en cours à l'échelle mondiale en vue de la mise au point de la technologie des petits réacteurs. Aux États-Unis, par exemple, le département de l'Énergie a affecté 450 millions de dollars pour permettre à la Commission américaine de réglementation nucléaire d'appuyer l'homologation de petits réacteurs de fabrication américaine et de démontrer la viabilité de la technologie.
    Vous serez peut-être surpris d'apprendre que plusieurs petits réacteurs sont déjà en exploitation au Canada et que la CCSN a quelques dizaines d'années d'expérience de la réglementation et de l'autorisation de ces réacteurs. Je veux parler bien sûr des petits réacteurs connus sous le nom de SLOWPOKE, qui se trouvent dans cinq universités et établissements de recherche du Canada. En fait, le Canada est un pionnier de la mise au point des petits réacteurs de ce genre, qui sont sûrs et qui continuent à fonctionner d'une manière fiable.

[Français]

    Pour terminer, la CCSN participe activement aux dossiers de mise en valeur des ressources dans le Nord du Canada.

[Traduction]

    La sécurité est notre première préoccupation, tant du point de vue de la santé humaine que de l'environnement. Nous n'autoriserons aucune installation sans être convaincus qu'elle sera sûre.
    Je serai maintenant heureux de répondre à vos questions.
    Merci beaucoup.
    Nous allons maintenant passer à notre deuxième groupe de témoins. Nous avons, de Babcock and Wilcox mPower Inc., Christofer Mowry, président, et de Babcock and Wilcox Canada, Christopher Deir, directeur.
    Monsieur Mowry, je crois savoir que vous devez nous quitter à 10 heures au plus tard.
    J'espère que les membres du comité s'en souviendront. Toutefois, M. Deir sera ici et pourra répondre aux questions.
    Vous pouvez maintenant présenter votre exposé préliminaire. Je vous prie de vous en tenir à 10 minutes ou moins.
    Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie de nous avoir donné l'occasion de nous adresser à vous aujourd'hui.
    Comme vous l'avez dit, je m'appelle Chris Mowry. Je suis le président de Babcock & Wilcox mPower, unité fonctionnelle de la Babcock & Wilcox Company. Je suis également président et président du conseil d'administration de Generation mPower LLC, filiale à participation majoritaire de B&W.
    Je suis heureux d'avoir l'occasion de vous parler aujourd'hui de notre projet de petit réacteur modulaire innovateur, le B&W mPower. C'est un réacteur avancé à fiabilité passive, qui peut constituer un choix économique pour le marché canadien. Je concentrerais mes observations sur les caractéristiques techniques, la sécurité et les qualités économiques des petits réacteurs modulaires, sur leurs applications possibles au Canada ainsi que sur un certain nombre de questions connexes.
    B&W a plus de 50 ans d'expérience continue en ingénierie nucléaire et en fabrication de réacteurs aux États-Unis, au Canada et ailleurs dans le monde. Nous offrons à nos clients des services de fabrication et des services connexes liés aux réacteurs nucléaires à partir de 17 installations situées un peu partout en Amérique du Nord. Nous exploitons également des établissements de fabrication nucléaire en Indiana, dans l'Ohio, en Virginie et au Tennessee, aux États-Unis, ainsi qu'en Ontario et en Saskatchewan, au Canada. Nous employons actuellement plus de 1 000 travailleurs dans notre filiale canadienne en propriété exclusive, B&W Canada, qui a son siège à Cambridge, en Ontario. Pour l'ensemble de l'Amérique du Nord, nous employons directement et dans le cadre de coentreprises près de 12 000 professionnels du nucléaire.
    Les réacteurs nord-américains d'aujourd'hui ont un niveau remarquable de sécurité, qui fait des États-Unis et du Canada des chefs de file mondiaux en sûreté et en sécurité nucléaires. Au lendemain du séisme et du tsunami qui ont dévasté le Japon, donnant lieu à une situation d'extrême urgence à la centrale de Fukushima-Daiichi, la communauté nucléaire, y compris les organismes de réglementation, l'industrie et le grand public, évalue les couches supplémentaires de sécurité à mettre en oeuvre pour affronter les défis de ce genre. Les efforts que nous avons déployés ensemble pour tirer des enseignements de l'expérience japonaise nous aideront à rendre les technologies nucléaires de demain encore plus sûres que celles d'aujourd'hui.
    Le petit réacteur modulaire B&W mPower apporte des améliorations sensibles par rapport aux objectifs de sécurité d'aujourd'hui grâce à une architecture d'une plus grande sûreté inhérente et à d'importants systèmes de défense en profondeur. Ces caractéristiques de conception peuvent être résumées en cinq points. Premièrement, le réacteur comporte un système intégral d'arrivée de vapeur sans grande pénétration du circuit de refroidissement primaire, ce qui écarte la possibilité de la plupart des accidents catastrophiques de perte de réfrigérant primaire. Deuxièmement, le réacteur a un petit coeur à faible puissance volumique et à fort débit d'eau, qui offre une importante marge de sécurité en cas de difficultés de courte durée touchant le refroidissement du coeur. Troisièmement, l'enceinte de confinement et le bâtiment réacteur sont entièrement enfouis sous terre, ce qui assure une protection efficace du réacteur, de toutes les sources d'eau de refroidissement d'urgence et de tous les systèmes de sécurité contre des catastrophes naturelles et des menaces extérieures comme celles qui ont frappé le Japon. Quatrièmement, tous les systèmes de sécurité peuvent fonctionner sans être alimentés par le secteur, sans génératrices diesel d'urgence et sans pompes, la convection naturelle étant suffisante pour évacuer la chaleur de désintégration. Cinquièmement, le réacteur est doté d'un bassin entièrement protégé pour le combustible usé, contenant un très grand volume d'eau de refroidissement et profondément enfoui sous terre. Ainsi, le combustible usé est aussi protégé que le coeur même du réacteur.
    Ensemble, ces caractéristiques de conception donnent un réacteur qui sera de deux à trois ordres de grandeur plus sûr que ne l'imposent les exigences actuelles de la Commission de réglementation nucléaire des États-Unis. Ce modèle permet d'attendre jusqu'à 14 jours avant qu'une intervention extérieure ne soit nécessaire pour maintenir le refroidissement du réacteur et assure plus de 30 jours de protection inhérente avant tout risque d'exposition du combustible usé entreposé dans le bassin. De plus, notre petit réacteur modulaire ne nécessite aucune intervention d'urgence dans les 72 heures qui suivent un arrêt automatique du réacteur, ce qui le classe en tête de tous les réacteurs avancés à eau légère, grands ou petits. Cette caractéristique permet à l'exploitant de concentrer ses efforts sur les mesures d'atténuation à long terme.
    Les événements survenus à Fukushima sont attribuables avant tout à l'emplacement de la centrale. Le secteur des petits réacteurs modulaires est particulièrement bien placé pour intégrer dans ses modèles les enseignements tirés de l'accident de Fukushima, aussi bien au chapitre de la conception qu'à celui de la réglementation. Nous déployons en permanence d'importants efforts pour évaluer la conception du réacteur mPower dans le contexte des leçons apprises à Fukushima. Notre évaluation confirme que, sur le plan de la sécurité, notre modèle est particulièrement robuste face à des événements aussi extrêmes que ceux de Fukushima.
(0900)
    Je voudrais insister sur le fait que l'adoption de notre petit réacteur modulaire n'imposerait aucun changement susceptible d'affaiblir des règlements existants ou proposés à la lumière de l'accident de Fukushima. Même si la façon dont la conception de ce réacteur satisfait aux règlements puisse différer de celle des grands réacteurs, les exigences de sécurité sous-jacentes sont exactement les mêmes.
    Nous avons entrepris un important programme d'essais destiné à fournir aux organismes de réglementation des données détaillées permettant d'évaluer la sécurité du réacteur mPower. Nous avons construit, exclusivement à cette fin, une installation d'essais intégrée consistant essentiellement en un prototype de réacteur sans combustible à l'échelle. Nous prévoyons faire des essais — ce qui représente un important investissement pour nous — pour démontrer aux organismes de réglementation, à d'éventuels clients et à des intervenants publics que le réacteur B&W mPower dépassera de loin les exigences de sécurité actuelles.
    Nous travaillons actuellement de concert avec le CNRC et la CCSN en vue d'une préautorisation comprenant un examen préliminaire de notre modèle, avant d'entreprendre des démarches officielles pour obtenir un permis. Nous prenons actuellement des mesures qui doivent aboutir à la présentation d'une demande officielle d'homologation aux États-Unis avant la fin de 2013. Nous sommes déterminés à respecter un calendrier prévoyant la mise en service aux États-Unis des premiers réacteurs B&W mPower avant la fin de 2022. Nous devrions également être en mesure de mettre en service des réacteurs au Canada vers le milieu des années 2020.
    Sur le plan économique, notre société n'aurait pas investi ses propres ressources dans cet effort si elle ne croyait pas pouvoir livrer un produit très compétitif et créer un modèle opérationnel rentable. Nos études de marché révèlent que le marché mondial accessible des petits réacteurs modulaires se situe entre 100 et 125 gigawatts jusqu'à 2020 pour l'électricité de base sans carbone. Les petits réacteurs modulaires répondent directement aux principaux défis que pose la construction de grandes centrales nucléaires, y compris les risques financiers, les incertitudes liées aux coûts et aux délais, l'engorgement de la production et les coûteuses mises à niveau du réseau électrique.
    Cela est réalisable grâce à un changement de paradigme qui nous ferait passer des économies d'échelle au montage en usine de réacteurs entiers simplifiés. Grâce à cette transition, nous croyons être en mesure d'offrir à nos clients de petits réacteurs modulaires qui, relativement parlant, ne coûteraient pas plus cher à cause de leur petite taille. Nous sommes persuadés de pouvoir concurrencer n'importe quel modèle de grand réacteur de la nouvelle génération. Compte tenu de notre grande expérience dans la fabrication de petits réacteurs, nous croyons pouvoir atteindre nos objectifs de coût en construisant moins de 10 modules.
    De plus, nous avons formé un consortium composé de 15 services publics américains et un conseil consultatif regroupant 28 services publics, dont trois sont canadiens. Nous travaillons en étroite collaboration avec le consortium et le conseil ainsi qu'avec notre partenaire en ingénierie, achats et construction pour confirmer la valeur économique de notre réacteur. Ce processus nous a permis de conclure non seulement que notre modèle peut concurrencer des réacteurs traditionnels, mais aussi qu'il assure des avantages économiques sensibles par rapport à des ressources renouvelables intermittentes.
    Au Canada, la législation environnementale existante et proposée a mis en évidence le potentiel de l'énergie nucléaire dans les régions qui ont traditionnellement compté sur des centrales au charbon pour produire leur électricité de base. La décision du gouvernement de l'Ontario de fermer toutes les centrales au charbon de la province d'ici 2014 engendrera un déficit d'électricité de base dans les régions septentrionales de l'Ontario. En même temps, la croissance industrielle — comme en témoigne le projet récemment annoncé de Clifford Mines d'établir une usine de ferrochromite à Sudbury — devrait provoquer une augmentation sensible de la demande d'électricité de base fiable. De même, les provinces de l'Ouest qui comptent sur la production des centrales au charbon devront chercher les moyens de répondre à la croissance prévue de la demande. Ce sont exactement les besoins que le réacteur mPower de B&W est conçu pour satisfaire. Nous nous proposons de prendre contact avec les services publics et les promoteurs canadiens pour veiller à ce qu'ils tiennent compte de notre modèle dans leurs projets futurs.
    Deux problèmes pourraient avoir des répercussions sur le déploiement de la technologie mPower au Canada: le régime actuel de responsabilité nucléaire et le processus d'évaluation environnementale des installations nucléaires.
    Pour que le Canada s'aligne sur les normes internationales, il est essentiel que le Parlement adopte rapidement les modifications à la Loi de 1970 sur la responsabilité nucléaire et que le Canada ratifie la Convention sur la réparation complémentaire des dommages nucléaires, connue sous le sigle CSC. La CSC est une importante initiative de l'Agence internationale de l'énergie atomique destinée à amener la communauté internationale à respecter des normes communes élevées pour la réparation des dommages découlant d'accidents nucléaires.
(0905)
    Le plan d'action de l'AIEA sur la sûreté nucléaire, adopté en septembre 2011, invite les États membres à participer à un régime mondial de responsabilité civile en matière de dommages nucléaires. Les quatre projets de loi déposés depuis 2007 sont généralement compatibles avec la CSC, mais auraient besoin de quelques changements techniques pour être conformes aux exigences de la convention. Les États-Unis ont ratifié la CSC en 2008.
    Une ratification rapide de la CSC par le Canada réglerait le problème relatif à la responsabilité nucléaire, inciterait les entrepreneurs internationaux à s'intéresser aux projets de rénovation de centrales nucléaires et de construction de nouvelles centrales et favoriserait les exportations nucléaires du Canada, auxquelles nous participerions, ce qui contribuerait à préserver les emplois et les infrastructures du secteur nucléaire canadien. La CSC a déjà été ratifiée par l'Argentine et la Roumanie, pays dans lesquels B&W Canada et d'autres fournisseurs nucléaires canadiens ont eu d'importantes activités.
    Nous nous félicitons de la récente décision du gouvernement fédéral d'accepter les recommandations de la commission d'examen conjoint concernant la nouvelle centrale de Darlington. Tout en appuyant pleinement des évaluations environnementales sérieuses et approfondies, nous croyons qu'il est impératif d'avoir un processus prévisible et pratique. L'évaluation de Darlington avait commencé il y a six ans, mais le permis définitif de préparation du site n'a pas encore été délivré. Cela montre qu'il est nécessaire de veiller à ce que le processus soit avantageux pour tous les intéressés.
    Je voudrais souligner, en conclusion, le leadership canadien dans le domaine de l'électricité nucléaire. La Commission canadienne de sûreté nucléaire est l'un des organismes de réglementation les plus respectés du monde. C'est un organisme indépendant qui n'est influencé par aucun groupe d'intérêt et qui veille à ce que tout projet réalisé sous son contrôle vise essentiellement un seul objectif, la sécurité du public canadien. Le Canada a un régime bien établi de réglementation nucléaire, que nous comprenons bien. Cela a donné à B&W la confiance nécessaire pour entreprendre des démarches de préautorisation de son réacteur mPower au Canada. Nous sommes persuadés qu'il fera, en temps opportun, l'objet d'un examen équitable, impartial et approfondi.
    La longue expérience canadienne de la technologie nucléaire, y compris la conception de l'excellent réacteur CANDU, les progrès de la médecine nucléaire et l'établissement d'une robuste chaîne d'approvisionnement nucléaire, donne à B&W et au reste du monde la conviction que le Canada peut appuyer de nouvelles installations nucléaires aussi bien dans le présent qu'à l'avenir.
    Je vous remercie de m'avoir donné l'occasion de présenter cet exposé au comité. Je serai heureux de répondre à vos questions.
(0910)
    Merci beaucoup, monsieur Mowry.
    Je vais maintenant donner la parole à notre troisième et dernier témoin.
    Nous accueillons, du Fonds mondial pour la nature (Canada), Martin von Mirbach, directeur du programme de l'Arctique canadien. À vous, monsieur.
    Monsieur le président et membres du comité, je vous remercie d'avoir invité le WWF à comparaître pour contribuer à votre importante étude sur la mise en valeur des ressources dans le Nord canadien. Je me limiterai ce matin à parler de la mise en valeur du pétrole et du gaz extracôtiers dans les eaux arctiques, en m'inspirant de l'expérience acquise dans la vallée du Mackenzie et des travaux extracôtiers de mise en valeur effectués ailleurs.
    Le WWF a pour mission d'empêcher la dégradation de l'environnement de la planète et de bâtir un avenir dans lequel les humains peuvent vivre en harmonie avec la nature. Grâce à nos 150 000 partisans du Canada et aux cinq millions d'autres que nous comptons dans le monde, nous avons des antécédents exceptionnels de partenariat avec le gouvernement et l'industrie aussi bien au Canada qu'ailleurs.
    Aujourd'hui, tandis que nous nous adressons au comité, le WWF publie son huitième rapport Planète vivante dans les grandes capitales et les centres d'affaires du monde. La principale conclusion de ce rapport, c'est qu'en même temps que la demande mondiale de ressources naturelles doublait depuis 1966, la biodiversité baissait d'environ 30 p. 100. Le prix économique et humain d'une mauvaise intendance dans un monde de plus en plus peuplé pourrait anéantir les perspectives de la société et des économies mondiales.
    Le WWF reconnaît le besoin d'un développement économique soigneusement planifié dans l'Arctique, et particulièrement un développement pouvant assurer des avantages durables à long terme aux habitants du Nord. Nous sommes également conscients du fait que le développement de l'Arctique est envisagé dans le contexte d'une croissance projetée prévoyant la mise en œuvre de quelque 500 nouveaux projets partout dans le pays au cours de la prochaine décennie, avec un apport de nouveaux investissements de l'ordre de 500 milliards de dollars. Plus que jamais, il est maintenant temps que notre gouvernement prenne l'initiative pour persuader les Canadiens qu'il a mis en place une politique et un régime réglementaire à la hauteur de la tâche consistant à planifier, évaluer et réaliser ces nouveaux projets dans le respect des grandes valeurs environnementales et culturelles et à minimiser les conflits avec nos autres objectifs sociaux, économiques et environnementaux.
    Par exemple, parmi les objectifs de portée générale, il y a l'urgent besoin de prendre des mesures efficaces pour combattre les changements climatiques, mesures qui nécessitent un leadership national et une action mondiale concertée. Le WWF a publié une étude, Le rapport sur l'énergie: 100% énergie renouvelable en 2050, traçant la voie vers un avenir d'énergie renouvelable. Dans ce contexte, on pourrait juger qu'une politique publique prévoyant de nouveaux investissements dans la mise en valeur de combustibles fossiles coûteux et à risque élevé est d'une valeur douteuse, surtout si elle n'est pas accompagnée, à l'échelle nationale, de mesures d'atténuation des effets des changements climatiques qui soient plus efficaces que celles que nous avons vues jusqu'ici.
    Les récentes modifications législatives prévues dans le projet de loi C-38 sont conçues pour accélérer le processus d'examen et d'approbation des projets. Une approche réglementaire efficace et rationalisée constitue certes un objectif louable, mais seulement si elle atteint les objectifs du processus d'examen: comprendre les effets négatifs possibles et chercher à les éviter, à les minimiser ou à les atténuer. Dans le cas de la mise en valeur de gisements extracôtiers de pétrole et de gaz dans l'Arctique, il y a des raisons de croire qu'une approche prudente est indiquée. Si elle est bien conçue, une telle approche peut être avantageuse.
    L'année dernière, nous avons participé à l'examen de l'Office national de l'énergie sur la réglementation des gisements extracôtiers de pétrole et de gaz dans l'Arctique et avons présenté plusieurs mémoires détaillés. Nos principales recommandations sont résumées dans l'exposé que nous avons présenté à la table ronde de l'ONE en septembre 2011. Un exemplaire de cet exposé a été transmis au comité. Je noterai simplement ce matin quelques-unes des lacunes qui existent au chapitre des connaissances et de la technologie dans le contexte de l'Arctique.
    On ne dispose que de relativement peu de données environnementales de base sur la répartition et l'abondance des espèces dans l'Arctique, par rapport aux autres régions du Canada. Ce facteur est aggravé par les incidences croissantes des changements climatiques dans les eaux arctiques et l'incertitude qui règne quant à la réaction des composantes de l'écosystème à ces changements. Les effets d'un développement sans précédent dans cette région intensifient cette incertitude.
    Il est encourageant de noter que l'Évaluation environnementale régionale de Beaufort — qui est mal nommée parce qu'elle ne comporte pas de travaux d'évaluation — comblera beaucoup des lacunes de connaissances durant son mandat de cinq ans. De plus, le WWF a récemment produit un outil analytique permettant de déterminer les caractéristiques qui appuient le fonctionnement de l'écosystème dans une région arctique en évolution.
    Les difficultés de fonctionnement dans cette région sont bien connues: capacités logistiques et de soutien terriblement insuffisantes, les équipes et les équipements techniques étant stationnés très loin et difficiles à mobiliser; conditions environnementales très rigoureuses qui réduisent les limites de rendement des personnes et du matériel; difficultés uniques en cas de déversement de pétrole dans les glaces. En nous fondant sur des recherches réalisées par l'ONE, nous avons estimé que, durant la courte saison estivale de la mer de Beaufort, les conditions seraient probablement trop rigoureuses pour permettre le déploiement du personnel d'intervention d'urgence entre 65 et 85 p. 100 du temps. Pendant le long hiver qui suit, il serait impossible d'obturer un puits en éruption ou d'effectuer des travaux de nettoyage. Même les traitements habituels — agents dispersants, confinement et combustion sur place — sont moins efficaces dans les eaux glacées de l'Arctique.
    Bref, il n'existe actuellement aucune capacité d'intervention pour affronter une importante éruption de puits ou un grand déversement de pétrole dans les eaux arctiques. Cette conclusion se retrouve dans un récent rapport d'une compagnie d'assurance internationale bien connue, la Lloyd's, selon lequel le nettoyage de tout déversement de pétrole dans l'Arctique présenterait « de multiples obstacles, qui constitueraient ensemble un risque unique difficile à gérer ». Le rapport de la Lloyd's exhorte donc les entreprises « à ne pas se précipiter… et à prendre du recul pour penser soigneusement aux conséquences d'une telle action ».
(0915)
    La Lloyd's n'est pas la seule entreprise à mettre en doute l'opportunité des forages pétroliers dans l'Arctique. La banque allemande WestLB refusera désormais d'accorder des prêts à l'égard de projets pétroliers extracôtiers dans l'Arctique. Voici ce qu'en a dit un porte-parole de la banque: « Plus on s'enfonce dans les régions glacées, plus tout coûte davantage et plus il y a de risques quasi impossibles à gérer. Nettoyer n'importe quel déversement coûterait une fortune. »
    Comme vous pouvez le voir, les groupes environnementaux ne sont pas seuls à croire que nous ne sommes pas encore prêts à faire des forages extracôtiers dans l'Arctique. Toutefois, tout en essayant de combler les lacunes de connaissances et de technologies que nous avons mentionnées, nous pouvons et devons simultanément investir dans toute la gamme des préparatifs nécessaires pour nous rapprocher d'un développement durable dans l'Arctique.
    Premièrement, il faut du temps pour élaborer et mettre à l'essai de nouvelles méthodes susceptibles d'augmenter la sécurité des opérations et l'efficacité du nettoyage des déversements d'hydrocarbures, pour renforcer l'infrastructure de soutien arctique, y compris les capacités de recherche, de sauvetage et d'intervention en cas de déversement, et pour donner la formation nécessaire aux habitants du Nord afin qu'ils puissent profiter du développement dans leur territoire.
    Deuxièmement, il n'y a pas de raccourcis faciles quand il s'agit de consulter les parties touchées, et particulièrement les ayants-droit autochtones. À cet égard, je voudrais vous inviter à examiner la Déclaration des Inuits circumpolaires sur les principes de mise en valeur des ressources dans l'Inuit Nunaat, dont vous avez reçu des exemplaires. La déclaration a été rédigée par le Conseil circumpolaire inuit et ses groupes membres. Elle reconnaît qu'un développement responsable, portant notamment sur des ressources non renouvelables, peut « jouer un rôle important et durable dans le bien-être des générations actuelles et futures d'Inuits ». Toutefois, on se rend compte, à la lecture de la déclaration, d'une préoccupation générale: le rythme de développement ne doit pas dépasser la capacité des Inuits de participer utilement à la résolution des problèmes et de tirer parti des avantages des projets réalisés. Je vous exhorte à étudier la déclaration et à inviter des représentants du Conseil circumpolaire inuit à venir vous en parler.
    Troisièmement, le processus d'examen réglementaire des activités pétrolières et gazières extracôtières pourrait se dérouler plus harmonieusement et entraîner moins de différends aussi coûteux que longs à régler s'il avait lieu dans le contexte d'une planification spatiale marine régionale faite au préalable. Cette planification tiendrait compte d'une façon intégrée de toutes les activités importantes et délimiterait explicitement les régions où des activités peuvent avoir lieu ainsi que les régions fragiles devant faire l'objet d'un examen particulier. Elle serait faite avec la participation de tous les intervenants et aboutirait à un processus décisionnel ouvert, transparent et responsable pouvant donner lieu à des décisions socialement acceptables. Ces conditions n'existent pas actuellement dans l'Arctique canadien, même s'il y a des processus de planification dignes de mention tels que le Partenariat de la mer de Beaufort, qui pourrait servir de modèle. De plus, l'évaluation environnementale stratégique constitue un outil permettant d'examiner les effets cumulatifs et de fixer des seuils globaux pour toute la région. En investissant d'avance dans une planification s'étendant à toute une écorégion, on peut réduire l'incertitude financière et politique.
    Quatrièmement, nous avons une excellente occasion de renforcer le régime de gouvernance circumarctique s'appliquant à la mise en valeur des ressources extracôtières. Les déversements d'hydrocarbures ne respectent pas les frontières nationales. Par conséquent, c'est vraiment dans notre propre intérêt de mettre en place et d'appliquer une réglementation efficace et cohérente partout dans l'Arctique. Des mesures sont actuellement prises dans le cadre du Conseil de l'Arctique — dont le Canada assumera la présidence en 2013 — pour établir des règles internationales obligatoires régissant la mise en valeur du pétrole extracôtier dans l'Arctique. En participant à ces négociations, le Canada a l'occasion d'assurer le bien-être de ses populations septentrionales en veillant à ce que les activités de développement entreprises au Canada et dans les pays voisins respectent les mêmes normes élevées.
    Cinquièmement, nous avons la possibilité d'élaborer une stratégie énergétique canadienne vraiment branchée sur l'avenir, qui tracerait la voie d'un développement aligné sur nos engagements relatifs aux changements climatiques et tenant compte des lacunes notées dans le récent rapport de la commissaire à l'environnement et au développement durable. Si nous ouvrons la porte à de nouveaux projets pétroliers et gaziers sans nous baser sur un plan énergétique à long terme visant la réduction de nos émissions de dioxyde de carbone, nous risquons de nous écarter encore plus de nos objectifs nationaux et de nos responsabilités internationales. Dans un monde qui s'oriente vers des réductions croissantes des émissions de carbone, cela peut nuire non seulement à la réputation du Canada, mais aussi à l'accès aux marchés de nos produits et services.
    Je veux souligner, en conclusion, que nous n'avons pas actuellement les connaissances, les technologies et les infrastructures nécessaires pour procéder en toute sécurité à des forages dans les eaux arctiques canadiennes. Il faudra du temps pour combler les lacunes, mais cette difficulté peut se transformer en avantage si nous investissons collectivement en même temps dans la recherche, la planification, l'infrastructure et le dialogue, caractéristiques essentielles d'une intendance responsable. Le développement de l'Arctique pourrait prendre plus de temps, mais, quelle qu'en soit la forme, il sera mieux planifié, moins controversé, plus acceptable sur le plan social et moins risqué pour les investisseurs, le gouvernement, les collectivités et l'environnement.
    Le WWF est prêt à collaborer avec le gouvernement et l'industrie pour préparer la voie à un développement durable et bien conçu de l'Arctique.
    Je vous remercie encore de m'avoir donné l'occasion de vous présenter notre point de vue.
(0920)
    Merci beaucoup de votre exposé, monsieur von Mirbach, directeur du Programme de l'Arctique canadien au Fonds mondial pour la nature (Canada).
    Avant de passer aux questions, je voudrais rappeler aux membres du comité la nature de notre étude. Au cours de la dernière réunion, j'ai noté beaucoup de digressions, des deux côtés de la table. Nous sommes ici pour étudier la mise en valeur des ressources dans le Nord canadien. Je prie tous les membres de limiter leurs questions à l'objet de notre étude.
    Nous allons maintenant commencer un tour à sept minutes.
    À vous, monsieur Allen. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie aussi les témoins de leur présence au comité aujourd'hui.
    Je vais poser quelques questions aux représentants de Babcock and Wilcox, puisqu'ils doivent partir à 10 heures.
    Nous avons entendu beaucoup de témoignages sur le soutien de la mise en valeur des ressources dans le Nord. Nous aurons besoin d'énormément d'infrastructures, notamment dans le domaine de l'énergie. J'ai trouvé intéressant votre exposé concernant le petit réacteur. J'ai eu l'impression que vous essayez de vous créer un créneau de marché dans les régions rurales et peut-être éloignées, en vous fondant sur l'architecture dont vous avez parlé.
    D'une façon générale, quelle puissance prévoyez-vous donner à ces réacteurs, même si vous n'en êtes encore qu'à un stade préliminaire? Vous avez parlé de 100 à 125 gigawatts. Quelle taille pensez-vous donner à ces réacteurs lorsque vous les mettrez en marché?
    Je vous remercie de votre question.
    Il y a quelques aspects à considérer. L'un des avantages des petits réacteurs réside dans la flexibilité du site. Notre réacteur doit avoir une puissance de base de 180 mégawatts, ce qui représente 15 p. 100 d'un réacteur standard de 1 000 mégawatts. Par suite de sa taille, le réacteur peut être placé à différents endroits, y compris des collectivités relativement isolées qui n'auraient pas besoin d'une puissance de l'ordre de 1 000 mégawatts. De plus, comme le réacteur est conçu pour avoir un coût pouvant concurrencer celui des grands réacteurs, nous avons suscité beaucoup d'intérêt de la part de services publics qui, ordinairement, auraient souhaité construire de grands réacteurs, mais qui n'en accepteraient pas les risques financiers.
    La conception d'un réacteur pour un créneau de marché ne serait pas vraiment rentable pour nous. Nous devons donc concevoir une centrale d'une flexibilité suffisante pour être toujours rentable, qu'on veuille produire de grandes quantités d'électricité ou répondre aux besoins dans certains créneaux.
    Avez-vous fait des estimations préliminaires du prix au kilowatt-heure?
    Oui. Nous croyons actuellement que le coût par kilowatt, y compris les coûts de propriété, sera inférieur à 5 000 $. Ce chiffre est appuyé par des estimations détaillées de notre partenaire en ingénierie, achats et construction.
    D'accord.
    En ce qui concerne l'architecture de la centrale, vous avez dit à quelques reprises qu'elle serait profondément enfouie sous terre. En parlant du confinement, vous avez précisé que le réacteur a un petit coeur et un grand bassin d'eau en profondeur. Vous avez également dit que le combustible usé serait profondément enfoui.
    Pouvez-vous nous donner votre définition de cette grande profondeur? Croyez-vous qu'il y aura des difficultés à faire de l'entreposage à grande profondeur dans les régions rurales et isolées?
    C'est une excellente question.
    Le réacteur et l'enceinte de confinement — l'îlot nucléaire — se trouvent à environ 140 pieds de profondeur. Il n'y aurait donc au-dessus du sol qu'un bâtiment d'un seul étage semblable à un supermarché, qui n'aurait absolument aucune fonction de sécurité. Le bâtiment serait doté de postes de chargement et de déchargement de camions et d'installation de ce genre. Toutes les structures de sécurité seraient enfouies sous terre.
    L'essentiel, dans ce modèle, c'est que la structure est souterraine. Aux endroits où l'eau ou des excavations profondes peuvent causer des difficultés, on peut aménager une berme et placer la structure au-dessous afin de la protéger des menaces extérieures. C'est le but principal.
    Dans une zone traditionnelle, cette structure serait-elle traitée un peu comme une mine puisqu'elle se trouve à 140 pieds de profondeur? Feriez-vous des travaux et des excavations comme s'il s'agissait d'une mine? Est-ce cela que vous feriez d'ordinaire?
    Oui. Nous avons fait des calculs pour déterminer le coût supplémentaire d'un enfouissement complet de l'îlot nucléaire. Pour une centrale à deux unités, qui produirait donc 360 mégawatts à 5 000 $ le kilowatt, l'investissement global serait d'environ 1,8 milliard de dollars. Le coût supplémentaire de l'excavation est d'environ 9 millions de dollars. Relativement parlant, ce n'est pas beaucoup. Ce ne serait pas vraiment un puits vertical. Il y aurait un talus.
    Le plus important est d'assurer la sécurité de la structure en cas d'événements et de menaces extrêmes sans pour autant l'entourer d'une grande infrastructure. Il est possible ainsi de s'assurer, avec un grand degré de confiance, que la technologie et le réacteur sont bien protégés.
(0925)
    D'accord.
    J'aimerais savoir maintenant quel genre de ressources vous prévoyez utiliser pour construire et exploiter un réacteur de ce genre. Avez-vous estimé les besoins en main-d'œuvre pour la construction et, à plus long terme, pour assurer le fonctionnement de l'installation?
    C'est une très bonne question. Dans un environnement de vraie compétitivité économique, il importe d'examiner à la fois le coût de construction et les coûts d'exploitation à long terme, c'est-à-dire le coût total de propriété. En effet, il est essentiel d'être compétitif aussi bien au chapitre des coûts de construction qu'à celui des coûts d'exploitation. Encore une fois, pour une centrale à deux réacteurs de ce genre, il faudrait compter quelque 200 personnes pour faire fonctionner l'installation, y compris la maintenance, l'exploitation, la sécurité et tout le reste.
    L'une des importantes caractéristiques de notre modèle est qu'il ne faut renouveler le combustible qu'une fois tous les quatre ans. Nous l'avons conçu ainsi pour réduire les besoins de présence continue sur place et les besoins logistiques. C'est environ le double de l'intervalle normal de renouvellement du combustible pour un grand réacteur à eau lourde de type autre que le CANDU.
    Très bien.
    Monsieur Binder, j'aimerais connaître l'aspect réglementaire de cette initiative en fonction des discussions de préautorisation que vous avez tenues. Nous avons déjà des réacteurs SLOWPOKE. De toute évidence, le réacteur dont nous parlons ici est très différent du SLOWPOKE.
    Avez-vous une idée du temps moyen qu'il faudrait pour terminer le stade de la préautorisation ou même celui de la délivrance d'un permis pour un réacteur de ce type?
    Je vous remercie.
    L'examen de préautorisation consiste essentiellement en entretiens destinés à mieux se connaître mutuellement, car beaucoup de ces nouveaux modèles n'ont jamais été réalisés. Par conséquent, aucune démonstration pratique de la technologie n'a déjà eu lieu. À mon avis, c'est la raison pour laquelle les Américains essaient de construire un prototype. Ils veulent voir comment il se comportera en réalité.
    Nous comparons le modèle proposé à nos exigences réglementaires et essayons de familiariser le demandeur avec ce que nous imposons en matière de sûreté, de sécurité, etc. Il faut bien comprendre qu'il ne s'agit pas d'un permis de construction. Le vendeur doit trouver un client qui, lui, viendra nous voir pour demander un permis de construction. C'est alors que nous examinerons tous les enjeux.
    Merci, monsieur Allen et monsieur Binder.
    Monsieur Julian, vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président. Je remercie également les témoins. Nous sommes reconnaissants de votre présence au comité aujourd'hui.
    J'ai une question à vous poser, monsieur Binder. Vous avez mentionné Fukushima dans votre exposé. J'aimerais savoir deux choses. Premièrement, pouvez-vous nous donner une idée approximative de ce que coûtera au total l'accident qui s'est produit à la centrale nucléaire, y compris le nettoyage? Ces estimations nous seraient utiles.
    Deuxièmement, au sujet de la possibilité de construire de petits réacteurs nucléaires dans le Nord, vous avez parlé dans votre exposé de petits réacteurs de recherche du type SLOWPOKE. Ceux-ci fonctionnent évidemment dans des conditions idéales, dans le sud du Canada. Ce qui nous est proposé, ce ne sont pas les conditions idéales qu'on trouve sur le campus d'une université du sud du Canada. Nous parlons plutôt de conditions très rigoureuses, très difficiles, surtout s'il s'agit d'utiliser ces petits réacteurs pour alimenter des projets d'exploitation minière dans le Nord. Dans ce cas, les conditions seraient très dures.
    Quand vous parlez d'évaluation, je me demande dans quelle mesure la commission peut évaluer n'importe quel genre d'application dans des conditions très rigoureuses? Comment tiendriez-vous compte de ces critères supplémentaires, qui seraient évidemment présents, et qui rendraient ces petits réacteurs beaucoup plus risqués qu'un SLOWPOKE utilisé sur le campus d'une université du Sud?
(0930)
    À vous, monsieur Binder.
    En réponse à votre première question concernant la responsabilité civile totale, je ne peux que vous rapporter ce que j'ai lu dans la presse. Je crois que le dernier chiffre total que j'ai vu était de l'ordre de 100 milliards de dollars. Ce montant couvrirait tout: le nettoyage des collectivités touchées, l'installation elle-même, etc. Je n'ai aucune idée du bien-fondé de ce chiffre. Je ne suis pas au courant de ces choses. Tout cela était dans les journaux.
    Pour ce qui est de nos évaluations — je demanderai peut-être à mon collègue, M. Howden, de vous donner plus de détails —, c'est le promoteur ou le client qui vient nous voir pour présenter ses arguments et établir la sécurité de son projet. Il lui incombe de nous prouver que l'installation proposée est sûre pour l'environnement, pour les gens et pour la sécurité à l'endroit envisagé.
    Les critères ne sont pas différents en fonction du lieu. Pour moi, un projet de centrale nucléaire n'est pas nécessairement très différent de l'exploitation d'une mine dans le Nord, par exemple, dans le genre de conditions très rigoureuses que vous avez mentionnées. La proposition dont il est question ici prévoit de creuser très profondément dans le sol. Il faudrait examiner ce que cela implique en ce qui a trait aux effets et à l'exploitation. Par conséquent, je ne peux pas vous dire a priori ce que l'évaluation comportera, mais il faudra absolument que le promoteur établisse que sa proposition sera sûre en fonction de ses effets sur l'environnement, les gens et la sécurité.
    Je ne voudrais pas vous attribuer des choses que vous n'avez pas dites, mais, si j'ai bien compris, cela signifie que, pour le moment, la commission n'a pas élaboré de critères particuliers pour des applications de ce genre.
    Oh, non. Nous venons juste de publier un document de réglementation qui envisage les choses à un niveau très élevé et d'une façon très générale pour définir des critères minimums.
    Monsieur Howden, vous voudrez peut-être intervenir ici.
    Allez-y, monsieur Howden.
    Dans notre cadre de réglementation, nous avons deux documents axés sur les petits réacteurs, Exigences relatives à la conception de petits réacteurs et Analyse déterministe de sûreté pour les petits réacteurs. Ces documents définissent les objectifs de sécurité.
    Ils fixent des objectifs fondés sur la fréquence et les conséquences des accidents. Nous examinons notamment les événements extérieurs, qu'il s'agisse de conditions météorologiques ou d'événements touchant la sécurité, et les évaluons séparément pour chaque site considéré.
    À la suite des événements de Fukushima, les phénomènes considérés comme allant au-delà des critères de conception sont maintenant inclus dans ces critères. Nous exigeons donc du promoteur qu'il nous explique, indépendamment de la nature des événements qui peuvent se produire, comment il pourra maintenir les opérations sans électricité et sans eau. C'est ainsi qu'il doit nous prouver que les critères de sécurité qu'il propose sont acceptables. Nous ne nous soucions pas trop des phénomènes qui peuvent causer les pannes. Nous essayons de déterminer comment le réacteur peut survivre à ces phénomènes, indépendamment de leur nature.
    Je vous remercie.
    Je vais maintenant passer à M. von Mirbach.
    Monsieur, j'ai deux questions à vous poser. Premièrement, dans l'exposé que vient de présenter la commission, M. Binder a mentionné la consultation des peuples autochtones. Vous aussi, vous avez insisté sur l'importance de la consultation. Je voudrais que vous reveniez à votre proposition d'associer tout projet de prospection pétrolière et gazière au large à une planification spatiale marine régionale. À ce sujet, vous avez donné l'exemple du Partenariat de la mer de Beaufort.
    Pouvez-vous nous donner quelques détails sur ce partenariat? De quelle façon le considérez-vous comme une base pour des consultations avec les peuples autochtones? De plus, avez-vous des suggestions à faire à la Commission de sûreté nucléaire et à tous les autres organismes de réglementation du Nord sur la bonne façon de procéder pour consulter les peuples autochtones du Nord?
    Je vous remercie.
    Je vais peut-être répondre en premier à votre seconde question en priant chacun de jeter un coup d'œil à la Déclaration des Inuits circumpolaires sur les principes de mise en valeur des ressources dans l'Inuit Nunaat. Vous y trouverez 57 principes qui présentent bien plus de détails que je ne pourrais en donner. C'est vraiment un excellent document que devraient examiner tous ceux qui s'intéressent à la mise en valeur des ressources. Il est conçu d'une manière très réfléchie.
    Le Conseil circumpolaire inuit a eu beaucoup de difficulté à produire ce document. Le processus a été très long parce que les membres du conseil avaient des degrés variables de confiance et d'intérêt en ce qui a trait à la mise en valeur des ressources. C'est donc un document nuancé, mais c'est la raison pour laquelle je le trouve précieux.
    D'une certaine façon, cela nous ramène à la première question concernant le Partenariat de la mer de Beaufort. Il s'agit d'un organisme multilatéral qui a élaboré un plan intégré de gestion océanique pour la mer de Beaufort, avec la participation de l'ensemble des grands organismes fédéraux et inuits de gestion des revendications territoriales et des différents autres intervenants, comme l'industrie, les organisations environnementales et les municipalités.
    L'avantage du partenariat et, en quelque sorte, de ce qui est offert dans le cadre de cette initiative, c'est l'intention d'établir un plan spatial marin. Toutefois, le partenariat n'a pas réussi jusqu'ici à susciter l'intérêt voulu pour le faire. De plus, il agit d'une façon très soigneuse et très prudente.
    Ce qui distingue le mode de fonctionnement du Partenariat de la mer de Beaufort en ce qui concerne le plan spatial marin, c'est qu'au lieu d'envisager chaque question particulière dans une optique sectorielle — comme le fait actuellement Affaires autochtones et Développement du Nord Canada, qui s'occupe de la délivrance de permis dans les zones extracôtières, des baux spéciaux et des différends particuliers —, le partenariat examine tous les enjeux, y compris la navigation, la pêche commerciale et d'autres utilisations de subsistance, et les évalue tous ensemble dans le cadre d'un plan.
    L'avantage, c'est que même si un plan mettant en cause différents intervenants peut être compliqué et long à établir, une fois qu'il est fait, il est, je dirais, solide sur le plan politique et susceptible de produire des décisions qui tiennent. Les politiciens aiment bien approuver des recommandations claires, nettes et précises. La probabilité d'en avoir est sensiblement plus forte si on a tenu compte au départ de l'ensemble des intérêts des intervenants.
(0935)
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Julian, de vos questions.
    C'est maintenant au tour de M. McGuinty. Vous avez sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je vous remercie tous, mesdames et messieurs, de votre présence au comité aujourd'hui.
    Vous avez tous les trois directement mentionné les évaluations environnementales.
    Monsieur Binder, votre commission procède à des évaluations environnementales.
    Monsieur Mowry, vous avez dit qu'il y a deux importantes questions à régler, l'une d'elles étant l'amélioration des évaluations environnementales.
    Monsieur von Mirbach, vous avez mentionné à plusieurs reprises à la fois l'évaluation environnementale et l'évaluation environnementale stratégique.
    Dans ce contexte, monsieur le président, puisque nous parlons d'énergie, de sa production et de son utilisation dans le Nord, il faut noter que le gouvernement est en train d'apporter quelques changements très intéressants aux procédures d'évaluation environnementale. Avez-vous été consultés à ce sujet?
    Monsieur Binder, la CCSN a-t-elle été consultée au sujet de ces modifications qui figurent maintenant dans le budget?
    Oui, nous avons été consultés. Les changements ne nous toucheront pas sensiblement.
    Je vais m'expliquer. Prenez le cas d'une nouvelle mine d'uranium. Nous nous occupons des mines d'uranium du berceau à la tombe. Cela implique des relations d'une durée de 60 à 70 ans avec la mine, ses exploitants et les collectivités voisines. Par conséquent, nous avons toujours fait des évaluations environnementales.
    Ce qui est plus important, les mesures d'atténuation découlant de ces évaluations sont inscrites dans les conditions des permis que nous délivrons. Ensuite, nous exerçons un contrôle permanent, sur une base annuelle, avec des inspecteurs, des visites, etc. Pour nous, les choses ont toujours été les mêmes. Ces changements vont quelque peu accélérer le processus et préciser les responsabilités.
    Ainsi, en prévision de relations d'une durée de 60 à 70 ans avec une collectivité, par exemple, serez-vous en mesure de mener une évaluation environnementale dans un délai arbitraire de deux ans?
    Nous croyons pouvoir le faire. Absolument.
    Vous avez dit que vous avez fait 66 évaluations environnementales depuis 1996. Combien d'entre elles ont duré plus de deux ans?
(0940)
    Je n'ai pas les chiffres ici. Toutefois, la durée ne dépend pas seulement de nous. Elle dépend aussi des promoteurs pour diverses raisons. Il leur arrive de suspendre le processus pour consulter d'autres ministères, etc. Beaucoup d'évaluations ont effectivement duré davantage. Toutefois, en fonction du temps écoulé de notre point de vue, dans l'ensemble, la durée a été inférieure à deux ans.
    Vous avez également dit qu'à la CCSN, vous venez de réussir à obtenir des fonds supplémentaires. Vous avez dit: « … nous avons lancé… notre Programme de financement des participants pour faciliter la participation du public, y compris les groupes autochtones… »
    Les changements apportés maintenant, qui établissent des limites concernant ceux qui peuvent témoigner ou être invités à témoigner, exclusivement en fonction des effets directs ou de l'expertise, auront-ils des répercussions sur…
    Ce n'est pas ainsi que notre programme fonctionne. Nous annonçons des audiences publiques. Quiconque pense avoir des éléments neufs à soumettre à la commission peut présenter une demande.
    Ainsi, vos procédures ne seront pas touchées par les nouveaux critères que le gouvernement a énoncés dans le projet de loi d'exécution du budget.
    Pas à ma connaissance.
    En êtes-vous sûr?
    D'après ce que j'ai lu au sujet des propositions et d'après les consultations tenues, ces critères n'auront pas d'effet sur nos audiences et nos consultations publiques.
    Monsieur von Mirbach, le WWF a-t-il été consulté au sujet des changements envisagés en matière d'évaluation environnementale?
    Non.
    À votre connaissance, y a-t-il eu des audiences, des assemblées, des tables rondes, des conseils?
    Comme vous le savez, un certain nombre de groupes environnementaux ont exprimé des préoccupations au sujet de ces mesures. Le fait qu'elles aient été intégrées dans un projet de loi d'exécution du budget constitue l'une de nos préoccupations. Je vais peut-être préciser cela en disant que nous sommes membres de la Coalition du budget vert. La coalition a participé aux consultations touchant les questions financières et budgétaires au stade de l'élaboration du budget. Nous estimons cependant que beaucoup des mesures inscrites dans le projet de loi d'exécution du budget auraient dû être examinées à part, séparément des mécanismes strictement financiers.
    Monsieur von Mirbach, un membre du comité a demandé à M. Binder s'il disposait d'une évaluation du coût de l'accident de Fukushima.
    J'espère, monsieur le président, que nous pourrons obtenir ces chiffres autrement qu'en consultant les comptes rendus des médias.
    Pouvez-vous fournir au comité des chiffres, par exemple au sujet de ce qu'ont coûté les déversements de l'Exxon Valdez et de BP?
    Je crains de ne pas avoir ces chiffres sous la main. Je peux cependant faire des recherches et transmettre les résultats au comité.
    Avez-vous une idée de l'ordre de grandeur de ces chiffres?
    Je n'ai vraiment aucune certitude, pas plus que M. Binder.
    Monsieur von Mirbach, vous avez essentiellement dit dans votre témoignage que nous n'avons pas la technologie nécessaire pour affronter un éventuel déversement dans les eaux arctiques. À notre dernière réunion, j'ai demandé à de hauts fonctionnaires du ministère compétent si, à leur avis, quatre ou cinq ingénieurs spécialisés pouvaient s'entendre à ce sujet. Ils ont été incapables de me répondre, tout comme ils ont admis qu'ils ne tiennent pas compte des incidences des émissions de gaz à effet de serre dans leurs décisions réglementaires, lors de la délivrance de permis par exemple.
    Croyez-vous que nous puissions arriver à un consensus sur l'absence de technologies permettant d'affronter un déversement?
    Arriverions-nous à un consensus? Non, je crois que chacun adaptera la question à ses propres intérêts. Par exemple, nous avons fait une intervention après laquelle l'organisme en cause a convenu avec nous que l'obligation de pouvoir forer un puits de secours au cours de la même saison est importante et devrait être maintenue. Nous n'avons cependant pas pu nous mettre d'accord sur la question de savoir si des méthodes équivalentes sont en place.
    Oui, des méthodes comparables ou équivalentes sont en place, mais elles ne peuvent servir que dans certains cas d'éruption. Par exemple, une éruption qui survient juste au point de sortie du pétrole peut souvent être jugulée. Toutefois, une rupture de la canalisation plus en amont ne permet pas d'obturer le puits pour arrêter l'écoulement du pétrole. Par conséquent, la méthode est peut-être équivalente, mais seulement dans le cas de certains types de déversement. Bien sûr, si nous avions un moyen de contrôler le type d'éruption qui peut se produire, nous n'aurions sans doute pas besoin de dispositions particulières au départ.
    Monsieur Mowry, vous avez parlé de la rentabilité de votre nouveau matériel ou système. Si le gouvernement du Canada donnait suite à la promesse faite par le premier ministre de fixer le prix des émissions de carbone à 65 $ la tonne au cours des cinq prochaines années — c'est la promesse internationale qu'il a faite à Londres en 2008 —, quel en serait l'effet sur la rentabilité de votre secteur?
(0945)
    Si une taxe de cet ordre était imposée sur le carbone, un petit réacteur constituerait l'option la moins coûteuse pour produire de l'électricité de base, par rapport à une centrale au charbon ou au gaz naturel.
    Êtes-vous en faveur de la fixation d'un prix du carbone? Le premier ministre l'était en 2008, mais nous n'en sommes plus sûrs aujourd'hui. Votre secteur est-il favorable à ce principe?
    Je ne crois pas qu'il y ait un consensus dans l'industrie à ce sujet. Beaucoup d'intervenants différents ont des intérêts en jeu. Notre société s'occupe de multiples technologies différentes de production d'énergie propre, y compris la biomasse. Nous croyons que les effets environnementaux des différentes technologies devraient être pris en considération lorsqu'on envisage de les déployer.
    Merci, monsieur McGuinty.
    À vous, monsieur Galipeau.

[Français]

    Monsieur le président, j'aimerais remercier nos invités de comparaître devant nous aujourd'hui.

[Traduction]

    Ce dont je me souviens au sujet de la taxe sur le carbone de 2008, c'est que le premier ministre s'y est fermement opposé, et moi aussi.
    Je trouve très intéressants ces petits réacteurs modulaires. Monsieur Binder, vous avez dit que cinq universités en possèdent. Lesquelles?
    Le Collège militaire royal de Kingston, l'Université de l'Alberta, le Conseil de recherches de la Saskatchewan…
    Dans le cas de l'Alberta, est-ce Edmonton?
    Oui.
    C'est à 40 au-dessous?
    C'est dans le campus même.
    Je veux dire que le thermomètre tombe parfois à -40, n'est-ce pas?
    Le réacteur se trouve dans un bâtiment. J'ai passé quelque temps en Alberta. J'ai obtenu mon diplôme de l'Université de l'Alberta. Je sais exactement ce dont vous parlez. En fait, le réacteur marche très bien.
    D'accord. Nous avons donc Kingston, Edmonton et...?
    Il y a aussi l'École polytechnique de Montréal. Dalhousie vient tout juste d'approuver le processus de déclassement. Son réacteur a fonctionné pendant une vingtaine d'années comme installation de recherche. Des centaines d'étudiants y sont passés. Il est bon que les gens ne soient pas au courant. Ces réacteurs fonctionnaient en plein milieu des campus, mais très peu de personnes le savaient.
    Il n'y a donc pas eu de manifestations.
    Non.
    Où se trouve le cinquième réacteur?
    À l'Université McMaster.
    Nous avons aujourd'hui des représentants de Babcock and Wilcox comme témoins. Je me souviens que Canatom s'occupait également du même domaine. Est-ce que cette société existe encore?
    Je n'étais pas là à l'époque. Je ne me souviens pas.
    C'était un consortium regroupant SNC-Lavalin, Marshall Macklin Monaghan et quelques autres sociétés d'ingénierie.
    Je crois qu'elle a été créée pour réaliser quelques grands projets et qu'elle a existé pendant un bon moment, mais on n'en entend plus parler depuis une dizaine d'années.
    Est-ce que des sociétés canadiennes font partie de ce groupe à l'heure actuelle?
    Candu Energy Inc. a racheté la branche Candu d'EACL. Candu Energy Inc. appartient à SNC-Lavalin.
(0950)
    Eh bien, il y a un certain nombre de choses. Au sujet de votre premier point concernant le public, je dois vous dire que nous ne déterminons pas a priori qui peut ou ne peut pas se présenter devant nous. Tout le monde est le bienvenu à une audience publique. Nous en tenons beaucoup dans le cadre de nos processus de délivrance de permis et d'évaluation environnementale.
    Nous accueillons aussi bien des partisans que des adversaires du nucléaire. Nous avons Greenpeace et le Sierra Club, de même qu'Ontario Power Generation et Bruce Power. Ils se présentent tous devant nous et ont tous leur mot à dire. La commission fait la synthèse de tout ce qu'elle reçoit au cours de ces délibérations et rend une décision.
    Lors de l'examen d'une demande ou des contacts avec un demandeur, il est toujours question de sécurité et des moyens de s'assurer que le fonctionnement sera sûr. C'est toujours une chose sur laquelle nous n'acceptons aucun compromis. Il incombe toujours au demandeur de présenter des arguments persuasifs. Nous avons beaucoup d'experts qui peuvent contester les hypothèses avancées et le modèle proposé. Nous demandons également quelles mesures d'atténuation sont prévues à l'égard de tout effet particulier sur l'environnement. Ce qui est encore plus important, nous faisons un suivi pour nous assurer que les promesses faites sont tenues.
    Je voudrais simplement faire une mise au point à l'intention de M. McGuinty, quand il a posé sa question concernant le Nord. Je voudrais rappeler à chacun que, dans le Nord, la plupart des évaluations environnementales sont dirigées par des commissions composées de gens du Nord. Au Nunavut, par exemple, c'est la Commission du Nunavut chargée de l'examen des répercussions qui s'occupe des évaluations. Bref, celles-ci sont effectuées par des commissions indépendantes, composées la plupart du temps de membres des collectivités autochtones.
    Nous n'avons donc absolument aucun préjugé au sujet de ceux qui peuvent comparaître devant nous. Tout ce qui nous intéresse, c'est la sécurité, et c'est sur cette base que nous rendons nos décisions.
    Merci, monsieur Galipeau.
    À vous, monsieur Daniel. Vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président. Je vous remercie également, mesdames et messieurs, de votre présence au comité aujourd'hui.
    Il est clair que vous avez bien évalué les modèles, les conceptions, etc. Avez-vous cependant déterminé les exigences permettant d'affronter une panne catastrophique? Qu'est-ce qui pourrait causer une panne catastrophique dans un système de ce genre?
    C'est une bonne question. Après l'accident de Fukushima, nous avons décidé d'examiner ce que l'industrie canadienne appelle maintenant « le scénario d'apocalypse de Binder », scénario dans lequel nous nous soucions peu des causes de la catastrophe et concentrons toute notre attention sur les mesures à prendre pour l'affronter.
    C'est ainsi que l'industrie envisage maintenant, pour renforcer la sécurité, de placer du matériel à l'extérieur du site. Au Japon, si vous vous en souvenez, il a fallu beaucoup de temps pour apporter du matériel sur le site. Par conséquent, l'industrie américaine — je dirais même l'industrie mondiale — essaie d'en tirer des enseignements. Ce n'est qu'un seul aspect. L'industrie songe aussi à prévoir du matériel de secours capable de prendre la relève du matériel de secours, pour être en mesure, par exemple, de passer à des génératrices diesel au cas où les génératrices diesel de secours ne fonctionnent plus. Tout cela figure maintenant dans le rapport de notre groupe de travail, et la commission examine les moyens de mettre en œuvre ces propositions.
    À part le matériel de relève du matériel de secours, à quoi songez-vous pour éviter une panne catastrophique?
    Il y a deux choses. La première, c'est que nous avons dépassé le stade d'une approche déterministe de la sécurité dans laquelle on essaie de déterminer les catastrophes possibles. Nous avons plutôt adopté ce que nous appelons une conception tenant compte du risque. Il s'agit d'une stratégie de défense en profondeur.
    Examinons, par exemple l'accident de Fukushima. La centrale elle-même a survécu au tremblement de terre et au tsunami, et le réacteur s'est arrêté. Le problème, c'est que la centrale a eu besoin quelques heures plus tard d'une alimentation extérieure en électricité, en eau, etc. Il est donc clair que nous devons écarter ce que j'appellerai cette conception fragile, pour passer à des modèles plus robustes qui n'ont pas besoin d'intervention extérieure. Voilà qui se rattache particulièrement bien à notre discussion d'aujourd'hui concernant le Nord canadien.
    Monsieur Binder, vous avez parlé de matériel qui n'est pas directement placé sur le site. C'est une approche conçue pour remédier à la fragilité de certaines des anciennes centrales. Elle n'est pas nécessairement pratique ni indiquée dans le Nord canadien, parce qu'il serait très difficile de la mettre en œuvre d'un point de vue logistique.
    Nous préférons avoir un système de réacteur qui soit lui-même très robuste sur le plan de ce que j'appellerai le délai de résistance: notre réacteur est conçu pour survivre pendant deux ou trois semaines sans la moindre aide extérieure, après un accident du type le plus grave. On pourrait même considérer que ce matériel supplémentaire dont vous parlez est placé d'avance dans l'enceinte de confinement souterraine, où il est bien protégé. Nous avons donc différentes couches de défense. Voilà comment il faut penser pour créer un système vraiment sûr.
    Dans l'industrie aéronautique, par exemple, les avions avancés d'aujourd'hui sont conçus pour avoir un accident une fois par 10 millions d'années de vol. Nous essayons, de notre côté, d'aller à un ou deux ordres de grandeur de plus. Pour être en mesure de le faire, il faut envisager la sécurité d'une manière différente. C'est ainsi que nous avons conçu les critères de sécurité que nous commençons à communiquer à la CCSN.
    Je vais vous donner un exemple pour illustrer mon propos. Pour ce qui est l'électricité, j'ai mentionné que nous avons un système à fiabilité passive qui ne nécessite aucune alimentation. Bien sûr, nous voudrions ne jamais avoir à l'utiliser. Par conséquent, la première ligne de défense, c'est le branchement sur le réseau électrique. En cas de panne du secteur, par suite d'une tempête de verglas ou d'autre chose, nous passons aux génératrices diesel que nous avons sur place. Si les génératrices cessent de fonctionner, nous avons des batteries d'accumulateurs de secours. Et si les batteries tombent en panne, nous passons à la convection naturelle par gravité. Il y a aussi une autre couche de défense. Comme vous pouvez le voir, ces couches sont vraiment nombreuses.
    L'essentiel, c'est que tout ce matériel de sécurité est placé dans l'enceinte de confinement souterraine. C'est une approche très différente. Elle s'écarte très sensiblement de ce que j'appelle une conception fragile ne pouvant fonctionner que très peu de temps sans avoir besoin d'une aide extérieure. Elle se fonde sur une conception très robuste comportant de multiples couches de défense et pouvant résister longtemps sans dépendre d'une aide extérieure immédiate. Toutes ces caractéristiques sont intégrées dès le départ. Encore une fois, c'est notamment pour disposer d'une option pratique adaptée aux sites relativement éloignés qui ne peuvent pas compter sur des capacités de soutien importantes.
(0955)
    Vous dites donc que…
    Merci, monsieur Mowry.
    Monsieur Daniel, votre temps de parole est écoulé.
    Monsieur Nicholls, vous avez cinq minutes.
    J'ai une question pour M. Mowry. Vous avez parlé des modifications qu'il serait souhaitable d'apporter à la Loi de 1976 sur la responsabilité nucléaire. Nous avons actuellement le principe du pollueur-payeur. L'exploitant paie pour les dommages locaux et extérieurs découlant de l'accident, sans qu'il soit nécessaire de prouver la négligence. En même temps, le public peut recourir à un processus de réclamation accéléré et a le droit d'être indemnisé.
    Compte tenu des antécédents de B&W, de l'accident de Three Mile Island et du fait que la société a fait faillite en février 2000 à cause de réclamations liées à l'amiante, je suis curieux de savoir quels changements vous proposez d'apporter à la loi de 1976.
    Pouvez-vous nous en parler brièvement?
    Bien sûr. Je serai heureux de le faire. En fait, j'ai grandi à une cinquantaine de milles de Three Mile Island. J'étais à l'école secondaire quand l'accident s'est produit. J'ai donc un lien très personnel et très profond avec cet événement, dont je connais bien les détails.
    Les experts du secteur qui l'ont évalué s'entendent tous pour dire qu'il est attribuable à une erreur humaine plutôt qu'à une erreur de conception. Cela ne veut pas dire que la conception n'aurait pas pu être plus robuste. Je crois cependant que l'affirmation selon laquelle B&W est à blâmer pour l'accident ne correspond pas du tout au consensus de l'industrie.
    Pouvez-vous me dire quels changements précis vous souhaiteriez apporter à la loi de 1976?
    Les modifications à apporter porteraient essentiellement sur le montant de la responsabilité civile et sur les aspects transfrontaliers.
    Autrement dit, vous changeriez le plafond d'assurance actuel de 75 millions de dollars pour le porter — je crois que cela a été proposé à quatre reprises — à 650 millions de dollars. Toutefois — et corrigez-moi si je me trompe —, les États-Unis ont actuellement un plafond de 10 milliards de dollars. Pourquoi cette différence? Seriez-vous en faveur d'un plafond semblable à celui des Américains?
(1000)
    La CSC — je veux dire la Convention sur la réparation complémentaire des dommages nucléaires — vise à harmoniser le montant global à l'échelle transfrontalière ainsi que dans d'autres pays. Nous souhaitons et proposons que le montant soit harmonisé avec celui que les États-Unis ont aujourd'hui, puisque Washington a ratifié la CSC. Par conséquent, il ne serait pas supérieur à ce que les États-Unis ont accepté aux termes de la CSC.
    J'ai une question précise concernant le réacteur mPower et son enceinte de confinement souterraine. Il y a des risques liés aux environnements périglaciaires, notamment le soulèvement de la fondation rocheuse sous l'effet du gel. Dans le Sud, la fondation rocheuse est assez stable, mais elle se soulève dans les climats nordiques, ce qui la rend instable. Votre société a-t-elle établi un plan de gestion du risque pour tenir compte de ce phénomène imprévisible d'instabilité?
    J'ai deux réponses à vous donner.
    La première est générale: Quelle que soit notre évaluation et quelles que soient les mesures d'atténuation que nous envisageons, elles devront être approuvées par la commission de M. Binder. Notre analyse de la sécurité devra le satisfaire et satisfaire aussi tous les intervenants.
    Il y a également une réponse précise. À la profondeur d'enfouissement dont nous parlons, le problème n'est pas le même. À 100 ou 150 pieds sous terre, on n'a pas les mêmes difficultés que dans la couche de sous-sol qui se situe à 10 à 20 pieds de profondeur.
    Dans ce cas, ma dernière question s'adresse à M. Binder. À votre connaissance, le Canada a-t-il signé une entente internationale quelconque concernant la responsabilité nucléaire?
    Non, je ne sais pas. C'est une politique ou un dossier particulier dont Ressources naturelles Canada s'occupe. Je ne suis pas au courant.
    Vous n'êtes pas au courant. Ainsi, la Commission canadienne de sûreté nucléaire ne sait pas si le Canada a conclu des accords concernant la responsabilité nucléaire. C'est bien le cas?
    Il existe actuellement une loi qui définit les règles à suivre. Nous nous conformerons à ces règles. Je crois que le gouvernement a proposé à quelques reprises de modifier la loi, mais que les modifications n'ont pas été adoptées jusqu'ici.
    D'accord. Mais, à votre connaissance, le Canada n'a pas signé d'entente internationale sur la responsabilité nucléaire?
    Je ne suis pas au courant.
    Merci, monsieur Nicholls.
    Merci, monsieur Mowry. Je crois que vous devez partir à 10 heures. Vous pouvez donc disposer à l'heure qui vous convient.
    Monsieur Anderson, vous avez cinq minutes.
    Monsieur Mowry, pouvez-vous préciser, avant de partir, la taille des collectivités qui peuvent profiter de votre technologie? Le comité fait une étude sur la mise en valeur des ressources dans le Nord canadien. Il y a deux ans, nous avons parlé de la possibilité d'utiliser ces petits réacteurs. Je m'interroge simplement sur la taille des collectivités. Quelle importance une collectivité doit-elle avoir pour que votre technologie puisse être rentable pour elle?
    Il y a deux applications. D'abord, l'application de type industriel, comme une fonderie ou une usine du même genre. Je crois que la taille de ce réacteur conviendrait parfaitement aux besoins d'énergie d'une fonderie. Cela vous donne une idée de la puissance produite par le réacteur. Bien sûr, cela dépend de la densité géographique. À 180 mégawatts, il devrait s'agir d'un lieu très concentré, à forte densité. Il pourrait s'agir d'une petite ville.
    Il faut également penser à la robustesse du réseau électrique, n'est-ce pas? De toute évidence, il faut pouvoir distribuer l'énergie produite. Nous nous intéressons donc, dans le cas des sites éloignés, à la robustesse du réseau et à la taille optimale du réacteur à mettre en place pour desservir une certaine région. Quoi qu'il en soit, nous parlons d'une puissance de l'ordre de 180 mégawatts. Nous croyons qu'une puissance inférieure à 200 mégawatts s'adapterait bien à l'infrastructure de transmission existante. Parmi les provinces de l'Ouest, par exemple, la Saskatchewan est d'une taille telle que le réseau de transmission n'aurait pas besoin d'importants changements et que l'électricité produite par le réacteur pourrait desservir une bonne partie de la province.
    Combien de tailles de réacteur souhaitez-vous être en mesure de produire? Envisagez-vous une ou deux tailles ou bien des tailles multiples pouvant servir à différentes applications?
    Nous n'avons qu'une seule taille de réacteur d'une puissance de 180 mégawatts, mais c'est un peu comme des blocs de Lego. Bien entendu, chaque réacteur a son propre système indépendant de sécurité, mais sa conception modulaire permet d'en grouper plusieurs selon la puissance totale qu'on souhaite donner à la centrale. C'est un peu comme des éoliennes: il suffit d'en ajouter un certain nombre à un endroit donné pour modifier l'énergie produite par la centrale.
    Monsieur Binder, de quelle façon votre processus changerait-il si on passe d'un seul réacteur à un groupe de six, par exemple? Avez-vous un processus différent? Si le promoteur arrive à vous persuader qu'un seul réacteur est assez sûr, votre évaluation serait-elle différente s'il décide d'en regrouper six? Que faites-vous dans une situation de ce genre?
(1005)
    Comme vous le savez, beaucoup de nos sites nucléaires comportent plus d'un réacteur. C'est le cas à Darlington, Bruce Power et Pickering. Encore une fois, dans le cas de nouvelles technologies, il est difficile de dire a priori si les réacteurs fonctionneront bien une fois interconnectés ou de savoir d'avance quelle sera la situation de sécurité si les choses se gâtent. Par conséquent, nous aurions à faire les évaluations nécessaires. Je ne peux vraiment pas évaluer a priori une technologie particulière sans connaître les détails de l'analyse de sécurité, les éléments de défense en profondeur et les couches de soutien. Nous aurions à étudier l'interaction des différents éléments.
    Dans ce cas, envisagez-vous de placer trois, quatre ou cinq réacteurs dans une même zone d'excavation ou bien utiliserez-vous un réseau pour pouvoir les placer à des endroits différents?
    Cela dépend de la puissance à produire dans chaque cas particulier. Je vais cependant répondre à la question particulière soulevée par M. Binder. Nous croyons en effet que c'est une leçon très importante que nous a apprise l'histoire: il faut absolument éviter d'établir des liens entre les modules au niveau de la sécurité. Du moins en fonction du modèle que nous avons conçu, chaque petit réacteur modulaire est totalement indépendant au chapitre de la sécurité. Par conséquent, la situation que vous avez envisagée ne se présente jamais. De plus, comme tout est enfoui sous terre, on peut écarter la possibilité d'une menace environnementale commune puisqu'on ne craindrait ni les tempêtes de verglas ni d'autres catastrophes naturelles. Chaque module souterrain a un système de sécurité totalement indépendant et complètement distinct de celui des autres. Les réacteurs pourraient être répartis sur une superficie de l'ordre de 50 acres. On pourrait en mettre quatre dans une zone de cette taille, mais il n'y aurait pas de liens matériels entre les différents modules.
    Monsieur Binder, vous avez parlé de la Commission du Nunavut chargée de l'examen des répercussions. Cela m'intéresse. Vous êtes en relation avec cette commission. Je m'interroge sur l'étendue de ses pouvoirs. Quels sont les liens entre ces pouvoirs et les vôtres? Vous avez dit que vous offrez de l'aide technique à la commission. Quels sont vos pouvoirs dans cette région du pays?
    Je vais commencer, puis Mme Thompson vous donnera plus de détails.
    La commission du Nunavut approuve l'évaluation environnementale. Nous nous limitons à lui offrir de l'aide technique parce qu'en fin de compte, s'il s'agit d'une mine d'uranium qui doit recevoir le feu vert, il faudra que le dossier vienne chez nous en vue de la délivrance d'un permis. La commission a donc intérêt à s'assurer qu'elle veut vraiment que le projet en cause soit réalisé et, si c'est le cas, à connaître les exigences de sécurité à respecter pour que nous soyons en mesure de délivrer un permis.
    Ainsi, rien ne peut se faire sans votre permis.
    Absolument.
    De quelle façon le rôle et les pouvoirs de la commission se distinguent-ils de ceux des provinces?
    Ils sont très semblables à ceux des provinces.
    Dans le cas de la Saskatchewan, par exemple, nous avons une entente visant à éviter de faire double emploi les uns avec les autres. Par conséquent, si les responsables de la Saskatchewan veulent imposer certaines conditions en vertu de mesures législatives provinciales, nous les laisserons agir, mais ils ont évidemment intérêt à prendre les mesures nécessaires pour que nous ne rejetions pas l'évaluation environnementale. Nous collaborons donc ensemble. Nous avons travaillé de concert pendant des années dans le cadre de l'examen de ces projets.
    Monsieur Anderson, votre temps de parole est écoulé.
    Madame Thompson, pourriez-vous répondre brièvement, s'il vous plaît?
    La Commission du Nunavut chargée de l'examen des répercussions doit procéder à l'évaluation environnementale. La CCSN lui fournit de l'aide scientifique et technique pour tous les aspects de l'évaluation. Nous participons également à la coordination du soutien scientifique de la commission avec d'autres organismes fédéraux, comme Environnement Canada et le ministère de Pêches et des Océans. Voilà le rôle que nous jouons.
    Si le projet est accepté par la Commission du Nunavut, certains offices des eaux du territoire doivent délivrer des permis, de même que la CCSN.
    Je vous remercie.
    Merci, monsieur Anderson.
    À vous, madame Liu. Vous avez cinq minutes.
    Allez-y, je vous prie.

[Français]

    Je remercie nos témoins d'être venus nous rencontrer aujourd'hui.
    Monsieur Von Mirbach, dans votre présentation, vous prêchez un peu le principe de précaution et vous dites qu'on n'a pas les connaissances nécessaires pour faire seulement l'exploitation. Si je comprends bien, il faudrait développer cette expertise avant de se lancer dans le forage.
    J'aimerais passer tout de suite au sujet de la gestion des agences.

[Traduction]

    Quand on parle de sécurité et d'intervention d'urgence, il est souvent question de l'exigence de la CCSN relative aux soupapes de décharge. Considérez-vous cette exigence comme un moyen essentiel d'intervention d'urgence? Quelles seraient les principales conséquences si cette exigence était supprimée?
(1010)
    Je crois que l'ONE a plus ou moins convenu avec nous que l'exigence de la CCSN relative aux soupapes de décharge constituait un élément essentiel de la sécurité des forages extracôtiers. Dans l'Arctique, l'élément vraiment critique est le suivant: si on procède à des forages, il faudrait suspendre les opérations assez tôt dans la saison pour qu'il demeure possible, en cas d'éruption survenant en fin de saison, de forer un puits de secours avant que la saison ne soit complètement terminée.
    Si un puits en éruption n'est pas obturé pendant la saison, une fois que la glace se forme, il est absolument impossible de rien entreprendre pendant sept à neuf mois, selon la latitude. Pendant tout ce temps, le pétrole continuerait à jaillir sans qu'il soit possible de prendre des mesures d'atténuation quelconques.
    L'éruption se poursuivrait donc pendant sept mois et le pétrole, une fois arrivé en surface, se mélangerait intimement à la glace marine nouvellement formée. Cela modifierait du tout au tout la trajectoire des hydrocarbures déversés qui seraient pris en sandwich dans la glace nouvellement formée, puis se disperseraient au fur et à mesure que la glace se déplace et fond. La récupération et le nettoyage deviennent alors beaucoup plus complexes.
    Si j'ai bien compris, aucune intervention ne serait donc possible?
    Certainement pas si la rupture se produit, par exemple, juste au-dessous de la tête du puits. Imaginez une rupture de la canalisation qui amènerait le pétrole à jaillir latéralement. Une éruption de ce genre ne peut pas être contenue en coiffant le puits.
    Les intervenants ont également exprimé des préoccupations au sujet du processus suivant et de l'option de location à bail. Ils estiment que les études environnementales sont insuffisantes et qu'il n'y a pas eu d'apport du public. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet? Quelles seraient vos recommandations ou vos préoccupations à cet égard?
    D'une certaine façon, cela dépendrait du besoin. Nous préconisons de faire d'avance une planification sur grande échelle qui permettrait d'examiner toute la région pour déterminer les zones où il conviendrait d'autoriser certaines activités et les zones où toute activité serait dangereuse. Il serait alors possible de fixer des seuils pour l'ensemble de la région ou d'évaluer sa capacité globale de supporter des activités industrielles, puis de gérer ces activités dans les limites définies. Ainsi, il est beaucoup plus facile de prendre des décisions.
    Voilà pourquoi nous recommandons une planification à grande échelle, qui éviterait d'avoir constamment à examiner les projets un à un. C'est ce qui se fait dans les eaux de l'Alaska, où des processus ont été mis en place en vue de faire des évaluations environnementales stratégiques et de fixer des seuils généraux. Toutefois, en Alaska, les autorités n'ont pas explicitement établi une définition spatiale des zones, ce qui constitue une faiblesse, à notre avis. Il y a cependant dans l'Arctique des outils qui permettent de le faire d'une manière plus soigneuse.
    Vous êtes donc partisan des évaluations environnementales cumulatives?
    C'est exact.
    L'évaluation stratégique se fonde sur les effets cumulatifs pour définir des seuils, mais il y a aussi l'autre composante, qui est différente, mais qui peut se faire en même temps. Je veux parler de la planification spatiale visant à déterminer la sensibilité relative des zones côtières et à tracer la trajectoire d'un éventuel déversement pour savoir s'il peut atteindre des endroits particulièrement fragiles. Cela permettrait de décider si une zone doit être interdite aux activités de forage. Il pourrait être suffisant d'imposer des restrictions saisonnières au lieu d'imposer une interdiction absolue.
    J'aimerais revenir au document que vous avez présenté à l'Office national de l'énergie au sujet des forages extracôtiers dans l'Arctique. Vous avez proposé de modéliser la trajectoire d'éventuels déversements de pétrole.
    Qui, à votre avis, devrait être responsable de ce travail de modélisation? Le secteur privé ou le gouvernement?
    Nous recommandons en fait que l'Office national de l'énergie en soit chargé. Je pense qu'en fin de compte, le travail devrait être confié à un organisme tiers indépendant. Nous avons les outils nécessaires pour le faire. Il y a de bons modèles de trajectoires pour différentes régions du monde, y compris la côte Ouest.
    Comme je l'ai dit, la modélisation devient plus complexe s'il faut tenir compte non seulement des courants marins, mais aussi du mouvement des glaces. Dans une perspective de crédibilité, nous envisageons de le faire, mais il serait utile à long terme de confier le travail à un organisme tiers.
(1015)
    Merci, madame Liu.
    Nous allons maintenant passer à M. Trost. Allez-y, vous avez cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Dans le cadre de notre étude du développement du Nord, nous essayons de déterminer quelles décisions le gouvernement pourrait prendre pour favoriser le développement économique de cette région et, en particulier, de ses ressources naturelles. En gardant cela à l'esprit, j'ai écouté M. Binder parler de sa collaboration avec la Saskatchewan dans le domaine de l'uranium. Dans d'autres domaines, on nous a souvent dit que certaines administrations avaient de meilleures pratiques que d'autres.
    Quand vous travaillez avec des promoteurs de projets du Labrador, du Québec, peut-être du Nunavut, etc., trouvez-vous que l'expérience que vous avez acquise en collaborant avec la Saskatchewan vous est utile dans vos relations avec les autres provinces? Dans leurs rapports avec la Commission canadienne de sûreté nucléaire, les autres provinces ont-elles des pratiques semblables à celles de la Saskatchewan, ou bien avez-vous une approche différente selon l'administration à laquelle vous avez affaire?
    C'est une excellente question car, comme je l'ai dit, l'un des objectifs de notre mandat est de diffuser une information objective. Par exemple, nous devons passer une journée, le 5 juin, dans la collectivité autochtone de Mistissini, dans le nord du Québec. Le lendemain, nous serons à Chibougamau. Nous essayons d'expliquer les critères de sécurité dans le domaine nucléaire. Nous avons une audience concernant une mine d'uranium.
    Nous avons exhorté le promoteur à faire appel à des gens de la Saskatchewan. Ils ont beaucoup d'expérience dans les relations avec les collectivités et les moyens d'expliquer à la population tout ce qui a trait à l'emploi, à l'exploitation minière et aux critères de sécurité, de façon à mettre tout le monde au courant de l'ensemble des aspects du projet. Nous ne faisons pas la promotion de la mine. Ce n'est pas notre rôle. Notre mandat est de veiller à la sécurité de tout ce qu'on construit. Toutefois, il est souvent surprenant de constater à quel point les gens sont mal informés en matière de sécurité. Nous essayons donc de mettre à la disposition de tous des renseignements objectifs et concrets.
    Si j'ai bien compris, vous dites que l'une des choses les plus efficaces que nous puissions faire est de favoriser le transfert de connaissances des collectivités du Nord qui ont de l'expérience à celles qui n'en ont pas.
    Absolument.
    D'accord.
    En écoutant les représentants de Babcock and Wilcox parler de leurs réacteurs, j'ai pensé à d'autres témoins qui envisageaient de construire des réacteurs dans le Nord. Ils devaient se servir de technologies éprouvées produites au Japon et ailleurs. Ils avaient dit que leur analyse de rentabilité dépendrait des délais d'approbation de leur projet par les organismes de réglementation.
    Je ne connais pas les suites de leurs démarches, mais, monsieur Binder, avant d'examiner les critères de sécurité de chaque nouveau réacteur et de chaque nouveau programme qui vous est proposé, quelles mesures prenez-vous pour vous assurer que votre commission rendra une décision dans des délais raisonnables? Quelles mesures internes avez-vous prises pour veiller à la rentabilité du processus? Nous ne pourrons pas établir dans le Nord de nouvelles sources d'énergie — peut-être d'énergie nucléaire — si le prix est trop élevé. Il semble que les obstacles réglementaires ou les exigences des organismes de réglementation constituent un important facteur de coût pour les entreprises qui s'intéressent au Nord. Que faites-vous sur le plan interne pour vous assurer que votre processus réglementaire ne fait pas perdre du temps? Comment veillez-vous à ce que ce processus soit à la fois efficace et rapide?
    Nous avons pris certaines mesures. Premièrement, nous avons précisé nos exigences réglementaires. Dans les quatre années où j'ai exercé mes fonctions, nous avons révisé tous nos documents réglementaires en nous efforçant de rendre nos exigences parfaitement claires.
    Deuxièmement, dans le cas des nouvelles technologies, nous acceptons, comme l'a dit M. Mowry, d'engager des discussions de préautorisation avec les promoteurs, de façon à mieux nous connaître mutuellement. Ainsi, les promoteurs seront au courant de nos exigences et nous pourrons nous familiariser avec leur nouvelle technologie. Tout cela se produit avant qu'ils ne présentent une demande de permis. Par conséquent, lorsque nous recevons cette demande, nous connaissons au moins leurs idées et leurs méthodes.
    Enfin — et ce n'est pas le facteur le moins important —, nous n'avons pas l'intention de réinventer la roue. Si les promoteurs ont présenté une demande aux États-Unis et si les Américains ont l'intention d'étudier des prototypes, nous examinerons tous les éléments de preuve qu'ils voudront nous soumettre. À ma connaissance, les lois de la physique sont les mêmes aux États-Unis que chez nous. Par conséquent, nous pourrons admettre beaucoup de renseignements qui nous seront transmis sans essayer de réinventer la roue.
    Bref, si vous considérez les délais de la CCSN elle-même, vous constaterez que nous sommes très disciplinés. Ce n'est pas à la commission que vous trouverez des goulets d'étranglement.
(1020)
    Merci, monsieur Trost.
    À vous, monsieur Gravelle. Vous pouvez prendre cinq minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Je remercie également les témoins de leur présence au comité aujourd'hui.
    Monsieur Deir, j'espère que vous pourrez répondre à ma question. Dans son exposé, M. Mowry a dit que les déchets nucléaires seraient enfouis à 140 pieds de profondeur. Où exactement?
    Permettez-moi de vous donner quelques précisions à ce sujet. M. Mowry parlait du combustible usé que nous gardons dans un bassin spécial à 140 pieds de profondeur pendant une vingtaine d'années. Il s'agit simplement du combustible utilisé pour faire fonctionner le réacteur. Lorsque le combustible est retiré du bassin, il est placé en entreposage sec. Ensuite, la Société de gestion des déchets nucléaires établie au Canada — ou une organisation semblable aux États-Unis — prend possession de ce combustible. Bien entendu, nous continuerions à cotiser à ce fonds.
    M. Mowry ne parlait donc que du combustible utilisé pendant la durée utile du réacteur. Une fois cette durée utile écoulée, la responsabilité du combustible est transférée à une organisation plus importante, de type national.
    Ainsi, ce ne sont pas des déchets?
    Je ne qualifierais jamais de déchet le combustible usé. Il peut certainement être recyclé.
    Par conséquent, le combustible usé est enfoui sur place pendant…
    Il n'est pas enfoui. Il est gardé sur place dans un bassin spécial.
    À 140 pieds de profondeur…
    Oui, à l'intérieur de la structure de confinement.
    Je vous remercie.
    Monsieur von Mirbach, nous considérons toujours que les puits de pétrole et les réacteurs nucléaires sont sûrs lorsqu'ils sont construits, mais ils ne le sont que jusqu'à ce qu'un incident se produise.
    Comment pouvons-nous garantir qu'un puits foré dans l'Arctique fonctionnera en toute sécurité et ne causera jamais un déversement de pétrole?
    C'est une bonne question.
    De toute évidence, si nous exigeons une sécurité à 100 p. 100 pour toute activité, il n'y aurait aucune activité. Toute chose comporte des risques inhérents. On peut minimiser les risques, mais on ne pourra jamais les éliminer complètement. Le fait qu'un risque puisse être à la fois tout petit et très grand crée des difficultés particulières.
    Nous avons recommandé à l'ONE d'adopter un cadre de gestion du risque dans lequel on ferait une distinction très nette entre les risques acceptables, tolérables et inacceptables. Les premiers sont les risques qu'on gère de façon courante. Par exemple, chacun accepte de courir un risque lorsqu'il monte dans une voiture. Les risques tolérables sont ceux qui nécessitent un certain travail. Enfin, les risques inacceptables sont ceux qu'on ne peut pas admettre.
    C'est une façon de gérer le risque qui reconnaît qu'un certain niveau de risque est inévitable. Il s'agit alors d'essayer de faire passer les risques tolérables dans le cadre acceptable et de veiller à éliminer les risques inacceptables. C'est une décision sociale. Aucun intervenant individuel n'a la capacité de déterminer objectivement ce qu'est un risque inacceptable par rapport à un risque tolérable. Nous étions très désireux de collaborer avec l'ONE pour donner du soutien et des avis éclairés permettant d'établir ces distinctions.
    Sommes-nous prêts à affronter un déversement de pétrole dans l'Arctique?
    Absolument pas.
    C'est le manque d'infrastructure qui constitue la plus grande difficulté. Dans le golfe du Mexique, quelque 40 000 personnes ont participé au travail. Il serait matériellement impossible d'amener ne serait-ce qu'une fraction de ce nombre de personnes sur le site d'un déversement de pétrole dans l'Arctique, sans compter les restrictions imposées par la durée de la saison. En ce moment, le grand défi, c'est le manque d'infrastructure. En principe, il est possible d'améliorer la situation, mais, pour le moment, les moyens sont extrêmement limités.
(1025)
    S'il y a un déversement de pétrole dans l'Arctique, il est évident que les hydrocarbures se mêleront aux glaces. Comment pourrons-nous nettoyer si le pétrole est pris dans des glaces flottantes?
    Avec beaucoup de difficulté. Ordinairement, on circonscrit le déversement à l'aide de barrages flottants, après quoi on brûle le pétrole sur place. Toutefois, ces méthodes ne donnent rien s'il y a de la glace dans l'eau. Il est impossible de placer un barrage flottant autour de la zone touchée.
    En réalité, tout dépend des conditions des glaces, qui changent de semaine en semaine et de région en région. On ne peut pas généraliser, mais la présence de glace ajoute une énorme complexité aux opérations de confinement du déversement. De plus, le froid réduit l'efficacité des agents dispersants.
    Merci, monsieur Gravelle.
    Monsieur Calkins.
    Merci, monsieur le président. Je voudrais également remercier les témoins de leur présence au comité aujourd'hui. C'est un vrai plaisir de rencontrer un ancien de l'Université de l'Alberta.
    Au cours de réunions précédentes du comité, nous avons entendu des représentants du Bureau de gestion des projets nordiques, qui étaient venus nous parler des efforts que le bureau déploie pour aider les différents demandeurs à surmonter les difficultés du processus d'approbation des projets. Monsieur Binder, monsieur Deir et monsieur von Mirbach, avez-vous eu affaire au Bureau de gestion des projets nordiques? Croyez-vous qu'il joue un rôle utile? Qu'avez-vous à nous dire à ce sujet?
    Le bureau essaie de s'organiser depuis sa récente création. Nous connaissons les responsables. Nous avons l'intention de recourir à eux aussitôt que le bureau sera opérationnel. Comme ils seront sur place, nous espérons qu'ils pourront nous aider. C'est un vaste territoire. Pour toucher toutes les collectivités et essayer de leur expliquer ce qui se fait et ce qui est proposé, nous avons besoin de toute l'aide que nous pouvons obtenir. Par conséquent, nous attendons avec intérêt l'occasion de collaborer avec le bureau.
    Monsieur Deir, avez-vous déjà eu affaire au Bureau de gestion des projets nordiques?
    Pas directement. Toutefois, les organisations de ce genre ont tendance à faire avancer les choses. Elles connaissent mieux la réglementation et les gens que n'importe qui d'autre.
    Nous n'avons pas eu avec le bureau des contacts quelconques qui me permettraient de vous donner des renseignements utiles.
    Ce n'est pas grave.
    Monsieur Binder, vous avez dit dans votre exposé que votre commission s'occupe des mines d'uranium du berceau à la tombe. Elle suit tout ce qui se passe depuis l'approbation d'une mine jusqu'aux éventuels travaux de nettoyage qui suivent son déclassement. Nous savons que cela n'a pas toujours été le cas. Combien de sites reste-t-il encore à nettoyer et à remettre en état?
    Je ne me souviens pas du nombre exact, mais nous sommes en train d'intégrer petit à petit dans le cadre de réglementation un certain nombre de vieilles mines abandonnées. Nous essayons de rétablir les sites pour les ramener dans la mesure du possible à l'état naturel initial. C'est notre intention. Voilà pourquoi nous exigeons d'une manière aussi rigoureuse que les mines prévoient d'avance les fonds nécessaires à un nettoyage futur. Cela fait l'objet d'une évaluation.
    Le processus comprend l'obtention d'un cautionnement ou d'un genre de dépôt. Pouvez-vous nous donner des détails sur le fonctionnement de ce mécanisme? Dans le cas des sables bitumineux, l'argent est gardé dans un fonds pouvant financer d'éventuels travaux de remise en état, d'atténuation, etc. au cas où une entreprise serait incapable d'honorer ses obligations. Le cas échéant, les ressources financières nécessaires sont là pour affronter ces risques sans imposer aux contribuables de les assumer. Pouvez-vous nous parler des moyens que vous utilisez?
    Le moyen le plus courant est la ligne de crédit irrévocable, dans laquelle seule la CCSN peut puiser en cas de faillite d'une entreprise. Il y a différents moyens de procéder. Tous les cinq ans, nous réévaluons la situation pour déterminer si les fonds sont suffisants. Je ne sais pas si vous connaissez la mine d'uranium de Cluff Lake, en Saskatchewan. Son fonds de nettoyage s'élève actuellement à 30 millions de dollars. Dès que la mine commence à fonctionner, nous avons accès à cet argent.
(1030)
    C'est un bon filet de sécurité pour les contribuables. On peut être sûr ainsi qu'il y aura de l'argent pour payer.
    Vous avez mis en évidence, dans votre exposé, le potentiel des mines exploitées au nord du 60e parallèle. À votre connaissance, combien de demandes relatives à cette région ont été déposées jusqu'ici? Quel en est le potentiel? Que voyez-vous à l'horizon au chapitre de l'exploitation minière? Avez-vous reçu des demandes concernant la possibilité de construire des centrales nucléaires dans le Nord?
    Non, nous n'avons reçu aucune demande relative à des centrales nucléaires.
    En ce moment, nous avons une demande officielle. Il s'agit du projet Kiggavik, grande mine de la société AREVA comprenant de multiples sites dans le Nord. Il y a d'importants travaux de prospection. J'hésiterais beaucoup à donner des chiffres parce que les entreprises sont assez discrètes à ce sujet. Elles n'aiment pas se vanter avant d'avoir fait des découvertes intéressantes, mais je peux dire qu'il y a actuellement une grande activité dans le domaine de l'uranium.
    Très bien. Je vous remercie, monsieur Calkins.
    Notre temps est écoulé, mais M. Julian a fait savoir qu'il aimerait que le comité examine sa motion aujourd'hui. Je voudrais vous remercier tous d'être venus, de nous avoir présenté vos exposés et d'avoir répondu à nos questions.
    M. McGuinty invoque le Règlement.
    Avant de laisser partir nos témoins, je me demande si nous pouvons, par votre intermédiaire, donner aux membres du comité l'assurance qu'ils obtiendront de M. Binder des estimations détaillées du coût de l'accident de Fukushima et de M. von Mirbach, le coût des déversements de l'Exxon Valdez et de BP.
    Je voudrais également rappeler la question que j'avais posée à Mme Mimi Fortier au cours de la dernière réunion parce que je n'ai pas eu de nouvelles à ce sujet, ni de vous ni du greffier. J'avais demandé à Mme Fortier un résumé détaillé des recherches concernant les mesures d'urgence dans la mer de Beaufort. Son collègue, M. Michel Chenier, s'était engagé à nous envoyer cette documentation. Je voulais simplement être sûr que nous pourrons en disposer pour nos délibérations.
    Oui. M. Binder nous a dit qu'il n'avait pas de tels chiffres et que les renseignements qu'il nous a transmis étaient entièrement tirés des médias.
    Vous avez raison, monsieur le président. C'est mon erreur.
    En fait, j'ai demandé à M. Binder de nous fournir une liste des 66 évaluations environnementales effectuées par la CCSN depuis 2003, afin d'aider les membres du comité à déterminer combien de temps ces évaluations ont duré.
    Je vais le faire.
    Excellent. Merci, monsieur Binder.
    Nous allons suspendre la séance pendant environ une minute. Je voudrais demander aux membres du comité qui souhaitent parler aux témoins en privé de le faire à l'extérieur de la salle pour qu'il nous soit possible d'examiner tout de suite cette motion. Nous allons donc suspendre la séance, puis revenir examiner la motion de M. Julian.
(1030)

(1030)
    La séance reprend.
    Monsieur Julian, vous avez indiqué que vous souhaitez présenter votre motion. Je suppose que c'est la seconde que vous avez déposée. La première était irrecevable puisqu'il est clair qu'un comité ne peut pas renvoyer un projet de loi à un autre comité. Seule la Chambre peut le faire.
    En fait, la Chambre a renvoyé le projet de loi au comité des finances. C'est déjà fait. Monsieur Julian, voulez-vous donner lecture de votre motion, puis nous l'expliquer, si vous le souhaitez?
(1035)
    Merci beaucoup, monsieur le président. Nous avons fait quelques corrections. Je voudrais donc proposer la motion suivante:
Que le Comité permanent des ressources naturelles entreprenne immédiatement une étude sur l'objet des sections du projet de loi C-38, Loi portant exécution de certaines dispositions du budget déposé au Parlement le 29 mars 2012 et mettant en oeuvre d'autres mesures, qui relèvent directement du mandat de ce comité, à savoir la partie 3 section 2, Loi sur l'Office National de l'Énergie; la partie 3, section 3, Loi sur les opérations pétrolières au Canada; la partie 3, section 4, Loi sur la sûreté et la réglementation nucléaires; la partie 4, section 38, Loi sur le cabotage.
    Je propose donc la motion. Nous n'avons pas vraiment besoin d'une grande discussion. Je vais en parler pour 30 secondes. La mesure législative elle-même, c'est-à-dire le projet de loi C-38, est vraiment massive, comme vous le savez, monsieur le président.
    Le projet de loi est renvoyé au comité des finances pour examen, mais, comme vous le savez, la connaissance spécialisée des ressources naturelles se trouve ici, autour de la table de notre comité. Ce que nous proposons ne s'écarte pas radicalement de la pratique parlementaire. En fait, c'est le projet de loi qui s'écarte de cette pratique, et non cette motion. Nous croyons simplement qu'il serait bon que le comité étudie les domaines qu'il connaît vraiment bien.
    Le gouvernement en profiterait parce que nous avons ici des experts du domaine. La motion assurerait la responsabilité et la surveillance auxquelles les Canadiens s'attendent. S'il est important que les Canadiens aient confiance dans le processus d'approbation du projet de loi C-38, il est certain que leur confiance sera ébranlée si le projet de loi est renvoyé au comité des finances quand certains de ses aspects ont directement trait aux ressources naturelles.
    Pour toutes ces raisons, nous proposons cette motion afin qu'il nous soit possible d'étudier les répercussions du projet de loi C-38.
    Merci beaucoup, monsieur Julian.
    Comme il n'y a pas d'autres interventions, nous passons directement au vote.
    Ceux qui sont en faveur de la motion de M. Julian?
    Pouvons-nous avoir un vote par appel nominal?
     (La motion est rejetée par 6 voix contre 5.)
    Comme vous pouvez le constater, monsieur Julian, votre motion est rejetée.
    Je suppose que nous entendrons bientôt le timbre, mais comme nous avons épuisé l'ordre du jour, nous nous reverrons jeudi.
    Pouvez-vous nous dire, avant de mettre fin à la séance, ce qui est prévu pour jeudi? Où en sommes-nous avec les témoins? Pouvez-vous faire le point?
    Les témoins ont été invités.
    Trois témoins sont confirmés pour jeudi. Nous aurons des représentants de l'Association canadienne de l'électricité et de la Qulliq Energy Corporation. Le maire de Fort McMurray, qui s'appelle officiellement la municipalité régionale de Wood Buffalo, sera également présent.
    Parlerons-nous encore de l'énergie?
    Le greffier: Oui.
    Merci beaucoup à tous.
    La séance est levée.
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