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SECU Réunion de comité

Les Avis de convocation contiennent des renseignements sur le sujet, la date, l’heure et l’endroit de la réunion, ainsi qu’une liste des témoins qui doivent comparaître devant le comité. Les Témoignages sont le compte rendu transcrit, révisé et corrigé de tout ce qui a été dit pendant la séance. Les Procès-verbaux sont le compte rendu officiel des séances.

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Emblème de la Chambre des communes

Comité permanent de la sécurité publique et nationale


NUMÉRO 054 
l
1re SESSION 
l
41e LÉGISLATURE 

TÉMOIGNAGES

Le mercredi 24 octobre 2012

[Enregistrement électronique]

(1630)

[Traduction]

    Bonjour à tous. Il s'agit de la 54e séance du Comité permanent de la sécurité publique et nationale.
    Nous sommes le mercredi 24 octobre 2012. Cet après-midi, nous poursuivons notre étude du projet de loi C-42, Loi modifiant la Loi sur la Gendarmerie royale du Canada.
    Nous recevons aujourd'hui deux témoins. L'honorable Warren Allmand est un porte-parole de la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles et il est également un ancien solliciteur général du Canada.
    Yvonne Séguin est la directrice générale du Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la province du Québec. Nous vous souhaitons la bienvenue. Mme Robichaud est membre du conseil d'administration du même groupe. Bienvenue.
    Nous avons hâte d'écouter vos remarques liminaires. Monsieur Allmand, vous savez comment cela fonctionne. Nous espérons que vous voudrez bien répondre à certaines questions après votre exposé.
    Malheureusement, le greffier a pris mes notes pour les faire photocopier et il ne me les a toujours pas rapportées.
    Monsieur Allmand, jamais je n'aurais cru vous voir un jour à court de mots.
    Je peux vous dire toutes sortes de choses, mais je veux que ce soit pertinent.
    Peut-être que nous pourrions passer à Mme Séguin.

[Français]

    Bonjour. Je m'appelle Yvonne Séguin et je suis directrice générale et fondatrice du Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement au travail.
    Je voulais faire une petite présentation pour vous dire pourquoi nous pensons que nos commentaires sauront intéresser le comité.
    Notre groupe d'aide existe depuis 32 ans et a comme principal objectif de briser l'isolement et le mur du silence que subissent les personnes vivant ou ayant vécu une situation de harcèlement sexuel ou psychologique au travail, et de sensibiliser la population à cet enjeu.
    Le groupe d'aide poursuit plusieurs objectifs tels qu'ils apparaissent dans sa charte: éduquer la population sur ce problème; conseiller les femmes sur les démarches à suivre; aider les femmes à surmonter les problèmes dont elles ont été ou sont encore victimes; rédiger, publier et diffuser les documents, les manuels et, plus spécifiquement, tout document portant sur le harcèlement au travail; recueillir des fonds sous forme de dons et organiser des activités culturelles.
    L'organisme existe depuis 1980. De 1980 à 1984, nous n'étions qu'un comité affilié avec le groupe Au bas de l'échelle, à Montréal. Nous étions connus sous le nom de Comité d'action contre le harcèlement sexuel au travail du groupe Au bas de l'échelle. Mais devant l'ampleur du problème du harcèlement, nous avons constaté la nécessité de développer une approche spécifique. Il est donc apparu essentiel de devenir un groupe autonome.
    C'est en 1984 qu'a eu lieu la première incorporation. Le nom de notre organisme est alors devenu le Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la région de Montréal.
    En 1993, le groupe d'aide a été reconnu à l'échelle provinciale. Sa nouvelle dénomination sociale est donc devenue le Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la province de Québec inc.
    Depuis 2002, le GAIHST est aussi connu sous le nom de Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement au travail. Cette dénomination englobe le harcèlement psychologique ainsi que le harcèlement sexuel.
    Nous desservons le territoire de Montréal et les environs. Le groupe d'aide n'a aucun point de service, mais nous tentons d'ouvrir un autre bureau à Saint-Jérôme. Il faut dire que, souvent, la clientèle qui fréquente le groupe d'aide est tellement en détresse qu'elle ne peut pas se rendre à Montréal. C'est trop stressant pour ces gens.
    Puisque le groupe d'aide offre plusieurs types de services, la clientèle diffère beaucoup. En ce qui concerne le harcèlement sexuel et psychologique, la clientèle se compose majoritairement de femmes, bien que de plus en plus d'hommes entrent également en contact avec nous. La clientèle est composée de personnes de tous âges, issues de tous les milieux et de toutes les origines ethniques. Cependant, l'âge de la clientèle pouvant bénéficier des services du groupe d'aide est de 16 à 65 ans.
    Je vais maintenant parler de la clientèle des séances de sensibilisation et de formation. En ce qui a trait aux séances de formation, toutes les entreprises peuvent avoir recours à nos services, aussi bien les PME que les entreprises privées ou parapubliques. Les séances de sensibilisation, pour leur part, n'étaient pas le premier objectif du groupe d'aide, mais au cours des années, de plus en plus d'entreprises ont contacté notre organisme pour avoir de l'information.
    Comme services, nous offrons de l'écoute téléphonique, des interventions individuelles, des interventions de groupe, des interventions judiciaires, de l'information et des références, ainsi qu'un journal interne.
    Afin de remplir adéquatement sa mission, le groupe d'aide offre quatre services: le service des plaintes, le service de relation d'aide, le service des café-rencontres ainsi que le service d'éducation, qui s'adresse aux entreprises.
    Le service de relation d'aide est celui où s'effectue le premier contact avec la clientèle. Il a pour fonction d'offrir un soutien moral et de la relation d'aide aux victimes de harcèlement au travail, ainsi que de fournir également de l'information sur les démarches possibles et sur le service des café-rencontres.
    Le service des café-rencontres est un endroit où les membres du groupe d'aide ou les personnes vivant ou ayant vécu une situation de harcèlement peuvent se rencontrer, valider ce qu'ils ont vécu et partager avec d'autres personnes. Souvent, les thèmes sont choisis par la clientèle qui vient au groupe d'aide. Comme thèmes, on peut aborder, par exemple, le trouble de stress post-traumatique, l'assurance-emploi, l'art-thérapie, les conjoints de fait ou les soirées de cinéma. C'est la clientèle qui choisit le thème selon ses besoins. Aussi, nous avons toujours un thème de nature plus juridique, par exemple ce qu'il en est du ouï-dire. Il faut préciser que, souvent, lorsque la clientèle porte des dossiers devant les tribunaux, ces personnes entendent beaucoup de ouï-dire. Nous essayons de leur montrer que ce n'est pas quelque chose qui passe à la cour.
(1635)
    Le service des plaintes a pour fonction d'effectuer un suivi à court, à moyen ou à long terme au chapitre des dossiers. Ce service emploie une avocate et quatre stagiaires en droit. Les avocates proviennent de l'Université McGill et de l'Université de Montréal. C'est dans ce cadre que l'on fait les recherches et la défense de la clientèle.
    En ce qui a trait à nos services d'éducation, des séances d'information sont offertes aux personnes qui ont vécu une situation de harcèlement ou ont eu connaissance d'une telle situation. Le but de ces séances est de démystifier le problème. Nos sessions de sensibilisation sont souvent faites dans les écoles et les centres communautaires.
    Les séances de formation sont offertes aux personnes qui font de la prévention au chapitre du harcèlement sexuel. Ces séances sont données plutôt dans les petites entreprises. On peut les aider à élaborer une politique interne et à développer des façons de faire une enquête.
    Nous avons également un petit journal, l'Info-GAIHST, qui relève du groupe d'aide. On envoie de l'information aux membres et on tient à ce que les dossiers de harcèlement soient à jour.
     Les personnes faisant appel au groupe d'aide peuvent rapidement parler à une intervenante. Malgré la charge de travail toujours grandissante, le délai ne dépasse jamais 24 heures. C'est une consigne donnée au groupe d'aide: on rappelle les gens en moins de 24 heures. Avons-nous une liste d'attente? Non, c'est impossible. Tout le monde qui appelle obtient un service rapide. Quant aux frais associés aux services aux victimes, il n'y en a aucun. Tout est gratuit.
    Parlons des statistiques sur les types d'appels reçus l'année dernière. On a reçu environ 6 000 appels. Parmi ceux-ci, 73,3 p. 100 proviennent de la clientèle et sont adressés au service des plaintes et à celui de la relation d'aide, 1,7 p. 100 des appels concernent les séances de sensibilisation, 0,4 p. 100 des appels portent sur les cafés-rencontres et 24 p. 100 sur autre chose. Il s'agit de demandes de renseignements, d'information sur les cartes, etc.
    Par qui nos services sont-ils offerts? Nous avons deux employés au service des plaintes et un employé au service de relation d'aide. De plus, nous bénéficions d'un maximum de six stagiaires par année en droit, en criminologie et en sexologie. Nous avons aussi une réceptionniste qui travaille avec toute l'équipe et une conseillère à la direction qui travaille sur les projets spéciaux. Finalement, une directrice générale est en poste pour assurer le bon fonctionnement de l'organisme. En tout, nous sommes six employés permanents qui travaillons annuellement avec de six à huit stagiaires.
    Le groupe d'aide compte sur l'appui et le dévouement de plusieurs membres honoraires. Ce sont des femmes dévouées à la cause de la lutte contre le harcèlement sexuel au travail.

[Traduction]

    Excusez-moi, madame, mais notre temps est quelque peu limité ici, et vos 10 minutes sont presque écoulées. Je sais que vous avez une partie qui porte précisément sur le projet de loi C-42.
    Oui, je peux directement passer à cela.
    Je crois effectivement que c'est ce qui serait le mieux. On voit bien que vous êtes très impliquée dans la communauté et dans le dossier du harcèlement sexuel et je tiens à vous en féliciter, mais vous pourriez peut-être davantage vous rapprocher du projet de loi.
    On me dit que vous avez une copie des documents que je vous ai soumis. Sinon, j'en ai ici.
    Le président: Oui, nous en avons une copie.
    Mme Yvonne Séguin: D'accord.
    Passons à la page 5.
(1640)

[Français]

    Nous pensons qu'il serait important d'inclure dans notre présentation les définitions du harcèlement sexuel du groupe d'aide. On peut les trouver à la page 5 en français et en anglais.
    À la page 6, vous allez aussi trouver la définition du harcèlement psychologique.
    Les commentaires et suggestions du Groupe d'aide et d'information sur le harcèlement sexuel au travail de la province de Québec concernant le projet de loi C-42 portent, d'abord, sur l'article 9.2 proposé:

9.2 Le pouvoir du commissaire de nommer une personne à titre de membre ou de nommer un membre par voie de promotion à un grade ou échelon supérieur lui confère le pouvoir de révoquer la nomination et de prendre des mesures correctives dans le cas où il est convaincu qu’une erreur, une omission ou une conduite irrégulière a influé sur le choix de la personne ou du membre nommé.
    Il s'agit d'ajouter: « [...] ou s'il est convaincu que le membre a exercé du harcèlement sexuel ou psychologique à l'égard d'un autre membre. »
    À l'article 12 du projet de loi, il est écrit ceci: « 12. Le commissaire peut suspendre tout membre qui a contrevenu, contrevient [...] » Nous pensons qu'on devrait écrire ceci — comme c'est le cas à la Commission des normes du travail du Québec —: « doit prendre les mesures nécessaires ». Selon nous, le projet de loi n'avait pas assez de mordant et cela devait être renforcé.
    À l'alinéa 20.2(1)l), il est écrit, et je cite: « Le commissaire peut élaborer les procédures concernant les enquêtes et le règlement des différends auxquels donne lieu le harcèlement qui aurait été pratiqué par un membre. » Cela devrait être remplacé par ceci: « Le commissaire doit élaborer les procédures concernant les enquêtes et les règlements des différends auxquels donne lieu le harcèlement [...] ».
     Le projet de loi devrait détailler plus en profondeur les procédures devant être enclenchées par le commissaire en cas de plainte de harcèlement. Cela devrait être une partie entière du projet de loi et non une sous-section.
    En résumé, il est bien de vouloir accroître la responsabilité de la GRC. Cependant, cela devrait être fait dans le sens des obligations de la GRC et non de ses droits. En d'autres termes, il ressort qu'un trop grand pouvoir discrétionnaire est accordé au commissaire. Pour que les recours mis en place soient efficaces, le traitement des plaintes pour harcèlement au travail devrait être une obligation et non une option.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Suis-je allée assez vite?
    Vous vous en êtes très bien sortie. Merci.
    Passons maintenant à M. Allmand, s'il vous plaît.
    Monsieur le président et membres du comité, je suis ici aujourd'hui au nom de la Coalition pour la surveillance internationale des libertés civiles, un regroupement pancanadien d'organisations de la société civile qui s'est formé au lendemain des attaques terroristes du 11 septembre 2001.
    La coalition regroupe 40 ONG, syndicats, associations professionnelles et groupes confessionnels, tous voués au développement international et à la défense des droits de la personne. Elle a pour mandat de surveiller les incidences des lois contre le terrorisme sur les normes en matière de droits de la personne et de défendre les gens contre les abus et les violations. La CSILC est intervenue dans l'enquête Arar et la Commission Iacobucci; nous avons également comparu devant la Cour suprême du Canada dans la cause des certificats de sécurité relativement à Adil Charkaoui.
    Nos observations sur le projet de loi C-42 sont basées sur notre expérience devant la Commission Arar, ainsi que sur les conclusions et les recommandations formulées par le juge O'Connor dans ses deux rapports préparés à la suite de son enquête sur l'incident Arar.
    Dans son premier rapport, déposé en septembre 2006, le juge O'Connor a conclu que la détention de Maher Arar par les agents américains à New York, en 2002, puis son transfert subreptice vers la Syrie, quelques jours plus tard, où il a été emprisonné et torturé pendant environ un an, étaient en grande partie causés par la négligence de la GRC qui avait, à tort, étiqueté M. Arar d'extrémiste islamiste lié à Al-Qaïda pour ensuite partager cette information erronée, de manière irresponsable, avec les autorités américaines. Le juge O'Connor a surtout reproché à la GRC de ne pas avoir vérifié l'exactitude de l'information recueillie, d'avoir communiqué cette information erronée, d'avoir donné des directives inadéquates et d'avoir mal surveillé l'équipe chargée de l'enquête.
    Dans son premier rapport, le juge O'Connor a présenté 23 recommandations pour corriger ces manquements et ces erreurs. Dans son second rapport, en date de décembre 2006, toujours pour corriger le problème dont il a été question, le juge O'Connor a proposé la création d'un nouvel organisme d'examen pour la GRC et la mise sur pied d'un nouveau processus d'examen pour cinq autres organismes fédéraux chargés d'activités de sécurité et de renseignements secrets.
(1645)
    À la suite de son enquête, le juge O'Connor a découvert qu'il y avait 24 organismes fédéraux au Canada impliqués directement ou indirectement dans le domaine de la sécurité et du renseignement, les principaux étant le SCRS, la GRC, le Centre de la sécurité des télécommunications au Canada, l'Agence des services frontaliers du Canada, Transports Canada, le MAECI, le MDN, Immigration Canada, le BCP, Justice et la Garde côtière. Il a également découvert qu'il y avait 247 ententes qui régissaient le partage de renseignements à l'échelle internationale et au Canada.
    En outre, il a trouvé qu'il y avait un nombre croissant d'opérations conjointes en matière de renseignement, également connues sous le nom d'EISN, à savoir équipes intégrées de la sécurité nationale, qui se composent, par exemple, du SCRS, de la GRC, des corps policiers provinciaux et des forces de police municipales. Avec toutes ces activités de partage et avec toutes ces opérations conjointes, il est facile de comprendre comment des erreurs commises par la GRC et par d'autres organismes auraient pu échapper aux examens et passer inaperçues. Le hic, c'est que les organes d'examen existants — la CPP, ou la Commission des plaintes du public, le CSARS pour le SCRS, le commissaire du CST — ont des pouvoirs et des mandats qui sont différents et limités et qui, dans chaque cas, ne se limitent qu'à un seul organisme. Ainsi, comment peut-on résoudre des problèmes qui découlent d'opérations conjointes et d'ententes de partage?
    Certains de ces organes d'examen ont le pouvoir d'assignation, tandis que d'autres ne l'ont pas. Certains ont le droit de faire des vérifications, tandis que d'autres ne l'ont pas. Certains, comme l'Agence des services frontaliers du Canada, ne disposent d'aucun organe d'examen. Nous nous retrouvons donc dans une situation impossible, où les problèmes et les violations peuvent facilement passer entre les mailles du filet.
    Au chapitre 10 du second rapport, le juge O'Connor pose la question suivante: « Le statu quo est-il adéquat? » À quoi il répond un non catégorique. Il dit que les contrôles internes de la GRC ne sont pas adéquats. Les pouvoirs existants de la Commission des plaintes du public, la CPP, ne sont pas adéquats et les pouvoirs des autres organes de reddition de comptes ne le sont pas, eux non plus. Ainsi, il propose de créer un nouvel organe pour remplacer la CPP de la GRC, qui sera connu sous le nom de commission indépendante d'examen des plaintes et des activités en matière de sécurité nationale. Le nom importe peu. Par rapport à ce que vous proposez dans le projet de loi, ce nom conviendrait également. L'objectif de ce nouvel organe serait d'examiner la GRC et l'Agence des services frontaliers du Canada, tout en étant doté de pouvoirs accrus pour vérifier et faire enquête sur les plaintes.
    Il a également proposé que le CSARS reçoive des pouvoirs supplémentaires pour examiner la sécurité et les opérations de renseignement d'Immigration Canada, du MAECI, de Transports et du CANAFE, en plus du SCRS. Il laisse intact le pouvoir du commissaire du CST pour ce qui est d'examiner les activités du Centre de la sécurité des télécommunications. Toutefois, pour coordonner ces trois entités, pour examiner toutes les pratiques en matière de sécurité nationale et pour veiller à ce que rien ne tombe entre les mailles du filet, il propose la mise sur pied d'un comité de coordination pour l'examen intégré des questions de sécurité nationale.
    Monsieur le président, et membres du comité, six ans après les deux rapports du juge O'Connor, nous voici avec le projet de loi C-42. Étant donné qu'il s'agit d'un projet de loi très long et compliqué, d'environ 120 pages, et qu'il modifie neuf grandes lois, je n'ai pas eu le temps d'examiner et d'analyser toutes ses parties. Ainsi, aujourd'hui, je vais plus précisément me consacrer aux questions soulevées par la Commission Arar, à savoir le travail fait par la GRC et les autres entités dans le domaine de la sécurité et du renseignement et particulièrement lors d'opérations conjointes comme les EISN. Je vais traiter aussi bien des opérations conjointes que du partage au sein du Canada qu'à l'étranger.
    Il y a deux parties dans le projet de loi qui pourraient être pertinentes à ce sujet. Il s'agit de l'article 45.75 tel qu'il est proposé et qui dit:
45.75(1) Lorsqu'une plainte porte à la fois sur la conduite d'un membre ou de toute autre personne nommée ou employée au titre de la Partie I et sur celle d'un agent responsable du contrôle d'application de la loi de toute autre entité publique au Canada ou à l'étranger, la commission peut tenir une enquête, une révision ou une audience sur la plainte conjointement avec l'entité publique ayant des compétences similaires en matière de plaintes à l'égard de tels agents dans le ressort concerné.

(2) Le gouverneur en conseil peut prendre des règlements concernant les enquêtes, les révisions et les audiences conjointes.
(1650)
    Le problème est le suivant: est-ce que l'expression « de toute autre entité publique » inclut les autres autorités d'examen qui relèvent de la compétence fédérale, comme le CSARS, l'organisme d'examen du CST, etc.? Il faudra préciser ce point. Si je dis cela, c'est parce que la plupart des opérations conjointes de la GRC incluent deux ou trois des autres autorités fédérales en matière de sécurité. Je vous rappelle que le juge O'Connor a trouvé qu'il y en avait 24. Est-ce que l'application de cet article sur les examens conjoints, dont l'objectif est d'ailleurs louable, concerne non seulement les autorités provinciales et non canadiennes, mais aussi les autres autorités qui relèvent du fédéral?
    Qu'en est-il des organismes fédéraux, tels que l'Agence des services frontaliers du Canada, laquelle ne dispose d'aucun mécanisme d'examen ou de surveillance? Comment fait-on enquête sur les opérations conjointes entre la GRC et l'ASFC, lesquelles en ont d'ailleurs plusieurs en commun? Le juge O'Connor a précisé que le nouvel organisme d'examen pourrait traiter aussi bien de la GRC que de l'ASFC.
    Ainsi, cet article pourrait nécessiter des amendements et des précisions. Il faudrait également en savoir plus sur ce que le gouvernement veut dire par « règlements » au paragraphe 45.75(2).
    Dans le même ordre d'idées, il faudrait des précisions sur la partie VII.2, à partir de l'article proposé 45.88. Cette partie est intitulée « Examen des opérations transfrontalières intégrées de contrôle d'application de la loi ».
    Tout d'abord, à la lecture du projet de loi, je n'arrive pas à comprendre la relation entre ces articles proposés et l'article 45.75 auquel je viens juste de faire allusion. Par exemple, est-ce que ces articles vont permettre à la nouvelle Commission civile d'examen et de traitement des plaintes, la CCETP, de tenir une enquête, une révision et une audience sur des affaires comme celles de M. Arar ou des MM. El Maati, Almalki et Nureddin, affaires qui ont été traitées par la Commission Iacobucci?
    J'ai lu le témoignage du ministre devant le comité et j'estime que le ministre devrait être invité de nouveau ici pour qu'il vienne apporter des précisions sur les articles que je viens de mentionner relativement aux examens tenus conjointement — tant au Canada qu'à l'étranger — et, le cas échéant, sur les amendements proposés.
    Je crois que le gouvernement était bien intentionné lorsqu'il a proposé de tenir des examens conjointement avec d'autres entités de surveillance, mais ces articles ne sont pas du tout clairs. Il faut y apporter des précisions. Peut-être que des amendements seront nécessaires.
    Les causes examinées par le juge O'Connor et par le juge Iacobucci ne devraient pas être négligées et oubliées. Le juge O'Connor y a passé trois ans et le juge Iacobucci, deux ans. Ils ont utilisé des millions de deniers publics pour examiner ces causes. On ne peut pas en faire fi.
    J'aimerais vous rappeler que le juge O'Connor a pu faire toute la lumière sur la tragédie Arar, car il disposait des pleins pouvoirs pour examiner tous les organismes, les opérations conjointes et les ententes concernant le partage d'information. Si cette nouvelle CCETP veut faire son travail correctement, elle doit disposer des mêmes pouvoirs.
    Merci beaucoup, monsieur le président.
    Merci beaucoup, monsieur Allmand.
    Passons à notre premier tour de questions, où chaque député dispose de sept minutes.
    Madame Bergen, allez-y, s'il vous plaît.
    Merci beaucoup, monsieur le président. Merci à nos deux témoins pour leurs exposés.
    J'ai deux domaines à couvrir et j'essaierai donc d'être rapide.
    Tout d'abord, je voudrais vous parler, madame Séguin, au sujet du harcèlement. Je sais que vous vous occupez principalement des cas de harcèlement sexuel et que vous travaillez avec des personnes qui sont victimes de harcèlement sexuel. Vous voyez les conséquences, l'après-coup et les effets à long terme que cela a sur les gens qui y sont confrontés en milieu de travail.
    Il me semble que vous devriez appuyer l'objet du projet de loi, qui consiste à moderniser et à accroître la responsabilité de la GRC et de ceux qui demandent à la GRC de rendre des comptes par le biais des diverses entités d'examen.
    Si je vous ai bien comprise, toutefois, vous aimeriez qu'il y ait un paragraphe qui porte précisément sur le harcèlement sexuel. Est-ce bien cela?
    Oui, pour rendre la chose beaucoup plus claire.
    Je ne suis pas avocate et donc, je ne suis pas certaine de la loi. Je l'ai lue; c'est très compliqué. Ce n'est pas facile de trouver les sanctions applicables, si quelqu'un est jugé coupable de harcèlement sexuel, ni les interventions ou les mesures à prendre.
    Je me réjouis que vous ayez soulevé cette question. Il y a plusieurs choses qui, à mes yeux, sont importantes.
    Tout d'abord, qu'il s'agisse d'un milieu de travail privé, d'un organisme gouvernemental ou d'une petite entreprise, il est important d'avoir certaines procédures en place pour traiter du harcèlement sous toutes ses formes. Il ne devrait y avoir aucune tolérance pour le harcèlement, qu'il soit de nature sexuelle, raciale, qu'il porte sur l'orientation sexuelle ou sur toute autre chose. Les entreprises ainsi que les organisations privées et publiques qui sont solides disposent de politiques pour faire face à cela.
    À la GRC, le problème est que le processus de traitement des plaintes est extrêmement lourd. Il s'agit d'un processus très long. Les superviseurs directs ne peuvent pas traiter de problèmes comme ceux-ci lorsqu'ils se produisent. Il s'agit d'un problème de taille. Ce que le projet de loi C-42 vient faire, c'est qu'il modernise tout le système. Il donne aux superviseurs directs la capacité d'intervenir.
    Ce qui m'inquiète avec votre suggestion, c'est que si nous commençons à extraire différents types de harcèlement et à essayer d'y faire face au cas par cas, nous passerons à côté de l'hypothèse de départ, à savoir que toute forme de harcèlement est inacceptable.
    Je me demande ce que vous pensez de l'idée qu'aucun harcèlement ne devrait être toléré. Si nous commençons à diviser les choses, cela pourrait semer la confusion ou nous risquerions d'en manquer des parties.
(1655)
    Je vous recommanderais certainement de diviser les choses et de parler plus précisément du harcèlement sexuel. En ce qui a trait aux cas qui ont été signalés cet été à la GRC, lorsqu'on apprend que des gens ont été harcelés sexuellement pendant deux décennies, on se rend à l'évidence qu'il y a un problème. Lorsqu'on entend que 150 femmes de la GRC sont passées par là et ont porté des accusations au civil, il est tout à fait évident que le système ne fonctionne pas. Je sais que pendant longtemps, c'était la mode d'essayer de regrouper toutes les accusations de harcèlement et de mettre cela sous la rubrique « la violence au travail ». Mais je crois que tant qu'il y a du harcèlement sexuel en milieu de travail, tant qu'il n'y a pas de bonne éducation en place, nous devrions être très précis.
    Je sais que le projet de loi est un énorme document, mais il donne non seulement aux superviseurs, mais aussi à la GRC, la possibilité d'adopter des procédures pour la discipline, l'éducation et l'atténuation. Je crois que lorsque l'on met quelque chose de semblable directement dans la loi, au lieu de l'inclure ultérieurement dans les règlements, cela peut faire plus de tort.
    Je vous remercie de vos commentaires et de votre dévouement dans ce dossier.
    Monsieur Allmand, sur la question que vous avez soulevée et qui porte sur l'enquête sur des incidents transfrontaliers, cela n'a rien à voir avec les agents de l'ASFC. À l'heure actuelle, nous avons un projet pilote et nous procédons de manière intégrée pour surveiller les frontières; ainsi, la GRC peut travailler avec des responsables de l'application de la loi américains dans différents dossiers transfrontaliers. Les agents de la GRC interviendraient tout au long du processus. Cela vient-il éclaircir les choses?
    Non. Il y a deux articles dans le projet de loi. Je les ai mentionnés. L'article 45.75 qui est proposé parle des enquêtes tenues conjointement avec d'autres entités de surveillance.
    Oui, je sais que c'est important.
    On dit au Canada ou à l'étranger. Il y a ensuite la partie VII.2 qui fait allusion aux opérations transfrontalières de contrôle d'application de la loi. En d'autres termes, on y parle de surveillance. Il semble y avoir un manque de clarté.
    Il s'agit de la GRC.
    Mon observation principale porte sur les opérations conjointes. Nous savons maintenant qu'il existe des opérations conjointes entre la GRC et l'ASFC. Tout ce que je veux, ce sont des éclaircissements. Je suis heureux de constater que vous avez prévu des examens conjoints, mais il n'est pas clair que vous couvrez le territoire.
    Ce qui est important pour moi, c'est que l'ancienne commission des plaintes soit remplacée. Le projet de loi adopte plusieurs des recommandations du juge O'Connor. L'une des principales recommandations du juge O'Connor, et qui fait l'objet du projet de loi, est que la nouvelle Commission civile d'examen et de traitement des plaintes puisse avoir accès à l'information. Je vais vous lire un passage du projet de loi:
Sous réserve des articles 45.4 et 45.42, la Commission a un droit d'accès aux renseignements qui relèvent de la Gendarmerie ou qui sont en sa possession et qu'elle considère comme pertinents à l'égard de l'exercice des pouvoirs et fonctions que lui attribuent...
    Et cela se poursuit. La commission peut également assigner un témoin à produire de l'information lorsqu'elle le juge nécessaire. Si une plainte examinée par la commission se transforme en une enquête criminelle, le dossier serait alors transféré à un organisme d'enquête déjà établi. Quatre provinces ont déjà établi un tel organisme d'enquête. Il s'agit alors d'une enquête criminelle. Les mêmes pouvoirs...
(1700)
    Rapidement, il vous reste 20 secondes.
    ... dont disposerait tout organisme d'enquête seraient accordés à ces organismes d'enquête provinciaux.
    Je comprends ce que vous dites; vous voudriez qu'il soit clairement établi qu'il est possible d'avoir une enquête conjointe avec, comme vous le dites, le SCRS...
    Non pas uniquement avec les organismes provinciaux. La plupart des EISN...
    Non, mais ce sont les organismes d'enquête...
    Par souci de précision, la plupart des EISN...
    Rapidement, monsieur Allmand, parce que notre temps est écoulé.
    Très bien.
    Vous pourrez peut-être obtenir cette information ultérieurement.

[Français]

    Madame Doré Lefebvre, vous avez la parole pour une période de sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    D'abord, j'aimerais vous remercier, monsieur Allmand, madame Robichaud et madame Séguin, d'être ici aujourd'hui. Nous apprécions vos commentaires sur le projet de loi C-42. Mes questions porteront sur le travail de Mmes Robichaud et Séguin et sur l'opinion qu'elles ont au sujet du projet de loi C-42.
    Je sais que vous faites un travail énorme en ce qui a trait au harcèlement sexuel en milieu de travail. Vous l'accomplissez surtout en aidant les personnes qui ne sont pas syndiquées et en faisant du travail individualisé. C'est sûrement grandement apprécié par ces gens qui sont moins protégés par les normes du travail.
    Vous avez parlé des lacunes et du manque de fermeté du projet de loi C-42. Selon vous, le traitement des plaintes de harcèlement en milieu de travail devrait être une obligation et non une option, comme c'est actuellement le cas. Ça le restera puisque le commissaire aura encore le pouvoir de décider s'il donne suite ou non aux recommandations du comité d'examen interne.
    Croyez-vous que le projet de loi C-42 ne prenne pas suffisamment au sérieux les cas de harcèlement sexuel et psychologique? Y aurait-il une façon de travailler plus en profondeur afin de prendre ce problème plus au sérieux?
    J'ai consulté sommairement le code de déontologie et je n'ai pas trouvé de références au harcèlement sexuel. Je suis en faveur du projet de loi C-42, mais je ne comprends pas la teneur de tout le texte. Cependant, quand une personne est victime de harcèlement, elle essaie de trouver des portes de sortie, des endroits qui vont l'aider. Or, quand elle ne les trouve pas, elle croit qu'elle ne peut aller nulle part.
    Ces choses s'observent souvent à la Commission des normes du travail, qui soutient les non-syndiqués. Les employeurs sont obligés d'agir. Ils n'ont pas d'autres solutions de rechange. Cela dit, le geste peut varier, mais cela oblige tout de même les petites entreprises à poser un geste. Je crois que ce serait bien que la GRC soit obligée de faire quelque chose.
    C'est certain que l'obligation d'agir doit être prise en compte. Comme ce n'est pas obligatoire pour la GRC de poser un geste devant un cas de harcèlement auprès de ses employés, ne croyez-vous pas que cela mine la confiance des femmes qui veulent travailler à la GRC?
    On peut le constater avec les articles qui ont été publiés cette année. On voit des gens prêts à venir témoigner aujourd'hui, alors qu'ils ont attendu 20 ans avant de raconter ce qu'ils ont vécu. Ils ont gardé le silence parce qu'ils tenaient à leur travail. C'était aussi parce qu'ils ne faisaient pas confiance au système qui devait les aider.
    Notre organisme a constaté qu'un employeur qui prend ses responsabilités très au sérieux reçoit moins de plaintes. Les gens qui travaillent dans une telle entreprise savent quelles sont les limites et quelle est la position de l'employeur. On fait de l'éducation dans ce type d'entreprises. Cela fait en sorte qu'il y a moins de plaintes. Lorsqu'une plainte est déposée, il y a un mécanisme qui va la régler rapidement.
    Cela répond-il à votre question?
    Oui, ça répond très bien à ma question.
    Croyez-vous que ce soit un exemple de la bonne façon de s'attaquer au harcèlement, qu'il soit psychologique ou sexuel, en milieu de travail fédéral?
    Cela devrait être une obligation.
    Cela devrait être une obligation, selon vous.
    Oui, une obligation et non un choix.
(1705)
    Selon vous, que manquerait-il au projet de loi C-42 pour le rendre plus étoffé?
    On pense qu'il manque une structure. La structure n'est pas mise en place. Même si c'est dans une autre section, ce n'est pas évident. De toute façon, c'est rédigé avec des mots qui suggèrent que des recommandations peuvent être faites.
    Personnellement, si j'étais victime de harcèlement, je ne suis pas certaine que j'irais porter plainte. Si je portais plainte, les suites seraient loin d'être claires.
    Vous avez travaillé sur plusieurs cas de harcèlement en milieu de travail, surtout en ce qui touche les femmes. Auriez-vous des exemples à nous donner à cet égard? Ici, on essaye de s'attaquer au changement de la culture interne à la GRC. Dans votre témoignage, vous avez évoqué un peu plus tôt les 150 femmes qui cherchaient à intenter un recours collectif.
    Avez-vous déjà vu un type de culture interne similaire qu'il fallait changer dans les milieux de travail? Pourriez-vous nous donner des exemples concrets à cet égard?
    Je sais qu'une fois par année, le groupe d'aide va cibler un organisme qui va nous appeler pour que nous puissions donner de la formation. Comme je l'ai dit, notre principal objectif n'est pas de donner de la formation, mais plutôt d'aider les personnes qui sont confrontées à ce problème. On donne de la formation aux pompiers de Montréal. Quand ils nous ont approchés, c'était beaucoup pour aborder la question de la culture qui existait chez les pompiers.
    Dans ce milieu, tout était acceptable. Il a fallu faire beaucoup de sensibilisation et d'éducation sur le fait que la culture des entreprises peut changer. Elle doit changer. Le changement est difficile pour tout le monde, mais une fois que c'est fait, c'est clair, net et précis. Dans les années 1980, le CN a fait des changements dans le dossier de la discrimination et du harcèlement sexuel. Cette institution était la première à dire qu'elle craignait être inondée de plaintes après ce jugement. Cependant, au contraire, elle a eu moins de dossiers, car c'était clair, net et précis.
    Excusez-moi de revenir sur ce sujet. Lorsque vous êtes allés faire des présentations aux pompiers de Montréal, ils vous ont avoué que cela faisait partie de...
    Oui. Quand ils sont venus nous voir pour qu'on offre de la formation, ils nous demandaient de les aider à établir leurs politiques contre le harcèlement et à faire des enquêtes internes. La façon dont les gens se parlaient faisait partie de leur culture et c'était des farces. Par contre, il faut comprendre aussi que des farces, cela se fait à deux. Lorsqu'une personne ne rit pas, ce n'est plus une farce. Quand on rit d'une personne en particulier ou qu'on l'isole, ce n'est plus une farce. Donc, il a fallu travailler beaucoup à cet égard. Cela n'a pas été si difficile. C'était plus difficile de faire en sorte que les hauts dirigeants acceptent que cette culture devait changer.

[Traduction]

    Très rapidement.

[Français]

    En les aidant à changer la culture interne, avez-vous vu des progrès?
    Oui. On a vu beaucoup de progrès. D'ailleurs, ils l'ont décidé eux-mêmes. Il y a des enquêtes internes. Les pompiers de Montréal vont appeler les pompiers de Laval pour aller faire une enquête et si les pompiers de Laval ont un problème, ils vont appeler les pompiers de Montréal pour venir enquêter. En somme, leurs dossiers ne s'éternisent pas pendant trois ou quatre ans.
    Merci.

[Traduction]

    Merci beaucoup.
    Nous revenons maintenant à M. Leef, pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président, et merci à nos témoins d'aujourd'hui.
    Madame Séguin, nous avons beaucoup parlé de mesures législatives que nous pouvons utiliser lorsque quelqu'un a un écart de comportement, et vous avez présenté des suggestions sur la façon dont la loi peut ou pourrait traiter ces écarts. Un élément important du changement de culture commence immédiatement lors de la formation. Dans le cas de la GRC, cela débute lorsqu'un groupe de personnes se rendent à l'école de la Gendarmerie royale à Regina. Elles ont la possibilité de se rendre dans un centre, et je crois que c'est une bonne idée; le centre rassemble toutes les recrues qui reçoivent leur formation avant d'être affectées ailleurs.
    J'aimerais soulever un point et, par la suite, vous pourrez me dire si vous estimez que c'est un élément positif de la loi. J'aimerais parler de certains éléments de la loi qui me semblent, en tant qu'ancien membre de la GRC, aller dans la bonne direction.
    Le nouvel article 20.2 permettrait au commissaire de déterminer les besoins en matière d'apprentissage, de formation et de perfectionnement des membres et de fixer les conditions de mise en oeuvre de cet apprentissage, de cette formation et de ce développement.
    Je pense que cela pourrait se présenter sous la forme d'un cadre de travail à l'école elle-même, que l'on pourrait intégrer dans les structures de recrutement et de formation. Pouvez-vous me dire si vous estimez qu'il s'agit d'un élément positif de la loi? Quelles recommandations feriez-vous pour orienter les préceptes de la formation afin de mettre en place les mesures préventives dont on a besoin à la GRC?
    Je ne connais pas personnellement ces éléments, mais je dirais que c'est un très bon départ. L'éducation doit commencer dès le début de la formation, mais les gens oublient vite. Par conséquent, il faut le répéter à maintes reprises. Une fois par année pourrait suffir. Voilà ce que je recommanderais. Il faudrait constamment modifier la politique interne sur le harcèlement sexuel ou la violence au travail, peu importe sous quelle forme, et mettre sur pied un comité qui travaille sur ces questions pour voir si cela fonctionne et assurer une surveillance, parce que les gens ont tendance à oublier.
    Nous rencontrons beaucoup de gens qui ne savent même pas si leur entreprise dispose d'une politique. Habituellement, lorsqu'on les embauche, ils en reçoivent une copie, mais ils sont tellement heureux d'avoir du travail qu'ils mettent ce document de côté et ne le regardent plus.
(1710)
    D'après votre expérience, y a-t-il une composante dont il faudrait tenir compte, parce que vous avez travaillé avec un nombre de groupes où cela devient malheureusement un élément de la culture d'entreprise, et cela ne se passe pas uniquement à la GRC mais dans d'autres organisations?
    Certains groupes et organisations vont présenter un programme sur le harcèlement, d'une durée d'un jour ou de deux heures, ou bien une formation en ligne. Selon vous, que faut-il faire à l'étape de la formation initiale pour garantir la validité de cette information, pour que les gens la retiennent plus longtemps et qu'elle fasse impression auprès des nouvelles recrues, sans toutefois nier votre recommandation selon laquelle cette formation devrait se poursuivre tout au long de leur carrière?
    Grâce à notre expérience qui s'étale sur 32 ans, nous avons constaté qu'il faut offrir des séances de formation où les employés doivent se déplacer pour y assister. Au début des années 1980 lorsque nous avons commencé, les employés pouvaient suivre la formation s'ils le désiraient. Maintenant ce n'est plus facultatif. Il y a des cours de recyclage qui sont offerts. Et cela ne doit pas forcément durer toute la journée. Nous travaillons avec de petites entreprises, de sorte qu'elles ne veulent pas perdre le temps que leurs employés passent à ces séances de formation. Nous sommes toujours à leur disposition soit avant le début du travail, pendant l'heure du repas ou après les heures de travail. On peut adopter différents mécanismes qui font en sorte qu'on n'a pas besoin d'y consacrer un jour et demi. Nous offrons une formation d'un jour et demi lorsque nous formons les gens sur la façon d'enquêter sur une plainte de harcèlement sexuel. Les cours de recyclage pour les employés peuvent être offerts sous différentes formes. Il n'est pas nécessaire qu'ils soient aussi longs. Mais l'information reste gravée dans l'esprit des gens. Ils savent ce que représente la GRC, ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas. Cela permet d'éclaircir les choses pour tout le monde.
    C'est probablement différent de toute autre organisation au pays. La GRC a la possibilité de faire affaire avec un groupe de nouvelles recrues dans un endroit centralisé et en fonction d'une formation dont la durée est préétablie; on consacre un jour entier à la formation, et les étudiants sont obligés d'y assister. C'est un programme axé sur la compétence dans tous les sens du mot, et cela permet d'agir ainsi.
    Vous avez dit que la disposition qui stipule que le commissaire peut orienter l'apprentissage et la formation à la GRC est véritablement une mesure positive qui permet de traiter le volet préventif des défis auxquels elle doit faire face.
    Passons maintenant aux observations que vous avez faites relativement au volet éducation et à son évolution, puisque les défis et la réalité évoluent; il faut donc que la formation et la sensibilisation emboîtent le pas.
    Estimez-vous que les nouvelles dispositions constituent un pas dans la bonne direction par rapport à ce qui se faisait par le passé puisqu'elles permettent de régler ces questions sur le coup? Autrefois, dès qu'un problème de harcèlement se produisait dans le milieu de travail — qu'il s'agisse de harcèlement sexuel ou psychologique ou de toute autre forme de harcèlement —, l'ancien système mettait en jeu un processus très juridique. Un gestionnaire d'un détachement dans une région rurale ou éloignée du Canada aurait bien voulu dire au membre fautif que ce qu'il avait fait était inapproprié et qu'il devait modifier son comportement, mais c'était impossible parce que la loi et le système ne lui permettaient pas de le faire. Maintenant, avec les changements prévus dans le projet de loi, un commandant de détachement peut s'asseoir avec la personne visée et traiter de la question immédiatement dès que cela se produit.
    Estimez-vous que c'est un pas dans la bonne direction qui permettra de ralentir l'occurrence malheureusement croissante de ces comportements inappropriés à la GRC?
    Je dirais que cette mesure semble bonne, mais il faudrait voir si son application fonctionne bien. Encore une fois, même si la possibilité existe, les gens vont-ils s'en prévaloir? Et comment le tout sera-t-il organisé?
    C'est un point intéressant. Évidemment, il faudra voir en quoi consistera la formation et comment elle sera offerte. Est-ce que ça fonctionne bien dans les autres organismes qui procèdent ainsi?
    Forts de nos 32 ans d'expérience, nous avons constaté que lorsque des entreprises ont une politique claire, que les employés savent ce qui est acceptable et ce qui ne l'est pas, c'est beaucoup plus facile pour les gestionnaires de régler les problèmes. Tout le monde ne devient pas harceleur. Dans bien des cas, lorsqu'on apporte des éclaircissements, le comportement disparaît. Parfois, les harceleurs disent qu'ils ne faisaient que blaguer. Il faut donc expliquer à ces personnes en quoi consiste une blague. Lorsque j'offre des séances de formation et que les groupes sont essentiellement constitués d'hommes, ils craignent habituellement que cela signifie qu'ils ne pourront plus draguer. Lorsque je leur dis qu'il leur sera possible de draguer, que cela est acceptable sauf lorsque quelqu'un leur dit « non », et qu'alors ils devront y mettre un terme, je vois leurs épaules qui se détendent. Ils sont d'accord avec cela maintenant. On n'a pas apporté de changement à cette culture. On leur dit tout simplement qu'ils doivent apprendre à respecter l'intimité de l'autre personne.
    Cela semble positif, mais il faudra voir qui seront les gestionnaires et quel type de formation ils recevront. Le délai est très important. Je puis vous dire que, dans les années 1980, à l'échelle du gouvernement provincial, j'ai été témoin d'un cas particulier dont l'enquête s'est étirée sur trois ans. C'est inacceptable.
(1715)
    Merci beaucoup.
    Nous cédons maintenant la parole aux libéraux pour sept minutes.
    Merci, monsieur le président.
    Pour ce qui est du dernier point relativement aux délais d'enquête, avez-vous une idée de la durée des enquêtes à l'heure actuelle? Pensez-vous que le projet de loi raccourcira ces délais? Il serait intéressant de voir le temps que durent les enquêtes avant qu'un dossier ne soit résolu.
    Je ne pense pas être l'experte en la matière. Ce serait peut-être M. Leef. Toutefois, je puis vous dire que lorsqu'un problème est dénoncé immédiatement, il peut y avoir un délai de deux ou trois semaines avant qu'il ne soit résolu. Mais s'il fait partie d'un processus juridique, cela peut prendre jusqu'à six ans.
    Monsieur Allmand, j'aimerais revenir à vos observations sur les examens conjoints. Vous en avez parlé vers la fin de votre témoignage, mais sentez-vous libre de rajouter tout ce que vous voulez. Comment percevez-vous le fonctionnement de ces examens conjoints? Quels types de pouvoirs ces organismes d'examen doivent-ils avoir afin de bien fonctionner? De quelle information doivent-ils disposer pour mener ces examens?
    Je ne pense pas que ce point a été bien compris. Lorsque la GRC fonctionne dans des opérations conjointes, comme avec les EISN et d'autres groupes qui s'occupent de sécurité et de renseignement et, qu'en raison de négligence, quelqu'un subit un préjudice, comme dans le cas de M. Arar, qui a été torturé pendant plus d'un an en Syrie et qui avait été transféré dans ce pays en raison d'information inexacte, et qu'il existe un organisme de surveillance comme le Collège canadien de police qui met uniquement l'accent sur le comportement de la GRC, cela signifie qu'on ne peut pas enquêter sur les autres partenaires qui ont participé à l'opération conjointe. Il faut un système qui nous permet d'examiner l'ensemble de l'opération conjointe et non pas uniquement le commissaire du Centre de la sécurité des télécommunications qui n'examine qu'un élément. Ils doivent être en mesure de collaborer.
    Le nouvel article 45.75 — et je suis content qu'il fasse l'objet du nouveau projet de loi — stipule que lorsqu'un agent de la GRC travaille dans le cadre d'une opération conjointe, il peut y avoir un examen conjoint entre la CCETP et l'organisme d'examen de l'autre groupe, plus exactement d'une autre entité publique — et je suppose que cela veut dire dans les provinces ou aux États-Unis. L'article ne mentionne pas les autres organismes de sécurité et de renseignement régis par le gouvernement fédéral. Le juge O'Connor a découvert qu'il en existait 24. Si cet article était modifié pour permettre non seulement la tenue d'examens conjoints avec d'autres entités publiques, mais aussi avec d'autres organismes de surveillance des services de sécurité et de renseignement au sein du gouvernement fédéral, y compris l'ASFC, qui ne dispose pas de tels organismes et qui, soit dit en passant, procure beaucoup d'informations et mène beaucoup d'enquêtes sur l'application de la loi, etc. dans les questions frontalières, la disposition serait alors excellente.
    J'ai également posé des questions relativement à la relation entre l'article 45.75, qui parle d'examens conjoints tant au Canada qu'à l'étranger, et il y a aussi les autres dispositions à la fin du projet de loi, à la partie VII.2, où l'on trouve l'article 45.88 et ceux qui suivent, qui parlent d'activités liées à l'application de la loi d'un côté et de l'autre de la frontière et qui mentionnent un processus d'examen de ces activités. Il me semble y avoir des contradictions. Ce qui est visé n'est pas clair du tout. En cas d'incidents comme ceux qu'ont connus MM. Arar, El Maati, Almalki et Benetta, lors d'opérations conjointes, c'est-à-dire lorsque de nombreuses personnes subissent des préjudices sérieux en raison de négligence de la part de la GRC et d'autres organismes participant à des opérations conjointes, il faut s'assurer que le projet de loi veille à ce que ces dossiers puissent être examinés de façon valable et que les responsables soient tenus de rendre des comptes.
    Voilà où je veux en venir. J'aimerais que le comité obtienne des éclaircissements sur la question de savoir si ces dispositions s'appliquent aux opérations conjointes entre la GRC, le SCRS, le CST, l'ASFC, la Garde côtière et n'importe quel autre organisme parmi les 24 autres groupes qui s'occupent de sécurité. La loi les couvre-t-elle ou pas? S'ils ne sont pas visés, je pense que vous devriez apporter des amendements afin de préciser qu'un examen conjoint les concernera. Sinon, les choses continueront de passer entre les mailles du filet.
    Comment cela devrait-il fonctionner? Eh bien, exactement comme la commission du juge O'Connor. Le juge O'Connor a été en mesure de déterminer ce qui est arrivé à M. Arar parce que son mandat ne le limitait pas à examiner uniquement la GRC. Il a fait enquête sur la GRC, le SCRS et tous les autres organismes et ministères au Canada qui traitaient de sécurité et de renseignement pour l'application de la loi. Parce qu'il a pu tous les examiner et tenir compte de toutes les ententes, il a été en mesure de déterminer ce qui s'est réellement passé et il a constaté que M. Arar avait été étiqueté de façon tout à fait erronée. Le gouvernement l'a par la suite indemnisé pour ce qui s'était produit. Mais, n'eut été des pouvoirs donnés au juge O'Connor dans cette commission, nous n'aurions jamais découvert la vérité.
    Le Groupe international de surveillance des libertés civiles fait valoir que ce nouvel organisme, la CCETP, devrait disposer des pouvoirs nécessaires pour apprendre la vérité sur les opérations conjointes afin de déterminer ce qui s'est réellement passé et qui est responsable lorsque quelqu'un subit un préjudice découlant d'une opération conjointe.
(1720)
    Lorsque vous parlez d'opérations conjointes avec les États-Unis, comment savons-nous que nous aurons accès à ces organismes d'examen et que cela figurera également dans leur loi? Je ne suis pas un expert. Je ne connais pas bien le sujet, mais savez-vous ce que nos voisins de l'autre côté de la frontière font concernant ce genre d'examen, ou bien n'en ont-ils tout simplement pas?
    La partie VII.2 essaie de traiter de cette question. Je n'ai eu que très peu de temps pour examiner ce projet de loi très complexe. J'ai relu cette partie à plusieurs reprises. J'essayais de déterminer exactement ce que vous me posez comme question, et je n'ai pas pu le faire en lisant ces parties. Le projet de loi modifie, comme je l'ai signalé, neuf autres lois, de sorte qu'il n'est pas facile de bien comprendre tout ce qu'il comporte. C'est pourquoi je vous recommande fortement d'essayer de faire témoigner le ministre de nouveau, ou bien des hauts fonctionnaires, afin qu'ils puissent vous l'expliquer. Il est indiqué qu'il y aurait un examen des opérations transfrontalières intégrées de contrôle de l'application de la loi, mais comment cela se déroulerait-il? Je n'ai pas pu le déterminer en lisant les articles, et il faut obtenir des éclaircissements.
    Merci beaucoup.
    Avant de céder la parole à M. Garrison, je vais m'adresser à notre analyste, parce que nous avons un ancien procureur général qui est préoccupé par ces deux parties. Peut-être serait-il possible d'obtenir des éclaircissements pour vous.
    Je vais maintenant passer à M. Garrison. Monsieur Andrews, votre temps est écoulé et vous avez posé de bonnes questions.
    Oui, je peux répondre au deuxième point que vous avez soulevé, monsieur Allmand, relativement à la partie VII.2, c'est-à-dire l'examen des opérations transfrontalières intégrées de contrôle de l'application de la loi. Vous avez mentionné l'article 45.88 du projet de loi.
    Oui, je vous suis.
    Il s'agit d'une modification corrélative, de sorte que ça ne fait pas vraiment partie du projet de loi. Il s'agit d'un changement au libellé, parce que le projet de loi C-42 crée une nouvelle commission. Cette partie, qui porte sur le programme Shiprider, a déjà été adoptée par le Parlement dans le projet de loi C-38. Cette loi est donc déjà en vigueur. Le projet de loi C-42 ne fait qu'y apporter des modifications corrélatives.
    Pour ce qui est de vos préoccupations relativement aux enquêtes conjointes transfrontalières, peut-être trouverez-vous une réponse à l'article 45.95. Je peux vous lire le premier paragraphe: « Lorsqu'une plainte porte sur la conduite d'un agent désigné », par exemple un agent de la GRC qui travaille à des opérations transfrontalières avec le FBI, la DEA ou bien une agence de répression transfrontalière — c'est-à-dire avec un agent américain —, la nouvelle commission créée par le projet de loi C-42 peut « tenir une enquête, une révision ou une audience sur la plainte conjointement avec l'entité publique ayant des compétences similaires en matière de plaintes du public contre les agents responsables du contrôle d'application de la loi dans tout ressort concerné, au Canada ou à l'étranger ».
(1725)
    Pourriez-vous me redire le numéro de l'article?
    C'est l'article 45.95.
    Une voix: Puis-je poser une question?
    Le président: Très rapidement, je ne veux pas interrompre M. Garrison.
    Qu'adviendrait-il si les opérations transfrontalières n'incluaient pas uniquement la GRC, mais la GRC et l'ASFC?
    Cela est prévu dans un autre article du projet de loi, l'article 45.75, et c'est lié à votre première préoccupation. C'est une question d'interprétation. Je n'ai pas de réponse.
    Voilà ce qu'il faudra vérifier. Merci de soulever cet élément.
    Nous passons maintenant rapidement à M. Garrison. Vous avez cinq minutes et ce sera probablement la dernière question.
    Merci beaucoup. Merci aux deux témoins de comparaître aujourd'hui. J'ai une brève question pour Mme Séguin.
    M. Leef a lu l'alinéa 20.2(1)a) proposé relativement à la formation. Il y est indiqué que le commissaire peut:
déterminer les besoins en matière d'apprentissage, de formation et de perfectionnement des membres et fixer les conditions de mise en oeuvre de cet apprentissage, de cette formation et de ce perfectionnement;
    Si je comprends bien ce que vous dites, vous croyez qu'en ne mentionnant pas particulièrement le harcèlement sexuel, cela pourrait faire en sorte que le harcèlement sexuel ne figure pas dans le processus de formation et de perfectionnement. Est-ce exact?
    Oui, c'est exact.
    Très bien, merci.
    Monsieur Allmand, merci d'avoir attiré l'attention du comité sur ces questions concernant les opérations conjointes. Lorsqu'il y a eu discussion sur le projet de loi C-38, j'avais en fait soulevé certaines de ces préoccupations au Comité des finances où, étrangement, nous traitions des dispositions du programme Shiprider contenues dans le projet de loi C-38.
    Vous avez parlé du juge O'Connor, de son examen approfondi et de ses recommandations détaillées. Je pense que quelques personnes ont proposé — y compris, je crois, M. O'Connor — que la commission civile d'examen et de traitement des plaintes soit très indépendante, mais malgré tout, la proposition que nous avons devant nous fait en sorte qu'elle devra rendre des comptes au ministre.
    À titre d'ancien solliciteur général à qui une commission devait rendre des comptes, estimez-vous qu'il vaudrait mieux que la commission relève du Parlement et qu'elle devienne un mandataire du Parlement, ce qui lui permettrait d'examiner tous ces organismes et de faire rapport au Parlement, ou bien est-ce suffisant de continuer de faire rapport au ministre?
    Non, je ne pense pas que ce soit suffisant.
    Je n'ai pas eu le temps de vous en parler dans ma déclaration préliminaire, mais j'ai lu l'ensemble du projet de loi, ce qui était toute une corvée.
    Non, je pense qu'il est indiqué que le rapport devrait être transmis à la GRC, au plaignant et à l'organisme qui assure la surveillance, mais pas au Parlement ni au grand public. Mais je pense qu'il le faudrait, sinon cela risque de saper la crédibilité des institutions aux yeux du public si ce dernier ne peut pas prendre connaissance du rapport.
    Par exemple, s'il n'y avait pas eu de campagne publique en faveur de M. Arar et des autres personnes ayant subi des préjudices par ces extraditions au Moyen-Orient en vue d'être torturées notamment, s'il n'y avait pas eu de ressac de la part du public, il n'y aurait pas eu de Commission Arar ni de Commission Iacobucci et ainsi de suite. Je pense que pour maintenir la crédibilité des institutions gouvernementales, il est nécessaire non seulement de déposer ces rapports au Parlement, mais il devrait également être rendu public.
    C'est le deuxième rapport du juge O'Connor, et il est accessible à tous. C'est bien que les gens puissent y avoir accès. Les universitaires peuvent l'étudier. Par ailleurs, il peut contribuer à une meilleure compréhension et à un plus grand appui envers nos systèmes de surveillance et nos systèmes de sécurité publique.
    L'une des dispositions du projet de loi, que Mme Bergen a mentionnée, vise à offrir un plus grand accès à l'information à la commission d'examen des plaintes, mais elle n'offre pas le même accès à l'information que le Comité de surveillance des activités de renseignement de sécurité, ou CSARS, dispose à l'égard du SCRS. En d'autres mots, comme l'ont dit certains témoins, il existe d'importants domaines où la commission n'aurait pas accès à l'information si la GRC décidait de ne pas lui fournir.
    Je sais que vous avez déjà traité de cette question et de celle du CSARS. Vous qui avez déjà traité de cette question lorsque vous étiez ministre, pensez-vous que la commission devrait jouir des mêmes pouvoirs que le CSARS?
    Tout à fait. Le juge O'Connor a recommandé que la nouvelle commission dispose des mêmes pouvoirs. Je sais que d'anciens présidents du Collège canadien de police, comme Shirley Heafey, ont enfin donné leur démission. Elle était frustrée parce qu'elle ne pouvait pas obtenir l'information nécessaire pour faire son travail. D'autres présidents du Collège canadien de police ont eu à faire face au même problème.
    Ce projet de loi améliore les choses, mais il ne va pas assez loin. La commission ne dispose pas des mêmes pouvoirs que le CSARS, même si elle devrait. Il n'y a aucune raison pour qu'elle ne les ait pas.
    Au début du projet de loi — j'ai oublié le numéro de l'article —, il est indiqué que le président de la commission ne peut entreprendre d'enquêtes indépendantes s'il est convaincu qu'il dispose des ressources nécessaires et si aucune entité gouvernementale n'enquête sur le dossier. Que pensez-vous de ces restrictions sur la capacité de la commission d'entreprendre une enquête?
    Je les ai trouvés plutôt amusants. Il me semble que s'il faut mener une enquête, et qu'en plus, elle est importante, il vous faut obtenir les ressources. Vous ne décidez pas de laisser tomber l'enquête. Vous vous assurez de pouvoir la mener.
    Je n'ai pas les chiffres exacts en main, mais des millions de dollars ont été dépensés sur les commissions Iacobucci et O'Connor, et il y en a eu d'autres, à cause de ces problèmes qui n'ont pas été bien gérés par la CPP, etc. On finit par dépenser plus d'argent en créant des commissions royales spéciales pour traiter de ces questions. Il serait préférable qu'elles aient le pouvoir de le faire.
    Il me semble que le président et les dirigeants de la nouvelle commission civile d'examen et de traitement des plaintes devraient avoir les ressources nécessaires pour faire ce qu'ils ont à faire. Sinon, tout comme n'importe quelle agence du gouvernement, j'espère bien qu'ils demanderaient d'autres ressources spéciales pour effectuer le travail. J'ai trouvé ces dispositions plutôt bizarres.
(1730)
    Merci beaucoup, monsieur Allmand. C'était très utile, et puisque vous êtes un ancien ministre, nous l'apprécions.
    Je remercie les deux groupes d'avoir comparu aujourd'hui, d'avoir partagé leur expertise avec notre comité et de nous avoir communiqué leurs opinions dans deux différents domaines.
    La séance est levée.
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